ms à Æx Libres SIR WILLIAM CROOKES, D.Sc. FRS. 10e qu . ON" h2 «1 2 tir ds RUN M AUS x CRU N'ES EURE AE La F0 " HA 4 APR M D e AR PUF Fr \ rt +: TA A TA Au LOT << r Ur 4 "ON" TU CRUE LE LOTS À "ae NUS h Aer 1 à À ANNE NE » 1# ee AUA JAe20 RCE eù Jui ‘ a ” HS rh b di a, er f EVA SIN Le 4h Lee We: d's 12 su eu ENTRE Dos. L Vereti AU pee AL ; NN k TON LA ‘a Le FH A An Et L PURE. , 2 Eu 0 CERN TE FRA NT T'Or me ta ne » : COR ni ra #7 h * . 1: sd": 22 Us 1% DE: 2 NE un à L É TE J 48 a) Lin "4.4 Ne à si M'A D 7e y LAS n° 14 CAO À ‘, LS UN 4 e E > L ref 4 à de brut Tu * Fe | ne | " 2 d 4 A 1 NS Fami ES: LA A A Revue générale HS. Sciences putes et appliquees TOME SEIZIÈME Revue générale Des Sciences pures et appliquées PARAISSANT LE 15 ET LE 30 DE CHAQUE MOIS DrrecTeur : Louis OLIVIER, Docruur ës Scrences TOME SEIZIÈME 1905 AVEC NOMBREUSES FIGURES ORIGINALES DANS LE TEXTE Librairie Armand Colin 5, rue de Mézières, Paris 16° ANNÉE N°1 15 JANVIER 1905 Revue générale des Ncionces pures et appliquées | Direcrecr : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, Y compris la Suède, la Norvège 29, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux et ia Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Les Prix Nobel. — La distribution des Prix Nobel a eu lieu le mois dernier à Stockholm en présence du roi de Suède. La science anglaise a été tout particulièrement honorée en la personne de deux de ses plus illustres représentants : Lord Rayleigh, qui a reçu le prix de Physique, et Sir William Ramsay, auquel a été décerné le prix de Chimie. L'œuvre de ces deux savants est trop connue pour que nous ayons besoin de la rappeler ; tous nos lecteurs applaudiront à la juste distinction qui vient d'être accordée à de si importants travaux. Le prix pour la Physiologie à été décerné au Profes- seur Pawlow, de Saint-Pétershbourg, dont les belles recherches sur la digestion ont fait époque dans cette branche de nos connaissances. $ 2. — Astronomie Les canaux de Mars. — On sait la difficulté d'affirmer l’objectivité de phénomènes tels que les canaux de Mars. M. P. Lowell n'avait-il pas trouvé des canaux sur Vénus, pour constater, quelque temps après, qu'ils avaient leur origine dans sa propre rétine. Maunder à soutenu que les canaux de Mars, tels que Schiaparelli les dessine, sont l'intégration sur la rétine de détails superficiels trop faibles pour être observés isolément; Waiss a décrit, devant la Aoyal Astronomical Society, les expériences qu'il fit pour vérifier cette assertion : différents jeunes gens sont mis en présence de dessins figurant Mars, avec des taches. En s'éloi- £nant, on voit successivement les taches s'agréger en deux, cinq canaux, et, plus loin encore, on ne distingue plus rien. u C'est là un mode d'expérimenter fort ingénieux, qui demanderait à être varié de toutes façons, et généra- lisé; et voilà une canalisation très compliquée qui devient problématique pour notre voisin. US N ES 1 Voir, à ce sujet, les deux Notes précédemment publiées dans la Revue, t, XIV, p. 529 et 841. ; ; $ REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. $S 3. — Art de l’Ingénieur Les derniers progrès des locomotives à vapeur et électriques. — Dans un intéressant Mémoire présenté récemment à l'/nstitution of Mecha- mical Engineers de Londres, M. Ed. Sauvage a mis au point l'importante question des locomotives compound et fait ressortir, en particulier, les avantages généraux acquis par l'emploi déjà suffisamment étendu et pro- longé de ces locomotive D'après M. Sauvage, ces locomotives auraient permis d'augmenter d'environ un tiers la charge des trains sans augmentation de la dépense de combustible; sous une autre forme, l'emploi des compound aurait permis d'augmenter le trafic d'un service donné d’un quart sans augmenter le nombre des locomotives, la dépense de charbon et le personnel. Ce sont là des résultats généraux de la plus haute importance et qui justifient pleinement l'emploi de plus en plus général des loco- motives compound, du moins pour les grands services. Au point de vue mécanique, ces locomotives présentent l'avantage d’une moindre fatigue de leurs organes, telle que leur entretien ne coûte pas plus cher que celui des locomotives simples, bien que le nombre des pièces y soit considérablement augmenté. Elles utilisent aussi mieux la détente de la vapeur à haute pression (45 atmosphères) actuellement adoptée, et permettent de réaliser ainsi des marches prolongées à grandes vitesses et très économiques; c'est ainsi que les loco- motives compound type « Atlantic » du chemin de fer d'Orléans ont pu, dans des essais signalés par M. Sau- vage, remorquer, sur des longueurs de 420 kilomètres et à la vitesse de 100 kilomètres, des trains de 350 tonnes, non compris la locomotive, en développant des puissances allant jusqu'à 1.800 chevaux, avec une vaporisation d'environ 8 kilogrammes par kilogramme de charbon et une dépense d'eau d'environ 11 kilo- grammes par cheval indiqué, résultats des plus remar- quables pour une machine aussi active, Ces résultats seront probablement encore améliorés par l'addition de la surchauffe au compoundage. À La locomotive à vapeur est toujours suivie de très près, dans son remarquable progrès, par sa rivale, la locomotive électrique 1] ne $ bien entendu, s'agit pas, Il 2 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE des vitesses extrêmes de 210 kilomètres à l'heure, réa- lisées en Allemagne sur la ligne d'expériences de Ma- rienfeld-Zossen, ni de tours de force extraordinaires, mais de locomotives pratiques, en service courant, comme celles qui fonctionnent à Paris sur l'entrée de la ligne d'Orléans, et dont le service est aussi régulier et sûr qu'on peut le désirer. Comme exemple récent de ces locomotives, on peut signaler, d'après une commu- nication de M. G. Richard à la Société d'Encourage- ent, celle du New-York Central, du type Sprague, construite par la General Electric C», de 93 tonnes et de 2,500 à 3.000 chevaux suivant le groupement des dynamos, à # essieux moteurs atlaqués chacun direc- tement par une dynamo de 700 chevaux sous 625 volls; prise du courant par trois rails, poids adhérant 67 tonnes, roues motrices de 12,12; effort de traction normal 10.000 kilogrammes. Cette locomotive a remorqué facilement aux essais des charges nettes de 330 tonnes, à la vitesse de 100 kilomètres. C'est un type remarquablement simple et puissant. Il semble, d’ailleurs, que la puissance des locomotives électriques puisse être poussée bien plus loin que celle des loco- motives à vapeur, limitée par leur chaudière, et l’on à déjà réalisé de sion. C’est une pression mécanique extérieure, obtenue par un appareil dit compresseur, — lequel.est actionné lui-même par un moteur, — qui produira cet effet. A priori, il semble que les premières de ces machi- nes, celles à affinité, devraient donner un rendement supérieur, — car la liquéfaction du gaz se produit sans intermédiaire, par l'action intime du gaz agissant sur lui-même pour se comprimer; — tandis que, dans les secondes, il y a des pertes par suite de l'emploi des appareils intermédiaires. Le compresseur a un coef- ficrent de rendement; le moteur qui l'actionne (à vapeur ou autre) en à un deuxième. Si l’on multiplie entre eux ces deux rendements, afin d'apprécier la perte, on voit que l'effet utile est diminué dans une proportion con- sidérable. Et, cependant, ce rendement supérieur des machines à affinité n'était pas obtenu : il n’était que théorique. C'est qu'il intervenait des causes de perte qui, jusqu'ici, n'avaient pu être évitées dans le fonctionnement. Et, d'abord, quand on chauffe la solution ammoniacale, le gaz se dégage, ce qui est un effet utile. Mais il s'évapore de l’eau en même temps, — effet absolument inutile, | — consommation inutile de charbon employé à cette évaporation. ces types d'une 622 3nmoy e ve: Mas ee res puissance tout à ne 22 pas là le plus a pee us ] / a Fr nos ie î * DÉS le 2 cette case es locomotives THEN a leu S ——= ete € de 160 tonnes du PR S Caz[ liquéfié évaporée, elle va tunnel de Balti- ee | LE se liquéfier aussi more, de sorte @ dans le récipient que l’on peut Liquide | © pauvre [N È où le gaz se dire que, sitla o transforme en locomotive élec- on EL EU trique est en- par suite de l'af- . £ € Le : core bien loin de finité considéra- HR ne fes Tarn anis ar ü x es , sa rivale sur les RS = celte eau redis- grandes lignes devepeert- D sout le gaz. On en général, elle LD défait ce qu'on semble devoir F POTEMANS del a fait. On a dé- s'imposer bien- à ÉAaRt LEE ï D. pensé du com- tôtdanscertains Fig. 1. — Schéma des nouvelles machines frigorifiques à affinité. — A, colonne bustible pour cas de services courts et très chargés, dans les longs tunnels, en un mot comme un suppléant local et spécialisé des locomotives à vapeur. Nouvelles machines frigorifiques à affi- nité. — L'industrie des machines frigorifiques, qui, depuis quelques années, était à peu près stationnaire, vient d'effectuer un progrès assez considérable pour être signalé ici. = Les machines à affinité, ces anciens appareils qui étaient presque abandonnés, délaissés, en présence de leurs plus jeunes concurrents, les machines à com- pression, — lesquelles paraissent offrir de plus grands avantages, — viennent de réapparaître, mais transfor- -mées, perfectionnées. On sait, en effet, que les machines destinées à la production du froid ou de la glace se divisent en deux groupes : 1° Les unes, dites à affinité ou absorption, fonction- nent au moyen d'une dissolution de gaz ammoniac dans l’eau. On chauffe cette dissolution; le gaz s'en dégage, et, sous l'influence de ce dégagement continu et de la pression qu'il produit, l'ammoniac gazeux va se liquéfier dans un récipient refroidi par un courant d'eau. C’est la gazéification ultérieure de cet ammoniac liquide qui produira le froid ou la glace. 2° Dans les autres machines, dites à compression, la liquéfaction du gaz n’est pas déterminée, comme pré- cédemment, par l'action directe des molécules de gaz agissant les unes sur les autres sous leur propre pres- à ammoniac; B, rectificateur; C, condensateur; D, réfrigérant contenant le liquide incongelable; E, ré, faire dégager de la solution am- moniacale le gaz qui y était contenu, et on la laisse se reformer en partie plus loin. C’est là un défaut considérable. Les nouvelles machines à affinité (fig. 4) remédient d'une façon absolue à cet inconvénient au moyen d'un organe intermédiaire, dit rectificateur, qui empêche la déperdition causée par la vapeur d’eau de se produire; — et, du coup, le rendement de la machine s'élève dans une proportion importante. É 1 : Le rectificateur B se compose, en principe, d'un fais- ceau de tubes dans lesquels estamené, directement, à sa sortie du régénérateur E, le liquide riche etfroid qui est obtenu dans ce dernier. Ce liquide circule à l'intérieur des tubes. Le gaz ammoniae entraînant la vapeur d’eau passe, au contraire, à l'extérieur des tubes à sa sortie de la colonne dans laquelle est chauffée la solution ammoniacale. Sous l'influence du refroidissement produit par la circulation du liquide riche, la vapeur contenue dans le gaz ammoniac se liquéfie et se dépose. L'appareil est conçu de façon que le refroidissement soit méthodique, c'est-à-dire que le gaz rencontre, à travers les parois des tubes, des couches de liquide de plus en plus froides, au fur et à mesure qu'il se dépouille de sa vapeur. Les dimensions des surfaces refroidissantes ont été calculées de façon que, à la sortie du rectificateur, le gaz soit absolumentt sec. L'eau de condensation est ramenée à la partie infé- rieure de la colonne de chauffage. rénérateur. Mais il y a encore d’autres considérations dont il faut tenir compte : Une fois que l'ammoniac liquide CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 3 a produit son effet utile en froid par sa tranformation en gaz et sa détente, on le dirige vers un récipient appelé régénérateur, où arrive de son côté l'eau de la toute première solution, qui a été soumise à l'action de la chaleur et qui a perdu la plus grande partie de son gaz, solution appauvrie ef qu il s'agit d'enrichir à nouveau en lui faisant absorber le gaz détendu, de manière à recommencer une nouvelle opération. L'absorption de ces régénérateurs était jusqu'ici dé- fectueuse. On l’obtenait dans un récipient unique, où, par suite des remous, l’eau enrichie en gaz — ou‘ Fig. 2. liquide riche — était constamment mélangée avec le liquide pauvre arrivant dans l'appareil. Finalement, la teneur en gaz du liquide sortant du récipient, au lieu d’être ce qu'elle devrait être rationnellement, c'est- à-dire la teneur correspondant à un liquide saturé, n'était qu'une moyenne entre cette teneur maximum et la teneur du liquide pauvre arrivant dans l'appareil. En outre, les questions de température jouent éga- lement un rôle qui n’est pas négligeable. La quantité de gaz absorbée est d'autant plus élevée que la tempé- rature est plus basse. Pour les mêmes raisons que précédemment, la température réalisée dans l'appareil n'était, à vrai dire, qu'une moyenne. Ces deux inconvénients ont été supprimés au moyen d'un nouveau régénérateur. Le régénérateur E est disposé comme il suit : à l'exté- rieur de l'appareil, le gaz qui servira à enrichir le liquide pauvre et ce dernier arrivent simultanément dans un mème tuyau qui les conduit au régénérateur propre- ment dit. Celui-ci se compose de séries de tubes hori zontaux superposés et mandrinés sur deux plaques tubulaires. Les plaques sont fermées par des portes munies de chicanes, de telle sorte que le liquide et le gaz, pénétrant simulanément dans les tubes de la partie inférieure de l'appareil, soient obligés de circuler dans chaque série horizontale avant de gagner la série supé- — Appareil de projection en couleurs naturelles. rieure. Chaque tuyau contient à l'intérieur un cloi- sonnement percé de trous de façon que l’eau et le gaz subissent un brassage énergique qui facilite l'absorption de ce dernier. Le refroidissement est obtenu par une circulation d’eau tombant en pluie de la partie supé- rieure de l'appareil. La solution qui débouche dans l'appareil à la partie inférieure rencontre de l'eau de refroidissement de plus en plus froide et s'enrichit constamment dans sa marche ascensionnelle, tout en restant complètement isolée pendant ce travail d’enri- chissement. À son arrivée dans les rangées supérieures des tubes, l'absorption est complète. La justesse de ces vues a été confirmée par les appli- cations qui en ont été faites. En effet, les installations effectuées par la Société des Glacières de Paris, et qui Le CHRONIQUE {T CORRESPONDANCE fonctionnent déjà depuis une période assez longue, ont montré, par des constatations rigoureuses, que le rendement de ces nouvelles machines dépasse facile- ment de 30°/, celui des meilleures machines de tout autre système connues jusqu'ici. C’est un progrès sé- rieux, mème considérable, et dont doivent tenir compte tous les industriels pour qui la production du froid est un élément de dépense non négligeable dans le prix de revient. $ 4. — Physique La proiection en couleurs naturelles. — Le problème de la photographie chromatique, après avoir été étudié avec tant de zèle par de nombreux ex- périmentateurs, a été résolu, au moins partiellement, dans deux voies différentes. Alors que les procédés directs jusqu'ici préconisés ne se sont pas montrés pleinement satisfaisants, on à obtenu de meilleurs ré- sultats par les procédés indirects, où l’on produit trois vues monochromatiques de l’objet en trois couleurs fondamentales, vues qu'on superpose par projection sur le même écran. Au commencement, il fallait se servir de trois espèces différentes de plaques photogra- phiques, sensibles chacune à la seule couleur fonda- mentale en question; mais M. Miethe, professeur à l'Ecole Polytechnique de Charlottenburg, vient d’'ap- porter un important perfectionnement à ce procédé, en donnant aux plaques photographiques une sensibilité parfaitement égale pour l’une quelconque des trois couleurs, rouge, vert et violet, choisies comme fonda- mentales. Une autre partie importante du problème est la con- struction d'un projecteur chromatique efficace, don- nant, par la synthèse des vues monochromatiques, des effets brillants et conformes à la Nature. Les progrès réalisés dans cette voie permettent même de com- penser en partie les défauts dont le procédé photo- graphique lui-même est toujours affecté. Les Ateliers d'optique de C. P. Goerz, à Berlin, vien- nent de construire, sur la demande du Professeur Miethe, un projecteur chromatique réalisant un re- marquable progrès; en effet, au lieu de laisser les trois images monochromatiques dans la projection sur une plaque commune, l'on prépare trois diapositives dont cet appareil permet d'ajuster à l'avance la position re- lative. Cet intéressant dispositif, représenté par la figure 2 (page 3), vient d'être exposé à l'Exposition universelle de Saint-Louis. L'appareil comprend trois lampes à arc électriques alimentées au moyen d’une table de distribution com- mune, qui permet de varier l'intensité de courant entre 40 et 35 ampères. Les lentilles condensatrices employées pour les projections sont formées d'un sys- tème triple de lentilles, à trois composantes chacun, que traversent les rayons des lampes sur leur chemin vers les diapositives et l'objectif de projection, tout en recevant la convergence voulue. Afin d'utiliser au- tant que possible la puissance lumineuse des lampes, on à choisi le rapport d'ouverture du système conden- seur aussi grand que possible; en même temps, un vase à refroidissement intercepte tous les rayons calorifiques qui pourraient compromettre les diapositives. On remarquera dans la figure les trois bancs d'op- tique placés sur la base de l'appareil et sur lesquels glissent les objectifs de projection. Ils sont tous les trois susceptibles d'un double déplacement à grande et faible amplitude, parallèle aux axes optiques, permet- tant un ajustement facile; d'autre part, les mouve- ments horizontal et vertical de l'objectif latéral don- nent le moyen d'ajuster l'appareil pour toute distance de projection voulue. La vis de pied de l'appareil per- met l'ajustement de ce dernier dans le centre de l'écran de projection. La pièce la plus importante de l'appareil est le dis- positif pour ajuster les diapositives monochromatiques. Dans un cadre d'aluminium, on a pratiqué trois ouver- tures rectangulaires à des distances convenables d'un fort serrage, au moyen de pinces et de vis, et dans les- quelles on insère les diapositives. Au lieu d'opérer l'ajustement dans l'appareil de projection, on emploie un dispositif d'ajustement spécial, analogue à une ma- chine à diviser et sur le traineau duquel deux micros- copes tournent de facon que le point d’intersection de leur réticule puisse coïncider avec un point quelconque de l'image monochromatique centrale. Après avoir transmis ces points aux deux autres diapositives, celles- ci sont fixées dans le cadre ajusteur. M. Miethe emploie des filtres chromatiques compre- nant deux plaques @e verre entre lesquelles on a disposé une couche colorée. Un obturateur permet de n’exposer les filtres au rayonnement intensif de la lampe que pendant la projection proprement dite. $ 5. — Chimie industrielle La décomposition des ciments par l’eau de mer. — La question de la décomposition des ciments à la mer est l’une des plus importantes et des plus complexes de l'art des constructions, et son étude, depuis les travaux classiques de Vicat, constitue une des littératures les plus abondantes de la Chimie appli- quée, mais aussi des plus confuses, non seulement en raison de la complexité du problème, mais surtout en raison de l'absence de méthode véritablement scienti- fique avec laquelle ces études ont été, le plus souvent, poursuivies. La nécessité d'une méthode rigoureuse- ment scientifique, pour l'étude d'une question dans laquelle interviennent simultanément tant de facteurs, vient d'être mise en lumière avec une clarté parfaite par M. H. Le Chatelier, dans un très important Mémoire qu'il publie sur cette question au dernier numéro des Annales des Mines; selon son habitude, il ne se con- tente pas d'établir la nécessité de cette méthode par des considérations générales; il l'applique encore lui- même avec un rare bonheur, comme on en jugera par les conclusions suivantes, auxquelles il est arrivé : 10 Tous les éléments actifs des ciments : chaux, alu- minates et silicates, sont immédiatement décomposés quand ils se trouvent en contact direct avec les sels de magnésie de l’eau de la mer, et donnent des chlorures et sulfates de chaux solubles qui entraînent la totalité de la chaux en dissolution; 2 La réaction de l'aluminate de chaux avec le sul- fate de chaux, préexistant dans les eaux naturelles ou résultant de l’action du sulfate de magnésie sur les composés calcaires des ciments, donne naissance à un sulfo-aluminate de chaux, dont la cristallisation occa- sionne, comme l'hydratation de la chaux vive, mais d'une facon plus lente, des gonflements et fendillements des mortiers ; 3° La pénétration des sels de la mer se fait de deux facons différentes : L'eau de mer pénètre en bloc par toutes les solutions de continuité résultant des malfaçons, en grande partie inévitables, des maconneries, et par le fait de la poro- sité des moellons et briques employés. La porosité nor- male des mortiers ne semble avoir, à ce point de vue, qu'une importance secondaire ; Ensuite, dans les parties saines des mortiers, les échanges et réactions avec l’eau de mer se font à peu près exclusivement par diffusion et d'autant plus rapi- dement que la porosité normale de ces mortiers est: plus grande ; 4° Tous les phénomènes de décomposition à la mer sont sous la dépendance de la formation d'une croûte superficielle infiniment mince, dont l'imperméabilité, d'une part, tend à s'opposer aux échanges par diffusion ou tout au moins à les ralentir, et dont l'expansion, d'autre part, par le fait de la formation du sulfo-alumi- nate de chaux, occasionne des gonflements et fendille- ments du mortier facilitant ensuite la pénétration de l’eau de mer en masse. ; CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 5 $ 6. — Biologie Création d’une Station biologique aux Iles Bermudes. — Depuis une dizaine d'années, des pro- fesseurs et savants américains ont visité à diverses reprises les !les Bermudes pour y recueillir ou y élu- dier sur place des spécimens de la faune marine. La richesse de cette faune et la douceur du climat en été sont telles qu'ils envisagèrent la possibilité d'établir aux Bermudes une Station biologique qui serait pour les naturalistes de l'Amérique du Nord ce qu'est la Station zoologique de Naples pour les biologistes européens. D'après un Rapport de M. W. M. Greene, consul des Etats-Unis aux Bermudes‘, ce projet est en bonne voie de réalisation. Sur l'avis favorable de la Société Royale de Londres, le Gouvernement anglais (dont dépendent les îles) a donné l’autorisation nécessaire. La Société Royale elle-même a fourni une subvention pour l'ins- tallation. L'Institution Carnegie a pris à sa charge l’en- tretien de trois tables pour une période limitée. L'Uni- versité de Harward et celle de New-York coopéreront également à l’œuvre; avec l’aide de la Société d'His- toire naturelle des Bermudes, elles ont déjà organisé un laboratoire temporaire et commencé à travailler. Enfin, d'après un renseignement fourni par M. F. Goodwin Gosling, secrétaire de cette dernière Société, la Législature des Bermudes vient de voter une sub- vention de 90.000 francs, ce qui permet de considérer comme très prochain le commencement des travaux. La nouvelle Station biologique des Bermudes mettra aux mains des savants du Nouveau-Monde un instru- ment de travail d’une grande valeur. Sur la sécrétion du sue gastrique chez l'homme. M. A. F. Hornborg, dans les Archives scandinaves de Physiologie, MM. A. Cade et A. Latarjet, dans les Comptes rendus de la Société de Broloqie,vien- nent de publier des observations de vérification, chez l'homme, des faits établis expérimentalement par Pawlow et les élèves de son Ecole sur la sécrétion gas- trique, chez le chien. On sait que, chez le chien, le passage d'aliments sa- pides agréables dans la bouche détermine, par un mé- canisme réflexe, une sécrétion gastrique, riche en pepsine et en acide chlorhydrique, persistant environ une heure et demie après le repas. M. A. F. Hornborg a observé un enfant de cinq ans, auquel on avait pratiqué, un an auparavant, une fistule gastrique pour permettre l'alimentation, rendue impos- sible par une obstruction totale et persistante de l’æso- phage. Chez cet enfant, comme chez les chiens de Pawlow, l'introduction dans la bouche et la mastication d'aliments agréables au goût, notamment de viande et de pain, provoquent une sécrétion gastrique abondante et douée d’un énergique pouvoir digestif. M. A. F. Hornborg a toutefois relevé entre son sujet etles chiens de Pawlow deux différences : la sécrétion gastrique du chien, provoquée par les aliments sapides, persiste une heure et demie après la fin du repas; elle ne persiste pas plus d'une heure chez l'enfant. Chez le chien, au moins Chez certains chiens, la simple vue des aliments sapides et plus particulièrement de la viande suffit à amorcer la sécrétion gastrique; chez l'enfant observé, la vue des aliments a toujours été inefficace; la sécré- ton gastrique ne s’est jamais manifestée qu'à la suite de la gustation. Ces réserves faites, les observations de M. A. Horn- borg montrent l'identité des mécanismes de la sécré- tion gastrique, ou tout au moins de l’un des mécanismes de la sécrétion chez le chien et chez l'homme. On sait que Pawlow a pu réaliser une fistule gastrique lui permettant de connaître très exactement et à chaque instant les phénomènes sécrétoires de l'estomac sous les influences les plus variées. Pawlow a fait une poche SULIÈIS: Daily Consular Reports, n° 2026, p. 1, 10 août 1904. gastrique, au moyen d'une portion de la muqueuse du grand cul-de-sac, qu'il a isolée complètement du reste de la muqueuse gastrique en lui conservant inté- gralement sa vascularisation et son innervation nor- males. Or, MM. A. Cade et A. Latarjet (de Lyon) ont observé une jeune fille de vingt ans, chez laquelle une hernie épigastrique, survenue au cours de la première année de la vie, avait réalisé, par le fait de son étranglement, la séquestration d'une portion de l'estomac dans la région du grand cul-de-sac. Cette séquestration était absolument analogue à celle réalisée expérimentale- ment par Pawlow : Ja petite cavité était complètement isolée, mais seulement par une barrière muqueuse; elle avait conservé avec le reste de l'estomac la conti- nuité de ses tuniques musculo-séreuses et, par consé- quent, ses connexions vasculo-nerveuses; elle s'ouvrait à l’épigastre par un orifice fistuleux. MM. A. Cade et A. Latarjet ont constaté que, le sujet étant à jeun, une petite quantité d’un liquide très vis- queux, faiblement acide (0,15 — 0,20 2/,,), contenant un peu d'acide lactique, mais pas d'acide chlorhydrique libre, s'écoulait par la fistule. Après un repas composé de bouillon gras, de viande, de pain et d’eau coupée de vin, le suc recueilli est plus abondant (surtout pendant les deux heures qui sui- vent), limpide, fluide, beaucoup plus acide (1,95 0/6), contenant de l'acide chlorhydrique libre (0,60 °/«) et de la pepsine. La suppression de la viande dans le repas fait baisser l'acidité totale et la proportion (0,25 °/,,) d'acide chlo- rhydrique, ainsi que la quantité de pepsine. MM. Arthus et Pagès ont montré que la digestion gas- trique du lait estune digestion s'accomplissant en milieu neutre ou peu acide ; M. Arthus à montré quel'ingestion de lait dans l’estomac provoque la sécrétion d'un suc con- tenant du lab-ferment. MM. A: Cade et A. Latarjet con- firment ces faits. Chez la jeune fille qu'ils ont observée, en effet, l'ingestion de lait est suivie d'une sécrétion très peu acide (0,20 °/,.), dans laquelle l'acide chlorhy- drique libre n'est plus décelable, mais dans laquelle existe manifestement du iab-ferment. Eñfin, — et ces dernières observations montrent qu'il ne faut-accepter qu'avec prudence, en ce qui concerne l'adulte, les faits signalés par M. Hornborg chez l’en- faut, — MM. A. Cade et A. Latarjet ont pu provo- quer une véritable sécrétion par le rappel prolongé des saveurs préférées du sujet : sous cette influence psy- chique, le sucdevient beaucoup plus abondant que pen- dant le jeûne, plus fluide et plus acide (0,80 °/,, d'acide et 0,15 °/,, d'acide chlorhydrique libre), mais doué d’un pouvoir digestif moindre que le suc sécrété à la suite d'un repas réel. $ 7. — Sciences médicales Les corpuseules de Negri et la rage. — M. d'Amato*, de l'Institut anti-rabique de Naples, vient de rechercher systématiquement, sur de nombreux chiens et cobayes, les corpuscules endocellulaires des centres nerveux que M. Negri considère comme les parasites spécifiques de la rage. Il les a trouvés dans tous les cas de rage pathologique ou expérimentale, mais il n'a pu les déceler chez quatre chiens indemnes. Il convient, d’ailleurs, de noter que, dans la rage dite spontanée, ilexiste également, d’un cas à l’autre, des dif- férences considérables de dimensions, de nombre et de distribution. Mais ces variations ne paraissent avoir aucun rapport avec la gravité de l’évolution de la maladie. Quant à la signification de ces corpuscules, M. d'Amato considère qu'il convient d'observer encore une certaine réserve au sujet du rôle spécifique que M. Negri a voulu leur attribuer. En effet, tandis que ces éléments ne passent pas à travers les filtres, le 1 Riforma medica, S juin 1904. 6 CHRONIQUE ET CORRESPONXDANCE virus rabique y passe très facilement; de plus, ces cor- | transitant dans la mer du Nord,font que le fret théo- puscules font défaut au niveau de certains organes virulents, comme les glandes salivaires et les nerfs périphériques; enfin, les centres nerveux deviennent virulents avant de présenter les lésions caractéristiques de la rage. D'autre part, étant donné le polymorphisme des corpuscules de Negri, on peut fort bien admettre que certains de ces éléments sont suffisamment petits pour passer au filtre ; de mème, des recherches récentes ont démontré que, à l'encontre de l'opinion classique qui assigne le maximum de virulence au bulbe et à la pro- tubérance, le virus rabique est particulièrement abon- dant au niveau de la corne d'Ammon, qui est aussi le siège de prédilection de ces corpuscules. En présence de ces deux séries d'arguments, il semble qu'il faille conclure, avec l’auteur, que la ques- tion de la nature parasitaire des dits corpuscules ne saurait encore être tranchée, ni dans un sens. ni dans l’autre. Nouveau traitement du tétanos. — Les deux traitements du tétanos actuellement les plus employés, le chloral à haute dose et le sérum antitétanique de Vaillard et Roux, ne donnent que des résultats très inconstants. Le D' V. S. Hodson, ancien médecin rési- dent de l'hôpital Kasr-el-Aini, du Caire, a eu l'idée de combattre cette affection par des injections intra-vei- neuses de solution physiologique‘ de chlorure de so- dium; après avoir retiré, par la saignée du bras, un demi-litre environ de sang, on pratique une injection massive de 2 litres de solution physiologique addi- tionnée de 75 grammes d’eau-de-vie. Dans les trois cas où il a eu recours à ce procédé, M. Hodson à noté une sédation très rapide des phé- nomènes spasmodiques, une transpiration abondante etune amélioration considérable de l'état général. Quoique l’action de cette injection massive soit pro- blématique, il semble que l’on puisse, dans tous les cas, employer ce moyen, qui, bien pratiqué, peut-être inoffensif et parait avoir rendu des services. $ 8. — Géographie et Colonisation Les grands Ports français de l'Atlantique. — Dans deux articles du plus haut intérêt, M. Paul Léon * attire l'attention sur la situation anormale de nos grands ports de la côte Atlantique. Le tonnage total de Nantes, Saint-Nazaire, la Rochelle et Bordeaux atteint à peine le chiffre de Marseille, et ce premier fait souligne encore davantage la remarque que nous avons déjà exprimée plusieurs fois dans cette Æevue : le manque de concentration de notre commerce mari- time. Une seconde anomalie, c'est qu'en 1902, sur un trafic total de 5.335.000 tonnes, 2.600.000, soit près de 50 °/;, sont fournies par l'importation de charbons anglais à destination de la France de l'Ouest, alors que les houillères du bassin de Saint-Etienne sont forcées périodiquement d'interrompre leur extrac- tion, faute de débouchés suffisants. D'autre part, les exportations réunies de ces ports ne dépassent pas, pour la mème année, 1.100.000 tonnes (800.000 en 1890). Ainsi, à côté d'un accroissement insignifiant, il faut remarquer la différence énorme qu'il y a entre les entrées et les sorties, et la conséquence fâcheuse qui en résulte pour le prix des transports. Par exemple, les frais d'assurance qui frappent les marchandises 1 Voir Semaine médicale, 1904, n° 39. ? Annales de Géographie, 15 mai et 15 juillet 4904. — Cf. en outre un récent travail de valeur : L. LarriTte : L'expan- sion économique de la France, par l'amélioration et le dé- veloppement de ses moyens de transport, 190%. 1 br. in-8o, Aux ect des Questions Diplomatiques et Coloniales. Paris. rique pour Nantes est inférieur de 5 francs au fret pour Hambourg; mais, par suite de la perte de temps qui résulte pour le navire obligé d'aller compléter son chargement de retour dans un autre port, le fret fran- cais reste plus cher que le fret allemand, et « l'infério- rité de l’organisation commerciale annule la supériorité de la position géographique ». Comment améliorer cet état de choses si défavorable? Pour produire le fret de sortie, dont l'insuffisance est cause de tout le malaise économique, il faut développer les industries urbaines, — qui sont une des grandes forces de Marseille, — et étendre la zone desservie. La première amélioration découle naturellement de la transformation économique présente, qui, grâce au bon marché des transports maritimes, tend à faire des ports des centres d'attraction industrielle. C'est ce qu'avait très bien compris le programme Freyeinet de 1879, et ce qu'exprimait en fort bons termes un publiciste de cette époque : «Il faut faire une évolution vers les créations industrielles, il faut s'habituer de plus en plus à transformer, à manufacturer la matière première que l’on reçoit, et non plus seulement à la distribuer aux usines lointaines, comme on faisait jadis. Le travail industriel moderne à pris d’autres allures que celui du passé. Que Nantes profite en cela de l'exemple que lui donne Marseille. Ce qui a sauvé ce port, ce sont les usines de tout genre qu'il a su établir. Bordeaux n’a pas su, comme Marseille, devenir une ville industrielle. Elle à jugé à tort qu'il était suffisant de recourir aux produits du sol et de la mer pour alimenter son commerce, et elle s'est contentée d’être une place maritime !. » L'extension de la zone à desservir serait déjà faci- litée par une entente méthodique entre les pouvoirs publics et les pouvoirs locaux, et surtout par une coopération étroite entre les diverses entreprises de transport intérieur, tandis que, à l'heure actuelle, on voit le plus souvent régner une fâächeuse hostilité, soit entre voies navigables et chemins de fer, soit entre réseaux ferrés voisins. M. Paul Léon cite, à cet égard, les faits les plus probants. Nous avons déjà signalé dans cette Æevue l'intérêt qu'aurait pour notre région de l'Ouest l'accès au Simplon par le percement de la Faucille?. D'autre part, la loi récemment votée sur l'outillage national, qui prévoit 200 millions pour l'amé- lioration de nos voies navigables, donnera à la batel- lerie une extension nouvelle. Enfin, la réorganisation du contrôle commercial exercé par l'Etat sur les Com- pagnies ne laissera pas d'exercer, sur la concordance et l'unification des tarifs de chemin de fer, une heureuse influence. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. 1 SImonIN : lievue des Deux-Mondes, 1% 15 novembre 1877. * La question du projet de la Faucille a évolué depuis que nous l'avons préconisé dans une précédente Note. Il résulte de nouvelles études que ce projet nécessiterait trois tunnels, ayant respectivement 6.900 mètres, 12.000 mètres, et 15.430 mètres, les deux derniers représentant à eux seuls un Gothard et un Mont-Cenis. Le coût lotal atteindrait environ 140 millions de francs. Enfin, il faut encore ajouter que les calcaires plissés et fissurés du Jura se prêtent mal à des travaux d'art et beaucoup trop à la circulation souterraine des eaux. Dans ces conditions, et surtout devant la somme énorme à dépenser, il est à peu près certain que la Com- pagnie concessionnaire reculera. Par contre, le bon marché du projet concurrent, Mouchard-Vallorbe, lui assure dès inaintenant toute chance de succès. L'idée du projet de la Faucille n'en subsiste pas moins avec toute sa justesse. IL reste à en trouver une réalisation pratique. Sur tous ces points, cf. J. Buuxues : La question des voies d'accès au tunnel du Simplon (Revue economique internationale, 15- 20 oct. 190%); et P, Ginarni : L'ouverture du Simplon et les intérêts français (Questions diplomatiques et coloniales, 1er oct, 1904). septembre et PAUL VIEILLE — LA VIE ET L'OEUVRE DE SARRAU 1 LA VIE ET L'ŒUVRE DE SARRAU La science francaise a fait, dans l'année qui vient de s'écouler, une perte cruelle dans la per- sonne de M. Sarrau, membre de l'Institut, pro- fesseur de Mécanique à l'Ecole Polylechnique, inspecteur général du Service des Poudres et Sal- pêtres. Il s'est éteint à Saint-Yrieix le 10 mai 1904, après une douloureuse maladie, entouré des soins affectueux de parents dévoués. L'influence considérable qu'il a exercée ne s'ex- plique pas seulement par l'importance et la variété des travaux éminents qu'il a publiés dans le do- maine de la Physique, de la Balistique et de la Mécanique : cette influence résulte de ce qu'il fut véritablement chef d'École, semant les idées autour de lui sans compter, et se jugeant suffisamment récompensé par une sorte de vénération dont l’en- touraient ses élèves et ses amis. La bonté se lisait d'ailleurs sur sa figure bienveillante et lui conci- liait, dès le premier abord, la sympathie de tous. La qualité maîtresse de son esprit fut la clarté : les questions les plus ardues prenaient, entre ses mains, un caractère de simplicité qui pouvait par- fois faire illusion sur le travail préparatoire consi- dérable qui lui permettait d'arriver à cette perfec- tion dans l’exposition. I. — BIOGRAPHIE. Sarrau (Jacques-Ferdinand-Emile) est né à Per- pignan, le 24 juin 1837. Sa famille était univer- sitaire. Il fit des études classiques brillantes, et se plaisait à rappeler plus tard ses succès dans la composition des vers latins. Il aimait les lettres et les arts. Les Mémoires qu'il a publiés, ses Rapports et ses Notices témoignent d'un souci très parti- culier de la correction de la forme et de la préci- sion de l'expression. Mais ses goûts profonds le portaient vers les Sciences. Il entra à l'Ecole Polytechnique en 1857 et en sortit en 1859 dans le Service des Poudres et Sal- pêtres. Il avait été distingué à l'Ecole par Sénar- mont, qui lui avait dans les examens attribué la nole maximum, à la suile d’un exposé de la théorie de la double réfraction de Fresnel, qui ne faisait pas partie du cours de l'Ecole à cette époque. Dès sa sortie de l'Ecole Polytechnique, il utili- sait le temps que lui laissait un service très actif, à la Poudrerie du Bouchet, à des recherches sur la théorie mathématique de la lumière. Le jeune ingénieur, après avoir consacré ses journées à des expériences de tir au canon-pendule, donnait ses soirées à l'étude des œuvres de Cauchy. Cette étude devait le conduire à une théorie de la lumière dans laquelle les noms de Maxwell et de Sarrau restent définitivement associés. Cette phase de son existence, où une part impor- tante de son aclivité trouvée réservée à l'expérience, eut sans doule une influence décisive sur la tendance de son esprit à pousser toutes ses études analyliques jusqu'au point où elles deve- naient susceptibles de vérifications numériques. C'est cette préoccupation constante de contrôler la théorie par l'expérience qui le mit en rapport, à l’occasion de ses premiers travaux d'Optique, avec Cornu, qui lui apportait sa merveilleuse habileté expérimentale. Ce fut l’origine d'une amitié étroite et presque fraternelle qui unit ces deux esprits éminents jusqu'à la mort. Les Mémoires de Sarrau sur la polarisation et la propagation de la lumière dans les cristaux datent de 1865, et furent publiés dans le Journal de Ma- thématiques pures et appliquées, en 1867 et 1868. La guerre de 1870 ramena l'ingénieur des Poudres d'une façon plus exclusive à l’étude des problèmes balistiques. Pendant le siège de Paris, il prit une part aclive, sous les ordres de M. l'Inspecteur général Maurouard, à l’installalion effectuée à Paris même, sous le feu de l'ennemi, et en quelques semaines, d'une grande Poudrerie, dont la fabri- cation atteignait 7.000 kilogs par jour au moment où l'armistice vint brusquement mettre fin à la lutte. À la suite de la guerre, la reconstitution des approvisionnements de lArtillerie entraîna une réorganisation du Service des Poudres et Salpêtres et l'appel de promotions nombreuses d'ingénieurs se recrutant à l'Ecole Polytechnique. Sarrau fut choisi comme l’'éducateur de jeunes générations. Directeur du Laboratoire Cen- tral et de l'Ecole d’Application des Poudres et Sal- pêtres, il a résumé, sous le nom d'/ntroduction à la théorie des Explosifs, dans des lecons d'une rare élégance, les théories chimiques, physiques et mécaniques nécessaires à l'étude si complexe des phénomènes balistiques. Son Cours d’explosifs se développa d'année en année : il y précisait les imperfections dela théorie, les lacunes dans les données expérimentales, el suscitait les recherches nouvelles par des travaux théoriques, s'étendant à toutes les parties du pro- blème balistique. On peut citer, parmi ces travaux systématique- ment dirigés vers un même but, une série de Mémoires sur les effets de la poudre dans les s'élait ces 8 PAUL VIEILLE — LA VIE ET L'OŒUVRE DE SARRAU armes, ses recherches sur le mode de décompo- sition des explosifs, ses études sur les manomètres à écrasement et sur la compressibilité des gaz. Il fut, dans la Commission des substances explo- sives, un des collaborateurs de M. Berthelot. Géomètre et mécanicien, il fut d’abord répétiteur d'Analyse à l'Ecole Polytechnique, puis nommé professeur de Mécanique à cette Ecole en 1883. Il transforma profondément l’enseignement de la Mécanique à l'Ecole, s’attachant au développe- ment des méthodes et des théories générales suscep- tibles d'une utilisation commune dans toutes les branches de la Science. La clarté de son exposi- tion, l’action pénétrante de sa parole, lui avaient acquis, auprès de vingt promotions successives, la réputation justifiée de professeur éminent. Il fut nommé en 1886 membre de l’Académie des Sciences dans la Section de Mécanique, où il succé- dait à Saint-Venant. IT. — TRAVAUX BALISTIQUES. Aucun des travaux de Sarrau n'a présenté un développement aussi considérable et une pareille continuité d'efforts. On peut dire que, pendant trente années, de 1874 jusqu'aux derniers mois qui ont précédé sa mort, il n’a pas cessé de com- pléter et de parfaire son œuvre, en l'adaptant au développement progressif de l'armement. On ne possédait, avant lui, que des formules empi- riques, traduisant l'influence des éléments du char- gement et de la bouche à feu sur les vitesses et les pressions. Il a réussi à leur substituer des formules rationnelles, déduites des lois qui régissent la | transformation de la chaleur en travail dans les | machines thermiques. Son premier Mémoire : « Sur les effets de la poudre dans les armes » à paru en 1874. Il est fondé sur l'application du principe de l'équivalence, introduit par Résal dans l'étude des phénomènes balistiques, et sur l'expression nouvelle de la force des explosifs, que M. Berthelot a déduite de ses mémorables recherches de 1870. Le problème du mouvement du projectile est relativement simple lorsqu'on suppose la com- bustion de la charge instantanée; mais cette hypothèse devient chaque jour plus inexacte avec les progrès de l'Artillerie. Aussi Sarrau introduit- il, malgré les complications analytiques qu'elle entraine, la loi de combustion de l’explosif, en admettant toutefois, avec Piobert, que la vitesse de combustion ne dépend pas de la pression. C'est la première élape qui va conduire l’auteur sur la voie de nouveaux progrès dans la représentation des phénomènes. Dès 1876, dans un nouveau Mémoire : « Sur les effets de la poudre dans les armes », Sarrau introduit l'hypothèse fondamentale de la vitesse de combustion fonction de la pression. Cette hypothèse, rendue indispensable par l’obser- vation des faits, conduisait à de nouvelles difficultés analytiques; mais elle a permis à Sarrau d'éta- blir les bases, en quelque sorte définitives, de la théorie balistique et &e donner la forme nécessaire de l'équation différentielle du mouvement du projeclile. Parmi les résultats les plus imporlants de ce Mémoire, il faut signaler le théorème de similitude, définissant la vivacité de l’explosif, qui permet d'ob- tenir des vitesses et des pressions égales dans les bouches à feu géométriquement semblables. Dans ce même Mémoire, Sarrau parvenait, avec une rare sagacilé, à déterminer a priori l’ex- posant de la pression quirégit la vitesse élémentaire de combustion des poudres noires, au moyen d'ob- servalions balistiques ne concernant que les vitesses et les pressions du lir. L'expérience directe a confirmé, depuis, d'une facon complète les résul- tals du calcul. Dans une série de Mémoires addilionnels publiés de 1876 à 1882, Sarrau a développé les consé- quences de ses formules; il a résumé la solution de tous les problèmes de Balistique relatifs à l'emploi de la poudre noire, dans l'étude détaillée d'un canon type de 10 centimètres. L'application du principe de similitude permet d'étendre ces résul- tals à tous les calibres. La multiplicité des variables qui interviennent dans le problème balistique rendait toutefois difficile le choix des conditions de tir assurant une vitesse et une pression données : le problème ainsi posé n’est pas déterminé. Sarrau à réussi à constituer, sous le nom de module, un groupement de ces variables encore indéterminées, qui possède une véritable significa- lion physique. La valeur du module caractérise un mode de fonctionnement balistique particulier, qui appartient soit aux poudres vives, soit aux poudres lentes; par le choix du module, on adople un type de fonctionnement balistique dont les propriétés générales sont connues et l'indétermination du problème se trouve écartée. Sarrau n’a rien publié sur l'application de ses formules aux poudres du nouvel armement; mais sa théorie avail fait prévoir les avantages que présenterait l'emploi balislique des grands explo- sifs, dès que leur mode de combustion pourrait être réglé. IL avait transformé les formules relatives à la poudre noire pour lenir compte de la force et des lois de combustion spéciales des nouvelles poudres. La représentation des conditions de tirs, chaque jour plus étendues, était l'objet de recherches inces- PAUL VIEILLE — LA VIE ET L'OEUVRE DE SARRAU santes qu'il effectuait personnellement ou dont il conservait la direction dans une collaboration affectueuse avec ses élèves. Ses Mémoires ont élé traduits dans toutes les langues : ils forment la base de l'enseignement balistique en France el à l'Étranger. Son influence a été également considérable sur | le développement de notre grande industrie mélal- lurgique des armes de guerre, qui a tenu à hon- neur de lui décerner, en 1903, une part du prix Schneider. III. — TRAVAUX DE PHYSIQUE MATHÉMATIQUE Les premiers travaux de Sarrau sont relatifs à la théorie de la lumière. Ils sont exposés dans deux Mémoires parus, en 1867 et 1868, sur la pola- risation et la propagation de la lumière dans les cristaux. Sa théorie est fondée sur la double hypothèse d'une modification périodique de l’éther dans les milieux cristallisés, et d'une modificalion spéciale de la constitution de cet éther par suite de la symétrie propre au milieu cristallisé. L'application d’une méthode de Cauchy lui permet de ramener l'intégralion des équations à coefficients périodiques, fournies par la théorie de l'élasticité, à celle d'équations auxiliaires à coef- ficients constants, qui ne renferment plus que les valeurs moyennes des déplacements lumineux. Sarrau admet que ces valeurs moyennes sont seules susceptibles d'impressionner nos organes, et doivent régir les phénomènes optiques. Telle est la méthode générale que Sarrau ap- plique, dans un deuxième Mémoire, au cas par- ticulier où l’éther est considéré comme isotrope et ne conserve plus que la périodicité dans la densité. La forme des équations auxquelles il est parvenu par cette méthode est identique à celle qu'a donnée Maxwell, etil est bien remarquable que la considé- ralion des valeurs moyennes des déplacements ait permis à Sarrau d'atteindre une forme des équations du mouvement lumineux, dont les pro- priétés sont fondamentales au point de vue de la représentation des phénomènes, et ne sauraient se retrouver dans les formes les plus générales qui régissent rigoureusement les déplacements élasti- ques. Saint-Venant avait été frappé de l'aptitude par- ticulière de ces équations à représenter les phé- nomènes lumineux et la signalait en ces termes : « Tous les résullats des expériences, même les plus singuliers, tels que ceux qui sont offerts par le quartz, le chlorate de soude, etc., se rangent dans .les applications qu'offrent ces équations, avec la Spécialité que leur imprime la structure constatée de chaque cristal, en sorte que le dernier chapitre du Mémoire de M. Sarrau peut servir de complé- mentetde commentaire aux dernières recherches de Fresnel, en mettant, en outre, les expérimentateurs sur la trace de nouveaux sujets de recherches. » IV. — TRAVAUX SUR LA THÉORIE MÉCANIQUE DE LA CHALEUR. Dans la plupart des travaux de Sarrau, on retrouve la même tendance d'esprit à rattacher aux principes généraux de la Mécanique les lois expé- rimentales des phénomènes physiques, au moyen d'hypothèses plausibles sur la constitution de la malière. Il a publié, en 1873, une Thermodynamique des systèmes matériels qui procède de cette méthode. Il admet que les molécules du milieu peuvent être assimilées à des points exercant les uns sur les autres des actions dirigées suivant leurs distances et fonclions de ces distances. En second lieu, l’état thermique du système est constitué par des mouvements intérieurs de la nalure de ceux que Clausius appelle stationnaires. Enfin, la température absolue d’une molécule est proporlionnelle à sa force vive moyenne. Ces hypothèses conduisent à une relation qui, jointe au principe des forces vives, permet d'établir toutes les propriétés que l’on tire du principe de l’équivalence et du théorème de Carnot. Ge résultat implique donc la réduction du second principe de la Théorie mécanique de la chaleur aux principes généraux de la Mécanique. Celte théorie de Sarrau conduit à une relation particulière entre l'équivalent mécanique de la chaleur et les coefficients (hermiques des corps. Une vérification satisfaisante lui avait élé fournie dans le cas du verre par les délicales expériences de Cornu sur la valeur du rapport des coefficients élastiques à et w. Sarrau ne voyait, Loutefois, dans celle théorie qu'une première approximalion. Elle devrait être corrigée en tenant compte de la force vive de rotation des molécules. Mais la fécondité de ces théories, même approchées, donnait à l'auteur la ferme confiance que la vieille théorie des atomes et des forces centrales n'avait pas dit son dernier mot. V. — TRAVAUX SUR LA COMPRESSIBILITÉ DES GAZ. La loi de compressibilité des gaz joue un rôle prépondérant dans la théorie des phénomènes explosifs. On doit à Sarrau l'introduction dans celte théorie d’une notion fondamentale, celle du covolume. 10 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ C'est l'influence du covolume des gaz qui fait croitre les pressions produites par la décomposi- tion des explosifs en vase clos beaucoup plus vite que les charges. C'est l'influence du covolume qui fait croitre, au-delà de toute grandeur mesurable, les pres- sions que produisent les grands explosifs, tels que le coton-poudre et la nitroglycérine, lorsqu'ils se décomposent dans leur propre volume. Le covolume, dont l'influence est presque exclu- sive dans les phénomènes explosifs, n'est qu'un des éléments de correction des lois de Mariolte et de Gay-Lussac, que Van der Waals et Clausius ont introduits pour représenter, dans les limites les plus étendues de température et de volume, la compressibilité des corps. Sarrau s'est proposé d'étendre la formule de Clausius à la représentation du vaste système de données expérimentales, relatives aux gaz, accu- mulées par M. Amagat : il a déduit, d’observalions faites à 15° et 100°, les éléments du point critique de l'oxygène, que les expériences ullérieures de Wroblewski devaient à peine modifier. La représentalion par une formule unique de la compressibililté d'un corps sous ses divers états présente de grandes difficultés. Sarrau les a sur- montées, dans le cas de l’acide carbonique, par des méthodes de calcul ingénieuses et d’une appli- cation très générale. Sa formule à quatre constantes lui permet de reproduire avec une exactitude comparable à celle de l'expérience : La température et la pression crilique; Les tensions de vapeurs saturées; Les pressions du gaz dans les limites étendues des varialions de température et de volume des expériences de M. Amagat; Enfin, les densités de liquide aux basses tempé- ratures et aux grandes pressions. Paul Vieille, Membre de l'Institut, Inspecteur général des Poudres et Salpêtres. ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ : PREMIÈRE PARTIE : DES ANCIENS A LA FIN DU XVIII: SIÈCLE Dès que l'intelligence humaine eut atteint un certain degré de développement, dès que l'homme réfléchit, un des premiers problèmes psychiques qui vinrent troubler son esprit fut, sans doute, celui de son origine. Ce furent d'abord les mythologies et les reli- gions qui répondirent à celte queslion. Toutes admirent l'existence de divinités créatrices : en Perse, ce fut Anâhita, Anaït ou Anaïtis, la divinité bienfaisante de l’Avesla; en Egypte, Isis, dont l'amour parvint à ressusciler son époux, et qui, par là, commença les divins enfanlements; en Palestine, Elohïm, lahveh ou Jéhovah, qui de- viendra le Dieu des chréliens; en Grèce, Aphro- dite, qui naît elle-même, par génération spon- tanée, de l’écume des flols; à Rome, Vénus; à Babylone, Mylitla; en Phénicie, Astarté. Toutes ces divinilés avaient présidé à l'origine ou prési- daient toujours pour les Anciens à la fécondité inépuisable de la Nature; et le charme si profond qui se dégage encore aujourd'hui de l'élude approfondie de ces mythes explique pourquoi l'homme s'est contenté pendant si longtemps de ces explications naïves. 1 Lecons d'ouverture faites à la Faculté des Sciences de Paris (cours libre d'Embryologie, 1903-1904). De bonne heure, cependant, à côté des prêtres qui gardaient jalousement leurs mystères, les phi- losophes, ne s'occupant guère alors que de l'espèce humaine, se demandèrent quels étaient les rôles respectifs de l’homme et de la femme dans la génération; ils cherchèrent à comprendre com- ment, de l'union passagère de ces deux sortes d'individus, pouvait résulter la création d'un nouvel être. I. — LES PnILOSOPNES GRECS. C’est à Hippocrate, c’est-à-dire au v° siècle avant l'ère chrétienne, qu'il faut remonter, dans notre civilisation du moins, pour trouver les premières vues d’ensemble sur la génération sexuée. Pour le célèbre médecin de l'ile de Cos, l'homme et la femme fournissent, l’un et l’autre, deux liqueurs séminales provenant de toutes les parties du corps, en particulier de la têle, et venant s'élaborer une seconde fois dans les testicules mâles et les testi- cules femelles (ovaires). Chacune de ces semences, celle du père et celle de la mère, est formée en réalité de deux substances : l’une forte, caracté- ristique du sexe mâle, l’autre faible, caractéristique du sexe femelle. Dès lors, pour Hippocrate, la for-, | mation des sexes s'explique facilement; si ce sont té bats Éd Én. > rasta G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ 11 les parties faibles des deux semences qui s'unissent, à la suite de la copulation, l'embryon qui en résul- tera sera du sexe femelle; si, au contraire, ce sont les parties fortes, il en résultera un mâle. Voilà pourquoi, ajoute Hippocrate, certaines femmes n'ont que des garcons d'une première union, el, au contraire, des filles d’un nouveau mariage. Près d'un siècle après Hippocrate, Aristote venait affirmer, au contraire, que la femme ne fournit aucune liqueur séminale; elle donne seule- ment la matière qui doit servir à former le fœtus, et cette matière est le sang menstruel. Les ovaires ne jouent ici aucun rôle; ils ne servent guère, devaient dire plus lard des disciples d’Aristote (Athénée d'Atalia et Averrhoës), qu'à établir la symétrie du corps humain. L'homme seul fournit une liqueur séminale véritable, dont le rôle, dans la génération, serait donner la forme à la matière provenant de l'autre sexe. Ce qui émane du sperme, dit-il, est une sorte d'esprit aussi peu matériel que la lumière des étoiles, et c’est cet éther qui donne la vie et le mouvement à la trame du fœtus : c'est comme le feu de Promélhée qui vient animer une machine formée pour la vie, mais ne vivant que par lui; autrement dit, la femme fournit le bloc de marbre, le sperme fail l'office de sculpteur, et le fœtus est la statue pro- venant de ce concours des sexes. Aristote qualifiait le sperme d’« excrément du dernier aliment (c'est-à-dire du sang), qui à la faculté de produire des corps semblables à celui qui l’a produit ». Il a toujours une couleur blan- châtre, dit-il, — et nous le voyons, à ce propos, s'élever fortement contre Hérodote, qui avait pré- tendu que les peuples de l'Ethiopie l'avaient noir. Pour ce qui concerne la génération des animaux ou des plantes, l’on élait naturellement encore moins avancé que pour l'homme.On méconnaissait, par exemple, la nécessité de l’accouplement chez les animaux; on croyait, d'autre part, que la semence de l'homme ou des animaux, lombée à terre ou dans l’eau, y conservait toutes ses pro- priélés prolifiques et qu'elle pouvait être trans- portée par l'air ou par l’eau. Aristote cite le cas de femmes fécondées ainsi dans un bain, et « c’est assez, ajoute-t-il, pour rendre une perdrix féconde qu'elle se lrouve sous le vent, plus bas que le mäle: souvent il a suffi qu'elle eût entendu le chant du mâle dans un temps où elle étail disposée à concevoir, ou que le mäle eût passé en volant au-dessus d'elle, et qu'elle eût respiré l'odeur qu'il exhalail »'. ? Aristote connaissait pourtant les màles et les femelles, mais il croyait que la différence de sexualité n'existait que chez les animaux qui possèdent la locomotion. « Les hôtes qui ne marchent pas, et les animaux qui restent adhérents Ces idées ne reposaient évidemment que sur des contes; mais, lorsqu'on voyait, au printemps, les colombes se becqueter amoureusement, ou bien, au temps du frai, les femelles des poissons suivre le mâle pour avaler la liqueur qu'il rejette, il était permis, vraiment, de trouver dans ces phénomè- nes, une sorte d’accouplement ou de fécondation buccale *. Chez les végétaux, on connaissait également, depuis Empédocle, la différence des sexes, non seulement chez les arbres, mais encore dans toutes les plantes. On savait que le dattier femelle a be- soin du datlier mäle pour produire des fruits; mais, avec le pistachier, c'était à peu près le seul exemple connu. Théophrasle et Dioscoride, qui écrivaient, l'un deux cents, l’autre quatre cents ans après Empé- docle, affirment toujours que, hormis ces deux cas, le sexe mâle ne fournit rien dans l’acte de la géné- ralion chez les plantes. Et nous verrons leurs ou- ouvrages faire aulorilé en Botanique jusqu'au xvirr° siècle”. Du reste, on croyait que les graines, comme les œufs, pouvaient rester stériles; c'est ce qui serait le cas normal, d'après Aristole, par exemple pour les œufs des mollusques, des papillons, des poux el des mouches. La sexualité elle-même n'était qu'un mode particulier d’un phénomène beaucoup plus général, celui de la génération spontanée, sur lequel nous ne pouvons nous arrêter ici. Cependant, on soupconnait déjà que les animaux vivipares pouvaient avoir des œufs semblables à ceux des ovipares. Car Plutarque avait pu écrire, dans ses Propos de table : Seulement, vous dirai-je en passant, que le monde contenant beau- coup de diverses espèces d'animaux, il n’y en a pas une seule qui soit exempte de passer par la génération de l'œuf”... Hippocrate avait déjà cilé le cas d’une musi- cienne qui, en sautant, avait fait tomber un germe, qui ressemblait à un œuf; c'était, dit-il, une vési- cule pleine de matière gluante, remplie de plusieurs filets blancs, qui étaient sans doule, ajoute-t-il, à l'endroit où ils ont pris naissance, ont une existence sem- blable à celles des plantes : ils ne sont ni mâles, ni fe- melles.. » ! Du reste, du temps de Lacépède (1, 374), quelques natu- ralistes, et non des moindres, croyaient toujours que les femelles des poissons pouvaient être fécondées par la bouche Aujourd'hui encore, dans les masses populaires de l'Europe et dans beaucoup de peuplades demi-civilisées, on admet la possibilité de la conception, chez la femme, en dehors de tout rapport sexuel; et cela, soit comme croyance réelle, soit comme partie intégrante de nom- breuses légendes et de nombreux contes. Voir : Lucina sine concubitu. La Revue des Idées, 1901, n° 5, 6 el 7. 2 Pourtant Pline parle nettement du pollen comme élant l'agent de la formalion des fruits. 3 Cité par La Revue des Idées, 190%, p. Î £. 19 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ les premiers commencements de l'enfant futur. Depuis Hippocrate, tous les médecins à Rome et au Moyen âge eurent l'occasion de décrire les mêmes observations; mais, dans leurs écrits, ils ne se servirent plus du mot œuf; ils employèrent les mots : vésicule, boule ou glande. A la vérité, l'œuf vu par Hippocrate n'était autre chose qu'un très jeune embryon entouré de ses membranes. Personne ne pensait alors à faire remonter l'ori- gine de ces œufs au fonctionnement de l'ovaire; on les faisail naître directement de l'utérus. IT. — DÉCOUVERTE DE L'ŒUF DES VIVIPARES ET DU SPERMATOZOÏDE (XVII° SIÈCLE). S 1. — L'œuf des animaux vivipares (1651). Ce fut, au xvr' siècle, un chanoine de la cathé- drale de Modène, du nom de Fallope, qui, le premier sans doute, eut l’idée que les testicules des femmes pouvaient être le lieu de formation de ces sortes d'œufs observés par les médecins; il assure, en effet, avoir vu dans ces organes de petites vessies pleines d'eau. Quelques années plus tard, Du Laurens, médecin de Henri IV, figure ces vésicules en ajoutant qu'elles forment le caractère distinctif entre les testicules de la femme et ceux de l'homme. Mais c'est seulement près d’un siècle plus tard que les recherches de Harvey (1651) sur les biches du pare de Windsor commencent à répandre cette idée que les vivipares peuvent, eux aussi, provenir d'un œuf. Cependant Harvey, en disciple fidèle d’Aristote, continue à admettre que la géné- | ration tout entière est l'œuvre de la matrice. Jamais, dit-il en substance, il n'entre en elle de semence du mäle; la matrice concoit le fœtus par une espèce de contagion que la liqueur du mâle lui communique, à peu près comme l'aimant com- munique au fer la vertu magnétique. Quelques années après cette date célèbre, les recherches de trois jeunes Hollandais : de Stenon sur le chien de mer, de Graaf (1672) et de Swam- merdam sur les mammifères, firent encore avancer la quéstion et montrèrent définitivement que les glandes femelles, au lieu d’être des testicules ou des ganglions lymphatiques, étaient le lieu d'origine des œufs et devaient dès lors porter le nom d'ovaires. De Graaf, en particulier, fit des observations suivies chez le lapin ; il vit se former à la surface de l'ovaire de petites vésicules, connues depuis sous le nom d'ovisacs ou follicules de Graaf, vésicules qu'il crut revoir dans les trompes, tout en s'étonnant de les retrouver diminuées de volume. Cependant, continuantses recherches, il vit ces œufs descendre vers le vagin en augmentant de volume, et les compara d’abord à un grain de moutarde, puis à du plomb de lièvre, enfin à des chevrolines et à des balles de plomb. s Naturellement, ces découvertes ne se faisaient pas sans rencontrer de vives oppositions, car la plupart des philosophes vivaient toujours avec une foi entière dans les idées de l'Antiquité. Et cette foi élait telle que nous voyons encore, en 1657, un savant naluraliste et médecin, Jonston, admettre toujours, avec Aristote, que les chenilles naissent de la pulréfaction des plantes et de la rosée. Il est curieux de lire aujourd’hui les polémiques, souvent trop passionnées, qui apparaissent dans les ouvrages de cette époque. En 1685, par exemple, Drelincourt, qui fut dans sa jeunesse médecin des armées de Louis XIV au service de Turenne, et en- suite recteur de l’Université de Leyde, publia un ouvrage dans lequel il soutenait à nouveau la réa- lité des œufs chez la femme; or, dans cet ouvrage, il réfute tous les autres systèmes, en donnant à chacun de leurs auteurs, ses contemporains, une épithèle moqueuse qui caractérise leur façon de penser. C'est ainsi qu'il appelle Fernel Seminator (le semeur), parce que ce médecin pensait que tous les êtres proviennent uniquement de la semence du màle; Plazzoni, Pistor (le boulanger), parce qu'il attribue la formation de l’homme à la fermen- tation des liqueurs prolifiques; Barbalus, Zliquator atque fusor (le fondeur), pour avoir dit, avec quel- ques anciens, que l'enfant naissait du sang mens- truel; Van Hoorne, Casearius (le marchand de fromage), parce que cet auteur croyait que, par le mélange des deux liqueurs prolifiques, il en résul- tait une espèce de coagulum qui était le rudiment du fœtus. Cependant la loi de Harvey : Omne vivum ex ovo! élait de plus en plus confirmée; partout on décri- vait des œufs nouveaux, et une découverte impor- tante allait bientôt faire prendre une place prépon- dérante à ces éléments dans la génération des êtres. Celte découverte ful celle de la parthénogenèse, qu'un jeune Génevois de vingt ans, Ch. Bonnet, : L« Cel aphorisme, dit La Revue des Idées, ne semble pas être la parole même de Harvey, mais bien un résumé lapi- daire de son idée Il s'exprime ainsi, en effet (Æxercitaliones de generatione animalium) : « Nos autem asserimus Omnia omnino animalia, eliam vivipara alque hominem adeo ipsum, EX OVO progigni; primosque eorum conceplus equibus fœtus fiunt ova quœdam esse, ut et semina plan- tarum omnium. » Nous ajouterons que c'est un médecin hollandais, Ker- kring, qui, en 1671, à la suite de ses recherches, affirmait positivement, le premier, l'origine ovulaire de l'homme : Zn ovo hominum non mimis quam avium prima reperiri inCcu- nabula. EX ovo enim producitur homo. Mais il ne faut pas oublier que l'œuf des Mammifères, dont on parlera encore longtemps, n'est autre chose que l'ovisae. Le vérilable ovule ne fut découvert, dans l'ovisac d'une chienne, que cent soixante-douze ans après Harvey, par von Baër (1826). L'ovule des Monotrèmes ne fut découvert qu'en 1885 par Haacke. G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ 153 fils de réfugiés protestants français, faisait en 1740 chez les pucerons. Dès lors, on put dire, avec lo- gique du reste : Si les œufs peuvent se développer sans le concours du mâle, on doil en conclure que ces corps porlent en eux-mêmes et à eux seuls le germe du nouvel être vivant qui doit sortir de l'œuf. D'un autre côté, un médecin italien, Malpi- ghi, avait déjà remarqué que les œufs de poule fécondés ne renferment rien de plus que les œufs non fécondés, et il avait même cru voir, sur ces derniers, les premiers rudiments du futur poulet. Ce sont là des faits positifs, disait Bonnet (1762), qui doivent être la base de tout raisonnement sur la génération, el c'est sur eux, en effet, qu'il établit la fameuse théorie de l'évolution et de l’'emboîte- ment des germes”. Bonnet, comme Malebranche, admeltait Ja préexistence des germes, mais non plus sous la forme de corps simples hypothétiques qui auraient été universellement disséminés par Dieu dans tous les milieux à l’origine des choses (Panspermie). Pour lui, ce sont des corps fluides ou gélatineux, organisés dès l’origine, contenus dans l'ovaire des femelles de toule antiquité; c’est-à-dire que la divinité créatrice, en formant l'ovaire de chaque être, aurait créé en même lemps les germes de tous les individus à venir dans la série des temps (théorie de la syngénèse). Toules les parties d'un végétal ou d'un animal futur avaient été ainsi formées au même moment; elles se trouvaient en raccourci dans chaque germe el n'avaient qu'à grandir en se nourrissant pour reproduire l'animal adulte (théorie de l'évolution). Du reste, Bonnet avait beau jeu à critiquer le mécanisme de Malebranche, qui n'était, en réalité, qu'une simple vue de l'esprit : « Siles corps organisés ne sont pas préformeés, disait-il (1766, 1, xxx), il faut qu'il se forment jour- nellement en vertu des lois d'une méchanique particulière. Or, je prie qu'on me dise quelle méchanique présidera à la formalion d’un cerveau, d'un cœur, d’un poumon, et de tant d’autres orga- nes? Je ne rends pas encore la difficulté assez saillante : elle ne consiste pas seulement à faire former méchaniquement tel ou tel organe, com- posé lui-même de lant de pièces différentes; elle consiste principalement à rendre raison, par les seules lois de la méchanique, de cette foule de rapports variés, qui lient si étroitement toutes les parlies organiques, et en vertu desquelles elles conspirent toules à un même but général; je veux 4 Nous devrions dire plus exactement qu'il vulgarisa, car cette doctrine, inspirée des idées de Malebranche sur la préexistence des germes, et de celles de Leibnitz sur l'har- monie préétablie, se trouvait déjà en substance dans Swam- merdam et explicitement décrite dans Haller (1158). dire, à former cetle unité qu'on nomme un animal, ce tout organisé qui vit, croît, sent, se meut, se con- serve, se reproduit. Prenez garde que le cerveau suppose le cœur, et que le cœur suppose à son tour le cerveau. » La doctrine de l’évolution reposait, au contraire, sur des faits facilement vérifiables. Swammerdam n'avait-il pas cru voir, sous la peau d’une chenille, les différentes enveloppes qui la conduiraient au papillon; et ne voyait-on pas encore, aux jours de printemps, les papillons sortir de leur chrysalide entièrement formés? Enfin, comme Malebranche le disait en vérité, il suffisait d'ouvrir une graine pour y trouver la jeune plan- tule déjà toute constituée. Bonnet suivait toujours la doctrine d’Aristote, qui veut que la liqueur fécondante du mäle soit seulement le stimulant du développement de l'être préformé; mais il pensait que celte liqueur est, en même temps, un fluide nourricier approprié à l'extrême délicatesse des parties du germe... Remarquons cette dernière opinion, qui apparait ici comme une nécessité de système. Nous la relrouverons au xix° siècle, présentée avec le même caractère d’affirmalion sans preuve. Le point faible de la doctrine était la difficulté qu'il y avait à concevoir comment tous les germes, créés dès l’origine du monde, avaient pu se trouver contenus dans les œufs de tous les individus qui avaient peuplé la Terre. On admettait que le créateur avait emboité ces germes les uns dans les autres, ce qui tournait, en effet, la difficulté. Dans l'ovaire d'une aïeule, disait Haller, sont renfermées non seulement la fille, mais la petite-fille, l'arrière-petite-fille el l'arrière-petite- fille de sa fille. Ce n'était là, il est vrai, qu'une hypothèse; mais, disait Bonnet : « Cette hypothèse de l’emboitement est une des plus belle victoires que l’entendement pur ait rem- porté sur les sens. Les calculs effrayants par les- quels on entreprend de la combattre prouvent seulement qu'on peut loujours ajouter des zéros à des unités, et accabler l'imagination sous le poids des nombres. « Mais, en accumulant des nombres, on n’accu- mule pas des faits, et la Nature elle-même semble nous fournir des preuves directes de l’emboite- ment. Elle nous montre des parties osseuses d'un fœtus renfermées dans un autre fœlus, un œuf renfermé dans un autre œuf, un fruit dans un autre fruit, un fœtus dans un autre fœtus, etc. » Cette théorie, si célèbre en son temps, et qui nous apparaît aujourd'hui avec un caractère quelque peu fantastique, doit-elle être laissée complètement dans l'oubli? Il ne le semble pas, quand on voit, de notre temps, certains biologistes admettre que tou- 14 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ tes les parties du futur embryon sont prédétermi- nées dans l'œuf sous la forme de particules", que, du reste, ils n'ont jamais vues. À bien chercher, dans la nuageuse Allemagne surtout, l'on retrouverait peut-être encore aujourd'hui l’ancienne querelle des ovistes et des spermistes. $ 2. — Le Spermatozoïde (1677). Pendant ce temps, une autre découverte, celle du spermalozoïde, prenait corps dans la science et allait détrôner l'œuf du piédestal sur lequel l'avait placé la théorie précédente. A l’époque des travaux de Stenon, de Swammer- dam et de Graaf, la Hollande montrait une grande activité, et, en particulier, elle pouvait se glorifier de ses nombreux savants. Le grand Leeuvenhoek venait de découvrir le microscope composé, et les « curieux de la nature » examinaient, avec cet instrument, Lous les liquides, toutes les substances qu'ils rencontraient. Au mois d'août 1677, Louis Ham, jeune médecin de Dantzig, eut l’idée d'examiner aussi le liquide séminal d'un de ses malades atteint de gonor- rhée; il y découvrit de petits corps mobiles qu'il prit pour des animaux *. Il fit part de sa curieuse découverte à Leeuvenhoek, qui la confirma et la communiqua, par lettre, à la Société Royale de Londres. Voici un passage de cette lettre où il parle des visites que lui fit Ham : « Aie Dominus Lam, me secundum invisens, secum in lagenula vitræa semen viri gonorrheä laborantis, sponte distillatum, attulit, diceus se post paucissimas mi- nulias animalcula viva in eo observavisse quæ caudata et ultra 24 horas non viventia, »° Cette communication eut un très grand relen- tissement dans le monde savant; tous voulurent voir ces sortes de petils vers spermaliques; l’on en chercha et l'on en découvrit facilement dans le sperme de différentes espèces animales; enfin, l'imagination aidant, on voulut bientôt y voir les homunculi des anciens alchimistes. Leeuvenhoek admetlait que, de ces vers, les uns étaient mâles et les autres femelles; Haller ra- conte, dans ses Éléments de Physiologie, qu'un de ces animaleules, s'étant par hasard dépouillé 1 Ces particules sont les micelles de Nægeli, les biophores de Weissmann, les idioblastes d'Hertwig, les biogènes de Verworn, ele. 2 D'après Fontenelle (Æloges), un autre Hollandais, Hart- sæker, avait déjà fait cette découverte en 1674. Mais elle n'avait pu être confirmée, car Hartsæker avait trompé ses contemporains en disant que le liquide qui renfermait ces petits animaux était de la salive. 3 « Ce sieur Ham, venant me voir pour la seconde fois, apporta avec lui, dans un petit flacon de verre, de la semence qu'avait émise spontanément un homme atteint de gonorrhée 11 me dit qu'après un petit nombre de minutes, il y avait observé des animaleules vivants, munis de queue el ne vivant pas au-delà de vingt-quatre heures. » de son enveloppe, avail laissé voir une figure hu- maine, bien pelite à la vérité, mais pourtant recon- naissable. De mème, on prélendait avoir vu, dans la semence de l'âne, des animalcules à longues oreilles, et un petit poulet, déjà bien conformé, dans le fluide séminal du coq. En somme, c'élait là, pour ces savants, la véri- table origine de l'embryon ; la préexistence et l'em- boilement des germes n'étaient pas une erreur, mais c'élait dans les vers spermatiques des premiers individus créés que Dieu avait emboilé les germes de toutesles générations futures. L'œuf était simple- ment le nid où ce pelit ver pouvait trouver la nour- rilure nécessaire à son développement. Voilà quel était l’état de la question à la fin du xvu° et au commencement du xvin° siècle ; Gaspar Frédéric Wolff, qui allait bienlôt(1759) faire revivre l'épigénèse sous la forme de l'embryologie actuelle, n'était pas encore connu; la doctrine de Bonnet sur l'emboîtement des germes était de plus en plus admise et devait l'être encore par Georges Cuvier. Malgré cela, les savants se disputaient tou- jours avec passion, car les uns (ovistes) en tenaient encore pour les idées de Bonnet, alors que les autres, au contraire (spermalistes), disaient que tout dans l'embryon provenait du ver sperma- tique. Il faut bien dire, du reste, que tous ces hommes élaient de hardis novateurs !, et que leur succès tenait surtout au bruit qu'ils faisaient dans le monde. Il restait, à côté d'eux, un grand nombre de médecins et de philosophes, et non des moindres, qui en référaient toujours à Hippocrate ou à Aris- tole; «il y en a même plusieurs, dit un curieux pelit livre, découvert sur lés quais de Paris”, qui ne scauraient entendre le mot de nouveauté sans quelque sorte d'horreur, s'imaginans qu'il ne reste plus rien à sçavoir après la doctrine des Anciens; que nôtre raison doit être bornée par tout où ils se sont arrêtez; que c'est criminel que d'altérer tant soy peu leurs derniers sentiments... ; que l’on en à vu même à qui l'on montrait, par l'Analtomie, que les nerfs parlaient du cerveau et non pas du cœur, comme avait soutenu un Ancien, dire : Vous ! Des novateurs qui révolutionnaient jusqu'au grand public. C'est ainsi que la thèse où Etienne Geoffroy se demandait, en 1704, Si l'homme avait commencé par étre ver, piqua tellement la curiosité des dames, et des dames du plus haut rang, qu'il fallut la traduire en français pour les initier aux mystères dont elles n'avaient pas la théorie. Malheureusement, ces novateurs n'avaient pas toujours été respectueux pour leurs contradicteurs : « Lorsque Pythagore découvrit son fameux théorème, écrivait un de ceux-ci, le médecin Boerne, il offrit aux dieux une héca- tombe: depuis lors, toutes les bêtes tremblent à chaque annonce d'une vérité nouvelle. » ? Les nouvelles découvertes sur toutes les parties princi- pales de l'homme et de la femme... par M. Louys Barles, mé- decin, aggrégé au Collège de Marseille à Lyon, M.DC.LXXV. G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ me le montrez si bien, que j'en serais persuadé s'il n'y avait une authorité contraire. » III. — RETOUR AUX THÉORIES HUMORALES D'HIPPOCRATE. & $S 1. — Buffon (1749). Beaucoup de philosophes scolastiques adoptaient donc encore la philosophie d’Aristote; les méde- cins, au contraire, suivaient toujours la doctrine d'Hippocrate renouvelée par Galien. C'est avec ces derniers que vont se ranger Buffon et son dis- ciple, l'abbé Needham, pour combattre le système des spermatistes aussi bien que celui des ovistes. Buffon, à la suite d'Empédocle et de Démocrite, croyait que les liqueurs séminales étaient compo- sées de particules relirées à tous nos organes par les glandes génitales. Ces particules avaient comme propriété essentielle de tendre à se grouper, à s'organiser entre elles; aussi Buffon est-il amené naturellement à ne voir dans les animalcules spermatiques que le premier assemblage de ces parties. C'étaient done des éléments anatomiques, et Buffon avait raison, en cela, contre les sper- mistes, qui voulaient y voir des animaux, des sortes de vers‘. Ce sont des « corps mouvans », disait-il, qui, par leur agitation conlinuelle, déterminent un mélange plus intime des deux liqueurs, màle et femelle, dont l'union est nécessaire pour la forma- tion de l'embryon. Voici maintenant les idées que Buffon opposait aux ovistes : « Les vésicules qui composent presque toute la substance des testicules des femelles, et qu'on croyait jusqu'à nos jours être les œufs des vivipares, ne sont rien autre chose que les réser- voirs d’une lymphe épurée, qui fait la première phase de la liqueur séminale ». Non seulement Buffon admettait ainsi, avec Hippocrate et Galien, la réalité d’une liqueur séminale femelle, mais encore il croyait, à la suite d'expériences curieuses dont j'aurai à reparler plus tard, que cette liqueur femelle renfermait des animaux spermatiques en tous points semblables à ceux que l’on rencontre dans la liqueur séminale du mâle. Quant aux œufs, il croyait que c’étaient des corps organisés, non constants et non formés dans l'ovaire, destinés à la ! Cette dernière opinion persistait encore au milieu du xix° siècle, comme le montre ce passage de Pouchet (18417, p. 346) : « Et cependant, qui le croirait... Wagner est tenté de refuser l'animalité à ces microzoaires! que veut-il done que ce soit, si ce ne sont des animaux? » — Quelques autres faisaient de ces animaux un groupe de Cercaires (Cercaria Mullieri : Gleichest, 177$, Czermack, 1833). Et Pou- chet leur trouve toujours une bouche et un intestin (p. 321). — C'est seulement en 1851 que Duvernoy put proposer avec succès de remplacer le mot de spermatozoaire (animal spermatique) par celui de spermatozoïde (ressemblance à —), qui à élé depuis conservé en France. nourriture du fœtus, qui se trouve formé par le mélange des liqueurs des deux sexes. Mais ce qui est le plus intéressant, c'est que Buffon expose en même temps des idées qui for- ment, en réalité, la première théorie générale que nous ayons de la sexualité. Ces idées sont d'autant plus intéressantes à rappeler que nous les retrou- verons, plus ou moins cachées, dans certaines théories actuelles, comme nous venons de voir Buffon reprendre lui-même les idées de Galien et d'Hippocrate. « La nutrition et la reproduction, dit notre grand naturaliste, sont toutes deux non seulement pro- duites par la même cause matérielle ; ce sont les parties organiques de la nourriture qui servent à toutes deux » !. Pour Buffon, les liqueurs séminales sont donc formées par le « superflu de la matière». Et, de même, nous le voyons, plus loin, à propos de l'histoire naturelle du cerf, expliquer de la mème facon l'apparition de ces ornements qu'on appellera bientôt caractères sexuels secondaires. « Il y a tant de rapports entre la nutrition, la production du bois, le rut et la génération de ces animaux, dit-il, qu'il est nécessaire, pour en bien concevoir les effets particuliers, de se rappeler ici ce que nous avons établi de plus général et de plus certain au sujet de la génération; elle dépend en entier de la surabondance de la nourriture. Tant que l'animal croît (et c’est toujours dans le premier âge que l'accroissement est le plus prompt), la nourriture est entièrement employée à l'exten- sion, au développement du corps; il n’y a donc nulle surabondance, par conséquent nulle produc- tion, nulle sécrétion de liqueur séminale; et c’est par cette raison que les jeunes animaux ne sont pas en état d’engendrer : mais, lorsqu'ils ont pris la plus grande partie de leur accroissement, la surabondance commence à se manifester par de nouvelles productions. Dans l'homme, la barbe, le poil, le gonflement des mamwmelles, l'épanouisse- ment des parties de la génération, précèdent la puberté. Dans les animaux en général, et dans le cerf en particulier, la surabondance se marque par des effels encore plus sensibles; elle produit la têle, le gonflement des daintiers, l'enflure du cou et de la tête, la venaison, le rut, etc. » Il y a beaucoup de vrai dans ces idées; la repro- duction est certainement sous la dépendance de la nutrilion, mais elle a cela de commun avec les autres fonclions du corps. Par contre, on ne sau- rait admettre, avec Buffon, que c’est le superflu de la nourriture qui, une fois le développement ter- miné, devient le sujet matériel de la reproduction. 1 Aristote (cité par Sachs, 1892, p. 389) avait déjà écrit : « La nutrition et la fécondation sont l'œuvre d'un seul et in 1e principe, du principe de la force vitale. » 16 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ Tous les cas de progenèse qu'ignorait Buffon vont manifestement à l'encontre de ces idées, et nous verrons, du reste, que, même dans les cas ordi- naires, la puberté apparait presque toujours avant | la fin du développement. $ 2. — Haller et Tissot (Premières notions sur les sécrétions internes des glandes génitales 1747-1760. A la fin du xvin siècle, les disputes entre ovistes et spermatistes étaient apaisées; on ne parlait même plus guère d'œufs ni de spermatozoïdes. Mais on se demandait toujours quelle était la nature réelle de la liqueur séminale. Est-elle ana- logue à quelque autre humeur, disait-on; ou bien est-elle la même que ce liquide qui, sous le nom d’esprits animaux, devait parcourir les nerfs; enfin, quelle peut être l'importance de ces humeurs pour un organisme qui a soin de s'en détarrasser périodiquement, et dont la perte exagérée produit pourtant de si funestes effets ? On accordait bien qu'une trop grande évacuation des humeurs qui circulent dans les vaisseaux, telles que le sang et la lymphe, devait affaiblir. Mais il élait beaucoup plus difficile de comprendre comment une humeur qui ne circule plus, que l'organisme dépose dans des réservoirs spéciaux avant de la rejeter définitivement, puisse produire les mêmes effets par sa perte. Or, pour répondre à celte question, on lrouve, dans les ouvrages des physiologistes de cette époque, l'exposé complet d’une théorie qui a reparu presque entirement de nos jours, celle de la sécrélion interne des glandes génitales. Voici, par exemple, ce que dit Haller (1747, par. 790), ce savant médecin dont nous avons déjà parlé à propos de l’emboitement des germes : « La semence est gardée dans les vésicules séminales jusqu'à ce que l'homme en fasse usage, ou que les écoule- ments nocturnes l’en privent. Pendant tout ce temps-là, la quantité qui s’y trouve excite l'animal à l'acte vénérien; mais la plus grande partie de cetle semence, la plus volalile, la plus odorante, celle qui a le plus de force, est repompée par le sang, et elle produit, en y entrant, des change- ments bien surprenants : la barbe, les poils, les cornes; elle change la voix et les mœurs, car l’âge ne produit pas dans les animaux ces changements, c'est la semence seule qui les opère, et on ne les remarque jamais dans les eunuques. » Haller suit donc ici Buffon pour rapprocher net- tement ces caractères particuliers de la sexualité ; comme nous l'avons montré autre part, John Hunter les y faisait rentrer définilivement, trente- cinq ans plus tard, sous le nom de caractères sexuels secondaires. Un compatriole de Haller, le médecin suisse Tissot, reprenant cette opiniou, est encore plus explicite pour ce qui concerne la sécrétion interne du testicule, Dans les vésicules séminales, dit-il (1760, p. 267), la liqueur séminale « est constam- ment repompée par les vaisseaux absorbants, de proche en proche, rendue à la masse totale des humeurs. C'est une vérité que l'on démontre par bien des preuves : une seule suffit. Dans un homme sain, la séparation de celte liqueur se fait continuellement dans les testicules: elle se rend dans ses réservoirs, dont l'étendue est très bornée, et ne peut peut-être pas en contenir tout ce qui se sépare dans un jour : cependant, il est des hommes continents, qui n’en évacuent point pendant des années entières. Que deviendrail-elle si elle ne rentrait pas continuellement dans les vaisseaux de la circulation? rentrée qui est extrêmement faci- litée par la structure de tous les organes qui servent à la séparation, à la route et à la conser- vation de cette humeur. Les veines y sont beau- coup plus considérables que les artères, et cela dans une proportion qui ne se trouve tout aussi grande ailleurs. Ainsi, il est probable que ce repompement ne se fait pas seulement dans les vésicules séminales, mais qu'il a déjà lieu dans les testicules, dans les épididymes, qui sont une espèce de premier réservoir adhérent aux lesti=. cules, et dans le canal déférent, qui est celui par lequel la semence va du testicule à la vésicule séminale ! ». Ces idées n'eurent guère de retentissement dans la suite, d’abord parce qu'on les considèra comme des affirmations sans preuves suffisantes, en- suite parce que la Biologie allait entrer dans une nouvelle voie toute différente, celle qui est encore suivie aujourd’hui pour ce qui concerne la sexualité. Elles ramenèrent cependant les esprits aux vieilles théories humorales, qui n'avaient élé délais- sées que momentanément. Les animaleules sper- maliques devenaient de moins en moins inléres- sants au fur et à mesure qu'on se trouvait obligé de les distinguer nettement des animalcules infu- soires; les idées de Buffon prévalurent bientôt, de sorte que nous voyons Prévost et Dumas écrire à leur sujet, en 1824 : « Toutes nos expériences * Galien avait déjà dit : « Les testicules fournissent une liqueur propre à répandre une nouvelle vigueur sur tout le corps » (De Semine, 1. [, ch. XXXIV,t. , p. 1219), et par là, le célèbre médecin de Pergame peut être considéré comme le précurseur de Brown-Séquard. Mais Galien se donne beaucoup de peine pour découvrir comment une pelite quantité de cette humeur peut donner autant de force au corps. Et, ne pouvant y parvenir, il décide « qu'elle est d’une vertu exquise el qu'ainsi elle peut communiquer très promptement de sa force à toutes les parties du corps ». Buffon dit également quelque chose de semblable dans son Histoire naturelle du Cerf. (. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ démontrent qu'ils sont le produit d'une véritable sécrélion. » Et pourtant, ironie des Lemps et des hommes! Nous allons voir ces mêmes expériences de Prévost et Dumas conduire les premiers histo- logistes du x1x° siècle à une conelusion tout à fait opposée. Mais, avant de passer au xIx° siècle, nous de- vons revenir sur deux questions dont nous avons à peine parlé jusqu'ici : sur le phénomène de la menstruation chez la femme et sur la sexualité chez les végétaux. IV. — RECHERCHES SUR LA MENSTRUATION (1842-1844). Les anciens s’occupèrent peu, sans doute, de la menstruation ; on ne connait, en effet, que Soranus d'Ephèse (le jeune) qui ait traité spécialement de l'écoulement menstruel; il en parle dans son livre sur les maladies de la femme pour réfuter Empé- docle, qui fixait les « époques » au déclin de la Lune. Pendant tout le xvim° siècle, on discuta beaucoup pour savoir si ce phénomène était dû à l’action de la Lune, à la fermentalion, à la pléthore générale ou à la pléthore utérine ; mais on s'accordail généra- lement pour admetlre que l'écoulement sanguin menstruel devait servir « à l'entretien, à la nourri- ture et au développement du fœtus » (Buffon). Vous savez, en effet, que cet écoulement manque pen- dant toute la durée de la grossesse. Par contre, on ne soupçonnait aucun rapport entre la menstrua- tion et l'ovulation, c'est-à-dire le rejet des œufs par l'ovaire; celui-ci, disait-on (et allait-on dire encore pendant cent cinquante ans), élait déterminé par le coït; on croyait même que les ovules ne pouvaient se former qu’à la suite du contact du sperme avec l'ovaire. Or, en 1781, un jeune médecin de l'Université de Leyde, Themmen, soulenait sa thèse inaugu- rale, et, dans cette thèse, on trouve déjà énoncées les idées que l’on a actuellement sur la menstrua- Lion. Dans cet ouvrage, on lit, en effet, que l'ovaire rejelte quelque chose au moment des règles et que le flux sanguin est la conséquence de l'émission de cette matière. « Si l’on‘examine les ovaires d'une femme saine morte immédialement avec le flux menslruel, on trouve les ovules* beaucoup plus gros que de coutume et remplis d'une matière blanche, épaisse, très analogue à la semence de l'homme. Peu de temps après les règles, les ovaires, sont, au contraire, moins volumineux, les ovules très pelits, et la matière sus-dite fait défaut ». Je dois ajouter que Themmen reprenait ainsi, mais 4 Cétaient les ovisacs: les véritables ovules ne devaient être découverts que quarante-six ans aprés, par von Baër. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. vérifiait par l'observation, une idée qui avaitété déjà émise quelques années auparavant par Cullen : « Ilest à croire, disait, en effet, ce célèbre médecin écossais, qu'il existe un certain rapport entre l’état des ovaires el celui des vaisseaux utérins, et que l'état des ovaires a une grande influence sur l'écou- lement des menstrues ». Ce n'est pourtant qu'un demi-siècle plus tard, à partir de 1839, que les médecins Gendrin et Négrier entrèrent dans cette voie; mais c'est sur- tout à Pouchet (1842) en France, puis à Bischoff (184%) en Allemagne, que reviennent le mérite d'avoir fait entrer définitivement le fait dans la science et d'avoir rapproché les phénomènes de la menstruation chez la femme de ceux du rut chez les animaux. Pour cela, Pouchet faisait voir surtout les analogies qui existent entre l’homme et les animaux sous le point de vue de la génération; Bischoff fit, de son côté, des démonstralions directes sur des chiennes, des lapines, des truies, etc. La lutle fut vive, pendant quelque temps, pour faire accepter ces idées; en 1845, le grand physio- logiste J. Muller professait toujours qu'il n’y avait rien decommun entre la menstruationet «ce qu’on appelle rut ou chaleur chez les animaux ». Pouchet revint sur lesujeten 1847, dans un grand ouvrage d'ensemble, et il pouvait encore écrire ces lignes, où l’on sent percer du découragement : « Peut- être nos efforts paraitront-ils prémalurés; mais bientôt la vérité se fera connaître, et notre entre- prise, aujourd'hui si courageuse, si désespérée, et pour laquelle nous luttons contre l'autorité de tant de siècles, et contre l’ascendant de tant de savants divers, notre entreprise obtiendra justice; puis nos travaux, d'abord censurés avec amertume, attire- ront enfin l'attention, et seront consacrés comme une vérilé nouvelle acquise pour la science ». Nous devons ajouter, cependant, sauf à y revenir plus tard, que l'ovulation peut se faire sans mens- truation et que, par contre, celle-ci peut continuer à se faire pendant la période de grossesse, contrai- rement à ce qui se passe d'habitude. V. — LA SEXUALITÉ DES VÉGETAUX (XVII, XVIN® ET XIX° SIÈCLE.) Comme nous l'avons vu plus haut (ch. I), les An- ciens avaient été bien près de découvrir les fonctions sexuelles chez les Végélaux. Mais vint le Moyen- Age et tout fut à recommencer, car, pendant cette période, on ne s'occupa guère que d'étudier les ver- tus des plantes, surtout de celles que les voyages faisaient connaitre. Jusqu'à la fin du xvi° siècle, les ouvrages qu'on écrivit sur la Botanique ne furent guère, pour ce qui concerne la sexualité, que des commentaires 1* 18 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ des anciens, de Théophrasle et de Dioscoride, surtout (voir plus haut, 1). Conrad Gesner, qu'on a surnommé le Pline de l'Allemagne, fut celui qui ouvrit ici la voie aux découvertes nouvelles par l'idée qu'il eut de classer les plantes par rapport à leurs fleurs, à leurs semences et à leurs fruits. IL eût pour disciple Césalpini (1585), médecin du pape Clément VIII, qui pense que l'excitation des étamines (/occi) est nécessaire à la formation de la graine. Le fait ne fut démontré expérimentale- ment qu'un siècle plus tard par un médecin de Londres, Grew (1682), en collaboration avec Robert Jacques, et par un allemand, Camerarius (169%), qui commença à apporter à la ques- tion les résultats de nombreuses expériences et put être considéré ainsi, par plusieurs, comme le vérilable fondateur de la doctrine de la sexualité chez les plantes. Ces idées nouvelles eurent, sans doute, un reten- tissement, qui ne {arda pas à gagner le grand pu- blic. L'état de la Botanique élait bien fait du reste pour le captiver. Les plantes ont-elles une âme? Leurs sens nutritifs circulent-ils? Comment se re- produisent-elles? Voilà les trois grandes questions qui dominaient alors toute la Physiologie végétale. Aussi ne faut-il pas s'étonner de voir le célèbre his- torien De Thou publier, en 1614, cinq petits poèmes sur : Je Chou, la Violette, le Lys, l'Œillet et la Marjolaine. Et dans ce dernier, nous lisons ce vers remarquable : Tum stylus excritur bilidus qui stamina queærit. (« Du centre de la fleur, s'élève le style, fenaa en deux, qui cherche les étamines. ») Par contre, ces idées rencontrèrent beaucoup d'in- crédules dans le monde savant, qui restait toujours fidèle aux Anciens. C'est ainsi que le célèbre Tour- nefort ne voulait toujours voir, dans la poussière des étamines, qu'un simple excrément de la plante. « Les anthères, dit-il, ont pour rôle de purger les fleurs de tous les principes nuisibles qu’elles ren- ferment. » C'est à peu près ce qu'avait dit Théo- phraste dix-neuf siècles auparavant. Il fallut donc attendre au commencement du xvin® siècle pour voir Burckard (1102), les Geoffroy (170% et 1711) et Vaillant (1718) reprendre la question avec succès!. Mais la théorie de la sexua- lité végétale rencontrait toujours d’ardents contra- dicteurs. Vaillant, dans son Discours, avait montré les analogies qui existent entre les organes sexuels des plantes et ceux des animaux. Cela avait révolté certains esprits pudibonds, tel que Kramer (cité ! Dans son célèbre Discours sur la structure des fleurs, prononcé en francais au Jardin royal de Paris, le 10 juin 1717, Vaillant restreint encore le sens du mot fleur aux enveloppes florales. par Marchand, 1890, p. 340), qui qualifie la théorie d'inepte, d'impudique, d'ordurière, elc. Mais ce furent surtout van Royen (1732) et Linné (4735) qui firent accepter et répandirent par- tout la notion définitive de la sexualité des plantes. L'œuvre de Linné est connue; on sait qu'il prit ces nouveaux caractères pour base de la classification botanique qui allait remplacer la méthode, alors classique, de Tournefort. Quant à Van Royen, c'était un professeur de Médecine et de Botanique à Leyde, très célèbre en son temps. Poète à ses heures, il eut l’idée de chanter en vers élégiaques les nouvelles découvertes. Le fait est assez rare dans le langage des savants pour que l'on me permelte de citer un passage de son poème. Van Royen parle d'abord de Vénus souriant aux productions de la Terre et montre celle-ci, trans- portée par ce sourire, se couvrant bientôt de fleurs mäles, de fleurs femelles et de fleurs hermaphro- dites. Dans ces dernières, dit-il, « les amants et les belles jouissent d'un bonheur rarement accordé aux humains : ils passent lenr vie ensemble, ils sont du même àge et doués d’une égale beauté. Le même sentiment les anime. Lorsque la vigueur de la jeu- nesse a déployé la force de leurs organes, l'amant s'incline vers son amante; il la caresse, sollicite ses faveurs avec un doux murmure, et l’hymen, en les unissant, leur assure une félicité que n'altèrent jamais ni les chagrins de l’absence, ni les tourments de la jalousie. « Les deux amants habitent-ils sur des arbres sé- parés, leur jeunesse se passe dans une mélanco- lique apathie; mais au printemps, l'amour voltige au-dessus d'eux et les frappe de ses traits sympa- thiques : alors ils éprouvent l'inquiétude du désir. L'amant s’agite; il se dresse, il étincelle, il brise les liens qui l'enveloppent et répand dans l'air, comme un léger nuage, l'esprit de vie qui l'anime; le zéphyr s'empare de cette vapeur parfumée : il la porte à l'épouse solitaire, qui la recoit dans son sein, tressaille de joie, acquiert une vigueur nou- velle, devient mère d’une postérité nombreuse et rend grâce à l'Amour de sa fécondité. J'en atteste ces Palmiers, symboles des hommes justes qui vivent sous leur ombrage.….". » Un demi-siècle plus tard, Van Royen eut un imi- tateur dans Érasme Darwin, l'aïeul du grand 1 La forme de ce discours étonne sans doute aujourd'hui, mais il ne faut pas oublier que nous sommes à une époque éminemment littéraire. I n'était pas rare alors de voir les professeurs de science faire leurs lecons en vers, et c'est ainsi que le même Van Royen, en prenant possession de sa chaire à Leyde, prononça un discours en vers latins sur l'utilité de la Botanique pour les études médicales. Aujour- d'hui, hélas! dans notre siècle utilitaire, nous voyons des académiciens poètes se croire obligés de faire leur discours de réception en prose. D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 19 Darwin. En 1789, ce médecin, qui fut considéré comme le plus célèbre des physiologistes que l'An- gleterre ait produits, publia sur le même sujet un poème en quatre chants. Cet ouvrage est écrit dans le même goût que celui de Van Royen; aussi, lorsque l’auteur parle de bergers, d'amants, de maris, etc., il faut en- tendre avec lui les étamines; comme il entend les pistils lorsqu'il parle de bergères, d'amantes et d'épouses. Malgré cela, et peut-être aussi à cause de cela, il est encore intéressant à lire ; il est même utile à consulter, pour les notes surtout qui accom- pagnent chaque poème; on y trouve les rudiments des grandes idées qui devaient illustrer, quelque soixante ans plus tard, le petit-fils de ce savant poète. La fin du xvui° siècle vit Kæœlreuter (cité par Sachs, p. 420, 1892) déterminer les fonctions réci- proques des différentes parties de la fleur et insis- ter déjà sur le rôle des insectes dans la fécondation; puis Conrad Sprengel (1793), un maitre d'école de Spandau, montrer que, dans l’état normal, la fécondation des plantes hermaphrodites est croisée, donnant ainsi, par là, une des bases positives à la sélection naturelle. Cependant, il restait encore beaucoup à faire pour le xix° siècle, surtout en ce qui concerne le fonctionnement même des organes sexuels; c’est ainsi que, en 1835, nous voyons Schleiden, un des auteurs de la théorie cellulaire, continuer à pro- fesser les errements d’Aristolte en soutenant que le grain de pollen est le véritable germe et l'ovaire la matrice où ce grain va se loger pour se transfor- mer en embryon. É D'un autre côté, on ne parlait encore de repro- duction sexuelle que pour les Phanérogames, c'est- à-dire pour les plantes à fleurs évidentes. On sa- vait bien que les Fougères donnent des spores et que, du développement de ces spores, sort une pe- tite lame verte, le prothalle. Mais on croyait que la spore était une graine véritable et on considérait le prothalle comme un cotylédon; c'est seulement en 1848 qu'un Polonais, le comte Lesczyc-Suminsky, découvrit, sur ce dernier, les éléments sexuels et que, l’année suivante, Hofmeister put établir le pa- rallèle actuellement connu entre la sexualité des Mousses, des Fougères et des Phanérogames. Il fallut attendre jusqu’en 1854 pour voir Thuret dé- montrer la sexualité des Algues en expérimentant sur des Fucus. Enfin Henschel (1820) en Allemagne, puis Clos (1854) en France, montraient que la dioïcité (on disait alors diclinisme) s'accompagne, chez les plantes, de caractères sexuels secondaires, analogues à ceux que l’on connaissait déjà chez les animaux. Dans un second article, nous poursuivrons l'étude de l’évolution des idées générales sur la sexualité au x1x° et au commencement du xx° siècle, G. Loisel, Préparateur d'Embryologie générale à la Faculté des Sciences de Paris. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE PREMIÈRE PARTIE : CONSTITUANTS DE L'ORGANISME. ALIMENTS. DIASTASES La présente revue est relative aux travaux de Chimie physiologique parus en 1904 et dans les derniers mois de l’année 1903. Çà et là, on a fait rentrer dans le cadre de cet exposé quelques tra- vaux antérieurs à celte période, mais qui se ratta- chaient étroitement à des recherches de l’année courante. Il est à peine besoin de dire que cette revue est loin de comprendre tous les travaux, ni même tous les travaux importants parus durant celle année, car il aurait fallu la condenser à un point tel qu'en fait elle eût été réduite à une simple énumération de Mémoires. Il à paru plus ulile de borner chaque année cet exposé à un certain nombre de questions, quitte à reprendre les autres les années suivantes, à l’occasion de quelque tra- ail nouveau. Ajoutons que, cette revue devant compléter la revue annuelle de Physiologie, on s'en est tenu ici au côté plus étroitement chimique des problèmes de la Chimie physiologique. I. — BIBLIOGRAPHIE. $ 1. — Périodiques. Revue de la Société scientifique d'Hygiène ali- mentare et de l'alimentation rationnelle de l homme. — Ce nouveau périodique publie le procès-verbal des séances de la Société du même nom, des mé- moires originaux, un index bibliographique et l'ana- lyse des travaux touchant aux questions d’alimenta- tion. Ont paru les trois premiers numéros du tome premier. Cette Société a été reconnue d'utilité publique, Asner et SpiRo : Ærgebnisse der Physiologie ; Biochemie, deuxième année, 689 p., Wiesbaden, pr E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 1903, et troisième année, 646 p., 1904. — Voici les sujels de quelques-unes des monographies conte- nues dans ces deux volumes: II. Échanges de ma- tière et d'énergie dans la nutrition (Speck). — For- mation des graisses (G. Rosenfeld). — Éliminalion des substances étrangères par les urines (A. Heffter). _— Matières colorantes de l'urine (Fr. N. Schulz). — Le lait (W. Raudnitz). — L'acide urique (H. Wie- ner). — Les échanges respiratoires (A. Jacquet). — Changements chimiques du muscle (0. von Kürth). — JL. Chimie des spermatozoïdes (IL. Bu- rian). — La putréfaction intestinale (D. Gerhardt). —— Physico-chimie des cellules et des lissus (W. Pauli). —- Dédoublement diastasique des graisses (Connslein). — Configuration stéréochi- mique et action physiologique (S. Fränkel). — L'azote dans les échanges nutritifs des plantes (F. Czapek). — Physiologie des pentoses et de | l'acide glycuronique (C. Neuberg). — La formation | des hydrocarbonés à partir de l’albumine (L. Langs- tein). — Nouvelles recherches sur les échanges de matière et d'énergie chez l'homme (0. Alwater). $ 2. — Traités généraux. M. Araus : Éléments de Chimie physiologique, Ze 6d., Paris, 1903, 441 p. Pu. Borrazi : Physiologische Chemie für Sludi- rende u. Aerzte: trad. all. de l'édition italienne, par Boruttau, 2 vol. de 316 el 336 p., Vienne, 1901-1901. —-L'ouvrage a été mis à jour par le traducteur. J. Carracino : Tratado de Quimica biologica, Madrid, 1903, 727 p. O. Hammarsten : Lehrbuch der physiologischen Chemie, 3° éd., Wiesbaden, 190%, 715 p. L. Hucouneo : Précis de Chimie physiologique | el pathologique, 2° éd., Paris, 1905, 626 p. M. Kassowrrz : Allgemeine Biologie; LIT : Stoff- und Kraftwechsel des Tierorganismus, Vienne, | — L'ouvrage entier comprendra | 1904, A volumes. G. MosseLmann et G. HeBranr : Chimie physiolo- gique, > 6d.. 4 vol., Paris, 1905. O. Snvoer : The chemistry of plant and animal life, New-York, 1903, 406 p. 412 P- $ 3. — Ouvrages spéciaux. E. ABDERHALDEN : Bibliographie der gesammten wissenschaftiichen Literatur über den Alkohol und den Alkoholismus, Berlin, 1904, 504 p. - O0. Connnerm : Chemie der Eiweisskürper, 2° éd., Brunswick, 1904, 315 p. E. From : Die chemischen Schutzmittel des Thierkôürpers bei Vergiflungen, Strasbourg, 1903, 92 p. G. GaLceran : La Spettrofotometria applicala alla Chimica fisiologica, Milan, 1903, 395 p. A. Gaurier : L'alimentation et les régimes chez l'homme sain et chez les malades, 2° éd., Paris, 1904, 660 p. J. Haweurcer : Osmotischer Druck und lonen- lehre in den medicinischen Wissenschaften, t. IL, Wiesbaden, 1904, 516 p. J. Kœnic : Chemie der mensehlichen Nahrungs- und Genussmittel, 4° éd., t. I, 1903, 1553 p: = L'ouvrage complet aura 3 volumes. 0. Lœw et Pozz-Escor : L'énergie chimique pri- maire et la matière vivante, Paris, 1904, 189 p. L.-G. Maizcanp : L'indoxyle urinaire et les cou- leurs qui en dérivent, Paris, 1905, 118 p. L. C. Marztarp, À. PRENANT et P. BoUIN : Traité élémentaire d'Hislologie, Paris, 1904. — L'ouvrage contient plusieurs chapitres d'histochimie et un grand nombre de renseignements d'ordre chimique incorporés aux descriptions histologiques. Mouneyrar : La purine et ses dérivés, Paris, 1904, 98 p. (Collection Scientia). C. OPPENnEIMER : Die Fermente und ihre Wir- kungen, 2° éd., Leipzig, 1905, 1 vol. M. Pozzr-Escor : La nature des diastases, Paris 1903, 114 p. M. W. Rauowz et K. Bascn : Chemie und Phy- siologie der Milch, Wiesbaden, 1903, 185 p. (Ex- trait du t. II des Ergebnine der Physiologie; Bio- chemie.) S 4. — Traités de Technique analytique appliquée” à la Chimie physiologique ou ouvrages pour l’en- seignement pratique. S. Frænkez : Praktischer Leilfaden der qualilali- ven und quanlitativen Harnanalyse (nebst Analyse des Magensaftes), Wiesbaben, 1904, 88 p. E. Gérarp : Traité des urines ; Analyse des urines considérée comme un des éléments du diagnostic, Paris, 1903, 492 p: À. Kicranr: Chemisches Praktikum für Mediziner, Munich, 1904, 67 p. A. Kossez : Leitfaden für medizinisch-chemische Kurse, 5° éd., 190%, TI p. J. A.et Th. Mizroy : Practical physiological Ghe- mistry, Londres, 1903, 214 p. F. Rosumaxn : Anleitung zum chemischen Arbei- ten für Mediziner, 2° éd., Berlin, 1904, 98 p. E. Senrr : Praktikum der Harnanalyse (nebst der bei der Harnanalyse angewandten chemisch-physi- kalischen Methoden), Vienne, 1903, 152 p. E. Seagru : Die chemische und mikoroskopisehe Untersuchungdes Harns,2° éd., Leipzig, 1903, 532p. II. — Les MATIÈRES PROTÉIQUES. Nos connaissances actuelles sur la constitution des matières protéiques ont été résumées dans celle M PTE D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 21 Revue d'abord par M. Kossel, puis par M. Hof- meister!, et, l'année dernière, M. Kossel a refait, devant la Société chimique de Paris?, l'exposé de ses idées sur cette question, problème fondamental et dont on peut dire qu'il est placé au seuil même de la Physiologie.— Nous passerons successivement en revue les protamines et les histones, puis les ma- tières albuminoïdes. $S 1. —- Protamines et histones. On sait que Kossel considère les protamines, extrailes par lui et par ses élèves des testicules de divers poissons, comme de petits albuminoïdes, des albuminoïdes simplifiés. Par là, il entend non pas que ces composés ont une molécule nécessairement plus petite que celles des albumines proprement diles, mais qu'ils sont institués par l'association d’un plus petit nombre d’entre les groupements que l’on trouve dans les albumines, ces groupements pouvant, d'ailleurs, se répéter un grand nombre de fois. Ainsi, dans une étude plus approfondie de la salmine, et au cours de laquelle 98,4 °/, de l'azote tolal de ce composé ont pu être retrouvés dans les produits d'hydrolyse, Kossel et Dakin” ont montré que cette prolamine ne contient que cinq groupe- ments qui sont : L° un groupe uréogène (guani- dine); 2 de l'acide diamino-valérianique, laréunion de ces deux groupes constituant l’arginine; 3° la sérine où acide 4-amino-B-oxypropionique; 4° de l'acide amino-valérianique; 5° de l'acide o-pyrroli- dine-carbonique. C'est la première fois qu'une matière du groupe protéique a pu être hydrolysée de la sorte, c'est-à-dire avec analyse de la totalité des produits formés. Pour la clupéine, il faut ajouter un sixième groupe, l’alanine. A l'occasion de ce travail, Kossel insiste à nouveau sur la nécessité qui s'impose d'étendre le sens chi- mique du mot albuminoïde, en faisant rentrer dans celte famille les protamines, et en constituant ainsi une série régulière de composés dont les premiers termes sont les protamines les plus simples, sa/mine et clupéine, les suivants, les protamines plus com- pliquées du groupe de la s{urine et de la cyclopté- rine, les histones venant faire ensuite la transition vers les matières albuminoïdes proprement dites. Au contraire, Hammarsten, O0. Læw, Hofmeister se ‘sont élevés contre ce qu'ils appellent une déviation regrettable du sens classique de cette dénomination. Le lecteur trouvera un résumé de ces critiques dans l'étude d'ensemble que Hofmeister a publiée sur les ! Numéros du 30 mai 1902 et du 15 mai 1903. 2 Séance du 30 mai 1903. % Kossez et Dakrix : Zeitsch. f. p. 565, 1903, et €. XLI, p. 407, 1904. 4 Cf. 1. Banc : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. IV, p. 331, 1904. physiol. Chem., t. XL, matières albuminoïdes dans l'ouvrage de Asher et Spiro (Ergebnisse der Physiologie, I, Biochemie, p- 797 et 801, Wiesbaden, 1902). Quoi qu'il en soit, l'étude des protamines continue à fournir des résultats très intéressants. Après avoir montré que le foie des Mammifères contient une diastase, l'arginase, qui dédouble rapidement l’ar- ginine en ornithine et en urée, Kossel et Dakin’ ont élabli que la clupéine, digérée pendant dix-huit mois avec un extrait d'intestin, est dédoublée en une prolone, la clupéone, en arginine, ornithine et urée et en d’autres produits. Or, cette clupéone ne fournit plus d’arginine par hydrolyse avec les acides, mais seulement de l'ornithine. Il semble donc qu'une diastase fournie par l'extrait intes- tinal a délaché de la molécule de la clupéine, c'est- à-dire d'un « petit albuminoïde », le groupement uréogène (guanidine), tandis que le complexe orni- thine n’a pas été touché. Ces recherches sur le dé- doublement diastasique des prolamines ont donc fait connaitre un nouveau mode de production de l'urée, dont les auteurs poursuivent l'étude avec des matières albuminoïdes proprement dites. Signa- lons encore, à propos des protamines, le travail de Kossel et Dakin sur les cyprinines, protamines nou- velles du sperme de carpe, et l’intéressante compa- raison que Hugounenq* a commencée entre les protamines spermaliques de Kossel et les albumines que l'on peut relirer des ovaires des mêmes espèces. L'ovaire de bareng a fourni une clupéovine, qui, par ses caractères et la nature de ses produits d'hydro- lyse, rentre dans la catégorie des albumines. Les différences dans les productions sexuelles mâles et femelles résident donc surtout dans la nature des matières albuminoïdes de ces productions. En ce qui concerne les histones dont il vient d'être queslion, notons que ce groupe, créé par Kossel, est en pleine évolution. On y à fait rentrer successivement des corps sans doute très différents, si bien qu'il est impossible d'en donner une défini- tion claire et précise. Dans la nouvelle édition du traité de Hammarsten, signalée plus haut, le lecteur trouvera (p. 49) un excellent résumé de l’état actuel de cette question. $ 2. — Matières albuminoïdes. 1. Nouveaux produits d'hydrolyse. Les polypep- tides et les k yrines.— L'étude du déboublement des malières albuminoïdes par divers agents (acides forts, diastases) a été activement continuée el a fourni un certain nombre de produits nouveaux. Par hydrolyse de la caséine avec les acides forts, et grâce à une modificalion de la méthode par étht- 1 Kossez et Daxin : Zeitsch. f. physiol. Chem., {. XL, p. 321, 1904, et t. XLIT, p. 181, 1904. 2 HucouxeNo : C. 2, t. CXXXVIIT, p. 1062. . 29 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE rification de E. Fischer’, Skraup* a obtenu tout récemment : 1° Des acides diamino-carboniques, à savoir un acide diaminoglutarique C'H°O'Az”, qui parait avoir été isolé à l’état de pureté, et un acide diamino-adi- pique CH"O'Az;, dont la formation n'a pas été net- tement démontrée ; 2° Des acides amino-polycarboniques, à savoir un acide amino-oxysuccinique C*HTOAz°, en très petite quantité; un acide contenant C*H"O'Az° et que l’auteur appelle provisoirement dioxy-amino- subérique; un acide tribasique C*H!OSAz?, l'acide caséanique, sans doute oxydiaminé; deux acides caséiniques isomères, C®H'O*Az’, dont l'un est inactif et l’autre dextrogyre. De tous ces produits, seuls les acides diamino- glutarique, caséanique et caséinique apparaissent en quantité notable (environ 1 °/, de la quantité de caséine et plus encore). On remarquera que ces ré- sultats enrichissent le groupe des acides oxyaminés gras, jusqu'ici uniquement représenté par la sé- rine*. Ce composé, d'abord isolé de la soie, a été trouvé depuis dans la corne, l'oxyhémoglobine, la sérum-albumine, el toutrécemment dans la caséine par E. Fischer et ses élèves". Ce groupe des acides oxyaminés est donc plus important qu'on ne l'avait cru jusqu'à présent. Dans ce clivage méthodique de la molécule, ce n'est pas tout d'isoler d’un mélange extrêmement complexe les produits qui ont pris naissance; il faut encore établir exactement la constitution de chaque fragment, vérifier celle-ci par une synthèse, s’il est possible, puis étudier les destinées dans l'organisme de chacun de ces produits et leur rôle dans la nutrition. Même quand ces fragments sont relativement petits, cette seconde partie de la läche arrête quelquefois les efforts des chercheurs pen- dant plusieurs années. C’est ainsi que de nombreux travaux se sont accumulés dans ces derniers temps sur des fragments de la molécule albumive, connus depuis longtemps, à savoir le groupe hydrocarboné, le groupe cystine et le groupe indol. 2. Le groupe hydrate de carbone. — La question du noyau hydrocarboné contenu dans les albumi- noïdes présente un intérêt tout particulier pour le physiologiste et le médecin. On sait qu'un grand nombre d'essais de nutrition sur des animaux tendent à établir que l’on peut obtenir une accu- Fiscaer : D. chem. Ges., t. XXXIV, p. 433, 1901. H. Skraup : Zeitsch. f. physiol. Chem., &. XLII, p. 274, 1904. 5 On pourrait ajouter iei l'acide tétra-0xy-amino-caproïque, extrait par Orgler et Neuberg de l'acide chondroïtine-sulfu- rique du cartilage (Zeïtschr. f. physiol. Chem., t. XXXVII, p. 407, 1903. — Voy. encore le présent exposé p. 24). 4 E. Fiscuer : Zbid., t. XXXIX, p. 154, 1903. Ste 2 Zn. mulation de glycogène dans le foie par une alimen- tation exclusivement albumineuse. D'autre part, les cliniciens ont remarqué que, si la suppression des amylacés dans la ralion fait disparaître le sucre chez beaucoup de diabétiques, il en est d’autres — représentant cliniquement les formes graves — chez lesquels l’excrétion du sucre se poursuit même avec le régime carné absolu, ou qui, avec un régime mixte, perdent pendant des semaines des quantités de sucre bien supérieures à celles qui peuvent provenir de la ralion ou des réserves de glycogène de l'organisme. Enfin, des chiens, privés des dites réserves par un jeûne pro- longé, excrèlent néanmoins des quantités notables de sucre lorsqu’on les intoxique par la phloridzine. D'où provient ce sucre? On a été conduit natu- rellement à le rapporter aux matières albuminoïdes. Mais faut-il admettre que le groupe hydrocarboné des albumines se détache simplement de ces der- nières pour donner du sucre, ou bien qu'il peut se faire aussi une consiruclion synthétique de sucre à partir d'autres fragments de la molécule? Pflüger avait admis la possibilité d'une telle syn- thèse, et l’on verra plus loin les recherches qui ont élé faites sur la produclion des sucres dans l'organisme aux dépens des amino-acides. Cr, voici que Pflüger vient de moüifier enlièrement, dans un article remarqué ‘, sa position dans cette impor- lanle question. Il n'entre pas dans le plan de celte revue de faire un exposé complet du côté physiologique de ce problème, mais simplement de montrer quels sont les arguments nouveaux que la Chimie physio- logique est en mesure de verser aux débats. Le lec- teur trouvera, d'ailleurs, la bibliographie complète de la question dans les deux études très étendues et d'une critique très pénétrante que Langstein * vient de consacrer à cette question et auxquelles nous empruntons le résumé qui suit: Voici d’abord les principaux arguments de Pflü- ger. À l’aide d'une nouvelle méthode de dosage — consistant essenlie'lement en une extraction par la polasse à 60 °/, et une précipitation à l'alcool — Pflüger montre que les réserves de l'organisme en glycogène sont bien plus abondantes qu'on ne l'avait admis jusqu'à présent, même chez l'animal qui a jeùné pendant longtemps et que l'on consi- dérail comme ayant consommé presque enlière- ment ses hydrates de carbone. En sus de ces réserves, l'organisme peut faire appel aux grou- pements hydrocarbonés que contiennent les ma- tüières protéiques et que Pflüger évalue en moyenne à 10 °/, du poids de ces matières, et il est vraisem- Przucer : Pfluüger's Arch., t. CII, fase. 1-II, 1906. ? Ascuer eb Sriro : Ergebnisse der Physiologie. — Bio- chemie, 1, 1902, p. 63, et III, 1904, p. 453. | | : D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 19 oS blable, dit-il, que nos lissus contiennent encore bien d'autres matériaux, à allures de glucosides, c'est-à-dire pouvant fournir du sucre par simple dédoublement. C’est là un inventaire qui est à peine commencé. Il faut admettre, jusqu'à preuve du contraire, que, dans l'organisme, « le sucre vient du sucre ». Tout le reste n’est qu'illusion prove- nant de dosages de glycogène inexacls ou de trom- peries de malades. « Il est plus facile de croire qu'un diabétique, possédé d'une effrayante envie de pain, a réussi à s’en procurer à l'insu du mé- decin, que d'admettre que des fragments de la moléeule protéique, tels que la tyrosine, l'indol ou le glycocolle, se transforment tout à coup en sucre par un coup de baguette magique. » Tel est le débat soulevé. On en peutrésumer ainsi le côté plus spécialement chimique : 1° Quelles sont la nature et la quantité des hydrates de carbone aui préexistent dans la molécule des protéiques? 2° D'autres noyaux contenus dans cette molécule peuvent-ils fournir du sucre dans l'organisme? En ce qui concerne d'abord les hydrates de car- bone fournis par les protéides, nous serons très brefs pour ce qui regarde les nucléo-protéides, dont le dédoublement fournit des pentoses. Les expériences faites sur la production du glycogène sous l'influence des ces composés n'ont encore donné que des résullats contradictoires‘. Le dédou- blement des mucines et des mucinoides fournit, au contraire, jusqu'à 35 °/, de corps sucrés, parmi lesquels on a isolé une hexosamine, étudiée pen- dant longtemps sous le nom de chifosamine et qu'une synthèse récente de E. Fischer et Leuchs? a identifiée avec un «-amino-glucose : CH°0H. (CHOH)*.CH.AzH”.COH. Le passage de cette amine au sucre correspon- dant n'exige qu'une substitution de OH à AzH”, réaction dont on pourrait citer de nombreux exemples”. Toutefois, la formation de glycogène aux dépens de la glucosamine n’a pas encore pu être démontrée *. Enfin, les matières albuminoïdes proprement dites contiennent aussi un groupe hydrocarboné, sur lequel Schutzenberger a fourni le premier des renseignements précis. Plus tard, on a extrait, sous la forme d’osazones, des corps sucrés d’un grand nombre de matières albuminoïdes, acidalbumine, ! Sazkowski : Zeitschr.f. physiol. Chem., t. XXXII, p. 393, 1903. — NeuserG et WogLGexuTa : 1bid., t. XXXV, p. 541, 1902. — Creer : Zeitsch. f. Biol., t. XLII, p. 440, 1902. ? Frscser et Leucas : D. chem. Ges., t, XXXVI. p- 2#, 1903. * Voyez, p. 24, l'exemple de la transformation in vivo de l’alanine en acide lactique. Voy. aussi les recherches de S. Lang sur la « désamidation » dans l'organisme (Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. V, p. 321, 1904). * P. Caracarr : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XXXIX, P- 423, 1903. fibrine, sérum-albumine, albumines végétales ; seule, la caséine a donné des résultats constam- ment négatifs. Mais les matériaux employés ne pré- sentaient pas, en général, de sérieuses garanties de pureté. C’est seulement dans ces dernières années que Langstein, Neuberg ont repris cette enquête avec des matières albuminoïdes cristallisées ou très soigneusement purifiées. De l’ovalbumine cris- tallisée, Langstein ‘ a retiré de la chilosamine (glu- cosamine), la quantité totale de corps sucrés, éva- luée à la liqueur de Febling, étant de 10 à 41 °/,. La même amine a été extraite de la conalbumine (partie non cristallisable de l'ovalbumine), de l’eu- globuline du blanc d'œuf (8,43 °/,), et de l’albu- mine du jaune d'œuf, où l’on a pu démontrer sa présence, à côté d'un autre groupement sucré, en la transformant par oxydation en acide norisosac- charique, l’autre groupe sucré donnant de l'acide saccharique”. La sérum-albumine a fourni aussi à Langstein de la glucosamine (0,5 °/,), avec un autre hydrate de carbone à caractère acide, et, de la sérum-globuline, le même savant a reliré du glu- cose, peut-être du lévulose, un amino-hexose qui est sans doute de la glucosamine et un hydrate de carbone acide, en tout environ 1,3 °/,. Toutefois, l'interprétation de ces résultats est encore délicate, comme le démontre un travail de critique et de vérification sorti récemment du laboratoire de E. Fischer. Le rendement en corps sucrés est très variable et l’on doit se demander si ces sucres font bien partie de la molécule des protéiques en ques- tion. Langstein * admet, d’ailleurs, lui-même que les globulines du sang transportent probablement avec elles du sucre retenu en combinaison plus ou moins lâche, ce qui complique singulièrement la question. On voit donc que l'enquête sur la qualité et sur la quantité des corps sucrés que les matières albu- minoïdes peuvent fournir directement par simple dédoublement est à peine commencée. Il est donc difficile d'affirmer, avec Pflüger, que la réserve d'hydrate de carbone contenue dans l’ensemble des matières protéiques de l’organisme peut être éva- luée à 10 °/, du poids de ces matières, et de con- 4 LanGsrein : /bid., t. XXXI, p. 49, 1900. ? Cette méthode par l'acide norisosaccharique est à signaler particulièrement, la chitosamine étant seule à fournir ce composé, tandis que la galactosamine (signalée aussi par F. N. Schulz comme produit dhydrolyse des albumines) donne de l'acide mucique, et l'acide glycuro- nique et le gulose, l'acide saccharique, trois acides dont la séparation est aujourd'hui facile (NeuserG et Wozrr : D. chem. Ges.,t. XXXIV, p. 3840, 1904). # LanGsteIx : Sitzungsber. d. kais. Akad. d. Wissensch. zu Wien, t. CXII, Ib, 1903, et t. CXIII, mars 1904. * ABDERHALDEN, BERGELL et DürpinGuaus : Zeitschr, £. phy- siol. Chem., t. XLI, p. 530, 1904. 5 LaNGsTEIN : Zhid., L. XLII, p. 171, 1904. © LS D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE clure ensuite que ces 10 °/, suffisent pour expliquer les pertes en sucres du diabétique ou de l'animal phloridziné (Langstein). C’est là évidemment une hypothèse gratuite, et l'embarras où nous laisse, dans cette question capitale pour la physiologie de la nutrilion, l'insuffisance des données chimiques, montre une fois de plus que la tâche la plus proche qui s'impose à la Chimie biologique, c'est de continuer son enquête sur la composition des lissus et organes et sur la conslitution chimique des principes immédiats de ces tissus. Seul un inventaire chimique approfondi de l'organisme fournira un terrain solide aux constructions de la Physiologie. Passons maintenant à la seconde des deux ques- | lions posées plus haut, à savoir si d’autres frag- ments de Ja molécule albumine peuvent être invo- qués comme producteurs de sucre in vivo. On est directement conduit à examiner cette hypothèse par ce fait que les quantités de sucre excrétées par certains diabétiques ou des animaux phloridzinés est si grande que, visiblement, elles ne peuvent être couvertes ni par les réserves en glycogène, ni par les fragments hydrocarbonés des protéiques de l'organisme !. Au surplus, Mohr” vient de constater que les diabétiques recevant de la caséine, où le groupe hydrate de carbone fait défaut, exerètent plus de sucre qu'avec l’ovalbume, qui en fournit de 40 à 11°/,. On s'est donc tourné vers d’autres pro- duits de dédoublement, et notamment vers les amino-acides en C° et en Cf, à savoir l’alanine et la leucine. En ce qui concerne l'alanine, sa facile transfor- mation en acide lactique par l’action de l'acide nitreux (E. Fischer) la met en relations chimiques | directes avec le groupe des sucres, l’acide lactique étant la forme tautomère de l’aldéhyde glycérique, dont la condensation fournit facilement du glu- cose. Les formules suivantes résument ces trans- formations. CH*.CHAZH?.COOH CH*.CHOH.COOH CHEOH.CHON.COH Alanine. . Acide lactique . Adéhyde glycérique. . On connaît enfin les nombreuses relations biolo- giques qui existent entre l'acide lactique et le glu- cose (fermentation laclique, etc.,. L'expérience physiologique semble confirmer ces prévisions théoriques. Ainsi, F. Krauss' a constaté que, chez des chats maintenus en étal d'inanition et recevant de la phlorétine, la quantité 1 Voyez sur ce point le récent exposé de F. Krauss (Berl. klin. Wochenschr., 1904, n° 4, p. 4) où se trouvent réunis quelques cas cliniques et expériences de laboratoire ty- piques. ? Monr : Zeitschr. f. klin. Med., t. LI, mai 1904. # F. Krauss : Berl. kiin. Wochenschr., {. XXI, p.5, 1904. de sucre excrélée par les urines (addilionnée de la quantité de glycogène qui subsiste dans les organes au moment de la mort) est plus forte lorsque les animaux reçoivent de l’alanine (5 gr. par jour pen- dant six jours). Ces résultats confirment ceux de Neuberg et Langstein ‘, qui ont observé une accu- mulation de glycogène dans le foie chez des lapins ayant recu 20 à 30 grammes d’alanine après onze jours de jeûne. De plus, l'urine renfermait de notables quantités d'acide lactique, qui, théorique- ment,apparaît comme terme de passage nécessaire de l'alanine aux corps sucrés. Pour la /eucine, une grave objection théorique avait été mise en avant tout d'abord : c’est l'exis- tence d’une chaîne bifurquée dans ce composé. Mais F. Müller a fait remarquer avec raison que l'acide saccharique ou acide tétra-oxycaproïque, qui dérive du glucose ou du lévulose par simple action de la chaux, possède la même chaine bifurquée que la leucine, et Langstein, après avoir montré que l'acide tétra-oxy-amino-caproïque, récemment isolé du cartilage par Orgler et Neuberg”, prend de ce chef une importance biologique considérable, établit la série que voici : CH°0H CoOoNH CH°0H CH°OH | | | [ CHOH CH.AzH* CH.A7H° CHOH | | | CHOH CI CHOH CHOH | | | | CHOH CH COH COH | / Pan pi CHOH CHS CH* CH* COON CH° COOH | CHO Leucine. Acide tétra-0xy- Acide Glucose. aminocaproïque. saccharique. Théoriquement, le passage de la leucine au glu- cose apparait donc comme fondé; et plusieurs expériences plaident, au point de vue physiolo- gique, dans ce sens. Ainsi, dans un cas de dia- bèle à forme grave, avec une perte quotidienne de 49 à 63 grammes de sucre, Mohr ajoute à la ration 20 grammes de leucine par jour, et il cons- tale que l’excrétion de sucre monte aussitôt à 12-75 grammes par jour, pour relomber, après la suppression de la leucine, à 55-39 grammes. Si ce mode de production du sucre dans l'organisme élait définitivement démontré, la leucine apparai- trait comme une des plus importantes sources de sucre de l'économie, car, si les albumines ne donnent guère que 3 à 4 °/, d’alanine, elles four- nissent, au contraire, jusqu'à 45 °/, de leucine. D’autres amino-acides seraient encore à étudier ou à reprendre à ce point de vue, par exemple 1 NeugerG et LanGstTEIN : Arch. f. Anat. u. Physiol., Physiol. Abt., 1903, p. 514. ? ORGLER et NEUBERG t. XXXVII, p. 407, 1903. 5 L. Mour : Zeitschr. f. klin. Med., t, LII, fase. 3-4, 1904. Zeitschr. f. physiol. Chem., D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 25 l'acide aspartique, déjà expérimenté à plusieurs reprises, et les acides oxy-aminés et thio-aminés, tels que les deux cystéines (voy. plus loin) et la sérine ou acide 4-amino-8-oxypropionique, dont les rela- tions avec l’alanine et l'acide lactique sautent aux veux. Enfin, d'après Neuberg et Silbermann !, ces acides oxy-aminés font la transilion in vitro et constituent peut-être les termes de passage in vivo entre les diamino-acides (lysine) et les sucres. On ne peut qu'indiquer ces relations: elles suffiront pour montrer combien sont nombreux Îles pro- blèmes qu’elles soulèvent au point de vue expéri- mental. Ce sont les deslinées dans l'organisme de toute cette foule de produits de dégradation de l'albumine qu'il faudrait poursuivre pas à pas. 3. Le groupe eystine. — La Revue à rendu compte récemment (numéro du 30 avril 1903) des travaux de Friedmann sur la constitulion de la cystine (de la corne et des cheveux). Il résulle de ces recherches que l'ancienne formule de Baumann, qui faisait de la cystéine un acide xx-amino-thiolac- tique, doit être abandonnée et remplacée par le schéma CH?SH.CH(AzH*).COOH, c’est-à-dire que la cystéine devient l'acide 4&-amino-B-thiolactique, et par conséquent la cystine, le disulfure du dit acide. Mais voici que K.-A.-H. Mürner*, le savant suédois auquel on doit la découverte de la cystine parmi les produits d'hydrolyse des protéiques, a trouvé que la eystine donne, par réduction suivie d'hydro- lyse, des produits de dédoublement dont les uns (ammoniaque et acide &-thiolactique) feraient de la eystéine l'acide a-thio-B-amino-lactique, tandis que les autres (hydrogène sulfuré et alanine) en feraient, au contraire, l'acide &-amino-B-thiolac- tique. Comme, d'autre part, Friedmann a pu trans- former la cystine en acide B-thiolactique, on est conduit à cette hypothèse que la cystine éludiée contenait à la fois les deux complexes +-amino-f- thiolactique et B-amino-o-thiolactique. Cette conclusion est à rapprocher de ce fait annoncé par Neuberg et Wohlgemuth*, à savoir qu'il faut distinguer deux cystines, celle des calculs urinaires avec S en « et AzH° en 8, et celle des matières albuminoïdes avec S en 8 et AzH° en &. Il sera intéressant aussi de connaitre de pius près la cystine synthétique obtenue récemment par M. Erlenmeyer jun. ‘, en partant de l’éther formyl- hippurique, el qui contient S en 8 et AzH° en «. On voit donc que la queslion du noyau ceysti- 1 NEUBERG et SILBERMANN : D. et 341, 1904. > K.-A.-H. Moerxer : Zeïtschr. f. physiol. Chem., t. XLII, p. 349, 1904. Cité d’après WouLGemuTa : Zbid., t. XL, p. 82, 1903. » # ERLENMEYER JUN : D. chem. Ges.; {. XXXVI, p. 2720, 1903. chem. G., t. XXXVII, p. 339 nique des matières albuminoïdes se complique non seulement par l'existence de stéréo-isomères, annoncée dès le début par Môrner, mais encore par celle d'isomères de structure. Notons ici que l'acide a-thiolactique, signalé de divers côtés comme un produit primaire de la décomposition des albu- mines, résulte, d'après Mürner, d’une action secon- daire de l'hydrogène sulfuré, abandonné par la eystine, sur l'acide pyruvique, qui figure également parmi les produits de l'hydrolyse des protéiques. Cet acide est aussi un produit de réactions secon- daires non encore élucidées !. 4. Le groupe indol. — La constitution du groupe indol dans les matières albuminoïdes à également été remise en question tout récemment. Il y a longtemps que l'on a isolé, des produits de la putréfaction des albumines, quatre composés con- tenant le noyau indol; ce sont l'indol, le scatol, l'acide scatolcarbonique et l'acide scatolacétique. Comme substance mère de ces produits dans l’albu- mine, Nencki admettait l'existence d'un groupement d'acide scatol-amino-acétique : C— CH°(8) UN CH C.CH(AzH®).COOH(a). NE AzH On supposait que cet acide engendre les quatre produits en question par des transformations que l'on rapprochait volontiers de celles qui, dans la putréfaction de la tyrosine, conduisent au phénol, au p-crésol, à l'acide p-oxyphénylacélique et à l'acide p-oxyphénylpropionique. Naturellement, les acides scatolcarbonique etscatolacétique recevaient des formules correspondantes, mais sans que la position attribuée aux chaines latérales fut véri- fiée*. L'hypothèse de Nencki parut recevoir une con- firmation définitive, lorsque Hopkins et Cole * iso- lèrent des produits de la digestion pancréatique de la caséine un corps répondant à la formule brute de l'acide scatol-amino-acélique et qui, soumis à l'action de bactéries variées, fournissait les divers produits de putréfaction du groupe de l'indol. En même temps, le corps en question présentait les réactions du {ryptophane où protéinochromogene, c'est-à-dire de ce corps inconnu que l'eau bromée colore et précipite en violet et que Nencki et d’autres ont considéré comme la substance mère des matières colorantes de l'organisme. Mais, contre celte formule de l'acide scatolcarbonique, et par 1 K.-A.-H. Moerwer : Zeitschr. f. physiol. Chem., LM. 0 D 1 A p. 121 et 365, 1903. 2 Cf. A. EcuwGer : D. chem. Ges., t. XXX VII, p. 1801, 1904. 3 Ho»kns et Coce : Journ. of Physiol., &. XXVII, p. #8, 1901, et XXIX, p. 451, 1905. 26 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE conséquent contre celle du tryptophane lui-mème, plaidait très fortement ce fait que l’acide scatolcar- bonique de synthèse, pour lequel Wislicenus et Arnold ‘ont établi la formule : C — CH* CH: C— COOH, ÿ AzH n'est pas identique à l'acide de putréfaction, lequel se confond, au contraire, comme l'a démontré Ellinger”*, avec l'acide indol-Pr-3-acétique*, tel au'il est obtenu synthétiquement par soustraction d'ammoniaque à la phénylhydrazone de l'acide 8-aldéhydo-propionique (ou mieux de l’éther mé- thylique de cet acide) : CH° — CH? —CO0.CH C— CH°—COO.CH* AN CHR ICH Nù AzH Avec l’ancienne formule du prétendu acide sca- tolcarbonique de putréfaction tombe done aussi la formule du tryptophane de Nencki. Parmi les nouvelles hypothèses que l'on peut faire touchant la constitution de ce dernier, il en est une que l'on peut adopter provisoirement avec Ellinger, parce qu'elle repose sur une expérience physiolo- gique intéressante. Le tryptophane ajouté à la ration d'un chien provoque une hausse immédiate de la quantilé d'acide cynurénique de l'urine, et les rendements par rapport à la dose ingérée sont si considérables, qu'il n'y a pas lieu, quant à présent, d'admettre pour l'acide cynurénique, dans l'organisme du chien, une autre source que le tryp- tophane. Or, l'acide cynurénique est, d'après la synthèse de Camps”, l'acide y-oxy-5-quinoléine- carbonique. Il suit de là que, des quatre formules que l'on peut imaginer pour le tryplophane, la plus probable est celle qui rend compte de sa transformation en un dérivé quinoléique, soit done la suivante : ! WiSLICENUS et ARNOLD Ann. d. t. CCXLVI, p. 334, 1886. ? A. EzuixGer : Loc. cit. 3 Le préfixe Pr, employé dans l'expression ci-dessus, in- dique que la substitution acétique est faite dans le noyau pyrrolique et les numéros d'ordre 1,2, 3, désignent les trois sommets libres de ce noyau. 4 Ainsi s'explique une observation de Glærsner et Langs- tein (Beïitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. 1, p. 34, 1902), qui, en faisant ingérer à des chiens certaines fractions des produits de l’autodigestion du pancréas, avaient cons- taté une augmentation considérable de l'acide cynurénique dans l'urine. D'autre part, l'extirpation du pancréas chez le chien diminue énormément ou même annule l'excrétion d'acide cynurénique. 5 R. Cawrs : Zertschr. f. physiol. Chem., t. XXXIII, p.390, 1901. Liebig's Chem., HAz CH? : Az CH ; CH — CON CT NS c.c00H jee CH LE GA | JE Get Ge à | G Ü(OH) NN /CH CHX CH # A7zH CH Tryptophane. Acide cynurénique. Le tryptophane serait done un acide indol-ami- nopropionique, comme l'avaient d’abord soupçonné MM. Hopkins et Cole. Nous reviendrons plus loin sur les relations de ce composé avec l’indoxyle uri- naire et l'acide cynurénique. Ne retenons ici que la conclusion à tirer de ce travail relativement à la constitution des malières albuminoïdes. On admet en général dans ces matières la préexistence d’un noyau pyridique. La nouvelle formule attribuée au tryptophane et la lendance de ce composé à en- gendrer un noyau pyridique par fermeture de sa chaine latérale rendrait cette hypothèse superflue. Enfin, c’est à ce noyau du tryptophane qu'il faut altribuer, d'après Cole’, un certain nombre de réactions colorées des matières albuminoïdes. Ainsi la réaction de Liebermann (coloration bleue obtenue en faisant bouillir avec de l'acide chlor- hydrique fumant de l’albumine lavée à l’alcool et à l'éther) est due à l'action du tryptophane, résultant de la décomposition de l'albumine, sur l'acide M glyoxylique que l’éther commercial apporte tou- jours comme impureté. La réaction du furfurol (coloration rouge pourpre par chauffage de l'albu- mine avec de l'acide chlorhydrique fort et du sucre ou du furfurol) est également une réaction du tryplophane, comme aussi celle de Reichel (colora- tion bleu foncé par chauffage de l’albumine avec une goutte de chlorure ferrique et un peu d’une aldéhyde aromatique comme la benzaldéhyde). AUTRES CONSTITUANTS DE L'ORGANISME. SUBSTANCES DIVERSES. I. $ 1. — Arsenic La méthode par laquelle A. Gautier a découvert en 1899 l'arsenic normal dans les tissus de l'homme et des animaux est d'une exactitude telle qu'elle permet de trouver ce métalloïide mème quand il n'en existe qu'une partie sur 50 à 100 millions de fois le poids de l'organe examiné, par exemple, un millième de milligramme perdu dans 100 gram- mes de foie ou de muscle. Mais elle est d’une application délicate, et surtout elle emploie une série de réaclifs qui, lous, contiennent une trace d'arsenie, soit pour 100 à 150 grammes de tissus à traiter à peu près de 0%", 0005 à Os, 001, donc près de un millième de milligramme. Enfin, cette méthode est en défaut dans certains cas. 4 S.-W. CoLe : Journ. of. Physiol., t. XXX, p. 311, 1903. D° E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 2 1 Celle que A. Gautier emploie aujourd'hui est d'une sensibilité plus prodigieuse encore, puis- qu'elle permet de relrouver et de mesurer une quantité d’arsenic représentant la milliardième partie de la masse mise en traitement. En voici le principe : Lorsque, dans une solution arsenicale quelconque, on ajoute, après neutralisation, du sulfale ferrique, pur d'arsenic, et qu'on porte à l'ébullition, l’arsenic de la liqueur est entrainé en totalité par le sel ferrique qui se précipite à chaud, et cet entrainement est si parfait que l'on peut retrouver et doser ainsi, par exemple 1 millième de milligramme ajouté à 1 litre d'eau pure ou salée, et même chargée de matières organiques. Le sel de | fer précipité est simplement dissous dans l'acide sulfurique, et cette solution est introduite dans l'appareil de Marsh. A l'aide de cette méthode, A. Gautier a pu s’assu- rer que l'arsenic n'est pas universellement con- tenu dans toute cellule vivante à la façon du phos- phore, par exemple. Ainsi le sang normal n’en renferme pas. La viande des mammifères n'en contient que 0°£°, 0006 à O0, OO1 (pour 100 gr. de substance fraiche), quantité infime si on la compare à celles que fournissent des poids égaux | de corne (0,200 à 0%", 500). Les feuilles vertes de choux, les haricots verts n'ont pas donné de trace d’arsenic. A. Gaulier calcule que la ration moyenne du Parisien renferme 0%£', 02097 d'arsenic par jour ou 7%, 66 par an, dont la majeure partie est apporlé par le vin, l’eau de boisson et le sel marin. G. Bertrand en a trouvé également dans l'œuf des oiseaux ‘. Notons encore que G. Bertrand ? a proposé l’em- ploi de la bombe calorimétrique de Berthelot pour la destruction des tissus dans lesquels on doit rechercher l’arsenic. Il est cerlain qu'on évite ainsi l'emploi de tout réactif (acides sulfurique et azotique, hydrogène sulfuré) pouvant apporter de l'arsenic. Ségale a pu refaire la démonstration de Ja pré- sence de l’arsenic dans les organes animaux en utilisant une réaction biologique extrêmement sen- | r£cemment acquises touchant l'adrénaline, prin- sible, décrite par Gosio, et qui consisle à observer l'odeur alliacée particulière produite par le déve- loppement de certains penicilliums (P. brevicaule) sur des liquides contenant une trace d'arsenic. Mais il faut, au préalable, décomposer le tissu par autolyse, de ‘façon à mettre l'arsenic sous forme accessible au penicillium”. A. Gautier : C. R. de la Société de Biologie, t. LV, p. 1025 et 1076, 1903. — A. Gautier et P. CLaussyaxx : Ibid, t. LVII, p. 55, 4904 — G. Bzrrraxo : Ann. de l'Institut Pasteur, t. XVII, p. 516, 1903. ? G. BertRaND : Comples rendus de l'Acad. des Sciences, juillet 1903. $S 2. — Iode, fer et chaux. D'après Justus, l'iode serait, au contraire de l'ar- senic, un élément constituant de toute cellule ani- male. Déjà A. Gautier, Bourcet et d’autres obser- vateurs avaient démontré, d'ailleurs, la grande diffusion de l'iode dans la nature. En employant des quantités suffisantes de malière première, Jus- tus a pu déceler de l'iode dans tous les organes. Les quantités varient (en cenlièmes de milli- grammes et pour 100 gr. d'organe frais) de 976 (glande thyroïde) à 11 (intestin grêle). Schmey a fait de même une révision des dosages du fer dans les organes ou lissus animaux, principa- lement dans le tissu musculaire rouge et blanc. La séparation et la pesée du fer avaient lieu à l'état de phosphate ferrique. On sait que ce procédé donne aisément des résultats trop forls, et que, pour de petiles quantités de fer, la valeur relative de cet excès peut devenir énorme (Lapicque).— Enfin, on doit à Toyonaga de nouvelles recherches sur la répartition de la chaux (et de la magnésie) dans divers organes. En ce qui concerne la présence dans l'organisme d'autres corps simples non encore recherchés mé- thodiquement, nous ne ferons que signaler ici le travail de Quinton sur « l'eau de mer, milieu organique », et dans lequel l'auteur défend cette thèse que, l'eau de mer ayant constitué primitive ment le milieu vital de tous les êtres vivants, les | organismes supérieurs tendent encore de nos jours à maintenir à leurs cellules un milieu vital intérieur de composition analogue à celle de l’eau | de mer, conséquemment qu'il faut s'attendre à trouver dans ce milieu {ous les corps que l'on ren- contre dans l'eau de mer, jusqu'au brome, au manganèse, au cuivre, à l'or, ele... Le lecteur trouvera dans ce travail un exposé complet de toutes les constatations faites jusqu’à ce jour dans ce sens”. à $ 3. — L’adrénaline. Nous placerons ici quelques données importantes | cipe actif des capsules surrénales. Tout d'abord, 3 Gosio : D. chem. Ges.,t. XXX, p. 1024, 1897. — SÉGALE: | G. Bertrand vient d'établir d'une facon définitive la formule de ce composé. Ayant extrait de 118 ki- logs de capsules surrénales de cheval 125 grammes d'adrénaline, Bertrand a divisé 110 grammes de ce produit, dissous dans de l'acide sulfurique normal, en une cinquantaine de fractions, par des précipi- Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XLII, p. 135. — HaAUSMANX : Beïtr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. V, p. 397. 1904. 1 Jusrus : Arch. de Virchow, t. CLXXVI, avril 1904 — Scasex : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XXXIX, p. 215, 1905. — Quinron: L'eau de mer, milieu organique. Paris, 1904 — ToxonaGA : Biochem. Centralbl..t. 11, p. 641, 1904. 28 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE tations successives au moyen de l’ammoniaque, et il a analysé quatre ou cinq fractions éloignées les unes des autres. Toutes les analyses ont été con- cordantes et ont conduit à la formule d'Aldrich, C'H°Az0*, en accord avec le poids moléculaire que G. Bertrand a établi par cryoscopie. Quant à la constitution du composé, elle est déjà presque entièrement élucidée. Le fait capital, observé par Takamine el précisé par O. von Fürth, est la production d'acide protocatéchique par fusion de l'adrénaline avec les alcalis. On est donc en présence d’un dérivé de la pyrocatéchine avec une chaine latérale grasse dont la position est connue, mais sur la constitution de laquelle on discule encore. Les deux formules les plus probables sont les suivantes, proposées par Pauly : OH — CH (OH) — CHE. Az11— CH° oH | AN — CII (AZH. CH). CH2OH Un récent travail de Friedmann tendrait à faire admettre plutôt la première”. IV. — ALIMENTS. — RATIONS. — DÉPENSES D'ÉNERGIE DANS LES ORGANISMES. La question de l'alimentation de l'homme sain et malade vient d’être exposée d'une facon magis- trale et complète par A. Gautier dans l'ouvrage cité plus haut (voy. Bibliographie). Dans un ordre d'idées analogue, il nous faut | citer ici, comme ouvrage d'ensemble, le traité de M. Rubner* sur les lois de la dépense de l'énergie pendant la nutrilion, et dans lequel ce savant résume, avec les travaux d’autres observateurs, les résultats des recherches personnelles poursuivies par lui sur cette question pendant près de vingt ans. Il nous est impossible de donner ici un exposé d'ensemble des travaux faits dans cette direction. On se bornera donc à l'indication de quelques questions. Les physiologistes et les hygiénistes continuent à se préoccuper de la détermination des quantités minimum de chaque aliment nécessaires à l’entre- tien de la vie. La question du besoin minimum d'al- 1 G. Berrranp : Bull. Soc. chim. (3), t. XXXI, p. 1188, 1904. — O. von Fürra : Sitzungsber. d. k. Akad. d. Wis- se»sch, in Wien; math.-naturwiss. Klasse, t. CXIT, Abt. III. | bumine, si importante théoriquement et pratique- ment, a surtout élé agitée. Dans les milieux médi- caux où, depuis quelques années, on est frappé des inconvénients d'une alimentation trop riche en matières azotées, on tend à admetlre que des quantités d'albumine notablement inférieures à 1 gramme d’albumine par kilogramme et par jour (par exemple, 0 gr. 75 environ) seraient suffisantes, et cetle conclusion est appuyée surlout sur des expériences physiologiques d'équilibre azoté ou sur des sujels isolés. Au contraire, A. Gautier‘ maintient la nécessité d’un apport d’albumine plus élevé (environ 1 gr. 27 par kilogramme et par jour), et il déduit cette conclusion principalement de la consommation moyenne d’albumine par la population parisienne pendant vingt ans, mode d'observation empirique, dont il a tout récemment, une fois de plus, justifié l'emploi et démontré les avantages. Maurel” a fait aussi l'évaluation approximative des quantités minima de divers aliments minéraux nécessaires à l'entrelien de la vie. Par kilogramme de poids vif et par jour, il faut fournir : pour la potasse, 0 gr. 06 chez l'adulte et O0 gr. 07 chez le nourrisson; pour la chaux, environ 0 gr. O1 chez l'adulte et 0 gr. 034 chez le nourrisson; pour la magnésie, 0 gr. 005 chez l'adulte et 0 gr. 0065 chez le nourrisson; pour l’acide phosphorique, 0 gr. 04 à O gr. 05. En ce qui concerne la mesure des dépenses d'énergie de l'organisme, remarquons d'abord que la méthode de la bombe calorimétrique de Ber- thelot est maintenant d'un usage courant dans un grand nombre de laboratoires de Physiologie, tant pour l'évaluation directe de la valeur calorifique de la ralion que pour la mesure des quantités d'éner- gie emportées par les excrétions, urine et fèces. Les excréments sont traités après dessiccation. Quant à l'urine, on la fait absorber au préalable par de pelits blocs de cellulose proposés par Kellner, de valeur calorifique connue; on dessèche le tout à 60°, puis on brûle dans la bombe ; mais on peut aussi comburer directement l’urine dessé- chée. D'intéressantes recherches ont été faites ainsi sur la valeur calorifique du lait de femme, des fèces de nourrissons sain et malade, elc.”. La bombe calorimétrique a servi aussi à mesurer { A. GauriER : ltevue de la Soc. scientif. d'hygiène ali- ment. etc., t. I, p. 117, 1904 — G. Bonnet : Bull. de thérap., décembre 1900. — Laumonier : Ibid., t. CXLVII, p. 197. — Maurez : C. R. de la Soc. de Biol., t. LV, p. 1281, 1903. 2 MauUREL : C. R. de la Soc. de Biol., t. LV, p. 1282, 1903, mars 1903. — Pauzy : D. chem. Ges., t. XXXVI, p. 2944, | et t. LVI, p. 706 et 751, 1904. 1903. — FRIEDMANN : Beitr. z. chem. Physiol. u. Path., * Voyez notamment : ScuLossmanx : Zeïtschr. physiol. t. VI, p. 92, 1904. | Chem.,t. XXXVII, p. 324, 1903, et Berl. klin. Wochenschr., ? Roëxer : Die Gesetze des Energie Verbrauchs bei der | t. XL, n° 12, 1903. — K. Farkas et M. Koneuzy : PAlügers Ernährung, Leipzig et Vienne, 1902, 426 p. Arch., t. CIV, p. 564, 1904. — F. TanGz : Zbid., p. 453. D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE la dépense d'énergie qui accompagne des phéno- | des Bancels et $. Lalou ont montré dans une série mènes d'ordre très délicat, comine ceux du déve- loppement des embryons. Tangl a montré que le contenu d'un œuf de poule, au début et à la fin du développement, possède respectivement une valeur calorifique moyenne de 91 et de 75 (grandes) calo- ries. Comme, pendant ce temps, l'œuf n’a perdu | que de l'eau et de l'acide carbonique, c'est-à-dire des corps non combustibles, la différence, soit 16 calories, représente l'énergie qu'a coûté le développement de l'embryon. D'autre part, la perte de poids de l'œuf a été d'environ 9 gr. 87, dont 1 gr. 55 de matériaux solides. Si l'on divise le nombre de calories dépensées (16 cal.) par le poids de matières solides disparues (1 gr. 55), on obtient un quotient qui oscille entre 9 et 10 calories, c’est- à-dire qui représente à peu près la valeur calori- fique de 1 gramme de graisse. Ce sont donc sur- tout les graisses du jaune d'œuf qui ont fourni l'énergie nécessaire au développement. Tangl et ses élèves ont étudié aussi la dépense d'énergie correspondant aux divers stades de la vie du ver à soie et au développement d'œufs de poisson (truite). Enfin, Rubner a évalué de même l'énergie que coûte le développement de certains micro-orga- nismes ‘. V. — LES ACTIONS DIASTASIQUES. $ 1. — Lois générales. Continuant ses études” sur les lois d'action des diastases, assimilées aux agents catalytiques, N. Henri a établi, avec Larguier des Bancels, une méthode générale dite de combinaison, qui repose sur la mesure des vitesses de deux réactions cata- lytiques isolées et de leur mélange, par exemple les vitesses de l’inversion du saccharose et de la sapo- nification de l’acélate de méthyle par un acide, étudiées d'abord séparément, puis dans un mélange de saccharose et de l’éther. Celte étude permet de décider si l’on est en présence d’un seul calalysa- teur ou de deux catalysateurs et de dire quel est le mécanisme intime.de la catalyse, c'est-à-dire s’il y a catalyse pure par simple présence (cas de l’action des acides sur le saccharose, par exemple) ou catalyse médiate, avec combinaisons intermédiaires (cas des actions diastasiques). A l’aide de cette méthode, et en mesurant les vitesses d'action par la détermination des variations de la conductibilité électrique, V. Henri, Larguier LETANGL .: Pflüger’s Arch, ft. XCIIT, p. 327, 1903: — Farxkas : Zbhid.,. t. XCNIII, p. 490, 1903. — F. Tanez et K. Farkas : Zbid, 1. CIV, p. 624, 1904. — M. Rugxer : Arch. f. Hygiene, t. XLVIII, p. 260, 1904. -* Vicror HER» : Lois générales de l'action des diastases, Paris, 1903. de Notes : 4° que l’action de la trypsine sur la caséine et sur la gélatine (laquelle appartient au groupe des catalyses médiates) résulle de l'action d'une seule diastase protéolytique et non de deux diastases différentes; 2° que, dans l’action de l'émulsine sur l’amygdaline et sur la salicine, c'est aussi une seule et même diaslase qui intervient de part et d'autre, et, de plus, que, dans cette cata- lyse médiate, ce n’est pas la partie de la diastase demeurée libre qui produit la transformation, mais c'est la combinaison intermédiaire entre le fer- ment et le glucoside, qui se décompose en donnant naissance aux produits de la réaction”. $ 2. — Hydrolyse diastasique des polysaccharides et des glucosides. Bourquelot a montré que, -dans cette question dont la complexité parail augmenter de jour en | jour, on peut dès à présent énoncer quelques règles générales qui permettent de classer sans effort un nombre considérable de faits actuellement très confus : 1° Pour hydrolyser les hexobioses du glucose droit, de facon à revenir aux deux molécules de glucose, il faut autant de diastases différentes qu'il y a de combinaisons (Bourquelot et Hérissey). Ainsi le maltose, le tréhalose, le gentiobiose, le touranose sont respectivement hydrolysés par la mallase, la tréhalase, la gentiobiase et la fouranase. Etant donné ce que nous savons de l’individualité des diastases, on conçoit quil doive en être ainsi, car, dans ces divers isomères, le mode de liaison entre les deux molécules de glucose étant très différent, il est nalurel que l'agent de dédoublement soit chaque fois différent ; 2 Pour dédoubler chacun des hexobioses que le glucose forme lui-même avec d’autres hexoses, il faut aussi un ferment particulier. Ainsi le saccha- rose, le lactose et le mélibiose sont respectivement dédoublés par l’invertine, la lactase et la mélibiase; 3° En ce qui concerne les hexotrioses, qui résul- tent de la combinaison des hexobioses avec des hexoses, on conçoit que la diastase, qui allaque un hexobiose donné à l'état de liberté, l'attaque encore dans la molécule de l'hexotriose qui le con- tient; mais il n'y aura séparation que d'une des deux molécules constituant cet hexobiose, l’autre restant combinée au troisième hexose de l'hexo- triose. Ainsi, dans les hexotrioses qui dérivent du sucre de canne, dans le gentianose par exemple, l'invertine décroche une molécule de lévulose, et laisse la molécule de glucose combinée avec la troi- 4 C. R. de la Soc. de Biol.,t. LV, p. 563, 187, 865. et 866. 188, 189, 864, 30 D° E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE sième molécule du triose, c'est-à-dire avec une autre molécule de glucose, sous la forme de gen- tiobiose. Pour achever l'hydrolyse, il faut faire intervenir une deuxième diastase, qui sera une diastase des hexobioses, dans l'exemple choisi, la | gentiobiase. 4° De même, pour l'hydrolyse totale des hexoté- troses et plus généralement des polysaccharides de plus en plus condensés, il faut faire intervenir au- tant de diastases que le polysaccharide renferme de molécules d'hexoses, moins une. Comme il n'est pas impossible qu'une même diastase intervienne plusieurs fois (dans le cas où le polysaccharide renfermerait plusieurs groupements d'un même | hexobiose, par exemple le mallose), on pourrait énoncer ainsi la règle ci-dessus : L’hydrolyse inté- grale d'un polysaccharide exige autant d'actes dias- tasiques différents que ce composé renferme de molécules sucrées moins une. Enfin, avec les hexotrioses et Les polysaccharides plus condensés apparaît une autre notion impor- tante, à savoir que, dans l’'hydrolyse d'un polysac- | charide, les ferments doivent agir successivement et dans un ordre déterminé. Ainsi, dans l’hydrolyse du gentianose, l'invertine dédouble d'abord ce sucre en lévulose et en gentiobiose, puis intervient la gentiobiase qui décompose le gentiobiose en deux . molécules de glucose. L'hydrolyse des mannanes de la graine de Phœænix canariensis, des mannanes du corrozo, étudiée aussi par Bourquelot et Hé- rissey, constitue une nouvelle confirmation de cette règle. Des règles analogues peuvent être établies pour les glucosides*. $ 3. — Diastases diverses. Continuantses recherches sur les diastases réduc- trices et oxydantes des tissus”, Abelous est arrivé, avec Aloy, à cette conclusion que ces deux agents sont une seule et même diastase, à la fois oxydante et réductrice. En effet, l’air et l'oxygène entravent également l'oxydation de l'acide salicylique et la réduction des nitrates par l'extrait aqueux de foie. L'influence de la température, celle des substances empêéchantes (sulfhydrate et sulfocyanate d'ammo- niaque, nicotine), présentent un parallélisme frap- pant; enfin, les organes qui fournissent les extraits les plus oxydants donnent également les extraits les plus réducteurs. Cette réduction est sans doute une hydrogénation, car la iransformation de la nitrobenzine en aniline par les tissus, la réduction 1 E. Bourquecor : C. R. de la Soc. de Biol., t. LV, p. 386, 1903. — BourqueLor et Hérissey : Zbid., L. LV, p. 567 et 699, 1903. 3 ABeLOuS et GÉRARD : C. R., €. CXXIX, p. 56, 164 et 1023. — AseLous et BrarNÈs : Arch. de Physiol., &. XXX, p. 664. de l'acide picrique en acide picramique, précé- demment établie par Abelous et Gérard, sont sou- mises aux mêmes conditions que l’activité de cette diastase oxydo-réductrice. Les extraits végétaux (suc de pomme de terre) possèdent aussi ce pou- voir. Cette double réaction d’'oxydation et de réduction peut être démontrée en partant des corps les plus variés. S'inspirant d'une observa- tion de Bourquelot, Girard et Ricquié viennent encore de la reproduire avec la morphine, que la macéralion du rein de cheval transforme en oxy- morphine, ce produit pouvant être inversement ramené à l’état de morphine dans le sein du même liquide". Un grand nombre d’autres travaux sur les oxy- dases seraient à citer ici, notamment la série déjà longue des recherches publiées en 1903 et en 1904 par Bach et Chodat dans le Pulletin de la Société chimique de Berlin, sur les oxydases et les peroxy- dases et leur rôle dans la cellule vivante. Notons aussi le débat qui s’est élevé au sujet du philo- thion de Rey-Pailhade, dont Abelous et Ribaut nient l'existence, la transformation du soufre en hydrogène sulfuré étant, d’après ces auteurs, non une action diastasique, mais un phénomène pure- ment chimique. Sans vouloir trancher ici la ques- tion de l'existence de la diastase hydrogénante de Rey-Pailhade et de Pozzi-Escot, il est de fait que le dégagement d'hydrogène sulfuré produit par le mélange de fleur de soufre et de blanc d'œuf ou de divers tissus ou liquides (foie, rein, sang, lait) n'est pas suspendu par l’ébullition, ni gêné par le fluorure de sodium. Cette action, qui s'épuise au bout d’un certain Lemps, et qui, dans le blanc d'œuf, accompagne la fraction de l’ovalbumine cristallisée, peut être obtenue aussi avec beaucoup de corps sulfurés (benzilmercaptan, thiophénol, acide thioglycolique). C’est donc bien une action purement chimique {Hausmann et Hefter*). La /evue a rendu compte des travaux de Connstein, Hoyer et Wartenberg sur la présence, dans les graines de ricin d'un agent capable d'opérer presque quantitativement Je dédoublement des matières grasses en glycérine et en acides gras (numéro du 30 mars 1903, p. 298). Nicloux a reconnu que cette propriélé lipolytique si remar- quable est exclusivement réservée au cytoplasma, à l'exclusion de toutes les autres parties de la graine. Une partie de ce cytoplasma supposé sec saponifie en trente minutes (en présence d'acide 1 AseLous et ALoy : C. R. de la Soc. de Biol., &t LV, p. 1M, 891 et 1535, 1903, et t. LNI, p. 222, 1904, — GÉRARD ef RicQuIE : Zbid., t. LVI, p. 904, 1904. * AgeLous et RipauT : Bull. Soc. chim,. t. XXXI, p. 698, 1904. — M. Hausuanx et A. Herrter : Beitr.z.chem. Physiol. u. Pathol., t. V, p. 213, 1904. D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 31 acétique dilué et à 20°) cinquante fois son poids d'huile, dans la proportion de 80 °/;. Une telle activité fait penser immédiatement à une action diastasique, ainsi que l'ont cru, d’ailleurs, dès le début la plupart des auteurs. De fait, Nicloux a montré que l’action de la température, la constance d'action du eytoplasma, l’action des produits de la réaction, la proportionnalité entre la quantité de cytoplasma et la quantité d'huile saponifiée, la loi qui exprime la vitesse de saponification, font appa- raitre un parallélisme complet entre le cyloplasma | et les diastases, invertine, émulsine, amylase, trypsine, mallase. Et pourtant cet agent se dis- tingue de toutes les diastases (ou ferments solubles) actuellement connues par ce fait qu'il n’est pas soluble dans l’eau, qu'il est même instantanément détruit par l’eau pure ou l'eau acidulée, dès qu'il n'est plus protégé par l'huile. En effet, un mélange : cytoplasma + huile + eau est le siège d'une sapo- nification régulière, tandis que dans un mélange : cytoplasma + eau acidulée + huile, cette dernière n'est point saponifiée. Le caractère de solubilité dans l’eau ne serait donc pas pour les diastases un caractère spécifique‘. L'étude des lipases d’origine animale à été pour- suivie aussi de divers côlés. Un exposé complet de cette question a élé fait récemment par Connstein — dont le nom vient d’être cilé plus haut -— dans les Ærgebnisse der Physiologie”, avec une biblio- | graphie complète, ne comportant pas moins de 151 mémoires. Et voici à peu près comment conclut l’auteur, spécialiste en la matière : L’exposé qui précède fait ressortir, dit-il, un contraste frappant entre le nombre des faits établis d'une manière définitive et celui des publications qu'on vient de citer. Partout des contradictions et des contro- verses, même en ce qui concerne les phénomènes 1 M. Niczoux : C. R. de la Soc. de Biol., t. LVI, p. 701,702, 839, 840 et S68, 1904. ? AscHer et Spiro : Zrgebnisse der Physiol. Biochemie, t. IN, p. 194-232, Wiesbaden, 1904. essentiels, si bien que, sur la base des faits actuelle- ment décrits, loute construction est impossible, puisque lout ce qui est fondamental vacille et tremble. Ce jugement nous dispense d'insister ici davantage. En ce qui concerne la {echnique des recherches sur les diastases, dont l'étude exige qu’on se mette à l'abri de l'intervention des ferments figurés, il convient de rappeler ici que, d'après Ch. Richet, le chloroforme et le benzène n'arrêtent d'une manière durable la fermentation lactique que s'il y a émul- sion complète de ces agents, employés simultané- ment, avec le liquide étudié. Il ne faudrait donc pas croire que la simple addition de l'un ou l’autre de ces anliseptiques mette dans tous les cas à l'abri des actions bactériennes, comme on l’admet d'ordi- naire implicitement. Dans l'intéressante question des /oxines et anti- toxines, qui jusqu'à présent est restée toute entière sur le terrain de la Physiologie pathologique, il convient de signaler le travail de Ch. Richet? sur la thalassine, poison pruritogène et corps cristalli- sable extrait des lenlacules des Actinies et qui possède un notable pouvoir antitoxique contre l'autre poison tentaculaire des Actinies, la conges- tine. La thalassine contient 10 °/, d'azote ; elle n'est précipitée ni par l'acide phosphotungstique, ni par l'iodure de potassium iodé, ni par le chlo- rure de platine ou le nitrate d'argent. Les divers précipités et le charbon animal l’entrainent très facilement. C'est la première fois que l’on a isolé une antitoxine à l’état de pureté. Dans un deuxième article, nous passerons en revue les travaux relatifs à la digestion, au sang et à l'urine D° E. Lambling, Professeur à la Faculté de Médecine de Lille, 4 Cu. Ricuer : C. R. de la Soc. de Biol., t. LVI, p. 26, 1904. 2 Cu. Racaer : Zbid, t. LV, p. 246, 707 et 1071, 1905. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ANALYSES 1° Sciences mathématiques de Larminat (E.). — Topographie pratique de Reconnaissance et d'Exploration, suivie de No- tions élémentaires pratiques de Géodésie et d'Astro- nomie de campagne. — À vol. in-8° de 340 pages et 138 figures. Ch. Lavauzelle, éditeur. Paris, 1904. Le capitaine de Larminat, professeur-adjoint de Topo- graphie à l'Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr, fait paraitre, sous le titre de : Topographie pratique de Reconnaissance et d'Exploration, un véritable traité de figuré du terrain et de détermination des positions géo- graphiques, qui est appelé à rendre les plus grands services à tous ceux qui auront, soit à parcourir des régions entièrement inconnues, Soit à établir la carte provisoire ou de reconnaissance d’un territoire où n'existeraient encore que des itinéraires. L'ouvrage est divisé en trois parlies. Partant de ce principe fondamental et absolument exact, que, pour pouvoir rendre avec vérité les formes du terrain (surtout dans les conditions rapides où l’on est forcément obligé d'opérer en exploration dans les pays d'occupation récente), il faut avoir des notions précises sur les lois physiques et mécaniques qui ont présidé à leur modelé, l’auteur expose ces dernières en quelques pages, d'une facon très claire, quoique sommaire; il insiste prin- cipalement sur les lois de l'érosion. Cette première partie se termine par quelques conseils pratiques pour la représentation du terrain par ses courbes de niveau, où l’on insiste sur les deux points très importants suivants : l’ordre à suivre dans le dessin des formes du terrain et la généralisation de ces dernières. Des figures très claires accompagnent tout cet exposé et nous ne pouvons regretter qu'une seule chose, l'absence de figurés de terrain pris dans les régions désertiques du sud de l'Algérie et de la Tunisie, qui auraient pu donner au lecteur une idée des effets de l'érosion dans les terrains très spéciaux qu'il pourra être appelé à rencontrer souvent, particulièrement en Afrique. La seconde partie est consacrée aux procédés et aux méthodes de topographie de reconnaissance. L'auteur y examine successivement l'itinéraire, opération élé- mentaire de la topographie de reconnaissance, son premier pas, pour ainsi dire, puis le lever expédié proprement dit, quis’appuie sur une triangulalion topo- graphique et qui forme en quelque sorte la seconde étape des levés en pays nouveau. Quel que soit le pro- cédé que l’on emploie, il faut mesurer des longueurs et relever des azimuts; les différentes méthodes et les différents instruments à utiliser suivant le cas sont décrits successivement avec tous les détails de pratique qu'a enseignés à l’auteur une longue expérience, dont il veut bien ici faire profiter ses lecteurs. Nous signa- lerons, en particulier, l'emploi très recommandé des abaques, et la discussion des erreurs de fermetures inévitables dans les cheminements d'exploration, qu'il ne faut pas envisager de la même manière qu'en topo- graphie régulière. A remarquer également la partie consacrée à l'établissement d’un canevas de nivellement au moyen du baromètre anéroïde. La troisième partie, la plus importante à notre avis, traite des éléments de géodésie de reconnaissance. Chacun, en effet, pourra, avec de la conscience, de la méthode et un peu d'habitude, exécuter un lever topo- graphique suffisant; mais presque tous les explorateurs, s'imaginant à tort que la pratique de la géodésie et de l'astronomie de position demande des connaissances mathématiques déjà élevées, s'éloignent de cette étude, BIBLIOGRAPHIE ET INDEX au détriment des travaux qu'ils exécutent à grand renfort d'énergie et de fatigue. Le mérite essentiel de l'ouvrage de M. de Larminatest d'avoir mis à la portée de tous, les procédés qui peuvent être employés tant pour la géodésie de campagne que pour la détermination des positions astronomiques. Il n’est personne qui, possédant simplement des notions élémentaires de géométrie et de trigonométrie, avec un peu de pra- tique des calculs logarithmiques, ne puisse suivre les exposés et les développements de l’auteur, tant ils sont clairs, simples et méthodiques. Les procédés géodé- siques et astronomiques sont exposés en vue surtout de l'explorateur, toujours pressé: on à cherché à pro- portionner partout les précautions, les calculs, les réductions, ete., à l'ordre de précision que l’on peut attendre d'un instrument ou d'une manière de faire déterminée; enfin, des exemples numériques, pour chaque méthode et pour chaque cas, achèvent de faire de cette partie du volume un ensemble sur lequel on ne saurait trop attirer l'attention. Nous signalerons, au nombre des chapitres les plus intéressants, celui qui est relatif à la méthode des droites de hauteur pour obtenir simultanément l'heure du lieu et sa latitude, particulièrement bien exposé, et celui où l'auteur traite du choix de la méthode astronomique à employer, des erreurs et des cir- constances favorables; M. de Larminat y montre, d'une facon simple et exclusivement géométrique, l'influence des erreurs commises, soit dansles observa- tions, soit dans l'évaluation des éléments estimés, sur le résultat d'une opération astronomique, mettant ainsi les opérateurs en garde contre une trop grande con- liance dans leurs résultats, obtenus souvent dans des circonstances peu favorables par la force même des choses. En résumé, ce livre comble une véritable lacune; il est indispensable à tous ceux qui sont appelés à s'oc- cuper de levés dans les pays nouveaux, et sera Ju, en outre, non seulement avec intérêt, mais aussi avec fruit, par tous ceux qui s'occupent des sciences géogra- phiques. R. BourGeois, Membre correspondant du Bureau des Longitudes, Chef de la Section de Géodésie au Service géographique de l'Armée. Sidén (Per), Directeur de scierie. — La pratique des Machines à bois. — 1 vo/. grand 1n-8° de 340 pages et 8 figures. (Prix : 12 fr. 50.) Veuve Dunod, éditeur, Paris, 1904. La littérature des machines-outils à travailler les bois est, malgré le grand intérêt que présentent ces ma- chines, des plus pauvres; aussi devons-nous accueillir avee une faveur spéciale tout ouvrage de quelque valeur qui vient y contribuer. Tel estle cas dulivre de M. Sidén, écrit par un praticien, clairement et sans prétention, pour l'usage de praticiens, auxquels il sera du plus grand secours dans une foule de difficultés profession- nelles. Ces difficultés, M. Sidén, directeur d’une importante scierie, s’y attaque presque chaque jour, et c'est le résultat d'une expérience attentive et prolongée qu'il met à la disposition de ses collègues et, en général, de tous ceux qui emploient les machines à bois. Ce n’est pas un traité de ces machines, qui fait encore défaut dans notre littérature technique, mais une sorte de recueil de conseils pratiques, donnés par un homme qui en a, lui-mème, éprouvé la valeur, et ces sortes de recueils sont trop précieux et rares pour que l’on hésite à féliciter du sien M. Per Sidén. G. RicHarp. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 39 2° Sciences physiques Rinne (E.). — Le Microscope polarisant. Guide pratique pour les études élémentaires äe Cristal- lographie et d'Optique. Traduit et adapté aux no- tations françaises par L. PERVINQUIÈRE, docteur ès sciences, chef des travaux pratiques de Géologie à la Sorbonne, avec une préface par M. A. DE LAPPARENT, membre de l'Institut. —1 vol. petitin-8°, vi-160 pages. (Prix : 5 francs). Rudeval, éditeur, Paris, 1904. L'emploi du microscope polarisant, malgré les puis- sants moyens d'investigation qu'il fournit dans les recherches chimiques, minéralogiques, pétrographi- ques, etc., est encore relativement restreint. Cela est surtout dù à ce que le maniement de cet instrument exige des connaissances variées de Cristallographie et d'Optique, disséminées dans de gros traités, dont la lecture n’est à la portée que d’un nombre restreint de lecteurs et qui, en tout cas, demande beaucoup de temps. L'usage du microscope polarisant devient cepen- dant de plus en plus indispensable ; aussi, depuis trois ou quatre ans, plusieurs guides permettant de s'initier facilement et rapidement aux études microscopiques ont été publiés en Allemagne. M. Pervinquière à choisi celui de M. Rinne, professeur à l'Ecole technique supérieure de Hanovre, pour en faire une traduction. Cette dernière, très claire, adaptée aux notations fran- aises, va rendre de grands services aux étudiants rançais. Ce petit ouvrage est, en effet, un excellent guide pour les débutants et surtout pour ceux qui ne sont pas versés dans les études d'Optique physique. L'action des cristaux sur la lumière y est étudiée d’une facon très simple et, en outre, de nombreuses figures schématiques aident le lecteur à se faire une idée suf- fisamment précise des phénomènes optiques pour comprendre l'emploi des diverses opérations utilisées dans la détermination des propriétés des substances cristallisées. P. GAUBERT, d Docteur ès sciences, Assistant de Minéralogie au Muséum. Benedicks (Carl). — Recherches physiquesetphy- _ sico-chimiques sur l’Acier au carbone. — 1 vol. grand in-8° de 1x-215 pages avec 28 photogrammes. C. J. Lundstrôm, éditeur. Upsala, 1904. Cette thèse de l’Université d'Upsal est écrite en fran- çais, et en un français très correct. L'auteur a pris des aciers industriels formant une série continue où la teneur en carbone va de 0,8 à 1,70 °/, et a soumis ses échantillons, naturels, recuits et trempés, à tous les procédés connus d'investigation physique; il en a déterminé la structure microsco- pique, la densité, la dureté, la résistance électrique, les propriétés magnétiques. D'après les résultats de l'analyse micrographique, les aciers au-dessus de 0,5 °/, environ de carbone contien- draient moins de perlite que n’en indique le calcul pour un mélange de perlite et de fer pur, et la ferrite S'y colorerait plus vite par les réactifs que celle des aciers plus doux. L'étude de la densité montre que le volume spéci- fique du fer pur, déterminé par extrapolation en par- tant des aciers d’une certaine dureté, est plus petit que le volume spécifique mesuré directement sur le fer et les aciers doux. Ces mesures de densités permet- traient le dosage du silicium et font soupçonner l’exis- tence de deux carbures différents. Le module d'élasticité décroit nettement à mesure que la teneur en carbone augmente; il est moindre dans les aciers trempés que dans les mêmes aciers recuits. ; La dureté à été déterminée par la méthode de Brinell, c'est-à-dire par le diamètre de l'empreinte laissée par la pression d'une bille d'acier sphérique sous une charge donnée, et cette méthode elle-même a été soumise à un examen attentif. Les résultats peuvent être rendus indé- pendants du rayon de la bille à condition de multiplier le REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. chiffre de dureté par la racine cinquième de ce rayon, et de diviser, comme le fait d’ailleurs Brinell, la pres- sion totale par la surface sphérique de l'empreinte. On pourrait aussi s'affranchir de l'influence de la pression totale et arriver à des chiffres absolus. Les expériences sur les aciers indiquent un accroissement brusque de la dureté quand la teneur en carbone passe par une valeur de 0,50 °/, environ. Des quantités équivalentes de manganèse et de silicium font croître de la même quantité le chiffre de dureté, mais cet accroissement n'a pas lamême valeur selon que la teneur en carbone est inférieure ou supérieure à 0,50. L'influence du car- bone de trempe est plus grande que celle du silicium ou du manganèse. Les solutions solides équiatomiques où le fer joue le rôle de dissolvant ont même résistance électrique, quel que soit le corps dissous. La résistance électrique per- met donc d'évaluer dans un acier la teneur en carbone de trempe. Même dans les aciers recuits, cette teneur ne serait pas nulle : elle augmenterait avec la teneur en carbone total de 0 à 0,15 dans les aciers doux el se fixerait à 0,27 dans les aciers durs. Au point de vue magnétique, un acier peut ètre com- plètement caractérisé par l'intensité magnétique dans un champ suffisamment intense et par le champ coer- citif. Le carbone de trempe fait diminuer l'intensité, qui s’annulerait pour une teneur de 1,60, exactement comme l'a trouvé M. Guillet par un procédé tout différent. Le manganèse, du moins au-dessous de 5 °/,, produit le même effet en proportions équivalentes. Le champ coercitif, au contraire, est beaucoup plus influencé par le carbone de trempe que par le manganèse. En discutant ses résultats et les comparant à tous ceux qu'il a pu rassembler, M. Benedicks arrive à cette conclusion que le fer n’est pas au même état molécu- laire dans les aciers doux et dans ceux qui contiennent plus de 0,50 °/, de carbone, cela après recuit. Dans ces derniers, le fer contiendrait 0,27 °/, de carbone en s0- lution solide et serait à l’état 6. L'auteur propose de le désigner du nom de « ferronite ». Le fer 5 pourrait donc exister sous deux états, magnétique et non ma- gnétique : il ne serait pas dur naturellement, mais il aurait une tendance particulière à le devemir par le fait de la dissolution de corps étrangers. Cette thèse est nouvelle et hardie. On peut trouver qu'elle n’est pas étayée de preuves absolument convain- cantes et que les faits observés pourraient recevoir des interprétations différentes. Nous risquons d’être envi- ronnés, dans ces études de métallurgie scientifique, de facteurs encore inconnus et dont nous ne soupcon- nons pas l'influence. Il faut cependant convenir que M. Benedicks a brillamment soutenu ses idées. Son tra- vail expérimental est fait avec le plus grand soin; il connaît admirablement la littérature scientifique et la discute avec autant de lucidité que de linesse et de sens critique. Pourses débuts, il a fait preuve d’une vé- ritable maîtrise. Il donne beaucoup déjà à la science métallurgique : il lui promet davantage. F. Osmonn, ; Ancien Ingénieur aux Usines du Creusol. 3° Sciences naturelles Gallois (Eugène). — Au Japon (Impressions de voyage). - { vol. in-12 de 98 pages. Librairie Orien- tale et Américaine, Paris, 1904. « Au Japon », ce sont les étapes d'un touriste. Volontairement, M. Gallois n'a pas arrêté ses regards sur les événements, pour conserver à ses impre de voyage toute leur sérénité, et, à défaut de Fin-octavo docte et savant qu'il pouvait nous donner, il a écrit cent pages alertes, vivantes, d’une lecture toujours attrayante. Le livre est trop vite fermé : cest un reproche que lon ne saurait adresser à tous les auteurs. M. Gallois se fera pardonner celte coquel- terie en nous laissant profiter, le plus souvent possible, des souvenirs qu'il a recueillis dans bien des régions du globe. LEUR j** Ssions 34 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES: ET INDEX Laurent (J.), Professeur à l'Ecole de Médecine de Reims. — Recherches sur la Nutrition carbonée des Plantes vertes à l'aide de matières orga- niques. — 1 vol. 1u-8° de 127 pages avec T planches hors texte. Le Bigot frères. Lille, 1904. Tandis que l’utilisation des substances organiques azotées par les végétaux est aujourd'hui démontrée, au moins dans ses grandes lignes, on ne savait jusqu'ici que fort peu de chose relativement au rôle joué par le carbone organique dans les phénomènes de la nutri- tion. Seuls, les travaux de Bæhm, Meyer, E. Laurent et Acton avaient en quelque sorte tracé la voie aux cher- cheurs, en montrant que des plantes ayant épuisé leurs réserves à l'obscurité, placées sur une solution con- centrée de glucose, de saccharose ou d’autres hydrates de carbone, reconstituent l’amidon qu'elles contenaient avant l’étiolement. Les recherches de M. Laurent ont été entreprises en vue de généraliser les résultats fort incomplets des pre- miers expérimentateurs. A la suite de nombreux tätonnements, l’auteur fixe d’abord les règles qui doivent présider à la stérilisation préalable des graines sans nuire d’une manière sensible à leur pouvoir germinatif. Bien que les conditions de cette stérilisation varient avec la nature des graines et la perméabilité de leurs téguments, on peut admettre en général qu'un résultat convenable est obtenu par immersion des graines pendant une heure et demie dans une solution de sublimé à 1/500, suivie d’un lavage à l’eau stérilisée. Bien entendu, cette stérilité devra toujours être contrôlée par des ensemencements sur des milieux nutritifs convenables. Les graines mises en germination par M. Laurent étaient disposées sous des cloches tubulées stérilisées, au-dessus d'un flacon renfermant la solution nutritive choisie, ou mieux de telle sorte que les racines vinssent plonger dans un flacon de Woolf permettant de si- phonner le liquide de culture et de l’analyser sans déranger l'appareil. Les essais destinés à servir de lypes eurent lieu dans les liquides de Knopp ou de Detmer, les autres dans des solutions de glucose, de dextrine ou de saccharose, sur de l’empois d’amidon ou sur de l’humate de potassium. Dans la plupart des cas, le Maïs à servi de plante d'expé- rience. M. Laurent à constaté que les racines de Maïs ab- sorbent des poids notables de glucose, dont une partie intervient dans les combustions respiratoires et le reste est utilisé pour augmenter la proportion de matière sèche de la plante ou pour la formation d’amidon dans les feuilles. Le saccharose est interverti lentement par les racines de Pois et de Maïs; cette interversion doit être plus notable dans le corps de la plante; en tout cas, le sac- charose contribue à augmenter le poids sec des végé- taux maintenus à l'obscurité. É La glycérine est un aliment très favorable pour le Pois et la Lentille, qui lemploient à la production d’'amidon. L'amidon soluble formé pendant la stérilisation à 120° d'un empois d’amidon ainsi que la dextrine peuvent être absorbés en petite quantité par les racines; une faible proportion peut s'hydrolyser sous l'influence des diastases exosmosées par les graines en germination ; mais, avec les plantes développées, ce phénomène n'a plus lieu, l'amylase et les dextrinases n'étant en aucun cas rejelées au dehors. Quant à l’humus, dont la valeur alimentaire a été si ‘discutée, il agirait en modifiant les échanges gazeux, à la manière des engrais minéraux, et en activant l’assi- milation du carbone. Son importance individuelle comme aliment carboné est faible. Considérées au point de vue de leur influence sur l'aspect extérieur ‘et la structure des végétaux, les substances organiques étudiées n'occasionnent aucune modification lorsqu'elles sont à l’état de solutions étendues. Concentrées, elles provoquent un retard dans l'allongement de la tige et de la racine, une augmen- tation de l'acidité du suc cellulaire. Avec les liqueurs isotoniques, on observe des différences portant sur l'aspect extérieur, la composition du suc cellulaire et la valeur du poids sec. En terminant, M. Laurent fait remarquer qu'il y à encore un certain nombre d'autres substances orga- niques dont le rôle nutritif à pu être envisagé : le tannin, les acides organiques, l'alcool, etc. Leur étude se présente naturellement à l'esprit et nous espérons que, dans un avenir prochain, M. Laurent apportera dans ce sens de nouveaux résultats. Nous signalerons aussi dans cet ordre d'idées l'emploi des moisissures comme plantes d'expérience, emploi qui se justifie par la rapidité de leur croissance, leurs grands besoins de matériaux nutritifs, ainsi que la facilité avec laquelle on peut les cultiver aseptiquement. Mais il est évident que le travail de M. Laurent n’est que le premier d'une série assez longue pour laquelle nous lui souhaitons le succès que présagent les premiers résultats qu'il a déjà obtenus. j L'ALUT, ù Professeur agrégé à l'École Supérieure de Pharmacie de Paris: Binet (A.), Directeur du Laboratoire de Psychologie physiologique de la Sorbonne. — L'étude expéri- mentale de l’Intelligence. — 1 10/. in-8° de 309 pages (Prix : 6 fr.). Schleicher frères et Cie, édi- teurs, Paris, 1904. Par sa méthode et par ses conclusions, ce livre semble être une critique de l'Ecole psycho-physiolo- gique à laquelle appartient l'auteur. CGette Ecole n'accorde aucune importance à la méthode introspec- tive; elle ne tient compte que des expériences qui révèlent un rapport entre une excitation physique et une réaction psychique ou des statistiques qui résument les observations prises sur un grand nombre de sujets. M. Binet estime, au contraire, que la méthode objective ne donne aucun résultat si l'introspection n'y est pas jointe; il pense qu'on peut expérimenter sur des esprits sans avoir recours à une excitation physique; il pré= fère aux statistiques portant sur de nombreux sujets l'observation attentive de quelques individus. Son livre est le résumé et l'interprétation d'observations et d'expériences faites pendant trois ans sur deux jeunes filles de sa famille. Voici un exemple des expériences purement psychologiques auxquelles il les soumet : il les invite à écrire vingt mots, puis leur demande : « Quel est le sens de chaque mot? », « Comment chacun a-t-il été suggéré? » On voit que cette expé- rience, utile pour l'étude de l’idéation et de l’asso- ciation des idées, n’exige aucun instrument de labo ratoire. Cette méthode conduit M. Binet à des hypothèses qui, si prudemment qu'elles soient émises, n’en contre disent pas moins nettement les dogmes de la Psycho= logie expérimentale. Celle-ci admet volontiers qu'il n'est pas de pensée sans image; M. Binet montre par des exemples que l’image n’accompagne pas toujours l'idée et lui est rarement adaptée. Les psychologues empiristes soutiennent souvent que l’idée générale n'est qu'une image générique formée à la facon des portraits composites de Galton; M. Binet prouve que, d'une part, cette hypothèse est gratuite, et que, d'autre part, elle est contredite par certains faits. La Psychologie expérimentale s'efforce de découvrir les lois générales de la vie mentale; M. Binet prend à tâche de révéler la variété infinie des types individuels : ses deux sujets, pris dans le même milieu, élevés de même façon, ayant même hérédilé et presque mème âge, sont pour- tant doués de facultés intellectuelles tout opposées. Ainsi, sans revenir à la psychologie des éclectiques, sans renoncer à la précision des méthodes expérimen- tales, M. Binet rompt les barrières dans lesquelles s’enfermait jusqu'ici la Psychologie scientifique et réin- troduit dans la science un certain nombre de procédés BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 3 co De et de notions qu'on s'élait trop pressé d’exclure. Nous n'avons aucune objection à diriger contre cel élargissement de la Psychologie expérimentale. Les seules réserves que nous pourrions exprimer viseraient des détails. Nous avons souvent regretté, par exemple, en lisant les expériences sur les associations d'idées, que tous les documents recueillis par l’auteur ne soient pas versés au débat : M. Binet n'en donne que ce qui l'intéresse, mais ils paraissent être de nature à inté- resser à d'autres points de vue les psychologues. Nous regrettons aussi que l’auteur n'ait pas recherché pour- quoi ses deux sujets sont si différents; il ne suffit pas de constater ces différences et il n’est pas scientifique de les attribuer à je ne sais quelle tournure d'esprit innée et irréductible ; il serait intéressant de savoir si la constitution physique est aussi différente que l’intel- ligence de ces deux jeunes filles. Enfin, M. Binet nous déclare qu'il a cessé de les observer quand il s'est aperçu que leur caractère se transformait: n'est-ce pas à ce moment qu'il fallait surtout les étudier, afin de connaître les causes de celte métamorphose? Nous voyons par un détail (p. 227) qu'en changeant d'âge l'un des sujets modifie son attitude intellectuelle et prend celle de son aïnée ; n'était-ce pas une indication propre à suggérer des recherches sur les causes des variations individuelles? La nature même de ces pro- blèmes montre l'intérêt du nouveau livre de M. Binet. Pauz Lai, Chargé de cours à la Faculté des Lettres de l'Université de Bordeaux. Levaditi (C.), Chef du laboratoire de Bactériologie et d'Anatomie pathologique de hôpital de Bran- eova {Bucarest).— La Nutrition dans ses rappports avec l'Immunité.— Encyclopédie des aide-meémoire. Masson et Ce, éditeurs, Paris, 1904. L'auteur a exposé dans ce livre les données mo- dernes résultant principalement des travaux de Pflüger, de Metchnikoff, d'Ehrlich, de Verworn, sur les toxines et les antitoxines et sur les procédés utilisés par l'organisme dans sa défense contre les corps étrangers nuisibles. Ÿ L'introduction dans l'organisme d’une toxine micro- bienne, d’un venin, d'un ferment digestif, d'une cel- lule vivante même, éveille un processus réactionnel de la matière vivante, qui à pour résultat la formation d'une antitoxine, d’un antivenin, d’un antiferment, d’une anticellule. Quel que soit le corps étranger qui à pénétré dans l'organisme, le processus est le même et aboutit à la production d’un anticorps. Levaditi expose le mode de production des anticorps suivant les conceptions d'Ehrlich et de Metchnikoff, le rôle de la cytase et des sensibilisatrices, et la ma- nière dont elles protègent l'organisme. Il s'efforce à chaque pas de dégager de ces faits une conception générale de l’immunité et montre que l'établissement de cet état est le résultat des actes intimes de la nutrition cellulaire. La molécule de protoplasma vivant est continuelle- ment le siège d'une destruction partielle et se régénère constamment aux dépens de la matière nutritive qui circule dans le plasma. Aux groupes fonctionnels atta- chés à cette molécule protoplasmique, incombe le rôle de présider à la fixation et à l'élaboration de cette matière nutritive, grâce à l’affinité chimique dont ils sont pourvus. Ils élaborent les principes assimilables au moyen des ferments endo-cellulaires et de leurs adju- vants, les sensibilisatrices. Ils régénèrent la molécule protoplasmique en faisant une sélection parmi les innombrables principes assimilables mis à leur dispo- Silion. 1l est permis de supposer que la régénération n'est, en dernière analyse, que l'expression d'un phé- nomène de polymérisation, comme l'ont soutenu Pflüger et Verworn. D' MarcEL LABBÉ, Professeur agrégé à la Facullé de Médecine dé Paris, Médecin des hôpitaux. 4 Sciences médicales Tripier (R.). — Traité d'Anatomie pathologique générale. — 1 vol. gr. 15-89 de 1015 pages. Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1904. Sous ce filtre, M. Prenant a récemment présenté aux lec- teurs de la Zevue (numéro du 15 novembre, p. 1003) son appréciation sur l'ouvrage de M. Tripier. En réponse aux critiques formulées par M. Prenant, l'auteur nous adresse les lignes qui suivent : « Il me faudrait beaucoup d'espace pour réfuter point par point tous les griefs qui me sont reprochés, car je ne pourrais le faire qu'en produisant les observations et les raisons qui permettent de les réduire à néant. Mais, comme ces arguments, négligés par M. Prenant, sont contenus dans mon livre, je prierai les lecteurs impartiaux de vouloir bien s'y reporter avant de me condamner. Ils verront que, si je n'admetls pas cer- taines théories qui ont généralement cours, c'est non seulement parce que j'ai cherché en vain à constater les faits avancés par leurs auteurs, mais encore parce que je crois avoir prouvé qu'elles sont incompatibles avec ce qu'on peut observer. « Ainsi, pour prendre l'exemple cité par M. Prenant de la division des cellules de la couche germinative dans l'épiderme, qui serait « mème pour l'étudiant une réalité d'observation » (seul argument qui me soit opposé), je fais appel à M. Prenant lui-même pour le prier de démontrer : 1° La réalité de cette division des cellules; 2° La possibilité de la division indéfinie des cellules en rapport avec leur destinée évolutive et des- tructive; 3° L'évolution des cellules dans la profondeur des tissus en même temps qu'à la surface de l’épiderme, lorsqu'il se manifeste des productions hyperplasiques, toutes choses qui me paraissent impossibles à voir ou à prouver rationnellement; landis que je crois avoir donné une explication suflisante des fails que tout le monde peut observer. « Je prendrai encore un autre exemple au sujet des inflammations et des tumeurs dont je n'aurais pas donné une caractéristique ferme. À l'appui, M. Prenant cite trois passages relatifs aux tumeurs, qui ne sont nullement contradictoires, et servent de conclusions à des démonstrations concernant leur constitution. Or, des tumeurs aussi bien que de linflammation, j'ai discuté les définitions des auteurs, puis j'ai donné, en italique, la définition à laquelle Je me suis arrété. Je ne me suis donc nullement dérobé à la nécessité de faire connaitre aussi nettement que possible comment j'interprète ces lésions. C'est, du reste, probablement pour cela que j'ai encouru les foudres de M. Prenant, qui trouve que mes descriptions « portent toutes, comme une tache originelle commune, la désobéissance à la loi générale de la division cellulaire ». « Oui, je n'ai pas pu constater d'une manière évidente la division des cellules dans les tissus adultes sains et pathologiques, pas plus du temps où les auteurs clas- siques admettaient avee Virchow la division directe, que maintenant où les mêmes auteurs admettent un autre mode, la division indirecte de Flemming ou karyokinèse. Or, ce changement d'opinion n'a pu cependant s'opérer sans prouver que Virchow et ses contemporains n'étaient pas infaillibles. J'ai aussi fourni les raisons qui ont fait croire au nouveau mode de division, qui n'a pas été mieux démontré que l’an- cien. Dès lors se trouve démoli l'échafaudage sur lequel reposent toutes les conceptions relatives à la Patho- logie cellulaire, à laquelle j'ai opposé la Pathologie tissulaire, basée sur l'observation précise des faits et qui, seule, peut être considérée comme se ratlachant à la Biologie générale. « Assurément, jé me suis servi de quelques termes en leur assignant une signification différente de celle des auteurs pour éviter de créer des néologismes; mais j'ai eu soin de m'expliquer à ce sujet et de dire avant tout ce que j'entends par tissu conjonctf, de manière à ne pas laisser persister de confusions à ce sujet. 36 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX «Je suis également répréhensible de ne pas admettre les théories de M. Metchnikoff relatives à la phago- cytose. Il est vrai que M. Prenant ne me reproche pas d'avoir omis d'en fournir les raisons; tandis quil insinue que j'ai réfuté la théorie de M. Delage par une simple boutade. Or, celle-ci ne s'adresse manifestement qu'à une certaine phrase de l’auteur et non à sa théorie, dont j'ai fait assez longuement la critique pour établir, au contraire, que la Pathologie biologique doit être la Biologie modifiée par les causes nocives. J'admets, dès lors, qu'il faut considérer l'organisme comme se déve- | loppant d'une manière déterminée et que tous les phé- nomènes anormaux où pathologiques ne se rapportent qu'à de simples modifications des phénomènes habi- tuels, lesquels continuent leur évolution seulement dans des conditions anormales. « Voilà le résultat auquel je suis arrivé après de longues études, dont j'ai été dédommagé par la satis- faction très grande de voir la facilité avec laquelle tous les phénomènes pathologiques ont pu recevoir la même explication rationnelle, que je considère comme la clef de toute interprétation pathologique. « En débutant dans l'enseignement, je me suis bien gardé de nier ce que je ne voyais pas, et pendant longtemps je me suis borné à répéter ce qui était écrit. Ce n’est que lorsque j'ai eu un faisceau de preuves me démontrant l'erreur des auteurs sur les choses les plus essentielles que, peu à peu, j'ai fait des réserves. J'ai mème attendu de pouvoir mettre quelque chose à la place de ce qui ne me paraissait pas être l'expression | de la vérité avant de faire aucune publication. Et, lorsque j'ai pu enfin arriver à cette conception de la Pathologie véritablement biologique, basée sur la généralité des faits’ que j'avais observés, j'ai été sur le point d’en faire une publication particulière. Mais j'ai été arrèté par cette considération que l’on pourrait croire à une simple théorie sans fondement, et que, si j'avais des | chances de faire prévaloir mes idées où au moins d'attirer l'attention sur elles pour les faire examiner, c'était en fournissant les preuves qui m'avaient permis de les établir. Dès lors, c'était toute la Pathologie qui devait être passée en revue. i «M. Prenant dit qu'il est très dangereux qu'un traité didactique présente un caractère personnel. Mais c'est un danger qui doit être bien rare, car je ne connais aucun événement fâcheux qui s'y rapporte. Au con- traire, on félicite habituellement les auteurs qui ne se sont pas livrés à un simple travail de vulgarisation el qui ont pu mettre au jour des idées personnelles. Du reste, je n'aurais pas pris la peine que donne une publi- cation de ce genre, si je n'avais rien eu de nouveau à dire etsi je n'avais pas pensé contribuer à la recherche de la vérité scientifique. Enlin, après vingt années d'enseignement, si l’on n’a pas le droit d'avoir des idées personnelles et de chercher à les faire prévaloir, je demande à M. Prenant quand cela sera permis? € Mais voilà, je n'ai pas constaté la moindre karyo- kinèse, qui aurait bien mieux fait l'affaire de M. Prenant, lequel me reproche encore d’avoir voulu « faire de l'Anatomie pathologique générale avec les ressources de l’Anatomie pathologique spéciale ». Alors, avec quoi faudrait-il la faire? M. Prenant le laisse pressentir lorsqu'il dit ensuite que je ne me suis pas douté que « lAnatomie pathologique générale devait être une science cellulaire ». Mais pourquoi? Parce que, « sous cette forme, elle avait déjà conquis droit de cité dans les connaissances humaines ». Je m'en suis douté, cepen- dant, puisque j'ai pris soin de faire la critique de la théo- rie cellulaire, qui n’est bien qu'une théorie, comme je crois l'avoir démontré. Pour soutenir le contraire, il faudrait d'autres arguments que celui qui consiste à ré- péter que la Pathologie doit être cellulaire, sans le prou- ver, mais simplement parce que c’est l'opinion générale. « Ce n’est pas par ce moyen qu'on a la moindre chance de voir progresser la science, et je persiste à croire que, si la parole du maître mérite toujours d'être prise en considération, il n'est pas moins permis de la discuter | | et d'avoir une autre opinion, lorsqu'on a de bonnes raisons pour la soutenir; car c’est la loi du progrès. » D' R. TRIPIER. 5° Sciences diverses Blondel (Georges). — La Politique protectionniste en Angleterre. Un nouveau danger pour la France. — 4 vol. in-12 de xv-161 pages. (Prix : 2 fr.) V.Le= coffre, éditeur, Paris, 1904. Des transformations économiques si nombreuses de l'heure présente, il en est peu qui n'attirent pas l'in- telligente attention de M. Georges Blondel. Qu'il s'agisse des leçons à retirer de l'essor remarquable du peuple allemand, de la situation de la France devant le marché mondial et, aujourd'hui, de la politique protectionniste de l'Angleterre, M. Georges Blondel parle et écrit; il multiplie les conférences aux quatre coins du pays, puis rassemble ses idées en des livres qui sont des mer: veilles d'érudition, tout en demeurant aussi agréables à lire qu'ils sont instructifs à méditer. Dans le présent volume, l'auteur, après avoir tracé le tableau de lévo- lution économique du peuple anglais et de sa situation actuelle, expose la thèse protectionniste de l'ancien ministre des Colonies. Joseph Chamberlain est l'homme d'une idée, le représentant de l'impérialisme écono- mique. « L'Empire, c'est le commerce, s'est-il écrié un jour ! » Et il à dit encore : « Je crois en cette race, la plus grande des races gouvernantes que le monde ait jamais connues; je crois en cette race anglo-saxonne, fière, tenace, résolue, confiante en elle-même, que nul climat, nul changement ne saurait abätardir, et qui, infailliblement, sera la force prédominante de la future histoire et de la civilisation universelle... Et je crois en l'avenir de cet empire, vaste comme le monde, dont un Anglais ne saurait parler sans un frisson d'enthou- siasme, » Avec de telles paroles, il semble facile d’atti- rer les masses. Et toute la question est là. Malgré la résistance des hommes d'Etat les plus éminents de l'Angleterre, malgré les objections serrées des écono- mistes, professeurs des Universités, Chamberlain ral= liera-t-il le peuple anglais à ses projets? M. Georges Blondel le croit, tout en estimant que ce changement de politique commerciale ne sera pas avantageux à l'Angleterre. Deux faits, cependant, ne nous permettent pas de partager entièrement les idées de l’auteur sur ce point : c'est d'abord l'opposition faite au projet par les représentants des grandes organisa- Hons ouvrières, et l'on sait la remarquable discipline den ces associations; c'est, en second lieu, et surtout, le peu d'empressement qu'ont témoigné les colonies anglaises elles-mêmes pour le projet en question, et la résistance qu'elles ne manqueront pas de présenter quand on voudra passer aux actes. Quelle qu'en soit l'issue, la lutte est engagée, et cela est suffisant pour justitien l'étude des répercussions possibles que les projets de M. Chamberlain auraient sur le mouvement commer- cial des pays intéressés, en particulier de la France. Nos exportations à destination d'outre-Manche attei= gnent une valeur de 1.193.094.000 francs, alors que nos importations ne s'élèvent qu'à 564.519 000 francs. Le marché anglais est ainsi notre meilleur débouché. Sommes-nous prèts à redoubler d'attention et de vigi= lance pour maintenir de pareils chiffres ou pour trous ver une compensation ailleurs? M. Georges Blondel voudrait le croire. À défaut de certitude, imitons les grands pays qui nous ont dépassé, tels que l'Allemagne et les Etais-Unis, gardons plus d'estime pour les pro= fessions industrielles et commerciales, rénovons nos méthodes de vente, ayons enfin, avec l’auteur, la con- viction profonde que « la suprématie commerciale n’esb pas de celles qui dépendent des hasards d'une guerre ou de la venue d'un homme de génie : c'est une œuvre collective qui demande l'effort de la nation tout entière. Elle ne peut ètre que le résultat de longs efforts et de nombreux sacrifices. » P. CLERGET, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 37 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 19 Décembre 1904. Séance publique annuelle. M. E. Mascart rappelle le nom et l'œuvre des membres de l'Académie décédés au cours de l’année. Puis il est procédé à la proclama- tion des noms des lauréats des prix de l’Académie pour 4904. — M. M. Berthelot lit une Notice sur la vie et les travaux de Daubrée. Séance du 26 Décembre 1904. M. H. Poincaré est élu vice-président de l’Académie pour l’année 1905. 19 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Painlevé dé- montre qu'un système S conservatif, qui n'est soumis à aucune force extérieure et qu'on abandonne sans vitesse, ne peut reprendre sa configuration initiale orientée autrement qu'au départ. — M. Giacobini pré- sente les observations, les éléments et l'éphéméride d’une nouvelle comète, qu'il a apercue le 17 décembre à l'Observatoire de Nice. — MM G. Fayet et E. Mau- rant communiquent les éléments provisoires et l'éphé- méride de cette même comète. — MM. Rambaud etSy adressent leurs observations de la comète Tempel (1873, II) faites à l'Observatoire d'Alger du 5 au 7 dé- cembre. — M. G.-A. Crocco montre le rôle capital joué par le couple d'amortissement dans les phénomènes de Stabilité des dirigeables. Selon sa valeur, on peut avoir stabilité bien au delà de la valeur que M. Renard assigne à la vitesse critique. —MM. A. Pérot et H.Michel-Lévy ont reconnu que, pour certains aciers, lorsque la vi- tesse du choc est et demeure pendant tout le choc suf- fisamment élevée, aucune déformation permanente ne se produit (le métal est fragile), tandis que, lorsque cette vitesse est suffisamment petite, le métal peut sup- porter une déformation permanente, indiquant les qua- lités inverses de la fragilité. 20 Scigxces PuYsiQues. — M. H. Deslandres à étudié les variations avec la pression des spectres de bandes de l'air en employant une forte dispersion. Aux pres- sions croissantes, on voit surgir de nouvelles séries de raies, qui existaient en germe, il est vrai, aux pressions plus basses. L'auteur ne sait encore s'il faut les attri- buer à des conditions différentes d’excitation ou à l'addition de nouveaux atomes. — M. P. Villard pré- sente de nouvelles expériences sur les rayons catho- diques qui sont absolument incompatibles avec l’exis- tence d'un frottement magnétique quelconque des corpuscules. — M. H. Pécheux a déterminé la thermo- électricité de divers alliages d'aluminium. De tous les alliages étudiés, Zn ALS et Zn Al! sont ceux qui ont le plus grand pouvoir thermoélectrique par rapport au Cu après 180°; Zn Al°, d'abord au-dessous, s’en rapproche ensuile vers 3800. — M. P. Langevin montre qu'il est possible, grâce à l'hypothèse des électrons, de trouver, pour le para- et le diamagnétisme, les interprétations complètement distinctes qu'ils exigent, conformément aux lois de Curie. — M. A. Polack apporte un fait nouveau (élévation momentanée de la sensation chro- matique déterminée par une basse lumière à l'instant même où l’on fait sortir la rétine de son état d'adap- tation à l'obscurité) à l'appui de la différence d'adapta- tion des deux modes de la sensibilité rétinienne. — M. G. Malfitano montre que, dans les solutions colloi- dales, la charge électrique des micelles doit ètre nulle ou excessivement faible. — M. H. Giran a reconnu que la chaleur de formation de SO? (69,8 cal. sous la pression atmosphérique) croît avec la pression; ce fait parait être dû à la formation de quantités croissantes d’anhydride persulfurique. — M. M. Guédras à em- ployé le carbure de calcium comme explosif dans des cartouches spéciales, où, à la suite de l’action d’un percuteur, de l’eau fait dégager de l’acétylène, qui est ensuite mis en explosion par un courant électrique. — M. Binet du Jassonneix, en réduisant au four élec- trique les divers oxydes du manganèse par le bore amorphe, a obtenu un borure de manganèse MnB. — M. E.-E. Blaise a préparé les combinaisons de l’iodure de magnésium avec les différentes classes de corps or- ganiques oxygénés, et, en particulier, avec les éthers- oxydes à fonction simple ou complexe; dans ces com- binaisons, on doit admettre que l'oxygène est tétra- valent. — M. G. Blanc, en réduisant les anhydrides d'acides bibasiques par le sodium et l'alcool absolu, a obtenu deux séries de lactones. — M. G. Darzens à préparé les éthers des acides glycidiques $-disubstitués par condensation des cétones avec l'éther chloracé- tique. La saponification de ces éthers conduit à des acides peu stables, qui se décomposent facilement en aldéhydes et CO*. — MM. A. Fernbach et J. Wolf montrent la nécessité de la présence d'une diastase liquéfiante pour la production du phénomène de la coagulation diastasique de l’amidon. — MM. A. Haller et P.-Th. Muller ont étudié, par la méthode optique différentielle proposée pour la diagnose des pseudo- acides, la constitution des sels de sodium de certains acides méthéniques et méthiniques. Tous ces sels ont une constitution autre que celle des acides générateurs. — MM. L. Lindet et P. Marsais ont reconnu que la production d'alcool, dans la fermentation, surpasse au début la production de CO*, que celle-ci reprend en- suite le pas sur celle-là, pour fournir, en fin de fer- mentation, des quantités égales des deux produits. — M. W. Russell à observé que la teneur en principes glucosidiques augmente considérablement chez les plantes que l'on soustrait à l’action de la lumière ; le maximum de concentration de ces principes s'observe en hiver dans les parties souterraines. — MM. A. De- lage et H. Lagatu montrent le nombre considérable d'espèces minérales pouvant entrer dans la composi- tion d’une terre et la concordance entre la composition d'une terre donnée et celle de la ou des roches ori- ginelles. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Lesage a réussi à cultiver une seule et mème amibe intestinale dans sept cas de dysenterie tropicale; elle se rapproche beau- coup de l’Entamæba histolytica de Schaudinn. — MM. Carré et Vallée ont inoculé le virus de l’anémie du cheval à d'autres chevaux et à l’âne, et ont vu l’af- fection se reproduire chez ces animaux. La maladie est également transmissible par les voies digestives. — MM. P. Vigier et Fr. Vles communiquent leurs re- cherches sur l'histologie du myocarde chez les Mol- lusques primitifs. — M. P. Mulon a constaté que, chez certains Mammifères, aussi bien jeunes qu'adultes, les noyaux des cellules de la substance corticale des sur- rénales peuvent présenter des enclaves graisseuses. — M. G. Cantin, en opérant la destruction de l'œuf d'hi- ver du phylloxera par le Iysol, a réussi à préserver en- tièrement de la maladie, depuis quatre ans, une Jeune vigne de plant français. — M. A. de Lapparent signale de nouvelles trouvailles géologiques faites au Soudan, qui montrent les traces d'un passage nord-sud, com- pris entre les granites de la région du Tchad et les schistes anciens du Kano, du Sokoto et du Dahomey, par lequel la mer crétacée, venant du nord, communi- quait avec un autre bassin méridional. — M. le général 38 ACADÉMIES ET SOCIËÈTÉS SAVANTES de Lamothe a constaté, dans le Sahel, l'existence de sept lignes de rivage dont les altitudes peuvent ètre représentées approximativement par les nombres : 320, 265, 200, 140, 100, 55, 30 et 17. ACADÉMIE DE MÉDECINE Seance du 20 Décembre 1904. M. Guéniot est élu vice-président, M. Motet secré- taire annuel pour l’année 1905. M. Landolt lit un Mémoire relatif à une nouvelle opération sur les muscles oculaires. — M. le D' Ben- dersky donne lecture d’un travail sur la microgastrie primaire. B Séance du 27 Décembre 1904. M. Chamberland est élu Associé libre de l'Académie. M. Ch. Fernet propose à l'Académie de demander l'inscription de l’alcoolisme, de la tuberculose et de la syphilis parmi les causes de décès dans les statistiques municipales. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 17 Décembre 1904 La Société procède au renouvellement de son Bu- reau. Sont élus : Président quinquennal : M. A. Giard ; Vice-présidents : MM. Darier et Kunckell d'Her- culais ; Secrétaires : MM. Achard, Manouvrier, Nicloux et Vincent ; Trésorier : M. G. Weiss ; Archiviste : M. A. Pettit. M. R. Dubois rappelle ses recherches antérieures sur le rôle physiologique de l’eau. — MM. A. Pettit et A. Krohn ont observé que les cellules des glandes salivaires du Notonecta glauca sont le siège d’une éla- boration active. — M. A. Lécaillon a reconnu que les araignées ne donnent généralement aueun soin à leurs œufs ou à leurs petits pris individuellement ; la progé- niture se trouve simplement protégée par des soins d'ensemble. — M. Ed. Hesse à étudié le T'helohania Legeri, microsporidie nouvelle, parasite des larves d'Anopheles maculipennis. 11 ne lui parait pas que cette espèce soit l'agent d'une maladie transmissible par les Anopheles. — M. P. Remlinger a constaté que la Tortue terrestre est réfractaire à la rage, ce qui tient probablement à l'état rudimentaire de son système nerveux cérébro-spinal. — M. G. Mioni a observé que, dans l’anesthésie complète avec perte des réflexes, le courant alternalif ne provoque aucune crise convul- sive; dans l’anesthésie incomplète avec conservation des réflexes, il y a seulement une crise clonique. — M. E. Fauré-Frémiet donne la description de l’appa- reil contractile des Vorticellidées. — M. L. Blarin- ghem signale un cas d'hérédité d'anomalies florales présenté par le Zea Mays tunicata. — M. Laulanié poursuit ses expériences relatives à l'influence de l’ali- mentation sur les combustions respiratoires. Dans le régime carné el celui de soupe au lait, les frais d’ex- ploitation augmentent plus rapidement que la ration. L'exploitation du sucre, au contraire, ne coûte rien. — MM. L. Bernard et M. Salomon ont reconnu que la tuberculisation du rein par la voie intra-veineuse est moins facile à réaliser que par la voie artérielle; en effet, un grand nombre de bacilles sont arrêtés par le poumon. — MM. Piery et Mandoul ont constaté que le bacille de Koch affecte des formes variées dans l’ex- pectoration des phtisiques. Ces formes dérivent les unes des autres et sont dues aux différences de colo- ration de la couche périphérique du bacille. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 6 Décembre 1904. M. R. Cruchet a constaté qu'il peut n'exister aucune différence, au point de vue de la perméabilité mé- ningée, entre les méningites et les diverses affections nerveuses chez l'enfant. — MM. J. Bergonié et L. Tri- bondeau ont observé que, dans les testicules des rats exposés aux rayons X, il n'y a pas une simple desquam- mation de l'épithélium séminal, suivie de son expul- sion, mais bien une transformation cytologique et chi- mique, suivie de résorption des éléments sur place. Les spermatozoïdes de l'homme conservent leur mobilité après une demi-heure d'exposition aux rayons X. — M.J.Chaïne montre que les seuls muscles susceptibles de présenter une forme polygastrique sont ceux du cou etceux qui, dans le tronc, forment les parois de la cage thoracique et de la cavité abdominale. — M. H. Sérégé a constaté que le glycogène prédomine dans le foie gauche depuis la douzième heure de la digestion jusqu'à la troisième heure environ du repas suivant. Ce fait proviendrait de la disposition différente des veines sus-hépatiques issues des lobes gauches et droits. — MM. A. Le Dantec et Boyé décrivent une myase observée chez l'homme en Guinée française et due à la présence d'une larve de mouche se développant sous la peau. — M. J. Gautrelet a observé une diminution parallèle de lalcalinité apparente du sang et de l'hémo- globine dans l'ictère expérimental. — MM. Gentès et Bellot ont étudié les altérations des neurofibrilles des cellules de l'écorce cérébrale du chien, après ligature de la carotide primitive. — MM. Ch. Pérez et E. Gendre décrivent les phénomènes de l'ovogenèse du Brau- chellion. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 16 Décembre 1904. M. A. Guébhard: Sur la fonction photographique dans ses rapports avec les phénomènes d'inversion. Quand on passe en revue, depuis Daguerre, les nombreux cas observés d’inversion des actions radiographiques, en prenant ce dernier terme dans son sens le plus étendu (lumière, chaleur, émanations, rayons X, etc.), l'on est frappé de la multiplicité des interprétations con- tradictoires qui en ont été données. Or il suffit, en pho- tographie, de mettre en compte, comme variable prin- cipale, une valeur toujours tacitement traitée comme constante indifférente, celle de la surexposition (rorlage) mise en jeu, pour voir reutrer immédiatement tous les cas dans la loi commune qui lie à l'énergie de l'excitation les manifestations de la sensibilité physique de surface, comme celles de la sensibilité physiologique : loi de fatigue, qui montre la réponse au stimulus, un instant attardée au voisinage du zéro, bientôt monter suivant une formule de proportionalité, puis se ralentir aux approches d’un maximum relatif plus ou moins étalé, et, de là, retomber vers un zéro, assez lointain pour que ses au delà n'aient pu encore être sûrement pré- cisés. Or, quelle que soit encore (après les observations de Janssen, Abney, A. et L. Lumière, Stolze, Michalke, Hurter et Driffield, Bouasse, etc.) l'incertitude expéri- mentale sur la forme précise de la courbe des impres- sions en fonction soit des énergies excitatrices, soit de leurs modalités, le fait seul de l'existence d'un maxi- mum entre les zéros de départ et d’aboutissement explique comment toutes les expériences faites au voi- sinage de ce maximum (ainsi que c'est toujours le cas, en photographie, lorsque intervient un voilage de la surface sensible) peuvent donner tantôt des apparences de continuation, si, restant en deça du maximum, elles poussent les ordonnées à s’en approcher, tantôt des effets d'état neutre (voile noir) lorsqu'on arrive au pla- teau, ou d'inversion lorsqu'on le dépasse, et, enfin, de pseudo-destruction dans l'approche finale du zéro. Toute intervention d'énergie additionnelle peut, suivant l'instant relatif de son application et de son aboutisse- ment, avant ou après le changement de signe de la dérivée, jouer successivement le rôle excitateur, con- tinualeur, ou soi-disant destructeur Mais la possibilité, expérimentalement établie, de substitutions mutuelles et d’interversions d'ordre prouve qu'il n'y a jamais ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 2 , 3) d'action négative et que, d'un bout à l'autre du spectre entre autres, ainsi que le proclamait avec insistance Edm. Becquerel, il n'y à ni spécialisations, ni surtout antagonismes d'actions, mais de simples variations de coeflicients d'intensité. Or, les données expérimentales actuellement acquises montrent que, si Fon réunit en tableau les courbes représentatives des inten- sités d'impression en fonction du temps pour des excilations diverses, chaque courbe, après être mon- tée, el puis retombée, d'autant plus vite qu'elle correspond à une intensité plus grande, recoupe aussi, d'autant plus près, sa voisine en donnant ainsi, à tout instant, l'image des progrès de linversion avec le temps suivant le groupe des courbes en jeu. On comprend tout de suite, par exemple, comment les impressions de spectres sur plaques voilées donnent, à la place exacte du seul maximum vrai, un faux minimum dû à l'inversion de l'action du violet, tandis que, de part et d'autre, les radiations extrêmes, lentement agissantes par superposition de leur faible énergie à celle du voilage de renfort, font naître la fausse apparence de deux maxima sans fixité. Il n'est pas un des nombreux faits cités depuis l'origine de la photographie, sem- blables à ceux qu'a rapportés M. Villard, qui ne s'ex- plique immédiatement de la même facon sans re- cours à d'autres circonstances, purement accessoires. M. P. Villard pense que les (rès intéressants résultats exposés par M. Guébhard rendent bien compte de ce qui se passe (développement alcalin compris) quand on emploie des radialions lumineuses dont chacune peut, à elle seule, impressionner la surface sensible, mais que lextension aux phénomènes de continuation et de destruction ne parait pas justifiée. Dans ces deux cas, on fait intervenir, en effet, des radiations qui, en dehors de toute impression préalable, seraient rigou- reusement inactives pendant la durée de l'expérience {infra-rouge, par exemple}, n'est pas indifférent ici de remplacer une radiation par une autre, comme dans les expériences de M. Guébhard, où de changer l'ordre dans lequel on les faitagir, en cite quelques exemples. Sans vouloir le moins du monde critiquer les travaux de M. Guébhard et les conclusions si claires qui s'en dégagent, l'auteur considère donc que ces conclusions sont étrangères aux effets de continuation ‘ou mieux de développement, et au phénomène visiblement géné- ral de la destruction d'une image par une radiation con- venablement choisie. — M. Guébhard, resreltant de voir maintenir et même aggraver, par M. Villard, une logomachie contre l'abus de laquelle ne cessa de pro- tester celui qu'on en rend souvent responsable, Edm. Becquerel, maintient formellement que tous les cas de continuation où destruction cités par M. Villard sont, à son avis, également justiciables de la formule générale ci-dessus rappelée, et point de telle ou telle circonstance purement secondaire. M. P. Villard pense que tout ce débat repose sur des confusions. Ainsi, il n'a jamais élé question de continuation pour le gélatinobromure d'argent (sauf si, au lieu d'un révélateur alcalin, on prend une solution d'argent, avec plaques à grain très lin .Pour ces préparations, il y a en effet lieu de détruire la légende créée autour de l'expérience d'Ed. Becquerel et d'après laquelle une plaque légèrement voilée serait plus sensible parce que le voile permettrait Faction des rayons continuateurs. Or il n'y à pas continuation et, sil y en avait une, elle exigerait des heures pour se manifester; enfin, elle ne donnerait pas prise au révé- lateur. IT n'y a ici que les effets décrits par M. Guébhard. Quand aux papiers, il serait invraisemblable que l'addition d'une impression blanche invisible et d'une impression jaune également invisible donnât l'image intense qu'on obtient par continuation. — M. W. Dud- dell présente à la Société deux appareils fondés sur le principe thermique pour la mesure des petits courants alternatifs de haute fréquence. IL. Un fil de platine-ar- gent de 254 de diamètre est laminé pour former un ruban dont on fixe les extrémités, puis que lon tord par le milieu de facon que les deux moitiés aient des torsions inverses (ruban tordu d'Ayrton-Perry,. Sur le milieu se trouve fixé un petit miroir de galvanomètre. Quand un courant échauffe par son passage le ruban tordu, sa torsion augmente et le miroir tourne. Un système compensateur particulier empêche l'appareil d'être sensible aux variations de la température am- biante; le zéro est fixe. Cet appareil donne 25 centi- mètres de déviation sur une échelle placée à 100 centi- mètres pour un courant de 22 milliampères. I décèle des courants inférieurs au milliampère. Sa self-induc- tion est faible et il est très robuste, Il a permis, prati- quement, de rechercher la cause des irrégularités de voltage des alternateurs accouplés où commandés par une machine à vapeur. I. Une résistance traversée par le courant à mesurer échauffe par rayonnement lune des soudures du couple thermo-électrique (Bi, Sb) d'un radiomicromètre de Boys. La résistance, en kruppin, or ou platine, a une longueur de 3 millimètres à #milli- mètresel une résistance qui peut dépasser 10.000 ohms. Le couple thermo-électrique fait partie d'un cadre rec- angulaire placé entre les pôles d'un aimant permanent et soutenu par un fil de quarz. Le cadre Lourne quand la soudure chauffe, Cet appareil est plus sensible et plus délicat que le précédent; il ohéitrapidement et on le rend propre à des mesures variées en changeant la résistance chauffante. — M. Rothé: l’hotoyraplies en couleurs obtenues par la méthode interferentrelie, sans miroir de mereure. Lorsqu'on regarde par réfle- xion la photographie d'un spectre obtenue par la méthode de M. Lippmann, on conslale (surtout si le cliché a été surexposé que les deux faces de la plaque ne présentent pas les mèmes teintes. Du côté verre on voit les couleurs du spectre fidèlement reproduites, du côté gélatine des teintes très différentes, quelquefois à peu près complémentaires des premières. De plus, la face gélatine d'une photographie en couleurs, de pose insuffisante, présente, suivant la durée de la pose el l'épaisseur de la gélatine, des teintes variées. Ia semblé à M. Rothé que les plans d'argent réduitles plus voisins de la gélatine et la lame mince formée par la surface de la gélatine etle premier plan d'argent intervenaient pour une très large part dans la production des cou- leurs, lorsqu'on observe la face gélatine par réflexion. Or, il est logique d'admettre qu'entre la gélatine et le mercure tout l'air n'a pas été chassé. I en subsiste une mince couche, qui est trop mince pour que l'épaisseur traversée introduise une différence de marche appré- ciable, mais dont la présence peul causer une réflexion sur la surface de séparation gélatine-air avec une diffé- rence de phase déterminée, Il y aurait alors, outre la réflexion sur le miroir de mercure, une réflexion sur l'air qui pourrait expliquer lesteintes variées observées dans les clichés insuffisamment posés. S'il en est ainsi, on pourrait obtenir, pour des poses prolongées, des photographies en couleurs par réflexion de Ha lumière sur la surface gélatine-air seulement. L'expérience à confirmé la prévision. Les photographies présentées à la Société (spectres, perroquels, houx, oiseaux, bou- quets) ont été obtenues par la méthode interférentielle de M. Lippmann, avec celte seule différence que M, Ro- thé a supprimé le miroir de mercure et utilisé seule- ment, comme surface réfléchissante, la surface de séparation gélatine-air, I suftit de placer dans un appareil quelconque, la face verre tournée vers l'objet une plaque transparente au gélatinobromure préparée d'après les indications de M. Lippmann. Comme pou es photographies interférentielles ordinaires, la pose est très variable suivant que l'objet est placé au soleil où à l'ombre (trente minutes au soleil, deux heures dans une salle de laboratoire). L'acide pyrogallique formule de MM. Lumière) a paru être le révélateur le mieux approprié. Il est bon, pour faire apparaitre les teintes sombres, de renforcer avec ménagement au bichlorure et à l'amidon. Il est aisé de prévoir, d'après a facon même dont ces photographies ontété obtenues, qu'elles offriront sans doute un éclat moins vif que les admirables épreuves de M. Lippnann. Les couleurs 40 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES sont pourtant bien visibles et ces épreuves pourront, comme le croit M. Rothé, être perfectionnées notable- ment entre les mains des praticiens; en tout cas, elles présentent l'avantage de pouvoir étre obtenues . sans matériel spécial, dans un appareil quelconque. M. G. Lippmann dit que l'explication donnée par M. Rothé de son expérience peut être vériliée de la manière suivante : derrière la couche sensible on met un verre noir, et l’on interpose une couche de benzine entre Ja gélatine et le verre noir. On supprime ainsi toute réflexion, et les couleurs disparaissent du même coup. Si, entre Ja gélatine et le verre noir, on laisse au lieu de benzine une couche d'air, les couleurs du spectre sont de nouveau reproduites; et l’on aperçoit en outre, sur le cliché, la trace noire des anneaux de Newton qui s'étaient formés entre les deux surfaces. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 9 Décembre 1904. MM. André Brochet etJoseph Petit ontétabli que la dissolution du platine dans les cyanures sous l'influence du courant alternatif résulte d'une désagrégation méca- nique de l’électrode fonctionnant comme cathode,. Cette désagrégation est amplifiée du fait de la variation de la densité du courant; elle résulte vraisemblablement de la formation transitoire d'un alliage, suivie de la dis- solution spontanée du platine dans le cyanure. MM. An- dré Brochet et Joseph Petit ont entrepris l'étude des conditions pratiques de l'oxydation électrolytique des ferrocyanures. Les résultats obtenus sont extrèmement variables, suivant la nature ‘et l'état de la surface du métal employé comme anode. Les diverses variétés d’électrodes de charbon donnent également des rende- ments très différents les uns des autres. — M. A. Colson, en traitant du sulfate de zinc dissous par la quantité équivalente de potasse, a observé une diminution d'éclat sur des taches de sulfure de calcium phosphorescent, tandis que l’action du sulfate sur la potasse ne produit aucun effet. Cette expérience a conduit M. Colson à constater que, dans le premier cas, la précipitation de l’oxyde de zinc n’est pas totale; elle s’arrète constam- ment aux proportions nécessaires à la formation du sel basique : Zn — 0 — Zn.0H so ; Zn — 0 — Zn.0H quelle que soit la dilution des liqueurs. L'inaction de la réaction inverse sur les taches de CaS n'est pas due à la solubilité de l'oxyde de zinc dans les alcalis, car le sulfate de cuivre se comporte exactement comme ZnSO* à l'endroit du sulfate de zinc ; la limite de satu- ration seule diffère : elle répond au composé : Cu—0—Cu—0 SO ÿCu. CENT 0) Non seulement la Thermochimie confirme ces diffé- rences d'action, mais aussi Ja Chimie pure. Tout d’abord, on retrouve les mêmes composés quand on remplace la potasse par la baryte dissoute. En outre, puisque les sulfates basiques résistent à l'action de la potasse froide, c’est que la base qu'ils renferment, prin- cipalement l'oxyde : Zn — 0 — Zn0OH 0 Zn — 0 — Zn0H est une base forte, comparable à la potasse. Si, alors, on isole cette base par réaction de la potasse chaude sur le sel basique, elle devra chasser au moins partiellement la soude du sulfate SO'Na*; c'est ce que l'expérience vérifie, De même, l'oxyde de cuivre précipité se dissout complètement dans le sulfate d'ammoniaque en excès. Il y à d’autres conclusions à tirer des expériences pré- cédentes. Tout d'abord, le sulfate de zinc dissous ne | peut pas être représenté par la formule SO‘Zn, car, par l'action de la baryte, une molécule de ce sel donnerait intégralement SO‘Ba et Zn(OH}?, incapables l’un et l'autre de réagir sur le corps saturé SO“Zn, et dans ces conditions la décomposition du sel de zinc serait com- plète. La formule HO.Zn.SO'H est préférable : elle explique l'acidité bien connue du sulfate de zinc; mais la forme HSO*.Zn.0.Zn.SO‘H rend, en outre, compte dela formation du sel basique ci-dessus décrite. Or, cette formule est précisément d'accord avec la cryoscopie; car, si l'on neutralise exactement l'acide sulfurique par l'oxyde de zinc, l'abaissement du point de congélation se réduit de moitié. Il en est de même si l’on remplace l'oxyde de zinc par l'oxyde de cuivre. Donc ces sulfates dissous ont une formule double de la formule molécu- laire, et doivent être représentés par [SO*MP. Pour jus-« ülier cette interprétation cryoscopique, M. Colson a examiné l'effet des sulfates de sesquioxydes. Un sulfate chromique vert de formule Cr*(S0#}, spécialement pré- paré et dissous au taux de 0 mol. 2 par litre, donne un abaissement cryoscopique de 081. L'acide qu'il ren-« ferme donnerait dans les mêmes conditions 22,40. Il y a donc bien condensation de 3 molécules sulfuriques: De plus, par ébullition, les 2 molécules Cr{S0‘}* se changent en 1 molécule (SO‘)Cr‘0O Æ1 mol. SO‘H2 Donc la cryoscopie, après ébullition, doit fournir le même abaisssement 09,81, si l'abaissement moléculaire est, comme l’affirme M. Colson pour les sulfates, indé- pendant de la nature de la molécule. L'expérience indique 0°,82, nombre dont la concordance est satis- | faisante. — M. J. Bougault a étudié l'action de [ et | HgO (IOH naissant) sur les acides non saturés éthylé- niques. Les résultats obtenus varient avec la place occupée par la double liaison. Les acides: R.CH:CH.COH et se retrouvent inaltérés à la fin de la réaction. Les acides R.CH : CIH.CH?.CO*H donnent des lactones iodées R.CH.CHI.CH°.CO | 0 Sas nl susceptibles de régénérer l'acide par le zinc et l'acide acétique. Les acides R.CH:CH.CH?.CH°.CO®H sont à l'étude. Les acides à fonction éthylénique plus éloignée du carboxyle fixent IOH et donnent des acides de for- mule générale R.CHI.CHOH.(CH*)".CO*H. — M. Tanret expose la suite de ses recherches sur les sucres à mul- tirotation. 1 SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. Lord Rayleigh a repris ses déterminations de la den- silé de loxyde d'azote, dans le but de diminuer autant que possible la différence qui existe entre ses résultats 1,52951) et ceux de M. Leduc (1,5301). Pour cela, il purifiait le gaz en le condensant au moyen de l'air liquide, qui le débarrasse des impuretés les plus vola- tiles. Ce traitement a, en effet, légèrement augmenté le poids, et la nouvelle densité, rapportée à l'air comme unité, est de 1,5297. L'auteur estime que le gaz ainsi purifié ne contient plus de traces appréciables d'azote, et que c’est donc la valeur de M. Leduc qui est trop élevéé. Si l'oxygène est pris égal à 16, la densité de l'oxyde d'azote est de 22,143; l'excès de ce nombre au-dessus de 22, valeur théorique pour Az°0, est dù principalement à ce que ce gaz s'écarte de la loi de Boyle entre la pression atmosphérique et la condition” de grande raréfaction. Séance du 17 Novembre 1904. Sir J. Norman Lockyer et M. F.-E. Baxandall communiquent les résultats d'une étude détaillée des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES = = lignes élargies du titane, du fer et du chrome en rapport avec les lignes du spectre de Fraunhofer. I à déjà été signalé que quelques-unes des lignes élargies du Ti, du Fet du Cr, qu'on observe dans le spectre de & Cyqni, paraissent correspondre à des lignes solaires faibles dont Rowland n’a pu trouver l’origine. La comparaison a été minutieusement reprise sur des photographies obtenues avec un réseau de Rowland, et telles que la partie du spectre située entre K et F à une longueur de 35 centimètres. Plusieurs lignes élargies tombent exactement sur des lignes isolées du spectre solaire ; dans d’autres cas, la coïncidence n'a pu être établie que par des procédés indirets. En fin de compte, 42 de ces lignes élargies se confondent avec des lignes du spectre de Fraunhofer non identifiées par Rowland. — Les mèmes auteurs ont repris leurs recherches sur les lignes du groupe IV du spectre du silicium, à la suite des critiques de M. A. de Gramont, qui, à cause de leur faiblesse, les considère comme dues à l'oxygène ou à l'azote. Ils comparent le spectre d’étincelles du silico- fluorure de sodium, volatilisé entre des pôles de platine, avec le spectre d'étincelle de l'air, rendu également incandescent entre des pôles de platine. Dans chaque spectre, on aperçoit très bien les lignes ordinaires de l'oxygène et de l'azote. Les lignes du silicium dont l'origine est contestée se trouvent dans le premier, mais il ne se trouve aucune ligne correspondante dans le spectre de l'air. Les auteurs donnent aussi côte à côte le spectre de Sil'# et celui de $ Orionis et montrent l'identité de position des lignes du groupe IV du silicium avec les lignes du spectre de cette étoile. — MM. W. R. Bousfield et T. M. Lowry : Sur la con- ductivité electrique et diverses propriétés de l'hydrate de soude en solution aqueuse. Le but primitif de cette recherche était de déterminer la diminution, lorsque la température s'élève, des propriétés ionisantes de l'eau, laquelle se manifeste par le fléchissement des courbes qui expriment la relation entre la tempéra- ture et la conductivité dans les solutions aqueuses des alealis. Voici les principaux résultats de ce travail : 1° Dans les solutions les plus diluées, dans lesquelles « l'ionisation » est presque complète, et aussi dans les solutions les plus concentrées, les courbes, exprimant le rapport entre la conductivité moléculaire et la tem- pérature dans les solutions aqueuses de l'hydrate de soude, ne sont pas infléchies entre 0° C. et 1002 C.; la température de l'inflexion atteint le minimum à 48° C., pour le cas d’une solution normale (4 °,,), mais s'élève à 100 C. lorsque la concentration est élevée à 30 °,;; 2° Les courbes infléchies de la « conductivité-tempéra- que » peuvent être représentées par la formule sui- van{e : KiKo— prfto(i Hi) eu 4 Cette formule est applicable aux courbes conductivité- température de toutes sortes, et donne l'expression non seulement de l'inflexion considérée, mais aussi de la conductivité maximum et de la seconde inflexion dans la courbe générale « conductivité-température »; 3° La conductivité maximum de la soude caustique à 18°C. est 0,3490 dans une solution à 15 °/,, la valeur donnée par Kohlrausch étant de 0,3462. A des températures plus élevées, la conductivité maximum est considéra- blement plus grande, s'élevant jusqu'à plus de 1,4 à 100° C., et elle se produit dans des solutions de plus grande concentration; 4 La viscocité d'une solution à 50 °/, est approximativement soixante-dix fois aussi grande que celle de l’eau. L'influence de ce facteur peut être en partie éliminée en divisant la conducti- vité moléculaire par la fluidité; les auteurs proposent d'appeler ce rapport la « conductivité intrinsèque » de la solution. Tandis que la conductivité moléculaire des solutions de soude décroît rapidement lorsqu'un élève la concentration, la « conductivité intrinsèque » tombe à un minimum à environ 8 °/, NaOH, et s'élève ensuite Jusqu'à ce que, à 50 °/, NaOI, la valeur soit considé- rablement plus élevée que dans les solutions les plus diluées. On croit que cette augmentation est due au fait que la soude liquide est un électrolyte, et que, dans les solutions concentrées, le courant est transmis en partie par la soude seule, comme si elle était à l’état fondu; 5° Pour déterminer à nouveau les densités des solutions aqueuses de l'hydrate de soude, on a pesé des quantités de sodium s’élevant à environ 150 grammes chaque fois, et on les a converties quantitativement en solutions concentrées d'hydrate de soude par l’action de la vapeur dans un vase de platine. Onze détermi- nations, faites avec six solutions différentes, ont donné comme densité d’une solution à 50°/,, à 18°C. la valeur 4,5268, avec une erreur moyenne de 0,0001. On a pré- paré des solutions de concentrations connues par dilu- tion: leurs densités ont été déterminées avec une erreur probable n’excédant pas 0,0001 ; les valeurs enregistrées par de précédents savants provenaient de solutions étalonnées par titration seulement, et elles semblent contenir des erreurs dans la troisième et même dans la seconde décimale; 6° Dans la formule & — 6, + af + $E + yf, laquelle représente l'influence de la tem- pérature sur la densité de l’eau et des solutions aqueuses de soude, le coeflicient de 4 disparait lors- qu'on atteint la concentration de 12 °/, NaOB, tandis que le coefficient de 4? disparaît à 42 °/, NaOH; à cette dernière concentration, il y a une simple relation linéaire entre la densité et la température; 7 Le volume moléculaire de l'hydrate de soude en solution aqueuse diluée à une grande valeur négative, un litre d’eau dissolvant 140 grammes à 0° G., 100 grammes à 189 C., ou 60 grammes à 50° C., sans augmentation de volume. Le volume moléculaire ne s'accroît pas continuellement à mesure que la température s'élève, mais atteint une valeur maximum à environ 70° C. Dans une solution à 50 °/, la température a peu d'effet sur le volume moléculaire, la variation extrème étant seulement d'environ 10 9/5. Séance du 24 Novembre 190%. M. Clive Cuthbertson: Les indices de réfraction des éléments. Dans une lettre adressée au journal Nature d'octobre 1902, l'auteur attira l'attention sur le fait que les réfractivités des cinq gaz inertes de l'atmosphère, He, Ne, 4, kr et X, déterminés par Ramsay et Travers, se trouvent, dans d’étroites limites d'exäctitude, dans la proportion de 1, 2, 8,12 et 20, ou plus simplement de ï Ù 2, 3 et 5. Dans une seconde lettre, il montra que les réfractivités des halogènes CI, Br et 1 sont aussi dans le rapport de?2, 3 et 5 avec le mème degré d'exac- titude; et il fit remarquer que les chiffres pour P, As etS, calculés par M. Le Roux en 1861, ne présentent aucune relation semblable ; une nouvelle détermination de ces chiffres parut devoir être intéressante. Avec un réfractomètre Jamin adapté pour l'emploi à de hautes températures, on à maintenant obtenu des résultats pour Hg, P et S, qui diffèrent beaucoup de ceux obte- nus par M. Le Roux. L'indice du mercure, calculé pour une molécule contenantdeux atomes, est égal à 1,001.857, nombre qui se rapproche étroitement de la valeur don- née par l'équivalent de réfraction de Gladstone. On trouve que l'indice de P, est de 1,001.197, et celui de $, de 1,001.101. On estime que, dans les trois cas, la marge d'erreur n'excède pas 1/2°/.. En comparant ces valeurs pour P* et S° avec celles de Az*et O*,on prouve que les relations simples trouvées pour les gaz inertes et les halogènes existent aussi avec l'azote et le phosphore, l'oxygène et le soufre; et qu'un atome de phosphore retarde la lumière quatre fois autant qu'un atome d'azote, etun atome de soufre quatre fois autant qu'un atome d'oxygène. Des efforts ont été accomplis dans le but de mesurer l'indice du fluor à l'état gazeux; mais, par suite des difficultés expérimentales, on na pas encore obtenu de résultats satisfaisants. Il apparaît donc que, sur quatorze éléments dont on à mesuré l'indice de réfraction à l’état gazeux, douze se con- forment à la règle par laquelle, dans chaque groupe 42 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES chimique, les réfractions des éléments sont dans les rapports de petits nombres. Les deux autres, Hg et H, n'ont pas d'éléments alliés avec lesquels ils puissent être comparés. L'auteur indique que Az, O et Ne sont chacun suivis dans leur famille respective par un élé- ment dont la réfraction est quatre fois aussi grande ; par conséquent, il y à des raisons pour croire que les éléments composant les séries Az, O, F, Ne et P,S CI, A, sont en quelque sorte homologues. Si on com- pare es réfractivités des dernières séries, on voit que le pouvoir de retarder la lumière paraît être étroite- ment relié avec la valence, augmentant lorsqu'elle augmente, malgré la diminution du poids atomique, comme on peut s’en rendre compte par la table sui- vante : ÉLÉMENT EE p S CI A Poids atomique. 31 32 355 x Réfractivité . . 299X 44 215X4 I92X4 IMAX4 Les séries Ne, O, Az montrent la même relation, et il est probable que la réfractivité de C est même plus élevée que celle de Az. La réfractivité de B, estimée d'après BCI, et BBr,, est certainement très grande, mais il n°y a pas de preuve suffisante pour déterminer si elle excède celle de C. Séance du 1®* Décembre 1904. Mie F1. M. Durham a retiré, de la peau de certains animaux pigmentés (lapins, rats, cobayes, poulets), un extrait qui agit sur la tyrosine en produisant une substance pigmentaire. Cette action suggère la pré- sence d'une tyrosinase dans la peau de ces Vertébrés. L'action de la tyrosinase est détruite par l'ébullition, n’a pas lieu à froid, est affaiblie par le temps, requiert une température d'environ 37% C. et aussi la présence d'une substance activante, comme le sulfate ferreux, pour la mettre en marche. Les substances colorées produites se rapprochent de la couleur des animaux utilisés : on obtient, en effet, des substances noires avec l'extrait de la peau des animaux colorés en noir, et des substances jaunes avec les animaux colorés en orange. Les substances colorées sont solubles dans les alcalis et insolubles dans les acides. — M. A. J. Ewart communique des recherches sur l'ascension de l'eau dans les arbres. Le flux de l’eau dans les vaisseaux ouverts remplis de sève a lieu suivant la formule de Poiseuille pour l'écoulement à travers les tubes cylin- driques rigides. La vitesse du flux est directement proportionnelle à la pression et au carré du rayon du tube, et inversement proportionnelle à la longueur du tube et à la viscosité du liquide. Un petitnombre delarges vaisseaux offre donc moins de résistance au flux qu'un grand nombre de tubes étroits, ayant la même hauteur et la même surface totale de section interne. Comme la viscosité dépend de la température, celle-ci est un facteur important : la viscosité et la résistance dimi- nuent avec une élévation de température. Pour une vitesse moyenne de flux, la résistance totale due à la viscosité de l’eau est toujours moindre (et pour les plantes grimpantes avec de larges vaisseaux beaucoup moindre) qu'une colonne d’eau de la hauteur de la tige. Les vaisseaux adultes des Angiospermes à trans- piration active contiennent toujours des bulles d'air, qui introduisent une résistance au flux inversement proportionnelle au rayon du tube quand les bulles et la colonne d'eau se meuvent ensemble. Quand ces bulles sont relativement slationnaires, comme dans la plupart des vaisseaux, la résistance augmente beaucoup. Les déterminations de la quantité de flux, faites d'après la vilesse du flux, le diamètre et le nombre des vais- seaux, montrent que le flux a lieu presque entièrement, dans le bois des Dicotylédones, par les cavités des vaisseaux et à peine par les trachéides. La résistance totale au flux dans les tiges droites des plantes à trans- piration active parait correspondre à une colonne d'eau de 6 à 33 (petits arbres) ou de 5 à 7 (grands arbres)" fois la hauteur de la plante. Donc, dans les arbres les plus hauts, la pression totale nécessaire pour main- tenir une active évaporation doit être équivalente à au moins 100 atmosphères. Aucune feuille ne peut produire ou maintenir une succion osmolique de cette intensité. La succion maximale des feuilles a été trouvée égale à 2-3 atmosphères, et elleest généralement moindre; sur le même tronc, la résistance totale au flux était de 10 à 12 atmosphères. Il en résulte que, pour maintenir le flux, une action aspirante doit être exercée dans le bois, pour laquelle la présence de cellules vivantes actives est essentielle. Il est possible que les'cellules du paren- chyme du bois, par l'excrétion et la réabsorption de matières dissoutes, De mettre en jeu des forces de tension superficielle d ans les vaisseaux d’une in- tensité suffisante pour maintenir un courant constant. — M. D. H. Scott poursuit ses recherches sur Ja structure et les affinités des plantes fossiles des roches paléozoïques. 11 a découvert un nouveau strobilus qu lui parait rentrer dans le genre Spheuophyllum. Le « point le plus caractéristique de la structure du nouveau cône est la fertilité à la fois du lobe dorsal et du lobe ventral de la sporophylle; l'auteur propose, en con- séquence, pour cette espèce le nom de S. fertile. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CIHIMIQUES SECTION DE Séance du 20 Octobre 1904. M. J. T. Dunn résume ses expériences sur la déter- mination du point de fusion des matériaux réfractaires, en particulier des argiles et des briques siliceuses. IL opérait par comparaison avec les cônes de Seger, mé- langes de kaolin avec du quartz, de l’alumine et du feldspath gradués de manière à former une série dont les points de fusion vont en croissant. Ceux-ci sont placés à côté de la matière à essayer dans un four chauffé par un mélange d'oxygène et de gaz d'éclairage. Séance du 17 Novembre 1904. M. W. H. Sodeau présente divers appareils pour le réglage de la température : 1° un régulateur à vapeur avec tube dilatable; 2° un régulateur à à vapeur électro- magnétique ; 3% un thermomètre à contact électrique ; 4° un ré igulateur simple à l'usage des gros brüleurs à gaz; 5° une modification très Sensible: du régulateur à gaz de Novy. OCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 11 Novembre 1904. M. E. Traube présente une communication sur le rôle que la tension superficielle joue dans les orga- nismes. D'après M. E. Overton, la vitesse osmotique étant dans presque tous les cas parallèle au coefficient de répartition entre les corps gras et l’eau, ce seraient les membranes contenant de la cholestérine et de Ja lécithine qui déterminent la pénétration des liquides dans les cellules dans la mesure de leur solubilité dans ces substances grasses. L'auteur est d'avis que cette hypothèse n'est pas absolument exacte, la pénétration des liquides dans les cellules n'étant pas nécessairement liée à une dissolution préalable dans la substance grasse. Les recherches capillaires qu'il vient de faire sur toutes les substances dont la vitesse osmotique à été déterminée par M. Overton lui ont donné le résultat que la vitesse osmotique et la tension superlicielle, et par là la pression externe des liquides, sont parfai- tement purallèles. Les corps qui, à l’état de solution aqueuse (| (sels, sucre de canne, etc.), ne traversent pas, en général, les cellules vivantes, augmentent la tension superficielle el la pression interne de l’eau. Les subs- tances telles que glycérine, le glycol, l’acétamide, etc., NEWCASTLE ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES traversant lentement le protoplasme, diminuent la tension superficielle de l’eau dans le mème ordre et dans une mesure peu considérable. Les substances pénétrant rapidement (telles que les alcools, les acides gras, elec.) produisent, au contraire, une diminution fort considérable de la tension superficielle de l’eau. C’est, par conséquent, la différence des tensions super- licielles, soit la pression superficielle, qui agit comme force motrice dans les phénomènes osmotiques. C’est de cette force que dépendent la présence et la vitesse d'action de la pression osmotique. Tout en n'étant point identique à la pression osmotique, cette nouvelle force motrice est, sans aucun doute, d'une grande importance pour les phénomènes les plus variés se passant dans les organismes animés. La théorie de l'auteur veut que, de deux liquides séparés par une membrane à parois capillaires, c'est le liquide à tension superficielle moindre qui traverse la membrane. Ces phénomènes restent encore les mêmes si on élimine la membrine; aussi ce n'est pas le sel ou la solution saline qui se diffusent dans l’eau, mais bien l’eau qui se diffuse dans la solution saline. Cette nouvelle manière de regarder les phénomènes de diffusion paraît ètre d'une importance considérable au point de vue des phénomènes de concentration se passant dans les orga- nismes, en même temps qu'elle donne une rouvelle théorie de la solubilité. Si l'alcool éthylique et l'eau sont miscibles, c'est que l'alcool éthylique, liquide à tension superficielle moindre, est soluble dans le liquide à tension superficielle plus grande, c'est-à-dire dans l’eau. Ce n'est pas le chlorure de sodium qui se dissout dans l’eau, mais l’eau qui se dissout dans la couche superficielle du chlorure de sodium. Cest pour cette même raison que l'alcool amylique est plus soluble dans l'eau qu'inversement. Aussitôt que les deux couches liquides se formant dans la superposition de ces deux liquides ont mème tension superficielle, la solution est saturée. La tension superlicielle de la solution saturée ne saurait jamais être moindre que celle de la substance dissoute. Voici quelques-unes des autres conclusions à tirer de cette théorie de la solu- bilité : Lorsqu'on additionne l’eau de substances telles que l'alcool méthylique ou éthylique, sa tension super- licielle se trouve diminuée de façon appréciable, c'est- à-dire que ces substances tendent à augmenter la sur- face de l’eau. Or, la propension que possèdent ces substances à se dissoudre, à savoir leur tension de solution, est inversement proportionnelle à cette ten- dance : on trouve donc ainsi une relation des plus simples entre les tensions superficielles et de solution. Si l'on étend au-dessus de la solution aqueuse de ces alcools un corps gras ou un benzène, etc., le coeflicient de répartition se déplacera d'autant plus en faveur de la substance grasse, etc., que la tension de solution est moins considérable et que l'influence de la substance en question sur la tension superficielle de l'eau est plus grande. Nous comprenons par là la justesse des relations trouvées par M. Overton entre la solubilité des corps gras et les vitesses osmotiques, sans que nous soyons obligés de considérer cette solubilité comme cause de la pénétration des cellules, hypothèse qui, jusqu'à nouvel ordre, n’est point indispensable. Mais il y a plus; on retrouve même quantitativement les relations constatées entre la tension superficielle, la vitesse osmotique, la diffusion, la solubilité et le coefficient de répartition. Suivant une loi empirique trouvée autrefois par l’auteur et qui est vraie d’une façon très approchée, les quantités équivalentes de corps homologues en solution aqueuse abaissent la tension superficielle de l’eau dans le rapport 1 : 3: 32:35. Cette loi capillaire s'applique encore d’une façon approximative au coefficient de répartition du système benzène-eau, etc. Mais la vérification la plus frappante de cette loi et de l’ensemble des vues théoriques de l'auteur est fournie par les substances narcotiques. MM. Meyer et Overton ont signalé les relations étroites qui existent entre l'effet narcotique et la solubilité des ST Ce corps gras; aussi il fallait s'attendre à ce que la tension superficielle et la vertu narcotique fussent également parallèles au même degré. Or, c'est ce qui est vrai dans une large mesure pour les substances mème les plus différentes au point de vue chimique. Suivant les récentes expériences de plusieurs auteurs, l'effet narcotique des corps homologues pour des poids molé- culaires croissants augmente dans le même rapport 1:3:3°:3° que la tension superficielle. L'introduction en physiologie de la tension superficielle au lieu de la pression osmotique permet de trouver une interpréta- tion simple d'une multitude de phénomènes qui, jus- qu'ici, ne s’expliquaient que grâce à des forces dites vitales. 11 paraït que la théorie de l’auteur s'accorde par- faitement avec les phénomènes se passant dans l'esto- mac,les intestins, les reins, la peau, etc. L'effet de la plupart des médicaments s'explique également par la relation démontrée entre la tension superficielle et la vitesse osmotique; cet effet consisterait en une modi- fication de la tension superticielle. Beaucoup de ces substances exercent des effets catalytiques souvent en quantité minime, en s'établissant en un endroit donné de l’organisme où elles modifient la tension superlicielle et la vitesse osmotique. — MM. E. Meyer et E. Müller ont fait des recherches sur la cause de l'ionisation par le phosphore, recherches quelque peu analogues à celles de MM. Elster et Geitel. D'accord avec ces der- nières, dont elles étaient d’ailleurs absolument indé- pendantes (les auteurs n’en ayant eu connaissance qu'après), elles font voir que l’ionisation par le phos- phore ne saurait ètre due aux rayons de courte longueur d'onde. — M. L. Zehnder vient de construire un nouveau polarimètre à .pénombres. Afin d'augmenter la précision des ajustements, l'auteur combine un polarimètre à pénombres avec le compensateur de Biot-Babinet. L'une des moitiés du diaphragme à pénombres est constituée par un nicol, l’autre par une plaque plane et parallèle de verre enfumé ou coloré, dont l’opacité est juste suffisante pour permettre un ajustement satisfaisant de la lunette avec l'éclairage dont on se sert. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 26 Novembre 190%. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. D.-J. Korteweg et D. de Lange : Les points ombilicaux double et mul- tiple comme singularités du premier ordre d'exception de surfaces générales en coordonnées ponctuelles. Si l'on varie d’une manière continue les paramètres figurant dans l'équation cartésienne d’une surface, la surface elle-même varie en général d’une manière continue. Alors deux ou plusieurs des points singuliers qui se présentent en nombre fini, comme les points de plissement, les points ombilicaux, etc., peuvent se réunir en un même point, point de coïncidence double ou multiple de cette espèce. Comme le montrent les résultats, il y a ordinairement plus d'un mode de coïn- cidence; quelques-uns de ces modes correspondent à une condition unique entre les coefficients de l'équa- tion, tandis que d’autres ne peuvent se présenter que si plusieurs conditions entre ces coefficients sont remplies. Les auteurs s'occupent seulement des coin- cidences de la première catégorie. Les particularités du premier ordre qui s'interprètent comme des points de plissement multiples ont été étudiées par M. Korteweg en 1889 et 1890; il trouvait deux espèces de points de plissement doubles, les points homogènes et les points hétérogènes; les points d’osculation équivalent à des points de plissement triples et chaque point double correspond à 24 points de plissement coincidés. Dans celte communication, les auteurs font connaitre les résultats analogues pour les points ombilicaux. 1. Le point ombilical double à distance finie. 2. Le point double correspondant à douze points ombilicaux. Les points ombilicaux à l'infini. 3. Le point de contact d’une surface avec le plan à l'infini comme point ombi- à ren ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES lical quadruple. 4. Le point de contact d'une surface avec le cercle commun à toutes les sphères comme point ombilical double. 5. Les points de la courbe spi- nodale à l'infini comme points ombilicaux simples, si la tangente se trouve à l'infini. 6. Les points d'inter- section de la surface avec le cercle à l'infini comme points ombilicaux simples, si l'une des deux tan- gentes doubles dans le plan tangent se trouve à l'intini. Application aux quadriques. — M. P.-H. Schoute : L'équation qui détermine les angles entre deux espaces polydimensionaux. Solution du problème : « En un espace E, à n dimensions les 2—p équations Xp+i 41, iX4 ++ 42,iXe +... + apiXp. (1=1.2,...,n —p) déterminent un espace E, par rapport à un système de coordonnées rectangulaires O(X,X....X,). Comment forme-t-on l'équation dont les racines font connaitre les p angles entre cet espace E, et l'espace coordonné O(X,X,... Xp)?» — M. J. Cardinaal : Sur le lieu géomé- trique des axes principaux d'un faisceau de quadriques. Le lieu géométrique en question est une surface gauche du neuvième ordre admettant une cubique triple (le lieu des centres des surfaces du faisceau), un cône directeur cubique et une courbe double de l'ordre 18. L'auteur étudie plus en détail le cas particulier où la courbe de base du faisceau coupe le cercle commun à toutes les sphères en deux points. — M. W. Kapteyn : Sur les valeurs de quelques intégrales définies en rapport avec les fonctions de Bessel. L'auteur considère l'intégrale 2 T f(x, 0,%) 3% cos 0 + cos SE où {(x,0,2) représente successivement : 1° cos (x sin 6) — cos (x sin o); 2° sin (x sin Ü) sin 0 — sin (xsino)sin®; 30 cos (x cos 0) — cos (x cos +); 4° sin (x cos 6) cos 0 — sin (x COS p) COS op: 20 Sciences PHYSIQUES. — M. H. A. Lorentz présente au nom de M. À. Sommerfeld (Aix-la-Chapelle) : Déduction simplifiée du champ et des forces agissant sur un élec- tron en mouvement. Dans les Güttinger Nachrichten, l’auteur a communiqué des formules générales pour le champ d’un électron se mouvant d’une manière quel- conque, d'une apparence plus simple que les formules de potentiel de M. Lorentz. La différence est la sui- vante : Les formules de M. Sommerfeld représentent les potentiels à l'aide d’une intégrale simple par rap- port au temps parcouru, où entrent seulement les distances variables d’un point fixe au centre de l’élec- tron, supposé sphérique; au contraire, les formules antérieures pour les potentiels ralentis contiennent des intégrales doubles où triples qui s'étendent sur l'espace de la charge et où entre en mème temps la distance du point fixe à la position antérieure de la charge. Seulement pour des cas particuliers M. P. Hertz, dans sa thèse (Güttingen, 1904), a appliqué une méthode capable de remplacer l'investigation générale de M. Sommerfeld, en faisant usage, pour l'énoncé de la loi de formation des potentiels, de l'image très heu- reuse d’une sphère se contractant avec la vitesse de la lumière. Dans les Gôttinger Nachrichten, M. Som- merfeld s'est servi d'une représentation à l’aide d'inté- grales de Fourier; ici il s'appuie exclusivement sur le théorème de Green. Alors, le potentiel cherché prend la forme d'une intégrale quadruple, une intégration se rapportant au temps et les trois autres à l’espace. En intégrant d'abord suivant le temps, il retrouve les formules de Lorentz; en intégrant d’abord suivant l'espace, il aboutit à ses propres formules. Sommaire : 4° Introduction, 2 Théorème de Green, 3 Transition aux formules de Lorentz et de Sommerfeld. 4 Le champ d'un mouvement stationnaire, surtout pour des vitesses surpassant celle de la lumière, 5° Les forces exercées par le champ sur l'électron, surtout dans le cas du mouvement stationnaire avec une vitesse plus grande que celle de la lumière. — M. A. F. Holleman: Sur la préparation de Portho-toluidine pure et sur une mé- thode de détermination du degré de pureté. — M. C.H. Wind présente au nom de M. C. Easton: Oscillations de l'activité solaire et du climat. MM. Küppen et Nord- mann ont montré qu'il existe un parallélisme remar=- quable entre les oscillations de la température dans la zone tropicale et le nombre et l'étendue des taches solaires ; mais on pouvait croire qu'une telle corréla- tion faisait défaut pour les zones entropiques, sans doute à cause des perturbations atmosphériques. Or, l’auteur trouve d’abord un certain parallélisme entre la fréquence des hivers très rigoureux dans l'Europe centrale et occidentale depuis le milieu du 1x° sièele (selon Küppen), et la courbe qui représente la valeur M — 1m, indiquant pour chaque oscillation undécennale le temps qui s'écoule entre un maximum de l'activité solaire et le minimum précédent. Mais une corrélation est de mème très apparente entre la courbe des taches nombres relatifs de R. Wolf) et la fréquence des hivers rigoureux, dès qu'on groupe ceux-ci dans une période de quatre-vingt-neuf, cent soixante-dix-huit ou trois cent-cinquante-six ans — correspondant à 8, 16, 32 os- cillations undécennales. Une période de quarante-cinq ans et demi est même discernable, surtout pour les hivers exceptionnellement rigoureux. Ils’ensuit qu'une même périodicité affecte les variations du climat et les manifestations de « l'énergie solaire ». Il est certain aussi que les irrégularités dans l’époque du maximum et du minimum solaires, comparés à la moyenne de onze, treize ans computée par Newcomb, sont pour une grande partie réelles, puisqu'il résulte des recher- ches de l’auteur qu'une diminution de la température hivernale correspond en général à une accélération du minimum solaire, une augmentation à un retard. M. Easton trouve encore que la période undécennale se manifeste aussi dans la courbe des hivers, de telle sorte que, prise en général, le froid augmente avec le nombre des taches, mais que les oscillations de la température précèdent celles de la fréquence des taches dans les époques froides, tandis qu’elles les suivent dans les époques relativement chaudes de la grande période. 3° SciENCES NATURELLES. — M. C. A. Pekelharing pré- sente au nom de M. M.C. Dekhuyzen : Sur la pres- sion osmotique dans le sang et l'urine des poissons. Les poissons de passage (l'anguille, le saumon, l’alose) se rendent dans un temps assez court, sans en éprouver quelque tort, de l'eau de mer, où règne une pression. osmotique de 24 atmosphères, à l’eau douce, où cette: pression est à peu près cent fois plus petite, et vice versa. Comment peuvent-ils se permettre une telle émancipation des lois de la pression osmotique? On sait grossièrement que les Téléostéens, tant en eau douce qu'en eau marine, maintiennent dans leur sang une pression osmotique à peu près indépendante du milieu environnant. Mais on ignore entre quelles limites l'organisme gouverne la teneur en sel des humeurs corporelles et par quels moyens il y réussit: Certainement, les Téléostéens sont sténotraliens, c’est- à-dire que chaque espèce exige une pression osmotique de l’eau environnante qui ne varie pas sensiblement et surtout pas trop vite. La question est tout autre chez les poissons de passage. Pour pouvoir pénétrer dans le” mécanisme de ces phénomènes physiologiques, il faut connaitre la pression osmotique dans le sang des espèces différentes. M. Dekhuyzen fait connaître les, résultats d'une série d'expériences; de plus, il signale la question comme objet d'étude à la Commission in- ternationale pour l'étude de la mer.—M. W. Einthoven présente le tome V de la deuxième série des « Onder- zoekingen gedaan in het Physiologisch Laboratorium te Leiden ». P. H. Sonoute. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE No? 30 JANVIER 1905 Revue générale des Sciences pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE _ $ 1. — Astronomie La situation de la Terre dans l’espace. — Un des plus brillants disciples de Darwin, M. A. Russell Wallace, a écrit, dans la Fortnightly Review, un article très remarqué sur « la place qu'occupe la Terre dans l'Univers, d'après l’Astronomie moderne ». Il envisage Phypothèse que notre Soleil occupe une position presque exactement centrale dans l'Univers visible et que, par conséquent, il est probable qu'il est au centre réel de l'Univers matériel tout entier. Sommes-nous au centre d’un groupe de Soleils? Ce groupe n'est-il pas seulement dans le plan de la Voie lactée, mais au centre même de ce plan? Ce sont là questions bien épineuses et qui, cependant, ne font aucun doute pour M. Wallace lorsqu'il étudie la distribution des étoiles dans l’espace; de même, l’auteur considère la Terre comme seule remplissant les conditions de la vie organique, ne pouvant s'en figurer d'autre que la propre vie terrestre. Certes, les raisonnements, tantôt astronomiques, tantôt biologiques, sont toujours instructifs et curieux; mais, néanmoins, cette tentative pour prouver un univers matériel fini échoue à chaque pas; sans doute, pour nous, l'Univers est fini, mais qu'il n'y ait rien au delà de ce que nous voyons est une question toute différente, que nous ne sommes guère aptes à résoudre. L'auteur « à agi comme ferait un homme qui pré- tendrait être au centre exact de l'Angleterre, parce que son horizon s'étend à la même distance dans toutes les directions »; nous empruntons là une conclusion du distingué vice-président de l'Association Astrono- mique de la Grande Bretagne, M. E.-W. Maunder, qui à fait une critique délicate et très serrée de la tentative de M. A. Russell Wallace, au point de vue astronomique (Journal de l'Association astronomique de la Grande Bretagne, t. XUI, n° 6). $ 2. — Météorologie Le sondage de l'atmosphère par cerfs- volants. = Nous avons eu déjà l’occasion de signaler, ici-même, l'heureuse initiative de M. A.-L. Rotch pour REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. rendre les cerfs-volants indépendants du vent naturel en les installant à bord d'un bateau à vapeur, et acquérir de la sorte de précieuses données sur les conditions météorologiques de l'atmosphère supérieure. Le Dr Fassig, de Baltimore, vient d'effectuer des ascensions de cerfs-volants aux iles Bahamas, vers la limite septentrionale de l’alizé du nord-est, mais les altitudes conquises de la sorte sont encore insuffi- santes. Les théories généralement acceptées sur les mouve- ments des contre-alizés supérieurs ne sont nullement vérifiées, ni par les observations des poussières volca- niques projetées dans la haute atmosphère, ni par celles des nuages supérieurs dans ces parages; du reste, on ne connaît ni l'altitude à laquelle persistent les alizés, ni les changements verticaux de la tempéra- ture et de l'humidité au-dessus de l'Océan. Ce sont donc, essentiellement, les alizés et contre- alizés qu'il faudrait pouvoir sonder, avec les calmes équatoriaux. Après différents essais avec un petit bateau pouvant se diriger à volonté dans la baie de Massachussets, M. Rotch a traversé l'Atlantique et put élever ses cerfs- volants cinq jours sur les huit jours de durée du voyage : il rendit compte de ses expériences, dès 1901, à l'Association Britannique à Glasgow, el ses observa- tions paraîtront dans les Annales de l'Observatoire de Blue-Hill. Depuis lors, cet auteur a élaboré un projet, el préparé un plan de campagne avec M. Hildebrandsson ; présenté au Congrès Aéronautique international de Berlin, et annexé aux procès-verbaux des projet obtint l'adhésion de la Commission interna- tionale d'Aérostation scientifique ; dernièrementencore, et sur la proposition, très compétente en ces malières, de M. L. Teisserenc de Bort, le Comité météorologique international vient de reconnaître officiellement la très haute importance de ces recherches. 3 IL s’agit d'obtenir là des renseignements de premier ordre pour la Météorologie générale et la prévision du temps; on sait ce qu'il faut observer; on sait comment l'observer, LL 11 manque 50.000 francs, ou un mécène bien inspiré pour cette œuvre utile. séances, Ce 2 46- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 3. — Mécanique Un appareil pour diminuer le roulis d’un vaisseau. — Alors que le tangage des vaisseaux ne saurait guère être diminué par voie artificielle, on a fait bon nombre de tentatives en vue de réduire le mouvement de roulis, tentatives qui ont été au moins partiellement heureuses. On augmentait la période d'oscillation latérale autant que possible, ou bien l'on diminuait dans une certaine mesure l'amplitude des oscillations produites par les impulsions des vagues frappant le vaisseau. Il n'existait, toutefois, aucun ap- pareil susceptible de mettre à prolit simultanément les deux effets dont il vient d'être question. Les pé- riodes d’oscillation considérables se réalisent en aug- mentant le moment d'inertie et en diminuant en même temps la hauteur mé- tacentrique. En rai- son, cependant, des limites étroites dans lesquelles cette mé- thode peut être appli- quée, les résultats ob- tenus dans cette voie étaient peu encoura- geants. D'autre part, on s’est servi de quil- les de dérive et de chambres à eau pour limiter l'amplitude des oscillations, et l'appareil présenté par M. Thornycroft à l’Znstitution of Naval Architects, en 1892, doit être mentionné plus spécialement à ce sujet. Or,un ingénieur al- lemand,M.0.Schlick, de Hambourg, vient d'imaginer un appa- reil ingénieux et qui paraît se prêter à aug- menter puissamment la période d'oscilla- tion du mouvement de roulis d'un vais- seau, en même temps qu'ilen diminue l’am- plitude; ces deux ef- fets simultanés sont basés sur l'action gy- roscopique d'un vo- lant installé à bord et exécutant un mouve- ment de rotation ra- pide. L'axe vertical de cet appareil est susceptible d'un mouvement de pendule dans le plan central du vaisseau. Ce dernier, en raison des oscilla- tions continues et rapides du volant, se trouve rendu insensible à l'effet des vagues, ce qui élimine pratique- ment tout mouvement de roulis. Comme l'effet qu'exerce cet appareil est fort énergique, même pour les oscilla- tions latérales les plus petites du vaisseau, les mouve- ments d’oscillation n'ont pas le temps de se propager et de prendre une intensité appréciable, à l'inverse de ce qui arrive pour les quilles de dérive, qui n'exercent leur action qu'après que le roulis a atteint une ampli- tude fort considérable. En ce qui concerne le principe sur lequel se base cet appareil, rappelons que tout corps tournant oppose à toute inclinaison de son axe une résistance d'autant plus grande que la rotation est plus rapide et le poids du corps est plus considérable. Dans la figure 4, on a représenté schématiquement Fig. 4. — Schéma du dispositif de M. Schlick pour diminuer le roulis d'un vaisseau. —R, cadre ; , FF, volant; aa, axe du volant: pp, tourillons; BB, support des tourillons. un volant se prêtant éminemment à exercer l'effet amortisseur en question, Dans un grand cadre R, tour- nant autour d'un axe horizontal perpendiculaire à la direction longitudinale du vaisseau dans deux touril- lons pp, est monté l'axe verlical à du volant FF, mis en rotation rapide par un électromoteur. Comme les forces produisant le mouvement de roulis d'un vaisseau ne sont point nécessairement d’une intensité excessive (en effet, on sait que vingt à vingt-cinq hommes courant. dans la cadence voulue d'un côté du pont d'un grand steamer à l'autre peuvent très bien produire un roulis fort considérable), le poids de l'appareil n'a nullement besoin d'être très grand. M. Schlick trouve, par ses calculs, que, dans le cas d’un vaisseau du poids de 6.000 tonnes, un volant de 10 tonnes et de 4 mètres de diamètre suffit parfaitement. Il n’y a, par conséquent, aucune difficulté à employer l'appareil Schlick sur les. vaisseaux à dimensions modérées, tels que, par exemple, les bateaux traversant la Manche, où il contribuera grandement à augmenter le bien-être des voyageurs. Les calculs qui suivent montrent bien l'action de l'appareil sur un bateau semblable. Soit donné un steamer du poids de 6.000 tonnes, présentant, avec une hauteur métacentrique de 0%,45 sans le volant, une période d’oscillation double de 15 secondes. On ins talle à bord du vaisseau un volant d'un diamètre de 4 mètres et d'un poids de 10 tonnes, tournant à une vitesse angulaire de 200 mètres par seconde, vitesse qui ne nuit nullement à la sûreté du volant, pourvu que ce dernier soit bien construit. Le poids total du volant, y compris le cadre oscillant et la machine motrice, est. d'environ 20 tonnes, les tourillons du cadre étant dis- posés de façon à placer la distance du centre de gravité du système tout entier, soit à 0,5, soit à { mètre en dessous de l'axe d'oscillation. Un tableau publié par l'inventeur fait voir que l'action de ce volant sur le mouvement de roulis d'un vaisseau est d'une intensité fort considérable. En eflet, si le vaisseau, pour une raison quelconque, à atteint une amplitude d'’oscilla- tion d'environ 4° d'un côté ou de l’autre, l'inclinaisom ne dépassera pas 1° dans l'oscillation suivante, alors que le mouvement de roulis se trouve pratiquement arrêté après deux ou trois oscillations, tandis que, dans un vaisseau analogue, mais sans volant, ce résultat n'est pas obtenu avant 6 ou Toscillations. D'autre part, la période d'oscillation du vaisseau se trouve grande- ment accrue, ce qui diminue considérablement l'in- fluence des ondes au point de vue de la production d'oscillations transversales. Comme la résistance de l'eau vient à son tour ajouter son influence, cet effel sera réalisé même plus rapidement. Une question relative au mécanisme des fluides. — Tous ceux qui ont regardé un brochet ont pu observer qu'il est pourvu d’une large gueule aplatie horizontalement et, par suite, perpendiculaire à sa queue, tandis que la plupart des autres poissons ont leur gueule aplatie dans le méme sens vertical que leur queue. Etant animal de proie, le brochet: doit pouvoir sur- passer en vitesse les autres poissons, sans quoi il-ne saurait les attraper. Pour cela, la Nature non seulement . lui a donné des formes bien:plus effilées à l'arrière: qu'à l'avant (ce qui est la condition indispensable pour obtenir de grandes vitesses), mais encore elle l’a doté de cette inversion de la tête par rapport à la queue, circonstance qui contribue largement à sa rapidité de progression. Rappelons, en effet, que lorsqu'un fluide s'écoule par un orilice, par exemple rectangulaire, la veine, qui, àsa sortie, présente ce rectangle dans le sens même de l'orifice, le laisse voir retourné dans le sens perpendi- culaire à une certaine distance de cet orifice. C'est ce qu'on à appelé « l’inversion de la veine ». Réciproquement, le brochet peut être considéré comme étant la veine inversée; en fendant l’eau dans le sens horizontal à l'avant et en la quittant dans le CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 47 sens vertical à l'arrière, il offre au liquide le minimum de parcours pour se refermer sur lui-même el reprendre sa position de repos. Il s'ensuit que le poisson éprouve une moindre résistance pour progresser, car cette résis- tance provient principalement du vide qui se formerait à l'arrière, si l’eau n'avait pas le temps de reprendre sa place pendant le passage du corps qui la traverse. Remarquons, en passant, que tous les animaux appelés à se transporter rapidement dans un fluide sont beaucoup plus effilés par l'arrière que par le devant, et ajoutons même que des formes trop fines d'avant sont tout à fait nuisibles pour les grandes vitesses, ce qu'on peut facilement démontrer, mais nous mènerait trop loin pour le moment. Disons seulement qu'il est difficile de comprendre pourquoi l'on s'obstine à donner aux embarcations quelconques des formes plus fines à l’avant qu'à l'ar- rière, alors que c’est le contraire qu'il faudrait faire. C.-L. Weyher. $ 4. — Électricité industrielle Nouvel appareil enregistreur pour la télé- graphie sous-marine. — M. Gustave Richard à signalé, à l'une des dernières séances de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, une nou- veauté curieuse dans la télégraphie sous-marine, qui montre quel parti l'on peut tirer des découvertes scientifiques en apparence les plus dénuées de toute portée pratique. On sait que l’une des caractéristiques de la télégra- phie sous-marine est l’extrème faiblesse des courants transmis par les càbles, de sorte qu'il faut, pour en enregistrer les variations et les traduire en signes lisibles, des appareils extrèmement sensibles, presque sans inertie et sans frottements. Lord Kelvin à donné une solution géniale de cette difficulté, au moyen deson siphon recorder, dans lequel le tracé de la dépêche, sur une bande de papier déroulée devant la pointe d’un petit tube capillaire en siphon, se fait par une projec- tion d'encre électrisée jaillissant de cette pointe sur le papier. L'appareil Armstrong-Orling, qui vient d'être proposé dans le même but, est fondé sur le phénomène de la variation de la dépression capillaire du mercure en fonction de la force électro-motrice du courant qui le traverse. Qu'on imagine un tube de verre rempli de mercure et terminé par une pointe capillaire plongeant dans un électrolyte, de l’eau acidulée, par exemple. En vertu de la tension superficielle existant entre le mercure de la pointe capillaire et l'électrolyte en leur contact, le mercure ne s’écoulera pas de son tube, et son niveau restera normalement à une hauteur déterminée par la constante capillaire du mercure dans ce tube, Mais, si l’on fait passer au travers du mercure et de son élec- trolyte un courant de tension variable, cette constante variera en fonction des variations mème de cette ten- sion, qui se traduiront, en conséquence, par des varia- tions corrélatives dans la position du ménisque de mercure. Il ne restera donc plus qu'à enregistrer sur un papier ces oscillations du ménisque pour repro- duire, si le courant en question est celui d'un câble télégraphique, les variations même de ce courant, c'est-à-dire les signes de la dépêche envoyée. Cet enregistrement se fait, très simplement, sur une bande de papier photographique déroulée devant une fente à laquelle arrive un faisceau lumineux concentré sur le ménisque de mercure. C’est, comme on le voit, presque tout à fait l'électromètre capillaire de Lipp- mann, mais fort opportunément détourné de sa desti- nation première, car les oscillations du ménisque suivent avec une extrème sensibilité les variations du courant, au point, par exemple, que, si l’on fait résonner un diapason devant un téléphone relié à cet enregistreur, il en reproduit exactement les vibrations. En fait, l'appareil de MM. Armstrong Orling aurait donné, sur des câbles transatlantiques, une rapidité de transmission double de celle du siphon recorder, et il aurait permis, dans des essais sur des lignes ter- restres de grande longueur (Londres-Edimbourg), en partie aériennes, en partie souterraines, de transmettre Jusqu'à 360 mots par minute. $ 5. — Physiologie Sur le suc pylorique. — On sait que les glandes contenues dans la partie de l'estomac voisine du pylore diffèrent par leur structure des glandes contenues dans la région du grand cu!-de-sac. Ces dernières sont con- stituées par deux sortes de cellules, les cellules prin- cipales et les cellules de revêtement; les glandes pylo- riques sont constituées par une seule espèce de cellules, analogues, mais non identiques, aux cellules prinei- pales. Le suc pylorique, sécrété par ces glandes, a-t-il la même constitution, les mêmes propriétés physiologiques que le suc fundique? Contient-il à la fois de la pepsine et de l'acide chlorhydrique, lui conférant une fonction peptonisante ? On sait qu'Heidenhain avait obtenu du suc pylorique pur en isolant dans la région pylorique un anneau gas- trique, le transformant par des sutures en une poche etabouchant cette dernière à la paroi abdominale, après avoir rétabli par des sutures convenables la continuité de l'appareil digestif rompue par cette préparation. Le suc sécrété par celte poche pylorique de Heidenhain était alcalin,riche en mucus, contenant un peu de pep- sine, capable par conséquent de peptoniser les sub- stances protéiques après acidulation. : Mais on pouvait se demander si le suc pylorique recueilli par Heidenhain était du suc normal. Les sec- tions pratiquées sur l'estomac dans la préparation de la poche pylorique portaient sur les filets nerveux con- tenus dans les parois gastriques, et l’on était autorisé à supposer que la muqueuse pylorique, privée d'une partie de son innervation normale, sécrétait anormale- ment. M. A.J. Schemiakine, dans le but de résoudre défini- tivement la question de la composition et des propriétés du suc pylorique, a modifié le manuel opératoire de Heidenhain et réalisé une fistule dans laquelle tous les filets nerveux de la poche isolée sont respectés : l’opé- ration se pratique, d’ailleurs, comme l'opération ana- logue pour le grand cul-de-sac : la muqueuse seule est séparée du reste de la muqueuse gastrique pour former la poche sécrétante ; les tuniques musculeuse et séreuse sont conservées intactes dans leur continuité. Le suc pylorique obtenu dans ces conditions, chez le chien, estun liquide sirupeux, incolore, contenant des flocons muqueux; sa réaction est toujours faiblement alcaline ; il contient de la pepsine, car, aprèsacidulation à 4°/, il peut peptoniser les substances protéiques. Sa sécrétion est continue; elle est, d’ailleurs, indépen- dante vis-à-vis des nerfs vagues, car elle n’est modifiée ni par leur section ni par leur excitation. Si, au point de vue anatomique, le grand cul-de-sac et la région pylorique ne sont que les parties d’un même tout, l'estomac, au point de vue physiologique, ils doivent être nettement séparés, d'après M. A. J. Sche- miakine, car les propriétés et le mode de sécrétion des sucs fundique et pylorique sont nettement distincts. Ces recherches établissent que l’on peut parfaitement étudier les propriétés de la région fundique au moyen de la préparation de Heidenhain, puisque la sécrétion et les propriétés du suc ne sont pas altérées par cette préparation. $ 6. — Sciences médicales Le surmenage des musiciens. — Tous ceux qui ont fait beaucoup de musique savent ce qu'est le surmenage des musiciens, c'est-à-dire la fatigue ou la douleur que l’on ressent dans la main, à la suite d’un jeu prolongé. Cette fatigue est accompagnée d'un ma- 48 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE laise plus ou moins violent. Or, il est certain qu'il suffit souvent de prendre quelques précautions pour préve- nir le mal, et empêcher ainsi la transformation d'une forme légère de cette affection en une forme plus grave, à savoir la véritable paralysie ou la crampe. On a rai- son d'admettre que ces manifestations de surmenage proviennent d'un excès de jeu. Très souvent, il en est bien ainsi; mais il y a toute une série de cas où il ne peut être question d'un excès d'exercices de musique, dans le sens usuel du mot. Nous désirons attirer ici l'attention sur les circonstances qui provoquent très rapidement le surmenage, à tel point que les limites des phénomènes de vie normaux dans le corps humain se trouvent dépassées. Nous pouvons dire d'emblée, ce- pendant, qu'il est heureux, pour un grand nombre de personnes qui désirent devenir musiciennes, que les perturbations maladives dans le jeu des instruments se produisent d'ordinaire dans la jeunesse, ce qui per- met aux vocations réelles de s'affirmer. Nous nous occuperons en première ligne des pia- nistes, qui forment le principal contingent des musi- ciens. Si, chez tous les virtuoses du violon qui ont commencé à jouer à un àge très jeune, on peut obser- ver un allongement de l'index et du majeur de la main gauche, de 1 à 2 centimètres par différence sur les doigts correspondants de la main droite, nous remarquons chez les pianistes une forme rectangulaire des pha- langes unguéales, qui prennent l'aspect de véritables marteaux, et une forme rectangulaire des ongles. Sou- vent aussi ces mêmes phalanges, aux pouces particuliè- rement, sont aplaties, courtes et larges, formant ce qu'on appelle le « sabot de cheval ». Nous pouvons éga- ment constater que, plus la personne était jeune lors- qu'elle a commencé à étudier la musique, plus pronon- cées aussi sont les transformations de la forme des doigts. Ce ne sont pas seulement les organes qui sont mis davantage à contribution pendant le jeu qui augmentent de volume, mais c'est aussi le bras en- tier, qui se développe plus fortement. Il n’y a point de musicien et surtout de pianiste qui n'ait échappé, de temps en temps, à des tiraillements des muscles, des nerfs et des articulations; il sutfit de quelques jours de traitement convenable pour en faire disparaitre les suites. On obtient ce résultat par le massage, par un bandage compresseur, formé de bandes molles, que l'on pourra aussi empeser. Le repos que procure ce bandage aidera lui-même à la guérison. Il s’agit donc d'un traumatisme, se présentant subitement, et que l’on traitera par les procédés usuels de la chirurgie. Les violonistes aussi échappent rarement à /a lésion des nerfs, qui cause des élancements aux bouts des doigts de la main gauche, à l'exception du pouce, et qui provient de longs exercices d’octaves et de glissan- dos. Ces irritations des nerfs sensitifs disparaissent d'ordinaire assez vite, dès que l’on supprime la cause de leur apparition, à savoir les trop longs exercices. On pourra également employer, pour ces exercices, un doigtier, pris à un gant quelconque, et que l’on mettra au doigt qui souffre le plus. On peut en dire autant du renflement qui se forme à l'éminence thénar du petit doigt à la suite d'exercices exagérés de ce petit doigt, le « quatrième doigt », comme l’appellent les violo- nistes, ou à la suite d'études destinées à le fortifier, et après des exercices de grande extension comme, par exemple, les dixièmes. Ce que nous avons en vue ici, tout particulièrement, ce sont les exercices n°° 3 et 14 de la Gymnastique du violon de M. G. Léonard. Il s'agit réellement là d'une crampe clonique de ce groupe de muscles. Il se présente aussi à l’avant-bras droit une sorte de gauchissement ou renflement, à savoir une crampe tétanique d'une portion du deltoïde, causée par des répétitions continuelles de coups d'archet détachés, exercices d’archet désignés par M. L. S. Meerts, dans son Mécanisme du violon, sous le nom de « coups d'ar- chet grands détachés », ou quatrième coup d'archet fondamental. Avant que la crampe se produise, on éprouve une sensation de grande fatigue, et cela d’au- tant plus tôt que l'on tient sa main droite à la même hauteur que le violon, position nécessitée par les notes basses de l'exercice. Lorsqu'on cesse de se livrer à ces exercices dès qu'une contraction spasmodique des muscles se produit, cette sensation de fatigue, causant un renflement, disparaitra en quelques mi- nutes. Plus on s'exercera, plus facilement aussi les contractions se reproduiront, et les sensations anor- males seront ressenties d'autant plus longtemps. Il en sera autrement, s'il s'agit de souffrances provenant de ce que le musicien accomplit, d'une manière durable, une tâche dépassant la force de résistance dont il est capable. Ces désagréments apparaissent furtivement et deviendront lentement, mais régulièrement, plus in- tenses. Il y aura pour un certain temps des améliora- tions, puis des rechutes, jusqu'au moment où, pour une cause minime quelconque, la mesure sera dépas- sée, et l'artiste se verra obligé tout à coup d'abandon- ner complètement son jeu d'instrument,. Dans ces cas chroniques, les excitations nerveuses ne restent pas localisées aux membres qui travaillent directement, mais elles envahissent des surfaces tou- jours plus étendues, bien qu'il n'y ait pas toujours continuité dans cette propagation. Cette continuité dépendra, en effet, de la puissance de résistance plus ou moins considérable que peuvent offrir les organes voi- sins. C'est ainsi qu'il peut se présenter des paralysies et des douleurs aux mains et aux épaules, sans qu'elles se fassent sentir aux coudes. Des douleurs rayonnantes de ce genre peuvent atteindre l'omoplate et le dos. Dès que ce mal à pris un caractère durable, il exerce une influence sur l’état général de la santé. Il se produit une irritation générale, et, d'ordinaire, des manifes- tations extérieures, qu'on peut très facilement remar- quer, viendront bientôt l'accompagner. Les couleurs de la figure pälissent ou tournent au gris-cendré, et l'on s'aperçoit souvent, à la diminuation du poids du corps, que la nutrition générale n’est plus normale. Les membres qui auront été mis le plus à contribution prendront une part principale à cet amaigrissement. L'on voit alors se produire les troubles qui constituent l'ensemble des symptômes de la faiblesse générale des nerfs, accompagnée de la maladie spéciale des nerfs qui régularisent la nutrition, l'assimilation, la désassi- milation et la croissance des organes en cause. Nous pouvons admettre, en général, que la cause du mal provient des exigences beaucoup trop exagérées aux- quelles les élèves ont dù se soumettre. On voit de jeunes personnes auxquelles on fait faire des exercices de piano très pénibles et de longue durée, tandis que leurs corps sont loin d’être suftisamment développéspour ce travail. Nous voyons des personnes de petite taille, et . dont le corps est encore peu développé, faire des exer- cices de piano (par exemple les études pour le mouve- ment perpétuel) dont l'intensité dépasse leur force. Le système nerveux de ces personnes nest pas en état, non plus, de supporter la grande irritation des sens, qui se produit aussi bien par les ondes sonores qui frappent leurs oreilles que par la multitude des chocs sur les touches dures, sans parler de l'influence psy- chique que produit la musique elle-même. Dans l'intérêt de ces pianistes, nous aurons à com- battre chez eux les causes du mal, qu’elles soient locales ou générales. Pour lutter contre les causes locales, on pourra considérer la méthode du jeu et trans- former tout spécialement la position, la manière de s’as- seoir et le toucher du pianiste; quant aux autres causes, on les combattra en changeant la nature des exéreices etes morceaux de musique. On ne peut méconnaître qu'il y ait actuellement grand progrès dans la lutte contre les premières causes de ces affections, et l’on rencontre de plus en plus rarement, chez les jeunes pianistes, les maux qui proviennent de méthodes de jeux défectueuses. Par contre, on voit augmenter de plus en plus les inconvénients provoqués par l'étude de compositions musicales exigeant des jeunes artistes une puissance de travail poussée à l'excès, et qui dépas- CHRONIQUE ET CIRRESPONDAN ) 49 sent ce que peut exécuter un homme, pourvu de membres ordinaires et de facultés musicales de puis- sance moyenne. C'est à de meilleurs professeurs de musique, dont le nombre s'accroit toujours, que nous devons la vulgarisation d'un enseignement plus métho- dique, tandis que les exercices sans fin, el par consé- quent la perte de forces corporelles et intellectuelles qu'il n'est pas toujours possible de réparer plus lard, ont pour origine la vanité maladive et le désir de vaincre les difficultés techniques les plus ardues. L'art de la musique, ainsi compris, risque d’être placé sur le même rang que le sport de l’automobilisme et des courses à obstacles, dont les victimes deviennent na- turellement de plus en plus nombreuses. Il y à cer- taines compositions musicales pour piano, dont nous ne citerons, comme exemple, que la « Fantaisie » en ut majeur (der Wanderer) de Schubert-Liszt, la Fan- taisie sur Don Juan de Liszt, et l'étude en ut majeur de Rubinstein, qui exigent des efforts que de vérita- bles athlètes peuvent seuls accomplir, si l'on veut que l'effet voulu soit réellement rendu. Nous nous permettrons de constater que la dexterité qu'on exige aujourd'hui de la part des pianistes dépasse la puis- sance physiologique du travail à la main. Il est vrai qu'on cherche actuellement à introduire une transformation que l’on n'a pas envisagée comme possible jusqu'à ces dernières années. On à émis des doutes au sujet de l’infaillibilité de la construction moderne des pianos, et, de divers côtés, l’on à essayé de faire du piano un instrument plus commode et plus maniable pour les personnes dont les mains sont d’une taille qui ne dépasse pas la normale. Il est vrai que la solution de ce problème présente certaines difficultés, car la construction de pianos d’un genre nouveau, dont on devra faire l'expérience, exigera de grosses dépenses de la part des fabricants, qui ne seront pas toujours certains de rentrer dans leurs frais. Nous avons cherché à procurer également au piano les avantages qu'offre le violon, que l’on peut se pro- curer de grandeurs différentes, et qui s'adapte à tout âge et à toutes les dimensions de la main. Nous avons fait construire, il y a quelques années, des pianos dont les touches étaient plus étroites, et nous les avons appelés pianos pour la jeunesse. Is exigeaient, pour le jeu, de moindres écarts des doigts. Il a été exposé des pianos de ce genre, au cours de ces dernières années, dans différentes expositions, entre autres à l'Exposi- tion d'Hygiène de Breslau, à l'Exposition industrielle de Dusseldorf, et ailleurs. Un Hongrois, M. Paul de Janko, fut encore plus radi- cal. Il créa, il y a une vingtaine d'années, un tout nou- veau clavier du piano, et chercha ainsi à simpliüer le jeu au moyen d'une construction toute spéciale de l’ins- trument. Il était persuadé que, pour le jeu, les doigts doivent être situés, non pas sur un Seul plan, mais sur trois, et que, de cette facon, les mouvements de la main entière, pour les tirades et les accords, peu- vent se suivre les uns les autres plus facilement dans une direction verticale que dans une direction hori- zontale. Il organisa six claviers en escalier les uns au- dessus des autres. Deux de ces claviers forment tou- jours un seul groupe, si bien que chaque touche peut être frappée à deux endroits que le pianiste peut uti- liser au choix et selon sa commodité. Les passages chromatiques et les doubles touches peuvent être exé- cutés en un temps extrêmement court. Les pianos à clavier Janko n'ont obtenu, jusqu'à présent, qu'un succès relatif, et cela provient surtout de ce que les professeurs de musique sont obligés, avec ce nouvel instrument, de faire l'étude d’un autre jeu. On n’a pas, non plus, réussi entièrement à construire, pour ce système, une mécanique qui fonctionne suffisamment bien. Ce n'est guère qu'au centre du clavier que les leviers de frappe se trouvent exactement vis-à-vis des cordes. Une certaine inégalité du jeu est causée par les trois petits claviers fixés l’un derrière l’autre au moyen d'un levier. Le levier A/enzel, adapté tout récemment pour remédier à cel inconvénient, n'a cependant pas complètement réussi à rendre le jeu des claviers pos- térieurs aussi égal que celui des premiers. Le « Piano système Virgile », pour étude du mécanisme, a une certaine valeur pratique. L'on s’en sert pour les exer- cices de doigté et de dextérité. Au lieu de sons musi- caux, on entend, lorsqu'on frappe les touches et qu'on les quitte, un bruit qui a de l’analogie avec celui des appareils télégraphiques. La résistance des touches peut être graduée. Pour utiliser cet instrument, il faut donc séparer l’enseignement musical du travail des deux mains, et l’on pourra obtenir un jeu pondéré, sans être irrité désagréablement par les sons [répétés du piano. De cette facon, le musicien conserve une force intellectuelle plus vive et plus fraiche, qu'il peut mettre à profit d'une manière plus intense à un mo- ment donné. Le D' Moser a apporté, dans ces derniers temps, un certain perfectionnement aux pianos usuels. Il utilise, plus qu'on ne ïe fait généralement, la puissance de vibration de la table d'harmonie pour la formation des sons. Il donne une épaisseur quatre à cinq fois plus forte que d'ordinaire à la table d'harmonie, puis, en supprimant les barres de table, il rend cette dernière plus homogène. Le volume considérable et la forte élasticité de la table font résonner chaque son plus longtemps, si bien qu'on pourrait obtenir un jeu très lié (legato), à la suite d'exercices beaucoup moins longs et sans l'emploi de la pédale. Il y a des moyens, en nombre suffisant, à la disposi- tion des maitres et directeurs de musique pour lutter contre la fréquence des manifestations de surmenage. Nous en indiquerons les principaux : On réduira les exercices, qui n'ont d'autre but que de faire briller l'artiste dans les salles de concert. Le compositeur devrait songer, plus qu'il ne l’a fait jusqu'à présent, aux capacités de l'artiste normal, et diminuer le nombre des compositions casse-cou, ef d’une longueur déme- surée. On cherchera aussi à s'adapter, autant que pus- sible, aux facultés du musicien ou de l'élève, à son âge, à son développement corporel, à la configuration ana- tomique de ses mains, à la longueur et à l'épaisseur des doigts, etc. D: Zabludowski. Directeur de l'Institut de Massage de l'Université de Berlin. Transmissibilité de la dysenterie armi- bienne en France. — Les cas jusqu'ici observés en France de dysenterie amibienne sont des cas d'impor- tation, venus des colonies. Les foyers qui sévissent en France, à Toulon et à Marseille par exemple, sont con- sidérés comme stériles et n'ayant aucune propriété extensive. M. Dopter vient de montrer que cette ma- nière de voir est trop absolue ; ila pu, en effet, observer plusieurs cas de cette dysenterie nés en France, par contagion, chez des soldats d'un régiment colonial de Paris, n'ayant jamais séjourné aux colonies, et qui ont contracté leur maladie au contact des dysentériques venant des pays chauds. Des faits que l’auteur présente, deux sont particulièrement nets et offrent toutes les garanties bactériologiques : présence d'amibes dans des selles, inoculation positive au chat, recherche du bacille négative et absence d'agglutination. Les mêmes cons- tatations ont été faites sur les malades ayant de la dis- sémination des amibes..Ces faits, entourés de toutes les preuves étiologiques, sont à rapprocher d'une véri- table épidémie de famille, provoquée par Jürgens sur des chats placés dans une même cage. Ces considéra- tions sont de nature à faire envisager le diagnostic étiologique de tout cas de dysenterie comme de la plus haute importance, car le pronostic est tout à fait diffé- rent pour les deux sortes de dysenterie, et, de plus, la dysenterie bacillaire seule est justiciable de la sérothé- rapie antidysentérique. , 1 Société médicale des Hôpitaux, séance du 28 octobre 1904, A © CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE N 7. — Sciences diverses La question du sucre et la Convention de Bruxelles. — La question du sucre intéresse tout à la fois l’industrie, l'agriculture, le commerce, la navi- gation et le Trésor public. C’est dire la complexité des intérêts en jeu‘. Née à la faveur du blocus continental, l'industrie du sucre de betterave commença à se déve- lopper grâce à la loi de 1814, qui élevait à 20 francs la taxe sur le sucre colonial, alors que le sucre indigène, jugé quantité négligeable, n'était l'objet d'aucune mesure fiscale. En 1838, on comptait déjà 575 fabriques, avec une production annuelle de 40 millions de kilogs. Ce régime de faveur prit fin en 1837; le sucre de bette- rave fut frappé d'un impôt qui s'éleva jusqu'à 45 francs — taxe du sucre colonial — en 1847. Par cette égalité de traitement, le législateur croyait avoir placé les deux industries dans des conditions équivalentes. On avait compté sans les progrès de la science. L'industrie indigène ne cessa point sa marche ascensionnelle, tandis que les colonies — usant de méthodes routinières et souffrant des difficultés de main-d'œuvre par suite de la suppression de l'esclavage — voyaient leur pro- duction baisser de 102 millions de kilogs, en 1845, à 40 millions, en 1850. Malgré l'élévation de Ja taxe jusqu'à 73 fr. 50, en 1875, le sucre indigène tend à s'emparer exclusivement du marché intérieur. Une crise survint cependant, au moment de la diminution des débouchés extérieurs . par le fait de la concurrence étrangère et notamment de celle de l'Allemagne et de l'Autriche. Tandis que 4 notre production descend de 462 millions de kilogs, en 1875-76, à 393 millions, en 1881-82, celle de l'Alle- magne, pendant la même période, s'élève de 256 à 849 millions de kïlogs. Il fallait à tout prix améliorer les méthodes de fabrication et les procédés de culture. La loi de 188% fut un stimulant. L'impôt ne portait plus sur le sucre raffiné, mais sur la matière première, la betterave, et plus la betterave produisait de sucre, plus le fabricant touchait de bonis de fabrication. Ce qui arriva, c'est que, par l'emploi d'engrais chimiques choisis avec soin selon la nature du sol et les exigences de la plante, par la sélection savante des meilleures graines, l’agriculteur ne cessa d'accroître la richesse en sucre de ses betteraves, pendant que, d'un autre côté, le fabricant renouvelait son outillage. La densité du jus sucré passa de 4 et 5° à 7 et 8e, et les diffuseurs vinrent remplacer la presse hydraulique. Tandis que la production du sucre prenait un déve- loppement extraordinaire, s'élevant de 373.000 tonnes de sucre raffiné, en 1884-85, à 1.400.000 tonnes, en 1902-1903, notre consommation intérieure se mainte- nait autour de 450.000 tonnes, et ceci ne peut guère s'expliquer que par le fait d'un impôt égal à deux fois la valeur du sucre. Car il n'y a pas d'autre raison sérieuse à ce que la consommation du sucre en Angle- terre dépasse #1 kilogs par habitant, alors que, en France, elle est de 12 kilogs seulement. Nous devions donc recourir à l'exportation et chercher des débouchés à l'étranger, et, comme l'Allemagne et l'Autriche accordaient des primes directes aux exportations de leurs fabricants, nous avons imité leur exemple par la loi du 7 avril 1897. La prospérité nouvelle qui s’ensuivit montra bientôt combien ce dernier remède était fac- tice; la production s'accrut, mais elle ne tarda pas à ètre arrêtée par l'encombrement des marchés et même par la fermeture complète de quelques-uns, comme celui des Etats-Unis. La crise était internationale; il fallait que le nouveau remède le fût également. Notre pays, d'accord avec l’Allemagne et l'Autriche, prit alors l'initiative d’une Conférence qui s’est ouverte à Bruxelles et qui a abouti à la convention signée le 5 mars 1902 par la France, l'Allemagne, l'Autriche- Hongrie, la Belgique, l'Espagne, la Grande-Bretagne, * Revue économique internationale, 15-20 juin 1904. A | l'Italie, les Pays-Bas, la Suède et la Norvège. C'est une véritable convention douanière entre les puissances signataires qui s'engagent : 1° à supprimer, partout où ils ont été établis, les avantages directs ou indirects accordés à la production ou à l'exportation des sucres; 20 à frapper d'un droit compensateur ou de prohibition absolue les sucres provenant de pays qui accorderaient des primes; 3° à limiter au chiffre maximum de 6 francs par 100 kilogs pour le sucre raffiné et de 5 fr. 50 pour les autres sucres la surtaxe, c’est-à-dire l'écart entre le taux des droits dont sont passibles les sucres étrangers et celui des droits auxquels sont soumis les sucres nationaux. Les Chambres françaises ont ratifié la convention et ont, pour s’y conformer, voté la loi du 28 janvier 1903, abrogeant la loi de 1884 et fixant le nouveau régime des sucres. Les deux premiers articles de cette loi sont ainsi CONÇUS : Art. 1. — A partir du 4# septembre 1903, les droits sur les sucres de toute origine livrés à la consommation sont ramenés aux taux ci-après, décimes compris : sucres bruts et raffinés, 25 francs par 100 kilogs de sucre raffiné; sucres candis, 26 fr. 75 par 100 kilogs de poids effectif. A partir de la même date, le droit de fabrication de 1 franc par 100 kilogs, institué par l'art. 4 de la loi du 7 avril 1897, est supprimé. Le droit de raffinage établi par ledit article est ramené de 4 à 2 francs. Art. 2. — Les surtaxes de douane sur les sucres étrangers de toute origine sont, à partir de la même date, modifiées ainsi qu'il suit : sucres raffinés et sucres bruts d’un titrage de 98 °/, au moins, 6 francs - par 100 kilogs de poids effectif; autres sucres, 5 fr. 50 par 100 kilogs de poids effectif. Comme on le voit, l'idée essentielle de la loi, c’est que le Trésor public, débarrassé de la charge des primes, consent à abaisser de 64 à 27 francs les droits sur les sucres. Quelles seront pour la France les conséquences de ce nouveau régime? Du côté de l'exportation, nous ne saurions avoir de grandes espérances. Si nous sommes les plus rapprochés de l'Angleterre, le grand marché du sucre et l’un des rares pays qui n’en produisent pas, nos prix de revient sont plus élevés qu'en Allemagne. Dans ce dernier pays, l'industrie sucrière s’est localisée dans des régions de grande propriété; les rendements en betterave sont plus élevés par le fait que le laboratoire de l'usine dirige à la fois la culture et la fabrication. D'autre part, la concurrence des colonies anglaises s'annonce redoutable, et il faut s'attendre à voir le sucre de canne regagner, en partie tout au moins, le terrain perdu. Reste la consommation intérieure. L'industrie su- crière française, protégée contre les sucres étrangers par la surtaxe de 6 francs, est assurée de la fourniture du marché national, et il est certain qu'avec la baisse actuelle du prix (à quelques oscillations près) la con- sommation augmentera dans une large mesure. Ce- pendant, cet accroissement ne saurait se produire tout d’un coup, et sl faut compter avec quelques années difficiles, aussi bien pour le fabricant que pour le cultivateur. Plus difficiles peut-être pour le cultivateur, devrions-nous dire! La suppression des bonis de fabrication pourra amener une diminution du prix d'achat de la betterave, et, comme la culture de cette plante est des plus coûteuses par ses exigences en terrain, en main-d'œuvre et en engrais, l'agriculteur n'y retrouverait plus son compte. La solution de ce difficile problème doit être cherchée soit dans l’exten- sion des usages du sucre, comme, par exemple, dans l'emploi des fourrages mélassiques, si vivement recom- mandés par M. L. Grandeau, soit encore dans la découverte de méthodes nouvelles d'extraction. Le dernier mot appartient une fois de plus à la science. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE 54 LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE Le polissage est l’un des arts les plus anciens de l'humanité. [l a donné son nom à l’une des périodes de cette préhistoire que les produits successifs des industries primitives, à défaut d'autres monu- ments, servent à diviser. Quel but poursuivait l'homme en effaçant péniblement les traces de la taille sur ses haches de silex? On peut douter qu'il les rendit ainsi plus efficaces. Sans doute voulait-il surtout les rendre plus belles, plus brillantes, en faire des objets d'art, de luxe ou de culle, propres à lui concilier l'envie de ses rivaux, l'admiration des femmes et la bienveillance des dieux. Depuis Homère jusqu'au chroniqueur de la dernière revue du 14 juillet, poèles et prosateurs, grands et pelits, ont célébré l’éclat des sabres et des cuirasses. Celui des bijoux n'a pas moins ébloui les yeux. Ce sont les fourbisseurs d'armes, comme on les appelait au Moyen-Age, les orfèvres et les lapidaires, qui nous ont transmis les vieilles recettes, adaptées progressivement à la machinerie moderne, mais restées un peu mystérieuses, comme celles de tous les arts que l’enseignement n’a pas touchés. Sur ce chapitre, la littérature technologique semble bien pauvre. À peine contlient-elle quelques vagues documents, dus pour une part à des compi- lateurs qui écrivent clairement sur ce qu'ils con- naissent mal, pour l’autre à des praticiens qui expliquent obscurément ce qu'ils exécutent bien. Quant à l'étude scientifique du polissage, elle n’a guère tenté la plupart des hommes de science que leurs études avaient dirigés de ce côté. Il est ce- pendant d'illustres exceptions. Comme tout pro- grès dans la technique d'un métier ouvre un champ nouveau aux sciences tributaires, des astronomes comme Herschel et Foucault n’ont pas dédaigné, pour assurer la perfection de leurs miroirs, de s'occuper du polissage des verres d'optique. Plus récemment, lord Rayleigh' a consacré un article à la même question, et regarde le polissage comme une dépendance de la Physique molécu- laire. D'autre part, la Métallographie, en réclamant des surfaces métalliques assez bien polies pour supporter les plus forts grossissements du micros- cope, à ramené l'attention de ses adeptes sur les procédés des polisseurs. Sorby dit expressément qu'il a tenu à préparer de sa main, du moins au début de ses recherches, les plaquettes dont il vou- lait déchiffrer la structure. Et c'est indubitable- ment à son habileté manuelle et à la conscience de sa technique, que le savant anglais a dû ces résul- 1 Proc. Roy. Inst., XVI, 563, 1901. tats, immédiatement définitifs, qu'il est si rare de rencontrer à l'origine d’une science. Les métallo- graphes qui considèrent comme besogne de ma- nœuvres le polissage de leurs éprouvettes ne soupconnent pas combien d'occasions fructueuses ils négligent ainsi. Personnellement, au cours d'une pratique de plusieurs années, nous avons pu recueillir au pas- sage bon nombre d'observations et nous convaincre que l’art du polissage pose beaucoup de problèmes difficiles appartenant aux domaines de la Chimie, de la Cristallographie, de la Mécanique, de la Phy- sique moléculaire, et aux confins de ces domaines. À la vérité, nous n'avons pas abordé méthodique- ment ces problèmes, soit pour ne pas nous détour- ner de notre objel immédiat, soit parce que nous ne nous lrouvions pas suffisamment autorisés. Mais nous pensons que nos remarques pourront être pour les spécialistes le point de départ de recher- ches intéressantes, et, en présence de travaux ré- cents dus à M. G. T. Beilby', nous avons jugé op- portun de réunir nos observations éparses et de les publier. Précisément parce qu'il ne rentre pas dans notre programme de creuser aucune question bien déli- mitée, le moyen le plus commode de donner quel- que corps à ces observations sera de les rattacher aux opérations successives du polissage. I. — DÉGROSSISSAGE. Suivant la nature du corps, une section est pra- tiquée à la scie, à la lime, à la meule * ou à l’aide de tout autre outil approprié. On la passe ensuite, d'habitude, sur des papiers d'émeri de plus en plus ! Surface Flow in crystalline Solids under mechanical Disturbance and the Effects of Heat and of Solvents on thin Films of Metal. Proc. of the Roy. Soc., LXXII, 218-234, 31 août 1903. Voir aussi : Rev. de Metall., I, extraits, 33, janvier 1904. The Surface Structure of Solids. Journ. of the Soc. of Chem. Indust., 45 novembre 1903. The hard and soft States in Metals. À paper read before the Faraday Society on June 9, 1904. ? Le meulage est accompagné non seulement d'un déga- gement considérable de chaleur, mais aussi de phénomènes lumineux visibles dans l'obscurité et qui ont été remarques par M. Cartaud. Dans le cas du fer meulé sur carborundum, on obtient des étincelles analogues à celles du briquet. Certains minéraux donnent des lueurs plus ou moins vives. Le quartz, notamment, s'illumine dans toute sa masse. Cette lueur, qui rappelle celle de deux morceaux de sucre frottés l’un contre l'autre, donne au spectroscope un spectre paraissant continu. Le quartz fondu et le quartz cristallisé se comportent de la même manière. ral © [SS] fins, et on termine, si les papiers du commerce ne sont pas suffisants, avec des papiers qu’on aura fabriqués soi-même, au moyen de poudres soi- gneusement lavées et classées. On a soin de s’as- surer, en croisant les raies, que chaque papier a bien enlevé celles qu'avait faites le précédent. Chaque dent d’une lime, chaque grain d'un pa- | pier d’émeri, fait une strie sur la surface à polir. L'action globale est la somme d'un grand nombre de stries élémentaires, et, comme toutes ces stries sont pratiquement équivalentes, il suffit d'en étu- dier une. On est ainsi ramené à la branche de la Minéralogie qui s'occupe de la rayure d’un corps par une pointe d'un autre corps et qui s’appelle la scléromélrie ou mesure de la dureté. Le mot dureté est pris ici dans un sens étroit et conventionnel, car cette propriété est, en fait, la résistance à la déformation permanente, quel que soit le mode d'application de l'effort”. Toute rayure produit l'abrasion d’une certaine quantité de matière. C’est là le résultat cherché : mais ce n’est pas le seul effet obtenu. Sous la pres- sion de la pointe rayante, la matière est modifiée | jusqu'à une certaine profondeur, et cette modifica- tion est le côté le plus obscur et aussi le plus inté- ressant de la question. $ 14. — Pénétration. Quand on appuie normalement une aiguille A contre la face horizontale BC d'un corps BCB'C', de dureté égale ou infé- | rieure, on tend à faire pénétrer l'aiguille A dans le corps BC (fig. 1). Ce mode de déformation a élé étudié théoriquement par Hertz”, et expé- of. NN, rimentalement par o . EF c M. Auerbach*; il a 3 ; ni à M. Bri #21] Fig. 1. — Déformation d'un four à M: Brinell une méthode pratique d'essai, l'aiguille étant remplacée par une bille en acier trempé. Supposons d’abord, pour nous placer dans les conditions les plus simples, que le corps BCB'C/ soit amorphe et fragile. Ce sera, par exemple, du Solide BCB'C! par une aïquille normale À. — mm, fissure circulaire ; »n, solide de ré- volution. 1 Voir : La dureté, Sa définition et sa mesure : Rapport présenté par M. Osmond, le 3 décembre 1892, à la Section A de la Commission des méthodes d'essai des matériaux de construction. ? Verhandlungen des Vereins zur Belürderung des Ge- werbfleisses, année 1882, p. 449. 3 Ann. der Physik und Chemie, neue Folge, XLIII, 60, Heft 5, 1891, et XLV, 262, Heft 2, 1892. * Congr. intern. des Méthodes d'essai en 1900, WU, 83-94. OSMOND £r CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE [ | verre, dont la limite d’élasticité coïncide avec la charge de rupture. On sait que, sous une pression suffisante, il se produit d’abord, dans le plan BC, une fissure circulaire Mm, concentrique au poincon; sous charges croissantes, cette fissure s'étend dans la masse, en y découpant un solide de révolution mn, que le Professeur Auerbach décrit comme un cône. Quelques expériences faites par nous, avec le gracieux concours de M. Frémont, donne- raient plutôt un paraboloïde. Cette forme de rupture peut recevoir une expli- cation que nous avons eu déjà l’occasion de propo- Fig. 2. — Systèmes conjugués de paraboloïdes produits par la déformation dans le solide de la figure 1. ser’, explication un peu hypothétique, mais qui présente au moins l'avantage de relier les faits d'observation. Si, comme il est très vraisemblable, la transmission des efforts est ondulatoire, les lieux d'interférence des ondes seront des lieux de défor- malion maximum et, éventuellement, de rupture. Dans le cas considéré, le poincon émet des ondes sphériques et la face B'C' du solide BCB'C' des ondes planes qui se réfléchissent contre BC. Les lieux d'interférence forment deux syslèmes conjugués de paraboloïdes dont la figure 2 montre une coupe par l’axe commun, la région au-dessous de BC étant seule réelle. Le paraboloïde obtenu expérimentale- ment serail un des paraboloïdes possibles, tels que mn. La forme conique d'Auerbach s'explique, d’ail- leurs, dans la même hypothèse, si l’on attribue aux ondes qui interfèrent des vitesses différentes. Quoi qu'il en soit, si l’on fait dans le solide fêlé une coupe 22 par un plan parallèle à BC, la félure cir- culaire, si elle n'est pas immédiatement visible sur la surface polie, apparaît facilement en suite d’une altaque par l'acide fluorhydrique. Le paraboloïde du système mn est celui qui se montre le premier; mais, si l’on appuie assez fort, on peut aussi détacher une esquille telle que mom qui représenterail un paraboloïde du système eon- jugué (fig. 1). ! Baumaterialienkunde, VI, Hef( 18, Congrès de Budapest. OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE >> Ces surfaces de rupture ne sont pas tes seules possibles. L'aiguille A, appuyée contre le plan BG (fig. 1), exerce une traction le long de tous les azi- muths et il peut en résulter des vibrations paral- lèles à ces azimuths. Ces vibralions, en interférant avec les ondes sphériques concentriques à la pointe du poinçon, engendrent une infinité de sytèmes conjugués de paraboloïdes à axe horizontal. En fait, Fig. 3. — Figure fournie par l'emboutissage des métaux déformables (systèmes conjugués de paraboloïdes à axe horizontal). le nombre des systèmes enregistrés est limité, et, si chacun d'eux est représenté par le paraboloïde de même rang, on obtient dans le plan BG la figure 3; c'est celle que donnent par emboutissage les métaux déformables. Il est vrai que M. Hart- mann' décrit comme des spirales logarithmiques les courbes que nous considérons comme des para- boles. Et, si différentes que semblent ces attribu- tions, les fails s'accordent également bien avec les deux hypothèses, parce que les courbes ne s'ins- crivent pas aulour du | poinçon, dans la ré- gion où leurs formes seraient réellement ca- ractéristiques. Parmi les parabo- loïdes de la figure 2, dont l'axe est celui du poincon, la rupture par pénélration n'en montre un seul que si le verre est dépourvu de tensions internes et l'opération conduite dans des conditions de symétrie parfaite. En général, on aura plutôt un solide de rupture engendré par la ligne brisée mnopq de la figure 4 et appartenant à plusieurs paraboloïdes du même système. Ces considérations peuvent jeter quelque jour Fig. 4 — Ligne de rupture. appartenant à plusieurs pa- raboloïdes du même sys- tème, engendrée dans un solide par l'action d'une pointe, * Distribution des déformations dans les métaux soumis à des efforts, Berger-Levrault, Paris, 1896. sur les cassures dites conchoïdales. On obtient une telle cassure en remplacant l'aiguille de la figure 1 par le tranchant d'une hachette analogue à celles qui servent à casser le sucre. La surface de Fig. 5. — Lignes de rupture obtenues par l'action d'une hachette, rupture, plane dans son ensemble, montre deux systèmes de lignes orthogonales (fig. 5), dont les profils ont élé étudiés par le Professeur Mar- tens', Les unes, demi-elliptiques ou demi-circu- laires, ont pour centre le point d'impact ; en coupe, elles se présentent comme une série d’ondulations de plus en plus douces à mesure que l’on s'éloigne du centre (fig. 6). Les autres, perpendiculaires aux précédentes, ont un profil anguleux à pans inéga- MINE Fig. 6. — Profil des lignes de rupture concentriques de la figure 5. lement inclinés sur la cassure et se birfurquent fréquemment (fig. 7). On peut regarder les ondula- tions demi-elliptiques ou demi-circulaires comme appartenant aux termes successifs de deux sys- tèmes conjugués de paraboloïdes à axe horizontal, avec raccords courbes. Quant aux lignes radiantes à profil anguleux, on ne saurait les rattacher aux surfaces de rupture déjà décrites. Il semble que ok TEEN Fig. 7.— Profil des lignes de rupture radiales de la figure 5. ce soient des surfaces secondaires engendrées par la cassure principale suivant les conchoïdes. $ 2. — Rayures. à 4. Corps amorphes fragiles. — Quand, au lieu d'appuyer simplement l'aiguille À sur la surface BG (fig. 1), on la promène en même temps de façon à tracer une rayure, la rayure peut être regardée comme l'intégrale d'une série de pénétrations infi- niment rapprochées et la déformation résultante 1 Traduit par le Bull, Soc. d'Encouragement (4), VII, 506, août 1892, 54 comme l'enveloppe des déformations de pénétra- tion. L’enveloppe des paraboloïdes tels que 2»2n est un cylindre à section parabolique, et, parmi les cylindres possibles, on pourrait compter, à la limite, le plan 00’ passant par la rayure et normal à la surface rayée. C'est ce plan que l'on cherche à produire quand on coupe le verre par un diamant. Mais, surtout quand on n’est pas un vitrier habile, on produit ordinairement l’une au moins des amorces de l'un des cylindres paraboliques mn. C’est ce que montre (page 58) la figure 8 (250 diam.) : la bande sombre, nettement délimitée d'un côté etestompée de l'autre, est une glace, c'est-à-dire une fissure oblique mn qui réfléchit la lumière en dehors de l'objectif. De même sur la figure 9 (glace étamée, rayure coupante au diamant, 125 diam.); mais, ici, une lame d’air emprisonnée dans la fente donne lieu à des bandes colorées parallèles à la ravure et qui se traduisent sur la photographie par des bandes dégradées alternativement sombres et claires. Mais toute application d'un effort tangentiel tend à déterminer un mouvement vibratoire. Dans le cas du verre, par exemple, la pointe, si elle pénètre, détache une esquille, se dégage, en détache une autre, et ainsi de suite (fig. 10, 35 diam.). La figure 11 est un détail de la précédente à 150 dia- mètres. Contre l’axe, à droite et à gauche, on remarque des esquilles conchoïdales, détachées par les poussées obliques et qui passent un peu plus loin aux formes-enveloppes : le système des conchoïdes à profil doux devient parallèle à la rayure, et les lignes à profil anguleux, courbes et obliques le long de l'axe, se transforment en fines cannelures perpendiculaires à cetaxe. En même temps, il se produit une série périodique d'amorces de cassures transversales suivant les paraboloïdes de la figure 1. Mais ces paraboloïdes sont incom- plets et ne s'ouvrent qu'à l'opposé du sens de la rayure. On les accentue en attaquant la surface par l'acide fluorhydrique. La figure 12 (135 diamè- | tres) montre ainsi, après attaque, une rayure de verre par une aiguille à coudre. Cette rayure est formée de deux stries étroites, finement cannelées, qui correspondent aux lignes 2», m de la figure 1 et | que rejoignent, à intervalles qui seraient réguliers sur une rayure plus artistement faite, des demi- cercles plus épais, origines des paraboloïdes incom- plets. Dans une glace dont le polissage, suffisant en apparence, est en réalité imparfait, l’altaque par l'acide fluorbydrique donne l'aspect de la figure 13 (35 diam.);, chaque rayure imparfaite- ment enlevée est représentée par une série de chevrons équidistants, presque invisibles avant l'attaque. Ho Decharme avait obtenu des figures analogues en OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE transporlant horizontalement, au-dessus d’une plaque de verre recouverte d'une couche mince dev minium, un ajutage d’où s’écoulait un courant d’eau; la hauteur de l'ajutage au-dessus de la plaque doit, bien entendu, être suffisante pour que la veine liquide se divise en gouttes. Plus simplement encore, il suffit de frolter le doigt mouillé contre la plaque de facon à produire des vibrations que le minium enregistre d'une manière permanente ; les phénomènes ne sont pas moins visibles sur une mince couche d’eau pure; mais ils ne persistent naturellement pas‘. Quand la rayure du verre par le diamant se” réduit aux arrachements de la figure 10, le verre n’est pas coupé, et, inversement, il pourrait être coupé sans rayure visible par le plan 00 ou par le cylindre m2 de la figure 1. En général, la rayure est à la fois périodique avec arrachements con- choïdaux à la surface, continue et coupante au- dessous. D'après Venham?, le caractère périodique de law rayure pourrait être révélé dans le verre par la lumière polarisée, même quand le passage de la pointe n'a produit qu'une déformation en appa- rence élastique. Mais, nous n'avons pule constater, par le même procédé, qu’en présence d'une rayure visible et en soumettant la pièce de verre-à une compression générale entre deux faces opposées. L'apparition ou, tout au moins, l'amplitude du. régime vibratoire dépendent de l’inclinaison de l'aiguille. Si elle fait un angle suffisamment aigu * avec la direction du mouvement, l'aiguille pénètre peu et se dégage facilement : la rayure tend à être continue, où à paraître telle. Au fur et à mesure qu'on redresse l'aiguille, on facilite la pénétration, « la pointe éprouve une résistance croissante, arrache une esquille et ainsi de suite. Le moment où l'ai- guille commence à router se percoit assez nette- ment. Cette question de la rayure et de la coupe du verre n’est pas nouvelle dans la science. Dès la pre- mière moilié du dernier siècle, elle a occupé l’atten- lion de grands physiciens comme Brewster, Atwood, Wollaston. Les petites contributions que nous venons de lui apporter ne sont pas elles-mêmes | aussi neuves que nous l’avions d'abord pensé. Le brouillon de cette Note était déjà écrit quand. nous avons eu connaissance d'un très intéressant Mémoire de M. W. Prinz, que son titre : « L’échelle w réduite des expériences géologiques permet-elle leur application aux phénomènes de la Nature? » ne semblait pas désigner particulièrement à notre 1 Imitation par les courants liquides ou gazeux des phé- nomènes d'électricité et de magnétisme. Amiens, 4883, p. 63-68. ? Quart. Journ. of Sc., année 1866, p. 121. da a OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE 55 attention. Dans ce Mémoire, d'une large synthèse et dont on doit recommander la lecture à tous ceux que préoccupentles déformations mécaniques, nous avons retrouvé, faites depuis plusieurs années, la plupart de nos observations sur le verre : nous n'avions fait que confirmer des faits déjà connus. 9, Corps amorphes plastiques. — La figure 14 (page 58) montre la rayure, par une aiguille à cou- dre, d'une pellicule de gélatine encore humide dé- posée sur verre (115 diam.). Sur l'axe de la rayure, on voit une série de petites cannelures équidis- tantes, à peu près normales à l’axe. Le caoutchouc, en raison de sa grande déforma- bilité élastique, présente des caracleres un peu par- ticuliers. Nous avons oblenu des pellicules sur verre par l'évaporation d'une solution commer- ciale servant à la réparation des pneumatiques de bicyclettes. Sur la figure 15 (250 diam.), en raison de l'obliquité de l'aiguille ou de l'épaisseur de la pellicule, celle-ci n'a pas élé coupée; la matière \stest élirée périodiquement en flèches dont la pointe est orientée dans le sens de la rayure. Sur la figure 16 (20 diam.), la pellicule est coupée, tou- jours périodiquement : le caoutchouc s’amasse en bourrelels à la pointe des flèches, l'aiguille sur- monte le bourrelet pour faire un nouvel anneau, et ainsi de suite. Les coupures peuvent être accom- pagnées d'un décollement, également périodique, de la pellicule. 3. Corps cristallisés fragiles. — Les déforma- tions dont nous venons de nous occuper et que nous avons rencontrées dans les corps amorphes ne dépendent que des lois générales de la Méca- nique et, pour celle raison, on peut les appeler banales. Elles tendent à se reproduire également dans les corps cristallisés, parce que les lois de la Mécanique sont indépendantes de la structure des corps; mais, comme les corps cristallisés ont une structure spécilique, ils peuvent aussi subir des déformations spéciliques correspondantes, c'est-à- dire fonction de leur structure. Dans chaque cas particulier, ce sont naturellement les déformations les plus faciles qui apparaissent. Les déformations cristallines peuvent se ranger sous quatre chefs : 1° Clivages; 2° Macles, au sens ordinaire du mot; 3° Déformations parallèles à certains plans cris- tallographiques, considérées comme des transla- tions simples tant par M. Mügge, qui les appelle macles par translation”, que par MM. Ewing et * Rev. de l'Univ. de Bruxelles, année 1896-97, p. 721-760. ? Neues Jahrb. für Miner., années 1886, {re partie, p. 183 et 1887, 2e partie, p. 55. Rosenhain, qui les appellent s/ip-bands, c'est-à-dire surfaces de glissement". D'autre part, M. Beilby pense, non sans bonnes raisons, croyons-nous, que le glissement est accompagné d'une destruction au moins partielle du réseau cristallographique et d’une véritable transformation allotropique en une variété amorphe; 4° M. Beilby admet encore deux formes de tran- sition, qu'il désigne par les symboles M dans le passage de l’état cristallisé à l'état amorphe et M° dans le passage inverse. Quelles qu'elles soient, les déformations cristal- lines tendent à prendre l'allure périodique, tout comme les déformations banales. La figure 17 représente à 125 diamètres une rayure vibratoire, par l'aiguille à coudre, de l’anti- moine coupé suivant une face cristallographique quelconque. La structure cristalline n’est pas inter- venue : la rayure est banale. Mais, comme la fra- gilité de l'antimoine est moindre que celle du verre, il n'y à pas séparation d’esquilles conchoïdales. Il se forme des cavités successives par pénétration, avec refoulement de la matière à l'opposé de l'aiguille. Pour une position moins relevée de l'aiguille, on aurait une rayure, continue en pre- mière approximation, mais finement striée sur l'axe, comme celle de la gélatine. M. Mügge a aussi décrit dans l’antimoine des macles par déformation qui pourraient être représentées par les lignes obliques placées de part et d'autre de la rayure (fig. 18, 400 diam..). L Dans la calcite, les déformations sont surtout spécifiques. Elles ont été étudiées par M. Cesaro* et par M. Paul Jannettaz*, qui ont pu expliquer, par l'examen microscopique de ces déformations, les: différences de dureté depuis longtemps signalées suivant les différentes directions sur une même face et suivant le sens de la rayure sur une même direclion. Cette question est d'un grand intérêt pour les minéralogistes, et nous aurons probable- ment à la reprendre, avec plus de détails, dans une publication plus spécialisée. Dans cette Revue, nous nous contenterons de donner un seul exemple (fig. 19, 75 diam.). Il a été pris sur les préparations de M. Jannettaz. C'est une rayure faite par une aiguille à coudre sur une face de clivage polie, parallèlement à la petite diagonale du rhombe, en allant de l'angle e vers l'angle a. La rayure fait apparaître une série de figures triangulaires dont deux côtés sont parallèles aux clivages; le troisième, { Phil. Trans., CXCIII, 353, 1899. 2 Bull. de la Soc. française de Minér., XIII, 192, et Annales Soc. géol. de Belgique, XVII, Mémoires, année 1890 3 Communication privée. M. Paul Jannettaz n'a pas pour- suivi ses recherches et n'a pas publié les résultats obtenus, il y a une dizaine d'années, avec le scléromètre de son in- vention. 56 OSMOND £er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQIES DU POLISSAGE parallèle à la grande diagonale, correspond, d'après M. Cesaro, aux affleurements de petites lamelles maclées par rapport à L'. Sur la rayure elle-même, on peut apercevoir de petites cannelures, sem- blables à celles de la gélatine et dont on ne saurait discerner la nature exacte, puisqu'une déformation spécifique est ici possible en position normale de déformation banale. 4. Corps cristallisés plastiques. — Comme l'avait déjà remarqué M. Martens, l'influence de Pincli- naison de l'aiguille rayante et de la charge sup- portée par elle est ici très marquée. Si l’aiguille fait un petit angle avec la direction de la rayure ou si elle est peu chargée, elle trace un sillon continu, du moins en apparence : il y a simplement péné- tration. La matière qui occupait la place du sillon est refoulée à droite et à gauche et se recouvre de plissements obliques, dont la nature est vraisem- blablement banale. Exemple : rayure du fer cristal- lisé par une aiguille à coudre sur une face cristal- lographique quelconque (fig. 20, 1.200 diam.). Si l'aiguille est suffisamment relevée et chargée, elle ne se dégage qu'en enlevant des copeaux; la rayure devient nettement périodique et on lombe dans le cas du rabotage, étudié, mais non certes épuisé par Tresca” et, plus récemment, par MM. Thime”, Haussner ‘, Codron *. Les copeaux, même continus à premiére vue, sont toujours formés d'éléments discontinus de plusieurs ordres, et la matière restante subit des divisions analogues au voisinage du sillon. Nous pouvons retrouver les déformations pério- diques banales étudiées à propos du verre, et montrées par les figures 12 et 13, en attaquant, par exemple, un bronze à 9°), d’étain après un polissage incomplet, qui n’a pas enlevé toute la matière iñté- ressée par les stries de la lime ou des gros papiers d'émeri (fig. 21, 125 diam.). L'attaque à été faite par une dissolution alcoolique d'un mélange d'acide picrique et de quinone. Les chevrons régulièrement espacés sont localisés sur les parties axiales des cristalliles, c'est-à-dire sur les régions de première consolidation, plus riches peut-être en cuivre el, en tout cas, écrouies plus profondément. Le pho- togramme ne présente pas toute la clarté désirable, en raison de la complication apportée par la struc- 1 Mitth. aus den k. techn. Versuchsanstalten, VIII, 271, Heft 6, 1890. ? Mémoire sur le rabotage des métaux. Bull. Soc. d'En- cour., année 1873, p. 584 et 655, 1874, p. 503. 3 Mémoire sur le rabotage des métaux, Saint-Pétersbourg, 1871; d'après Haussner. 4 Hobeln und Härte. Oesterr, Zeitschrift für Berg-und Hüttenwesen, XI, 379 et 397, 6 et 13 août 1892, — Das Hobeln von Metallen. Mittheïil. des k. k. technologischen Gewerbe- Museums in Wien, neue Folge II, 117, 1892. 5 Bull. Soc. d'Encour., CIV, 29 et 358, janvier et avril 4903. ture propre de l'alliage et de la nécessité de montrer à la fois celte structure et les déformations produites par les rayures. Mais il n'est pas doute que ces déformations sont identiques aux parabon loïdes du verre. Quand on polit du cuivre contenant des grains d'oxydule, il arrive souvent que ces grains se détachent et tracent à la surface des lignes discon tinues présentant le même caractère. C’est là une grosse difliculté dans le polissage du cuivre. Continue ou périodique, la rayure produit un en trainement amorphe de la matière. Sur la figure 22 (125 diam.), une rayure au diamant pratiquée sur une face p d'un cristal de fer, et en partie arasée par un repolissage ultérieur, a imprimé une forte courbure à des lamelles de Neumann antérieure ment rectilignes. Cette courbure semble devoir impliquer quelque chose comme une dislocalion du réseau cristallin et nous parait difficilement explicable par un processus de déformalion pure= ment cristallographique. Nous passons maintenant aux déformations cris= tallines. Les clivages faciles, comme ceux de la calcite, sont peu compatibles avec la plasticité. Il existe, cependant, une curieuse exceplion, celle du fer, que nous avons éludiée en détail, avec le concours de M. Frémont, dans la levue de Métallurgie de janvier dernier. Larayure peut engendrer des macles, par exemple dans le zinc (fig. 23, 125 diam.). Deux rayures de sens contraires ont été faites sur la surface, polie par coulée sur verre, d'un pelit lingot de ce métal. Sur chaque strie se forment des chevrons dont la pointe est lournée à l'opposé du sens de l'effort, tout comme dans le verre. Cependant, il ne s'agit plus ici de déformations banales. Les lignes, con- venablement éclairées en lumière oblique, se mon- trent formées par l'intersection de deux plans; leur direction, constante sur un même grain, change quand on passe au grain voisin el varie aussi avec le sens de la rayure. On a donc bien affaire à des déformations cristallines et, nommé- ment, à des macles, en raison du profil. Mais ces déformations se substituent le plus exactement possible aux déformations banales qu'elles rem- placent. La même figure montre aussi des plisse- ments doux, courbes, d’origine banale, analogues à ceux de la figure 20. Les slip-bands sont également très fréquentes: La figure 24 (350 diam.) en est un exemple sur le cuivre fondu, la figure 25 (250 diam.) un autre exemple sur le nickel forgé. Les macles, qui sont ici facilement reconnaissables, préexistaient. Sur le plomb (fig. 26, 150 diam.), la rayure, pratiquée sur une lame mince, détermine, oulre les shp- AT OSMOND £r CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE 57 Dands, de gros plissements courbes rappelant ceux | proposons d'appeler le derme, ne peut pas être du caoutchouc de la figure 15. Nous avons dit que la rayure paraissait pouvoir entrainer quelque modification du réseau cris- tallin. L'étude de ce phénomène est à peine ébau- chée. La figure 27 (1.200 diam.) montre, après repolissage partiel, le fond d'une rayure sur face p d'un cristal de fer : la rayure est parallèle à un côté du carré, et l’on a fait apparaître les figures de corrosion par une attaque de deux minutes au chlorure double de cuivre et d’ammonium en solu- tion à 12 °/,. Ces figures de corrosion, sur la rayure, sont nettement différentes des figures carrées du voisinage etrappellentles cannelures de la gélatine. Le photogramme 28 (125 diam.) donne des indi- “cations analogues. On y voit le fond d’une grosse rayure laissée par un polissage imparfait. Gelte rayure traverse un grain de fer d'orientation inconnue, parasite d'un cristal coupé suivant une face p. On a attaqué par l'acide picrique en solu- tion alcoolique à 5 °/,. Le grain parasite se recon- nait à son polissage beaucoup moins avancé. Le “fait curieux est que 1e fond de la rayure présente à peu près, sur le grain parasite, l'aspect d'une face p, et, sur la face p, l'aspect d'une face difré- rente de p. De même, sur un bronze à 9 °/, d'étain, attaqué par une solution acélonique d'acide picrique et de quinone ‘,—solution qui colore les grains du jaune clair au brun foncé suivant leur orientation cris- talline, — la trace d’une rayure arasée par un polissage incomplet change de couleur en chan- geant de grain. En même temps, cetle trace se couvre de stries en chevrons comme nous en avons déjà trouvé sur le zinc, mais qui sont ici révélées par une attaque (fig. 29, 800 diam.) et, vraisem- blablement, des slip-bands. Les phénomènes de ce genre pourront et devront être mieux étudiés en lumière polarisée sur les corps transparents. Une lamelle de gypse, assez mince pour donner lieu aux apparences de la pola- risation chromatique, laisse reconnaitre la trace d'une pointe frottante par une coloration différente de la coloration générale. Nous avons vu, par exemple, telle de ces traces mauve sur champ bleu, rouge sur champ vert, ou inversement. Comme conclusion de ce chapitre, nous voyons que le dégrossissage laisse après lui non seulement une surface encore marquée de stries visibles, mais, au-dessous de cette surface, une couche d'une certaine épaisseur où la matière est écrouie, c’est-à-dire modifiée par des déformalions banales ou cristallines ou mixtes. Cette couche, que nous 1 11 convient que la solution ait déjà servi un certain nombre de fois. Les solutions neuves ne montrent pas bien la structure cristalline, nulle, puisque le papier d'émeri le plus fin écrouit. Mais son épaisseur est proportionnelle à la grosseur de l'émeri. Le rôle des papiers successifs, de plus en plus fins, est à la fois de substituer à des sillons d'abord relativement profonds des sillons de plus en plus légers, et de réduire le derme au minimum correspondant au dernier papier. IL. —" FINISSAGE. Le finissage a pour objet de rendre le poli spécu- laire. Il se fait par le frottement d'une poudre impalpable, sèche ou humide, retenue par un subs- tratum convenable sur un plateau tournant animé d’une vitesse plus ou moins grande. L'industrie se sert, suivant les cas, de poudres très variées, rouge, tripoli, carbonate de chaux, etc... Mais, dans les laboratoires de métallographie, l'alumine et l’oxyde de chrome, lévigés par le procédé de Schlæsing suivant les indications de M. Le Chatelier, tendent à devenir d'un usage à peu près exclusif. On les étale d'habitude sur un drap bien dégraissé et on humecte à la consistance voulue avec de l’eau pro- jetée par un pulvérisateur. On peut obtenir ainsi, du moins sur les métaux qui ne sont pas trop mous, un poli spéculaire parfait. : Si l’on cherche à se rendre compte de ce résultat, k première idée qui se présente à l'esprit est de penser que le finissage est simplement la conti- nuation du dégrossissage et n’en diffère que par la ténuité et la mobilité des poudres employées après l’émeri. On substituerait à des raies visibles des raies invisibles, et le derme créé par ie dégros- sissage serait enlevé sans être remplacé par un autre plus mince. Cette opinion contient probablement une part de vérité, mais il est permis de douter qu'elle soit suffisante et complète, La perfection du polissage n'est, en effet, qu’ap- parente. Le derme est masqué, mais il subsiste, et l'on peut le mettre en évidence par des révélateurs de deux sortes, chimiques et mécaniques. 1° Révélateurs chimiques. — Quand on attaque une surface métallique polie par un réactif quel- conque, il est rare que, pendant une cerlaine période au moins, quand l'attaque n'est ni trop faible, ni trop poussée, on n’aperçoive pas les traces de raies de dégrossissage qui étaient aupa- ravant invisibles ou beaucoup moins visibles, La figure 28, dont nous avons déjà parlé et qui donne, après attaque, l'impression d'un polissage tout à fait grossier, présentait, avant cette opéra- tion, un poli déjà très passable, Ne A; A 4 à A > Fig. 8 à 43. — Micropholographies des divers aspects obtenus finissage des corps solides. e le polissage et 1 par la rayure, 60 OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE Un bronze à 9 °/, d’étain, chauffé aux couleurs de revenu, est beaucoup moins beau qu'avant le chauffage : l'oxydation a révélé, par des colora- tions différentes de celles de la masse, des stries de dégrossissage plus ou moins cachées. M. Beilby décrit une expérience particulièrement nette : quand on attaque pendant dix à quinze secondes, par l'acide chlorhydrique très dilué (0,2 °/, environ de HCI), une face de clivage fraiche de la calcite, la surface attaquée, bien qu'un peu ondulée et irrégulière, ne montre pas de structure. Si, au contraire, avant l'attaque, on avait passé sur la face de clivage le doigt recouvert d'une peau douce, l'acide fait rapidement apparaître des stries latentes engendrées par le passage de la peau, alors que ces stries élaient complètement invisibles avant la morsure de l'acide. 929 Révélateurs mécaniques. — Beck Guerhard a montré que les lignes de Lüders, obtenues, par exemple, en poinçonnant une tôle d'acier et effa- cées par un repolissage ultérieur, réapparaissaient quand une éprouvette découpée dans la tôle était soumise à un autre mode de déformation”, M. Fré- mont” a mis celte expérience sous une forme très frappante : il estampe à froid avec des lettres une barrette d'acier, efface les empreintes à la lime, et repolit la surface qui ne garde aucun signe appa- rent. Une compression générale fait revenir les lettres facilement lisibles. Il s'agit là d'essais macroscopiques. Les phéno- mènes microscopiques sont les mêmes. Sur la figure 30, qui représente à 400 diamètres une face p d'un cristal de fer, les raies latentes du derme ont été révélées par uné rayure au diamant, Une autre face p du même cristal (fig. 31, 250 diam.) a été déformée par la pression d'un couteau appuyé sur la face adjacente parallèlement aux côtés du carré : les raies latentes réapparaissent également; mais il ne faut pas les confondre avec les rides parallèles plus nettes produites par la déformation elle-même. Ces dernières sont des plissements en position de lignes de Lüders. L'attaque chimique les efface au lieu de les accentuer, comme elle le fait des lignes d'écrouissage. La figure 32 (1.000 diam.) montre un acier extra- doux qu'on avait voulu polir sur un drap neuf, poilu et non lessivé. Certain grains se sont norma- lement polis; mais d'autres sont plus gravés qu'ils ne l’'étaient après le dégrossissage : le derme a été mis à nu. C'est une question de savoir si, sur les grains polis, le derme a été arasé où non encore atteint : les deux cas sont possibles. Quoi qu'il en soit, la différence d'aspect entre les grains dépend 1 Frémonr : Bull. Soc, d'Encour, (5), 1, 1218, septembre 1896. 2 Bull, Soc. d'Encour., septembre 1903, | les molécules superficielles deviennent mobiles de leur orientation cristalline respective. L'épais: seur du derme est une fonction de cette orienta= tion : en repolissant partiellement une rayure faite sur une face p d'un cristal de fer recoupé de cris= taux parasites, et attaquant par l'acide picrique;, on voit que l’action de la rayure s'étend beaucoup plus loin sur les faces différentes de p. Ce sont aussi ces dernières dont le polissage est le plus long : résultat conforme à la théorie de Bravais et de Mallard, qui montre dans les clivages p des plans de densité réticulaire maximum. Ilest donc démontré que le finissage, à l'habitude, ne fait pas disparaître le derme, et, d'autre part, quele dermen'apparaitpassurunesurface bien finie. Nous arrivons donc à la notion d’une couche superficielle différente du derme. L'existence d’une telle couche est très plausible. D'abord, la peau d’un solide, par le seul fait de sa position, diffère, sur quelques millionièmes de millimètre d'épaisseur, de la matière sous-jacente, et il a élé dit que certains métaux émettent des vapeurs dans le vide à des températures très infé- rieures à leur point de fusion. Ensuite, quand mème cette couche superficielle extrême n'aurait pas naturellement de propriétés distinctives, elle en prend cerlainement par le fait du polissage. Le premier effet d’une attaque sur une coupe polie est de montrer une structure granuleuse, que M. Beilby appelle spiculaire et qui ne ressemble ni » à la structure du derme, ni à la structure propre du corps étudié. Cette pellicule, nous pouvons l'appeler l’épi- derme, à M. Beilby admet, comme conséquence d’observa- tions dont plusieurs se sont trouvées confirmées indépendamment par notre propre pratique, que sous l'influence du frottement et constituent alors une couche mince, visqueuse, analogue aux liquides, régie comme eux par les lois de la ten- sion superficielle. Ses petites ondulations se nivel- leraient commes celles que les poils d’un pinceau laissent sur une peinture fraiche. Et, quand la friction cesse, elle se constiluerait en épiderme amorphe, où les spicules, granulations aplaties dont l'épaisseur est de l'ordre de grandeur des molé- cules, représenteraient des gouttelettes résultant de la rupture de pellicules. Il suivrait de là : 1° Que deux solides, dont l’un au moins est poli, tendent, lorsqu'on les appuie l’un contre l’autre, à adhérer par leurs couches superficielles, c'est-à- dire à se pénétrer; 2° Que, dans le frottement de deux corps polis, les couches superficielles plus ou moins adhérentes tendent à s'entrainer. OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE 61 La première proposition est appuyée par les expériences bien connues de M. Spring sur la sou- dure des poudres et d’autres corps par compres- sion. Dans le même ordre d'idées, on doit à M. Margot! des recherches très originales sur l'adhérence de l'aluminium, du magnésium, du cadmium, du zinc, solides ou liquides, au verre, au quartz et à d'autres minéraux. Nous avons répété notamment l’une de ces expériences en cou- lant du zinc sur verre. Le décollement du mélal laisse une pellicule adhérente continue ou discon- tinue. Les pellicules continues, légèrement atta- quées par l'acide chlorhydrique, montrent une structure cellulaire. Les pellicules discontinues sont formées d'éléments circulaires pouvant s’ali- gner (fig. 33, 50 diamètres, éclairage par transpa- rence) : si l'on altaque par l'acide fluorhydrique, le verre se dépolit par points sous chaque tache de zinc (fig. 34, 150 diamètres), alors que l'attaque est homogène là où le zine n'avait pas adhéré. La théorie de ces phénomènes semble très difficile. M. Margot examine différentes hypothèses, notam- ment l'intervention de l'oxyde du métal qui servi- rait d'intermédiaire, mais ce savant ne conclut pas définitivement. En réalilé, nous sommes ici dans ces régions limites, si peu connues, où la Chimie, la Physique et la Mécanique se pénètrent et s’in- corporent, justement comme l'aluminium et le verre. L'entrainement par friction, au cours du finis- sage, résulte, pour M. Beïlby, de la forme douce- ment arrondie des rayures el de l'extension d’un épiderme sur les pelites cavités, même dans les métaux passablement fragiles comme l’antimoine. Nous avons relevé, dans le même sens, quelques indications d’un autre ordre. Si l’on fait glisser, en appuyant assez fortement, sur une lame de verre, l'extrémité d'une règle en bois avec interposition de fer électrolytique en poudre, on incruste dans le verre des aliÿnements de fer et l'on y détermine, en même temps, des amorces de ruptures sous forme d’arcs de cercle régulièrement espacés et tournant leur concavité à l'opposé de la direction du mouvement. C'est exactement ce qui se passe lorsqu'on raye le verre par un corps de dureté égale ou supérieure. On pourrait dire que le fer électrolytique, dont la dureté minéralogique a donné lieu à discussion, est dans ce cas. Mais on obtient des résultats identiques en remplaçant le fer par une surface de cuivre poli, dont la seule impureté connue consiste dans une pelite propor- tion d'oxydule (la dureté de l'oxydule est elle-même très inferieure à celle du verre). Les figures 35 et 36 illustrent ces expériences, la figure 35 a PRE EE PNR TRES ENS ET SOU ? Arch. Sc. phys. et nat., août 1894 et février 1895. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. (200 diamètres) dans le cas du fer électrolytique, la figure 36 (75 diamètres) dans celui du cuivre. La fêlure périodique du verre suivant une série de chevrons arrondis, fèlure qui était, dans les opérations de dégrossissage, le résultat d’un rabo- tage, dépend ici de l'incrustation et de l'entraine- ment de lépiderme. Les effels sont les mêmes en fin de compte : les causes sont notablement diffé- rentes, bien qu'il soit peut-être difficile d'établir entre elles une ligne de démarcalion bien précise. En tenant compte des considérations et des faits ci-dessus, le finissage des polisseurs peut être interprété de la façon suivante : Les corps à polir et le mélange hétérogène drap- alumine-eau doivent être considérés au même litre, c'est-à-dire comme deux corps A et B dont les épi- dermes se pénètrent sous pression et s'enlrainent muluellement quand on donne le mouvement de rotation. Si À et B étaient équivalents, la surface de A serait incruslée par B et celle de B par À, jus- qu’à ce que l'équilibre s'établit. Mais, si la penétra- tion de B dans A est moins facile que celle de A dans B, ce que l’on réalise en rendant B plus meuble, B pourra entrainer d'une façon continue les molécules de À, qui l'auront pénétré sans que ses propres molécules aient le temps de pénétrer la surface de À. On dit alors que le corps À, qui garde son indi- vidualité intacte, est le corps poli; B, qui se charge de À, est le corps polissant. Mais, si cela est vrai, il doit être possible d’in- tervertir les rôles, et l'on y réussit, en effet, très souvent sans le vouloir, en modifiant l'un des fac- teurs, pression, vilesse, humeclalion, pour une poudre el un métal donnés. Quand on finit avec l’alumine le polissage du fer, il suffit que l'humidité manque pour que l'alumine adhère au métal en lrainées qui résistent à l’es- suyage (fig. 37, 250 diam.). C'est le fer qui a poli le mélange drap-alumine-eau. lei, cependant, la pellicule d’alumine n’est pas très adhérente, ni la pénétration profonde. Il suffit, pour s'en débarras- ser, de pulvériser un peu d'eau sur le polissoir et de continuer le polissage. Il n’en est pas de même avec le rouge. Quand nous nous servions de ce produit, avant l'introduc- tion de l’alumine par M. Le Chatelier, nous avions remarqué que, sous une pression suflisante, quand on laissait le plateau devenir trop sec, la surface mélallique présentait à l'œil nu un aspect opales- cent en lumière verticale, et, en lumière oblique, les couleurs des lames minces. En même Lemps, la surface devenait peu réfléchissante sous le micros- cope éclairé par le prisme de Nachel. Le fer était incrusté profondément et régulièrement L'alumine se comporte vis-à-vis du cuivre rouge p* 62 à peu près comme le colcothar vis-à-vis du fer. L'oxyde de chrome, préparé par la calcination du bichromate d’ammonium ei lévigé, toujours selon les prescriplions de M. Le Chatelier, incruste le cuivre plus facilement encore et ne peut être em- ployé que très humide. L'incrustation est fonction de la vitesse du pla- teau. C'est là un facteur dont l'étude serait intéres- sante, mais que notre installation ne nous permet pas de faire varier dans de larges limites. M. Nachet nous a signalé les ennuis que cause quelquefois l'incrustation du verre par le rouge. Jusqu'à présent, l'incrustalion du corps à polir par le corps polissant s’est présentée à nous comme un accident, comme une interversion des rôles ré- sultant d’une faute ou d’une négligence technique. Mais, comme il arrive souvent, cet accident peut être utilisé et fournir une méthode d'investigation. Dans un alliage renfermant plusieurs phases, dans l'acier par exemple, le carbure désigné par le nom de cémentite peut être poli, tandis que le fer lui-même, la ferrite, est incrusté par le rouge sec. M. Arnold a liré de là un procédé pour résoudre la perlile, mélange de ferrite et de cémentite, en fines lamelles; et M. Frewen Jenkin a communiqué à l'un de nous, il y a quelques années, de belles pho- tographies de plaquettes ainsi préparées. La figure 38 représente un acier de cémentation frotté à la main sur rouge au sulfate sec avec substratum de papier filtre. Les grandes lames claires sont la cémentite indépendante, qui commence d'ailleurs à s'incruster par endroits; les lamelles minces sont la cémentite intersiratifiée dans la ferrite. La ferrile elle-même parait absolument sombre (800 diam.). Le métal immédiatement adjacent à la peau in- crustée est plus ou moins régulièrement écroui. Sur la face p d'un cristal de fer ainsi incrusté, une attaque par l'acide picrique jusqu'à élimination de l'oxyde de fer montre une surface fortement colo- rée, granuleuse, irrégulière, alors que cette surface serait claire, réfléchissante, presque spéculaire en l'absence d’incrustation antérieure. Quelquefois, la matière incrustante est fournie par l'usure de l’un des constituants structuraux. Exemple : quand on polit sur rouge sec un alliage d'or et d'aluminium contenant le composé pourpre AuAl de Roberts-Austen, ce composé fournit une poussière qui adhère au constituant mou plus riche en aluminium et y forme des dessins comme dorés rappelant un peu l'aspect des eutectiques. La figure 39 (100 diam.) est un acier doux passé sur une meule en feutre du commerce, neuve et non nettoyée. Le feutre neuf est un peu gras et plus ou moins poussiéreux : la perlite s’est passablement polie en bloc, sans se résoudre, et elle apparait 2 OSMOND Et CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE sous forme d'ilots blancs déchiquetés; la ferrite, en général, a été rayée et légèrement incrustée, à l'exception de trois bandes restées plus claires : ce sont des bandes créées par le laminage et dont l'orientation cristalline est probablement à peu près constante. Cette observation nous apprend que la méthode par incrustation pourra différencier non seulement deux constituants de duretés très différentes, comme la ferrite et la cémentite, mais encore les différents grains d’une même phase, suivant leur orientation. Nous y avons réussi, pour le fer et l'acier, avec le rouge au sulfate sec, sur velours de coton lessivé et sec, en réglant convenablement la pression et la vitesse. Si la préparation a reçu un polissage antérieur en léger bas-relief, les reliefs s'incrustent naturellement avant les creux. La figure 40 (400 diam.) montre deux grains voisins d'ur fer cristallisé à très gros grain. L'un des grains, en creux, est resté blanc; l’autre s’est incrusté, à l'exceplion d’une lamelle de Neumann qui élait en creux. La plaquette a été attaquée légèrement par l'acide picrique alcoolique, après l'incrustalion; on exagère ainsi les contrastes. Quand même on n'aurait pas produit volontaire- ment de bas-relief préalable, le polissage sur rouge sec en produit un. La cause première qui permet de différencier les grains est toujours leur orienta- tion cristalline par rapport à la coupe. Suivant son orientation, chaque grain s'use plus ou moins. Dès qu'une différence de niveau est créée, la pression varie d'un grain à l'autre; l'incrustation, qui est fonction de la pression, et, probablement aussi, de l'orientation cristalline directement, varie en même temps. En fin de compte, on peut obtenir une préparation telle que la figure 41 (450 diam). C'est la photographie d'un fer cristallin préparé par M. Stead, dans la région centrale, où le grain est moins grossier que sur les bords. Chaque grain est différencié par incrustation comme il le serait par une attaque au chlorure double de cuivre et d’am- monium. On reconnait aussi des lamelles de Neu- mann. Dans un acier eutectoïde, c'est-à-dire contenant environ 0,90 de carbone pour 100, et formé entiè- rement de perlite, les grains de perlite peuvent être aussi distingués les uns des autres par le polissage sur rouge sec (fig. 42, 400 diam.). En réalité, cette méthode par incrustation n'est ni la plus pratique ni la plus délicate qui puisse conduire au but. Mais elle n’en est pas moins inté- ressante, parce qu'elle nous montre un procédé mécanique rivalisant avec un procédé chimique, et jette quelque jour sur les affinités de deux sciences regardées pendant longtemps comme radicalement distinctes. Dans le polissage en bas-relief du fer et x pus 22 du 1 £ À H Î { £ OSMOND Er CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE 63 de l'acier sur parchemin mouillé d’eau et imprégné d'une poudre blanche, sulfate de calcium ou de baryum, le parchemin et la poudre se colorent, non en gris de fer, mais en jaune ocre. Le fer dé- taché par le polissage est donc immédiatement oxydé, soit que l’acide carbonique dissous dans l'eau intervienne, soit que le fer se détache sous forme de molécules isolées facilement oxydables. Comment faire, iei encore, la part de la Mécanique et celle de la Chimie? III. — DESQUAMATION. La présence d’une peau écrouie n'est pas, en général, bien gênante pour l'analyse microgra- phique des alliages. L'attaque qui sert à révéler la structure dissout l’épiderme et une partie au moins du derme, si ce dernier a été réduit à l'épaisseur minimum par un dégrossissage progressif soigné. Quelques résidus de grosses raies accidentelles, ayant laissé des traces écrouies plus profondes, n'apportent pas de trouble notable, et il est aisé d'en faire abstraction. Il n'en est plus de même quand on veut étudier les traces internes de déformations systématiques. Évidemment, ces traces sont de même nature que celles résultant du dégrossissage, le dégrossissage étant lui-même un mode de déformation. La part de ce dernier doit donc êlre complètement éliminée. De là, la nécessité d’une troisième opération, que nous appellerons la desquamation. En choisissant ce mot, nous continuons la métaphore qui nous a déjà fourni ceux de peau, de derme et d'épiderme. Il est vrai que la racine squama s'applique originairement aux écailles. Mais le sens primitif en a élé souvent généralisé, et, au surplus, les spicules de Beilby suffiraient à le justifier. La desquamation a pour objet d'éliminer la peau sur des métaux polis. Il semble que l'opération soit très facile etn'exige autre chose qu'une attaque assez profonde pour dissoudre toute l'épaisseur du derme. Mais les attaques de ce genre donnent ordinairement des figures de corrosion cristallines, creusent les joints etleslignes de contact entre les divers constituants : on obtient finalement une surface très dénivelée, chargée de détails, et où les caractères de la défor- mation que l'on recherche sont masqués par ceux de la structure congénitale qu'on ne recherche plus. Il faut bien dissoudre le derme, mais il faut “aussi maintenir l'épiderme plan, sans créer simul- lanément un nouveau derme par le finissage. Le “succès pratique est souvent difficile, parce que, en réalité, dégrossissage et finissage ne sont pas des opérations aussi distinctes sur la matière que sur le papier et que le finissage écrouit un peu pour son compte. La difficultés’accroit rapidement, bien entendu, à mesure que l'on s'adresse à des corps plus mous. Elle n’est pas cependant insurmontable. La dissolution superficielle et la reconstitution d’un épiderme plan sont deux choses distinctes. On peut les faire séparément, en les répétant aulant de fois qu'il est nécessaire, ou les réunir dans l'opération mixte qu'on a appelé le polissage- attaque. , Chronologiquement, le polissage-attaque est an- térieur dans notre Lechnique aux polissages etalta- ques alternés; mais, pour aller du simple au com- posé, comme l'exige la clarté de l’exposilion, il est logique de décrire d’abord ces derniers et leurs applications. Pour le fer et l'acier, le réactif de M. [schewsky, la solution à cinq pour cent d'acide picrique dans l'alcool absolu, est encore mieux approprié à notre objet actuel qu'à la distinction des constituants, parce qu'il donne sur la ferrite des attaques plus planes qu'aucun autre et n’a qu'une faible tendance à en fouiller la structure cristallographique. On a donc peu à faire pour effacer, même après une attaque prolongée et relativement forte, les pelites dénivellations qui ont pu se produire. On le fait en passant la préparation sur un plateau de drap chargé d'alumine humectée d’eau. Ce traite- ment, quand les produits à polir sont de bonne qualité et les manipulations bien conduites, ne reforme pas de derme sur le fer. En répétant les deux opérations autant de fois qu'il estnécessaire, on arrive à se débarrasser complètement du derme qu'avait créé le dégrossissage. C'est en appliquant cette méthode que nous avons pu obtenir, dans l'étude des déformations internes du fer, les résultats que nous avons publiés en collaboration avec M. Frémont, dans la ÆRevue de Métallurgie de janvier dernier. On a plus de difficullé avec les bronzes et, à fortiori, avec le cuivre rouge. Pour les bien com- prendre, il faut donner quelques détails sur la structure de ces métaux. Un bronze usuel, à 9 ou 10 pour cent d'’étain brut de coulée, est formé de grains dont chacun est le domaine à la fois d'un cristallite et d’un cristal correspondant. D'après les travaux de M. Le Chatelier‘, de M. Charpy', de MM. Heycock et Neville*, l'étain ne parait pas être réparti umi- formément, et, pour celle raison, on trouve un peu 1 Bull. Soc. d'Encour. (5), 1, 559, avril 1896. E 2 Bull. Soc. d'Encour. (5), II, 38%, mars 1897, fig. 27, p- 406. 3 Phil. Trans. (A), CCIX, 1, année 1903, Bakerian Lecture 64 OSMOND £r CARTAUD — LES ENSEIGNEMENTS SCIENTIFIQUES DU POLISSAGE d’eutectique entre les branches des cristallites, même quand la teneur moyenne en étain est infé- rieure à celle que le cuivre pourrait garder en solution solide. L'étain irait en diminuant à partir de l’eutectique et serait minimum sur les axes des cristalliles. Soient (fig. 44) un grain cristallin, AA les axes des eristallites, E,E,E, les grains d'eutectique. Fis. 44. — Aspect d'un grain cristallin au finissage. — AA, axes des cristallites; EE, grains d’eutectique. Au dégrossissage, l'eutectique fragile, désagrégé par la lime et les premiers papiers d'émeri, est représenté par des trous que les derniers papiers n'arasent généralement pas. Au finissage, ces trous sont le point de départ de dépressions, allongées dans le sens du polissage, circulaires si on fait constamment tourner la plaquette. Une coupe faite à ce moment par (deux grains E,;E d’eutectique Fig. 45. — Coupe passant par deux grains EE de la figure 4% au commencement du finissage. donnerait donc le profil de la figure 45, avec un relief sur l'axe à du crislallite. EaE est la limite intérieure du derme, avec un maximum d’épais- seur Aa, parce que le relief À à supporté pendant le dégrossissage le maximum de pression et, éventuellement, parce que la teneur en cuivre est minimum en ce point. Quand on pousse le finissage suffisamment loin, Fig. 46. — Même coupe à la fin du finissage. l'eulectique, qui n’est plus désagrégé et qui, plus dur, s’use moins, finit par venir en relief. A devient le centre d’une dépression et le profil final estcelui de la figure 46, la limite intérieure du derme res- tant en place. Quand maintenant on traite la préparalion par allaques et repolissages allernés, on fait dispa- raitre progressivement le derme en conservant et accentuant plutôt la forme du profil. Le derme se trouve donc coupé, à un moment donné, par la surface nouvelle mm. Une attaque ultérieure colore plus, en général, ou tout au moins différem- ment les parties écrouies conservées, et les cristal- lites apparaissent, d'habitude en clair sur fond sombre, tels que les a photographiés M. Charpy. Se reporter à notre figure 21. On voit que ces apparences cristallitiques reçoi- vent une explication purement mécanique, indé- pendante de l'hétérogénéité chimique. Si cette hété- rogénéité est réelle, et, bien que non prouvée, elle est vraisemblable comme conforme aux lois connues de la solidificalion, elle agit dans le même sens que l'effet mécanique pour faciliter la révélation des formes cristallitiques. Mais elle n’est pas nécessaire, et, en fait, elle ne saurait être bien grande, puisqu'elle n’est pas accusée par les varialions de la couleur propre du bronze. Les apparences restent les mêmes avec le cuivre rouge ne contenant d'autre impureté qu'un peu d'oxydule. L'oxydule, plus dur que le métal, y joue le même rôle que l'eutectique dans le bronze et les cristallites se montrent encore. La figure 43 représente un grain de cuivre coulé, avec de l'oxy- dule en relief dans les joints et, à cœur, des dessins confus appartenant au derme et caractéristiques de sa présence. Il faut se garder d'y voir des détails de structure congénilale. La desquamation est tout simplement incomplète. Si elle était ache- vée, on ne verrait plus les cristallites. Pour la desquamation du cuivre et du bronze, nous employons comme dissolvant soit une solu- tion d'acide picrique et de quinone dans l’alcooh ou l'acétone, soit une solution de perchlorure de fer acidifiée par l'acide chlorhydrique, réactifs qui donnent des attaques assez planes. Pour le repo- lissage entre les attaques, on frotte à la main sur drap chargé d’'alumine, ou mieux d'oxyde de chrome, en mouillant avec de l'eau ammoniacale. | L'ammoniaque a pour rôle de dissoudre, au fur età mesure qu'il se produit, le mince derme que reconstituerait la poudre à polir employée seule. Il ne faut pas essuyer sur loile. La toile, même fine et usée, reconstitue aussi un derme. On lave à l’acétone, dont on essore le plus gros avec um morceau de papier buvard appliqué latéralement. On laisse s'évaporer le surplus. Il ne reste pas de: résidu gênant. Comme nous l'avons dit plus haut, on pourrait réunir les deux opérations, polissage el atlaque, en une seule, en mouillant le drap par le réactif convenable. Il semble qu'on réaliserait ainsi un progrès. Mais la méthode est délicale. Suivant la! concentration du réactif, la vitesse, là pression, etc., il arrive que l'atlaque est trop en avance sur le: G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ 65 polissage ou inversement. Dans le premier cas, la surface est trop dénivelée et, dans le second, on refait un derme sur les métaux mous. Nous avons donc une tendance à remplacer le polissage-atta- que par les polissages et les attaques alternés. C'est moins élégant, mais pius sûr, et le procédé s'applique, avec quelques variantes, aux métaux mous, tels que zinc, étain et plomb, que nous moulions antérieurement sur une surface polie. En somme, l’usage méthodique de la desquama- Lion à permis d'aborder plus efficacement l'étude microscopique de la déformation des métaux. Nous désirons que ces simples notes sur des queslions peu explorées apportent aux hommes de science et aux industriels qu'intéresse le polis- sage quelques sujets de réflexion et d'étude. F. Osmond, Ancien ingénieur aux Usines du Creusot. G. Cartaud, Ingénieur-chimiste, ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ DEUXIÈME PARTIE : DIX-NEUVIÈME ET VINGTIÈME SIÈCLES I. — ORIENTATION NOUVELLE DE LA QUESTION. THÉORIES ACTUELLES. Depuis longtemps, on avait homologué la graine des végélaux supérieurs à l'œuf des animaux ovi- pares ; mais, jusqu'au xix° siècle, les physiologistes voyaient encore dans l’acte de la génération ani- male presque autant de procédés particuliers qu'il y a de classes d'animaux. C'est un Français, Coste, qui commença à montrer l'unité de la fonction en faisant voir (1837, p. 200) que l’ovule des Mammi- fères est comparable au jaune de l'œuf des Oiseaux. En même temps, les recherches d'anatomie et de physiologie comparées venaient démontrer, d'une façon définitive, que l'oviparité et la viviparité émanent d’un phénomène identique, dont elles ne représentent que deux modifications pouvant se rapprocher, s'unir et se confondre. C'est donc seulement à partir de celte époque, si rapprochée de nous, que nous voyons apparaitre la notion de sexualité telle que nous la comprenons aujourd'hui, c'est-à-dire s'étendant à la Nature animée tout entière. Dans les idées que nous allons voir éclore maintenant, nous n'aurons donc plus à nous demander si les biologistes veulent parler de l'homme, des vivipares, des ovipares ou des végé- taux ; leurs théories vont viser la connaissance de la sexualité, sans qualificatif. Depuis trois siècles, les découvertes en Histoire nalurelle s'étaient tellement accumulées que la né- cessité d'établir des groupements, des catégories dans les êtres vivants, se faisait de plus en plus sentir. Tournefort et Linné furent les premiers à établir uneclassificalion véritablementutile. Aveccetteclas- ! Voir la première partie de cet article dans la Revue du 45 janvier, &. XVI, p. 10 et suiv. sification, la notion de l'espèce (qui avait été déjà définie au moyen de la parenté et de la procréation, par le botaniste anglais Ray, en 1682) entre en maitresse dans l'Histoire naturelle. Pendant la ma- jeure partie du xix° siècle, les discussions célèbres qui eurent lieu, entre les partisans de la fixité et ceux de la variabilité des espèces, ne firent qu'affirmer de plus en plus l'existence propre de l'espèce. Et alors, par une de ces erreurs de méthode si répandues même chez les savants, l’on arriva à méconnaitre peu à peu les individus, en tant que personnalités distinctes; on ne voulut plus voir, dans la Nature, que des couples, des espèces qui ne sont pourtant, en quelque sorte, que des créations artificielles de notre esprit !. À partir de ce moment, les physiologistes nous montreront dans les orga- nismes deux sortes de fonctions : celles qui ont pour but la vie de l'individu lui-même, les fonctions de nutrition et de relation, et celles qui n’envisa- gent que la vie de l'espèce, les fonctions de re- production, la sexualité. Les philosophes vinrent à la suite de ces naturalistes : avec Vollaire et Champfort d'abord, avec Schopenhauer ensuite, nous voyons les premières fonctions compter seules pour la vie de l'individu, et les fonctions sexuelles et les jouissances qui les accompagnent n'être qu'une sorte de piège, tendu par la Nature, pour inciter les individus à se sacrifier au profit de leur ‘ Buffon lui-même, qui n'avait pourtant guère l'esprit sys- tématique, commencait sa Seconde vue de la Nature par ces mots : « Un individu, de quelque espèce qu'il soit, n'est rien dans l'Univers ; cent individus, mille, ne sont encore rien : les espèces sont les seuls êtres de la Nature. » Il est curieux d'opposer à cette opinion la manière de voir de Lacépède : « 11 en est de l'espèce comme du genre, de l'ordre et de la classe, disait le disciple et le continua- teur de Buffon; elle n'est au fond qu'une abstraction de l'esprit, qu'une idée collective, nécessaire pour connaitre, pour instruire; la Nature n'a créé que des êtres qui se res- semblent, et des êtres qui diffèrent. » (IT, p. 104. 66 espèce. C'est là une opinion qui, favorisée par cer- taines doctrines religieuses, se retrouve encore un peu partout de nos jours et que l'on me verra combattre dans le cours de cet article, du moins dans cette forme où on la présente habituellement. D'un autre côté, la découverte des phénomènes intimes de la fécondation, faite dans le courant du dernier siècle !, attira de nouveau l'attention des biologistes sur les éléments sexuels. Dès lors, les biologistes vont refuser au testicule et à l'ovaire le nom de glande et au sperme le nom de produit sécrété qu'on leur donnait jusqu'ici. « Le produit du testicule, dit Ch. Robin (1874, p. 441), n'est pas un produit de sécrétion; le testi- cule sert seulement à la génération d'éléments anatomiques qui conduisent à la génération des spermatozoïdes. Aussi rien n'est erroné comme d'appeler le testicule une glande, ou l'ovaire une glande. » A partir de cette époque, on négligea complète- ment la partie liquide du sperme, que l’on considéra comme un simple substratum. Aussi, lorsque les découvertes récentes vinrent montrer la réelle exis- tence d’une sécrétion chimique véritable du testi- cule, on ne voulut voir, dans les produits sécrétés, qu'un matériel nutritif élaboré en vue de la nour- riture des spermatozoïdes. Depuis quarante ans, les cytologistes ont porté toute leur activité sur l'étude morphologique des éléments sexuels. Actuellement, il n'ya pas d'année où ne soient publiés deux ou trois travaux sur les spermatozoïdes ou sur les ovules. On a fouillé ces éléments jusque dans leurs parties les plus fines, et il suffit de comparer le schéma d’un spermato- zoïde donné il y a dix ans avec celui donné aujour- d'hui pour se rendre compte du chemin parcouru. Mais il s’en faut de beaucoup que cette analyse patiente et minutieuse nous ait renseignés davan- tage sur la nature même de ces éléments, sur leur signification physiologique et sur leur rôle dans la fécondation. Elle a eu, par contre, ceteffet malheu- reux de fixer les biologistes, s'occupant de sexua- lité, dans les voies de la morphologie et de leur faire négliger les recherches d'analyse chimique et d’expérimentation qui, seules, peuvent mainle- nant conduire à la Physiologie. Telles sont les idées qui sont la base de tout ce qu'on écrit actuellement sur la sexualité. Aujour- ! De Barry (1840), Coste (1849), Meissner, Bischoff, etc., virent d'abord les spermatozoïdes pénétrer sous la mem- brane vitelline de l'œuf des Mammifères (lapin, chien). L'entrée de l'élément mäle dans le protoplasma ovulaire fut observée ensuite, en 4856, par Pringsheim chez les animaux, et par de Bary chez les végétaux (OEdogonium). C'est en 1875, seulement, que O. Hertwg, puis Fol, en 1877, purent suivre dans tous ses détails la pénétration du spermalozoïde dans l'œuf d'oursin. G. LOISELZ — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ | sexuel, le dimorphisme des sexes, etc. d'hui, les biologistes ne voient guère, dans les fonctions sexuelles, que les seuls éléments : ovule et spermatozoïde, c'est-à-dire ce qui sert seulement à l'espèce. Et les théories dont je dois parler maintenant vont toutes refléter plus ou moins ces errements. Cependant, je n'envisagerai ici que les théories générales de la sexualité, remettant au cours même de mes lecons l'exposé des théories particulières venant expliquer la fécondation, le déterminisme $ 1. — Théorie du Parasitisme sexuel. La première des théories générales que nous allons envisager peut être désignée sous le nom de parasitisme sexuel, car elle admet que les organes génitaux représentent des sortes d’individualités distinctes, se nourrissant, comme des parasites, aux dépens du corps qui les contient. Cette idée ne date pas d'hier. Du temps des Grecs, Platon avait déjà considéré l'utérus comme un animal demeurant en parasite dans le corps de la femme ; poussé par la faim sexuelle, il disait que cet animal pouvait se mettre en fureur, par- courir le corps en tous sens sous la forme d'une boule et donner naissance à toutes sortes de malaises ou de maladies, parmi lesquelles l'hystérie. C'est ainsi qu'Aretée de Cappadoce comparait les mou- vements de l'utérus à ceux d'un arbre dont les branches flexibles suivent les impulsions d'un vent léger. A Rome, Galien combattit vivement cette bizarre opinion en montrant, par des dissections, que des mouvements de la matrice aussi étendus sont impossibles. Pourtant, au milieu du xvi° siècle, nous voyons encore Jean Fernel, le grand médecin de Henri I, se plaindre que Galien l'ait induit en erreur et dire que, dans plusieurs cas, il a senti l'utérus remonter sous sa main jusque dans l'estomac. Deux cents « ans plus tard, Cabanis, le célèbre médecin et ami de Mirabeau, professe encore à peu près la même opinion; il croit l'utérus capable par lui-même d’être le siège de la mélancolie, par exemple. Enfin, en 1802, un médecin de Paris, Louyer-Villermay, parle encore dans sa thèse inaugurale des mouve- ments de l'utérus pendant les crises d'hystérie *. Remarquons tout d'abord que cette idée de para- sitisme sexuel est logique et apparaît encore mieux comme la conséquence des nouvelles directions dans lesquelles se sont engagés les biologistes depuis un siècle et demi. Dès le moment où l’on accepte l’épigenèse, on { Ce médecin est un des derniers représentants des th6o- ries d'Hippocrate et de Buffon quand il dit que la pléthore spermatique chez la femme est la cause des accès d'hystérie. G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ peut admeltre que chaque partie d'un organisme a - son existence propre, et l'observation montre, en effet, que, chaque fois qu'un organe donné se déve- loppe, « ce développement s'opère toujours aux dépens de ceux qui sont dans le voisinage »; tel est le fait qu'Etienne Geoffroy Saint-Hilaire à mis en évidence le premier sous le nom de principe du balancement des organes. Et alors, considérant exclusivement la vie de l'espèce, il est naturel de penser que tous les or- ganes qui servent à cette vie forment un tout indé- pendant des organes qui servent à la vie de l'indi- vidu ; on peut admettre, du moins, que les organes sexuels se comportent vis-à-vis d'eux comme un parasile se comporte vis-à-vis de son hôte, c’est- à-dire s'en servant pour la protection et pour la nourriture. Mais ce n'est plus l'utérus que considèrent les biologistes actuels dans leur explication parasitaire dela sexualité; ce sontleselandes génitales : l'ovaire et le testicule, ou même seulement les éléments sexuels. La théorie de l’'emboitement des germes devait conduire naturellement les naturalistes à consi- dérer ces germes déjà entièrement organisés comme des parasites; c’est, en effet, celte conception que l’on trouve nettement exprimée dans quelques ouvrages des défenseurs de cette théorie. De nos jours, l'épigenèse a fait place à la doc- trine de l'emboitement; mais on dit souvent encore que les glandes génitales forment, avec le soma, un cœnobium homophysaire, alors qu'un parasite ordinaire forme avec son hôte un cœno- bium hétérophysaire. Notre maitre, le Professeur Giard, auquel j’em- prunte ces expressions, apporta un grand appui à celte théorie par ses belles recherches sur la castration parasitaire (1888). Il montra, en effet, que des parasites ordinaires peuvent se substituer au tissu génital, et de manière que leurs excreta produisent sur le corps de leurs hôtes des effets comparables à ceux que produit le tissu génital lui-même (caractères sexuels secondaires). Dans certains cas, même, la substitution peut être mor- phologique aussi bien que physiologique; ainsi lorsque le parasite occupe la place des organes sexuels, il prend parfois, non seulement la forme, mais encore la couleur de l'organe auquel il s'est substitué ; tel est le cas, par exemple, du Portunion moœnadis, un crustacé parasite qui se loge dans le corps des Crabes. Présentée ainsi, la théorie n'est donc que l’ex- pression des faits, et ces faits, qui sont des plus intéressants, nous les retrouverons quand il s'agira d'étudier les caractères sexuels secondaires. Dans l'idée de Giard, l'expression de parasitisme sexuel 67 n'a jamais été, croyons-nous, qu'une manière plus saisissante pour exprimer l'importance du tissu génital. Il y voit, du reste, plutôt une symbiose qu'un parasitisme réel; « les gonades se forment el se développent sous l'influence de nutriments venant du soma, dit-il (1898, p. 35), mais le déve- loppement retentit à son tour sur le soma, de manière à lui donner des caractères particuliers ». Il n'en a pas été de même pour d’autres biolo- gistes, qui ont pris l'expression à la lettre et qui sont arrivés à parler d'un antagonisme absolu entre la vie de l'individu et celle de l'espèce. Déjà un disciple de Pythagore, le philosophe Hip- pase de Métaponte (cité par Censorinus), disait que les glandes sexuelles retirent à l'organisme toute la substance des moelles pour en former la semence. Anaxagore, Démocrite et Alcmæon renchérissent encore sur cette opinion; nous les voyons, en effet, représenter les fonctions sexuelles comme épuisant spécialement la graisse et les chairs des individus en rut. Ge sont là des idées anciennes qu'il était bon de rappeler, car nous allons les retrouver presque telles dans les écrits de certains de nos physiologistes contemporains. En 1885, Weissman crut pouvoir distinguer, dans un individu sexué, deux sortes de proto- plasmas : l’un, le soma, destiné à former tout ce qui constitue le corps périssable, c'est-à-dire la peau, les nerfs, les muscles, le sang et les viscères; l'autre, le germen, qui se loge en un endroit quel- conque du premier (glandes génitales) et qui, à chaque génération, passe directement de l'œuf parent à l’œuf enfant, constituant ainsi un véri- table protoplasma immortel. Ces idées ne sont pas que des hypothèses, elles reposent sur des faits; ainsi, chez un certain nombre d'animaux, on a remarqué que, dès le moment où l'œuf fécondé se divise, certaines cel- lules s’isolent et restent, sans se multiplier ou en se mullipliant peu, jusqu'au moment où elles for- meront les organes génitaux. La théorie s'est alors emparée de ces cellules initiales, pour voir la pré- sence objective du germen. Voici, par exemple, un œuf d’un petit Crustacé d'eau douce, si commun dans nos mares, le Cyclops; cet œuf, qui esten train de se diviser pour la première fois, montre à un des pôles un amas de corpuseules se colorant fortement par les cou- leurs rouges. Les corpuscules se retrouveront donc seulement dans un des deux blastomères qui résul- tera de cette segmentalion; or, à toutes les phases des divisions suivantes, on trouvera loujours une cellule présentant les mêmes caractères’, avec ‘ Ilest à noter que les corpuscules se colorant en rouge n'apparaissent ici qu'au moment où la cellule entre en divi- sion. 68 cette particularilé en plus que celte cellule à corpuscules se divise plus lentement que ses sœurs. Un peu plus tard, on voit que deux des cellules de la petite larve se divisent plus lentement que les autres; on peut donc penser, avec Hacker, de qui nous tenons ces fails, que ces cellules sont les des- cendantes de la cellule à corpuscules primitive; du reste, une de ces cellules présente dans son pro- toplasma les mêmes corpuscules : c’est la cellule germinative primordiale; l’autre cellule est la cellule souche de l’endoderme. Nous retrouverons ces faits plus tard, mais nous devons dire déjà que les espèces chez lesquelles on les a constatés sont peu nombreuses et que ces espèces représentent des lypes hautement diffé- renciés ; il n'y a donc pas là un phénomène ances- tral, puisque les Métazoaires les plus inférieurs, chez lesquels ce phénomène devrait êlre le plus net, semblent jusqu'ici faire exception. Après Weissman, nous trouvons Félix Le Dantec (1903), qui décrit le lissu génital, arrivé à maturité, comme formé de plastides déséquilibrés, incapables d’assimilation et de vie durable. Le Dantec oppose ainsi ces éléments aux plastides somaliques dont toutes les molécules vivantes sont entières el peu- vent, par conséquent, conlinuer à vivre et à se multiplier. Cette théorie est encore basée sur des faits posi- tifs : les cellules sexuelles sont réellement des cellules qui, d'une façon très générale, ne peuvent plus assimiler el qui doivent môurir si elles res- tent isolées; mais Le Dantec s'avance trop, selon nous, lorsqu'il fait, de cette incapacité d'assimi- lation, la caractéristique de la sexualité. On re- trouve, en effet, ce même caractère dans les cellules de certaines glandes; prenons les glandes sébacées, par exemple : leurs éléments cellulaires deviennent sénescents, eux aussi, et le sébum n'est également formé que de cellules mourantes. Enfin, Beard (1902-03), venant exagérer les théo- ries de ses devanciers, considère les cellules ger- minalives sexuelles comme des êtres distincts, comme des sortes de prolozoaires; le reste du corps, le soma, serait pour lui un organisme stérile (phorozoon), destiné à loger les cellules germinatives et à leur fournir de la nourriture. C'est à la suite de recherches intéressantes sur l’embryologie de la Raie que Beard a été amené à formuler sa théorie. Pour cet auleur, les premiers blastomères qui résultent de la segmentation de l'œuf de Raie sont tous semblables; mais, lorsque le stade de 32 blastomères a élé alleint, on voit un de ces blastomères rester plus gros et se diviser beau- coup plus lentement que les 31 autres, Ces der- G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ niers constitueront le soma, le 32° donnera nais- sance lentement aux premières cellules germina= tives. Beard comple 256 de ces cellules dans le sexe mâle, 512 dans le sexe femelle. Ce sont de gros éléments dont le diamètre est à peu près double de celui des cellules somaliques, et dont le protoplasma peu colorable est chargé de ta- blettes vitellines qui souvent cachent entièrement le noyau. Jusqu'ici, Beard ne fait que confirmer ce que nous savions déjà sur la différenciation précoce des cellules souches des glandes génitales. Mais il montre, en plus, que, chez la Raïe, les cellules ger- minatives primordiales, placées d’abord au-dessous de l’ébauche embryonnaire, émigrent dans cette ébauche, au moyen de mouvements amæboïdes, l’envahissent pour aller se loger en différents en- droits; la plupart viennent se placer dans la région des futures glandes génitales et y restent, à l’état de repos, jusqu'au moment où elles se diviseront à nouveau pour donner des cellules germinatives secondaires; les autres, dans la proportion de 10 à 28 °/,,, vont se placer en n'importe quelle région du corps : dans la peau, dans l'épithélium intestinal, dans le péricarde, dans le mésoderme surtout. Là, ces cellules entrent également en repos, puis dégénèrent généralement au bout de peu de temps. Mais il peut arriver aussi qu'elles continuent à vivre dans ces situations anormales. Elles don- neraient alors naissance aux carcinomes el à ces sortes de tumeurs si particulières : kystes der- moïdes, tumeurs sacro-coccygiennes, etc., dans lesquelles on a trouvé des cheveux, des denis, des os, elc., et que l'on considère généralement comme résultant de l'avortement plus ou moins précoce d'un embryon inclus ou enclavé de très bonne heure dans son hôte. Et ainsi se trouveraient résolus de la façon la plus simple, par l'embryologie, quelques-uns des pro- blèmes les plus obscurs encore de la médecine : celui des tératomes et celui du cancer. Il est curieux de constater, à ce propos, que quelques chirurgiens anglais ont déjà eu l'idée, en 1897, de faire un rapprochement entre les glandes génitales et les cancers du sein. Dans ces derniers cas, en effet, ils praliquent la castration ovarienne et voient alors la tumeur se décongeslionner, devenir moins douloureuse et moins mobile. Cette pratique, suivie depuis par les chirurgiens français, a donné jus- qu'ici les mêmes résultats favorables. Voilà donc les différents côtés sous lesquels se présente la théorie du parasilisme sexuel, théorie hétérogéne, comme on le voit, et dont les diver- gences s'accentuent encore lorsqu'on recherche, avec les auleurs, comment s'exerce ce parasitisme. Il est tout d’abord un groupe de biologistes qui, G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ continuateurs de Buffon, ramènent ce parasitisme ! expliquer la disparition ou la réduction, chez les une question de nutrition. On remarque qu'au | femelles, de certains organes caractéristiques des moment de la reproduction sexuelle, les tissus ordinaires maigrissent pendant que les glandes génitales grossissent; les premiers, disent-ils, sont mangés par les seconds. Ainsi, dans le règne végétal, un grand nombre de botanistes, dont un des derniers en date est Nuillemin (1888), ont montré que les lubercules radicaux des Légumineuses, par exemple, vont normalement en vidant leur contenu, durant la fructificalion, de sorte qu'à la fin du rut, les tuber- cules se trouvent ridés et presque vides”. Chez les animaux, c'est surtout le tissu muscu- laire qui, comme l'avaient déjà observé les Anciens, semble fournir au développement des gonades. » Considérons, par exemple, les Saumons. Ce sont des poissons marins qui remontent les rivières à une époque qui correspond à leur aclivité sexuelle. Pendant cette « migration du frai », qui dure de quatre à qualorze mois, les individus mangent peu ou pas du lout, el pourtant leurs glandes s'ac- eroissent énormément; ainsi le poids de l'ovaire, qui était d'abord de 0,4 °/, du poids du corps, atteint le poids relatif de 27 °/, (Miescher, 1881); or on constate une diminution parallèle dans le poids du système musculaire. Il peut arriver même que des appareils tout entiers s’atrophient au moment de l’activité géni- tale; tel est, par exemple, le cas du tube digestif de certaines Annélides étudié par Caullery et Mesnil (1898). 11 y a ainsi dans l’évolution de l'ani- mal, disent ces auteurs, deux phases très opposées qui peuvent êlre considérées, au point de vue phy- siologique, comme deux vies antagonistes l'une de l’autre : l’une, vie nutritive, pendant laquelle l'ani- mal croit et accumule des réserves, l'autre, vie sexuelle, pendant laquelle il cesse de croitre et consomme alors ses réserves pour produire des ovules ou des spermatozoïdes *, C'est sur des considérations semblables qu'un Allemand, Kennel (1896), étudiant le dimorphisme sexuel des Papillous, se base pour expliquer les dif- - férences de couleur que l’on observe souvent entre les deux sexes d’une même espèce. La coloration des individus, dit cet auteur, est en relation directe avec le chimisme nutrilif du corps, et si,en général, elle est plus développée chez les mâles, c'est parce que, chez ceux-ci, les organes sexuels accaparent une moins grande proporlion de sucs nutrilifs. C'est également de la même facon qu'il faudrait * Des expériences plus récentes de Mattirolo (1900) vien- nent montrer, cependant, qu'une semblable corrélation n'existe pas toujours lors de la floraison des Légumineuses. ? Nous retrouvons, dans le rôle de ces réserves, l'idée du « superflu de la nourriture » de Buffon. mäles : bois des Cerfs, crinières des Lions, ergot du Coq, antennes de certains Insectes, etc. Pour d’autres biologistes, le tissu génital para- site agirait plutôt par une sorte d'infection, en versant ses excreta dans le torrent circulatoire de son hôte. Ce seraient ces excreta qui amèneraient l'apparition des caractères sexuels secondaires: nous verrons, en effet, qu'il suffit d'enlever les glandes génitales, à une certaine époque de la vie, pour voir le dimorphisme sexuel s’atténuer énor- mément, sans jamais disparaitre entièrement tou- tefois. Patrick Geddes (1886) a donné le nom de dia- thèse sexuelle et Le Dantec de virulence du sexe à l’ensemble des phénomènes qui résultent de l'action nocive du parasite, le germen, sur son hôte, le soma. La théorie explique alors, de la facon la plus simple, les troubles de la ménopause chez la femme, par exemple; ces troubles sont ana- logues, dit Le Dantec, « à ceux que procure aux alcooliques ou aux morphinomanes la suppression brusque du poison auquel ils sont accoutumés ». (1903, p. 198). Beard exagère encore cette dernière idée; pour lui, ce n'est plus une simple infection, c'est un envahissement réel du soma par le parasite ger- men; de cet envahissement résulte une lutte où le soma finit parfois par succomber, dans les cas, par exemple, où les cellules sexuelles aberrantes évoluent en tumeurs malignes. En somme, si l’on se contente de porter sur la théorie du parasilisme sexuel une vue d'ensemble, cette théorie est séduisante; elle est simple, elle explique clairement quelques faits; enfin, elle vient apporter un caractère plus scientifique à cer- laine École philosophique dont je parlais lout à l'heure. Elle tend à nous montrer, en effet, qu'en définitive les individus n’agissent dans la Nature que pour faire vivre l'espèce. Et c'est ainsi que la science positive viendrait justifier ces paroles de Schopenhauer : « L'amour n’est donc que le « vou- loir vivre » de l'espèce, le besoin de se perpéluer aux dépens des illusions et des joies éphémères qu'éprouve l’homme... Les animaux dupes de cette mystification de la Nature qui, par l’appät de la jouissance, leur fait croire qu'ils tra- vaillent pour leurs plaisirs individuels, tandis qu'ils ne travaillent, en réalité, que pour les besoins de la perpétuité de l'espèce. » Mais, pour juger une théorie, la méthode scien- tifique exige autre chose qu'une vue d'ensemble, et il suffit d'approfondir un peu la théorie du parasitisme sexuel pour voir le vide réel qu'elle renferme. aussi sont 70 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ En y réfléchissant purement et simplement, il y a tout d'abord une chose qui ne manquera pas de frapper. Si l’on veut mettre en évidence tout ce qui sert à la vie de l'espèce, si l’on veut opposer les organes qui servent à la reproduction sexuelle à ceux qui servent à la nutrition de l'individu, pour- quoi s'en tenir aux glandes génitales? Est-ce que les mamelles, les glandes odorantes, l'utérus, ne présentent pas aussi un développement exagéré au moment du rut? Logiquement, il faut donc faire aussi, de ces organes, des parasites du soma; mais alors, prenons garde d’être entraînés à consi- dérer l'organisme tout entier comme un parasite de lui-même! D'un autre côté, lorsque les défenseurs de la théorie nous montrent que, dans un certain nombre de cas, les muscles du tube digestif régressent pendant que les glandes génitales se développent, ces biologistes ne font que mettre en évidence une concordance entre deux ordres de phénomènes. Or, il y a déjà longtemps que Bacon a fait remarquer (Novum organum, 1620) que toute concordance, serait-elle constamment observée, n'implique pas forcément une relation de cause à effetentre les deux phénomènes. Mais, du reste, il suffit de jeter un coup d'œil sur le règne animal pour voir que celte con- cordance entre la maigreur du soma et la présence des réserves nutritives dans les éléments sexuels n'existe pas toujours. Il est à remarquer, en effet, que ce ne sont pas les femelles qui produisent le plus d'œufs ou les plus gros œufs qui deviennent le plus maigres à ce moment. Il est même à re- marquer que, des deux sexes, c'est toujours le màle qui paraît le plus malade au moment du rut, et c'est pourtant l'organisme sexué qui fournit le moins de substances par la formation des produits génitaux. Enfin, si beaucoup d'individus sont dans un état régressif particulièrement prononcé au moment de la reproduction, c'est également un autre fait d'ob- servation, des plus fréquents, que beaucoup de femelles, les femmes en particulier, sont toujours dans un état de santé meilleur lorsque leurs glandes sexuelles fonctionnent régulièrement, et même lorsqu'elles portent, dans leur sein, un embryon qui lui, pourtant, semble bien, à première vue, agir comme un véritable parasite. D'un autre côté, si l’on examine les glandes gé- nitales au moment où elles paraissent retirer du soma cette abondance de nourriture qui frappe chez le Saumon, on remarque bien vite que ces glandes ne se conduisent nullement comme des organismes parasites, dont une bonne nutrition augmenterait l’organisation, la force et la vitalité des éléments; elles apparaissent, tout au contraire, comme des organes excréteurs, comme des glandes holocrines et mérocrines, tout à la fois; elles se comportent de la même facon que les mamelles ow que les glandes sébacées, par exemple, c’est-à-dire comme des organes dont les éléments cellulaires, chargés de produits d’élaboralion et rejetés hors de la glande, meurent plus ou moins vite. Et, pour en revenir au cas du Saumon, si la sub- stance musculaire disparait en partie, aux époques sexuelles, ce n'est pas parce que les glandes géni- tales s'en nourrissent; c'est, comme nous le montre- rons bientôt, parce que les muscles, ainsi que l’or- ganisme tout entier, sont dans un élat de régression maladive. Les deux phénomènes concordent, non pas parce que l’un est l'effet de l’autre, mais parce qu'ils dépendent l'un et l’autre d’un état spécial de l'organisme, caractéristique de chaque poussée sexuelle, et que nous aurons bientôt à mettre en évidence. Qu'il y ait maintenant relation intime entre le fonctionnement des glandes génitales et l’orga- nisme, que certains phénomènes du soma soient sous la dépendance du germen, cela est indé- niable. Mais nous verrons que les glandes géni- tales agissent ainsi comme des glandes à sécrétion interne ; il n'y a pas plus à parler, pour elles, d'action parasilaire que pour toute autre glande à sécrétion interne de l'organisme, pour le foie ou pour les capsules surrénales, par exemple. $ 2. — Théorie métabolique. Une autre théorie de la sexualité, que l’on trouve défendue également en France, a été exposée de la façon la plus claire dans le petit livre de Geddes et Thomson intitulé L'Évolution du sexe (1892). On rencontre bien encore, dans cette théo- rie, quelque chose des idées précédentes; par exemple, la sexualité y est toujours représentée comme une fonction de l'espèce; mais, au lieu de trouver un antagonisme plus ou moins grand entre les fonctions conservatrices de l'individu et les fonctions conservatrices de l'espèce, les auteurs y voient un parallélisme de développement complet. A l'exemple de Th. Schwann, Geddes et Thomson ” donnent le nom de métabolie ou de métabolisme à l’ensemble des phénomènes de changement qui se produisent continuellement dans l'intérieur des cellules d'un organisme. Si ces changements sont déterminés par l’arrivée de nouveaux matériaux nutritifs, ils constituent ce qu'on appelle l'ana- bolie; si, au contraire, ils résultent du rejet,-hors de la cellule, de substances faisant partie primiti- vement de sa constitution, ils forment la catabolie”. 1 Comme le fait remarquer Yves Delage, ces expressions, employées couramment par les biologistes anglais, ne sont qu'une autre forme des vieux mots francais : nutrition (méta- bolie), assimilation (anabolie) et désassimilation (catabolie). G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ TÎ Geddes et Thomson remarquent ensuite que « le fait essentiel de reproduction est la séparation d'une parlie de l'organisme parent pour commencer une vie nouvelle ». « La division cellulaire, qui est parfois le résumé de l'acte de la reproduction et qui l'accompagne toujours, se produit dans une crise catabolique. » Dès lors, ces auteurs concluent que la reproduction a pour cause une rupture de l'équilibre vital, caractérisée par une prépondé- rance relative de catabolisme. Ét c'est pour cela que la reproduction est toujours liée à la mort. Nous verrons combien ces propositions sont jus- lifiées dans leur ensemble. Mais on a remarqué, sans doute, qu'elles ne font qu'approcher de plus près la solution du problème. « La reproduction commence par une ruplure, par une crise catabo- lique », disent les auteurs. Cela est très vrai, mais pourquoi celte rupture, quelle est la cause de la crise catabolique ? C’est à cette question qu'il fallait répondre et c’est ce que Geddes et Thomson n'ont pas fai. D'un autre côté, la théorie, ramenant toujours la sexualité à l'espèce, n'explique pas davantage (ou fait intervenir une finalité douteuse) la quantité énorme de produits rejetés hors des organismes par les fonctions sexuelles sans profit direct pour la vie de l'espèce : les milliers d'ovules et de spermato- zoïdes qui nese rencontreront jamais, les sécrétions chimiques des glandes génitales, des oviductes, des spermiductes, et des glandes cutanées, dont bien peu serviront à la vie de l'embryon. Elle n’explique pas suffisamment l'accumulation de substances qui se fait autour de la graine dans les fruils char- nus, car ces substances ne serviront pas au jeune embryon et leur rôle de protection n’est pas suffi- samment manifeste quand on compare ces sortes de fruits aux fruits secs. Enfin, elle reste muette devant ces produits nuisibles que l’on a découverts dans le lait de Mammifères et qui font de cette substance, comme nous le montrerons plus tard, un produit d’excrélion plus ou moins bien adapté ‘à la vie de l'embryon. Poursuivons, cependant, l'exposé de cette (théorie intéressante à plus d'un titre. De même que les fonctions de l'individu se divi- sent en anaboliques et en cataboliques, de même, disent Geddes et Thomson, les fonctions de l’es- pèce se divisent en femelles, caractérisées par la prépondérance de l’anabolie, et en mâles, caracté- risées par la prépondérance de la catabolie. Partant de ces idées, que Geddes et Thomson résument dans un diagramme, il est alors facile d'expliquer les deux sexualités. Elles résulte- raient de la désharmonie d'un état hermaphrodite primitif : les organismes qui se sont trouvés mal nourris sont restés petits, toujours en quête de nourriture, et ont formé les mâles ; au contraire, les organismes bien nourris sont devenus plus gros, ont manifesté une tendance de plus en plus grande vers l'inactivité et sont devenus les femelles. Les éléments sexuels ne font que répéter ce dimorphisme en l’exagérant encore. « Les petites cellules mâles affamées recherchent les cellules femelles grandes et bien nourries, dans le but de la conjugaison, but pour lequel les dernières, plus grandes et mieux nourries, ont pour leur part moins d'inclinalion*. » Et alors Geddes et Thomson nous donnent un autre diagramme, dans lequel on voit les deux éléments sexuels, partant d'un type cellulaire commun, évoluer dans deux directions différentes : l'ovule dans la voie de l’anabolie, le spermatozoïde dans celle de la catabolie, puis se retrouver au bas de leur course pour s'unir par l'acte. de la fécondation. Certes, cette théorie est très simple, mais elle se trouve malheureusement en opposition avee quelques faits. En effet, les organismes mâles ne sont pas toujours les plus petits, el, par contre, beaucoup de femelles montrent, au moment du rut, autant ou même plus d'activité que les mâles. Puis il n’est pas exact de dire que l'œuf est une cellule affamée qui, lors de la fécondation, phago- cyterait, c'est-à-dire mangerait le spermalozoïde. S'il en était ainsi, on devrait se demander, tout d'abord, comment une cellule, chargée de subs- tances nutritives qu'elle va utiliser tout à l'heure, peut se trouver affamée. Un des partisans de la théorie, Lebrun, répond à celte objection, mais vraiment sa réponse n'est pas suffisante ; c'est parce que, dit-il (1902, p. 76) « le cytoplasma et le noyau (de l'œuf), quoique se trouvant plongés dans des milieux nutritifs abondants, s'y sont tel- lement habitués, que leur assimilation se trouve ralentieet devient même impossible ». L'observation montre neltement, du reste, que le spermatozoïde, lors de la fécondation, au lieu d’être digéré par le protoplasma ovulaire, acquiert, au contraire, une nouvelle puissance vitale, puisqu'on le voit se diviser cinétiquement et cela souvent d’une facon indépendante du noyau ovulaire *. On peut renverser les termes, il est vrai, et dire, avec d’autres défenseurs de cette théorie : c’est le spermatozoïde qui est la cellule affamée et qui va vers l'œuf, attiré par les substances nutritives que cet œuf contient. Mais, là encore, quelques faits vont à l’encontre de cette proposition. Chez un certain nombre de types végétaux inférieurs (Vaucheria, 4 Rolph, cité par Geddes et Thomson, p. 161. 2 Lebrun (1902, p. 82) conteste, il est vrai, la réalité de cette indépendance, affirmée par d'autres observateurs ; cela n enlève rien au fait essentiel pour nous, qui est le retour du spermatozoïde à l'activité cinétique. 1 19 OEdogonium, Coleochæte et Coridée), on voit les cellules femelles pourvues d'appareils collecteurs des anthérozoïdes. Et chez certains animaux, tels que les Myriapodes, le spermatozoïde est immo- bile ; c’est l'œuf lui-même qui va le chercher, lors de la fécondation, par le moyen d’une sorte de pseudopode (Silvestri, 1898). Enfin, Léger (1904) a montré que, chez les Grégarines, c'est l'élément mâle, toujours mobile, qui est chargé des réserves nutritives, landis que l’ovule est plus petit et beaucoup moins chargé de vilellus, Lout en restant passif au moment de la fécondation. Les deux théories que nous venons d'exposer, celle du parasilisme sexuel et la théorie métabo- lique, se rapprochent en plusieurs points, en par- ticulier, de la conception de structure des éléments sexuels. Pour l’une comme pour l’autre théorie, les éléments ovule et spermatozoïde ne renferment que des demi-noyaux; la fécondation a pour but de rétablir, dans le noyau de l'œuf, le nombre normal de chromosomes qui avait été diminué de moilié par la réduction chromatique. Nous aurons à étudier plus tard ce dernier pné- nomène, que la théorie est amenée à considérer comme la raison d'être de la sexualité; mais nous devons dire dès maintenant que les der- nières découvertes lui ont enlevé beaucoup de son importance et de sa signification. D'abord, on a bientôt remarqué que le nombre des chromosomes sexuels ou la quantité de chromatine restée dans les éléments fécondants ne sont pas toujours cons- tants chez le même animal; chez la souris, par exemple, Sobotta a observé l'élimination tantôt d’un seul globule polaire, tantôt de deux; le même auteur voit osciller le nombre des chromosomes entre 12 et 15; Tafani, toujours sur la souris, en compte 20, et enfin Holl va jusqu'à 24 (v. Ku- lagin, 1898). Puis on a trouvé que des phénomènes de réduc- tion chromatique se produisaient dans d'autres cellules que celles des tissus génitaux. Depuis 1898, en effet, des biologistes anglais: Farmer, Moore, Walker (Voir Bashford, 1904, p. 19), ont signalé, à plusieurs reprises, le fait que cette réduction se présente dans les éléments du cancer chez l'homme, exactement, disent-ils, de la même façon que chez les spermatocytes ou les cellules-mères des plantes. Faut-il voir dans ces derniers faits l’origine des idées de Beard, dont nous avons parlé plus haut? Je ne sais. Dans tous les cas, remarquons la force des idées préconçcues. On a vécu, depuis plusieurs années, dans cette notion que la réduclion chromatique est la caractéristique de l'élément sexuel. Un beau jour, on s'aperçoit que ce G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ —— phénomène se produit aussi dans les cellules du cancer ; immédiatement on fait, de ces dernières, des cellules sexuelles ou, du moins, des cellules renfer- mant la nature de la sexualité. C'est iei encore que Bacon pourrait apprendre à ces biologistes que la concordance qu'ils constatent peut résulter d’une même cause sans avoir nullement la signification d'une parenté réelle. Du reste, à la même époque, mais à l'autre extrémité de l’Europe, un Russe, Kulagin (1898), montrait que les cellules des disques imaginaux, chez les Hyménoptères, contiennent une fois plus de chromatine que les cellules défi- nitives qui en dérivent. Le phénomène des méta- morphoses s'accompagnerait donc, lui aussi, des mêmes phénomènes de réduction chromatique. Enfin, d’autres observations viennent comme à plaisir, nous apporter la contre-partie de Ja théorie que je discute ici, c’est-à-dire pour nous montrer que, chez certains types, les éléments, fécondants peuvent parfaitement jouer leur rôle, sans présenter aucune trace de réduction chro- matique vérilable. Dans les Chlamydomonas, par exemple, famille de Volvocinées chez lesquels la reproduction sexuelle se présente de la facon la plus simple, les éléments reproducteurs ont une structure et un mode de formation identiques à ceux des zoospores asexuées. De plus, le nombre « des chromosomes se maintient constant au cours des diverses générations asexuées et sexuées : « dans le genre Chlorogonium, le no yau des gamètes (éléments sexuels) renferme une dizaine de chro= mosomes comme celui des zoospores ordinaires » (Dangeard, 1898). Il en est de même pour les Gré- garines étudiées par Léger (1904), chez lesquelles » l’auteur a vu que les gamètes « ne montrent pas, au cours de leur développement, de réduction chromatique ». $ 3. — Théorie de l’autophagie sexuelle. Dans ces derniers temps, un botaniste français, Dangeard (1898), reprenant une idée émise, dix ans auparavant, par un hollandais, Van Rees (cité par Delage 1895, p. 323), a émis une théorie de la sexualité qui se relie par quelques points à la théorie précédente. Dangeard suppose d'abord que la nutrilion ani- male n’était, au début de la vie, qu'une sorte d'incorporation directe, s’effectuant entre des proloplasmas de composition identique. Il consi- dère ensuite la reproduction sexuelle comme n'étant qu'une modificalion de cette autophagie primilive et son apparition comme déterminée par une interruption dans la nutrition ordinaire. Considérant, par exemple, les Algues et les Cham- pignons, il montre la sexualité remplaçant ou suppléant l'enkystement. Avant de passer à l’état G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ 73 de repos, dit-il, le protoplasma, ne trouvant pas dans son milieu les réserves qui lui sont néces- saires pendant la période de jeûne, procède par « autophagie »; deux individus se mangent réci- proquement pour le bien commun »; c'est là ce que Dangeard appelle l’autophagie sexuelle. Comme Geddes et Thompson, Dangeard établit un parallèle entre la sexualité et la nutrition : « L'autophagie sexuelle et la nutrition animale représentent donc, écrit-il, des modifications de l'autophagie primitive; elles ont conservé des caractères communs : il ya incorporation de proto- plasma dans un autre; l'affinité qui préside à la réunion des éléments reproducteurs rappelle celle qui permet à un organisme de faire un choix dans ses aliments; elle rappelle aussi l'attraction qui dirige un parasite vers son hôte. » On le voit, cette théorie n’est jusqu'ici qu'une amplialion de la théorie précédente; comme elle, elle n’a guère en vue que les éléments sexuels; comme elle, elle n'explique guère que la féconda- tion; par suite, elle est passible des mêmes cri- tiques. Il y a, cependant, dans cette théorie une idée nouvelle qui me parait beaucoup plus con- forme aux fails que les théories précédentes. Au lieu de voir, dans la réduction chromalique, la raison d’être de la sexualité, cette réduction n'en est, au contraire, pour Dangeard, qu'une conséquence; cette conséquence est nécessaire, du reste, puisque, sans elle, le nombre » des chromosomes double- rait à chaque génération sexuelle. Dans la fécon- dation, au contraire, ce sont des noyaux normaux qui s'unissent; le noyau sexuel est, par consé- quent, un noyau double, et ce ne sera que plus tard, à un élat plus ou moins avancé du développe- ment, que l’on verra, dans certaines cellules du nouvel organisme, une réduclion chromatique se produire; c’est ce qui se produira, par exemple, pour les cellules destinées à devenir des éléments sexuels. Mais, si Dangeard montre la raison d'être de cetle réduction, il n'en montre ni la cause ni la signification physiologique. Aussi la théorie de l’autophagie sexuelle, comme celle du mélabo- lisme, ne fait que s'approcher plus ou moins près de la solution du problème sexuel, sans la ré- soudre complètement. $ 4. — Théorie chimique de Keiffer. Pour en finir avec ces lhéories générales de la sexualilé, il me reste à parler d'un Æssai de phy- siologie sexuelle générale dû à un Belge, Keiffer (1897). Cet essai, qui ne manque vraiment pas d'ori- ginalité, est basé sur une idée, que l'on retrouve comme base de raisonnement pour expliquer la psychologie des sexes, dans un petit livre d'un médecin français, Joanny Roux (1898). D'après Keiffer, la vie génitale, dans ses manifes- tations générales, nutrilives, et dans ses manifes- talions locales, sexuelles, serait sous la dépendance d'une sécrétion génésique interne, élaborée par tous les tissus de l'organisme. Cette substance génésique, sur la nature de laquelle l’auteur ne nous renseigne pas malheureusement, exciterait la nutrition générale suivantun type chimique déter- miné; elle exciterait en même lemps l'activité spé- ciale de la glande sexuelle, l'ovaire ou le testicule ; enfin, elle s’éliminerait par l'utérus chez la femme, par la prostate chez l'homme. Le liquide mens- truel et le liquide prostatique seraient ainsi l’ex- pression ultime de la sécrétion d'une substance génésique interne et de son excrétion par les émoncloires sexuels, utérus et prostate. Ces deux organes sont, en effet, des organes homologues et peuvent être considérés comme des organes à fonc- tions glandulaire aussi bien que musculaire. Mais Keiffer considère que ce n’est pas seulement l'appareil génital qui est le dépositaire exclusif de la fonction sexuelle; pour lui, tous les tissus inter- viendraient aussi dans la succession des phéno- mènes dont la fécondalion est le but essentiel. On le voit, cette théorie est justement la contre- parlie de celle du parasilisme sexuel. Iei ce n'est plus le germen qui va influencer le soma; de toules les parties de ce dernier sortirait, au contraire, une subslance excitante qui s'éliminerait par les organes génilaux. L'idée qui a guidé Keiffer aurait pu être féconde entre les mains d'un biolo- giste, mais un médecin ne pouvait guère envisager que l'homme ou les Vertébrés supérieurs. C'est ainsi que la théorie de Keitfler, partant d'une vue d’en- semble que nous retrouverons sous une forme plus précise dans nos leçons, vient aboutir à une conception étroile, qui laisse de côté les phéno- mènes essentiels de la sexualité. II. — RÉSUMÉ ET CONGLUSIONS. L'étude historique par laquelle j'ai voulu com- mencer ces lecons sur la sexualité ne doit pas être une simple manifestation d’érudition. Cette étude nous à déjà fait connaitre, en effet, paux points de Ja question; elle nous a montré en même temps des opinions d'inégale valeur; elle a reflété plus ou moins justement, devant nous, les errements de temps passés dont nous sommes toujours les tributaires; enfin, elle nous a fait revivre avec des esprits philosophiques, avec les prinei- des hommes avides de savoir, el, avec ceux-là, il est toujours profilable de venir passer quelques heures de sa vie. Ce qui frappe le plus, sans doute, dans cet his- torique, c'est la discontinuité que l'on trouve dans 74 G. LOISEL — ÉVOLUTION DES IDÉES GÉNÉRALES SUR LA SEXUALITÉ les esprits et dans les idées, c’est l'abandon de théories anciennes venant réapparaître, plus ou moins modifiées, dans les siècles suivants. Mais il en est de cette question comme de toutes les autres en science, et J'aurais certes commis une erreur si j'avais présenté l'évolution des idées sur la sexualité sous la forme de l'arbre symbolique, dont les branches, de plus en plus touffues, vont étendre au loin leur ombre bienfai- sante. La science ne progresse que par les hom- mes; or, les hommes dépendent d’abord de leur hérédité et de leur éducation; ils sont liés ensuite à la marche même des grandes découvertes qui viennent, tout à la fois, donner un nouvel essor à la science, en même temps, malheureusement, qu'elles endiguent, trop longtemps et trop exclu- sivement surtout, la direction des recherches. A l'époque où l’on ne connaissait guère que des humeurs dans les organismes, la sexualité ne fut expliquée avec les Anciens que par le mouvement de ces humeurs (Hippocrate) ou par l'intervention de forces parliculières contenues dans ces humeurs (Aristote). Il en fut ainsi pendant plus de deux mille ans, car c'est seulement au xvin° siècle que Ja découverte des ovules et des spermatozoïdes vint détourner pendant un certain temps toute l’atten- tion des savants. Les exagérations des ovistes et des spermistes permirent à Buffon de faire revivre tout la fois, dans son système, les humeurs d'Hip- pocrale et les particules représentatives d'Aristote. Mais, dans le cours du xix° siècle, à la suite de la découverte des phénomènes intimes de la féconda- tion, on revint avec ardeur à l’étude des éléments sexuels etaux explications purement mécaniques de Ja fécondation et de l’hérédité. Dès lors, on ne s'oc- cupa plus guère que de ces questions et, encore aujourd'hui, pour beaucoup d'’esprits, la sexualité n'est représentée que par les éléments fécondants, et les fonctions sexuelles que par la fécondation. Cependant les théories humorales ne faisaient que sommeiller. Après une vogue d'un moment, avec Brown-Séquard, elles semblent reprendre actuellement un nouvel essor; cela se produit à la suite des études histo-chimiques des sécrétions génitales et des corrélations si frappantes que l’on découvre entre le fonctionnement du testicule et de l'ovaire et la formation des caractères sexuels secondaires. En somme, la discontinuité dont je parlais tout à l'heure a été plus apparente que réelle. Aujour- d'hui, comme au xvin°, comme au xvri° siècles et même comme au temps des anciens Grecs, si proche de nous, malgré les siècles écoulés, les idées courantes sur la sexualité partagent encore les hommes en deux grands courants : les uns en tiennent toujours, au fond, pour Hippocrate et ses humeurs ; les autres parlent de forces, d'énergies, de particules représentatives qui rappellent de bien près les « esprits » et les « forces forma- tives » d’Aristote. L'anciennelé et la persistance à travers les âges de ces deux courants d'idées sont une cons- tatation intéressante. Elle reflète d'abord certai- nement une double direction dans l'esprit des hommes qui se sont occupés de ces questions. On peut remarquer, en effet, que, chez nous du moins, les médecins se rangent plus volontiers du côté d'Hippocrate, alors que les philosophes et les bio- logistes purs tiennent davantage d’Aristote. Mais cetle constatation peut et doit signifier aussi que les deux systèmes renferment l’un etl'autre quelque chose de vrai. Un philosophe n'a-t-il point dit : « Les principes les plus opposés contiennent tou- jours une certaine quantité de cette vérité qui est éparse partout, condensée dans une formule. » Donc, loin de combattre ces deux grands cou- rants qui se manifestent encore aujourd'hui dans les questions sexuelles, je m'efforcerai de décou- vrir et de mettre en évidence les liens qui doivent les unir. J'essayerai, avant tout, de grouper en un seul ensemble toutes les questions diverses qui s'agi- tent isolément autour du mot sexualité : l’origine du sexe, le dimorphisme sexuel, les phénomènes du rut, la fécondation, l’hérédité, le détermi- nisme des sexes, l'instinct génital, l'amour ma- ternel, etc. Autant de points que l'on spécialise actuellement dans la science et qui, pourtant, sont, sans aucun doute, dépendants les uns des autres, du moins dans une certaine mesure, qu'il s'agira pour nous de déterminer. Une autre erreur des méthodes actuelles est, nous l'avons vu, de considérer les fonctions sexuelles, non pas par rapport à la vie de l’in- dividu qui présente ces fonctions, mais par rapport à la vie de l'espèce à laquelle appartient cet indi- vidu. La conséquence de celte méthode est la ten- dance à ne voir, dans la sexualité, que les seuls éléments fécondants, et, dans la fécondation, que la seule fonction importante de la sexualité. Cette manière de considérer la queslion est due sans doute aux progrès de la technique histolo- gique et aux nombreuses découvertes morpholo- giques que cette technique nous a fait connaître, sans plus de profit, du reste, pour la connaissance réelle des phénomènes. Mais elle reflète toujours aussi ces temps où l'espèce apparaissait aux yeux des philosophes comme une sorte de divinité jalouse pour laquelle les individus étaient sacrifiés. Certes, beaucoup de biologistes, ceux qui ne res- tent pas canlonnés dans les courtes vues des spécia- lisalions, tendent de plus en plus à ne voir dans la D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 15 Nature que des individus; mais ii en est d’autres aussi qui continuent à vivre sur les errements d'un Transformisme mal compris; ce sont, avant tout, ceux qui demandent seulement à une idée nou- velle d’être claire, simple, vraisemblable. Je crois que la meilleure méthode, actuellement la plus profitable pour étudier la sexualité, est, sans méconnaitre aucune œuvre du passé, de considérer ce grand problème par rapport à l'in- dividu, c’est-à-dire de prendre pour guide la Nature qui nous montre, dans les sécrétions gé- nitales et dans la lactation, par exemple, des fonelions intéressant nécessairement l'individu avant de s'adresser à ses enfants. Nous étudierons donc tout d'abord ici les phénomènes du rut, aussi bien ceux qui se laissent voir immédiatement dans les organismes que ceux quil faut aller chercher profondément dans l'intimité même des tissus; non seulement nous étudierons ces phénomènes en eux-mêmes, mais encore et surtout dans leurs apports avec les autres fonctions de l'individu. Dans cette étude, nous rencontrerons évidem- ment les éléments sexuels; mais, dans leur forma- tion, nous ne verrons qu'un des effets, qu’une des manifestations du rut, contrairement aux idées de ceux qui ne veulent voir, dans ces éléments, que la raison même de la sexualité. C'est seulement alors que, suivant la destinée de ces éléments, nous | rencontrerons l'espèce sur notre route. Autrement dit, notre étude de la sexualité aura l'individu comme point de départ et l'espèce comme aboulis- sant. Comme je le disais tout à l’heure, pour mener à bien ce programme, je tàcherai de ne rien né- gliger des connaissances antérieurement acquises. Car il serait bien orgueilleux et un peu naïf celui qui, à notre époque, prétendrait pouvoir émettre une théorie générale, vraiment utile à la marche de la science, sans tenir compte de tout ce qui a été fait avant iui. Rassembler simplement des faits observés et les grouper en un certain ordre peut déjà servir à la découverte de vérités inconnues ; c'est là, disait notre grand Lamarck, « dans l’élude de la Nature, la tâche que doit s'imposer, d’une manière inébranlable, quiconque se dévoue à con- courir à ses véritables progrès » (1802). Ainsi donc, prenant pour base de nos raison- nements la connaissance des faits connus, appli- quant à l'explication et à la coordination de ces faits les données fournies par nos recherches par- ticulières, nous espérons pouvoir présenter main- tenant une conception nouvelle de la sexualité de laquelle sera exclu tout raisonnement purement hypothétique. D' Gustave Loisel, Préparateur d'Embryologie générale à la Faculté des Sciences de Paris. REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE DEUXIÈME PARTIE : DIGESTION, SANG, URINE Dans un premier article', nous avons passé en revue les travaux récents relalifs aux constituants du corps, aux aliments etaux diastases ; nous termi- nerons par l’exposé des recherches consacrées à la digestion, au sang et à l'urine. I. — LA DIGESTION. On sait quelle impulsion nouvelle ont recue, au cours de ces dernières années, les recherches sur la digestion, principalement sous l'influence des tra- vaux de l'Ecole de Pawlow, complétés et étendus surtout par les physiologistes français et anglais. C'est tout particulièrement la question des diastases digestives, de leur sécrétion, des conditions de leur action dont l'aspects’est profondément modifié. La Revue a rendu compte à plusieurs reprises de cet ensemble de recherches; mais le côté plus spé- * Voir la Revue du 15 janvier, t. XVI, p. 19 et suiv. cialement chimique du problème, à savoir la question des produits de la digestion, de la posi- tion chimique de ces produits, a été également l’objet d’un grand nombre de travaux. Ce sont ces recherches que nous résumerons ci-après. $ 1. — Action de la pepsine et de la trypsine sur les matières albuminoïdes. Les polypeptides et les kyrines. Les polypeptides de synthèse. La position donnée par la théorie de Kühne à cette question de la digestion pepsique et trypsique des albumines est aujourd'hui classique : Ces substances sont constituées par l'association d'un groupe hém1 et d'un groupe anfi, déjà dislingués par Schützenberger. Dans la digestion pepsique, ces deux groupes restent unis, et l'albumine est successivement transformée en acidalbumine, en albumoses primaires et secondaires, puis en une peptone, laquelle est une amphopeptone, car elle contient encore les deux groupes Lémi et anti. En 16 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE effet, la digestion trypsique en fait sortir l'anti- peptone résistante, tandis que le groupe hémi se disloque en donnant des produits crislallisables abiurétiques (amino-acides). Or, ce tableau sché- malique est allé se modifiant peu à peu sur les points que voici : 1° Le nombre des albumoses pepsiques, tant pri- maires que secondaires, est bien plus considérable qu'on ne le croyait, ainsi qu'il ressort des travaux faits par l'École de Hofmeister à l'aide de la méthode de précipitation fractionnée par les sels”. Dans un exposé d'ensemble consacré récemment par Hofmeister à l'étude des matières albumi- noïdes, on relève un total provisoire de dix frac- tions, qui diffèrent nettement par leur composition centésimale, leurs réactions colorées, etc. Ainsi, l’une d'elles est très riche en soufre (thio-albumose) une autre très riche en glucose (gluco-albumose). Ce n'est donc pas loule la molécule albumine qui passe peu à peu par les divers slades albumoses; en réalité, il y a dédoublement en fragments diffé- rents, dont chacun ne contient plus qu'une partie des noyaux associés dans la molécule primitive”. 2 Quant aux peplones pepsiques et trypsiques, leurs caractéristiques essentielles étaient pour Kühne les suivantes : Ce sont des corps biurétiques, solubles dans les solutions saturées de sulfate d'ammonium et résistant respectivement à toute action ultérieure de la pepsine et de la trypsine. Occupons nous d'abord des peptones pepsiques. Que de tels composés prennent naissance sous l'action de la pepsine, c'est ce que démontre ce fait | que, même prolongée au delà d’une année, la diges- tion pepsique laisse toujours subsister la réaction du biuret. Mais rien ne prouve que les peptones pepsiques décrites jusqu'à présent — ycompris celle dont il sera question plus loin — présentent ce caractère de produit final de la digestion. Il est prob ble, en effet, qu'il se produit une succession de corps à caractères de peptones, car nous verrons plus loin que les peptones nous apparaissent comme une association d'amino-acides, et comme, durant toute la digestion pepsique, la production d'amino- acides libres est un phénomène continu, celle des peptones apparait corrélativement comme un effeuillement progressif de molécules qui, d'abord plus compliquées, engendrent des peptones de plus en plus simples à mesure que se continue le déta- 1 Les critiques faites à cette méthode ont été réfutées par A. Gautier et par E. Zunz. Voy. à ce sujet les exposés de Zunz (Ann. dela Soc. des Sciences mé. et nat. de Bruxelles, L. IX. fase. 2-3, 900, et Journ. méd. de Bruxelles 1901, p. 637). 2 Pour le détail de ces travaux, voy. l'exposé de Hofmeister (Eryvbnisse der Physiol., 1. Biochemie, 1902, p. 718) et celui de Zunz (Ann. de la Soc. des Sciences nat. el méd. de Bruxelles, t. XI, fasc: 1, 1902). | antipeplones, le problème est encore plus délical. chement et la mise en liberté des amino-acides. E. Fischer a réalisé artificiellement ce phénomène dans des expériences que nous reltrouverons pius loin. Cela posé, remarquons d’abord que l'amphopep= tone de Kühne est sûrement un mélange très complexe. Fränkel et Langstein en ont isolé jusqu'à quatre substances différentes, dont deux peptones; E. P. Pick, Siegfried ‘ et ses élèves distinguent éga- lement deux peptones pepsiques. Il semble que ce soient les peptones deSiegfried, isoléesà l’aide d'une méthode spéciale à l'alun de fer ammoniacal, quipré- sentent le plus de garantie de pureté.Hammarstenles considère comme des individus chimiques définis. Les deux variétés & et 8 obtenues en parlant de la fibrine ont pour formule minima C*H°'Az'0° et C*“H°Az°0". Elles paraissent dériver l'une de l’autre par perte ou gain d'une molécule d’eau ; elles don- nent la réaction du biuret et celle de Millon; elles présentent le caractère d'acides et sont dédoublées par la trypsine en arginine, amino-acides (parmi lesquels la lotalité de la tyrosine et beaucoup d'acide glutamique) et en deux antipeptones. Elles seraient donc bien une amphopeplone au sens de Kübne, avec celte correction qu'il exislerait dans k l'albumine deux groupe anti et non pas un seul . comme le pensait Kühne. Mais on ignore si ces peptones sont le produit final de l'action de la pep « sine. L'étude approfondie des produits biurétiques terminaux fournis par la digestion pepsique des malières albuminoïdes bien pures, de préférence de matières albuminoïdes cristallisables, reste donc” une question ouverte. Il est certain que, pour des raisons bien connues, la fibrine consliluail à cet f égard une matière première mal choisie. En ce qui concerne les peptones trypsiques ou oem» - + he. à pat Depuis que Morochowetz, Siegfried* et d'autres observateurs ont vu que, par une digestion trypsi-M que active, on réussit à faire disparaître complète ment la réaction du biuret, on peut dire avec R L. Langstein* qu'au sens où l’entendait Kühne, il 1 n'existe pas de peptone trypsique, c'est-à-dire de û corps biurétiques représentant un produit final de Î l'action diastasique. Les antipeptones ne sont que des produits de transition, qui, dès lors, ne E 1 FRANKEL et LANGsTEIN : Sitzungsber. d. Akad. d. Wis® sensch. z. Wien; Math. naturwiss. K1., t. CX, IL b., p. 243: — LaANGsrEIx : Beïtr. z.chem. Physiol. u. Pathol.,t. I,p. 507, 1902 ett. Il, p. 229,902. — E. P. Pre : Zeitschr. f. physiol. Chem.,t. XXIV, p. 267, 1898.—M. SreGrrieD : Zbid., t. XXXV, p. 16%, 4902, et &. XXXVIIL, p. 299, 1903.— C. KonkeL : /bid., h t. XXXVIII, p. 269, 1903. — Ta. KrauGer : /bid., t. XXXVII, 4 p. 320, 1903. ; st ? Srecruien : Zbid., t. XXXV, p. 168, 4902. L 3 L. Lanosren : Biochemisches Centralbl., t. I, p. NM, 1903-1904 (ce travail est une revue générale de la questiom des peptones). D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE l être saisis qu'au passage, ce qui complique singu- lièrement la question, surtout s’il se forme une sé- rie d'anlipeptones à molécules de plus en plus sim- plifiées, ce qui est possible. Néanmoins, celles que Siegfried a isolées en parlant de la fibrine présen- taientunerésistance remarquable, quoiquerelative, à l’action de la trypsine. Ce sont des sublances acides, renfermant (x) C!H'Az'O" et (8) C'H'AZ'O". Elles ne donnent plus la réaction de Millon, ne contiennent pas de tyrosine ni de soufre, et fournis- sent par hydrolyse acide de l'arginine, de la lysine, de l'acide glutamique et sans doule aussi de l'acide aspartique et de la sérine. Le poids moléculaire correspondant aux formules ci-dessus est confirmé par la cryoscopie. La composilion centésimale, le poids équivalent et le pouvoir rotatoire ne varient pas par des précipitations successives. Les résultals opposés de Kutscher *, qui a nié l'existence même d'une antipeptone, tiennent à ce fait que ces deux auteurs ont étudié des produits provenant d'une digestion de durée el peut-être aussi d'activité diastasique différentes. 3 On sait que Kühne considérait la production d'amino-acides (leucine, tyrosine) comme caraclé- ristique de la digestion trypsique, tandis que Hoppe-Seyler zt!mettait que ces composés appa- raissent également sous l'action de la pepsine. C'est Zunz qui, démontrant l'exactitude des vues de Hoppe-Seyler, a établi le premier que la digestion pepsique dépasse, en effet, le stide peptone pour atteindre, comme la trypsine, celui des produits abiurétiques. Ces produits, que Law- row a caractérisés tout d'abord, sont la leucine, la leueirimide, les acides asparlique et glutamique, la tyrosine, l'oxyphényléthylamine, la cystine, la tétra- et la penta-méthylène-diamine, etc., tous produits que l'on considérait autrefois comme caractérisant essentiellement la protéolyse tryp- sique. Toutefois, il ne se produit pas de tryplo- phane. La digeslion pepsique irait donc plus loin même que la digestion trypsique, en ce sens que, pour la pepsine, l'arginine et la lysine ne sont que des termes de passage conduisant respec- -tivement à la tétra-et la penta-méthylène-diamine, tandis que, pour la trypsine, ce sont deux pro- duits terminaux (Kutscher). La seule différence qui ubsiste entre les deux procès serait done surtout que la digestion pepsique marche plus lentement, qu'elle laisse toujours subsister des produits biuré- tiques et qu'elle n’aboutit pas au tryptophane”. 4 Lorsqu'on pousse l'action de la trypsine jus- qu'à la disparition de la réaction du biuret, il ne faudrait pas, dit E. Fischer, conclure de ce fait à une dégradation totale de l’albumine en produits cris- tallisables, car il subsiste en réalité dans le liquide, à côté des amino-acides, un composé ou un mé- lange de composés amorphes, précipitables par l'acide phosphotungstique, ne donnant plus la réac- tion du biuret, et que l'acide chlorhydrique dé- double avec formation, d'une part, de leucine, d’ala- nine, d'acides glutamique et asparlique, produits qui coexistaient déjà dans le liquide de digestion avec ledit composé, et, d'autre part, d'acide Pyrr0- lidine-carbonique et de phénylalanine, que E. Fis- cher avait, au contraire, vainement recherchés dans ce liquide. On doit conclure de là, dans le sens des idées de Schützenberger et de Kühne, qu'il existe dans l’albumine un novau l'action de la trypsine et constitué par une association d'amino-acides, parmi lesquels figurent notam- ment l'acide &-pyrrolidine-carbonique et la phényl- alanine. De tels produits, qui se placent donc entre les peptones et les amino-acides, ont recu de E. Fischer le nom de polypeptides et se confondent sans doule avec ceux que Hofmeisler et ses élèves avaient entrevus (produits de digestion amorphes, abiurétiquement précipilables par l'acide phospho- tungstique) et qu'ils avaient réunis sous le nom générique de peploides. Ces corps, qui sont done des combinaisons de divers amino-acides, pa- raissent ne différer des peptones de Siegfried (voir plus haut) que par l'absence d’un groupe arginine ou uréogène. E. Fischer el ses élèves” ont, en oulre, préparé récemment toute une série de polypeplides arti- ficrels, et c'est par l'intermédiaire de ces composés qu'ils marchent méthodiquement à la synthèse des peptones. Le procédé consiste à trailer un amino- acide par un chlorure d'acide halogéné et à rem placer ensuile l’halogène par AZH*. Exemple résistant à CH2CI.CO.CI + CH*.CH.AZH°.COOH Chlorure de chloracétyle. Alanine. CH° | | — HCI + CH?CI.C0 .AzH.CH.COOI Chloracétyl-alanine. CH | | CH°CI.CO.AzH.CH.COOH + Az1* CH° | — HCI + AzH°.CH°.CO.AzH.CH.COOH Glycocollyl-Alanine Si, sur le dipeplide ainsi obtenu, on fait réagir à nouveau un chlorure d'acide chloré, on passe, par la même série de réactions, à un tripeplide, el il 1 Kurscaer : Zbid., t. XXVI, p. 110, et t. XX VIII, p. 88. 2 Pour la bibliographie de cette question, voyez: KUTSCHER : Zeitschr. f. physiol. Chem., t. XLI, p. 332, 1904. XV pe 195 t- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 1 E. Fiscuen et E. AgvernaLoen : Zeilschr. f. physiol. Chem., t. XXXIX, p. 81, 1903. et # D.chem. G.,t. XXXVI,p. 2912, 1992, et t. XXX VII, p. 2486, | 2842, 3062, 3071 et 3103, 190f. T8 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE arrive même que les rendements s'améliorent à | l'azote provenant des diamino-acides. La fibrine a mesure que le produit se complique. Déjà E. Fi- scher et ses collaborateurs se sont élevés jusqu'au tétraglycollyl-glycocolle, soit donc à un pentapep- tide de formule : AzH°.CH°.CO.(AzH.CH*.CO)".AzH. GH°.COOH, en passant par des tri- et des tétra- peptides. Parmi ces composés, les uns sont simples, c'est-à-dire constitués par l'association de plusieurs radicaux d’un même acide, comme le penta-peptide ci-dessus ou la /eucyl-leucine, les autres mixtes, c'est-à-dire formés par l'association de radicaux d’amino-acides différents, comme la leucyl-tyrosine, la dileucyl-phénylalanine, la leucyL glycocollyl-phénylalanine, etc. Plus récemment, E. Fischer et Abderhalden ont pu introduire aussi dans ces composés l'acide «-pyrrolidine-carbo- | nique, qu'ils proposent de désigner sous le nom abrégé de proline, et à préparer par exemple la leucyl-proline. Il est vraisemblable que l’on réussira également à insérer dans ces chaines des acides | oxyaminés comme la sérine, ou desacides diaminés comme l’arginine, et à atteindre ainsi des produits | se rapprochant de plus en plus des peptones. Déjà les plus compliqués d'entre ceux que l’on vient de | citer présentent avec les peptones des analogies visibles. Is donnent la réaction du biuret, sont pré- cipités par l'acide phosphotungslique, et quelques- uns d’entre eux sont dédoublés par la trypsine. De | plus, selon que l’on part de produils racémiques ou actifs, on oblient des composés différents. 5° Enfin, aux polypeptides naturels se rattachent les kyrines, récemment découvertes par Siegfried ', et qui se placent aussi entre les peptones et les amino-acides. Siegfried a obtenu la première d'entre elles, la glutokyrine, par une hydrolyse ménagée de la gélatine-peptone, ou plus simple- ment de la gélatine, en présence de l'acide chlorhy- drique à 12,50 °/, pendant 12 jours à 38°. La glutoky- | rine renferme C*H”"O*Az". Sa solution est fortement alcaline et donne la réaction du biuret. Le sulfate, le phophotungslate — ce dernier est cristallisé en fines aiguilles — et le dérivé naphtalène-sulfoné* ont donné des résultats concordants. Le corps est donc bien un individu chimique défini. Par hydro- lyse acide, il est dédoublé en arginine, lysine, acide glutamique et glycocolle, les deux tiers de 4 M. Srecrrren : Chem. Centralbl., 1903, 1, p. 1144. 2 Notons ici l'emploi de plus en plus fréquent, en Chimie physiologique, du chlorure de l'acide B-naphtalène-sulfo- nique, qui donne avec les amino-acides, les oxyamino-acides et les combinaisons du type du glycollyl-glycocolle des combinaisons peu solubles et bien caractérisées (E. Fischer et P. BERGELL : D. chem. Gesellsch., t. XXXV, p. 3719, 1902). On s'en est servi notamment pour extraire de l'urine de petites quantités de cystine (ABpERHALDEN, Zeïtschr. f. physiol. Chem., t. XXXVII, p. 557, 1903) et d'amino-acides divers tels que le glycocolle, la leucine (IGnarowskt : Zbid., t. XLII, p. 381, 1904). donc donné une substance analogue. L'intérêt de cette découverte consisle en ceci qu'elle vient, dans une certaine mesure, à l'appui de la théorie de Kossel sur la structure des matières albuminoïdes. Partant de ses travaux sur les protamines, qu'il considère comme de « petits albuminoïdes », Kossel suppose que les matières albuminoïdes contiennent toutes un noyau de pro- tamine, autour duquel viennent se rattacher les divers autres groupements conslituant la molécule. Contre cette théorie, Hofmeister' avait élevé des criliques sérieuses et il avait conclu que les prota- mines apparaissent plutôt comme un produit de. l'activité spéciale des glandes spermatiques, et non point comme le noyau primitif des divers albumi- noïdes. Or, bien que les kyrines représentent une molécule bien plus petite que celle des protamines, l’analogie entre ces deux classes de composés est frappante, el, si les albumines ne contiennent pas, sans doute, comme le voulait Kossel, un noyau de protamine, elles renferment du moins ce noyau de kyrine, fortement basique comme celui des prota- mines et dans lequel les acides diaminés consti- tuent la masse principale. On voit combien toutes ces conslatations modi- fient l'ancien tableau de la digestion pepsique et trypsique. On considérait volontiers la peptone comme l’aboutissant final et unique du travail de la pepsine. Nous voici loin de compte, puisque, dans la digestion pepsique in vitro de la sérum- albumine cristallisée, E. Zunz* a établi que, sur 100 parties d’'azole contenues dans la matière pro- EST ES téique, on en trouve, après 8 heures, 69 dans les albumoses, 28 dans les corps non précipitables par l'acide phosphotungstique (monamino-acides, ete.) et 2,6 seulement dans les peptones. Même après 30 jours, les peptones ne représentent encore que | la moilié environ des produits de la digestion, le reste étant constitué surtout par des corps abiuré- tiques. Pour la digestion trypsique, l'interpréla- tion physiologique du phénomène est encore plus difficile, puisque là la peptone n’est plus qu'un produit de transition vers les corps abiurétiques. D'ailleurs, le problème physiologique s'est com- pliqué parallèlement, puisqu'on ignore si l’absorp- tion des protéiques a lieu à l’état d’albumines pri- milives, d'albumoses, de peptones, ou de produits cristallisables,ou bien dans quelle mesure ces divers modes de pénétration ont lieu simultanément. Les mots de peptone et de peptonisation n'ont plus de sens précis en Physiologie. ! Voyez l'exposé d'ensemble de Hofmeister (Ærgebnisse der Physiol.; 1, Biochemie, 1902, p. 797). ? E. Zuns : Ann. de la Soc. des Sc. méd. et nat. de Bruxelles, t, XI, fasc. 1, 1902. dr sai D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 19 $ 2. — Pseudo-pepsine. Lab et plasteines. La diastase stéatolytique de l'estomac. La question de l'existence d'une pseudo-pepsine, qui serait secrélée dans les régions pylorique et | fondique de l'estomac, d'après Glässner, est toujours en suspens. Celte diastase agirait encore aisément en milieu alcalin, tandis que l’action de la pepsine est supprimée, silôt que le milieu cesse d'être acide à la phénolphtaléine (E. Zunz). Klug et Volhard considèrent que l'existence de la pseudo- pepsine n'est pas démontrée. Reach, au contraire, a apporlé en faveur de la thèse de Glässner des arguments que Zunz ‘ considère comme décisifs. On reste de même dans l'incertitude quant à la signification du ferment lah dans la chimie de la digestion. Meunier a constaté récemment que la faiblesse du pouvoir caséifiant du suc gastri- | que se rencontre, en général, dans les cas où la diète lactée est mal supportée, tandis que Hawk a vu, au contraire, que 22 vitro le lab retarde nota- blement la digestion pepsique du lait*. C'est surtout l'action de précipitation exercée par le lab sur les solutions de peptones commerciales qui à atliré l'attention des observateurs. La pepsine, la trypsine, la papaïne, comme aussi les sucs d'organes auto- lysés, exercent la même action, et l'on sait que Danilewski et d'autres observateurs après lui ont vu, dans les précipités ainsi formés, les produils d’une action de réversion exercée par le lab, qui ramènerait les albumoses à l’élat d'albumine (voir la Revue du 15 décembre 1903, p. 1102). Mais, dans un travail sorli du laboratoire du Hofmeister, H. Bayer? vient de montrer que les diverses albumoses de la peptone de Witte n'ont aucun pouvoir plastéinogène, que la subslance qui fournit le précipité de plastéine n’est même pas une peptone, mais qu'elle appartient au groupe des pep- toïdes de Hofmeister (voir plus haut). L'hypothèse émise par Danilewski n’en conserve pas moins, d'après Bayer, un grand intérêt, étant donnée la grande diffusion dans l'organisme des diastases « formatrices de plastéine. Il est possible, en effet, que le rôle de ces diastases soit d'arrêter, en les transformant en substances insolubles, les fragments de matières albuminoïdes de l’ordre des peptoïdes, peut-être même de les condenser en produits plus complexes. 1 GLAESsNER : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol.. t. X, p.24, 1901. — Kiuc : Arch. de Pflüger, t. LXXXV, p. 471, 1901. — MocaarD : Munch. med. Wochenschr., t. L, p. 2129, 1903. — Reaca : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. IV, p. 139, 4903. — E. Zuwz : Biochem. Centralbl., t. 11, 349, 1904 (Revue générale). ? L. Meuwrer : Bull. gén. de Thérapeut., CXLNIT, p. 683, 1904. — P. B. Hawk : Amer. Journ. of Physiol., t. X, p. 37, 1903. $ H. Bayer : Beitr. z. chem. Physiol. u.. Pathol., {. IV, p: 554, 1903. Û S 0 | CNET : G : = si re Professeur repris récemment, sous la direction de Salkowski, On a dénié pendant longtemps tout pouvoir stéa- tolytique au suc gastrique, jusqu'au moment où Volhard a montré que l'estomac est apte à dédou- bler les graisses à condition que celles-ci soient émulsionnées. La graisse contenue dans le jaune d'œuf, notamment, est hydrolysée en deux heures dans une proportion qui peut atteindre 60 °/,. W. Stade a étudié le mode d'action de celte stéap- sine slomacale, qui suit la loi de Schütz-Borrissow pour la pepsine”. $ 3. — Les putréfactions intestinales. On sait que le contenu de l'intestin grêle n'a aucune odeur putride. Il ne renferme pas de pro- duits de la putréfaction des albumines ou à peine des traces. Sa réaction acide est due à des acides gras (acide acélique, lactique, butyrique, for- mique...), c'est-à-dire à des produits de la fermen- tation des hydrates de carbone, l'effet de ces fer- | mentalions étant précisément de restreindre ou de supprimer complètement la putréfaction des albu- minoïdes. Au contraire, dans le gros inteslin, on trouve, quoiqu'’en petites quantités à l’élat normal, des produits tels que le phénol, l'indol, le scatol, l'ammoniaque, témoins de la destruction putré- | factive des matières albuminoïdes. La présence de quantités importantes d'hydrates de carbone est donc une garantie contre cette putré- faction, dont les produits sont sans doute les plus nuisibles pour l'organisme, et l’on explique ainsi la diminution très marquée des putréfactions intes- tinales au cours du régime lacté. Simnitzki- à l'étude de l'influence exercée sur la putréfaction banale des albumines, par la présence de quantités variables de divers hydrates de carbone. Il a cons- taté que le lactose est particulièrement efficace dans ce sens, et que les divers sucres agissent de même, dans la mesure où ils fournissent par fer- menlation des acides, et principalement de l'acide lactique. Il y a donc intérêt à assurer aulant que possible dans l'intestin la prédominance aux fer- ments lactiques, par l'usage de lait caillé par exemple, comme le recommande Metschnikoff. L'intensité des putréfactions inlestinales se me- sure, en général, d'après les quantités de phénols et d’indol (indoxyle) éliminées par les urines. Mais Salkowski* vient de montrer tout ce qu'il y a d'in- | certain dans la manière dont on calcule, d’après l’excrétion de phénol et d'indol urinaires, la quan- tité de matières albuminoïdes qui, dans l'intestin, 1 W. SrAnEe: Beitr. chem. Pysiol. u. Pathol., t. 1903. ? SIMNITZKI : 1903. 5 E. Sazxowski : Zhid., t. XLII. p. 228 et 236, 1904, IT, p. 294. Zeilschr. f. Physiol. Chem., t. XXXIX, p.99, 80 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE est devenue la proie des bactéries de la putréfaction. Nous n’entrerons pas ici dans le délail de cette discussion. Bornons-nous à noler que la question de la produclion du phénol et de l'indol au cours des échanges nutritifs, et en dehors de loute fer- mentalion intestinale, a été soulevée par Blumen- thal et ses collaborateurs, Lewin et Rosenfeld. Mais les recherches de Scholz et d’Ellinger' sont tout à fait contraires à cette thèse et ne laissent guère subsister, du moins pour ce qui regarde l'indol, que la doctrine classique de l’origine intestinale. En ce qui concerne l'origine immédiate de l'indol, on à vu plus haut que des acquisitions importantes ont élé faites dans ces derniers temps. Le tryplo- phane s'étant révélé comme un acide indol-amino- propionique, ce corps apparait comme élant l'ori- gine peut-être unique des divers composés indo- liques qui se produisent dans la putréfaction des albumines, à savoir : l'indol, le scatol, l'acide seatol- carbonique et l'acide scatolacétique. En effet, ce composé, injecté directement dans le cæcum du lapin à l’aide d’une seringue de Pravaz, provoque une excrétion considérable d'indoxyle urinaire. On a vu qu'il est également, chez le chien, la substance mère de l'acide cynurénique. II. — LE sANc. S 1. — Matières albuminoïdes du sang. Lorsqu'on à éliminé du sang loutes les malières albuminoïdes coagulables, on constale que le filtrat contient encore des matières azolées non coagu- lables. Dans ce « resle azoté », on a successive- went recherché, selon la théorie que l'on défendait quant à l'absorption digestive des albumines, les albumoses et les amino-acides. La présence des albumoses dans le sang, niée par Neumeister, puis admise par Embden et Knoop, L. Langslein, Wolf, a été rejelée encore récemment par Abder- halden et Oppenheimer”, qui n'ont pas trouvé d'al- bumoses dans le sang, même dans celui de la veine porte chez le chien, après ingestion d’un fort repas, ou qui n'en onl trouvé exceptionnellement que des traces si faibles qu'elles sont sans signification physiologique. G. von Bergmann et Langstein cal- culent, au contraire, qu'à raison de 3 litres de sang passant par minule à lravers le foie, cet organe reçoit pendant les trois où quatre heures que dure l'absorption environ 600 litres de sang. Si même on porte à 30 grammes la quantité d'azote fournie en vingt-quatre heures par la ralion, on arrive à ce 1 Scrozz : Zeitschr. f. Physiol. Chem., t. XXX VIII, p. 512, 1903. — EcuwGer ; bid., t. XXXIX, p. 44, 1903. — ELrinéenr el GEnrzen: Beitr.z. Chem. Physiol.u. Pathol.,&.1V,p.111,4904. ? E. AnperuALDEN et C. Orpexaeimen : Zbid., L. XLIL, p. 155, 190%. — G. von BerGuanx et L. LANGSrEIN : Beitr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. NI, p. 27, 1904. résultat que l'azole lotal contenu dans 100 cenli- mètres cubes de sang ne se trouverait augmenté, par le fait de cette absorplion, que de 0 gr. 005 seu- lement. Même des {races de substances azotées non coagulables trouvées dans le sang peuvent donc avoir une importance physiologique considé- rable. Or, les deux auteurs montrent que, si l'on a soin d'opérer sur des quantités de sang suffisantes, ce que Abderhalden et Oppenheimer ne paraissent pas avoir fait, on trouve dans cetle humeur un reste azolé représentant de 7,7 à 14,7 °/, de la quantité totale d'azote, et d'autant plus élevé que la digestion a été plus active. Ce reste azoté con- tient 25 °/, d'albumoses (surtout primaires) et 55 °/, de composés précipitables par l'acide phos- pholungstique. La Revue a déjà rendu compte des intéressantes recherches de M. Moll sur les changements chi- miques qu'éprouvent les malières albuminoïdes du sang pendant le chauffage à 60° et par le fait de l'immunisation (Numéro du 15 mai 1904, p. 427). $ 2. — Glycérine. Nicloux a continué ses recherches sur la glycé- rine normalement contenue dans le sang, sur les varialions physiologiques et sur le sorl de la glycérine ingérée ou injectée dans le sang, et il a défendu ses résultats contre les criliques faites à sa méthode par Mouneyral'. $ 3. — Coagulation du sang. Notre intention n'est pas d'aborder dans cette revue des questions telles que la coagulation du sang, qui demeurent encore presque entièrement sur le terrain de la Physiologie et qui échappent, lorsqu'on serre les choses de près, à loule expli- calion véritablement chimique. On se bornera done à noter ici que la doctrine classique de la coagula- tion a élé vivement altaquée par Dasire el ses élèves”, qui ont donné à la question une position toute nouvelle. D'après eux, ce n'est pas la des- truclion anatomique du globule blanc (leucolyse) qui donne naissance au ferment de la fibrine. Les leucocytes sont, au contraire, irès résislants, et c'est par un phénomène excréloire osmotique (Arlhus dit même : sécréloire el physiologique) que ces éléments fournissent le fermenten question. $ 4. — Dissociation de l’oxyhémoglobine. Le problème de la dissociation de l’oxyhémo- globine, qui semblait sinon résolu, du moins exac- tement posé par les (travaux bien connus de Hüfner, z “ M. Niccoux : Journ. de Physiol. et de Pathol. gén., &. N, p. SU3 et 827; C. R. de Ja Soc. de Biol., t. LN, p. 1696. — MouxEyrAT : /bid., p. 1438. ? Dasrre, Artuus, V. HENRI, STOnEL et STASSANO : la Soc. de Biol., t. LV, p. 1342-1354. C. R. de D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE a été complètement remis en question de divers côtés. Pour ce qui regarde d’abord la dissociation de l’oxyhémoglobine en solution aqueuse, V. Henri a fait remarquer que la formule : B5 = KD,po (A, b, et p, désignant respectivement les concen- trations en oxyhémoglobine, hémoglobine et oxy- gène dans la dissolution et Æ une constante) n'est pas en accord avec les données expérimentales. Hüfner a, d’ailleurs, reconnu lui-même que les valeurs de À varient avec la concentration, etila fait des raisonnements très compliqués pour expli- quer cette variation. Dans tous les cas, la formule ne correspondant pas aux données expérimentales, il faut faire une autre hypothèse relativement à la dissociation de l'oxyhémoglobine. Au lieu de poser avec Hüfner : 1 moléc.oxyhémogl. — 1 moléc.hémogl.+1 moléc.oxygène, on pourrait supposer, dit V. Henri, que 1 moléc.oxyhémogl. = 2 moléc.hémogl. +1 moléc.oxygène, ce qui conduit à la formule d'équilibre : ho —k1h"po. Or, les valeurs de X,, calculées d’après les don- nées expérimentales de Hüfner, sont bien plus con- stantes que celles de k. En réalité, l'équation de la | dissociation de l’oxyhémoglobine est encore à trou- ver. V. Henri a montré que la méthode à suivre consistera à délerminer les variations du rapport de l'oxyhémoglobine à l'hémoglobine, lorsqu'on dilue la dissolution d’une part avec de l’eau purgée d'oxygène et d'autre part avec de l’eau chargée d'oxygène. La connaissance de la chaleur de combi- naison de l'oxygène avec l'hémoglobine, mesurée par M. Berthelot, fournit une autre méthode consis- tant à déterminer les variations du même rapport, lorsqu'on fait varier la température. Tel est, som- mairement énoncé, le plan d'expériences établi par V. Henri et qui permettra de trouver la loi de dis- sociation cherchée*. Il faudra, dans ces expériences, apporter un soin particulier à la préparation de l'oxyhémoglobine. Lœvy et Zuntz* viennent de démontrer, en effet, que l'oxygène est beaucoup plus fortement retenu, c'est-à-dire que la tension de dissociation est plus élevée, toutes choses égales d’ailleurs, pour l'oxy- hémoglobine préparée avec intervention d'alcool, que pour celle où la cristallisation a été opérée, par exemple, par dialyse de la purée des globules contre de l’eau distillée froide. Ch. Bohr° a constaté, Vicror Henri : C. R. de la Soc. de Biol., t. LVI, p. 339, 341, 342, 1904. - ? Lœvy et Zuxrz: Arch. f. Physiol., 1904, p. 166. * Cu.Bonr : Centralbl.f. Physiol., t. XVII, p.682 et 688, 1904. sl de plus, que la courbe de dissocialion de l'oxyhémo- globine varie, dans la région des faibles tensions, d'un échantillon à l’autre, et il suppose que, pen- dant la préparation du pigment, la partie non colorée de la molécule peut être diversement atteinte, ce qui a pour effet de modifier les condi- tions de la fixation de l'oxygène. De plus, il faudra se garder de conclure des résultats fournis par la dissolution d’oxyhémoglobine ou même de sang laqué, à ce qui se passe dans le sang à globules intacts. Déjà Hüfner avait élé frappé du désaccord que l’on constate ici. En effet, de ses premières expériences sur les dissolutions de pigment ou sur le sang laqué, Hüfner avait conclu que l'oxyhémo- globine ne commence à se dissocier sensiblement que pour des pressions d'oxygène relativement faibles. Ainsi, pour une pression en oxygène de 50 millimètres de mercure, 93 °/, du pigment devaient encore persister à l’état d'oxyhémoglobine. El, cependant, sur l'animal vivant, on voit les acei- dents graves commencer sitôt que la tension de l'oxygène descend au-dessous de 60 millimètres. Comment expliquer ce désaccord? Hüfner a fait intervenir ici l'influence exercée par la paroi pul- monaire, mais Lævy et Zuntz ont récemment rélulé cette manière de voir. Il est plus probable qu'il faut mettre en cause, outre l'inexactitude de la formule dont est parti Hüfner {voir plus haut), les différences chimiques qui existent entre le pig- ment dissous et celui du globule intact. Déjà | Hoppe-Seyler avait, dans son classique traité, atliré l'attention sur ce fait que, dans le globule, les deux pigments sanguins sont en combinaison avec d’autres substances et notamment avec de la lécithine, et, pour bien marquer cette différence, il avait appelé respectivement artérine et phlébine les deux pigments du sang artériel et veineux. De fait, Lævy et Zuntz viennent de montrer que la ten- sion de dissociation du sang intact est, toutes choses égales d’ailleurs, beaucoup plus faible que celle du sang laqué, et surtout que celle des solutions de pigment cristallisé. Bien que l'étude de la dissociation de l’oxy- hémoglobine cristallisée conserve un intérêt théo- rique considérable, le vrai problème physiologique est donc celui de la dissociation de l’oxyhémoglo- bine dans le sang en nature. Lœvy, qui a repris récemment celte élude, a obtenu des valeurs qui sont en bon accord avec les résultats de P. Bert. De plus, il a constaté, d'un sujet à l'autre, des dif- férences si considérables qu'elles ne peuvent pas être expliquées par des erreurs d'expériences, mais bien par des particularilés individuelles. Faut-il ad- mettre, avec Ch. Bohr, qu'il existe, pour une même | espèce, plusieurs sortes d'oxyhémoglobine, ou, au contraire, qu'il s’agit simplement de différences 82 D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE physico-chimiques dans la manière dont le pigment est incorporé au globule? C’est ce que l'avenir nous apprendra. Rappelons seulement que L.-G. de Saint-Martin a constaté des variations considérables de la quantité d'oxyde de carbone fixée par gramme de matière colorante pour le sang d'homme, de chien et de bœuf. Pareillement, le pouvoir absor- bant s'est élevé chez le lapin après une forte sai- gnée, comme si l’oxyhémoglobine de formation nouvelle était différente du pigment ordinaire. Enfin, Ch. Bohr et ses collaborateurs viennent d’é- tablir ce fait important, à savoir que des tensions élevées de l'acide carbonique dans ce sang n'ont qu'une influence médiocre sur la fixation de l’oxy- gène au voisinage de la pression atmosphérique (1502 d'O), mais que, pour des pressions inférieures (de 80 à 5" d'O), cette influence est considérable et s'exerce dans le sens d’une diminution de la quantité d'oxygène fixée. Celte constalation est importante pour l'explication des accidents qui accompagnent la respiration dans l'air raréfié *. $ 5. — Hémoglobine oxycarbonée. Il est clair que la même revision s'impose en ce qui concerne la dissociation de l'hémoglobine oxy- carbonée, car, malgré de nombreusesrecherches et notamment celles de Mosso el de ses élèves, il reste encore bien des points obscurs dans le méca- nisme d'intoxication par l’oxyde de carbone. Les qualre observations très intéressantes apportées l’année dernière par L. Garnier suffiraient à elles seules pour démontrer l'insuffisance des explica- tions classiques dans certains cas. Aussi faut-il signaler comme une acquisition importante le fait de la fixation de l'oxyde de carbone par l’hémo- globine des muscles et du cœur, démontré par J. Camus et Pagniez”*. IT. — L'URINE. $ 1. — Urée et uréine. D'après O. Moor, l'urine contiendrait à peine la moitié de la quantité d'urée qu'on luiattribue d'après les dosages habituels, le complément étant formé par une substance voisine, que l’on peut extraire sous la forme d’une huile hygroscopique et que, jusqu'à présent, on aurait confondue et dosée avec l'urée. Ces conclusions ont été formellement contestées par Erben et par Gies; néanmoins, Moor maintient et précise ses résultats dans un récent travail. Bien que l'existence de celte uréine apparaisse encore 1 Logvx : Arch. f. Physiol., 1904, p. 231. — L.-G. DE Saint-MarmN : IVe Congrès international de Physiol. à Cambridge, 4898; Journ. dé Physiol. et de Pathol. gén., L. II, p. 538. — Car. Bour, K. Hassezracu et A. Krocn : Cen- tralbl, f, Physiol., t. XVII, p, 661, 1904. * L. Garnier : C. R. de la Soc. de Biol., t. LN, p. 161. — J. Camus et PAGnIEZz, Ibid., p. 837, 1903. comme très contestable, la discussion très vive qui s'est élevée à ce sujeta, du moins, cette utilité de ramener l’altention sur l'incertitude de nos mé- thodes de dosage de l’urée. Les meilleures méthodes (Môürner el Sjüqvist, Schændorff, Folin) ne dosent finalement que l’ammoniaque fournie par le dédou- blement de l’urée, réaction dans laquelle peuvent intervenir d'autres corps. Tous les procédés tendent, à la vérité, à éliminer au préalable de tels com- posés; mais on n'est pas certain d'atteindre com- plètement ce résultat, surtout depuis que l'on sait, par les recherches de O0. Lœwi nolamment, qu'au cours des échanges nutritifs peuvent apparaître des composés amidés, intermédiaires entre les acides amidés et l’urée, et cédant leur ammoniaque en présence des agents hydratants*. $ 2, — Matières extractives. Au surplus, nos analyses d'urine sont beaucoup plus loin de « fermer », comme disent les gens du mélier, qu'on ne le croit généralement. Dans son Traité de Chimie physiologique, Hammarsten admet que, sur 35 grammes de matières organiques que contient l’urine des vingt-quatre heures, l'urée, l'acide urique, la créatinine et l'acide hippurique représentent environ 32 gr. 4, et les matières extractives, c’est-à-dire le « non dosé organique » environ 2 gr. 6 seulement. En réalité, ce « non dosé » est beaucoup plus considérable. En déter- minant dans vingt et une urines des vingt-quatre heures, provenant de huit sujets, d'une part les matières organiques totales, et d'autre part l'urée, l'acide urique, les corps xanthiques, la créatinine et l’ammoniaque, matériaux dont l'azote repré- sentait de 90 à 97,4 °/, de l'azote total, Donzé et Lambling ont constaté que le « non dosé » orga- nique variait pour l'urine des vingt-quatre heures entre à et 19 grammes, et pour cent parties de matières organiques, entre 16 et 38 parties (en moyenne 26 °/,). On avait donc laissé en moyenne en dehors de l'analyse, cependant poussée très loin, à peu près Ze quart du poids total des matières organiques. Le dosage du carbone total a montré que le tiers environ du carbone urinaire reste engagé dans ce non dosé. Il est probable que la majeure partie de ces matières extractives est constituée par des acides azotés complexes : acides oxyproléique, alloxyprotéique, uroferrique (Bond- zinski, Gottlieb, Panck, Thiele) *. 1 Moon : Zeitschr. f. Biol., t. XLIV, p. 121. — ERBEN : Zeitschr. f. Physiol. Chem., t. XXXVIII, p. 54%, 1903, et t. XL, p. 162, 1903. — O. Mook : Zbid., t. XL, p. 162, 1903. — Gies : Journ. of Amer. Chem. Soc., t. XXV, p. 1295, 1903. — 0. Moon : Zeitschr. f. Biol., &. XLV, p. 420 et 540, — K. A N. MoEnxeR : Skand. Arch. f. Physiol., t. XIV, p. 297, 1903. — 0. Loewr : Z. physiol. Chem., t. XXV, p. 511, 1898. Dowzé et LamezinG : Journ. de Physiol. et de Pathol. gén., t. V, p. 225 et 1061, 1903. D' E. LAMBLING — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE PHYSIOLOGIQUE 83 $ 3. — Matières colorantes. para par rapport à la chaine latérale, se trouve Les acquisitions les plus intéressantes de ce côté sont constituées par les recherches de Maillard sur les « couleurs chloroformiques » de l'urine, c'est-à- dire les pigments d'origine indoxylique, dont la Revue a rendu compte récemment‘. On sait que les urines alcaptoniques sont celles qui, alcalinisées, se colorent en brun ou en noir au contact de l'air. Parfois même, cetle coloration se produit en l'absence d'alcali el avant toute fermen- talion ammoniacale. Il est donc justifié de parler ici de l’alcaptonurie à propos des matières colo- rantes de l'urine. Cette coloration est due à deux acides dits « alcaptoniques », l'acide homogenti- _sinique, auquel s'est ajouté exceptionnellement l'acide uroleucique. Baumann a considéré l'acide homogenlisinique comme élant un acide hydroqui- none-acétique, C°H° (OH) (OH) (CH°.CO*H) (1 : 4 : 5), formule qui, déjà vérifiée par la synthèse de Bau- mann et Fränkel, l'a été à nouveau par celle d'Osborne. Ce savant a transformé la diméthylhy- droquinone en acide diméthylhomogentisinique à l’aide de la réaction de Friedel et Krafts (c'est-à- dire par chauffage avec du monochloracétate d'éthyle.et du chlorure d'aluminium), puis en acide homogentisinique *. Ajoutons, pour la clarté de ce qui suit, que l'acide uroleucique est de même un acide hydroquinone-#-lactique : C'H°(OH) (OH) (CH. CHOH-:CO°H) (1 : 4:5). En ce qui concerne l'origine de ces acides, on sait déjà que la tyrosine ingérée produit chez l'alcaptonurique une augmentalion de l'acide homogentisinique. Mais Falta et Langstein, après avoir observé chez un malade l'excrétion d’une quantité d'acides alcaptoniques bien supérieure à celle que pouvait fournir le noyau tyrosine des albumines ingérées, ont trouvé dans la phénylala- nine introduite per os un autre producteur d'acide homogenlisinique chez leur sujet. Or, la phényla- lanine résulte du dédoublement de beaucoup de malières albuminoïdes, en quantité souvent plus grande que celle de la Lyrosine. En étudiant enfin méthodiquement divers acides aromatiques, ils ont vu que seuls les acides à chaine latérale hydro- xylée, tels que les acides phényl-4-lactique, phényl- B-lactique, phénylpyruvique, ont donné lieu à une augmentation de la quantité d'acide homogentisi- nique chaque fois que l'oxhydrile était en «. On peut alors, pour la phénylalanine, admettre les élapes indiquées ci-après. . Pour la tyrosine, il est clair qu'il faut admettre que l’oxhydrile phénolique, qui est en position 1 Revue gén. des Sc. du 15 octobre 4904. © Bauwanx et FraxkeL : Zeitschr. physiol. Chem., t. XXI, P: 219, 1894. — OsSBorne : Journ. of Physiol., t. XXIX. Pro- ceed. of the Physiol. Soc., 21 mars 1903. soit transposé, soit réduit avec passage par le stade de l'acide phényl-«-lactique. Enfin, à l’état normal, les acides uroleucique et homogentisinique / À Ho//N\ HO HSE Ne No A0 0H | | | | CH? CH CU? CH? | | CH.AZzH? CHOH CHOH COOH | | | COOH COOH COON Phénylalanine. Ac. phényl- Acide uro- Acide homo- a-lactique. leucique. gentisinique. Acides alcaptoniques. sont détruits à leur tour; au contraire, chez l’al- caplonurique, la dégradation s’'arrèle au stade des acides alcaptoniques *. $S 4. — Corps acétoniques. L'origine des corps acétoniques de l'urine (acé- tone, éther acétylacétique et acide B-oxybutyrique) reste toujours très discutée, et l'on comprend l'importance que présente cette question, si l’on se rappelle que des quantités de 50 à 60 grammes d'acide B-oxybutyrique dans l'urine des diabétiques se rencontrent fréquemment, et que Külz rapporte même un cas où l’on put extraire de l'urine la masse énorme de 226 grammes de cet acide. Voici les conclusions d'un récent travail de G. Satta : En mettant à part la petile quantité d'a- cétone qui se produit loujours à l'état normal et qui est sans doule d’origine albuminoïde, on peut dire que les corps acéloniques qui sont éliminés pendant le jeûne ou à l’état pathologique provien- nent non des matières proléiques, comme on l'a admis pendant longtemps, mais des graisses * De plus, lorsqu'on supprime les hydrates de car- bone, ou bien dans les cas où l'organisme ne détruit plus qu'incomplètement celte catégorie d'aliments, on voit la quantilé d'acétone augmenter. On sait qu'elle augmente aussi dans l'inanition, où le prin- cipal aliment consommé par l'organisme est la graisse des réserves adipeuses. Inversement, l’in- gestion d'hydrates de carbone fait aussitôt des- cendre l’excrétion d'acétone, et en général celle des corps acétoniques (acétone, éther diacélique, acide B-oxybutyrique), sans cependant la faire cesser jamais complètement. E. Lambling, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Lille 1 Farra et LANGSTEIN Zeitschr. [. Physiol. Chem. t. XXXVIL, p.513. 4903, et t. XLI, p. 81, 1904. 2 G. Sara : Beïtr. z. chem. Physiol. u. Pathol., t. ME, p- 1, 190%. — Voyez aussi GEELMUYDEN : Zertschr. physiol. Chem., t. XLI, p. 128, 1904, et WaLovocec : Die Acelonkôr- per, Stuttgart, 1903; Biochem. Centralbl., L. IN, p. 451. 84 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Observatoire national de Besançon. — XV° ZBul- letin Chronométrique, publié sous la direction de M. Lebeuf, Directeur de l'Observatoire. — 1 bro- chure in-8 de 65 pages. Besançon, 1904. La construction des chronomètres est pratiquée avec succès dans tous les pays qui tiennent la tête du mou- vement scientifique et industriel; mais il est permis de dire que la science chronométrique est une science éminemment française. Si les pendules astronomiques ont été l’objet de beaux travaux dans les observatoires du monde entier, Phillips, Yvon-Villarceau, Résal ont été les premiers à appliquer les méthodes de la Méca- nique rationnelle à une élude rigoureuse des horloges portatives. Au point de vue pratique, il faut convenir que, si notre pays avait depuis des années ses concours de chronomètres pour la Marine de l'Etat, il s'était laissé dépasser par d’autres pays, et notamment par la Suisse, en ce qui concerne les chronomètres de poche. Longtemps la montre marine, avec échappement à détente, a paru seule digne du nom de chronomètre. Mais le goût des horloges précises s'est développé dans le public; les explorateurs ont demandé des montres à ancre, moins sujettes aux arrêts et aux dérangements que celles à détente; la marine elle-même en a eu besoin pour ses torpilleurs et ses sous-marins, et l’'ému- lation ainsi excitée chez les régleurs a amené de tels progrès que le Congrès international de Chronométrie, réuni à Paris en 1900, a pu étendre à ces nouveaux instruments la définition du chronomètre garde-temps. Il devenait nécessaire de mettre à la disposition de nos horlogers les facilités dont leurs voisins et émules jouissaient depuis longtemps. Ce n’est qu'en 1885 que cette satisfaction leur fut donnée par la fondation de l'Observatoire astronomique, chronométrique et météo- rologique de Besançon. Cette fondation a été l’œuvre de Gruey, et les Bulletins publiés depuis l'origine dé- montrent avec évidence les avantages qu'en a retirés l'horlogerie de précision. Le directeur actuel, M. Lebeuf, a compris l’importance du Service qui lui est confié, et il s’attachera à lui assurer tous les perfection- nements qu'il comporte. Il ne suffit plus d'enregistrer les résultats des observations faites sur les montres déposées par les horlogers. Il faut aller plus loin et employer ces observations à l'étude des moyens de faire avancer le réglage et la construction; le savant doit collaborer avec l'artiste. L'Université de Besançon l'a si bien compris qu'elle a fondé un cours de Chrono- métrie, confié à M. Andrade. Le directeur de l'Observatoire, de son côté, a pensé que le moment était venu d'élargir le cadre du Bulletin. Désormais, à côté des résultats des concours, il réser- vera une place à des mémoires et travaux originaux. Le Bulletin débute par un souvenir donné à Gruey, une biographie du regretté fondateur de l'Observatoire, où sont exposés ses nombreux titres à l'estime des savants et à la reconnaissance des praticiens. Vient ensuite une première partie : Chronométrie. Nous y trouvons les résultats des épreuves en 1903. Si le nombre des chronomètres déposés (690) est légè- rement inférieur à cerui des années 1900-1902, qui ont bénéficié du grand effort fait à l’occasion de l'Expo- sition universelle, il est en progrès marqué sur les années antérieures, et la qualité des résultats, rappro- chés de ceux de la précédente période, dénote un labeur soutenu de la part des régleurs. Ces résultats sont suivis d’une comparaison avec les services de l'étranger, puis d'indications, destinées à être com= plétées, sur d’autres branches de l’activité de l'Obser- vatoire : transmission de l'heure, désaimantation des montres de poche. Toute cette partie des travaux intéresse plus spécia= lement la fabrique de Besançon. Mais, dans le but d'étendre à tout le territoire l’'émulation résultant de la comparaison des produits, un concours national de réglage sera ouvert le 4 avril 1905 à l'Observatoire de Besancon, auquel sont appelés à participer tous les horlogers francais. Les conditions de ce concours sont données avec détail, et suivies de l’ensemble des règle= ments qui régissent le Service chronométrique. La deuxième partie : Mémoires, est consacrée à des études spéciales. Un des vétérans de l'horlogerie bison- tine, M. Ernest Antoine, nous donne un résumé vivant de ses recherches théoriques et expérimentales sur les causes qui empêchent d'obtenir l'isochronisme pratique; il recommande aux régleurs de soigner l’'échappement et d'aborder résolument la courbe théo- rique intérieure du spiral. M. Paulin (Grenoble) décrit l’ensemble des installalions actuelles pour la transmis- sion électrique de l'heure, de l'Observatoire de Besancon à l'Hôtel de Ville, à l'Université et au domicile des hor- logers. Ou nous nous trompons fort, ou cette deuxième partie est appelée par la suite à recevoir encore plus de développements, et à combler une lacune de notre littérature horlogère, en nous apportant des travaux originaux d'un grand intérêt théorique et pratique. Nous en avons pour garant le souci constant de M. Lebeuf de faire progresser cette œuvre importante, et nous lui souhaitons bon succès. C. En. Caspart, Ingénieur-hydrographe en chet de la Marine. Le Chatelier (H.), Z1génieur en chef des Mines, pro- * fesseur à l'Ecole des Mines et au Collège de France. — Essais des matériaux hydrauliques. — Æncy- clopédie scientifique des Aide-Mémoire. (Prix : 2 fr. 50). Gauthier-Villars, éditeur, Paris, 1904. Dans tous les ouvrages traitant des produits hydrau- liques, on trouve la description de la plupart des essais exécutés couramment. Mais il n'existe pas de traité s’occupant spécialement des matériaux hydrauliques. M. H. Le Chatelier a comblé cette lacune en écrivant un livre dans lequel, avec la clarté, la précision et l'autorité que l’on rencontre dans tous ses ouvrages, il fait voir quel est le rôle de ces essais, ce qu'ils sont et ce qu'ils devraient être. L'objet des essais est d'observer ou de mesurer cer- taines propriétés des chaux et ciments présentant des rapports plus ou moins directs avec leurs qualités à l'emploi; mais, le plus souvent, les propriétés soumises aux essais n’ont que des relations très indirectes avec les qualités réellement utiles. On ne peut, du jour au lendemain, remplacer tous les essais, même ceux dont l'utilité est très contestable, par d'autres plus ration- nels; mais on doit s'efforcer de perfectionner les mé- thodes et de leur donner un caractère plus scienti- fique. Il est très important, dans les essais de réception, d'employer des procédés très précis, car le refus d’une fournilure peut causer un préjudice très grand. Ces essais ne peuvent être exécutés que dans des labo- ratoires bien outillés et par un personnel exercé. Avant d'exposer les méthodes d'essais, M. H. Le Chate- lier rappelle la classification des produits hydrauliques, le mécanisme de leur durcissement; puis il indique | al à BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 85 quelles sont les causes de destruction des mortiers et par quels phénomènes elle se manifeste. Enfin, il montre quelles sont les qualités à l'emploi qui doivent être l’objet des essais; ce sont la résistance mécanique, la résistance chimique, l'adhérence, la coloration. Puis les essais proprement dits, essais physiques et chimiques, composition des mortiers, essais de résis- tance mécanique, rapidité de prise, invariabilité de volume, essais à l'eau de mer. Le dernier chapitre est consacré aux essais de chan- tier, c'est-à-dire aux essais qui peuvent être exécutés simplement, sans nécessiter une installation impor- tante ; ce sont les essais de finesse de mouture, la den- sité apparente, la durée de prise, la résistance à la traction, l'essai de déformation à chaud et à froid. E. CanpLor. * 2° Sciences physiques “Barnett (S.]J.), Ph. D., Assistant Professor of Phy- sics in the Leland Stanford University (Calilornia). — Elements of Electromagnetic Theory. — 1 vol. in-8° de 4S0 pages, avec 145 figures. (Prix : 425. 6.) New-York, Macmillan and C°, 1904. Jusqu'à ces dernières années, les Universités améri- *caines étaient restées en grande partie tributaires des savants européens pour leur enseignement par le livre; maintenant, elles vivent de leur vie propre et nous en- voient à leur tour, en signe de leur autonomie scienti- fique, des manuels dus à la plume de leurs distingués professeurs, et dans lesquels se reflète l'espritaméricain. Ces manuels, nous avons tout intérêt à les connaître, parce que, contrairement aux nôtres, ils ne sont pas commandés par une longue tradition. La science euro- péenne a été constituée, par la force des choses, par des éléments juxtaposés dans des cadres établis en partant d'idées élémentaires et incomplètes; aujourd'hui, ils se trouvent trop étroits, mais nous les conservons par l'ha- bitude. Les savants américains sont plus libres de leurs mouvements, et leurs ouvrages nous surprennent par l'usage qu'ils font de cette liberté. Dans celui qui nous occupe, les proportions ne sont pas celles des manuels européens, la disposition encore moins; les faits sont autrement déduits, autrement enchaïnés; et il est très agréable, en le lisant, de retrouver des choses sues, là où l'on ne s'attendait point à les rencontrer, mais où elles sont souvent bien à leur place. M. Barnett aurait pu être tenté d'abandonner, à ses débuts, la notion de la charge électrique. Il ne l’a pas fait, mais la considère surtout comme un élément qua- litatif. L'étude du champ électrique, où les notions - générales sont illustrées par de nombreux exemples, pour diverses dispositions des charges, des conducteurs ou du diélectrique, constitue la pièce de résistance de toute la première partie du volume. Une innovation, croyons-nous, consiste à désigner sous le nom d'élec- tret (en parallèle avec le mot magnet) un support de — deux charges, tel qu'il est constitué par un cristal pyro- » électrique ou par un diélectrique retiré d’un conden- sateur chargé. Il en résulte une certaine symétrie qui dispensera de longs développements lorsque nous abor- derons le magnétisme. Des champs modifiés par des diélectriques de pou- voirs très divers et même fictifs, à moins qu'on les assimile à des conducteurs, sont représentés par leurs lignes de force, et les mêmes figures exigeront seulement une transposition des notions pour s'appli- quer exactement au champ magnétique. Le courant électrique est représenté par ses trois formes : courant de convection, de déplacement et de conduction; l'identité de nature est d'abord sous- entendue, puis anticipée dans une rapide allusion à une - théorie qui sera développée plus tard, et d'après laquelle le courant de conduction n'est pas autre chose - qu'un double courant de transport. C’est la théorie des électrons qui est ainsi annoncée pour un développe- ment ultérieur. Une très rapide description des mé- + | thodes de mesure des résistances est donnée en fin de chapitre, un peu comme un hors-d’œuvre interrompant l'exposé théorique. Le chapitre consacré à la conduction métallique et électrolytique se réduit à très peu près à cette der- nière; et l’auteur est tellement persuadé de leur ana- logie que tout se trouve pêle-mèêle. Pour bien accentuer combien l'ordre historique importe peu, quelques lignes sont employées à montrer l'analogie thermique de la loi d'Ohm. La mème tendance à séparer les phé- nomènes par leurs effets et non par leurs causes se retrouve dans le chapitre suivant, où l'on passe, sans au- cune séparation, des forces électromotrices thermo- électriques à la théorie de Helmholtz et de lord Kelvin concernant les éléments voltaïques ; d’ailleurs, l’auteur ne reste pas longtemps sur cet exposé et renvoie pour le détail aux traités d'Electrochimie. Pour les raisons déjà indiquées, l'exposé de la théorie des aimants a pu être considérablement allégé. En revanche, la plus grande attention est donnée à l’in- duction et au flux d'énergie électromagnétique déve- loppé dans le sens des idées de Poynting. C’est ici que trouve place l'exposé des découvertes les plus mo- dernes sur la propagation des ondes électriques, la pression qu'elles exercent sur les obstacles, etc. Tel est, résumé à grands traits, le contenu de cet ouvrage, qui contient bien des indications intéressantes sur ce que pourra être l’enseignement de demain. Si nous avions un reproche à faire à l’auteur, c'est que, voulant éviter la forme artificielle de l’enseignement classique, il est retombé, par endroits, dans un cadre tout aussi artificiel. L'avantage d’un tel exposé est de conserver un développement mathématique très simple; mais il nous semble que l'intelligence du sujet, consi- déré au point de vue de l'observation et de la recherche des causes, y perd un peu. Dans la terminologie, l’auteur est quelque peu nova- teur, et pas toujours heureusement. Il se sert de cet affreux terme de gaussage, digne frère cadet de voltage et d'ampérage, que M. Hospitalier traite avec raison de mots d'argot. L'avenir nous réserve peut-être l'ohmage d’un circuit, le coulombage d'une décharge, le faradage d'un condensateur, le micronage d'une onde lumi- neuse; ce serait le développemement logique d’une mauvaise habitude de langage. Les questions relatives aux unités sont éparses dans l'ouvrage. Pour la doctrine, M. Barnett se rallie aux vues de M. Heaviside des unités rationnelles et irration- nelles. Aucun physicien ne lui donnera tort pour le ‘principe, mais on enregistrera une fois de plus le regret de ne pas pouvoir faire de l'administration scien- tifique avant de faire de la science, comme en Amé- rique on trace le plan entier d’une ville avant de cons- truire une seule maison. C'est un défaut inévitable, duquel il faut nous accommoder. Cu.-En. GUILIAUME. Directeur adjoint du Bureau International des Poids et Mesures. Sechurr (J.), Chargé de cours au Lycée de Montluçon.— Recherches sur la vitesse de dissolution des sels dans leurs solutions aqueuses. T'hèse présentée à l'Université de Clermont-Ferrand. — 1 vol. in-8° de 71 pages. Kündiq, éditeur. Genève, 1904. Deux méthodes s'offrent à nous pour étudier l'action de’ l’eau sur un sel soluble ; une méthode qualitative, qui consiste à suivre les progrès de l'attaque du cristal par l'observation des figures de corrosion, et une méthode quantitative, dans laquelle on enregistre la diminution de poids du cristal immergé. L'auteur, dans son travail soigné, emploie successi- vement les deux procédés. La préparation des cristaux est une opération laborieuse, à laquelle ne se prêtent que très peu de corps, parmi lesquels l’alun de chrome et le sulfate de cuivre ont été étudiés. Les figures de corrosion s’observent dans la période préliminaire, après une immersion de deux à trois 86 BIBLICGXAPHIE — ANALYSES ET INDEX secondes; on sait qu'elles dépendent de la nature cris- tallographique de la face étudiée. L'auteur a découvert que cette première étape est suivie d’une période de régime permanent de dix à vingt minutes, caractérisée par des cavités dessinées sur le plan de la face cristal- Jine et nettement distinctes des figures de corrosion. Ces cavités, nommées stries de convection, sont corréla- tives des courants de convection du liquide, et leur forme dépend, non de la nature cristallographique de la face, mais de sa position relative dans le dissolvant. C’est pendant cette période d'usure régulière que l'on exécute les mesures de vitesses de dissolution dont la technique est expliquée en détail. Comme le faisait prévoir l'étude des stries de convection, la vitesse de dissolution est la même pour toutes les faces du cristal, pourvu qu'elles occupent la même position relative dans le dissolvant; elle est indépendante de l'histoire antérieure du cristal. Pour l'influence de la concentration, l'auteur a trouvé la loi suivante, qu'il rattache aux considérations sur lesquelles Nernst a basé sa théorie des piles (diffusion, pression de dissolution) : la vitesse de dissolution d'un sel dans sa propre solution est proportionnelle à la différence des logarithmes de sa concentration maxi- mum et de la concentration actuelle. Cette loi est plus générale que celle de Noyes et Whitney, qui, pour les corps peu solubles, avaient trouvé que la vitesse de dis- solution est proportionnelle à la différence entre la concentration maximum et la concentration actuelle. Un des chapitres les plus intéressants est celui où M. Schurr étudie la vitesse de dissolution du sul- fate de cuivre dans une solution homo-ionique avec lui, c'est-à-dire contenant soit l'ion Cu, soit l'ion SO,, les solutions étant prises, chaque fois, à la même concentration moléculaire. En effet, si la vitesse de dissolution d’un sel dans l'eau pure mesure, jusqu'à un certain point, l'affinité de l’eau pour ce corps ‘hydratation des ions ou de la molécule neutre), dans les solutions homoioniques, la vitesse de dissolution nous renseignera sur la formation des ions complexes; c'est ainsi que le sulfate d’ammonium attaque le sul- fate de cuivre plus vite que ne le fait le sulfate de potassium, formant évidemment un ion complexe plus stable. Il est regrettable que les difficultés de la méthode ne permettent pas de donner plus d'extension à ces mesures, mais c'est une raison de plus pour féliciter M. Schürr d'avoir heureusement surmonté les obstacles dans les cas qu'il a étudiés. P.-Ta. MuLcer, Professeur à l'Université de Nancye 3° Sciences naturelles Grenard (F.). — Le Tibet. Le pays et les habitants. — À vol. in-12 de 387 pages. (Prix : 5 fr.). Librairie Armand Colin, Paris, 1904. M. F. Grenard, compagnon de l'infortuné Dutreuil de Rhins pendant son voyage de 1890-94 à travers le Tibet, a déjà publié, en un ouvrage aussi solide qu'atta- chant, les résultats scientifiques de cette exploration. Le présent volume répond au besoin de mettre à la portée de tous les connaissances acquises par la Mis- sion. Les itinéraires ayant été en partie accomplis à travers des régions inconnues, et l’auteur ayant sé- journé longtemps dans le milieu tibétain, l'on gagnera beaucoup à lire ces pages, mème après les récits de Desgodins, de Bonvalot, de Rockbhill et de Sven Hedin. La première partie du livre comprend le résumé des faits et gestes de la Mission, de 1890 à 1894 : explora- tion du Tibet du nord-ouest, en 1890, de Khotan à Lé et col Karakorum; voyage de 1891 à 1894, de Khotan à travers le Tibet Central jusqu'au Nam-Tso; efforts infructueux pour pénétrer à Lhassa, et retour par le haut Salouen (Nag-tchou), les sources du Mékong, le haut Yang-tseu (Do-tchou), le Kouk-Nor et Si-ning. C'est pendant cette dernière partie du trajet, près de Tong-bou-mdo (haut Yang-{seu), que la caravane de _Kor, à Ta-tsien-lou et à Li-Kiang »; et cette consta= Dutreuil de Rhins fut attaquée par les Tibétain qu'avaient fanatisés les lamas. Dutreuil tué d'une balle; M. FE. Grenard n'atteignit qu'à grand'peine Si-ning, et il fallut l'intervention du Gouvernement chinois pou qu'il püt recouvrer les papiers de la Mission. On ne peut, dans un compte rendu, analyser un journal de route. Je me contenterai donc de dire que cette moitié du volume se recommande avant tout par l'intérêt saisissantes descriplions; la route suivie s'est tenues daus une notable partie, à plus de 5.000 mètres d’alti= tude ; et l'on chercherait en vain ailleurs des pages qui donnent mieux l'impression de ce froid désert de mon= tagnes. Qu'on lise surtout le récit du parcours compris; au sud de l’Arka-Tagh, entre les hauts terrains de chasse des Turcs el ceux des Tibétains; il y à bien là. une contrée morte de la planète, « où il ne passe qu du vent, et où il ne se passe que des phénomènes géo= logiques ». : Les onze derniers chapitres donnent une « vue d’en= semble du Tibet et de ses habitants ». Bien des pas sages y sont du plus haut intérêt géographique. Je signalerai d'abord la « description générale du pays »} où l’auteur fait ressortir la distinction entre le Tibeb des lacs, vaste contrée massive, privée d'écoulement vers la mer, qui offre « le régime de la toundra sibé= rienne », et le pays plus articulé des rivières, d’où des= cendent, par de profondes entailles, tous les grands cours d’eau de l'Asie méridionale et sud-orientale. Le chapitre IV présente une esquisse des conditions maté: rielles de la vie au Tibet, assez pareilles chez les no= mades et chez les sédentaires. L'organisation de la famille tibétaine offre des ressemblances avec l& « gens » romaine : le pouvoir y est exercé et le patri= moine géré par le fils ainé; le communisme de l& terre et des troupeaux va jusqu'à la possession par les autres fils de la femme qui a élé initiée au culte des dieux domestiques, et qui doit perpéluer la race. C'est le majorat et la constitution en familles qui explique le caractère aristocratique de la société : chaque fone= tion sociale devient la propriété héréditaire d'une caste, Le chapitre VII indique l'état économique du Tibet, et étudie ses relations de commerce avec les pays voisins : « La plus grande partie du trafic tibétaim se fait, dit M. Grenard, avec la Chine et aboutit à Tong= tation explique en grande partie les démarches ac= tuelles de la politique et des armes britanniques dans le sud du Tibet. Très nouvelle aussi l'analyse du bou= dhisme tibétain, qui « reconnait une foule de divinités secondaires empruntées à la mythologie hindoue et à la vieille religion locale »; l'homme de ces hautes régions est, dans le culte, d’une superstition compli= quée et traditionnelle qui le rapproche du Romain des premiers temps de la République. Les « lamas » entretiennent ces dispositions; elles leur permettent d'exploiter le pays au moyen d'une organisation poli. lique qui se confond avec celle du clergé. 1 La carte qui termine le volume est la première qui montre la répartition des races dans les hautes mon- tagnes de l'Asie Centrale : elle complète le double mérite d'originalité et de précision scientifique de ce bel ouvrage. J. Macuar, Agrégé d'Histoire et de Géographie, Professeur au Lycée de Bourges. Prenant (A.), Professeur à la Faculté de Médecine de Nancy; Bouin (P.), Professeur agrégé à Ja Faculté de Médecine de Nancy; Maillard (L.), Chef des Travaux de Chimie biologique à la Faculté de Médecine de Paris. — Traité d’Histologie. T. I: Cytologie générale et spéciale. — 1 vol. gr. in-8° de 977 pages et 191 fig. Schleicher fr., éditeurs. Paris: L'ouvrage que je signale aujourd'hui aux lecteurs de la Hevue générale des Sciences constitue le premier volume d'un Traité d'Histologie, pour la rédaction duquel M. Prenant s'est adjoint MM. P. Bouin et L. Maillard; il est consacré exclusivement à la Cytologie BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 87 PL générale et spéciale et comprend trois parties : la pre- mière et la troisième forment la Cytologie générale, C'est-à-dire l'étude de la cellule; dans la deuxième (Gytologie spéciale) sont étudiées les diverses sortes de Mules La première partie comprend : le livre I (M. Prenant), avec la notion du protoplasma et de la Cellule en général; le livre IT (M. Prenant), contenant la Morphologie de la cellule; le livre IT (M. Maillard), avec des principes de Physiologie cellulaire; le livre IV (M. Prenant), indiquant les grandes lignes de la Diffé- rénciation cellulaire et préparant ainsi les diverses sortes de cellules qui serontexaminées dans la deuxième partie. Celle-ci, ou Cytologie spéciale (M. Prenant), comprend les livres V, VI, VII et VIIT, consacrés à la cellule sensible, à la cellule musculaire, aux cellules nutritives et de soutien. La troisième partie (M. P. Bouin), qui revient à la Cytologie générale, étudie dans les livres IX et XI la cellule en état de division, sa dé- générescence et sa mort. Le livre X (M. P. Bouin) con- tient la reproduction des individus; on y trouvera exposées l'histoire des cellules germinales, la morpho- logie et la physiologie de la fécondation, les principales théories sur l'hérédité. C'est à M. Maillard que sont dus, en outre, les paragraphes d'ordre chimique, dis- séminés dans tout le volume. Malgré la collaboration de trois personnes, cet important Traité n'en conserve pas moins une forte unité, la contribution personnelle de chaque auteur se fondant harmonieusement dans l'ensemble. Les notions “chimiques elles-mêmes, bien qu'elles soient l’œuvre propre de M. Maillard, ne font pas, comme dans l’ou- rase de Schiefferdecker et Kossel, l'objet de chapitres écrits indépendamment; elles sont incorporées au texte des divers chapitres; la collaboration du chimiste à été aussi étroite que possible et elle n'apparaît que là où belle est nécessaire pour expliquer la description mor- Mphologique du substratum anatomique, l'interprétation physico-chimique apparaissant toujours comme le der- imier mot de l'explication biologique. L'ouvrage publié par M. Prenant et ses collabora- teurs est le fruit d'un labeur ‘ dont on trouve peu exemples dans la littérature histologique; ces savants ont, en effet, résolument rompu avec un procédé qui tend à s'implanter et suivant lequel un traité n’est plus actuellement qu'une sorte de revue générale dé- mesurée dans laquelle sont condensés tous les docu- ments afférents à la question; ils ont estimé avec raison ‘que leur tâche ne se bornait pas à l'exposé plus ou moins didactique des notions histologiques classiques relatives à l'homme ainsi qu'aux animaux de labora- toire et d’abattoir; ils se sont efforcés de tirer de Histologie des enseignements généraux et ils se sont proposé, non sans succès, de dégager dans la série zoologique tout entière, depuis les Protozoaires jusqu'à Miomme, les types structuraux fondamentaux, point de vue d'autant plus fécond que, en maintes circonstances, évolution organique se manifeste en dépit des affinités ologiques. Cette façon de procéder est, d'ailleurs, la seule qui érmelte de grouper rationnellement les diverses for- nations anatomiques, de les relier entre elles malgré S divergences phylogénétiques, par exemple, de classer les éléments de la radula des Mollusques parmi phanères dentaires, de ranger les cellules chlora- gènes des Oligochètes au nombre des éléments écialisés du mésoderme, etc. En se conformant à cette discipline, en suivant pas à pas l’évolution onto- et phylogénétique, et cela aussi bien chez les animaux e chez les végétaux, les divers éléments s'ordonnan- cent en séries naturelles, et parmi ces dernières il est exceptionnel] de n’en pas rencontrer qui représentent 1 forme simple et explicative, permettant de pénétrer essence même des processus en apparence les plus omplexes : ainsi, la compréhension de la spermato- — : L'ouvrage comprerd 791 figures, presque toutes dessi- nées par les auteurs d'après des préparations originales. | genèse aurait vraisemblablement toujours échappé, si | l’on s'était borné à l'étude des Chordés : seuls, l'Oursin et l'Ascaris réalisent des dispositions assez significa- tives pour fournir l'interprétation de phénomènes qui demeurent impénétrables chez tous les autres ani- maux. C'est précisément cette tendance synthétique et ex- plicative qui imprime à l'ouvrage de MM. Prenant, Bouin et Maillard un cachet spécial ; en alliant de très heureuse facon les données botaniques, physiolo- | giques et physico-chimiques, ces auteurs ont fait sortir l'Histologie du cadre étroit où certains esprits se com- plaisent à la maintenir, et, suivant la forte expression de Claude Bernard, ils ont transformé une science passive en une science active et conquérante de l’ave- nir : « étendue à toute la série animale, cherchant dans l'explication physiologique sa raison d’être, repo- sant sur la Physique et la Chimie, l'Histologie devient une Biologie cellulaire » (Prenant). Cet exposé suffira à mettre en lumière la conception féconde qui a présidé à l'élaboration de cet ouvrage, pour lequel M. Prenant réclame l’épithète d'élémen- taire, mais qui ne paraît guère mieux lui convenir qu'aux autres traités de grande envergure récemment publiés ; par son abondante documentation, par sa portée philosophique, ce livre semble dépasser sensi- blement les besoins de l'étudiant en médecine auquel M. Prenant cependant le destine, et même ceux du candidat au certificat d'Histologie : en revanche, il est parfaitement approprié aux exigences du chercheur au début de ses recherches, et il sera lu avec intérêt, sinon avec fruit, par l'histologiste de carrière, dont l'attention sera certainement retenue par les chapitres consacrés aux questions générales et dont nombre de pages méritent une discussion approfondie. Il faut regretter, toutefois, la concision des paragraphes rela- tifs à la dégénérescence et à la mort de la cellule, car il s’agit là de notions susceptibles de constituer ces traits d'union que M. Prenant cherche avec raison à établir entre des enseignements que des cloisons presque étanches séparent encore. Par la rigueur des descriptions, par l'importance des contributions personnelles des auteurs, par son illustration presque entièrement originale etsurtout par l'esprit éminemment scientifique qui a inspiré ses rédacteurs, le Traité de MM. Prenant, Bouin et Maillard représente une œuvre à peu près unique dans la litté- | ralure histologique ; le seul souvenir qu'il évoque est celui du livre justement célèbre de Leydig, que cin- quante années de travaux auraient considérablement enrichi et éclaireraient de lumières nouvelles. AUGUSTE PETTIT, Préparateur au Museum. 4 Sciences médicales, Gautier (Armand), Membre de l'Institut et de l'Aca- démie de Médecine, Professeur à la Faculté de Méde- cine de Paris. — L'Alimentation et les Régimes chez l'homme sain et chez les malades. — 1 vol. in-8° de 525 pages avec figures. (Prix : 40 fr.). Masson et Cie éditeurs, Paris, 1904. Dans ce remarquable ouvrage, M. Gautier expose toutes les données qui ont trait à l'alimentation ration- nelle dans l’état de santé et de maladie. L'alimentation ayant pour but de réparer les pertes régulières de l'organisme et de fournir l'énergie néces- saire au travail, la composition des repas est basée sur la constitution chimique de l'organisme. Ils doivent apporter les quantités d'albumine, de graisse, d'hy- drocarbonés, d'eau et de sels que réclame l'entretien de la vie. L'étude de l'alimentation moyenne d'un habi- tant de Paris fournit une approximation des matériaux | nécessaires à un homme adulte vivant sous notre climat. : | M. Gautier expose les principes scientiliques de l'ali= | mentation, la digestibilité des divers aliments et leur 88 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX coefficient d'utilisation dans le tube digestif. 11 calcule la dépense énergétique de l’homme au repos, la ration d'entretien, la ration de travail, la ration d’accroisse- ment, montre que toutes ces rations alimentaires ont pour résultat de fournir un dégagement de calories qui sont la mesure de l'énergie humaine, et établit le prin- cipe de l’isodynamie des rations alimentaires. Ces principes scientifiques posés, l’auteur fait l'étude chimique complète des principaux aliments. Les viandes constituent une partieimportante de notre alimentation ; la consommation moyenne est de 39 ki- logs par individu et par an pour toute la France, de 93 kilogs pour Paris. La consommation est bien moindre qu'en Angleterre. La viande est composée de matériaux qui sont en proportion différente suivant l'espèce animale et la région du corps que l’on considère. L'auteur indique la constitution des diverses espèces de viandes (mammi- fères comestibles, mammifères sauvages, oiseaux, pois- sons, sang, viscères, viandes blanches et rouges), les modes de préparation de la chair (crue, rôtie, bouillie, bouillon, extraits de viande), les modes de conservation (cuisson, dessication, salaison, fumaison, frigorifica- tion), - Le lait, aliment très important, qui entre dans la consommation annuelle d’un Parisien à la dose de 60 litres environ, est l’objet d’un long chapitre, où sont envisagés : sa constitution générale ; celle des laits de femme, de vache, de chèvre, de brebis, d’ânesse; les altérations et falsifications; les moyens de conserva- tion; les dérivés du lait : crème, petit lait, babeurre, koumys, kéfir, fromages, etc. Viennent ensuite les œufs, les laitances, le beurre, les principales graisses, la margarine. Les aliments végétaux sont étudiés ensuite : diverses préparations de céréales, pain, légumes secs, tuber- cules, racines, champignons, légumes herbacés, di- verses espèces de fruits, aliments aromatiques (café, thé, cacao, kola, etc.). L'alcool et les diverses boissons alcooliques (vin, bière, cidre, poiré, liqueurs) sont envisagés au point de vue de leur valeur nutritive, puis en qualité de toxiques. Les eaux potables sont l’objet d’une étude très com- plète, au point de vue de leur constitution, de leur ori- gine, de leur conservation et de leur purilication, des dangers qu'elles peuvent offrir et des maladies qu’elles causent. La partie du volume qui a trait aux aliments se ter- mine par des notions de chimie culinaire sur la prépa- ration et la cuisson rationnelles des aliments, les assai- sonnements, la distribution et la composition des repas, les adjuvants de la digestion et de l'appétit. Dans une troisième partie, toute médicale, M. Gautier étudie les régimes alimentaires, leur influence sur le caractère de l'individu et des races, leur variation en rapport avec les besoins (travail, taille, poids, saisons, climats), avec les âges et les conditions physiologiques diverses, puis les régimes spéciaux (végétarien, carné, lacté), les régimes d’abstinence et les régimes de sura- limentation. Il expose ensuite succinctement la diététique des divers états pathologiques, celle des convalescents, des opérés. Enfin, l’auteur décrit les procédés d'alimentation par les voies détournées dont la connaissance est nécessaire au médecin : alimentation par la sonde stomacale, par fistule stomacale, par lavement, par injections sous-cuta- nées, par injections intra-veineuses. Le livre se termine par un aperçu des méthodes qui peuvent servir à apprécier l'effet des régimes et les mé- dications diverses : les unes sont tirées de l'étude des coefficients respiratoires, les autres de l’étude des coefficients urinaires ; la définition, la simplification et la valeur de chacun de ces coefficients y sont nelte- ment exposés. On trouvera dans ce traité, succinctement et claire- ‘ lules et les cristaux qui peuvent être rencontrés dan ment décrites, toutes les nolions chimiques néce saires à l'établissement des régimes alimentaires d& chaque cas particulier ; des tableaux d'ensemble rés ment les plus importantes de ces données. L'ouvrage de M. le Professeur Gautier est d’un intém considérable et d'une grande utilité. Il est à souhaï que les médecinsle lisent et s'en pénètrent, car il fera disparaître de leur esprit bien des idées erronées les questions de nutrition. D' MarceL LABBÉ, Professeur agrégé à la Facullé de Médecine de Pan Médecin des hôpitaux. Létienne (Auguste) et Masselin (Jules). — Préc d'Urologie clinique. — 1 vol. in-8° de 460 pages 58 figures. Naud, feu éditeur, Paris, 1904. Ce n'est pas seulement une technique précise l'analyse chimique, histologique et bactériologique dl urines que nous donnent MM. Létienne et Masselh c'est en même temps un guide précieux pour le méde cin qui veut interpréter rationnellement les résulta des analyses d’urines pour affiner son sens clinique parfaire son diagnostic et son pronostic. Dans une première partie, les auteurs étudient physiologie de la sécrétion urinaire, puis les principe normaux de l'urine avec leurs proportions et leul variations physiologiques. Dans une deuxième partie, ils exposent les variation pathologiques des principes ordinaires de l'urine, étudient les principes anormaux. Ils font une ét très complète des diverses albumines urinaires : sérim et globuline, mucine, albumose, peptone, des cond tions dans lesquelles on les rencontre, de leur sign fication pathologique. De même, le glucose et les substances voisines, lé lose, saccharose, lactose, pentose, sont étudiés Unè complètement au point de vue de la technique dé recherches et de la séméiologie appliquée à la classif cation des diverses variétés de diabètes. à Les auteurs étudient le passage dans l'urine de l’acé tone, de l'acide B-oxybutyrique, et des divers pigments indican, uroérythrine, pigments biliaires (bilirubine urobiline, pigment rouge brun). | Ce sont ensuite les substances étrangères (sang € pus), puis les sédiments, les cristaux, les cylindres, le spermatozoïdes, les calculs, dont l'étude est faite a double point de vue technique et séméiotique. Les ce l'urine sont représentés dans d'excellentes figures. Vient enfin un exposé succinct des principaux mi crobes trouvés dans les urines, des procédés applicable àleur recherche et des conditions dans lesquelles on l& rencontre (infection urinaire, cystites, bactériurie). Les procédés modernes utilisés pour l’appréciatio des fonctions rénales (épreuve de la perméabilité rénal au bleu de méthylène, épreuve de la phloridzine, cryos copie, toxicité urinaire, séparation de l'urine des deux reins) sont l’objet d'un chapitre spécial qui contribuex faire du livre un véritable précis d'Analyse clinique. Les auteurs ont cherché même à faire la synthèse dé ces notions et à caractériser les principaux types urË naires pathologiques : fébrile, anémique, nerveux, gas tro-entérique, hépatique, cardiorénal, néphritique, cys tique, diabétique, goutteux. . En résumé, le précis de MM. Létienne et Masseli pourra rendre de grands services aux médecins qui trouveront beaucoup de renseignements exposés claire ment et succinctement. Les travaux les plus récent sur la physiopathologie rénale y tiennent une pla d Ce importante et en font un livre bien moderne. Il n} manque guère qu'un peu de scepticisme à l’égar cerlains procédés d'appréciation des fonctions rénales et nutrilives, tels que la cryoscopie, la toxicité urk naire et les coefficients urinaires, qui n'ont pas donné au point de vue clinique, les résultats qu'on avait attens dus d'eux. Dr Marcez LABeé, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris Médecin des hôpitaux. ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS 1905. L'Académie présente la liste suivante de candidats le Ministre de l'Instruction publique pour la chaire stoire naturelle des corps inorganiques vacante au lège de France : 1° M. Michel-Lévy; 2° M. Cayeux. 12 SciENCES MATHÉMATIQUES. — M. Fréchet poursuit recherches sur les fonctions limites etles opérations tionnelles. — M. S. Lattès étudie les subslitutions ois variables et les courbes invariantes par une insformation de contact Il montre, en particulier, é, par un élément double d'une transformation de fact, passent en général deux courbes invariantes la transformation. — M. G.-A. Miller cherche à érminer le nombre des sous-groupes invariants — M. J. Boussinesq étudie le pouvoir froidissant d'un courant fluide sur un ellipsoide à xes inégaux immergé dans ce courant. — M. de Sparre ale deux causes d'erreur dans l'établissement de formule habituelle de la déviation des corps en chute bre ; on néglige la variation de la force centrifuge et Me del'attraction en grandeur eten direction pendant Wchute. — M. le vice-amiral Fournier a déterminé périmentalement, sur des modèles réduits, la résis- e à l'eau de cinq navires de formes diverses. 1l en uit la forme théorique de la carène de moindre Stance. — MM. Rambaud et Sy présentent leurs ervations de la comète 1904 d, faites à l'Observatoire Alger. ) SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Lippmann montre n peut obtenir des franges pareilles à celles des oirs de Fresnel en employant, au lieu de deux oirs dont l'angle est voisin de 180°, deux miroirs dont l'angle est voisin de 90°. — M. P. Langevin à nu que la plus grosse partie de la conductibilité flammes est due à la présence de particules catho- eslibres provenant de la dissociation corpusculaire lanée, dans le volume de la flamme, d'un certain Séance du 2 Janvier bée. — M. Ch. Nordmann indique un procédé de ure de la conductibilité des diélectriques, qui con- e à fournir à à l'une ee faces à du mesarique (dont courant 5 gaz ionisé) et à observer électro- iquement le potentiel variable de cette face a. — MAO. Boudouard à constaté que les gaz réducteurs du lu fourneau, à l'état sec, ont une action plus éner- que qu'à l'état humide ; la diflérence, qui est impor- nte aux basses températures, devient nulle aux envi- S de 10009. — M. Ab. Colson montre que le sulfate hrome résultant de la réduction de l'acide chro- e par le gaz sulfureux renferme 3 radicaux sulfu- s. De plus, ce sel, Cr? (S0‘,7.101°0, est un sulfate normal, en tous points comparable au sel violet respondant. — M. J. Lavaux décrit un RRICEGÉ séparation des trois diméthylanthracènes qu'il à tenus dans l’action du chlorure de méthylène et hi orure d'aluminium sur le toluène. — M. Ed. Bon- a constaté qu'il faut 0 gr. 291 del H°0* par litre ur stériliser un litre d’eau de Seine après six heures ontact, lorsqu' il provient d'une solution commer- e d'eau: oxygénée; tandis que, dans les mêmes con- itions, 0 gr. 06 de H°0° produit à l’état naissant par le éxyde de calcium suffisent pour obtenir la stérili- n en # heures. SCIENCES NATURELLES. M. J.-P. Bounhiol a ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 89 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER reconnu, par des mesures appropriées, une diminution des 6 ichanges respiratoires et une élévation du quotient respiratoire chez tous les poissons marins en capli- vité. — M1: M. Stefanowska à constaté que les poids d'azote organique, d'acide phosphorique, de chaux, de potasse et de fer subissent une augmentation rapide dans la première période de la croissance chez l'avoine. — M. C. Houard à observé que les feuilles hypertro- phiées constituant les cécidies des Genévriers des Alpes présentent les caractères histologiques suivants : déve- loppement plus accentué des appareils normaux d'assi- milation et de sécrétion et renforcement de l'appareil de soutien. — M. P. Becquerel n'a pu déceler la moindre trace de radio-activité de la part des graines, des mousses et du rameau de buis, eu prenant les précautions les plus minutieuses contre l'émission de la vapeur d’eau. C'est à cetle dernière que seraient dus les résultats positifs de M. Tommasina. — M. P. Vuillemin a reconnu que les hyphoïdes des tubercules des racines de cer- laines Légumineuses sont des produits symbiotiques, où les portions appartenant à la Légumineuse et au /#hi- zobium sont bien distinctes. — M. A. Lacroix a exa- miné les roches éruptives recueillies sur le territoire de Zinder; ce sont des microganites alcalins, à aegyrine et amphiboles sodiques. — MM. F. Foureau et L. Gen- til ont déterminé les roches cristallines rapportées par la Mission saharienne. 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —- M. J. Boussinesq démontre que la conductibilité extérieure représenta- tive du pouvoir refroidissant d’un courant fluide est proportionnelle à \—— : racines de la conductibilité intérieure K du courant, de sa capacité calorilique C par unité de volume, de sa vitesse générale V et de l'inverse du trajet L des filets fluides sur le corps. — M. Ch. Féry a éludié le pendule Séance du 9 Janvier c'est-à-dire aux quatre d'une horloge astronomique dont la variation de marche a été nulle entre 2°02'et 2°29', soit pour une variation d'amplitude de 9 mm. environ. — M. Borrelly a découvert, le 28 décembre, à l'Observatoire de Mar- seille, une nouvelle comète (e 1904). — MM. G. Fayet et E. Maubant ont déterminé les éléments provisoires et l’'éphéméride de la nouvelle comète Borrelly. — M. G. Rayet présente les observations de la comète Borrelly (28 déc. 1904) faites par M. Courty au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. 20 SciExCES PHYSIQUES. — M. Th. Moureaux donne la valeur des éléments magnétiques à l'Observatoire du Val-Joyeux, au 1 janvier 1905. — M. A. Berget indique un nouveau mode de visée des surfaces larges de mercure. — M. V. Crémieu a observé que des gouttes d'un liquide suspendues dans un liquide non miscible de même densité, et ainsi soustraites à l’action de la pesanteur et à leur attraction mutuelle, se rap- prochent cependant lentement. — M. G. Seguy à étudié la valeur comparée, au point de vue photogé- nique, de diverses radiations. C'est le corail calciné, placé dans le vide radiant et soumis à l'influence des rayons cathodiques, qui a donné la meilleure impres- sion photographique. — M. F.-P. Le Roux a reconnu que l'énergie lumineuse potentielle maximum que peut induire dans un corps phosphorescent donné une lumière activante donnée, est indépendante de la tem- pérature; celle-ci n'influe que sur la vitesse de trans- formation de l énergie lumineuse potentielle en énergie lumineuse actuelle, — MM. M. Chanoz et M. Perrigot 90 rapportent des faits qui montrent que la démonstration de l'existence des rayons N par la photographie d'écrans au sulfure de calcium insolé est illusoire. — M. Marage a constaté qu'à distance constante chaque voyelle est percue par l'oreille physiologique pour un minimum d'énergie sur une note déterminée. — MM. H. Moissan et F. Osmond déduisent de l'étude micrographique de la météorite de Cañon Diablo que les parties métal- liques qui paraissent homogènes renferment souvent des noyaux microscopiques et irréguliers formés de couches superposées de phosphure et de carbure de fer. Les nodules sont formés de sulfure de fer ou troï- lite, entouré de couches de phosphure ef de carbure de fer. — MM. C. Chabrié et A. Bouchonnet ont préparé le fluorure d'indium In°F°.18H°0 et le fluorhydrate de rubidium RbEF.HEF. — M. L. Vignon à reconnu que l’'aminoazobenzène représente la limite stable des com- binaisons azoïques possibles entre le diazobenzène et l’aniline. — MM. L. Bouveault et G. Blanc, en traitant la camphénylone par l'iodure de méthylmagnésium, ont obtenu un alcool tertiaire, différent de l’isobornéol, qui se déshydrate en donnant du camphène racémique, {l’où l’on peut retourner au camphre. — MM. J. Wolff et A. Fernbach ont observé que l’état de liquéfaction de l’amidon favorable à la coagulation favorise égale- ment la formation diastasique d’amylocellulose. — M. V. Henri a constaté que la loi suivant laquelle se produit l'hémolyse des hématies de poulet par le sérum de chien est une logarithmique. — MM. Albert-Lévy et A. Pécoul dosent l'oxyde de carbone dans les atmo- sphères confinées par la méthode de M. A. Gautier, mais en recueillant l'iode dans le chloroforme et com- parant la coloration de celui-ci à une gamme de colo- rations types. — M. E. Fleurent décrit une nouvelle UE pour le dosage du gluten dans les farines de blé. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran signale le fait que les Glossina ou {sé-tsé abondent dans presque toute l'étendue de la Guinée française, où l'existence de la trypanosomiase humaine et de plusieurs {trypanoso- miases des Equidés est déjà démontrée. — M. Thiroux a reconnu que, lorsqu'on rencontre, chez un même padda, le Trypanosoma paddae et l'Halteridium Dani- lewskyi, les deux parasites ont, dans l'organisme du padda, une évolution parfaitement distincte et pro- viennent d'une double infection. — M. J. Gautrelet, à propos des notes de M. Quinton, rappelle des expé- riences antérieures, où il a observé une augmentation d'alcalinité du sang des poissons placés dans un milieu extérieur alcalinisé. ACADÉMIE DE MÉDECINE Scance du 3 Janvier 1905. M. Chauvel présente un Rapport sur un Mémoire de M. E. Bruch relatif à la formation d’un moignon oculaire artificiel par autoplastie au moyen d'un Tam- beau de peau pédiculé. C'est une bonne opération, qui mérite d'être vulgarisée, — M. P. Brouardel indique les difficultés qui s'opposent à la déclaration par le médecin de l'alcoolisme, de la tuberculose et de la syphilis comme causes de décès. Le projet de M. Fernet est renvoyé à l'examen de la Section d'Hygiène. — M. Guitez lit un travail sur les résultats généraux obtenus par la trachéo-broncho-æsophagoscopie et les perfectionnements de cette méthode. — M. Darier donne lecture d’un Mémoire sur la supériorité des sels organiques d'argent sur le nitrate d'argent en théra- peutique oculaire. Séance du 10 Janvier 4905. M. À. Josias présente un Rapport sur un Mémoire de M. A. Courtade relatif à l'examen du pharynx supé- rieur par le toucher médiat à l’aide d’explorateurs. Avec les sondes exploratrices, la désinfection est facile et rapide, l'exploration est facile à tous les âges; elle est bien tolérée par les petits malades. — M. Ker- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Ja rate chez les Ichthyopsidés. — M. A. Pettit signale morgant signale un cas de rétention complète d'urine causé par un calcul préputial chez un Annamite, guéri par la circoncision. — M. Variot lit un Mémoire sur les causes de la faible mortalité infantile dans ville du Creusot. — M. Castex donne leclure dur travail sur la surdi-mutité. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 24 Décembre 1904. M. U. Lombroso montre que les conditions infés rieures de l'organisme ont une influence remarquable sur l'échange des graisses, indépendamment de la fonc tion lipolytique qui s'accomplit dans le tube digestifs — Le même auteur n'a observé aucune altération pro fonde et définitive du pancréas après ligature et rése® ion des conduits pancréatiques chez le chien; chez Je pigeon, il y a transformation (emporaire de l'épithé lium glandulaire en épithélium pavimenteux. — M: p Léger a découvert dans le tube digestif du Tabanus glaucopis un nouveau Flagellé parasite qu'il décrit sous le nom d'Æerpetomonas subulata. Cette forme paraît représenter un ancêtre des Trypanosomes à fouet mors phologiquement antérieur. — M. Donnat-Cattin pré sente un nouveau type de dynamomètre musculaire. M. N. Gréhant a reconnu qu'un mélange d'air et de& gaz d'éclairage dans la proportion de 30 à 1 est très dangereux pour le chien et peut causer la mort d’um homme. — MM. A. Gilbert et J. Jomier ont observé que, chez les animaux soumis à un même régime, IN foie peut présenter des variations de teneur adipeuse très notables, considérables même comme dans 10 D et J. Heitz ont constaté, sur trois chats, que la section de quelques racines postérieures a entraîné, après huit mois de survie, une dégénérescence disséminée et lentem dans le territoire des nérfs cutanés correspondants. = MM. Piery et Mandoul ont reconnu que les variations morphologiques et numériques du bacille de Koch dans l'expectoration des phtisiques sont en rapport à la fois avec l'évolution du processus tuberculeux et avec lan forme clinique de la maladie. — M. A. Pettit décril un dispositif d'immobilisation pour les Squalidés sur lesquels on pratique des vivisections. — Mie À. Drze wina et M. A. Pettit ont observé des hyperplasiess tissulaires compensatrices consécutives à l'ablation de la présence de cellules fusiformes dans le sang des Ichthyopsidés consécutivement à l’ablation de la rate, ainsi que des phénomènes de pyknose du noyau des! hématies. — M. G. Patein estime que la matière albu= minoïde qui caractérise l'albumosurie de Bence-Jones est une albumine de constitution variable, se rencon= trant dans des cas pathologiques très différents. — MM. Courcoux et Ribadeau-Dumas étudient les cel lules géantes développées dans le foie à la suite de Pin= jection par la veine porte de chloroformo-bacilline. —= MM. H. de Waele et E. Sugg ont obtenu l’'immunité contre le cow-pox par l'introduction sous la peau d'une bête bovine de sacs de collodion remplis de vaccin. — M. F. Battelli et M'° L. Stern ont observé, après l'ablation du foie chez la grenouille ou la production de la stéatose du foie chez le cobaye, une augmentation de la catalase dans les autres tissus. — M. E. Maurel confirme l'action du vêtement sur la diminution de poids du cobaye, l'augmentation des matières fécales et leur fétidité. Ces actions ne sont pas modifiées par la nature et la couleur du vêtement. — MM. Baylac et Albarède ont obtenu des lésions très nettes de l'aorte chez le lapin avec des doses d'adrénaline variant de 1,28 à 2,58 milligrammes. — M. A. Borrel n’a pu élucider la nature des inclusions de l'épithélioma contagieux des oiseaux, — M. A. Thomas étudie les rapports anatomiques du bulbe et du cervelet. — M. P. Wintre- bert signale l'existence d'une irritabilité excito-motrice primitive, indépendante des voies nerveuses, chez les embryons ciliés de Batraciens.— M. F.-J. Bose montre ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 91 ‘que, si, après avoir fait une inoculation de virus cla- “eleux à la peau, on injecte aussitôt 10 à 15 centimètres “Cubes de sérum d'hyperimmunisé, l'accident local “évolue seul, plus ou moins atténué, et il ne se produit pas d'éruption générale. Il se propose d'employer la même méthode dans l'infection syphilitique. Séance Qu 7 'aivier 1C05. M. A. Laveran a inoculé le surra à une roussette (Pteropus medius); elle est morte au bout de 9 jours en présentant de nombreux Trypanosomes dans le sang. — M. A. Ignatowsky a éludié l'influence de la -néphrectomie et de la ligature de l'artère rénale sur Jes éliminations urinaires. — M. Ed. Hesse décrit le “Myxocystis Mrazeki, microsporidie parasite du Limno- duilus Holfmeisteri. — MM. Borrel et Haaland ont observé une tumeur spéciale de la souris, déjà signalée par Jensen, et formant des métastases dans les organes. — M. L. Panisset a inoculé le surra au chat ; l'animal meurt après {rois semaines en moyenne, en présentant de nombreux Trypanosomes dans le sang. — MM. A. Gil- bert et J.Jomier ont constaté que les régimes riches en graisses ne produisent, au niveau du foie, qu'une faible quantité de glycogène ; les albuminoïdes en four- nissent une quantité moyenne ; les légumes et de pain une grande quantité. — Les mêmes auteurs ont reconnu que la graisse d'ingestion apparait dans le foie entre la %e et la 9° heures chez le lapin, entre la 5° et la 7° heures chez le chien; elle peut ne disparaître que très lente- ment (après 5 à 10 jours). — M. F. Battelli et Ml: L. Stern ont observé, chez les Oiseaux, que tous les tissus, Sauf le foie et Le rein, sont peu riches en catalase. Le Sang en renferme très peu. Zn vitro, la catalase est sans action sur les substances qui se transforment facile- ment en urée. — M. J. Lefèvre montre que le rayon- nement calorifique du chat non seulement grandit, mais s'accélère avec l’abaissement de la température extérieure. — M. E. Maurel termine ses expériences relatives à l'influence du vêtement sur les fonctions digestives chez le cobaye. — M. P. Remlinger à reconnu ‘que la Tortue terrestre est réfractaire à la rage, ce qui tient peut-être à l'état rudimentaire du système ner- veux. — Le même auteur, après avoir soumis à la cen- trifugation du virus rabique dilué, a observé que le liquide superficiel est devenu inoffensif au bout d'une demi-heure à une heure. — M. V. Henri : Recherches physico-chimiques sur l'hémolyse (voir p. 90) — M. Doyon a constaté que le chloroforme, à certaines doses, détermine parallèlement lincoagulabilité du sang et des lésions hépatiques graves. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 13 Décembre 1904. MM. P. Bouin ef P. Ancel signalent un cas d'her- “maphrodisme glandulaire chez une chèvre. — M. P. “Bouin à reconnu qu'il faut près de deux ans pour que “la spermatogenèse, établie dans une certaine région “(lu testicule chez le cheval, s'étende dans tout l'organe. — MM. Simon et L. Spillmann décrivent un procédé “photographique pour la numération des éléments figurés u sang. — M. L. Mercier a constaté la présence d'un exoplasme dans les cellules épithéliales de Ja queue du “Lètard de ana temporaria. — M. Th. Guilloz indique ne méthode de radiographie stéréoscopique sans sté- “réoscope, au moyen d'un réseau, et présente des épreuves ainsi obtenues. Pie RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 20 Décembre 1904. M. A. Briot na pas décelé de venin dans les épines de la Rascasse (Scorpoena). — M. L. Bordas à reconnu ue les glandes dites salivaires de la Nèpe cendrée n'ont aucun rapport avec le tube digestif; ce sont des glandes “appendiculaires ou glandes maxillaires. —M. C. Oddo «met en évidence l'absence de dicrotisme dans le pouls lent permanent. 4 SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 6 Janvier 1905. M. V. Crémieu présente un calorimètre de PBunsen, modifié en vue de le rendre plus maniable pour Les expériences de cours. En premier lieu, les enveloppes protectrices ordinaires, très encombrantes, ont été remplacées par un cylindre de Dewar. Sous un très faible volume, ce cylindre est assez efficace pour per- meltre de conserver le manchon de glace du calori- mètre pendant trois jours. En second lieu, le tube capillaire indicateur, dont la projection est difficile et ne permet pas de mesures exactes, a éé coupé en deux parties; entre ces deux parties, on interpose une petite cuve à faces parallèles, remplie d'eau. Les extrémités capillaires pleines de mercure aboutissent ainsi dans un liquide transparent. Toute variation thermique au sein du calorimètre s’accompagnera d'une chute de gouttes de mercure par l’une ou l’autre des extrémités des tubes immergés dans l’eau. Le réglage est rendu très facile, par le robinet de M. Villard pour un des côtés, et par un robinet fixé à la partie inférieure de la cuve à eau, pour l’autre côté du tube capillaire. On projette les extrémités du tube capillaire. La projection est très facile et très nette. Elle permet, de plus, de faire, au cours, des mesures assez précises. Il suffit, en effet, de compter une fois pour toutes le nombre de gouttes de mercure qui tombent pour une variation thermique de 1 calorie. La mesure d'une quantité de chaleur reviendra alors à compter un nombre de gouttes, ce qui est facile. M. Crémieu indique ensuite comment, au cours de M. Bouty, il a appliqué le calorimètre ainsi modifié à deux expériences, qu'on n'avait pas encore réalisées publiquement, d'une manière précise. Ce sont : 1° La mesure de l'équivalent mécanique de la chaleur, par une méthode dérivée de celle de M. Micu- leseu; 2° L'expérience de Joule sur la détente des gaz dans le vide. — M. G. Berlemont : Modifications aux trompes à mercure. 4° Dans les modèles de trompes à rémontage automatique du mercure par la trompe à eau, suivant le réglage de la rentrée d'air, le mercure se trouvant brassé dans l'air conservait des molécules d'air qui étaient rappelées par le vide de là trompe et limitaient ainsi le vide, puisqu'elles se renouvelaient continuellement. Pour éviter ces bulles d'air, M. Ber- lemont à adapté à la trompe, sur les indications de M. Debierne, un type de purgeur sans robinet per- mettant d'éliminer complètement toutes traces d'air. Ce purgeur peut s'adapter à tout appareil de son modèle sans autre complication qu'un réglage de rentrée d'air; il est complètement indépendant de la trompe à mer- cure même. 2° Un inconvénient des trompes à mercure qui fonctionnent fréquemment est la casse des tubes à l'endroit où le mercure vient frapper en coup de marteau lorsque le vide est déjà avancé, cet incon- vénient étant grave, parce que cet accident se produit généralement à la fin d'une expérience et oblige ainsi non seulement à recommencer, mais à réparer une trompe. Pour éviter cette casse, M. Berlemont soude entre deux tubes de verre capillaire un tube de platine de 0%,20 de longueur à la hauteur où se produitle choc; de cette façon, tout accident de casse est éliminé. Une trompe montée ainsi fonctionne depuis trois mois, une moyennne de huit à douze heures par jour, sans qu'il y ait de tube cassé. — M. A. d'Arsonval présente la lampe à lumière oxy-acétylénique de la Uompagnie française de l’'Acétylène dissous. La haute température produite par le chalumeau oxy-acétylénique avait de suite fait penser à l'utiliser à la production de la lumière par incandescence, mais on fut vite arrèté par la fusibilité des matières habituellement employées dans ce genre d'éclairage. La chaux, la magnésie sont creusées en quelques minutes par le jet du chalumeau. On essaya d'obvier à cet inconvénient en animant le bâton de chaux d'un mouvement de rotation; mais, outre la complication du chalumeau, la solution cherchée n'était pas atteinte, car, sous l'influence de la 92 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES chaleur, la chaux se fend et, lorsque le jet de flamme tombe dans cette fente, l'intensité lumineuse varie con- sidérablement; les impuretés contenues dans la chaux agissent de la même manière. La vraie solution était donc de trouver une matière résistant à cette haute température. En mélangeant certaines terres rares et en leur faisant subir un traitement approprié, la Com- pagnie française de l'Acétylène dissous a obtenu cette matière. Moulée sous forme de pastilles de 15 milli- mètres de diamètre environ, elle permet, avec un chalumeau consommant 50 litres d’acétylène à l'heure, d'obtenir une intensité lumineuse d'environ 41.500 bougies. — Le même auteur décrit un nouveau pro- céde de fabrication de loxygène comprimé, au moyen du générateur autocompresseur de la Compagnie française de l'Acétylène dissous. Ce procédé permet d'obtenir directement de l’oxygène sous pression, sans grandes manipulations, et ne nécessite pas l'emploi d’une pompe de compression. L'oxygène se trouve produit par la combustion d'agglomérés se faisant dans l’intérieur d'un réservoir étanche. L'oxygène se comprime de lui-même au moment de sa production. Ces agglomérés se composent d'un mélange de chlorate de potasse avec une substance inerte et une proportion très faible d'un corps combustible, la chaleur dégagée par ce corps en brûlant étant suffisante pour décomposer complète- ment toutle chlorate de potasse et mettre l'oxygène en liberté. La matière inerte sert à ralentir la décomposi- tion. Ces agglomérés se présentent sous la forme de petits cylindres de 30 millimètres de diamètre et 55 mil- limètres de longueur; ils dégagent 18 litres environ d'oxygène et leur combustion dure deux minutes; ils sont inaltérables à l'air. L'appareil servant à brûler ces agglomérés est désigné sous le nom de générateur autocompresseur d'oxygène; il se compose d'un corps cylindrique en acier éprouvé à une forte pression; au centre se trouve un tube destiné à recevoir les agglo- mérés et qui se termine par une tubulure sur laquelle se monte un couvercle serré par un étrier pour assurer l'étanchéité; à côté de cette tubulure se trouve le robinet servant à la prise du gaz. Ce générateur permet donc de préparer de l'oxygène à un instant quelconque et de s’en servir au moment opportun. — M. G. Meker présente de nouveaux brüleurs de laboratoire appli- cables au chauffage à température élevée. Ces brûleurs tendent à réaliser le principe de brûler aussi complè- tement que possible une quantité de gaz maxima dans un volume de flamme minima. Les formes et dimen- sions de ces brûleurs ont été déterminées expérimen- talement, de façon à obtenir un mélange intime du gaz et de l'air, contenant une quantité d'air suffisante pour que la flamme obtenue produise un maximum d'effet calorifique. La pièce la plus caractéristique du système est un dispositif cellulaire, comparable à un nid d'abeilles dont les cellules seraient de section carrée, fermant le brûleur à sa partie supérieure, et traversé par le mélange gazeux immédiatement avant son inflammation. La flamme obtenue est homogène et très chaude; on doit l'utiliser à partir de quelques millimèhes de sa base. Les résultats obtenus sont comparables à ceux du chalumeau ordinaire, la con- sommation de gaz étant cependant beaucoup diminuée. Sous forme de brüleur à sodium, ils permettent d'obtenir des flammes très riches en rayons jaunes. Leur adap- tation à l'éclairage fournit aussi d'excellents résultats. Les mêmes brûleurs disposés pour employer l'air com- primé conduisent à des résultats nouveaux. Suivant la pression de l'air employé, on peut brûler dans le même volume de flamme une quantité plus ou moins grande de gaz et obtenir des températures plus ou moins élevées. Avec de l'air à 100 grammes par centimètre cube, on arrive à la fusion du nickel (1.470°) en creuset. Avec de l'air sous 2 kilogs, on arrive en creuset à des températures voisines de 1.700°, qui n'ont pu encore être déterminées. On arrive aussi à la fusion directe du platine en masses dans des fours en chaux, avec de l'air à une pression de 2 kilogs à 3 kilogs. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 23 Décembre 1904. M. G. Darzens communique ses {ravaux sur la rédu tion des cétones par la méthode catalytique de Sab. tier et Senderens. A l’aide d’un catalyseur préparé ve 300, on transforme facilement les cétones aromatiques en carbures benzéniques correspondants, sans produ& tions de dérivés hexahydrogénés. C’est ainsi que l'acé= tophénone donne de l'éthylbenzène, la p-crésylmé thylcétone donne le p-éthyltoluène. En continuant @ travail avec les cétones grasses saturées, M. Darzens observé la résistance remarquable de ces corps vis-à-vi du catalyseur hydrogénant. Au contraire, les cétone grasses non saturées se transforment avec la plus grande facilité en cétones saturées correspondantes. L'oxyd de mésityle donne l'isobut\Iméthyicétone ; la méthyl= hepténone naturelle, ainsi que la méthylhepténone syn® thétique donnent l'isohex\Iméthylcétone.— M. Gabriel Bertrand à reproduit synthétiquement la sorbiérite, le nouveau sucre cristallisé du jus de sorbes, qu'il a mon= tré, récemment, être un isomère de la sorbite et de læ mannite. Cette synthèse fixe la formule de structure de la sorbiérite, qui se trouve être la d-idite de MM. E. Fischer et W. Fay. M. G. Bertrand obtient la sorbiérite artificielle en réduisant le sorbose en milieu acide par l'amalgame de sodium. Le mélange des deux hexites stéréoisomères, ainsi obtenues, est oxydé par culture avec la bactérie du sorbose; la d-sorbite dispaz rait, tandis que la sorbiérite ou d-idite résiste. On l'extrait sous forme d'acétal benzoïque. Elle possède la composition et tous les autres caractères du produit naturel. La synthèse de la sorbiérite à partir du sor-= bose enlève, de même, les derniers doutes au sujet de la structure de ce dernier sucre. — M. Nicolardot expose ses recherches sur l’éthylate ferrique de Gri- maux, qui serait, si son existence est certaine, le corps de Graham en solution alcoolique. En préparant l'éthy- late ferrique dans les mêmes conditions que Grimaux, on n'obtient jamais du chlorure de sodium pur, mais un précipité ferrugineux. La liqueur brune qui surnage, et qui devrait être l'éthylate ferrique, renferme toujours du chlore. En ajoutant une quantité d'éthylate de sodium deux fois, trois fois et même cinq fois plus grande, il se forme toujours un précipité ferrugineux et une solu- tion brune très foncée contenant du chlore, mais dans laquelle le rapport du fer au chlore augmente constam- ment. On arrive ainsi à un terme limite identique (au point de vue de la teneur en chlore) à celui que four- nit la dialyse des composés bruns préparés en solution aqueuse par l’ébullition du chlorure ferrique étendu. La dilution, le temps et la dialyse ont, sur ces solutions alcooliques, une influence analogue à celle observée sur les composés de M. Béchamp. Enfin, des résultals com- parables ont été obtenus en étudiant l’action de l’éthy- late de sodium sur le chlorure d'aluminium anhydre en solution dans l'alcool absolu. — M. A. Wahl donne quelques détails complémentaires sur la préparation des éthers dicétobutyriques qu'il a décrite en collaboration avec M. Bouveault. Quand on distille dans le vide le pro= duit de la réaction de l'anhydride nitreux sur l’éther acé- tylacétique, on oblient, à côté du dicétobutyrate d'é= th\le (Eb.70° sous 13"), un liquide épais, Eb. 1#5° sous 20m, C’est l’arétale du nitrosoacétylacétate léthyle CH3.CO.C(: AzO.CO CH®).CO?C'H5 Le produitsynthélique obtenu en traitant le nitrosoacétylacétate d'éthyle par l'anhydride acétique est identique avec lui. — M. Poster- nak indique une méthode pour isoler les grains d'aleu- rone à l’état de pureté, el communique les résultats d'analyse de quelques préparations provenant des semences de sapin rouge, de chènevis, de lournesol et de lupin blanc. En dehors de lazote, on y trouve constamment des quantités considérables de phos- phore, de potassium, de magnésium, des quantités moins grandes de calcium, de fer, el, ce qui est sur= tout frappant, de silicium et de manganèse. Il devient ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 03 donc nécessaire d'élargir la conception courante du rain d’aleurone, qui ne représente pas uniquement a matière azotée de réserve, mais aussi tous les éléments minéraux considérés comme indispen- sables au développement d'une plante. — M. Brunel avait montré, dans une communication précé- dente, qu'en faisant agir l’iode et l’oxyde de mercure sur le cyclohexène en présence d’un alcool R.OH, il se faisait un composé I.CH!°.0R, à la fois éther- oxyde et étheriodhydrique d’un cyclohexanediol. M. Brunel montre qu'en remplaçant l'alcool par un anhydride d'acide organique il se fait une réaction analogue, donnant naissance à un dérivé de glycol qui est éther iodhydrique et éther-sel. Par exemple, en employant l’anhydride acétique, on obtient l'éther 1.C:5H°.0.CO0.CH*. On peut, d'ailleurs, dans la prépa- ration, remplacer le mélange anhydride + oxyde mer- curique par le sel mercurique neutre correspondant. Les corps obtenus sont des éthers de l'x-cyclohexa- nediol-1 : 2 de Markownikolf. — M. Brunel fait con- naître les premiers résultats qu’il a obtenus dans l'étude du thymomenthol, préparé par hydrogénation du thy- mol au moyen de la méthode de MM. Sabatier et Sen- derens. Cet alcool est un liquide huileux à odeur de menthe, de densité 0,913à 0°, cristallisant en masse vers — 10°, fondant ensuite vers 0°. Il bout à 215°,5- 2160. Il donne avec les acides phtalique et succinique des éthers acides parfaitement cristallisés, fondant res- pectivement à 128° et 80°. Ces deux éthers sont solubles dans les alcalis aqueux dilués. Ils sont précipités en solution alcaline concentrée. Les solutions alcalines renfermant un petit excès d’alcali, tiédies légèrement, mettent en liberté Le thymomenthol qui vient surnager. Mais le corps obtenu n’est pas identique au thymomen- thol qui à servi à la préparation de l’éther. Ce nouveau thymomenthol cristallise en longues aiguilles fusibles à 280. 11 bout à 2170. Il a une odeur de menthe. Avec les anhydrides succinique et phtalique, il donne des éthers identiques à ceux qui ont servi à le préparer. Il y a donc eu stéréoisomérisation lors de l'éthérification du thymomenthol liquide. Ces deux alcools, traités par le bisulfate de potassium ou l’anhydride phosphorique, donnent naissance à un thymomenthène CH'8, bouil- lant à 167-168°, de densité 0,823 à 0°. Entin, les deux alcools précédents donnent par oxydation chromique la même cétone. Cette thymomenthone bout à 212-2130. Son oxime fond à 80°; sa semicarbazone fond à 1590. — M. Tassilly présente un nouveau système de chauf- fage à l'usage des laboratoires, inauguré par M. Méker, et indique les avantages que présentent ces appareils fonctionnant à l'air libre ou à l'air soufflé. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 17 Novembre 1904 (suite). M. James Walker Théorie des électrolytes amphotères. Dans un Mémoire précédent!, l'auteur a montré qu'il est possible d'exprimer les concentra- tions des ions présents dans la solution aqueuse d'un électrolyte amphotère en fonction de la concentration de la substance non ionisée, des constantes de disso- ciation de la substance agissant comme acide et comme base respectivement, et de la constante d'ionisalion de l’eau. Dans ce Mémoire-ci, les valeurs pour les acides aminobenzoïques ont été calculées de nouveau, et l’au- teur a obtenu une concordance plus étroite entre la théorie et l'expérience que celle qui semblait exister lors des caleuls précédents. Comme il est d'importance fondamentale de connaitre la concentration de la pro- portion non ionisée d'un électrolyte amphotère en solution pour l'application de la théorie, l'auteur donne une table des valeurs de cette grandeur avec des con- stantes différentes et une concentration totale. D'après cette table, il semble que, lorsque les constantes acides 4 Voir Mature, 7 avril, 1904, €. LXIX, p. 545. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. et basiques ont des valeurs rapprochées, la dilution n'a pas d'effet sur lionisation totale d'un électrolyte ampho- tère, quoique les proportions des deux ions positifs et, par conséquent, la conductivité moléculaire puissent varier beaucoup. Pour une série d’électrolytes ampho- tères avec un produit Æky constant (4 représentant la constante acidique et 4, la constante basique), on peut montrer que la variation simullanée de 1/44 ky et de v dans le même rapport n'a pas d'effetsur l'ionisation totale. De ce fait et des résultats précédents, on peut déduire que, dans une telle série, commençant avec une valeur excessivement faible de 4, l'ionisation totale cesse lorsque 4; diminue et Æ, augmente, la diminution de l'ionisation étant d'abord rapide, ensuite devenant plus lente jusqu'à ce que, sur un intervalle assez étendu, elle soit pratiquement constante et égale à la valeur minimum qui est actuellement atteinte lorsque 4, = ko. À ce point, la substance est absolument neutre. Lorsque 4, diminue encore, et que kyaugmente, l'ionisation commence à s'élever, très lentement tout d'abord, et les substances considérées prennent un ca- ractère de plus en plus basique. Finalement, l'ionisation progresse rapidement, et l’on se trouve enfin en pré- sence d'une simple base pour laquelle 4, est infiniment petit. Cette théorie à été appliquée à l'acide cacodylique et à l’asparagine, et a donné une concordance satisfai- sante avec les résultats expérimentaux. Séance du 24 Novembre 190% (suite). M. H. A. Webb : La convergence des séries infinies de fonctions analytiques. — MM. H. T. Barnes et E. G. Coker : L'écoulement de Peau à travers les tubes. On sait füe, lorsque de l’eau coulant dans un tube de 2 à 3 mm. de diamètre est chauffée électrique- ment par un fil conducteur central, la chaleur est emportée par le courant rapide qui forme un manchon d'eau chaude autour du fil, tandis que les parois ne reçoivent presque pas de chaleur. Si la chaleur est appliquée à l'extérieur du tube, l'eau chauffée reste en contact avec la paroi interne de ce tube et l’eau qui coule au centre possède une température {très infé- rieure. Mais, si le flux est augmenté suffisamment pour rompre les lignes de courant, il en résulte des mouve- ments tourbillonnaires ou sinueux, et la distribution de la chaleur à travers toute la colonne d'eau devient uniforme. Le point de changement est très net; c’est ce que Reynolds a appelé la vitesse critique. Celle-ci peut varier suivant que l’eau qui pénètre dans le tube est tranquille ou plus ou moins troublée. Reynolds à calculé et vérifié expérimentalement que la vitesse critique varie en raison inverse du diamètre des tubes et qu'elle obéit à la loi de Poiseuille. Dans les expé- riences des auteurs, faites avec de l’eau absolument tranquille, on à trouvé que les lignes de courant se maintenaient, dans plusieurs cas, à des vitesses bien supérieures à celles qu'on déduit de la loi de l'inverse du diamètre, et que la limite supérieure de la vitesse critique diminue un peu plus rapidement avec l’aug- mentation de température que ne le voudrait la loi de Poiseuille. Les auteurs ne pensent pas que cela infirme les lois de Reynolds: ces résultats montrent seulement l'instabilité de la limite supérieure du flux avec ligne de courant et son étroite dépendance des perturbations de l’eau. — MM. C. H. Burgess et A. Holt : Quelques caractères physiques des borates de soude, avec une méthode nouvelle et rapide pour la détermination des points de fusion. Les verres obtenus par la fusion du carbonate de soude avec l'anhydride borique peuvent être transformés totalement ou en partie, par chauffage prolongé, en variétés cristallines stables qui fondent invariablement à des températures plus élevées que les verres dont ils proviennent. L'étude des points de fusion des formes cristallines et vitreuses des mélanges de différentes compositions conduit à la conclusion que deux borates de soude peuvent seuls être oblenus par la fusion : Na?0.4B°0# et Na°0.B°0*. L'addition de Na*0 à l'anhydride borique produit tout d'abord une solution +. 94 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES du borate Na°0.4B°0% dans l'anhydride borique. Ce der- nier devient alors sursaturé, et le borate en excès se sépare si l'on chauffe pendant quelque temps. La quan- tité qui se sépare continue à augmenter jusqu'à ce que le mélange ait la composition du Na°0.B°0* presque pur; alors la cristallisation complète se produit. Entre ce point et le composé Na°0.B*0', les formes cristal- lines paraissent être les solutions solides des deux borates ci-dessus mentionnés, le borax anhydre lui- même formant presque le point eutectique. Dans les mélanges contenant plus de soude que Na*O.B*0*, les cristaux semblent être des solutions solides de ce com- posé avec le carbonate de soude. Les verres paraissent être les formes surfondues et métastables des cristaux. Les analyses des verres et des cristaux de diverses compositions confirment les observations provenant des points de fusion. La méthode employée pour obte- nir le point de fusion consiste essentiellement à chauf- fer électriquement un fil de platine, auquel on suspend un petit morceau de la substance à examiner. On attache un faible poids au morceau de substance. Lorsque le fil est chauffé jusqu'au point de fusion de la substance, le morceau et le poids tombent. On déter- mine la résistance du fil à ce moment, et d'après elle la température, Cette méthode a donné des résultats satisfaisants pour les substances comme le verre, qui jusqu'ici n’ont pas été supposées fondre à une tempé- rature déterminée. Séance du 1° Décembre 1904 (suite). MM. Robert Muir et H. Browning : La combinaison chimique et L'action toxique dans le sérum hémolytique. Ce mémoire traite du mode d'action des compléments — ces corps relativement instables présents dans le sérum des animaux normaux, et qui sont les substances actives dans l’hémolyse et la bactériolyse. Vis-à-vis des corpuseules rouges traités avec un corps immunisant convenable (lanti-substance développée par l'injection de ces corpuseules dans un animal d’une autre espèce), un complément peut être considéré comme une toxine, et déjà beaucoup de points de ressemblance dans la constitution des toxines et des compléments ont été mis en évidence, La dose hémolytique d'un complé- ment particulier varie beaucoup avec des corpuscules différents, lorsque chaque variété est traitée par le corps immunisant correspondant; aussi le but des auteurs a-t-il été de rechercher si de telles variations de dosage.sont dues aux variations des affinités de combinaison des compléments ou aux variations de leur action toxique. Par exemple, la dose hémolytique du complément du cochon d'Inde est dix fois plus grande avec ses propres corpuscules qu'avec ceux du bœuf; les auteurs montrent, par des méthodes quanti- tatives, que, dans le premier cas, toute la dose du com- plément entre en combinaison avec les corpuscules du cochon d'Inde (par le moyen du corps immunisant); il n'y a pas défaut d'affinité de combinaison du complé- ment, mais son action toxique est faible. On a obtenu un résultat semblable avec chacun des trois sérums soumis aux recherches : non-sensibilité relative des corpuseules d’un animal vis-à-vis de son propre com- plément; dans un cas, il y avait aussi un défaut du pouvoir de combinaison du complément. Tous les résultats tendent à confirmer l'importance de ja dis- tinction de ces deux facteurs dans l’action d'un com- plément, qui correspondent avec les deux groupements atomiques principaux désignés par Ehrlich sous les noms d'« hapotophore » ou combinant et de « zymo- toxique ». En ce qui concerne la biologie générale du sujet, on peut noter que «personne n'a encore réussi à produire une anti-substance où un corps immunisant en injectant à unanimal ses propres corpuscules ou ses cellules; un tel corps, avec l'aide du complément, produirait la destruction de ces cellules. C'est manifes- tement une protection contre l'auto-empoisonnement ; Ehrlich l'a nommé lautotoxicus horror. Les résultats obtenus par les auteurs, si on les généralise, indique- raient que, même si quelque substance agissant comme un corps immunisant apparaissait, il y a une protection grâce à laquelle le complément d’un animal produiraif comparativement peu d'effet dangereux. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 14 Décembre 1904. M. V.-H. Veley montre que, lorsque des solutions aqueuses de sels d'ammonium sont chauffées à leux point d'ébullition, le dégagement d’AzH* et l'acidité concomitante des solutions ne résultent pas d’une dis= sociation directe, mais d'une simple hydrolyse. M. A.-E. Dunstan vérifie ses précédentes conclusion sur la viscosité des mélanges liquides par une série d'expériences sur les mélanges : alcool allylique et eau alcool propylique et eau, glycol et eau, acide lactique et eau, benzène et acide acétique, benzène et alcooh propylique. — M. J.-C. Cain a étudié l’action de la chaleur sur la solution du sel de diazonium préparé au moyen de l'éthoxybenzidine et a reconnu qu'un groupe diazonium est substitué normalement par un hydroxyle tandis que l’autre reste intact. — M. P.-C. Ray, en traitant le nitrite de dimercurammonium AzHg°Az02 par un oxy-acide, a constaté que le groupe Az0O* est, simplement remplacé par l'ion acide correspondant: Il a ainsi obtenu le sulfate (AzHg*)*SO#.H*0 et le phos= phate AzHgH*PO* de la série. — MM. R. Meldola et L: Eynon ont trouvé que la plupart des amines diazotées, traitées en solution aqueuse par une solution concentrée de chromate de soude, donnent des précipités cristal= lins de chromates de diazonium. Les diamines four-= nissent des chromates analogues, qui se combinent avec les phénols et les amines pour former des com posés amino-azoïques. — M. S. Ruhemann à observé qu'en employant la pipéridine ou l’éthylate de soude comme agent catalytique, les mercaptans réagissent sur les cétones mono-oléfiniques pour former des pro- duits d’addition. En présence de pipéridine, la diben-« zylidène-acétone, cétone dioléfinique, donne un com= posé avec deux molécules de mercaptan. — MM. Th.S: Patterson et F. Taylor ont préparé l'acétate de menthyle, le d-tartrate et le diacétyl-d-tartrate de Æ menthyle et en ont mesuré la rotation entre 0° et 1000: Ces composés ne présentent pas une température de rotation minimum comme le menthol. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 26 Octobre 1904. MM. S. R. Trotman et J. E. Hackford présentent une étuve électrique pour laboratoires. La chaleur est fournie par une lampe électrique de 16, 32 ou 50 bou= gies. Séance du 23 Novembre 1904. M. S. R. Trotman a reconnu que la plupart des échantillons de sumac du commerce contiennent une proportion de fer qui peut aller jusqu’à 0,25 °/,. Ce fer provient du broyage de la feuille entre des rouleaux de pierre portés par des tiges de fer. En soumettant la poudre de sumac à une énergique ventilation et en la traitant par des électro-aimants puissants qui attirent le fer et l'oxyde de fer magnétique, on peut réduire la proportion des cendres à 6,5 °/ Ke la silice compte pour 0,75 °/, et le fer pour 0,15 °/,). La proportion de fer combinée dans la feuille ne parait pas dépasser 0,1 °/o. SECTION DE NEW-YORK Séance du 21 Octobre 1904. M. J. R. Mardick rappelle que toutes les méthodes d'analyse des extraits lannants sont empiriques et que ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 95 la poudre de peau absorbe non seulement les tannins, mais aussi une part de non-tannins; il en résulte que les tanneurs ne peuvent fabriquer des cuirs qui corres- pondent au pourcentage de tannins trouvé par les chi- “mistes. 11 lui paraît que la méthode d'analyse qui donne - les meilleurs résultats utilisables par la pratique est la méthode officielle de l'Association des Chimistes agro- nomes américains. SECTION D'ÉCOSSE Séance du 25 Octobre 1904. M. Th. Gray a étudié les différentes méthodes en usage pour la mesure des hautes températures. Pour des observations qui ne dépassent pas 1.0009, la méthode calorimétrique, avec un cylindre en fer, lui a rendu de bons services. Pour des températures plus hautes, on peut employer un cylindre de platine; mais il faut éviter soigneusement les pertes de chaleur dans le transfert du fourneau au calorimètre. Pour éviter cette cause d'erreur, l'auteur préfère utiliser les cônes de - Seger entre 1.000 et 1.800° C. Comme moyen continu «d'indication et d'enregistrement des températures - jusqu'à 1.600, la méthode thermo-électrique est la plus utile. Jusqu'à 1.000°-1.200° et aux basses températures, Je thermomètre à résistance de platine donne les me- sures les plus exactes. Enfin, au-dessus de 1.600o, il faut employer un pyromètre optique ; celui de Wanner a donné de bons résultats. Séance du 6 Décembre 1904. M. H. Ingle discute les méthodes, d’ailleurs peu nombreuses, d'essai des linoléums et conclut que la détermination de l'absorption d’eau de deux échantil- lons de linoléum appartenant à la même classe est un bon moyen de connaître leurs valeurs relatives de résistance à l'usure. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 9 Décembre 1904. M. E. Gehrcke vient d'étudier l'influence des oscil- lations électriques sur la largeur des raies spectrales “les plus fines. M. Lilienfeld à récemment réussi à mettre en évidence par l'analyse spectrale l’'argon con- tenu dans l'air. Cet intéressant résultat était dù à ce que le tube spectral sans électrodes dont se servait ce savant était excité non pas par l’effluve ordinaire, mais par les oscillations d'un circuit de vibrations élec- “iriques. Le tube spectral étant disposé en dérivation . par rapport à la self-induction du circuit en question, le circuit de vibration pouvait accomplir ses oscilla- tions presque sans perturbation aucune, l'énergie tra- versant le tube étant très petite par rapport à l'énergie du circuit. Or, l’auteur s’est proposé d'étudier la struc- ture que prennent les raies spectrales les plus fines lorsqu'on se sert de l'excitation précitée par oscillations … électriques. Les observations de plusieurs expérimen- tateurs antérieurs faisaient, en effet, prévoir des modifi- . cations générales sous l'influence d’une modification «de la méthode par laquelle est produite la lumines- * cence. M. Gehrcke s'est servi de plusieurs tubes droits “ renfermant des capillaires d'environ 4 millimètre de - diamètre intérieur. Des couches de feuilles d'étain dis- posées à l'extérieur servaient d'électrodes. Les spectres de l'hydrogène, de l'hélium, du sodium, de l'argon et du mercure ont été recherchés, un circuit vibratoire analogue à celui de M. Lilienfeld et actionné par une bobine d'induction servant comme excitateur. Un Spectroscope à interférence, du type indiqué par l'au- teur et M. Lummer, a été employé dans ces expériences, dont voici les résultats : les raies spectrales, plus ou moins bien définies dans le cas d'un effluve ordinaire, s'élargissent d’une facon frappante si l'excitation est due au circuit vibratoire. Cet élargissement est maxi- mum dans le cas de l'hydrogène, étant supérieur à la région de dispersion du speéctroscope à interférence, L'explication qui se présente à l'esprit est que la tem- pérature du gaz au moment du passage des oscillations s'élève à une hauteur anormale. En admettant encore que l'élargissement des raiés se produit exclusivement en vertu du principe de Doppler, une limite inférieure de la température pourrait être calculée, Les calculs de l’auteur donneraient une température d'environ 17.000° comme limite inférieure, température fort élevée en comparaison de celle de la lumière positive dans la décharge lumineuse ordinaire. Aussi, 1l parait probable que d'autres causes, telles que la rota- tion du centre d'émissiôn ou la décomposition de l'atome en sous-atomes, jouent également un rôle dans les phénomènes dont il vient d'être question. Séance du 30 Décembre 1904. M. H. Rubens fait la démonstration des ondes acous- tiques stationnaires à l'aide des flammes manomé- triques. L'extrême sensibilité que présentent les becs de gaz brülant sous un excès de pression très faible, relativement aux variations de pression intérieures ou extérieures, etquisuffit à mettre en évidence la différence de pression atmosphérique même pour une variation d'altitude de quelques centimètres, a engagé l'expéri- mentateur à employer ces flammes pour l'étude des ondes acoustiques slationnaires. Il est vrai qu'afin d’uti- liser leur sensibilité tout entière, il faut renoncer à l'em- ploi des capsules à diaphragmes de M. Künig, produisant les vibrations acoustiques au sein même du gaz d’éclai- rage. M. Rubens se sert d’un tube de laiton de 4 mètres de longueur etdeS8 centimètres de diamètre, fermé d'un côté par une plaque de laiton et de l’autre par une membrane élastique. Un dispositif télescopique permet de varier la longueur totale du tube d'environ 50 cen- timètres. Un tube de raccord latéral servait à amener le gaz. Sur la ligne latérale la plus élevée du tube, on avait disposé une série recliligne de cent trous d'un diamètre de 2 millimètres, pratiqués dans la paroi du tube à des distances égales à 3 centimètres. Après avoir fait pénétrer le gaz d'éclairage à travers le rac- cord pendant environ deux minutes, on allume sans danger d'explosion la série de petites flammes aux- quelles on donne une hauteur d'environ 1 centimètre en réglant la pression du gaz. Or, lorsqu'on vient à actionner une source acoustique quelconque à proxi- mité de la plaque de laiton fermant le tube, il se forme dans ce dernier des ondes stationnaires manifestées avec une beauté et une précision étonnantes par les différences d'intensité et de grandeur des flammes. La longueur du tube tout entière se trouve divisée en sections égales, et qui correspondent chacune à une demi-onde. Au milieu de chaque section pareille les flammes prennent une hauteur de quelques centimètres plus grande et une clarté éclatante, alors qu'au bout elles sont très petites et peu lumineuses. Dans le cas d’une excitation acoustique intense, le bout du tube fermé par la plaque de laiton présente à l'endroit où l'oscillation de pression est maxima un maximum d'in- tensité lumineuse, suivi par d'autres maxima à des : À ; 2 distances de =: Lorsqu'au contraire la source acous- tique est faible, le phénomène en question est parfai- tement renversé. Dans le cas de ce second régime, les flammes sont parfaitement continues, tandis que dans le cas considéré antérieurement elles sont nettement ondulatoires. — M. ©. Krigar-Menzel présente une contribution à la théorie des tubes acoustiques de M. Rubens dont il vient d’être question, donnant une explication au moins qualitative des remarquables phénomènes caractéristiques du « second régime ». L'auteur croit que ce régime est dù au frottement sur les parois du tube de la masse gazeuse oscillant en direction longitudinale, frottement qui empèche la cou- che adhérente à la paroi de prendre la vitesse normale, qui, au contraire, se développe librement dans les couches axiales. Le déplacement des couches gazeuses 96 ACADÉMIES ET SOCIÉTES SAVANTES ainsi produit engendrait dans les régions périphé- riques de la colonne gazeuse des tourbillons poussant le gaz vers la paroi du tube où se produit un excès de pression. En se basant sur cette hypothèse. l'auteur fait quelques calculs approximatifs confirmant sa manière de voir. — M. E. Meyer présente un mémoire sur la perméabilité de l'argon relativement au rayon- nement ultra-violet. L'appareil dont il se sert est iden- tique à celui qu'il vient d'employer dans le cas de l'ozone: c’est le photomètre photo-électrique indiqué par M. H. Kreusler (Annalen der Physik, {. VE, p. 412, 1901). Le tube d'absorption était un tube de verre de 24,2 cm. de longueur et de 3,9 em. de diamètre, fermé à ses extrémités par des plaques de quartz d'environ 4 millimètres d'épaisseur. Après avoir rempli ce tube d'un mélange d’argon et d'azote, l’auteur mesure l'ex- tinction du rayonnement soit avec, soit sans le tube à gaz sur le passage des rayons. Les résultats de M. Meyer font voir que l'argon ne présente pas d'absorption appréciable relativement au rayonnement ultra-violet entre À — 186 puy. et À—300 pu; dans tous les cas, cette absorption, dans les conditions étudiées par l’auteur, ne saurait dépasser 3,2 °/.. L'air atmosphérique ren- fermant environ 1 °/, d'argon, ce dernier ne saurait jouer de rôle sensible dans l'absorption des rayons du Soleil de courte longueur d'onde. Aussi l'hypothèse de M. Hartley, d'après laquelle la substance renfermée dans l'atmosphère et à laquelle on attribue la fin brusque du spectre solaire pour À — 293 py serait identique à l'ar- gon, devra être définitivement rejetée. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 1* Décembre 1904. 10 Scrences Paysiques. — M. E. von Schweïdler com- munique ses mesures sur l'électricité atmosphérique faites sur le Walchensee pendant l'été 1904. La disper- sion et les charges ioniques sont représentées par des valeurs assez concordantes avec celles qui résultent des observations faites sur le Mattsee en 1902 et 1903. _— M. A. Boltzmann a déterminé la dispersion de l’é- lectricité par les électrons de l'air atmosphérique au cours d'un voyage d'Europe en Amérique. Les valeurs obtenues sur mer sont à peu près du même ordre que celles qu'on obtient sur terre. — MM. S. Meyer et E. von Schweidler communiquent leurs recherches sur la variation dans le temps de l'activité des substances radio-actives: ils arrivent à la conclusion que le radio- tellure et le plomb radio-actif sont deux substances identiques. —M. F. Meingast, en condensant l'acide lé- vulique avec l’isobutyraldéhyde en présence de NaOI diluée, a obtenu un acide non saturé (CH*)CH.CH : CH. CO.CH°.CH:.CO®H, donnant par oxydation de l'acide succinique et de l'acide isobutyrique, — M. Zd. H. Skraup a reconnu que, par hydrolyse, la gélatine ne donne pas les acides caséanique, caséinique, oxyami- nosuccinique et dioxyaminosubérique qu'on obtient dans l'hydrolyse de la caséine, mais fournit, par con- tre, en grande quantité, les acides diaminoglutariques isomères qui ne se forment qu'en minime quantité dans l’autre cas. L'auteur a obtenu, en outre, un acide nouveau C:#H?Az°0t°. — M. R. Kremann communique le diagramme de fusion des mélanges d’anthracène et d'acide picrique. — Le même auteur montre que la saponification des éthers en solution alcoolique est aussi une réaction complète, quoique environ mille fois plus lente qu'en solution aqueuse. La saponifica- tion dans les alcools supérieurs à faible constante dié- lectrique et haut frottement interne a lieu plus rapide- ment. — M. F. von Hemmelmayr a constaté que l'acide mononitrorésorcylique (nitro-3:5-dioxy-2:4-ben- zènecarbonique), obtenu par nitration de l'acide f-ré- soreylique, fournit, quand il est soumis à a nitration ultérieure, l'acide dinitrorésorcylique, donnant par ébullition avec l’eau la dinitrorésorcine., — M. H. Ott a reconnu que les bases de Schiff, quelles que soient les aldéhydes et bases aromatiques dont elles provien= nent, perdent, sous l’action de la phénylhydrazine ow de ses dérivés à la température ordinaire, le reste ani= line et forment les hydrazones correspondantes. — M. A. Brezina montre que, dans le fer météorique de Narrabura (Australie), les lamelles dodécaédriques de schreibersite forment le constituant dominant du tissu; il en est de mème de plusieurs autres fers. 20 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Neumann a exa- miné un certain nombre de figures en argile et de vases anthropomorphiques trouvés dans les tombeaux des Incas au Pérou. Ces objets portent des représenta- tions de pertes de substance, principalement au nez et à la lèvre supérieure. Celles-ci ne peuvent être attri- buées qu'à la syphilis, et l’auteur estime que l'existence précolombienne de cette affection dans le Nouveau= Monde ne saurait être mise en doute. Séance du 9 Décembre 190%. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. K. Przibram a Cal- culé une formule pour la longueur de la décharge ramifiée, qu'il a vérifiée, au moins qualitativement, par les résultats de ses essais. — M. A. Boltzmann pré sente quelques appareils de cours pour la démonstra= tion des ondes stationnaires et interférentes, 20 SCIENCES NATURELLES. — M. N. Albanese : Un nou- veau cas d’endotropisme du tube pollinique et déve= loppement anormal du sac embryonnaire chez le Sibhbhaldia procumbens L. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 24 Décembre 1904. 1° ScrENGES MATHÉMATIQUES. — M. W. Kapteyn : Sur une série de fonctions de Bessel. I s'agit de la série: 2 x 1) Len +1 (a) fon +1(x) ; n = l'auteur en exprime la somme dans la forme : Six) + (x +a)] œ (8 +2 [Pasta 8) —1(x + a 6) Déductions d’autres résultats analogues. — M. P. H: Schoute : Les théorèmes de Guldin dans espace poly= dimensional. Dans l'espace d'opération E, à a dimen= sions, on imagine un expace axial E,(®, et dans un espace E2+1 contenant E,( et situé en E, une partie limitée L à p1 dimensions, n'ayantpas un seul point en commun avec E,@. Si L tourne en E, autour de E,®, un point quelconque P de L décrit un espace sphérique situé dans l'espace E,_, normal à E,( et passant par P; si Q est la projection de P sur E,(, cet espace sphérique à centre Q et à rayon PQ forme e E,_, le lieu des points situés à une distance PQ de Q: L'auteur s'occupe de la question suivante : « Commen détermine-t-on le volume et la surface de la figure de révolution engendrée par la rotation de L autour de E,@°? » Application au cas où L est un segment d'es pace sphérique et aux tores polydimensionaux. M. J. A. C. Oudemans présente, au nom de la Commis sion gouvernementale de Géodésie : Sur la détermis nation des azimuts et des latitudes, par les ingénieurs A. Pannekoek e/ R. Posthumus Meyes, de quelques: lieux des Pays-Bas.— Ensuite M. Oudemans présente au nom de M. S. Blok: La jonction du réseau trian gulaire du premier ordre de Sumatra méridional à celui de la côte occidentale de Sumatra. hHTY,;>->->>DDD D SH_D_OOO———————————— Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE No 3 15 FÉVRIER 1905 Revue générale L cienc pures et appliquées ++ res Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Nécrologie Paul Tannery. — Paul Tannery est né à Mantes, le 20 décembre 1843. 11 à fait ses études au Lycée du Mans, à partir de la quatrième, puis au Lycée de Caen, où M. Lachelier contribua certainement à lui inspirer le goût de la Philosophie. Il entra en 1861 à l'École Polytechnique, n'ayant encore que dix-sept ans; il en sortit dans le corps des ingénieurs des Manufacturés de l'Etat. … Il était, vers cette époque, assez préoccupé de la pédagogie des Mathématiques, sur laquelle il n'a rien publié : on à retrouvé dans ses papiers tout un cours de Mathématiques, qui doit remonter à l’année 1864 ou 1865, où ses tendances à philosopher, son indifférence “pour les habitudes reçues, son goût pour les idées générales, se manifestent nettement‘. C'est à cette époque aussi qu'il se mit à étudier le Cours de Philosophie positive d'Auguste Comte: cette étude à eu, sur la direction de ses travaux, une “influence décisive. Il répétait volontiers qu'il s'était mis à étudier l'histoire des sciences afin de réaliser une partie de la pensée d’Auguste Comte ; personne peut-être ne s'est mieux assimilé cette pensée, qu'il connaissait à fond; mais il avait l'esprit trop libre pour Saffilier à la secte de ceux qui prétendent observer les “rites de la religion positive, ou pour se mettre à la suite “de quelque hérésiarque du positivisme. Il se regardait, Cependant, comme un disciple spirituel du maître et affimmait parfois, non sans une pointe de paradoxe, quil était le dernier tenant de la doctrine des trois élats. - Successivement élève-ingénieur à l'Ecole d’applica- ton des Tabacs, sous-ingénieur de la Manufacture des Tabacs de Lille, puis sous-chef du Bureau des Manu- factures de l'Etat au Ministère des finances, il était à Paris au moment du siège : il commanda, comme capi- EE ne À ! Dans la préface de ses Notions de Mathématiques, auxquelles Paul Tannery a collaboré pour la partie histo- tique, M. Jules Tannery a fait allusion à cette période de la Mie de son frère : il se rappelle très bien avoir eu ce cours entre les mains en 1865 et en avoir tiré grand parti. L REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, taine, la 2° batterie à pied du corps franc d'artillerie (service des mitrailleuses). Il garda toute sa vie le goût des choses militaires; en 1894, il fut nommé lieutenant- colonel d'artillerie dans l’armée territoriale. Après la Commune, il alla à Bergerac, pour diriger, dans la région, la construction des magasins de tabacs en feuilles : il y tomba gravement malade; la conva- lescence fut longue; il en occupa les loisirs en se perfectionnant Gans l'étude du latin et du grec, où sa maîtrise devint bientôt complète. Au reste, il n'avait jamais négligé cette étude, bien qu'il ait été élevé sous ‘cette bifurcation, dont on a dit tant de mal avant de la rétablir. Dans les années précédentes, il avait appris l'hébreu : on a retrouvé dans ses papiers la traduction d'une bonne partie de la Bible. A partir de ce moment, il fait deux parts dans sa vie : Il consacre ses journées à son métier, qu'il aimait beaucoup. Ingénieur à Bordeaux, au Havre, au Service de l'expertise, directeur à Tonneins, à Bordeaux, chef de bureau au Ministère, directeur à Pantin (1894), il sut partout se faire estimer et aimer du personnel ouvrier, qui appréciait sa droiture, sa bonté, sa facon de concilier les intérêts opposés. Il donne ses soirées à l'étude. C’est entre huit heures du soir et une heure du matin, à côté d’une femme qui a vécu de lui et pour lui, qu'il a accumulé tant de travaux si profonds et si divers. Ces heures-là ont été heureuses et fécondes. Sa production, depuis 1876 jusqu'à sa mort, est vrai- ment extraordinaire. La plupart de ses recherches concernent l’histoire des Sciences et de la Philoso- phie pendant l'Antiquité, le Moyen-Age, le xvi° et le xvire siècles. Mais que de points de détail il a dû élu- cider, sur les sujets les plus différents, que d'idées il a su éclairer de la vraie lumière du passé, grâce à une connaissance approfondie de ce passé, à un travail et à une patience inlassables, à une conscience scrupu- leuse, à une mémoire extraordinaire par son étendue et sa sûreté, à une habitude de ne se fier qu'à ce qu'il avait vu lui-même, à une liberté de jugement que ne troublaient jamais les opinions recues, et qu'il devait peut-être en partie à son éducation scientifique, si différente de celle qu'ont reçue la plupart des érudits! Les innombrables notes qu'il a laissées font voir 3 98 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE à nu, pour ce qui regarde l'histoire des Mathématiques, sa façon de travailler; il s’efforçait vraiment de repasser par les états de pensée de ceux dont il étudiait les écrits, de raisonner et de calculer comme eux. Il fut l’un des premiers, en France, à appliquer à l'étude de la Philosophie ancienne une méthode à la fois historique et concrète. Jusque-là, l'histoire de la Philosophie consistait à dérouler une sorte d'enchaine- ment métaphysique des systèmes, à introduire dans la série chronologique la nécessité d’une déduction pure- ment conceptuelle. Le grand ouvrage de Zeller, qui dominait alors tout cet ordre d'études, n’était pas autre chose, avec tout l'appareil érudit et savant quille fon- dait, qu'un immense système d'interprétation construc- tive. Il s'agissait, à présent, d'atteindre, sous ce décor, la réalité historique, de saisir les systèmes philoso- phiques, les systèmes scientifiques, les parties les plus fragmentaires de la pensée et de la croyance d'une époque, dans leur racine réelle, de les voir naitre des conditions d'existence de l'époque, cadres sociaux, coutume, tradition, technique, vie pratique, etc., de restituer les doctrines d’une époque dans la vérité de leur sens historique, de leur attribuer, non pas unique- ment la valeur que ces doctrines ont pour nous et pour l'histoire de la pensée, mais la valeur exacte qu'elles possédaient pour les hommes qui les créaient, qui y croyaient, qui en vivaient. Cette dislocation des constructions traditionnelles où on logeait et où l'on adorait une antiquité de conven- tion, cet effort pour voir dans les penseurs de l’Anti quité, à travers la légende, des hommes réels, obéis- sant aux nécessités physiques et morales de leur temps, et travaillant pour les besoins moraux et intellectuels des hommes de leur temps, ce vigoureux essai d’appli- cation d'une méthode réaliste et vraiment historique furent menés très énergiquement en Allemagne par quelques hommes qui s'insurgèrent contre l'autorité de Zeller et des systèmes analogues au sien, surtout par Teichmüller. Paul Tannery donna, de son côté, et d'une manière indépendante, une impulsion analogue à ces études : ses premiers travaux sur les doctrines mathématiques de Platon, qui parurent dans les pre- miers numéros de la Revue philosophique, datent d’un moment où il ne connaissait pas encore les travaux de Teichmäüller, qu’ensuite il fit connaître en France et qu'il fortifia de ses propres découvertes. Une partie seulement deses monographies historiques et critiques passa dans son volume Pour l’histoire de la science hellène. Les études historiques ne furent qu'une partie de son activité philosophique. Il semble qu'il ait eu de très bonne heure la préoccupation d’une théorie philo- sophique de la connaissance mathématique, préoccu- pation qui se mêlait à cette recherche de la meilleure manière d'enseigner dont on a parlé plus haut. A une époque (1879) où ces études n'existaient pas encore en France, et où peu d'hommes possédaient à la fois des connaissances philosophiques et la science mathéma- tique nécessaires, il écrivait déjà, dans la Revue phrlo- sophique, à propos des livres de Schmitz-Dumont, des articles qui étaient une grande nouveauté en France. Il ne cessa de porter sur ces questions un effort de plus en plus conscient et lucide. Il y apporta les mêmes habitudes et les mêmes exigences d'esprit que dans ses études historiques : le souci de la réalité psychologique, des opérations vivantes dont les notions mathéma- tiques sont le résidu, le souci de l'explication véri- table, de l'explication réaliste et concrète. Il n’est pas temps de dresser la liste complète de ses publications, qui devra être revisée par des savants très divers : ceux-ci seront assurément heureux d'honorer la mémoire de l'ami qu'ils ont perdu, et dont les con- naissances, par leur étendue, causaient d'autant plus d'admiration que chacun savait, pour le domaine par- ticulier qu'il cultivait lui-même, combien elles étaient sûres et profondes. Nous nous contenterons d'indiquer ici les princi- paux recueils où sont répandus ses articles, les livré publiés à part, les éditions savantes qu'il a publiées 0 auxquelles il a collaboré. Les articles sont ou des articles originaux ou dé comptes rendus; mais on aurait peut-être tort de di tinguer les uns des autres; s'il rendait compte d'u livre de science ou d'histoire, Paul Tannery profitai très souvent de l'occasion qui lui était offerte pou exposer ses vues personnelles, soit sur le sujet qu'avai traité l’auteur, soit sur quelque sujet connexe. Le premier article qu'il a publié est, croyons-nous « le nombre nuptial dans Platon »; ila paru dans | Revue philosophique en 1876; une « Note sur le système astronomique d'Eudoxe », publiée dans les Mémoire de la Société des Sciences physiques et naturelles d@ Bordeaux, est de la même date; on relève, dans le BuR letin des Sciences mathématiques, un article intitul « À quelle époque vivait Diophante ? » qui est de 1879: Déjà, dans ces courtes Notes, on reconnait cette ingé= niosité, cette sagacité, cette süreté dans la critiques que l'on devait admirer dans toute son œuvre : ces, quelques pages ont, de suite, vivement frappé les con= naisseurs, plus nombreux à l'étranger, faut-il dire; que dans notre pays. ; A partir de ce moment, les Notes, les analyses, les Mémoires se multiplient’. Nous évaluons à peu près à quatre cents les articles publiés dans les divers re= cueils cités en note et nous croyons être plutôt au- dessous de la vérité. - Voici maintenant les titres des ouvrages séparés : SA Pour l'histoire de la science hellène (de Thalès à Empé- docle). Alcan, 1881. La Géométrie grecque ; comment son histoire nous est parvenue et ce que nous en savons; essai critique. Première partie : Histoire générale de la Géométrie élémentaire. Gau- thier-Villars, 1887. Recherches sur l'histoire de l'Astronomie ancienne. Gau- thier-Villars, 1893. : La correspondance de Descartes dans les inédits du fonds Libri, étudiée pour l'histoire des Mathématiques. Gauthier- Villars, 1893. Diophanti alexandrin: opera omnia (texte et traduction latine, commentaires anciens etc.), t. I et II. Teubner, 1893- 1895. Œuvre de Fermat (en collaboration avec M. Ch. Henry), t. 1, II, II. Gauthier-Villars, 1891, 1894, 1896. Œuvres de Descartes (en collaboration avec M. Ch. Adam), Le Cerf, t. I, 2, VI: 4897, …., 1903. Il ne faut oublier ni les chapitres sur l'Histoire des sciences publiées dans l'Histoire générale de MM. La= visse et Rambaud, ni le volume (A. Colin) qui résume les travaux de la 5° section du Congrès international d'Histoire tenu à Paris en 4900, ni les notions histori- ques ajoutées aux Notions de Mathématiques de M. Jules Tannery (Delagrave, 1903), ni les notes histo- riques très nombreuses ajoutées au premier article de l'édition francaise de l'Encyclopédie mathématique. Beaucoup de travaux restent interrompus : Un qua- ————————————_———_—p—p—Z2ZaZEEaaEaaaZEZEZ--Z 1 On les trouvera dans la Revue philosophique, dans le Bulletin des Sciences mathématiques, dans les Mémoires de la Société des Sciences physiques et naturelles de Bordeaux, dans les Annales de la Faculté des Lettres de Bordeaux, danss l'Archiv für Geschichte der Philosophie, dans la Revue archéologique, dans la Bibliotheca mathemalica, dans la, Revue de Métaphysique et de Morale, dans la Revue critique; dans la Zeitschrift für Mathematik und Physik, dans la Revue de Philologie, dans la Revue de Philosophre, dans las Revue des études grecques, dans les Notices el extraits des manuscrits de l'Académie des Inscriptions et Belles Lettres, dans les Annales de Philosophie chrétienne, dans les Ar= chives des Missions, dans la Revue de synthèse historiques dans le Journal des Savants, dans la Grande Encyclopédies Les lecteurs de la Revue n'ont pas oublié le bel articles sur Galilée et les principes de la Dynamique. { 3 Un volume analogue, relatif au récent Congrès de Genève, (Philosophie), est tout prèt. 4 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 99 trième volume devait s'ajouter aux œuvres de Fermat, contenant de nombreuses pièces inédites, extrêmement intéressantes pour l'histoire des idées à cette époque. Paul Tannery regardait ce volume comme fait : les documents étaient réunis, ils étaient classés dans son esprit, il savait comment les mettre en œuvre; mais un autre que lui ne pourra, sans beaucoup de travail, tirer parti de ces documents. En tout cas, les trois volumes parus constituent le monument auquel Fermat avait droit. La publication des œuvres de Descartes est {rès avan- cée; M. Ch. Adam, par cela mème qu'il avait longtemps travaillé avec Paul Tannery, était devenu un de ses amis les plus chauds : il mettra assurément une grande iété à tirer des notes manuscrites qu'a laissées son collaborateur tout ce qu'elles contiennent. On peut compter que l'édition nationale des œuvres de Descartes sera menée à bonne fin. Quelques textes anciens paraissent prêts pour l'im- pression : la maison Teubner à déjà offert de s’en charger. Paul Tannery laisse ez de savants amis pour que ce qu'il peut rester à faire soit fait parfaite- ment. Contentons-nous de signaler une traduction com- plète d'Euclide. Paul Tannery, malgré les sollicitations de ses amis, s'était longtemps refusé à publier un livre d'ensemble, Lun livre élémentaire dans le vrai sens du mot; il s’y était décidé depuis un an et avait promis ce livre à la maison Armand Colin. C’est par excès de scrupules quil ne s'était pas mis plus tôt à cette tâche, qui, en réalité, l’attirait et le passionnait. Il allait sortir de ces questions particulières qui n'avaient qu'en apparence absorbé son activité scientifique : il était de ceux qui pensent que les faits ne valent que par leur enchaîne- ment, mais qu'avant d'essayer de les réunir, de les éclairer les uns par les autres, il faut les connaitre à fond, être assuré de sa propre méthode et de son pro- pre fussent par le long usage qu'on a fait de l’une et de l’autre, par l'unanime approbation de ceux qui savent. Jusqu'où allait cette approbation, il l'avait appris par les témoignages qu'il avait recueillis aux irécents Congrès de Rome, de Heidelberg, de Genève. Il pouvait, doublement sûr de lui, développer, en toute confiance, les idées générales qu'il avait müries lente- “ment. Il se réjouissait de ce travail, qui s’'accomplissait Jour par jour dans sa pensée; il avait trouvé un titre, un peu ambitieux, qui amusait sa modestie. Cela devait s'appeler : « Discours sur l'Histoire générale des sciences ». Le plan, qui était grandiose, n’a été réalisé que dans Son esprit et il ne reste que deux ou trois chapitres de ce Discours. Quand se retrouvera-t-il un homme pour essayer de l'écrire? Paul Tannery était connu et admiré de tous les Savants étrangers; en France, il était apprécié à sa Valeur par ceux dont le jugement importe; on ne peut Sattendre à ce que des travaux comme les siens fassent connaitre leur auteur à la foule, et même aux minis- tres; on ne peut demander, à celui qui accumule de pareils travaux, de cultiver ces relations qui procurent une notoriété temporaire. Cependant, la part de gloire à laquelle il avait droit lui venait : le Collège de France, MAcadémie des Sciences l'avaient désigné en première ligne pour occuper cette chaire d'Histoire générale des Sciences que l’on avait créée pour M. Pierre Laffitte : ses travaux, la doctrine mème qui les avait inspirés Semblaient devoir l'y mener naturellement. La porte de cette maison, où cependant il avait enseigné pen- dant cinq ans (1892-1896), dans la chaire de Philosophie grecque et latine, comme remplaçant de M. Ch. Lévé- que, lui fut fermée. 11 essaya de se consoler en préparant ce livre qui dévait contenir la substance de ce qu'il comptait ensei- £ner ; il était plein de vie et d'activité pendant les va- tances, il tomba malade au commencement d'octobre, il est mort le 27 novembre 1904. $ 2. — Astronomie La quadrature mécanique des taches so- laires. — La relation très étroite qui existe entre les modifications de la surface du Soleil et les traits généraux de la Météorologie terrestre fait prendre une importance de plus en plus considérable à la statis- tique des taches solaires et à la détermination de leur étendue. Aussi beaucoup d’observatoires ont-ils organisé un service journalier d'héliophotographie; les épreuves obtenues sont mesurées et l'aire des taches se déduit de ces mesures au moyen de formules de correction ayant pour but de tenir compte de la déformation causée par la perspective. Lorsque la tache considérée présente une grande étendue dans le sens du rayon du disque solaire, on la divise en zones concentriques qui recoivent séparément leur correction. Il y à là un travail long, pénible et minutieux, surtout si l’on veut obtenir quelque précision, et seuls les observaloires qui ont les ressources suffisantes pour entretenir un bureau de calculateurs peuvent se livrer avec fruit à ce genre de recherches. Il y a donc un réel intérêt à chercher des méthodes de réduction à la fois plus expéditives et au moins aussi précises, et, dans cel ordre d'idées, il y a lieu de mentionner celle qui fut proposée par M. Em. Touchet*. M. H. Chrétien, l'infatigable astronome de l'Observa- toire Farman, a pensé, de son côté, que l’on pourrait peut-être employer avec avantage les appareils connus sous les noms de planimètres et d'intégrateurs, et qui sont d’un usage courant dans les bureaux d'ingénieurs, où ils rendent de très grands services. Pour que ces appareils soient réellement avantageux dans le cas qui nous intéresse, il faut trouver un dispositif effectuant automatiquement la correction de perspective. L'auteur s’est donc posé, en résumé, le problème suivant : Une tache solaire étant donnée par sa projection orthographique, effectuer sur la projection de son contour (C) une transformation algébrique par rayons vecteurs d’où se déduise un contour plan (F) ayant même aire que la surface sphérique occupée par la tache, — énoncé qui contient des Conditions, non né- cessaires d'ailleurs, mais propres à particulariser nettement la solution. Il existe de nombreuses transformations susceptibles de conserver les aires, celle de Lorgna étant une des plus simples; M. H. Chrétien indique de son côté? une solution qui consiste en un système exclusivement articulé, et qui est intimement liée au problème de la bissection mécanique de l'angle, problème qui peut être résolu par le réverseur de Kempe. Il suffit, dès lors, de fixer le point de l'appareil décri- vant (F) au style d’un planimètre d'Amsler, par exemple, et de contourner les taches de la photogra- phie solaire à mesurer pour avoir immédiatement sur un index la valeur de la surface sphérique tachée. On peut contourner plusieurs fois chaque tache et augmenter ainsi la précision par le jeu des moyennes. Entin, l'emploi auxiliaire d'un pantographe permettra d'adapter l'appareil à des disques solaires de rayons quelconques. Tel est l'essentiel de ce que M. H. Chrétien a commu- niqué au congrès d'Angers de l'Association Française, et le résultat en est fort important; car une des diffi- cultés les plus grosses, presque insurmontable parfois,de l’Astronomie actuelle réside dans les réductions,calculs, et besognes matérielles de toutes sortes, indispensables avant de pouvoir dégager quelque résultat. Il est donc désirable que d’habiles praticiens comme M. H. Chré- tien puissent défricher les routes d’une manière aussi élégante, et préparer ainsi les moyennes dont on peut attendre des résultats de la plus haute importance. 1 Bulletin de la Société Astron. de France, juin 1903, 2 Congrès de l’Assoc. française, 1904, 100 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $S 3. — Art de l’Ingénieur La transformation des wagons àmarchan- dises. — Comme l’a signalé M. G. Richard à l'une des dernières séances de la Société d'Encouragement, il se dessine, en ce moment, sur nos chemins de fer, un mouvement qui ne fera sans doute que s'actentuer en faveur de l'emploi de wagons à marchandises de plus en plus grands. Les raisons de cet emploi sont nom- breuses : la principale estla diminution du poids mort, de sorte que le remplacement des wagons de {0 tonnes, par exemple, par des wagons de 40 tonñes, supposés tous remplis, fait passer la charge forte ou non payante de 38 à 25 °/, environ du poids total remorqué. En outre, on peut augmenter considérablement la charge par mètre de longueur du train; c'est ainsi qu'un wagon en acier de 40 tonnes 6st moitié moins long que quatre wagons de 10 tonnes et n'occupe en longueur qué 42 °/, de celle de huit wagons de 5 tonnes. Le nombre des essieux est aussi considéra- blement réduit, car le wagon de 40 tonnes ne porte que sur deux bogies à deux essiéux chacun. Il y à done un grand intérêt à l'emploi dé ces grands wagons chaque fois que le trafic en permet une utilisation cou- rante. Ces grands wagons, très usités depuis longtemps aux Etats-Unis, sont déjà fort répandus en Angleterre, principalement pour les trains miniers. Dans leur construction, il y a lieu de signaler l'emploi de plus en plus fréquent des tôles et poûtres en acier pressé d’après les procédés Fox et autres analogues, el aussi l'adoption fréquente des attelages centraux, qui faci- litent les passages en courbe et simplifient les ma- nœuvres. Les nouvelles ‘machines frigorifiques à affinité. — La Revue à püblié en Chronique, dans le n° du 45 janvier, une Nole sur les Nouvelles ma- chines frigoriliques à affihité. Il est dit, dans cet article, « que le rendement de ces nouvelles machines dépasse facilement de 30 ‘/, celui des meilleures ma- chines de tout autre système connues jusqu'ici ». M. Desvignes, ingénieuf-constructeur, nous a écrit pour meltre en doute la réalité et le résultat des ex- périences effectuées. Nous avons, en conséquence, demandé des explièa- tions à MM. Hignette el Cie, auteurs de la Note non signée, en leur faisant connaitre les dires de leur contradicteur. MM. Hignette et Cif nous ont répondu en nous demandant de conserver à leurs observations un ca- ractère « confidentiel ». Ils ne veulent pas engager de « polémique personnelle », oubliant qu'ils ont eux- mêmes ouvert la discussion. La /evue, dans ces conditions, ne peut qu'exprimer à ses lecteurs tous ses regrets d’avoir, confiante en MM. Hignette et Cie, inséré leur communication. Louis Olivier. $ 4. — Physique Photographie en couleurs par la méthode Lippmann. — Quand on photographie’ à la fois sur une même plaque deux spectres identiques, parallèles mais inverses, et se recouvrant partiellement sur toute leur longueur, ou deux spectres croisés ayant une partie commune, l'épreuve, observée normalement par réflexion en lumière blanche et par le côté verre, montre des franges noires dont M. Pfaundler donne l'explication suivante! Dans le cas de spectres inverses, par exemple, l'interférence des deux systèmes d'ondes stationnaires dans la couche de gélatine donne lieu à des ventres et à des nœuds secondaires, disposés à peu près sur des nappes d'hyperboloïdes asympto- 1 Drude's An». der Physik, t. XV, p. 371. ‘explication. L'existence de ces franges montre qu'il tiques à un plan de symétrie perpendiculaire à la plaqu et passant par la droite qui correspond, dans les de spectres, à une même radiation (440 y à peu près pol des spectres normaux); les franges ne seraient que projection, sur la surface de la plaque, de la portia sensiblement plane ou peu courbée des nappes d'hypet boloïdes; le petitnombre,l'élargissementet l’atténuatia graduelle de ces franges, qui arrivent rapidement à s€ fondre en une sorte de voile, vient à l'appui de cett a toute une série de mélanges de couleurs qui, loi d'apparaître en valeur correcte sur la plaque, se neu tralisent grâce à l'intercalation, entre les maxima et minima dus à chaque onde isolée, de ces maxima € minima secondaires dus à leur superposition. Le pro cédé Lippmann n'apporterait donc pas une solutio complète du problème dela photographie en couleurs les succès obtenus par d'habiles opérateurs seraienl dus soit à l'emploi de sujets à couleurs presque homos gènes (perroquets, vases peints), soit à une telle diversité et une telle répartition des mélanges de couleurs qui l'extinction ne serait nulle part totale, mais répandre sur l'image un voile général; ce serait le cas pour les paysages, qui, en général, donnent des épreuves ternes! e $ 5. — Électricité industrielle Nouvelle lampe à vapeur de mercure l'Exposition de Saint-Louis. — La Compagnie Westinghouse à exposé à Saint-Louis des lampes vapeur de mercure dont l'allumage se fait, soit méce niquement en inelinant la lampe, soit électriqueme en y provoquant une décharge à haute tension. La G neral Electric C°, sans faire, comme sa rivale, un! large place aux lampes à vapeur de mercure, Een eXpos sait, du moins, un intéressant procédé d'allumage. BE tube de la lampe est vertical, et n’a nullement besoin d'être incliné. Les électrodes y aboutissent aux deu extrémités et l’électrode supérieure se continue à l'inté rieur du tube par un mince filament de charbon, sup porté de distance en distance par de petites attaches en verre soudées à l'enveloppe de la lampe. En regard de l'extrémité inférieure du filament de charbon est placé un godet à fer doux, dont la cavité supérieure est remplie de mercure. Il est monté dé manière à pouvoir occuper, suivant la verticale, dew positions distantes d'une dizaine de millimètres : a première, à la partie supérieure, sous l'action de pression de mercure du réservoir inférieur, la seconde à la partie inférieure, sous l’action d'un petit électro aimant en série avec la lampe. Dans la première position, le mercure et la petit armature de fer doux mettent en circuit le filament d charbon. Mais l'électro-aimant, étant ainsi en cireui attire l'armature de fer doux dans sa position inférieux et provoque, entre l'extrémité inférieure du charbone le mercure, une étincelle suffisante pour amorcer lampe. Un modèle de lampe est présenté nu pour permetin l'inspection du dispositif de mise en marche ; un autr modèle est présenté sous la forme pratique que lu donnée la General Electrie C9, et qui a valu à cett lampe le nom de lampe «orthochrome ». Ce nom estd à la restitution des rayons rouges, dont la lampe à va peur de mercure est complètement privée, par de lampes à incandescence réunies en faisceau autour tube de mercure. Le tout est enveloppé d’un globe hole phane, dont on reconnaît les excellentes qualités di fusantes. $ 6. — Zoologie Valeur de l'homochromie comme moye de dérense. — On à remarqué depuis longtemp qu'un grand nombre d'animaux ont des teintes quiss rapprochent plus ou moins de celles du milieu qu'il habitent ordinairement, de telle sorte qu'au repos sont peu ou point visibles sur leur substratum : tant # ïÿl n'y a qu'une ressemblance générale de couleur (homochromie) ; tantôt, en plus de la teinte générale, de petits accidents de surface et de coloris du support Sont copiés fidèlement (homochromie mimétique, ou éopiante), comme dans les cas célèbres des Aallima, Phlæa, chenille d'Urapteryx, etc. Tout naturellement, on à attribué à l'homochromie un effet protecteur vis-à-vis des carnassiers qui chassent leur proie à la vue, comme la plupart des Vertébrés et les Céphalo- podes; mais, si séduisante, si vraisemblable que soit cette interprétation, il est nécessaire qu'elle reçoive une sanction expérimentale ; ou, pour parler plus cor- rectement, l'expérience seule peut montrer que tel &as d'homochromie à une valeur défensive, tandis que tel autre n'a pas d'importance à ce point de vue. mAinsi, d'après M. Cuénott, l'homochromie parfaite de Meertaines Poris avec les Eponges, sur lesquelles vivent ces Mollusques, ne paraît pas avoir d'effet protecteur, @es animaux, qui n'ont à redouter que des attaques de LPoissons, étant très suffisamment défendus par leur mode de vie obseuricole, leur adhérence au substratum, résistance des téguments et leur peu de comestibilité ; I cas des Lloris serait un exemple d’Lomochromie utricrale, ces animaux prenant fortuitement, par “absorption de la matière colorante des Eponges, la mème teinte que leur support. Les Doris ne seraient “pas homochromes avec les Eponges qu'elles n'en tourraient ni plus ni moins de dangers; c'est une par- Mticularité sans utilité. F Par contre, M. P. di Cesnola® vient de réaliser avec des Mantis religiosa une expérience très ingénieuse, qui montre l'énorme importance pour cette espèce de la coloration homochromique. On sait que les Mantes présentent deux formes différentes, une verte et une brune ; il paraît qu'en [talie, la forme verte, assez pares- seuse, est cantonnée dans l'herbe verte, tandis que la brune, plus active, affectionne plutôt les plantes roussies par le soleil. Cesnola recueille 410 Mantes, 45 vertes et 65 brunes; chaque individu est lié par un fil de soie à une plante, le fil s'attachant d'autre part au thorax de insecte. Les 45 Mantes vertes sont placées, les unes (20) dans de l'herbe verte, les autres (25) dans une “place où l'herbe est brülée et roussie. Les 65 Mantes brunes sont disposées de même : 20 sont liées à des Plantes roussies dans un endroit aride; les autres à des plantes vertes dans un pré vert. » L'observation a duré dix-sept jours : au bout de ce temps, on retrouve bien vivantes les 40 Mantes vertes et brunes qui avaient été placées sur un substratum homo- chrome, tandis que les autres, bien visibles sur le fond non homochrome, ont presque toutes été tuées, en majeure partie par des Oiseaux; en particulier, les Mantes vertes disposées sur des herbes roussies étaient Moutes mortes onze jours après le début de l'expé- | rience. … Ilest difficile d'imaginer une expérience plus démons- trative; à dire vrai, nous trouvons même qu'elle est trop bien réussie, et nous souhaiterions qu'elle fût confirmée par un autre biologiste; il est étonnant que Jes Oiseaux, qui ont une vue si percante, ne distin- “uent pas de gros Insectes comme les Mantes, lorsque celles-ci se trouvent sur un fond approximativement “homochrome. Quoi qu'il en soit, le dispositif imaginé Mpar M. Cesnola est très ingénieux, et tout à fait propre à fournir des résultats démonstratifs. $ 7. — Physiologie . Les fonctions du bulbe. — M. P. Bonnier, se basant sur un certain nombre de remarques d'ordre “1 Contributions à la faune du Bassin d'Arcachon. I. Dondiens (Bull. Stalion biologique d'Arcachon, T° année, 903, p. 4). >? Preliminary note on the protective value of colour in Mantis religiosa (Biometrika, I, 1904, p. 58). CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 101 physiologique et pathologique, à imaginé de considérer le bulbe comme le lieu de réunion d'une série de centres nerveux physiologiques jouant un rôle essen- tiel dans les phénomènes biologiques. Il est certain que le bulbe représente un lieu de passage pour des fibres nerveuses de toutes provenances el de toutes directions, et l’on peut très bien concevoir que des lésions bulbaires puissent déterminer des réactions à distance, et inversement. M. P. Bonnier a dressé une sorte de « carte du bulbe », où figurent les principaux centres administratifs de la vie organique “. Si ces loca- lisations schématiques ne correspondent pas d'une facon certaine à la réalité anatomique, elles ne sont pas moins ingénieuses, commodes pour élablir une certaine classification entre les phénomènes physiolo- giques et pathologiques. A côté de départementsréservés à lavision,àlaudition, l'auteur décrit des centres scoposthéniques, dont l'office est l'exercice du regard, l’orientation des globes ocu- laires, l'accommodation à la lumière et à la distance; des centres statisthéniques, qui régissent la sustenta- tion de la tête et du corps et qui sont reliés à l'appa- reil des centres des attitudes; des centres hypniques, régulateurs du sommeil ; des centres tonostatiques, régulateurs de la tonicité musculaire et des réflexes ; des centres myosthéniques, pour l'appropriation mo- trice et la synergie musculaire, dont les lésions entrai- nent des troubles tels que la myasthénie, les myoclonies, l'ataxie, les convulsions, ete. Les centres augiosthé- niques et cardiosthéniques, les centres pneumosthé- niques, gastrosthéniques, entérosthéniques corres- pondent à la régie des phénomènes circulatoires, respiratoires, digestifs. D'autres centres président à la régulation des phénomènes vasomoteurs, thermiques, trophiques, ete. Des centres manostatiques, ther- mostatiques, hygrostatiques assurent l'équilibre de pression, de température, d'hydratation de l'individu. Les centres euecrasiques commandent les sécrétions internes, et leurs perturbations entraînent les différents états diathésiques et dyscrasiques. Les centres diacri- tiques commandent les sécrélions externes. Enfin, les centres euthymiques ont pour mission de signaler les infractions à l'équilibre physiologique normal des diffé- rents organes. Les avertissements reçus par ces centres se traduisent par des phénomènes angoissants. Il importe de ne pas confondre les phénomènes bul- baires proprements dits, liés à la perturbation de l'un quelconque des centres précités, avec leur représen- tation corticale; par exemple, l'angoisse (phénomène hulbaire) ne doit pas être confondue avec l'anxiété (phénomène cortical). M. P. Bonnier attire également l'attention sur l'in- suffisance de notre vocabulaire pour caractériser les états fonctionnels positifs. Nous avons beaucoup de termes pour désigner les troubles de l'équilibre physio- logique; nous n'en avons guère pour délinir les états physiologiques heureux, le nou-vertige, la non-larm, la non-oppression. Or, il est certain que l'équilibre physiologique peut varier eu plus comme en moins; en opposition à l'oppression, on peutsignaler des crises d'alacrité respiratoire; de mème, à l'anxiété on peut opposer l'euthymie. Les migraineux, les goutteux con- naissent bien ces états d'euphorie excessive qui alter- nent avec les crises douloureuses. En somme, de part et d'autre de l'équilibre fonction- nel normal, qui ne se traduit par rien, il 'aut envisager non seulement les variations négatives, qui corres- pondent à des états pathologiques bien connus, mais aussi des variations positives qui représentent, si l'on peut ainsi parler, des « excès de santé ». Ces dernières ne devraient pas passer inapercues, car elles sont sou- vent le prélude d'une variation en sens inverse; elles ont donc une valeur pronostique à iaquelle le médecin ne doit pas rester indifférent. { Revue neurologique, 15 octobre 1904. 102 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 8. — Sciences médicales Le syndrome de Ganser. — On donne, en Psychiâtrie, le nom de syndrome de Ganser à un état mental qui se caractérise par des réponses absurdes, sans qu'il soit possible de relier ces réponses à un thème délirant. Par exemple, si l'on demande à un malade quel est son nom, quel est le nom des per- sonnes qui sont devant lui, il fait des réponses va- riables et toujours erronées. De même pour les jours, les mois et les années, etc.; de même aussi pour les opérations arithmétiques les plus simples. Les réponses aux mêmes questions sont toujours diffé- rentes et ne sont jamais justes. Il semble que le ma- lade « fasse exprès » de répondre mal; aussi a-t-on songé à la simulation, d'autant plus volontiers que les sujets en question sont souvent sous le coup de pour- suites pénales ou en instance pour obtenir des dom- mages et intérêts à la suite d’un accident. On a souvent rapproché cet état de ceux que l’on observe chez les hystériques, dont on connait la pro- pension singulière à forger des histoires mensongères. M. Soukhanoff (Revue neurologique, 15 septembre 1904) fait ressortir cette similitude et tend à croire que le syndrome de Ganser fait partie des troubles mentaux hystériques. D'autres rapprochent le syndrome de Ganser de ce que l’on observe chez les déments pré- coces. Ce qui est intéressant à relever, c'est que les ma- lades qui présentent cette particularité mentale com- prennent cependant très bien ce qu'on leur dit, obéis- sent exactement à tous les commandements. Mais, dès qu'il s’agit de formuler une réponse à une question, immédiatement surgissent des représentations et des idées mcohérentes, dont quelques-unes semblent même systématiquement contradictoires. Soukhanoff consi- dère le syndrome de Ganser comme un trouble partiel du mécanisme logique supérieur; maisilest certain que le trouble porte sur toute l’activité psychique en géné- ral. ’ M. J. Hey (de Strasbourg) a fait récemment une étude détaillée du syndrome de Ganser, et pense également qu'il s’agit d'une manifestation hystérique, où domi- nent les hallucinations et les troubles amnésiques. On l'observe également dans la folie circulaire et dans la démence précoce; dans cette dernière affection, il peut être considéré comme une manifestation du négati- visme. Selon M. J. Hey, ce syndrome ne s’observerail pas uniquement chez les sujets soumis aux exper- tises médico-légales consécutives aux crimes, délits ou accidents. La fièvre bilieuse hémoglobinurique dans le ba 184.616. Les 184.616 voix natioualistes ne constituaient donc qu'une minorité. E Avant d'entreprendre de le résoudre, il était nécessaire de bien définir le problème et de montrer d’une manière fisamment précise le but à atteindre. C'est ce dont on parait S'être soucié le moins dans les innombrables écrils i ont été consacrés à ces questions. Faute d'une bonne définition, une infinité d'erreurs ont été commises par les adversaires les plus acharnés, et par les partisans les plus convaincus de la réforme électorale. les hommes les plus éminents, les plus dévoués et les meilleurs de chaque parti. I y à donc deux questions à résoudre : 1° Répar- tition des suffrages représentatifs entre les diffé- rents partis el groupements d'opinion; 2° réparli- tion des sièges attribués à chaque parti entre les différents candidats du groupement. Dans la présente étude, nous ne nous occuperons que de la première de ces questions, celle de la représentation proportionnelle. Je me propose d'examiner les solutions données jusqu'à présent au problème, celles, du moins, qui sont entrées dans le domaine des faits, et de déter- miner les conditions que doit remplir un système de représentation vraiment proportionnelle. Ce fut en 1855 qu'un mathématicien danois. Andræ, qui occupait alors les fonctions de ministre des finances ?, réussit à faire adopter par le Gouver- nement et à faire introduire dans la loi électorale du Danemark des dispositions qui constituent la première application du principe de la représenta- tion proporlionnelle. Dans le système conçu par Andræ, chaque bul- letin d'électeur ne peut être complé qu'à un seu des candidats en présence, quel que soit le nombre des représentants à élire dans la circonscription (et quelle que soit la diversité des revendications sociales et économiques dont les électeurs pour- raient avoir à cœur d'envoyer au Parlement les champions). Mais l'électeur qui veut que $a voix ait de toute façon des chances d'entrer en ligne de compte peut faire figurer sur son bulletin de vote une liste de plusieurs noms, en indiquant en tête celui des candidats qu'il désire voir élire avant tous les autres, et ensuite, par ordre de préférence, ceux auxquels il désire reporter éventuellement son suffrage dans le cas où il ne pourrait être compté utilement au candidat porté en tête du bulletin. Pour chacun des collèges électoraux, le quotient * Je laïsserai d'ailleurs de côté, quel que soit leur intérêt historique, les procédés empiriques et rudimentaires et les expédients qui ont été imaginés dans le but d'assurer sim- plement, dans une mesure plus ou moins grande, mais arbitraire, la représentation des minorités, et je ne m'oc- cuperai que des systèmes destinés à réaliser la représenta- tion proportionnelle. Et, parmi les innombrables systèmes de représentation plus ou moins proportionnelle, je n'exa- minerai que ceux qui ont recu une consécration législative, c'est-à-dire ceux qui ont été el qui, sauf exception, sont encore appliqués. ? Comme Considérant, Andræ avait commencé sa car- rière en qualité d'officier du génie. Envoyé en mission scientifique, il avait séjourné une année en France, à l'é- poque même où Considérant faisait campagne à Paris en faveur de la réforme électorale. En 1843, Andræ fut nommé professeur d'Analyse mathématique et de Mécanique à l'École militaire, et en 1853 membre de l'Académie des Sciences de Copenhague. Il était entré dans la vie politique en 154$, 116 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE obtenu en divisantle nombre des bulletins de vote par le nombre des représentants à élire constitue un mètre électoral qui détermine l'élection de tout candidat qui l'a atteint. Au dépouillement des votes, dès qu'il y a au compte d'un candidat un nombre de suffrages égal à ce quotient électoral, il est proclamé élu. Les bulletins que l’on tire ensuite de l’urne, s'ils portent en tête le nom de ce candidat, sont attribués au candidat non encore élu dont le nom suit immédiatement. Le dépouillement effectué, s'il reste des sièges à réparlir, ils sont altribués aux candidats qui, après lesélus, ontréuni le plus de voix,à condition qu'ils aient obtenu un nombre de suffrages égal au moins à la moitié du quotient électoral. Toute- fois, si par ce moyen l'élection n'est pas encore complète, il est fait un nouveau dépouillement de tous les bulletins, en prenant autant de noms ins- crits en tête de liste qu'il reste de sièges à remplir. L'élection a lieu à la majorité simple des voix ainsi complées. Ainsi done, les derniers sièges, les sièges com- plémentaires, sont attribués à la majorité simple et non plus aux candidals qui ont atteint le quo- tient électoral. Il est possible, dans ces conditions, que les électeurs d'un parti qui ont réparti leurs suffrages sur un trop grand nombre de candidats n'obtiennent aucun représentant, où un nombre de représentants inférieur à celui obtenu par un parti ayant des adhérents en nombre égal ou inférieur. ; C'est là l'inconvénient essentiel du système : il ne permet pas de réaliser la représentation pro- portionnelle. En outre, les opérations du dépouille- ment, tout en étant d'une extrême simplicité, ont l'inconvénient d'être excessivement longues, dès que le nombre des votes à dépouiller devient consi- dérable : elles ne se prêtent guère, en effel, à une grande division du travail, le dépouillement de tous les votes de la circonscription devant se faire dans un bureau central. (De plus, l'élection de tel ou tel candidat peut dépendre des hasards du dépouillement, de l’ordre dans lequel les bulletins sont tirés de l'urne.) Mais le premier de ces incon- vénients, celui qui résulte du mode d'attribution des sièges complémentaires, suffirait à lui seul à faire écarter le système Andræ et les systèmes ana- logues, tels que celui de Thomas Hare’, malgré les 1 L'ouvrage de Hare, intitulé The election of representa- tives, eut un immense retentissement dans les pays de langue anglaise. Le système préconisé par Th. Hare est appliqué, depuis une vingtaine d'années, à Costa Rica et en Tasmanie. Dans différentes associations, il fonctionne avec succès, par exemple dans le Mechanie's Institute de San Francisco (un millier d'électeurs), et dans une importante association suisse, le Grutliverein (plus de 3.000 électeurs). . avantages infiniment grands qu'ils présentent sous certains rapports, sur le système majorilaire et malgré les adhésions enthousiastes et la pro: pagande chaleureuse dont ils ont été l'objet de la part d’esprils tels que Stuart Mill, Lord Ave bury, etc. Le nombre des partisans de ces systèmes tend d’ailleurs à diminuer depuis un certain nombre d'années. Beaucoup de proportionnalistes améri” cains les ont abandonnés pour adopter le principe de la concurrence des listes". Ce principe, sur lequel sont basés toutes les lois de représentation (plus ou moins) proportionnelle en vigueur en Suisse, en Belgique, dans la Répu blique Argentine, etc., consiste à déterminer le « chiffres électoraux » des listes en présence autrement dit les nombres respectifs de suffrages obtenus par les différents partis ou groupements d'opinion, pour faire, en raison de ces chiffres électoraux, la réparlilion des sièges entre les dif= férents parlis qui ont présenté des listes de can= didals au corps électoral. C’est ensuite seulement que l’on répartit les sièges obtenus par le parti entre les différents candidats portés sur la même liste qui se sont partagé les suffrages des électeurs. Ainsi donc, les candidats d’un même parti ont la faculté de mettre en commun les suffrages recus! en nombre inférieur au mètre électoral, ou en excédent en sus de ce nombre, suffrages qu'ils ne pourraient utiliser individuellement, parce qu'ils ne donnent pas droit à un siège. Mais, même en procédant ainsi, il subsistera encore, en général, pour chaque parti, sinon pour chaque candidat, et dans chacune des circonscrip= tions, un excédent de suffrages non utilisé, pour la simple raison que le nombre total des suffrages: réunis par les candidats d’une liste n’est pas, en général, un multiple exact du mètre électoral. Si l'on suppose — sur cette hypothèse sont basés tous les systèmes de représenlalion proportionnelle appliqués jusqu'à ce jour — que le nombre des sièges à répartir dans chaque circonscription doib être exactement fixé d'avance”, il restera don en général, dans chaque circonscription, un ou plus 1? On appelle Ziste l'ensemble des candidats qui représens tent le programme et les tendances d'un parti, d'un groupe ment électoral, dans une circonscription déterminée. Les nombre des candidats d'une liste peut être quelconque. On peut concevoir des listes comportant un nombre de candi dats supérieur à celui des représentants à élire, le soin de choisir entre eux étant laissé aux électeurs. Mais, en fait le nombre des candidats présentés par un parti sera pres® que toujours inférieur au nombre total des représentants à élire. La «liste» d'un groupement électoral peut même se réduire à un seul nom de candidat. ? Soit en raison de la population totale des circonscrip= tions, soit en raison de la population nationale (électeurs et non-électeurs), abstraction faite des étrangers, ou bien en se basant sur le nombre des électeurs inscrits. A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 117 sieurs sièges non répartis correspondants aux excé- dents des différentes listes, el il sera nécessaire de procéder à une réparlition nouvelle pour l'attri- bution des sièges complémentaires non encore répartis. Les différents systèmes qui ont été mis en avant pour réaliser la représentation proportionnelle ne diffèrent qu'en ce qui concerne la répartition des sièges complémentaires. Et cela suffit cependant pour que les résultats soient très différents, même si l’on borne la comparaison aux systèmes seuls ‘qui ont été ou qui sont encore appliqués. On peut S'en rendre comple aisément en parcourant le de Gand, consiste à attribuer les sièges complé- mentaires aux listes de la circonscription qui pré- sentent les plus forts excédents. C'est ce système qui est couramment désigné sous le nom de système suisse — bien que d’autres systèmes faisant des concessions plus ou moins grandes au préjugé majoritaire et donnant des résultals plus ou moins disproportionnels aient élé appliqués dans quelques cautons de la Suisse. — Il est souvent appelé aussi système des plus grands restes (ou excédents), ou des fractions forcées, ou encore système Massau*. Il est appliqué depuis 1876 dans la République Argentine (province de Buenos-Ayres). C'est, depuis Tagceau IL — Résultats donnés par les huit systèmes de répartition. RÉPARTITION DES SUFFRAGES entre Système Massau Système Der * Struye les différents partis ee I 111 Premier exemple : Liste À : 25.000 suffrages. . B : 24.000 ; 9.010 060 9.000 7.000 >.000 rh 19 109 NN © © © D D © = [=] 100.000 suffrages. . Système Mirman RÉPARTITION DES SIÈGES Systèmes dérivant du procédé Hagenbach-Bischotf + 2 VIT Système du c. de Zug Système d'Hondt LA v here RO 19 9 = = Deuxième exemple : Liste À : 57.000 suffrages. . : 13.000 RE 17.000 — 1.000 6 060 5.000 SSONbo B C : DE DE E = 100.000 suffrages. . tableau synoptique que j'ai établi (Tableau I1) pour rendre sensibles, par deux exemples différents, les divergences que présentent les résultats donnés par les huit systèmes que nous allons examiner. Ils supposent l’un et l’autre un collège électoral de 100.000 électeurs ayant 10 représentants à élire (4 représentant pour 10.000 électeurs). Dans le premier exemple, les sept listes en présence, À, B, GC, D,E, F, G,ont respectivement obtenu 25.000, 24.000, 19.000, 10.000, 9.000, 7.000 et 6.000 suf- | frages ; dans le second cas six listes À, B, C, D, E, F ont réuni respectivement 57.000, 13.000, 12.000, 7.000, 6.000 et 5.000 voix. $ 1. — Système des plus grands restes. Ce système, qui fut préconisé en Suisse par l'As- sociation réformiste de Genève, et en Belgique par M. Massau, professeur de Mécanique à l’Université 1892, le système électoral du canton de Genève. Il est également appliqué dans les cantons de Fribourg et du Tessin (élections municipales), en Serbie (constitution du 22 décembre 1888), etc. En France, M. l'abbé Lemire, dépulé, a déposé, en 1896, une proposition de loi ayant pour objet l'application du système génevois aux élections législatives. En appliquant ce système, chacune des listes en présence recoit soit le nombre entier de sièges approchant à moins d'une unité par défaut du nombre (fractionnaire) exactement proportionnel, soit le nombre (entier) de sièges immédiatement supérieur. Cette méthode est d'une grande simplicité. Mais elle présente certains inconvénients qui ont fait RARE RE nee ER 0 | #2 1 Et parfois aussi système du quotient, désignation qui pourrait convenir également à d’autres systèmes, et qui, par conséquent, ne peut guère servir à l'en distinguer. 118 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE l’objet de critiques plus ou moins sérieuses. Je vais les exposer brièvement : 1° Ce système conduit à attribuer des sièges (complémentaires) à des partis qui n’ont pas atteint le quotient électoral dans la circonseription, et qui, par conséquent, n’ont pas droit à un siège. « Soit à répartir 30 sièges, dit M. Mirman', entre deux listes À et B ayant obtenu : A, 2.949 voix et B, 51 voix seulement. Les quotients seront 29,49 et 0,51; 29 sièges sont attribués tout d’abord au parti À; et avec ce système des fractions forcées, parce que la fraction 0,51 est plus grande que la fraction 0,49, on donnerait le dernier siège à la liste B! Elle n'y a certainement pas droit; car si 91 voix suffisent pour obtenir un siège, le parli A pourrait en réclamer près de 60 (puisque 2.949 contient près de 60 fois le nombre 51). » On pourrait répondre à M. Mirman que, si le parti B n'a pas droit à ce trentième siège, parce que 51 voix ne représentent que 51 cenlièmes du mètre électoral qui donne droit à un siège, le parti A, auquel M. Mirman l'attribue, ne peut y avoir droit à plus forte raison, car les 49 voix en excédent ne représentent que les 49 centièmes du mètre électoral. L'objection serait assurément très fondée si l’on admettait qu'aucun excédent inférieur au quotient électoral ne peut donner droit à un siège, quel que soit le parti, fort ou faible, qui l’a obtenu. Il suf- firait de laisser inoccupés les sièges correspondant aux excédents des différents ‘partis, pour réaliser un système répondant à celte condition. Mais, chose curieuse, aucun des innombrables systèmes de représentation proporlionnelle proposés ne comporte cette solution; personne, je crois, n’a jamais préconisé une pareille méthode, qui, malgré de graves inconvénients, serait, en somme, incomparablement plus proportionnelle et moins compliquée que la plupart des systèmes plus ou moins absurdes qui ont été proposés. 2° Le système des plus grands restes peut favo- riser outre mesure un parti qui présenté deux ou plusieurs listes dans une même circonscription, pourvu que les excédents que présentent les listes du parti soient parmi ceux auxquels le système attribue un siège complémentaire. Cet inconvénient est une conséquence immédiate du précédent. Nous verrons, dans le cours de cette étude, dans quelle mesure l’objection est fondée, 3° Dans un collège électoral ayant à nommer un nombre de représentants impair 2 n—+ 1, à raison d'un représentant pour » suffrages, il peut fort 1 Chambre, Doc. parl., session extraordinaire. Séance du 18 décembre 1899. Annexe n° 1292. Proposition de loi ten- dant à assurer la représentation proportionnelle dans les conseils municipaux. =. bien arriver qu'un parti ayant obtenu un nombré de suffrages compris entre C -- :) m et(n+1) c'est-à-dire la majorité absolue, n'obtienne que sièges, c’est-à-dire la minorité des sièges de la cir conscription, si l'excédent n'est pas de ceux qui prennent part à la répartilion des sièges complés mentaires. Ceci est une conséquence forcée de ce fait que le système ne peut donner exactement à chacun des partis le nombre fractionnaire des sièges qui, pro portionnellement, lui revient dans la circonscrip= tion, mais seulement un nombre entier de sièges, se rapprochant à moins d'une unité près du nombre mathématiquement proportionnel. Nous verrons dans cetle étude comment, pou remédier à cet inconvénient, on a subslitué au sys” tème des plus grands restes des méthodes de calcul qui ne donnent même pas aux partis à moins d'une unité près le nombre de sièges qui leur revient proportionnellement dans chaque circonscription: $ 2. — Système Struye. Ce système, qui n’a été appliqué que transitois rement dans les cantons suisses du Tessin et den Neuchâtel, où il a donné de détestables résultats® consiste à attribuer fous les sièges complémentaires à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de: suffrages. Système cent fois pire et plus dangereux: que le système majoritaire, car il conduit biens souvent à donner la majorité des sièges à la mino= rité la plus fortement concentrée. L'application! projetée de ce système monstrueux faillit déchainer en Belgique une révolution, qui ne fut conjurée que par le retrait du projet de loi et la démission! du ministère clérical Vandenpeereboom (1899). $ 3. — Système Mirman. M. Mirman, professeur agrégé de Mathématiques et député de la Marne, a proposé‘ d'attribuer les sièges complémentaires non pas aux listes aya obtenu les plus forts excédents non utilisés, mais aux plus fortes listes de la circonscription : en sorte qu'une liste qui a obtenu la majorité (absoluë ou reialive) obtient en tout cas le premier des sièges complémentaires à répartir, quand bien même elle n'aurait aucun excédent non représenté. | Ce système, de même que le système suisse} attribue à chacune des listes en présence soit nombre (entier) de sièges approchant à moins d'un@ unité près par défaut le nombre (fractionnaire exactement proportionnel, soit le nombre entier dé sièges immédiatement supérieur. Doc. ! Chambre. cembre 1899. Proposition de loi tendant à sentation proportionnelle dans les conseils municipaux. Séance du 18 d assurer la repr parl. Annexe n° 1292. te or A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 119 M. Mirman, qui est un mathématicien distingué, a donné, en annexe à son Rapport, une assez longue démonstration algébrique pour élablir qu'en appli- quant son système, chacune des listes reçoit, à une unité près, le même nombre de sièges que si l’on appliquait le système des plus grands restes. Ce développement algébrique était assurément su- perflu, car il est évident à priori que deux sys- tèmes qui attribuent l’un et l'autre à chaque liste soit le nombre entier de sièges égal, à moins d'une unité près par défaut, au nombre fraclionnaire exactement proportionnel, soit ce nombre entier & sièges augmenté d'une unité, ne peuvent dif- férer dans leurs résultats que d'une unité. é De sa démonstralion, M. Mirman tire cette con- 4 que les électeurs des partis lésés par l'ap- plication de son système auraient la consolation de se dire que l'application du système majoritaire aurait pu donner des résultats pires. Cette conclu- sion ne me semble pas très fondée, et je crois bien que les électeurs ne raisonneront pas ainsi. Si, ‘dans une élection de trois représentants, les élec- teurs se partagent entre les listes de trois partis A, B, C dont l’une recueille 1.001 suffrages, la euxième 1.000 et la troisième 999, les électeurs de ce dernier parti, en vertu du système Mirman, mobtiendront aucun représentant avec 999 suf- outre le siège auquel il a droit parce qu'il a atteint une fois le quotient électoral de 1.000 suffrages — le siège complémentaire à raison d'un suffrage Unique en excédent. Le système majoritaire (qui omporte, en pareil cas, un deuxième tour de Scrutin) n'aurait pu donner de résultat pire pour le parti C. Au contraire, si les partis B et C ont des tendances communes, il v a bien des chances pour qu'une concentration se produise au second tour, assurant l'élection de l’un des candidats du parti C. “ Remarquons, en passant, que, dans cet exemple, le système Mirman aboutil à donner la majorité des s ièges (2 sur 3) à un parti qui n'a recueilli que la minorilé des suffrages (1.001 sur 3.000), chose que e système avait précisément pour but d'éviter. -Le système préconisé par M. Mirman a été intro- duit dans la législation du canton de Neuchâtel par là loi électorale du 22 novembre 1894, remplaçant la loi transitoire du 28 octobre 1891, qui appliquait le système Struye. Les élections faites en vertu de là loi de 1894 ont donné plus d’une fois des résultats absolument disproportionnels. Voici ceux de la &irconscription de Val-de-Travers, lors des élec- tiens an Grand-Conseil de 1895 : 1.010 votes émis. 3 sièges à répartir, Quotient électoral : 1.010 : 3 — 336,6... Liste libérale : 617 suffrages — 2 X 336,6.. + 3,8 Liste radicale : 333 suffrages — 0 X 336.6.. +333 frages, alors que le premier parti obliendra — | En vertu du sytème Mirman, la liste libérale obtint également le troisième siège, et les électeurs radicaux n’eurent aucun représentant. C'est exacte- ment le résultat qu'aurait donné le système majo- ritaire : les choses se passèrent tout comme si les électeurs radicaux avaient donné leurs voix à la liste opposée. Le système Mirman, bien qu'il ne soit pas un des plus mauvais, doit cependant être considéré comme inadmissible. $ 4. — Système zugois. Un système très particulier a été introduit dans la législation électorale du canton de Zug (loi du 1°" septembre 1894) afin d'assurer dans tous les cas la majorité absolue des sièges au parti dont la liste a réuni la majorité absolue des suffrages de la cir- conscription. En vertu de cette loi électorale, quand l'une des listes a réuni la majorité absolue des suffrages, le premier des sièges complémentaires est attribué à cette liste (Lout comme si l'on se pro- posait d'appliquer le système Struye ou le système Mirman); s'il y a d'autres sièges complémentaires à répartir, ils sont attribués successivement aux plus forts excédents, en sorte qu’une lisle qui à obtenu la majorilé absolue des suffrages reçoit géné- ralement un siège complémentaire el souvent même deux de ces sièges, même dans le cas où elle n'aurait aucun excédent de suffrages non repré sentés. Quand aucune des listes n’a obtenu la ma jorité absolue, le système électoral de Zug si confond avec celui des élections génevoises. Le mode d’attribulion des sièges complémentaires introduit dans la législation du canton de Zug par la loi du 1° septembre 1894 donna, dès la première application de cette loi, le 18 novembre 1894, des résultats qui produisirent une tempêle d'indigna- tion parmi les électeurs de la minorité libérale et ouvrière‘. $ 5. — Système d'Hondt. Ce système, adopté à l'unanimité, sur la propo- sition de MM. Hagenbach-Bischoff, professeur de Physique à l'Université de Bäle, et Maurice Vernes, ‘ Deux partis de force presque égale étaient en présence et se partagèrent les suffrages émis, au nombre de 26.581. 11 s'agissait d'élire 7 représentants, ce qui donne 1 représen- tant à raison de 26.881 : 1— 3.840 suffrages. La liste conservatrice réunit 15.482 suffr. — 4 X 3.840 + 122 La liste libérale — 14.399 suffr. —2 X 3.810 + 3.719 26.S81 suffr. —6 X 3.540 + 3.841 Le siège complémentaire fut attribué, en raison des règles du système, à la liste conservatrice, en sorte que cette liste obtint 5 sièges sur 7, alors que la liste libérale, avec 11.399 suffrages sur 26.881, n'obtint que 2 sièges sur 7. Remarquons que le système Struye et le système Mirman auraient donné, pour cette élection, des résultats identiques. 490 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS par le Congrès proportionnaliste d'Anvers (août 1885), a passé jusqu'à présent pour avoir été ima- giné par M. d'Hondt, professeur de Droit civil à l'Université de Gand, qui l’exposa dans deux bro- chures parues en 1882 et 1885, et qui le propagea et le défendit pendant de nombreuses années contre les altaques des adversaires de la réforme électo- rale, et aussi contre les critiques dont ce système fut l'objet de la part de proportionnalistes con- vaincus el de mathématiciens tels que M. Massau, professeur de Mécanique à l'Universilé de Gand. Je me suis aperçu récemment, dans le cours d'une recherche documentaire, que la véritable pater- nilé du système devait être altribuée non pas à M. d'Hondt, mais à François F. Cantagrelt. Dès l’année 1874, Canlagrel proposa, dans une bro- chure?, la méthode de répartition des sièges com- munément attribuée au professeur de l'Univer- silé de Gand, et, vers la fin de sa vie, devenu député de la Seine, il en fit l’objet d'une proposition de loi déposée en novembre 1880*. Je conli- nuerai, Cependant, pour ne pas trop bouleverser les habitudes d'un grand nombre de proportionnalistes de l'Ancien et du Nouveau Monde, à désigner, comme on le fait communément, par le nom de M. d'Hondt, le système de répartition des sièges indiqué dès 1874 et proposé de nouveau en 1880 par Cantagrel. Le système d'Hondt fut introduit dans le code électoral belge par la loi du 30 décembre 1899 *. Il est préconisé en France par la Ziqgue pour la ‘ Un des premiers apôtres de la représentation propor- tionnelle. Il avait fait campagne pour la réforme électorale aux côtés de V. Considérant sous la monarchie de Juillet. Pendant son exil, sous l'Empire, il fut l'initiateur du mou- vement réformiste à Neuchâtel. 2 De l'élection véridique. Le vote au Bulletin de ralliement par F. Cantagrel. Paris (31 mars 1874). # Proposition de ioi concernant les dispositions à intro- duire dans la loi électorale pour que la Chambre des dépu- tés soit la représentation exactement proportionnelle des opinions du corps éleeloral. Chose surprenante, la proposition de Cantagrel a été bien des fois mentionnée dans les écrits innombrables traitant de la réforme électorale (et parfois même reproduite, entiè- rement ou en partie, dans les volumineuses compilations consacrées à la représentation proportionnelle). Et personne n'a paru soupconner que le système de répartition proposé par Cantagrel était tout simplement celui dont l'invention première est invariablement attribuée à M. d'Hondt. À vrai dire, Cantagrel appelle moyenne électorale théo- rique le mètre électoral proportionnel (les proportionnalistes l'appellent d'ordinaire quotient électoral ou chiffre d'élection), et moyenne électorale pratique le mètre électoral diminué qu'il substitue en pratique au mètre électoral proportionnel dans les calculs de répartition. C'est ce dernier nombre que M. d'Hondt et ses adeptes ont appelé chiffre répartiteur ou chiffre diviseur, ou encore, d'une manière tout à fait im- propre, — je ne sais si c'est M. d'Hondt lui-mème qui a mis en avant cette absurdité, — le plus grand commun diviseur. + Je ne parle pas de la loi belge du 12 septembre 1895, relative aux élections communales, qui constitue une appli- cation très partielle (et encore plus partiale) du système d'Hondt. ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE leprésentation proportionnelle. Un projet de lo élaboré par cette Ligue, et déposé sous forme de proposition de loi à la Chambre par MM. L. Milk Charles Benoist, etc., comporte l'application de cé système. Le système d'Hondt consiste essentiellement à substituer, dans chaque circonscription, au nombre répartiteur proporlionnel, c'est-à-dire au quotien SY72 So. 0 électoral 4 (résultant de la division du nombre & des suffrages de la circonscription par le nombre n des sièges à réparlir), un nombre inférieur tel qu'en répartissant les sièges de la circonscrip lion sur la base de ce quotient diminué, ils se trouvent tous répartis, sans laisser de sièges complémentaires à attribuer aux excédents. Remarquons que cela revient à effectuer la répar tition sur la base du quotient électoral propor tionnel, mais en majorant les nombres respectifs de sultrages réunis par les différentes listes de 1 circonscription dans une proportion telle que tous les sièges puissent être répartis entre les listes ains majorées, sans aucune atlribution de sièges com plémentaires aux excédents inférieurs au quotient électoral : il suffit, pour obtenir ce résultat, de substituer, dans le calcul de la répartition, aux nom bres respectifs de suffrages véritablement obtenus par les différentes listes, les nombres obtenus en Las ï L : multipliant chacun d'eux par F Cela revient encore à répartir les sièges complémentaires em tenant compte non pas des excédents eux-mêmes mais de ces excédents majorés chacun d'un tant pour cent du nombre des suffrages obtenus par le liste correspondante, 10, 20, 30, 50 ou 100 2°} par exemple, de telle manière qu'il ne soit plus nécessaire — en apparence — d'attribuer des sièges à des excédents inférieurs au quotient‘. Il en résulte qu'en appliquant le système d'Hond les partis les plus forts — ou les plus fortemeni concentrés — et les grandes coalitions de parti plus ou moins hétérogènes peuvent oblenir dan toutes les circonscriptions — quand bien même ils n'auraient aucun suffrage en excédent et no encore représenté — un et méme plusieurs des sièges complémentaires correspondant aux votes non émis des électeurs de toute opinion qui nor pas voté, et aux suffrages qui ont élé donnés @l réalité aux partis et groupements électoraux ad verses les moins nombreux?. ! Cette remarque pourrait fournir un procédé de calet assez commode pour l'application du système d'Hondt. ? Ce sont donc, invariablement, les listes ayant groupée plus de voix qui recoivent les majorations les plus for quand on applique le système d'Hondt. Sans doute, I A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS Pour l'application de son système, M. d'Hondt a indiqué une mélhode de caleul comportant une suite d'opérations qui devient fort longue lorsque le nombre des sièges à répartir est un peu grand. Elle consiste à diviser successivement par 1, 2, 3, 4, 5, etc., le chiffre électoral de chacune des listes (autrement dit le nombre des suffrages obtenus), et à ranger les quotients dans l'ordre de leur im- portance décroissante jusqu’à concurrence d'un nombre total de quotients égal à celui des repré- sentants à élire dans la circonscription. Il est clair que, si l'on prenait comme nom- bre répartiteur de la circonscription le premier de ces quotients, un seul siège de représentant pourrait être attribué, et ce siège reviendrait à la liste qui à fourni le premier quotient : à la plus forte. En prenant le deuxième quotient comme nombre répartiteur, un deuxième siège pourrait être également réparti, un troisième en prenant le troisième quotient, el ainsi de suite, en attri- buant chacun ‘des sièges ainsi répartis à la liste qui à fourni le quotient correspondant. Par suite, dans une circonscription dont les électeurs ont 7 listes des différents partis ne peuvent, en général, utiliser ces majorations en entier, puisque le quotient proportionnel qui sert de mètre électoral n'est pas contenu, en général, exactement dans les nombres majorés. Le reste de la divi- sion, qui constitue un excédent de suffrages non utilisés, doit être déduit du montant total de la majoration, si l'on veut connaitre l'importance de l'avantage dont la liste béné- ficie réellement, Lorsque l'excédent à déduire dépasse la majoration reçue — ce qui est très souvent le cas pour les listes qui ont groupé le moins de voix — celle-ci devient, en réalité, négative : elle se change en diminution, en perte de suffrages. Mais, tandis que la majoration recue en sus du nombre des suffrages véritablement obtenus est d'autant plus grande, dans une circonscription déterminée, que la liste a groupé plus de suffrages d'électeurs, l'excédent des suffrages non utilisés, qu'il faut déduire, n’est pas plus grand, en moyenne, pour les listes qui ont groupé le plus de suffrages que pour celles qui ne recoivent que les moindres parts dans la répartition des sièges. Pour toutes les listes, cet excédent peut varier entre 0 et une fois le mètre électoral, et pour toutes (à l'exception de celles qui ne représentent que des groupements électoraux insignifiants, des fractions infimes du mètre électoral), la valeur moyenne de l'excédent égale la moitié de ce nombre. Le rapport entre le nombre des suffrages utilisés par une liste et le nombre Lotal des suffrages qui lui ont été attribués est donc d'autant plus grand, en moyenne, que le nombre des suffrages recus est plus grand. Il en est de même pour le rapport entre le nombre des sièges atiwibués à une liste dans la répartition (en raison des suffrages utilisés) et le nombre des suffrages réellement recus par la liste, rapport qui exprime la valeur d'un suffrage d’électeur, mesurée en prenant comme unité la valeur du suffrage représentatif. L'eflicacité moyenne des suffrages d'une liste est en raison directe de ce rapport. Il en résulte que c'est aux suffrages obtenus par les listes des groupements électoraux les plus forts (ou les plus for- tement concentrés) et par les grandes coalitions de partis que le système d'Hondt accorde, en général, le plus d'effi- cacite. Aux élections générales belges de 1900, la liste du parti ministériel (parti catholique obtint la majorité absolue des ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 121 représentants à élire, le n°" quotient — ou tout autre nombre compris entre le n°% et le (n + 1% quotient‘ — sera le mètre électoral de la circons- criplion. La répartilion des sièges entre les listes s'opère en attribuant à chacune d'elles autant de sièges que son « chiffre électoral » comprend de fois cette unilé de mesure (sans tenir aucun compte des fractions). Il est possible, toutefois, qu'il y ait égalité entre le n°“ quotient (et un ou même plusieurs des quolients précédents) d’une part, et un où même plusieurs des quotients qui suivent le n° d'autre part. Dans ce cas, le n°" quotient, pris comme nombre répartiteur, donnera un nombre de sièges répartis supérieur à celui qui a été fixé pour la circonseription. Une des règles accessoires du sys- tème de M. d'Hondt attribue dans ce cas le dernier siège (ou les derniers sièges) à répartir de préfé- rence à la plus forte (ou aux plus fortes) des listes correspondant au 2% quotient, de manière à ne pas répartir plus de » sièges. La méthode de calcul indiquée par M. d'Hondt suffrages dont disposaient les électeurs inscrits dans 17 cir- conscriptions sur 30, dans 18 la majorité absolue des suf- frages valablement émis, et dans 25 circonscriptions sur 80 la majorité relative. Dans 15 circonscriptions, les suftrages donnés au parti catholique eurent une efficacité moyenne plus grande que celle des suffrages donnés à tout autre parti; autrement dit, chaque suffrage clérical eut, dans ces 15 circonscriptions, une valeur supérieure à celle des suffrages émis par les électeurs de toutes les autres opinions. Mais, il importe de remarquer que, même lorsque les suf- frages groupés par la liste d'un parti A se trouvent avoir une efficacité inférieure à celle des suffrages d'un groupe- ment numériquement moins important B, il se peut cepen- dant que la liste du parti À soit encore la plus avantagée des deux : car, mème dans ce cas, il est possible, et 11 arrive souvent, en effet, que la majoration dont bénéficie réellement le parti le plus fort soit sensiblement supé- rieure en valeur absolue à celle dont bénéficie l'autre parti. C'est donc une grave erreur que de croire, comme le fait dans un livre tout récent M. La Chesnais, que les partis les plus forts sont avantagés par l'application du système d'Hondt uniquement lorsque les suffrages recus ont une effi- cacité, une valeur supérieures à celles des suffrages donnés à toute autre liste de la circonscription. Cette manière de voir ne serait juste que s'il n'y avait} considérer que la valeur relative des avantages (autrement dit des erreurs) dont bénéficient les différentes listes. Mais, quand il s’agit de déterminer dans quel sens et dans quelle mesure les erreurs que comporte un système donné dépla- cent la majorité dans une assemblée de représentants, c'est la valeur absolue des avantages et des pertes des différents partis qui, seule, entre en ligne de compte. La mème erreur s'était également glissée, dans le temps, dans l'esprit si lucide de M. Louis Have. 4 Le nième quotient, que la méthode de caleul indiquée par M. d'Hondt a pour objet de faire connaitre, n'est, en effet, que le plus grand des nombres qui peuvent servir,de mètre électoral pour l'application de ce système. C'est pour cette raison, sans doute, que le système d'Hondt a été appelé sou vent système du plus grand commun diviseur, Ce qui est simplement absurde, car ces mots ont une tout autre signi fication dans le langage des Mathématiques. 1292 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS (et introduite dans le Code électoral belge) peut nécessiter, quand le nombre des représentants à élire dans une circonscription est grand, un nom- bre vraiment considérable de divisions. Il n’est pas difficile de substituer, pour l'application du sys- tème d'Hondt, des procédés plus expéditifs à cette méthode de calcul, qui est d'une absurde com- plication. Il est entièrement inutile, en effet, de calculer les quotients supérieurs au quotient pro- . S . :x . LE . portionnel 7 Puisque le n% quotient qu'il s’agit de déterminer ne peut être qu'inférieur ou tout au plus égal à =. Désignons par À, B, C, D, E,F les groupements et partis en présence, rangés par ordre d'impor- tance décroissante, par a, b, e, d, e, f les nombres décroissants de suffrages que ces groupements ont obtenus et par 2,, My, De, Ua, Le, Nf les nombres entiers de sièges respectifs que le quotient propor- tionnel, pris comme nombre répartiteur, permet d'attribuer à ces groupements, sans tenir comple des fractions. Supposons que cette répartilion faite, il reste encore trois sièges complémentaires à attribuer pour que les 2 sièges de la circonscrip- tion soient tous répartis. Les listes qui ont groupé le plus de suffrages pourront obtenir un ou plusieurs de ces lrois sièges complémentaires. Dans le cas présent, la plus forte liste pourra donc en obtenir jusqu'à trois, mais pas davantage évidemment. Quant aux listes qui, prises isolément, ont groupé le moins de suffrages, elles pourront, tout au plus, obtenir un seul des sièges complémentaires. Il suffira donc de comparer les quolients a b e d e Î RTE TI TENTE TNT TN TETE PU (4 A PARENT © Da+2? D+2 nat"? qui représentent les nombres répartiteurs corres- pondant respectivement à l'attribution d'un, de deux ou de trois sièges complémentaires aux listes correspondantes. On attribuera les trois sièges complémentaires aux listes (ou à la liste) donnant les trois quotients les plus forts. (Dans beaucoup de cas, il ne sera pas nécessaire d'effectuer toutes ces divisions. Il est évident que si le quotient de la division de a par n, +2 n’est point un des (rois quolients les plus forts, celui de la division de à par »,+3 ne le sera point à plus forte raison : celte dernière opération sera donc absolument inutile. On peut également, dans bien des cas, faire la comparaison sans calcul, à simple vue des chiffres.) Il est possible, lassez souvent, d'abréger les cal- ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE culs encore davanlage, en remarquant que tout nombre compris entre le n°" et le (n + 1)*" quo- tient peut servir de nombre répartiteur pour l’ap- plication du système d'Hondt. Par suite, si l’on S substitue au quotient proportionnel = le nombre entier qui suit immédiatement le quotient see (résultant de la division par le nombre des sièges à répartir plus un du nombre (otal des suffrages de la circonscription), on aura un nombre réparti- teur qui, tout en étant inférieur au quotient pro- portionnel, sera supérieur en tout cas, d’une frac- tion d'unité au moins, au (n +1)*"* quotient. Si ce nombre répartiteur est compris entre le n°" et le (n + 1)%%, la répartition des sièges de la circons- cription pourra se faire immédiatement d’une manière conforme au système d'Hondt, sans laisser de siège complémentaire à réparlir. S'il est com- pris entre le quotient proportionnel et le 1°" quotient, il y aura encore un ou plusieurs sièges complémentaires à répartir. Dans ce cas, il faudra, comme précédemment, comparer les quotients résultant de la division du chiffre électoral de chaque liste par le nombre de sièges déjà attribués à la liste augmenté d'une, deux, trois... unités, et attribuer les sièges complémentaires à répartir aux quotients les plus forts. C'est là le procédé préconisé par M. Hagenbach- Bischoff, professeur à l'Université de Bâle. Ce pro- cédé de calcul, qui donne les mêmes résultats que la méthode indiquée par M. d'Hondt tout en néces- sitant des calculs sensiblement moins longs, fut adopté, en principe, dans quelques cantons suisses, pour les élections cantonales (Tessin, Soleure) ou municipales (ville de Berne); mais, comme on le trouvait encore trop compliqué, en ce qui concerne la répartition des sièges complémentaires, pour pouvoir être compris et pratiqué, on déeida d'attri- buer ces sièges : soit a) aux plus forts d’entre les restes présentés par les différentes listes après division du chiffre élee- toral par le nombre entier qui suit immédiatement S n +A suffrages de la circonscription par le nombre des sièges à répartir augmenté d’une unité (c'est à peu près" le procédé introduit dans la loi électorale de la ville de Berne); soit D) à la liste seule qui a obtenu la majorité abso- le quotient » obtenu en divisant le total des ! Les auteurs de la loi bernoise, n'ayant pas très bien compris le procédé Hagenbach-Bischoff, ont adopté comme S n +1 a amenés à compliquer inutilement les dispositions de la loi. Dans la loi de Soleure, erreur et complications analogues, nombre répartiteur le ‘quotient lui-même, ce qui les D: P. DESFOSSES — RADIOTHÉRAPIE ET CANCER 123 lue ou relative des suffrages dans la circonseriplion (Soleure); soit c) aux plus fortes listes de la circonscription, en commencant par la plus forte, c’est-à-dire celle qui a obtenu la majorité absolue ou relative (Tessin). Il suffit de jeter un coup d'œil sur les tableaux syn- optiques donnés plus haut (page 117) pour voir que . ces trois systèmes dérivant du procédé Hagenbach sont très divergents et, de plus, que ces résultats, quel que soit celui des trois systèmes que l’on con- sidère, s'écartent frès sensiblement de ceux du système d'Hondt. Cette dernière constatation suffit pour les condamner, car ces trois systèmes n'ont d'autre but que de donner, par des procédés moins longs et moins compliqués, des résullats suffisam- | ment approchants de ceux du système d'Hondt. Mais le système d'Hondt lui-même peut-il être considéré comme une solulion satisfaisante du problème de la représentation proportionnelle? Est-ce qu'un pareil procédé de répartition ne fausse pas entièrement le problème à résoudre en favori- sant d'une manière excessive les partis les plus forts, auxquels il attribue la plupart des sièges complémentaires correspondant aux suffrages excédants des différents partis forts et faibles et aux votes non émis? El ne serait-il pas possible de donner une solution plus exacte et plus simple au problème de la représentation proportionnelle des partis? Les partisans du système d'Hondt se sont ap- puyés sur plusieurs démonstrations mathématiques, dues notamment à M. Mansion, professeur à l'Uni- versité de Gand, et à M. Hagenbach-Bischoff, pro- fesseur à l'Université de Bâle, pour affirmer la su- périorité du système qu'ils préconisent, et pour lui attribuer des avantages qui doivent faire adopter ce système de préférence à tous les autres. Ce sont ces démonstrations qu'il importe d’exa- miner : nous le ferons dans un deuxième article. Alfred Meyer. RADIOTHÉRAPIE ET CANCER Médecine et Chirurgie tendent de plus en plus à devenir l'art d'appliquer les découvertes scienti- fiques au diagnostic et au traitement des maladies humaines. Il n'est guère de progrès, dans les Sciences chimiques ou physiques, qui n'ait son retentissement en Médecine. La découverte de Rüntgen, celle, plus récente, du radium, ont été uti- lisées dès leur début et ont conquis d'emblée en clinique et en thérapeutique une place importante. Les tumeurs malignes, épithéliomas, carcinomes, sarcomes, tous ces processus néoplasiques qu'on range sous le nom un peu vague de cancer, avaient jusqu'ici échappé à toute thérapeutique; leur récidive plus ou moins lointaine après l'inter- venlion chirurgicale était la règle immuable. Aujourd'hui, tout au moins pour les épithéliomas superficiels, on peut avoir l'espoir légitime d'ob- tenir des guérisons, et c’est là une des plus impor- tantes applications de la découverte féconde de Rôntgen. I. — HisTorIQUE. La radiothérapie dans le cancer a lout d'abord été appliquée d'une facon empirique, un peu à l’aveugle, faute de mieux, dans les cancers pro- fonds; d'une façon raisonnée, en lenant compte de l'action des rayons X sur les téguments, pour les cancers superficiels. Despeignes, de Lyon, paraît avoir été le premier à traiter le cancer par la radiothérapie; il publia en 1896 l'observation d’un malade atteint d’un cancer à l'estomac qui fut amélioré un certain temps par le traitement radiothérapique; ce malade succomba néanmoins à son affection. En France, cette tentative resta isolée. A la même époque, beaucoup d'expérimentateurs ayant constaté des modifications de la peau, chute des poils, rougeur, irritation, sous l'influence des rayons X, eurent l'idée de faire servir ces radia- tions nouvelles au traitement des maladies cuta- nées; pensant que cette méthode donnerait des résultats favorables pour obtenir l'épilation, ils l’appliquèrent à l'hypertrichose, aux teignes et aux affections parasitaires du cuir chevelu. On passa de là au traitement du lupus et des épithéliomas. Bientôt, en Amérique et en divers pays d'Europe, le traitement des cancers culanés par les rayons X prit une large extension. Le traitement radiothérapique de l’épithélioma de la face donna le plus souvent des guérisons complèles. En 1900, Stenbeck publie 2 observations de can- croïdes guéris par les rayons X. John Lee, Sequeira, Merrill, Gibson, Coley, Williams, Taylor, Fergusson voient se cicatriser la plupart des cas d'épithélioma de la face qu'ils ont à traiter et obtiennent des résultats encourageants dans certaines autres lumeurs malignes. Bowen, sur 55 épithéliomas 12% D' P. DESFOSSES — RADIOTHÉRAPIE ET CANCER traités au Massachussetl’s general Hospital de Bos- ton, a vu 29 guérisons et 9 améliorations. En France, un des premiers malades chez lequel on vit s'effectuer une cicatrisation complèle fut présenté avec les photographies à l’appui à la So- ciété médicale des Hôpitaux de Paris. Get homme élait porteur d’un ulcus rodens (à l'examen hislo- logique, épithélioma tubulé), qui avait détruit une partie de la joue et de l'aile gauche du nez; il guérit avec une cicatrice à peine visible sur la joue et une perte de substance relativement minime de l'aile du nez (Haret et Desfosses, Société médicale des Hôpitaux de Paris, janvier 1904). Bergonié, en avril 1904, présenta à la Société de Médecine de Bordeaux un cas d'épithélioma de la face, où l'angle interne de l'œil, l'orbite, le soureil el une partie du nez étaient envahis; les pholo- graphies prises avant et après le traitement montrent un résultat inespéré; depuis cetle époque, la guérison s’est confirmée. Béclère, en juin 190%, montra, à la Société médi- cale des Hôpitaux, un cas d'épithélioma végétant de la région lemporo-maxillaire guéri par la radio- thérapie. La lésion, avant le trailement, présentait les dimensions d'une pièce de 5 franes. L'examen histologique montra qu'il s'agissait d'un épithé- lioma pavimenteux lobulé. La cicatrisation fut complète et parfaite. Leredde a soigné depuis un an, par les rayons X, 24 cas d'épithélioma de la peau; sur ce nombre, 11 peuvent être considérés comme guéris ; 13 sont encore en traitement. Belot, dans son livre récent sur la Radiothérapie, apporte de nombreuses observations de guérisons : sur 27 épithéliomas cutanés traités à Broca, il à obtenu 18 guérisons, 7 améliorations ; 8 malades sont encore en lraitement, 4 ont cessé de venir. Le cancer du sein, élant donnée sa fréquence, a été en tous pays soumis au traitement radiothé- rapique. Les résultats semblent meilleurs dans la forme ulcérée, saignante, que dans les tumeurs non ulcérées. Les cancers du sein ulcérés se cicatrisent superficiellement, mais la tumeur profonde per- siste. Les petits noyaux qui apparaissent sous la peau au voisinage de la tumeur disparaissent, en général, très rapidement sous l'effet des rayons X. De nombreuses observations, francaises ou étran- gères, relatent les bénéfices de la radiothérapie appliquée au traitement du cancer du sein : cas de Mondain, du Havre, cas de J. von Mikuliez et O. Fittig, observations de Béclère, de Richmond, de Marton, de Barney, etc. Les résultats du traitement radiothérapique dans le cancer du sein sont cependant beaucoup moins brillants que dans le cancer de la peau; ils sont encore beaucoup moins démonstratifs dans les tumeurs d'organes profonds. On a traité des can- cers du vagin et du col de l'utérus, des cancers du rectum, des tumeurs de 1'intestin ; aucune des observations publiées dans cet ordre d'idées n’ap- porte la preuve de l’action curative des rayons X. Doumer et Lemoine, en juin 190%, entlretenaient l'Académie de Médecine du trailement du cancer gastrique par les rayons X; ils auraient obtenu, sur 20 cas traités, 3 guérisons complètes. MM. Im- bert, de Montpellier, ont rapporté l’histoire d'un cas de carcinose prostato-pelvienne diffuse à marche aiguë, guérie par la radiothérapie; mais l'examen histologique marque. Plus démonstrative est l’observation que Béclère, en juin dernier, a présentée à la Société médicale des Hôpitaux : un sarcome du maxillaire supérieur, récidivé après deux interventions chirurgicales, fut guéri complè- tement par la radiothérapie. Bisserié a relaté en juin 190% deux cas d'épithe- lioma de la langue guéris par la radiothérapie; Béclère a montré un cas semblable de guérison d'un épithélioma de la face supérieure de la langue, au Congrès de Dermatologie tenu à Berlin du 12 au 17 septembre 1904. La question de la radiothérapie dans le cancer a fait l'objet d'une longue discussion à la Société de Chirurgie de Paris (2 novembre 1904). M. Walther a présenté un jeune homme qui, ayant déjà subi plu- sieurs opérations, loujours suivies de récidives ra- pides, pour un sarcome du rebord inférieur de l'or- bite, a été guéri par M. Béclère en 18 séances de radiothérapie faites en l’espace de quatre mois. M. Berger a rapporté une observalion analogue de sarcome de la face, récidivé après plusieurs opéra- tions chirurgicales et guéri par les rayons X. MM. Tufier, Reynier, Routier, Quénu, Sébileau se demandent si ces guérisons sont réelles eb définilives, ou simplement apparentes. L'opinion de la plupart des chirurgiens est qu'il faut attendre du temps la confirmation des espérances actuelles données par la radiothérapie. Seules les guérisons des cancers superficiels leur paraissent indiscu- tables. Il. — TECHNIQUE. Le traitementradiothérapique d'un cancer cutané consiste à placer le malade devant une ampoule radiogène, de facon que le rayon normal frappe « le centre de la région à traiter. Suivant le diamètre de la lésion, on éloigne plus ou moins l'ampoule pour avoir une surface impressionnée plus ou moins grande. Les parties saines sont protégées soit par des feuilles de plomb de quelques dixièmes de millimètre d'épaisseur, soil par une cupule de. verre qui ne permet aux rayons de passer que par un orifice restreint. D' P. DESFOSSES — RADIOTHÉRAPIE ET CANCER Les dermites el brûlures survenues au début de l'emploi médical des rayons X ont montré que, pour éviter les accidents provoqués par les rayons de Rüntgen, il ne fallait pas faire absorber à la peau plus d’une certaine quantité de rayons. Comme le dit Béclère, c’est de la quantité de rayons absorbée que dépendent essentiellement les réactions théra- peutiques. Pour assurer toute sécurité au traitement radio- thérapique, il fallait trouver un moyen de mesurer la quantité de rayons émise par l’ampoule. M. Holz- knecht, de Vienne, est arrivé à la solution de ce pro- blème par l'emploi d'un mélange de certains sels susceptibles de se colorer sous l'influence des rayons de Rôntgen. Son chromoradiomètre se com- pose d'une série de petits godets contenant les sels réactifs et d’une échelle graduée qui sert d'étalon. L'échelle graduée est formée de douze godets de sels réactifs enfermés dans une boile qui les pré- serve de la lumière ; ils ont été soumis à l'influence des rayons X et ils présentent une coloration verdâtre dont l'intensité s’accentue graduellement d'un bout à l'autre de la série. À chaque degré de l'échelle correspond un chiffre qui indique la quantité de rayons absorbée. Holzknecht a choisi une unité qu'il dénomme H. (Cette unité de mesure est, du reste, parfaitement arbitraire). L'échelle s'étend de 3 H à 24 H. Pour l'emploi du chromoradiomètre de Holzk- necht, on place un de ces godets, au voisinage de la région à traiter, sur la peau du patient, de manière que le godel recoive et absorbe la même quan- tilé de rayons que la peau; de temps en temps, on interrompt l'irradiation et l'on compare la réaction du réactif à l'échelle qui sert d'étalon; on reprend l'opération el l'on s’arrête quand le godet réactif a atleint précisément le degré de coloration désiré. On fait absorber ainsi à la peau trois, quatre, cinq unilés d'Holzknecht, 3, 4, 5 H, suivant l'expression consacrée. Le réactif de Holzknecht a l'inconvénient d’être une spécialilé tenue secrète et en même temps d'être d’un prix élevé. On a cherché un réactif facile à se procurer et d'un prix abordable. Sabouraud et Noiré emploient le papier au platino-cyanure de baryum comme réactif de mesure de la somme des rayons X reçus par la peau en un temps donné. Ce papier vire à la lumière des rayons X. La teinte obtenue est comparée à une série de deux teintes fixes aquarellées : 4° Teinte du papier au platino-cyanure baryum non viré; 9 Teinte correspondant à quatre unités H de Holzknecht; cette teinte correspond à la quantité de rayons X qui donne le premier effet thérapeu- tique apréciable. de 125 Le papier au platino-cyanure de baryum est moins sensible aux rayons X que les pastilles d'Holzknecht. Aussi, Landis que les godets réactifs sont placés au voisinage même de la lésion à traiter, le papier Sabouraud-Noiré doit être placé à 8 centi- mètres du centre de l'’ampoule, tandis que la peau du patient est placée à 15 centimètres. L'emploi du réactif d'Holzknecht et du papier de Sabouraud-Noiré est basé sur la comparaison de deux teintes; cetle méthode n’est donc pas d'une précision absolue. Il était désirable d'avoir à sa disposition des instruments de mesure plus mathématiquement exacts. Gaiffe a imaginé un dispositif très intéressant. Dans le circuit de l’am- poule, on intercale un milliampèremètre bien isolé, susceptible d'indiquer à chaque instant l'intensité du courant qui traverse le tube. Un réglage préa- lable étant fait, il suffit de suivre les variations des milliampères pour connaitre les variations du tube. Les déplacements de l'aiguille du galvanomètre correspondent aux variations de la quantité d’élec- tricité qui traverse le tube ; le milliampèremètre mesure la quantilé de rayons X. Pourvu ainsi de la facilité de doser les rayons X, on abordera le traitement d'un cancer en se basant sur les deux principes suivants : 1° Faire absorber, à chaque séance, la quantité de rayons maxima le compatible avec l'intégrité des téguments; 20 Attendre, pour passer à une seconde élape du traitement, le temps nécessaire pour que les phénomènes inflammatoires, qui pourraient se pro- duire, soient apparents. O.Noiré recommande de faire absorber au malade, à chaque séance, cinq unités H de Holzknecht ou la somme de rayons correspondant à la teinte B du radiomètre Sabouraud-Noiré. Les séances se répéteront de quinze jours en quinze jours. Quelque rapide que soit la disparition des lésions, on ne cessera les applications qu'après avoir fait absorber au total au moins 24 H ou 5 à 6 teintes du radiomètre Sabouraud-Noiré. L'intervalle de quinze jours entre les séances est nécessité par ce fait que, si les séances étaient plus rapprochées, l'érythème causé par la première séance serait transformé en radiodermite par la seconde. III. — EFFETS DU TRAITEMENT. Le traitement radiothérapique est absolument indolore. Un de ses effets les plus fréquents et les plus rapides est la disparition des douleurs et de la mauvaise odeur. Si la surface malade saignait faci- lement, la tendance à l’hémorragie disparait. L'ulcé- 126 D' P. DESFOSSES — RADIOTHÉRAPIE ET CANCER ralion, si elle existe, change d'aspect, et en même temps se produit un suintement très abondant. Si la lésion est recouverte de croûtes, celles-ci deviennent d'abord plus épaisses, puis elles tom- bent; de nouvelles croûtes se reforment moins épaisses, puis tombent à nouveau; finalement, les croûtes cessent.de se produire. En même temps, le fond de l’ulcère se modilie, bourgeonne, le bourrelet et les nodules s’affaissent, le fond de l’ulcération s'élève, se nivèle, tandis que l’épidermisation se fait sur les bords et gagne progressivement le centre. Finalement, il reste à la place de l’ulcération épithéliomateuse une cicatrice souple, souvent à peine visible. IV. — MOoDë D'ACTION DES RAYONS X. L'agent efficace en radiothérapie, ce sont les rayons de Rüntgen eux-mêmes, et non pas, comme on l’a soutenu longtemps, les décharges électriques, les effluves venant de l’ampoule. Il parait prouvé que les rayons de Rüntgen exercent une action élective spécifique sur les cel- lules épithéliales. Quelques examens histologiques ont été pra- tiqués sur des tumeurs en voie de régression sous l'influence des rayons X. Scholtz a pu constater que les cellules cancéreuses dégénèrent et finale- ment sont détruites sous l'influence des rayons X. Mickulicz et Fittig examinèrent une pièce pro- venant de la cicatrice d’un foyer néoplasique du sein, après traitement par les rayons X ; ils ne trou- vèrent plus de cellules carcinomateuses, mais les tissus sous-cutanés ésaient remplis de cellules rondes. Macaigne a examiné un cas d'épilhélioma cutané de la région temporale guéri par les rayons X. Avant le traitement, le diagnostic histologique fut : épithélioma pavimenteux en bourgeons arrondis ou anastomosés. Au cours du traitement, l'examen histologique fit constater qu'il n'y avait plus trace de boyaux épithéliomateux, mais seulement un tissu conjonclif en voie d'organisation fibreuse. En somme, les rayons X atteignent et détruisent les cellules néoplasiques qui dégénèrent sur place, vacuolisées dans leur protoplasma, fragmentées dans leur noyau; à la place des cellules morbides, détruites et éliminées, se constitue un tissu con- jonctif sain. V. — INDICATIONS ET CONTRE-INDICGATIONS. Les auteurs américains insistent sur les insuccès de la radiothérapie dans les cancers de la lèvre inférieure, Sauf les cas de cancer de l'estomac mentionnés ci-dessus, les tumeurs malignes de l'inteslin n'ont jusqu'ici retiré aucun bénéfice de la méthode radio- thérapique, qui, dans certains cas, auraitsemblé pro- voquer une généralisation plus rapide. Les indicalions et les contre-indications sont donc impossibles à préciser d'une facon complète. On peut dire, néanmoins, que tous les cancers cutanés sont justiciables de la radiothérapie. Le- redde insiste à bon droit sur les avantages de la radiothérapie dans les épithéliomes des paupières, où l’exérèse chirurgicale amène presque toujours un rétrécissement de la fente oculaire et où les rayons X donnent une cicatrice parfaite. Toutes ces néoplasies qu'on voit parfois sur la face, formant des tumeurs grosses comme un pois ou comme une noisette ou des ulcérations de la dimension d’une pièce de 2 francs ou de 5 francs, sont complètement cicatrisées et guéries au bout de quelques séances de radiothérapie. La forme de néoplasme qui est le plus rapidement modifiée est celle qui est caractérisée par une ulcération cen- trale, entourée d’un bourrelet dur plus ou moins saillant. Lorsque la lésion est végétante,exubérante, dans certaines formes d'épithélioma perlé, quelques auleurs conseillent de faire précéder les applica- lions radiothérapiques par un grallage à la curette. Quant l’épithélioma de la peau adhère aux parties profondes avec engorgement ganglionnaire, cer- tains médecins pensent qu'il est préférable d’em- ployer l'intervention chirurgicale d’abord, la radio- thérapie ensuite, qui aura pour but d'empêcher la récidive. Noiré est d'avis que, dans tous ces cas, la radiothérapie suffit à faire disparaitre eb la lésion épithéliomateuse el l'engorgement ganglion- paire. Les cancers dits inopérables, dit Noiré, ces larges pertes de substance qui ne peuvent guérir qu’au prix de déformations considérables, dispa- raitront le jour où les malades qui avaient reculé devant une opération sauront, au début de leur mal, que dans la radiothérapie ils peuvent trouver la disparition rapide et non douloureuse de leur affection. NI. — ACCIDENTS. Au début de l'emploi de la radioscopie, opéra- teurs et opérés virent assez souvent survenir sur les parties de la peau exposées aux rayons X des irrilations, des inflammations de téguments : les poils tombaient, des démangeaisons survenaient; parfois apparaissaient des bulles et des phlyctènes, suivies d’ulcérations ou d’escarres plus ou moins profondes. C'est, du reste, la constalation de ces modilications de la peau produites par les rayons X qui incila les expérimentateurs à employer les rayons de Rüntgen dans un but thérapeutique: D' P, DESFOSSES — RADIOTHÉRAPIE ET CANCER 127 Aujourd'hui, avec le perfectionnement de la tech- nique, ces accidents de dermite sont exceptionnels et très légers : il n'y a pas lieu de s'en préoccuper. Certains radiothérapeutes ont prétendu que, dans certains cas, la radiothérapie peut produire une aggravalion de phénomènes morbides en occasion- nant l'extension et la généralisation des foyers car- cinomateux. Les faits publiés ne sont pas jusqu'ici très probants. NII. — RaADIUMTHÉRAPIE. La radiothérapie ne se borne pas à l'emploi thé- rapeutique des rayons de Rôntgen; elle comprend aussi l'utilisation des radialions complexes émises par les substances radio-actives : radium et sels radifères. L'emploi thérapeutique des rayons éma- nés des sels de radium a recu également le nom de radiumthérapie. Danlos, à l'Hôpital Saint-Louis, a traité par les rayons du radium des lupus de la face et des épithéliomas superficiels. Gérard Sichel a publié un cas d’ulcère rodent trailé par le radium. Exner aurait obtenu des résultats encourageants dans six cas de cancer de l'œsophage. Max Einhorn (juillet 1904), sur 9 sujets alteints de rétrécisse- ment cancéreux de l'æsophage, a obtenu également une dilatation marquée de la sténose œsopha- gienne. Bergonié a observé une amélioration manifeste chez un sujet alteint d’épithélioma lingual par des applications intra-buccales de bromure de radium pur. Foveau de Courmelle a eu une amélioration con- sidérable dans un cas d'épithélioma lingual, et des guérisons dans des cas d'épithélioma cutané au déput. La technique de la radiumthérapie est très simple : la substance radio-active est enfermée dans une cupule forée dans une masse épaisse de cuivre et de plomb et recouverte d'une lame mince d'aluminium ou de mica, soudée ou collée avec soin sur le pourtour de la lame de cuivre. Ce petit récep- tacle peut être tenu par un manche de 8 à 10 cen- timètres de longueur formé d’un simple fil de laiton ; il suffit d'appliquer la lame de mica directement sur la région à traiter. Pour porter le radium dans une cavité profonde, le vagin par exemple, Morton l’enferme dans un premier tube de verre mince ne contenant pas de plomb, puis introduit le tube à radium dans un autre tube de verre ou mieux de celluloïde. On peut aussi placer une petile ampoule de verre mince, contenant un sel de radium, dans l'extrémité d'une bougie ou d’une sonde œsophagienne; ce dispositif permet de traiter les rétrécissements æsophagiens d'origine néoplasique. Les méthodes de mesure employées en radio- thérapie sont utilisables en radiumthérapie. Béclère a mesuré à l’aide du chromoradiomètre d'Holzk- necht l’action colorante de quelques centigrammes de bromure de radium pur enfermés dans un mince tube de verre; en l’appliquant sur un gode réactif, il a obtenu en dix minutes la coloration correspon- dant à l'absorption de cinq unités. Le grand obstacle à la généralisation de l'emploi du radium est l'élévation extrème du prix des sels de radium, un gramme de bromure de radium pur valant 400.000 francs. Aussi les résultats des applications médicales du radium sont jusqu'ici inférieurs à ceux que donne l'emploi des rayons de Rüntgen. VIIL. — ConcLusions. En résumé, après avoir exposé succinctement l'élat actuel de la radiothérapie dans le cancer, nous pouvons dire que la thérapeutique possède actuellement dans la radiothérapie un merveilleux moyen de guérison des épithéliomas superficiels, des cancers de la peau. Si, jusqu'ici, celte mé- thode a échoué généralement dans les cancers profonds, quelques faits permettent le plus encou- D' P. Desfosses. rageant espoir. LES BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Bruns (H.), Professeur d'Astronomie à l Université de Leipzig. — Grundlinien des wissenschañftlichen Rechnens.—1 vol. 1n-8° de 459 pages (Prix :# fr. 25). B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1904. Nous signalons ce petit volume à tous ceux qui s'occupent de calcul numérique dans les sciences appli- qué es, notamment en Astronomie. Il a été rédigé d'après les leçons faites par l'auteur au Séminaire de Calcul scientifique 1 rattaché au cours d'Astronomie de l’Uni-- versité de Leipzig. Son but est d'initier le lecteur à un ensemble de principes d'une grande utilité pour le calculateur, mais dont l'emploi n'est pas encore assez er C'est qu'il manquait précisément d'un ouvrage récent dans ce domaine. Celui de M. Bruns vient done combler une lacune et il constitue en même temps un excellent complément au livre de M. Lüroth; Vorle- sungen über numerisches Rechnen (Leipzig, 1900), en ce qu'il a plus particulièrement en vue les calculs spéciaux à l'Astronomie. Dans l’/ntroduction, auteur insiste sur les termes de « caleul scientifique » et de « technique du calcul » par opposition à « l’art de calculer », et c'est précisé- ment aux méthodes de cette technique, telles qu'elles ont été développées principalement par les astronomes, qu'il consacre ce volume. L'introduction contient quelques indications historiques, ainsi que des remar- ques et conseils sur la manière de disposer les calculs. Les deux premiers chapitres sont consacrés aux propriétés des différences et des sommes, à leurs liens avec les tables numériques et au problème d'interpo- lation qui s'y rattache. Après un court chapitre sur la différentiation numé- rique, l'auteur fait une étude très approfondie des différentes méthodes d'intégration numérique. envisage d'abord le cas d’une simple quadrature, puis celui de l'intégration d’une équation différentielle. Viennent ensuite l'emploi des séries trigonométriques, des formules récurrentes et, dans un dernier chapitre, comme complément du chapitre I, le problème de l'in- terpolation envisagé sous une forme plus générale, avec un court aperçu de la méthode des moindres carrés. B. Fegr, Professeur à l'Université de Genève, Constan (P.), Professeur d'Hydrographie de la Ma- rine. Cours élémentaire d’Astronomie et de Navigation. — 2 vol. grand in-8° avec figures ; tome 1, Astronomie; t. Il. Navigation. (Prix: 7 fr. 50 et 8 fr. 50.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1904. Les Ecoles d'Hydrographie, auxquelles ce livre est destiné, ne sont pas, comme leur titre semblerait l’in- diquer, des établissements où l’on étudie l'Hydro- graphie. Elles préparent les candidats au brevet de ca- pitaine au long cours, et leur enseignement ne suppose chez les élèves que des connaissances très élémentaires en Mathématiques. Le but essentiel est d'apprendre à ceux-ci à déter- miner leur position à la mer et à diriger la route du navire, ce qui constitue la navigation; comme l’obser- vation des astres en donne les moyens principaux, il est nécessaire d'avoir comme introduction un précis d’Astronomie ou, plutôt, de Cosmographie. La plupart des traités de navigation sont principale- ment des recueils de formules et de types de calcul, accompagnés de règles pratiques pour effectuer les observations. L'auteur de l'ouvrage dont nous rendons compte à eu l'ambition de mieux faire comprendre et de démontrer le pourquoi et le comment de ces règles, 2 de ne pas les exposer comme de simples recettes. C'est ce qui explique pourquoi ce livre, sans renfer- mer de tables numériques, a pourtant une étendue supérieure à celle des traités similaires. La première partie, Astronomie, constitue, dans son ensemble, une cosmographie complète qui. au lieu de rester purement descriptive, est toujours appuyée sur des explications géométriques. Peut-être eùt-il été plus conforme à la réalité d'insister moins sur l'emploi du théodolite pour la détermination des lieux des astres. Cet instrument n'est guère employé dans les observatoires, et les officiers de la marine marchande ne sont jamais dans le cas d'en faire usage. Mais l'exposé est, en général, très lucide. Nous voyons, dès cette première partie, l'emploi systématique des nota- tions vulgarisées par les types de cale uls de l'Ecole navale, notations qu ‘il y a tout avantage à graver dans la mémoire et qui seront suivies de facon courante dans la deuxième partie. Celle-ci est consacrée à la Navigation. On sait que, dans les trente dernières années, la navi- gation astronomique a subi une évolution importante dans le sens de la simplification et de l’uniformisation systématique. L'augmentation de vitesse des navires réclame des observations plus fréquentes, et le perfectionnement des chronomètres permet de faire de l'heure de Paris la base des méthodes. C'est dans cet esprit que sont conçus les nouveaux programmes auxquels l’auteur s’est conformé. S La « nouvelle navigation » n’a, en quelque sorte, qu'un tour dans son sac, et par là se ‘distingue foncièrement de l’ancienne, que caractérisaient des méthodes mul- tiples et variées, sans lien essentiel entre elles. Tout se ramène actuellement à la considération du lieu géomé- trique du navire, déterminé par la hauteur observée et par l'heure du premier méridien. Il y a là un progrès incontestable et d'une grande portée. Peut-être est-on allé un peu trop loin à certains égards. Il y a cent ans, la méthode des distances lunaires était considérée comme donnant seule de bonnes longitudes. Depuis lors, on à fait de grands progrès dans la construction et dans l’uti- lisation des chronomètres. S'ensuit-il qu'il faille abso- lument jeter par-dessus bord les distances lunaires, que Faye recommandait encore il y a vingt ans comme don- nant seules une sécurité absolue? Le Bureau des Longi- tudes a cessé d'insérer, dans la Connaissance des Temps, les distances toutes calculées de la Lune aux étoiles, aux planètes et au Soleil. Mais cette mesure n'a été acceptée que parce que l'on peut fort bien calculer la longitude avec une observation de distance, sans avoir besoin de trouver le distance géocentrique dans l Ephéméride : le calcul n'est ni plus long, ni moins exact. On aimerait à voir ce sujet traité dans un livre destiné à des marins qui n'ont souvent qu'un seul chronomètre exposé à s'arrêter ou à être tout à fait hors de service : que leur reste-t-il alors? En seront-ils réduits aux pratiques de la navigation du xvit siècle? Etd'ailleurs, le chronomètre lui-même, malgré les pro- grès réalisés dans son réglage, donne encore des erreurs qu'on n'évite que par une étude attentive de sa marche et surtout des perturbations dues à la température. Les officiers de marine qui naviguent bien ont tous soin de faire cette étude à l’aide de formules de marche ou de graphiques; lomission de ces considérations dans un cours pratique constitue une lacune qu'il eût été facile de combler sans augmenter les dimensions du livre, en gagnant par exemple sur la théorie de la déviation du nu de BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 129 compas, dont un certain nombre de théorèmes et de for- mules seront rarement utiles. Nous eussions enfin désiré que le chapitre si im- portant des marées reçüt quelques développements supplémentaires. Nous ne chicanerons pas l'auteur sur l'explication mécanique des marées, insuffisante déjà au point de vue élémentaire, puisqu'elle néglige le fac- teur le plus important du phénomène, les actions et composantes horizontales de la force perturbatrice de Péquilibre. Mais, même au point de vue pratique, ilcon- viendrait de ne pas s'en tenir à des notions qui, en “réalité, ne sont vraies que pour Brest, mais d’insister un peu Sur les marées beaucoup moins simples de la ma- … jorité des côtes : un capitaine au long cours doit savoir “qu en Amérique, et dans les mers des Indeset de Chine, onde diurne est prédominante. — La haute mer peut différer de l'heure du passage méridien de la Lune d’une quantité quelconque infé- “rieure à douze heures. Notons aussi que l'établissement du port se rapporte au jour même de la syzygie, et non à trente-six heures plus tard. LEE … Ges légères imperfections ne doivent pas nous empé- cher de reconnaitre que nous sommes en présence d'un ouvrage bien conçu pour répandre et faire apprécier les méthodes de la navigation moderne. Nous y trouvons des détails intéressants sur la manière d'observer, des explications circonstanciées et très pratiques sur les moyens de reconnaître les étoiles, un très bon aperçu des mouvements du Soleil et de la Lune et de leurs éclipses. L'exposition est élémentaire et claire : nul doute que ce livre ne soit appelé à rendre de bons services aux navigateurs. C.-En. Casparr, Ingénieur-hydrographe en chef de la Marine. 2° Sciences physiques Claude (Georges). — L'Électricité à la portée de tout le Monde {5° édition). — 1 vol. in-8° de 415 pages, avec figures (Prix : 7 fr. 50). Veuve Ch. Dunod, éditeur. Paris, 1905. Les lecteurs de la /tevue n'ont certainement pas oublié la présentation élogieuse qui leur a été faite par M. Emile Demenge, ingénieur métallurgiste, de la seconde édition du livre de M. G. Claude: or, c'est de Ja cinquième dont il est question aujourd'hui. Si cela avait besoin d’être démontré de nouveau, ce succès de librairie légitimerait, à lui seul, le ton familier que l'auteur adopte systématiquement pour exposer à M. Tout-le-monde les vérités scientifiques en apparence les plus rébarbatives. L'édition actuelle est caractérisée par d'intéressants “développements sur les nouvelles sources de lumière : lampe Nernst, arc à flamme, tube Cooper Hewitt, et par une exposilion plus claire de la théorie des moteurs. Mais le principal élément d'intérêt nouveau est un Supplément d'une centaine de pages sur le radium et les nouvelles radiations. L'auteur a voulu mettre ses lecteurs au courant de ces manifestations de l'énergie, “dont la compréhension approchée est restée jusqu ici le privilège de quelques-uns; il y a tout à fait réussi. Aucun sujet, d'ailleurs, n'est plus digne de retenir l’at- tention que les admirables recherches où apparait, si Amportant et si intime, le rôle de l'électricité, et dont lintérêt est sanctionné par de merveilleuses applica- ions pratiques. - M. G. Claude a partagé son supplément en trois cha- pires d'importance inégale : le premier est relatif aux Oudulations hertziennes, et ce n'est pas trop de toute Lingéniosité de l'auteur pour rendre claire, en dehors de toute formule, l'idée de Ja propagation par ondes. La production expérimentale des ondulations hert- zennes, la mesure de leur longueur d'onde et un bref exposé de la télégraphie sans fil complètent ce chapitre intéressant. Le deuxième est consacré aux rayons cathodiques et aux rayons X° alors que le précédent est la gloritication de Hertz, celui-ci est l'exposé des travaux de Crookes, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Lénard, Goldstein, J. J. Thomson et Rüntgen, pour ne citer que les plus grands noms. Une attention parti- culière est accordée à la mesure de la vitesse et de la masse des corpuscules cathodiques par les méthodes si originales de J. J. Thomson et au bouleversement de nos idées sur la matière par la notion nouvelle d’élec- tron, qui tend à remplacer l’ancienne notion de l'atome chimique. Le troisième et dernier chapitre est le plus considé- rable de tous ; il chante la gloire du radium. L'histoire de la découverte du polonium et du radium par M. et Me: P. Curie, de l'actinium par M. Debierne, à la suite de l'hypothèse émise en 1896 par M. H. Poincaré et des belles recherches de M. H. Becquerel sur le rayonnement de l'uranium, les propriétés si curieuses du radium et de ses sels, la complexité de son rayon- nement et les applications physiologiques et médicales auxquelles il a donné naissance sont successivement passées en revue. L'étude de la radio-activité induite, la démonstration expérimentale de l'existence d’une émanation subtile que l’on peut condenser par l'appli- cation du principe de la paroi froide et dont le spectre est caractérisé par trois raies définies, enfin la stupé- fiante propriété qu'a cette émanation de se détruire spontanément après quelques jours en donnant nais- sance à l’hélium, tout cela constitue des paragraphes d'une lecture extrêmement attachante. L’extrème diffu- sion du radium dans la Nature, déduite de la présence permanente de l’hélium dans l'atmosphère et dans les eaux, est le point de départ de vues synthétiques grandioses attribuant au métal de M. et Mu Curie un rôle énorme, merveilleux, en tout cas vraisemblable ; et M. G. Claude laisse le lecteur sous l'impression de l'admiration pour l’œuvre géniale accomplie dans ces dernières années par les savants auxquels la France est redevable de la découverte du radium. Les lecteurs de la Revue estimeront sans doute avec moi qu'il n'est que justice de souhaiter à la cinquième édition du livre de M. G. Claude le succès mérité des éditions précédentes. E. Maruias, Professeur de Physique à la Faculté des Sciences de Toulouse, Foveau de Courmelles (D')}. — L'’Année élec- trique. — 1 vol. in-12 de 360 pages (Prix : 3 fr. 50). Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1904. Publication annuelle, qui constitue, sous une forme condensée, une revue des progrès accomplis pendant l'année en électricité, électrothérapie et radiographie. Cela suffit pour en montrer l'intérêt incontestable. Valeur (Amand), Docteur ès sciences, Pharmacien en chef des Asiles de la Seine. — Chimie et Toxico- logie de l’Arsenic et de ses composés. — { vol. gr. in-8° de 364 pages (Prix : 9 fr.). A. Joanin et Ci, éditeurs. Paris, 1904. Depuis une vingtaine d'années, engagé dans un nombre considérable de combinaisons, l’arsenic à fourni plusieurs groupes de corps d'un intérêt à la fois scientifique et pratique. Et ainsi, des fonctions nou- elles ou connues se sont affirmées dans la série des substances à noyaux arsenicaux. Le moment était venu de ranger ces substances selon leur attitude chimique, de leur marquer dans la littérature une place en rapport avec leur importance scientifique. M. Valeur a eu le mérite d'accomplir cette œuvre en publiant un livre dans lequel apparaissent ses brillantes qualités d'exposition, livre que goûteront tous ceux qui recher- chent, dans la lecture d’un texte scientifique, la con- naissance des faits et l'attrait de la forme. Le travail présentait, indépendamment de son intérêt didactique, un puissant attrait d'actualité. Effectivement, les travaux de M. Armand Gautier sur le rôle de l'ar- senic chez les animaux ne datent que d'hier, et plus récentes encore sont les recherches qui ont conduit le savant professeur de la Faculté de Médecine, ainsi que M. Gabriel Bertrand, à perfectionner les méthodes de ge 130 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX recherche de l’arsenic et à démontrer la présence de cet élément dans l'organisme normal. Ces questions ont à la fois tenu en éveil la curiosité scientifique et pas- sionné l'opinion. Aussi M. Valeur a-t-il voulu reprendre avec quelques détails l'étude toxicologique de l’arsenic, de facon à la mettre en harmonie avec les faits récem- ment acquis à la science. Il consacre la première partie de son ouvrage aux combinaisons minérales, la seconde aux composés organiques de l’arsenic; dans la troisième est étudiée la toxicologie de l'arsenic; enfin, la recherche ana- lytique de cet élément fait l'objet de la quatrième partie. L'auteur avait constaté que les monographies publiées antérieurement sur l’arsenic et ses composés minéraux demandaient plus à être complétées qu'à être entière- ment refondues. En conséquence, il a estimé avec raison qu'il y avait lieu de ne faire qu'un rapide exposé de cette partie du sujet, en se bornant à énoncer les faits les plus saillants, de façon à pouvoir consacrer une plus large place à l'étude des combinaisons organiques. C'est, en effet, cette étude qui a été en quelque sorte renouvelée en ces derniers temps, et l'on sait combien nombreuses et précises ont été les applications théra- peutiques auxquelles a conduit la découverte de nou- velles combinaisons organiques de l'arsenic. Ces combinaisons, groupées selon leurs fonctions chimiques, sont l'objet d'une description conscien- cieuse. Et, dans leur histoire, une part importante est faite aux questions expérimentales. La troisième partie, consacrée, avons-nous dit, à la toxicologie de l’arsenic, est d’une lecture agréable et instructive. Après un historique, copieusement docu- menté, l'auteur examine si l’arsenic existe normalement dans l'organisme, en quelle quantité il s’y trouve et comment il y est distribué. Il traite ensuite de l’intoxi- cation par l’arsenic et de la recherche toxicologique de cet élément, et formule à ce sujet des conclusions sur lesquelles les experts devront méditer désormais. Dans l'exposé qui termine l'ouvrage, exposé relatif à la recherche analytique de l’arsenic, tous les problèmes qu'a soulevés jusqu'ici cette question se trouvent envi- sagés. Cette quatrième partie vient compléter la mono- graphie d’une heureuse facon. En résumé, le livre de M. Valeur parait à son heure. Ecrit dans un style alerte et châtié, il est d'une lecture agréable et facile, lecture profitable à toutes les per- sonnes, nombreuses parmi les industriels, les chimistes, les médecins, les pharmaciens, qui s'intéressent à cette importante question de la chimie et de la toxicologie” de l’arsenic. EUGÈNE CHARABOT, - Inspecteur de l'Enseisnement technique au Ministère du Commerce. 3° Sciences naturelles ‘Ogilvie Gordon (Maria M.). — The geological Struc- ture of Monzoni and Fassa. — 1 vol. in-8° de 150 pages avec 17 planches et 34 fig. (Prix : 6 sh.). Turnbull and Spears, éditeurs, Edinburgh, 1904. La classique région des « Dolomies » (ou « Dolo- mites»), dans le Tyrol méridional, a été, plus que nulle autre dans les Alpes orientales, l’objet de longues dis- cussions parmi les géologues. L'assimilation, par le baron de Richthofen, des dolomies du Schlern à des récifs coralliens et, plus tard, l'explication, donnée par M. Edm. de Mojsisovics, de la coexistence de massifs calcaires ou dolomitiques et de dépressions marneuses, par l'hypothèse de changements de faciès, dans le sens horizontal, rencontrèrent l’une et l’autre de nombreux contradicteurs ; mais nul d’entre eux n'avait eu la per- sévérance de baser ses objections sur une étude nou- velle du pays, auquel les deux auteurs précités avaient consacré des Mémoires détaillés, accompagnés de cartes géologiques. Il était réservé à une femme, à une Jeune Ecossaise, d'entreprendre de nouveau l'exploration des « Dolomites », de poursuivre ses recherches pendant dix ans avec une patience et une énergie admirables, et d'aboutir à la publication de plusieurs Mémoires qui lui assurent un rang des plus honorables parmi Îles géologues alpins et qui permettent d'envisager la struc= ture géologique du pays dolomitique sous un jour tout nouveau. Miss Maria M. Ogilvie, aujourd'hui Mistress Gordon, vient de livrer à la publicité les résultats de ses observations sur un district des « Dolomies » situé plus au sud que ceux à l'étude desquels étaient con sacrés ses Mémoires antérieurs: c'est la région de Fassam et du Monzoni, plus connue des minéralogistes et des pétrographes que des stratigraphes et des tectoniciens, grâce à l'existence de superbes roches éruptives et des phénomènes de contact qu'elles ont provoqués dans les roches sédimentaires encaissantes. Les produits d'intru= sion y sont développés avec une ampleur que l’on cher= cherait en vain plus au nord; aussi les résultats auxquels a été conduite Mistress Ogilvie Gordon présentent-t-ils cette fois un intérêt plus général encore que ceux qu'elle avait obtenus précédemment dans le massif de Sella et dans l'Enneberg. Les géologues envisageaient les « Dolomites » comme un pays essentiellement tranquille, accidenté seulement par des failles verticales, contre-coup des effondre= ments de la région adriatique; Mistress Ogilvie Gordon nous montre aujourd'hui que les plis-failles et les che= vauchements y sont aussi répandus que dans d'autres parties de la chaîne des Alpes, où la structure « imbri= quée» ou en «écailles» constitue la note dominante: Cet important résultat tectonique est basé sur une minutieuse étude stratigraphique de la région. La dé= couverte de couches de Saint-Cassian fossilifères, dans le massif de Sella, et celle d'un horizon nouveau à la limite des couches de Werfen et des calcaires virglo= riens fournissent deux précieux repaires au milieu de la série sédimentaire des environs du Monzoni et em facilitent la représentation cartographique. Ces deux horizons marquent d'importants changements de faciès dans le sens vertical: ils correspondent l’un et l’autre à des moments « critiques », où la sédimentation mar= neuse fait place à la sédimentation calcaire ou dolomi tique. C'est dans ces deux zones, constituant des sur= faces de moindre résistance, que se produisirent, sous l'action des forces tangentielles, les principales surfaces de glissement, le long desquelles on observe des che- vauchements, des superpositions anormales des cous ches. Il s'est formé ainsi une série d’imbrications, attess tant des poussées dirigées vers le Sud. Ces accidents fondamentaux, parallèles à la direction générale des couches, sont pour la plupart orientés W.N. W.-E.S. E% ils sont coupés à angle droit par de véritables failles, que l'auteur attribue à des phénomènes de torsion. L'un et l'autre système sont accompagnés de venues éruptivess Les masses en fusion se sont élevées suivant ces plans de moindre résistance et se sont consolidées sous là forme de «sills », de filons-couches, dans le cas du premier système, de dykes ordinaires, dans le cas des accidents transversaux. Les intrusions sont manifestes ment postérieures aux dislocations, et, comme celles- appartiennent au mème ensemble d'accidents tecto niques que la grande faille giudicarienne et que les chevauchements de la Cima d’Astla, qui sont d'âge te Liaire, le même âge doit être attribué aux éruptions du Monzoni, contrairement à l'opinion courante, qui le assignait un âge beaucoup plus ancien. Tous ces résultats sont d’une importance capitale et paraissent établis sur des observations d’une exacti= tude indiscutable, En ce qui concerne les dislocations du sol, on est toutefois en droit de se demander si Mis: 4 Qu'il soit permis à l'auteur de cette analyse de reve diquer ici pour lui-même la priorité de la découverte des premiers chevauchements dans les «Dolonties ». Dès 188 il signalait à l'Alpe Puez le recouvrement du Néocomi par des calcaires rhéliens. Mistress Ogilvie Gordon attribue la priorité de cette découverte à M. Salomon, dont les publi cations sur la Marmolata remontent à 1895. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 431 tress Ogilvie Gordon n'a pas attribué une importance exagérée aux phénomènes de torsion ; les exemples empruntés à d'autres régions des Alpes, sur lesquels elle s'appuie, sont, dans tous les cas, susceptibles d'une tout autre interprétation. Par contre, la part des actions tangentielles n'est-elle peut-être pas faite assez large. Certaines observations de l’auteur relatives aux acci- dents périphériques des massifs de Sella et du Monzoni évoquent l'idée de véritables charriages. Il convient d'ajouter que l'ouvrage de Mistress Ogilvie Gordon est accompagné de coupes nombreuses, de vues photographiques très parlantes et de cartes schémati- ques ou détaillées qui en facilitent considérablement Ja lecture. Eue Hauc, Professeur à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. 4 Sciences médicales Roussel{(Albéric), Médecin du Ministère de l'Instruc- tion publique. — La Franklinisation réhabilitée. — 4 vol. in-12 de 292 pages. O. Doin, édit. Paris, 1904, L'électricité statique a subi, depuis son origine, des alternatives de vogue et d'abandon. Nos pères ont vu la franklinisation délaissée dès l'apparition de la pile de Volta; Duchenne de Boulogne dédaignait la machine électro-statique; Charcot et Vigouroux ont eu beau- coup de peine à la tirer de l'oubli. Et voici qu'elle est menacée, une fois encore, d'être éclipsée par les courants alternatifs de haute fréquence. : L'auteur est convaincu que l'électricité statique est appelée à rendre des services thérapeutiques beaucoup plus importants que ceux qu'on lui a demandés jus- qu'ici. Il estime qu'il y à lieu de la réhabiliter; on mettra de cette facon entre les mains des médecins, et de tous les médecins (car la spécialisation de l’électri- cité médicale serait inutile), un puissant moyen d'action sur le courant nerveux, sur la circulation et sur l'en- semble des actes nutritifs. Il se base sur des résultats heureux obtenus avec la machine à grande surface pour soutenir que l’électri- cité statique n'a pas dit son dernier mot, et que, dès maintenant, elle peut être mise, sans désavantage, en parallèle avec la « haute fréquence ». M. Albéric Roussel a voulu, en écrivant ce petit livre, mettre les praticiens à même de trouver réunis, en peu de pages, l'historique, l’instrumentation, l'action phy- siologique de la franklinisation. Les applications théra- peutiques constituent la partie la plus volumineuse, le corps mème du livre. À propos de diverses maladies, l'auteur expose comment doit être appliquée la fran- klinisation et quels sont les résultats qu'on est en droit d'en attendre, particulièrement dans les maladies ner- veuses et dans les dermatoses. Dr Henry Meice. Tripier (R.). — Traité d'Anatomie pathologique générale. Nous avons publié, dans la Revue du 15 janvier, la ré- ponse de M. le D' Tripier à l'article paru dans le numéro u 15 novembre 1904, sous la signature de M. le Dr Prenant. M. Prenant nous adresse, en réplique, les lignes qui suivent : Je me contenterai de prier les biologistes de con- fronter le texte de l'ouvrage de M. Tripier avec les cri- tiques formulées dans mon analyse. Mais, devant l'opi- nion du grand public de la Æevue, je répondrai à M. Tripier en deux mots. … Un mot d'abord sur notre litige scientifique même. En face de la division cellulaire, que tout le monde reconnait ètre la base des processus normaux et patho- logiques s'accomplissant chez l'adulte, M. Tripier, qui Ja nie ne l'ayant jamais vue, installe, pour expliquer -ces processus, l'hypothèse des rénovations cellulaires des tissus par les globules blancs. Cette doctrine est évidemment le produit de la suggestion des faits, c'est-à- dire de préparations histologiques démonstratives, que M. Tripier possède certainement. Ne demandant pas mieux que d'être convaineu et de Convaincre aussi mes confrères histologistes de la réalité de ces curieux pro- cessus de rénovation cellulaire, je prie instamment M. Tripier de me prêter à cet effet quelques prépara- tions probantes. Je pourrai, en échange, et par le même moyen, lui révéler la division cellulaire dans les tissus de l'adulte. Par le second mot de ma réponse, je m'adresse à M. Tripier lui-même, auteur et professeur à la fois. Je note les hésitations de l’auteur « arrèté par cette con- sidération que l’on pourrait croire à une théorie sans fondement », s'il publiait ses idées personnelles dans un Mémoire spécial, et j'enregistre la résolution du professeur de « faire prévaloir ses idées » en les publiant dans un (raité didactique. C’est ce que j'avais dit, en y réussissant moins bien que M. Tripier. C'estle triomphe psychologique du professeur sur l’auteur que j'avais voulu dénoncer comme un danger : « un danger qui doit être bien rare », mais dont, de l’aveu de M. Tripier lui-même, il doit exister au moins un exemple. A. PRENANT, Professeur à la Faculté de Médecine de Nancy, 5° Sciences diverses Blancarnoux (Paul), Ingénieur des Arts et Manu- factures. — Du choix d'une carrière industrielle. — 1 vol. in-8° de 376 p. (Prix : 1 fr. 50) Veuve Ch. Dunod, éditeur, Paris, 1904. Le livre de M. Paul Blancarnoux sur le choix d'une carrière industrielle est divisé en trois parties. Dans la première, se trouve la liste des écoles indus- trielles françaises. Sur chacune de ces écoles, l'auteur donne une série de renseignements utiles. La seconde partie est consacrée à l'énumération des diverses branches industrielles, des diverses voies quise présentent devant le jeune homme au sortir des écoles. Son choix est vaste, depuis le groupe formé parce qu'on appelle la petite industrie jusqu'aux grandes entreprises de construction et de métallurgie, en passant par les industries de l'électricité, du cycle et de l'automobile. Mais il ne suffit pas d’avoir, à l’école, acquis un outil de travail, d'avoir ensuite choisi le moyen d'utiliser cet outil : il faut encore que le jeune débutant sache où se mettre à la besogne, sur quel point de la Terre s’ins- taller. M. Blancarnoux le prend par la main et le guide à travers le monde: c’est l'objet de la troisième partie. Il lui énumère les grands centres industriels, lui donne des détails sur les conditions indispensables pour réussir dans chacun d'eux, sur la facon dont on y peut vivre et équilibrer son budget. Il n'oublie pas de signa- ler, quand il ya lieu, les dangers duclimat et d'indiquer les règles à suivre pour s'en préserver. Dans ce court résumé d'un ouvrage de près de 400 pages, nous avons essayé de mettre en relief ce qui rend ce livre vraiment intéressant : il est rempli de renseignements utiles. L'auteur connaît beaucoup de choses. Il a longtemps voyagé et il suit aujourd'hui, par des lectures, le courant industriel dans le monde. De son expérience, il fait largement profiter les jeunes débutants, et ceux qui se tourneront vers lui l’écou- teront avec fruit. Aussi, nous en voudrions-nous de nous atlarder à des querelles de détail. Sans doute, le développement du sujet n’est pas toujours rigoureux. Il y à des répé- titions; parfois le récit s'égare, au point qu'en certain chapitre on trouve des considérations, d’ailleurs inté- ressantes, sur l'éducation des jeunes filles. Qu'importe tout cela, puisque le but principal de l’auteur, nous nous plaisons du moins à le penser, a été de produire une œuvre utile, non une œuvre artistique. Il faut lui savoir gré, d'autre part, d’avoir rempli son livre d’un souffle vivifiant, d’avoir dit et redit à ses lecteurs que, pour réussir, il était d'abord nécessaire d en avoir l'invincible désir. Faire appel à l'initiative, à l'énergie personnelle, c'est en créer : c'est ainsi accomplir une bonne œuvre. ALFRED (rAY, Ancien Elève de l'Ecole Polytechnique. 132 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Poincaré étend aux hyperespaces le théorème sur la somme des angles d'un triangle SRE — M. Em. Picard démontre le théorème ‘suivant : pour une surface algébrique, r, désigne le nombre Re intégrales de première espèce et r le nombre des intégrales de seconde espèce, on a la relation r6— r — (py — Pn)s La étant le genre géomé- trique et p, le genre numérique. — M. F. Enriques ‘montre que, si, sur une surface algébrique f, il y a des intégrales de Picard de la seconde espèce, il y en a aussi Seance du 16 Janvier de la première, et les courbes algébriques tracées sur donnent lieu à une infinité de systèmes linéaires de courbes du même ordre. —M.G. Remoundos démontre qu'il est impossible d’avoir 2 v équations de la forme q (u) = Aet admettant des racines algébriques. — M.S. Bernstein communique ses recherches sur les équa- tions du type paraboloïde. — M. G. Bigourdan pré- sente ses observations de la nouvelle comète Borrelly (1904, €), faites à l'Observatoire de Paris. — M. P. Cho- fardet adresse ses observations de la même comète, faites à l'Observatoire de Besançon. — MM. Rambaud et Sy communiquent leurs observations de la mème comète, faites à l'Observatoire d'Alger. 2° SciENCES PHYSIQUES. — M. C. Camichel à constaté que le coeflicient d'absorption du verre d'urane pour les radiations qu'il émet par fluorescence est le même, que la fluorescence soit excitée ou non. — MM. H. Mois- san et Chavanne ont déterminé la conductibilité élec- trique du calcium pur (g = 105 X 105), son point de fusion (8100), sa densité (1,525 à 1,560) ; ils ont préparé un amalgame de calcium HeSCa, stable dans l'air sec. — MM. C. Matignon et R. Trannoy ont reconnu que le chlorure de samarium anhydre frais absorbe à froid AZH* en grande quantité; ils mettent en évidence l’exis- tence de huit combinaisons, avec 1, 2, 3, 4, 5,8, 9,5 et 11,5 molécules d'AzH*. — MM. J. Tribot et H. Chré- tien ont obtenu par électrodialyse un hydrate de fer colloïdal ne renfermant presque plus de CI, et possé- dant toutes les propriétés de l'hydrate de Graham. — MM. G. Perrier el E. Prost, en faisant réagir AIC/ sur l’alcool en solution sulfocarbonique, puis en ajoutant du chloral, ont obtenu un corps C*CIH*O, isomère de l’acétone trichlorée, et qui est probablement un oxyde de propène trichloré. — MM. E.-E. Blaise et A. Lut- tringer ont observé que l'acide sulfurique, dans des conditions convenables, est susceptible de produire une migration de la liaison éthylénique des acides &-alcoyl- SUN dans la chaîne la plus longue, soit en af, soit en $y. — MM. L. Hugouneng et AID. Morel, en faisant réagir la leucine naturelle sur l’urée fondue, ont obtenu avec dégagement d’'AzH3 l'acide leucine- hydantoïque, F.200°-210°; par perte d'eau, il donne son anhydride, la leucine-hydantoïne. — M. G. Dar- zens, en hydrogénant par le nickel réduit les cétones non saturées, a obtenu facilement les cétones saturées correspondantes. — M. A. Haller, en traitant par l’ami- dure de sodium et les iodures alcooliques la f-méthyl- cyclohexanone, préparée soit par dédoublement de la pulégone, soit par hydrogénation du métacrésol, a obtenu des homologues de la menthone. — MM. A. Haller et C. Martine, en traitant la méthylcyclohexa- none de par l'iodure d'isopropyle, ont fait la syn- thèse de la menthone, qui est identique au produit naturel. 39 SCIENCES NATURELLES. — MM. P. Oceanu et A. Babes ont étudié les effets physiologiques de l’ovariotomie chez la chèvre : elle fait disparaître l'odeur hircine du lait, active et prolonge la durée de la sécrétion lactée, favorise l’engraissement et le rendement en viande de qualité supérieure. — M. H. Jumelle à étudié une Bignoniacée à gomme de Madagascar, le Stereospermum euphorioides; la gomme qu ‘elle produit est une gomme vraie, contenant un peu de tinnin et entièrement soluble dans l'eau. — M. Jean Friedel a reconnu que la présence d'oxygène, dans l'atmosphère mise à Ia disposition d’une feuille, n’est pas indispensable pour l’accomplissement du processus d'assimilation chloro- phyllienne. — M. Savorin à constaté que les plis dem l'Atlas saharien ont existé dans la région actuellement occupée par l'Atlas tellien au nord des.plaines de Hodna et de l’'oued el Ham; l’âge de ces plis est ordi- nairement compris entre le Crétacique supérieur et l'Eocène inférieur. — MM. J. Deprat et M. Piroutet signalent l'existence et la situation tectonique anor- male de dépôts éocènes en Nouvelle-Calédonie. — M. H. Courtet conclut, des observations géologiques faites par la Mission Chari- Lac Tchad, que la région traversée est constituée par des schistes cristallins, « souvent plus ou moins redressés verticalement, tra- versés par des roches granitiques variées et recouverts en stratification discordante par des grès horizontaux sans fossiles. — M. Al. Hébert a étudié les sols et miné- raux recueillis par la Mission Chari-Lac Tchad. Les ter" rains, fortement sablonneux, sont généralement riches en azote. On trouve du minerai de fer en grande quantité et du chlorure de sodium. — MM. R. Fourtau ét M. Georgiades ont étudié la source thermale de Ham" mam Moussa, située sur le côté occidental du Sinai.M Elle appartient à la catégorie des sources chlorurées sodiques avec sulfates et se rapproche beaucoup de, celle de Wiesbaden. des restes trouvés dans les fouilles pratiquées rue de Rennes pour l'établissement du Métropolitain, que des hommes, des éléphants et des rhinocéros vivaient dans la vallée de la Seine pendant le Quaternaire inférieur. 23 Janvier 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. S. Carrus étudie les conditions nécessaires pour qu'une famille de sur- faces f(x, y, z)—=p admette des trajectoires orthogo- nales planes. — M. G. Darboux généralise les résultats de M. Carrus et donne un exemple intéressant d’inté- gration complète pour une équation aux dérivées par= tielles du second ordre à trois variables indépendantes. — M. A. Buhl étudie l’approximation des fonctions par des polynomes dans ses rapports avec la théorie des équations aux dérivées partielles, et applique ses résultats au problème de létat initial en Physique mathématique. — M. E. Traynard montre que toule surface du quatrième degré à quatorze points doubles; parmi lesquels deux groupes de trois sont en ligne droite, est une surface hyperelliptique. —_ M. G. Cas- telnuovo démontre le théorème suivant : Une surface ayant les genres Dy, J'a possède }y— pa intégrales dis= tinctes de différentielles totales de première espèce et 2 (pa — Pa) intégrales distinctes de seconde espèce: Le continuum réel à quatre dimensions CRE surface a la connexion linéaire p,—2 (py— fa) +4 — M. Tzitzeica étudie les équatious différentielles li= néaires du second ordre renfermant un paramètre. = M. F. Riesz démontre qu'un ensemble de domaines; tel que chaque point d'un ensemble fermé de point estintérieur à un domaine de l’ensemble, contient tou> Séance du jours un ensemble fini de domaines jouissant de la ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 133 mème propriété. — M. Considère ramène au calcul des poutres droites celui des arcs élastiques isolés ou reliés à des tabliers rigides et celui des ponts suspendus à tablier rigide porté par des câbles paraboliques sans haubans inclinés. — M. M. Fouché étudie la déviation des graves en chute libre vers le sud; elle est la même soit qu'on laisse tomber le corps d’un lieu élevé, soit qu'on l'abandonne dans un puits de mine. Elle est un peu plus petite que la moitié de celle qui est due à la force centrifuge composée et doit lui ètre ajoutée. — M. Ch. Féry présente un pendule électrique à échap- pement libre composé d'un balancier moteur qui fait progresser d'une dent, à chaque oscillation complète, la roue d'échappement d’une minuterie ordinaire. — MM. Lœwy et Puiseux étudient la marche de la solidi- fication dans l’intérieur d'une planète d’après leurs pho- tographies lunaires. Ils confirment la théorie de l'écorce mince et montrent que le passage à l’état solide, encore inachevé pour la Lune, est très loin de son terme pour la Terre. — M. G. Rayet présente ses observations de la comète Borrelly faites au grand équatorial de FOb- servatoire de Bordeaux. — M. G. Fayet a été amené à conclure, malgré l'incertitude tenant à la petitesse de Parc dont on dispose, que la nouvelle comète Borrelly est de nature elliptique ; sa durée de révolution serait d'environ huit ans. 20 ScIENGES PHYSIQUES. — M. H. Pellat démontre la proposition suivante : Un corps animé d'une grande vitesse V dans un champ électrique d'intensité ® est soumis par là même à un champ magnétique dont la direction est normale au plan contenant la direction de la vitesse et celle du champ électrique, et dont l'in- tensité est donnée par H—KOV sin «, en appelant « l'angle de la vitesse et du champ électrique et K le pouvoir inducteur spécifique du milieu.— M. P. Lange- vin : Sur les ions de l'atmosphère (voir p. 1153, €. XV.) — M. P. Massoulier présente les résultats de ses recher- ches sur l’ionisation dans les flammes; ils montrent que la conductibilité est bien uniquement due à l’ioni- sation produite par la température élevée, indépendam- ment des électrodes. — M. G. Meslin à déterminé le coefficientd’aimantation spécifique d'un certain nombre de liquides, c'est-à-dire la susceptibilité rapportée à l'unité de poids. — M. F. Wallerant montre, en se basant sur l'exemple des azotates de potasse et d'am- moniaque, que la loi de Bravais n’a rien d’absolu : les faces à caractéristiques élevées peuvent se produire, non accidentellement, mais normalement, si les conditions de cristallisation leur sont favorables. — M. J. Danne a trouvé près d'Issy-l'Evèque (Saône-et- Loire) un minéral, le pyromorphite, renfermant du radium; il ne contient pas d'uranium. L'activité peut atteindre plusieurs fois celle de l'uranium. — M. H. Moissan à reconnu que le fer pur ou ne contenant que peu de carbone, en passant de l’état liquide à l'état solide, suit la loi générale de la solidification : sa den- sité s'accroît et il diminue de volume. Par contre, ce métal, saturé de carbone au four électrique, fait excep- tion à cette loi et augmente de volume en passant de l’état liquide à l’état solide. — M. M. Berthelot a exa- miné quelques métaux trouvés dans les fouilles archéo- logiques en Egypte. Les uns sont formés d’un alliage de cuivre avec un peu d'étain, en partie transformé en oxychlorure et hydrocarbonate. L'autre est une lame “de bronze. Le mème auteur a analysé le contenu d'une fiole égyptienne; ce sont les produits d'oxydation lente “d'une huile grasse qui était probablement de l'huile de ricin. — M. J. Minguin a observé une dissociation “partielle de la molécule des sels de strychnine au sein du mélange alcool benzylique et alcool; cette dissocia- tion est d'autant plus grande que l'acide est plus faible. — M. E. Rengade à observé que la méthylamine dissout à froid le césium métallique; la solution se décompose rapidement avec dégagement d'hydrogène et formation de méthylamidure de sodium, corps cris- tallisé, détonant, se décomposant à 420° en H et cya- nure de Cs. — M. P. Lemoult, en faisant réagir PCI jours. sur la diméthylaniline, a obtenu, outre le produit de Michler et Walder, la leucobase du violet hexaméthylé et les colorants qui en dérivent, puis des produits phosphorés et du phosphore blanc. — M. M. Godchot a oxydé l’octohydrure d'anthracène par l'acide chro- mique ; ilse forme de l'anthraquinone et, par oxydation plus ménagée, du dihydrooxanthranol et de l'hexahy- droanthrone.— M. L. Brunel: Thymomenthol et déri- vés (voir p.93). — MM. A. Guyot et J. Catel ont étudié les produits de l’action du bromure de phényl- magnésium sur le phtalate et le benzoylbenzoate de méthyle triphényloxybenzodihydrofurfurane, o-di- benzoylbenzène, ete. — M. J. Dumont à observé que la valeur culturale des substances humiques ne saurait être la même dans tous les cas; c'est moins la richesse globale de la matière noire que sa composition quali- tative qui influe sur le rendement des récoltes. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. L. Jammes et H. Man- doul montrent que l’action bactéricide des sues hel- minthiques explique d'une facon simple l’action bien- faisante spéciale que peut exercer le Tænia sur son hôte. — M. A. Fraysse a étudié au point de vue ana- tomique les sucoirs de l'Osyris alba, et la biologie générale de cette plante. — M. F. Dienert a constaté qu'un morceau de magnésium, aussi pur que possible, ajouté à une suspension de bacilles d'Eberth ou de colibacilles dans l'eau, les tue tous après deux ou trois M. J. Janssen fait le récit de sa récente ascension au Vésuve. — M. EF. Laur indique la suite des terrains traversés par les sondages pour arriver au Houiller, dans la Lorraine française : Keuper, Muschel- kalk, grès bigarré, grès des Vosges, Permien, Houiller. — M. Laubya étudié la florule diatomique du ravin des-Egravats, près du Mont-Dore; il y a trouvé cent six espèces ou variétés. ACADÉMIE DE MÉDECINE Seance du 17 Janvier 1905. M. Chauvel présente un Rapport sur un Mémoire de M. E. Landolt concernant une nouvelle opération sur les muscles oculaires. Cette opération, dénommée allon- sement des muscles oculaires, est caractérisée par une augmentation de la longueur des corps charnus qui impriment aux globes de l'œil les déplacements néces- sités par les fonctions de ces organes. Cette opération mérite d'entrer dans la pratique, bien que plus délicate que la ténotomie ordinaire. — Le même auteur pré- sente un autre Rapport sur un travail de M. Darier relatif à la supériorité des sels organiques d'argent sur le nitrate d'argent en ophtalmologie. L'auteur à obtenu des résultats dans le traitement des ophtalmies puru- lentes avec l'argyrol; mais ce sel parait perdre de son action et de son pouvoir bactéricide au bout de peu de jours. — M. Bréhon lit un Mémoire sur la fréquence de l'ankylustome et de quelques autres vers intestinaux dans une région du bassin houiller du Pas-de-Calais. Séance du 24 Janvier 1905. M. Poirier est élu membre titulaire dans la Section d'Anatomie el Physiologie. M. P. Reynier montre qu'il est à souhaiter que l'on abandonne aujourd'hui, pour la choroformisation, le procédé de la compresse pour adopter celui des mé- langes titrés de chloroforme et d’air, le seul vraiment conforme aux indications de la Physiologie. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 1% Janvier 1905. M. Colombo a observé que l'ingestion de plusieurs litres de lait provoque chez l'homme une élévation de la pression artérielle, puis une urination et une défé- cation abondantes, suivies d'un abaissement de la pression artérielle. — M. V. Henri à étudié l'influence de la quantité de sérum de chien sur l'hémolyse des globules rouges de poulet. La vitesse d'hémolyse est 134 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES représentée par une loi logarithmique. — M. Ch. Au- | lard et Perrin montrent que la toxicité de l'urine es bertin à constaté, dans les anémies, la coïncidence | en raison inverse de sa tension superficielle. — constante de la rétraction normale du caillot avec | MM. G. Billard et F. Bellet ont observé que l'élonga l'abondance des hématoblastes. — M. P. Carnot à | tion du sciatique chez le lapin provoque un allonge reconnu que les greffes de vésicule biliaire provoquent, soit à la surface de l'intestin, soit à l'intérieur du foie, des formations kystiques et adénomateuses, remar- quables à la fois par la végétation superficielle et par l'infiltration profonde de cet épithélium. — M. Ed. Ret- terer à constaté que les ménisques interarticulaires du genou restent fibreux ou fibro-cartilagineux tant que les mouvements de rotation sont bornés dans cette articulation; dès qu'ils servent de pivot à des mouvements étendus, ces organes deviennent cartila- gineux et osseux. — M. F. Battelli a observé que, si l'on fait agir les sérums des animaux normaux sur les globules et sur les vaisseaux du cobaye, on constate dans la majorité des cas un parallélisme étroit entre la quantité d’hémolysine el la quantité de vasocons- trictine renfermées dans ces sérums. — MM. G. Guil- lain et P. Thaon ont observé une forme clinique de la syphilis du névraxe réalisant la transition entre les myélites syphilitiques, le tabes et la paralysie géné- rale. — MM. Edm. et Et. Sergent ont trouvé, dans le sang d'un certain nombre de paludéens, des corps particuliers en anneaux ou en demi-lunes, qui semblent caractéristiques du paludisme. — Les mêmes auteurs ont découvert, dans le sang des Chauves-souris, deux sortes de Trypanosomes : un petit, voisin du Tr. Lewisi, qu'ils nomment Tr. Nicolleorum, et un gros, le Tr. vespertilionis. — MM. Edm. et Et. Sergent ont observé une nouvelle Hémiamibe dans le sang des Hirondelles d'Algérie. — Enfin, les mêmes auteurs ont répété et confirmé les expériences de Schaudinn sur les générations alternantes des Hématozoaires endo- globulaires des Chouettes, donnant des Trypanosomes chez les Moustiques. — M. L. Barthe montre que le méthylarsinate de soude ingéré ne fait que traverser les organes sans s’y localiser. — M. Ch. Féré a étudié l'influence, sur le travail d'un groupe musculaire, du travail musculaire d'autres groupes musculaires. — MM. A. Gilbert et J. Jomier ont constaté que le gly- cogène commence à apparaître dans le foie entre la première et la deuxième heure après l'absorption de sucre; il disparait aussi très rapidement à partir de la neuvième heure. — Les mêmes auteurs ont observé trois localisations principales de la graisse dans le foie : dans la cellule hépatique, dans la cellule étoilée, dans les capillaires sanguins. — M. H. Cristiani a provoqué la dégénérescence et latrophie expérimentale des greffes thyroïdiennes par l'ingestion à dose toxique de pastilles de glande thyroïde. — MM. J.-L Prevost el J. Mioni montrent que, chez les jeunes sujets, l'extir- pation de la thyroïde retarde le développement et altère les fonctions de la zone corticale motrice qui, chez le chien, est le centre des convulsions cloniques. — MM. L. Bernard et M. Salomon ont observé que la tubereulisation lente de l'organisme par l'injection intra-péritonéale ou sous-cutanée d'un bacille peu virulent provoque, au niveau du rein, une série cons- tante d’alférations qui méritent le nom de néphrite interstitielle tuberculeuse. — M. L. Launoy à étudié l'action des injections de chlorhydrate d’amyléine (stovaine) sur les globules. Séance du 21 Janvier 1905. M. Ed. Retterer à constaté que le tissu qui compose les ménisques interarticulaires du genou continue, chez le lapin adulte, à être formé d'éléments identiques à ceux que présente le cartilage hyalin lors de son premier développement. — MM. A. Gilbert et J. Jomier ont étudié la répartition du glycogène hépatique à l’état normal et à l'état d'inanition. — MM. G. Billard, Dieulafé et Gilles estiment que l'oligo-hydramnios tire son origine de l’exagération du courant allant du liquide amniotique vers le sérum fœtal et maternel, qui s'établit vers la fin de la grossesse. — MM. G. Bil- L ment des os et une diminution de leur poids du côté opéré. — M. L.-G. de Saint-Martin propose une modi= fication du procédé de Folin pour le dosage de l'urée dans l'urine, qui consiste à substituer au chlorure de Mg le chlorure de Li anhydre exempt d'AzH®. — MM. Ch. Bisanti et L. Panisset montrent que les microbes introduits dans l'intestin, le bacille de Koch: en particulier, peuvent franchir la paroi intacte pour passer dans le sang pendant la période de digestion. — MM. L. Léger et Ed. Hesse ont rencontré en parasite chez lOtiorynchus fuscipes un nouveau protiste qu'ils désignent sous le nom de Mycetosporidium talpa. — MM. Léon Bernard et M. Salomon ont constaté que l'injection canaliculaire du bacille de Koch ne peut provoquer de lésions rénales que lorsqu'on lui associe la ligature urétérale. — MM. J. Nicolas et Ch. Cot ont étudié la leucocytose digestive chez le chien normal et splénectomisé. — MM. L. Nattan-Larrier el A. Brin- deau estiment que la môle hydatiforme constitue un néoplasme infectant, auquel convient la dénomination de plasmodiôme à type molaire. — M. L. Uriarte rec- tifie une note antérieure sur la classification des Puli- cides des Rats. — MM. Piéry, Mandoul et Ortal montrent qu'on ne peut, dans les hémoptysies sur- venues au cours de la tuberculose, tirer aucun rensei- gnement pronostic de l'examen bactériologique des crachats. — MM. C. Nicolle et G. Catouillard ont étudié le venin d'un scorpion commun de Tunisie, l’'Heterometrus maurus. Le moineau y est très sensible, le lapin moins. — MM. Charrin, Moussu el Le Play établissent que les séreuses, par l'intermédiaire de la dialyse, des sucs, des cellules, etc., agissent, soit sur les microbes, soit sur leurs sécrétions, soit sur une sérié de principes nuisibles, ou même des corps étrangers. — M. L. Fortineau a isolé d'une chemise de malade un microbe rouge pathogène qu'il nomme Zrythro- bacillus pyosepticus; il s’est montré pathogène pour tous les animaux expérimentés. — M. E. Maurel montre que la diminution du poids du cobaye, sous l'influence du vêtement, est due en partie à une utili- sation moins bonne des aliments ingérés. — MM. M. Doyon, A. Morel et Billet on! trouvé qu'à la dose de 4 à 2 grammes par kilog. le chloroforme détermine la nécrose presque complète du foie. — M. Ch. Richet a observé que l'injection d’une dose non mortelle de congestine chez le lapin détermine une sensibilité extrème à l’action d’une dose ultérieure (anaphylaxie); cela provient d'une forte diminution de la résistance du système nerveux. Chez les chiens, il en est de même; l'injection antérieure de thalassine agit comme prophylactique. — M. Laulanié poursuit l'étude de l'influence de l’alimentatien sur les combustions respi- ratoires. — M. E. Gellé examine au point de vue physiologique la question de la réforme de l'ortho- graphe. — M. F. Dévé montre qu'il existe des carac- ières zoologiques paraissant appartenir en propre au parasite de l’'échinococcose alvéolaire humaine, bavaro= tyrolienne, et qui viennent confirmer l'opinion de la dualité de l’échinococose. — MM. E. Couvreur el CI. Gautier ont reconnu que, chez les grenouilles, ni la polypnée vraie à l’étuve, ni la fausse polypnée en chauffant la tête avec une lampe, ne sont d'aucun secours pour lutter contre le réchauffement. M. Al. Ignatowsky a étudié l'état de l'urine après la ligature de la veine rénale et de l’uretère. L RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 9 Janvier 1905. M. L. Cuénot conclut de ses observations qu'il n'y à aucune relation causale entre le volume des œufs de ver à soie el le sexe des chenilles qui en sont sorties. — MM. Fr. Gross el L. Sencert signalent un cas de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES décollement épiphysaire chez un castrat naturel adulte. — MM. Haushalter et R. Collin ont observé des mal- formations de l'écorce cérébrale (microgyrie et poly- gyrie) avec agénésie du corps calleux et du faisceau pyramidal chez un enfantalteint de rigidité spasmodique généralisée. — M. Th. Guilloz préconise un nouveau système de notation des objectifs et des oculaires de microscope; dans ce système, le grossissement est le 1/20 du produit des numéros de l'objectif et de l’ocu- laire, diminué de la moitié du numéro de l’oculaire ; la puissance à quatre fois la valeur du grossissement. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 17 Janvier 1905. M. Ch. Pérez décrit une nouvelle Glugéidée, le Nosema pulvis, parasite du Carcinus moenas, qui se généralise dans toute la musculature à l'exception du cœur. Ce parasite, ainsi que le T'helohania monadis, sans provoquer de castration parasitaire, peuvent empêcher la ponte. — Le même auteur à trouvé une autre Glugea (Gl. Stempelli) vivant en para- site sur le Balanus amaryllis. — M. A. Le Dantec à reconnu que le ténia inerme ne sécrète aucun produit toxique susceptible de provoquer des troubles chez l'homme parasité. — M. R. Brandeis présente un nouvel uréomètre à eau. — MM. Gentès et Bellot ont étudié les altérations des neurofibrilles des cellules pyramidales de l'écorce cérébrale dans l'hémiplégie. — MM. J. Bergonié et L. Tribondeau ont poursuivi l'étude de l’action des rayons X sur le testicule du Rat blanc ; on se trouve bien en présence d’une destruction de l'épithélium séminal par résorption sur place etuon par desquamation el expulsion. — M. M. Cavalié a observé, dans la couche ventrale de la lame électrique du Torpedo Galvani, un dispositif fibrillaire considérable qui se trouve dans les gaines des fibres nerveuses et autour d'elles. — MM. R. Ducrot et J. Gautrelet ont constaté que, dans l'ictère expérimental, sans compli- cations d’un autre ordre, il n’y à jamais passage des pigments biliaires dans le liquide céphalo-rachidien. Les plexus choroïdes jouent le rôle de véritables glandes ; ils se comportent comme les agents sécréteurs du liquide céphalo-rachidien. — M. B. Auché a isolé, dans plusieurs cas de dysenterie à Bordeaux, le bacille dysentérique décrit par Chantemesse et Widal. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 17 Janvier 1905. MM. D. Olmer et P. Stephan ont vu, à la période la plus précoce de leur développement embryonnaire, les neurofibrilles traverser de part en part la cellule; ultérieurement, elles forment un réseau fin et compli- qué, condensé d'abord sur un côté du noyau, puis envahissant tout le corps cellulaire. — M. L. Bordas communique ses recherches sur l'anatomie du tube digestif de la Nepa cinerea. — M. J. Livon a isolé du sérum sanguin de deux femmes éclamptiques un microbe, dont les bouillons de culture, injectés à des cobayes gravides, provoquent la mort après de fortes convulsions. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 20 Janvier 1905. La Société procède au renouvellement de son Bureau. M. Dufet devient de droit président. Sont élus Vice-président, M. Amagat; secrétaire général, M. H. Abraham; vice-secrétaire, M. P. Lugol. M. P. Langevin : Sur la théorie du magnétisme, La Revue publiera dans un prochain numéro un article de l’auteur sur ce sujet. — M. Ch. Ed. Guillaume : La Physique des solides d'après les idées de M. Tammann. Les expériences de Tresca sur l'écoulement des solides, les nombreuses applications industrielles de la plasti- cité des métaux, l'observation des cas intermédiaires, 155 comme ceux que présente, par exemple, la glu marine, la fusion pâteuse dans un large intervalle de tempéra- ture et beaucoup d’autres phénomènes d'observation courante ont conduit à l’idée de la continuité entre les états solide et liquide de la matière. M. Ostwald a dé- veloppé cette idée, tandis que M. Le Chatelier, tout en reconnaissant qu'elle est correcte dans des cas nom- breux, à attiré l'attention sur le passage brusque et sans états intermédiaires entre les corps amorphes et les cristaux de même composition chimique qui se développent à leurs dépens. M. Tammann a repris cette théorie et, admettant qu'il n'existe pas d'état critique dans le passage du cristal au corps amorphe, il a établi une théorie de la fusion des cristaux dans laquelle la courbe d'équilibre dans le plan p0 est une courbe fermée, limitant une région limitée du plan, à moins que l’origine des coordonnées (pression nulle et zéro absolu) ne soit comprise à l’intérieur de la courbe; dans ce cas, elle se termine aux axes coordonnés. Le maximum de la courbe, c'est-à-dire le point de tempé- rature maxima de fusion du cristal, est réalisé à la pression où la densité du corps amorphe et du cristal est la même. Ce point est atteint, pour les corps qui se solidifient avec contraction, et qui constituent la presque totalité des corps connus aux pressions ordi- naires, lorsque la plus grande compressibilité du corps amorphe l'a suffisamment contracté pour qu'il ait rejoint la densité du cristal. Cette égalité n'existe, en général, qu'à des pressions très élevées, de l'ordre de plusieurs milliers d’atmosphères. Pour que la cristal- lisation puisse se produire dans la région du plan où un cristal déterminé est stable, il faut, à la fois, que le milieu contienne des germes cristallins et que la visco- sité soit assez faible pour que le mouvement de cris- tallisation se propage. Si l'on part de la température de fusion du cristal pour aller vers les températures basses, la tendance à la formation spontanée des germes cristallins augmente jusqu'à un maximum déterminé, au delà duquel elle redescend. Mais la vitesse de propagation du cristal diminue dès que la température est abaissée au-dessous du point de fusion ; le maximum de vitesse a lieu immédiatement au-dessous de la température de fusion. Si les expé- riences montrent en général une augmentation de la vitesse jusqu'à une certaine distance du point de fusion, c'est qu'on à confondu la température du bain avec celle de l’eau-mère en contact avec le cristal. En réalité, le dégagement de chaleur par le fait de la cris- tallisation maintient l’eau-mère à une température toujours plus élevée que celle du bain qui entoure le tube dans lequel la cristallisation se propage. Un grand nombre de liquides, refroidis rapidement à partir d'une température supérieure à celle de la fusion de leur cristal, deviennent bientôt assez visqueux pour que les germes cristallins ne s'y développent plus. On peut alors les amener à la température ordinaire à l’état vitreux, qu'ils conservent indéfiniment; les verres proprement dits, le quartz fondu sont des exemples de ce fait. Un réchauffement produit souvent la cris- tallisation ; ainsi le verre se dévitrifie par une chauffe suffisante. Les corps amorphes subissent la fusion pâteuse, qui n’est pas autre chose qu'une diminution graduelle de la viscosité, sans que l’on rencontre, à aucune température, une brusque variation du volume ou un subit dégagement de chaleur. Il n'y à pas, à proprement parler, de changement d'état entre les fils de quartz, dont M. Boys a montré les propriétés élas- tiques, et le quartz parfaitement liquide. On peut observer, au refroidissement, la diminution graduelle de la plasticité, sur un intervalle de plus de 4.000, pour arriver, finalement, sans aucun saut brusque, à l'élasticité parfaite. En revanche, le passage est brusque entre le quartz amorphe et le quartz cristallisé. M. Tam- mann à examiné un grand nombre de corps, pour éta- blir leur diagramme de fusion, et tenter de vérifier ses idées. En fait, il a atteint une seule fois le maximum de la courbe p4 (sel de Glauber décahydraté); dans 136 tous les autres cas, il a pu néanmoins démontrer que la courbe de fusion a sa concavité tournée vers le bas, indiquant ainsi l'existence d'un maximum à une pres- sion supérieure à celle des expériences. Les corps exa- minés par M. Tammann sont déjà nombreux. La plu- part ont été étudiés jusqu'à 3.000 atmosphères, et auelques-uns au delà. M. Guillaume signale, parmi les faits les plus curieux découverts au cours de ces études : 4° L'existence de l’état solide à une température supé- rieure au point critique, rendue évidente pour plu- sieurs corps, et démontrée directement pour le chlo- rure de phosphonium; la température critique de ce corps est 50°, tandis que la courbe de fusion stable a pu être poursuivie jusqu'à 4029; 2 Le diagramme de l'eau, qui comprend trois espèces de glace, dont deux sont plus denses que l’eau. On obtient les deux glaces nouvelles en comprimant vers 2.700 atmosphères de la glace maintenue à — 60° ou à — 80°; en réchauffant ensuite, on peut tracer leur courhe de fusion, qui com- mence, pour l'une d'elles, à 22° et 2.200 atmosphères, et va en remontant à mesure que la pression s'élève. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 43 Janvier 1905. M. le Président annonce que le Conseil de la Société a décerné le Prix de Chimie organique à M. L. Mar- quis, et le Prix Louis Pillet à M. A. Hébert. La Société procède au renouvellement de son Bureau, qui est ainsi constitué pour l'année 1905 : Président d'honneur : M. M. Berthelot ; Président : M. L. Lindet ; Vice-Présidents : MM. J. Hamonet, A. Gautier, L. Bouveault et A. Verneuil; Secrétaire général : M. A. Bébhal; Secrétaire : M. G. Bertrand ; Vice-Secrétaires : MM. A. Hébert el Ch. Moureu; Trésorier : M. Petit; Archiviste : M. A. Desgrez. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 24 Novembre 1904 (suite). M. Wilderman : Communication préliminaire sur les piles galvaniques produites par l'action de la lumière. L'auteur a trouvé qu'il'y a, sous l’action de la lu- mière, une région de piles galvaniques aussi vaste et aussi variée que dans le cas des piles galvaniques ordinaires. Il a trouvé des piles constantes et incons- stantes, réversibles et irréversibles. Les réactions chi- miques et l’équilibre chimique dans les combinaisons galvaniques sont maintenant parfaitement élucidés; ils semblent cependant être tous sui generis, tous les processus étant mêlés et caractérisés par des phéno- mènes d'induction et de déduction, particuliers aux piles lumineuses seulement. L'auteur à réussi aussi à placer cette région de phénomènes sur une base phy- sico-mathématique, vérifiant expérimentalement les équations fondamentales dans tous leurs détails. Voici les principaux résultats obtenus : 4° La f. 6. m. totale, créée par la lumière, consiste en une f. é. m. produite par la lumière à une température constante, due à l’ac- croissement du potentiel chimique et de la pression de solution de la plaque exposée, et en une f.6.m.thermique produite par l’'échauffement, dû à la lumière, d'une des plaques en contact avec le liquide. On trouve que les deux f. 6. m. sont directement proportionnelles à l’in- tensité de la lumière; les deux donnent des courants de même direction, prouvant ainsi que la lumière agit sur le potentiel chimique aussi bien que sur la pression de solution de l'électrode de la même facon que la chaleur ; 2° Le cours particulier des périodes d'induction et de déduction permet de distinguer des piles cons- tantes et inconstantes, montrant la polarisation de l'une à l’autre. La considération de la composition chi- mique et des réactions se produisant dans les sys- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tèmes sous l’action du courant amène à des résultats identiques; 3° La période d’induction suit une loi dj dx = c(rot — r)(7 — r,4-K), qui donne en même temps la loi fondamentale de la photographie relatant le rapport entre la quantité de sels d'argent décompo= sés et le temps de l'exposition. La période de déduction suit une loi similaire :—dx/dr— c'(ro—7)(x—70 Ki); 4° L'équation fondamentale pour la f. 6. m. des piles constantes « réversiblés au point de vue du cation » (par exemple : plaque Ag à la lumière, solution de AgAzO® à la lumière, solution de AgAzO* dans l'obscurité, plaque Ag dans l'obscurité) est : ZE —0,860T (logeP:/Pa + 2v/u + vloger/pa) 107 volt, et pour les piles cons= tantes « réversibles vis-à-vis de lanion » (par exemple: plaque Ag— BrAg à la lumière, solution de KBr à la lumière, solution de KBr dans l'obscurité, plaque Ag — BrAg dans l'obscurité) : DE —0,860T(—logeP:/Pa + 2v/u + v log. pn/pa)10-4 volt, dans laquelle P: et Pa sont les pressions de solution des électrodes à lan lumière et dans l'obscurité, pr et pa sont les pressions osmotiques du cation ou de l’anion en solution à lan lumière et dans l'obscurité, et T représente la tempéra=« ture absolue. La théorie des piles thermogalvaniques termine ce travail. 5 Séance du 8 Décembre 1904. M. Henry J. S. Sand : Le rôle de la diffusion pen=« dant la catalyse par les métaux colloïdaux et les sub= stances similaires. Ce Mémoire contient une critique de l'opinion exprimée par Nernst (Zeitschrift. Phys Chem., XLVIL, 55) que la décomposition catalytique du peroxyde d'hydrogène due aux métaux colloïdaux a probablement lieu instantanément à la surface du cata- lyseur, de sorte que la concentration du peroxyde d'hydrogène est maintenue là d’une façon permanenten à zéro, et la rapidité de la réaction mesurée est celle avec laquelle la diffusion et la convection renouvellente le corps dissous en contact avec les particules catalyti=m ques. Comme résultat, l'hypothèse de Nernst amène à supposer que la réaction est du premier ordre, conclu- sion qui s'accorde avec les résultats expérimentaux trouvés par Bredig et ses élèves. Les valeurs récentes des constantes de vitesse expérimentales sont cepen- dant beaucoup trop petites pour permettre de les con- cilier avec l'hypothèse de Nernst; aussi celte dernière doit-elle ètre abandonnée. Pour arriver à ce résultat, on à calculé les valeurs minima théoriques pour lan vitesse de la réaction d’après l'hypothèse de Nernst. A cet effet, on suppose que les particules sont sphériques avec un diamètre de 0,5 y, valeur qui, d'après Bredig,s est plus grande qu'aucune de celles rencontrées dans ses solutions. Les particules étaient supposées dans un état de mouvement continuel, accomplissant ce qu'on appelle ies mouvements Browniens; mais, en se mou- vant à travers la solution, elles devaient entraîner une pellicule de liquide adhérente. Pour obtenir une valeur minimum de la vitesse de réaction, le volume total des pellicules était supposé égal à celui de tout le liquide: Le coefficient de diffusion du peroxyde d'hydrogène à 250 à été pris égal à 10 —5 cm°/sec., valeur qui est plus faible que celle de la plupart des substances ayant des molécules plus lourdes. Le rôle joué par la convection due aux mouvements Browniens des particules à été démontré; les résultats expérimentaux concernant la dépendance entre les constantes de vitesse et la con= centration du catalyseur ne peuvent s'accorder qu'avec l'idée d’une réaction hétérogène, si la convection joue un rôle important. Enfin, l’auteur montre que les faits expérimentaux s'accordent tous avec l'hypothèse que là vitesse actuelle de la réaction sur les surfaces des par- ticules à toujours une valeur limitée, qui est propor= tionnelle à la concentration du corps dissous en contact immédiat avec elles. Comme conclusion, les hypothèses de Nernst, en ce qui regarde la vitesse de réaction des systèmes hétérogènes, ont été critiquées au point de vue thermodynamique, et il a été démontré que, Sl elles peuvent être correctes pour la majorité des pro= ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 137 cessus physiques, il est nécessaire d’être prudent lors- qu'on les applique aux processus de nature chimique. Séance du 15 Décembre 1904. M. Charles H. Lees : Zffet de la température sur les conductivités thermiques de quelques isolateurs élec- æriques. La substance dont la conductivité thermique ést à déterminer a la forme d’un cylindre d'environ 8 centimètres de longueur et 2 centimètres de diamètre, entouré par un cylindre de cuivre mince et placé dans un tube Dewar. La chaleur est fournie par le passage d'un courant électrique à travers un fil de platine noyé dans la substance parallèlement à l'axe du cylindre et à une distance d'environ 4 centimètres de celui-ci. La température est mesurée par la résistance électrique de deux courtes spirales de fil de platine pur, n° 40, au centre de l’une desquelles passe le fil chauffé. La diffé- rence de température des deux spirales est déterminée en les prenant comme bras d'un pont à résistance dont -les deux autres bras sont égaux. Au moyen de coupes de mercure, des résistances peuvent être placées en série avec l’une ou l'autre des spirales jusqu'à ce que l'équilibre soit obtenu. On trouvera dans le tableau en quelques valeurs des conductivités en unités C. G. S. pour une certaine étendue de température sur échelle de l’hydrogène : L A 1200 ABs. A 180° ABS. À 2400 Ags. Glace. . .. 0,0062 0,0058 0,0052 Naphtalène . 0,0013 0,0011 0,00091 Aniline, . 0,001! 0,00086 0,01070 Para- -nitrophénol | - . 0,0010 0,00085 0,00070 Glycérine. : 0,00078 0,00082 0,00076 Cire de paraffine 5 0,00060 0,00065 0,00061 B-naphtol. 0,00067 0,00065 0,00063 Diphénylamine . 0,00058 0,00054 0,00052 SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 18 Janvier 1005. M. F. D. Chattaway a préparé les dérivés nitroha- logénés des sulfonamides par l’action de l'acide hypo- chloreux sur les sulfonamides etles alkylsulfonamides ; ils sont remarquables par leur stabilité et leur facilité de cristallisation, — M. H. D. Law, par l'oxydation électrolytique des aldéhydes aliphatiques saturés en solution sulfurique, à obtenu en majeure partie l'acide correspondant, et en plus petite quantité CO? et CO. Avec l'acétaldéhyde et le propaldéhyde, il se forme un peu d'hydrocarbure, d'après l'équation R.CHO +0 — RH + CO. — M. G. T. Morgan et M'° F. M. Mick- lethwait ont préparé les dérivés diazoïques des trois benzènesulfonylphénylènediamines CHSO®.AzH.CSH*. Az°Cl; les dérivés ortho et para, sous l’action des alcalis, se condensent pour former des diazoimides CSH5SO®.[ Az": CSH, — MM. S. E. Sheppard et Ch. E. K. Mees ont constaté que l’oxalate ferreux se dissout dans les oxalates alcalins pour former des sels doubles, tels que K?Fe(C?0}°, qui se dissocient en donnant un anion complexe négatif Fe(C?0*), peu stable. — M. H. O. Jones montre que, dans la formation d’un atome d'azote asymétrique dans un composé conte- nant un atome de carbone asymétrique, il se produit deux isomères & el 5. C’est le cas lorsqu'on combine Piodure d'allyle ou de benzyle avec la méthyl-/-amyla- niline. — M. W. C. Anderson a étudié l'oxyde de magnésie obtenu par la calcination de la magnésite naturelle et de trois formes de carbonate de magnésie artificiel. Les propriétés variables des oxydes obtenus paraissent être dues à la polymérisation qui se produit quand la magnésie est chauffée. — M. K. J. P. Orton a repris ses expériences sur la transformation des déri- xés du s-tribromodiazobenzène; 1l confirme ses vues précédentes sur le mécanisme de la réaction et ne trouve aucune preuve de la formation intermédiaire d'une nitrosamine, soutenue par Hantzsch, pour abou- tir à la quinonediazide, — M. A. W. Stewart montre que l'introduction d'un groupe méthyle dans une chaîne cétonique à une tendance à empêcher la formation d'un produit d’addition avec le bisultite de soude. — M. J.S. Lumsden, en réduisant par le sodium l'acide anisique dissous dans l'alcool amylique, a obtenu l'acide hexa- hydrobenzoïque et l'acide ô-cétohexahydrobenzoïque ; ce dernier est identique à celui qui à été préparé syn- thétiquement par Perkin. — Le même auteur a reconnu que les propriétés de l'acide hexahydrobenzoïque et de ses dérivés sont, en général, intermédiaires entre celles des acides heptoïque et benzoïque. Les points d'ébulli- tion des composés hexahydrobenzoïques sont de 9° su- périeurs à ceux des composés heptoïques et de 15° in- férieurs à ceux des composés benzoïques. — MM. Th. S. Paterson et F. Taylor ont déterminé les rotations du menthol et des menthyltartrates et ont comparé les valeurs obtenues avec celles du volume moléculaire de solution. Il y a une relation très étroite entre les deux phénomènes. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Séance du 5 Décembre 1904. M. E. Divers fait un examen critique de la théorie de Raschig sur le processus des chambres de plomb, et la remplace par une théorie plus compréhensive. Pour lui, les particules du brouillard des chambres de plomb consistent en acide sulfurique fort, tenant en solution de l'acide nitrososulfurique ; elles absorbent continuelle- ment de l’anhydride sulfureux et de la vapeur d’eau, en formant de l'acide sulfurique et de l'acide nitrososul- fonique : 2H°0 +- 20Az.0.S0°H + 2S0? — 2S0?(0H)° + 2047z.SO%H. L'acide nitrososulfonique réagit sur l'acide nitrososulfurique non décomposé suivant l’équation : 20Az.SO%H 2047.0.S0*H = 4A70 + 20(S0*H)}?; mais les produits de la réaction se recombinent en présence d'oxygène pour former l'acide nitrososulfurique : %A20 + 0? + 20 (SH)? — 40A7.0.SO'H. Celui-ci agit donc en somme comme catalysateur. — M. E. Divers présente une théorie de l’ac tion des métaux sur l'acide nitrique. Ag et Hg n'agissent sur cet acide qu'en pré- sence d'acide nitreux comme catalyseur, et le conver- tissent en molécules égales de nitrite et de nitrate 24 g + 2HAz0° — AgAz0* + AgAzO°ÆH°0. Le zinc ou l'étain agissent sur l'acide nitrique en produisant un nitrate, et de l'ammoniaque, de l’oxyde d'azote et de l'azote : 4Zn-+ 8AzOSH + O°Az.OH — 4Zn(Az0°} + 3 H°0 + AzH* 4Zn+ SAzOSH + 20°A7.0H — 4Zn(Az0*} + 5 H?0 + Az°0 5 Zn +140 AzOSH + 2 0°Az.0H — 5 Zn(Az0*)° + 6 H°0 + Az7° Le produit primaire de la réaction est, en réalité, l'hy- droxylamine, qui peut être isolée en présence d'un acide stable : 62n + 7TSO*H® Æ 20*A7.0H — 6ZnS0 + 4H°0 + SO+ (AzH° OH}. — M. C. S. St. Webster pré- sente un nidbscee pour comparer les substances sous l'influence des rayons du radium. — MM. J. S. Rowland et L. J. Davies décrivent une nouvelle mé- thode pour la détermination du phosphore dans les minerais de fer. Elle consiste essentiellement à oxyder le minerai par incinération avec de la magnésie, et à bouillir ensuite avec de l'acide nitrique dilué. On obtient ainsi une solution qui contient tout le phosphore ; celui-ci est déterminé par titration du précipité Jaune avec de la soude et de l'acide nitrique titrés. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 14 Décembre 190#. M. H. J. Watson considère comme tout à fait impos- sible, en l'absence de nouvelles recherches et de mé- thodes meilleures pour distinguer les diverses formes de collagène, d'obtenir aucune évaluation de la colle 158 ou de la gélatine par des méthodes chimiques. L'action de la chaleur est différente de la peptonisation par les bactéries, et, quoi qu'elle tende à diminuer les pro- priétés gélatinisantes, elle n'affaiblit pas les propriétés adhésives. Rideal a, d’ailleurs, montré qu'après douze heures de chauffe toutes les propriétés physiques impor- tantes déclinent, tandis que les réactions chimiques sont peu altérées. SECTION DE NEW-YORK Séance du %5 Novembre 1904. M. R. E. Divine propose une nouvelle méthode pour faciliter la filtration et le lavage des précipités d'alu- mine, opérations longues et difficiles, surtout dans l'analyse des argiles. A la solution contenant environ 0,1 gramme d'alumine, on ajoute 2 centimètres cubes d'une solution d'acide tannique à 2-2 4/2 °/;, puis de l'ammoniaque en léger excès, et l’on fait bouillir jusqu'à ce que l'odeur d'ammoniaque ait à peu près disparu; l'alumine est précipitée sous une forme qui peut être filtrée très rapidement à l'aide d'un tube à succion et qui permet le lavage rapide de tout le chlore. En présence de grandes quantités de chaux ou de magné- sie, il est bon de redissoudre, puis de précipiter une seconde fois. — M. A. C. Langmuir décrit une méthode pour la détermination de la rosine dans la cire à ca- cheter; elle est basée sur la détermination de l'indice d'iode caractéristique au moyen d'une solution de Wijs. — M. H. A. Frasch signale un nouveau procédé indus- triel dans lequel on peut obtenir de la soude caustique. L'hydrate de nickel, en présence d’ammoniaque, réagit sur le chlorure de sodium ou de potassium en donnant du chlorure de nickel-ammonium et de l'alcali caus- tique. Le premier, qui est insoluble dans la liqueur caustique, est séparé par filtration (et soumis à la dis- tillation, qui régénère de l'oxyde de nickel et de l'am- moniaque, lesquels retournent aü processus), tandis que la solution d'alcali est concentrée à la manière ordinaire. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 30 Novembre 1904. M. E. Carey fait une conférence sur les industries chimiques aux Etats-Unis. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Novembre et Décembre 190%. 1° SciENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Millosevich pré- sente des observations de la comète Encke. — M.E. Pas- cal : Sur les équations différentielles relatives à cer- lains covariants des formes algébriques (extension de quelques recherches de Brioschi et Betti). — M. G. Fu- bini s'occupe d'une question fondamentale pour la théorie des groupes et des fonctions automorphes. — M. T. Boggio : Sur la déformation des plaques élas- tiques cylindriques de grosseur quelconque. — M. G. A. Crocco : Sur la stabilité des aérostats dirigeables ; dans cette Note, l'auteur soumet au caleul les résultats obte- nus par le colonel Renard dans ses dernières expé- riences. — M. L. Orlando : Sur la déformation d'un dièdre isotrope d'ampleur sous-multiple de %. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. L. Puccianti, reprenant les recherches de Wiedemann, Schmidt et Wood sur la fluorescence de la vapeur du sodium, à confirmé l'existence, dans son spectre, des raies D, D,, et il décrit les particularités des ondulations qui les produisent. — M. G. Guglielmo expose ses recherches pour trou- ver un moyen de déterminer l'heure exacte, avec une erreur moindre d'une seconde, à l'aide d'un gnomon de dimensions ordinaires; il parle, en outre, de quelques instruments simples qui peuvent servir à la vérification exacte de l'heure. — M. P. Gamba donne des détails sur les expériences exécutées par lui sur l'élasticité du marbre en plaques minces; il présente les courbes qui reproduisent l'allure des déformations lorsque les forces ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de flexion sont appliquées de différentes manières. = M. G. Martinelli présente le résultat de ses expériences sur la radio-activité de quelques roches des environs des Rome; on a observé les phénomènes radio-actifs seu lement dans les roches d'origine éruptive, et ces phé nomènes sont du même ordre que ceux observés déjin pour les pouzzolanes, tandis que les roches sédimenn taires ne possèdent, en général, aucune radio-activit appréciable. — M. C. Carpini a éludié la dispersion: électrique des sources thermales de Acquaxanta (Ascoli)s et il a reconnu que l'air des grottes, où l’eau surgit, & un pouvoir dispersif moindre que celui de Fair exté rieur; les boues déposées par l'eau ne sont point radios actives, ce qui prouverait que les propriétés thérapeu= tiques des boues et des eaux ne dépendent pas de lan radio-activité.— M. A. Herlitzka donne la description d'un appareilqu'il a imaginé pour enregistrer d'une mas nière automatique les variations de la température d’un milieu donné, et qui se prète très bien aux recherches physiologiques. — M. F, Eredia s'occupe de l'inversion de la température, phénomène qui fait que souvent, pens dant la nuit, la température des lieux élevés et sur les sommets des montagnes est plus haute que dans les val= lées. M. Eredia a tâché de déterminer, dans des Obser= vatoires de Monte Cavo et de Rocea di Papa, les condi= tions météorologiques qui accompagnent le phénomène; ila trouvé que l'inversion est plus fréquente à 9 heures; et que les cas d’inversion les plus persistants et les plus: marqués furent accompagnés par des indications baro= métriques élevées et par une atmosphère calme et sereine, — M. @. Bruni, après avoir développé ave® M. Finzi la théorie générale des phénomènes cryohy= dratiques dans les mélanges isomères optiques, montre comment, de lasurface de congélation et de l'allure des isothermes relatives, il est possible de déduire des conclusions sur lPétat moléculaire des corps dissous; c'est-à-dire sur l'existence de molécules racémiques ent solution, ou sur leur absence. — En comparaison du platine, les composés, simples ou complexes, du pallaz dium tétravalent connus jusqu'ici sont en très petit nombre. M. I. Bellucci, dans le but de remplir cette lacune, à entrepris l'étude des composés sulfocyaniques du palladium, et il montre, par ses expériences, que, à l'inverse du platine, les composés sulfocyaniques rap= portables au palladium tétravalent n'existent pas ou sont très instables. — MM. M. Betti et C. M. Mundici ont cherché à établir si les relations du naphtol avec le phénol et le camphre peuvent se manifester entre les aldéhydes salicylique, f-oxynaphtoïque et camphoriques — M. E. Manueli à préparé l’éther ethylpipéronylique; et il en donne la description. — MM. G. Plancher eb C. Ravenna ont étudié l'assimilation du carbone danse les végétaux, et ils affirment avoir exclu par leurs recherches la formation de l'aldéhyde formique pen dant cette assimilation. — Une étude intéressante est celle des métamorphoses qui se produisent pendant la germination des plantes vivaces ayant des graines riches en graisse. M. G. Sani à accompli cette étud sur les graines du hêtre, que l'on faisait germer rapide ment à une température de 459 et avec une humidité modérée, et il donne les résultats de la détermination des graisses, des substances protéiques, ete., qu'il a trouvées dans les graines. — Dans une ‘autre Note“ M. Sani annonce que, pendant la préparation de la phy= tostérine de l'huile d'olives, il a trouvé et séparé unes substance, dont il décrit les propriétés, qui n'a dem relation ni avec la phytostérine de l'huile d'olives, ni avec la cholestérine ordinaire. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Zambonini comimus nique les analyses, exécutées par lui, de quelques laws sonites italiennes ; ces analyses paraissent en accord satisfaisant avec la formule H,CaAlL,Si,0,,. — M. E. Re possi, qui, étudiant de nombreux cristaux de fumarale monopotassique, avait reconnu qu'ils appartenaient à système triclinique, a repris ses observations sur le fumäs rate mono-ammonique que Pasteur avait signalé commen monoclinique, et a reconnu que ce second fumarat& ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES appartient au même système que le premier. — M. C. De Stefani s'occupe de quelques terrains éocéniques de Ja Dalmaltie et en étudie la stratigraphie, — M. D, del Campana apporte une contribution à la connaissance du Trias supérieur du Monténégro, dont il décrit les fossiles recueillis dernièrement par M. Martelli. — M. E. Clerici s'occupe de la stratigraphie du volcan latial, et il donne la série des roches qui le composent. — M. A. Mosso poursuit ses recherches sur les rela- tions qui existent entre Ja présence de l'anhydride car- bonique dans le sang et les mouyements respiratoires, et il décrit les expériences faites en injectant à des chiens des substances capables de se combiner avec CO. Ces injections arrètent les mouvements respira- toires sans déranger les fonctions du système nerveux et du cœur; elle font paraitre une respiration pério- dique, ce qui explique, par la diminution de la tension de l'anhydride carbonique, cette forme particulière de respiration que l’on observe chez l'homme et chez les animaux sur les Alpes à de grandes hauteurs. Dans le cours des expériences, on à vu des arrêts de la respi- ration, par effet des injections d'hydrate de sodium, d'une durée de presque trois minutes, ce qui prouve- rait que les excilations respiratoires sont dues à des Substances qui prennent naissance dans les cellules nerveuses, et que celles qui dépendent de l'accumu- lation de l'acide carbonique sont plus énergiques que celles qui dérivent du manque d'oxygène. — MM. B Grassi et L. Munaron communiquent leurs dernières recherches pour préciser la cause du goitre et du cré- linisme endémique. On à continué les expériences sur des chiens, et elles font croire que, en dehors du milieu où le goitre se forme naturellement, on ne peut oble- nir l'apparition du goitre que dans des milieux fermés où l'on a accumulé des matériaux provenant des loca- lités où le goitre est endémique. — Mie À. Foà trans- met la seconde partie de ses recherches sur la repro- duction des Flagellés, et s'occupe de la manière dont s'accomplit la division des Triconymphes etdes formes analogues. — M. G.. Rossi à continué ses recherches sur la mécanique de la digestion chez le poulet, et il décrit ses observations expérimentales sur les contractions de l'estomac glandulaire et de l'estomac musculaire, et sur les mouvements qui accomplissent la mastication gastrique. L'estomac musculaire ne se trouve jamais en repos absolu ; la fréquence de ses contractions touche au maximum dans le jeune prolongé et varie dans les différentes périodes de la digestion. — M. L. Petri a observé, sur des plantes de haricot, une infection due au Sclerotina Libertiana Fuck, qui, au lieu de com- Mmencer à attaquer les tiges, se manifeste tout de suite sur les fruits; cette différence dans la propagation de Linfection est due au fait que les fragments des pétales des plantes tombaient sur les fruits, s'y décompo- Saient, favorisés en cela par une forte humidité, et de celle façon se trouvaient réalisées les conditions favo- rables à la germination et au développement des spores et des parasites. — Dans une autre Note, M. Petri s'oc- “cupe d'une colonie bactérienne qu'il a pu observer “ans toutes les larves de la mouche de l'ohvier (Dacus “bleae), de provenances et d’âges différents; ces micro- organismes sont expulsés par la mouche à la fin de la période larvaire. ERNESsTO MANCINI. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE : Séance du 15 Décembre 1904. - Jo Screxces PHYSIQUES. — M. A. Boltzmann décril une modification de l'électroscope d'Exner dans laquelle il a rendu les feuillets indépendants de leur support et empêché, pour un fort écartement des feuillets, un choc contre ce support. — M. G. Jager présente trois appareils nouveaux : un polaristéréoscope, projetant les images en lumière polarisée linéairement; un stéréos- cope à concentration, envoyant les images sur une grosse lentille qui forme de nouvelles images sur les yeux des spectateurs; un appareil d'agrandissement 139 stéréoscopique. — M. C. Doelter montre que la capacité de cristallisation d’un mélange fondu dépend plutôt du nombre des centres de cristallisation naissant sponta- nément que de la vitesse de cristallisation, car cette dernière est une propriété vectorielle qui se modilie avec la direction. — M. R. Kremann montre qu'il n'est pas possible de tirer, de la vitesse de saponifica- tion observée dans les systèmes hétérogènes, une con- clusion sur le mécanisme de la réaction, car celle-ci est déterminée par des phénomènes purement physi- ques, comme la vitesse de solution. Ainsi la saponifica- tion des éthers peu solubles, comme le benzoate d'éthyle, peut être uniquement monomoléculaire, tandis que celle des éthers plus solubles est d'abord monomo- léculaire, puis dimoléculaire vers la fin de la réaction. — MM. A. Lipschitz et R. von Hasslinger montrent que le sulfure de fer, traité par les acides dilués, con- lient du fer métallique, qui entre d'abord en solution ; l'hydrogène produit réduit Fe S en IPS et Fe; c'est ce dernier qui maintient la marche de la réaction en agissant comme catalysateur. — M. R. Hertzka à préparé les produits de condensation de la dibenzylcé- tone avec l’aldéhyde anisique et avec le pipéronal en présence de HCI gazeux; ce sont des cétones chlorées, qui, chauffées avec les alcools, échangent leur chlore contre un alkoxyle. ÿ 2° SCIENCES NATURELLES. — M. H. von Wielowieczki confirme ses précédentes recherches sur les PRE nutritifs des cellules de l’œuf avec les cellules de l'albu- mine chez les insectes, ces dernières servant d'organes glandulaires et nourissant les cellules de l'œuf par l'intermédiaire de canaux. — M. F. Werner décril un genre nouveau de Ja famille des Mantides (Orthop- tères) qu'il a trouvé en Egypte; il le nomme Centro- mantis Mantidarum. — M. A. von Hayek : Etudes monographiques sur le genre Saxifraga. 1. La section du Porphyrion Tausch. — M. F. Becke : Observations géologiques sur le percement du tunnel du Tauern. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Décembre 1904 (suite). 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. A. Lorentz : Le mouvement des électrons dans les métaux. Première communication. Si l’on s'imagine que chaque métal contient un grand nombre d'électrons libres, se mou- vant avec une vitesse dépendant de la température dans l’espace intermédiaire entre les atomes métal- liques, on arrive à une explication du pouvoir de con- duetion pour lPélectrieité et la chaleur des courants thermo-électriques, de l'effet de Thomson, de l'effet de Hall et de plusieurs autres phénomènes, comme lont démontré surtout MM. E. Riecke, P. Drude et J. J. Thom- son. Iei, l’auteur applique à ces phénomènes une mé- thode différente. 1. Suppositions simplificatives : Le métal ne contient qu'une espèce d'électrons libres, admettant tous la même charge e et la même masse m; l'unité de volume contient N de ces électrons à énergie cinétique moyenne &T, où T est la température absolue, et « une constante. Le mouvement rectiligne des élec- trons est borné principalement par les c hocs contre les atomes métalliques, par rapport à l'influence desquels celle des chocs des électrons entre eux peut être négligée. 2, Détermination du nombre y, indiquant le surplus des particules se mouvant dans l'unité de temps à travers l'unité de section, normale à la direction prin- cipale du problème, comparé d'abord aux mouvements dans un barreau cylindrique, dans la direction positive, sur celles qui se meuvent en sens contraire, et de l'énergie de chaleur W correspondante, En désignant par f(E,n, €) dÀ le nombre des points de vitesse (£, n, Ÿ) de l'élément dàX, par dS l'élément de volume, l'auteur {trouve : = / L(E, n, t)d, Séance du ?4 N=— f{1E,n 948, V—!m ET ti; &) D =; LE (E, 1, & 140 3. Déduction de l'équation différentielle : df dë X+ df; 5 dn vie dE x ° dy” déterminant la fonction £. 4. Si R représente la somme des rayons des électrons, et r la vitesse (£, 1,6), on a : c—nR?r / [(E!, n!, L')—T(E, n, €)] cos Adw, où » est le nombre des atomes métalliques de l'unité de volume. 5. Introduction de la loi de distribution Î(E,n,0)—= Ae—%r® de Maxwell, où 6. La formule ÎLE, n, t) = Aer? Ho, n, t) correspondant au cas où l’état du métal change de point en point. La supposition ares pe, n, €) = Ex(r), d'où découle £ dA dh ner )(2hAx — © + AT). (Em 0—e-h/(2hAx — 4 AT) 7. Les résultats : 2 1] dA A dh re {lo Gps Dr F snif (2rex ral Ron 1 dA A dh Te Az) (D; = QUES # =;rm(; (ons =) de el pour le « courant d'électrons » et le « courant de cha- leur ». 8. Le pouvoir de conduction électrique 9. Le pouvoir de conduction de chaleur __ S8x/Aa = = - 10. Introduction du potentiel 9, où ee e do TN ES La force électromotrice T'/! 2% £ Nr Re a log Na QUE 4 — M. P. Zeeman: La réfraction double dans un champ magnétique à proximité de raies d'absorption magnéti- quement décomposées. Les expériences antérieures de l'auteur (Rev. génér. des Se., 1. XI, p. 552) ont démon- tré que la théorie magnéto-optique de M. Voigt ( Wre- dem. Anu.,t. LXVII, p. 359) rend compte de tous les phénomènes se présentant à la proximité des raies d'absorption. En faisant passer de la lumière à travers du sodium dans la direction normale aux lignes de force, on observe la réfraction double, prédite par la théorie de Voigt, qui doit se présenter dans les subs- tances isotropes placées dans un champ magnétique et qui devient mesurable si l'on expérimente tout près d'une raie d'absorption. MM. Voigt et Wiechert exami- nèrent l'entourage des raies d'absorption d’une flamme contenant une: quantité assez considérable de vapeur dé’sodium à l'aide d'un petit réseau. L'auteur a étendu cette recherche (Rev. génér. des Se., t. XEV, p. 840). Ici M. Zeeman communique les résultats obtenus par M.J. Geest, qui, à son tour, a poursuivi le même ordre d'idées. Comme le montrent les figures obtenues, ses résultats s'accordent avec la théorie. — Ensuite M. Zee- man présente là thèse de M. J. Geest : « De magne- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tische dubbelbreking van natriumdamp » (La réfraction double de la vapeur de sodium). — M. J. D. van der Waals présente au nom de M. Ch. M. van Deventer® « On ima= Le dégel de la glace flottante. Problème : gine un réservoir rempli jusqu'à une certaine hauteuxs d'eau, portant un morceau de glace de poids déterminé à la température zéro. Quelle variation subira le niveau de l’eau dans le réservoir si la glace dégèle? ». Solu tion : « Le niveau ne change pas du tout ». — M. H Kamerlingh Onnes présente au nom de M. J. E. Vers schaffelt : Sur l'influence d'impuretés sur les phéno mènes critiques de substances simples et lexplicütion) La con= des expériences de M. Teichner. Conclusion : naissance de la conduite des mélanges de 0? et de CO montre que de très petites quantités de O0? ajoutées à CO® (par exemple quelques millièmes de molécule) sufs fisent pour l'explication des variations de la densité der CO* observées par M. de Heen (Rev. génér. des Se., t. XI p. 391). En supposant que la substance CCI, dont s’est. servi M. Teichner, contenait tout de même des quan= tités minimales d'autres substances, les expériences de M. Teichner, quoi qu'elles laissent moins à désirer que celles de M. de Heen, s'expliquent de la même manière — M. H. W. Bakhuys Roozeboom présente : 19 au nom de M. S. Tymstra, Bz. : La synthèse asymétrique de l'acide valérique optiquement actif par M. W. Marck= wald:; 2 au nom de M. A. H. W. Aten : Le syslème pyridine et iodure de méthyle; 3° au nom de M. J. JA Blanksma : Le trinitrovératrol. — Ensuite, M. Rooze= boom présente les thèses de M. P. C.E. Meerum Ter= wogt « Onderzoekingen over het stelsel bromium en jodium » (examen du système « brome-iode »), de M. A. H. J. Belzer : «Omzetting van tri-en tetrabroom= phenolbromide in tetra-en pentabroomphenol » (trans= formation, etc.), de M. H. W. R. Raken : « Snelheids=« bepalingen van de verspringing der nitrosogroep by aromatische nitrosamine » (Détermination de la vitesse du déplacement par saut du groupe nitrosé dans | nitrosamines aromatiques), de M. J.F.Suyver : « On derzoekingen over omzetting tusschen stereoisomeren trithioaldehyden » (Etude des transformations, etc.). -= M. A.F. Holleman présente au nom de M. J. Bôeseken M La réaction de Friedel et Crafts. Comme on le sait, la. réaction indiquée ne se présente pas toujours de 1 même manière; quelquefois, des traces mêmes du cata lysateur suffisent pour la préparation de grandes quan= ütés du produit cherché ; quelquefois, on à besoin pour réussir de quantités assez considérables. En second lieu, la réaction dépend de nombreuses circonstances; liées à une action secondaire du chlorure d'aluminiu sur une des substances présentes ou à ces substances elles-mêmes. S'appuyant sur le grand nombre de syn= thèses de date postérieure à la découverte de la force catalytique du chlorure d'aluminium, l’auteur se pros ose de faire connaitre la cause de cette conduite variable. Successivement, il considère cinq cas diffé= rents, où les actions secondaires ne se présentent pas: — M. W. H. Julius présente au nom de M. E. Cohen: Note nécrologique sur Cornelis Adriaan Lobry da Bruyn. — M. J. M. van Bemmelen présente : Bei trüge zur Kenntnis der Verwitterungsprodukte de Silikate in Ton-vulkanischen und Laterit-Boden ». 3° SCIENCES NATURELLES. — Rapport de MM. J. M. var Bemmelen et G. van Diesen sur une étude de M. g# Lorié : « Beschrijving van eenige nieuwe grondbhorins gen » (Description de quelques nouveaux percementss de sol). — M. C. A. Pekelharing présente : « Voor drachten over weefselleer » (Leçons d’histologie), pre mière partie. — M. S. Hoogewerff présente le Bulletin n° 31 du Musée colonial de Harlem, contenant une étude de M. E. L. Selleger : « Studien over Neder landsch-Indische Vezelstoffen » (Etudes de matières fibreuses des Indes Neerlandaises). P. H. Scout. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE 30 FÉVRIER 1905 Revue générale S Science pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. 29 Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Kevue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $S 1. — Mathématiques La somme des angles du triangle et les hyperespaces. — On a, dans le plan, une relation entre les angles d'un triangle. Rien de pareil n'a lieu dans l’espace à trois dimensions; mais, par contre, il existe une relation entre la somme des angles d'un triangle sphérique et la surface de ce triangle. C'est dans ce domaine tout élémentaire que M. Poin- caré a trouvé la matière d’une découverte nouvelle. Il a prouvé que la première des deux relations que nous venons de rappeler s'étend (moyennant l'intervention d'angles de différentes espèces)aux espaces à un nombre pair de dimensions, la seconde au cas où le nombre des dimensions est impair. Les deux propositions n'en font, à vrai dire, qu'une, la première dérivant de la seconde. C'est ainsi que le triangle plan peut être con- sidéré comme cas limite d'un triangle sphérique (infini- ment petit). L'intérêt de ce double résultat ne réside, d’ailleurs, pas seulement dans une généralisation, passée inaper- ue jusqu'ici, d'un théorème classique. La question que M. Poincaré à ainsi résolue s'est posée à lui dans l’ex- tension aux hyperespaces de la théorie des groupes et “des polygones fuchsiens. » & S 2. — Physique du Globe Théorie nouvelle des Séismes. — Dans le remarquable ouvrage que nous avons eu plus d'une fois l’occasion de mentionner dans cette chronique, M: Tammann consacre quelques réflexions aux trans- formations de la matière dans les conditions d'existence “qui lui sont faites au sein d'un corps céleste dans le-, quel elle est soumise à une très forte pression. Les recherches de M. Tammann lui ont montré des cas nombreux de changements de l’état cristallin sous pression, ou de cristallisation en partant de l’état amor- phe, liquide ou non liquide. Une telle transformation Se produit quelquefois sur la courbe d'équilibre, mais peut aussi subir un retard très considérable, lorsque es noyaux nécessaires au début d’une nouvelle cristal- lisation sont absents du milieu. On peut alors empiéter largement sur les conditions du changement dans l’état REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES 1905. cristallin sans que celui-ci se produise; mais, si les noyaux se forment, alors la transformation peut être très rapide et prendre le caractère d'une explosion. Or, les conditions d'existence de la matière à une certaine profondeur au-dessous du sol se modifient peu à peu à mesure de l'abaissement de la température de notre globe, des infiltrations ou de la formation de com- binaisons nouvelles. Telle matière qui, pendant de longues périodes, ne pouvair exister qu'à l’état amorphe peut donc arriver, à une autre époque, aux conditions normales d’un état cristallin déterminé. Si, en même temps, des noyaux de cristallisation se forment au sein de la matière, la transformation s'opère graduellement, et nous assistons, par le fait de la variation du volume spécifique qui en résulte, aux mouvements lents de la surface du sol. Mais, si la surfusion existe, ou si la courbe d'équilibre de deux états cristallins a été tra- versée, alors la transformation sera brusque, et se tra- duira par une forte secousse de tout le terrain environ- nant. Aux faibles pressions, la règle générale est une con- traction de la matière par la cristallisation. Mais à la profondeur où se produisent les centres des séismes, la pression est suffisante pour que l'inversion puisse avoir lieu pour un grand nombre de corps. Ce seraient d'excellentes conditions de surfusion, et les retards de- vraient dès lors être fréquents, Aux pressions existant aux grandes profondeurs, des variations peu considé- rables du volume devraient déclancher de fortes quan- tités d'énergie, ce qui expliquerait les effets parfois ter- rifiants des secousses souterraines. $ 3. — Art de l’Ingénieur Pendule en acier-nickel entretenu éleetri- quement. — Les remarquables travaux de M. Ch.- Ed. Guillaume ont immédiatement mis en évidence l'intérèt considérable qu'ii y aurait pour l'horlogerie à utiliser une matière dont la dilatation peut être nulle, en première approximation; s'appliquant à la cor- rection de l'erreur secondaire de compensation des chronomètres, l'emploi judicieux des aciers au nickel dans la construction des balanciers a permis à M. Guil- laume de résoudre le problème par un moyen très # 142 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE simple, sans l’adjonction d'aucun système de compen- sation auxiliaire. Deux problèmes distincts se posent, relativement aux chronomètres : il peut, tout d’abord, être désirable de transformer le chronomètre, qui est déjà un instrument de précision moyenne, en un instrument de précision instantanée: dans ce cas, il faut pouvoir rendre les oscillations parfaitement identiques. On sait qu'une telle préoccupation est ancienne chez les horlogers et qu'un grand nombre de « remontoirs d'égalité » ont été imaginés : jusqu'alors, la fusée bien taillée a paru suffire, et les remontoirs d'égalité, tous délicats et dépourvus de sécurité, ont été abandonnés.Cependant, reprenant cette étude, M. M. Brillouin! a pu montrer que les chronomètres de la Marine, même les plus précis, ont un très grave défaut, qu'exagèrent beau- coup des imperfections de construction à peu près inévitables : à savoir que l'amplitude du balancier varie constamment, dans des limites bien plus larges qu'on ne l’imagine d'ordinaire, et d'une façon apparente fort irrégulière, — de sorte que l'épreuve dite d'isochro- nisme, à ressort désarmé, est d'une interprétation très incertaine. Ce sont ici les frottements des engrenages, les pas- sages des dents, les tourillons, les erreurs dans les distances des ceutres, les excentricités de roues ou de pignons, les irrégularités individuelles des dents. causes multiples qui viennent se combiner à l'infini pour donner les irrégularités si complexes, et puisque, malgré tous les soins, l’action individuelle de toutes les dents du rouage paraît impossible à éliminer, le seul moyen d'annuler les variations d'amplitude semble bien être l'emploi d'un remontoir d'égalité, du moins assez simple et précis. Mais, par ailleurs, on peut se proposer de perfec- tionner le chronomètre en tant qu'instrument de pré- cision moyenne. Or, lorsqu'un balancier compensateur de chronomètre à été réglé pour deux températures, il est soumis aux lois suivantes, énoncées en 1833 par le célèbre horloger anglais Dent : 1° Entre les deux températures pour lesquelles il a été réglé, le chronomètre avance ; 20 Au-dessus et au-dessous de ces températures, il retarde. Ainsi, la marche du chronomètre, au lieu d’être représentée par une droite, l'est par une courbe de forme parabolique, coupant la droite théorique en deux points correspondant aux deux températures de réglage. Réduire l'erreur secondaire, où l'écart entre le sommet de la parabole et la droite théorique, c’est-à- dire rapprocher l'arc parabolique de sa corde théorique, fut depuis longtemps l'objet d'efforts multiples et de procédés ingénieux, parfois compliqués, qui restèrent presque impuissants. Seul, le palladium eût pu fournir des spiraux avantageux, si sa stabilité n'avait pas été très loin de celle de l'acier. C'est par l'emploi de l’acier-nickel que M. Guillaume a pu vaincre cette difficulté considérable, et si, dès l'Exposition universelle de 1900, MM. Ditisheim et Nardin présentèrent déjà d'intéressantes applications, M. Ditisheim® a pu fournir, depuis lors, desrésultats plus étendus, montrant bien le succès de cette tentative. Nous ne pouvons ici citer tous les travaux de M. Guil- laume sur les aciers au nickel, soit à peu près purs, soit à fortes doses de matières étrangères, sur leurs propriétés mécaniques, leurs transformations irré- versibles, leur magnétisation, etc. En particulier, au sujet de l’acier-nickel peu dilatable, deux courants d'opinion se sont formés parmi les praticiens : les uns, frappés des avantages résultant de la faible dilatabilité de cet alliage, pensent quele champ de ses applications est illimité; d’autres, au contraire, plus timorés, s’atta- chant aux variations qu'il éprouve avec le temps, 1 M. Briczoui : Bulletin de la Société d'Encouragement, mai 1899 : Société française de Physique, avril 1902, estiment qu'il doit être complètement banni de tous les usages confinant aux mesures de précision. 1 Ces deux opinions sont également erronées! : less changements d'état que le temps apporte dans ces alliages nécessitent une certaine prudence; mais, d'autré part, ce serait méconnaitre singulièrement les incons, vénients des dilatations ordinaires que de renoncer à employer un alliage qui les évite presque complètements pour cette seule raison que ses dimensions ne restent pas rigoureusement identiques dans le cours des années. D'ailleurs, dès aujourd'hui, les mesures sont suffisantes pour affirmer que, durant une dizaine d'années, la variation de longueur d’une tige d'invan ne dépassera guère le cent millième, et, d'autre part, cette variation s'est toujours montrée d’une régularité parfaite en fonction du temps : ainsi, par exemple, on n'a jamais pu constater un saut de l’ordre du demis micron sur une barre de { mètre. Or une telle varia= tion, agissant sur la tige d'un pendule libre battant la seconde, correspondrait à un écart de deux cen= tièmes de seconde environ par jour, quantité extrèmes ment petite et qui pourrait encore, le cas échéant, être rapportée à bien d'autres causes perturbatrices. Dans ces conditions, et puisque le succès a été obtenu presque complètement pour les chronomètres, il est pareillement indiqué de chercher à étendre cette application aux pendules simples, tels qu'ils sont employés dans les observatoires : l'expérience a montré immédiatement, entre les mains de M. Caspari, le bien fondé de cette tentative, et, sans que la compensation soit parfaite, on peut, du moins, obtenir du premier coup une marche très suffisante par un pendule d'invar, Ici, au reste, il ne sera pas avantageux de recourir à un acier-nickel à dilatation nulle, quant à son premier terme : on devra choisir, dans la variété des types, un alliage dont les deux premiers coeflicients soient positifs, car, dans ce cas, on peut obtenir un maximum de compensation avec une masse de laiton: Mais, si l'on entre dans cette voie, il n’y a pas de raison pour ne pas pousser le perfectionnement plus loin encore; et, se rappelant l'influence de la pression barométrique sur la marche d'un pendule, on doit. chercher à obtenir un appareil situé dans un espace hermétiquement clos : j or, jusqu'ici, les nécessités du remontage, des visites, ont empêché les observatoires de réaliser ce point très important, tandis que l'ingé= nieux dispositif de M. Lippmann pour l'entretien élecs trique du mouvement pendulaire conduit à la solution définitive de ce problème. Tel est, répondant aux dernières exigences de lan science, le pendule que M. Jean Mascart* vient de faire exécuter par une de nos plus vieilles maisons d'horlos gerie, la maison Henry-Lepaute. Le pendule est cons titué par une tige d’invar avec, pour suspension, unê lame de ressort; filetée vers son milieu, la tige porte une vis propre à achever le réglage; la masse du pens dule est constituée par un cylindre de laiton pu coulissant sur la tige et, pour éviter les rotations, unê rainure intérieure laisser passer une goupille fixée dans la tige; la masse repose sur un écrou, vissé à la partiel inférieure de la tige, et permettant le premier réglages les aimants de M. Lippmann, en avant et en arrière sont fixés sur la masse de façon que leur action S produise au centre de percussion, et la compensation de toutes les pièces est calculée en tenant compte des variations des moments d'inertie dues à la températures La suspension à ressort, elle-même, peut ètre uné difficulté pour les instruments de haute précision, db cause des glissements brusques entre parties d’inégalé dilatabilités; mais l'invar lui-même, sans pouvol constituer un très bon ressort, au sens généralement attribué à ce mot, peut être suffisant pour les défo mations minuscules qu'ont à supporter les suspensia de pendules : en dehors d’une difficulté de travä 1 Cu.-Ev. GuizLauMe : Journal suisse d'Horlogerie, 1902: 2 C. R. de l'Ac. des Sc., 12 décembre 1904, 4 ble, nous ne voyons donc pas pourquoi on n'a pas hé à réaliser en invar toute la suspension, ressort encastrement. Au reste, l'expérience seule pourra her de lutilité de cette modilication et, pour ant, on peut toujours essayer un ressort et une ée de mème métal, soit acier avec acier, soit bronze c bronze. pendant, ce travail nous apprend aussi une chose 2eurieuse : c'est qu'un tel instrument est déjà trop ble pour être réglé provisoirement; seule, l'instal- on définitive permet d'obtenir de bons résultats, et bque le pendule n'est pas solidement encastré, il est ipossible de le régler complètement. voit l'importance des questions soulevées et le grès qui en peut résulter pour l'horlogerie de pré- n, d'autant plus que, par ce procédé, on peut dimi- ble prix des pendules dans des proportions consi- bles; ce dernier point lui-même est fort précieux, qu'il va permettre la multiplication des instruments ontrôle. M. J. Mascart se dispose à faire construire endules encore plus simples et plus économiques, blissant toutes les conditions requises pour les iatoires : ce sera là un objet fort intéressant sur 2 nous aurons à revenir, lorsque les détails de the auront été suivis plus longuement, pour en bles bénéfices et les avantages. s Signaux de chemins de fer et le Block im automatique. — La question des signaux iemins de fer devient de plus en plus difficile et tante par le fait de l'accroissement du nombre et vitesse des trains, et, pour salisfaire à ces diffi- S croissantes, il a fallu singulièrement étendre et ionner, dans ces dernières années, les différents mes de signaux. Ces perfectionnements ne sont connus que des spécialistes, surtout lorsqu'il des appareils étrangers; aussi convient-il de ler tout particulièrement un très intéressant Mé- que M. Siegler vient de publier, dans la dernière son des Anvales des Mines, sur « le block system lignes américaines ». Aux Etats-Unis, la cherté main-d'œuvre à conduit la plupart des Compa- à adopter, pour les points les plus chargés de lignes, des appareils de block system automati- .cest-à-dire fonctionnant sans l'intervention à poste fixe, et par le passage même des ss Dès qu'un train entre dans une section de bloc, utomatiquement à l'arrêt les signaux de cette * Qui restent à l'arrêt tant que le train reste dans section, et même un peu après qu'il en est sorti ; s se remettent d'eux-mêmes en voie ouverte. block automatique est réalisé par une grande éde systèmes, faisant tous appel à l'électricité, rain lui-même commute et distribue automati- ent aux mécanismes des signaux qui le couvrent, & électricité agit soit directement comme puis- motrice unique, en actionnant ces mécanismes S dynamos ou électro-aimants, soit par la com- de relais mettant en jeu des moteurs pneuma- “Dans ce dernier cas, l'électricité ne commande ment que les petites valves de distribution de mprimé à des appareils moteurs, situés au bas e Semaphore ou groupe de signaux, et qui sont S par une canalisation spéciale que dessert une entrale de compression. Il en est ainsi dans le système de Westinghouse, qui donne, en Amé- leine satisfaction, et est actuellement à l'essai, terre, sur le London and South Western, et à la gare de l'Est. Il suffit d’un courant extrème- ble, d'environ 0,025 ampère sous}10 volts, pour rer les valves à la fois délicates et très sûres de pareils. Dans le système dit «electrogas » de Hall, mprimé est remplacé par de l'acide carbonique emmagasiné dans des bouteilles en acier, dis- bas des sémaphores, et dont le gaz est en- mécanismes des signaux par des distributeurs leurs très ingénieux, que commande l'électri- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 143 cité. Ces bouteilles, qui renferment 22 kilogs d'acide carbonique liquéfié sous une pression d'environ 150 atmosphères, peuvent suffire à environ 10.000 mou- vements de leur signal, et elles dispensent de la cana- lisation d’air et de ses compresseurs. Ce système est actuellement à l'essai, en Angleterre, sur le North Eastern Ry; il a aussi très bien fonctionné aux Etats- Unis. Nous ne pouvons, pour les très intéressants détails de ces appareils, que renvoyer au Mémoire de M. Siegler: il y a lieu d’insister seulement sur la sécurité remar- quable du fonctionnement de ces signaux et blocs automatiques, dont le taux des ratés dangereux, c’est- à-dire ouvrant une voie à contretemps, ne dépasse guère le millionième, c'est-à-dire la proportion d’un pour un million de signaux exécutés. C'est un chiffre des plus rassurants pour l'avenir, assez prochain sans doute, où le bloc automatique s'imposera définitive ment. $ 4. — Physique Sur les phénomènes présentés au sein des champs magnétiques par les solutions de matières colorantes. — En répétant les expé- riences de M. Raehlmann relatives à une influence des courants électriques sur les solutions de matières colo- rantes, M. G. Schendell { vient de rechercher les phé- nomènes que présentent ces mèmes solutions vis-à-vis d’un champ magnétique constant. Un aimant à pôles parallèles et distants de 9,5 milli- mètres recevait une excitation intense et constante par une batterie de plusieurs éléments de pile. Les solutions de matières colorantes, ayant été appliquées sur une plaque de verre, y ont été laissées pendant vingt-quatre heures; on obtient alors un dépôt de la couleur en suspension par suite de la vaporisation, quand il n’y à pas de champ magnétique. Mais, quand ce dernier a élé excité, on observe des phénomènes nettement différents, le dépôt cessant d’être uniforme. Les particules de matière colorante s'accumulent dans la région de densité maximum du flux de force, d’où des branches hyperboloïdales partent vers les quatre angles des bords de paraffine encadrant la plaque de verre. Au voisinage non immédiat des pôles, on, a observé une couche mince faiblement colorée, con- sistant essentiellement (surtout dans le cas des matières colorantes jaunes) en particules, et exécutant au sein de la solution des mouvements vivratoires rapides, caractéristiques de ces solutions de matières colo- rantes. Sous le microscope, on constata qu'aucune séparation des couleurs composantes n'avait eu lieu dans le cas des couleurs mixtes. La couche faiblement colorée dont il vient d'être question ne s'accumule pas, chose étonnante, dans l'intervalle des pôles. C’est que les particules dont se compose cette couche semblent être suspendues dans le dissolvant en une distribution si fine que la concen- ration et la vaporisation de la solution auraient lieu a que ces particules pussent se précipiter sur les poles. e $ 5. — Électricité industrielle | La nouvelle lampe à incandescenee élec- trique au tantale. — À une récente réunion de la Société des Electriciens de Berlin, MM. von Bollon et Feuerlein ont faitune conférence sur la nouvelle lampe à incandescence au tantale construite par la Compa- gnie Siemens et Halske, de Berlin. _ Les tentatives qu'on vient de faire dans ces der- nières années pour réduire le prix de l'éclairage élec- trique, de facon à en faire un concurrent plus puissant de l'éclairage à incandescence par le gaz, ont donné lieu à la construction de lampes à incandescence élec- trique, présentant une consommation spécifique d'éner- 1 Voir Naturwissenschaltliche Wockhenschrilt, n° 4, 190*. = FES = CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE sie tout particulièrement basse. Tous les essais tentés dans cette voie avec les lampes à filaments de carbone ont, toutefois, été infructueux. Il est vrai que la puissance lumineuse d'une lampe s'accroît en même temps que monte sa température; mais les filaments de carbone, brûlant à 3,5 watts par bougie, ne supportent un accroissement de température au delà de la normale 1.700° C.) que pendant un temps très court, après quoi le filament est réduit en poudre, l'ampoule se noircit et la lampe est rapidement détruite. On fut ainsi amené à rechercher d’autres substances capables de supporter un accroissement de tempéra- ture sans être endommagées. Après une série appro- fondie de recherches préliminaires, M. von Bolton, ingénieur de la maison Siemens et Halske, vient de trouver une matière pareille dans le tan tale, métal dif- ficilement fusible et dont le point de fusion est supé- rieur à celui du platine (vers 2.000° C). Le tantale est fort répandu dans la Nature, et c'est en grandes quantités qu'on le retire des minerais de tanta- lite et de colombite d'Australie, d'Amérique, de Nor- vège et de Suède. Après avoir subi différents processus de purification, cette substance est fondue dans le vide et étirée en filaments-tiges de 0m®,05 ou 02®,035 de clia- mètre. Le filament, destiné à brûler dans le vide, est étendu en zigzag sur un cadre qu'on soude debout dans une ampoule de lampe à incandescence ordinaire. À la partie supérieure de cette dernière se trouve une étoile de 11 bras de fil de nickel et en bas une autre étoile de 12 bras, rigidement reliées l’une à l'autre par une tige de verre. Les lampes à tantale présentent une consommation d'énergie de 1,5 watts par bougie; on les prépare en trois types de 16 bougies et 110 volts, 25 bougies et 110 volts, 32 bougies et 220 volts respectivement. La durée de ces lampes est de mille heures en moyenne, alors que leur durée utile varie entre quatre cents et six cents heures. Cette nouvelle lampe est moins sensible au point de vue des fluctuations de voltage que les lampes à fila- ments de carbone. D'autre part, elle est d'un aspect très beau en brûlant; sa lumière est d’une teinte écla- tante et douce à l'œil, et, comme elle brûle dans toute position voulue, elle se prête éminemment aux éclai- rages décoratifs, d'autant plus qu'elle est fort résis- tante aux vibrations. $ 6. — Physiologie La mort d’une grenouille célèbre. — Les physiologistes apprendront avec intérêt la nouvelle de la mort de la grenouille décérébrée de l’Université Cor- nell. Le D' Wilber, directeur du Département de Phy- siologie de cette Université, avait prétendu que, chez les animaux, le cerveau est le siège de la conscience et de la volition. Pour prouver sa théorie, il choisit en 1899 une grenouille verte et lui enleva les deux hémis- phères cérébraux. L'opération eut lieu avec succès et la blessure guérit rapidement. La grenouille décéré- brée fut placée dans un grand vase ouvert, où elle resta pendant cinq ans, Jusqu'à sa mort survenue récem- ment. Pendant toute cette période, l'animal ne montra ja- mais les signes de la moindre initiative ; ses seuls mou- vements étaient très légers et attribuables à la fatigue musculaire, comme ceux d'une personne endormie. Les yeux, les nerfs et les lobes optiques du cerveau n'é- taient pas endommagés, et la grenouille pouvait évidem- ment voir, mais sans comprendre. La nourriture la plus attrayante placée devant elle n'était absolument pas perçue, et elle dut être nourrie, chaque jour de sa vie Sans cerveau, par un assistant qui lui ouvrait la bouche et, avec un forceps, poussait une bouchée de viande fraiche ou de poisson assez profondément dans le go- sier pour exciter le mécanisme réflexe de la déglutition. DRE RDS an UE CR ER 1 British. D'edical Journal, n° 2201; p. 28. | Lorsqu'on la touchait, elle se mouvait ou sautait; pla dans l'eau, elle nageait jusqu'à ce qu'elle eùt attem quelque support; retournée sur le dos, elle se redressai rapidement et vigoureusement ; mais elle ne s’est jamai déplacée de son propre mouvement. L'animal a servi à démontrer à plusieurs classes su@ cessives de Physiologie les fonctions du cerveau, dont avait été privé, ainsi que les fonctions des autres pal ties de l'encéphale qu'il avait conservées. Il fut expos au Congrès de l'Association physiologique américain à Washington, etil retint pendant longtemps l'attentio des physiologistes. $ 7. — Sciences médicales Le « déjà vu ». — Un individu est témoin d'un! scène quelconque; aussitôt il a l'impression que, dans un passé plus ou moins lointain, il a déjà assisté à méme scène dans des conditions identiques. On donné à ce phénomène, signalé par Wigan, en 1844, nom de « déjà vu » ou de « fausse reconnaissance MM. Dugas, Arnaud, Leroy, P. Janet, Grasset, etc., & ont rapporté des exemples et proposé diverses inter prélations *. M. Gilbert Ballet en a signalé un nouveau cas (Sociét de Neurologie de Paris, 30 décembre 1904). Il s'ag d'une femme qui, en entrant dans une pièce, aval d'avoir eu le temps d'examiner les personnes et les choses en détail, affirme immédiatement reconnaits certaines d’entre elles. Le même phénomène se pre duit également pour la parole : outre le « déjà vu »,4 existe aussi un « déjà entendu ». Selon M. G. Ballet, @ phénomène coexiste avec un état de psychasthénie ne s'agitpas d'une exagération de la mémoire, mais biel d'un état d'insuffisance cérébrale. MM. Dugas et P- net rattachent le « déjà vu » aux sentiments d «il complétude » qui accompagnent les états psychasthé niques; il semble bien, en effet, qu'on ait affaire à u trouble de la perception plutôt qu'à un trouble ded mémoire. Migraine ophtalmique. — On donne le nom € migraine ophtalmique à une variété de migraine qi s'accompagne de troubles oculaires variés. Parmi ceux ei, le plus connu a reçu le nom de scotome scintillant le malade, au cours de l'accès migraineux, épro une impression lumineuse singulière; il voit une son de zig-zag brillant, parfois multicolore, dont la pré sence est souvent très pénible. D'autres fois, les phén mènes oculaires se manifestent par une simple phot phobie, où par une chute de la paupière; dans des ci plus graves, il se produit une paralysie des muscle moteurs de l'œil, qui, d'abord transitoire, peut deven permanente : c'est la migraine ophtalmoplégique. observe également de l’'hémianopsie: le sujet ne qu'une moitié des objets qui sont devant lui. Ce n'est pas tout. Les grandes crises de migraini peuvent s'accompagner d'autres phénomènes nerveul tels que le vertige, les nausées, une difficulté de parole, et même des phénomènes paralytiques d membres. Tous ces symptômes ont, depuis longtemps, atti l'attention des neurologistes, et l’on admet actuel ment qu'ils sont liés à un trouble circulatoire passag de la région encéphalique. Ils rappellent, en effet, @ que l'on observe à la suite de lésions durables de là pareil vasculaire de l'encéphale. Il arrive mème qi chez certains migraineux, les accidents en questio qui, au début, ne se produisent qu'au moment « crises, tendent à devenir permanents. M. llenry Meige (Congrès des médecins aliéniste neurologistes, Pau, 1904) à montré qu'il existe d ressemblances cliniques entre cerlains migrain et les sujets qui sont atteints de cette variété d'hém 1 Voir à ce sujet la Revue du 15 mars 190%, L. XV, p. 2212 plégie à laquelle M: Brissaud à donné le nom d'hémi- plégie progressive. Les crises de migraine s'accompagnent généralement de troubles circulatoires de la face; on a décrit des migraines rouges et des migraines blanches, suivant qu'on observait de la vaso-dilatation ou de la vaso- constriction dans le territoire facial. M. Henry Meige a rapporté un cas où une moitié de la face présentait un “dème au cours d’une crise migraineuse; d'où le nom d'hémiface succulente. I1 a signalé également l’existence d'un mouvement Convulsif des paupières qui peut être interprété comme un tic de clignement consécutif à la photophobie. Les migraineux présentent aussi parfois des troubles psychiques au moment de l’accès; on à mème prétendu qu'il existait une psychose migraineuse. Si l'autonomie “le cette psychopathie est contestable, il est certain @ependant que les migraineux sont particulièrement “Sujets aux crises d'angoisse accompagnées ou non | d'anxiété. La transmission du parasite de la malaria travers le placenta.— M. le D' Grabham ‘ a fait les recherches personnelles qui lui permettent d’aflir- mer, contrairement à l'opinion de Dinstl, Schramm, MDuchek, Playfair, que l'hématozoaire du paludisme ne Mraverse pas le placenta. Voici comment il est arrivé à cette conviction : il a prélevé du sang chez quatre femmes enceintes entrées à l'hôpital de la Jamaïque ‘pour accoucher. Toutes les quatre présentaient tous les \signes du paludisme, et, chez elles, les parasites étaient extrèmement nombreux. Aussitôt après l'accouche- ment, il fit des préparations avec le sang des nouveau- nés, et, dans aucun cas, il ne trouva de] parasites; de plus, il prit la température des petits enfants plusieurs Mois par jour, et il ne trouva jamais le moindre écart. Il faudrait donc conclure, d'après ces expériences, que le paludisme n’est pas transmissible de la mère au fœtus, et que, si certains auteurs ont trouvé des hématozoaires dans le sang des nouveau-nés, ou bien il y a eu une hémorragie du placenta qui a servi de porte d'entrée, ou bien, ce qui est plus vraisemblable, ces petits êtres ont été eux-mêmes piqués par des moustiques. - K 8. — Géographie et Colonisation Les chemins de fer transpyrénéens*.— Il y à vingt ans que la question des chemins de fer transpy- lrénéens fait l'objet de multiples et laborieuses négocia- \tions entre les Gouvernements espagnol et français. Nous entrons aujourd'hui dans une phase nouvelle : le MS août 1904, a été signée une Convention qui va être soumise prochainement à la ratification des Chambres. Mrois transpyrénéens seront construits : Ax-les-Ther- “mes-Ripoll; Oloron-Zuera; Saint-Girons-Sort-Lérida. Les deux premiers devront être terminés dans un délai de dix ans, à dater de la ratification de la Convention; le mème délai est fixé pour le troisième, à partir de De du chemin de fer espagnol de Lérida à ort. Les dépenses prévues pour la France seront de ®$ millions de franes pour la première ligne, de 34 mil- ions pour la deuxième et de 27 millions pour la troi- sième. Les difficultés techniques de toute sorte ne manque- ront pas, non seulement pour la construction des tracés ët le percement des tunnels, mais encore en ce qui con- rne la traction, surtout si l’on veut vraiment con- truire des lignes internationales Il est à peu près sûr w'il faudra avoir recours en partie à la traction élec- “rique; or, la « houille blanche » est très dispersée dans les Pyrénées, et ce serait un mauvais calcul de l'enlever aux entreprises locales pour la concentrer et la mettre à la disposition des voies ferrées. 1 British medical Journal, 1904, n° 2266, p. 1312. 2 Questions diplomatiques el colnniales des 1°" novembre et 46 décembre 190%, 1®r janvier 1905. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE {A5 Nous n'insisterons pas davantage sur ce côté de la question, qui est plutôt affaire de millions, mais ne saurait être insurmontable après les expériences faites au cours des grandes percées des Alpes. Il sera toujours temps d'y revenir quand les travaux seront commencés. Le point de vue économique nous paraît aujourd'hui le plus important à examiner. Sans doute, nos relations seront facilitées avec Barcelone et la riche région de la Catalogne, avec la vallée de l'Ebre, sans que, cependant, le gain de temps sur les lignes excentriques existantes soit bien considérable. On peut également prévoir l'éta- blissement d'une voie de grande communication entre la France et l'Algérie, par Carthagène et Oran, et, là encore, faudrait-il commencer par faciliter la traversée du plateau espagnol lui-mème. Mais, comme le fait remarquer avec beaucoup de compétence M. Henri Lorin, les relations commerciales transpyrénéennes valent actuellement peu de chose, le mouvement des voyageurs est peu développé; de côté et d'autre, la douane a diminué son personnel, simplifié ses services. C'est que la voie espagnole est plus large que la voie française, qui est celle du continent européen, la Russie exceptée, et les frais de transbordement viennent s'ajouter aux droits de douane, très élevés dans chacun des deux pays. Aussi bien, est-ce sur mer que passe la plus grande partie du commerce extérieur de l'Espagne, bénéficiant encore en plus, de cette maniere, d'une grosse économie de frais de transport. Il ne faut pas oublier également que les minerais et les métaux bruts, qui entrent pour une large part dans les exportations espagnoles, emprunteront toujours de préférence la voie maritime. Pour toutes ces raisons, ne vaudrait-il pas mieux commencer par développer les relations franco- espagnoles en abaissant des tarifs douaniers presque prohibitifs, afin de permettre aux vins et aux fruits espagnols de s'échanger contre nos produits manufac- turés, à cette heure particulièrement favorable où notre voisine est en train d’outiller son industrie en pleine voie de transformation ? Ne serait-il pas préférable que l'Espagne assurât la continuité de la circulation, soit par l'introduction d'un système d’essieux interchan- geables, permettant aux wagons de passer sans grande perte de temps sur des voies de largeur différente, soit en doublant sa voie unique d'une voie nouvelle à écar- tement normal, soit enfin en se prêtant mieux à la cir- culation de trains rapides à destination de Carthagène et de Cadix? Le réseau espagnol a, d’ailleurs, tant de perfectionnements à recevoir avant que les Pyrénées soient percées utilement! La présence en France du Massif central et celle des Monts Universales en Espagne feront que les meilleures voies entre les deux pays seront toujours celles qui tourneront ces hautes terres, et c'est précisément le cas des voies existantes. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. $ 9. — Enseignement Création à la Faculté de Médecine de Lyon d’un enseignement spécial pour les candi- dats à l'Ecole de Santé militaire. — La Faculté de Médecine de Lyon vient de prendre une initiative qui force l'attention et qui, selon le tempérament de chacun, appelle la louange ou le blâme. Elle vient de décider la création d’un enseignement payant, com prenant des cours spéciaux, des interrogations, des corrections de compositions, à l'usage des candidats à l'Ecole de Santé militaire de Lyon. Des professeurs, soucieux du bien général du pays, inséparable de la prospérité de la Faculté de Médecine lyonnaise, ne craignent pas d'ajouter à la tâche déjà lourde de leur enseignement magistral des charges nouvelles, et quelles charges ! Ils consentent à descendre du haut de leur chaire professorale, à interroger, à « coller » les étudiants, dont ils emporteront chez eux les devoirs pour les corriger. Il est bien entendu que le paiement des étudiants n’est là que pour prouver que tout travail 146 mérite un salaire ; il est certain que les étudiants de Lyon n'acquitteront jamais la dette de reconnaissance contractée envers leurs maîtres répétiteurs. Convaincue de la pureté de ses intentions, la Facullé de Lyon n’a pas hésité à faire, dans les autres villes et universités, la réclame nécessaire, en priant notamment les doyens des Facultés de Médecine de répandre des programmes spéciaux. Tels sont les faits. Si l'on cherche maintenant à se mettre dans l’état d'esprit qui animait les fondateurs de cette institution nouvelle, on ne peut émettre à cet égard que deux hypothèses, dont l’une, d’ailleurs, doit ètre immédiatement écartée. On ne peut croire, en effet, un seul instant, connaissant, d'une part, l'excellent esprit des professeurs de la Faculté de Lyon, et consta- tant, d'autre part, la franchise avec laquelle à été faite, pour l'institution nouvelle, la publicité nécessaire, que cet enseignement a été créé dans un but de concur- rence. C'est, en effet, à n'en pas douter, un principe admis par tous les universitaires de. France, que la concurrence entre les Facultés d'Universités différentes ne peut s'exercer que sur le terrain de la valeur des maitres et de l'enseignement, ainsi que de l’outillage plus ou moins perfectionné des cliniques et des labora- toires, mais qu'une Faculté doit se refuser tous les autres moyens, même légaux, de triompher sur des voisines qui ne sont point des rivales. Les Universités régionales, créées pour répondre à des besoins régio- maux, ont d'abord une sphère d'action régionale, une zone d'attraction matériellement délimitée; une autre zone d'attraction, dont les limites sont indéfinies, s'étend au delà des frontières des provinces, de celles du pays même, et n’a, dans le monde entier, d’autres bornes que celles durenom des savants de l'Université. La personnalité régionale d’une Université ne saurait dégénérer en une rivalité régionale. Les Universités ne peuvent que rivaliser de science. Ayant écarté l’inadmissible hypothèse de la concur- rence, il ne reste plus qu'à supposer que la Faculté de Médecine de Lyon à cru prendre une heureuse initia- tive, avec la pensée, avec l'espoir qu'elle serait bientôt suivie par les autres Facultés. L'institution d'un en- seignement spécial, destiné aux candidats à l'Ecole de Santé militaire, deviendrait ainsi générale. C'est contre la généralisation de la mesure et contre l'ini- tiative qui en aurait été le point de départ que je tiens à m'élever. Toute concurrence devenant nulle par la généralisation de l'institution, la question ne se pose plus sur le terrain de l'utilité pratique que chaque Faculté pourrait en retirer. C’est la question théorique de principe es ’il faut envisager. Les principes qui doivent régir la vie des Universités sont-ils favorables ou défavorables à l'établissement d’un enseignement de cette nature? Ce qui, croyons-nous, caractérisait jusqu'ici l’ensei- gnement supérieur des Universités, celui notamment des Facultés de Médecine, c'est qu'il était libre de toute réglementation étrangère, c’est aussi qu'il se suffisait à lui-même et que ses activités étaient adéquates à ses besoins propres. A présent, une Faculté de Méde- cine ne se contentera plus d'affirmer sa personnalité en formant un docteur selon son cœur et son esprit; élle devra, abdiquant d'autre part cette personnalité, faconner un étudiant suivant un modèle conçu en dehors d'elle. Après les temps héroïques où l'Université tenait tête aux Pouvoirs publics, nous connaïîtrons ceux où, la docilité lui venant avec l’âge, elle s’assujettira aux règles multiples et variées des administrations étrangères, et, simple rouage administratif, ne con- naîtra plus que des exigences d'emprunt. Après la pré- paration à l'Ecole militaire, nous aurons aussi, org uisée dans toutes les Facultés, la préparation à l'Ecole ñavale, et nous serons prêts à préparer à toute can- didature médicale spéciale qui pourra surgir, à la médecine des chemins de fer, si les chemins de fer CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE sont un jour rachetés par l'Elat. Cette soumission à des finalités variées, concrétées dans des programmes ad ministratifs, est-elle le fait de l’enseignement supérieur Évidemment non. Ce serait mème se faire une idée inexacte de la situation faite alors aux Facultés d Médecine que de la comparer à celle des Lycées prépæ rant aux Ecoles du Gouvernement. La préparation aux écoles spéciales, assurée par l’enseignement secondaire est, en effet, le couronnement de l’œuvre scolaire des lycées et une sorte de prolongement post-scolaire. Ici il en est tout autrement; c'est, en pleine scolarité médicale, un rétrécissement du programme moral que s’est formé la Faculté. Je suis amené par là à exprimer ma pensée sur la nature du programme d'admission à l'Ecole de Santé militaire. Je ne sais dans quelles conditions et avec quels concours le programme a été élaboré; mais ik paraît l'avoir été sans le moindre souci des actesuniversi taires légaux et deux reproches principaux peuvent lui être adressés. On doit d'abord pratiquement lui repro= cher d'être inadéquat à l’état actuel de la scolarité médicale, puisqu'il extrait du programme normal ana* tomique et physiologique des deux premières année de Médecine des matières que le professeur de Faculté a le devoir de traiter en deux années et non l'obligation d'enseigner en une seule. On peut formuler, en outre; contre ce programme un grief moral, plus sérieux peutà être encore. Une des principales dispositions, en effet que ce programme contient, c'est qu'il n’est tenu aucun. compte au candidat de sa scolarité, et que, quelle ls soit quantitativement et qualitativement cette scolarité les meilleurs étudiants de 4° année et les pires étudiant de 1° année sont traités sur le même pied de can= didature ; les élèves sont considérés «quel que soit le nombre réel de leurs inscriptions ». Que l'Ecole 4 Santé maintienne, pour les matières non comprises dans l'enseignement des Facultés, toutes les obligatio né) qu'elle voudra; mais elle à intérêt à tenir compte des l'instruction médicale, à ne pas considérer comme neuf un candidat qui a fait ses preuves devant une Faculté, et comme nul l’enseignement donné par cett@ Faculté. La mesure prise par la Faculté de Lyon, si elle se généralisait, me paraîtrait avoir, enfin, un résultat moral très fâcheux. L'Université, en effet, dont la mis sion est d'élargir les idées, de multiplier les points de vue, de mener l'étudiant au doctorat par des voies el« moyens qui se ressemblent, mais ne doivent pas se répéter et qui peuvent différer selon le tempérament de chaque Faculté et de chacun, l'Université, par le pro cédé de la répétition uniforme pour tous, du « seri nage », coulera dans un même moule toute une caté gorie d'étudiants. Je ne veux pas examiner si c'est là une bonne opération, mais je prétends que ce n'est pass le rôle de l’Université. 11 n’est malheureusement pas nécessaire à un professeur de Faculté d’avoir beaucoup vieilli dans le métier pour constater les fâcheux chan: gements qui se sont opérés dans l'esprit des étudiants | au cours de ces quinze ou vingt dernières années l'abandon de l'initiative individuelle, étouffée sous Je poids d'un programme scientifique de plus en plus lourd et accepté tel quel sans discussion; les progrès accomplis, il est vrai, par l'instruction médicale en raison des conquêtes scientifiques et des perfectionne ments de l’enseignement, mais aussi le recul de la vraie éducation médicale, véritablement biologique, profon: dément civique, qui doit former un bon médecin et un bon citoyen. Je trouve donc, en résumé, très regrettable, pour: les raisons qui viennent d'être exposées, la mesure prisé par la Faculté de Médecine de Lyon, et j'en trouverais l'extension plus regrettable encore. A. Prenant, Professeur à la Faculté de Médecine de l'Université de Nancy. A. KOHLER — LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE 147 LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE' La théorie élémentaire de l'objectif microscopique | leurs, — du moins lorsque les éléments de est basée sur les propriétés des rayons lumineux. | On examine si tous les rayons émanés d'un point | quelconque de l’objet se réunissent dans le point | conjugué de l'image. L'image du plan visé serait, d'après cette théorie, parfaitement semblable au modèle, si toutes les aberrations dont s'occupe l'Optique géométrique étaient corrigées avec une exactitude suffisante. Abstraction faite de la valeur didactique que cette théorie possède pour le débu- ant, il est certain que, dans bien des cas, elle “explique ce que l’on voit dans le microscope ou “dans les autres instruments optiques. Mais, dès quil s’agit de la reproduction microscopique des | délails les plus délicats, elle entre en contradiclion | avec les faits. La Physique nous donne l'explication de celte contradiction. Elle montre que les rayons lumineux considérés par l'Optique géométrique n'ont pas d'existence réelle et nous enseigne que la propagation de la lumière se fait d’une manière analogue à celle du son dans l’air ou des ondes sur l’eau. Tant que les dimensions à reproduire par le microscope sont d'un ordre de grandeur supérieur aux longueurs d'onde intéressées, les résultats que fournit la théorie élémentaire concordent sensi- blement avec les fails observés; mais, dès que cette condition n'est plus réalisée, la formation des images microscopiques devient un phénomène de diffraction soumis aux lois des mouvements ondu- latoires. Il Une théorie du microscope basée sur la diffrac- tion a élé donnée, presque en même lemps, par Helmholtz pour des points lumineux et par Abbe pour des objets éclairés. Sans entrer dans les détails de ces recherches, nous rappellerons seulement ici le résultat le plus important auquel elles ont conduit : les images formées par le microscope cessent d’êlre sembla- bles aux objets dès que les dimensions de la struc- Lure examinée sont du même ordre de grandeur que la longueur d'onde. Quand cette limite est atteinte, l’image de l'objet — s’il est encore permis d'employer ce terme d'image — n’est plus, comme avant, un simple agrandissement de la projection de l’objet sur le plan visé, mais plutôt une sorte de schéma reproduisant, avec une fidélité plus ou moins grande, la disposition générale des éléments de structure. Ce schéma lui-même disparaît, d’ail- ? Communication présentée à l'Assemblée des natura- listes allemands réunis à Breslau. structure se répèlent périodiquement, — quand la dimension de chaque élément est iaférieure à la moitié de la longueur d'onde intéressée Cette valeur peut être considérée comme la limite du pouvoir résolvant. La reproduction schématique de particules iso- lées atteint, il est vrai, comme l’a montré M. Sie- dentopf, des dimensions beaucoup plus petites. Mais la méthode de M. Siedentopf ne s'applique qu'à la classe déterminée d'objets que nous venons d'indiquer et, même pour ces objets (comme pour tous les autres), la reproduction semblable ou conforme ne peut être poussée au delà des limites actuellement acquises qu'à la condition d'employer une longueur d'onde plus petite. La longueur d'onde À de la lumière est reliée au nombre de vibrations N et à la vitesse de pro- pagation V par l'équation : qui fait voir que, pour diminuer la longueur d'onde, il faut diminuer la vitesse et augmenter le nombre de vibrations, L'observalion microscopique se fait presque toujours à la lumière blanche, dont les rayons les plus actifs, les rayons vert-clair du spectre, font 545 billions de vibrations par seconde. Si l'on se borne à l'emploi de la lumière blanche, N est donné et il ne reste disponible, pour la diminulion de À, que le premier des deux moyens indiqués : la diminution de la vitesse de propagation V. Pour réaliser ce moyen, on immerge la préparation dans un milieu pour iequel la vitesse V est petite ou, ce qui revient exactement au même, l'indice de réfrac- tion est élevé. Afin que ce procédé produise tout l'effet qu’il est susceptible de donner, le médium réfringent choisi doit remplir Lout l’espace compris, d'une part, entre la surface supérieure du conden- sateur et l’objet, et, d'autre part, entre cet objet et la frontale du microscope. Les objectifs à immersion réalisent ce procédé. L’augmentalion du pouvoir résolvant qu'ils procurent est mesurée par leur ouverture numérique (l'ouverture numérique est le produit obtenu en multipliant l'indice du liquide d'immersion par le sinus du demi-angle d'ouver- ture ). Les objeclifs à immersion les plus répandus, les systèmes à immersion homogène, ontune ouverture numérique égale à 1,30-1,40, c'est-à-dire que leur pouvoir résolvant dépasse celui d'un système à 148 sec idéal, ayant une ouverture de 180°, de 30 à 40 °/,. L’immersion au monobromure de naphla- lène, calculée par Abbe, donne même une augmen- mais celte augmentation n'a pu ] o tation de 60 °/,; être mise com- plètement à pro- fit dans la prali- que, parce que la majeure partie des préparations ne supportent pas l'immersion dans le mono- bromuredenaph- talène. En outre, tout progrès ul- térieur dans cel- te voie ‘semble impossible, car onneconnait pas de milieu à in- dice sensible- ment plus élevé qui puisse être utilement em- ployé pour l'in- clusion des pré- parations. Mais on peut, sans recourir à un liquide parti- culièrement ré- fringent, obtenir unpouvoir résol- vant plus grand en utilisant le second moyenin- diqué l'aug- mentation du nombrede vibra- tions. Il n'y a qu'à employer, au lieu de la lu- mière blanche, des rayons à os- cillations plus ra- pides, les rayons bleus ou violets, par exemple. C'est, si je ne me trompe, Ami- ci qui, le pre- mier, à fait res- sortir l'avantage que le bleu et le violet offrent à cet égard, et, depuis lors, on a, à plusieurs reprises, utilisé ces couleurs pour la résolution des détails A. KOHLER — LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE | 50 Ra si=le]s Ile) ]=1= Ii 45 TETE \ Le | rom \ | EN TES d: X.Av MHUNGER VEN Fig. 1. — Microscope et chambre sur le dessus de table pendant la pose (env. ‘/, grand, nat.). — S,, vis servant à maintenir le socle du microscope; P, prisme à réflexion, en cristal de roche, pour renvoyer le faisceau hori- zontal de lumière incidente sur l'axe du microscope; Sp, miroir plan pour observer l'image de l'étincelle sur la plaque de verre d'urane; D, porte- diaphragme, recevant le verre d'urane, écarté hors de l'axe. La signification des autres lettres est donnée au bas de la figure 2. les plus fins. La sensibilité et l’acuité visuelle dem la rétine étant petites pour ces teintes, il a fallu, en ÿ général, recourir à la microphotographie pour tirer parti des avantages qu'elles offrent. C’est dans la voieindiquéepar ces recherches que j'ai fait uns pas de plus en m'adressant à la lumièreultravio- lette, dont les longueurs d’on- de sont encore bien plus courtes que celles des deux couleurs employées jus- qu'à présent. Cette lumière n 'impressionne w plus du lout la rétine et c'esl encore la photo- graphie qui sup- plée à l'insuffi- sance de notre œil. IT | L'application de la lumière ul-" traviolette aux recherches mi- crographiques « exige : un appa- reil d'éclairage et une optique spéciale pour le microscope, un instrumentcapa- ble de faire voir les images, invi- sibles par elles- mêmes, el une chambre de mi- crophotogra- phie. Cette der- nière ne diffère pas sensible- ment des modè- les courants. Les figures 1 à 4 re= présentent ces instruments et le dispositif des expériences”. 1 Une installation complète comprenant tous ces instrus | em mt 1e A. KOHLER — LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE = es (Je) J'emploie comme source lumineuse un courant | saire parce que la lumière employée est monochro- d'étincelles électriques éclatant entre deux élec- | matique. Après plusieurs essais, nous nous sommes trodes de cadmium ou de magnésium. Les élincelles | arrêté à la construction de trois objectifs, désignés, sont fournies parjune bouteille de Leyde alimentée | commeles apochromatiques, par leur‘distance focale par une bobine d'induction. La lumière émanant de | etleur ouverture numérique. Ces objectifs, que nous cette source est décom- posée par un appareil spectral composé de len- tilles et de prismes en cristal de roche. Les ra- diations de 275 y (ou “280 y pour le magné- sium), qui seules doi- - vent servir, sont sépa- - rées des autres par un diaphragme-iris. Ce dia- phragme forme la pu- pille d'incidence d'un condensateur en quartz, qui remplace le conden- sateur usuel en verre et amène un cône de lu- mière plus ou moins ou- vert sur la préparation. Celle-ci est renfermée entre une lame porte- objet en quartz ou en verre UV (verre spécial laissant passerlesrayons ultraviolets) et une la- _melle couvre-objet en quartz fondu. Comme liquide d'inclusion, on peut employer l'eau,une _ solution physiologique de sel de cuisine, de la glycérine, un mélange -de glycérine et d'alcool ou de l'huile de vase- line. Le baume de Ca- - nada et les résines ana- - logues doivent être reje- “tés à cause de leur trans- parence insuffisante. Les objectifs sont cal- “culés d'après une for- mule toute nouvelle créée par M. von Rohr. Il n’y entre qu'une seule substance : le quartz fondu, et ils nesont cor- rigés que par rapport Re, Fig. 2. — Microscope et chambre sur le uessus de table pendant l'examen et la mise ou point (env. ‘/, grand. nat.). — B, pied de la chambre verticale; $,, vis servant à immo- biliser la tige tournante divisée S£: H, support mobile pour le chercheur E; J et K, sup- ports mobiles pour la chambre: Z obturateur pour la pose: Sch, rideau du châssis à coulisse, ouvert; G, poignée du cadre mobile recevant les plaques. Les autres lettres ont la mème signification que dans la figure 1. aux aberrations de sphéricité et du sinus. La correc- | appelons monochromatiques, sont les suivants : tion des aberrations chromatiques n'est pas néces- Distance focale, 6mm,; ouverture numérique, 0,35 ments, a été RTE par la maison Zeiss au Congrès de == 2,5 = 0,85 Breslau. Æ a5 ps 1,25 150 A. KOHLER — LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE 1 Les deux derniers sont des immersions. Comme liquide d'immersion, on emploie un mélange de glycérine chimiquément pure et d’eau, dont l'indice est sensiblement égal à celui du quartz fondu. Ces objectifs moñochromatiques devant servir avec une lumière dont la longeur d'onde ne mesure que la moitié de celle de la lumière blanche, leur pouvoir résolvant correspond à celui d'objectifs ordinaires possédant une ouverture numérique double, c'est-à-dire égale à 0,7, 1,7 et 2,5. Ces chiffres caractérisent le pouvoir résolvant des mono- chromatiques, comme l'ouverture numérique carac- Fig. 3. — Appareil d'éclairage pour la lumière ultravio- lette avec le dessus de table vu d'en haut (‘/; grand. nat.). — F, excitateur; K,, collimateur; P, et P., prismes en cristal de roche séparant les radiations de longueur d'onde différente qui émanent de la source lumineuse F: K,, collecteur réunissant les rayons de même longueur d'onde pour former une image de l’étincelle. Après être sortis du collecteur, les rayons de la longueur d'onde voulue viennent tomber sur le prisme à réflexion P (fig.1), qui les renvoie sur le condensateur du microscope. La disposition générale des appareils est indiquée par la figure 4. térise celui des objectifs employés en lumière blanche. Je proposerai de les appeler l'ouverture relative des monochromatiques. Si nous comparons le plus puissant des mono- chromatiques avec un objectif à sec idéal, comme nous l’avons déjà fait pour les immersions, nous constatons une augmentalion du pouvoir résolvant de 450 °/,, contre 30 à 40 °/, que donnaient les immersions ordinaires. > Les lentilles des oculaires sont en cristal de roche. Leurs grossissements (calculés d’après la ‘oculaires mettant un nombre suffisant de grossis- définition d’Abbe), qui servent auss tion, sont : 5, 7, 10, 14 et 20. Pour l'observation et pour la mise au point de l'image, j'ai construit un instrument auxiliaire, que j'appelle le chercheur. C'est, pour ainsi dire, un œil artificiel, sensible à la lumière ultraviolette. Son appareil optique est en cristal de roche, sa rétine en verre fluorescent. L'image projetée sur la rétine estexaminée au moyen d’une loupe puissante. Cet œil arlificiel est presbyte ; l'hypermétropie est d’en- viron lrois dioptries. Si, par conséquent, l'image est nette sur la plaque fluorescente, elle le sera également sur le verre dépoli de la chambre, à la condition que le tirage mesure environ 30 centi- mètres. Des différences de quelques centimètres n'ont pas d'importance. Il est, d’ailleurs, inutile de faire varier le tirage au delà de ces limites, les cinq eur désigna- sements à la disposition de l'opérateur. La ligne du magnésium À — 280 px convient le mieux pour les observalions oculaires avec le cher- cheur. Les recherches de M. Pflüger ont encore con- firmé dernièrement qu'elle dépasse en inlensité, dans la région ultraviolette, toutes les autres lignes des sources lumineuses connues. Pour la photogra- phie, on préférera la ligne du cadmium À = 275 uy, dont la radiation est plus homogène. Les objectifs. n'étant pas corrigés pour les aberralions chroma- tiques, la ligne du cadmium donne des images plus nettes. Les plaques employées sont des plaques. ordinaires non orthochromatiques. III L'examen définitif des détails délicats n’est pos- sible qu'au moyen de la photographie ; la supério- rité des plaques photographiques sur les plaques fluorescentes se manifeste aussi clairement ici que pour les recherches spectrales dans l’ultraviolet. Dès mes premières recherches, je reconnus que la lumière ultraviolette non seulement procure une augmentalion du pouvoir résolvant impossible à réaliser par tout autre moyen, mais donne, en outre, un second avantage, inattendu à première vue, De nombreuses substances comme,parexemple,lachro- matine des noyaux, les cellules durcies (« verhornt » devenues cornées) de l'épiderme, les fibres du ceris- tallin, sont presque opaques pour les rayons ultra violets. Ceux-ci produisent donc à eux seuls des différenciations qu'on ne pouvait, jusqu'à présent, mettre en évidence qu'au moyen de la coloration artificielle des tissus fixés. Parmi les tissus des plantes, la cuticule, le liège et les membranes ligni-M fiées accusent une opacité semblable. è Les rayons à courte longueur d'onde peuvent, par conséquent, rendre des services, même pour les A. KOHLER — LA MICROPHOTOGRAPHIE EN LUMIÈRE ULTRAVIOLETTE 151 recherches que l'augmentation du pouvoir résolvant n'intéresserait pas. L'objectif monochromatique le plus faible, dont le pouvoir résolvant n’atteint pas celui des systèmes à sec puissants, est destiné à des travaux de ce genre. Il y a plus. L'éclairage ultraviolet peut conduire à des résultats intéressants lorsqu'on observe tout simplement avec des objectifs ordinaires, car cer- taines parties des tissus émettent, quand on les éclaire avec la lumière ultraviolette, une fluores- cence si intense qu'elles peuvent, grâce à ce rayon- que dans ces derniers temps que je l'ai examinée de plus près, et alors il m'a semblé que sa couleur pouvait servir à distinguer différentes parties des tissus. La lumière fluorescente cellulaires du bois a une belle teinte bleue; la cuti- cule émettait, dans un cas, une lumière blanche, dans un autre, une lumière jaune. Dans ce dernier cas, elle était, d'ailleurs, colorée en jaune. En outre, il est connu que la lumière ultravio- lette peut exercer des actions physiologiques éner- giques. Notre appareil peut fort bien être employé des membranes Fis. 4. — Schéma indiquant la disposition des appareils (!/,, grand. nat.). — abcd, dessus de table pour le microscope et la chambre, avec les cales sur lesquelles reposent les vis calantes du socle et de la chambre. Il se pose sur une table de la hauteur habituelle; efgh, dessus de table pour l'appareil d'éclairage avec les cales de ses vis calantes. Il se pose sur une table ou une armoire, de 23 centimètres moins haute que la première. Si l'on veut examiner la préparation avec un objectif achromatique, on l'éclaire avec une lampe (à incandescence par exemple) placée en L, ou L,. Si la lampe est placée en L,, ses rayons sont partiellement réfléchis sur la dernière surface du prisme P, (fig. 3), traversent le collecteur K, et parviennent au condensateur du miscroscope, après avoir été une seconde fois réfléchis sur le prisme P (fig. 1). Si la lampe est placée en L,, sa lumière tombe directement sur le prisme P. Dans ce cas, la lampe, cela va sans dire, doit être éloignée, lorsqu'on travaille avec la lumière ultraviolette ; , écran fluorescent qui sert pour faciliter l'orientation dans le spectre de l’étincelle lorsqu'on met l'appareil en place. nement, être examinées avec des objectifs (à sec, puissants) ordinaires, sans le secours d’une autre source lumineuse. Cetle fluorescence impressionne même si fortement l'œil que j'ai dû chercher des moyens d'en atténuer l'effet dans le chercheur. Sur la plaque photographique, son action disparait, il est vrai, à côté de l'action bien plus énergique de l’ultraviolet. Dans mes premières recherches, cette fluores- cence n'élait pour moi qu'un effet parasite dont il s'agissait de combattre les effets nuisibles; ce n’est à leur étude, comme le montre le Mémoire que M. Hertel a dernièrement publié. Les rayons à courte longueur d'onde nous offrent donc plus d'un moyen de pénétrer plus avant dans l'étude de la structure si compliquée de la matière organisée : invisibles à l'œil humain, ils semblent appelés à seconder nos sens dans les régions où notre œil nous refuse son service accoutumé. A. Küôhler, Docteur ès Sciences (Iéna). 152 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE PREMIÈRE PARTIE : LA THÉORIE DE LIEBIG A mesure que les idées progressent dans les sciences, il est utile de jeter sur elles un coup d'œil rétrospectif, et de mesurer le chemin parcouru en en marquant les étapes. Ce genre d'étude est assez délicat, parce qu'il faut, avant tout, être juste; mais | l'impartialité est une qualité difficile à salisfaire lorsqu'on se propose, avec nos connaissances ac- tuelles, de juger les travaux de nos devanciers ; il faudrait pouvoir pénétrer leur mentalité et faire table rase des faits acquis jusqu'à nos jours pour apprécier à leur juste valeur les idées qu'ils pro- fessaient sur les grandes questions qui les préoc- cupaient. Souvent, ils ont négligé bien des faits d'où sont sorties de grandes découvertes, pour accorder une importance exagérée à d’autres, com- plètement tombés dans l'oubli. On n'a pas le droit de s’en étonner; ce sont les conditions du progrès qui veulent que sa marche s'effectue par bonds irréguliers, et les lois qui ont gouverné le passé règlent le présent et dominent l'avenir. À ce titre, l'histoire des idées dans une branche quelconque de nos connaissances ne se réduit pas à une simple compilalion des faits; elle repose sur la critique des méthodes scientifiques, et elle est, par cela même, féconde en enseignements variés. Cette conclusion se dégage à un haut degré de l'examen des théories qui ont eu cours sur la nu- trition de la cellule vivante; ce sont quelques-unes de ces théories que je me propose de résumer briè- vement dans cette /?evue. Dans cet ordre d'idées, les progrès ont été lents; on peut même ajouter qu'ils ont été souvent néga- tifs, c'est-à-dire que les conquêtes réalisées ont consisté à se débarrasser des considérations et des théories abstraites qui encombraient la route et paralysaient les esprits. Lorsqu'on parcourt les ouvrages des auteurs de la fin du xvin° siècle et du commencement du xix°, on a l'impression qu'ils parlaient avec assurance et ne doutaient point de l'exactitude de leurs déductions; mais leurs con- clusions ne reposaient pas toujours sur l’obser- vation expérimentale; leur science était toute de spéculation, si bien que les théories dans les- quelles ils se complaisaient n’ont pas survécu à l'ap- plication d'une méthode d'investigation rationnelle : celle que Lavoisier a introduite dans la Chimie. La lutte s’est engagée tout d’abord sur le terrain de la nutrition végétale. Il est facile de concevoir qu'il n’en pouvait être autrement, car l'Agriculture, la plus ancienne de toutes les sciences appliquées, avait conquis ses méthodes variées par des obser- vations séculaires. Le premier qui s'est avisé de les dogmatiser ne pouvait faire autrement que de traduire ce qui tombe directement sous les sens. I. — THÉORIE DE L'HUMUS ET THÉORIE MINÉRALE Il est de toute évidence que, plus on enrichit le sol en fumier, plus les récoltes sont abondantes. Rien de plus logique, en apparence, que d'en con- clure que le végétal puise dans le sol les substances qui se rapprochent le plus de celles qui le consti- tuent, c’est-à-dire les matières organiques appor- tées par le fumier ou par les débris végétaux et les résidus animaux qui reviennent directement à la terre, et qui y forment l'humus. Les végétaux prennent à l'humus tout ce qui est nécessaire à leur alimentation, comme les herbivores emprun- tent aux végélaux les substances toutes faites dont ils forment leurs tissus, comme enfin les carni- vores se procurent leurs aliments en s'adressant aux herbivores. Rien ne semblait mieux établi que cette dépen- dance étroite et harmonieuse des deux règnes vé- gétal et animal : non seulement le sol établissait entre eux un trait d'union nécessaire, mais l'at- mosphère elle-même constituait pour eux un lien aussi indispensable; cette dernière proposition dé- coulait directement de la célèbre expérience de Priestley. On sait, en effet, que le savant anglais a montré que l'air dans lequel on fait séjourner un animal devient bientôt impropre à l'entrelien de la vie, s'il n’est pas renouvelé; mais si, dans l'air rendu irrespirable, on place pendant quelque temps une plante verte exposée à la lumière, l'animal peut y vivre de nouveau : la plante purifie l'air vicié par l'animal. Les esprits les plus éclairés du commencement du xix° siècle partageaient ces conceptions; les théoriciens comme de Saussure, et les praticiens comme Thaër et Mathieu de Dombasle les ap= puyaient de toute leur autorité, et ils en concluaient que la production et l’utilisation du fumier doivent dominer toute l'agriculture et jouer dans l’écono- mie rurale le rôle d'un axiome fondamental et intangible. Ils n'ignoraient pas, cependant, que les P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 153 végétaux renferment une petite quantité d'éléments minéraux; mais leur présence, si elle n’est pas tou- jours accidentelle, ne peut être considérée comme utile qu'autant qu'ils stimulent l'assimilation des malières organiques. Dans aucun cas, ils ne con- seillaient la restitution méthodique de ces composés que les récoltes enlèvent régulièrement à la terre. Aussi, la surprise fut grande quand Liebig an- nonça, en 1840, dans sa Chimie organique appli- quée à la Physiologie végétale, que l'humus est impropre à la nutrition végétale, que le fumier ne vaut que par les cendres qu'il renferme, et que la fertilité du sol dépend surtout de la qualité et de la quantité de malières minérales qu'il peut céder à la plante. Celte opinion avait déjà élé formulée par Ber- nard Palissy, mais elle était demeurée sans écho; Lavoisier lui-même avait écril cette phrase signi- ficative, comme introduction à des considérations sur les {rois règnes minéral, végétal et auimal : « Les végétaux puisent dans l’air qui les environne, dans l’eau et, en général, dans le règne minéral, les matériaux nécessaires à leur organisation ». Mais celte pièce, découverte par Dumas dans les papiers du grand savant, n'a vu le jour qu'en 1860; la mort prématurée de Lavoisier ne lui avait pas permis de développer ses idées et de les faire fructifier. Ce n’est qu'après un demi-siècle d'attente qu'elles furent vériliées par l'expérience. La théorie de Liebig se présentait donc comme une nouveauté ; mais, pour nier ainsi le rôle uni- versellement incontesté de l'humus, Liebig devait avoir des raisons sérieuses, et, puisqu'il n’admet- tail pas celte origine de la matière organique des végétaux, il fallait bien qu'il en indiquàt une autre source ; il ne suffit pas de détruire une théorie : il faut là remplacer. Liebig avait prévu tout cela; l'humus ne peut fournir son carbone à la plante parce qu'il est à peu près insoluble dans l'eau ; en déterminant son coefficient de solubilité, on peut prévoir que la quantilé d’eau nécessaire pour fournir à la plante, à l’état d’humus soluble, tout le carbone qu'elle emmagasine dans l’année, est bien supérieure à celle qui tombe annuellement en un lieu donné. De plus, si l’on admet que la matière organique est indispensable à la nutrition végétale, il faut en conclure que les premiers végétaux qui ont fait leur apparition à la surface du globe ont dû trouver une provision d'humus toute préparée qui ne pou- vait provenir que d'une végélation antérieure, de sorte que le raisonnement aboutit ainsi à un cercle vicieux". 4 Liebig rééditait dans cet argument la conclusion d'un Mémoire de Brongniart à l'Académie des Sciences (1828). La source du carbone des végétaux est donc ailleurs ; elle est dans l'acide carbonique de l'air. Bonnet, Ingushouz et Sénebier avaient montré que les plantes pourvues de chlorophylle décomposent l'acide carbonique à la lumière et mettent de l’oxy- gène en liberté. De Saussure avait établi, de plus, qu'un végétal qui décompose l'acide carbonique augmente de poids ; il retient done quelque chose : c'est d'abord le carbone ; mais l'augmentation de poids est supérieure au poids du carbone de l'acide carbonique ; il faut donc admettre que ce carbone s'unit aux éléments de l’eau pour donner le ligneux, les sucres et l'amidon, qui, d'après les analyses de Payen, doivent être précisément considérés comme des combinaisons de carbone et d’eau. La plante renferme encore bien d’autres substances qui ne contiennent que du carbone, de l'hydrogène et de l'oxygène ; tels sont les acides, le tanin, etc... On voit done que la presque totalité des substances végétales ne renferment que les éléments de l'acide carbonique et de l'eau; il suffit alors de montrer que ces deux corps existent en assez grande abon- dance pour faire face aux besoins de la végétation. Pour l’eau, la question ne se pose pas; mais il n’en est pas de même de l'acide carbonique; des ana- lyses nombreuses de l'atmosphère avaient établi que la quantité d'acide carbonique libre dépasse tout ce que l’on pouvait prévoir. D'ailleurs, la res- piration des animaux, les combustions, les putré- factions, les fermentations déversent incessamment dans l'air l'acide carbonique que les végétaux lui empruntent, de sorte qu'il est impossible de cons- tater l'appauvrissement de l'air en gaz carbonique. L'humus agit pourtant sur la végétation, et d’une façon très efficace ; son action ne saurait échapper à l'observateur le moins prévenu ; il a donc un rôle à remplir; Liebig ne contestait pas son influence heureuse; mais, pour lui, il intervient seulement par l'acide carbonique qu'il peut fournir à la plante. Les phénomènes de combustions, de putréfactions, de fermentations, qui se produisent dans le sol et qui portent sur l’humus, s'accompagnent toujours d’une absorption d'oxygène et d’un dégagement d'acide carbonique. Cet acide carbonique est ab- sorbé par les racines ; il arrive donc dans les tissus verts de la plante, où il est décomposé de la mème facon que celui qui vient de l'atmosphère ; la por- tion qui échappe aux racines se dégage dans l'air, où elle se trouve en conlact avec les feuilles. Plus le sol est riche en humus, plus la production de gaz carbonique est abondante, et plus le végétal absorbe de carbone. Si l’on active la combustion de l'humus en facilitant par les labours la pénétration de l'oxygène dans le sol, on en observera immé- diatement les effets sur la végétation, qui devient plus vigoureuse. Liebigavait doncuneréponseà tout. 154 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE-LA CELLULE VÉGÉTALE Ce n'est pas tout : les plantes renferment aussi de l'azote; re corps se rencontre dans tous leurs organes sous forme d'albumine ou de gluten. L'azote constitue les 4/5 du volume de l'atmosphère; mais l'azote gazeux n’est pas assimilable, car on a cons- taté que les végétaux verts exhalent de l'azote en même temps que de l’eau à la lumière ; l'azote dis- sous dans l’eau n’est donc pas absorbé ; et, comme on a établi que les plantes peuvent se développer et augmenter de poids sur du charbon de bois arrosé avec de l'eau distillée, il faut admettre qu'elles trouvent dans l'atmosphère un composé azoté qu'elles peuvent utiliser. Ce corps n'est autre que l'ammoniaque, qui est toujours présente dans l'atmosphère, où elle se forme pendant les orages sous l'influence des étincelles électriques ; on en trouve dans les eaux de pluie, dans l’eau de neige. On sait, d'ailleurs, que l’ammoniaque a une action très marquée sur le développement des plantes; les fumiers qui en fournissent le plus sont les plus efficaces; le purin en renferme beaucoup, et c'est pour cela que les agronomes soigneux l’uti- lisent avec soin. En résumé, d'après Liebig, la plante tire tous ses éléments organiques de l'acide carbonique de l’eau, et de l'ammoniaque ou des nitrates dont on a reconnu également l'utilité; quant aux cendres qui sont nécessaires aussi, elles viennent des subs- tances minérales du sol ou de celles que renferme le fumier. L'alimentation végétale est donc exclu- sivement minérale. On verra plus loin ce qu'il y a de trop absolu dans cette déduction; pour le moment, il suffit de faire remarquer combien les idées de Liebig étaient en opposition avec l'opinion universellement adoptée, et combien était grande la révolution qu'elles présageaient au point de vue agronomique. Elles suscitèrent des contradictions violentes, et, comme il arrive toujours en pareil cas, les argu- ments qu’on leur opposait relevaient surtout de la spéculation; mais Liebig se complaisait dans la lulte, et, après une discussion aussi passionnée que stérile, on en vint aux expériences qui, seules, peuvent conduire à des résullats. Les savants se divisèrent en deux camps : d'un côté, les chimistes qui, avec Liebig, prétendaient que la Chimie doil aspirer à résoudre les phénomènes de la vie parce qu'ils sont régis par les mêmes lois que tous les phénomènes cosmiques; de l’autre, les agronomes et les physiologistes qui, à cette époque, profes- saient tous des idées vitalistes. Les physiologistes, comme de Saussure, avaient déjà éludié l'influence des éléments minéraux sur la végétation, les résultats obtenus, intéressants à certains égards, ne plaidaient pas toujours en faveur des déductions de Liebig; mais, comme le faisait justement remarquer ce dernier, il ne faut pas demander à l’étude d’un malade des rensei- gnements sur les lois de la nutrilion chez une per- sonne bien portanle : une expérience ne peut four- nir de résultat probant si l'on n'a pas déterminé exactement les éléments indispensables au déve- loppement de la plante. Il s’agit donc de trouver, avant tout, un milieu de constitulion telle que le végétal puisse y prospérer. Sous la vigoureuse impulsion de Liebig, les recherches sur la nutrition minérale des végétaux, à l’aide de solutions nutri- lives ou de sable calciné additionné de substances minérales, prirent un essor magnifique. Les ré- sultats confirmèrent pleinement les prévisions de Liebig, et c'est de cette époque que date la véritable science agricole ; l'emploi des engrais minéraux se généralisa en quelques années, el l’agriculture, affranchie des pratiques empiriques qui l’auraient conduite à la ruine, connut désormais une pros- périté qui ne peut être compromise que par les accidents météorologiques. La Chimie, suivantles prévisions de Liebig, a donc imposé ses règles à l'Agronomie; rien ne semblait désormais capable de modifier les résultats obtenus ou de s'opposer à la marche progressive de nos connaissances sur la nutrition végétale; et pourtant les physiologistes ne tardèrent pas à jeter une nole discordante dans l'harmonieux accord qui régnait entre les chimistes et les agronomes. Les physiologistes n'ont, d’ailleurs, jamais partagé toutes les vues des chimistes; mais,comme la riva- lilé d'écoles ne nuit pas au progrès des idées, on ne doit pas désirer chez les savants une parfaite communauté d'opinions. L'interprétation de l'origine de l'acide carbo- nique exhalé par les plantes fut le point de départ de la nouvelle discussion. Pour les chimistes, re- présentés surtout par J. Dumas et Boussingault, la plante est exclusivement un organisme de réduc- tion et de synthèse : elle absorbe du carbone, dé- gage de l'oxygène, et construit des substances or- ganiques ; l'animal, au contraire, est un organisme de combustion et d'analyse : il absorbe de l'oxygène et dégage de l'acide carbonique; il détruit la ma- tière organique. L’acide carbonique exhalé par les plantes provient du sol, et filtre comme l’eau et l'azote à travers le végétal. Les physiologistes, avec Claude Bernard, n'ad- mettaient pas cette interprélation. La plante ex- posée à la lumière décompose l'acide carbonique et dégage de l'oxygène; mais ce phénomène est la résultante de deux actions inverses : la combustion respiratoire et la fonction chlorophyllienne. Si on met la plante à l'abri de la lumière, le premier seul subsiste, et, dans ces condilions, il faut ad- mettre que la plante respire comme l'animal, _— ad: P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 155 c'est-à-dire absorbe de l'oxygène et dégage du CO, à un moment quelconque de son existence, et non pas, comme l’admettaient Dumas et Boussingault, pendant la germination ou la fructification. Claude Bernard a, d'ailleurs, réussi à mettre en évidence le phénomène de la respiration chez les plantes expo- sées à la lumière en les anesthésiant par les va- peurs d'éther; l’éther suspend l'assimilation chlo- rophyllienne, mais respecte la fonction respiratoire. Il n'y a donc pas lieu d'opposer le végétal à l'animal d'une manière absolue : il y a un grand nombre de phénomènes communs aux végétaux et aux ani- maux; en particulier, on peut dire que toules les cellules vivantes respirent dans les conditions nor- males de leur existence. If. — NUTRITION DES MICROBES. Si la conclusion que je viens de formuler s'est dégagée avec tant de difficulté de l'étude de la nu- trition des végétaux supérieurs, c’est parce que l’on ignorait complètement le mécanisme des com- bustions, des fermentations et des putréfactions dont le sol est le siège. À l’époque où Liebig pu- bliait sa Chimie organique appliquée à l'agriculture, l'existence des infiniment petits n'avait pas encore attiré l’attention des savants; on les confondait tous sous le nom d'infusoires et de vibrions; on savait qu'ils peuplaient de préférence les infusions orga- niques, mais on ne les considérait pas comme les agents des transformations chimiques qui sur- viennent dans les liquides en fermentation. C'étaient des êtres inférieurs, qui naissaient spontanément dans les liquides en putréfaction, à la faveur des changements qui s’y produisaient. Quant à la véri- table cause des fermentations, elle résidait, d'après Liebig, dans la propriété que possèdent les subs- tances organiques en décomposition de commu- niquer autour d'elles, à des substances de même nature, les mouvements dont elles sont animées. Cetle interprétation, qui était déjà celle de Willis et de Stahl, repose exclusivement sur des apparences. Il est assez curieux de voir un esprit comme Liebig, après avoir montré combien les apparences sont Vaines à propos de la théorie de l'humus, tomber dans le défaut qu'il reprochait à ses adversaires, Sur une question tout à fait voisine. Lorsqu'on introduit une certaine quantité d'un liquide en fermentation, en d'autres termes un peu de levain, dans un liquide de même nature, on voit bientôt celui-ci entrer à son tour en fer- mentation; le mouvement de décomposition qui existait dans le levain se communique à la masse, mais le résultat final n’est pas constant : le levain pris à une fermentation donnée peut provoquer une autre fermentation, qui aboutit à une transforma- tion différente de la première. Avec un levain emprunté à une fermentation alcoolique, on peut, par exemple, obtenir une fermentation lactique. Cagnard-Latour, Schwann et Helmhollz avaient attribué la fermentalion alcoolique au développe- ment d'un organisme vivant que l’on peut voir au microscope; ils avaient même observé, chez ce végétal microscopique, la multiplication par bour- geonnement. La fermentation est done la con- séquence du développement d'un être vivant et doit, par conséquent, être considérée comme un acte vital. Cette conclusion n'était pas faite pour embar- rasser Liebig : si la levure a une action quelconque sur la fermentation, ce n’est pas à sa vie qu'il faut l’attribuer, mais bien à sa mort; le ferment mort entre en putréfaction et le mouvement de décom- position se communique au sucre; le ferment qui se décompose perd du poids : c'est pour cela qu'il y à, en général, moins de ferment à la fin de la fermentation qu'au commencement; mais, si le liquide est riche en gluten, il fermente plus éner- giquement, et, comme le gluten se précipite sous forme de globules de levure, on trouve plus de poids de levure à ia &n qu’au début. Tel était l’état de la question au moment où Pas- teur à abordé l'étude des fermentations. Dans un premier Mémoire, il étudie la fermentation lactique et formule les conclusions suivantes, qui constituent la base de la Microbiologie : 1° La fermentation lactique est la conséquence du développement d'un ferment vivant; 2 Cette fermentation peut être transportée d’un milieu dans un autre au moyen d'une goulte de liquide aussi faible que l'on veut; 3° On obtient toujours la même fermentation lorsque le microscope montre que la semence est homogène ; 4 La fermentation lactique doit être considérée comme une action vitale produite par un ferment spécifique ; la matière fermentescible est son aliment. Cette notion de spécifité appliquée à la levure devait conduire Pasteur à préparer des semences de levures pures; et, comme une quantité de semence aussi faible que l’on veut provoque tou- jours dans ces conditions la même fermentation, il suffira d'introduire une quantité impondérable de ferment dans un milieu dépourvu de gluten pour renverser la théorie de Liebig, si le ferment se multiplie. La levure renferme des cendres; il faut donc lui fournir des aliments minéraux, ses propres cendres; eïle renferme aussi de l'azote; on le lui offrira sous forme de tartrate d'ammoniaque; et, comme c'est le sucre qui est la malière fermen- 136 ‘ P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE tescible, il faut le considérer comme le principal aliment de la levure. La liqueur ainsi préparée, ensemencée avec une trace de levure, a fermenté, et, à la fin de l’expé- rience, il y avait un poids de levure trois ou quatre fois supérieur à celui de la semence. La levure s'est done multipliée dans un milieu minéral ne renfermant que du sucre, et la fermen- tation alcoolique doit être considérée comme un acte vital et non comme un phénomène corrélalif de la décomposition du ferment introduit. Les premières recherches de Pasteur orientaient donc la science vers une nouvelle voie, puisqu'elles établissaient que les fermentations doivent être attribuées à des organismes spécifiques. Les phé- nomènes désignés sous le nom de combustions ou de putréfactions doivent être rapportés aux mêmes causes : c'est ce que les élèves ou les disciples de Pasteur ne tardèrent pas à démontrer. Ce qui nous intéresse dans cel exposé, c'est d'abord ce fait que ce sont les microbes qui prési- dent à la destruction de la matière organique du sol; j'aurai bientôt l'occasion de rappeler ce résultat; c'est ensuite la propriété des matières fer- mentescibles d'être des aliments pour les ferments. On sait que ceux-ci se développent de préférence dans les liquides qui renferment des substances organiques ; il semble donc que la nutrition des microbes ne saurait êlre assimilée à la nutrition des végétaux supérieurs. Mais les résultats de Pasteur nous montrent encore qu'il ne faut pas se hâter de formuler des conclusions absolues. Nous avons vu, en effet, la levure se mulliplier dans une solution minérale aux dépens du sucre; le sucre est indispensable, car c'est lui qui apporte à la levure l'énergie néces- saire pour édifier ses tissus; la plante verte ne pro- cède pas autrement quand elle utilise le sucre éla- boré par les choroleucites; la plante verte est un parasite direct, si l'on peut s'exprimer ainsi, du grain de chlorophylle; la levure en est un parasite indirect: la théorie minérale de Liebig trouve ainsi une nouvelle confirmation. Raulin en a donné une autre encore, plus écla- tante, avec le Sterigmatocystis nigra; ce champi- gnon peut nou seulement se développer sur un mi- lieu minéral additionné de sucre, mais il le préfère à toutes les solutions organiques; si, de plus, on fait remarquer que tous les champignons que l’on a cultivés jusqu'ici sur des milieux artificiels peu- vent proliférer également sur des solutions miné- rales sucrées, on est en droit de se demander s’il n'est pas possible de généraliser ces résultats. On a observé, en effet, le développement de bac- Léries dans les solutions minérales ne renfermant que du sucre, ou même un acide orgauique comme l'acide lactique, les acides tartrique, malique, ci= trique, ele. Les ferments nitreux et nitriques isolés par Winogradsky sont encore moins exigeants : ils. empruntent leur carbone à l'acide carbonique; comme les plantes à chlorophylle, mais pas suis vant le même mécanisme. La présence d’un alimenb carboné n'est donc pas nécessaire ; Winogradsky a même montré qu’elle ne peut être que nuisible; c’est la transformation de l'ammoniaque en acides nitreux ou l’oxydation de l'acide nitreux en acide L nitrique qui constituent ici la source de l'énergie in. dispensable à toute cellule vivante. Contrairement à ce qu'on a observé chez tous les êtres vivants connus, la combustion respiratoire porte sur l'azote et sur l'hydrogène; elle se réduit, en dernière ana lyse, à un dégagement d'azote oxydé el d’eau pen= dant que l'acide carbonique est décomposé. | Mais, malgré lous ces exemples de prolifération. microbienne active dans des solutions puremenb minérales, qui vont même jusqu'à constituer sou=. vent des milieux d'élection, il n’en est pas moins évident que les espèces qui recherchent exelusive= ment les solutions organiques paraissent êtres encore les plus nombreuses. On peut prévoir toub au plus que leur nombre se réduira dans l'avenir. Dans l’état actuel de la science, il faut donc con= clure que la nutrition des microbes ne peut pass être assimilée à la nutrition des végétaux supé= rieurs, telle que la concevait Liebig et son École; il. s’agit de montrer maintenant que c'est Liebig qui s’est montré trop exclusif. IIE. — RÉSERVES A FAIRE A LA THÉORIE MINÉRALE DE LIEBIG. Jusqu'en 1860, les phénomènes de fermentalion; de combustion et de putréfaction dont l'humus esb le siège ont été expliqués par les théories chi miques. L'interprétation était d'autant plus goûtée que les chimistes et même les physiologistes réagiss saient ouvertement contre les théories vitalistes En attribuant tous ces phénomènes à des causes vitales, Pasteur inaugurait une série de recherches qui ont permis de pénétrer de plus en plus le mécas nisme intime de toutes ces transformalions. La moindre particule de terre, la plus pelite gouttes d'eau sont peuplées d'espèces microbiennes variées qui constituent autant d'agents actifs de destrucs tion de la matière organique. Ce sont eux qui ass FI rent la vie à la surface du globe en rendant à circulation et au monde minéral le carbone et su tout l'azote combinés qui resteraient inertes Silk conservaient l'état insoluble. A vrai dire, les agen chimiques agissent également dans le même sensÿ mais leur rôle nous apparaît négligeable à côté d celui qu’assument les infiniment pelits et qui | À A P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 157 remplissent d'autant p'us sûrement que leur acti- | vité se règle sur le travail à accomplir; plus il y à de matières organiques à transformer, plus ils prolifèrent, de sorte que la destraction fait toujours équilibre à la création. - Ces faits expliquent pourquoi l'humus ne peul pas contribuer d'une manière sensible à la nutri- tion des végétaux supérieurs; mais la négation pure et simple du fait tourne au paradoxe. Les résidus animaux et végétaux renferment, en effet, en des substances solubles parmi lesquelles des sucres; comme les racines laissent passer les subs- fances minérales solubles, on ne conçoit pas pour- quoi elles n’absorberaient pas les substances orga- “iques dissoutes dans l'eau. Or, les substances drganiques variées qui circulent dans la sève sont ilisées par Les plantes ; si elles viennent du dehors, elles doivent subir le mème sort. Liebig admettait e les végétaux supérieurs n'absorbent pas le cre parce qu'ils peuvent en fabriquer. Cepen- dant, bien avant lui, les physiologistes avaient ob- Servé que les racines peuvent absorber le sucre introduit dans une solution minérale; mais l’expé- ence n'était pas concluante, parce que les phé- mènes de fermentation se déclaraient très vite dans le liquide nutritif. É De nos jours, on voit de nouveau les agronomes, s renseignés sur les phénomènes biologiques i se déroulent dans le sol, tenter de mettre en idence l'absorption de l'humus par les végétaux périeurs. Si l'on introduit, dans deux parcelles de re aussi identiques que possible, la même quan- d'éléments fertilisants, d’une part sous forme engrais minéraux et de l’autre à l’élat de fumier, - constate que c’est la parcelle qui a reçu la Mure organique qui donne la meilleure récolte. semble donc tout naturel d'en conclure que Piumus a élé absorbé. En réalité, l'expérience anque de valeur probante, car l'humus modilie propriétés physiques et chimiques du sol dans sens très favorable à la végétation. La conclu- on demeure donc indécise. our démontrer l'absorption des substances aniques solubles par les racines des végétaux et ur assimilation ultérieure, il est nécessaire de faire des cultures dans des solutions nutritives préalablement débarrassées de germes microbiens, en partant de graines aseptiques. Il faut, de plus, si Don veut rapporter l'augmentation de poids réalisée par la plante au carbone organique introduit dans leS solutions nutrilives, opérer à l'abri de la umière, de façon à éviter l'assimilation chlorophyl- lienne. En opérant dans ces conditions, j'ai constaté e les plantules de pois assimilent le sucre et que es poids de plantes obtenus à la fin de l'expérience REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. sont bien supérieurs aux poids des graines qui leur ont donné naissance. Mais les tiges restent chloro- tiques, et atteignent une longueur démesurée. Puisque les racines absorbent et assimilent le sucre à l'obscurité, il faut en conclure qu'il en est de même à la lumière; c'est ce que M. J. Laurent a vérifié directement avec le maïs: mais on peut s'étonner de voir combien les poids de plantes obtenus à la lumière sont faibles. Il semble que le sucre gène le développement de la plante. J'ai repris ces expériences avec M. A. Perrier, dans le but de démontrer que le maïs cultivé dans des solutions nutritives additionnées de sucre doit se développer à la lumière plus vigoureusement que dans les conditions les plus favorables qu'on réalise dans les champs. Nous avons pu constater qu'il en est bien ainsi; pendant le premier mois de leur développement, les plantes en expérience con- servent une avance marquée sur des plantes qui poussent en plein air dans un sol très fertile. Les poids de sucre assimilés ont varié de 5 grammes à 14 grammes pour des plantes dont le poids sec variait de 6 à 20 grammes au bout de dix-huit à trente-trois jours. Ces résultats prouvent que le sucre, offert à la dose de 1 °/, environ, loin de gêner la plante, active au contraire son développement. Il n’est pas douteux qu'on ne parvienne à géné- raliser ces observalions en opérant avec des subs- tances ternaires ou azotées, celles, du moins, qui se rencontrent communément dans les végétaux, et, en particulier, avec les matières humiques solubles. Si l'on peut négliger cette assimilation dans les conditions de la grande cullure, c’est parce que les microbes décomposent toutes ces substances avec une rapidité telle que l'eau qui circule à travers les couches arables ne renferme que des traces de substances organiques solubles. Au point de vue pratique, on peut admettre que les végétaux n'ab- sorbent par les racines que les résidus des fermen- tations microbiennes, l’'ammoniaque, les nitrates. C'est pour cela que l'application des idées de Liebig à l’agriculture a élé si féconde en résultats. Mais la théorie nous enseigne que les racines absorbent indifféremment toutes les substances alimentaires solubles, minérales où organiques, azotées ou non azotées, ce qui permet de conclure que le mode de nutrition des végétaux supérieurs se confond en tous points avec celui des microbes, l'assimilation chlorophyllienne mise à part. Dans un deuxième article, nous exposerons nos propres recherches sur la question de la nutrition carbonée des végétaux et les conclusions qui en découlent. Pierre Mazé, Docteur ès sciences, Chef du Laboratoire de Chimie agricole à l'Institut Pasteur. £* 158 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE LA THÉORIE DES ÉLECTIONS ET LA REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE DEUXIÈME PARTIE : EXAMEN CRITIQUE DES THÉORIES SUR LESQUELLES S'APPUIE LE SYSTÈME D'HONDT I. — EXAMEN DE LA DÉMONSTRATION DE M. MANSION. | répondre aux critiques era Dans l’un des derniers numéros du Bulletin des Sciences mathématiques”, M. Mansion, en réponse à un arlicle antérieur de M. La Chesnais sur la représentation proportionnelle, affirme que « le système de feu le Professeur d'Hondt a été adopté en Belgique, parce que Ze nombre des suffrages ineflicaces y est moindre que dans aucun autre sys- tème ». M. Mansion avait publié', huit ans auparavant — et bien qu'il füt « adversaire acharné » de la représentation proportionnelle *, — un Théorème destiné à démontrer que, « dans le système d'Hondt de représentalion proportionnelle, le nombre des suffrages dits inefficaces est minimum ». Cette démonstralion de l’éminent professeur de Mathé- matiques de l'Université de Gand a contribué gran- dement à faire entrer le système préconisé par M. d'Hondt, professeur de Droit civil à la même Université, dans la législation belge ÿ. C’est sur ce théorème, en effet, que M. d'Hondt et les partisans de son système s'appuyèrent désormais pour ! Voir la première partie de cet article dans la Revue du 15 février, p. 111 et suiv. ? Juillet 1903, p. 203. # Cf. La Représentation proportionnelle, revue mensuelle (sic), numéro de janvier-février-mars 1895, p. 46 (Bruxelles, impr. Polleunis et Ceuterick). * M. Mansion à publié autrefois un tract en 4 pages intitulé : Contre la Représentation proportionnelle, où il démontrait : 19 Que la représentation proportionnelle peut ne pas donner la majorité, à la Chambre, au parti qui l'a dans le pays; 29 Qu'un faible déplacement de voix suffit pour enlever à la Chambre la majorité aux catholiques bien qu'ils l'aient encore dans le pays. (Proportionnaliste con- vaineu, je serais assez volontiers d'accord avec M. Man- sion, en ce qui concerne ces deux démonstrations, s'il rem- placait le mot proportionnelle par disproportionnelle. La plupart des systèmes prétendus proportionnels sont loin de réaliser la proportionnalité. Le problème a été mal résolu, parce qu'il a été mal posé.) 5 Chose singulière ! le projet appliquant le système d'Hondt fut adopté par la Chambre belge (24 nov. 1899) par 70 voix contre 63, grâce aux votes favorables d’un certain nombre d'adversaires de la représentation proportionnelle, et malgré les votes contraires de proportionnalistes avérés, de treize, au moins, qui appartenaient au Conseil général de la Ligue belge pour la représentation proportionnelle, Au Sénat, des proportionnalistes clairvoyants, MM. Guinotte et W. de Selys, firent également entendre des protestations éner- giques. | pour affirmer que leur sysième de représentatio tème était l’objet dela part des mathématiciens”, d M. Massau, professeur de Mécanique à l'Université de Gand, un des proportionnalistes les plus émis nents de Belgique, et d’autres encore. C’est sur 1 démonstration de M. Mansion qu'ils s'appuyèrent « proportionnelle » était supérieur à tous les aulress systèmes qui avaient été mis en avant (et même à tous les systèmes possibles et imaginables!). En France, la Ligue pour la Représentation propor tionnelle, présidée par MM. Yves Guyot, Ad. Carnot (de l'Institut), Durand-Claye, inspecteur général des Ponts et Chaussées, L. Mill, député, et G. Picok (de l'Institut), s'appuie également sur la démons tration de M. Mansion? pour demander l'adoption du système d'Hondt en France. { C'est cette démonstration que M. Mansion vient. de reproduire récemment — en termes un peux différents — dans le Pulletin des Sciences mathé” matiques. | Je me propose de démontrer qu'elle est absolu= ment erronée. Je reprends les données de M. Mansion. Il y a 2M députés à élire, trois partis en présence, qui se partagent les suffrages des électeurs. Le parti / obtient 4 suffrages, le parti B en recueille b, et @ est le nombre des suffrages obtenus par le parti G Le nombre total des suffrages exprimés a + h £r est égal à s. Soit À un nombre tel que a = pA + a Dans le système belge ou système d'Hondt, les partis À, B, C auront respectivement droit à p, 4," 1 dépulés. « Or, dit M. Mansion, la répartition des sièges de députés entre les trois partis eût été la même s 1895, p. 17. > Proposition de loi ayant pour objet l'application dela rep. prop. aux élections législatives, Paris, avril 4903, p. 26. # M. Mansion dit : « l'un de &es restes étant au plus égal à 2». Simple inadvertance. , . MEYER — THÉORIE DE 3 ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 159 électeurs du parli À, $ du parti B, y du parti C n'avaient pas volé. Il y a donc : d+B+y—atb+c—(p+q+r)A , —s—nA suffrages inefficaces. » Celle manière de déterminer le nombre des suf- frages inefficaces est erronée. On pourrait dire, en effet, tout aussi bien, si ce mode de raisonnement élait admissible : « La répartition des sièges eût été la même s'il £ JA ee: -n y avait eu que == votes émis en faveur des can- É A : | didats du parti A, _ voles en faveur du parti B, nrA et —- suffrages donnés aux candidats du parti C. Il y à donc : L re BEI ra se suffrages inefficaces. » D'une manière générale, si cette facon de raison- ner élail juste, on pourrait dire tout aussi bien que la répartition des sièges eût été la même s’il y avait eu 21pA voles émis en faveur du parti A, mqA votes en faveur du parti B et mrA suffrages donnés au b parti C, » pouvant être un nombre entier ou frac- tionnaire, plus grand ou plus petit que l'unité. Comme » peut prendre un nombre infini de va- leurs différentes, la quantité exprimée par la for- mule s—mnA, qui doit donner le nombre des suf- irages inefficaces, peut elle-même prendre un nombre infini de valeurs différentes. Le mode de raisonnement employé par l'éminent mathémati- cien belge ne permet donc pas de déterminer le nombre des suffrages efficaces et celui des suf- | frages inefficaces. - Dans la seconde partie de sa démonstration, M. Mansion s'occupe de la déterminalion du nombre des suffrages inefficaces dans les autres Systèmes, en se servant pour celte détermination du même mode de raisonnement. Je me dispense- ui de répéter ce que je viens d'en dire. Je ferai remarquer seulement que c'est à tort que M. Man- “Sion suppose que, dans tous les systèmes, le nombre des sièges reste le même, quel que soit le nombre des électeurs qui n'ont pas voté. Il est vrai que, dans la plupart des systèmes de représentation plus ou moins « proportionnelle » qui ont été pro- posés jusqu'à présent, comme dans le système ma- Joritaire, le nombre de suffrages nécessaire et suffi- Sant pour l'élection de 2 représentants dans une circonscription de s électeurs pourrait, au besoin, se réduire à 7 suffrages : pour être élu, un seul Sutfrage serait, dans ce cas, nécessaire! Mais il est possible de concevoir des systèmes de représenla- tion proportionnelle où le nombre des représen- tants diminue quand une partie des électeurs n'ont . pas voté pour se faire représenter. Je dirai même que, pour ma part, je ne conçois pas d'autre sys- tème de représentation vraiment proportionnel, car il ne peut y avoir représentation proportion- nelle que si tous les représentants, quelle que soit leur circonscription, représentent chacun, directe- ment ou indirectement, le même nombre d'élec- teurs. Comme le disait en termes d'une justesse frappante M. Louis Havet, professeur au Collège de France, « les électeurs qui ne votent pas ne peuvent être représentés que par des sièges vides‘ ». Que faut-il donc entendre par suffrages efficaces et suffrages inefficaces, et comment déterminer les nombres respectifs de ceux-ci et de ceux-là? Dans un coilège électoral de s électeurs ayant droit à 2 représentants, la représentalion serail proportionnelle et les s suffrages émis seraient {ous efficaces (et également efficaces) si les lrois partis en présence, À, B, C, qui, en vertu du système d'Hondt, ont respectivement recu p, q etr sièges, avaient respectivement obtenu Tr , SHRLEL RS suffrages. En général, il n’en sera pas ainsi. On aura par exemple : mire as +, et comme atb+e=£s+f Ts+is, + h!'=— h". Dans ce cas, 2 suffrages du parti À et Z! du parti B auront été inefficaces. La répartition des sièges a été faite comme si, sur les suffrages qui ont élé émis, 2 suffrages du parti A et L' suffrages du parti B avaient été transférés — sans le consen- tement des candidats et des électeurs — au parti C. Supposons, par exemple, que, dans une circons- cription de 24.000 électeurs, il y ait 4 représentants à élire — un représentant pour 6.000 électeurs — et que les partis en présence, au nombre de quatre que nous appellerons À, B, C, D, aient respective- ment recueilli 12.000, 6.000, 3.800 et 2.200 suf- frages. Si l’on applique le système d'Hondt, le parti À, qui à recueilli la moitié des suffrages, recevra 3 sièges sur 4. Le parli B, qui a recueilli le quart du total des suffrages, recevra un siège, les partis C et D, qui ensemble ont réuni 6.000 voix, n'auront pas de représentant. : Conférence sur La représentation proportionnelle et la moralité des élections, faite le 21 décembre 1901 sous la pré- sidence de M. Anatole France, devant les sections du XVIe arrondissement de la Ligue des Droits de l'Homme et du Citoyen. 160 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE Si l'on applique le système suisse, le parti A et le parti B reçoivent chacun un représentant à raison de 6.000 suffrages. Le parti À, qui a recueilli la moitié des suffrages, recoit donc 2 sièges sur #4; le parti B en recoit un. Reste à attribuer le qua- trième siège. Ce siège complémentaire est donné, dans le système suisse, au parti qui a le plus fort excédent de voix non encore représentées, c'est-à- dire au parti C qui a obtenu 3.800 voix. Je ne parlerai que pour mémoire du système Struye, que M. Mansion a également examiné dans sa démonstration de 14895. Personne ne l'a jamais proposé en France. L'application projetée de ce système, en Belgique, sous le ministère catho- lique Van den Peereboom, en 1899, provoqua une émeute et faillit déchainer une révolution *. La Lique pour la Représentation proportionnelle, dans l'exposé des motifs de sa Proposition de loi, a commis* une erreur grossière en confondant le système des plus fortes fractions, qui fut préconisé pas l'Association réformiste de Genève, avec Île système Struye, qui est, de tous les systèmes, celui qui s’en éloigne le plus, et aussi celui qui s'éloigne le plus de la proportionnalité. Si l’on applique le système proposé par M. Mir- man, les 6.000 suffrages réunis par les partis C et D sont transférés au parti qui a obtenu le plus de suffrages, c'est-à-dire au parti A: même répartition des 4 sièges que dans le système d'Hondt et celui de Struye. Avec le système d'Hondt, il y a 6.000 suffrages inefficaces (les 6.000 suffrages réunis par les partis Cet D). Avec le système Mirman (et le système Struve), de même. En appliquant le système suisse, le nombre des suffrages inefficaces se réduit à 2.200: c'est le nombre des voix recueillies par le parti D, qui n’a pas obtenu de représentant. —————_— 1 Le système Struye devait être appliqué dans la circons- cription de Bruxelles, où les cléricaux n'ont que la majorité relative, et dans quelques autres circonscriptions de grandes villes ayant au moins 6 représentants à élire. Voici comment il devait fonctionner : Supposons que, dans une circonscription ayant 6 sièges à recevoir pour un total de 60.000 suffrages, les cléricaux en aient reeu 49.000, les libéraux 9.000, les radicaux 8.000, les socialistes 18.000 et les démocrates-chrétiens 6.000. Le parti clérical et le parti socialiste, qui ont atteint chacun une fois le quotient 10.000, reçoivent chacun un siège. Les quatre sièges complémentaires sont ensuite attribués au parti qui a obtenu la majorité relative, au parti clérical. Les cléricaux recoiveut donc en tout à sièges sur 6 avec 19.000 suffrages sur 60.000, les socialistes avec 18.000 suffrages en reçoivent un seul, et les autres partis, qui ont obtenu un total de 23.000 voix, n'obtiennent aucun représentant. Dans les 35 petits arrondissements ruraux, élisant moins de 6 représentants, où le parti clérical possède généralement la majorité absolue, le projet maintenait le système majo- ritaire. 2 Pour la conjurer, le ministère dut retirer son projet et donner sa démission. 3 Page 19, ligne 35. sur les 24.000, les suffrages de ce parti ne seraient D'après M. Mansion, en appliquant le système d'Hondt, il y aurait non pas 6.000 suffrages ineffis caces, mais 8.000 (2.000 pour le parti B, 3.800 pour C et 2.200 pour D). En appliquant le système suisse des plus fortes fractions, il y aurait non pas 21.800 suffrages efficaces, mais seulement % x 3.800 — 15.200 et, par conséquent, 8.800 suf= frages inefficaces (4.400 pour le parti A, 2.200 pour le parti B et 2.200 pour le parti D) au lieu de 2.200, Remarquons que les suffrages obtenus par le parti B ont exactement la même efficacité dans le système des fractions forcées et dans le système d'Hondt, puisque, dans les deux systèmes, les 6.000 suffrages de ce parti reçoivent exactement le même nombre de représentants (un seul. Cependant, M. Mansion attribue aux suffrages du parti B une efficacité différente suivant que c'est le système suisse ou le système d'Hondt qui est appliqué. Si c'est le système d'Hondt, le parti B aurait, d'après lui, 4.000 suffrages efficaces et les 2.000 autres seraient inefficaces; si c'est le système È suisse, il n'aurait plus que 3.800 votes efficaces 4 2,200 seraient inefficaces! : Or, il est évident que les 6.000 suffrages dus parti B doivent tous être considérés comme effi- caces, — quel que soit le système que l'on applique, — puisque nous avons supposé que les 24.000 élec-« teurs de la circonscription ont droit à 4 députés, \ autrement dit à un représentant à raison id 6.000 électeurs, et que le parti B a obtenu précisé= ment 6.000 voix. Si le parti B, au lieu de réunir 6.000 suffrages,“ en avait recueilli davantage, 7.000 par exemple, à pas tous efficaces : 6.000 le seraient et 1.000. ne le seraient pas. Comme il à réuni exactement 6.000 voix, ils doivent tous être considérés comme. efficaces, quel que soitle système que l’on applique: Supposons un instant que les groupes Cet D, qui, ensemble, réunissent 6.000 voix, au lieu de prés senter aux électeurs deux listes séparées de candi dats, n'en fassent qu'une seule commune aux deux groupes et ne constituent plus qu'un seu parti C' de 6.000 électeurs, les deux autres partis À et B obtenant respectivement 12.000 et 6.000 voix comme précédemment. Quel que soit le système appliqué, le parti À recevra deux sièges, les 6.000 électeurs du parti B en recevront un comme précédemment, et un siège également sera attribué au parti C'. ; Dans ce cas, M. Mansion lui-même, après avoir considéré le parti B comme ayanttantôt 4.000 votes, efficaces sur 6.000, tantôt 3.800 sur 6.000, selon Jen système appliqué, M. Mansion considère les 6.000 suffrages du parti B comme étant tous eff caces. Dans tous les cas, les 6.000 électeurs de ce se. A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 161 parti ont obtenu identiquement le même résultat dans la répartition des sièges. Dans le présent cas, leurs votes sont tous efficaces; dans un autre cas, 4.000 seulement seraient considérés comme effi- eaces, et dans le troisième cas il ne faudrait consi- dérer comme efficaces que 3.800 votes sur les 6.000! Ainsi donc la méthode de détermination de l'émi- nent professeur de l'Université de Gand ne peut “servir à comparer l'efficacité des votes dans les “différents systèmes proposés, puisque, quand les “suffrages d’un parti ont identiquement la même efficacité quel que soit le système appliqué, les “résultats de la méthode de M. Mansion ne sont pas, en général, identiques. —_ Comment M. Mansion a-t-il été induit en erreur et a-t-il obtenu ces résultats divergents et inconci- “liables ? C'est parce que, après avoir supposé qu'il y avait en tout s suffrages, M. Mansion, sans s'en “apercevoir, a modifié ses données. Pour le système d'Hondt, il a raisonné comme si le nombre des suf- -frages émis avait élé non pas s, mais seulement nA. Puis, passant à un autre système, il modifie de -nouveau ses données, et raisonne comme sil n'y avait que 71 suffrages en présence, pour prendre part à la répartition proportionnelle. L'erreur de M. Mansion sera facile à saisir en reprenant l'exemple numérique qu'il avait donné dans la ÆReprésentation proportionnelle! en 1895 : … Soient 11 sièges à répartir. Il y a 4 partis en pré- sence ; 121.000 suffrages ont été émis et se sont répartis comme il suit : Suffrages catholiques . . . . . . . 20.000 — LDÉTAUXE MO 00 D — TAUICAULE- te er 307400 — SUCIaNStES 2-61 6U0 « Dans le système d'Hondt, dit M. Mansion, le nombre répartiteur est 10.000. Les catholiques obtiennent 2 sièges, les libéraux 0 siège, les radicaux 3, les socia- listes 6, absolument comme s'il y avait eu : Sutfrages catholiques . . 20.000 — ETS RATE MONET 0 — radicaux 30.000 u — socialistes 60.000 “à — «Il y a donc en tout 110.000 suffrages efficaces et, par Suite, 11.000 suffrages inefficaces. » Mais non! 121.000 suffrages ne peuvent se répartir comme s'il n'y en avait eu que 410.000 ! En réalité, les sièges ont été répartis absolu- ment comme s'il y avait eu : 20.000 + 2.000 — 22.000 suffrages catholiques. 9.000 — 9.000 — 0 — libéraux. 30.400 + 2.600 — 33.000 _— radicaux. 61.600 + 4.400 — 66.000 — socialistes. 121.000 0 —121.000 suffrages. EU EN © ERP AU OP °F Numéro de janvier-février-mars, p. 4. Il y a donc en tout 9.000 suffrages inefficaces, les suffrages donnés par les électeurs au parti libé- ral. Ces suffrages ont été transférés dans l'exemple de M. Mansion, par le mécanisme du système d’Hondt, aux trois autres partis en présence 2.000 au parti catholique, 2.600 au parti radical, et 4.400 au parli socialiste. M. Mansion passe ensuile au système des plus fortes fractions (qui fut préconisé en Belgique par M. Massau) : « Dans le système Massau, on aurait donné : sièges. Aux catholiques . Aux libéraux. Aux radicaux. . Aux socialistes. 2 IRREE dr = AR absolument comme si les suffrages avaient éte répartis comine il suit : Catholiques. 18.000 Libéraux . . 9.000 Radicaux . 27.000 Socialistes . 45.000 « 11 y aurait done eu Suffrages efficaces 99.000 — inefficaces. . 22.000 .» C'est impossible, car 121.000 suffrages ne peu- vent pas êlre répartis comme s’il n'y en avait que 99.000. L'erreur de M. Mansion apparaît ici très clairement. En réalité, les sièges ont élé répartis absolument comme s'il y avait eu : 20.000 + 2.000 — 22.000 suffrages catholiques. 9.000 + 2.000 — 11.000 — libéraux. 30.400 + 2.600 — 33.000 — radicaux. socialistes. 61.600 — 6.600 — 55.000 — 121.000 + 0 —121.000 suffrages. Il y a donc en tout, non pas 22.000 suffrages inef- ficaces, comme le dit M. Mansion, mais seulement 6.600. (Dans l'exemple de M. Mansion, ces suf- frages inefticaces ont tous été émis par des élec- teurs socialistes et transférés aux autres partis en présence : 2.000 aux catholiques, 2.000 aux libé- raux et 2.600 au parti radical.) Inutile de parler du système Struye. Enfin, dans le système majoritaire, les sièges sont répartis absolument comme s'il y avait 121.000 sullrages socialistes, 0 suffrage catho- lique, 0 suffrage libéral, et 0 radical. Ainsi donc, c’est le système suisse et non pas le système d'Hondt qui comporte le moins de suf- frages inefficaces. Il est, d’ailleurs, possible de démontrer a priori d'une manière extrêmement simple que la démons- tration de M. Mansion est erronée, et, de plus, que: Théorème. De tous les systèmes qui admettent le 162 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS transfert des suffrages de liste à liste sans le con- sentement préalablement convenu des électeurs et des candidats, — M. Mansion n'avait en vue que des systèmes appartenant à cette calégorie, — c’est, invariablement, le système suisse des plus forts excédents qui comporte le moins de suf- frages inefficaces. En effet, dans le système suisse, ce sont préci- sément les restes ou excédents de voix non repré- senlées les plus faibles en imporlance numé- rique qui sont inefficaces pour les partis qui les ont obtenus. Ce sont les suffrages des moindres excédents que le système suisse transfère aux listes dont les excédents se rapprochent le plus du quotient proportionnel constituant le mètre élec- toral de la circonscription, de manière à com- pléter, jusqu'à concurrence de ce mètre, les frac- tions qui s’en rapprochent le plus. II. — EXAMEN DE LA DÉMONSTRATION DE M. ROUYER. On voit, en réalité, que c'est précisément le sys- tème suisse qui possède la propriété que M. Man- sion, dans son théorème, attribue d'une manière erronée au système d'Hondt. C'est done à tort que l’on conclut, dans la Théorie mathématique de la Représentation porportionnelle qui est annexée à la Proposition de loi' de la Ligue pour la Représentation proportionnelle, que le sys- tème suisse du quotient ou des plus forts excédents ne repose, en réalité, Sur aucune base rationnelle. De tous les systèmes qui admettent le transfert des suffrages de liste à liste en dehors du consen- tement des candidats et des électeurs (pour ma part, je considère tous les systèmes qui appar- tiennent à cette catégorie comme inadmissibles), le système suisse est non seulement /e plus pro- portionnel, comme M. Mansion veut bien le recon- naître*, mais aussi le plus rationnel. Je ne dirai que quelques mots de la 7héorie mathématique de la représentation porportionnelle, théorie due à M. Léon Rouyer, professeur agrégé de Mathématiques. M. Rouyer y démontre que «la méthode d'Hondt conduit à une répartition dans laquelle les listes favorisées bénéficient d'un avantage aussi faible que possible ». Supposons que, dans un collège électoral de 100.000 électeurs, ayant à élire un représentant à raison de 10.000 électeurs, les partis en présence A, B, C, D, E, F, G aient respectivement obtenu 49.000, 20.000, 7.000, 6.600, 6.400, 6.000 et 5.000 suffrages ÿ. a —— 1 Voir cette Théorie, op. cit., p. 51 à 58. ? Bull. des Sc. math., juillet 1903, p. 204. 5 Si l'on applique le système d'Hondt, le parti A, qui à ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE M. Rouyer considère que l'avantage — dem 3.000 suffrages — dont on ferait bénéficier Je parti Cqui a obtenu 7.000 suffrages (10.000 —3.000) si on lui donnait un représentant sur 10 comme shl avait recu 10.000 votes, serait plus important que l'avantage dont pourrait bénéficier le parti À qui obtenu 49.000 (ou 7 X 7.000) suffrages, si on nat tribuait pas à ce parti au moins 7 sièges sur 10! (comme s'il avait reçu non pas 49.000 suffrages mais 7 X 10.000 — 70.000), c'est-à-dire plus de deux sièges en trop. La démonstration de M. Rouyer serait juste si fallait, comme il le suppose, considérer non pas la valeur absolue des « avantages » (en d'autre termes des erreurs en faveur des listes avantagées | qu'un système donné de répartition comporte} mais leur valeur relative (c’est-à-dire le rapport de s'agissail, non pas de réduire au minimum Île somme des erreurs, le nombre lotal des suffrages inefficaces, mais de favoriser les partis ou coali tions les plus forts, proportionnellement à leu importance numérique, au nombre de suffrages que chaque parti ou coalition a obtenus. | Or, le but de la représentation proportionnelle; c'est de donner à chaque groupement d’électeurs exactement ou à moins d'une unité près le nombre de sièges qui lui revient sans favoriser aucun des partis de l'Assemblée des représentants de plus d'un siège. s'agit, en effet, d'assurer, quel que soit l'état de division des partis, la majorité dans lassemblée des représentants à lTopinion qui a lan majorité parmi les électeurs. On voit que, pour deux raisons, le système d'Hondt fausse la proportionnalité bien davantage que le système suisse. Celui-ci, du moins, donne, dans chaque circons le nombre de sièges qui lui revient. Il y a généralement des partis qui sont avantagéss au détriment d'autres partis. Mais jamais l’ava passer leurs candidats dans les circonscriptions ont, quelle que soit leur force numérique, des chances égales d'être avantagés ou de perdre uni partie de leurs suffrages au profit d’autres partis B en recoit 2, le parti C en recoit 1. Le système des pl fortes fractions attribue 5 représentants au parti A, 2 parti B, et un seul à chacun des partis C, D, E. Le systèn Struye donne 8 sièges sur 10 au parti À, et 2 sièges au pa B. Le système Mirman en donne 5 au parti A, 3 au parti B et un seul à chacun des partis C et D. A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 163 il en résulte, généralement, qu'une sorte de com- pensation s'établit, dans une certaine mesure, pour ‘chaque parti, entre les suffrages perdus dans un ‘certain nombre de circonscriptions et les suffrages qui lui sont transférés dans les autres circonscrip- tions. Si l’on applique le système d'Hondt, au contraire, un parti peut obtenir, par transfert à son profit et au détriment d’autres listes, non pas seulement une fraction du nombre des suffrages nécessaires pour “avoir droit à un siège, mais une fois et davantage, parois deux, trois lois, quatre lois, ele., ce nombre de suffrages, en d’autres termes un siège, deux sièges, trois sièges, etc., en trop. Comme, dans toules les circonscriptions, le sys- tème d'Hondt transfère invariablement aux partis les plus forts, aux grandes coalitions, les suffrages obtenus par les partis qui n’atteignent pas entière- ment, dans la circonscription prise isolément, le nombre de suffrages auquel le système d’Hondt attribue un représentant, il s'ensuit qu'en général il ne s'établit pas, comme dans le système suisse, une compensation entre les suffrages qu'un parti a perdus dans un certain nombre de circonscriptions et ceux qui lui ont été comptés en trop dans les aulres circonscriptions : en appliquant le système d'Hondt, ce sont généralement les partis les plus faibles, qui, dans toutes les circonscriptions ou dans la plupart d’entre elles, sont dépouillés de leurs voix au profit des plus forts ou des plus for- tement concentrés et des grandes coalitions de partis hétérogènes ; à ces partis, le système d'Hondt attribue, uniformément dans loutes les circons- criplions, les sièges correspondant aux suffrages des électeurs qui n’ont pas voté et aux suffrages perdus par les autres partis. Ainsi donc, non seulement c'est dans le système suisse qu'il y a, dans chaque circonscription, le moins de votes transférés de liste à liste à l’avan- tage de certains partis; mais, en outre, dans le système suisse, les votes perdus et les votes gagnés “par transfert de liste à liste se compensent, en - général, presque entièrement pour chaque parti, si l’on considère la répartition des sièges entre les “différents parlis pour l'ensemble des circonscrip- tions dans l'Assemblée des représentants, tandis que, dans le système belge, cette compensation fait presque entièrement défaut. III. — DÉMONSTRATION GÉOMÉTRIQUE DE M. HAGENBACH-BISCHOFF. . Voilà pourquoi un des théoriciens les plus émi- nents de la représentation proportionnelle, M. Ha- genbach-Bischoff, professeur de Physique à l'Uni- versité de Bàle, s'est grandement trompé en voulant « prouver que le principe fondamental de la valeur égale de tous lessuffrages esttoujours jus/ilié par la répartition avec le chiffre répartiteur de M. d'Hondt, et toujours violé quand, par suite de l’emploi d’une autre règle, le résultat diffère de celui que donne le chiffre répartileur! ». En effet, les suffrages ne sont pas tous, en général, efficaces, et, en raison du mécanisme du système d'Hondt, le rapport entre les suffrages efficaces et ceux qui ne le sont pas est infiniment grand ou très grand, en général, pour les partis les plus forts, tandis qu'il est le plus souvent très petit ou nul pour les autres partis; en outre, le système d'Hondt, substituant au quotient proportionnel un nombre plus petit comme mètre électoral ou nom- bre répartiteur, les votes qui sont inefficaces pour les partis qui les ont recus sont transférés aux autres partis qui en bénéficient pour des parts d'autant plus grandes qu'ils ont recu plus de suf- frages de leurs propres électeurs. Il s'ensuit que ce système donne, en général, aux votes des élec- leurs appartenant aux partis les plus forls beau- coup plus d'efficacité, de valeur qu'aux votes des électeurs appartenant aux autres partis. M. Hagenbach-Bischoff a imaginé une construc- tion géométrique très ingénieuse, qui conslitue une illustration du système d'Hondt ou, du moins, de la principale des règles de ce système; cette construction est considérée par les partisans du système comme une démonstration géométrique de sa justesse et de sa précision. « En partant du point O (fig. je prends suivant une échelle horizontal des abs- cisses, les distances OA, OB, OC, OD.... 4, égales aux sommes des suffrages des / différentes listes A, BAC D. Surales verticales élevées dans les points A, B, C, D... je mets ER z des points à égales distances, qui re- présentent les can- 1), dit M. Uagenbach, quelconque, sur l’axe B3 fÈ5 didats. Puis, en par- DAC £ tant de l'axe hori- < zontal, je fais tour- 4e ner une droite au- - 2 tour du point 0 ë DEMCSNE 3 jusqu'à ce que 2 Fio. 1. points en (out aient été dépassés. Le nombre de points dépassés sur chaque verticale donne le nombre de députés que peut réclamer chaque liste par le principe fondamental de la valeur égale de tous les suffrages. « Il est évident que, par cette construction géomé- trique, nous avons résolu avec toute rigueur mathé- 1 La Représentation proportionnelle (Bruxelles), année 1890, p. 168 : La solution dü problème de la représentation proportionnelle. 16% matique le problème de la représentation proportion- nelle. « La solution du problème ne peut donner la propor- tionnalité absolue que dans le cas très exceptionnel où la ligne tournante atteint exactement à la fois les derniers points de toutes les verticales sans que le nombre total des points qu'elle a touchés dans sa course dépasse le nombre n des sièges à répartir)’, comme dans le cas suivant : 9 députés à élire, A— x, Br 00% « La position de la droite qui résout le problème n’est pas en général fixe; elle est contenue entre deux limites bien définies. » En réalité, il n’y a qu'une seule position de la droite tournante’qui puisse résoudre le problème qui consiste à partager le nombre des sièges 7 en parties proportionnelles aux nombres de suffrages que les différentes listes en présence ont respecti- vement obtenus. Sé [Se En partant du point O (fig. 2), je prends sur l'axe des abscisses une distance OS égale à la somme s où OA + OB + OCG—+ OD... exprimant le total des suffrages obtenus par les différentes listes de la circonscription. Sur la verticale élevée au point $, je marque des points S,, S,,... S,, à égales distances, en tout » points (sans compter le point S). La longueur SS, représentera les n sièges à partager en parties proporlionnelles à OA, OB, OC, OD... Je mène pr le point O la droite OS,. Cette droite coupera les verticales élevées aux points À, B, C, D... en des points A’, B', C', D’... On aura évidemment, en vertu des propriétés des triangles semblables : SSraMAULONBBSS CCE "DD" Ci TONMOIMIRUNRNT Et, en outre,commeOS —OA +O0B+O0C+0D..., ! J'ajoute les quelques mots entre parenthèses pour ré- parer une simple omission (A. 17.) A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE la longueur SS, à partager en parties proportions nelles sera égale à la somme AA! BB'+CC'+ DD C'est donc la position OS de la droite tournante qui seule permet de résoudre géométriquement le problème qui consiste à partager la longueur SS, — en parties (AA', BB', CC', DD'...) proportion® nellesaux quantités OA — a,0B— h,0C— ec, OD —=d; exprimant respectivement les nombres de suffrages obtenus par les différentes listes. Toute autre position correspond au partage pro portionnel d'un nombre de sièges plus grand où plus petit que 2. En particulier, les positions de Ja droite indiquées par la construction de M. Hagen bach correspondent au partage proportionnel d'ux nombre de sièges plus grand que n. Si l’on suppose, par exemple, 2—4 et s — OS — 24.000 suffrages = OA + OB + OC + OD — 12.000 + 6.000 + 3.800 + 2.200 suffrages on aura : AA D qo X 4 —2 sièges; BB X 4— I siège; CC! — EU X 4 — 0 siège, 633...; DE Le X 4—0 siège, 366... La méthode de M. d'Hondt donnera 3 sièges sur 4 au parti À qui a obtenu la moitié des suf frages (12.000), 1 siège sur 4 au parti B qui a réuni le quart des suffrages (6.000), et 0 siège aux partis C et D qui, ensemble, ont oblenu 6.000 suffrages C'est ce qu'indique la position OA, de la droite tournante dans la construction géométrique de M. Hagenbach (et toute position comprise entre OA, et OC,). Or, cette position de la droite corres- pond au cas où il y aurait 6 sièges à répartir el non pas 4. Le parti A, qui a oblenu la moitié des suffrages, aurait droit alors à la moitié de 6 sièges c'est-à-dire à 3 sièges. Mais, comme il n’y a que 4 sièges à répartir, la construction géométrique de M. Hagenbach ne résout pas exactement, 21 méme à moins d'une unité près, le problème de la répar: tition proportionnelle. | L'erreur de l’éminent professeur bâlois provient de ce qu'il suppose que le problème de la repré: sentation proportionnelle est différent de celui qui consisle à partager un nombre en parties propors tionnelles à d’autres nombres. La répartition qu'on obtient en résolvant le problème comme une ques tion de partage en parties proportionnelles « satis= fait, dit-il, s'il s'agit, par exemple, de partager n francs, parce qu'on peut payer en centimes les fractions de franc. Mais, lorsqu'il s’agit de partager 2 représentants, on ne peut rien faire des fractions parce que tous les représentants doivent être élus A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE de la même manière, c'est-à-dire complètement : dans un cas pareil, il n'y a rien autre chose à] faire que de négliger les fractions ». « Mais cela modifie quelque peu le prcblème et nous devons diviser les nombres de suffrages par un même chiffre, tel que la somme des quolients, abstraction faite des fractions, soit égale à n »°. Remarquons d'abord que, quand il s'agit de par- tager 4 francs, par exemple, ou quatre billets de 100 francs en parties proportionnelles, on effectue la répartition en donnant à chacun ce qui lui revient à 1 centime près, ou plutôt à moins de 5 centimes près, la pièce de 5 centimes étant géné- ralement la plus petite monnaie de compte cou- rante. Et, si la monnaie divisionnaire venait à manquer, on ne songerait pas à donner à À 300 francs au lieu de 200 francs qui lui reviennent, sous prétexte que C et D n'ont droit respectivement qu'à 63 fr. 333.. et 36 fr. 666.., et que les billets de 100 francs ne se découpent pas. De toute facon, on s'efforcerait de régler le partage à moins d'une unité près ou à moins d'une demi-unité, que cette unité soit le billet de 100 francs, le franc, le décime ou la pièce de 5 centimes. C'est ce que fait le système suisse des plus fortes fractions en donnant à chacun des partis, à moins d'une unilé près, par excès ou par défaut, le nombre de sièges qui lui revient, les sièges com- plémentaires étant attribués aux plus fortes frac- tions. C'est ce que fait M. La Chesnais, — sans fixer à l'avance el d'une manière plus ou moins disproportionnelle le nombre des députés de chaque circonscription, — en donnant à chacun des partis, à moins d'une demi-unité près, le nombre de sièges qui lui revient dans la circonscriplion *. M. Hagenbach n'admet pas qu'il y ait des repré- sentants qui ne soient pas « élus complètement ». - Je n'admets pas non plus que tous les membres d'une assemblée représentalive ne représentent pas, directement ou indirectement,le mêmenombre - de suffrages quand les votes des représentants sont - égaux. Il est inadmissible, en effet, que les uns - aient atteint le mètre électoral (directement ou par - transfert de suffrages donnés au même parti), et - que les autres, les représentants complémentaires, - ne l’aient pas atteint dans une assemblée où tous les suffrages représentalifs ont la même valeur. Mais je ne suis plus du tout d'accord avec - M. Hagenbach-Bischoff quand il conclut de là : 1° Qu'il n'y a rien autre chose à faire que de négliger les fractions ; 2° Que, dans chaque circonscriplion, il faut modi- fier le problème et adopter dans chacune d'elles ! Représentation proportionnelle (Bruxelles), année 1887, p. 185. ? Bull. des Sc. math., 1903, p. 144. 165 un mètre électoral différent, en opérant d’après les règles du système d'Hondt (système qui est d’ail- leurs destiné, d'après MM. d'Hondt et Hagenbach, à réaliser « l’unité du mètre électoral » et « l'égale valeur de tous les suffrages »). Je ne puis adopter la première et bien moins encore la deuxième de ces conclusions. Il est possible de résoudre le problème de la représentation proportionnelle sans négliger les fractions. D'une part, en effet, s'il n'est pas possible de fractionner un représentant, il est possible de frac- tionner, par quarts ou par dixièmes, par exemple, la valeur des suffrages émis dans l'Assemblée par les représentants complémentaires, c'est-à-dire par ceux qui ne représentent qu’une fraction du mètre électoral. On pourrait également attribuer cette fraction de suffrage représentatif à celui des can- didats élus de la liste qui a obtenu personnelle- ment le plus de suffrages : cette fraction viendrait s'ajouter au suffrage entier qu'il possède déjà comme tous les autres élus de la liste". D'autre part, il n’est même pas indispensable, en général, pour résoudre d'une manière suffisam- ment exacte le problème de la représentation pro- portionnelle, de créer, dans l'Assemblée des représentants, des suffrages représentatifs frac- tionnaires : on peut également additionner les fractions perdues par un parti dans les circonscrip- tions de chaque région ou dans toutes les circon- scriptions du pays tout entier, et donner à ces fractions ainsi totalisées le nombre de représen- tants qui leur revient, de telle sorte que chaque groupement obtienne, au moins, à moins d'une unité près, le nombre de représentants auquel il a droit. Mises en œuvre isolément ou combinées ensemble, ces deux méthodes peuvent donner, par l'application rigoureuse de quelques principes extrêmement simples, des solutions satisfaisantes du problème de la représentation proportionnelle. Si l'on négligeait purement et simplement les fractions, toutes les fractions (sans s'astreindre à répartir les sièges complémentaires), on obtien- drait encore, en général, dans l’Assemblée des représentants, une répartition à peu près propor 1 Il ne faut pas confondre ce système avec celui que M. Boutmy préconisa dans une étude publiée en 1867 (Liberté du 21 août). Le système Boutmy n'avait pas pour but la représentation proportionnelle des partis, mais simplement la représentation plus ou moins proportionnelle des can- didats. Ce système n'assurait pas le transfert des suffrages entre candidats d'un même parti et l'utilisation, au profit d'autres candidats du même parti, des suffrages donnés inu- tilement ; il ne comportait pas de suflrages représentatifs fractionnaires. Il donnait à chaque représentant un nombre de suffrages représentatifs entier et égal à une unité près au quotient de la division du nombre de suffrages qu'il a obtenus par le mètre électoral. 166 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE tionnelle des sièges entre les différents partis. Mais ce qui est absolument inadmissible, c’est que, dans chaque circonscription, on modifie les données du problème en faveur des partis les plus forts, et que l’on substilue au quotient proportionnel comme mètre électoral un autre nombre plus petit et variant selon la répartition des suffrages entre les partis dans chaque circonscription. Même si, dans toutes les circonscriptions, le nombre des suffrages -émis élait mathématiquement le même (chose im- possible), on obtiendrait cependant, en appliquant le système d’'Hondt, autant de nombres répartiteurs différents qu'il y a de circonscriptions. Ce syslème ne peut donc donner que des résul- tats extrêmement disproporlionnels quand les -circonscriptions sont nombreuses et les parlis de forces inégales, et que quelques-uns d’entre eux ne peuvent alteindre le nombre réparliteur dans toutes les circonscriptions, bien qu'ayant des adhé- rents en nombre assez considérable pour que les suffrages inefficaces qu'ils ont ainsi recueillis dans le pays tout entier atteignent, totalisés, un certain nombre de fois le mètre électoral qui donne droit à nommer un représentant. La multiplicité des cir- conscriptions a pour effet, quand on applique le système d'Hondt, de multiplier les excédents de suffrages inefficaces que ce système n'utilise pas au profit du parti qui les a reçus, pertes d'autant plus sensibles qu'elles forment une portion plus imporlante du nombre lotal des suffrages reçus par un parti, désastreuses, par conséquent, pour les partis les plus faibles. IV. — UNE « EXPÉRIENCE DÉCISIVE ». EXAMEN CRITIQUE DES RÉSULTATS DES ÉLECTIONS BELGES DE 1900. Cependant, les partisans du système d'Hondt s'appuient sur l'application qui en a élé faite aux élections générales belges du 27 mai 1900 pour demander « l'importation » de ce système en France. « Expérience décisive », dit l'Exposé des motifs de la Ligue présidée par l'honorable M. Yves Guyot. Les dispositions du système belge auraient recu en 1900, d'après cet exposé, une « consécration » définitive. Je fus amené à me demander si vraiment cette ‘expérience élait de nature à démentir dans quelque mesure mes prévisions théoriques sur les résultats disproportionnels qu'un système tel que celui d'Hondt doit produire nécessairement. Est-il vrai, comme l'affirme l'honorable M. Yves Guyot, que ce système ait fai ses preuves en Bel- gique, autrement dit qu'il ait donné les résultats qu'on peut attendre de la représentation propor- tionnelle, et notamment qu'il ait assuré Ja majorité dans la Chambre, sinon à la majorité des électeurs (les Belges n'ont pas l'égalité du vote), du moins à la majorité des suffrages émis? Et le Temps appré=« ciait également d’une manière enthousiaste les effets de la nouvelle loi électorale belge en de remarquables arlicles publiés immédiaiementaprès les élections du 27 mai 1900 : « Chaque parti n’a qu'à déployer ses forces dispos nibles; il aura {out juste autant de sièges qu'il aura mérité d'en avoir ; la correspondance est absolument exacte entre le nombre des suffrages exprimés et le nombre des mandats obtenus. Ce n'est rien moins qu'une révolution. Désormais les caprices du hasard — parfois savamment préparé et exploité sans scru= pules — ne prévaudront plus contre les lois de l'Arith= meétique. (Temps du 28 mai 1900.) « C'est déjà en soi un immense progrès pour une démocratie que de se rendre aux urnes non plus avec le sentiment qu'un grand combat de force, de ruse et de chance va se livrer, et qu'il s'agit de corriger, par de savantes opérations, le hasard et ses caprices, mais: avec la conscience paisible que tout effort aura San récompense, que pas un vote ne sera égaré et que petits et grands, forts ou faibles, auront justement leur part adéquate de représentation. (Temps, 30 mai 1900.) Je crus devoir ne pas me fier aux affirmations, même à celles qui pouvaient paraître les plus vraïi= semblables en raison de leur concordance et les plus autorisées comme émanant de personnes à même de se renseigner en Belgique à la source des informations précises et positives, et j'eus l'idée très simple de faire venir de Bruxel'es les docu= ments statistiques donnant pour chaque circonscrip= tion les résultats numériques des élections belges. Au lieu de reproduire ces résultats dans l’ordre habituel descirconscriptions, je les disposai d'après l’ordre croissant des nombres de suffrages obtenus par les différents parlis dans les différentes cir= conscriptions. On trouvera dans le tableau I suivant (col. 2 et 3) quelques-uns des chiffres relevés dans la liste des résultats ainsi ordonnée. J'ai simplement ajouté, pour plus de clarté et de précision, le nombre (moyen) des suffrages représentés par les élus (col. 4) et (col. 5), l'inverse de ce nombre exprimant la valeur d'un suffrage d’électeur mesurée en pre nant comme unité la valeur du suffrage représen tatif. Enfin, dans la colonne 6, la même valeur est exprimée en prenant comme unité la valeur d'un suffrage socialiste de Namur. j Ainsi done, landis que les démocrates-chrétiens de Bruxelles n’obtenaieut aucun représentant, el que le chef de ce parti (l'abbé Daens) se voyait exclu du Parlement’, les 10.178 suffrages quil ! Parmi les avantages de la représentation proportion nelle que les partisans du système belge ont fait valoi celui d'assurer l'accès du Parlement aux hommes les plus marquants de tous les partis n'est pas le moins précieux Cependant, l'abbé Daens, chef du parti démocrate-chrétiens qui disposait, en 1900, de plus de 60.000 voix dans l'ensemble, des circonscriptions belges, fut, grâce au système d'Hondt; 4 + A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 167 avait obtenus étant, par le mécanisme du système d'Hondt, transférés aux partis adverses, les libé- raux d'Ypres, qui n'avaient réuni que 8.237 voix, se voyaient attribuer un siège de représentant. Les cléricaux de Hasselt obtenaient 3 représentants avec 22.595 voix; avec 25.212 suffrages (2.677 en plus), les socialistes de Namur n'en obtenaient qu'un seul". Nous voilà loin du principe de l'égale valeur de tous les suffrages, sur lequel s'appuie M. Hagenbach-Bischoff pour élablir la justesse et la supériorité du syslème d'Hondt. Différentes causes ont contribué à produire celte Tagceau |. — Résultats de l'expérience du sidé à l'élaboration de tous est impossible, en effet, de donner aux suffrages émis une égale valeur si l’on fixe d'avance exactement le uombre des sièges à altribuer à chaque circons- cription, quel que puisse être, au scrulin, le nombre des suffrages réellement émis et valables. Ce nombre de sièges fixé d'avance n’est pas, en effet, le nombre (fractionnaire) exactement proportionnel au nombre des habitants, mais un nombre entier qui s’en approche à une unité près. Il n'est et ne peut êlre proportionnel ni au rombre des habi- tants, ni, à plus forte raison, au nombre total des ces systèmes. Il système d'Hondt (elections belges de 1900). DÉSIGNATION Liste libérale d'Ypres. . . . socialiste de Tongres- Maese ye k. radicale de Liége (CNE démocrate- chrétienne de Bruxelles cléricale d'Audenarde . socialiste de Nivelles . cléricale de Hasselt. d'Ypres . F socialiste de Soignies. cléricale de Termonde libérale de Liége . socialiste de Namur cléricale de Tongres- ed k : libérale de Bruxelles à cléricale de Saint Nicolas. de Courtrai . libérale de Tournai-Ath. socialiste de Liége (?). de Charleroi. cléricale de Bruxelles. NOMBRE de suffrages obtenus VALEUR d'un suffrage d'électeur mesurée en prenant comme unité] la valeur NOMBRE NOMBRE de sièges de suffrages d'un suffrage socialiste de Namur obtenus pour { élu d'un suffrage représentatif 0,000.121 0,000.000 0,000.000 0,000.000 0,000.108 0,000.048 0,000.133 0.000.087 0,000.0%4 0,000.12% 0 ,000.079 0 ,000.0%0 0,000.111 0,000 .062 0,000.115 0,000 08% 0,000.054 0,000.094 0 ,000.066 0,000.089 12 = 19 D NO WDæ=-I S © Li Se NC IN -] [= So DS DS ND NN So CES _ a D Dok D =N =NN =N ENS DS ND Co ©: inégalité considérable dans la valeur des suffrages. Plusieurs sont communes aux différents systèmes qui ont élé appliqués jusqu’à ce jour et proviennent des conceptions élroiles et erronées qui ont pré- électeurs inscrits, ni au lotal des suffrages dont ils disposent‘, ni, encore moins, à celui des suffrages émis”, ni, enfin, au nombre des suffrages valables”. Mais la principale des causes de l’inégale valeur … dépouillé des suffrages de ses partisans au profit des partis adverses. 1 En raison de l'organisation du vote plural, les électeurs belges recoivent 1,2 ou 3 bulletins de vote suivant la caté- gorie sociale à laquelle ils appartiennent. Aux élections du 27 mai 1900, le vote d'un électeur clérical à 3 suffrages de Hasselt valut donc plus de 10 votes d'électeurs socialistes à 1 suffrage de Namur. ? Chose exceptionnelle, dans cet arrondissement, c'est le parti socialiste qui fut avantagé, au détriment surtout du parti radical, qui fut dépouillé, grâce au mécanisme du sys- tème d'Hondt, de ses 9.655 suffrages. La liste socialiste recut 6 sièges sur 41 avec 63.952 suffrages sur 143.037 émis. Si l'on avait appliqué le système suisse, le premier candidat de la liste radicale, M. Fléchet, eût été élu à la place du sixième et dernier élu de la liste socialiste, M. Troclet. M. Troclet, ainsi élu grâce au système d'Hondt,crut devoir, parait-il, manifester en pleine séance son extrème conten- tement et une admiration sans bornes pour le fonctionne- ment du système d'Hondt. La satisfaction de M. Troclet se comprend. Mais c'est peut-être aller un peu loin que de vouloir, comme l'a fait la Ligue présidée par l'honorable M. Y. Guyot, dans la conclusion de son Catéchisme de Ja représentation proportionnelle, transformer le témoignage de satisfaction de M. Troclet en une preuve décisive de l'excellence du système d'Hondt et en faire un article de foi proportionnaliste. (Voir ce Catéchisme reproduit in extensn, Petit Temps, 22 janvier 1904). ! Le nombre moyen des suffrages dont dispose l'électeur belge dans les différentes circonscriptions varie, pour les élections législatives de 1900, entre 1,42 pour les circonscrip- tions de Roule rs-Thielt et de Gand-Eccloo et 1,72 pour celle de Thuin. 2 Ce nombre varie entre 87,2 °/, pour la circonscription d'Audenarde et 95,7 °/, pour celle de Malines. 3 Le nombre des bulletins blancs et nuls varie entre 168 des suffrages, celle qui pourrait suffire à elle seule à produire des effets aussi absurdes que ceux des élections belges que je viens de citer, c'est le mode de répartilion particulièrement disproportionnel qui caractérise le système d'Hondt. Même si le rapport entre le nombre des sièges attribués respec- | tivement à chaque circonscription etle nombre cor- respondant des suffrages valablement émis était constant, le système d'Hondt serait fort loin de pou- voir réaliser l’égale valeur des suffrages. Supposons toutes les circonscriptions parfaitement égales : même nombre d'habitants, même nombre d'élec- teurs inscrits et desuffrages valables, même nombre de représentants pour chacune d'elles. Le système belge pourra encore, dans ce cas idéal, donner des résultats tels que ceux des élections belges de 1900. Reprenons les trois nombres de suffrages 34.744, 35.403 et 36.832 qui, en 1900, ont obtenu respectivement 4, 3et 2 sièges à Saint-Nicolas, Courtrai et Tournai-Ath. Nous supposerons trois cir- conscriptions parfaitement égales. Même nombre d’électeurs, 64.000 dans les trois, aucune absten- tion, ni bulletin blanc, ni bulletin nul; même nombre de représentants à élire, 4 par circons- cription (1 à raison de 16.000 voix) : {re CIRCONSCRIPTION 2° CIRCONSCRIPTION 3° CIRCONSCRIPTION 36.832 a — 34.144 a — 35.403 = b— 8.256 b— 12.597 b— 14.168 ce — 8.000 c— 9.000 € — 13.000 d=— 7.000 d— 7.000 e— 6.000 64.000 64.000 64.000 Si l'on applique dans chacune de ces circonscrip- tions le système d'Hondt, dans la première, le parti À obtient 4 sièges (la totalité) avec 34.744 suf- frages sur 64.000; dans la deuxième, il obtient 3 sièges sur 4 avec 35.403 suffrages sur 64.000, et dans la troisième, avec 36.832 suffrages sur 64.000, il n'en obtient que 2 sur 4 : aux mêmes nombres croissants de suffrages correspondent, comme aux élections du 27 mai 1900, les mêmes nombres décroissants de sièges”. Le mètre électoral du système d'Hondt, en rai- son de ces diverses causes d’inégalité, varie nola- blement d'une circonscription à l’autre : 7.531,7 suf- frages suffisaient à Hasselt, en 1900, pour élire un député; à Charleroi, il en fallait au moins 15.201, plus que le double. D’après les règles du système, une liste qui aurait recueilli 30.200 suffrages (ou tout autre nombre compris entre 30.127 et 30.401 in- 2,6 °/, pour les circonscriptions d'Anvers et de Charleroi et 8,1 °/, pour celle de Dinant-Philippeville. 4 Si l’on avait appliqué le système suisse, la liste A n'aurait obtenu que 2 sièges sur 4 dans chacune des trois circonscriptions, ce qui est évidemment plus conforme à la proportionnalité ; avec le système Mirman, la liste A aurait eu, dans chacun des trois collèges, 3 représentants. A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE | clusivement) aurait droit à 4 représentants en vertu du mètre électoral de Hasselt, el à un re présentant unique en vertu du mètre de Charleroi: Totalisés par province, les résultats ne sont pas plus proportionnels (Tableau IT) : TagLeau Il. — Quelques résultats des élections belges de 1900 (suffrages totalisés par province). ! TOTAL TOTAL | NOMBRE |}. des des à des suffrages | sièges suffrages chtenus {obtenus |pour1 élu DÉNOMINATION 2. de la province du parti 23.4: Dém.-chrét. 42% 41.759 Socialistes. Flandre orientale. . Namur (Prov. de}. . Bimboure "7 Cléricaux. | 49.5 256 Liége (Prov. d’) . .| Libéraux. | 50.998 200 Flandre occidentale. — 52.535 13.134 Flandre orientale. . — 62.090 3 20.697 Anvers (Prov. de) .| Clér 131.114 12 10.926 Hainaut. . . . . .|Socialistes.|172.218 il 15.656 Flandre orientale. .| Cléricaux. [182.298 18 10.12 Ces chiffres se passent de commentaires. Le sys-« tème belge ressemble aasez à une horloge dont les aiguilles, follement capricieuses, tourneraient tantôt dans le sens voulu et tantôt en sens inverse. à. Si l'on totalise les chiffres obtenus en 19004 par chaque parti dans les 30 circonscriplions du royaume, voici les résultats qu'on obtient : TaBceAu II. — Résultats d'ensemble par partis des élections belges de 1900. TOTAL TOTAL | NOMBRE des suffrages des moyen NATURE DES SUFFRAGES ne: des par sièges [suffrages catégorie obtenus | par élu Cléricaux ME TES 994.333 (!)| S6sur152| 11.562 Libéraux et radicaux. . .| 498.854 (1)| 33 15-447 SOCIALISTES ER TU 461.241 (1)| 32 14.414 Démocrates-chrétiens 60.496 (| 14 650 496 Divers: TR RU 35.990 0 » Suffrages valables totalisés.|2.050.91% 152 13.4 BlancsretioulIs eee 84 023 (l » NODIÉMIS ER EE 134.613 0 » Suffrages inscritstotalisés.|2.269.550 [152 14.931 Ainsi donc, tandis que l'opposition antiministé- rielle et démocratique (libéraux, radicaux, socia- listes et démocrates-chrétiens) n'obtenait que 66 sièges sur 152 avec un total de 1.020.591 suf- frages sur 2.050.914, le parti clérical, qui n'avait 1 Ces chiffres sont ceux donnés par un des promoteurs de la réforme électorale, M. H. Dumont, secrétaire de l'Asso= ciation réformiste belge, dans la Revue pol. et parl. (10 août 1900, p. 321). Les chiffres donnés par M. Y. Guyot font éga= lement ressortir une majorité antiministérielle dans le corps électoral belge. M. Y. Guyot donne comme totaux ministé-= riels (cléricaux) 968.174 voix et comme fotaux antiministé\ riels, 1.000.918 voix (Siècle, supplément, 1er juin 1900). ï A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 169 réuni que 994.333 suffrages (la minorité), obtenait 86 sièges sur 152, ce qui lui assurait une majorité de 20 sièges au Parlement. Grâce au système d'Hondt, le parti démocrate- chrétien, avec 60.496 suffrages, se voyait attribuer un siège unique, landis que le parti clérical, avec un nombre de voix à peu près 16 fois aussi grand, obtenait non pas 16 sièges, mais 86. . On voit que l'expérience belge ne justifie point la théorie de M. Hagenbach, fondée sur le principe de l'égale valeur de tous les suffrages. Elle ne justifie pas davantage l'argument « décisif » de LZxposé des motifs de la Ligue pour la K. l.: @Il n'y a pas de raison, conclut cet Exposé (p. 89), pour que la France n’adopte pas un mode de suf- frage qui a si bien réussi en Belgique ». Le système “d'Hondt, appliqué en Belgique, a donné 30 mètres “électoraux différents. Nous en aurions 87, un par département, si le projet de la Ligue était adopté. Déplorable méthode pour réaliser l'unité de mesure et l'égalité des citoyens en matière d'élections, et pour fonder la justice électorale. V. — DEMONSTRATION MATHÉMATIQUE DE M. Louis Haver. M. Louis Havet, de l’Institut, qui fut, un moment, un partisan éminent du système d'Hondt, s'était également appuyé sur le principe de l'égale valeur “de tous les suffrages — de ceux du moins que le Svstème d'Hondt utilise en prenant comme mètre “électoral un nombre plus petit que le quotient pro- Portionnel — pour justifier ce système et pour en expliquer très clairement le mécanisme. « Soient, disait M. Havet, cinq listes qu'on peut | désigner par les nombres de suffrages qu'elles ont obtenus en ordre décroissant : A,B,C,D.E. — « Soient à pourvoir huit sièges. « Soient les huit premiers quotients* : CORRE Re: à n nl 2 3 1 2 1 Î ou æ AR A EVAREE CO UE —_« Le nombre A alteint le triple de E, mais non le quadruple, car avant le ‘quotient E on trouve s n A : pien g» Mais non +: Le nombre B atteint le double de E, mais non le triple. Les nombres C et D sont supérieurs à E sans en atteindre le double. On donnera donc 1 siège à la liste E, À aussi à la liste C et à la liste D, 2 à la liste Bet 3.à la liste A. ! En reproduisant l'explication de M. Havet, je rectifie (en $ e RAA intervertissant les places de r 4 =) une légère erreur pure- ment matérielle qui s'était glissée dans son hypothèse. « .… Le système d'Hondt n'a donc rien d'em- pirique. Il est fondé sur la théorie la plus rigou- reuse. » (Siècle du 1% décembre 1901.) Dans une lettre que j'eus l'honneur d'écrire à l’'éminent professeur du Collège de France pour lui communiquer quelques remarques au sujet de cetle justification, irréfutable en apparence, du système d'Hondt, je lui disais : « Supposons, un instant, que la circonscription n'ait droit qu'à 4 sièges, la répartition des suf- frages entre les différents partis en présence res- tant la même. Qu'arrivera-t-il si nous appliquons les règles du système d'Hondt? Le parti A gardera ses trois sièges intégralement, et la représentation de tous les autres partis sera diminuée ou sup- primée complètement. Ainsi donc, le parti À n'avait tout à l'heure que 3 représentants sur 8, moins que la moitié. Il en aura maintenant 3 sur 4 (la majorité des représentants de la circonscription), comme si les trois quarts des électeurs avaient voté pour le parti A. « Et pourtant le nombre total des suffrages des cinq parts est plus grand que 8 E, plus grand, à plus forte raison, que si ou 2 À, en sorte que le parti À ne représente certainement pas la moilié du nombre total des suffrages : en lui donnant 3 sièges sur 4, on lui donne un nombre de sièges qui n'est même pas exact à une unilé près, car il s'en faut de plus d’une unilé pour que ce nombre et le nombre mathématiquement propor- 4 À A+B+C+D<+HE « Supposez, Monsieur, que le parti À représente une coalition de toutes les réactions, de tous les partis antirépublicains, royalistes, bonapartistes, nationalistes, césariens, antisémiles,cléricaux, etc. ; supposez que le parti B soit celui des radicaux et le parti C celui des progressistes, enfin que les partis D et E soient respectivement ceux des radi- caux-socialistes et des collectivistes; et voyez ce qui arriverait si la même coalition se produisait dans la plupart des circonscriptions. « Il arriverait en France, si l’on v appliquait le système belge, tout simplement ce qui est arrivé en Belgique aux élections du 27 mai 1900, où un parti (le parti clérical) a obtenu une majorité de 20 sièges à la Chambre des représentants (86 sièges sur 152), avec 994.333 suffrages, tandis que les partis démocratiques (libéraux, radicaux, socia- listes et démocrates-chrétiens), qui, ensemble, avaient obtenu 1.020.591 suffrages (c'est-à-dire 26.258 votes de plus que le parti clérical), ne se voyaient attribuer que 66 sièges sur 152. Le sys- tème d'Hondt, mode de partage absolument léonin, qui favorise d'une manière efflrayante les grandes tionnel soient égaux. 170 A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE coalitions, constituerait un immense danger s'il élait adopté en France et si, dans toutes les circon- seriptions, les partis antirépublicains s'entendaient pour ne présenter qu'une seule liste contre celles des différents partis républicains. » Je faisais connaître à M. Havet mes recherches sur les résultats des élections belges de 1900 que j'ai cités plus haut, et je disais en terminant : « On propose d'appliquer le système d'Hondt à la France, divisée en 87 circonscriptions déparle- mentales. Ce système comporterait 87 mètres élec- toraux différents. Il donnerait des résullats encore pires que le système des 30 mètres électoraux diffé- rents qui a fonctionné en Belgique. Un parti qui compterait dans chacune des 87 circonscriptions la dixième partie des électeurs parmi ses adhérents, ne serait même pas assuré d'obtenir en tout 10 sièges dans une Chambre de 60) députés, alors que, d'après les règles de la proportionnalité, il aurait droit à 60 sièges dans une assemblée de 600 représentants. « Un parli qui compterait 200.000 électeurs ré- partis dans les différentes circonscriptions, aurait bien des chances d'être entièrement privé de toute représentation. « Assurément, le système des 87 mètres électo- raux, proposé par M. Yves Guyot, serait, sous cer- tains rapports, supérieur au système majoritaire actuel qui en comporte 581 (autant que de députés), — sans compter un mètre électoral infiniment grand pour tous les groupements non représentés. Mais, quand il n'y aura plus en France que 87 mètres électoraux, il y en aura encore 86 de trop: un poids et une mesure, lel est le principe fondamental de toute justice. L'unité du mètre électoral peut seule réaliser la justice en matière d'élections. «… Le problème de la représentation proporlion- nelle a été mal résolu parce qu'il a été mal posé. Il est possible de donner à ce problème une solution reposant sur l'application intégrale et rigoureuse de quelques principes extrêmement simples, conte- nus en germe dans la Déclaration des Droits de l'homme et du citoyen et dans la Pétition des citoyens domiciliés à Paris du 8 décembre 1788, solution bien plus exacte dans ses résultats — quel que soit le nombre des circonscriptions — que le système suisse et le système belge, et ne com- portant d’ailleurs pas d’autres opérations que de simples additions... » J'ajouterai que M. Havet, avec sa haute droiture intellectuelle, n’hésita pas à rejeter très nettement le système d'Hondt dans une conférence qu'il fit qeulques jours plus tard (21 décembre 1901), et à préconiser un mètre électoral unique pour la France entière. 1Loc.teit. VI. — AVANTAGES ET INCONVÉNIENTS COMPARÉS DU SYSTÈME BELGE ET DU SYSTÈME SUISSE. Je dirai quelques mots, en terminant, d'une remarque faite par M. Mansion au sujet du sys= tème suisse. Tout en reconnaissant que c’est «le plus proportionnel de tous », — M. Mansion n'avail. en vue que les systèmes admettant le transfert des suffrages de liste à liste sans le consentement des électeurs et des candidats, systèmes que je consi- dère lous comme inadmissibles, — l’éminent ma-« thématicien belge dit en parlant du système suisse des plus grands restes : « Un parti en minorilé dans le pays, s'il se divise habilement en deux ou trois sous-partis dans chaque circonscription élec= torale, augmente ses chances et peut conquérir la majorilé au Parlement”. » * Il est certain qu'un parti peut avoir avantage à présenter deux ou plusieurs listes séparées si les resles que présenteront ces listes sont de ceux aux= quels le système suisse attribue des sièges complé mentaires. C'est là un des inconvénients réels du système suisse. Il ne faut pas l’exagérer ni en dimi- nuer la gravité. Mais je crois qu'un parti qui aurait recours, dans chaque circonscription, à de pareilles habiletés risquerait fort d'en être la dupe, et dem tirer de son machiavélisme plus de mécomples et de pertes que de profits, même si le parti qui a la majorité ne déjouail pas ses calculs d'avance en se divisant, lui aussi, en sous-partis. Supposons que les électeurs d’une circonscrip- tion aient droit à un député à raison de 10.000 élec= teurs. Nous admettrons que ce nombre répartileu est connu d'avance, soit exactement, soit d'une manière suffisamment approchée. Supposons, pa exemple, que l'un des parlis compte 30.000 élec teurs. Il a droit à 3 sièges exactement. S'il se divise en 2 sous-partis de 15.000 électeurs, il am beaucoup de chances de ne recueillir que 2 sièges en tout, car les deux excédents de 5.000 suffrages ne compteront probablement pas parmi les plus grands restes auxquels le système suisse attribue des sièges complémentaires. Il ne peut avoir évi demment aucun avantage à se diviser en 3 sous partis égaux. C'est en se divisant en 4 sous-partis de 7.500 électeurs qu'il a peut-être le plus de chance d'obtenir 4 sièges au lieu de 3. Seulement, il est fort possible et même probable qu'après avoir dis: tribué les premiers sièges complémentaires aux restes plus grands que 7.500, il ne reste plus assez de sièges complémentaires à répartir pour en donner un à chacun des 4 sous-partis de 7.500 élec teurs. Et il n’est même pas impossible que tous les sièges complémentaires reviennent à des restes plus grands que 7.500. EE 4 Bull. des se. math. p. 204. A. MEYER — THÉORIE DES ÉLECTIONS ET REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE 174 Je crois qu'en général la possibilité — plus ou moins problématique — d'obtenir un siège de plus ne compensera pas le risque d'en perdre trois. Au contraire, si l'on applique le système d'Hondt, des partis ayant des programmes plus ou moins différents ne peuvent qu'avoir avantage à pactiser ensemble et à ne présenter qu'une seule liste de coalition pour obtenir dans la répartition des sièges une part grossie outre mesure, ou pour éviter que le mécanisme particulièrement dispro- portionnel du système d'Hondt ne fonctionne d'une manière désastreuse à leur détriment. Supposons que, dans une circonscriplion de 60.000 électeurs ayant 4 représentants à élire, le parti conservateur compte 28.000 adhérents et les partis démocratiques 32.000. Si le parti conserva- teur ne présente qu'une seule lisle, et les partis démocratiques une seule également, les deux listes obliendrontchacune, quand on applique le système d'Hondt aussi bien que quand on applique le sys- tème suisse, la moitié des 4 sièges à répartir. Mais, en général, les partis démocraliques, diver- gents par essence, plus ou moins modérés ou avancés, ne sont point aussi unis que les partis conservateurs’. Supposons que les situations de l'exemple précédent soient renversées, que le parti conservateur recueille au lieu de 32.000 suffrages 28.000 (sur 60.000), et que les partis républicains en reçoivent 32.000, c'est-à-dire la majorité. Dans ces conditions, ne sera-t-il pas plus que difficile de faire marcher ensemble toutes les fractions du “parti républicain en majorité ? C'est une chose qui n'est même pas toujours possible au second tour “de scrutin du système majoritaire. Si le parti conservateur ne présente qu'une seule liste de candidats, et les partis républicains une seule également, la répartition sera la même que dans l'exemple précédent : chacune des listes rece- vra la moitié des sièges. Mais supposons que le parti conservateur pré- sente une lisle unique (ou, ce qui revient au même, qu'il ne vote que pour une seule liste tout en se “donnant l'apparence d'en présenter plusieurs), et que les partis républicains, chose assez vraisem- blable, en présentent cinq (liste modérée, liste de l'Alliance démocratique, liste radicale, liste radi- cale-socialiste, liste collectiviste), et que ces cinq 1 Dans son Histoire des variations, Bossuet avait déjà “constaté, en s'étendant sur la multiplicité des sectes protes- Hantes, que la pensée libre engendre la diversité des opi- nions. Un philosophe mort récemment, Charles Renouvier, a mis en parallèle, dans l’un de ses écrits, la « difficulté à peu près insurmontable pour les opinions réformatrices, toujours etnécessairement très divisées, de s'entendre sur le nom d'un candidat, à moins de se sacrifier elles-mêmes », et « l'extrême facilité d'agir donnée à l'opinion conservatrice. parce qu'il est relativement aisé de se coaliser pour le succès d'un can- didat dont toute la mission soit de résister au progrès ». listes, se partageant les 32.000 suffrages républi- cains, obtiennent chacune entre 5.000 el 7.000 voix. Qu'arrivera-t-il avec le système d'Hondt? Le parli conservateur qui a recueilli 28.000 suf- frages sur 60.000 recevra le premier des à répartir. Il n’y a rien à dire. C'est justice. Le deuxième siège lui est également attribué. La liste conservatrice n'a pas obtenu la moitié des suffrages exprimés (30.000 sur 60.000). Mais, si l’on admet dans une certaine mesure le transfert des suffrages de liste à liste sans le consentement des électeurs et des candidats, ce siège lui revient également. Enfin, le troisième et le qualrième siège sont atiribués, eux aussi, tous les deux, d’après les règles du système d'Hondt, à la liste réactionnaire. De quel droit? « Ce droit, vous le savez, c'est le droit du plus fort », fait dire au Lion le fabu- liste. « C’est le droit du parti qui a le chiffre élec- toral le plus élevé », a dit, à son tour, M. d'Hondt. Et c'est ainsi que, prétendant substituer un sys- tème de représentation « proporlionnelle » au sys- tème majoritaire, inadmissible parce qu'il attribue la lotalité des sièges à la moitié plus un des élec- teurs, il attribue la lotalité des sièges de la circons- cription à un parti qui n'a méme pas oblenu la moi- tié des sullrages exprimés. Et le désastre d'une réparlition aussi monstrueuse au détriment des électeurs républicains qui sont la mäjorilé (32.000 sur 60.000) sera, gràce au système d'Hondt, défi- nitif et irréparabhle, le second tour de scrulin du système majoritaire étant supprime ! En réalité, rien de moins fondé que celte préten- tion d'assurer, par le système d'Hondt, la majorité des sièges à la majorité vraie, ni de plus léonin que ce mode de partage, qui altribue la totalilé des sièges de la circonscription — comme si les 60.000 électeurs avaient {ous voté pour la liste conservatrice — à un parti, à une coalition qui n’a pas obtenu la moitié des suffrages émis par les électeurs de la circonscription. Il n'est guère possible de fausser et de renverser plus complètement les rapports el les propor- tions: les partis démocratiques, en minorité avec 28.000 suffrages sur 60.000, obtiennent deux sièges sur qualre, et n'en obtiennent aucun quand, réu- nissant 32.000 suffrages sur 60.000, ils forment la majorilé du corps électoral. Qu'un système destiné à réaliser la proportionnalité puisse rendre pos- sibles de pareils résullats, cela suffil pour le con- damner, et pour montrer que son application, préconisée en France par la Ligue pour la Repré- sentation proportionnelle, ne constituerait que l'ombre d’une réforme, une grossière et bien dan- gereuse caricature de la représentation propor- ; tionneile. Alfred Meyer. sièges L A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE Lorsqu'on parcourt les publications périodiques, on est frappé par le nombre prodigieux de Mémoires de Chimie organique et par la place restreinte qu'y occupe la Chimie minérale. En 1903, le nombre des Mémoires relatifs à la Chimie organique s'est élevé à 4.950, tandis que ceux de Chimie minérale n’atteignaient pas le chiffre de 500. On peut dire qu'à l'heure actuelle presque tous les laboratoires dirigent tous leurs efforts vers la Chimie du car- bone. Pourquoi cette préférence? Les grands hommes que la Chimie minérale illustra ont-ils emporté avec eux les secrets d’une science qui a acquis entre leurs mains un si beau développement? Gay-Lussac, Berzélius, Thénard, Sainte-Claire Deville, Dumas, Frémy n’ont pas tellement épuisé tous les sujets qu'on ne trouve plus à glaner après eux. La Chimie organique a l'attrait de la formule. Un beau schéma fascine l'esprit, beaucoup plus qu'une formule très simple; il est de plus un guide dans les réactions à accomplir pour en obtenir la réalisation pratique. En outre, les méthodes d’in- vestigation naissent à chaque pas de la Chimie organique. Elles se renouvellent, se perfection- nent, et, toutes les fois que l'une d'elles apparait, elle apporte à la science un contingent nombreux de faits nouveaux. En Chimie minérale, au contraire, ces méthodes sont restreintes. On vit sur le passé, un passé glo- rieux, qui a doté le monde d'un ensemble d'indus- tries chimiques représentant une immense produc- tion de richesses et de capitaux. Cependant, dans ces dernières années, une véri- table révolution s'est produite dans les laboratoires par la découverte de deux agents puissants qui ont permis d'accomplir des réaclions jusque-là très difficiles et même impossibles à réaliser. Le four électrique, découvert par M. Moissan, et les gaz liquéfiés ont ouvert deux chimies nouvelles tout à fait opposées : la chimie des hautes tempé- ralures et la chimie des basses températures. A l’aide du four électrique, on a pu atteindre des températures très élevées, peut-être supérieures à 3.500°; avec les gaz liquéfiés, on s’est rapproché du zéro absolu. Immédiatement et sous l'impulsion de ces deux outils nouveaux, la Chimie minérale a pris une autre face. Des métaux, qu'il avait été impossible d'isoler jusque-là, ont été préparés à l’état pur par M. Moissan. Les carbures, les siliciures, les borures métalliques ont vu le jour pour la première fois. Par l'emploi des gaz liquéfiés, les anciens gaz | permanents ont disparu et leur obtention facile et | à bon marché a permis à Ramsay d'isoler del'argon liquide les nouveaux gaz satellites de celui-ci 2 xénon, krypton, néon. Une nouvelle période d'éclat était ouverte pour la Chimie minérale. Elle fut à la fois si brillante et, si féconde que tous les travaux publiés dans ces. derniers temps ont paru peu importants à côlé des découvertes des nouveaux gaz de l'air ou des corps obtenus à l’aide du four électrique. Cependant, tous ces travaux, si modestes qu'ils soient, ont contribué au développement de la Chimie et, à ce titre, ils méritent d’être signalés. De l'examen des 450 Mémoires de Chimie miné- rale parus dans l’année, il ressort que l’on peut classer en quatre groupes l’ensemble des travaux : ceux qui ont trait aux hautes températures, aux basses températures, à l’action de l’eau oxygénée et aux métaux divisés, réservant pour un dernier chapitre un ensemble de travaux intéressants ne pouvant figurer dans aucun de ces quatre groupes. I. — HAUTES TEMPÉRATURES. L'introduction du four électrique dans la science a permis de réaliser les synthèses les plus déli- cales et, en particulier, la formation du diamant” noir et du diamant transparent. Jusqu'à l’apparition de cet appareil nouveau, la science et l’industrie chimiques avaient utilisé les hautes températures fournies par la combustion du charbon, par les fours Siemens et par le chalu- meau à gaz oxygène et hydrogène. Toutes ces températures, qui ne dépassaient pas 1.800°, étaient insuffisantes pour effectuer la réduction de cer-. tains oxydes métalliques ou la préparation des carbures et siliciures de la plupart des métaux. Il y avait dans la science chimique un vide qui néces- sitait, pour être comblé, l'emploi de températures beaucoup plus élevées que celles qu'on savait pro- duire. C'est à la production de ces tempéralures que M. Moissan a consacré ses efforts. | Depuis 1892, époque à laquelle le premier modèle de four électrique a été présenté à l’Aca- démie des Sciences, M. Moissan n'a cessé d'apporter chaque année une contribution nouvelle à l’his- toire des métaux, des carbures, des siliciures et des borures métalliques, et, quand parut la syn« thèse de tous ces travaux dans le Four électrique, publié en 1897, on aurait pu penser qu'il ne restait plus rien à faire dans cet ordre d'idées. Les décou- A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE vertes ont cependant continué depuis cette époque, et tous les ans la Chimie des hautes températures a marqué d'une pierre son étape glorieuse. Cette année, M. Moissan et ses collaborateurs ont isolé, à côté d'un carbure de molybdène Mo°C pré- paré antérieurement, un nouveau carbure MoC, analogue au carbure de tungstène découvert par Williams, et un carbure double de chrome et de tungstène, remarquable par sa grande dureté el sa stabilité parfaite. Ce corps nouveau peut présenter un réel intérêt au point de vue induslriel; il per- met d'espérer qu'en ajoutant du tungstène aux aciers chromés, dont l'emploi est si fréquent, on pourra modifier leurs propriétés et leur donner une dureté spéciale. Les siliciures métalliques, dont l'étude avait pu êlre abordée pour la première fois à l'aide du four . électrique, ont été complétés par la préparation de ceux de vanadium VdSi et VdSi, de ruthénium SiRu, et de ceux de manganèse, SiMn° et SiMn; : ces corps, de formules simples comme celles des - corps déjà connus, montrent très nettement, comme \ Je disait M. Moissan, que « la chimie des hautes températures esl une chimie simple ». Ils possèdent, d'ailleurs, les propriélés générales des corps analogues; ils sont remarquables par | leur grande dureté, puisqu'ils rayent le cristal de roche, la topaze et le rubis. Leur stabilité est par- faile. Ilest une question qui n’a pas élé encore résolue: c'est celle de la température qu'on peut atteindre : dans le four électrique. M. Violle admet que le point de volatilisation du charbon serait de 3.500°. Mais M. Moissan a montré que, lorsqu'on fait varier intensité du courant, la température de l'arc varie dans le même sens : elle augmente avec l'intensité. Par l'emploi du four électrique, l'industrie des métaux pourra se perfectionner comme l’a déjà fait Dindustrie du carbure de calcium. II, — Basses TEMPÉRATURES. Le développement de la Chimie des basses tem- pératures est un des traits les plus saillants de | Mhistoire scientifique des dernières années du xix° siècle. De nombreuses questions du plus haut intérêt ont pu être résolues. Sans parler des effets produits par les froids intenses dans le domaine de la Physique (variations dans les propriétés optiques de certains corps. exallation des phénomènes de phosphorescence, décroissance de la résistance des métaux, augmentation de la perméabilité magné- tique, etc), ou dans le domaine de la Chimie (abo- lilion presque complète de l’affinilé chimique : le | phosphore, le potassium, le sodium n'ont aucune action sur l'oxygène liquide), l'emploi des basses | RE\UE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 173 températures a permis de résoudre ce problème, qui n’était même pas posé au moment de la décou- verte de l’argon: l'air est composé de plusieurs gaz, inertes comme l'argon lui-même. On sait avec quel succès Ramsay a pu isoler le néon, le kryplon, et le xénon, par la méthode de fractionnement aux basses tempéralures. C'est grâce aux efforts persévérants de l'Institu- tion Royale de Londres et à la direction du Profes- seur Dewar que la liquéfaction et la solidification des gaz permanents ont pu être menées à bonne fin. De 1892 à 1900, l'Institution Royale marcha de triomphe en triomphe : l'oxygène, l'air, l'hydrogène furent solidifiés. Et, chaque fois qu'un élément apparaissait sous un nouvel état, on descendait sur l'échelle des températures : on se rapprochait du zéro absolu. C'est l'hydrogène solide, fondant à 13° au-dessus du zéro absolu, qui constitue l'extrème limite attein!e jusqu'a présent. On peut penser que l'hélium, corps plus volatil que l'hydrogène, réduira encore de quelques degrés la distance qui nous sépare du zéro absolu; mais ce sera tout, etrien ne laisse prévoir que ce zéro puisse être atteint. L'hé- lium est, de tous les gaz, celui qui résiste encore à toutes les tentatives de liquéfaction. Mème sous une pression de 60 atmosphères et dans un vase refroidi à 13° absolus (— 260°) par de l'hydrogène partiellement solidité, il ne s’est pas liquéfié. Le fluor, que MM. Moissan et Dewar avaient obtenu à l’état liquide en 1897, vient d’être solidifié par ces deux savants. Ils ont placé un tube plein de fluor dans de l'hydrogène liquide ; les parois du tube se sont recouverles de gouttelettes donnant un liquide jaune qui n'a pas tardé à se solidifier. Le fluor solide est un corps blane, dont le point de fusion est lég'rement inférieur au point de fusion de l'oxygène, qui est de 38° absolus (— 255°). Il se- rait voisin de 35° absolus (— 238°). ILétait intéressant de connaitre l’activité chicnique du fluor solide. On sait quelle énergie d'aftinité caractérise le fluor gazeux. Déjà à l'état liquide elle est considérablement réduite; le fluor liquide n’attaque pas le verre; il est sans action sur l'eau, le mereure. Mais il réagil encore avec incandescence sur l'hydrogène ét sur les hydrocarbures. A l'état solide, il conserve encore une affinité puissante pour l'hydrogène, ainsi que le montre l'expérience suivante faile par MM. Moissan et Dewar : Un tube contenant du fluor solidifié a été ouvert dans de l'hy- drogène liquide. Immédiatement une explosion vio- lente s’est produite avec mise en liberté d'une quan- tité de chaleur telle que toute la masse a été portée à l'incandescence et que l'hydrogène a pris feu. Tube et vase ont été réduils en poussière. L'air liquide — que l’on obtient aujourd hui à un prix de revient si faible, puisque, lorsqu'on le gar A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE prépare par grandes quantités, il peut être livré à moins de deux centimes le litre — devait naturelle- ment éveiller l'attention des industriels. On sait qu'il est employé avantageusement pour la prépa- ration de l'oxygène liquide, à l’aide d'un appareil construit par Linde, spécialement pour cet usage. Des expériences effectuées par la Société des ma- chines à glace Linde, en 1898, il résulte qu'un mélange d'oxygène liquide, plus ou moins souillé d'azote, et d'une substance oxydable se comporte d'une manière analogue à la dynamite, c'est-à- dire que, si on l’enflamme au moyen de capsules détonantes, il produit des explosions à effet bri- sant. Ce mélange explosif, qui peut ètre préparé à la pression atmosphérique, s'obtient à très peu de frais. C’est cet explosif qui est employé pour le percement du tunnel du Simplon. Deux machines de Linde, produisant 6 à 7 litres d’air liquide par heure, ont été installées dans ce but à Brigue el à Domo d’Ossola. Les grandes espérances que l’on a fondées sur les applications industrielles de l'air liquide vont au delà des limites prévues. Dans ces derniers mois, l'emploi de l'air liquide a permis de résoudre définitivement la question de l’anhydride azoteux. On sait que, des nombreuses combinaisons que l'azote forme avec l'oxygène, seul l’anhydride azoteux Az°0* n'avait pu être isolé avec certitude. En faisant éclater l’élincelle dans un mélange d'azote et d'oxygène, on admet qu'il se forme de l'oxyde azotique AzO, qui, au contact d'un excès d'oxygène, se transforme en peroxyde AzO*° absorbable par les alcalis. Au lieu d'opérer sur les gaz oxygène et azote, M. Helbig a eu l'idée de faire passer les étincelles dans de l'air liquide. Il à vu apparaître à la surface des flocons de couleur bleu- verdàtre, qui, après l'élimination de l'air liquide en excès, forment une poudre amorphe d’un azur très pâle, fondant à —111°en donnant un liquide bleu. Resolidifié à l’aide de l'air liquide, il garde celte cou- leur. Si on élève la tempéralure jusque vers — 100°, il se décompose partiellement en oxyde azotique AzO et peroxyde Az°0°. Après une heure d'action des étincelles sur 300 centimètres cubes d'air liquide, Helbig a recueilli O0 gr. 5 d'anhydride azoteux solide. Plus récemment, Francesconi et Sciacca, en employant pour le refroidissement de l’air liquide, ont réussi à combiner : 4° De l'oxygène et de l’oxyde azotique liquide; 2 De l'oxyde azotique solide avec de l'oxygène gazeux ; 3 De l'oxyde azotique gazeux avec de l'oxygène liquide. Dans les trois cas, ils ont toujours obtenu de l’anhydride azoteux Az°0°, même en présence d'un excès d'oxygène. D'après ces savants, cet anhydride serait stable à la pression ordinaire jusqu'à Ml température de — 21°, avec les métaux alcalirs, seuls le sodammoniume le potassammonium avaient pu être isolés depul partant de ces composés, préparé aussi le potas sium-carbonyle el le sodium-carbonyle et enfin le azotures alcalins. l'anhydride carbonique sur ces composés, a obtenu au-dessous de —50°, un carbamate alcalin : avec dégagement d'hydrogène selon la réaeliom suivante : At CO? + AzH°Na — CO û + H. NONa A une température moins basse, il se produit, el même temps que celle réaction, un formiate alcalin# on se trouve là en présence d'une réaction élégante pouvant donner naissance aux carbamates alcalins Les réactions indiquées par M. Joannis pou vaient-elles être généralisées, et les autres métau de la famille du sodium étaient-ils capables de se combiner à l’'ammoniac ? M. Moissan, poursuivant ses recherches sur nouveaux composés du césium et du rubidium, a pt préparer, après les hydrures de ces métaux, A césium-ammonium et le rubidium-ammonium, EI faisant arriver l'ammoniac liquéfié au contact din métal brillant. La préparation est très délicate avee le césium, qui prend feu au contact de l’air et ne peut être manié que dans un gaz inerte bien sec Les corps résultant de la combinaison de l'ammos niac liquéfié avec le césium et le rubidium son analogues à ceux qu’on obtient avec le potassiume@ le sodium. Ils complètent heureusement la série dl ces composés ammoniacaux alcalins, et répondent tous à une même formule AzH°M : AZHSNa — AzHSK — AzHSCs — AzHSRD. La tâche de M. Moissan ne s'est pas bornée Ainsi qu'il l'avait démontré en 1898, l’action «d l’acétylène gazeux agissant sur les métaux ammo niums en solution dans l'ammoniac liquéfié con duit à la formation des carbures de potassium, d sodium, de calcium el de lithium. Appliquant la même méthode, M. Moissan obtenu, par action d'un courant de gaz acétylèn sur les solutions de césium-ammonium et de rubi dium-ammonium dansl’ammoniacliquéfié, des coms posés parfaitement définis répondant aux formules#" CCs?:C°H°, C?Rb2.C°H°: L Ce sont des acétylures acétyléniques de césium ét de rubidium, composés cristallisés, fondant le premier vers 300°, le second au-dessus de cette température. Ils prennent feu au contact du fluor, du chlore, du brome, de la vapeur d'iode. Ils de- viennent incandescents en présence du soufre liquide ou au contact du phosphore et de l'arsenic légèrement chauffés. Enfin, lorsqu'on essaie de les réduire par divers agents, ils donnent lieu à des réactions très violentes. Ce sont de véritables explosifs. Lorsqu'on essaie de chauffer ces acétylures acé- Lyléniques dans le vide, ils perdent de l’acétylène. On oblient à la suite de cette dissociation les car- bures de césium et de rubidium : et C2Rh*. Ces nouveaux carbures complètent encore la liste des carbures alcalins et alcalino-terreux de même formule. Leurs propriétés, d’ailleurs, sont de tous points comparables à celles de ces carbures. Ce sont, en effet, des réducteurs très énergiques, qui se combinent à froid à la plupart des métalloïdes avec un grand dégagement de chaleur; ils décomposent Peau à froid avec dégagement d'acétylène pur. … L'emploi de l’ammoniac liquéfié, c'est-à-dire dun corps obtenu à une basse température, de beaucoup éloignée cependant de celle que donne air liquide, a permis d'obtenir toute une série de corps du plus haut intérêt, qui viennent généraliser dune facon remarquable les connaissances qu'on possédait sur des corps de la même famille. - L'action de l'anhydride carbonique sur le césium- ammonium et sur le rubidium-ammonium conduira Sans doute à une réaction identique à celle que donnent le sodammonium et le potassammonium, fournissant ainsi les carbamates de césium et de xubidium. II. — RÉACTIONS OBTENUES AVEC L'EAU OXYGÉNÉE. On connait depuis très longtemps l'action ©xydante qu'exerce l’eau oxygénée sur la plupart des corps. L'arsenie, le sélénium, le tungstène Sont convertis en acides; le potassium, le sodium eble magnésium sont transformés en hydrates; les carbures éthyléniques engendrent des glycols. Un Srand nombre d'hydrates passent à l'élat de peroxydes, et ces réactions ontété observées depuis de nombreuses années déjà par Thénard. En trai- tant de l’eau de baryte, une solution de soude ou de polasse caustiques, par de l’eau oxygénée, on oblient les hydrates de peroxydes : Ba0°.H°0; Na°0°.21F0; K°0°.2H°0. La chaux, l'oxyde de zine, elc., sont transformés A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE 175 de même, au contact d'eau oxygénée, en peroxydes correspondants. Cette action oxydante, due à la facilité avec laquelle l’eau oxygénée cède une partie de son oxygène, a été employée dans ces dernières années à produire des réactions qui ont permis d'enrichir la science de nombreux hyperacides et de leurs sels correspondants. L'action de l’eau oxygénée sur l'acide chromique, qui fournit avec lant de facilité l’acide perchro- mique, signalée pour la première fois en 1860, par Bareswill et Schünbein, était resté un fait isolé, et, de 1860 à 1882, aucun effort nouveau n'avait été tenté dans cette voie. De nombreux savants, et en particulier Tanatar, Mélikoff, Pissarjewski, ont repris celte question en étudiant l’action oxydante de l’eau oxygénée sur les acides et leurs sels métalliques. En faisant réagir du bioxyde d'hydrogène sur une solution froide d'un carbonate alcalin, Tanatar a obtenu des percarbonates crislallisés de formule : CO!Na*.1,5 H°0; CO'K°.2 120, CO“(AZzH*)°.2H°0. Ces sels jouissent de propriélés réductrices in- tenses, qui les ont fait employer par l'industrie pour décolorer la laine, le coton, la soie, les plumes. Il devenait intéressant pour elle de les préparer à bon marché sans le concours de l’eau oxygénée. Aujourd'hui on obtient en grand ces percarbonates par l’électrolyse à basse température (— 10 à — 20°) des carbonates alcalins correspondants. Les solutions alcalines d'acide borique sont transformées de même par H°0° en métaborates suroxydés de formule BO'Na. 4H°0. Toutes ces réactions n'ont pas tardé à êlre géné- ralisées, et l’on a constaté que, dans la famille du chrome eu particulier, la formation d'hyperacides et de leurs sels est très aisée. L'acide molybdique et les molybdates fournis- sent de l'acide permolybdique très stable Mo*O‘H° et les permolybdates correspondants. Les tungs- tates et les uranates se transforment en pertungs- tates et peruranates. Récemment, Pissarjewski, ayant traité les an- hydrides tungstique, molybdique et uranique par de l’eau oxygénée, a obtenu les hyperacides de formules : TuOSHE — MoOSIE — UOYHE, analogues à l'acide perchromique CrO°’I. Ces trois composés nouveaux tranchent définitivement la question de la formule à altribuer à l'acide per- chromique, qui doit être la formule CrO"H° proposée par M. Moissan. Dans la famille du tilane, seul l'acide litanique 176 avait pu être peroxydé el transformé en acide per- titanique Ti0*. Les sels de zirconium, de cérium et de thorium ont subi le même sort cette année. En ajoutant une solution à 30 °/, d’eau oxygénée à une solution concentrée de nitrate de thorium, on oblient un précipité gélatineux de peroxyde : Th (AzOS)# + 4 HÈO® = 4 AzOH + Th (OH). Avec les azotates de zirconium et de cérium, on obtient de même Zr(0*H)' et Ce(O*H)'. Quelle constitution faut-il attribuer à tous ces Corps ? Les hyperacides, comme leurs sels, doivent tous être considérés comme appartenant au type eau oxygénée, et par conséquent le groupe divalent 0 | — doit entrer dans leur formule de constitution. C'est ainsi que les acides permolybdique, per- chromique, ele., auront pour formules : O — Mo0?— OH O — CrO? — OH | O—H O—H où l'hexavalence du molybdène, du chrome, etc., est maintenue. L'acide permolybdique de Péchard Mo*O*H° aura une constitution analogue à celle de l'acide persul- furique : 0 — SO°0H 4 0 — SO?0H et sera O — Mo0?— OH | 5 O — Mo0? — OH où encore se trouve respectée l'hexavalence du molybdène. Enfin, les corps de la famille du thorium seront représentés par la formule de constitution : M'=(0—ON). où M (= lhorium, est tétrava- lent. L'action oxydante de l’eau oxygénée s'arrêtera-t- elle à la formation de ces hyperacides ou pourra-t- elle être poussée plus loin? L'expérience suivante, décrite tout récemment par MM. Hoffmann et Hield- maiyer, permel de penser qu'on n’a pas encore atteint la limite extrême de l'oxydation. Ces deux auteurs ont pu obtenir, en effet, des sels d'un acide perchromique plus oxygéné que CGrO'H*. Ils ont refroidi une bouillie d'hydrate chromique précipité par l’ammoniaque étendue de la moilié de son volume d’eau. En ajoutant, à 3 parties en poids de ce mélange, 2 parties d’eau oxygénée à 30 °/, et zirconium, cérium) A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE EE | bone et l’anhydride carbonique en méthane, réalis continuant à refroidir, puis enfin 3 parlies dam moniaque à 10°/,, ils ont vu se déposer de petit cristaux rouge foncé, très altérables par l’eau même à froid, qui les décompose violemment en oxygène et chromate d'ammonium. Leur compos, tion est CrO(AzH'}, sel neutre d'un acide dioxychros mique CrO‘(OH}. Ce sel possède la propriél curieuse de déflagrer comme de la poudre à cano quand on le chauffe à sec ou qu'on le touche ave de l'acide sulfurique concentré. Il détone violem=" ment par le choc, en laissant un résidu de ses quioxyde de chrome. £ Cet exemple, encore isolé, est-il susceptible d' être. généralisé? Et les acides analogues à l'acide chro= mique pourront-ils atteindre ce degré d° oxydation? En tout cas, c'est un fait extrêmement curieux, qui méritait d'être signalé. ? & IV. — MÉTAUX DIVISÉS. s Les métaux ont joué dans ces dernières années un rôle prépondérant dans les synthèses de la Chimie organique et, à ce titre, il convient de rappeler rapidement leur histoire. Avec leur con= cours, il a été facile d'obtenir des corps que 1e laboratoires ne savaient pas préparer. : Le magnésium, par sa combinaison directe ave@ la majeure partie des composés du carbone, a ouvert une voie nouvelle à la synthèse organiques Il est devenu entre les mains des chimistes un instrument facile à manier et donnant des com= posés qui présentent, sur les composés organo® métalliques du zinc, l'avantage de ne pas . flammer au contact de l'air. | Il serait trop long d'énumérer ici les nombreuses réactions obtenues avec ce métal. Disons seulemenb que le magnésium joue le rôle de support et qui est définitivement perdu. Bien différente est la facon dont se comporlen! les métaux divisés. Depuis 1897, le nickel, le fe le cobalt et le cuivre provenant de la réduction des leurs oxydes, et, par suile, se trouvant dans un étal d'extrême division, ont été employés par MM. Sa batier et Senderens à la réalisation de réactions d'hydrogénation et de réduction du plus grandi intérêt. Ces métaux divisés, qui avaient permis à ces savants de préparer quelques années auparava les métaux nitrés Cu*Az0*, Co?AzO? et Ni‘AzO° pal aclion à froid du peroxyde d'azote, possédenl des propriétés catalyliques du plus haut intérêts qui ont fait l'objet d'une étude longue et minus tieuse non encore terminée. Le nickel, en particulier, est de tous les méla IX celui qui jouit des propriétés catalytiques les pl étendues. Il permet de transformer l’oxyde de car Cu IL d A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE sant ainsi une synthèse élégante de ce gaz; les dérivés nitrés gras ou aromatiques, les nitriles sont changés en amines, les aldéhydes et les cé- “ones en alcools. Mais l'hydrogénation la plus impor- tante est celle qui permet la fixation de 6 atomes d'hydrogène sur le benzène et ses homologues, sur le phénol, les crésols, les amines, qui sont ainsi “transformés en dérivés hexahydrogénés correspon- “dants. Méthode féconde et précieuse, permeltant d'obtenir en grande quantité des corps, comme le “yclohexane et ses homologues, qu'on relirait jus- qu à présent avec tant de peine du pétrole du Cau- case, ou d'autres corps inconnus ou mal connus, “tels que le cyclohexanol, les méthyleyclohexanols, des cyclohexylamines. Le cuivre, le cobalt, le fer jouissent de propriétés “talalytiques moins actives. Tous ces métaux servent “de support à l'hydrogène, avec lequel ils forment ans doute une hydrure instable facilement disso- D. en métal et hydrogène, très actif, éminem- ment propre à accomplir ce genre de réaction. — La Chimie organique trouve ainsi dans la Chimie minérale un aide précieux : c'est un exemple de plus à l'actif de l'unité de la science chimique. Et ceci montre encore une fois combien il est artificiel de vouloir séparer la Chimie en Chimie organique et en Chimie minérale. « À côté de ces métaux divisés, qui produisent des réactions catalyliques du plus haut intérêt, il existe d'autres métaux, dits colloïdaux, dont l’'extrème division produit aussi deseffets calalytiques encore mal expliqués, et dont l'étude a pris dans ces der- iers Llemps un grand développement. On sait ce qu il faut entendre par colloïde. On désigne par ce rme des substances qui peuvent être ou liquides u solides; les substances liquides ont reçu le nom Vhydrosols. Sous certaines actions bien détermi- ées, ces hydrosols peuvent se transformer en bstances solides, qui, primitivement, se trouvent voisines des dissolutions, mais qui ne tardent pas à prendre peu à peu l'aspect de corps gélatineux solides, que l’on a nommés gels ou hydrogels. Ces colloïdes liquides (sols) ou solides (gels) possèdent, ailleurs, des propriétés spéciales très nettes, les différenciant des cristalloïdes, et dont quelques- unes ont été énoncées déjà en 1861 par Thomas Graham. au moment où il fit la distinction entre es deux corps. Les différents colloïdes peuvent être répartis, ailleurs, d'après leurs propriétés en deux groupes Tincipaux : Dans un premier groupe prennent ace les colloïdes organiques à poids moléculaire é evé, caractérisés par une vitesse de diffusion très faible, par leur état amorphe; leurs solutions pré- sentent toujours une faible pression osmotique et Polarisent la lumière. Enfin ces pseudo-solutions, î F2 sous des influences variées, précipitent sous forme d'hydrogel les substances salines qui les accompa- gnent dans les solutions. Dans un deuxième groupe, on peut classer tous les colloïdes pouvant être assimilés à des suspen- sions de matière dans l’eau ou dans des liquides quelconques. Ce sont les solutions colloïdales de métaux qui ont été, dans ces dernières, années, l'objet de discussions nombreuses. Dans ces solu- tions, on admet que les métaux sont dans un état de division extrême et que ces particules infi- niment peliles sont maintenues en suspension par un mouvement capillaire ou par une force électro- capillaire. Deux méthodes permettent d'arriver à la prépa- ration de ces mélaux colloïdaux : une méthode chimique, une méthode physique. La méthode physique, due à Bredig, consiste à faire jaillir, au sein d’une eau rigoureusement pure, les étincelles de l'arc électrique entre deux fils du métal qu'on veut obtenir sous la forme colloiï- dale. Avec le platine, par exemple, on voit les fils qui forment les électrodes se désagréger partielle- ment et prendre un état particulier dans lequel le métal est capable de passer avec l’eau au travers d’un filtre, de manière à constituer un liquide d'ap- parence homogène, une sorte de solution (d'hy- drosol) du métal employé. On peut obtenir de même les solutions d'argent et d’or colloïdal. Cessolutions possèdentdes propriétés catalytiques remarquables. Celles de platine, en particulier, dé- composent l'eau oxygénée en mettant l'oxygène en liberté, et cette action est telle qu'il suffit de 4 milligramme de métal dans 350 litres d'eau pour provoquer le dédoublement. Le mécanisme consis- terait, d'après Bredig, qui l'a minutieusement étu- dié, en une oxydalion suivie d'une réduction : H°0® + Pt= Pt0 + H°0 PtO + H20°= Pt + H°0 + O?. La méthode chimique, signalée pour la première fois par Carey Lea, en 1889, consiste dans la réduc- lion des sels métalliques solubles par un excès d'un autre corps colloïdal. C'est ainsi qu'il obtint, le premier, l'argent colloïdal, en réduisant une solution de nitrate d'argent par du sulfate ferreux en présence de citrate de soude. Cette méthode conduit à l'obtention de métaux colloïdaux d'une pureté moins grande. Il est, en effet, presque impos- sible de débarrasser complètement les solutions colloïdales ainsi obtenues des corps qui ont servi à les préparer. Et même a-t-on bien affaire à des solutions d'un mélal divisé? M. Hanriot, ayant analysé avec un soin très minutieux trois argents colloïdaux différents : le collargol, l'argent col- loïdal de Carey Lea, et le silicargol, est arrivé à 178 A. MAILHE — REVUE ANNUELLE DE CHIMIE MINÉRALE celte conclusion que, dans le cas du collargol, la matière albuminoïde fait partie intégrante de la mo- lécule et qu’elle ne constituerait pas une impureté. Dans le cas de l'argent colloïdal de Carey Lea, ce serait l’oxyde ferrique, et, pour le silicargol, la si- lice qui entreraient en combinaison. Il va même plus loin : il admét que le prétendu collargol ne serait autre qu'un acide particulier de l'argent, l'acide collargolique. Quoi qu'il en soit, ces mélaux colloïdaux obtenus par voie chimique possèdent des propriétés intéres- santes. Ils sont solubles dans l’eau en donnant des solutions colorées non dialysables, qui sont pré- cipitables à la manière des colloïdes par la plu- part des sels neutres : carbonate de soute, ni- trate de potasse, sulfate de cuivre, perchlorure de fer, ete. Soumises à l'électrolyse, elles donnent un dépôt métallique au pôle positif. En réduisant des solutions de concentration va- riable de chlorure d'or par du chlorhydrate d'hy- droxylamine, on obtient, en particulier, un hydrosol qui présente des colorations pouvant varier du violet au rouge, au bleu et au vert. NV. — TRAVAUX DIVERS MM. Moissan et Rigaut ont utilisé le calcium, qui possède la propriété de se combiner à l'azote et à l'hydrogène, pour obtenir de l’argon très pur, et ils ont appliqué cette méthode à la détermination des quantités d'argon contenues dans l'air des divers pays. Les résultats obtenus montrent que la teneur en argon est constante et voisine de 0 c.c. 95: pour 400 c.c. d'air, aussi bien dans l’air de Paris et de Berlin que dans celui qui a été recueilli au sommet du Mont-Blanc et de la Montagne-Pelée (Martinique). Un seul échantillon, pris dans l'Océan Atlantique, était plus riche : il renfermait 0 c.c. 9492 pour 400 c. c. d’air. Le monosulfure de carbone CS, analogue à CO, avait été considéré jusqu'ici comme un corps hypo- thétique. En faisant passer de l’azote saturé de sulfure de carbone sur du cuivre chauffé, Julius Thomsen a obtenu le sulfure cuivreux et du mono- sulfure de carbone, selon la réaction très simple : Cu? + CS= CuS + CS. Il y a quelque temps, l'existence de ce gaz a été mise en doule. M. Guntz, continuant ses travaux sur les sous-sels métalliques, a indiqué la formation des sous-sels de baryum. On sait que les sels d'argent, en par- ticulier le chlorure, le bromure, le fluorure et l'io- dure, peuvent donner des sous-sels correspondant aux formules Ag'CF, Ag'F?, etc. En particulier, en chauffant du fluorure d'argent avec de l'argent en poudre, au-dessous de 90°, on obtient une matière bronzée de formule Ag'F*, qui, chauffée avec dem l'acide chlorhydrique en excès, forme du sous= chlorure d'argent Ag'Cl. On connaît aussi un sous” oxyde Ag'O. M. Guntz avait, sans doute, espéré lam généralisation de la formation de ces sous-sels, el ila essayé de les obtenir avec les chlorure, bro=« mure, iodure et fluorure de baryum, qu'il a chauf= fés entre 800 et 1.000° avec du sodium métallique: Mais, au lieu du sous-sel simple de formule Ball, BaBr, etc., il a obtenu les composés mixles dus à l'union du sous-sel de baryum ainsi formé avec 1m sel de sodium qui a pris naissance. M. Guntz a ainsi préparé les corps suivants : BaCI.NaCI, BaBr.NaBr, Bal.Nal, BaF.Nar. En chauffant ces sels dans le vide vers 700°, ils perdent le sodium, et le sel normal de baryum re= prend naissance. M. Christomanos a obtenu aussi un sous-oxyde de magnésium Mg‘O?. En refroidissant une flamme, de magnésium par un corps solide, il se dépose un enduit gris qui serait ce sous-oxyde. Que devient la notion de valence en présence de tels corps? Tandis qu'il est facile d'expliquer que les sous-sels d'argent peuvent exister grâce aux valences supplémentaires des éléments halogènes,; il n’en est pas de même pour les nouveaux sous= sels mixtes de baryum et de sodium. Si l’on peut attribuer aux sous-fluorure et sous-chlorure d'ar gent les constitutions suivantes : .… +. F—Ar I [ASS sn CI — Ag Il CI— A 1 Ag vd tee pa où les 2 atomes de chlore, ou les 2 atomes de fluor échangent entre eux 6 valences, on ne voit pas trè bien quelle serait la formule de constitution de BaCI.NaCI par exemple. Mais, si l'on attribue à ce corps la formule double, on peut l'écrire : CI— Na Na—Cl IL Il L CI — Ba — Ba —C Il resterait, pour terminer cette revue, à parlen des travaux effectués sur le radium et les corps radio-actifs. Après les nombreux articles parus ici mème et de divers côtés, il serait téméraire d’en treprendre ici un résumé forcément trop succinel el très incomplet de la question. Le lecteur retrou vera facilement les Mémoires originaux où Ja radio-activité est développée avec toute l'ampleur qu'il convient. A. Mailhe, Chargé d'un cours complémentaire de Chimie à l'Université de Toulouse. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 179 3 BIBLIOGRAPHIE 2 ANALYSES 1° Sciences mathématiques —… Cox (John), 41. À., F. R.S. C., Professor of Physics in Me Gill University, Montreal. — Mechanics. — 1 vol. de 332 pages et 148 figures. (Prix : 9 s.) Cam- bridge University Press, 1904. L'auteur nous raconte qu'ayant enseigné la Méca- nique pendant plus de dix ans, en suivant d’abord les méthodes classiques, il s'apercut un jour que ses élèves, tout en ayant en leur parfaite possession pratique les concepts de cette science, n'avaient, en définitive, que des idées très vagues sur la corrélation existant entre les notions mathématiques et les réalités naturelles dont s'occupe la Mécanique. Il était arrivé ainsi à la conviction que seule la méthode historique est suscep- tible d'éclairer les jeunes intelligences, lorsque, ayant - ouvert, il y a dix ans, le célèbre ouvrage de Mach, il y trouva, exposé avec une ampleur qu'il n'avait pas soupconnée, le programme qui s'était peu à peu im- posé à sa conviction; depuis cette époque, son ensei- gnement s’est complètement pénétré des idées de l’'éminent philosophe. L'ouvrage de M. Cox est loin de l'étendue de son modèle; l'auteur ne prétend pas en avoir atteint la … profondeur; il en a plutôt adapté le plan général à un … enseignement qui procédait des mêmes tendances et - des mêmes désirs, enseignement d'un degré moyen, inspiré des préoccupations pratiques des Anglo-Saxons. - La description des expériences par lesquelles les créa- teurs de la Mécanique en dégagèrent les principes est parsemée d’anecdotes qui enlèvent à l'ouvrage les der- nières traces de l’aridité à laquelle les traités nous ont … accoutumés en celte matière. * Les principes sont d'abord établis : le levier et le … centre de gravité, auxquels reste attaché le grand nom - d'Archimède, le principe du plan incliné pour lequel Stevinus utilisa si judicieusement l’idée de l’impossi- bilité du mouvement perpétuel, la dynamique de la : chute des corps avec le prodigieux effort de Galilée, le “ mouvement uniforme sur un cercle et la force centri- | fuge de Huygens, enfin le développement des principes nm AS À dl de Sd Sd Dé LES de la Dynamique et le début de la Mécanique céleste, dont Newton posa les premières bases. Si, dans cette partie, l’auteur suit pas à pas le développement historique et logique des principes, il n’est pas à ce point attaché à l’histoire que les dé- monstrations expérimentales plus modernes lui soient étrangères. L'emploi du diapason pour la mesure des petits intervalles de temps est rattaché à la méthode de Galilée, dont les expériences furent certes moins délicates. C'est là une facon de moderniser l'histoire * quirend, sans aucun doute, un enseignement très fruc- tueux. Arrivé à ce point, l’auteur reprend tout son exposé sous une autre forme.lIl part, cette fois, du mouvement -et de l’inertie, et revient, par une voie nouvelle, à la notion de la force et de la masse. Pour cette dernière, il met sous une forme excellente l'expérience qui pour- rait nous la faire connaître en tout point de l'Univers, et qu'on oublie trop, parce que nous vivons dans un - champ de force uniforme qui nous a donné la notion de la proportionnalité des poids aux masses au point que, … pour beaucoup de professeurs et pour la majorité des * élèves, la masse est consécutive au poids, et apparait ? dans la Mécanique comme quotient de deux quantités - toujours proportionnelles. .« Supposons, dit-il, que nous voulions acheter une - livre de sucre. Notons que, en partant du point de vue . 4 ET INDEX de Newton (masse — quantité de matière), nous serions heureux d'en avoir une masse aussi grande que pos- sible; le poids, au contraire, c’est-à-dire l'effort avec lequel il les tend vers la terre, est un pur inconvénient lorsqu'il s’agit de porter le sucre à la maison, et nous serions heureux de supprimer le poids en conservant la masse. « Pour déterminer ce qu'est une livre de sucre, le marchand pourrait placer sur le comptoir deux cha- riots légers, semblables en tous points ; il les actionne- rait successivement à l’aide d’un ressort, en ayant soin de les faire partir du même point, et de mesurer exactement le temps employé à parcourir une longueur déterminée, etc. » Un tel exposé paraîtra enfantin à plus d'un lecteur; mais combien est-il d'élèves des écoles spéciales qui soient en état d'imaginer une telle expérience en par- tant de l’enseignement formel qui leur est donné ? Le troisième livre applique les notions acquises à quelques problèmes, tels que celui du mouvement sur une courbe donnée, ou celui des projectiles, le pendule simple, les forces centrales, le choc. L'ouvrage se ter- mine par un exposé de quelques problèmes relatifs à la dynamique des corps rigides : pendule composé, pendule réversible de Kater (ou de Prony), enfin déter- mination de la constante de la gravitation, ce problème auquel, sans doute en souvenir de Newton, les savants anglais ont consacré tant de labeur. Reprocherons- nous à l’auteur d'avoir rattaché ce problème à celui qui consisterait à peser la Terre? L'expression est si erronée, surtout dans les idées développées par M. Cox, qu'il s'agit assurément d’un lapsus. M. Boys, dont l'élé- gant exposé de la question est classique, a montré toute la disproportion qui existerait, indépendamment de l’incorrection, à appliquer ce terme au grand pro- blème de Cavendish. Effleurant un détail, nous ne pouvons que constater, avec satisfaction, l'effort de l’auteur pour populariser par de nombreux problèmes les unités du système mé- trique, dont il donne une définition dont la correction pourrait faire envie à plus d’un auteur de langue fran- çaise. La nécessité de faire encore une large part aux mesures anglaises semble lui peser. Espérons qu'il en sera délivré dans une seconde édition. Si maintenant nous voulions caractériser en quelques lignes l'ouvrage de M. Cox, nous dirions qu'un débu- tant, après l'avoir lu, aurait sans doute encore beau- coup à apprendre en Mécanique; mais il aurait gagné des notions très claires et très exactes, qui lui ren- draient particulièrement fructueuse l'étude des ou- vrages plus avancés. Cu.-En. GUILLAUME, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. 2° Sciences physiques Arnold (E.), Directeur de l'Institut Electrotechnique a l'Ecole Technique de Carlsruhe. — La Machine dynamo à courant continu. Tome 1, traduit par MM. Boisrez et Brunswick. — À vol. gr. in-8°. (Prix : 25 fr.). Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1904. M. le Professeur Arnold, directeur de lInstitut Electrotechnique de l'Ecole Technique supérieure de Carlsruhe, a entrepris la publication d'une Encyclo- pédie du plus haut intérêt pour les ingénieurs-électri- ciens. Cet ouvrage, qui comprendra l'examen complet, théorique et pratique, des machines électriques à cou- rant continu et alternatif, débute par l'étude de la dynamo à courant continu; le premier volume est 180 consacré à la théorie de ce genre de machine. « Le but d'une théorie des machines dynamos, nous dit l’auteur dans sa préface, doit être de permettre de les construire de la façon la plus économique possible. » Tous les constructeurs-électriciens., en effet, arrivent à fournir des machines marchant dans des conditions satisfaisantes au point de vue du rendement, de l’'échauffement et de la commutation; mais la concur- rence mondiale les oblige encore à produire ces résultats en utilisant le minimum de main-d'œuvre et de matériaux possible. Ce minimum, cela se conçoit, sera d'autant mieux atteint que la machine sera plus rigoureusement calculée; se basant sur un calcul exact et sûr, l’électricien, en dimensionnant ses machines, n'aura plus besoin de prendre de la marge pour se créer une sécurité à la fois douteuse et coûteuse. L'étude théorique de la dynamo à courant continu comprend dans ce volume les divisions principales suivantes : Enroulements; Excitation; Réaction d'in- duit; Commutation; Courbes caractéristiques; Pertes et échauffement. La compétence de l’auteur dans la question des enroulements est bien connue; les chapitres y relatifs reproduisent partiellement les indications d'un ouvrage précédent sur cette matière. Mentionnons plus spé- cialement l'emploi du schéma dit «réduit», permettant de suivre avec facilité le fonctionnement de l’enrou- lement ondulé en le ramenant au genre hélicoïdal; citons aussi l'étude de l'enroulement en « séries paral- lèles », fort utile pour les génératrices destinées au ser- vice de traction, et l’application des connexions équi- potentielles à ce genre d’enroulement. Le calcul du système inducteur est poussé avec beaucoup de rigueur; l'examen de l'influence des dents de l’induit, et de la forme à donner aux épanouisse- ments polaires forment de captivants paragraphes. Mais la partie la plus intéressante de l'ouvrage est, sans contredit, celle qui se rapporte à la commutation et à la réaction de l’induit. On sait que la production d'étincelles sous les balais, signe d’une commutation défectueuse, est la pierre d'achoppement où se bute bien souvent le calculateur-électricien; aussi l'étude très complète de M. le Professeur Arnold sur ce su- jet (le tiers du volume y est consacré) sera-t-elle pour lui la bienvenue. L’exposé de cette question com- prend : les effets des ampères-tours transversaux et démagnétisants de l’induit et leur action sur le champ dans la zone de commutation, puis les phases mêmes de la commutation, le calcul des coefficients d’induc- tion des bobines court-circuitées par les balais, la recherche de la densité de courant sous les charbons- frotteurs et de la différence de potentiel entre les pointes de ceux-ci et le collecteur; cette dernière valeur est le critérium final de la commutation. Les recherches expérimentales de l’auteur, citées en détail, viennent appuyer sa théorie d'exemples concluants. La dernière partie traite des causes de diminution du rendement, pertes dues à la résistance ohmique, à l'hystérésis, aux courants de Foucault, aux frottements:; des aperçus nouveaux sont à signaler, entr'autres l'estimation des pertes au collecteur par frottement des balais et par résistance ohmique au passage du courant. Un dernier chapitre s'occupe de la détermi- nation d’une valeur trèsutile et toujours exigée, léchauf- fement des diverses parties d’une machine dynamo. Il reste à remercier MM. Boistel et Brunswick de l'heu- reuse idée qu'ils ont eue d'entreprendre la traduction de cette importante publication. P. An. Mercier, Ingénieur à la Compagnie de l'Industrie électrique el mécanique à Genève. Lezé (R.), Professeur à l'Ecole d'Agricilture de Gri- gnon. — Préparation et maturation des Caillés de fromagerie. — 1 vol. de 115 pages. Asselin et Hou- zeau, éditeurs. Paris, 1905. M. Lezé s’est proposé de résumer les connaissances cientifiques susceptibles de donner une direction à BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX l’industrie fromagère, qui, comme plusieurs industries agricoles, est restée souvent assez routinière. Il étudie, tout d'abord, le lait et la présure, qui sont les deux éléments servant à préparer le caïllé, matière première de l’industrie fromagère. Les éléments essentiels du caillé sont la caséine et le beurre. Ce dernier ne varie pas en propriétés, mais il n'en est pas de même pour la caséine; une hypo- thèse fort ingénieuse de M. Lezé permet de concevoir les différences considérables qui existent, par exemple, entre la caséine obtenue par coagulation à la présure et celle obtenue par coagulation aux acides énergiques. Il étudie ensuite le caillé, et montre comment ses propriétés varient suivant plusieurs facteurs : nature du lait, de la présure, température de coagulation. La question qui se pose ensuite est de la plus haute importance ; c’est celle de la maturation. Ici intervien - nent des phénomènes complexes et délicats, que M. Lezé expose avec une grande clarté. La présure agit par sa pepsine, et, si elle ne fait pas mürir la pâte, elle la rend plus attaquable. La galactase ou ferment Bab- cock, apportée par le lait, intervient activement dans la maturation; elle attaque profondément la caséine en donnant des produits amidés et de l’am- moniaque. Enfin, les microorganismes prennent une part active dans la maturation. M. Lezé donne à ce point de vue la première place aux ferments lactiques; l'acide lactique produit par ceux-ci agit sur la caséine, se combine en quelque sorte avec elle et donne la pâte liante des fromages. Les Mucédinées jouent aussi un rôle important, soit qu'elles agissent à la surface (fro- mages mous), soit qu'elles agissent à l’intérieur de la pâte (Roquefort). Dans le premier cas, le Penieillum candidum de Roger, dont on emploie actuellement des cultures pures, donne d'excellents résultats; dans le second cas, c’est le Penicillum glaucum qui intervient. Après avoir décrit les phénomènes nombreux qui interviennent dansla préparation des fromages, M. Lezé se demande si l'on ne pourrait pas simplifier considé- rablement cette préparation. En somme, les longues et délicates manipulations auxquelles donne lieu la pré- paration des fromages n’ont pour but que : 1° de cons- üituer une pâte homogène par une combinaison de caséine et d'acide lactique ; 2° de faire mürir cette pâte sous l'influence de diastases diverses et d'ammoniaque. Ne pourrait-on préparer synthétiquement et chimique- ment des fromages en faisant agir judicieusement sur le caillé l'acide lactique et l’ammoniaque. Cette prépa- ration à été essayée avec succès : elle donne des pâtes douces et homogènes. Est-ce dans cette voie que s’en- gagera l'industrie fromagère ? Il est difficile de le pré- voir. Ce qui est certain, c'est que cette industrie à besoin, pour progresser, de faire appel à la science et d'exercer sur ses opérations un contrôle rigoureux. A ce point de vue, le petit volume de M. Lezé peut avoir la plus heureuse influence; les fromagers ne peuvent trouver un guide plus autorisé. X. RoconEs, Ingénieur-chimiste, Ancien chimiste principal du Laboratoire municipal de Paris. 3° Sciences naturelles Lafar (D° Franz). — Handbuch der technischen Mykologie (Manuel de Mycologie technique). — 5 vol. illustrés. Gustav Fischer, éditeur. léna, 190%. Les Champignons, avec les Bactéries qui s'y ratta= chent physiologiquement, quelles que soient leurs af- linités naturelles, jouent un rôle immense dans les transformations de la matière organique. D'une des forces les plus redoutables de la Nature, l'Empirisme avait fait à l'Homme un allié précaire; la Science, en précisant la biologie des Champignons, les conditions de leur existence et de leur action, est appelée à en faire un instrument docile, travaillant à notre profit avec la plus grande économie. Le pralicien se tient difiicilement au courant des tentés à Éd ominedinin… dede net de ous dois Le BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 181 découvertes qui se succèdent chaque jour dans ce champ d'exploration si vaste et déjà encombré. Nous signalions, il y a deux ans, aux lecteurs de cette Revue, l'intéressante tentative faite par le D' Lafar de rouper toutes les notions de Mycologie susceptibles ‘application industrielle. Avant mème d’avoir achevé sa l'echnische Mykologie, léminent professeur de Vienne reconnut la nécessité d'étendre le cadre de son œuvre et d'associer à son entreprise un grand nombre de collaborateurs. 3 Le Manuel comprendra cinq volumes : 1. Morphologie et physiologie générales des orga- nismes de la fermentation. — Cultures pures; ; 2. Mycologie des industries de l'alimentation (lai- terie, boulangerie, fabrication des sucres, conserva- tion de la viande, des légumes, des fourrages); 3. Mycologie du sol, de l’eau et des engrais (cir- culation de l'azote, etc. Fermentation de la cellulose, rouissage) ; 4. Morphologie et physiologie des Saccharomycètes, des principaux Ascomycètes et des Champignons im- parfaits susceptibles d'application industrielle ; 5. Mycologie de la fabrication du tabac et de la tannerie. Mycologie de l’industrie des fruits. Brasserie, distillerie, fabrication des levures de presse, vinifica- tion. Ces divers sujets, traités par des spécialistes, forme- ront un ensemble d’un intérèt technique évident. La valeur scientifique de l'ouvrage, dont nous avons un échantillon dans le premier fascicule récemment paru, est garantie par la haute compétence du Dr Lafar et des quarante-cinq savants de tous pays qui ont répondu à son appel. PAUL VUILLEMIN, Professeur à l'Université de Nancy. Mosso (A.), Professeur de Physiologie à l'Académie de Turin. — Les Exercices physiques et le Déve- loppement intellectuel. Traduit de l'italien par M. V. Craunrus-JacquerT. — 1 vol. de 29% pages de la Bibliothèque scientilique internationale (Prix: 6 fr.). Alcan, éditeur. Paris, 1904. Le livre de M. Mosso est un des plaidoyers les plus éloquents qui aient été faits en faveur du développement de l'éducation physique. Il contient une foule de consi- dérations et de documents concernant la pédagogie; il devrait être lu par tous les éducateurs. M. Mosso nous fait d'abord un historique des exer- cices physiques dans l'Antiquité, et nous montre comment le rôle considérable qu'ils jouèrent chez les Grecs retentit sur toutes les affaires de la vie privée et publique. La gymnastique grecque ne pénétra que dif- ficilement chez les Romains, et la transformation qu'elle subit ne fut pas des plus heureuses. Bien des questions actuellement discutées ont été agitées aux temps les plus reculés de l'histoire. Hippo- crate, déjà, se montre l'adversaire de l'entrainement dans les espaces clos et prône les exercices de plein air, et cette même préoccupation se retrouve à toutes les époques; car, trop souvent, pour pouvoir continuer à l'abri des intempéries les exercices devenus des jeux, on aménage des locaux où l’on finit par se conliner. Au Moyen-Age, ces jeux furent extrêmement floris- sants en France; parmi eux, la paume fut le plus en honneur, si bien que l'usage dégénéra en un tel abus que nous voyons les rois rendre vainement plusieurs ordonnances pour limiter ces excès. La gymnastique porte, en effet, en elle-même un dan- ger : elle conduit facilement à l'athlétisme. Modérée et bien comprise, elle est avantageuse pour l'individu et pour la race; pratiquée avec excès, elle conduit au sur- menage de la machine humaine. Il est inexact de penser que l'on ne peut développer à la fois son corps et son cerveau : Pythagore fut vain- queur à Olympie au pugilat, Platon concourut à la lutte; Sophocle, Euripide, pour ne citer que les plus célèbres, parurent dans des concours solennels de jeux. Actuellement, dans tous les pays, la bonne gymnas- tique est considérée comme ne devant pas consister en exercices difficiles, accessibles à un petit nombre et vers la bonne exécution desquels doivent tendre les efforts. Chaque mouvement, au contraire, doit être bien étudié, de facon à amener le développement d'un groupe de muscles déterminé, et être à la portée de tous sans effort exagéré; l'expérience à montré que l'on obtient ainsi les résultats les plus favorables. Mais il faut pour cela que l'instruction soit confiée à des maitres compétents. Le rôle de l'État peut être particulièrement efficace dans cette création d'un corps d'instructeurs à la hau- teur de leur tâche ; en Amérique et en Angleterre, l'ini- tiative privée est telle que cette intervention n’est pas nécessaire; en Allemagne, les Pouvoirs publics ont fait un effort considérable, suivi de succès; il ne reste que les pays latins où l’on ne s’est pas encore assez préoc- cupé de cette question si importante. En dehors du problème de l'éducation physique, dans le cours du livre, M. Mosso appelle à maintes re- prises l'attention sur ce qui se passe en pays étranger dans les écoles et les universités, et nous montre l’im- portance considérable que leur organisation amène dans la mentalité et toute la vie sociale d’un peuple. L'ouvrage se termine par un chapitre des plus imté- ressants sur l'éducation et le rôle de la femme. L'auteur fait, en particulier, une étude sur la jeune fille aux États-Unis, où il a fait un séjour qui semble avoir modifié considérablement son opinion sur les attributions de la femme et la place qu'elle peut occu- per sans déroger à ses devoirs naturels. Dr. G. WEiss, Professeur agrégé à la Facullé de Médecine. 4 Sciences médicales Pouchet (G.), Professeur de Pharmacologie et Ma- tière médicale à la Faculté de Paris, membre de l'Académie de Medecine. — Leçons de Pharmaco- dynamie et de Matière médicale. 4° série : Anti- thermiques, analgésiques; 5° série : Modificateurs du système nerveux périphérique et névro-mus- culaire. — 1 fort vol. in-8° de 1.156 pages avec 190 figures dans le texte. (Prix : 22 fr.). O. Doin, éditeur. Paris, 1904. Il suffit, pour juger de l'importance des matières traitées, de se reporter au titre du volume. La quatrième série est surtout consacrée à l'étude des antithermiques-analgésiques. À travers l’accumu- lation énorme des faits, on sent que l’auteur est mani- festement guidé par un désir de synthèse; quelques lois particulières solidement établies (renforcement de l'action hypno-analgésique et diminution de la toxicité par substitution d'un radical éthyle ou méthyle à un atome d'hydrogène, influence directrice prépondérante de la situation d'un atome de carbone central dans la structure moléculaire des hypnotiques, etc.) font pres- sentir et espérer que, de mème que la connaissance de la structure moléculaire d’un corps permet — dans une certaine mesure — d’en prévoir 4 priori, avec la place dans une classification chimique, les propriétés phy- siques et chimiques, cette structure moléculaire per- mettra un jour de prévoir ses propriétés pharmacody- namiques et, partant, son action médicamenteuse. En fait, cette prévision théorique des propriétés pharma- codynamiques d'une substance encore inexistante di- rige depuis longtemps la recherche des produits syn- thétiques : le pyramidon est un des exemples les plus typiques de cette synthèse d'un produit après calcul hypothétique de ses propriétés thérapeutiques. 11 s'en faut toutefois que ce calcul des propriétés d’une substance en fonction de sa structure moléculaire soit généralement possible. L'empirisme a encore la plus large part dans l'étude de la Pharmacodynamie ; — mais on doit évidemment tendre à en faire chaque jour une science plus exacte, et dès maintenant les résultats acquis dans cette voie légitiment toutes les espérances. 182 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Dans l'impossibilité où nous sommes, dans une brève analyse, d'essayer de montrer autre chose que l'esprit dans lequel ces lecons sont écrites, nous nous borne- rons à en énumérer les chapitres. L'auteur classe les antithermiques analgésiques en six groupes. _Le premier groupe est celui de la quinoléine, c’est-à- dire celui dont les représentants sont caractérisés par le noyau quinoléique : Noyau quinoléique. La substance la plus importante de ce groupe est la quinine, qui résulte de la soudure d’un noyau pyri- dique au noyau quinoléique: son étude a fait l’objet presque exclusif de la troisième série; on ne la trou- vera donc pas dans ce volume. Les autres substances de ce groupe : analgène, kairoline, kairine, thalline, cupréine, euquinine, sont brièvement étudiées. Le deuxième groupe est celui du pyrrol : AzH AN HCMAUE: U | HC — CI Pyrrol. L'antipyrine, le seul corps vraiment important de ce groupe, fait l objet d'une étude magistrale, ainsi que ses dérivés : acélopyrine, anilipyrine, quinopyrine, ferro- pyrine. Le troisième groupe est celui de l'hydrazine AzH2. AzH®, — surtout représenté par la phénylhydrazine, l'antithermine, tous corps extrêmement dangereux, du fait de leur pouvoir hématolytique. ï Le quatrième groupe est celui des anilides, avec ses deux sous-groupes : 4° Les dérivés de l'aniline (C5H: — AzH®) ou phénylamine : acétanilide, exalgine; 2 Les dérivés du paramidophénol C‘H* (OH) (AzH®) : phénéti- dine, phénacétine, méthacétine. Toutes ces substances et leurs dérivés secondaires : bleu de méthylène, triphénine, lactophénine, citro- phène, etc., sont d’un intérêt pharmacodynamique et thérapeutique de premier ordre. Le cinquième groupe est celui des acides aroma- tiques : acide benzoïque, acide salicylique, ete. L'auteur estime l'acide salicylique et ses sels « d’une importance capitale, aussi considérable certainement que la qui- nine, et plus considérable, sans aucun doute, que l’an- lipyrine ». Aucun clinicien n'y contredira. L'aspirine et les dérivés sulfonés des phénols sont étudiés dans ce groupe. Le sixième groupe, enfin, constitué par les alcools et les phénols, étant plus nettement antiseptique, n'est mentionné que pour l'exelure de l'exposé actuel. Cette première partie (4° série) se termine par l'étude des Renonculacées usitées en médecine (aconit et ses alcaloïdes, Hydrastis canadensis, etc.). La deuxième partie (5° série) débute par l'étude des champignons, considérés tant au point de vue alimen- taire qu'au point de vue toxicologique. Elle étudie en- suite le jaborandi, les ciguës, le colchique et les vera- trums,. Mais ce qui en constitue la portion capitale, ce sont les leçons consacrées à l'étude des médicaments cardio- vasculaires; c'est, en particulier, l'exposition quasi- complète de la pharmacodynamie de la caféine et de la digitale, ces pierres angulaires de la thérapeutique cardiaque. Rien de ce qui concerne ces deux drogues n'a été omis : préparations, accidents, résultats expé- rimentaux, parfois si contradictoires, interprétations physio-dynamiques, action thérapeutique, ete. Comme nons l'avons déjà écrit ailleurs, « nous ne connaissons, quant à nous, aucune œuvre de Phar- macodynamie qui mette mieux à mème le clinicien de devenir thérapeute, c'est-à-dire, quand la clinique lui aura clairement-montré ce qu'il doit faire et pourquoi il doit le faire, qui lui enseigne mieux comment il peut le faire ». D' ALFRED MARTINET. 5° Sciences diverses Siegfried (André), Docteur ès lettres. — La Dé- mocratie en Nouvelle-Zélande. — 1 vol. in-18 de 360 pages. (Prix : 4 fr.) Armand Colin, éditeur. Paris, 1904. ; Depuis quelques années, l'Australasie est, en France, l'objet de nombreux travaux: néanmoins, le livre de M. André Siegfried n'est pas superflu. Il ne modifie guère l'idée que nous pouvions nous faire de la démo- cratie en Nouvelle-Zélande d'après le tableau tracé, par exemple, par M. Métin (Le socialisme sans doctrines). Mais, tandis que M. Métin n'avait pu signaler que les traits principaux de la législation néo-zélandaise, M. Sieg- fried nous donne d'abondants détails sur l'histoire de la colonie, sa constitution politique, l'œuvre du minis- tère libéral-ouvrier qui la gouverne depuis 1890, la société et les mœurs, les rapports de la Nouvelle-Zélande avec le Commonwealth australien et avec l'Empire bri- tannique. Le plan qu'il suit n’est pas à l'abri de toute critique : la quatrième partie, consacrée à la « société » et aux « mœurs », contient des chapitres disparates, dont quelques-uns (les grandes villes néo-zélandaises, la démographie néo-zélandaise, le snobisme dans la so- ciété néo-zélandaise, le mouvement féministe) seraient mieux placés dans la seconde, consacrée aux conditions de la vie politique : ils expliquent, en effet, l'état actuel de la Constitution néo-zélandaise. Mais M. Siegfried paraît s'être moins préoccupé d'expliquer que de dé- crire. Ses descriptions sont agréables : il met en pleine lumière ce qu'il y a pour nous de surprenant dans ce petit pays, où semblent régner à la fois le socialisme d'Etat et l'impérialisme, dans ce pays de suffrage uni- versel où l’on supprime les cabarets, dans ce « paradis des ouvriers » où le roi, les nobles et les riches sont les uns destitués de tout pouvoir, les autres expropriés, sans cesser d'être respectés. L'attention de l’auteur s’est dirigée, comme il convenait, sur la législation ouvrière du ministère Seddon, particulièrement sur l'institution de l'arbitrage obligatoire. Il paraît, à cet égard, moins optimiste que M. Métin. Jusqu'à présent, les décisions de la Cour d'arbitrage sont respectées. Mais c’est qu’elles sont, en général, favorables aux ouvriers : qu'advien- drait-il dans le cas contraire? Or, la Cour ne peut donner satisfaction aux ouvriers que si l’état écono- mique de la colonie le permet. Et cet état dépend lui- même de circonstances qui peuvent se modifier d’un moment à l’autre. En tout cas, la situation de cette colonie de 800.000 habitants, défendue par une marine qu'elle ne paie pas, et séparée du monde par une mer immense el par des douanes sévères, est toute diffé— rente de celle des nations européennes qui comptent des millions d'habitants et ne peuvent ni s'isoler de leurs voisines ni déposer le fardeau de la défense natio- nale : aussi ne doit-on pas croire que les expériences sociales qui réussissent aux antipodes pourraient être reprises sans modifications dans les sociétés euro- péennes, Pau LAPir, Chargé de cours à la Facullé des Lettres de Bordeaux. buts D. à ét ts A ls rs dr À St L ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 183 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 30 Janvier 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Em. Borel démontre la proposition suivante : Pour qu'un ensemble E soit tel que, si chacun de ses points A est intérieur à un ensemble fermé d'un même nombre de dimensions e,, il en résulte que chacun de ses points est intérieur à un nombre fini d'ensembles choisis parmi les e4, il est nécessaire et suffisant que l’ensemble E soit fermé. — M. Ed. Maillet communique les résultats qu'il a obtenus dans l'étude des zéros des fonctions entières d'ordre infini non transfini. — M. Considère à re- connu non seulement que le béton armé et convena- blement préparé peut subir, sans se briser, des allon- gements très supérieurs à ceux qui brisent toujours le béton non armé, mais encore qu'après ces défor- mations considérables il possède une résistance à la traction comparable et peut-être égale à celle du béton qui n'a subi aucune déformation préalable. — M. G. Fayet confirme, d’après les nouvelles observations, le caractère périodique de la comète Borrelly 1904 e; sa durée de révolution serait d'environ sept ans. — Dom M. Amann et Dom CI. Rozet ont observé, à une certaine distance de l'ombre de Saturne projetée sur son anneau, une autre ombre plusétroite et bien moins accentuée, qui traverse sous forme de ligne courbe les anneaux dans toute leur largeur. — M. Driencourt a déterminé d'une façon très précise une série de posi- tions géographiques sur les côtes de Madagascar au moyen de l’astrolabe à prisme. 20 SCIENCES NATURELLES. — MM. P. Langevin et M. Moulin décrivent un nouvel appareil pour l'enre- gistrement continu des ions de l'atmosphère. — M. H. Hergesell donne le résultat des ascensions de cerfs-volants exécutées sur la Méditerranée et sur l'Océan Atlantique à bord du yacht du Prince de Monaco en 1904. On n'a jamais observé l’inversion nocturne si connue sur les continents. — M. L. Guillet a constaté que la trempe des bronzes faite entre 600° et 800° améliore considérablement les résultats des essais à la traction. — M. H. Moissan à repris ses expériences sur la formation du diamant par refroi- dissement brusque de la fonte saturée de carbone, en ajoutant à celle-ci du siliciure ou du sulfure de fer; le rendement à été un peu supérieur. — M. P. Nicolardot estime que les colorations diverses du sesquioxyde de fer : noire, jaune, rouge, etc., correspondent à des condensations diverses de sa molécule. — M. André Kling, par chloruration de la méthyléthylcétone, à obtenu: la cétone chlorée CHS.CHCI.CO.CH*, Eb. 414-1170, et la célone CH3.CIH2.CO.CH?CI, Eb. 134°-136°. Toutes deux sont saponifiées dans les alcools cétoniques cor- respondants. — MM. A. Haller et A. Guyot, en con- densant le dihydrure d’anthracène y-hydroxylé-y-tri- phénylé avec les amines et les phénols, ont obtenu des dérivés du dihydrure d’anthracène y-tétraphénylé. Le dérivé monoamidé fond à 3209, le dérivé hydroxylé vers 308°, — M. Jardin a constaté que les composés oxygénés de l'azote et spécialement l'acide azotique dilué sont susceptibles de provoquer des oxydations lentes des fibres végétales; ce procédé présente des avantages sur le procédé d'oxydation par exposition sur prés. — M. À. de Schulten a analysé des cristaux de fiedlérite trouvés dans les mines du Laurion; ils correspondent à la composition PbO.2PbCP.H*0. — M. H. Courtet a analysé les sels recueillis dans la région du Tchad par là Mission Chari-Lac Tchad; ce sont : du sel gemme, contenant beaucoup de sulfate de magnésie, et du natron, constitué par l'espèce minérale trona : 3N@°0.4C0°,5H4°0. — M. S. Posternak à reconnu que les grains d’aleurone renferment, d'une facon constante, tous les éléments minéraux indispensables à la vie de la plante : Az, P,S, Si, K, Mg, Ca, Fe, Mn. — M. G. Perrier, en lavant les fruits à l’eau formolée, puis en les broyant dans des appareils lavés de même, a obtenu des moûts de cidre stériles, qui ne fermentent pas et se conservent parfaitement pendant longtemps. Ensemencés avec des levures, ils fermentent régulière- ment en fournissant des cidres naturels de bonne qualité. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran a reconnu que la médication la plus efficace contre les infections produites par le Trypanosoma gambiense consiste, actuellement, dans l'emploi de traitements successifs par l'acide arsénieux et le trypanroth. — MM. A.Charrin et Le Play présentent le squelette d'un nouveau-né qui permet d'établir la réalité du rachitisme intra- utérin, absolument distinct de l’achondroplasie. — M. M. Baudouin a observé que le Lernæenicus Sar- dinae s'implante, sur le corps de son hôte, la sardine, au niveau de la nageoire dorsale. — M. Leclerc du Sablon a reconnu que, chez les Cucurbitacées, les sucres, relativement abondants dans le fruit jeune, diminuent jusqu'à maturité, puis augmentent après la récolte et diminuent ensuite régulièrement, Les matières amylacées augmentent jusqu’à la maturité et diminuent ensuite. — M. A. Fraysse poursuit l'étude du parasitisme de l'Osyris alba. — M. R. Nicklès à étudié les plis couchés de Saint-Jean de Buèges (Hérault). L'effort qui a déterminé leur formation est venu du Sud et a été orienté du Sud au Nord; la masse charriée est venue s'écraser contre la grande faille de la Séranne. — MM. L. Dupare et F. Pearce signalent l'existence de hautes terrasses dans l'Oural du Nord. Séance du 6 Février 1905, L'Académie présente à M. le Ministre de l’Instruction publique la liste suivante de candidats pour la chaire d'Histoire naturelle des corps organisés vacante au Collège de France par suite du décès de M. Marey : 1° M. François-Frank,; 2° M. J. Tissot. 10 SGrENCES MATHÉMATIQUES. — M. Ed. Maïllet cherche à déterminer les solutions des systèmes d'équations différentielles linéaires à coefficients monodromes. — M. P. Fatou, étudiant l'intégrale de Poisson et les lignes singulières des fonctions analytiques, montre qu'une fonction uniforme, ayant pour unique singu- larité une coupure fermée, peut avoir une infinité non dénombrable de zéros sur la coupure. — M. F. Severi démontre le théorème suivant : Pour que les intégrales de Picard attachées à une surface algébrique se rédui- sent toutes à des combinaisons algébrico-logarith- miques, il faut et il suffit que la surface soit régulière, c'est-à-dire que son ordre de connexion linéaire soit p, —=1. — M. de Sparre rectifie les résultats obtenus par M. Fouché dans l'étude de la déviation des corps en chute libre. — M. Hérisson décrit un nouveau dispo- sitif d'embrayage absolument progressif. — M. E. Ber- tin, étudiant la giration des navires, arrive à la con- clusion que, dans les essais de traction, la pression de l'eau F est, pour une même valeur de l'angle de dérive 6, appliquée beaucoup plus près de l'avant et dirigée sui- vant un angle moindre avec l'axe du navire que dans les girations à court rayon. — M. Millochau à mesuré, à l'aide de la grande lunette de l'Observatoire du Mont- Blanc, la hauteur de la couche renversante du Soleil; il 184 a trouvé 0,15. — M. A. Hansky a observé la lumière zodiacale depuis le sommet du Mont-Blanc. Elle à la forme d'un triangle sphérique, dont le sommet est situé très près de l'écliptique; on y distingue trois zones, se fondant par degrés insensibles. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J. Violle signale les bons effets obtenus par le tir des canons paragrèles pour la préservation des orages dans le Beaujolais, où lon compte 28 sociétés disposant de 462 canons. — M. Ch. Féry décrit un thermomètre intégrateur don- nant la température moyenne de l'endroit où il setrouve. — M. H. Abraham : Frein synchronisant électroma- gnétique (Voir p.186). — MM. Ch. Eug. Guye et A. Schi- dlof ont constaté qu'entre 300 et 1.200 périodes par seconde l'énergie dissipée par cycle est, pour les aciers au nickel comme pour le fer, indépendante de la vitesse avec laquelle le cycle d'aimantation est parcouru. — MM. Piettre et Vila ont observé, dans le spectre d’ab- sorption du sang, une nouvelle bande dans le rouge (= 634). — M. Alb. Colson montre que les résultats qu'il a obtenus dans la cryoscopie des sulfates con- cordent parfaitement avec les conclusions tirées par M. Mathias de sa théorie liquidogénique. — MM. E.-E. Blaise et A. Courtot ont reconnu que les dérivés organo-magnésiens peuvent se fixer directement sur la liaison éthylénique des éthers-sels non saturés ; mais la fixation exige la présence d’un groupe électro-négatif en « par rapport à la double liaison. — MM. P. Saba- tier et A. Mailhe, par hydrogénation de l’orthocrésol au moyen de Ni réduit, ont préparé le méthyleyclo- hexanol-1:2, Eb. 181°5-182%5, donnant par oxydation la méthyleyclohexanone-1:2, Eb. 1629-1630. Le méta- crésol fournit de même le méthyleyclohexanol-1 :3, Eb. 172°5, et la méthylcyclohexanone-1:3, Eb. 1690. Enfin, avec le paracrésol, on obtient l’alcool-1:#, Eb. 18605, et la cétone-1:#4, Eb. 16905. — MM. A. Haller et A. Guyot, en condensant le dihydrure d’anthracène y-dihydroxylé-y-diphénylé symétrique avec la diméthyl- et la diéthylaniline, ont obtenu des dérivés y-tétra- phénylés du dihydrure d'anthracène, chacun sous deux formes stéréo-isomères. — MM. A. Trillat et Turchet : Nouveau procédé de recherche de l’ammoniaque par l'iodure d’azote (voir t. XV, p. 1105). — MM. J. Bay et J. Alix montrent que, tandis que le carbone augmente de la cellulose au graphite dans la série des combus- libles, les autres éléments (0,H) diminuent. L'azote, absent dans la cellulose, augmente du bois à la tourbe et diminue ensuite normalement. — M. A. Muntz attri- bue à la pectine des vins une part prépondérante dans la propriété du moelleux; il a pu la communiquer à des vins qui ne la possédaient pas en les additionnant d’une petite quantité de pectine.— M. L. Lutza reconnu que la leucine etla tyrosine sont également assimilables par les Phanérogames et les Champignons. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Clément signale l'existence de myélites provoquées par la toxine tuber- culeuse et dont les manifestations nerveuses sont ana- logues à celles du fabes incipiens. — MM. H. Bertin- Sans et J. Gagnière ont reconnu que la forme normale du cristallin est, chez le lapin, celle qui correspond au repos de l’accommodation ; la déformation de la len- tille oculaire, pendant l'effort de l'accommodation, doit par suile être passive, comme l’admet la théorie de Tscherning, et nonactive, comme le voulait celle d’Helm- holtz. — M. J. Tissot a constaté que les proportions des gaz du sang artériel, pendant le cours de l’anes- thésie chloroformique, restent invariables tant que la ventilation pulmonaire reste à peu près normale, — M. Blaringhem a observé que, lorsqu'on coupe les tiges aériennes de certaines plantes herbacées à une époque de développement rapide, on provoque l’appa- rition de nombreux rejets qui présentent, pour la plupart, des anomalies de l'appareil végétatif et de la grappe florale. — M. Houllier montre que l'appauvris- sement progressif des sources du bassin de la Somme résulte du perfectionnement de l'exploitation agricole des terres, entraînant une augmentation importante ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de l'évaporation par transpiration végétale. — M. A. de Lapparent signale de nouvelles découvertes de fossiles qui montrent que la mer crétacée du Sahara et du Soudan était en communication par l'Ouest avec l'Océan Atlantique. — M. P. Lemoine a reconnu que le Djebel Hadid (Maroc occidental) est un dôme anti- clinal très aigu, au centre duquel apparaît le Trias. — M. A. Brives à constaté que l'Eocène inférieur s’est étendu dans toute la partie du Maroc située au Nord de l'Atlas. Il ne l’a pas rencontré au Sud de cette chaîne, ni dans la plaine du Sous. — M. P. Girardin montre que, dans le modelé des hautes vallées glaciaires, il faut réduire la part de l’erratique proprement glaciaire au profit de l’erratique de névé et de l’erratique d’ava- lanche. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 31 Janvier 1905. M. Chauvel présente un Rapport sur un travail de M. Castex relatif à la surdi-mutité. D'après l’auteur, il y aurait deux fois plus de nés sourds-muets que de devenus sourds-muets. Les surdi-mutités acquises suc- cèdent le plus souvent, chez l'enfant, aux méningites, aux maladies infectieuses et à des accidents trauma- tiques du crâne. Il n’est d'autre traitement pour la surdi-mutité que l'instruction des écoles spéciales. — MM. Lucas-Championnière et P.- Reynier discutent la valeur pratique des appareils employés à l’adminis- tration du chloroforme. Séance du T Février 1905. M. Lancereaux présente un Rapport sur un travail de MM. Th. Jonnesco et J. Grossmann relatif au pylo- rospasme avec hypersécrétion et tétanie. Les auteurs signalent un cas de rétrécissement du pylore avec forte hyperchlorhydrie et cerise de tétanie; le malade fut guéri par la gastro-entérostomie. Tous les cas de tétanie connus coexistent avec un obstacle mécanique au passage du bol alimentaire de l'estomac dans l'intestin, obstacle dû à un rétrécissement de l'oritice pylorique, fibreux et cicatriciel ou cancéreux. Ce rétrécissement est non l'effet, mais la cause de l'hypersécrétion acide de l'estomac. Deux signes principaux, les vomissements et le péristaltisme, suffisent à mettre en évidence la sténose pylorique; quand vient s'y ajouter la tétanie, le doute n'est plus possible. — MM. A. Chantemesse et Borel étudient les théories modernes sur la propa- gation de la fièvre jaune et montrent que celle-ci à presque complètement disparu du eontinent européen depuis 4870, parce que les progrès apportés à l'hygiène de la navigation ont rendu, sinon impossibles, du moins difficiles, à bord des navires modernes, la conservation et surtout la multiplication de la variété de moustiques vecteurs de fièvre jaune. — M. Kermorgant signale la fréquence de la distomatose hépatique au Tonkin. Ses lésions consistent en une congestion du foie au début, à laquelle succède une cirrhose hypertrophique avec angiocholécystite simple ou suppurée. On ne connait pas de traitement à opposer à la distomatose; la pro- phylaxie doit consister à laver soigneusement et à bien cuire les herbages et légumes. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE] Séance du 28 Janvier 1905. MM. P. Carnot et A. Chassevant ont observé que les solutions isotoniques passent très rapidement à tra- vers le pylore sans subir de modifications notables; les solutions hypotoniques sont évacuées avec un certain retard et se modifient dans le sens de l’isotonie sans pouvoir, cependant, la réaliser complètement; les solu- tions hypertoniques passent d'autant plus tardivement qu'elles sont plus hypertoniques. — MM. Ch. Aubertin et E. Beaujard ont constaté que les rayons X pro- voquentsur les leucocytes à la fois une émigration hors des organes hématopoïétiques et une destruction DT 77 + ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES pour les polynucléaires, émigration forte et destruction faible; pour les mononucléaires, émigration faible et destruction forte. — M. E. Maurel résume ses recher- ches sur l'influence du vêtement sur l'azote fécal chez le cobaye.— MM. J.-L. Prévost et G. Mioni ont reconnu que la crise convulsive épileptiforme provoquée par l'application du courant alternatif n'est caractérisée que par une phase tonique, la phase clonique man- quant, lorsque la zone corticale motrice a perdu son excitabilité à la suite d’anémie cérébrale expérimen- tale. — M. J. Renaut présente de nouvelles obser- vations à l'appui de son interprétation des disques accessoires de la zone des disques minces des fibres musculaires striées. — M. J. Laurent a observé une tubérisation généralisée des cultures de Pois faites sur glycérine. — M. G. Mioni à constaté que les globules d'un sang normal ne présentent pas tous la même résis- tance à l'action dissolvante des sérums hémolytiques. La dissolution des globules rouges marche d'abord rapi- dement; elle continue ensuite lentement jusqu'à ce que le sérum soit tout à fait dépourvu de son hémolysine. — M.F. Marino a obtenu du sang absolument dépourvu de plaquettes en le recueillant dans l'alcool absolu. — M. L. Butte a reconnu que la proportion de glycose dans le sang et les tissus augmente très rapidement à la suite de l'absorption d’une grande quantité de matières albuminoïdes; dans le même cas, la formation de sucre dans le foie est beaucoup plus active qu'à l’état de jeûne. M. V. Henri est élu membre tilulaire de la Société. Séance du 4 Février 1905. M. Ch. Féré signale une observation d'augmentation de la durée de la gestation coïincidant avec des troubles mentaux.— M. Ed. Retterer a observé que les muscles interarticulaires du genou de l’homme, du cheval, du bœuf et du chien sont fibreux à leur grande circonfé- rence,conjonctivo-élastiquesdansleur portion moyenne, où ils contiennent, de plus, des cellules claires et encap- sulées. — M. Jossifov a trouvé que la masse principale de la lymphe, chez les Murénidés, est chassée dans les veines jugulaires au moyen de deux sinus céphaliques symétriquement disposés, dont le fonctionnement est en rapport avec le mécanisme respiratoire. — M. F. Guéguen à étudié la germination, les homologies et l'évolution des Sperra. — MM. G. Billard et F. Bellet ont constaté que leslésionsirritatives du nerf sciatique, chez le lapin, sont capables d’'exagérer le développe- ment et le poids des os des membres postérieurs. — MM. G. Billard et Perrin estiment que la mesure de la tension superficielle des urines peut permettre d'ap- précier leur toxicité, celle-ci étant d'autant plus grante que la tension superficielle est plus faible, — M. P. Car- not propose le dosage clinique de l'acidité gastrique par la méthode des tubes capillaires — M. Em. Fauré- Frémiet a étudié l'organisation de la Campanella um- bellaria. — MM. Ch. Aubertin et E. Beaujard ont reconnu que les rayons X agissent sur le tissu myéloïde par un double mécanisme : émigration des leucocytes, surtout adultes; destruction des leucocytes, surtout jeunes. Si l'on observe sur l’animal sain comme sur l'homme leucémique des poussées leucocytaires au début, finalement c’est encore la destruction qui l'em- porte. — MM. A. Pic et S. Bonnamour ont observé que l'injection d'extrait aqueux de surrénale a le même effet que celle d'adrénaline ; l’'adrénaline agit plus sûre- ment et plus rapidement sur l'aorte lorsqu'il y a une cause de moindre résistance de l'organisme : tubercu- lose, lactalion. — Me P. Cernovodeanu et M.V. Henri montrent que la dilution du mélange globules-sérum diminue la vitesse de l'hémolyse. La vitesse initiale d'hémolyse dépend de la concentration de l'hémolysine dans les globules. L'hydrate de fer ajouté aux globules avant le sérum accélère l’hémolyse ; ajouté après, il la retarde. — M. E. Géraudel à reconnu que l'artère hépa- tique fournit exclusivement à la portion biliaire de la glande hépatique, aux voies biliaires intra-et extra- 185 hépatiques; la veine porte assure exclusivement la nutrition du lobule. — M. H. Cristiani a observé que la conservation de tissu vivant dans les sérums hété- rogènes est mauvaise, même si leur alexine a été préa- lablement détruite : l’action néfaste de ces sérums esl activée par l’alexine se trouvant dans les tissus à con- server. — MM. C. Nicolle et G. Catouillard ont cons- taté que le sérum antivenimeux est incapable de pro- téger la conjonctive du lapin contre l’action irritante qu'exerce sur elle le venin de l'Heterometrus maurus. — MM. H. Labbé et E. Morchoisne ont mis en évidence l'influence presque exclusive des matériaux alimen- taires sur l'élimination des composés xantho-uriques sur les sujets sains. — M. F. Battelli et Mlle L. Stern ont reconnu que les extraits de tissus de Japin et de cobaye ont la propriété de détruire la catalase ; cette propriété parait être due à un ferment, l’anticatalase. L’anticatalase n’agit pas en l'absence d'oxygène. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 3 Février 1905. M. Guillet a adapté à divers systèmes vibrants (pen- dule de torsion, diapason, corde tendue) un mode d'entretien qui satisfait aux conditions d'entretien parfait établies par M. Lippmann et appliquées par lui au pendule astronomique ‘. 11 rappelle brièvement ces conditions. Les corps vibrants, soumis seulement aux forces inhérentes à leur nature et aux résistances pro- voquées par leur mouvement, oscillent, sous certaines restrictions, suivant la loi : x—x,e-}t sinw/. Pour combattre l'amortissement, M. Lippmann communique, par impulsion, l'énergie réparatrice au système. Il est clair qu'alors, la déformation du système restant petite, la période n'est pas allérée, puisque les forces qui agissent ultérieurement à l'impulsion satisfont aux mêmes lois qu'antérieurement à celle-ci. L'invariabi- lité de la phase exige que l'impulsion soit donnée au moment où le corps prend sa figure d'équilibre; toute- fois, si l'on s'arrange de manière que deux impulsions égales consécutives se produisent au moment où le système passe par une même position dans les deux sens, il y à compensation entre les perturbations de phases dues aux deux impulsions. Pour réaliser les conditions du théorème de M. Lippmann, dans le cas du diapason installé devant la Société, M. Guillet dis- pose les éléments de l'entretien comme il suit: L'élec- to-aimant placé entre les branches du diapason recoit, au lieu d’un courant alternativement établi et inter- rompu, comme cela a lieu dans l’entretien classique de M. Mercadier, les charges et les décharges périodique- ment induites dans un petit transformateur. Les con- nexions sont établies de manière que ces charges et décharges produisent une action motrice sur les branches aimantées du diapason. Cette aimantation peut être déterminée au moyen de l'électro d'entretien lui-même (électro à noyau aimanté), comme cela a lieu dans le téléphone; mais, si l'on a besoin de pouvoir faire varier à volonté l'intensité d'aimantation des branches, il est préférable de se servir d’une bobine auxiliaire enfilée sur l’une d'elles. Pour produire les impulsions d'entretien chaque fois que le diapason repasse par la même figure, on intercale dans le circuit primaire un interrupteur formé d'une pièce fixe à, et d'une pièce mobile 2 commandée par un fil de cocon fixé à l’une des branches du diapason. Le fil étant tendu, il suffit de fermer le contact par l'approche de b pour que le diapason entre en vibration et s'y main- tienne. La pièce entrainée doit réagir de façon que le fil reste tendu pendant le retour de a vers la position d'équilibre ; on est assuré par là que le contact s'établit pour la position du diapason qui correspond à la cou- pure du circuit primaire du transformateur. M. Guillet indique ensuite un second mode d'entretien très géné- ral, qui laisse le corps vibrant absolument libre et qui 1 C. R. de l'Acad. des Sc., 13 janvier 1896. 186 consiste simplement à transmettre, par le support ou autrement, à un contact vibrant (mis en série avec la pile et l’électro d'entretien) le mouvement du système à entretenir. Par un serrage convenable de ses deux parties, le contact se synchronise sur le corps vibrant et il se produit un véritable accrochage entre le diapason et l'électro d'entretien, comme cela a lieu dans divers moteurs à courants alternatifs ; le système vibre ensuite indéfiniment. — M. Pécoul présente l'appareil automa- tique avertisseur d'oxyde de carbone de MM. Albert Lévy et A. Pécoul. Cet appareil permet de déceler et l - 100.000 L flacon à écoulenient d’eau, de 3 lit. 5 de capacité, aspire l'air, qui passe dans un tube en U renfermant de l'an- hydride iodique, et placé dans une cheminée métallique au-dessus d'une petite lampe à alcool dont la flamme est réglée de manière à réaliser une température de 70° environ; l'air barbote ensuite dans du chloroforme pur surmonté d'une couche d'eau distillée (pour éviter l'entrainement de vapeur de chloroforme par le cou- rant gazeux), auquel il abandonne l'iode mis en liberté par l’oxyde de carbone; l'opération est très rapide : on mel en train en remplissant le flacon aspirateur, allu- mant la lampe, et ouvrant le robinet. Le dosage se fait en comparant le petit flacon contenant le chloroforme à une série de tubes étalons identiques, scellés et con- tenant, sous une couche d’eau distillée, la mème quan- tité de chloroforme dans laquelle on à fait dissoudre les poids d'iode libérés par 1, 2, 3, .… cent-millièmes d'oxyde de carbone; la couleur rose pâle corres- de doser l’oxyde de carbone à partir de 000 d'oxyde dans l'air analysé est très nette. Cet appareil a permis de constater que, même à cette dose infime, l'oxyde de carbone détermine des troubles dans l'économie. Répondant à une demande de M. Pellat, M. Pécoul dit que les carbures de l'air, ne réduisant l'anhydride iodique qu'au-dessus de 2009, ne peuvent fausser les résultats du dosage. — M. H. Abra- ham présente un dispositif de frein synchronisant électromagnétique. Dans un assez grand nombre d’ex- périences, on est conduit à entrainer un appareil au moyen d'un moteur synchrone actionné par un courant alternatif. On peut alors ètre gèné par la complication qu'apporte le dispositif spécial de démarrage et par la perturbation que le moteur introduit dans le circuit. On atténue beaucoup ces inconvénients à l’aide de l’ar- tifice suivant. L'appareil particulier qu'il faut entraîner est mù par un moteur auxiliaire. L’axe de ce moteur porte une roue dentée en cuivre rouge, dont les dents défilent dans l’entre-fer d'un électro-aimant ayant ses deux branches de part et d'autre du plan de la roue. Cet électro-aimant est actionné par le courant alter- natif sur lequel on veut synchroniser le moteur. Sup- posons pour un instant le synchronisme établi et supposons, en outre, que chaque dent passe dans l’en- trefer au moment où le champ magnétique est presque nul. Les courants induits sont alors très faibles, et le freinage qu'ils produisent est, par conséquent, mini- num. Pour maintenir le synchronisme, il suffirait que la puissance fournie au moteur auxiliaire fùt juste suffisante pour produire le mouvement et pour com- penser la petite quantité d'énergie absorbée par le frein. Si l’on fournit au moteur une puissance un peu supérieure à celle valeur critique, ce moteur prend tout d'abord une légère avance de phase sur le courant alternatif. Les dents de cuivre rouge passent alors dans l'entre-fer à des instants où le champ magnétique à une valeur sensible; les courants induits augmentent et le frein absorbe toute l'énergie supplémentaire du moteur, sans que Sa vilesse puisse augmenter. En pratique, la manœuvre se réduit à ceci : on met le moteur en marche et l'on fait passer le courant alter- natif dans l’électro-aimant. La synchronisation se pro- duit spontanément; le moteur s'accroche tout seul. — M. A. Guébhard poursuit ses recherches expérimen- pondant à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES tales pour la représentation de la fonction photogra- phique. Du fait seul que l'allure générale de la fonction photographique est assez bien connue, dans sa partie moyenne, pour qu'il soit constant qu'après avoir atteint un certain maximum elle redescend vers zéro, il résulte la possibilité d'expliquer, sans autre recours, tous les cas plus ou moins improprement dits de ren- versement, de destruction ou encore de continuation. Il est vrai que certaines expériences de M. Bouasse ont mis en doute l'existence d’une courbe énergétique unique, telle que la voudrait le postulatum de la pro- portionnalité des impressions au simple produit des intensités d’excitation par les durées. Et cela justifie la répartition qu'avait faite M. Guébhard, sur une courbe décroissante, des maxima des courbes représentant les valeurs d'impression en fonction du temps d’excitation, pour des intensités diverses de celle-ci. Mais, plus cela complique les expériences, en commandant la recher- che d'autant de courbes qu'il y a de modalités d’éner- gie, et plus il importe d’être fixé préliminairement sur le mouvement de la courbe synoptique vers ses extré- mités. Or, si divers expérimentateurs ont délinitive- ment prouvé que le départ, bien loin de se faire en ligne droite comme avaient cru l’établir MM. Lumière, se fait avec une tangente très peu inclinée sur l'axe, une certaine hésitation pouvait subsister sur l'extrémité lointaine de la courbe, qui, d'après MM. Lumière, se rapprochait asymptotiquement de l'axe horizontal, d’après M. Bouasse, s'en écartait de nouveau après une approche à concavité supérieure, et, selon certains commentateurs de M. Janssen, après ce relèvement retombait encore, comme pour finir en ondulations successivement décroissantes. Attribuant ces diver- gences à l'inconvénient de n'avoir pour juger, dans chaque expérience, que deux valeurs seulement, entre lesquelles rien ne peut avertir d'un changement de signe de la dérivée, l'auteur s’est appliqué à grouper toujours dans un mème développement (bain dilué en cuvelte verticale: eau 1000, sulfite de soude an- hydre 10, métoquinone 1; durée 1 heure; tempéra- ture 15°), non seulement un certain nombre de plaques (6 ou 12) de mème fabrication (pellicules, pour éli- miner les perturbations dites de alo), mais encore, sur chaque surface 9 X 12 ou 13 X18, le plus grand nombre possible de valeurs échelonnées. Des séries continues peuvent s'obtenir en exposant pendant des temps différents, par fractions longitudinales, une : longue pellicule de 6°" X 108: X n à l’action d'une flame linéaire (pyr-étalon de Giroux), placée à quelque distance en avant d'une extrémité, parallèlement à la surface et éclairant, inversement au carré de la dis- tance, tous les points non protégés. Mais la continuité des valeurs fail obstacle à une bonne différenciation, et mieux vaudrait encore opérer sous une cache à grille, ou faire des expositions fractionnées par saccades, si certains autres inconvénients, relalifs au développe- ment, ne devaient faire préférer l'emploi des formats ordinaires de surfaces sensibles, qu'il suflit de décou- vrir progressivement par fractions, parallèlement à chacune des deux dimensions, pour les diviser en rec- tangles dont les poses correspondent à la somme des temps de mise à Jour dans chaque sens. La comparai- son de ces temps de pose avec les noirs correspondants fournit tous les éléments des tracés de courbes, pour chaque intensité de lumière. Un autre procédé, qui simplifie les longues durées d'exposition, mais au détri- ment des résultats numériques, consiste à recouvrir chaque plaque de deux caches translucides croisées, formées chacune par l'imbrication en échelons d'un nombre progressif d'épaisseurs de papier blanc, avec, dans chaque sens, une bande opaque pour former réserve, el une bande découverte pour donner le rec- tangle d'exposition maxima. Malgré tout, certaines difficultés, écueil de tous les observateurs, rendent aléatoire de mesurer les estimations chiffrées, et l’'au- teur se borne, pour le moment, à l'énoncé du pre- mier résultat spécialement visé, la réalité d'existence PR TA LU RE Te. Th PA ü à À RSS 2 ms. di li dre i Ré d'un relèvement des noirs après le premier minimum, très voisin de zéro, qui, sur Vitroses Lumière, avec un éclairement de 2.000 lux (bec acétylène de 20 pyrs à 10 centimètres), demande de quarante à cinquante minutes pour se produire; puis la probabilité très grande d'une baisse nouvelle, après un maximum, inférieur au premier, qui, sur les plaques précitées, paraît très tardif, mais sur pellicules Kodoïd d'East- mann s'est manifesté nettement pour des expositions de quelques heures au pâle et inconstant soleil d'hiver, toujours suffisant, d'ailleurs, pour produire en moins d'une seconde le premier maximum, au delà duquel toute augmentalion de pose ne fait que décroitre les noircissements. M. P. Villard signale à ce sujet que très souvent, quand une plaque sensible est soumise suc- cessivement à deux impressions, et que pendant l'une d'elles cette plaque à été localement protégée par un écran, on observe un liséré clair entourant la silhouette de l'écran. M. Guébhard dit que ces faits notoires de si/houettage sont, à sa connaissance, absolument indépendants de la superposition de deux impressions successives, et parfaitement observables en prenant directement avec un objectif ou par contact l'image de « régions adjacentes » fortement contrastées. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 27 Janvier 1905. M. G. Urbain expose les recherches qu'il a faites en commun avec M. H. Lacombe sur la préparation et le poids atomique du samarium et de l’europium. Il décrit ensuite ses recherches sur le poids atomique du gadolinium (Gd—157,10) et donne quelques caractères de l'élément encore inconnu qui suit le gadolinium dans la série des terres rares. Il décrit, en particulier, le spectre d'absorption de l'élément Z5 dont il montre la photographie à la Société. Ce spectre ne présente aucune des bandes du dysprosium. Ses bandes sont ultra-violettes et fort intenses, si l'on en excepte toute- fois la faible bande À — 487,7, observée antérieurement par M. Lecoq de Boisboudran, et visible entre le vert et le bleu. La description de ce spectre, telle qu'elle résulte des premières mesures de l’auteur, est la suivante : Milieu d'une bande faible, étroite et diffuse, constituant l'unique spectre d'absorption TOUTE sy RE PR EE ON Milieu d'une bande double, forte, dont le composant le moins réfrangible est le ATEN OS ORDRE RTE EST CE: Milieu de la plus forte des bandes de ce SHC A el -deNrlet re Messe EU ue L0007 Milieu d'une bande étroite et assez forte . . 359,6 Milieu très approximatif d’une bande forte, IR ee RITES IIUSE, CEE EME UE SON Au delà de cette bande, on en discerne une sixième sur les clichés, lorsqu'on les examine par transparence, — M. Godchot, en oxydant l'octohydrure d'anthracène, C“H', dans des conditions déterminées, a obtenu deux nouveaux produits : 1° le dihydrooxanthranol-9 : 10, C“H#0*, cristallisé en grandes aiguilles jaunes, fondant à 159°, II possède une grande stabilité. Par une oxyda- tion plus profonde, il donne l’anthraquinone ordinaire. Il est susceptible de donner des éthers à 2 molécules d'acide : le diacétyldihydrooxanthranol est cristallisé et » fond à 220°; 2° l’hexahydroanthrone, C'#H*O, se pré- sentant sous forme de tables fondant à 459,5; elle dis- tille vers 222-2259 sous 25 mm. Elle donne une semi- carbazone qui fond à 250°. Avec le brome, elle donne le dibromohexahydroanthrone fondant à 123°.— M. M. . Wahl expose les raisons qui l'ont conduit, en commun . avec M. L. Bouveault, à reprendre la question de l'existence de deux isomères stéréochimiques du dioximidobutyrate d’éthyle. D'après M. Nussberger (D. ch. G., t. XXN, p. 2152), cet éther, obtenu par le Chlorhydrate d’hydroxylamine et l'o-nitrosoacétylacé- tate d’éthyle, F. 142, se transforme par HCI sec en un ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 187 isomère F. 1329. D’après la théorie de M. Hantzsch, ces deux éthers sont stéréoisomères; le premier est le sy», et le second l'ampli : CHG G*CO2CEAF CIP.C C.CO*C?H5 > I Az (OH Az (OH Amphi. F. 132, | I Az (OH) (OH) Az Syn. F. 4420. D'après Nussberger, le premier donne un diacétate, F. 50°, et le second un driacétate, F. 149-1209, quand on les traite par l'anhydride acétique. De même, le dérivé syn, traité par CH°.COCI, fournit aussi le diacé- tate F. 119-1209. En réalité, l’éther dioximidobutyrique n'existe que sous une seule forme, F. 162; traité par l’'anhydride acétique, il donne bien le diacétate F. 53-549; mais le produit résultant de l’action du chlo- rure d'acétyle n’est pas, comme l'indique Nussberger, un diacétate isomère; c'est un monoacétate, F. 1490. La preuve, c'est que celui-ci, chauffé avec l’'anhydride acétique, fournit le diacétate FE. 53-54, Le même monoacétate se forme quand on dissout l’éther dioxi- midobutyrique dans l’anhydride acétique à froid et qu'on évapore dans le vide; au contraire, à chaud, on obtient le diacétate. Quant à l’action de HCI sec sur l'éther dioximidé F. 162, loin d'opérer une isomérisa- tion, elle provoque simplement la formation de la méthylisonitrosoisoxazolone, qui, contrairement à ce qu'indique Nussberger, ne renferme pas 1/2H°0 de crist. et ne fond pas à 1329, mais cristallise anhydre et fond à 159, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 27 Janvier 1905. M. R. S. Willows a montré antérieurement qu'un champ magnétique transverse, appliqué à la cathode, peut, dans certains cas, réduire la différence de poten- tiel aux bornes du tube. Il fait voir que la pression à laquelle cette diminution commence correspond à la pression à laquelle le voltage nécessaire pour main- tenir la décharge dans les conditions normales est minimum; c'est aussi la pression à laquelle la colonne positive commence à être complètement striée. — MM. R. S. Willows et J. Peck ont trouvé que l'étin- celle d'une machine de Wimhurst est éteinte par l'ac- tion des radiations du radium dans certains cas et que le courant qui passe décroît. Le phénomène est dû à l'action des rayons &; les rayons Rôntgen sont inactifs, tandis que les rayons Lenard sont actifs. — M. P. Phi- lipps a constaté que du caouchouc, soumis à une trac- tion constante, s’allonge considérablement, l'extension à un instant { après l'établissement de la charge étant donnée par la formule x= 4 + b logt, où a et b sont des constantes pour chaque charge. Après l'enlèvement de la charge, le caoutchouc retourne lentement à sa lon- gueur primitive; l’allongement qui persiste au temps t après l'enlèvement de la charge est donné par la formule x = blogt/t, tétant le temps d'établissement de la charge. Quand le caoutchouc est étiré à une lon- gueur déterminée et maintenu dans cet état, la charge nécessaire pour maintenir l’élongation diminue avec le temps et est donnée à tout temps #, compté à partir du moment où l'allongement initial a été établi, par la loi P—a— log {, b étant proportionnel à la grandeur de l'élongation initiale. Les fils recuits de cuivre, argent, or ou platine soumis à une charge se comportent en certains points comme le caoutchouc, tout en présen- tant des différences marquées. Si la charge dépasse une certaine valeur (dans les expériences de l’auteur, le tiers ou le quart de la charge de rupture), l’élongation au temps {après l'établissement de la charge est donnée par la même loi x—a—<+hblogt; mais, au-dessous de cette valeur de la charge, b— 0. Quand la charge est enlevée, il n'ya pas de contraction appréciable, comme pour le caoutchouc ou le verre. — M. C. A. Bell montre que les erreurs dans la détermination acoustique du 183 module de Young pour le verre, dues aux irrégularités des barreaux ou tubes employés, peuvent être éliminées en appliquant à la longueur mesurée de chaque bar- reau libre une correction donnée par la formule : dans laquelle èS est la différence entre la section trans- versale au point z et la valeur moyenne S, pour le bar- reau entier. M. C. Chree donne une justification théo- rique de cette formule. — M. B. Weinberg décrit quelques méthodes pour l'étude de la viscosité des solides : déformation d'un parallélipipède fixé par sa base, torsion d’un barreau, déformation de la subs- tance comprise entre deux tubes coaxiaux par la rota- tion du plus petit tube. Séance du 10 Février 1905. La Société procède au renouvellement de son Bureau pour l’année 1905. Sont élus : Président : M. J. H. Poynting; Vice-présidents : MM. C. Chree, H. M. Elder, J. A. Fleming et J. Swinburne; Secrétaires : MM. W. Watson et W. R. Cooper; Secrétaire étranger : M. S. P. Thompson; Trésorier : M. H. L. Callendar. M. J. H. Poynting fait une conférence sur la pres- sion de radiation. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 25 Janvier 1905. M. W. H. Perkin fait une conférence sur la vie et les travaux de Wislicenus. Séance du 2 Février 1905. MM. M. O. Forster et H. T. Fierz ont préparé la camphorylcarbimide CH.Az : CO. cu | Co E. 7%, volatile avec la vapeur d’eau ; elle est transformée par l’eau en dicamphorylcarbamide, CO(AZH.C"H#0), F. 2610. — M. M. O. Forster représente l'isonitroso- camphre et sa forme instable par les deux configura- tions suivantes : GSHÉS CHE AIN TaNR GC — € el (RESTE |! [l ||] Il AZOI 0 HOMO Syn, LE: 152. Anti, X. 1140, —M.E. P. Perman à étudié une méthode simple pour la détermination des poids moléculaires, avec une exac- tiltude modérée, d'après les mesures de l'abaissement de la tension de vapeur du solvant de la substance à examiner. La solution est chauffée dans la vapeur du solvant pur, bouillant sous pression atmosphérique, et l'abaissement de la tension de vapeur est lu directe- ment. —- MM. R. Meldola et J. H. Lane, en réduisant le bromonitroacéto-a-naphtalide par Fe et HCI, ont obtenu la base anhydrobromée de Prager. Celle-ci, débromée par ébullition de sa solution alcoolique pen- dant deux jours avec Zn et de l’alcali, fournit une ami- dine, qui est le B-AzH-éthényldiaminonaphtalène. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 2 Décembre 190%. M. W.F. Lowe montre que l'essai de la galène par voie sèche dans un creuset de fer peut donner des ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES résultats plus exacts qu'on ne le croit généralement. En enlevant l'essai du four aussitôt qu'il paraît être réduit, il a obtenu, avec une galène très pure, 85,86 2/0 de Pb (quantité théorique 86,58 °/,); comme il y avait en tout 0,75 °/, d'impuretés, le résultat ne différait de la théorie que de 0,02 à 0,03 °/. SECTION DE NEWCASTLE Séance du 15 Décembre 1904. M. H. S. Pattinson, à la suite d'une série d'expé- riences concluantes, propose de modifier comme suit la méthode de Lunge pour la détermination du soufre dans les pyrites : L'hydrate ferrique est précipité à 70° et maintenu pendant dix minutes à cette température, au lieu de précipiter à froid, puis de chauffer à 600-700; l'excès d’ammoniaque doit être de 5 cc. (d — 0,88). Après lavage du précipité, le volume de la solution n'est pas réduit, mais neutralisé exactement (au méthylorange) avec HCI; on ajoute un excès d'HCI (1 ec. d=—1,47) et on précipite BaSO* par addition de BaCF à la solution bouillante. — MM. J. Pattinson el J. T. Dunn signalent deux nouvelles sources d'erreur dans la détermination. du soufre : Les bouchons en caoutchouc rouge com- munément usés pour les flacons-laveurs sont attaqués par Peau bouillante ou la vapeur et leur cèdent de l'acide sulfurique. D'autre part, on trouve souvent des composés sulfurés solubles dans le chlorure de baryum commercial. SECTION DE NEW-YORK Séance du 16 Décembre 1904. M. S.F. Ball propose la méthode suivante pour déter- miner la quantité d'alcool éthylique contenue dans l'huile de fusel commerciale : On prend 20 cc. de la substance, 20 ce. de benzène et 60 cc. de solution salu- rée de Na Cl, qu'on agite dans un séparateur gradué cylindrique; après séparation, on lit le volume de la solution de Na CI. On en prend 50 cc. que l'on distille avec 60 cc. d’eau, et l’on détermine l'alcool dans le dis- tillatum ; on en déduit facilement l'alcool contenu dans le total de la solution salée et, par là, dans l'huile de fusel. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 14 Décembre 1904. MM. R. F. Carpenter et S. E. Linder poursuivent leurs recherches sur les réactions qui se passent dans le four de Claus. Entre 465° et 625° C., en présence de brique pilée, les deux réactions principales sont : 10 HCAz + H°0 — AzH* + CO; 29 CO Æ H°0 = E0° + HE. La quantité d'acide cyanhydrique convertie en ammo= niaque est d'environ 80 °/,; elle diminue quand le cou- rant est trop fort. En présence d'oxyde de fer, le ren- dementen AzH5 atteint un maximum (96,5 °/,) à 2800 C., puis diminue ensuite; tout l'HCAZ est décomposé. En présence de terre de Weldon, le rendement en AzH* n'excède jamais 75 °/,; au-dessous de 150°, il s'échappe de l'HCAz non décomposé; au-dessus de 2009, il se dé- gage de l'azote libre. Dans les trois cas mentionnés, la présence d'hydrogène sulfuré et d'air (en excès modéré) favorise à un haut degré le rendement en AzH?. SECTION DE LONDRES Séance du 9 Janvier 1905. M. W. F. Reid fait un Rapport sur les industries chimiques à l'Exposition de Saint-Louis. à Le Dircecteur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MakETHEUX. imprimeur, 1, rue Cassette. À N° 15 MARS 1905 © £ 16° ANNÉE Revue générale Sciences pures et appliquées Directeur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et ia Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie - La nouvelle comète à courte période “« 1904 € ». — M. Fayel, un jeune astronome de l'Observatoire de Paris, qui s’est fait, chez nous, la “spécialité du calcul des orbites, vient de mettre en évi- dence le caractère périodique de la comète « 1904 e », découverte récemment par M. Borrelly. C'est donc un double succès pour l'Astronomie frar- “caise, et nous sommes heureux que la chance soit ve- “nue favoriser cette fois encore M. Borrelly, dont tout le monde astronomique admire l’infatigable activité dans cette branche, et qui a déjà découvert un grand nombre le comètes paraboliques. L'astre dont il s'agit a été trouvé le 28 décembre der- hier, avec le petit chercheur de l'Observatoire de Mar- seille : c'était une petite nébulosité, de 10° grandeur Bt sans trace de queue; situé, à cette époque, au voisi- Dage de l'équateur et par 15° d'ascension droite, il se déplaçait d'environ 1° par jour vers le Nord-Est; la première mesure précise est du 30 décembre. La parabole provisoire que M. Fayet déduisit, en uti- sant les trois premières observations, lui permit de onstater une particularité importante, qu'il avait re- “marquée comme un signe caractéristique des éléments de la presque totalité des comètes elliptiques déjà con- nues : l'inclinaison sur l'écliptique et l'argument du érihélie étaient peu différents de zéro. | Guidé par cet indice (dont l'utilité s'est trouvée con- mée une fois de plus dans le cas actuel), il n'hésita à entreprendre le calcul d'une orbite elliptique, “malgré la petitesse de l'intervalle embrassé par les observations : celles-ci, en effet, avaient dû être inter- mpues, à cause de la Lune, dès le 11 janvier; il y fait donc toutes probabilités pour qu'une tentative écutée dans'des conditions aussi défavorables échouât que l'unique résultat fût d’avoir entrepris en pure ïerte de longs et pénibles calculs. … Tout au contraire, le résultat-fut mème bien plus in- Léressant qu'on ne pouvait l'espérer : non seulement, il fut démontré que la parabole était insuffisante pour représenter les observations, mais le désaccord entre cette section conique et l'orbite réelle se trouva assez Msidérable pour qu'il fût permis d'affirmer que l'on se # REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. trouvait en présence d'un astre dont la durée de révo- | lution ne devait pas atteindre 10 ans*. Les observations faites ultérieurement vinrent con- firmer pleinement cette conclusion; une nouvelle or- bite, basée, cette fois, sur des lieux normaux s'étendant sur un mois environ, donna, en effet, les éléments que voici? : Epoque du passage au périhélie : 1905 janvier 16, 654 t. m. de Paris. Longitude du nœud ascendant . . 76942! ) Inclinaison sur l’écliptique . . 30032! 1905,0 Argument du périhélie . . . . . . 352014! \ ERCEDDAGNÉE EEE PEUR 0°61974 Moyen mouvement. . Ce qui conduit à une durée de révolution de 7 ans environ. La comète 1904 e paraît dorc appartenir au groupe important des astres périodiques dont le temps de révo- lution est inférieur à celui de la planète Jupiter, et ce groupe, nous l'avons déjà dit, tire principalement son grand intérêt de son rôle transitoire entre les petites planètes et les comètes, d'autant plus que la comète en question ne présente qu'un anneau de condensation sans queue. Il est, en outre, intéressant de constater que, parmi les 33 comètes connues dont la période est inférieure à celle de Saturne, il n’en existe que 2, les comètes Tuttle et 1846 VI, dont la durée de révolution surpasse celle de Jupiter, et encore est-ce de bien peu, puisque leur période est de 13 ans 1/3. Le nouvel astre ne semble pas, jusqu'à présent, être identique avec un de ceux déjà catalogués ; mais cette conclusion ne pourra revêtir quelque certitude que lorsqu'on aura pu examiner la trajectoire dans le passé, et se rendre compte si les perturbations dues à l'ac- tion de Jupiter n'ont pas, à un certain moment, modifié considérablement la nature de l'orbite. M. Fayet, qui s'est chargé de cette étude, serait très heureux si les différents observateurs voulaient bien lui adresser leurs mesures, et surtout si ces observa- R., 23 janvier 1904, p. 259. AT Ce 2 C. R., 30 janvier 1904. 190 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tions pouvaient se prolonger le plus longtemps pos- sible. A la fin du mois de mars, l'éclat de la comète sera encore le quart de celui qu'elle possédait au mo- ment de la dé- couverte. Le 3 avril, elle passera à peu près au milieu de la droite qui joint la Chèvre à À Co- cher. $ 2. — Phy- sique Un instru- ment pour l’observation de la vie des insectes.— Le docteur Aurelio de Gasparis, pri- vat-docent à l’'U- niversité de Na- ples, vient d'in- venter un instru- mentd’'un intérèt toutexceptionnel et qui permettra aux naturalistes d'étudier désormais la vie des insectes et d'autres petits animaux dans | metteur) oblige la personne qui parle à se placer, p ses conditions naturelles. On sait que le microscope ordinaire, qui nous a révélé la structure même des tis- sus organiques et auquel nous devons la connaissance de tant d'organismes minus- cules, oblige l’observateur d'approcher le plus près pos- sible de l’objet à étudier. Le bioscope (fig. 1) lui per- met, par contre, de se tenir à une distance de 0,50 à 1 mètre, de facon à rester inaperçu de l’objet en expé- rience. Cet instrument con- siste essentiellement en un tube extensible, portant dans sa partie antérieure un Ssys- tème d'objectifs achroma- tiques parfaitement libres d'aberrations de sphéricité, alors que sa partie posté- rieure comprend un oculaire grand champ de vision. Les tableaux que le bios- cope révèle aux yeux du naturaliste sont d'un genre inattendu et d’une splen- deur et d'un éclat inexpri- mables. En munissant l'ap- pareil d'une chambre pho- tographique, on peut fixer par la photographie les im- pressions éminemment inté- ressantes qu'on reçoit ainsi. De ces photographies, nous donnons un échantillon qui ne manquera pas d'intéresser nos lecteurs (fig. 2). Cet instrument, ouvrant un champ tout nouveau aux recherches biologiques, ne tardera sans doute pas à ètre généralement adopté, d'autant plus que le manie- ment n'exige point de technique spéciale, comme le Fig. 1: — Observateur se servant du bioscope. comme trè | microscope; faisons remarquer, enfin, que le bioscop | se prête encore aux emplois médicaux, pour étudié | par exemple, les cavités du corps humain. | posé sur une table, la fixité du microphone (ou 4ranss centimètres: aussi ces appareils sont-ils considé s personnels. En outre, dans la plupart 4 microtéléphones, l'inclinaison de l'appareil dépend sentiellement de la personne qui parle, ét Com A.Gradenwitz $ 3. — Élec tricité que. — Les aps pareils téléphoni ques en usage Su les grands 1 deux catégories suivant que Je microphone do ils sont munis € fixe, où combi avec le récepteuk pour former ce qu'on appelle w microtéléphones Dansle premi cas, que l’appas reil soit appliqué contre un mur OÙ L rapport à cet appareil, da une poisiton à peu près im muable, face à la plaque où au cornet dont il est munis et à une distance de ceux=® qui varie suivant les pers sonnes et suivant la notion qu'elles ont qu'on les conk prend plus ou moins bien. ON a, d'ailleurs, généralement dans le public, une tendan instinctive à se rapproché du transmetteur, dans les poir d'être mieux complis L'un desinconvénients d'u telle pratique consiste en @e qu'elle est fort peu hygi nique, tant pour la person qui parle que pour celles qui pourront se servir, apll elle, du mème appareil. D'at tre part, bien des mic phones sont sujets à se régler, par suite de lhum dité due à la vapeur de qui est exhalée avec la res piration. Les microtéléphones Sok sujets aux mêmes critiqué avec cette aggravation qu@ dans ces appareils, lon mème plus la latitude s'éloigner du cornet du tram metteur. L'application Ml pavillon du récepteur conb l'oreille a pour effet d'a ner le microphone, mom sur le même bras, à une di tance de la bouche géné lement réduite à quelq CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 191 pour chaque microphone, cette inclinaison n'est pas indifférente, il en résulte que, dans un très grand nombre de cas, l'appareil est mal utilisé et ne donne pas son rendement maximum. Un appareil d'invention récente, que les construc- Leurs appellent le monophone, échappe à ces critiques et réalise, de ce fait, un sérieux progrès en téléphonie “eten hygiène (fig. 3 à 5). C'est un appareil dans lequel le microphone M est placé dans le même boilier métallique que le récep- eur: R, lequel doit, bien entendu, être appuyé contre doreille pendant la conversation. Ce boitier est muni un cornet C qui joue le double rôle d’adducteur des “sons au microphone et de poignée permettant de saisir appareil. Ce cornet est très légèrement cintré, de facon à ramener son ouverture vers la bouche, mais Sans arriver néanmoins en face de celle-ci. Elle s'en “approche assez pour recueillir les sons transmis, pas Sez pour recueillir l'haleine niles particules de salive, “qui, dans les autres types d'appareils, sont, au contraire, fécueillis si pieusement par le cornet ou la plaque du Wansmetteur. Il va sans dire que le microphone employé est extré- ement sensible, à tel point que, sans cet éloignement tre lui et la bouche et sans les réflexions que ubissent les ondes sonores avant de lui arriver, ce microphone serait d'un emploi insupportable. Dans les “onditions où il fonctionne, il est, au contraire, de la sensi- “bilité voulue pour donner une “ransmission (très puissante ‘Sans cesser d'être d’une net- “eté absolue. Il se compose de deux membranes de charbon, très minces, munies à leur “centre d'une petite cuvette, et accolées de telle facon que Û TRE us GET der 227 , Fig. 3. Fig. 4. , à 3. — Coupe du monophone. — KR, récepteur; M, crophone; C, cornet. — Vue extérieure du monophone. mi- ? Fig. 4. | les cuvettes forment, au centre du système, une sorte d'alvéole où l'on place des granules de charbon de forme irrégulière. Le microphone ainsi constitué est monté dans le boitier de facon à recevoir les vibrations D'où le nom de mouophonc. simultanément sur ses deux faces. On obtient ainsi la grande sensibilité dont nous avons montré la néces sité. En outre, il est clair que, quelle que soit l'incli- naison donnée au cornet, le microphone reste toujours vertical, c’est-à-dire dans la position la plus favorable à son bon fonctionnement. Quant au récepteur, il n'a rien de spécial, sinon Fig. ». — Mode d'emploi du monophone. qu'il est soigneusement isolé du microphone par une cloison séparatrice, qui a pour but d'empêcher la for- mation du phénomène bien connu sous le nom de téléphone chantant. $ 4. — Chimie biologique Les déviations pathologiques de la désin- tégratioun des albumines : Ia Cystinurie. — Tandis que l’on connaît toute une série d'anoma- lies de la dégradation des hydrates de carbone dans l'organisme, on ne peut guëre citer, en ce qui con- cerne les déviations pathologiques de la désintégration des albumines, que l’alcaptonurie et la cyslinurie. La Hevue a rendu compte récemment des dernières re- cherches faites sur l'origine des corps alcaptoniques", et aussi, à deux reprises , des travaux relatifs à la consti- tution de la cystine, ou plus exactement des deux eys- tines : celle que l'on obtient par l'hydrolyse des pro- téiques et spécialement de la corne et des cheveux, el celle que l’on extrait des calculs urinaires de cystine, quand on a la bonne fortune, extrêmement rare, de mettre la main sur des pierres de cette nature. Néan- moins, en dépit de ces recherches, la cystinurie était demeurée à l'état de simple curiosité ou de rareté patho- logique, lorsque, tout récemment, des recherches de A. Loewy et C. Neuberg* ont montré que l'étude de cette affection se relie à tout l’ensemble du problème de la désintégration pathologique des albumines. Les lecteurs de la Revue ont vu que la eystéine des protéiques est l'acide «-amino-6-thiopropionique {Fried- mann), tandis que celle des calculs est l'acide x-thio-5 aminopropionique, les deux acides présentant done les 1 Voyez la Revue du 30 janvier 1915, p. S3. 2 Voyez la Revue du 30 avril 1903, p. #12, et 15 janvier 1905, p. 25. 3 Lœvy et NeugerG : Z. f. physiol. Ch... XUIIT, p. 338. # On se rappelle que la cystine est le disulfure de l'acide {hio-aminé correspondant, ou cystéine. celle du 492 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE mêmes relations que la sérine et l'isosérine. Or, Loewy et Neuberg, ayant eu l’occasion d'observer un cystinu- rique, ont constaté d'abord ce fait surprenant que la cystine du sédiment de cette urine n’est pas, comme on pouvait s'y attendre, identique à celle des calculs, mais à celle des protéiques. L'organisme produit donc les deux cystéines par un mécanisme sur lequel on ne peut encore faire que des hypothèses. Voici celle que proposent les deux auteurs et qu'il ne serait pas impos- sible de poursuivre sur le terrain expérimental. IIS sup- posent que l'organisme produit d'abord un acide {hio- aminosuccinique (1), qui, par perte de CO? emprunté à l'un ou l’autre carboxyle, engendrerait, soit la eystéine des protéiques (I), soit celle des caleuls (II). On verra plus loin des exemples de semblables départs de Co*. COOH Cook | | CIP.SH CH.SH CH.SH | | | CH.AZH° CIL. Az? CH°.AzH° | | COOH COOH II I III Quoi qu'il en soit, l'origine protéique de la cystine urinaire chez le cystinurique, originequi n'avait jamais été. démontrée jusqu'à présent, devient très vraisem- blable, et la cystinurie consiste donc dans l'impuis- sance où se trouve le cystinurique de brûler complète ment le groupe cystine fourni par le dédoublement de ses albumines. Mais on est conduit alors à se demander si cette impuissance ne s'étend pas à d'autres d’entre les amino-acides résultant de la désintégration des protéiques. : En examinant dans cette direction les urines de leur malade, Loewy et Neuberg n'y ont rien trouvé d'anor- mal, ni amino-acides, ni les diamines (cadavérine, putrescine) signalées par Baumann dans l'urine des cys- tinuriques; mais ils ont constaté que le sujet est im- puissant à oxyder convenablement les amino-acides qu'on lui fait ingérer. D'abord la cystine des protéiques, —_ donc la même que celle que le malade éliminat, — introduite per os, S'ajoutait simplement à la cystine déjà perdue par l'urine, alors que l’on sait qu'à l’état normal l'homme détruit totalement une dose de 8 gram= mes de eystine‘. Au contraire, le sujet détruisait com- plètement la cystine des calculs, dont le soufre se retrouvait intégralement sous la forme de sulfates et de soufre urinaire neutre. La tyrosine, l’'asparagine, que l'organisme normal détruit et transforme en acide carbonique el en ammoniaque, et secondairement en urée, se retrouvaient en majeure partie inaltérées dans les urines. Les diamino-acides, lysine et arginine, n'étaient pas détruits non plus, mais seulement trans- formés. La lysine reparaissait dans les urines sous la forme de cadavérine ou pentaméthylène-diamine, c'est-à- dire qu'elle avait perdu CO®, et l’arginine sous la forme de putrescine ou tétraméthylène-diamine, c'est-à-dire après départ de CO* et du groupe uréogène. Ces constatations apportent avec elles plusieurs enseignements importants. La Revue® a signalé inci- demment un travail très intéressant d'Ellinger, qui à constaté que les bactéries de la putréfaction trans- forment l’ornithine®— c'est-à-dire, en définitive, l'argi- nine — en putresecine, et la lysine en cadavérine, en détachant simplement CO? de cés deux molécules. Les observations de Læwy et Neuberg démontrent aujour- d'hui que l'organisme — ou tout au moins celui du cystinurique — peut opérer la même réaction, véritable combustion interne, aboutissant à la formation d’une plomaïne, par une de ces réactions anaérobiques sur lesquelles A. Gautier a si fortement attiré l'attention CR PE — Gozpuann : Zeitschr. physiol. Chem., L. IX, p. 206. Voyez la Revue du 15 janvier 1903, p. 6. On sait que l’arginine est dédoublée, par hydratation, en ornithine et en urée. sw » abstraite de son milieu, des nécessités auxquelles elle des physiologistes. Constatons, d'autre part, que la tran: formation de l'arginine en putrescine implique que l'organisme a séparé de la molécule arginine, en mê temps que CO?, le groupe uréogène, réaction récem ment observée par Kossel et Dakin‘ sous l'influen d'une diastase spéciale, l'arginase. Il était intéressai de constater que ces réactions, signalées commenst passant 14 vitro et dans des conditions spéciales, s'ac complissent aussi dans l'organisme. { On doit se demander, en outre, pourquoi le sujete question, qui était capable de brûler complètement monoamino-acides (tyrosine, asparagine) et les di& mino-acides arginine, lysine) résultant du dédouble ment de ses albumines, ne détruisait plus, ou seule ment d'une facon incomplète, ces mêmes acides, Intn@ duits directement dans l'organisme. Serait-ce done q la dégradation des albumines ne passe pas dans l'orga nisme par ces produits? Les auteurs espèrent pouvoi aborder expérimentalement ces questions en faisanl ingérer à leur sujet des polypeptides* de plus en plus compliqués, puis des peptones, et enfin des albumines et en observant à partir de quel degré de complicatiol des molécules ainsi ingérées cessera l'élimination d'amino-acides par les urines. Le cas en question montre aussi qu'il existe des degrés dans la cystinurie. Le malade de Lœæwy et Neur berg n'excrétait pas de diamines. Au contraire, dans les cas graves observés par Baumann, la cystinurie ét compliquée de diaminurie, c'est-à-dire qu'à l'impuis sance de brüler la cystine s'ajoutait encore celle d'oxyder des diamino-acides, comme la lysine et l'argi nine. C’est donc bien dans l'intimité mème des problèmes de la désintégration pathologique des albumines que nous introduit l'étude de la cystinurie. $S 5. — Enseignement A propos d'enseignement. — On a traité d l'enseignement scientifique au Musée pédagogique; 1 lecteurs de la Æevue ont été mis au courant de © discussions par l'article d’'Ascoli. On avait trail l'année précédente, d'enseignement secondaire général à l'Ecole des Hautes-Etudes sociales. Je vo drais parler des rapports qui existent entre ce qui s dit ici et ce qui s'était dit là. $ Rapports fort étroits, je crois qu'on aurait tort l'oublier. Nulle branche de l'enseignement ne peut èbt est contrainte par la présence des autres. Les conféren ciers du Musée pédagogique nous ont signalé des I cunes et proposé des réformes dans l'enseignement des Sciences mathématiques et physiques. Je ne crois pd qu'on puisse combler ces lacunes el réaliser ces réformt d'une manière satisfaisante en s'adressant à cel ense gnementseul. Les causes quiont agi sur lui, qui, pendan si longtemps, l'ont rendu abstrait, l'ont éloigné de l'ex périence et de la réalité, ont manifesté leur action su toute sorte d'autres points : non seulement — nou reviendrons tout à l'heure — par la place déplorab ment insuffisante qui lui était faite où par l’exclusio plus complète encore des Sciences naturelles, par P& clusion absolue de la Géologie, mais d’une mamiè beaucoup plus étendue et plus générale ; car lens gnement littéraire, pas plus que l'enseignement sciel tifique, pas plus, en un mot, que tout ce qui s'est fait lycée jusqu'à ces derniers temps, n'a été exempt mèmes tendances. Partout se retrouve cet esprit toire, verbal, formel qu'ont si bien caractérisé, al Hautes-Etudes sociales, MM. Seignobos et Lanson: La seule différence est que, dans un cas, la natuk du mal et celle du but à atteindre ont été unanimi ment reconnues, tandis que, dans l’autre, d'étran divergences existent sur ce point. Beaucoup de lecteur 1 Voyez la Revue du 15 janvier 490, p. 21. > Voyez la Revue du 30 janvier 1905, p. Lire + mont pas besoin qu'on leur montre dans l’enseigne- ment littéraire — pour me borner à cet exemple — les ffets du formalisme. Peut-être auront-ils, comme moi, eine à comprendre la persistance avec laquelle beau- coup d'autres se refusent à admettre cette action, et évrai-je m'excuser auprès des premiers si je m'at- arde un instant à m'expliquer vis-à-vis des seconds. … Ceux-ci, notons-le bien, sont les plus ardents à pro- urs n'est pas aussi mort qu’on veut bien le dire, mais iste des ouvrages portés au programme n'a sensi- ement pas changé, du moins en ce qu'elle a d'étrange ; quelques-uns des plus saugrenus, la Lettre à l'Aca- mie, par exemple, ne sont nullement abandonnés les professeurs de première, comme on dit aujour- ui, — de rhétorique, comme on pourrait, hélas! rt légitimement continuer à dire le plus souvent. Non seulement les conséquences de l'esprit de for- nalisme subsistent presque aussi nombreuses que par passé, mais il me semble que cet esprit lui-même bien vivant. Je n’en veux pour preuve que les con- dictions violentes rencontrées, dans un auditoire iversitaire, par MM. Seignobos et Lanson lorsqu'ils at abordé ce sujet. J'ai trop vu nier qu'il y eût quoi que soit à changer pour croire que le changement soit trepris d’une manière bien active. t puis, je ne vois pas qu'on ait cessé d'invoquer la ulture générale » pour l'opposer à l'esprit « tech- e et utilitaire ». L'emploi de cet argument, sur la ur duquel les lecteurs de la Æevue sont évidem- ent édifiés après l'article d'Ascoli, est assez significa- MP à lui tout seul. En lui, le formalisme revit tout entier. Non pas, entendons-nous bien, que, pris à la lettre, ibne renferme un sens profondément juste. Ce n'est pas à l'utilité en soi de telle ou de telle connaissance il faut mesurer son importance dans l'enseignement, mais à l'influence qu’elle exerce sur le développement £ Lis CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 193 de l'esprit. Si c'était cela que les partisans de la cul- ture générale voulaient dire, je ne sais s'ils rencontre- raient des contradictions, mais ce ne serait pas de ma part. Seulement les mots « culture générale », pour l'im- mense majorité d'entre eux, signifient tout autre chose : ils s'appliquent précisément à tout ce qui est le plus oratoire et le plus formel possible, pendant que « technique » et «utilitaire » désignent, en fait, tout ce qui s'éloigne de cet idéal. x Sont ainsi baptisées, par exemple, les sciences de toute espèce, sans qu'il soit possible de comprendre — si les mots conservaient leur sens — quelle significa- tion cela pourrait avoir. Tant que des aphorismes de cette espèce auront cours, le formalisme ne sera pas mort, et, tant qu'il en sera ainsi, je crains que l’enseignement scientifique ne puisse pas être amené au point où nous voudrions le voir. Il y a dans les choses une harmonie qu'on ne peut rompre à volonté. Au reste, cette impossibilité s'est déjà présentée dans les discussions du Musée pédagogique sous une forme tout ce qu'il y a de plus tangible et évidente. À toutes les réformes qui ontété successivement mises en avant, qu'il s'agisse de l'introduction, si profondément néces- saire, de la méthode heuristique ou de la multiplication des expériences en Physique, une mème objection a été, en général, fort justement opposée : c’est l'insuffi- sance de temps. Seulement ce n’est pasla méthode heuristique seule, c'est tout enseignement véritable qui est impossible de ce chef, aujourd'hui encore, dans certaines classes. Je ne vise pas, en ce moment, celles de Mathématiques élémentaires et spéciales, où la question de l'encom- brement des programmes, qui a, d’ailleurs, été discutée au Musée pédagogique, se pose autrement; mais du début de l'enseignement, de l'enseignement des sciences dans les classes de lettres (principalement dans la section À du premier cycle, dans les sections A et B second), sur lequel on à une tendance naturelle à s’ar- rêter un peu moins, ef qui a, en réalité, une très grande influence. Par cela seul qu'il est le premier en date, ses défectuosités ne sauraient être indifférentes. C'est sur ces médiocres fondations que devra s'édifier l'enseignement ultérieur, lorsqu'il existexra ; et, pour la majorité des élèves, il n’existera pas; ce sont même ceux qui en sont privés que beaucoup de gens consi- dèrent, à l'exclusion des autres, comme ayant reçu la culture universitaire. À On sait dans quelle ignorance profonde de toute idée scientifique ils ont été tenus jusqu'à présent. Ici encore, devons-nous parler au passé, et le nouveau plan d'études a-t-il notablement amélioré les choses? On l'a beaucoup dit et cela a été posé en principe un peu partout. Mais cela ne me parait pas aussi évident en fait. Pour les Mathématiques, il y a recul (1 heure en quatrième, seconde et première, 2 heures en troisième, au lieu de 1 h. 1/2 et 3 heures); et il ne me parait pas que l'heure unique ajoutée en quatrième pour les Sciences naturelles compense efficacement ce recul. Pour la Physique, le temps total est le même, avec une autre répartition qui permet de consacrer à cette étude... 1 heure en seconde et en première. L'habitude que nous avons tous de cet état de choses est-elle assez forte pour qu'un tel « progrès » paraisse suffisant à quelques-uns ? 1] faudrait, à mon avis, pour en juger ainsi, oublier les conditions que doit remplir n'importe quel enseignement, lorsqu'il s'adresse à des enfants. Rappelons nos souvenirs d'écoliers. Nous avons tous appris des déclinaisons, des conjugaisons et des règles de syntaxe; mais quelle fraction du temps représentait l'indication et la récitation pure et simple de ces quelques pages de grammaire ? À quoi aurait été réduite l’année d'enseignement, si elle n'avait con- sisté qu’en cela? A quelques semaines, sans doute. Le reste était employé à une série d'exercices, où les règles \ 194 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE étaient perpétuellement ramenées, où chacune d'elles élait rappelée à vingt reprises par les applications qu'on en faisait. Et quand une année avait ainsi passé, le professeur de l'année suivante ne comptait guère sur le savoir ainsi acquis : il recommencait sur nouveaux frais, faisait reprendre en majeure partie les mêmes pages, prodiguait de nouveau exemples et applications; et c'est seulement au bout de cinq ou six ans de ce régime qu'on se flatte, quelquefois à tort, d'en avoir retiré quelque fruit. Cela suffit — mème en admettant que les classes littéraires prennent un peu trop leur temps — pour faire comprendre qu'un enseignement comme celui des Mathémaliques — pour ne parler que d'elles — dans les sections À et B, où le professeur dispose d'à peine plus de temps qu'il n’en faut strictement pour faire son cours sans flâner en route, où il est obligé, chaque année, de continuer (et non de faire revoir) le cours de l’année précédente, n'a pas d'existence réelle. L'étonnant est qu'il n'y ait pas, avec ce système, plus d'élèves encore « fermés aux Mathématiques ». Et les projets de loule sorte que l’on forme en vue de rendre cet enseignement plus fécond et plus éducatif me paraissent un peu puérils dans de pareilles condi- tions. Il faut donc espérer que lon donnera — et sans trop tarder — satisfaction au vœu exprimé par plusieurs professeurs de l'enseignement secondaire, et qui tend à modifier cel état de choses, vœu auquel on ne peut reprocher que sa modération excessive. Si important qu'il soit, je ne voudrais pas insister plus longuement sur ce point, — les faits parlent au reste suffisamment pa eux-mêmes; — je ne voudrais pas qu'on réduisit à cela la véritable question. 11 faut, certes, combattre à tout prix le système qui consiste à traiter les sciences, — et souvent tout ce qui n’est pas l'enseignement littéraire ou philosophique, — comme une quantité négligeable. Ce système est encore sou- tenu aujourd’ hui par une foule d'écrivains pé “dago- giques, mais il n'est, chez eux, qu'un des aspects du formalisme. La lutte n’est pas entre l’enseignement lit- téraire et l'enseignement scientifique : elle est entre deux facons de concevoir tout enseignement. Jacques Hadamard, Professeur suppléant au Collège de Frarce. $S 6. — Sciences diverses La dépréciation du métal argent'. — La pro- duction de l’argent n'a jamais cessé d'être bien supé- rieure à celle de l'or; c'est là, d'ailleurs, la raison principale de Ja différence de valeur entre les deux métaux. Depuis la découverte de l'Amérique jusqu'en 1903, y compris, il a été extrait 288.295.337 kilogs d'ar- gent contre 46.471.822 kilogs d. or, soit dix-sept fois et demie plus d'argent que d’or. Le rapport entre les pro= ductions annuelles à naturellement beaucoup varié, sans que pourtant, au cours de cette longue période, la proportion des valeurs s'écartât beaucoup du pair de l'Union latine, soit 45,5. Du moins en fut-il ainsi jus- qu'en 1873. De 1873 à 1903, la moyenne annuelle de la production de l'or passe de 174.000 kilogs à 445.000 kilogs, soit un accroissement de 156 ‘/, ; la moyenne annuelle de la production de largent s'élève de 1.969.000 kilogs à 5.319.000 kilogs, soit un accroisse- ment de 174 0/0, Malgré la faible différence de propor- tion dans les quantités extraites, le rapport des valeurs monte cependant jusqu'à 39,1 à fin 1902. Quelles sont les raisons de ces deux phénomènes économiques? Cest qu'autrefois, par le fait de bas salaires, de tran- sactions peu importantes et peu étendues, la richesse publique était faible, l'argent plus recherché que l'or, aussi bien par le monnayage que par les besoins indus- ! Cf, les Fapports des Directeurs de l'Administration des Monnaies de France el des Etats-Unis; la /evue ccono- mique internationale du 15-20 janvier 1905: l'Economiste francais des 5-12 novembre 1904. triels. Il en fut ainsi pendant des siècles, tant que science ne vint pas transformer l'industrie en en chissant brusquement la société et en retournant conditions précédemment exposées hausse des salaires, développement des échanges, accroissement de la richesse générale. D’autres phénomènes écon miques Se encore dans le sens d'une dépréciati de l'argent. C'est, de 4871 à 1875, l'adoption de létal d'or par l'Allemagne et les Pays scandinaves; de 18% à 1880, la suspension de la frappe de l'argent dam l'Union latine et les Pays-Bas; de 1891 à 1900, l'adoy tion de l’étalon d'or par l’Autriche-Hongrie, la Russie le Japon et les Etats-Unis, el la suspension de la frtppl de l'argent aux Indes. Cette préférence pour l'or vient de ce qu'il est la monnaié la plus portative, la plu précieuse et, par conséquent, la mieux adaptée at besoins des pays où Ja richesse est plus grande, le prix et les salaires plus élevés. ‘ L'avilissement de l'argent à produit une rupture di pair du change entre Elats à étalon d'or et Etats étalon d'argent, et à eu des effets particulièremen TagLEau |. — Production et cours du métal argent de 1871 à 1902. PRODUCTION COURS DE L'AR- ) | moy.annuclles| RAP- GENT RAP-] en à Londres à milliers de kges)| PORT (en deniers) PORN ANNÉES 4 | CR ne des RL des W de l'or [de l'ar-| poids | maxi- | mini- | valeurs] gent mum munm , 1811-1875 . . . 174 |°1,969| 44,3 1876-1880 . 167 | 2:14961.43,2 1881-1885 . 154 | 2.661| 17,3 1886-1890 . rien) 1891-1895 . 245 | 4.921| 20,0 1896-1900 . 381 | 5.154| 13,2 || 1901 395 | 5.3652| 13,6 | 1902 445 | 5.19%| 11,7 11080 : 494 | 5.381! 10.9 1904 (10 mois). » » » funestes sur le commerce du monde. Les pays argel tistes ont pu croire un moment que la baisse d change les faisait bénéficier d'une protection contre importations étrangères et d’ une prime à l'exportatio «le leurs propres produits. Ce n'était là qu'une illusio dangereuse, qui aboutit à l'appauvrissement du pays élalon d'argent. On a calculé, ainsi, que le Mexiqu faisait cinq fois plus d'efforts et de dépenses pol obtenir seulement trois fois plus de produits d'échang La gravité de cette situation n'a pas échappé at deux grands pays producteurs d'argent, les Etats-Un etle Mexique, qui ont nommé chacun une Commissic d'enquête, chargée d'insister auprès des Gouvernemen européens sur la nécessité de s'associer pour une actll commune en vue d'arriver à la stabilité du changem résultat de cette consultation est que cette stabili pourrait être obtenue en suivant une politique un forme dans les achats d'argent nécessaires à certa moments pour la frappe des monnaies, en adoptant rapport de valeur entre l'or et l'argent plus confoni aux conditions actuelles, tel que le rapport de 32 à enfin, en suspendant la frappe libre partout où existe encore. Ces nouvelles mesures ue appliq en ce moment aux Straits Settlements, dans lin Chine française, aux îles Philippines, dans la » blique de Panama et au Mexique. De plus, le noue système monélaire de ces trois derniers pays est sur l'étalon d'or. La hausse continue du métal argenl pendant l’année 1904 peut être regardée comme um conséquence heureuse du nouvel élat de choses. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du 2 D' E..JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE 195 } { HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE Respeclueuse à l'excès du passé, la Chine ne rogresse plus depuis bien des siècles. Qui par- | court le Yunnan, en relisant les descriptions du | célèbre voyageur Marco Polo, contemporain de “Saint-Louis, reste convaincu que la physionomie “du monde chinois ne s'est guère modifiée depuis ‘six cents ans. Comme en Occident,au Moyen-Age, les moindres villes et même les bourgades de l'Empire sont encore aujGurd'hui entourées d'une enceinte crê- nelée d'aspect formidable, mais qui ne tiendrait pas une heure contre le canon moderne. Les routes qui relient les différents centres et même celles qui traversent la Chine de part en part, de- buis Pékin jusqu'aux frontières indécises, ne sont à proprement parler que des pistes. Tantôt elles s'élargissent démesurément et se subdivisent en une infinité de ramilicalions entre lesquelles le voyageur hésite, tantôt elles se réduisent à leur plus simple expression, un sentier, par exemple, qui couronne un talus de rizière. Le soin de réparer la “route est laissé à l'inilialive des riverains, et l'on “peut êlre assuré qu'ils y mettent beaucoup de discrétion. L'unité de plan dans le tracé des routes fait donc totalement défaut. Parfois même des solu- Chevaux chinois, dont le pied est d'une sûreté mer- eilleuse pour progresser sur l'argile glissante, en- foncent dans les fondrières jusqu'aux jarrets et durant la saison sèche. Des ponts suspendus ou même des ponts de pierre franchissent Îles “Brands fleuves; mais les cours d'eau de moindre | | | . di 2e « —! Les notes qui ont servi à rédiger cet article ont été recueillies au Yunnan, province de la Chine méridionale. | | | Aux abords des villes, des faubourgs populeux s'alignent le long des voies les plus fréquentées. Là s'enlasse, dans des demeures exiguës et sordides, la population pauvre. On y voit de vastes caravan- sérails, où les muletiers chinois, à bon droit dé- fiants, couchent sur leurs charges auprès de leurs bêtes. Les murailles des villes, dont l'importance au point de vue militaire est problémalique, ne sont pas sans utilité. Elles mettent les citadins paisibles à l'abri d'un coup de main, elles les protègent contre les brigands et les malandrins qui tiennent la campagne et lèvent des tributs. Contre ces bandes armées, que peut le mandarin, fonclionnaire im- puissant, qui n’a sous ses ordres qu'une force mili- laire dérisoire et suspecte! Un coup de canon est tiré à la tombée du jour: à ce signal, on ferme les portes de la ville. Dès lors, et pendant toute la nuit il n ya plus de communicalion avec le dehors, en théorie du moins. Mais, si l'étape a été longue, si vous arrivez après le coucher du soleil, ne per- dez pas courage, faites tinter un taël à l’oreille du portier : l'effet sera magique et les lourds vantaux, grinçaut sur leurs gonds, vont s'ouvrir devant vous comuwe par enchantement. Mais il n’y a pas sur cette terre bénie qu'à se défendre contre l'ennemi du dehors ; il faut aussi se garder de l'ennemi du dedans, de l’humble vo- leur qui opère sans gloire, la nuit venue. A celui-ci, la vigilance des autorités rend la profession dure el périlleuse. Non content d'emprisonner les habi- tants toute la nuit, par sollicitude pour leurs biens et pour leur personne, le mandarin prescrit de fermer, vers neuf ou dix heures du soir, les portes intérieures qui isolent chaque quartier l'un de l'autre. Il est même des villes où les rues prinei- pales sont closes à chaque extrémité. Qu'un indi- vidu soit surpris en train de dérober, aussitôt le centenier donne l'alarme et chacun de son mieux s'emploie à trouver le voleur. La justice n’est pas tendre pour l'infortuné qui a la maladresse de tomber dans ses mains, surtout s'il ne sait pas la fléchir par un argument sans ré- plique. En pénétrant du Tonkin en Chine, l'un des premiers objets qui attira mon attention sur la route de Mongtsé fut un mât auquel était appendue, à deux mètres du sol, une corbeille en natle propre- ment tressée. J’eus la curiosité de me hisser jusqu'à elle pour en saisir le contenu. Ma main rencontra une masse froide et gluante dont je ne compris pas tout d’abord la nature. Poursuivant mes investiga- tions, je dégageai une lêle d'homme récemment 196 D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE coupée. C'était celle d'un détrousseur de caravane que l’on avait exécuté sur le lieu du crime, disait une inscription destinée à servir de salutaire aver- tissement à ceux qui ne marchent point d'un pas ferme dans le sentier de la vertu. Sitôl que le voyageur à franchi les murailles d'une cité chinoise, s'offre à ses yeux un lacis de rues étroites, pavées de larges dalles inégales el glissantes. Les cuisines établies en plein vent répandent une odeur de friture qui se mélange au fumet de l’opium. Les étalages de boutiques étroites et profondes débordent jusqu’au milieu de la chaussée, si bien que dans les voies les plus larges, celles qui ont 4 à 6 mètres, à peine reste-t-il un passage de 1,50 pour la circulation. La foule, très dense dans les rues commerçantes, se coudoie sans laisser la moindre place libre. Elle est peu bruyante; cependant, de temps à autre, les cris ou les coups de clochettes des mar- chands ambulants, les avertissements brefs et impé- rieux des porteurs de chaise, les aboiements des chiens à demi-sauvages et très agressifs pour l'Eu- ropéen, animent celte masse humaine peu expan- sive. Chaque profession, chaque corps de métier, comme en Europe au bon vieux temps, occupe de préférence une rue ou même tout un quartier. Cependant, pour la commodité, les boutiques des pharmaciens et des changeurs sont disséminées un peu partout, et en grand nombre, car le Chinois, le prototype du matérialiste, ne désire rien tant que santé et richesse. Les marchands n'ouvrent leurs boutiques que fort avant dans la matinée, vers dix heures seulement. Le réveil est pénible, car il faut cuver l’opium, dont l'usage est universellement répandu. Voilà le cadre dans lequel se meut la vie maté- térielle chinoise. Celui-ci connu, on devine aisément ce que doit être l'hygiène publique et privée en un tel pays. Dans une capitale comme Yunnan-Sen, où vivent 70 à 80.000 habitants, c’est à peine si quelques char- rettes à bras circulent par la ville pour recevoir les immondices. En réalité, ce sont les chiens et les pores qui sont chargés du service de la voirie. Et cependant, au milieu des détritus de toutes sortes qui couvrent la boue noirâtre des rues, on ne voit trainer aucun chiffon de papier. L'écriture, en effet, est tenue en grande vénéralion par les Chi- nois ; les caractères d'imprimerie sont en quelque sorte sacrés. Aussi a-t-on coutume de jeter les feuilles écrites, hors d'usage, dans des corbeilles accrochées aux façades des maisons. A certaines petits fours crématoires spécialement deslinési cet acte religieux. Dans celte même capitale, il n'existe pas de canalisalion pour l'eau, qu'on soutire de puits vaseux. Il n'y a pas non plus d'égouts, car on ne peut donner ce nom à d'étroits caniveaux toujours engorgés, toujours débordants d'une boue fétides qui s’épand au dehors par les fissures des dalles de recouvrement à demi-brisées. Aussi, qu'une pluie d'orage s'abatte sur la ville, et sur-le-champ Ja rue est transformée en un véritable ruisseau char riant des ordures et des charognes. La vidange se fait en plein jour, au moyen de seaux de bois non couverls. Des industriels onb établi à leurs frais, sur les voies les plus fré quentées, des communs gratuits. C'est là, parait il, une entreprise d'un excellent rapporl; car Je paysan chinois prise beaucoup l’engrais humain avec lequel il fume ses champs. Le feu se propage avec une exlrême rapidité dans les villes chinoises, car les maisons sont er majeure parlie construites en bois. De grandes cuves en pierre, destinées à recueillir les eaux dé pluie, sont disposées de distance en distance danSm les quartiers populeux. Voilà tout ce que la pré voyance administrative oppose au fléau. Les habitants vont y puiser eux-mêmes en cas d'incendie, car il n’y a pas de corps de pompiers Trop souvent ces cilernes sont à sec, et d’ailleurs elles sont dépourvues de tous les engins qui perz mettraient d'en extraire l’eau avec promptitude. Les cimetières, en Chine, sont toujours situés hors ville, non par mesure d'hygiène, mais parce que les ombres se plaisent loin des bruits terrestres et parce que les vivants redoutent les maléfices des trépassés. Les tombes sont disséminées, soit dans un champ familial, qui, par cela même, devient sacré et inaliénable, soit dans des terrains vagues et inculles ou sur les flancs des montagnes. Les sépultures ne sont donc pas groupées dans enclos; elles sont jetées aux quatre points card naux, suivant les indications du géomancien. S défunt n’est pas enterré suivant les règles, il & venge sur sa postérité; de là des exhumations su cessives, où l'hygiène ne trouve pas son compt@m jusqu'à ce que l’on ait enfin découvert l'orientation convenable. À proximité des villes, il n’est pas rare de voir des bières posées simplement sur les sol ; elles séjournent là des mois entiers au gran ait prononcé son arrêt. L’Assistance publique, comme bien on pense, @ des plus rudimentaires en Chine. Cependant, cha . à L que province prélève sur le produit de l'impôt une k certaine somme pour entretenir des hospices. Celui Mde Yunnan-Sen est situé à l'extrémité du faubourg “Sud et par conséquent hors des murs. Il se compose “d'une série de constructions n'ayant qu'un élage; au centre, trois corps de logis disposés en profon- “deur; de part et d'autre de ceux-ci, cinq longs “bâtiments qui encadrent les premiers. Ceux-ci - recoivent les malades qui vivent en salle commune. “Les seconds sont divisés chacun en une vinglaine ’élroits compartiments éclairés par une baie grillée. Chaque cellule devrait contenir au plus deux ou trois personnes, mais souvent la famille tout entière de l'hospitalisé s'y entasse. La sordidité de ces laudis obscurs, toujours remplis d'une fumée “aveuglante, est incroyable. Chacun fait sa cuisine chez soi, chacun se meuble à sa guise, et, comme tout Chinois lient à s'assurer le confortable en l'autre monde, le premier soin de l'occupant est de se procurer, S il le peut, un cercueil, objet de con- “voitise pour ses voisins moins fortunés que lui. La population de l’hospice de Yunnan-$Sen est fficiellement de 800 malades, et ce chiffre ne me arait pas exagéré, car aucune cellule n'est vide. Sur ce nombre, la moitié environ sont des aveugles, wictimes de la variole, mais plus souvent encore de cette ophtalmie, de cause inconnue, si fréquente eu Yunnan et en Indo-Chine. Des vieillards infirmes, … des éclopés, quelques lépreux, quelques paraly- iques, bref lout le déchet humain d’une grande ité, se trouvent réunis dans celte cour des Mi- acles. Aucun médecin, aucun être charitable, ne visite “ce refuge, dont les pensionnaires sont privés de k ous soins médicaux. Un gardien, sous les ordres k un mandarin, est chargé de surveiller cette agglo- Minéralion assez lurbulente, et de présider à la dis- “tribution des vivres qui sont apprèlés par les malades eux-mêmes. A jours fixes, des portions entières et des demi-portions sont délivrées à des malades indigents qui logent hors de l’hospice. … L'infanticide, dans certaines provinces de Chine, est élevé à la hauteur d'une institution. Les mora- listes chinois ont essayé, mais en vain, d'abolir cette barbare coutume, qui, en certaines régions, xoue à la mort la plupart des filles. Depuis les temps les plus reculés, dès le vi° et même le xn° siècle avant l'ère chrétienne, le Gouvernement impérial entrelient des « Temples de nouveau- nés », où des nourrices, payées par l'Etat, allaitent les enfants trouvés. … Malheureusement, ces établissements d'assis- tance rendent peu de services, et l’on estime qu'à Pékin les trois quarts des enfants secourus succom- bent faute de soins. Au Yunnan, les habitants n'abandonnent pas leurs enfants; aussi n'y a-t-il Le D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE 197 pas dans cette province de lo in tang (Hospices d'enfants trouvés)’. Voilà pour l'hygiène publique. L'hygiène privée du Chinois n’est pas meilleure. Pour savoir comment il la comprend, pénétrons à l'auberge, le seul lieu où l'Européen puisse à loisir observer le Jaune. Une voûte large et basse, sous laquelle s'engagent les mulets et les chaises, conduit dans une cour intérieure toujours très encombrée. On y voit des fourneaux en plein air, où chacun fait sa cuisine, un puits dont on extrait une eau chargée d'argile, de vastes cuves où tous les gens de l'auberge, voya- geurs, porteurs ou muletiers, puisent avec de grandes cuillères de bois. À l’arrivée d'une cara- vane, c'est un brouhabha indescriptible. Cà et là les bâts et les charges sont posés au hasard sur le sol, et au milieu de tout ce désordre circulent des muletiers qui jurent, des bêtes qui ruent et des pores qui grognent. Enfin, le calme renait et les pauvres bêtes au dos tout meurtri (car le mafou yunnanais ignore le tapis de selle et de bàt) vont d'elles-mêmes aux râteliers et aux mangoires qui, de chaque côté de la cour, alternent avec des réduits où couchent les muletiers. Les écuries ne sont pas closes; elles sont seulement protégées contre la pluie par l'étage qui les surplombe, de sorte que le voyageur européen, dont l’odorat est plus susceptible que celui du jaune, est fort incom- modé par les senteurs animales qui remplissent toute l'auberge. Le fond de la cour est souvent occupé par une ou plusieurs pièces réservées aux mandarins de passage ou aux étrangers de marque. Au-dessus de cet appartement el des écuries règne un étage en bois, toujours peu élevé et rarement plafonné. Il est divisé en plusieurs dortoirs, ayant pour tout mobilier des lits de camp sur lesquels lrois à six personnes dorment côte à côte, dans une atmosphère alourdie par les fumées de l'opium. Entre la planche du lit de camp et la natte est interposé un paillasson assez épais, roulé en tra- versin au niveau du chef, de sorte que cette couche, sans être moelleuse, serait acceptable pour l'Euro- péen, si toule la vermine de la création ne s'y don- nait pas rendez-vous. L'auberge cesse d'être bruyante vers onze heures du soir, mais le remue- ménage recommence dès cinq heures du matin. Vous vous disposez donc à profiter de ce court 1 Je tiens ces renseignements de deux missionnaires, le P. Le Guilcher (de Talifu) et le P. Pitou {de Tapinsé). 2 ]1 y a deux classes d'auberges: 1° le Ma Tien (litt. auberge de cheyaux), où les muletiers sont logés et nourris pour 50 sapèques par jour; la pension des bètes de somme est de 100 sapèques, soit le double de celle des hommes ; 20 Je Tien tsé, où descendent les mandarins, et les gens de condition aisée. Le prix est de 80 sapèques par nalte, nour- riture comprise. 198 D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE répit pour dormir. Mais à peine avez-vous fermé les paupières, bercé par le bruit de machoires mono- tone et régulier des bêtes, que vous êtes réveillé en sursaut. C'est un Chinois excédé par les piqûres des moustiques ou des poux qui se lève en mau- gréant pour secouer sa natte dans la cour, ou bien cest quelque galeux qui s’étrille fébrilement le cuir jusqu'à ce qu'il succombe au sommeil. Vous percevez très netlement toules les phases de ces pelits drames intimes, à travers les minces cloisons qui séparent les pièces adjacentes ; aussi le voyageur novice passe-t-il bien des nuits blanches ! Dans la plupart des auberges, il n'y a pas de communs : c'est la porcherie qui en tient lieu. Quand ils existent, ils sont réduits à leur plus simple expression : c'est une rigole creusée le long d'un mur, au-dessus de laquelle une demi-douzaine de Chinois s'accroupissent de compagnie, car il ne leur répugne nullement de satisfaire leurs besoins naturels aux yeux de tous; ou bien c’est une fosse recouverte d'une simple celaire-voie de bambou percée d’orifices de distance en distance ; ou bien encore une excavation béante que franchit une planchette mal assujettie sur laquelle un jaune seul est capable de se lenir en équilibre. La demeure du mandarin ne vaut guère mieux que l'auberge au point de vue de l'hygiène. Sans doute, elle est de plus belle apparence, mais elle n'est ni plus confortable, ni plus saine. La maison chinoise, par ses dispositions principales, rappelle l'habitation gréco-romaine. Tous les appartements prennent jour sur une cour intérieure encadrée d'un portique. Les pièces d'apparat, toujours situées au rez-de-chaussée, ne sont fermées que par des vanlaux de bois, au nombre de six à huit, qu'on ouvre les jours de réception pour que le publie, massé dans la cour, puisse assister à l'audience comme à un spectacle. Bien différentes sont les pièces réservées à l'habitalion privée. Petites, à demi-obscures, elles ne prennent jour que par une étroite fenêtre, dont le panneau à celaire-voie peut êlre fixe ou s'ouvrir à la facon d'une tabatière. Jamais le soleil ne visite ces chambres, qui ne sont pas élevées sur cave; aussi sont-elles très humides. Les coucheltes sont disposées sur des estrades en bois, exhaussées de 20 à 30 centimètres seulement au-dessus de la terre battue. La literie est des plus sommaires. Le Yunnanais dort tout habillé, à peine défendu contre Ja fraicheur des nuits par une couverture ou un couvre-pied doublé d'ouate. La maison chinoise est si mal close que le confinement de l'air n'est pas à craindre. Bien au contraire, par les portes mal jointes, par les claires-voies recouvertes d'une mince feuille de papier de riz presque loujours en lambeaux, l'air se renouvelle sans cesse et souvent même avec excès. L'hiver, la température est assez fraîche, surtout la nuit, et, comme les maisons sont dépour= vues de tout appareil de chauffage, les bronchiles" a [rigore sont fréquentes. IT Le Chinois, mème celui de la plus basse condi= Üon, prend un certain soin de sa personne. Dès l'arrivée à l'étape, le muletier et le porteur de chaise réclament de l’eau chaude. Le cuir du jaune résiste à des températures que la peau du blane ne» saurait supporter. Aussi le Chinois fait-il usage d'eau presque bouillante, ce qui a le double avan- tage de dissiper la fatigue et de mieux débarrasser le tégument de la graisse et des débris épider… miques. 4 Les pieds, toujours souillés et meurlris, car ils: ne sont protégés que par des sandales en paillas- son, sont l'objet de soins particuliers; les bras et les jambes sont lavés à grande eau, et souvent" même une ablulion générale termine cette toilette du soir. Le malin, au réveil, le Chinois se passe un linge humide sur le visage, il se rince la bouche, se fric= tionne les dents avec un chiffon, et se lave les narines. . Malgré ce souci de la propreté corporelle, forts répandu, même parmi les coolies, la phtiriase et la gale sont, en Chine, d'une extrême fréquence. Cela tient à deux causes : la première, c'est que le Chinois n'a pas de linge de corps; la seconde, c'est qu'il ne peut neltoyer ses vêtements sordides, faute de savon”. Une fois par semaine, le Chinois se fait raser le pourtour de la tête. L'opération se fait sans dou= leur, grâce à l'adresse du barbier, qui n’a pourtant à son service qu'une lame grossière et mal affilées Les cheveux qui partent du vertex sont seuls réser= vés; ils sont enduits de cosmétique et lissés avec un gros peigne de bois, puis ils sont tressés en une nalle mince et longue qui donne aux races si diverses du Céleste Empire un air de famille. Cela fait, le barbier retire avec dextérilé, au moyen de petites curettes, le cérumen et les débris épithéliaux qui encombrent le conduit auditif. Sous vent aussi, il inspecte les culs-de-sac conjonclivaux en y promenant une pointe mousse pour en extrairés au besoin, les grains de poussière et les mouches rons. Ces instruments ne sont jamais aseptisés, ‘ Le savon de provenance européenne, même de la qu lité la plus inférieure, ne peut pénétrer au Yunnan, car SOn prix de revient est trop élevé pour que le Chinois (dont I dépense quotidienne n'excède pas la valeur de quelques sous) puisse se le procurer. Là D' E. JEANSELME — UYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE 199 aussi cette pratique me paraît elle très propre à propager les ophtalmies, dont j'ai déjà signalé l'extraordinuire fréquence. Un massage plus ou “ moins prolongé clôt dignement la séance. Les hommes du peuple sont presque tous habillés de grosse toile bleue, semblable à celle que portent “nos ouvriers parisiens. Leur vêtement se réduit à , une sorle de camisole dont les manches sont É flollantes, et à un pantalon très ample, maintenu “par une ceinture. Le couvre-chef varie suivant la dsaison : c'est la petite loque noire, toujours lui- “sante et grasse, autour de laquelle on enroule un - turban bleu on noir, ou bien c’est le vaste chapeau “pointu que la caricature a vulgarisé en Occident. … Les gens de condition aisée portentune longue robe “(le soie fendue sur les côtés et serrée au niveau de “la taille; par les temps froids, à ce costume léger “ils ajoutent un grand gilet ouaté ou doublé de “fourrure: des chaussettes blanches, sur lesquelles “le bas du pantalon est assujetti à l’aide d’un lien, “des pantoufles de soie ou de velours noir, dont …l'épaisse semelle de feutre n'a pas de talon, com- “plètent l'accoutrement du bourgeois yunnanais. “ Le costume féminin ne diffère pas sensiblement “de celui de l’homme. La Chinoise ne porte pas “de jupe, et son pantalon serré aux chevilles appa- “rail au-dessous d'un grand surtout qui descend _ jusqu'à mi-jambe. Ce qui la distingue de l’autre “sexe, c'est sa chevelure, qu'elle garde entière et “qu'elle réunit en chignon, et surtout la petitesse de ses pieds, suite d’une longue et patiente mutilalion. On ignore quelle est la raison d’être de cetle cou- “tume barbare dont l’origne remonte à une très haute antiquité. Toule mère, soucieuse de l'avenir de sa fille, préside elle-même à cette torture ou, tout au moins, en surveille l'exécution. À peine l'enfant a-t-elle trois ans qu'on s'applique, à l'aide de ban- dages compressifs, à enrouler les quatre derniers orteils autour du premier. A la longue, leur dévia- lion parvient à être telle que leur pulpe s'imprime dans la plante du pied, landis que leur face dorsale regarde le sol. - Diminuer le diamètre transversal n’est pas tout; il faut aussi s'opposer à son allongement. Pour ce faire, on s'efforce de le tasser. Lentement, par l'effet d'une compression savamment graduée, au prix de souffrances chaque jour renaissantes, les os du …larse glissent les uns sur les autres, la voûte plan- “taire s'excave et devient aiguë, tandis que la cam- brure du cou-de-pied s'exagère. Quand l’œuvre contre nature est parachevée, un sillon profond barre la voûte plantaire et sépare l'avant- -pied, sorle d'appendice informe, de la masse talonnière qui 1.- semble épaisse et massive paree qu'elle a gardé ses dimensions normales”. Quand les procédés de douceur n'atlteignent pas le but, la mère a recours à la violence. Fixant d'une main le talon de l'enfant sur son genou, de l'autre elle saisit l'avant-pied qu'elle lord sur son axe jusqu'à ce qu'elle obtienne l’élongation ou la rupture des ligaments de l'articulation médio- tarsienne. Le résultat désiré obtenu, il faut le maintenir. Comme le pied laissé en liberté tendrait à reprendre son développement interrompu, la Chinoise, toute sa vie durant, doit porter un bandage contentif qui se natte en spica au devant du cou-de-pied. Bandage et moignon sont contenus dans une petile chaus- sure découverte très effilée, dont la longueur, chez les élégantes, n'excède pas 13 à 15 centimètres. La paysanne elle-même ne renoncerait volontiers à celte coutume illogique. Obligée de vaquer aux rudes travaux des champs, elle préfère souffrir pour conserver la pelitesse de son pied, dont elle est très vaine, et traite avec mépris les robustes montagnardes qui laissent croître leurs extrémités au naturel. Les effets de cetle mulilalion sont beaucoup plus étendus qu'on ne saurait l'imaginer. Toute l'archi- tecture du corps humain en subit le contre-coup. La Chinoise n’a pas de mollet, car les masses musculaires qui actionnent l'articulation médio- tarsienne sont atrophiées ou, pour parler plus exactement, ne se sont jamais développées. Les os de la jambe n'alteignent pas leur longueur normale; peut-être mème sont-ils plus grêles, s’il est vrai, comme on l'a dit, qu'ils se fracturent faci- lement. C'est une règle, en effet, maintes fois véri- fiée, qu'une affection ostéo-articulaire, surprenant l'organisme en voie de développement, ralentisse la croissance du segment osseux immédiatement sus jacent au siège de la lésion. Cette brièveté des jambes est fort disgracieuse. La taille est située trop bas, le torse est comparativement trop fort, et les bras sont trop longs. Aux jambes étiques suc- cèdent des cuisses bien fournies, comme on peut le constater sur les repiqueuses de riz dont le pan- talon est retroussé jusqu'au pli de l’aine. Avec ses membres convertis en pilons noise marche de la cuisse, sans fléchir le genou pas , la Chi- 1 Depuis la rédaction de ce travail, M. Duval a publié dans le journal La Nature des radiographies très démons- tratives. Sur celles-ci, on constate que les métatarsiens el les phalanges des orteils sont réduits au tiers de leur volume normal et que l'extrémité postérieure du calea- neum est très abaissée, de sorte que cet os fait un angle droit avec le reste du pied. Ainsi s'explique l'encoche qui coupe la voüte plantaire. — M. Matignon à donné de fort bonnes figures du pied de la Chinoise dans Ja Nature (1897, 2e semestre, p. 313) et dans Superstition, Crime et Misère en Chine (Paris, Masson, 1899. 200 D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE d'une facon appréciable. Talonnant à pelits pas, les reins cambrés, la poitrine en avant, elle pro- gresse avec lenteur ettrébuche au moindre obstacle. Pour assurer ses pas chancelants, elle élargit d’ins- inct sa base de sustentation et elle écarte les bras du corps en manière de balancier. Quand elle s’ar- rète, elle oscille et s'accote aux murs pour éviter les chutes... Voilà en quel piteux élat la tyrannie de la coutume a réduit la femme chinoise! Heureusement, les Célestes n’ont point eu d'imi- tateurs. Les aulochtones, qui forment encore en plein Empire des îlots importants, les Annamites, les Taïs, les Birmans et les Japonais qui se récla- ment de la civilisation chinoise, enfin les conqué- rants mandchous qui ont adoplé les mœurs des vaincus, ne mulilent pas le pied de leurs femmes. On a beaucoup disserté sur la cause qui a pu pousser le Chinois à en user ainsi avec sa compagne. La plupart des explicalions qu'on a fournies de cette aberration ne méritent pas d'être reproduites. On a dit avec une certaine vraisemblance que l'homme, mû par un sentiment d'égoïsme jaloux, avait pensé relenir son épouse au foyer conjugal en lui infligeant celte torture. C'est bien mal con- naîlre la mentalité du jaune, qui, loin d'imposer la clôture à sa femme comme fait le musulman, la laisser circuler librement, du moins dans la basse classe. Ce qui me parait évident, c'est que la mutilation du pied fait parlie du groupe des déformations ethniques auxquelles nulle race n'échappe complè- ment. Le besoin de faire violence à la nature peut s'exprimer de diverses manières :allérer la forme du pied en est une, aplatir le crâne des enfants, comme le font les Aymaras du Pérou, en est une autre. Le Chinois a le goût inné du monstrueuxet de l’excessif. Il recherche les nains difformes et en crée au besoin. L'idéal du jardinier chinois est d'obtenir par divers procédés des arbres minuscules el contrefaits. Cette perversion du sentiment esthétique a bien pu faire germer dans le cerveau du Chinois l'idée de con- trarier le développement normal du pied. La muti- lalion une fois réalisée, un autre facteur est inter- venu, sans doute, pour l’acclimater et la perpétuer malgré son illogisme : c'est une déviation du sens génésique. En effet, la vue du pied et même du soulier de la Chinoise serait (au dire de gens bien informés) un grand inciltateur de volupté pour le jaune. Aussi la femme honnêle ne consentirait jamais à découvrir celte partie de son corps. A ses yeux, cel acte, impu- dique au premier chef, équivaut presque à l’adul- ère et mérite répudiation ‘. 1: Cette description du pied de la Chinoise est la repro- duction d'une Note qui vient de paraitre dans la Chronique Médicale du Dr Capanës. III Dire que le Chinois est tempérant est presque une banalité. La viande n'apparaît guère sur la table du travailleur qu'à de rares intervalles. Dans le con= trat que je passai avec mes muleliers et porteurs de chaise, je m'engageai, suivant la coutume, à fournir à chacun, une fois par semaine, une livre chinoise de lard ou de porc frais (600 grammes environ). Les autres jours, ces hommes vivaient à peu près exclusivement de riz, dont ils absorbaient, en deux fois, dix à douze bols par jour. Pour compléter leur menu, ils ajoutaient quelques pätes frites, quelques choux et autres légumes verls, des bananes, des pêches, des poires, des” noix, car les arbres fruiliers d'Europe croissent sous le beau climat d'altitude du Yunnan, qui est situé sur les confins de la zone lempérée. Pour les habitants de celle partie de la Chine, le lait est une sorte d'excrément; ils n’en boivent done pas; ils ont le même dégoût pour ses dérivés, le beurre et le fromage. Toutefois, dans les villages où l'élément musulman prédomine, ce qu'on reconnail au pre- mier coup d'œil, car on n'y voit pas vaguer le pore, l'animal immonde proscrit par Mahomet, le lait est d’un usage courant. Malgré ce régime, peu substantiel d’après les idées reçues, ces porteurs lourdement chargés four- nissent, sauf le jour du repos hebdomadaire, une élape quotidienne de sept à neuf heures, au milieu de marécages et de fondrières. Le paysan se nourrit essentiellement de riz, ou à son défaut de maïs 4 de fèves; il ne mange guère de viande que les jours où il offre un repas funéraire en l'honneur des An- cêtres; et cependant il est vigoureux et très endu=« rant. Ce qui le prouve, c'est qu'il arrive, par un labeur obstiné, à faire produire au même champ deux récoltes annuelles. Le riz est donc plus nour- rissant que le foin des prairies, contrairement à l'assertion de Boussaingault, et la Chimie biologiques a fort à faire avant d'avoir élucidé le problème de la nutrilion. Du reste, si l'homme du peuple se soumel à un régime aussi slrict, c'est par nécessité plutôt que par vertu. Le Chinois dans l’aisance faib bonne chère. Il absorbe chaque jour une quantité nolable de viande, en particulier du porc et de la. volaille; il se gorge de sucreries et de mets épicés: Comme il est sédentaire, il se laisse empâter par la graisse; loin de combattre cet embonpoint, il 1 recherche, car l'obésité lui donne un cachet d'aris= tocratie qui le distingue du plébéien dont le muscles saillent sous la peau. Comme l'homme prête à la divinité ce qu'il désire pour lui-même le Chinois a traduit d’une manière concrèle son idéal de bien-être par le poussah souriant et bedons nant dans sa graisse. £ D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE 201 _ L'énorme quantité de riz qui est la base de « l'alimentation des porteurs et muleliers est in- ë gérée en deux fois, le matin au lever et le soir vers cinq heures, en arrivant à l'étape. Ordinairement “le Chinois mange en silence et avec lenteur, comme il convient à un végétarien qui doit broyer et insa- liver une grosse masse de substance alimentaire. «_ Jamais il ne boit pendant le repas; mais, celui-ci terminé, il absorbe plusieurs bols de thé léger, qu'il “remplace au besoin par une infusion chaude quel- conque. L'eau presque bouillante est donc la bois- son favorite du jaune. En cours de route, dans les relais échelonnés le long de l'étape, il ne prend “que du thé, et cela en loutes saisons, car il sail par expérience qu'aucune autre boisson ne désal- “ière aussi bien. Pour que le dernier des coolies se “résigne à boire de l’eau froide, il faut qu'il y soit “contraint par la nécessité . L'Européen voyageant “en ces régions devrait suivre l'exemple de l'indi- gène. L'usage du thé est doublement utile : d'abord c’est un stimulant qui remplace avec avantage les “boissons alcooliques, si nuisibles sous les tro- piques; c'est, en outre, un moyen très simple de purifier l'eau, toujours suspecte et souvent fran- “chement mauvaise, et par conséquent d'éviter les “affections intestinales. On concoit sans peine combien multiples sont les causes d'adultération de l’eau potable dans ce “pays, où il n'y a ni égouts ni latrines. Au fond des puits, qui ne sont pas maçonnés, se collectent cules les souillures du voisinage. Le liquide «iétide qu'on en tire est surchargé de limon. Il ne fait plusieurs fois, on remue la vase du fond, on voit s'élever des tourbillons de boue et de grosses Chinois se mouche avec ses doigts et ignore abso- lument l'usage de la serviette indispensable. L'eau courante, elle aussi, doit être tenue en défiance *. Cest done un grand bienfait pour le Chinois que Peau non bouillie soit pour ainsi dire exclue de son alimentation. | Sur la route mandarine qui longe le littoral de l'Annam, un bol de thé coûte une sapèque; or celle-ci n'est que la Six centième partie d'une piastre, dont la valeur, en 1900, “était de 2 fr. 50. Le Chinois établi en Annam a l'habitude de -croupir dans les rivières pour satisfaire ses besoins, et peu lui importe que l'emplacement choisi soit situé en amont ou en aval du village. s'ac- Comme le débit de thé lient en Chine et dans tout l'Extrème-Orient la place que le cabaret occupe en Occident, l'alcoolisme y fait peu de victimes. Au cours du long voyage que je fis au Yunnan, vivant dans les auberges, au milieu des Chinois de la basse classe, je n'ai constaté qu'un seul cas d'ivresse manifeste. Cela ne veut pas dire que le Chinois n'ait pas, comme tous les autres hommes, un penchant pour l'alcool. Beaucoup de porteurs, après le déjeuner du malin, avalent un petit bol d'eau-de-vie de riz, breuvage détestable qui offense le palais, mais dont la teneur en alcool est faible. Certaines gastriles, accompagnées de cauchemars zoopsiques, me paraissent relever à coup sûr d'une intoxication alcoolique. Le médecin Yu, de Talifu, estime que l'abus d’eau-de-vie est extrêmement répandu dans celte région et parmi toules les classes de la société. Il me décrivit assez bien le tremblement des buveurs, qu'il rapportait d'ail- leurs à sa vraie cause. En outre, il me fit le tableau d'une affection abdominale dans laquelle il était facile de reconnaitre la cirrhose de Laënnec. Mais, je le répète, ce sont là des exceptions, et l'alcoolisme ne s’est implanté en Chine que sur le littoral, où l’'Européen tend à introduire ses habi- tudes d'intempérance parmi les coolies. L'alcool n'est donc pas pour le Jaune, du moins quant à présent, un facteur de dégénérescence de l'individu et de la race; ce n’est pas non plus un élément de ruine pour la famille et pour la société, car la dépense journalière, même pour ceux qui s'adon- nent à cette habitude, est presque insignifiante. En Chine, la première place revient certainement à l’opium. Ce poison est le fléau de l'Extrème- Orient. Au point de vue social, il fait peut-être autant de ravages que l'alcool en Occident. À sa suite, les revers, puis la ruine et le déshonneur s'installent trop souvent au foyer domestique. Depuis le Vice-Roi jusqu'au plus humble des mu- letiers, tous les hommes fument la maudite drogue. Les jeunes gens suivent l'exemple de leurs ainés dès qu'ils sont en âge de se payer le précieux poison. Les femmes, quand elles le peuvent, ne se refusent pas l'ivresse de l'opium. Le prêtre lui- même, après l'office du soir, étale sa natte au pied de l’autel, et « tire sur le bambou ». Le mandarin, qui ne pourrait s'adonner en public à son vice préféré sans « perdre la face », fume en secret, à domicile. Quant à ceux qui n'ont aucun souci du décorum, ils fument ouvertement, où bon leur semble, à l'auberge par exemple. Beaucoup se rendent dans des fumeries d’opium. Il y en a pour toutes les bourses : des bouges, où grouille l’écume des villes; d'élégantes, établies dans de luxueux | Yamens, retrailes paisibles, dont les salles de 202 D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE repos s'ouvrent sur une cour intérieure alimentée en eau vive. Entre le cabaret, rempli de clameurs et de que- relles qui dégénèrent en rixes, et la fumerie d’opium, où règne un silence de mort, quelcontraste frappant! Tandis, en effet, que l’alcoolique discute et gesticule, l'opiomane, caplivé par les hallucina- tions agréables qui se déroulent dans son cerveau, répugne à l’action. L'ivresse de l'opium n'est pas bruyante ; elle est plus décente que celle de l'alcool, si j'ose dire, mais elle ne vaut guère mieux. Lente- ment, mais sûrement, le poison affaiblit, puis an- nihile la volonté, et l'être dégradé, devenu étranger à tout ce qui n'est pas sa passion, est un esclave incapable de se réhabililer. Quand une étape se prolonge plus que de coutume, les muletiers et les porteurs de chaise deviennent anxieux. Talonnés par le besoin, assoiffés d'opium, dès l'arrivée à l'auberge, sans prendre aucune nourriture, ils se jettent sur une natte et fument avec avidité..……. La quantité de tabac consommée par le Yunnanais est minime. Comme l'Annamite, il ne fait guère usage que de la pipe à eau. Celle-ci, dans sa forme la plus simple et la plus commune, se réduit à an internœud de bambou à demi rempli d'eau, sur lequel s’insère un minuscule foyer dont le contenu est consumé après trois ou quatre aspirations. Bien que cette pipe soit à la disposition de tous dans les auberges et les débits de thé, l'intoxicalion tabagique paraît inconnue au Yunnan. Du reste, la fumée, en passant dans l'eau du récipient, s'y dé- barrasse en grande partie de sa nicotine. TN La race chinoise est très prolifique, comme on le sait. Dès qu’elle est nubile, la jeune fille est pourvue; le jeune homme songe à s'établir vers l’âge de seize à dix-huit ans. L'union de ces jeunes époux est féconde, car, au printemps de la vie, le calcul n'intervient pas pour limiter le nombre des enfants. D'ailleurs, les conceptions religieuses, aussi bien que les conditions économiques de la Chine, inclinent l'homme à la constitution de grandes familles. Pour que l'âme du défunt vive en paix, le culle des Ancêtres exige que cerlaines cérémonies rituelles soient exécutées par uh de ses descen- dants mâles; c'est pourquoi le premier soin du chefde famille est d'avoir un fils, qui, le cas échéant, accomplira les rites funéraires nécessaires au repos de son àme, et, pour plus de sûreté, il procrée d'autres fils, destinés à remplacer, au besoin, l’ainé dans cette fonction sacerdotale *. ! La rigoureuse observance de ce culte est le premier Imbu de cette croyance, le Chinois ne peul s&w faire à l’idée de mourir sans postérité. Si l'épouse légitime est stérile, elle choisit pour la suppléer» en ce qui concerne la fonclion génératrice, une femme d'humble, mais d'honnète extraction, qui & pour unique rôle de continuer la descendance» Cette femme n'est pas élevée au rang d'épouse; elle est la servante de la femme légitime, qui est con sidérée, au point de vue civil, comme la mère de tous les enfants. $ D'autre part, dans un pays essentiellement agri= cole, qui vit encore sous le régime patriarcal, Ian famille nombreuse est une richesse et non pas une charge. Plus il y à de bras pour culliver le champ familial, plus il rapporte. Mais, si la naissance d'un garçon est toujours accueillie avec joie, celle des filles, dont le rendement économique esk moindre et l'établissement souvent difficile, est beaucoup moins goûtée. Aussi, dans quelques pro- vinces, beaucoup d'entre elles sont vouées à la mort; mais cette coulume barbare de l'infanticide resle cantonnée dans des limites territoriales assez étroites. Quant à l'avortement, il n'est guère pro- voqué que pour cacher la faute d’une fille séduites il n'apporte donc aucune entrave à l'accroissement de la populalion". Quel que soit son rang, la Chinoise allaite elle= même son enfant. C'est une excellente nourrice; à cela rien d'étonnant. La femme du peuple, qui vaque aux soins du ménage ou travaille dans la rizière, ne dépasse pas la limite de ses forces comme le fait l'ouvrière d'Occident, qui peine e s'anémie dans un atelier. La Chinoise de haute condition, dont la vie, exclusivemeut végétative, se poursuit dans une longue enfance, demeure à l'abri ; des excitations, des émotions et des fatigues de la vie mondaine. Aucune préoccupalion du dehors ne vient la distraire du devoir maternel. La mère donne le sein à son nourrisson pendan un temps illimité; j'ai vu des enfants de trois ow exécrable forfait, ! La prostitution, sous la forme qu'elle revêt en Occi dent, c'est-à-dire la maison close et le racolage clandestin: est relativement peu répandue, car la loi chinoise tolère l'admission de concubines sous le toit conjugal. Cette remarque s'applique spécialement à la province du Yunnan; où les mœurs sont encore telles qu'elles étaient autrefois“ et ne doit pas être étendue à toute la Chine et surtoub au littoral, dont les bateaux de fleurs sont renominés. Le jaune n'admet pas qu'une femme de sa race, alors in èmt qu'elle est étrangère à sa famille, s'unisse avec un blancs c'est comme une injure faite à la nation entière. Si l'a y regarde de près, ce préjugé est la cause de bien des SOUS lèvements contre les Européens À D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE - jeune enfant recoit, outre le lait maternel, un peu de riz préalablement mastiqué et insalivé par sa mère, et quelquefois même un peu de jus de viande. —…. Peut-être l'absence d'allaitement artificiel, de sevrage brusque et précoce, explique-t-elle pour- quoi le rachitisme est inconnu au Yunnan”. Quoique le sein maternel ne soit pour ainsi dire - jamais refusé au nourrisson ?, la mortalité infantile “atteint au Yunnan un taux très élevé. Cet énorme “déchet doit être attribué, pour une large part, aux “soins peu éclairés de la mère et aux affections “sastro-inltestinales qui en sont la conséquence. En “outre, la variole fait d'innombrables victimes parmi “les enfants du premier âge. La pratique de la vario- lisation accroît encore le champ d'action du fléau, Br l'inoculation variolique donne lieu à des cas … généralement bénins qui, n'immobilisant pas le - sujet, aident à la dissémination du contage. Ces “causes, et plusieurs autres telles que l’exiguité de la surface cultivable, contrarient au Yunnan l'ac- “croissement de la population. Je dirai même plus : «les vides que les massacres, la répression sans “merci el la peste creusèrent dans la population de celte province, au cours et à la suite de la rébellion - musulmane (1857-1873), ne sont pas encore com- “blés, malgré une longue période de paix *. L ! i Cependant le Yunnan, dont le climat est subtro- pical, ne peut être considéré comme malsain. On y it vieux, etcerlains missionnaires y résident depuis rente et même cinquante ans sans être jamais entrés en France. Voilà qui contraste singulière- ‘ans *. — ! Cette remarque peut ètre étendue à toute la péninsule Indo-Chinoise. Bien que mon attention füt attirée sur cette “question, et que l'inspection du squelette soit facile sur “les Annamites, les Cambodgiens, les Siamois, les Laotiens et les Birmans, qui laissent courir leurs enfants complète- “ment nus jusqu'à l’âge de cinq ou six ans, il ne m'a pas “lé donné d'observer un seul cas de rachitisme au cours “rend au travail porte son enfant à califourchon sur les “reins. Le siège du bambin, dont les jambes sont par consé- …quent très écartées, repose sur un carré de toile grossière, | aux angles duquel sont cousues des bretelles qui s'entre- “croisent au-devant de la poitrine de la mère. L'enfant lindou et Annamite est porté à cheval sur la hanche. ï # Le long des routes les plus fréquentées, on voit encore “aujourd'hui beaucoup de villages et mème des villes dont les ruines ne seront jamais relevées. Evaluer à 12.000.000 (1 habitants par kilomètre carré) la population de Yunnan, comme le font MM. E. et O. Reclus, me parait exagéré. Je Serais porté à donner le chiffre de 7 à 8.000.000 comme beaucoup plus probable. * L'établissement d'un sanatorium au Yunnan rendrail 4 Après la variole, qui tient la première place dans la pathologie du Yunnan, la maladie la plus com- mune est le paludisme, dont la recrudescence coïncide avec la saison de l'hivernage ‘. Peut-être groupe-t-on sous ce vocable de palu- disme des maladies épidémiques de nalures diffé- rentes. Le Hän pin ou Hän Ai, que les mission- naires considèrent à tort comme la fièvre typhoïde, est une fièvre rémittente à type lierce, qui s’accom- pagne de constipation ou de selles sanguinolentes, et se termine par la guérison ou par la mort après la troisième recrudescence. Le 7chäng Ki, fièvre très tenace précédée d'un frisson, persiste quatre à cinq semaines et même plus, sans aulre signe marquant que de l'inappétence. La quinine n’a aucune aclion sur celle maladie, qui est souvent morlelle. En cas de survie, le retour à la santé parfaite exige plusieurs mois *. L'usage des boissons chaudes ne corrige qu'im- parfaitement l'impureté des eaux potables. À en juger par le nombre de médicaments que les offi- cines délivrent contre la diarrhée et la dysenterie, on peut conclure que les afleclions intestinales sont fréquentes au Yunnan, surtout pendant la saison chaude. La syphilis, sous la forme qu'elle revêt en Extrème-Orient, est assez répandue dans les grands centres. Elle n'a pas toujours une origine véné- rienne ; la transmission accidentelle du contage peut être assurée de multiples façons, soit par les nattes sordides sur lesquelles s'étendent les voya- geurs, soit par la curette ou le rasoir du barbier, soit par la pipe à eau qui circule de bouche en bouche dans les débils de thé, soit enfin par le les plus grands services à notre colonie de l'Indo-Chine. Quand la ligne de Hanoï à Yunnan Sen par la vallée du Fleuve Rouge sera ouverte, il sera possible d'installer sur les hauteurs du Yunnan des stations sanitaires, semblables à celles que les Anglais ont construites sur les contreforts de l'Himalaya. 1 Les médecins chinois distinguent trois variétés de fièvre : Kan choùi mäo pia (litt. maladie à sec d'eau), dans laquelle le patient refuse de boire; — tche choùi mäo pin litt. maladie de l’eau fraiche), dans laquelle le fébriciant boit avec avidité; — 1à päai tse, qui signifie accès de fièvre. Cette classification, toute objective, désigne peut-être les diverses phases de l'accès paludéen. La fièvre, sans autre qualificatif, se dit Han (litt. froid). : ? Je tiens d'un ingénieur, chargé de faire des études pour la construction de la ligne du Yunnan, que, sur trente-huit porteurs chinois partis de Mongisé pour chercher des bagages à Manhao, centre essentiellement malsain situe sur le haut Fleuve Rouge, trente-six succombérent au Tchäng k'i, soit rapidement, soit après avoir langui pen- dant une durée plus ou moins longue. — Il y a quelques années, on aurait, sans hésitation, fait rentrer ces lypes morbides dans le cadre du paludisme. Mais les recherches contemporaines commandent aujourd'hui plus de réserve. L'étude microscopique seule peut décider si, dans ces fièvres, il n'y a pas des cas relevant du Piroplasma Donovanï, agent d'un type de fièvre rémittente fort répandu dans l'Inde. Récemment, G. A. Bentley a trouvé ce piroplasma dans le Kala -Azar ou fièvre noire du Brahmapoutre. 204 D' E. JEANSELME — HYGIÈNE ET VIE MATÉRIELLE EN CHINE bambou qui sert à attiser le feu dans les auberges. La lèpre fait de nombreuses victimes au Yunnan. Nulle mesure efficace n'est prise contre celte ter- rible maladie. Les malheureux qui en sont alteints vivent au milieu de la population saine jusqu'au jour où ils deviennent un objet de dégoût. Alors, ils sont pourchassés sans pitié et ils se réfugient, par petits groupes, dans des masures ou dans des grottes, d'où ils sortent pour aller mendier dans les marchés. Le Yunnan est peut-être le berceau de la peste. En lout cas, elle y règne à l’état endémique depuis fort longtemps, et les retours offensifs de ce fléau dévastateur ont beaucoup contribué à dépeupler celte province. Parmi les noms divers que les Chinois donnent à la peste, l'un des plus caraclé- ristiques est celui de Zäng isè -qui veut dire écrouelles, glande abcédée ou bubon. On l'appelle aussi « maladie des rats », parce que les épidémies sont annoncées par la mort d’un grand nombre de ces rongeurs. : Les ophtalmies font d'innombrables victimes dans la presqu'ile indo-chinoise et dans le Yunnan. Les conjonctivites sont extrèmement répandues; en général, les femmes sont plus atteintes que les hommes. Outre la conjonctivite purulente blen- norragique et le trachome, dont l'existence est certaine, il y aurait lieu de rechercher, à l’aide du microscope, si la conjonctivite aiguë contagieuse, causée par le bacille de Wecks, et la conjonclivite subaiguë, produite par le diplo-bacille, existent en Indo-Chine. Au Yunnan, dans les régions de Kai hoa et de Mongtsé, de Yunnan Sen cet de Talifu, non seulement les hommes, mais aussi les chiens, sont atteints de conjonctivite purulente. Les pau- pières, et mème la conjonctive des indigènes affligés d'ophtalmie, sont constamment couvertes de mouches qui puisent le liquide purulent. Ces insectes, que le palient se lasse de chasser, et qui, d'ailleurs, reviennent immédiatement se poser sur le pourtour des yeux, sont, suivant toute vraisem- blance, l'un des agents vecteurs de cetle infection oculaire. Les indigènes affirment que ces conjonc- tivites sont dues à la fumée qui règne dans leurs habitations, mais cette opinion n’est pas soutenable. L'irritalion causée par la fumée peut tout au plus favoriser l'infection conjonctivale, en incitant les malades à se frolter les yeux avec leurs doigts chargés du contage. Le ptérygion est d'une extra- ordinaire fréquence au Yunnan. A ces diverses causes d'opacité cornéenne, si l’on ajoute les complications oculaires de la variole et de la lèpre, on comprend pourquoi les aveugles sont nombreux au Yunnan. Le Yunnan, qui est un vaste massif montagneux coupé par des vallées étroites, réalise l'ensemble D des condilions dans lesquelles on voit apparaitre le goitre. Aussi celui-ci est d’une fréquence telle que, dans cerlaines localités, le tiers des habitants« est affligé de cette infirmilé. Il n’en résulte point de conséquences graves pour l'individu et pour sa descendance d’une manière générale. Pourtant, j ai observé un cerlain nombre de crétins et de nains myxædémaleux dans les régions les plus éprouvées: La plupart des causes morbides que je viens. d'énumérer, pour être sévères et même mortelles; ne sont pas de celles qui impriment à la race une tare indélébile. Aussi le Yunnanais est-il un robuste montagnard. Par sa taille au-dessus de la moyenne, par son visage ouvert, presque blanc et quelque ne coloré au niveau des pommettes, par ses yeux à peine bridés, il diffère beaucoup du Cantonnais; dont le corps est gracile, la peau male et jaune, les yeux tirés vers les tempes. 4 La pathologie de tous les peuples qui ne plient ra6il sous le faix d'une civilisation raffinée est sensible ment réduile; c'est ce qui se vérifie au Yunnan M varices et ulcères variqueux, hernies, eczéma, psO= riasis, lichen, carie dentaire, calvitie et canilie« précoces, bref, tous ces indices cerlains de l'usure et de la sénilité d’une race, sont des déchéances" pour ainsi dire étrangères à ces populalions restées jeunes. NAIL À ç wa L'entrée en scène du médecin hygiéniste, dont le rôle serait facile, puisque les maladies évitables constituent le fond de la pathologie du Yunnan serait à la fois un acte de haute philanthropie ets de bonne politique. Ë La création de dispensaires et d'hôpitaux dans les provinces chinoises limitrophes du Tonkin esl« l'un des meilleurs moyens dont nous disposons pour étendre notre influence au delà de nos fron= tières actuelles. Le Yunnanais ne prise rien si fort que la santé. Il se drogue volontiers. Faute dem mieux, il s'adresse à la pharmacopée chinoise ; mais il reconnaît l'énorme supériorité du médecin d'Oc cident, qu'il tient en particulière estime et quil respecte, même en périodes de trouble. Au voyageur quitraverse son village, il demande avec insistance. les médicaments européens dont il a éprouvé les bons effets. Avec de la quinine, de l'iodure de potassium, du mercure, des solutions antiseptiquesy quelques collyres et surtout du vaccin, on peut faire Ja conquête pacifique et économique du Yun nan. Comme agent de pénétration, nul n’est moins dispendieux, nul n'est plus efficace que le médecin + D'E. Jeanselme, Professeur agrégé É à la Faculté de Médecine de Paris P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 205 Dans un premier article !, nous avons rappelé les incipales théories qui ont eu cours sur la nutri- ion de la cellule vivante; nous allons maintenant xposer nos recherches sur ce sujet et les conclu- ions qui en découlent. I. — ASSIMILATION DU SUCRE. En partant du sucre et d'un nombre restreint d'éléments minéraux, les végétaux supérieurs et obablement la plupart des microbes peuvent éla- rer l'infinie variété des substances organiques jui les constituent. Il serait intéressant de suivre ës migrations des éléments minéraux dans la cel- e vivante, ainsi que le rôle qu'ils y remplissent ; nais nos connaissances sont encore très limitées dans cet ordre d'idées; je me bornerai à exposer ci les transformalions que subit la molécule de sucre avant d'être incorporée à la substance vivante. Le sucre a toujours été considéré comme l'ali- ent ternaire directement assimilable ; l'amidon, dextrines, les polysaccharides alimentaires pas- nt sans exception à l'état d'hexoses avant de dis- paraitre ou de perdre leur individualité dans le burbillon vital. Les matières grasses elles-mêmes, bpeut-être les résines et autres substances car- bonées de réserve, passent par le même état avant de subir le même sort. Construit uniquement avec des hexoses et des léments minéraux, le végétal a, cependant, une mposilion élémentaire qui diffère nettement de telle des hydrates de carbone. Il est plus riche en lydrogène que ces derniers composés. Si les hexoses Sont assimilés sans transformation préalable, il fut admettre que la cellule vivante emprunte son xcédent d'hydrogène à l’eau. C'élait l'opinion de liebig, de Dumas, de Bous- ault, etc.; mais on ne s'inquiétait pas du sort loxygène qui devient libre à la suite de l'assi- ation de l'hydrogène. D'après les résultats de assingault relatifs à l'assimilation chlorophyl- ne, la quantité d'oxygène mise en liberté corres- nd exactement à l'acide carbonique décomposé, sque le rapport des volumes gazeux mis en jeu très voisin de l'unité. L’oxygène de l’eau n'est : pas éliminé en nature. Voir la Revue du 28 février 1905, t. XVI, p. 152. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. L’'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE DEUXIÈME PARTIE : L'ASSIMILATION DES SUBSTANCES TERNAIRES Les recherches de MM. Bonnier et Mangin ont montré, dans la suite, que le quotient respiratoire chez les végétaux supérieurs est inférieur à l'unité; il y a donc plus d'oxygène absorbé que de gaz car- bonique dégagé ; le végétal s'enrichit donc en oxy- gène au lieu de s'appauvrir, de sorte que, si l’on admet, avec les chimistes, que la combustion respi- raloire est directe, c'est-à-dire que l'oxygène em- prunté à l'air se combine au carbone pour s'éliminer à l’état de gaz carbonique, on ne concoit pas com- ment le végétal peut s'enrichir en hydrogène. Pour sortir de cette impasse, il suffit d'admettre que la combuslion respiratoire ne se confond pas avec un phénomène d'oxydation directe: l'acide carbonique dégagé ne renferme pas tout l'oxygène emprunté à l’air; il peut provenir de l'oxygène des aliments carbonés, en particulier des sucres, à la suite de transformations analogues aux phéno- mènes de fermentations. C'est Claude Bernard qui, le premier, a émis cette hypothèse; il s'élevait contre la théorie de la combustion directe et consi- dérait l'oxygène commé un élément susceptible d'entrer dans la constitution de la substance vivante pour s'éliminer ensuite au moyen de transforma- tions qui rappellent les phénomènesde fermentation. A l'appui de cette conception, il cite Les observa- tions suivantes : un muscle au repos absorbe plus d'oxygène quil n'élimine de CO’; il produit, au contraire, plus de gaz carbonique qu'il ne prend d'oxygène pendant le travail; il dégage, enfin, de l’'anhydride carbonique pendant un temps assez long dans une atmosphère de gaz inerte. En pénétrant plus loin dans cette voie, on est conduit à se demander si, contrairement aux appa- rences, le glucose est réellement incorporé en nature ou brülé entièrement, sans subir de (rans- formations ou de dédoublements rappelant les phé- nomènes de fermentation. En d'autres termes, ces phénomènes des fermentations doivent-ils être considérés comme des transformations accomplies par la cellule vivante dans l'unique but de détruire ou de modifier les substances alimentaires, ou, au contraire, dans le but d'en tirer le carbone dont elle a besoin ? L'histoire de la Microbiologie répond par la négative à cette double question. Les fer- ments et les champignons dédoublent le sucre en un certain nombre de produits, tels que l'acide lae- tique, l'alcool, l'acide acélique, l'acide butyrique, P) 206 1 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE l'alcool butylique, etc.; mais Lous ces composés, qui caractérisent aulant de fermentations différentes accomplies par des ferments divers, n'ont jamais élé considérés que comme des produits de dé- chet. Quand Pasteur eut montré que la levure est un végétal aérobie qui ne peut vivre sans oxygène, il interpréta la production de l'alcool en supposant que, dans cette dislocation de la molécule de sucre, la levure peut se procurer de petiles quantités d'oxygène dont elle à besoin. La production de l'alcool est la conséquence de la vie sans air ; sa formation traduit des conditions de vie anormale, de sorte qu'il constitue lui-même un produit anormal. Par analogie, les composés qui s'accumulent dans un liquide en fermentation indiquent un état de souffrance du ferment; ils n'ont donc aucun rapport avec l'alimentation nor- male, etle sucre, qui concourt à la créalion ou à l'entretien de la cellule vivante, es! assimilé sui- vant un processus différent, que l’on ignore. Claude Bernard faisait, comme je l’ai déjà dit, une place aux phénomènes de fermentation dans la respiration normale; mais il se hâtait d'ajouter que les phénomènes de combustion et de fermen- tation, dont la résultante se confond avec la respi- ration, élaient plutôt soupconnés que démontrés et que cette étude était encore dans l'enfance. Partant de cette idée, il fut conduit à rechercher une diastase capable de produire la fermentation alcoolique en dehors de la cellule de levure; mais ce n'est qu'en 1897 que Buchner est parvenu à la mettre en évidence. Cette diastase semble ne se former qu'à l'abri de l'air; la levure cultivée au contact de l'air, à la sur- face de milieux solides, n'en renferme pas; la fer- mentalion alcoolique se présente donc comme une transformation diastasique destinée à fournir à la levure l'énergie qu'elle ne peut plus se procurer en l'absence de l'oxygène. Si la fermentation alcoolique ne pouvait plus être interprétée suivant les idées de Pasteur, elle res- tait cependant liée à la vie sans air, et l'alcool ne devait pas être rapporté à un phénomène de digestion. Tel était l'état de la question au moment où j'ai abordé l'étude de l'assimilation du sucre à la fin de l’année 1898 *. En consultant les faits acquis, on pouvait faire quelques rapprochements intéressants, car, si les interprétations varient, les faits restent; c'est donc avec ceux-ci qu'il faut compter; c'est sur eux qu'il faut échafauder si l’on veut édifier de nouvelles théories plus générales, capables, non seulement de ! Annales de lIastilult Pasteur, années 1900, 14902, 1904. —— réunir tous les résultats bien assis, mais encore de. suggérer de nouvelles recherches % Ainsi, si l'on prend comme see la fermen= tation alcoolique, on a constaté que toutes les cels lules végétales privées d'air, et même les cellules animales, sont capables de la produire; on a réunk tous les faits de cet ordre sous le nom de fermen” talion intracellulaire ou intramoléculaire; à côté de ces fermentations, se produisant dans des condi” tions particulières, on a observé d’autres fermen tations alcooliques, provoquées par des ferment anaérobies et s'effectuant, par conséquent, dans des condilions de vie normale. Si ces dernières peus vent être regardées comme des transformation exothermiques destinées à fournir au fermenk l'énergie nécessaire pour vivre et se développer, les fermentations inlra-cellulaires ne sauraient être interprétées de la même façon, car la cellule stries tement aérobie, privée d'oxygène, ne peut ni s& nourrir, ni se multiplier; elle ne peut done pas utis liser la chaleur qui résulte du dédoublement d sucre en alcool et acide carbonique; elle devient, d'ailleurs, le siège de phénomènes de désassimi” lation qui dégagent aussi de la chaleur. Les théories courantes sont, comme on le voit incapables de fournir une interprétation suffisant@ de l’ensemble des faits connus; et l'on ne peut ser refuser à reconnaitre que, si l'on admet que les produits des fermentations sont des actes de diges”= tion, on aplanit bien des difficultés. Cette facon d'envisager les produits d'une fers mentation entraine un certain nombre de consé- quences susceplibles d'être vérifiées par l'expé rience. En prenant {toujours comme exemple la fermens tation alcoolique, on conçoit facilement que, Si l'alcool est la portion utilisable du sucre, le poidsm de substance vivante obtenu en milieu minéral addilionné de sucre ne pourra jamais dépasser là moitié du poids du sucre consommé. LES de Pee relatifs à Ja levure, par ceui De Raulin a obtenus avec l'Asper de rigeS Pas- qui nous autorisent à considérer l’interprétatio que je viens de formuler, sinon comme suffisam ment établie, du moins comme élant digne d'attirer l'attention. 4 Suivant cette conceplion, l'alcool apparaitra toutes les fois que la cellule aérobie, étant M d'air, ne pourra plus assimiler l'alcool, ou que à P. MAZËÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 207 cellule anaérobie en produira plus qu'elle n’en peut consommer. Mais on admet ainsi implicitement que la cellule aérobie, contrairement encore à l’opi- nion courante, sécrète de la zymase; c'est un fait qu'il faudra démontrer. On voit, par conséquent, si l'on veut établir que l'alcool est un produit de digestion du sucre, qu'il . suffit de montrer : je Que les cellules aérobies peuvent se nourrir “d'alcool aussi bien que de sucre; 2° Que la zymase est une diastase de la vie aéro- bie ou anaérobie, suivant que la cellule peut se “développer au contact de l'air ou à l'abri de l'air. “cette indication pour opposer, à priori, les hypo- | thèses les unes aux autres, si paradoxales que bien être, de prime abord, celles que je viens Ménoncer. À Les nombreux faits que j'ai apportés à leur appui “ont été fournis par l'étude des végétaux supérieurs met par celle du microbe. Que l'on s'adresse à l’une ù ou à l’autre de ces deux catégories d’être vivants, À “le choix des matériaux d'expérience s'impose. “mineuses, dont les cotylédons ne renferment que de fé lamidon, comme aliments ternaires de réserve, moisissures sont tout indiquées, “à raison du poids élevé de substance vivante Lqu'elles fabriquent en quelques jours, je dirai “mème en quelques heures. Elles ont, en outre, l: inérales de composition bien définie, parce “qu'elles tirent les éléments qui les constituent - Je dois ajouter, enfin, puisqu'il s'agit de mon- trer que le sucre ne vaut comme aliment qu'en raison de l'alcool qu'il pourrait fournir par voie par M. Laborde, remplit à merveille toutes les Conditions que je viens de définir. … Conformément aux prévisions déjà formulées, le rendement en poids de mycélium, pour un poids donné d'aliment consommé, doit varier entre 25 et 50 °/, si la substance alimentaire fournie est du glucose ; il sera compris entre 50 et 100 °/, si elle est constituée par l'alcool. C'est ce point qu'il s’agit de vérifier tout d'abord avec la culture d'Æurotiopsis. Les tableaux I et IT donnent les chiffres fournis par deux séries de cultures que j'ai faites sur milieu Raulin, la première en milieu sucré, la deuxième en milieu alcoolisé. — Milieu sucré. TABLEAU I. Nos DURÉE POIDS CRE RENDEMENT Fe du ] 00 d'aliner t d'ordre | j'expérience mycélium | consommé Ê: ne 2 jours heures mgr. gr 1 2 » 11,2 » » 2 DE 38,8 38,56 5) 3 3 12954 33,48 4 SL 182,0 33,80 5 4 3 260,1 32,00 6 DOS 386,8 30,71 1 6 13 452,3 27,40 En portant sur deux axes de coordonnées la durée des cultures et le poids de mycélium corres- pondant, on obtient des courbes qui traduisent mieux que les chiffres la marche générale du déve- loppement des cultures. La courbe de la figure 1 a été oblenue avec les chiffres du tableau I; la courbe de la figure 2 correspond au tableau I. Le) Le] È S % = 5 Q © D C Le) & È > v 8 £ Ÿ d ÿ è 7 4. 5 Temps en jours 1. — Poids de mycélium en fonction du temps des cultures d'Eurotiopsis en milieu sucré. Fig. Les courbes se comprennent d'elles-mêmes; elles nous fournissent encore quelques indications intéressantes; mais, pour les faire ressortir, il est nécessaire d'utiliser la formule par laquelle M. Du- claux a symbolisé le travail de la vie de la cel- lule (1). 208 L. P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE Les aliments servent à la construction de la cel- lule ou à son entretien. Si l'on désigne par $ la somme des aliments consommés par une culture d'Æurotiopsis, par C la quantité employée à la construction du végétal, par E celle qui estaffectée à TasLeau Il. — Milieu alcoolisé. 5 IRÉE > RENDEMENT N°s Hour Fat SCO en mycélium d'ordre | l'expérience 315 consommé |P: 10020 aliment expérience mycélium consommé jours heures mngr mer, 1 3 16 12,8 » » 2 4 16 42,0 42,0 » 3 5 16 133.0 192,0 19,68 4 6 » 221,1 325,0 10,00 5 GPOULE, 342,3 640,0 53,48 l'entrelien, ces trois quantités sont liées par la rela- tion suivante : S—C+E. C peut être mis sous la forme aP, P étant le poids du mycélium obtenu à la fin de l'expérience et a un coefficient exprimant la quantité d’aliment employée à la construction de l'unité de poids de plante. E dépend du poids P; on peut donc faire : ED E f, I = est ce qu'on peut appeler le poids moyen de la culture, c'est-à-dire une quantité constante pen- dant toute la durée de l’ex- périence, qui consomme, pour son en- treltien, Îla même somme d'aliments que la culture elle-même. La dépense d'entretien, calculée à l’ai- de du poids moyen, est donc propor- tionnelle au temps, ce qui justifie l'expression précédente; D est la dépense d'entretien par unité de poids et de temps. De sorte qu’en définitive, on a : Poids du mycelium en decigrammes Temps en Jours Fig. 2.— Poids du mycélium, en fonction du temps, des cultures d'Eurotiopsis en milieu alcoolisé. (4) S—aP+b? 4 C'est la formule de M. Duclaux‘. ! Trailé de Microbiologie, t. I et III. Masson, Paris. Pour éviter les complications de calcul, je consi dérerai S comme représentant seulement la sommen des aliments ternaires qui ont contribué à l'alimen=« tation de l'£urotiopsis; comme P est constitué en partie, à peu près 5 °/,, par de l’azote emprunté à l'ammoniaque ou à l'acide nitrique, les coefficients aet b déduits par le calcul seront légèrement infés rieurs aux coefficients réels, puisque le premier membre ne renferme pas l'azote utilisé; mais ils demeureront comparables entre eux d’une expés rience à l'autre. Dans cette formule, M. Duclaux à fait 2 —3, chiffre déduit par M. Hansen de la muls liplication de la cellule de levure. Il a admis, en outre, comme conséquence de Lx revision méthodique des notions apportées pan l'étude de la vie de la levure, que à doit être voisin de 2 pour la levure, 2 étant cependant une valeur approchée par excès; pour l'£urotiopsis, il a fait a—= 1,5. Ces valeurs, déduites de considéralions théoriques, faute de renseignements pratiques, ne correspondent pas aux indications de l'expérience” Les résultats des tableaux I et Il nous montrent, en effet, que à est égal à l'unité; mais, lorsqu'il s'agit d'une alimentation hydrocarbonée, ce n’est pas la somme S de sucre disparu qu'il faut employer, mais bien >, puisque la moitié seulement du poids du sucre est utilisée, soit pour la construction, soil pour l'entretien des cellules. Le coefficient à étant ainsi fixé par l'expérience” il suffit de déduire = des courbes (fig. 1 et 2) pour P calculer . 3 est je le rappelle, le poids moyen des cultures. C'est aussi l’ordonnée moyenne des courbes correspondant à chaque culture (Dueclau (loc. cit.). En utilisant la formule de Simpson pou le calcul de celte ordonnée moyenne, on obtient {l : pour = les valeurs suivantes : TABLEAU fil. Sucre interverti. Alcool. Culture n° 4. 0,20 Culture n° 3. 0, = "n5e 0,2% — n°4. . 0,1HÆ — n°6. 0,32 — Mn UE UNE 0,37 pondent à ceux des tableaux I et Il. TABLEAU IV. Sucre interverti. Alcool. Culture n° 4. . 0,65 Culture n° 3. . 0,40 — n°5. 0,4: — n°4. . 0,64 — n°6... 0,34 — n° 5. . 081 — n°7. 0,4 Ces valeurs, portées dans la formule (1), permet tent de calculer » pour chacune des cultures envi- % fe 4 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE 209 sagées; les chiffres obtenus sont réunis dans le tableau IV. Voilà les résultats que l'étude des courbes (fig. 1 el 2) permet d'obtenir; ils peuvent se traduire de la façon suivante : La ration d'entretien de l'£urotiopsis Gayoni nourri avec du sucre va en décroissant à mesure que la culture vieillit; elle croît, au contraire, avec le temps s'il est alimenté avec de l'alcool. Il est bien entendu que toutes ces cultures ont élé arrêtées au moment où il y avait encore dans le milieu nutritif beaucoup de sucre ou d'alcool non consommé. Ces résultats montrent que le mycélium vieillit plus vile lorsqu'il est nourri avec du sucre que lorsqu'il est alimenté avec de l'alcool, car il faut bien admettre qu'une cellule qui consomme peu ou pas d'aliments est moins active que celle qui en consomme beaucoup. Comment peut-on interpréter “ ce curieux phénomène, si l'on considère que le sucre doit être dédoublé en alcool et CO* pour être assimilé? Il faut admeltre que la zymase est indispensable à la cellule qui doit emprunter son carbone au sucre; mais cette diaslase est très | oxydable; elle disparait assez vite de la cellule à mesure que celle-ci vieillit, et, quand elle est dé- truite, le mycélium n'a plus d'action sur le sucre; il s’'autophagie; cette conception nous permet donc de prévoir que le mycélium d'£Zurotiopsis est d’au- tant plus riche en zymase qu'il est plus jeune, d'autant plus pauvre qu'il est plus âgé. C'est un fait qui peut être vérifié par l'expérience, comme on le verra plus loin. Les cullures effectuées sur milieu alcoolisé peu- vent se passer de zymase; elles peuvent donc uti- liser l'alcool d'autant mieux qu'elles sont mieux - aérées, puisqu'il est assimilé surtout par voie d'oxydation; on conçoit ainsi que la ration d'’entre- tien puisse demeurer constante; mais elle croit - avec le temps, et ce résultat semble difficile à inter- préter; en observant attentivement le développe- - ment du voile mycélien, on remarque, cependant, que celle particularité s'explique facilement. Le voile jeune est en partie submergé, la portion - aérienne seule se trouve dans les conditions favo- rables à l'assimilation active de l'alcool; or celle-ci augmente avec l’âge, car les filaments aériens, con- trairement à ce qui se passe dans les cultures en . milieu sucré, prennent un grand développement. Voilà pourquoi la ration d'entretien augmente à mesure que les filaments aériens prédominent. II. — VARIATION DE LA ZYMASE DANS LE MYCÉLIUM D'EUROTIOPSIS GAYONI. On sait de quelle facon on a été conduit, au début du chapitre précédent, à envisager la zymase comme une diastase de la vie aérobie; les conclu- sions que je viens de formuler au sujet de la varia- tion de la ration d'entretien viennent corroborer celte opinion, d'une manière détournée il est vrai,et sous une forme encore hypothétique. Le moment est venu de soumettre cette déduction à une dé- monstration directe. On peut isoler la zymase de l'Eurotiopsis Gayoni soit par l'emploi de pressions élevées (400-500 atmosphères), soit en traitant le mycélium forte- ment essoré par un mélange d'alcool et d'éther, suivant le procédé indiqué par Albert. On peut établir de cette façon que le mycélium jeune renferme plus de zymase que le mycélium âgé; que le voile mycélien, traité sans avoir élé privé d’air pendant un temps plus ou moins long, est plus riche que les cultures identiques, mais exposées dans leur vase de cullure à une atmos- phère dépourvue d'oxygène pendant vingt-quatre ou quarante-huit heures; mais, comme ces pro- cédés d'isolement de la zymase ne permettent d'ob- tenir qu'une fraction très faible de la quantité de diastase que renferme le mycélium, environ 1/12, ils ne se prèlent pas à des déterminations quanli- tatives suffisamment rigoureuses. Pour évaluer les quantités de zymase présentes dans le mycélium d’£urotiopsis, il suffit de le pla- cer dans une solution à 25 °/, de glucose, en pré- sence d’une atmosphère inerte. Les quantités de diastase se mesurent par le volume d'acide carbo- nique dégagé dans l'unité de temps par l'unité de poids de mycélium. Si l’on s'arrange de façon à pou- voir suivre, pendant plusieurs jours, la production d'acide carbonique, on peut se rendre compte des variations de la diastase alcoolique dans une cul- ture placée à l’abri de l'air. J'ai appliqué ce pro- cédé à l'étude d’une série de cultures faites dans des conditions identiques et prises à des âges variables. En ramenant les volumes d'acide carbonique dé- gagés par 1 gramme de ces cullures en vingt-quatre heures à la pression de 760 et à la température de 0°, j'ai obtenu les courbes de la figure 3. Le lemps, évalué en jours, est porté sur l'axe horizontal ; les volumes de CO*, dégagés de vingt- quatre heures en vingt-quatre heures, sont portés sur l'axe verlical et comptés en 100 centimètres cubes. La courbe À correspond à un voile de vingt- quatre heures, l’âge des voiles mycéliens étant évalué à partir du moment où les premiers fila- ments aériens commencent à émerger du liquide. La courbe B correspond à un voile de quarante- huit heures, C à un voile de quatre jours et M à un voile âgé de sept à huit jours. Ces courbes traduisent un certain nombre de résullats fort intéressants. On voit, en effet, que la 210 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE zymase diminue rapidement avec l'âge des cul- tures; ce résullat explique et justifie l'interpré- lation que j'ai donnée de la variation de la ration d'entretien avec l’âge du mycélium. La courbe À montre que la diastase diminue rapidement dans une culture privée d'air. L'ÆZuro- tiopsis Gayoni est, en effet, un champignon stric- tement aérobie; la privation d'oxygène suspend immédiatement tout développement, de sorte que l’on conçoit aisément qu’il soit incapable de sécré- ter, dans ces conditions, de nouvelle diastase; la quantité iniliale diminue parce que certaines causes de destruction agissent même à l'abri de l'air. Mais il semble que la courbe fournie par un voile mycélien de quatre jours contredise cette conclu- sion. Contrairement à la courbe À, qui est toujours décroissante, la courbe C présente un maximum 7 Vol. de CO? dégage en (00 par /%'de mycelium 8 9 101 12 13 1# 15 16 17 1819 SN6N7 Duree l'experience en Jours Fig. 3. — Dégagement d'acide carbonique par diverses cultures d'Eurotiopsis Gayoni. qui a lieu au bout de dix jours de séjour à l'abri de l'air. On est donc autorisé, en apparence, à affir- mer que le mycélium àgé sécrète de la zymase lorsqu'on le prive d'oxygène; mais on ne se trouve pas ici en présence d’une véritable. sécrétion de diastase, car on ne saurait admellre que le mycé- lium jeune et très actif ne possède pas celte pro- priélé. Si l'on remarque que le mycélium de quatre jours est six fois moins riche que le mycélium de vingt-quatre heures, à poids égal, on est en droit d'admettre que le premier renferme de la diastase active el de la diaslase inactive plus ou moins complètement détruite. Une portion de cetle zy- mase inactive, celle qui est la moins altérée, por- tion très faible, d'ailleurs, est capable de reprendre, dans un milieu réducteur, l'activité qu'elle a perdue dans un milieu oxydant; c’est donc un phénomène de régénération qu'on observe dans ces conditions; la régénération de la zymase peut masquer le tra- vail inverse de destruction, qui s'effectue également à l'abri de l'air, et la courbe croit pendant quelque temps, passe par un maximum, et décroit ensuiteu lorsque la destruction est plus aclive que la régé= néralion. Les deux phénomènes peuvent se contre balancer plus ou moins longtemps, et alors la dé croissance est très lente; la courbe B en est un exemple; elle présente aussi un maximum qui S6 manifeste vers le deuxième jour; mais ce résultab est accidentel et tient à ce que l'acide carbonique retenu par le liquide à l’état dissous a été pris entièrement sur la quantité produite pendant les premières vingt-quatre heures. Si l’on soumet une culture relativement très âgée au même traitement que les précédentes, on obtient une courbe de la forme M. Une culture vieille peut rester inerte en apparence pendant quelques jours; et donner lieu à un dégagement de CO? qui va en augmentant, passe par un maximum et décroit ensuite lentement jusqu'à zéro. Si l'on rappelle que tous les végétaux placés à l'abri de l'air présentent les mêmes phénomènes, cette courbe prend un grand intérêt, car elle est la reproduction graphique à peu près fidèle de la marche des fermentations dites intracellulaires, qu'on a si souvent observées dans les milieux privés d'oxygène. Rapportée à des cas isolés, cette courbe demeure énigmatique; mais, lorsqu'elle est rattachée à sa vérilable cause, lelle qu'on vient de la découvrir chez l'Zurotiopsis, elle se présente comme la suitem d'une action diastasique qui a son origine dans la vie normale La solulion de continuilé qui existe entre les deux modes de vie n'est qu'apparente; chez la plupart des végétaux, la zymase se détruits dès qu’elle a agi, par un processus dont le méca=s nisme nous échappe, mais qui se rattache proba= blement aux phénomènes d'oxydation. Comme dans le mycélium d'Zurotiopsis âgé, il y a dans ces vé= gétaux une quantité plus ou moins grande dem zymase susceptible de se régénérer, ou de repren= dre son activité dans un milieu réducteur. J On arrive ainsi, par l'observation directe, à montrer que, non seulement la zymase est un diastase de la vie aérobie qui préside à l'assimi= lation du sucre dans les conditions de vie normale; mais encore que les fermentalions à l'abri de l'air, observées chez les végétaux aérobies, sont Ja conséquence directe de la présence de la zymase dans les cellules vivant au contact de l'air. Celle généralisation peut se justifier autrement que par des raisonnements d'analogie. J'ai montrés en effet, que les cotylédons de pois privés de leurs embryons, placés dans les conditions favorables üla germination des graines entières, saccharifient leurs réserves amylacées et produisent de l'alcookw aux dépens du glucose qui se forme dans ces con” dilions ; tous ces produits de digestion se retrouvent Le P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VNÉGÉTALE 214 ainsi à l'état libre parce que la plantule n'est plus là pour les utiliser; il faut en conclure que les cotylédons à réserves amylacées fournissent à la plantule non seulement toute la série des hydrates de carbone qui se forment par hydrolyse de l’ami- don, mais encore de l'alcool. C’est pour cela que Mon trouve toujours de pelites quantités d'alcool dans les plantules en voie de développement; on Sait que M. Berthelot en a trouvé également dans les feuilles de graminées cueillies pendant le jour. Voilà, par conséquent, des faits qui montrent que, chez les végétaux supérieurs, comme chez les Champignons, l'alcool est un produit de digestion des hexoses. On peut citer d’autres arguments à l'appui de “cette conclusion : Si l’on considère les graines à réserves amylacées, on peut prévoir que le poids de plantules formées aux dépens des aliments “mpruntés aux cotylédons ne pourra jamais “dépasser 50 °/, du poids de ces derniers. C’est ce + l’on observe avec les pois, les haricots. Mais si Jon fait les mêmes déterminalions sur des graines “oléagineuses, le rendement en poids de substance “vivante peut dépasser 50 °/, et mème 100 °/, du poids perdu par les cotylédons. Les graines d'ara- chides en constituent un exemple. Ce résultat n'a pas le droit de nous étonner; on sait, en effet, que les matières grasses se transforment en sucre “avant d'être assimilées, c'est-à-dire incorporées “aux substances vivantes. Cette transformation est accompagnée d’une fixation d'oxygène sur les sub- “lances grasses qui a pour résultat de doubler à peu près leur poids initial, de sorte que le poids éel des réserves lernaires assimilées est encore le “double de celui des plantules formées. L'ensemble de ces faits permet de conclure que alcool doit être considéré comme un produit de digestion du sucre. # Lorsqu'il reste inutilisé, c'est une preuve que la D qui le produit ne dispose pas de l'oxygène écessaire à son assimilation, si elle est aérobie; si, au contraire, elle est anaérobie, l'accumulation de l'alcool est due à ce fait que l’action de lazymase, ne se réglant pas sur les besoins de la cellule, pro- ci plus d'alcool qu'il ne s'en consomme. Ces conclusions, qui sont démontrées pour Valcool, doivent être admises également pour les autres produits de fermentalion, de sorte que l’on peut dire qu'il existe autant de processus d'assimi- Jation du sucre que de modes de fermentation auxquels il peut donner lieu. Ces modes de fermen- falion sont très limilés. On connaît, en effet : les fermentations lactique, alcoolique, acétique, butyrique. Je dois ajouter que l’on a trouvé bien d’autres Substances dans les liquides en fermentation; un certain nombre d’entre elles peuvent être rattachées au dédoublement du sucre; mais la plupart se présentent comme des produits de désassimilation ou se forment par l'intervention de réactions secon- daires. + Dans toutes les fermentations, on peut dire que l’une des substances énoncées prédomine; mais elle ne se rencontre jamais seule; c'est ainsi que la fermentation lactique est accompagnée de pro- duction d'alcool et d'acide acétique ; la fermenta- tion alcoolique elle-même, lorsqu'elle est due à la levure, ne se limite pas à un dédoublement du sucre en alcool et acide carbonique: il y a en même temps formation de glycérine, d'acides succinique et acétique; on verra plus loin ce qu'il faut penser de ce fait. Les fermentations butyriques, enfin, entrainent toujours une production d'acides vola- tils et d'alcool butylique. Quelques-uns de ces corps peuvent se former aussi successivement, aux dépens les uns des autres, et non directement aux dépens du sucre. C'est ainsi que l'acide lactique doit être considéré comme un produit intermédiaire entre le sucre et l'alcool. Cela veut dire que la zymase est constituée par deux diastases, dont une dédouble le sucre en deux molécules d'acide lactique, tandis que l’autre dédouble ensuite l'acide lactique en alcool et acide carbonique. Cette conclusion résulle de mes recherches sur l’assimilalion de Pacide lactique par l'Eurotiopsis. Si l'on considère, en effet, le rende- ment en poids de myeélium fourni par l'acide lac- tique, et si l'on rapproche des résultats oblenus de cette façon ceux qui sont fournis par l'étude des échanges gazeux, on est conduit à admettre que l'acide lactique est dédoublé en alcool et CO” avant d'être assimilé. Le fait que le mycélium d'Euro- Liopsis, cultivé sur milieu Raulin qui ne renferme que de l'acide lactique comme unique aliment car- boné, puis immergé dans le liquide nutrilif, produit de petites quantités d'alcool aux dépens de l'acide lactique, est d'accord avec la conclusion précédente. Les deux diastases qui constituent la zymase de la levure sont en proportions telles que leurs aclions se font toujours équilibre dans la fermen- tation alcoolique produite par la levure; l'acide lactique ne semble pas se former dans les condi- tions ordinaires de la fermentation; mais si, par une action quelconque, on réussit à détruire la deuxième diastase en plus forte proportion que la première, les actions des deux diastases ne se feront plus équilibre, et une partie de l'acide lac- tique reste libre. C'est ce qui résulte des essais de MM. Buchner et Meisenheimer sur le suc de levure. Ces savanis ont constaté que non seulement la zymase obtenue par l'emploi de hautes pressions produit de l'alcool aux dépens du sucre, mais 212 P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE encore de l'acide lactique et de l'acide acétique : ce dernier d’une facon tout à fait régulière, le premier seulement dans quelques cas; mais cetle irrégularité même est, dans la circonstance, un argument en faveur de la dualité de la zymase, puisque les causes de destruction peuvent affecter plus fortement l’une ou l’autre des deux diastases. Si, au lieu de prendre comme exemple de fer- mentation alcoolique celle qui est produite par la levure, onu considère celle qui résulte de l’action des ferments lactiques sur les sucres fermentes- cibles, on constate que les deux diastases sont toujours réparties inégalement dans ces espèces bactériennes; on trouve toujours de l'acide lactique et de l'alcool, si bien qu'en réalité il faut distraire de la nomenclature des types de fermentation la fermentation lactique, qui n'est qu'une élape dans la fermentation alcoolique. Nous voyons ainsi que la plupart des cellules vivantes, bactériennes ou végétales, mettent en œuvre des processus de digestion du sucre en nombre très restreint. Une plantule de pois, un champignon, une levure, une bactérie, exercent les mêmes actions sur le sucre, et, si l’on remarque que les phénomènes de fermentalion ne sont que des cas particuliers de la digestion des sucres, se manifestant dans des conditions particulières, on est bien obligé d'admettre que les fermentations ne sont pas spécifiques. Et telle est la loi du pro- grès que les interprétations les plus élémentaires, les mieux établies en apparence, se modifient de Jour en jour à mesure que la moisson des faits devient plus abondante. IIT. — VIE ANAÉROBIE DE LA LEVURE. Dans l'exposé des faits que je viens de déve- lopper dans les chapitres précédents, je n'ai rien emprunté aux connaissances, pourtant si étendues, que nous possédons sur la levure. C'est une omis- sion volontaire. La levure ne se prête pas, en effet, à la démonstration des conclusions que j'ai résu- mées. Celles-ci s'appliquent cependant à la levure végélative, laquelle se multiplie activement au contact de l'air, absorbe de l'oxygène gazeux, et ne produit pas d'alcool libre. Mais si l’on ensemence une trace de levure, em- pruntée à une culture Jeune en surface, dans un milieu privé d’air aussi complètement que pos- sible, on constate que la levure se développe acli- vement et fait fermenter énergiquement le sucre. Dans les mêmes conditions, les spores d'Æuro- liopsis ne germent pas; un fragment de mycélium jeune n'augmente pas de poids; une culture entière encore jeune s'arrête dans son développement et s’aulophagie; la fermentation qu'elle peut provo- quer est due à la zymase formée en vie aérobies elle diminue d'activité à mesure que la zymase se détruit, et cela à partir du moment où l'atmosphère confinée ne renferme plus d'oxygène. Si les phénomènes observés avec la levure privée d'air sont si différents de ceux que l’on constat avec l’£urotiopsis, il faut en conclure que la levure met en œuvre un processus d'assimilation du sucre qui n'existe pas chez l’Zuroltiopsis. L'alcool n’est pas un aliment de la vie anaérobie puisqu'il doit être oxydé avant d'être assimilés mais, s'il est accompagné d'un autre produit de fermentation capable de fournir à la levure, à l’état combiné, l'oxygène qu'elle tire de l’air pendant vie végélative, sa multiplication deviendra possible à l'abri de l'air. Il faut donc rechercher si, parmi les produits secondaires qui accompagnent l'alcool, il n’existe pas un composé capable de remplir ce rôle. J'ai établi que l'acide acélique doit être consi dedigestion du sucre ; MM. Buchner et Meisenheimer avaient montré, quelques mois auparavant, que le suc de levure, en présence du sucre, donne nai sance à de l'acide acétique; mais ils ne sont pas rôle physiologique qu'il est capabie de remplir viss à vis de la levure. abondance pour qu’on ne puisse pas le considérer exclusivement comme un produit de désassimilas par la levure, rapproche l’action de la levure de celle des ferments lactiques qui peuvent se déve lopper également à l'abri de l'oxygène. Comme tous les processus de fermentation anaë robies, celui qui caractérise l’action de la levure dm l'abri de l'air se résume au moins dans deux fers mentations : la fermentation alcoolique et la fer mentalion acétique. C'est ee qui permet à la levure de se mulliplierà l'abri de l'air et de prendre directement aux al ments l'oxygène combiné qui remplace, jusqu’à ui certain point, la part importante qu'elle prélève s l'atmosphère lorsqu'elle mène la vie végétalive. dis jusqu'à un certain point, car on sait que développement de cet organisme est limité à l'abmbW de l'air. Au bout d'un temps plus ou moins longs on remarque, en effet, d'après les expériences d | Denys Cochin, que la levure ne peut plus se mule tiplier dans un milieu neuf si l'ensemencement sè fait à l'abri de l'air durant un certain nombre de passages d'un milieu dans un autre; mais si, comme Pasteur l'a observé, on lui rend une petite bullew d'air, la fermentation repart bienlôl. | C'est ce qui distingue la levure des ferments stric=\ P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VEGÉTALE tement anaérobies; cela tient à ce que la première ne peut pas emprunter de l'oxygène à l'eau, tandis que les derniers trouvent, dans ce composé qu'ils peuvent réduire, une source illimitée d'oxygène. La fermentation alcoolique provoquée par la levure est donc une conséquence de la vie anaérobie limitée de cet organisme. La zymase se conserve dans ces condilions, et, comme le globule se mul- tiplie activement, la quantité de zymase suit la même progression; une fois formée, elle agit sur le _ sucre indépendamment du besoin de la levure, et “son action se poursuit jusqu'à ce qu'elle soit en- tièrement détruite. La levure cesse de se multiplier au bout d'un “Lemps relativement court si la température est élevée; dans des cultures faites à l'abri de l'air, à la tempéralure de 30°, dans 200 centimètres cubes de liquide, ensemencés avec 30 à 50 milligrammes de levure, sa multiplication fournit un poids de substance vivante dix à vingt fois supérieur au poids de la semence ; la prolifération est terminée “au bout de trente-six heures environ; mais la fer- mentation se poursuit pendant des semaines, si la quantité de sucre offerte n'est pas transformée complètement avant ce délai. Ce phénomène doit être considéré ici encore comme un cas particulier d'un phénomène de digestion, car on ne peut pas admettre que la zymase se forme exclusivement dans le but de procurer au végétal l'énergie néces- aire à l'édification de ses tissus, puisque la proli- féralion cesse dès le début et que la cellule entre dans la période d'autophagie; la chaleur dégagée par le dédoublement du sucre en alcool et CO* s'ajoute à celle, très faible il est vrai, que four- nissent les phénomènes de protéolyse, pour élever la température des cuves en fermentalion. IV. — LES PHÉNOMÈNES D'ASSIMILATION ET DE DÉSASSIMILATION DANS LA CELLULE VIVANTE. L - Jusqu'ici je n'ai envisagé, on l'a vu, que les phé- nomènes de digestion accomplis par la cellule “vivante. Que devient l'alcool auquel semblent aboutir toutes les transformations diaslasiques que Ja cellule aérobie imprime aux aliments ternaires ? L'oxygène, je le répète, est nécessaire à son assi- milation ; or, le premier terme d'oxydation de l'al- cool est l'aldéhyde. Rien n'est plus facile que de faire apparailre ce corps dans les milieux de cul- ture où l’on fait germer des graines ou pousser des moisissures ; il suffit d'immerger les unes et les autres pour voir se former d'abord l'alcool, puis l'aldéhyde sous l'influence d'une oxydation très ménagée et en l'absence de toute assimilation ; mais, dans les conditions de vie normale, ce com- posé fait défaut; il disparait à mesure qu'il se 213 forme, et, à partir de ce moment, on ne trouve plus de produits plus oxydés pouvant être considérés comme des intermédiaires entre l'alcool d'une part, l'eau et l'acide carbonique de l’autre. Si j’aldéhyde participe intégralement à l'élabora- tion des substances vivantes, la composition élé- mentaire du mycélium très jeune, obtenu sur un milieu minéral ne renfermant que du sucre ou &e l'alcool comme aliment carboné, devra être très voisine de celle de l’aldéhyde, défalcalion faite de l’ammoniaque. L'analyse vérifie celte prévision et montre même que la cellule très jeune est moins riche en oxygène que l’aldéhyde, ce qui prouve que l'organisation de la substance vivante est accom- pagnée d'une réduction parlielle de l’aldéhyde. Si l’on détermine à ce moment la valeur du quo- tient respiratoire, on trouve qu'elle est notablement supérieure à 1; elle est comprise entre 1,2 et 1,5 chez l'Æurotiopsis; ce résultat s'explique par la prédominance marquée de l'acide carbonique de fermentation, autrement dit de digestion. Mais, à mesure que les cultures vieillissent, la composition élémentaire du mycélium dénole un enrichisse- ment graduel en oxygène, et, corrélativement, !a valeur du quotient respiratoire baisse peu à peu et tend vers l'unité, si on le délcrmine d’après la tota- lité des échanges gazeux. Les modifications que l’on observe dans les cons- tiluants de la cellule portent surtout sur les mem- branes cellulosiques, qui s'épaississent en vieillis- sant, pendant que, d'un autre côlé, leur proportion relative va en augmentant. Les substances cellulo- siques semblent done résulter du travail de désas- similation des malières vivantes, ou, si l'on veut, d'un travail d'élaboration qui se fait aux dépens des éléments constituants des substances proto- plasmiques. C'est là encore une interprétation qui est en désaccord avec l'opinion, universellement admise, qui fait dériver les celluloses d'un phéno- mène de polymérisation des sucres plus avancé que celui qui aboutit à l'amidon, dont les relalions avec les sucres sont évidentes. Ce qui m'aulorise à insister sur cette question, qui mériterait d'être étudiée à fond, c'est ce fait que les moisissures, alimentées exclusivement avec de l'alcool, de l'acide lactique, et même de l'alcool méthylique, forment leurs membranes cellulosi- ques aux dépens de substances qui ne peuvent pas se transformer directement en sucres. On ne concoit pas que l'alcool, en particulier, puisse repasser à l'état de sucre pour redevenir assimilable, et, si les celluloses se forment aussi bien, sinon mieux, dans les milieux alcoolisés que dans les milieux sucrés, il faut admettre précisément que ces substances sont élaborées aux dépens des substances vivantes par voie d'oxydation. 214 + P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE Rien ne permet d'étendre ces conclusions aux végétaux supérieurs; mais je dois faire remarquer cependant que, si ces substances peuvent être con- sidérées comme des produits de -désassimilation des malières protoplasmiques par voie d'oxydation, on peul prévoir que le quotient respiratoire sera d'autant plus faible que leur proportion relative dans la masse du végétal sera plus élevée. Il suffit de rappeler, à ce sujet, que les recherches de MM. Bonnier et Mangin ont établi que le quotient respiratoire des végétaux supérieurs est notable- ment inférieur à l'unité. Cette contradiction dans la valeur du quotient respiratoire entre deux calé- gories de végétaux, les champignons et les végé- laux supérieurs, nourris exclusivement de sucre et d'éléments minéraux, s'explique par ce fait que les premiers sont moins riches en celluloses que les seconds. On à le droit, par conséquent, d’opposer cette hypothèse à celle qui fait dériver les celluloses des sucres par voie de polymérisations, sil'on songe surtout que celle-ci repose sur une simple analogie de constilution élémentaire, et non sur des faits d'observation, si l’on ajoute, enfin, que l’hydrolyse des substances cellulosiques n'aboutit pas exclu- sivement à des hexoses. Ces considéralions nous conduisent peu à peu à une conception de l'assimilation et de la désassi- milalion dans les substances vivantes que j'ai déjà eu l'occasion de traduire de la facon suivante : « On peut concevoir que l'édifice moléculaire d'une substance vivante puisse ne jamais se créer de toutes pièces; la semence qui l’a héritée de ses an- cêtres la transmettra à ses descendants. Quand la germination commence, c'est le travail d'entretien qui apparail, de sorte que la vie semble se mani- fester d’abord par un processus de désassimilation qui donne naissance à de l'acide carbonique, de l’eau, des hydrates de carbone insolubles, des ma- tières grasses, des résidus azotés, ete. Cette usure réduit l'édifice moléculaire inilial, l'entame en quelque sorte de tous les côtés, et c'est pour réparer ces pertes que l'être vivant fait des emprunts in- cessants aux aliments dont il dispose; mais il ne les prend pas sous les formes où ils se présentent ; il les prépare par un travail de digestion, les dis- loque, provoque des ruptures qui font naître des fonctions chimiques nouvelles, douées de grandes affinités qui leur permettent de se combiner à la molécule de substance vivante, de contre-balancer ses perles, d'augmenter son poids. C'est dans ce dernier cas qu'il y a multiplication cellulaire. » Si l’on met en regard de cette interprétation l'o- pinion que Ciaude Bernard a émise sur le mème sujet, on s'apercoit sans peine qu'elles sont iden- tiques. Claude Bernard dit, en effet : « Nous n'assis- tons pas à la synthèse directe du protoplasma pri- milif, non plus qu'à aucune autre synthèse primitive dans l'organisme vivant. Nous constatons seulement le développement, l'accroissement de la maté vivante; mais il a toujours fallu qu'une sorte des levain vital ait élé le point de départ. Au début du développement d’un être vivant quelconque, il y a un protoplasma préexistant qui vient des parents et siège dans l'œuf. Ce protoplasma s'accroît, sex mulliplie et engendre tous les protoplasmas de l'organisme. En un mot, de même que la vie de l'être nouveau n’est que la suite de la vie des êtres qui l’ont précédé, de même son protoplasma n’est que l'extension du protoplasma de ses ancêtres C'est toujours le même proloplasma, c’est toujours le même être. Le protoplasma a la propriété dem s’accroitre par synthèse chimique; il se renouveiles à la suite d'une destruction organique. Ces deux propriétés constituent la vie du protoplasma. » Nous sommes là dans le domaine des hypothèses, et il ne semble pas que ces notions doivent jamais en sortir. Elles sont cependant accessibles à l'expérience par un certain côté. J'ai, d’ailleurs, dans toul IG cours de cette discussion, laissé entrevoir que les faits indiquent plutôt que le travail d’oxydation dont les cellules aérobies sont le siège s'effectue aux dépens de la molécule de substance vivante même, etnepeut pas être assimilé à la combustion du charbon dans le foyer d'une machine. Cette déduction résulte de l'absence totale de composés intermédiaires entre l'alcool, par exemple, et les produits de sa combustion totale, dans une cellule qui fonctionne normalement. Mais on peut les faire apparaître facilement, en particulier dans les champignons, où la combustion s'arrête à l'acide oxalique dès que les conditions de la vie deviennent difficiles. De même, chez les végélaux supérieurs, on trouve toujours des acides organi=« ques, tels que l'acide oxalique, l'acide lartrique, l'acide malique, l'acide citrique, ete. Chacun de corps caractérise, suivant l'expression de M. Du claux, autant de modes de respiration différents: Puisqu'ils se présentent, d'autre part, comme autanb d'intermédiaires entre le sucre, d'un côté, l’eau eb le gaz carbonique, de l’autre, l’étude du mécanisme de leur formation nous permeltra de conclure entre la théorie de la combustion directe et celle de l’oxydation ménagée de la substance vivantes J'ai entrepris cette étude avec la collaboration des M. A. Perrier, en prenant comme exemple la pros duction d'acide cilrique par les Citromyces, pro priété particulière de certains Penicillium décous verts par Wehmer. Ces champignons, cultivés sur des milieux miné: | raux addilionnés de sucre, forment des quantités relativement très élevées d'acide citrique. F P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE Le lableau V résume les résultats fournis par une série de cultures faites sur du bouillon de haricot addilionné de glucose en excès. Chaque culture renfermait, au début, 100 centi- mètres cubes de bouillon, 11 gr. 627 de glucose et 22 milligrammes d'azote. Il résulte des chiffres du tableau V que l'acide Misceau V. — Production d'acide citrique aux dépens du sucre par les Citromyces. POIDS SUCRE ACIDE AZÔTE RENDEMENT | du CITRIQUE acide citrique disparu disparu sucre s| mycélium formé jours L gr. gr. 14 traces 1S 21 21 3% 41 57 toe-uwe sx Éd À US co 19 = 19 L “itrique apparaît quand la culture à atteint à peu “près le maximum de son développement; à partir de ce moment, le poids de mycélium augmente peu, l'azote assimilé ne varie pas non plus; mais l'acide citrique va loujours en croissant pendant que le Glucose diminue. Tout se passe donc, en appa- rence, comme si l'acide citrique se formait à partir “du moment où l'azote assimilable du milieu est épuisé, et l’on peut, en effet, retarder ou avancer “apparilion de ce corps en faisant varier les doses d'azote. Si l'acide citrique prend naissance par voie d'oxy- “dation directe, l'équalion suivante traduit le phé- Dre : (1) C°H!°0° + 3 O = CH*07 + 2 H°0. _ On peut supposer que cette transformation est lœuvre d'une diastase oxydante sécrélée par le ycélium; mais il est impossible de l'isoler du champignon. - À cette équation, on peut en opposer une autre, plus conforme aux résullats acquis sur le mode à assimilation du sucre. On a vu, en effet, que le Sucre est dédoublé en alcool et acide carbonique, et que l'alcool seul est incorporé à la substance | Vivante après une oxydation préalable. Les Citro- myces n'agissent pas autrement sur le sucre, car ils produisent de l'alcool lorsqu'on les prive d'air se montrent capables d'assimiler directement | 4 offert en nature. On peut done admettre que l'acide citrique se forme par un processus de désassimilation de la substance vivante, parce que la combustion s'arrête à ce terme lorsque le milieu ne renferme plus d'azote assimilable, pendant que lesucre est encore abondant. Le mycélium continue 215 de proliférer lentement dans ces conditions; les cellules jeunes empruntent leur azote aux cellules âgées, et c'est ce travail de protéolyse qui pro- voque la mise en liberté des groupements ternaires combinés à l'azote, au nombre desquels se trouve l'acide citrique. Les équalions suivantes rendent compte de ce processus : CSH1205— 2 C*H‘O + 2 CO? ;: 3 C*H°O + 90 = CH"07 + 5 H°0. En ajoutant 6 CO* à chacun des membres de la dernière équation après les avoir doublés, on peut, en remontant au sucre, la mettre sous la forme suivante, qui permet de la comparer plus facile- ment à l'équation (1): 3 CH206 + 18 O0 — 2 CSH#07 + 10 H°0 + 6 CO*. L'équation (1) prévoit un rendement de 106 envi- ron d'acide ceitrique pour 100 de sucre disparu; l'équation (2) un rendement de 70 °/, environ. Les résultats consignés au tableau VIne permet- tent pas de faire le calcul du rendement d'une ma- nière exacte, car on ne peut pas élablir le départ entre le sucre qui a servi à construire et à nourrir le champignon, et celui qui a été transformé en acide citrique. Mais il suffit de retrancher ie sucre con- sommé par une culture quelconque de celui qui a disparu dans la culture suivante, de faire égale- ment la différence des poids d’acide citrique cor- respondants, pour éliminer, en partie, l'influence du sucre absorbé par le mycélium sur le caleul du rendement. On obtient de cette façon les rendements consi- gnés au tableau VI. Tagceau VI. — Rendement en acide citrique du sucre consommé par les Citromyces. DURÉE | POIDS DIFRÉRENCES DIFFÉRENCES ere des du sucre consommé ies GARE | LE d'une culture d'acide citrique DEMENT| cultures| mycélium Here produit | —— jours gr. gr. 18 0,199 » » | 21 0,797 0,463 21 0,851 0.995 34 0,890 1,049 47 1,033 3,092 57 1132 1.249 Ces chiffres, comme l'on voit, sont plutôt d'accord avec les indications tirées de l'équation (2); si les rendements avaient élé supérieurs à 70 °/,, on aurait dû admettre la tranSformation traduite par l'équation (1). L'équation (2) nous permet de prévoir que les Citromyces produiront de l'acide citrique aux dé- pens de toutes les substances ternaires qu'ils sont 216 capables d’assimiler, à condition, toutefois, qu'elles constituent des aliments supérieurs à l'acide ci- trique, car les Citromyces se développent très bien aux dépens de l'acide citrique. Parmi les subs- lances lernaires capables de nourrir ces champi- gnons, On peut citer : les acides oxalique, tartrique, malique, succinique, lactique, la glycérine, l'alcool éthylique, ete. Les acides organiques se sont montrés incapables de favoriser la production d'acide citrique; mais il n'en est pas de même de la glycérine et de l'alcool. La glycérine donne des rendements comparables au glucose; l'acide citrique qui en dérive n'’esl donc pas seulement le résultat d’une oxydation; c'est, en outre, un produit de synthèse. L'alcool produit également des quantités assez élevées d'acide citrique; le tableau VII reproduit quelques-uns des chiffres que nous avons obtenus : TaBceau VII — Production d'acide citrique aux dépens de l'alcool par les Citromyces. POIDS ALCOOL ACIDE du à CITRIQUE mycélium | restant formé gr. Cultures sur 0,279 milieu alcoo-\ LISE PTE 003: ,0 0,267 Culture témoin n'ayant pas RECONSICOUI SRE ,9: » Ces cullures n'avaient pas été addilionnées de carbonate de calcium; celles qui avaient recu de l'alcool étaient très acides, la culture témoin pré- sentait une réaction alcaline. Ces résultats sont d'accord avec l'équation (2); et il devient, dès lors, évident que la formation d'acide citrique ne saurait être attribuée à une action diastasique simple, susceptible d'être repro- duile in vitro, puisque la diastase devrait trans- former des composés aussi différents que le sucre, la glycérine et l'alcool. Pour montrer que l'acide citrique est le résullat d’un phénomène de protéolyse s'exerçant sur les substances protoplasmiques qui renferment les groupements générateurs de l'acide citrique, il suffit de priver d'air une culture bien développée, au moment où ce composé n'a pas encore fait son apparition; on oblient, dans ces conditions, des quantités sensibles d’acide citrique; on ne saurait en obtenir de grandes quantités, puisque les grou- pements générateurs ne peuvent pas se reformer à l'abri de l'air. L'acide citrique doit donc être considéré comme un produit de désassimilation se formant seulement dans les milieux riches en sucre ou en substances ternaires alimentaires, comme la glycérine et l'alcool, au moment où ces milieux ne renferment P. MAZÉ — L'HUMUS ET L'ALIMENTATION CARBONÉE DE LA CELLULE VÉGÉTALE plus d’azole assimilable. Ces aliments sont d'abord assimilés, c’est-à-dire incorporés à la substance vivante suivant le processus que j'ai développé au sujet de l'alimentation de l'Æurotiopsis et des végé« taux supérieurs ; ils sont alors oxydés sur les subs 4 lances protoplasmiques mêmes et transformés progressivement en eau et acide carbonique, si l'alimentation est normale, ou, au contraire, €I acides organiques, si les aliments azotés viennent faire défaut, ou si ces condilions de milieu devien= nent défavorables. Les acides, si répandus dans les végétaux supé rieurs, se forment probablement suivant le même mécanisme; là, en effet, les conditions qui favo |; risent leur mise en liberté constituent pour ainsi dire la règle. Les végétaux à chlorophylle assurent régulièrement leur alimentation hydrocarbonées mais leur alimentation minérale, en particulien leur alimentation azotée, dépend d'un certair nombre de conditions extérieures sur lesquelles elles n'ont aucun pouvoir; et c’est pour cela que l'acidité des sues de certains végélaux varie d'un instant à l’autre. $ ces phénomènes d'oxydation, qui portent directes ment sur les substances protoplasmiques, il y en à d’autres qui relèvent d'une fixation directe d'oxygène : telles sont, par exemple, la trans for mation des matières grasses en sucres, la formation d'acide acétique aux dépens de l'alcool; mais ces phénomènes doivent être considérés comme des actes de digestion. V. — RÉSUMÉ DES CONCLUSIONS. Les conclusions suivantes ressortent de cetlen revision rapide des théories de l'alimentation riné=n rale et hydrocarbonée de la cellule vivante : 19 LE végétaux supérieurs, les champignon, et ne leurs éléments constitutifs à des alimen minéraux, à condition qu'on leur offre une subs= tance ternaire capable de fournir le carbone « même temps que l'énergie nécessaire aux manifes= talions de la vie de la cellule; pas directement, et sans dissociation de sa molés, cule, de la solution dans la plante; elle est, & réalité, décomposée par les micro-organismes, el ce sont ses éléments minéraux qui, au fur ebñ dans la racine du végétal supérieur: | Les végétaux à chlorophylle peuvent naturelle ment se passer de tout abinent organique ; mais i D' FÉLIX REGNAULT — LA MORPHOGÉNIE OSSEUSE solutions minérales et les assimilent au même titre que ceux qui résultent de la synthèse chlorophyl- lienne ; 3° Les processus d'assimilation des sucres sont les mêmes dans toute l'étendue du règne végétal; les produits de fermentation sont des produits de digestion; ils nous indiquent que les modes de digestion des sucres que la cellule vivante met en œuvre sont relativement peu nombreux. Les Cellules anaérobies réalisent simultanément plu- sieurs de ces processus; chez les cellules aérobies, est la digestion alcoolique qui prédomine, et peut- être même se manifesle-t-elle à l'exclusion de toutes les autres ; « 4° Les phénomènes de combustion respiratoire portent sur les substances vivantes, de sorte que Jes portions assimilables des aliments hydrocar- bonés font partie intégrante des matières proto- plasmiques et en sortent à l’état de produits oxydés, tels que l’acide carbonique, l'eau ou les acides organiques, suivant les conditions de vie imposées à la cellule. On peut se demander jusqu'à quel point ces résultats peuvent s'appliquer à la cellule animale ; M. Duclaux n'a pas hésité à proclamer que celle- ci ne fait pas exception à la règle générale; mais, avant d'aborder ce sujet, je passerai quelque jour en revue les théories qui ont cours sur l'alimen- tation azotée de la cellule vivante. Pierre Mazé, Docteur ès sciences, Ingénieur agronome, Chef du Laboratoire de Chimie agricole à l'Institut Pasteur. …— Déjà, sous l'influence de l'hérédité, le squelette du fœtus revêt une forme générale préadaptée aux fonctions motrices qu'il aura plus tard. Sans nous occuper de savoir comment s'explique la transmis- sion héréditaire, notons que la forme des os n'est encore qu'ébauchée : ils sont lisses et unis; on n'y voit pas les mille détails, saillies et creux, qui s'y arqueront par la suite; parmi les apophyses, EL les plus volumineuses, l’olécrane, le tro- hanter, etc., sont déjà constituées". Quand les mouvements s’établissent chez l'enfant, on voit apparaître et se développer lentement les Saillies et les creux qui caractérisent les os adultes. Il semble bien que ces transformations soient dues Mlactiondes organes et principalementdes muscles; tant, dans certaines maladies fœtales, on peut observer déjà action des muscles sur la forme des os. Ainsi, chez l'achon- üplase, les muscles plus épais agissent profondément sur S os des membres, qui sont courts et gros: le fémur, au eu d'ètre ovale et lisse, a une crête postérieure saillante et S surfaces latérales excavées; de même les tibias, les érus, etc. Dans le rachitisme fœtal, l'os, devenu mou, résiste moins à l'action musculaire, qui déjà le courbe, l'aplatit et fait Saillir sa ligne àpre (voir Musée Dupuytren, n° 513). Enfin, Sur un fœtus atteint de luxation congénitale (739, c. M. Du- ytren), j'ai trouvé des fémurs aplatis suivant leur dia- mètre transverse et avec une crète postérieure. À l'examen radiographique, la substance compacte était plus épaisse en déhors, et le canal médullaire porté en dedans; ici on doit invoquer la contracture musculaire, que bien des auteurs regardent comme la cause mème de la luxation. LA MORPHOGENIE OSSEUSE ï EXPLIQUÉE PAR L'ANATOMIE PATHOLOGIQUE pourtant, certains veulent y voir la force héréditaire qui continuerait à agir après la naissance. Mais l’action des organes est incontestable quand les modifications osseuses sont consécutives à des changements dans la statique et les mouvements. Tel, entre mille, l'exemple du vieillard édenté chez qui la mandibule se transforme, ce qui prouve, de plus, la constante malléabilité de l'os même à un âge avancé. On trouverait d'autres preuves dans les modifications osseuses professionnelles; elles ont été malheureusement peu étudiées. Les expériences de vivisection offrent aussi des exemples précis et indéniables de cette action des organes sur les os. Le physiologiste, en détruisant intentionnellement certains muscles, certains nerfs ou certains organes, voit par suile les os se mo- difier. Nombre de chercheurs, entre autres Fick, Gudden, mon maitre le Professeur Marey, et récem- ment son élève Anthony, ont suivi cette voie; mais de telles recherches sont délicates, demandent beaucoup de temps et sont souvent d'une interpré- tation difficile. Les maladies, enfin, comme l'a autrefois indiqué Jules Guérin’, réalisent spontanément de véritables expériences, qui ont une valeur aussi grande que celles des physiologistes. Tout récemment, les tra- vaux de Julius Wolff” ont définitivement élabli cette valeur en démontrant : 1 Juzes Guérn : Essai de Physiologie générale, 1868, p. 7. ? Juurus Wozrr : Das Gesetz der Transformation der Kno- 218 D' FÉLIX REGNAULT — LA MORPHOGÉNIE OSSEUSE À Que les changements dans la forme et la struc- ture des os consécutifs à une maladie osseuse sont dus, non à la maladie elle-même, mais aux modi- fications motrices qu'elle occasionne; Que ces changements se montrent dans le cours de la maladie et non, comme certains l'ont pré- tendu, seulement à la convalescence ; Qu'enfin il suffit de rendre aux membres malades leur fonctionnement normal pour voir les os reprendre leur forme et leur structure normales. Les pièces conservées dans nos musées cons- tituent donc des documents d'extrême importance pour quiconque étudie les problèmes de morpho- génie osseuse. Leur multitude nous offre, de plus, une richesse de faits incomparable. Sans doute, on peut objecter qu'en bien des cas il est difficile de saisir la cause mécanique des déformations. Mais, en d’autres cas, celle cause apparaît évidente; ici, comme en toute science d'observation, il faut savoir choisir. Pour cela, ilest nécessaire d'étudier patiem- ment, d'analyser tous les faits, et enfin de les com- parer. C'est à quoi peu d'anatomistes se résolvent; mais, silôt qu'ils ont un squelette ou quelque os pathologique qui les étonne, ils l’étudient isolément avec détails et se lancent dans des considérations générales qui, n'ayant pas d'autre fondement, ont, par suite, grande chance d'être fausses. Depuis douze ans, je me suis livré à cette pas- sionnante étude, analysant un à un les faits en des monographies spéciales qui ont paru dans les re- cueils des Sociétés d'Anthropologie, de Biologie et surtout Anatomique. Aussi leur ensemble me per- met-il, aujourd'hui, d'entrevoir quelques vérités générales que je veux exposer ici. J'étudierai successivement l’action des organes mous sur les os, puis celle des muscles, qui #st plus complexe. I. — ACTION DES ORGANES EN CONTACT AVEC LOS. Par quel mécanisme les glandes submaxillaire et sublinguale se creusent-elles chacune une fosse à la face interne de la mandibule, les vaisseaux fa- ciaux forment-ils un sillon sur le bord inférieur de cet 05, la veine frontale creuse-t-elle parfois un lit sur la face externe de l'os frontal, les vaisseaux et nerfs intercostaux s'impriment-ils sur les côtes, les circonvolutions cérébrales sur l'endocrane, ete.'? chen. Berlin, 1, 4872. — J. Worrr : La théorie de la patho- génie fonctionnelle des déformations, trad. par le Dr Bil- haut. Paris, 1897. — J. Wozrr : Forme et fonction, leur rap- port réciproque dans l'organisme, trad. par Tavel. Paris, 19041. 1 De même, certaines tumeurs bénignes peuvent déprimer l'os sans le détruire, comme font les cancers et anévrismes. Le n° 442 du Musée Dupuylren en est un bon exemple. — ! Il semble que mème le tissu cellulo-adipeux lâche puisse, en cerlaines circonstances, déprimer l'os : ainsi s'expliquerait la formation de certains creux, comme le creux poplité. Quelques auteurs admettent que le simple contael de l'organe sur l'os suffit à les produire, en constis tuant un obstacle à la formation du tissu osseux tandis qu'à la périphérie l'os se forme librement en bord épais. Le D'Papillault, notamment, explique ainsi la formation des empreintes des circonvolu= tions sur l'endocrane‘. Une pareille théorie s’appli querait fort bien à l'insertion du muscle des Mol lusques sur la coquille, qui offre une dépression pou le recevoir, car la sécrétion de substance calcaire se faisant autour du muscle a exhaussé la surface libre. Bien différente est la formation de l'os par le périoste. Tout organe en contact avec le périoste esb séparé de sa couche profonde, qui seule forme l'os par sa couche fibreuse superficielle. Il ne peut done agir à travers celle-ci par simple contact: il faut qu'il la comprime. Prenons pour exemple les empreintes des cir convolutions sur la surface interne du crâne; elles sont dues à la pression du cerveau, organe vaseur laire et expansible enfermé dans une boite era nienne rigide. À la base du crâne, le poids du cer veau ajoute son action; aussi les circonvolutions sont-elles plus profondément marquées. S'il se pro duit des changements dans l'équilibre statique du cerveau : cyphose, scolioses, torticolis, les em preintes des circonvolutions marquent davantag@ sur les parties déclives. À l'opposé, si une partie où la tolalilé de l'encéphale ne se développe pas, les reliefs et les creux correspondants ne se formeronb pas sur la surface interne du cràne. Geoffroy Sain Hilaire l'avait déjà observé : « Quand, dit-il, le masses encéphaliques, sans manquer entièremen n'arrivent pas à leur développement ordinaire, le os en éprouvent une moindre poussée et des parties rondes apparaissent en remplacement des surfaces aplaties. » Mais d’autres facteurs que la pression du cerveau influent sur le résultat. Il faut tenir compte de la résistance des différents tissus qui l'enveloppents Tout d'abord, /a dure-mère, qui joue le rôle de périoste interne. Est-elle pathologiquement irritées elle amène une prolifération osseuse aux poinls non comprimés par les circonvolutions, d'où la for mation de crêtes minces, à base étroite, à bord frangé, bien différentes des saillies normales qui ont une large base et un sommet mousse et régur lier. Dans les cas de pachyméningite, au contraires les circonvolutions sont aussi altérées et ne come priment plus la dure-mère; la prolifération osseusen est uniforme, saillies et creux disparaissent : jai pu observer de nombreux crânes ainsi déformés 1 Dr ParizzauLr : Mémoire de la Soc. d'Anthropol. Parisk | t. II, 3° série, 1 fascicule, 1896, p. 106. | D' FÉLIX REGNAULT — LA MORPHOGÉNIE OSSEUSE 219 au Musée de la Société d'Anthropologie, et à celui de M. Bourneville, à Bicètre. — Dans le rachitisme, les circonvolutions arrivent à détruire l'os (craniotabès). Bien qu'on l'ait con- Leslé, ces perforations sont dues à la pression des “circonvolutions, quiempèche la dure-mère, dont la nutrition est alanguie, de former de la substance “osseuse : car elles se produisent du côté où la tête s'incline, c'est-à-dire où le cerveau pèse le plus sur la paroi cranienne, et les bords de la perforation reproduisent les moindres détails des circonvolu- tions. » Plus la paroi osseuse est résistante, plus la dure- ère est comprimée contre elle par la pression cérébrale, el plus les empreintes sont accentuées ; “cest ainsi que lorsque, dans une région, les sulures Sont prématurément soudées, el que le cerveau ne trouve pas ailleurs un développement compen- & irconvolulions étaient moins marquées. On voit, par ces exemples, combien de facteurs influent sur ce fait, en apparence si simple, de impression des circonvolutions sur l’endocräne. Les sinus veineux de la dure-mère et les sillons nos et la dure-mère, se creusent par un mécanisme différent des empreintes. Ici, le vaisseau creuse di- | rectement son lit dans l'os. Il faut, par conséquent, lenir compte : | 1° D'une part, du volume des vaisseaux. Les | | arlères méningées étant plus volumineuses à gau- che, leurs sillons sont plus marqués de ce côté”. Et, dans la scoliose, la circulation se fait mal du côté déclive, les veines se gonflent et les sinus veineux Sont, en général, plus volumineux de ce côté; la fosse jugulaire, notamment, est énorme * : 2 Je l'autre, de la résistance de l'os, qui ici est mdirecte. Chez les vieillards, les sillons des artères mméningées sont plus volumineux, et parfois les | | | “ Bull. de la Soc. d'Anthropol. Paris, 1902. — Daxicro : Bull. de la Soc. d'Anthropol. Paris, 1883, 1. 144. Voir pour plus de détails le Dr Fécix REGNAULT : Bull. “de la Soc. anat. Paris, 1903, p. 326. granulalions de Pacchioni arrivent l'os. à perforer IT. — ACTION DES MUSCLES SUR LES 05. Par quel mécanisme l'insertion des muscles aux os s’effectue-t-elle lantôt sur des saillies, tantôt dans des creux? Parmi les {héories qui ont été émises, certaines doivent être tout d'abord écartées. Celle de la lutte entre les tissus a été soutenue par Fick, et dernièrement par M. Papillault! : il s'agi- rait d'une lutte entre les muscles, d’une part, et l'os, de l’autre, avec intervention des phagocytes. Une objection de fait* suffit à la ruiner : le muscle ne peut lutter avec l'os, car il n'est jamais en contact direct avec lui; il s'insère toujours à ce dernier par l'intermédiaire du tissu tendineux, celui-ci fût-il microscopique. Or, le tissu tendineux est très fai- Element vascularisé, et, par suite, d'une vitalité toujours inférieure à celle du périoste : constamment vaincu s’il y avait lutte. D'après une autre théorie, les os adapteraient leur forme aux besoins d'insertion des muscles. Ainsi les besoins d'un muscle tibial postérieur très volumineux amèneraient, pour M. Manouvrier, l'ex- cavation de sa surface d'insertion sur le tibia aplali des races préhistoriques‘; ceux du musele vaste externe donneraient, pour le même auteur, la saillie du pilastre fémoral, et ceux des muscles temporaux la crête sagittale *. De même, pour Wil- mart”, tous les muscles qui creusent les os le font dans le but d'étendre le plus possible la surface à uliliser pour leur insertion. Sans doute, il existe un rapport entre l’excava- tion osseuse et la puissance du muscle, comme l'avaient déjà signalé les anciens anatomistes et notamment Cruveilhier”. Mais il n'est pas nécessaire, pour l'expliquer, d'invoquer la théorie des causes finales, qui est aujourd'hui à juste titre complètementabandonnée. La théorie bio-mécanique, au contraire, est géné- ralement admise pour expliquer toutes les formes il serait ! PapiLLaULT : Essai sur les modifications fonctionnelles du squelette. Revue de l'Ecole d'Anthropol., Paris, 1901, p. 65. 2 J'ai développé cette objection dans le Bull, de la Soc. d'Anthropol., 1901, p. 165. 8 V. notamment Manouvrir : Remarques sur le change- ment de la forme des os, et en particulier sur la platyc- némie, d'après un travail de M. Hirsch. Archiv. d'Anat. normale et patholog., 1896, p. 522-4. Cette théorie y est clai- rement résumée. 4 Bull. de la Société d'Anthropol., 5 février 1905, p. 136. 5 Wacuarr : Les contributions à l'étude de la configura- tion extérieure des os longs et des os larges. Journ, de Méd. et de Chir. Bruxelles, 1894, p. 613-20. 5 Cruveizurer et Marc Sée : Anat. descript. Paris, Asselin, édit., 14877. Myologie, p. 750. Cruveilhier dit que l'excava- tion du muscle tibial antérieur est proportionnée à la force de ce muscle. 220 D' FÉLIX REGNAULT — LA MORPHOGÉNIE OSSEUSE organiques; elle nous a déjà expliqué l'action des organes mous sur les os. Si elle a rencontré de nombreuses oppositions en ce qui concerne l’action des muscles sur les os, c'est que les premiers partisans l'ont envisagée d'une facon simpliste; pour eux, les muscles for- maient une saillie osseuse lorsqu'ils tiraient et une dépression lorsqu'ils pressaient sur le périoste. Le problème est, en réalité, plus complexe’. Un grand nombre de facteurs interviennent; nous les examinerons séparément dans la formation des saillies et des creux osseux. $ 1. — Mécanisme de formation des saillies osseuses à l'insertion tendineuse des muscles:. Les muscles s’insèrentsur l'os, tantôt directement, tantôt par l'intermédiaire d'un lenden. Or, pour quelles causes se forme-t-il souvent, en ce dernier cas, une saillie osseuse, alors que celle-ci n'existe pas en cas d'insertion directe? Le périoste et le tissu tendineux contribuent à la fois à former la saillie. Le tissu tendineux peut, en effet, s'ossifier au même litre que le périoste, avec lequel il confond ses fibres et même qu'il traverse pour se continuer dans l’os. On voit les tendons des ailes et des pattes s’ossifier chez les vieux oiseaux, et un os sésamoïde se former à l'endroit où le tendon est comprimé par sa réflexion sur l'os. Mais la traction continue du muscle sous l'in- fluence de sa lonicilé joue le role d’excitant vis-à- vis du tissu périosto-tendineux; elle ne se borne pas à déterminer la direction de l’apophyse, comme l’'admettent quelques auleurs : elle en cause la formation. En effet, lorsque le muscle est relâché, la saillie osseuse diminue et s’efface; s'il est con- tracturé, au contraire, elle augmente. Tel est le cas du torticolis : s'ilest dû à une contracture ancienne du sterno-mastoïdien, l'apophyse mastoïde s'al- longe ; s’il s'agit d’un torticolis osseux, au contraire, les muscles du côté incliné se relàchent et s’atro- phient, l’apophyse mastoïde du même côté est moins saillante, la substance osseuse y est amincie, translucide et laisse voir les cellules qu'elle con- tient. De même, dans le spondylolisthésis des accou- cheurs ou glissement en avant de la cinquième ver- ! J'ai déjà montré cette complexité dans les Bull. de la Soc. d'Anthropol. Paris, 1901, p. 615. ? Les ligaments peuvent aussi former à leur insertion des saillies osseuses, bien que ces saillies paraissent plus rares que pour les tendons. Elles dépendent du degré de tension; ainsi le ligament latéral interne du genou, qui, à l'état nor- mal, s’insère au tibia sur une surface osseuse, y forme une épine quand il est étiré dans le genu valgum. On peut rap- procher de ce fait l'ossification des ligaments vertébraux communs inférieurs chez le cheval soumis à des charges trop fortes. ; tèbre lombaire, l’'apophyse épineuse s'allonge déme=« surément sous l'influence de la traction continue des muscles et des ligaments qui s’y insèrent; on pourrait citer bien d'autres exemples. On peut, à la simple vue d’une saillie osseuse dem grosseur anormale, déterminer la part de ces deux facteurs et savoir si sa formation est due à l’action de muscles exceptionnellement vigoureux ou à une irritation inflammatoire du tissu tendineux *. Dans le premier cas, la saillie est large, à base épaisse, à sommet mousse : telles sont les saillies qu'on observe sur les squelettes de nains achon-« droplases ou encore de sujets acromégales très vigoureux. Dans le second, au contraire, elle se présente sous forme de longue épine, mince, à sommet appointi : l'ostéile épiphysaire multiple en» montre surtout un bon exemple. Fig. 1. — Fracture consolidée de l'extrémilé supérieure dum fémur (n° 505, nouv. musée Dupuytren).— Les museles obturateurs s'insèrent à l'os par une saillie. D'autres causes interviennent dans le développe- ment de la saillie à l'insertion du tendon. Tout d’abord, d'autres muscles ou aponévroses sus-jacents peuvent comprimer et aplatir l’apo- physe : ainsi agit le muscle deltoïde pour les ten= dons des muscles sus-, sous-épineux et scapulaire qui s’insèrent à deux tubérosités humérales aplaties: En second lieu, la saillie se forme d'autant plus sûrement que la traction est moins oblique par rapport au plan de l'os. L'insertion tendineuse d'un muscle ne s'accom= pagne pas de saillie osseuse quand le tendon s'in- sère parallèlement à l'os, comme les tendons de la patte d’oie et des fléchisseurs des doigts. Enfin, en certains cas exceptionnels, le tendon ! J'ai pu comparer deux squelettes d'acromégales : Puns provenant d'un sujet très vigoureux, avait des saillies très marquées, mais épaisses, régulières, à large base ; l'autre, ayant appartenu à un acromégale sans aucune force, mais dont le périoste avait été irrité, présentait, des saillies.\ osseuses nombreuses, mais minces, à base étroite, déchi= quetées. — F£cix ReGxaurr : Deux squelettes d'acromégales, Bull. de la Soc. anat., Paris, 1901, p. 476. D' FÉLIX REGNAULT — LA MORPHOGÉNIE OSSEUSE 2: ne forme pas d'apophyse, bien qu'il s'insère per- pendiculairement à l'os. Ainsi, les deux tendons des muscles obturateurs externe et inlerne s'insérent dans la cavilé digitale. Ils sont environnés par un tissu cellulo-adipeux lèche’, et peut-êlre la pré- sence de ce tissu est-elle la cause à la fois de la for- mation dela cavité et de lanon-ossification du tendon à son inserlion. Mais cette dernière peut toujours se produire sous l'influence d'une irritation intense, et j'ai ainsi observé la présence d’'épines osseuses à l'insertion des muscles oblurateurs sur une pièce d'ancienne fracture de l'extrémilé supérieure du fémur consolidée avec cal exubérant (N° 505, nou- veau Musée Dupuytren) (fig. 1). Ces quelques exemples nous montrent la com- plexité des faits; nous sommes loin de l'explicalion simpliste donnée par les premiers auteurs. S 2. — Mécanisme de formation des dépressions osseuses d'insertion musculaire. Quand le musele s'insère directement sur l'os, la Surface d'inserlion est souvent excavée. Si l'on pra- tique une coupe de l'os, on voit alors que la subs- tance compacte est inince dans la dépression formée par le muscle et épaisse sur les bords sail- lants. Pour comprendre l'action mécanique du muscle, il faut examiner successivement deux cas, suivant que l'insertion musculaire est perpendiculaire ou oblique par rapport à l'os. 1. Elle es° perpendiculaire à Fos. — I existe souvent une légère dépression, une empreinte ou même une cupule avec rebords saillants : telle est la lossette digastrique à la mandibule?. Comment ne se produit-il pas une saillie, comme pour l'inserlion d’un tendon, puisque le musele æxerce une traction sur le périoste? Celte contra- diction, qui a porté certains anatomisles à rejeler “la théorie bio-mécanique, n'est pourtant qu'appa- rente; en effet : ; ss 1 De méme certains ligaments, comme le ligament rond, “le lisament interosseux astragalo-calcanien, sont environnés “le paquets cellulo-graisseux, et s'insèrent dans des dépres- “sions osseuses, alors qu'autour les surfaces articulaires font rger, — la question des méthodes autoplastiques dans le traitement des déformations de l'épaule, du bras, du coude, de l’avant-bras et de la main. Les auteurs insistent sur la technique des anastomoses teudineuses qui, en ces dernières années, ont été l'objet de tant d'importants travaux. La troisième partie forme, à elle seule, presque la moitié de l'ouvrage; les QUE commencent par une question à l'ordre du jour, la luxation congénitale de là hanche, dont ils décrivent avec de nombreux détails les deux principaux traitements : méthode sanglante et méthode non sanglante. Plus loin sont donnés les diffé- rents modes d'intervention dans les ankyloses de la hauche et dans les ankyloses du genou. Le traitement du pied bot varus equin congénital, le traitement du pied bot paralytique, forment le sujet d'importants chapitres. Dans les dernière pages sont énoncées les règles qui président au traitement orthopédique de la mäladie de Little, au traitement du pied plat valgus douloureux el des déviations des orteils. Ce qui fait la caractéristique du livre de MM. Ber- ger et Banzet, c'est qu'il reflète bien l'idée orthopédique moderne, que chirurgie ne veut pas toujours dire intervention sanglante, et qu'en orthopédie on doit réserver une large part aux méthodes de redressement el de mobilisation par-les massages, les manipulations, la mécanothérapie. Dr P. DEsrosses. 5° Sciences diverses Prost (Eug.). Chargé de cours à l'Université de Liége. — La Belgique agricole, industrielle et commer- ciale. Etude économique.— 1 vol. iu-8 de 343 pages avec 2 cartes hors texte. (Prix : 7 fr. 50.) Ch. Béran- ger, éditeur, Liège et Paris, 490#. Malgré la faible étendue de son territoire, la Belgique est bien un des Etats les plus intéressants de l Europe. La forte densilé de sa population (228); l’état avancé de son agriculture, dans des conditions naturelles souvent défavorables, l'extension remarquable et la grande va- riélé de ses industries, le réseau serré de ses routes, de ses canaux et de ses chemins de fer, le rapide accrois- sement de tonnage et le dé veloppement du port d'An- vers, tout cela nous parait digne d'attirer et de retenir l'attention. M. Eug. Prost est un guide excellent pour qui veut connaître le développement économique de la Belgique, sous ses multiples faces, el son livre nous apporte une très importante contribution à l'étude de ces questions. C’est un inventaire complet, quoique s'en tenant aux grandes lignes, rempli de Copieuses statis- liques, puisées en grande partie aux sources offi- | cielles — souvent comparées avec celles des pays étran= gers — et embrassant toute l’activité économique du pays. L'auteur débute par un apercu de géographie physique, que nous aurions voulu plus détaillé, princi= palement en ce qui concerne le climat, un des facteurs essentiels de l'agriculture. Et nous aurons exprimé notre critique principale en disant que le défaut essen- tiel du livre est de manquer d’une solide base géogra- phique, dont l'absence apparaît un peu partout, et en particulier dans la localisation des industries. Bien que l'ouvrage ne soit pas un manuel d'enseignement, sa tenue générale aurait été meilleure sans qu'il ait rien perdu de sa richesse de documentation. Après avoir étudié les cultures et l'élevage, l’au= teur consacre quelques pages très brèves à l'enseigne= ment agricole et aux associations du mème ordre. Ce sont là pourtant les deux faits qui distinguent l’agri= culture des différents pays et permettent ‘de la juger, aussi bien, aurions-nous aimé, là encore, plus de détails, et regrettons-nous davantage que l’auteur n'ait. pas consacré un chapitre spécial au même sujet en, ce qui concerne l’industrie et le commerce; les quel=M ques renseignements disséminés que:l'on recueille sur l'enseignement professionnel et les associations industrielles et commerciales nous apparaissent très insuffisants. En appendice, on trouvera le régime douanier appliqué aux marchandises à l'entrée en Bel- gique, et la liste des services réguliers de navigation maritime à vapeur qui desservent le port d'Anvers: Nos critiques, ainsi que les lacunes, faciles à, faire dis= paraître, que nous avons signalées, n'enlèvent rien à la valeur documentaire du livre, qui renferme une masse de renseignements intéressants et nous fouruit un bel exemple “d'intense activité économique. P. CLEKGET, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle (Suisse)}s Rist (D' A.). — La Philosophie naturelle intésrale et les Rudiments des Sciences exactes ({!° yat10). — 1 vol. in-8° de 128 pages. Hermann, éditeur, Paris, 1904. Nous ne connaissons pas les propriétés des corps, mais l’état de notre moi en présence de ces corps. La nature est une, et les phénomènes sont produits de l'activité. Nous conditionnons le monde sensible d’après nous-mêmes, en le posant. M. le Dr Rist part de ces principes et les conduit jusqu'à leur aboutissement logique, pour asseoir les bases de sa Philosophie naturelle intégrale et établi ses ltudiments des Sciences exactes. Il nous donne, avec une Introduction dans laquelle il expose sa conceps tion propre de la vie, ses idées personnelles sur le raisonnement mathématique en général et une étud sur les prolégomènes des géométries et de l'analyse. numérique. Il est impossible de porter, dès aujour d'hui, un jugement définitif sur cette œuvre, dont la première partie seulement vient de paraitre. Ce que l'on peut toutefois affirmer, c’est que l'ouvrage de M. le Dr Rist, qui abonde en vues originales, ne passera pas inaperçu, et que l'œuvre suscitera d° intéressante polémiques. LucieN RouLLer. Préparation aux Carrières coloniales. Coulérence faites sous les auspices de l'Union coloniale frans çaise. — 1 vol. inA2, avec préface de M..J. CnarzLEY Bent. A. Challamel, éditeur, Paris, 1904. L'organisation des colonies de domination, l'hygiène de lEuropéen dans les pays chauds; des renseigne ments sur l'agriculture, le commerce et l'industrie en Nouvelle-Calédonie ; des conseils à ceux qui veulent s'établir en Tunisie, en Indo-Chine ; deux études doeus mentées sur la Cochinchine et le Tonkin ; des rensei gnements sur les cultures coloniales et un manue d° Iygiè ne des colons, des mieux concus, tels sont les: principaux chapitres de ce livre substantiel, indispen: sable à tous les jeunes gens qui se préparent au carrières coloniales. AUADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES D}: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Février 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Hadamard dé- montre que les équations linéaires aux dérivées par- tielles pour lesquelles le principe d'Huygens a lieu ne sont autres que celles dont la solution fondamentale ne contient pas de partie logarithmique. — M. M. Fou- ché répond aux critiques de M. de Sparre relatives à ses recherches sur la déviation des graves. — M. A. Laus- sedat signale le levé très rapide d’une carte topogra- phique d'une assez grande étendue, en Asie mineure, par le D' Penther, à l’aide de la photographie. — M. 9. Guillaume présente des observations de la comète Bor- relly (1904 e) faites à l’équatorial Brunner de l'Observa- toire de Lyon. — Le même auteur communique ses observations du Soleil faites à l'Observatoire de Lyon pendant le 4° semestre de 1904. Les taches ont aug- menté tant en nombre qu’en étendue; les groupes de facules ont augmenté également. — M. A. Hansky a fait un, certain nombre de déterminations actino- métriques au sommet du Mont-Blanc; parmi les valeurs obtenues, celle de 3,29 cal. peut être considérée comme se rapprochant le plus de la vraie valeur de la constante solaire. 29 SCIENC-S PHYSIQUES. — M. L. Teisserenc de Bort a constaté que, loin du sol, la température, à quelques jours d'intervalle, peut présenter des -écarts équiva- lents et même supérieurs à ceux qu'offre la tempéra- ture à une même heure près du sol et dans le mème intervalle de temps. — M. J. Boussinesq démontre l'existence d'un ellipsoïde d'absorption dans tout cristal translucide, même sans plan de symétrie ni axe prin- cipal. — M. L. Houllevigne détermine l'épaisseur des lames transparentes de fer (obtenues par ionoplastie), par comparaison photométrique des transparences, ce qui permet de conserver les lamelles, tandis que la méthode de dosage colorimétrique du fer nécessite leur destruction. — M. Ch. Nordmann décrit un nouvel enregistreur à écoulement liquide de l'ionisation atmos- phérique. — MM. Ch.-Eug. Guye et P. Denso ont déterminé la chaleur dégagée dans la parafline sou- mise à l’action du champ électrostatique tournant de fréquence élevée. Pour une mème fréquence, elle est proportionnelle au carré de la tension; pour une même tension, elle est proportionnelle à la fréquence.— M. E. Jungfleisch pense que les phénomènes lumineux de la phosphorescence du phosphore résultent presque exclusivement de la combustion spontanée de la vapeur « d’un oxyde de phosphore volatil ‘émis par le P) arri- vant au contact de l'oxygène. — M. F. Wallerant étudie la cristallisation des mélanges de corps isodimorphes. — M. H. Moissan à reconnu, dans la météorite de Canon Diablo, la présence de siliciure de carbone SiC, identique à celui qu'on prépare au four électrique. — MM. H. Moissan et Chavanne ont liquéfié et solidifié du méthane pur; il fond à — 4184 et bout à —164°sous 760 millimètres. Le fluor liquide réagit avec explosion “sur le méthane solide. — M. A. Conduché a observé que les aldéhydes aromatiques réagissent sur le chlor- hydrate d'hydroxylamine en donnant des composés caractéristiques; l'action de HCI régénère l'aldéhyde. — M. R. Lespieau, en faisant réagir l'épiéthyline sur Pacide cyanhydrique, a obtenu Île nitrile CH°0C?H. CHOH.CH*.CA7, Eb. 243-245°: l'acide correspondant perd H°O par ébullition en donnant un acide non Saturé. — MM. L. Bouveault et A. Wahl : Sur la non- existence de deux dioximidobutyrates d'éthyle stéréo- isomères (voir p. 187.— M. E. Roux à constaté que la réversion de l'amylocellulose se produit sous l'action de l’eau à 1500-155° en donnant naissance à de véri- tables amidons artificiels. — MM. A. Brochet et J. Pe- tit ont reconnu que l’électrolyse des acides formique et oxalique peut être facilement réalisée par le courant alteruatif; les résultats sont les mèmes qu'avec le cou- rant continu et les rendements sont très élevés. — MM. E. Charabot et A. Hébert ont constaté qu'à l'abri de la lumière le basilic est susceptible de consommer l'huile essentielle qu'il renferme et notamment les composés terpéniques. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Tissot a observé que l'action déprimante du chloroforme sur le cœur ou sur la pression artérielle croit régulièrement avec la dose de chloroforme absorbée. Les doses qui pro- duisent la syncope cardiaque chez le chien sont celles qui abaissent la pression artérielle au voisinage de 5 centimètres de mercure ou au-dessous. — MM. A. Moutier et A. Challamel ont observé que, dans la d’arsonvalisation, l'action du lit condensateur n’est pas équivalente à celle de la cage auto-conductrice et qu'il est préférable d'employer cette dernière pour le traite- ment de l'hypertension artérielle. — M. M. Mendels- sohn décrit les modilications fonctionnelles et nutri- tives qu'on observe chez la Torpille lorsque celle-ci est soumise pendant un temps plus ou moins long à l'action du bromure de radium. — M. H. Jumelle décrit deux Dalbergia à palissandre de Madagascar, qu'il considère comme espèces nouvelles et qu'ilnomme D. boinensis et D, Perrieri. — M. P. Dop a constaté que le Saproleqna Tureli peut être, en présence de slucose, facultativement aérobie ou anaérobie ; dans ce dernier cas, il produit une fermentation complexe, dont un des produits est l'aldéhyde glycérique. — M. P. Hallez a reconnu que le Bougainvillia fruticosa Allm. est Le faciès d'eau agitée du Bougainvillia ramosa Van Ben. — M. A. Lacroix à éludié une série de roches éruptives basiques, péridolites, gabbros et dia- bases, provenant de la Guinée française et qui forment une série pétrographique remarquablement homogène et continue. — M. H. Arsandaux à déterminé une série de roches recueillies dans le bassin de l'Aouache ; ses résultats montrent l'énorme extension des roches alzalines acides entre Obock-Djibouti et Adis-Abeba.— M. J. Bergeron présente ses recherches sur la tecto- nique de la région située au nord de la Montagne Noire. Séance du 20 Février 1905. 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Dienes complète un résultat de M. Pringsheim relatif à la série de Taylor sur le cercle de convergence. — M. G. Tzitzéica, con- sidérant l'équation y" +Æ À (x) — 0, et la suite k,, 4... qui intervient dans le problèmede Picard, démontre qu'en général il y a une valeur 4’, comprise entre k, et k,, pour laquelle cette équation admet une inté- grale périodique. — M. Em. Cotton montre que la con- naissance d'un intervalle (E), où il existe une intégrale régulière de dy/dx =f{x, y), permet de donner un cri- térium simple servant à reconnaître qu'une fonction donnée est assez près de satisfaire à l'équation diffé- rentielle pour ne s'écarter de la solution exacte, dans tout l'intervalle (E), que d'une quantité inférieure à un nombre donné. — M. A. Petot étudie le mode de fonctionnement dynamique du différentiel des automo- biles : il montre que chaque pignon satellite se com- porte sensiblement comme le fléau d'une balance en équilibre, qui recoit el transmet de chaque côté des, r. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES efforts égaux. — M. G. Bigourdan présente ses obser- vations de l’éclipse partielle de Lune du 19 février 1905, faites à l'Observatoire de Paris. — M. Th. Moreux à observé la grande tache solaire de février 1905; elle lui parait être la plus grande que les astronomes aient jamais observée : sa longueur est de 180.000 kilomètres, sa largeur est de 102.000 kilomètres et sa surface de 13 milliards de kilomètres carrés. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Meslin a déterminé le coeflicient d'aimantation du bismuth; pour le bis- muth cristallisé, il a trouvé, à 109, — 1,39 X 105, pour le bismuth fondu —1,42 X 10-6, — M. P. Melikoff rappelle qu'il a obtenu déjà en 1848 le perborate de soude NaB0°.H°0 décrit récemment par M. Jaubert. — MM. J. Bruhat et H. Dubois, en précipilant par l'alcool une solution de biborate de potasse dans l’eau oxygénée, ont obtenu des cristaux de biperborate de potasse B2O%K.2H°0. Par l'électrolyse d'une solution d'ortho- borate de soude, ou par l’action de H°0°, on obtient le perborate quadrihydraté NaBO*.4H°20. — M. C. Mati- gnon méôntre qu'il est possible de prévoir les réactions chimiques en utilisant : d'une part, la loi des phases ou la loi d'action de masse; d'autre part, la loi de constance de la variation d’entropie aux températures correspondantes. — MM. E. Jungfleisch et M. Godchot, en distillant l'acide lactique bien see vers 250° sous une faible pression, ont obtenu l'acide lactyllactyllactique OH.CH(CH*).C0?.CH(CH*).CO?.CH(CH®).CO*H, F.399, et le dilactide. — MM. L. Hugoureng et Morel, en faisant réagir COCI® dissous dans le toluène sur l’éther éthy- lique de la /leucine à 130°, ont obtenu son carbimide COAz.CH(CO?C?H).CH2.CH(CHS}?, Eb. 120-130° sous 48 millimètres, ainsi qu'une urée subslituée, — MM. P. Sabatier et J.-B. Senderens, en hydrogénant les nitriles au contact du nickel réduit, ont obtenu des amines primaires; mais, à la température atteinte par la réaction, il y a réaction secondaire, avec formation d'AzH® et d’amine secondaire; il y a également, quoique dans une proportion plus restreinte, formation d'AzH* et d'amine tertiaire. — MM. A. Haller el F. March, en faisant réagir en autoclave, à 2206-2250, les alcools sodés sur la B-méthyleyclohexanone, ont obtenu les alcools alcoylés correspondants. On à pu ainsi préparer les homologues du menthol. — M. Ch. Bernard a de nouveau répété, sans aucun résultat positif, les expé- riences de Friedel et de Macchiati sur la décomposition de l'extrait glycériné par la poudre de chlorophylle en dehors de l'organisme, — M. X. Rocques à analysé vingt-deux eaux-de-vie charentaises. Celles qui pré- sentent une faible teneur en éthers renferment, par contre, une forte proportion d'alcools supérieurs. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Kronecker estime que, même dans le cas où le faisceau musculaire atrio- ventriculaire existe, il ne joue aucun rôle dans la conduction des impulsions motrices du cœur, et que celle-ci se fait uniquement par l'intermédiaire d'élé- ments nerveux. — MM. A. Charrin et Le Play montrent que les variations de constilution des organes entrainent, dans les principaux processus pathogé- niques, des différences qui font que, suivant chacun de ces organes, le mal revêt des allures spéciales. — M. Pariset montre que l’action hydrolysante produite sur le glycogène du foie par l'injection de suc pan- créatique dans la veine porte est due au ferment amy- lolytique qu'il contient. — M. L. Lapicque à reconnu que l'excitation nerveuse produite par une onde élee- trique très brève naît, dans les mêmes conditions que l'excitation de fermeture classique, à l'électrode néga- tive, quelle que soit la forme de l'onde. Dans une onde très brève, la rupture de courant ne joue aucun rôle dans l'excitation. — M. Ch. Nicolle est parvenu à ino- culer au Macacus Sinensis la lèpre humaine et à pro- duire des lésions qui ne différent des lépromes humains que par l'absence des cellules volumineuses remplies de bacilles. — M. E.-L. Bouvier à étudié les Palinurides et les Eryonides recueillis dans lAtlantique oriental par les expéditions françaises et monégasques. Malgré leurs affinités zoologiques, ils diffèrent beaucoup par l'étendue de leur distribution géographique, qui semble dépendre étroitement de leur distribution bathymé- trique. — M. A. Cligay à reconnu que, chez les Pleu- roneclides, la multiplication des rayons est une varia- tion progressive, et que les formes qui en ont le moins, généralement les plus septentrionales, paraissent ainsi les plus primitives. — M. L. Léger à trouvé, dans l'intestin des larves de Ceratopogon solstitialis, un nouveau type cellulaire de Grégarine à cytoplasme mélamérisé, quil nomme J'aeniocystis mira. — M. E. de Wildeman décrit deux lianes caoutchouti- fères trouvées pour la première fois au Congo belge : le Baissea gracillima (Landolphiée) et le Periploca nigrescens (Asclépiadée). — M. Aug. Chevalier à découvert, au cours de sa mission au Chari, un Caféier nouveau, qu'il nomme Cofflea excelsa et qui produit un café dont la teneur en caféine et les qualités d'arôme et de goût font une sorte très estimable, — M. P, Guégen a observé que les canaux sécréteurs répandus dans le bois de la tige des Diptérocarpées présentent, par leur mode de développement dans le cambium et leurs anastomoses, une particularité qui n'a guère été signalée que chez les Copaifera et les Daniellia. — M. E.-C. Teodoresco à constaté que les zoospores des Algues, placées dans de l’eau salée refroidie jusqu'à — 30°, supportent sans périr ces basses températures. - M. Léon Bertrand indique l'existence, dans les Pyrénées de la Haute-Garonne et de l'Ariège, d’une importante nappe charriée venue du sud et qui a été conservée, en avant de la zoue primaire centrale en éventail, d’une facon remarquablement continue. — M. G.-D. Hinrichs a étudié les météorites tombées en 1875 à Amana (Iowa). Elles contiennent, en moyenne, 7 °/, de fer nickelé, 1,8 /, de troilite et 91,22/6 de silicates. — M. M. Boulle signale l'installation de trois squelettes de Lion des cavernes dans la Galerie de Paléontologie du Museum. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 1% Février 1905. M. Sevestre présente le biberon gradué de M, Variot indiquant la quantité de lait qui doit être donnée par chaque biberon, chez les enfants normaux, aux diffé- rents âges, ainsi que les intervalles e& le nombre des tétées. — MM. A. Chantemesse el F. Borel montrent que l’éclosion des épidémies de fièvre jaune en Europe a été conforme aux règles de la théorie étiologique du moustique. — MM. Lannelongue el Achard ont con- firmé expérimentalement l'observation elinique qui montre les bienfaits de l'immobilisation, aidée ôu non de l'extension continue, des jointures devenues tuber- culeuses, et les dangers qu'il y à à laisser les articula- tions tuberculeuses libres de leurs mouvements, et surtout à leur faire subir des mouvements en vue d'augmenter l'étendue du champ articulaire de ces jointures. — M. A. Josias signale un cas de fièvre typhoïde à début brusque, ayant simulé d'abord l’'appendicite, puis la granulie, et terminé par la mort, A l’autopsie, on ne trouva ni appendicite, ni ménin- gite, mais des lésions de fièvre typhoïde avec péritonite par propagation. — M. Moussu lit un Mémoire sur la qualité du lait des vaches tuberculeuses. — M. Maire donne lecture d’une Note sur un nouvel appareil pour les fractures de cuisses chez les nouveau-nés. Séance du 2 Février 1905. MM. A. Chantemesse et F. Borel montrent que la fièvre jaune ne saurait ètre considérée en France comme une maladie contagieuse; les mesures prophy= lactiques doivent viser la destruction du moustique pendant la traversée depuis les pays infectés jusqu'en France et à l'arrivée au port. —M. Fournier commence une étude sur les rapports de la paralysie générale avec la syphilis. — M. Boinet signale un cas de trans- D: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS S mission héréditaire homéomorphe d'un rétrécissement mitral de la mère au fœtus. cher » SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE 1905. M. E. Retterer a reconnu que les ménisques inter- articulaires du genou commencent par être des organes “ibreux ou tendineux, pour devenir ensuite fibro-carti- lagineux à la suite de l'apparition d’un nouveau cyto- plasma dans le tissu. — MM. H. Bertin-Sans et J. Ga- gnière : Du mécanisme de l'accommodation (voir p.18#). — MM. C. Nicolle el C. Comte ont observé une grande résistance du Vespertilio Kubli au Trypanosome des dromadaires, qui ne détermine qu'une infection passa- gère. — M. F. Dévé signale un cas d'échinococcose hépatique secondaire, d'origine biliaire. — MM. F. Dévé et M. Guerbet ont trouvé dans le foie d'un malade des concrétions mixtes, à forte prédominance pigmentaire, s'étant produites autour de petits lambeaux de mem branes hydatiques: il s’agit d’une cholélithiase d'origine hydatique. — MM. A. Gilbert, M. Herscher et S. Pos- ternak ont constaté que la réaction attribuée par Zoja à la bilirubine appartient bien à cette substance, à con- dition qu'on agisse sur des solutions concentrées. Celle “qu'il assigne à la lutéine n'est pas produite par elle et “S observe quand on traite des solutions peu riches en …bilirubine. — M. A. M. Bloch a étudié la croissance …des ongles; le facteur principal, mais non exclusif, est “l'âge des sujets; la vitesse d'accroissement est maximum entre cinq e: trente ans. — M. L. Lavauden a observé que la résistance du Poisson-chat à l'air libre est très “considérable; elle provient de la constitution de sa peau, essentiellement glandulaire, qui sécrète un mucus protecteur, et de l'extension considérable des phéno- mènes respiratoires. — M. G. Linossier décrit un pro- “cédé simple pour le dosage du sucre et des substances éductrices dans l'urine; il repose sur l'emploi de fer- rocyanure de K qui maintient l’oxyde cuivreux en dis- “solution. — M. F. Arloing à un que la splénec- miomie favorise l'infection par les bacilles tuberculeux “en culture homogène lorsqu'ils sont introduits dans le “péritoine. — M. P. Salmon diagnostique la variole et “la varicelle humaine par inoculation du virus dans la couche épithéliale de la cornée du lapin, qui réagit à la variole et non à la varicelle. — M. A. Rodet a vérifié la “valeur antiseptique du savon commun, qui est capable “de détruire tout au moins les éléments peu résistants “et certains microbes fragiles, comme le bacille d'Eberth. M. E. Gellé critique la méthode de Bezold pour la Sélection des sourds-muets éducables par l'oreille. M. Pariset a reconnu que l'action hydrolysante pro- “luite sur le glycogène du foie par l'injection de suc pan- eréatique dans la veine porte est due au ferment amylo- lytique qu'il contient. — MM. A. Trillat et Turchet : Nouveau procédé de recherche de l'ammoniaque (voir &XV,p.1105). — MM. A.Pettit etJ. Girard ont observé, Ehez un cheval producteur de sérum, une hyperplasie éactionnelle des organes hémo- -lymphatiques, « Carac- férisée par des phénomènes de multiplication cellulaire et de macrophagie. — M. A. Guilliermond a observé la “présence de 8 chromosomes dans la caryocinèse du SE vesiculosa. Séance du 18 Février 1905. … M. 4. Laveran à éludié des préparations du sang de Bovidés et d'Equidés malades du Soudan anglo-égyptien. IL y a trouvé, entre autres, un Trypanosome nouveau, Qu'il nomme Tr. nanum. — MM. H. Lamy ct André Mayer ont constaté qu'au cours de la polyurie produite parl'injection intra-veineuse desucre, les cellules rénales Vivantes accomplissent un travail actif et électif. M. Beauñils et J. P. Langlois ont étudié l'action des Peintures murales sur le ferment lactique et le bacille PYocyanique. —MM. F.-J. el Ed. Bosc ont observé que 16 virus claveleux emmagasiné par la sangsue conserve Séance du 11 Février Ve 1 SAVANTES 235 indéfiniment ses qualités initiales. — MM. J.-E. Abe- lous, A. Soulié et G. Toujan proposent un procédé de dosage colorimétrique de l’adrénaline basé sur la teinte rose qu'elle prend en solution quand on lui ajoute une faible quantité d'iode. — MM. G. Biliard el Ch. Bruyant ont conservé pendant longtemps des sangsues et des alevins dans une eau non renouvelée où s'était déve- loppée une culture d'algues. — M. F. Dévé a constaté que l’action des rayons X sur l’évolution des greffes hydatiques est absolument nulle. — MM. E. Hédon et C. Fleig ont reconnu que l’eau de mer est un liquide impropre au maintien des contractions du cœur. M. et Mie Bourguignon ont observé que le muguet peut végéter sous la forme de bâtonnets et peut même revêtir la forme de coceus. — M. G. Moussu établit que des vaches tuberculeuses sans lésions mammaires peuvent éliminer des bacilles tuberculeux dans leur lait; il faut donc rejeter de l'industrie laitière toute vache tuberculeuse, quel que soit l’état de ses lésions. M. Haaland à observé dans un élevage de souris une épidémie causée par une Pasteurella. Les souris étaient atteintes de diarrhée et mouraient rapidement. M. L. Lapicque : Sur l'excitation des nerfs par des ondes électriques très brèves (voir p.234). — MM.J.-A. Sicard et Dopter ont étudié au point de vue cytologique le liquide parotidien au cours des oreillons; on y trouve d'abord des éléments cellulaires, puis des éléments glandulaires nombreux. — M. D. Anglade montre-que le ramollissement cérébral n’est pas une nécrose pure et simple, mais qu'il s'accompagne d'une encéphalite interstitielle, parfois limitée, susceptible souvent de dif- fuser à travers le système nerveux tout entier. MM. Coyne et Cavalié ont découvert, dans les pre- mières et deuxièmes molaires, au niveau de la pulpe, un véritable muscle lisse, indépendant des parois vas- culaires, possédant vraisemblablement une fonction encore indéterminée. — MM. Widal et Rostaine ont observé, chez un malade qui avait des attaques d'hémo- globinémie etd'hémoglobinurie à la suite de la moindre impression de froid, une insuffisance de l'antisensibili- satrice que le sang renferme à l’état normal pour pro- téger ses propres globules contre les sensibilisatrices qu'il charrie constamment. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du T7 Février 1905. MM. J. Carles et Michel ont constaté que la subs- tance rénale, administrée par ingestion et sous forme de macération, possède un pouvoir néphrotoxique impor- tant. — M. Ch. Pérez décrit l'Hexsiliodes Pelsenerii Canu, qui vit en parasite sur un Clyménien de Wime- reux. — MM. Ch. Blarez et G. Denigès ont reconnu qu'à la suite de l’'empoisonnement par l'acide arsénieux l'organisme humain, en dehors du toxique trouvé dans r appareil g gastro-intestinal, peut renfermer, dans linti- mité de ses tissus, des doses d'arsenic bien plus élevées 60 à 70 centigrammes) que les doses minima commu- nément admises comme devant amener la mort (7 à 30 centigrammes). — MM. J. Bergonié et Tribondeau ont provoqué une aspermatogenèse complète du testi- cule du Rat après une seule exposition aux rayons X. — MM. J. Bergonié, L. Tribondeau et D. Récamier ont constaté que les rayons X, même à doses peu élevées, déterminent l'atrophie de l'ovaire de la lapine. — M. R. Cruchet signale un cas d'hémianesthésie hystérique, où l'entrée en jeu du sens stéréognostique réveillait la sensibilité thermique au niveau de la main. — M. J. Sabrazès a observé que, dans l'anémie pernicieuse métaplasique, les taches formées par des gouttes de sang sur papier buvard sont entourées d'un liséré clair qui persiste indéfiniment après dessication. — MM. R. Ducrot et J. Gautrelet ont constaté la présence des pigments normaux du sérum sanguin dans le liquide céphalo-rachidien après suppression physiologique des plexus choroïdes. 250 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES . RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 14 Février 1905. M. L. Sencert signale un cas d'arrêt de la torsion de l'anse intestinale primitive, constaté à l'autopsie d'un nouveau-né. — M. À. Prenant, étudiant l'épithélium œæsophagien du Triton, y à trouvé des cellules ciliées, des cellules muqueuses et dés cellules intermédiares entre les deux formes précédentes. — M. S. Christens a reconnu que des phénomènes convulsifs se manifes- tent chez la chèvre à la suite de la thyro-parathyroïdec- tomie. — MM. P. Haushalter et R. Collin ont déterminé les lésions histologiques du cerveau et de la moelle dans un cas de rigidité spasmodique généralisée. La lésion initiale réside dans l'écorce cérébrale, qui est dépourvue d’un grand nombre de ses éléments caracté- ristiques, les neurones pyramidaux. — M. Bellieni décrit une méthode pratique et simplifiée de micropho- tographie, basée sur l'adjonction au microscope d'un appareil photographique à main. — M. Th. Guilloz indique un procédé de détermination de la grandeur réelle des objets dans les photomicrographies. MM. Simon et Sencert sont élus membres litulaires. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 Février 1905. M. P. Langevin appelle l'attention de la Société sur certains résultats obtenus à l'Etranger dans les der- nières années et qui apportent une contribution impor- tante à l'explication des phénomènes si complexes de la décharge disraptive. En particulier, le phénomène d'ionisation par les chocs, dont l'étude détaillée est due principalement à M. Townsend, d'Oxford, semble constituer un des faits élémentaires, une des lettres de l'alphabet, grâce auquel il sera possible de déchiffrer l'ensemble des manifestations multiples de l’étincelle électrique. Il à déjà permis à M. Townsend d'élucider de manière satisfaisante ce qui constitue en quelque sorte le seuil de la décharge disruptive, le problème du potentiel explosif, et de prévoir à quelques volts près la différence de potentiel nécessaire pour faire éclater une étincelle entre deux surfaces conductrices planes et parallèles séparées par un gaz sous pression quel- conque. — M. A. d'Arsonval présente, au nom de la Société industrielle des Téléphones, un nouveau télé- phone hygiénique (voir p.190). — M. P. Villard s'est proposé de répéter les expériences très anciennes «le Hittorff sur l'enroulement des rayons cathodiques dans un champ magnétique (hélices, spirales, circonférences). La cathode employée est un disque d'aluminium de 8 à 12 millimètres de diamètre, placé dans une sorte de boile constituée par une coupe en verre fermée par une plaque de mica percée d’une ouverture de 3 à 4 millimètres, soit par un anneau en verre fermé par deux micas dont l’un est percé. Cette ouverture est placée en face du point de la cathode pay lequel on veut produire l'émission, et, lafflux cathodique se {rouvant ainsi très resserré, l'émission n'a lieu qu'en face du centre de l'ouverture. La distance entre le mica et la cathode est de 2 à 3 millimètres, ce qui laisse toute liberté de déviation aux rayons. On obtient ainsi un pinceau très fin, peu divergent, et de grande den- sité au centre, mais entouré de rayons aberrants. On arrête ceux-ci, quand cela est nécessaire, au moyen d'un écran de mica percé d'une ouverture de 1 à 2 mil- limètres placée sur la trajectoire prévue. Le vide est toujours fait sur l'oxygène pur, dans lequel le trajet des rayons est très visible et très net. Un petit tube latéral contient quelques centigrammes d'oxyde d'argent très pur, préparé sans faire usage de filtres ni de caout- chouc. On chauffe légèrement ceLoxyde pour régénérer l'ampoule usée ; on fait passer le courant pendant deux ou trois heures pour élever, au contraire, le degré de vide. Champ uniforme. Le faisceau est diaphragmé comme il vient d'être dit, après une demi-spire ou trois demi-spires de lhélice à obtenir. On observe ainsi très aisément une dizaine de spires. Mais, sile champ est intense (500 unités et au-dessus), bien que le\trajet total correspondant à un nombre donné de spires soit alors relativement faible, on n'observe plus que 5 ou 6 spires au plus; on constate que le rayon s’affaibhit rapidement et que de tous ses points partent des rayons magnétocathodiques en lesquels il finit pas se résoudre (d'autres expériences ont confirmé Cebles observation). L'hélice, parfaitement régulière d'ails leurs, finit ainsi par se transformer en un simple cylindre magnétocathodique. Si les rayons sont dirigéss normalement au champ, ils forment une famille de circonférences qui sont assujetties à la seule conditions de repasser par le point de départ, qui est un point den la trajectoire, A l'opposite de ce point s’observe l& maximum de dispersion du faisceau. (Pour cette expt=s rience, la boîte cathodique doit être d'épaisseur aussi faible que possible.) En faisant passer le faisceau par une fente, on élimine les rayons obliques qui donnes raient des hélices. Dans celte expérience, on constales encore l'émission de rayons magnétocathodiques pa tous les points du faisceau. Champ non uniforme. lanss un champ non uniforme, les rayons ne s'enroulent pis sur un tube de force, comme l'auteur l'avait aflirmé dans une autre publication. Il se passe le singuliem phénomène que voici : Supposons l’ampoule placées entre les pôles coniques de l'électro-aimant, la cathodes assez éloignée de l'axe du champ etprès d'un des piless le faisceau s'enroule suivant une courbe hélicoïdale de pas et de diamètre d'abord croissants, jusqu'au milieu de l'entrefer: puis, en se rapprochant du pôle opposés le pas de la spirale diminue plus vite que son diamètre et s'annule avant que les rayons n'aient atleint paroi, puis devient négatif, et le faisceau revient cn arrière, décrivant une hélice semblable à la précés dente, mais dont la direction générale forme un angles notable avec celle de la première, en sorte que l'hélices de retour s'écarte de plus en plus de l’hélice d’allems Revenus près du pôle de départ, les rayons enroulé s'arrètent encore, rebroussent chemin etainsi de suites l'ensemble serait à peu près représenté par un ressoëb en hélice qu'on aurait replié en zigzag. Aucun ra YO ne peut arriver aux parois de l’ampoule, qui ne sonk atteintes que par les rayons magnétocathodiques ISsuss de toutes les spires. Si l'on considère les axes des tube fusifermes sur lesquels s'enroule le faisceau cathodiqu dans ses allées etvenues d’un pôle à l’autre, l’ensemble de ces axes constitue une ligne en zigzag qui n'est jh plane, mais tracée sur une surface de révolution ayaub pour axe l'axe du champ, de telle sorte que, si aucuïM obstacle n'est interposé, et si les rayons cathodique, ne s'évanouissaient pas progressivement, on aurail 0 singulier spectacle d'un enroulement qui se réfléchi en quelque sorte à une distance bien définie des pôles de lélectro, et s’enroule lui-même autour de l'axe di champ magnétique. Pratiquement on peut obser cinq ou six allers et retours de la spirale cathodiques M. Jean Perrin et M. Paul Langevin font remüs quer tous deux que la production des rayons magnélos cathodiques tout le long du rayon cathodique pourrail sans doute s'expliquer par l'ionisation que produit y dans lampoule le choc des particules cathodiques contre les molécules du gaz raréfié. Les rayons catho diques de faible vitesse qui s> formeraient ainsi s'en= rouleraient aisément autour des lignes de force M champ magnétique. M. Villard ne conteste pas qus cette explication, qui se présente tout naturellement, ne soit extrémement séduisante; cependant, il lui semble qu'il y à encore certains détails d'expérienee que cette explication ne suflirait pas à éclaircir. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 40 Février 1905. M. Nicolardot montre que, quand les combinaisons complexes du sesquioxyde de fer (modification brune) | | L 4 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES se coagulent sous l'action de la chaleur, par l'aëdition d'acides ou de sels, la coagulation a lieu suivant les lois ordinaires de la Chimie. La loi des proportions définies s'applique aux solutions colloïdales de l'hy- drate ferrique avec la même force qu'aux cristalloïdes. L'auteur fait ressortir, en outre, les propriétés curieuses de l'hydrate ferrique, qui permet de mettre en évi- dence la valence des acides et l'existence de fonctions alcooliques dans les acides organiques. Enfin, il établit que le sesquioxyde de fer, dans les solutions d'alcool, de glycol et, en général, d’un alcool polyvalent, joue le rôle d'un acide condensé, et que, dans ces conditions, les ferrites alcalins sont stables. M. J. Duclaux pense que, s’il est possible de faire rentrer, par une interpré- tation convenable, les propriétés de l'hydrate ferrique “colloïdal dans le type ordinaire des réactions entre cristalloïdes, il faut, pour étendre cette interprélation aux autres classes de colloïdes (sulfures, ferrocya- nures, etc….), les retenir tous sous une même dénomi- nation de corps condensés, ce qui revient à remplacer un mot par un autre. En effet, il reste, au point de vue chimique et surtout au point de vue physico-chimique, diverses propriétés qui conduiraient à admettre, pour ces corps condensés, des lois différentes de celles qui régissent les cristalloïdes : telle est l’action du courant électrique. — M. A. Kling montre que, dans la chloru- ration des cétones aqueuses, en présence de marbre, c'est l'acide hypochloreux qui agit comme chlorurant. D'autre part, il étudie les produits obtenus dans la chloruration de la méthyléthylcétone. Il montre que lun des dérivés monochlorés qui se forme et qui bout à 136° n'était pas connu jusqu'ici à l’état de pureté. Il en fixe la constitution en le transformant en alcool cétonique, puis en glycol C?H°.CHOH.CH?0H. Le dérivé chloré Eb. 136° est donc bien C*H°.C0.CH2CI. —M. L. Ma- quenne a obtenu du $-méthylglucose en méthylant à froid, par le sulfate de méthyle et la potasse, une solu- tion de glucose à pouvoir rotatoire stable + 529,5. Il résulte de là que la liqueur contenait du glucose à pouvoir rotatoire faible, ce qui est conforme aux idées actuelles sur la constitution du glucose dissous dans l'eau. M. Tanret rappelle que, dans une séance pré- cédente, il a montré que le glucose, le galactose et le lactose, et probablement aussi tous les sucres à mulli- rotation, se transforment partiellement en solution: les Sucres «(à pouvoir rotatoire plus élevé) en sucres 8 (à pouvoir rotaloire le plus faible) et les sucres £ en sucres «, jusqu'à ce qu'un certain équilibre soit établi : le pouvoir rotatoire est alors devenu stable. Du glucose, qui, en solution à 1/10, à an == + 529,50, est constitué, par exemple, de 0,368 glucose & (an — +110) et de 0,632 glucose $ («æn— 19°). Les anciens sucres y deviennent maintenant sucres &, la forme y n'étant pas une modification moléculaire au même titre que ces modifications « et &. Les sucres & diffèrent physique- ment des sucres & par leur pouvoir rotatoire, qui est plus faible, et leur solubilité, qui est beaucoup plus grande, chimiquement aussi par leur faible affinité pour l'eau. Alors que le glucose ordinaire et le sucre de lait (sucres «) ne se déshydratent, le premier que vers 60°, et le second qu'à 130°, si on mélange intime- ment au glucose $ ou au lactose 8 (qui sont anhydres) assez d’eau pour les hydrater, ils perdent cette eau par une simple exposition sur l'acide sulfurique. SECTION DE NANCY Séance du 1% Février 1905. MM. A. Guyot et J. Catel communiquent le résultat de leurs recherches sur les produits de condensation du bromure de phényl-magnésium avec les éthers 0-phtalique et o-benzoyl-benzoïque (F. 52) et sur les composés furfuraniques qui en dérivent. L'action du romure de phényl-magnésium en large excès sur ces deux éthers donne naissance au même produit : le triphényl-oxy-«x-benzo-8f'-dihydro-a4-furfurane ; REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 237 NS C(C°H° Le | | No. Ne(car)(on) La formule de constitution de ce composé résulte, d’une part, de l'étude de ses propriétés, et, d'autre part, du fait qu'on l’obtient encore avec d'excellents rendements dans l’action du bromure de phényl-magnésium sur la diphényl-phtalide. D'ailleurs, les auteurs ont constaté la formation de cette même diphényl-phtalide, à côté de faibles quantités de son isomère, l’o-dibenzoyl- benzène, dans l'action ménagée du composé organo- magnésien sur l’éther benzoyl-benzoïque (F. 52), et à côté d'acide benzoyl-benzoïque dans l’action ménagée du mème bromure sur l'éther o-phtalique. Grâce à la présence de son hydroxyle carbinolique, ce dérivé fur- furanique se condense facilement avec les phénols et les amines aromatiques pour donner des composés du type: Se où R= AzH= (F. vers 2000). No — Az(CH°)(R. / NN CH) CHR) OH 1710). F. 1670). L'acide sulfurique concentré transforme presque ins- tantanément ces derniers composés en leurs isomères dérivés du dihydrure d’anthracène-y-triphénylé-y-hydro- xylé. Le triphényl-oxy-œ2'-benzo-ff'-dihydro-xx'-furfu- rane, traité par l'amalgame de Na en solution alcoolique, fixe deux atomes d'hydrogène avec rupture du noyau furfuranique et donne l'o-benzhydryl-triphényl-car- binol : & /E(C'H5)OH N NN CH (CH5)0H Ce dernier composé, traité en solution acétique par HCI, perd une molécule d'eau et donne le triphényl- œal-benzo-6£'-dihydro-aa-furfurane. Si on remplace dans cette préparation HCI par l'acide sulfurique, on obtient par une déshydratation plus profonde le diphényl-anthracène symétrique {. — M. Minguin à pris le pouvoir rotatoire d’un certain nombre de sels de strychnine dans une solution contenant 2/3 d'alcool benzylique et 1/3 d'alcool éthylique absolu. Il dissout 0 gr. 334 de strychnine et la quantité équimoléculaire d'acide dans 25 centimètres cubes du solvant; il observe sous une épaisseur de 20 centimètres. Pour un certain nombre de sels, la déviation va en augmentant si l’on ajoute plus d'acide que n’en réclame la théorie, puis, à un moment donné, reste constante quelle que soit la quantité d'acide en excès. Ce fait ne s'explique que par une dissociation des sels au sein du dissolvant, et la différence observée entre la déviation première et la déviation permanente est en rapport avec la force de l'acide. Il constate aussi l'influence de la double liaison sur l’activité optique. — M. E.-E. Blaise expose la suite de ses recherches sur l'oxygène quadrivalent. Il montre que, dans les combinaisons de l'iodure de magnésium avec les éthers-oxydes, les acétals et les ortho-éthers, il y à union intime par l'atome d'oxygène du groupement carboné et de la molécule métallique. Ces recherches l'ont également conduit à une méthode générale de préparation des éthers chlorés. — MM. E.-E. Blaise et Courtot montrent que les dérivés organo- magnésiens sont susceptibles de se fixer sur la liaison éthylénique des éthers non saturés acycliques. C'est ainsi qu'en faisant réagir l'iodure de magnésium- méthyle sur le méthacrylate d'éthyle, on obtient une cétone saturée : la méthyl-1 :3-pentanone-2. La réac- 1 Haucer et Guyor : Bulletin Soc, Chimique, 1904, t. XXXI, p. 795, .. 238 ACADÈMIES ET SUCIÉTÉS SAVANTES ê tion exige la présence d’un groupement électronégatif | en posilion « par rapport à la double liaison. — MM. P.-Th. Müller et Allemandet ont étudié les potentiels électrolytiques des alcalis (KOH, NaOH, Li0H, TIOH, Ba(OH),, Sr(OH),, Ca(OH),) à l’aide des piles à Hg et oxyde de Hg opposées à l’électrode au calomel et au sein d’un électrolyte formé d’une solution décime de nitrate de potassium, le tout à 25°. Les différences entre les alcalis disparaissent à partir de ja dilution 4 °/, équivalent. On peut alors exprimer la différence de potentiel e de tous les alcalis par une seule formule contenant comme variable la seule con- centration C : — 6 04 e — 0.000198 T log ne La potasse fait exceplion à cause de l'influence homo- ionique du nitrate de potassium. Les auteurs montrent que la méthode permet de déterminer : 1° La constante de dissociation de la potasse; 2 L'hydrolyse alcaline des sels sans action sur l’oxyde de Hg, tels que borax, Na*CO$, etc. Les études sont poursuivies. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 8 Décembre 190% (suite). M. P. A. Mac-Mahon communique ses recherches sur la théorie de la répartition des nombres. Il étudie en particulier les propriétés des carrés magiques. — M. O. J. Lodge: Sur un moyen de produire un courant continu à haut volage où « permanent ». Les méthodes jusqu'ici employées pour lancer un courant à travers une très haute résistance reposent sur l'emploi soit d’une forte machine statique à induction (Wimshurst ou autre), soit d’une batterie à un grand nombre de piles. L'auteur trouve que, par l'emploi des rectifica- teurs à mercure à haute tension, le même résultat peut être obtenu avec des sources d'électricité ordinaires, en transformant et utilisant le courant de tout circuit continu ou alternattf. — Sir J. Dewar et M. R. A. Had- field: Zifet de la température de l'air liquide sur les propriétés mécaniques et autres du fer et de ses alliages. A part certaines exceptions, l'effet des basses tempéra- tures est d'accroître d’une façon remarquable la charge de tension maximum pour le fer et ses alliages et de réduire la ductilité à une valeur presque nulle. Ces changements sont presque identiques dans le fer forgé le plus doux et dans les aciers au carbone de 0,10 à 20 °/, jusqu'à 1,25 ou 1,50 ,/° de C: l'absence ou la présence du carbone a donc peu d'influence. La pré- sence du nickel communique au fer une grande dureté aux basses températures. En effet, tandis que le fer le plus pur devient très cassant sous l'influence de ces températures, le nickel s'améliore plutôt, non seule- ment sous le rapport de la ténacité, ce qui est aussi le cas du fer, mais aussi sous le rapport de la ductilité, à l'inverse du fer, La présence du nickel dans un alliage de fer contenant peu de carbone est donc un préser- vatif de la fragilité. Séance du 15 Décembre 1904 (suite). M.F. H. Jackson: La fonction gamma basique et les fonctions elliptiques. — M. E. Cunningham : Sur la série normale satisfaisant aux équations différentielles linéaires. — M. Ch. Chree analyse et discute les résul- tats obtenus avec les magnétographes de Falmouth pendant les jours « tranquilles » de 4891 à 1902. Les variations séculaires totales de la déclinaison de 1891 à 1900 à Kew et à Falmouth sont identiques, et les variations d'années en années presque semblables. Les variations annuelles de la force horizontale enregis- ‘trées dans les deux stations ne concordent pas aussi bien, et en moyenne la variation à Falmouth est la plus forte. — Sir William Crookes à mesuré le spectre ultra-violet du gadolinium en utilisant un échantillon de gadolinite très pure transmis par M. G. Urbain. La plupart des longueurs d'onde données sont identiques à celles qu'avaient déjà publiées MM. Exner et Haschek en 4902; d’autres sont nouvelles; quelques-unes dois vent être supprimées comme appartenant à des impu= retés; les principales impuretés trouvées sont l'yttrium l'europium, le samarium, l'ytterbium, le bismuth, Ie magnésium et le scandium. Dans le spectre de phos» phorescence de la gadolinite, l'auteur à retrouvé les bandes qu'il attribue au victorium; ce nouvel élé ment serait donc aussi présent à l’état d’impureté dans le gadolinium. — M. B. D. Steele: Les hydrures d'hæ logènes comme solvants conducteurs. HI. Les nombres de transport. L'auteur a déterminé les nombres dem transport des substances suivantes : éther, bromure de triéthylammonium, acélone, méthylhexylcétone, diss soutes dans l'acide bromhydrique liquétié, à la tempé= rature de — 81°, Voici les valeurs trouvées pour le nombre de transport du cation : À NOMBRE | CONCENTRATION en gr. mol. de par litre transport Tel Re) chblemoTo Mo ail à 1000 1,0 0,82 Bromure de triméthyl-ammonium. 0,5 à 0,75 0,20 — — ; 4,0% 0,35 ACÉIODO RECU ER RU ITA RIT 1,0 0,38 — USM EN OR AE E 1,8 0,95 NÉTRMINESVICELURE EE 0,9 0,39 — sd bus Ë 1,8 0, On voit que le nombre de lransport du cation aus mente avec la concentration. — MM. B. D. Steele, R. Mac Intosh et E. H. Archibald : Les hydrures d'halogènes comme solvants conducteurs. IV. Les aus teurs montrent que les résultats anormaux (diminution énorme de p avec la dilution) obtenus avec les solus tions conductrices d'hydrures d'halogènes liquéfiéss peuvent s'expliquer très simplement si l’on suppose ques la substance dissoute entre en combinaison avec le sole vant et que le composé formé subit + dissociation ionique. Cette hypothèse est confirmée par les résul= tats des déterminations de poids moléculaires, qui sont, dans plusieurs cas, plus élevés que la normale, ce qui montre l'existence d'une certaine association. # + ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN “ Séance du 8 Décembre 1904. M. E. Fischer présente une communication sur les recherches qu'il vient de faire de concert avec M. Umew taro Suziki sur les polypeptides des diamino-acides Les acides diamino-propioniques et les substances si importantes au point de vue biologique que sont J& lysine, l'histidine et l’arginine, se convertissent, comm les amino-acides simples, en dipeptides ou dérivés diacipipéraziniques par le chauflage de leurs éthers: — M. Kônigsberger communique un Mémoire sur principe d'énergie appliqué au potentiel cinétique d'u ordre quelconque et d'un nombre de variables indé pendantes et dépendantes illimité. Continuant s@ recherches antérieures relatives aux principes de Mécanique, l’auteur considère les différences quo trouve entre le principe de la conservation de l'éner gie, pour les potentiels cinétiques d’un ordre quelcons que, mais à une seule variable dépendante, et le prins cipe d'énergie appliqué à un nombre illimité de variables indépendantes. — M. Schotty présente une Note UM M. H. Jung (de Marbourg) sur les périodes des intés grales réduites de première espèce. Séance du 15 Décembre 1904. M. F. F. Schulze vient d'étudier la structure et Je développement de certains organismes marins consié dérés soit comme éponges cornées, soit comme ford minifères. 11 résulte des recherches de l’auteur, faites sur un matériel très riche et qui provenait de plusieurs, expéditions marines, que ces organismes constituent un groupe spécial de Rhizopodes pour lesquels | ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 239 M. Schulze propose le nom générique de Xenoplyo- phora. Is se composent de cordons ramifiés comme les branches d’un arbre ou bien réunis en réseaux, étroi- tement entourés de tubes organiques délicats avec les- quels ils se trouvent fixés dans un squelette mou de corps étrangers englobés. La forme de ces squelettes, traversés dans certaines espèces par des fils cornés minces, est caractéristique des espèces et des genres. — M. Emile Cohn présente un second Mémoire sur l'électrodynamique des systèmes en mouvement. Les équations fondamentales de Dynamique électrique, à l'opposé de celles de la Mécanique, changent de forme lorsqu'elles se rapportent à un système de coordonnées animé d'un mouvement uniforme. Ce fait a suggéré l'idée que le système au repos absolu pourrait être trouvé par l'expérience et que les étoiles fixes ne se- raient autre que ce système. Or, l'auteur fait voir que c’est là une erreur. Séance du 22 Décembre 190%. M. Van’t Hoff présente une communication ulté- rieure sur les conditions de formation des dépôts de sels océaniques; ce sont les températures de formation “au-dessous de 25° qui font l’objet de ce Mémoire, De concert avec M. Meyerhoffer, l’auteur établit que la glaubérite prend naissance au-dessous de 18°, alors que la thénardite (l'hexahydrate du sulfate de magnésium, la kiesérite, la léonite et l’astrakanite disparaissent respectivement à 13,59, 43°, 18° et 4,50. — M. G. Hel- mann à étudié la rareté des pluies sur les côtes planes de l'Allemagne. L'auteur fait voir que l'opinion géné- ralement adoptée, suivant laquelle les côtes seraient plus riches en pluies que les terrains continentaux si- tués en arrière, n’est vraie que des terrains en pente. Toutes les fois qu'on dispose d'observations relatives à un réseau assez dense, comme c'est le cas des côtes allemandes, on remarque que les côtes planes sont moins riches en pluie que les terrains continentaux situés en arrière. — M. Dilthey présente une étude sur les fondements des sciences philosophiques. A légal de la conscience philosophique de soi-même, les fon- dements des sciences daivent s'étendre à toutes espèces . de connaissance, tant à celle de réalité qu'à l’appré- ciation et à l’établissement des fins et des règles. La théorie du savoir doit résoudre de prime abord deux problèmes relatifs aux bases des sciences pures. Les sciences physiques et les sciences historiques formu- lent deux hypothèses, partant d'une condition indépen- dante de la conscience individuelle empirique et rela- tives à ses expériences, supposant que notre activité intellectuelle, en tant Paie évolue dans les formes et d'après les règles qui s’attachent à la conscience d'évidence, conduit à un savoir qui permet de connaître ces facteurs indépendants du sujet empirique. La solu- tion du second problème, à laquelle l’auteur s'attaque d'abord, se base sur une comparaison de la structure logique dans ses liaisons différentes, essayant de réali- ser la connaissance de réalité, l'appréciation et l’éta- blissement des fins et des règles. ALFRED GRADENWITZ. _ ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 5 Janvier 1905. 12 SGiENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Klug : Construc- tion du relief d'une surface de deuxième ordre. 20 Sciences PuYsiQuES. — M. H. von Ficker commu- nique ses études sur la dynamique du foehn, basées sur des observations faites à Innsbruck et dans des sta- tions voisines. Il cherche en particulier à expliquer les hénomènes d'interruption et de reprise soudaines du oehn. — M. J. Hann présente des recherches sur la météorologie de l'équateur, d’après les observations recueillies à Para depuis quelques années par M. E. Goeldi. — MM. R. Hoernes et F. Seidl : Le tremble- ment de terre de la Basse-Styrie et de la Carniole du 31 mars 1904. — M. H. Kurrein, en faisant réagir le chlorure d’éthyloxalyle sur l’éther malonique sodé, a obtenu l’éther d’un acide tribasique, Eb.86° sous 12 mil- limètres. L'acide correspondant HOOC.CO.CH(COOH}: cristallise avec 2 molécules d’eau et perd CO? par chauf- fage. — M. M. Samec, en condensant le formisobu- tyraldol avec la &iméthylaniline en présence de ZnCFÆ, a obtenu une base (CH*)°Az.C‘H£.CH?.C{CH5)>.CH[C'HS. Az (CH*}?®, donnant par oxydation un anhydride C?H%7475, d’où l’on peut revenir par réduction à la leucobase pri- mitive ; les sels de la base sont colorés. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. E. Heinricher a étudié quelques membres de la famille des Rafflésiacées, en particulier le Brugmansia Zippelii. I signale la courte durée de la fleur : un jour et demi à 2 jours; la fleur fraiche n'a pas un parfum désagréable: celui-ci ne se développe qu'après qu'elle est fanée. Le pollen n’est pas poussiéreux, mais forme une masse visqueuse. — M. F. Berwerth poursuit ses recherches géologiques sur l'aile sud du tunnel du Tauern. Séance du 12 Janvier 1905. 1° SGIENCES PHYSIQUES. — M. B. Zôlss analyse les observations de dispersion de l'électricité faites à Kiremsmunster en 1903-1904. La moyenne annuelle de la dispersion a été de 1,35 pour 1903 contre 1,32 pour l'année précédente. Le maximum se trouve en sep- tembre et le minimum en janvier. La marche diurne à une période double : les minima s’observent au lever et au coucher du Soleil, le maximum principal au moment de la plus haute température et le maximum secondaire dans la nuit. — M. J. Wittmann confirme les formules de Firba pour la solanine, le glucoside des pommes de terre, et la solanidine, base qui en dérive par hydrolyse. Les produits sucrés de l'hydrolyse se- raient le galactose, le rhamnose et un autre sucre complexe ; l'auteur n’a pas trouvé de dextrose, ni d’al- déhyde crotonique. — M. W. Suida a recherché si, en rendant inactifs les groupes atomiques chimique- ment actifs des fibres textiles, tout en conservant la structure de ces dernières, la teinture par les ma- tières colorantes basiques ou acides de la houille en solution neutre a encore lieu. Avec le coton, une acyla- tion partielle est seule compatible avec la conservation de la structure de la fibre; les produits obtenus se comportent vis-à-vis des colorants absolument comme le coton non traité. La laine de mouton est transformée très facilement par les moyens d’acylation ou par trai- tement avec l'alcool et l'acide sulfurique, sans change- ment de structure, en un produit qui n’est presque pas coloré par les colorants basiques, mais qui est très for- tement coloré par les colorants acides en solution neutre. Par saponification avec le carbonate d'’ammonium dilué, les fibres ainsi traitées sont ramenées à leur état initial. Par éthérification de la soie avec l'alcool et l'acide sul- furique, on obtient un résultat analogue. Ces résultats sont en faveur d'un processus chimique dans la tein- ture des fibres animales et de phénomènes purement physiques dans la teinture du coton. 90 SGIENCES NATURELLES. — M. G. Antipa : Les Clu- péides de la partie occidentale de la Mer Noire et des bouches du Danube. L. BRUNET. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 Janvier 1905. 4° SGiENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Cardinaal : Les équations qui déterminent le lieu géométrique des axes principaux d'un faisceau de quadriques. Complé- ment analytique à une étude synthétique (Æev. gen. des Sciences, t. XNI, p. 44). L'auteur parvient à une équation de l’ordre douze, en forme de déterminant, qui permet de développer l'équation de la surface du neuvième ordre dans tous les cas possibles. Ensuite, il donne quelques indications relatives à des cas parti- culiers. 20 SœEnces PHYSIQUES. — M. H. G. van de Sande Bakhuyzen : Notice nécrologique sur Th. H. Behrens, 210 professeur de Microchinie à l'Ecole Polytechnique de Delft de 1869 à 1905, autéur d’un manuel : « Die mikro- chemische Analyse », traduit en plusieurs langues. — M. H. A. Lorentz. Le mouvement des électrons dans les métaux. Seconde communication (pour la première, voir Rev.gén. des Sciences, t. XVI, p. 139). 11. Déduc- tion de la formule F — ?R, faisant connaître l'intensité i du courant dans un circuit thermo-électrique fermé. 12. Les énergies de chaleur : 27rm1A dh 3h dx’ mi eZh” W,=— W,— développées däns un circuit où circule un courant d'intensité 7. 13. Décomposition de la quantité de cha- leur développée : q=wW— = (WE)4x . 2 : SATA en trois parties, la chaleur développée S dx corres- éd pondant à la loi de Joule, la chaleur de conduction: d —— (W,E) dx FES) nl ; indépendante de 1, et la chaleur : mi dog A X 2eh dx fe qui change de signe avec i et mène à l'effet de Peltier et l'effet de Thomson. 14. Les résultats obtenus sont d'accord avec la théorie thermodynamique des cou- rants thermo-électriques. 15. La conclusion, déduite de plusieurs expériences, que les électrons négatifs sont de beaucoup plus mobiles que les électrons positifs, amène l’auteur à examiner ce qu'on peut atteindre à l’aide d’une théorie n’admettant que des électrons libres négatifs. — Ensuite M. Lorentz présente au nom de M. J. J. van Laar : Sur quelques phénomènes remarquables qui se présentent en cas de miseibilité restreinte de deux liquides dont l'un est anomal, comme l'eau. Dans la première partie de son « Conti- nuität » (1900, p. #1-45), M. Van der Waals a donné pour la première fois la théorie du pli longitudinal de la surface Y et étudié (Z e., p. 175, ete.) celui-ei avec quelque développement, surtout dans ses relations avec les composantes anomales. Entre autre, il a démontré que, pour que certaines complications, possibles en général, se présentent, il faut qu'une des composantes soit anomale. Ici, M. Van Laar tâche d'expliquer les formes particulières qui peuvent se présenter quand une des composantes est associante, spécialement quand la composante anomale est l’eau. — M. H. W. Bakhuis Roozeboom présente aussi au nom de M. E. H. Büchner : Points terminaux critiques de lignes de trois phases à phases fixes de mélanges binaires admettant deux couches fluides. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker : La sensibilité de loreille humaine pour des sons de différentes hauteurs produits par des tuyaux d'orgue. A peu près simultanément cette sensibilité a été examinée par M. M. Wien (1903) et M. F. H. Quix et l’auteur (1903), par des méthodes différentes. Les résul- tats obtenus concordent en ce qu'il n’y a qu'un seul maximum de sensibilité, que ce maximum est situé à g*, que la zone de sensibilité suffisante est comprise entre c! et g°, que la sensibilité diminue très considé- rablement en dehors de ces limites: ils diffèrent en ce que M. Wien trouve que la sensibilité dans la zone suffisante varie d’une manière importante d’un point à l’autre, tandis qu'elle est partout du même ordre sui- vant MM. Quix et Zwaardemaker, et, de plus, en ce que le «minimum perceptible » de M. Wien est un milliard de fois plus petit que celui des autres auteurs. C'est ce qui a induit M. Zwaardemaker à examiner encore une fois, par une tout autre méthode, les minima perceptibles à travers toute la gamme. Le téléphone et le diapason ont été remplacés par des tuyaux d'orgues couverts ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES larges, dont une série en bois, de composition uni- forme depuis G jusqu'à g*, était à sa disposition. Quel= ques séries d'expériences ont été faites en plein air à la bruyère de Milligen, d’autres en partie dans les cor- ridors de la Bibliothèque de l’Université d'Utrecht, en partie dans la salle exempte de sons du Laboratoire physiologique de cette Université. Les résultats assez concordantsserontpubliés ultérieurement ;ici M.Zwaar- demaker ne s'occupe que de deux séries faites dans les conditions les plus simples, la série terminale en plein air et la série terminale faite dans la Bibliothèque. Le diagramme de la fig.4 permet de comparer les résultats de 1902 avec la première de ces deux séries terminales par rapport au minimum perceptible. — M. K. Martin présente au nom de M. H. G. Jonker : Contributions à l'élude des blocs erratiques sédimentaires dans les Pays-Bas. I. Le « Hondsrug » dans la province de Gro= ningue. II. Système silurien supérieur. Première com munication. Les blocs erratiques correspondent à la zone G des provinces baltiques russes. La descriptions des blocs erratiques du système silurien supérieur commence par une courte analyse d’un travail de JE 1904 L | k PR ae 3 Ra | | ‘ L \ | U É. | Vis n! ( (& c g c! g ec? Ge ec? GE c* g* e° 9° cf q Fig. 1. — Minima des sons, produits par des tuyaux d'orgue“ 5 j , Produits p 2S LU) perccptibles à l'oreille humaine. M. O0. Torell, réponse couronnée à une question de prix proposée en 1865 par la Société hollandaise des Sciences, de Harlem, sur l’origine des fossiles que l’on trouve près de Groningue. Ce travail intéressant donne pou la première fois la théorie d’une couche glaciaire dans l'Europe septentrionale, pendant l'époque pleistocènel seulement, il n'a jamais été publié. Après quelques considérations sur la succession dés couches silurienne dans les îles de Gothland et d'OEsel, l’auteur se range du côté de M.F. Schmidt, en ce qu'il base la déterm nation de l’âge de ces blocs erratiques sur la division introduite par Schmidt pour le terrain silurien des provinces baltiques russes. Ensuite, deux espèces d roches erratiques sont examinées de plus près : # Calcaire à Pentanerus borealis Eichw., Calcaire et dos lomite formant la zone G, de Schmidt. Le « Boreas, Jiskalk », dans l'Esthonie, est considéré comme lietlMl d'origine des blocs erratiques trouvés à Groningue 2 Calcaire à Phacops elegans (« Eleganskalk »). Le autres fossiles caractéristiques sont Leperditia His geri Schmidt, Strophomena pecten L., Vincular nodulosa Eichw., Vincularia megastoma Eichw. Ce faune fossile prouve que ces blocs erratiques équi lent à la zone 6, de Schmidt, l'étage de Raiküll dan l'Esthonie. Pourtant, l'origine de ces blocs n’est pa encore connue. — M. C. Winkler présente la thèsed M.G. W. Manschot, intitulée « Paralysis agitans. » P. H. ScuouTe. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris, — L, MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. É À N° 6 30 MARS 1905 Revue générale des SCICenCCsS pures et appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, $ 1. — Mathématiques a Théorie des ensembles. — Les travaux du ongrès de Heidelberg ont donné lieu à un fait assez aradoxal, auquel nous avons fait allusion en rendant ompte de ces travaux ‘. Dans une séance de la Section Arithmétique, M. Künig a établi que le continu ne eut être mis sous la forme d'un ensemble bien onné, c’est-à-dire? que, si l’on convient d'une règle daprès laquelle, de deux nombres quelconques (com- Mis entre 0 et 1), on dira lequel est l’antérieur et quel est le postérieur, il est impossible de faire cette bnveution de manière que : {1° toutes les fois que a era antérieur à et b antérieur à €, a soit forcément itérieur à c; 2 une partie quelconque de l’ensemble onsidéré (celui des nombres compris entre 0 et 1) omprenne un élément antérieur à tous les autres. Or, presque immédiatement après, M. Zermelo arri- ait à cette conclusion que tout ensemble peut être n ordonné : conclusion directement contraire à la récédente. La démonstration de M. Kônig n’a pas encore été übliée, à notre connaissance. Elle n'a été exposée Woralement. On ne peut donc la discuter quant à ésent. La discussion sera, d’ailleurs, assez délicate, te démonstration faisant intervenir les propriétés S moins classiques des nombres aleph de M. Cantor. Celle de M. Zermelo a paru dans un fascicule récent ës Mathematische Annalen : il est d'ores et déjà pos- e de se faire une opinion à son sujet. Beaucoup de mathématiciens ont pensé trouver une une dans le point de départ même de la démonstra- on, point de départ sur lequel, d'ailleurs, l’auteur Emême avait attiré l'attention à ce point de vue. onsidérons une infinité d’ensembles E, définis d'une anière plus ou moins compliquée et constituant eux- ièmes une collectivité dont chaque ensemble E est un ndividu. Un des ensembles E étant donné, il est clair que, dans #bensemble, on peut envisager en particulier un élé- 2 Voir la Revue du 15 novembre 1904. ? Voir l’article de M. Hilbert dans la Revue du 28 février 1904 (p. 469-170). - REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. CHRONIQUE} ET CORRESPONDANCE ment déterminé e. M. Zermelo suppose cette opération effectuée pour chacun des ensembles E qui constituent la collectivité donnée. C'est cette possibilité qui n’est pas considérée comme évidente. Nous avouons ne pou- voir nous associer à cette critique. Certes, il n’est pas du tout évident que nous puis- sions, en fait, intiquer la loi qui présidera au choix de l'élément e dans chaque ensemble E. Mais où voit-on qu'une loi ait besoin de pouvoir être explicitement formulée pour exister ? Nous ne saurions mieux faire que de renvoyer, sur ce point, à l’article que M. Tannery a consacré précé- demment, dans la Revue, à la thèse de M. Couturat et à la notion de l'infini’. On y trouve? expliquée, avec une clarté qui nous paraît ne laisser de place à aucun doute, toute la différence entre une loi qui existe et une loi que nous pouvons caractériser en un nombre fini de mots, ou (comme le dit l'auteur) entre une cor- respondance bien déterminée et une correspondance qui peut être décrite. Sans cette différence, notons que les courbes dites topographiques ne pourraient exister. Nous avons, il est vrai, entendu soutenir qu'en effet ces courbes n'existaient pas au point de vue mathématique, puis- qu'elles n'étaient définies que physiquement, c'est-à- dire avec une certaine approximation. Cette objection, elle non plus, ne nous paraît pas probante. Les courbes topographiques ou empiriques ne nous sont connues que physiquement; elles peuvent même n'avoir qu'une existence approximative si l'on admet que les corps sont composés de molécules discrètes. Mais il en est, sans aucun doute, autrement dans l'hypothèse de la matière continue. Or, cette dernière est tout aussi mathématiquement possible que l’autre. Il suffit, d’ailleurs, nous semble-t-il, d'approfondir un peu la notion de ce qu'on peut appeler courbes définies mathématiquement pour être conduit à la même con- clusion. L'idée de courbe (ou, ce qui revient au même, de fonction) a été en s’élargissant progressivement depuis l'Antiquité. Les géomètres du commencement de ce siècle en avaient assurément une conception 1! Rev. gén. des Sc., tome VIII, p. 129-140, 1897. 2 P. 132-134. 6 très large, lorsqu'ils demandaient simplement à la fonction d'être définie par une expression analytique quelconque ; c'était cependant cette conception même que Riemann trouvait trop étroite, et contre laquelle il eut à lutter. La question que nous avons posée dans ce qui précède ne nous parait pas autre que celle qui se posait à Riemann. Si l’on parle de fonction ou de courbe admettant une définition mathématique, « mathématique », à notre avis, ne veut rien dire autre chose que « simple » : assez simple pour pouvoir être embrassée et énoncée par nos intelligences. C'est une notion toute subjec- tive, qui ne résulte nullement de la nature des choses. Dans le domaine mème des fonctions analytiques, une erreur, reconnue aujourd'hui sans contestation possible, ne reconnait pas d’autre cause que la con- fusion contre laquelle nous nous élevons en ce moment: c'est celle qui a consisté à considérer comme excep- tionnelles les séries entières non prolongeables au delà du cercle de convergence. Si MM. Pringsheim, Borel, Fabry ont pu établir qu'une série entière, prise au hasard, avait, au contraire, toutes les chances pour posséder cette propriété, c’est en envisageant la « loi des coefficients » au sens que nous adoptons ici. Si l’on ne considérait que les séries que l’on peut définir explicitement, nul doute que le point de vue inverse, celui où se sont placés les premiers auteurs qui ont traité cette question, ne soit le vrai. Enfin, il n'est pas nécessaire de s'adresser à l’idée de fonction pour rendre sensible la distinction dont nous parlons. Si, à chaque nombre entier N, on faisait correspondre un nombre entier 7 compris entre 0 et 9, ces nombres n étant choisis comme le suppose M. Tannery dans l’article cité ‘, c'est-à-dire sans aucune « loi », avec un nouveau coup de dés pour chaque valeur de N, la suite indéfinie des », considérés comme des chiffres décimaux, correspondra à un nombre irra- tionnel v, compris entre 0 et 1. Espère-t-on définir « mathématiquement » de tels nombres? Ou doute- t-on qu'il en existe ?? S La correspondance postulée par M. Zermelo peut être aussi « indescriplible » que le nombre v. Mais, ceci bien entendu, l'affirmation (évidente) : Un ensemble étant donné, on peut en considérer à part un élément, nous parait absolument adéquate à celle-ci : Un nombre quelconque (fini, infini ou transfni) d'ensembles étant donné, on peut supposer l'opération précédente effectuée sur chacun d'eux. La contradiction précédemment signalée ne dispa- rait donc pas par ce moyen. Il faut noter que cette contradiction n’est pas la pre- mière qui se présente dans la théorie des ensembles. C’est ainsi que M. Cantor a établi l'existence de sa série transfinie de nombres ordinaux et que, d'autre part, M. Burali Forti* a démontré que l'existence d'une suite de nombres transfinis présentant les propriétés décou- vertes par M. Cantor impliquait contradiction. C'est cette même antinomie que relève M. Hilbert dans sa conférence de 19004, lorsqu'il dit que l’on peut indiquer un système d’axiomes compatibles pour définir les nombres de Cantor, — de sorte que ces nombres doivent exister; mais qu'on ne peut indiquer un tel système d’axiomes pour l’ensemble de tous les nombres en question, de sorte que cet ensemble ne «doit pas exister : déclaration contradictoire avec la première, puisqu'un ensemble est défini quand on a défini chacun des éléments. L'étude du transfini semble donc conduire à un cer- lain nombre de conséquences contradictoires. Pour- AMLoc.icrte dE 133. : * Au reste, les lettres de l'alphabet étant en nombre fini, les nombres que l’on peut définir avec un nombre fini de inots forment une infinité dénombrable. % Circolo Mat. di Palermo, 4897. * Voir l'article cité de M. Hilbert, p. 170. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE quoi non? N'a-t-on pas énoncé plus d'une conclusid paradoxale lorsqu'on a commencé à introduire Je nombres incommensurables, les nombres négatifs, imaginaires ? Nous sommes peut-être à l’un de ces tou nants de la science, et il faudra laisser à l'avenir” tâche d’élucider ces obscurités, qui ne doivent q nous inciter davantage à nous intéresser aux notions propos desquelles elles s’introduisent. $ 2. — Astronomie Le neuvième satellite de Saturne. — satellite a été découvert, en 1898, par M. W. Pickering astronome américain, qui lui a donné le nom dé Phœbé; mais il est tellement faible et si éloigné de planète que son existence avait été, jusqu'ici, miseer doute. Elle vient d'être nettement confirmée dans une intéressante publication qu'a fait paraitre récemmen l'Observatoire de Harvard College; c’est à cette sou que nous avons puisé les quelques renseignements q suivent : M. Pickering avait commencé, dès 1888, avec 43 pouces, l'exploration photographique du voisin de Saturne, mais sans arriver à aucun résultat; cem fut que dix ans plus tard, lorsque le télescope Br de 24 pouces fut installé à l'Observatoire d’Aréquip qu'il reprit ses recherches. 4 En mars 1899, comme il examinait attentivement.les clichés pris en août 1898, il aperçut sur quatre d’enth eux (obtenus les 16, 17, 18 août et résultant de posts variant de une heure à deux heures) un petit poir allongé, à peine perceptible, à une grande distance"dé l'astre central, dont il partageait le mouvement. Les photographies suivantes furent prises en aoû 1899, mais la planète était à cette époque dans x région voisine de la Voie lactée, par conséquent Un riche en étoiles faibles, et cette particularité rendi l'examen difficile et incertain. On dispose maintenant de plus de soixante phot® graphies : l'examen des plus récentes à conduit àu résultat très déconcertant en indiquant pour le nouve satellite une révolution en sens contraire de celle huit autres. L’astronome américain a émis l'hypoth: d'une rotation antérieure de Saturne, à l’état nébuleu s'étendant jusqu'à Phœbé, et alors rétrograde, rota modifiée ultérieurement par les marées solairest devenue directe avant la formation du premier sate lite. ÿ MM. Barnard et Turner, à l’aide de l’équaton de 42,05 de l'Observatoire Yerkes, qui est actuellement le plus grand réfracteur du monde, ont pu, le 8 ao dernier, apercevoir un point lumineux ayant, à l'oû laire, l'aspect d’une étoile de 15°,5 à 16° grandeur: 3 septembre, M. Barnard constata, au même point ciel, l'absence de l’objet aperçu le mois précédent. Bes hotographies prises à l’aide du télescope Bruce, st esquelles Phæbé est visible, ne montrent aucune étoil à cette position. En outre, les éphémérides permet de conclure que, le 8 août, le nouveau satellite deva précisément être dans la région examinée par MM. Ba nard et Turner. On peut donc considérer que ces deux savants ont fait la première observation visuelle Phœbé. À Voiciles principaux éléments de l'orbite que M. Picke ring a pu calculer : & La distance à Saturne serait de vingt-trois minu ce qui représente environ 13 millions de kilomèt La durée de révolution serait de cinq cent quaranl six jours, et l’inclinaison sur l'écliptique atteindrait L’excentricité est très forte, égale à 0,22; Enfin, le diamètre est d'à peu près 320 kilomè et, vu de Saturne, il doit paraître de 5° à 6° grande Le sixième satellite de Jupiter. — Le pre télégramme que le Bureau Central de Kiel adressa Ce année aux différents observatoires du monde annong } une nouvelle très intéressante : le Professeur Perr CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de l'Observatoire Lick (Etats-Unis), venait de découvrir, par rapport à Jupiter, un sixième satellite, beaucoup plus éloigné de la planète que ceux déjà connus. Le nouvel astre avait déjà été soupçonné en décembre 1904; mais ce soupçon ne recut confirmation que dans des observations faites au début de janvier, avec le réflecteur Crossley : ce satellite occupait alors l'angle deposition 269° et était situé à la distance de quarante- neuf minutes de la planète. La découverte, à la même époque, par M. Wolf, de dplanète PV, dans une région très voisine de celle où Non avait trouvé le sixième satellite, fit croire, pendant quelques jours, qu'il y avait identité entre les deux «stres. Il n’en était rien, ainsi qu'est venue le démontrer diminuer les mouvements de roulis des vaisseaux !, cet ingénieur vient d'imaginer, de concert avec M. Maihak, constructeur à Hambourg, un appareil pour enregistrer les vibrations des bateaux à vapeur. Le pallographe, tel est le nom donné à cet appareil, trace l'amplitude des vibrations verticales et horizon- tales de la carène (où l'instrument se trouve installé), au moyen de deux plumes en acier, sur une bande de papier qui se déroule lentement sous l'impulsion d'un mouvement d'horlogerie. Une troisième plume, com- mandée par un autre mouvement d'horlogerie, produit à chaque seconde une marque sur la bande de papier. L'appareil comprend encore une à trois plumes addi- tionnelles (suivant le nombre des machines), mues Fig. 1. — Le pallographe, appareil pour mesurer les vibrations des navires à vapeur. “une nouvelle observation de M. Perrine effectuée le 17 janvier. De cette position et de celle du 4 janvier, M. Crom- “melin à déduit une orbite circulaire; il a obtenu les “résultats provisoires que voici : “La période de révolution est de deux cent quarante- huit jours, et la conjonction a eu lieu au milieu de évrier ; Linclinaison de l'orbite par rapport au plan équa- Kornial de Jupiter parait être voisine de 30°. $ 3. — Art de l’Ingénieur Un appareil pour enregistrer les vibra- tions des steamers. — On connait les recherches théoriques entreprises par M. Otto Schlick, de Ham- Oure, en vue de réduire les vibrations des steamers, Techerches qui ont rendu possibles les vitesses énormes, d'environ 23 nœuds par heure, auxquelles les bateaux à Vapeur modernes peuvent traverser l'Atlantique. Après avoir récemment construit un appareil pour électriquement par les machines. Chaque arbre de machine est, en effet, muni d'un disque de contact, permettant d'envoyer un courant électrique dans l’électro-aimant qui commande la plume en question, pour une position donnée de la bielle. Au moment où la bielle occupe cette position (le point mort, par exemple), une marque est, par conséquent, tracée sur la bande de papier. On peut disposer, s'il y a lieu, une autre plume d'acier, mue par un électro-aimant qui est actionné par un bouton de pression établi sur la passerelle. Ce dispositif se prête tout spécialement pour les courses d'essai sur une distance mesurée. Les courbes du diagramme fourni par l'appareil donnent toutes les données importantes d'une facon aussi exacte qu'aucun autre procédé. La forme des courbes détermine, en effet, l'amplitude des vibrations, tant horizontales que verticales, et leurs fluctuations périodiques. La marque faite sur la bande à chaque ! Voir la Revue du 30 janvier 1905, p. #0. 244 révolution de la machine permet, d'autre part, de trouver, au moyen des marques de temps, la vitesse de rotation de l'arbre à 1/20 de tour près. Ce diagramme permet encore de déterminer le nombre de vibrations produites pendant une révolution de la machine, et le point de l'amplitude où se trouve la partie en question du bateau lorsqu'une bielle donnée passe par le point mort. L'emploi de l'appareil dans les courses d'essai sur une distance mesurée est tout particulièrement précieux; il indique, en effet : 1° Le temps exact (à un vingtième de seconde près) nécessaire pour franchir la distance de 1 nœud; 2° Le nombre total de tours faits par la machine pendant la traversée d’un nœud, à 0,02 tour près (pourvu que ce nombre n'excède pas 150 tours par minute ); 3° L'amplitude, la fréquence et les caractéristiques des vibrations horizontales et verticales. Les recherches de M. Schlick ont démontré que le nombre de tours des machines maritimes est sujet à de fréquentes fluctuations dans l'intervalle d’une mi- nute. Aussi il importe tout particulièrement de déter- miner ce facteur aussi exactement que possible, afin de juger du travail de la machine. En analysant ces courbes (agrandies au préalable par voie photographi- que), on peut ensuite trouver les causes des vibrations et les éliminer, s’il y a lieu. Cet appareil est, par conséquent, d’une importance énorme, non pas seule- ment pour les vapeurs mus par machines à piston, mais encore, et à plus forte raison, pour les steamers à turbines, où il permet de constater toute position défectueuse des aubes du propulseur, cause principale des vibrations. $ 4. — Physique La transmission au loin des indications de la boussole. — A la récente Exposition jubilaire de la Société allemande des Electriciens, tenue à Berlin pendant les derniers jours de novembre 1904, la maison Siemens et Halske exposa un dispositif fort intéressant pour transmettre au loin les indications d’une boussole. En raison des grandes quantités d'acier et de fer que contiennent les vaisseaux de guerre modernes, le champ magnétique terrestre S'y trouve grandement affaibli dans la plupart des places où il faut se servir d'une boussole, et, qui plus est, le mouvement de va- et-vient et de rotation de grands corps magnétiques, tels que les canons et les tourelles tournantes, peut modifier jusqu'à la direction du champ terrestre. Ces inconvénients ne sauraient être éliminés que par l'usage d'un dispositif de transmission, permettant de placer la boussole à tout endroit convenable du vais- seau, -— choisi de facon à être libre de toute perturba- tion magnétique, — quitte à transmettre ses indications à l'endroit où il faut s'en servir. Le dispositif de MM. Siemens et Halske comprend d'abord la boussole primaire, qui n'est autre qu'une boussole ordinaire et qu'on dispose, comme nous venons de le voir, à l'endroit magnétiquement favo- rable. La rose de cette boussole est reliée à une plaque de mica recouverte d'une feuille d’étain:; dans cette dernière est pratiquée une ouverture en corne à tra- vers laquelle les rayons d'une forte lampe à incandes- cence, placée au-dessus, viennent frapper un dispositif bolométrique (sensible aux rayonnements calorifiques) qui se trouve au-dessous de la rose mobile. Suivant la position de cette dernière, des parties différentes du dispositif bolométrique seront frappées par les rayons de la lampe. Les modifications de résistance ainsi pro- duites donneront lieu à des variations de courant dans le circuit relié au bolomètre, variations qui, à leur tour, feront parfaitement enregistrer à la rose de la boussole secondaire les indications mêmes de la bous- sole primaire, Cette boussole secondaire comprend essentiellement CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE un instrument de mesure du type Deprez-d'Arsonval électro-aimant en fer à cheval. La bobine mobile de instrument comprend deux enroulements différentiel traversés par des courants dont l'intensité dépend p cisément des variations de résistance du disposi bolométrique de la boussole primaire. La rose de boussole secondaire fait corps avec la bobine mobil et un dispositif spécial permet à la rose d’'exécu des rotations entières sans compromettre les spirall d’amenée des bobines mobiles. Ce dispositif a été expérimenté avec beaucoup succès par les marines d'Allemagne et de Hollande. $ 5. — Electricité industrielle mt id L'éclairage par les lampes Cooper Hewitt — Les lampes Cooper Hewitt, dont la Æevue a prée demment donné la description, ont rapidement (trouvé par suite de l’uniformité de leur lumière et de leu consommation peu élevée de courant, un emploi dans les applications de la photographie, les travaux & copie, d'agrandissement, de photogravure, ‘d'impres sion, etc. L'Ælectrical World a récemment signalé un curieuse application de ces lampes, faite par la « Nex York Transportation Company ». Cette Société, qu emploie d'innombrables voiturettes électriques, dis pose d’une installation électrique assez importanteet TaBLEAU |. — Eclairage par lampes Cooper Hewitt SURFACE D'ÉCLAIREMEN SURFACE | NOMBRE À LE ES AMPÉRAGE | VOLTAGE à éclair: s . ail à éclairer |de lampes par lampe | parampèrel 200 m° 8 3,3 110 25 m? 7,50 m 100 m° 3 3,3 110 133 1/3 m°| 40, mm 1100 m° 30 3,3 55 31 m° 114,25 m notamment de puissantes batteries d'accumulateu placées dans une salle dont l'éclairage est difficile, no seulement à raison de la situation (les lampes brüler vingt-deux heures par jour) et des dimensions de salle (91%,50 de longueur, 12,75 de largeur, 8 mètre de hauteur), mais encore par le fait de la couleu sombre des récipients et du dégagement des vapeul corrosives. Ces dernières ayaient imposé dès l’origini la nécessité de placer dans une enveloppe spéciale mécanisme des cinq lampes à arc, absorbant de 60 70 ampères sous 115 volts, qui y étaient installées a début. . D'un autre côté, le fonctionnement des lampes" répondait pas à la consommation d'énergie, et il décidé de procéder à l’essai de lampes à vapeurs m@ curielles, qui, sous une même tension de 115 vol n’absorbent que 3 ampères. Une dizaine de lampes ce genre furent donc installées, et leur lumière ess vive que, malgré leur nombre relativement restre n elles permettent aux desservants de vérifier sans pell les divers éléments. [ Cet éclairage n’est donc pas aussi pareimonieux qL l'on pourrait croire au premier abord; en généralss « Cooper Hewitt Company » évalue à 7,43 m°, wo 10,22 m° ou 11,15 m°, la surface d’éclairement obtent par ampère. La Société précitée donne à ce sujetMle chiffres du Tableau I pour trois installations différent d'éclairage, la distribution des lampes étant approprié dans chaque cas aux exigences locales. $ 6. — Chimie industrielle La récupération électrolytique de l’état des vieux fers-blanes. — Le problème de la red pération de l'étain des vieux fers-blancs est l'un, ceux qui ont tenté le plus d’inventeurs; l'utilité d'un # CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 245 cédé véritablement pratique saute aux yeux par iportance de ces déchets qui, aux Etats-Unis seule- nt, atteignent jusqu'à 30.000 tonnes par an, dont 0 sont traitées en Amérique et le reste envoyé en lemagne. G. Richard a récemment signalé à la Société d'En- uragement un nouveau procédé dû à M. M. Neil, et paraît constituer un progrès dans cette voie. Le ncipe de ce procédé consiste à traiter les déchets anune dissolution de chlorure ferrique bouillant, qui ansforme l'étain en chlorure d'étain et une partie du ven chlorure ferreux; on retire le fer du bain dès l'étain en est entièrement dissous, on le plonge ns un bain de pétrole pour le préserver de l’oxyda- m et on l'expédie en paquets aux forges qui l'uti- sent. Quant à la dissolution stanno-ferro-chlorique, la traite dans un bain électrolytique avec caisse érieure en ciment et caisse intérieure en poterie use, renfermant une dissolution de chlorure fer- x provenant de la première opération. La dissolu- Da traiter circule entre les deux caisses. La cathode en étain et l’anode en graphite ; les cristaux d’étain posent sur la cathode, et le chlore dégagé à l'anode ansforme la dissolution en chlorure ferrique, ultérieu- ment employé dans la première opération. La disso- Hon traverse une série de ces bains, dont elle sort fièrement dépourvue de son étain. Mest donc un procédé logique, continu et théorique- ent simple, mais dont la pratique exige, toutefois, cer- nes précautions de détail. Le courant employé est 25 volts X 500 ampères, avec une densité de 60 am- les par centimètre carré d'électrodes. On retire envi- M5 kilogrammes d’étain pur par 24 heures, avec un teur d'environ 2 chevaux 5 à la dynamo, et 9 kilo- änmmes d'étain par tonne de déchet traité. $ 7. — Physiologie msuffisance parathyroïdienne chez la hèvre. — On sait que l’ablation des glandes thyroi- nnes chez le chien, chez le chat, chez le lapin, etc., ermine, de facon à peu près constante, l'apparition phénomènes tétaniques très particuliers conduisant, général, rapidement l'animal à la mort. Ces accidents niques ne s'observent, par contre, que rarement d'autres espèces animales, notamment chez les vores domestiques, soit que l’ablation totale des athyroïdes soit difficile à réaliser chez eux, soit une cause, er présent inconnue, intervienne ir annihiler les effets ordinaires de la parathyroïdec- S. Christens (de Copenhague) vient de publier, les Comptes Rendus de la Société de Biologie (1905, 335), une Note rapportant trois cas d'insuffisance athyroïdienne observés chez la chèvre, caractérisés pabdes accidents tétaniques conduisant rapidement à mort. Ces {rois cas, ajoutés aux cas signalés par Gley et à celui qu'a indiqué M. Moussu, démontrent 5 Si la chèvre échappe souvent aux conséquences ires de la parathyroïdectomie, elle peut, comme ien, le chat et le lapin, présenter des accidents aniques et rentrer ainsi dans la règle générale. ne chèvre vieille, ayant subi depuis quatre jours tion des thyroïdes et des parathyroïdes, est prise es tétaniques se renouvelant pendant une demi- ée et se terminant par la mort. — Une chèvre de ans et demi, ayant subi la parathyroïdectomie > présente, trente-cinq jours après l'opération, ccidents tétaniques très légers et meurt dans les quatre heures.— Enfin, un petit chevreau, qui avait !, pendant les premiers mois de sa vie, la thyroïdec- Me et présenté, de ce fait, les troubles trophiques demment décrits par M. Moussu (nanisme, poil et cassant, etc.), manifeste des accidents téta- revêtant rapidement une grande gravité deux oxante-cinq jours après l'opération. DS ces trois cas, l’autopsie minutieusement prati- quée démontre l'absence totale de parathyroïdes. On note aussi, dans le Mémoire de M. Christens, que, chez ces trois animaux, il n'existait, avant toute opération, aucune parathyroïde externe; la totalité du tissu para- thyroïdien était englobée dans les thyroïdes. En faut-il conclure que, lorsque cette disposition anatomique est réalisée, la parathyroïdectomie étant totale, les aeci- dents se manifestent nécessairement tôt ou tard; et que, dans le cas où des parathyroïdes externes existent, il y à toujours des parcelles isolées qui échappent à l'ablation et empêchent les accidents tétaniques de se manifester? C'est là une hypothèse tout au moins vraisemblable. $ 8. — Sciences médicales L’autonomasie."— On donne ce nom à un trou- ble de langage qui consiste dans la perte du souvenir des substantifs. M. Pitres, M. Trenel, en ont rapporté des exemples. M. Halipré (de Rouen) en a présenté un nouveau cas à la Société de Neurologie de Paris (12° décembre 1904). Quant on interrogeait sa malade, elle répétait sans cesse : « Je voudrais dire, mais je ne peux pas dire. » Parfois, elle forgeait un mot dont la consonnance rappelle vaguement celle du mot propre; exemple : oréga pour orange, veillon pour crayon. Elle ne pouvait pas lire etne reconnaissait pas les mots écrits (cécité verbale). Elle reconnaissait seulement les lettres isolées, mais se trompait souvent. Ce trouble du langage, survenu à la suite d'un ictus, s'est atténué peu à peu par la suite. Trois ans plus tard, la malade est morte d'une broncho-pneumonie. L’autopsie a révélé l'existence d’un ramollissement de la partie postérieure de l'hémisphère gauche. Les hémiædèmes chez les hémiplégiques. — Gn sait qu'il existe d’une facon presque constante des troubles circulatoires dans les membres hémiplé- giés : ces membres, et surtout leurs extrémités, sont généralement plus froids, plus rouges que ceux du côté sain. On constate aussi, dans quelques cas, une sorte d'infiltration œdémateuse. MM. Lœper et Crouzon ont étudié! les œdèmes des hémiplégiques. Pour eux, l'hémiplégie n'est pas seule capable de produire l'ædème, mais elle détermine sa localisation sur le côté paralysé chez les sujets qui présentent des troubles cardiaques ou rénaux. Il s’agit done d’un œædème d’ori- gine mixte. Sa présence est un signe clinique impor- tant à connaître, car il attire l'attention sur une lésion du cœur ou du rein qui pouvait passer inaperçue. Ecoulement du liquide céphalo-rachidien par le nez. — M. A. Vigouroux a présenté à la Société de Neurologie de Paris (1° décembre 1904) un malade atteint depuis neuf mois d'un écoulement nasal perma- nent, qui atteint 800 centimètres cubes par vingt- quatre heures. Des examens chimiques réitérés ont prouvé qu'il s'agissait bien d'un écoulement du liquide céphalo-rachidien, dû vraisemblablement à une lésion de l’ethmoïde. Avant que cet écoulement ne se fût pro- duit, le malade souffrait de violents maux de tête: depuis lors, ces douleurs ont disparu. Des faits ana- logues ont été signalés antérieurement par MM. Ba- binski, Brissaud, Sicard. On hésite à intervenir pour faire cesser cet écoulement, par crainte de voir repa- raître les maux de tête. $ 9. — Géographie et Colonisation La pénétration économique du Sahara. — Au mois de novembre 1904, la grande ligne de péné- tration d'Arzew à Béni-Ounif a atteint Ben Zireg,et trois 4 Nouvelle Iconographie de la Salpêtrière, n° 3, 1904. ? Cf. E.-F. Gauraier : La valeur économique du Sahara, in Bull. Soc. Géogr. commerciale, Paris, XXV, 1903: Sahara oranais, in Annales de Géographie, 15 mai 1903; le Moui- dir-Ahnet, in la Géographie, 15 juillet et 15 août 1904. 246 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE millions de francs ont été inscrits au budget de 1905 pour sa continuation sur Béchar-Colomb. Grâce aux excellentes méthodes de pacification du général Lyau- tey, commandant la subdivision d’Aïn-Sefra, la sécurité est revenue dans l'Extrème-Sud oranais. L'entrepôt franc de Béni-Ounif se développe ; les Figuiguiens, les Doui Menia, les Beni Guil y viennent chaque jour da- vantage, amenant des moutons et des chameaux, des poils de chèvre, des peaux de filali, des dattes, des burnous, du bekhour, etc., qu'ils échangent contre le blé, l'orge, la semoule, le café, les tissus, la laine, le beurre et l'huile, etc. Le commerce se chiffre déjà par millions de francs. Les recettes de la ligne Aïn-Sefra- Béni-Ounif atteignent 245 francs par kilomètre et par mois ; le même résultat peut être escompté pour le grand. Est-ce à dire que l’on pourrait faire du Sahar une région d'élevage? Nous ne le croyons pas davar tage, en partie pour les mêmes raisons, encore que à les possibilités soient plus grandes. Il reste les richesses minières, et c’est pour elles prins cipalement que serait utile l'inventaire que nous réel mons; la tâche est facile en adjoignant des spécialistes, aux très nombreuses « randonnées » d'officiers qui sil lonnent en tous sens le Sahara depuis trois ans. tout est à découvrir : les nitrates du Gourara sont mythe ; il y a des chances de calamine dans les calcaires disloqués du Béchar; la présence de l’or est probléma tique au Hoggar; on peut à peu près compter sur cell du cuivre. Après examen de fossiles du Dévonien supés rieur, rappor de Béni-Abhbès tronçon Beni-Ou- nif-Ben-Zireg, étant donné qu'u- ne bonne partie des marchandi- ses qui arrivent 3° notre savant Cole“ Hamyan laborateur, M Mebheria Haug, a conclu at caractère hercy Lin ber-Ahelil n des 4 paléozoïques dl | Sahara à la première de ces stations sont destinées à la se- conde. C’est que la vallée de loued Guir est incom- parablementplus habitée et plus riche que celle | de l’oued Zous- Forthassa Marbre Beni Cuil, NG ee. trional. sait que la plus grande partie des gisements houil=n lers de l'Europe occidentale s@ trouvent dans 14 chaine here nienne. C'est ens core une espé… Chott Tigri fana ; les DouiMe- nia ont des cul- tures d'orge: il était juste que l'on dirigeät la voie ferrée de ce côté, plutôt que par Taghit, com- me le prévoyait le premier pro- Oulad Dye rance, mais CE n’est rien de plus Il faut des certis tudes pour oriens ter nos voies fer rées de pénétræ tion, et seul ut inventaire scie tifique està mêm OU? O nir. jet. Au delà de Bé- char, aucune dé- cision fermen'’est encore prise; il importe aupara- vant d'être ren- seigné par un inventaire scien- tifique sur ce que P. Clerget. renferme le Sa- hara: c’est alors, et seulement quand ce travail sera fait, que l’on ÆEBorremans.s pourra parler de « complète réhabilitation ».., s'il y a , suivants pour les prix qu’elle distribue chaque année lieu. Au point de vue agricole, la seule région cultivable est l’oasis. Sans doute, ces oasis, exploitées Jusqu'ici de facon très rudimentaire, peuvent être étendues et mul- tipliées. Si les pluies sont rares, le bassin de réception est énorme, et les puits artésiens donneront d'excellents résultats. M. Flamand considère même les dunes comme de magnifiques réservoirs d'humidité et des filtres natu- rels. Le seul obstacle avec lequel l'irrigation ait à comp- ter, c'est l'envahissement du sel par infiltration : il faut alors tuber les puits ou surélever le sol. Mais, quoi que l'on fasse, l'énorme distance, la pauvreté du sol, la qua- lité inférieure des dattes, malgré l'effort des indigènes pour acclimater la variété d’Ouargla, rendent peu probable la création de grandes exploitations, comme celle de l’oued Rir. Il apparaît clairement que le noma- disme est plutôt un effet qu'une cause, et que le Targui est pasteur par suite de l'impossibilité de la culture en Fig. 2. — L'Exlrême-Sud oranaïs. Lisbonne. L'Académie des Sciences de bonne vient d'in Sciences mathématiques. — 1. Développer la théon des variables imaginaires aux points de vue analytique et géométrique. — II. Faire l'étude critique de théorie géométrique de la courbe des superficies, € cherchant à la développer sur quelques points im tants. — III. Etudier les équations de la Dynamique sous le point de vue de l'intégration. Sciences physiques. — I. Influence de la découve des vibrations irréfrangibles dans les théories de lumière. — IL. Services rendus par l'analyse spectral l'étude de la composition des terres rares. - Sciences naturelles. — 1. Monographie sur un grouf animal ou végétal de la faune ou de la flore portugaist — II. Etude du volcanisme dans les Acores dans temps géologiques et à l'époque actuelle. s | Tous les savants peuvent concourir, à l'exception de membres de l’Académie. Les prix consistent en ume médaille d’or de 250 francs. Le tunnel du Simplon diffère de ses congénères, et de sen voisin le Gothard en particulier, par le fait qu'il commence à une hauteur beaucoup moindre et qu'il est, par conséquent, plus long; il possède, par contre, l'avantage d'un accès plus facile, où les fortes rampes sont évilées. Ainsi le tunnel du Mont-Cenis est situé à 600 mètres, celui du Gothard à 450 mètres d'altitude au-dessus du tunnel du Simplon; par contre, le Mont-Cenis a environ 12 kilomètres, le Gothard 13 et le Simplon 20 kilomètres de longueur. Le Simplon est done un tunnel de base, parce qu'il attaque la montagne Len sa partie la plus basse et que ses entrées sont à un niveau relativement peu élevé : l'extrémité mord est exactement à 685 mètres, l'extrémité sud à 634 mètres au-dessus de la mer. I. — PROGRAMME DES TRAVAUX. Comment se présentait, au point de vue tech- nique, l'opération du percement du Simplon ? La construction des tunnels de grandes dimensions est une œuvre toute moderne. Un tunnel comme celui du Hauenstein, sur la ligne de Bäle à Lucerne, de 2 kilom. 1/4 de longueur, fut, à l'époque de sa construction, un objet d'attention universelle. Ce fut également une entreprise colossale que l'attaque du tunnel du Mont-Cenis, long de plus "de 12 kilomètres, vers 1859. Au commencement des travaux, on en était encore uniquement réduit au percement à la main; le percement à la machine ne fut découvert et utilisé qu'au cours de la cons- lruction. Pour gagner du temps, on percait quand on le pouvait des puits dans l'axe du tunnel, afin de créer plusieurs points d'attaque; mais, dans la haute montagne, cette ressource fait défaut. Le percement à la main ne permet guère une avance de plus d'un mètre par jour; par ce moyen, il aurait fallu seize ans et demi pour traverser le Mont-Cenis en travaillant des deux côtés à la fois. L'emploi des premières perforatrices mécaniques ermit de réduire la durée des travaux à onze ans. Au Saint-Gothard, long de 15 kilomètres, l'amé- lioration des machines fit progresser l'avance jour- nalière à 2,6 mètres de chaque côté, et le perce- ment fut terminé en huit ans. Quelle durée était à prévoir pour le tunnel du Simplon? L'entreprise fit appel au concours de la maison Brandt, dont le système de percement repose sur l'emploi de perforatrices hydrauliques. Etant données, d’une part, les indications fournies par le profil géologique soigneusement établi, qui ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON 247 LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON présentait en général comme favorables les espèces de roches à traverser etleur stratification supposée, d'autre part les preuves déjà données par le sys- tème Brandt, on a escompté une avance journa- lière de 5,5 mètres environ, ce qui donne une durée de cinq ans pour le percement des 19.770 mè- tres de tunnel, plus six mois environ pour le para- chèvement des travaux. Nous verrons plus loin comment ce programme a élé suivi. A côté de la question du percement mécanique se place celle de la ventilation. Lorsqu'on com- mencça le tunnel du Mont-Cenis, on crut naïvement que le renouvellement de l'air se ferait plus ou moins de lui-même, comme c'est le cas, en effet, pour les tunnels très courts. Aussi l'adoption de l'air comprimé pour actionner les perforatrices, qui provoque simultanément une certaine aéralion, fut-elle considérée comme un grand succès. C'est sous cette impression qu'on traça le programme des travaux du Gothard. En principe, il est très vrai que l'air comprimé renouvelle l'air au moment de son expansion; mais on se trompa quantitalive- ment. Ce que les perforatrices à air emploient suffit à peine au personnel qu'elles occupent; il ne reste rien pour les nombreux aulres travailleurs. Il en résulla qu’à certaines époques, il arrivait à peine 90 mètres cubes d’air par minute pour 400 hommes dans le tunnel du Gothard, alors qu'il en aurait fallu plus du double. C'est à cette ventilation insuffisante qu'il faut attribuer le mauvais état de santé des travailleurs du Gothard, qui, joint au manque d'hygiène, fit tant de victimes. Une étude approfondie de cetle question nous en a fait trouver la solution, et la construction du tunnel de l’Arlberg est venue nous offrir à point le champ d'expérience désiré. Notre projet de ven- tiler fortement le tunnel au moyen de conduites d’un diamètre considéré jusqu'alors comme impos- sible à obtenir, alimentées de beaucoup d'air à une basse pression, trouva l'adhésion des ingé- nieurs autrichiens, el le succès confirma les prévi- sions. C’est en grande partie grâce à la nouvelle ventilation, qui fournissait 6 mètres cubes d’air par seconde, que le tunnel de l’Arlberg put être achevé un an avant le délai fixé, et que la santé des ouvriers se montra constamment bonne. Pour le Simplon, la question de la ventilation était beaucoup plus compliquée que pour l’Arlberg : il s'agissait d'une longueur double, d'un nombre beaucoup plus grand de personnes travaillant ensemble dans le tunnel, et surtout de hautes tem- pératures, facteur complètement nouveau dans la 248 ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON construction des tunnels. Partant de ce principe que l’homme ne peut supporter une haute tempé- rature quand il travaille dans un air stagnant, mais qu'elle est presque sans influence lorsqu'il se trouve dans un courant d'air, on calcula qu’il était nécessaire de fournir à chaque homme 3 mètres cubes d’air par minute, soit 1.500 mètres cubes pour une équipe de 500 hommes. Mais on reconnut que la fourniture d’une telle quantité d'air néces- siterait des conduites énormes et encombrantes, et l'emploi d’une force considérable. C’est en son- geant aux moyens de surmonter ces difficultés que germa peu à peu l'idée de la construction simul- tanée d'une deuxième galerie, la galerie parallèle, est impossible d'abaisser de beaucoup la tempé- ralure par la seule ventilation, à cause de la faible capacité calorifique de l'air. Il ne suffit pas, d'ail leurs, de connaître seulement la température pro bable; il faut encore savoir quelle quantité de chaleur, en calories, cèdent les parois du tunnel L'ingénieur Hirzel-Gysi, qui se voua à l'étude de cette queslion, reconnut que le dégagement de chaleur par heure devait être d'environ 2 millions de calories, et, dans ces conditions, le seul moyen de rafraichissement efficace lui parut être unem circulation d’eau froide. Nous verrons quels excel= lents résultats a donnés ce moyen si simple. Les trois questions principales : percement méca Fig. 1. — Pertoratrice hydraulique Brandt avec colonne d'appui et affüt roulant. qui apporta d'un seul coup la solution du pro- blème. Cette deuxième galerie constitue, en effet, le grand tube dont on avait besoin, et elle ne gêne en aucune manière les travaux du tunnel prin- cipal; elle présenta même, dans la suite, de grands avantages pour la question du transport et celle de l'écoulement des eaux, et elle permit la cons- truction d'un tunnel à une seule voie pour com- mencer. Restait encore la question de la température. Le facteur chaleur a joué un rôle néfaste au Gothard, et pourtant la température ne s’y éleva qu'à 31°. Or, au Simplon, d’après les lois de l'élévation de la température avec la distance verticale au-dessous de la surface, on pouvait s'attendre à des tempé- ratures de 38°, 40° et même 42 C. en certains points; dans toute la partie allant du kilomètre 6 au kilomètre 15 en partant du nord, la tempéra- ture moyenne devait osciller entre 35° et 400. II nique, ventilation, refroidissement, étant ainsi résolues, on put tracer le programme des installaz tions. En premier lieu venait le problème de la fourniture d'énergie : les calculs montrèrent que les divers travaux et l'éclairage électrique absor= beraient environ 1.700 chevaux; pour plus de sûreté, on porla cette estimation à 2.200 chevaux® et, pour obtenir cette force, on eut recours à l'énergie hydraulique du Rhône, du côté du nord$ et de la Diveria, du côté sud. La triangulation et la détermination de l'axe du tunnel n'offrirent aucune difficulté. II. — PERCEMENT. Examinons maintenant plus en détail la façon dont les divers points du programme exposé pré= cédemment ont été remplis. La largeur d’un tunnel à une voie est d'environ A Ah ig REA À ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON 219 4,5 à 5 mètres, sa hauteur de 6 mètres. Ce gros | d'établir d'emblée un plancher sûr et immuable trou n’est pas percé d'emblée sur loute sa section ; | pour tout : pour les rails, les conduites, l’écou- on commence par pratiquer un trou plus petit, la | lement de l'eau, ete.; avec les galeries de faite, où galerie, d'environ 2 mètres de hauteur sur 2,5 à 3 | l'agrandissement se fait par le bas, la base change mètres de lar- constamment geur, c'est-à- k ; ù et il en résulte dire assez haut de grands désa- pour que des gréments. hommes puis- La différence sent S'y tenir du tunnel du debout et assez Simplon avec large pour que les autres tun- des wagons nels alpins a puissent y cir- seulement con- culer. L'établis- sisté en ce que sement de la l'on à altaqué galerie est l'ou- à la fois deux rage des per- galeries de ba- foratrices. On se, distantes de travaille ainsi 17mètres:dans beaucoup plus chacune, le tra- rapidement; val amété le pour les très même. courts tunnels On a em- seuls, on atta- ployé, comme que le perce- NE ; nous l'avons ment sur toute Fig. 2. — Perforatrices au front d'attaque, dit, les perfo- la section. La ratrices hy- galerie peut être siluée n'importe où par rapport | drauliques Brandt. Le principe de ces machines à la section totale; pratiquement, on la place en | est de détacher les parlicules de roches du trou haut ou en bas : dans le premier cas, on a une | de percement non par le choc, mais par la pres- galerie de faite, dans le second une galerie de base. | sion. Une tarière tubulaire avec trois dents est Am.X 1 Ki. X+#00 ee em ectron d'elergrss Tunnel 1 = Galerie À £ Fig. 3. — Schéma des travaux de percement du tunnel du Simplon. Au tunnel du Gothard, on pratiqua une galerie de | appliquée sur la pierre avec une forte pression faite; à l'Arlberg et au Simplon, on a établi une | (10 à 12.000 kilogs), de facon que les dents y galerie de base. Où est l'avantage? La question est | pénètrent de quelques millimètres; on tourne encore vivement discutée. Je pense, pour ma part, | ensuite lentement, de manière à détacher de petits que les galeries de base offrent l'avantage essentiel | fragments. Dans une seule perforatrice, on déve- 250 ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON loppe une force de 25 chevaux environ; du côté nord, on travaillait avec 3, du côté sud avec 3 ou 4 machines de ce genre. Les perforalrices sont dis- posées sur le tube de compression, qui fournit la pression totale des 3 ou 4 perforatrices, soit 30 à 40.000 kilogs. Le tout est monté sur un chariot mobile (fig. 1 et 2). Les perforatrices doivent avancer d'au moins un centimètre par tour. Lorsque ce n'est pas le cas, les , suivant la dureté de la pierre, on a avancé par jour de 4 à 9 mètres. L'eau sous pression servant à actionner les per- foralrices était produite au dehors du tunnel. L'eau était comprimée par des pompes, mues par des turbines, à 80-120 almosphères, puis envoyée jusqu'au front d'attaque (c'est-à-dire, vers la fn des travaux, à environ 10 kilomètres) par des conduites appropriées, assez résistantes et assez grosses Fig. 4, — Excavation du canal latéral pour l'écoulement des eaux. dents ne mordent plus suffisamment et il faut rem- placer la tarière. Les pierres dures nécessitent fréquemment ce changement; pour ces dernières, il fallait souvent employer 120 à 150 tarières avant que le trou fût assez grand pour permeltre de poser une charge d’explosif. Avec le meilleur acier, il est impossible d'avancer de plus de 10 à 15 centimètres dans une roche dure. La durée de perforation d'un trou est de quarante minules à une heure, mais peut atteindre jusqu'à trois heures. On peut faire par jour de quatre à sept attaques, et dans chacune | pour éviter une trop grande perte de charge par le frottement. En fait, on a oblenu, avec une pression initiale de 100 atmosphères, une pression de 70 à 80 atmosphères à 10 kilomètres de distance L’eau comprimée ne servait pas seulement aux perforas trices, mais pour des pompes de toute nature el pour la ventilation; ce fut le grand agent de pers cement du tunnel. L'avancement moyen, du côté nord, qui offrit des conditions à peu près normales, ful de 5,52 mètrés de novembre 1898 à septembre 1903, ou de abattre 4 mètre à 1 1/2 mètre de terrain. Ainsi, 5,92 mètres en défalquant les jours perdus. Du pompage mes de er DEEE x gite ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON côté sud, on avanca beaucoup moins rapidement, par suite de circonstances spéciales, sur lesquelles nous reviendrons. A côté de la perforalion, une question impor- tante est celle du déblaiement. Toutes les matières abattues par les coups de mines doivent être enle- vées rapidement, et le problème de l'enlèvement mécanique préoccupe depuis longtemps les cons- tructeurs de tunnels. J’en ai trouvé en principe la solution, qui consiste à enlever les matériaux au moment de l'explosion au moyen d'un jet hy- draulique. Malheureusement, en pratique, nous n'avons pu y arriver, parce que, à cause des per- tes par frot- tement dans la conduite, la force dis- ponible est inférieure à celle qui se- rait néces- saire. Depuis 1898, le tra- vail des per- foratrices s’est pour- suivi jour et nuit pendant toute l’an- née, à l'ex- ceplion des grands jours de fête (deux seulement 251 vailleurs ont été à l’œuvre simultanément Simplon. En ce qui concerne le revétement du lunne!,ilest de règle de l'opérer sur toute la longueur, non qu'il soit nécessaire d’avoir partout une voûte pour supporter la roche, mais parce que, par suite des explosions, des morceaux isolés ont été ébranlés sans tomber, et qu'on doit craindre qu'ils ne s'éboulent ultérieurement. Là où la roche est assez solide, on n’élève qu’une maçonnerie assez mince, dont le minimum atteignait 35 centimètres au Sim- plon. Là où la roche est moins solide et où l'on peut s'attendre éventuellement à des pressions, le profil des murs est na- turellement plus fort. Dans les premiers ki- lomètres au nord et au sud, on à pu se contenter demurs min- ces; mais, vers le mi- lieu,parsuite de l'énorme pression des masses sus- jacentes, on a dû procé- der à des tra- vaux derevé- tements plus au par an)et des sérieux (fig. jours néces- Fig. 5. — Exécution des voütes du tunnel avec cintres en fer. 5). saires à la La ques- vérification de l'axe (deux également par an). Il s’agit maintenant d'élargir la galerie pour en faire le tunnel, et ici l'on peut procéder différem- ment. Des galeries de base on se dirige versle haut, d'après l’ancienne méthode, et, parvenu en haut, on va en avant et en arrière. Ces travaux d'élargis- sement ne se font pas à la machine, mais à la main, ce qui revient à meilleur compte. Ensuite, on tra- vaille d’abord en haut, puis en bas dans la largeur (fig. 3), et les galeries de faite finissent par se ren- contrer. Tous les 200 mètres, on réunit le tunnel Ià la galerie II par une galerie transversale. Ces tra- verses servent surtout à la ventilation, mais aussi au transport. Ce mode de travail permet à un grand nombre d'ouvriers d'opérer simultanément; si le profil entier du tunnel était attaqué de front, on ne pourrait utiliser qu'une trentaine d'hommes à la fois, tandis que, par le moyen des galeries, 500 tra- tion du transport oïre d'assez grandes diffi- cultés dans la construction des tunnels. Si l’on se base sur une avance moyenne de 7 mètres, il faut évacuer environ 210 mètres cubes de déblais par jour; il faut introduire, d'autre part, des pierres, de la chaux, du sable, du ciment, du bois, etc., pour le revêtement du tunnel. De chaque côté du tunnel, il y a eu environ 300 wagons en service, eb le mouvement journalier des véhicules a élé, en temps normal, de 510 à 560 voitures à l'entrée et à la sortie. Le trafic a lieu de la façon suivante : De l'entrée jusqu’à l'extrémité de la section entière- ment terminée, les trains sont tirés par des loco- molives à vapeur de 16 tonnes, pourvues d'une grande réserve d'eau chaude et de vapeur afin de produire le moins possible de fumée. En ce point se trouve la station du tunnel, avec deux voies de service provisoires. De là, les voitures qui servent 9252 ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON à l'achèvement du tunnel I poursuivent leur chemin dans ce tunnel. Les voitures pour le service des galeries passent du tunnel I dans le tunnel IT par les galeries transversales (fig. 6), et tout le trafic se poursuit parallèlement au tunnel I en déchargeant celui-ci d'autant, ce qui constitue un des grands avantages de nolre méthode de travail. À partir de la station du tunnel, le service de traction est fait par des locomotives à air comprimé, alimentées d'air à une pression de 80 atmosphères par une un pareil essai, et nous n'avions aucune valeur expérimentale pour le coefficient de frottement de l'air sur des parois aussi grossières. En prenant pour ce dernier une valeur très élevée, on calcula qu'une pression correspondant à une colonne d'eau de 500 millimètres était nécessaire pour obtenir une vitesse de l’air de 4 mètres par seconde dans la galerie. L'expérience montra que les prévisions étaient un peu supérieures à la réalité, puisque, avec plus de 10 kilomètres de galerie, on put travailler Fig. 6. — Jonction d'une galerie transversale avec la galerie principale. — À gauche, locomotive à air comprimé. conduite. Ges locomotives sont très ramassées pour passer partout dans les galeries. On nous demandera pourquoi nous n’avons pas ‘eu recours à la traction électrique, qui paraissait s'imposer. Une étude approfondie nous a convaincu qu'elle aurait présenté de grands inconvénients : l'humidité et le suintement auraient provoqué des courts circuits, et une installation fixe aurait subi de grands dommages par suite des explosions et des changements perpétuels de profil. III. — AÉRATION ET REFROIDISSEMENT. Pour ce qui concerne l’arralion, nous avons déjà dit que la galerie parallile servait de conduite d'amenée d'air. C’est la première fois qu'on faisait avec une pression de 270 millimètres. L'air est fourni par deux ventilateurs centrifuges, envoyant environ 30 mètres cubes d'air par seconde à 210 millimètres, et commandés chacun par une turbine de 250 chevaux. Ils travaillent alternative- ment par périodes de vingt-quatre heures, l'un étant toujours en réserve; au besoin, ils peuvent fonctionner simultanément en donnant une pres- sion double ou une quantité double d'air. Des ventilateurs, l'air est conduit par un canal à la galerie II et envoyé le long de celle-ci. Il est clair qu'on ne peut forcer l'air à remonter celle-ci entiè- rement quand on ouvre sur son parcours des ga= leries transversales, car, par une loi naturelle, l'air revient au dehors par le plus court chemin suivant le tunnel I. On a donc été obligé de murer ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON au fur el à mesure les galeries transversales, en ne laissant que l'ouverture nécessaire à l'écoulement des eaux du tunnel I à la galerie II. L'air fourni par les ventilateurs remonte donc presque en tota- lité jusqu'à la dernière galerie transversale, où l’on en a surtout besoin, et retourne au dehors, plus ou moins souillé, par le tunnel I. Quand il est nécessaire de laisser les galeries transversales libres pour letraficentrel et Il, celles-ci sont fermées aussi hermétiquement que possible par des portes en bois, lesquelles ne sont ouvertes que lorsque des personnes ou un train ont besoin de pas- ser. La ventila- tionestsipar- faite qu'au- cun accident n'est survenu à cause du manque d'air ou de l'impu- relé de celui- ei. De la der- nière galerie transversale jusqu'au front d'attaque, l’air ne péné- trerait pas de lui-même. Là on est obligé de recourir à l’ancienne méthode : on recueille de l'air frais dans la galerie IL et, au moyen de souffleries et de conduites, on l'amène jusqu'aux perforatrices. L'air entrant dans la galerie II se modifie natu- réellement sur son parcours au point de vue de la température et de l'humidité. La plus grande partie des roches laissent suinter de l’eau, et l'air se sature rapidement d'humidité. Quant à la température, on observa, dès le kilomètre 6 sur le côté nord. que la température de la roche atteignait 40° C. et, au kilomètre 8, 55° C. Mais nous avions compté que le fort courant d'air frais parcourant la ga- lerie IL en refroidirait peu à peu les parois, et en cela nous ne nous sommes pas trompé : le refroi- dissement est très notable. On a conslaté, par exemple, au kilomètre 7, une température iniliale de la roche de 48°, en avril 1992; en mars 1903, elle s’élait abaissée à 28°. Fig. 7. — Pulvérisateurs à eau pour la réfrigération de l'air du côté nord, Pendant longtemps (jusqu'au printemps 1902), la ventilation seule suffit pour procurer une tempé- rature supportable sur les points d'avancement. Mais, lorsque la température de l'air dépassa 27°, on s'aperçut que la capacité de travail des ouvriers diminuait. On dut alors recourir au refroidissement par l’eau fraiche. On procéda à une installation fournissant 80 litres d’eau à la seconde. Comme l’utilisation de cette eau ne nécessite pas une très forte pression, on se servil pour la conduire de deux pompes centrifuges dites à haute pression, produi- sant ensem- ble une pres- sion de 40 at- mosphères, et commandées chacune par uneturbine de 250 vaux. La con- duite d’eau froide a 250%" de diamètre, et l’eau arrive au point d'u- tilisationavec une pression de AOVaN > atmosphères, bien suffisan- te pour per- mettre de la pulvériser fi- nement, Con- dition néces- saire pour un échange de chaleur in- tensif. Pour maintenir l'eau très fraiche, il faut protéger soigneusement la conduite, d'une longueur de 10 kilomètres environ, contre la chaleur qui règne dans la galerie 11; sinon, l’eau prendrait peu à peu la température de l'air ambiant ou de la roche voi- sine. Le meilleur isolant que nous ayons trouvé est le charbon de feuilles, charbon de bois puivérisé, placé sous forme de couche de 50 millimètres d'épaisseur autour du tuyau et maintenu par une couverture en tôle. Au lieu de l'échauffement de 1° par kilomètre qu'on avait supposé, on a observé à peine une élévation de 1/2° par kilomètre, soit un peu moins de 5° sur tout le trajet, ce qui permettait d'avoir au bout de la conduite de l’eau à 15° en été et à 5° ou 6° en hiver. Cette eau est utilisée de la facon suivante : À un endroit de la galerie I où les wagons ne circulent che- 254 25 ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON pas, on place sur le sol un système de lubes pourvus de pommes d'arrosoir dirigées vers le haut (fig. 7). L'eau qui sort sous pression est finement divisée et remplit tout le profil du tunnel; on fait circuler l'air au travers, et la température de ce dernier s’abaisse, par exemple, de 28° à 15°. L'air ainsi rafraichi a perdu une partie de son humidité, et lorsqu'il s’échauffe de nouveau au contact des parois du tunnel, il devient relativement sec; il facilite ainsi l'évaporation sur la peau des travail- leurs et les maintient par là au frais. Enfin, l'eau froide a rendu encore un autre ser- vice; en la faisant ruisseler sur les parois des ga- leries dans leur partie extrême et sur les conduites d'air, on a également abaissé de beaucoup la tem- SUISSE À /TALIE furgenbauÎnpass 28507? EN PRosswald 1850m SUISSE À ITALIE furgenbaëmpass Amoincini 2850" 2705 Pa Valle Rossweld Fntree Nord FEU Entrée Sud 686m Dr LÉ A —— T4 - SON ee ue SE = (D ET Re: NCIS SN BRIE TENUE DAME RET TOME NU 1919077 7m Schistes lustres Schrstes __— Gnerss et schistes Gnerss sw Gp5e et UV et calcaires. micaces. GNEISSIQUES. 3 Antigorro. Éd Fig. 8. — Coupe géologique du massif du Simplon. — En haut, le profil officiel, tracé en 1893 au cours des études; en bas, profil réel, tracé par M. Schardt d’après les résultats du percement. pérature dela roche et celle de l'atmosphère fournie aux ouvriers qui travaillent sur le front d'attaque. IV. — MESURES DE PROTECTION POUR LES OUVRIERS Nous avons ainsi passé en revue tous les moyens employés à la construction d’un tunnel conme Je Simplon ; la méthode adoptée a eu surtout pour but de faciliter la tâche aux ouvriers et de maintenir leur capacité de travail. Car les travailleurs sont la marchandise la plus chère dans le percement d'un tunnel, et celle-ci doit être économisée. La durée du travail était de huit heures nettes : le jour était divisé en 3 périodes, commençant à 6 heures du matin,? heures de l'après-midi et 10 heures du soir. Afin de ne pas fatiguer inutilement les ouvriers, ils étaient transportés sur les chantiers par des trains spéciaux, et n'avaient qu'un-très court trajet à pied. Ensuite, pour éviter aux travailleurs, sortant gé- néralement avec des habits chauds et mouillés, des refroidissements pendant la mauvaise saison, on avait disposé à la sortie des installations où ils pouvaient se déshabiller, prendre des bains ou se laver simplement, et revêtir ensuite leurs habits secs de sortie. Grâce à ces précaulions, l’élat de santé s'est maintenu excellent. Par une propreté très grande du tunnel et la forte ventilation, on est parvenu également à éloigner l'ennemi le plus ter- rible des mineurs, l'ankylostomiase, qui a causé tant de ravages au Gothard. V. — DIFFICULTÉS RENCONTRÉES. Nous dirons maintenant quelques mots des dif- ficullés imprévues rencontrées au cours du perce- Amorncrni 21705" Péa V2/le d e SRE RES à, vi S ns mn [I —— = Bnes 2 = CSS Dir BUT SON AIS ia 13770 ment du Simplon et qui furent pour les entrepre-= neurs de très désagréables surprises. En premier lieu, il faut citer les condilions géo= logiques, qui furent sensiblement différentes de ce qu'on avait prévu et presque toujours au désavan= tage de l’entreprise. On verra, par l'examen de la figure 8, représentant le profil officiel, tracé par les géologues avant le commencement de l'entre= prise, et le profil vrai, dessiné par le Professeur Schardt d’après les résultats du percement, com= bien la réalité s’écarte de ce qu'on s'était figuré: Du côté sud, au lieu de roches plongeant sous un angle notable, on fut poursuivi dès le commen cement et jusqu'à la fin par des stralificationss horizontales, qui rendent le percement difficile eb nécessitent des soutènements considérables. Dans toute la parlie centrale, on n'avait prévu que lex gneiss du Monte-Leone et une seule strate de. calcaire en profondeur ; en réalité, le calcaire s'est rencontré très fréquemment et, avec lui, ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON 255 des venues d’eau, froide ou chaude, considérables. | ont exercé une telle pression que nous n'avons P I La deuxiè- me surprise fut les irrup- tions d'eau des kilomètres 4 à 4,4 du côté sud; de gros- ses sources (fig. 9 et 10) donnèrent jus- qu'à 150 litres par secondeen été. Elles n'ont pas cessé de couler depuis lors, etelles fournissent encore aujour- d'hui par se- conde 800 li- tres environ en hiver, et 1.200 en été. Du côté nord, où l'on avait prévu de l’eau au-dessous du Fig. 9. — Source froide du côté sud dans la galerie parallèle. pu y résister par aucun des moyens jus- qu'’alors em- ployés. Les plus fortes poutres en bois ont été brisées comme des al- Jumettes, et l’on a dû fina- lement recou- rir à une sorte de cuirasse- ment formé de doubles pou- tres à T en fer de 40 centimè- tres ; sur 44 mètres de lon- gueur,Cces pou- tres sont pla- cées côte à côte (fig. 14). La pression est si énergique que plusieurs ont été cou- Gantertal, au kilomètre 5, on n’en a pas rencontré. | pées net. IL a fallu six mois pour percer ces Une troisiè- me difficulté consista dans l'existence de zones de pr'es- sion, quiseren- contrèrent du côté sud jim- médiatement après les irrup- tions d’eau. Sur ce nom, on désigne des ré- gions où la ro- che est plus ou moins plasti- que et sans so- lidité; ce phé- nomène doit vraisemblable - ment être atlri- bué aux frolte- ments énormes et à la pression Fig. 10. — Mesure de la température d'une source froide du côté sud. 44 mètres. Le revêtement de cette section a constitué éga- lement une tà- che considéra- ble; il a fallu employer des contreforts de 12,80 et des voûtes de 1,60, et le travail à duré deux ans. La quatrième grande sur- prise fut la /em- pérature du cô- té nord rencon- trée au prin- temps de 1902 et qui, comme nous l'avons dit, atteignit 55° centigrades qui ont été mis en jeu dans la formation des monta- | au lieu du maximum de 42 prévu. Nous avons gnes. Les régions que nous avons ainsi traversées pu heureusement la vaincre, parce que nos instal- 256 ED. SULZER-ZIEGLER — LE PERCEMENT DU TUNNEL DU SIMPLON lations de refroidissement étaient assez fortes. | la galerie; par l'amenée d'eau froide, on parvint à 4 Même en été, où l’eau était moins froide, la tem- pérature ne dépassa pas 25°-27°, et les ouvriers n'en souffrirent pas trop. Le moment le plus angoissant fut celui où, après avoir atteint 55°, on calcula que, d'après l'augmentation d'épaisseur des couches sus jacentes, on arriverait probablement à 65°; on craignit alors d’avoir à arrêter les travaux pendant six mois à un an pour renfor- cer les tallations de refroidisse- ment. Heu- reusement, la tempéra- ture com- menca à dé- croître en avançant; on n'a pas pu trouver la cause de cet étrange phé- nomène. Enfin, la dernière etla plus grave des difficul- tés fut. la présence de l’eau chaude. D'après les prévisions géologiques originales, on ne devait guère rencontrer d’eau dans la partie chaude. Or, on en trouva du côté sud en août 1903 pendant peu de temps, et en décembre 1903 du côté nord d’une facon perma- nente. Il ne s'agit pas moins ici de 70 litres par seconde d'eau à 48°, apportant une quantité de 6 millions de calories nuisibles. L'arrivée de l'eau chaude du côté nord créa des difficultés considérables lorsqu'on eut dépassé le plus haut point du tunnel et qu'on commença à travailler en contre-pente. On pompa l’eau et l'on s’arrangea pour éviter une nouvelle inondation de ins- Fig. 11. — Cadres en fer pour résister à la poussée du roc friable. maintenir une température supportable et l'on put reprendre le travail. Mais de nouvelles sources chaudes se présentèrent; tous les expédients devinrent finalement insuffisants, et, le 18 mais 1904, au kilomètre 10,380, l'avancement du côté nord dut être définitivement abandonné. Pendant ce temps, le percement du côté sud s'était pour- suivi succès, Jjus- le 6 septem- bre 1904, on eût rencon- tré une sour- ce chaude d'environ 100 litres de débit à la se- conde et d’u- ne tempéra- ture de 469. Avec beau- coup de pa- tience et d’é- nergie, Clles fut maïitri- sée, et, le 24 février 1905, la ren- contre avec la galerie nord, aban- donnée mai 1904, s’opérait heureusement. Il ne reste plus aujourd'hui qu'à parachever le tunnel. Du côté nord, le revêtement est complète= ment terminé sur une longueur de 10 kilomètres; Alpes. Ed. Sulzer-Ziegler, Ingénieur en chef des Travaux du Tunnel du Simplon. AVEC qu'à ce que, nouvelle, par le fait expérimental de la structure “discontinue, corpusculaire, des charges électriques “semble être le caractère le plus saillant des travaux maines de l’ancienné Physique : loules puissantes “en Électromagnétisme, en Optique, en Chaleur jusque sur les conceptions fondamentales de la Mé- canique newtonienne et rajeunir les vieilles idées da structure atomique de la matière et celle de l'électricité. fort génial de Faraday, de Maxwell et de Hertz a- sance précise des propriétés de l’éther électroma- P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS » La fécondité singulière manifeslée par la nolion | | modernes en Électricité. | » LR | Ses conséquences pénètrent dans tous les do- | | rayonnante, elles viennent jeter une clarté nouvelle atomistiques au point de les faire passer du rang des hypothèses à celui des principes, grâce au lien étroit qu'établissent les lois de l’électrolyse entre Sans chercher à parcourir ici le champ tout en- tier de ces applications, je voudrais indiquer sur quelles bases solides, expérimentales et théoriques, repose dès maintenant la notion d'électron, fonde- | ment de la Physique nouvelle, souligner les points qui semblent demander une lumière plus complète et montrer combien vaste est la synthèse que d'on peut espérer en déduire, synthèse dont seules les grandes lignes paraissent arrêtées aujourd'hui. Sous sa forme actuelle et provisoire, celte syn- thèse constilue un admirable instrument de re- cherches, et, grâce à elle, les questions se posent | “ans toutes les directions. Il y a là en quelque sorte une Amérique nouvelle, où l'on respire à Vaise, qui sollicite toutes les activités et qui peul enseigner beaucoup de choses au vieux Monde. I. — L'ÉTHER ÉLECTROMAGNÉTIQUE. 1. Champs et charges. — On peut dire que l'ef- eu pour résultat de nous donner une connais- gnétique et lumineux, du milieu homogène et vide de malière dont l’état se trouve entièrement dé- fini, au phénomène près de la gravitation, quand nous connaissons en chacun de ses points la direc- ion et la grandeur des deux champs électrique et magnétique. J'insiste dès maintenant sur la possibilité d’at- lteindre ces notions, ainsi que la nolion connexe de tharge électrique, indépendamment de toute dyna- mique, je veux dire par des considéralions n'im- Rapport présenté au Congrès international des Sciences êt Arts à Saint-Louis, le 22 septembre 1904. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. pliquant nullement la connaissance des lois du mouvement de la matière. Les deux champs présentent cette propriété que leur divergence est constamment nulle en tout point de l'éther ; autrement dit, que les flux de force électrique et magnétique à travers une surface fer- mée ne contenant pas de matière sont rigoureuse- ment nuls. C'est, en effet, toujours la matière, au sens ordinaire du mot, qui contient et peut fournir les charges électriques autour desquelles existe la divergence du champ électrique, de sens variable avec le signe des charges. Dans le cas extrême où les charges électriques paraissent le plus complè- tement dégagées de leur support matériel, pour les rayons cathodiques par exemple, les faits expéri- mentaux de la structure granulaire de ces rayons, de la complète indestructibilité de leur charge, le fait, enfin, que les corpuscules cathodiques, par cela même qu'ils sont chargés, possèdent la pro- priété fondamentale de la matière, l'inertie, et su- bissent des accélérations dans le champ électroma- gnétique, ces faits ne permettent pas de distinguer les charges soi-disant libres de la matière ordinaire électrisée. Bien plus, nous arriverons à cetle notion que non seulement il ne peut y avoir charge électrique sans matière, mais que, vraisemblablement, il ne peut y avoir matière sans électricité : une agglomé- ration de centres électrisés des deux signes, ana- logues aux corpuscules cathodiques, possède pres- que toutes les propriétés de la matière par le fait seul que les centres sont électrisés. Nous verrons dans quelles iimites celte conception peut être acceptée comme suffisante, et s’il est nécessaire de superposer d'aulres propriétés à la charge élec- trique des centres pour obtenir une image satisfai- sante de la matière. L'éther seul, au contraire, ne renferme jamais d'électricité. Si l'expérience nous oblige à admettre l'existence de charges électriques positives et négatives, d'un flux de force électrique différent de zéro à travers une surface fermée tracée tout entière dans l'éther et contenant de la matière électrisée, il en est au- trement pour le champ magnélique, car l'expé- rience n’a jamais jusqu'ici présenté aucun cas où une surface fermée tracée dans l'éther fût traver- sée par un flux magnétique différent de zéro. Seuls d'inléressants phénomènes observés récemment par M. Villard, dans l’action d'un champ magné- tique intense sur la production des rayons calho- diques, paraîtraient recevoir une explication simple dans l'hypothèse des charges magnétiques libres; 6° 258 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS mais il n’est nullement certain que cette hypothèse soit nécessaire. 2, Les équations de Hertz. — Les deux champs électrique et magnétique dont l’éther peut être le siège sont liés l’un à l’autre de telle manière que l’un d'eux ne peut exister seul qu'à la condition de ne pas varier; toute variation du champ élec- trique produit un champ magnétique : c'est le courant de déplacement de Maxwell, et toute va- variation de champ magnétique produit un champ électrique : c’est le phénomène d'induction décou- vert par Faraday. Ces deux relations sont traduites par les équa- tions de Hertz, qui résument complètement notre connaissance du milieu électromagnétique, et qui impliquent que toute perturbation du milieu s’y propage avec la vitesse de la lumière. Hertz eut la gloire de vérifier ce fait expérimentalement, 3. L'énergie. — On peut dire encore que l'éther est le siège de deux formes distinctes de l'énergie, la forme électrique et la forme magnétique, sus- ceptibles de se transformer l’une dans l’autre par lintermédiaire de la matière, c'est-à-dire des centres électrisés qu'elle contient. Dans l'éther seul, en effet, dans la radiation qu'il propage, les champs électrique et magnétique, transversaux à la direction de la propagation, représentent tou- jours des énergies égales dans chaque élément de volume, sans oscillation de l'énergie d'une forme à l’autre. En présence de matière, au contraire, l'énergie électrique peut exister seule, et ce sont les mouvements des centres électrisés qui per- mettent sa transformation en énergie magnétique et réciproquement. La matière seule peut être source de radiations. [l faut ajouter aux deux formes précédentes l’éner- gie de gravitation, qui correspond probablement à un troisième mode d'activité de l’éther, dont la connexion avec les deux autres est encore obscure. J'insiste ici encore sur ce point que le principe d'équivalence des diverses formes de l'énergie ainsi que les procédés permettant de les mesurer peuvent s'atteindre indépendamment de toute no- tion dynamique, par des procédés faisant inter- venir uniquement des systèmes matériels en équi- libre. 4. La théorie de Lorentz. — L'éther nous étant ainsi complètement connu au point de vue électro- magnétique et optique, le problème qui se posait aux continuateurs de Maxwell et de Hertz était celui de la connexion entre l’éther et la matière, la matière inerte, source et récepteur des radiations que léther transmet. Le lien cherché nous es fourni par l'électron ou le corpuscule, centre élec= | trisé mobile par rapport à l’éther. | Ce fut l’idée fondamentale de Lorentz de conce= voir la possibilité d’un déplacement relatif des charges électriques, centres de divergence du champ, et de l’éther envisagé comme immobile. Ces déplacement s'effectue, d'ailleurs, sans aucune mo dification de la grandeur des charges, c’est-à-dire qu'une surface qui se déplace dans l’éther ave@ elles est traversée par un flux électrique complète: ment invariable : c'est le principe fondamental de la conservation de l'électricité, qui absorbera peut être le principe de conservation de la matière, sil ne peul y avoir matière sans électricité. Il est, cependant, probable que l'électricité seule ne suffib pas à construire la matière. Nous n’avons actuellement aucun rence plus précis sur ce déplacement relatif des charges électriques et de l’éther, des centres électrisés dans le milieu immobile, aucune forme tangibl sous laquelle nous puissions le concevoir. Le essais tentés jusqu'ici pour en obtenir une repré sentation concrète, pour donner une structure l'éther, sont restés à peu près stériles. Peut-être y a-t-il là une difficulté qui tient à la nature ac- tuelle de notre esprit, habitué par notre évolutior séculaire à penser en matière alors qu'il est peu raisonnable de chercher à construire le milie simple et un qu'est l’éther à partir du milieu coms pliqué et divers qu'est la matière. Je reviendra plus loin sur ce point à propos des théories mécas niques de l'éther. Je crois qu'il faudra nous habi tuer à penser en éther, indépendamment de toute représentation matérielle. Si la charge électrique est supposée répartie en volume dans une portion du milieu, le principe de conservation, joint à la possibilité du déplacement relatif des charges et de l’éther, oblige à modifier dans cette portion les équations de Hertz relatives au courant de déplacement par l'addition d'un courant de convection, conséquence nécessaire de l'existence du courant de déplacement, et impli quant production d'un champ magnétique par le déplacement de charges électriques à travers le milieu. Cette conséquence des équations de Hertz a reçu maintenant une confirmation expérimentale complète. De plus, les faits expérimentaux imposent à ces charges mobiles une structure discontinue, gran laire, conduisant à la notion de l’électron commen une région singulière de l’éther, portant une chargé d'un signe déterminé répartie sur sa surface OÙ dans son volume suivant que l'intensité du champ électrique est supposée présenter ou non une dis- continuité quand on traverse la surface qui limite. # le volume occupé par l'électron. L’inertie d° origine P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 259 électromagnélique que nous allons reconnaitre à “un semblable centre s'oppose, sous peine de devenir infinie, à l'hypothèse d’une charge élec- “rique finie condensée en un point sans étendue. — Des considérations très variées et de plus en plus précises sont venues converger vers cette notion de la structure atomique des charges, point de part de tous les travaux récents en Électricité. II. — L’ATOME D'ÉLECTRICITÉ. “1. L'électron. — Les si remarquables lois de Mélectrolyse, découvertes par Faraday, établissent un lien intime et nécessaire entre la structure ato- mique de la matière et celle de l'électricité. Elles t suffi pour conduire Helmholtz à concevoir cette rnière comme constituée de portions distinctes, Insécables, éléments de charge, toutes identiques u point de vue de la quantité d'électricité qu'elles portent et différant seulement par le signe. Cette charge élémentaire est égale à celle que transporte in atome ou un radical monovalent dans l’élec- trolyse ; un atome ou un radical polyvalent porte in nombre entier de pareils éléments. Ce fut Johnstone Stoney qui employa le premier le mot é/ectrons pour désigner ces atomes d'élec- tricité, conçus tout d'abord comme distincts de la natière, à laquelle ils peuvent se combiner pour onner les ions électrolytiques. La présence de mblables électrons, combinés aux atomes malé- Biels, lui permit de représenter certaines particula- tités des spectres de lignes, l'existence de doublets mème intervalle de fréquence, l'électron en mou- vement étant considéré comme source d'émission des ondes lumineuses. . Les gaz conducteurs. — Mais ce sont les re- cherches sur la conductibilité électrique des gaz ion des atomes d'électricité, qui ont rendu cette ion plus langible en permettant de compter les 2, Giese, en observant les caractères ticuliers de la conductibilité des gaz issus d'une me, les écarts à partir de la loi d'Ohm, l'im- Ssibilité d'extraire du gaz, quel que soit le champ éctrique employé, plus d'une quantité limitée électricité, la recombinaison progressive des arges disponibles dans le gaz, avait émis de facon cise cette idée que, comme dans les électrolytes, charges électriques mobiles dans les gaz sont por tées par des centres distincts, en nombre limité, positifs et négatifs, Sc ohbi de se mouvoir en sens inverses sous l'action d'un champ électrique extérieur pour aller décharger les corps électrisés qui produisent ce champ. Il est difficile, en effet, de concevoir comment, dans l'hypothèse où les charges des deux signes disponibles dans le gaz seraient réparties dans l'espace de manière continue, une masse de gaz électriquement neutre pourrait fournir une quan- tité limitée d'électricité de chaque signe, diminuant avec le temps par recombinaison progressive si l'on tarde à établir le champ électrique dans le gaz. Il faut bien admettre, pour les deux électricités, une structure discontinue, qui leur permettra de coexister sans se neutraliser de manière complète. La recombinaison progressive des particules chargées ou ions des deux signes, présents en nombre limité, se produira au moment de leurs collisions mutuelles. Le phénomène du courant de saturation, de la quantité limitée d'électricité disponible dans le gaz, se retrouva dans des conditions plus favorables à une étude expérimentale précise lorsque, aus- sitôt après la découverte des rayons de Rüntgen et des radiations connexes, on eut reconnu leur pro- priété de rendre conducteurs les gaz qu'ils tra- versent. Les charges limitées qu'on peut extraire des gaz ainsi modifiés, la vitesse finie et facilement mesurable avec laquelle ces charges se déplacent sous l’action d'un champ électrique, leur recombi- naison progressive, s'interprètent admirablement dans l'hypothèse où la radiation, comme la tempé- ralure élevée dans la flamme, dissocie un certain nombre de molécules du gaz en fragments élec- trisés portant des charges de signes contraires. 3. Phénomènes de condensation. ment les phénomènes de condensation de la vapeur d'eau sursaturante par les gaz rendus conduc- teurs, déjà rapportés par Robert von Helmholtz à la présence des ions, sont venus apporter une con- firmation éclatante aux hypothèses précédentes. Grâce aux travaux de J. J. Thomson, Townsend, C. T. R. Wilson, H. A. Wilson, les gouttelettes d'eau visibles, formées chacune par condensation autour d'un centre électrisé, viennent apporter un témoignage tangible de l'existence de ceux-ci, et fournir un moyen de mesurer leur charge, pré- sente sur chaque goutte d'eau formée et égale environ à 3,4 X 107! unité électrostatique C.G.S. d'après les mesures récentes de J. J. Thomson et de H. A. Wilson. L'idée fondamentale dans ce genre de mesures, appliquée pour la première fois par M. Townsend aux goutteleites chargées qui se produisent en présence de vapeur d'eau simplement saturante dans les gaz récemment préparés, consiste à dé- duire la masse de chaque goultelette de sa vitesse 260 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS ( de chute sous l’aclion de la pesanteur seule. Une formule de Stokes, donnant la résistance éprouvée par une sphère en mouvement dans un milieu visqueux, relie la vitesse de chute au rayon de Ja goutte et, par suite, à sa masse. On en déduira la charge électrique portée par chaque goutte si l'on connaît le rapport de cette charge à la masse. Ce rapport peut s'obtenir, comme l'ont fait MM. Townsend et J.-J. Thomson, en mesurant ou calculant la masse tolale d'eau portée par les goultes, supposées toutes identiques, ainsi que la quantité totale d'électricité portée par les ions qui ont servi de centres pour la formation des gouttes. La charge ainsi obtenue fut trouvée égale, pour chaque centre, à 3 X 10-u. G.G.S. par M. Townsend, dans le cas des gaz de l’électrolyse, et à 6,5 X 107" par le Professeur J.-J. Thomson, dans une première série de mesure sur les gaz ionisés par les rayons de Rüntgen. M. H.-A. Wilson obtint plus Simplement le rap- port de la charge à la masse d’une goulte en com- parant la vitesse de chute de celle-ci, sous l’action de la pesanteur seule, à sa vitesse de chute dans un champ électrique vertical. On obtient ainsi directe- ment le rapport cherché, el ce procédé a l'avantage de bien mettre en évidence que les charges élec- triques sont portées effectivement par les gouttes, et de séparer les gouttes qui portent une charge élémentaire de celles qui, par diffusion ultérieure des ions vers elles, peuvent porter une charge double ou triple. M. Wilson donne comme résultat moyen de ses mesures le nombré 3,1 X 10", très voisin de celui de M. Townsend. Une secunde série d'expériences du Professeur J.-J. Thomson, où il employa comme sources d'io- nisatlion des corps radio-actifs, plus constants qu'un tube de Crookes, et où il s’efforca d'utiliser tous les ions présents dans le gaz pour la forma- tion des gouttes, en produisant la sursaturalion de la vapeur d'eau par une détente aussi rapide que possible et assez grande pour provoquer la conden- sation aussi bien sur les ions positifs que négatifs, lui donna comme résullat moyen 3,4 X 10 -", en accord complet avec ceux des autres expérimen- tateurs. Les principes de la Thermodynamique rendent parfaitement compte de cette influence d’un centre électrisé sur la condensalion de la vapeur d’eau, la charge électrique d'une gouttelelte diminuant la pression de la vapeur en équilibre avec elle. Bien plus, la sursaluration minimum reconnue nécessaire par C. T. R. Wilson pour la formation des gouttes d’eau sur les ions, la mème quelle que soit leur origine (raçons de Rüntgen, de Becquerel, aigrette, action de la lumière ullraviolette sur un métal chargé négativement), permet, par des raisonne- ments de pure Thermodynamique, de calculer approximativement la charge portée par chacun der ces ions, et ce calcul, entièrement distinet de l& | mesure directe, conduit à la valeur 5 X 1071 C.G:S* 4. Le rayonnement intégral. — Plus surprenant encore est le résultat oblenu récemment par, H. A. Lorentz, qui parvint à baser une mesuré précise de la charge élémentaire portée par less centres électrisés présents dans les métaux sul l'étude expérimentale du rayonnement intégrals Nous verrons comment l'absorption et l'émission d'ondes ue et lumineuses par la malièré trons, en fonction de la charge portée par chacun de ceux-ci. La comparaison de ce résultat ave@ les mesures de Kurlbaum fournil un moyen ens tièrement nouveau d'obtenir cette charge et donn@ TSALAUICG:S: 3. La théorie cinétique. — Enfin, dernière cons firmation qui précise davantage encore notre” connaissance de l'atome d'électricité et notre cons d'un gaz. Le résultat est entièrement d'accord aweb les évalualions, en général beaucoup plus gra - | sières, qu'on avait pu déduire de la théorie ciné= tique des gaz. Voilà un faisceau important d'indications con- | cordantes, quoique d'origines absolument dis- linctes, qui mettent hors de doute la structure ” P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 261 granulaire des charges électriques et, par consé- quent, la structure atomique de la matière elle- même. Les mesures que je viens de rappeler per- mettent de nous établir en toute sécurité sur le terrain, jusque-là mouvant, des grandeurs molé- culaires. Je tiens à souligner ici ce résultat extrêmement remarquable, et qui tient sans doute à quelque propriété fondamentale de l'éther, que tous ces centres électrisés sont identiques dès maintenant “au point de vue de la charge qu'ils portent. Il nous faut pénétrer plus avant dans leurs propriétés, dans leurs relations avec les atomes matériels, “déterminer leur grosseur relative par rapport à “ceux-ci, pour aboutir à la notion la plus précise “que nous possédions aujourd'hui dans ce domaine, celle des électrons négatifs ou corpuscules catho- “diques, tous identiques non seulement au point de vue de leur charge, mais aussi au point de vüe de leurs propriétés dynamiques. Nous sommes mal- - heureusement beaucoup moins renseignés sur les centres positifs. 2 Li LÉ III. — INERTIE ET RAYONNEMENT. 1. Le sillage électromagnétique. — Mais, avant d'aller plus loin, il importe d'indiquer tout ce que kon peut tirer du point de vue auquel nous “sommes arrivés maintenant : des centres élec- “trisés dont l'existence est établie expérimentale- ent et dont nous connaissons la charge en valeur “absolue, mobiles par rapport à un éther fixe défini par les équations de Hertz, sans que nous ayons “eu besoin de recourir, pour en arriver là, à aucune Considération dynamique. — Dans quelle mesure les propriétés connues de la atière peuvent-elles se déduire de ces deux notions d'électron et d'éther et que devons-nous admetlre dehors de celles-ci pour édifier une synthèse ? D allons voir rapidement, en précisant notre conception de l'électron, comment elle peut suffire Lpour représenter à la fois l’inertie de la matière, Sespropriétés dynamiques et son pouvoir d'émettre “æt d'absorber les radiations électromagnétiques ‘que l'éther transmet. % La possibililé de concevoir l’inertie, la masse, non pas comme une nolion fondamentale, mais Comme une conséquence des lois de l’électroma- gnétisme est une conception qui a son origine dans un important Mémoire publié en 1881 par J J. Thomson. Il y étudie, en s'appuyant sur lexistence du courant de déplacement de Maxwell, le champ électromagnétique qui accompagne une Sphère électrisée en mouvement. * Ce mouvement implique changement du champ électrique en un point fixe par rapport au milieu, donc courant de déplacement et, par suite, produc- tion d'un champ magnétique conformément à l'idée de Maxwell. C'est encore la nécessité du cou- rant de convection que j'ai signalée plus haut. Le champ magnétique ainsi produit, analogue à celui d'un élément de courant parallèle à la vitesse du mobile électrisé, est proportionnel en chaque point à cette vitesse, du moins tant que celle-ci ne s'ap- proche pas trop de celle de la lumière. Cette production d’un champ magnétique au mo- ment dela mise en mouvement du mobile implique une dépense d'énergie proportionnelle, en première approximation, pour les vilesses faibles par rap- port à celle de la lumière, au carré de la vitesse, c'est-à-dire de même forme que l'énergie ciné- tique ordinaire. Donc, une partie au moins de l'inertie d'un corps ‘électrisé est une conséquence de sa charge électrique. De plus, le champ magnétique ainsi produit, et le champ électrique d’autant plus modifié par lui qu'on s'approche davantage de la vitesse de la lumière, constituent, autour du centre électrisé en mouvement de translation, un sillage qui l’accom- pagne à travers l’éther sans modification aucune tant que la vitesse reste constante. Il est, d’ailleurs, nécessaire qu'une action exlérieure intervienne pour modifier l'énergie du sillage et, par consé- quent, pour augmenter ou diminuer la vitesse. Ceci implique, en l'absence mème de toute autre inertie que celle d'origine électromagnétique due à la production du sillage, la loi fondamentale de Galilée sur la conservation de la vitesse acquise, en l'absence de toute action, de tout champ de force extérieur. C'est ici l’éther immobile, le milieu électroma- gnétique qui sert de support fixe aux axes par rapport auxquels le principe de l’inertie est appli- cable, et dont la Mécanique ordinaire se borne à affirmer l'existence en disant : il existe un sys- tème d’axes, déterminé à une translation uni- forme près, par rapport auquel le principe de Galilée se véritie exactement. 2. Le mouvement absolu. — Si nous pouvons, au point-de vue actuel, concevoir l'éther comme supportant ces axes de Galilée, il n’en résulte pas nécessairement que les phénomènes électroma- gnétiques nous permettent d'atteindre le mouve- ment absolu. Il semble bieu, au contraire, que des expériences staiiques effectuées dans un sys- tème matériel par un observaleur entrainé avec lui ne permettent pas, quelle que soit la précision des mesures électromagnétiques ou opliques, de mettre en évidence le mouvement d'entrainement du système par rapport à l’éther si ce mouvement est une translation. M. Larmor et, plus complète- 202 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS ment, M. Lorentz ont démontré que, s'il n'existe dans le système entrainé que des actions d’ori- gine électromagnétique, il est possible d'établir de manière complète une correspondance statique (relative à des positions d'équilibre ou à des franges noires en optique) entre le système en mouvement et un système fixe par rapport à l’éther, au moyen d'un changement de variables qui conserve aux équations électromagnétiques par rapport aux axes mobiles la forme exacte qu'elles possèdent pour un système fixe. Les deux systèmes diffèrent l’un de l'autre en ce que le système mobile est légèrement contracté, par rapport au système fixe, dans le sens de la trans- lation, d'une quantité toujours très faible, propor- tionnelle au carré du rapport de la vitesse d’en- trainement à la vitesse de la lumière. Cette con- traction affecte également tous les éléments du système mobile, les électrons eux-mêmes, si les actions intérieures sont uniquement des actions électromagnétiques ou se comportent comme elles, et l'observateur ne peut pas plus la constater qu'il ne peut constater le mouvement d’entraîne- ment. Ainsi se trouvent expliquées les expériences négatives nombreuses dirigées dans ce sens, de Michelson et Morley, de Lord Rayleigh, de Brace, de Trouton et Noble, si l’on admet que toutes les actions intérieures à la malière sont d’origine élec- tromagnétique. Peut-être des expériences d'un autre type que celles qu’on a tentées jusqu'ici, des expé- riences dynamiques et non plus statiques, per- mettront-elles de saisir le mouvement absolu, les axes liés à l’éther, au lieu d’en simplement conce- voir l'existence. Mais nous verrons plus loin qu'il semble difficile d'éliminer toute action étrangère, non électroma- gnétique, et il faudrait alors admettre, avec M. Lo- rentz, pour que la correspondance subsiste, que, dans le système entrainé, les forces et les masses d'origine non électromagnélique sont modifiées exactement comme les forces et les masses électro- magnétiques, hypothèse assez compliquée, dans l’état actuel de la question. Mais il n'est pas nécessaire d'en arriver là : il paraît vraisemblable que ces actions étrangères, nécessaires à l'intérieur de l'électron pour assurer sa stabilité, et pour représenter la gravitation, pro- bablement connexe, n'interviennent pas de manière appréciable dans les expériences rappelées plus haut, et que tout se passe dans celles-ci comme * si les forces électromagnétiques, seules à y jouer un rôle, existaient seules aussi. 3. L’inertie électromagnétique. — Le problème du sillage électromagnétique qui accompagne une sphère ou un ellipsoïde électrisés, en mouvement de translation uniforme dans l’éther, a été repris et complètement résolu, après J.-J. Thomson, par Heaviside et Searle. Max Abraham a montré que leurs résultats subsistent à un facteur numérique près lorsque, au lieu de supposer le corps condué- teur, on suppose sa charge répartie uniformément dans le volume. A Parmi les résultats les plus importants contenus, dans cette solution du problème de J.-J. Thomson, je signalerai ceux-ci : que, dans le cas d’une sphère conductrice, la charge électrique reste uniformé- ment répartie sur la surface, quelle que soit Le | vitesse, tandis que le champ électrique à distancem tend à se concentrer de plus en plus dans le plat équatorial à mesure que la vitesse s'approche de celle de la lumière; de plus, l'énergie qu'il faut dépenser au moment de la mise en mouvement dans la modification correspondante du champ électromagnétique entourant la sphère, dans son sillage, cesse d'être proportionnelle au carré de la vitesse et augmente indéfiniment quand celle-ci s'approche de la vitesse des ondes lumineuses; la loi d'accroissement de cette énergie cinétique d'origine électromagnétique, énergie de self-in- duction du courant auquel la particule chargée en mouvement équivaut, se déduit facilement de la solution de Searle. Sans aucune autre hypothèse que celle de sa charge électrique, l’électron se trouve donc pos- séder l'inertie définie comme capacité d'énergie cinétique, avec une loi particulière de variation de celle-ci en fonction de la vitesse, loi dont l'allure» varie peu avec les hypothèses faites sur la forme de l’électron et sur la répartition des charges élec= triques. Dans tous les cas, on retrouve l'impossi- bilité de communiquer à l’électron une vitesse égale à celle de la lumière, au moins de manière permanente. Au lieu de considérer l'électron comme sphé-= rique, quelle que soit la vitesse, M. Lorentz l'admet sphérique au repos avec une distribution uniforme des charges ; mais, si les actions intérieures à l’élec= tron sont uniquement d'origine électromagnétique, nous avons vu que celui-ci doit s'aplatir dans la direction de son mouvement d’une quantité propor a L : ve : tionnelle au carré F du rapport de sa vitesse de translation à la vilesse de la lumière, pour devenik un ellipsoïde de révolution aplati, le diamètre équas torial restant égal au diamètre de la sphère primis, tive. Ceci conduit, comme on le verra, à une lo d'inertie électromagnétique différente de l’inertie d'une sphère invariable. Nous verrons plus loin qu'il ne parait nécess saire de supposer aux électrons, négatifs tout au moins, aucune inertie en dehors de celle-là, sans P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS que les expériences soient encore assez précises . pour permettre d'atteindre la forme même de l’élec- tron dont dépend la loi de variation de l'énergie cinétique avec la vitesse. 4. Deux problèmes. — Nous avons seulement examiné jusqu'ici le cas d'un électron en mou- vement uniforme, en l'absence de tout champ électromagnétique extérieur capable de modifier le mouvement de l’électron en lui communiquant une accélération. Le problème général de la connexion entre l’éther et l’électron, qui représente vraisemblablement la partie la plus importante de la connexion entre l'éther et la matière, est double. En premier lieu, quelle est la perturbation élec- tromagnétique qui accompagne dans l'éther un “ déplacement quelconque et donné d'électrons ? En second lieu, quel mouvement prendront ces élec- trons, libres de se mouvoir dans un champ électro- magnétique extérieur, superposé à celui qui cons- tilue leur sillage ? 5. Onde de vitesse, onde d'accélération. — Nous possédons tous les éléments pour la solu- tion du premier problème, dont celui du mouve- ment uniforme n'est qu'un cas particulier. M. Lo- - rentz en a donné, sous une forme lrès simple, la . solution générale par l'intermédiaire des potentiels retardés. Chaque élément de charge en mouvement donné détermine, par sa position, sa vitesse et son accélération à l'instant {, les champs électrique et “magnétique à l'instant {-L-+ sur une sphère ayant “pour centre la position à l'instant f, et pour rayon le chemin parcouru par la lumière pendant Île temps 7. M. Lorentz a donné les expressions des “deux potentiels électrostatique et vecteur dont es champs se déduisent par les formules con- . nues. Les expressions complètes de ces champs, qui “ont été données pour la première fois par M. Lié- “nart, comprennent chacune deux parties : La pre- _mière dépend uniquement de la vitesse de l’élé- «ment de charge à l'instant £ el contribue à former le sillage qui accompagne l'électron dans son déplacement; je l'appellerai onde de vitesse. “Cette onde de vitesse, qui existe seule dans le “cas du mouvement uniforme, a son champ élec- trique dirigé partout vers la position qu'oceuperait l'élément de charge à l'instant {+ + s'il avait con- Servé depuis l'instant £ la vitesse qu'il avait à ce moment; M. Schwartzschild appelle cette position le point d'aberration ; elle coïncide avec la position vraie du mobile à l'instant {++ si le mouvement est uniforme. L'autre partie des deux champs fait intervenir l'accélération, et les directions des deux 263 champs y sont perpendiculaires l'une à l’autre et perpendiculaires au rayon, en même temps que les deux champs électrique et magnétique y repré- sentent des énergies égales; ce sont là tous les caractères de la radiation se propageant librement dans l’éther. Je l’appellerai onde d'accélération. De plus, les intensités des champs variant ici en raison inverse de la distance au centre, l'énergie repré- sentée par cette onde d'accélération ne tend pas vers zéro quand le temps + augmente indéfiniment; il ya donc énergie rayonnée à l'infini par l'onde d'accélération. L'’onde de vitesse, au contraire, dans laquelle l'intensité des champs varie en raison inverse du carré du rayon Vr, ue transporte aucune énergie à l'infini; l'énergie des ondes de vitesse accompagne l'électron dans son déplacement; elle contient son énergie cinélique. 6. Radiation implique accélération. — On en conelut qu'un centre électrisé soumis à une accélé- ration, et seulement alors, rayonne à l'infini, sous forme d'une onde transversale, d'une radiation électromagnétique, une quantilé finie d'énergie proportionnelle, par unité de temps, au earré de l'accélération. L'origine de la radiation électromagnétique, de toute radiation est donc dans l'électron soumis à une accélération ; c'est par son intermédiaire que la matière fonctionne comme source d'ondes hertziennes ou lumineuses. Toute accélération, tout changement qui s'opère dans l’état de mou- vement d’un système d'électrons se traduit par l'émission d'ondes. Le caractère de l'onde émise change naturelle- ment suivant que l'accélération est brusque, dis- continue, ou périodique. Dans le premier cas, réalisé par exemple lors de l'arrêt brusque, par une anlicathode, des électrons ou corpuscules négatifs qui constituent les rayons cathodiques, la radiation consiste dans une pulsa- tion brusque, ayant pour épaisseur le produit de la vitesse de la iumière par le temps qu'a duré le retard progressif, et qui fournit une représen- tation complète des rayons de Rüntgen ou des rayons y des corps radio-actifs. Si l'accélération est périodique, au contraire, comme dans le cas d'un électron gravitant autour d'un centre électrisé de signe contraire au sien, l'accélération est périodique, et la radiation émise constitue une lumière de longueur d'onde déter- minée par la période de révolution de l'élec- tron. La solution du premier des deux problèmes fon- damentaux parait ainsi complète et ne soulève aucune difficulté. L' 926% P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS Û ! fee iex #0 tk d’un temps fini, et le système cesserail de réagir IV. — DYNAMIQUE DES ÉLECTRONS. ; s NEA É : contre la déformation qui lui est imposée. De plus, 1. L'idée de Maxwell. — Le problème inverse il parait impossible de comprendre dans cette est moins simple qui consiste à trouver le mou- | Conception la présence d'électrons permanents;# È vement, l'accélération que prend un électron mo- | centres de déformation du milieu. * bile dans des champs électrique et magnétique En dehors de cette difficulté, M. Larmor a be d'intensités données; c'est, à proprement parler, soin, dans l'image matérielle qu'il a proposée pour le problème de la Dynamique des électrons. Les | l'éther, de superposer au système gyrostatique de équations qui résolvent ce problème doivent, Lord Kelvin les propriétés d'un fluide parfait dont comme les équations de la Dynamique ordinaire, | le déplacement, représentant le champ magné= renfermer deux sortes de termes : les uns dépen- | tique,soit à chaque instant irrotationnel pour ne dant des champs extérieurs, traduisant leur action | Pas produire de champ électrique par rotation des î sur l'électron, analogues aux forces exlérieures | 8yrostats présents dans le milieu. Mais une grosse dans la Dynamique; les autres dépendant du mo- | difficulté s'ajoute aux précédentes : si le mouve- bile lui-même, traduisant sa résistance à la mise | ment d'un fluide satisfait à chaque instant à la en mouvement, analogues aux forces d'inertie. condition d'être irrotationnel pour des déplace- Les termes correspondant aux actions exté- | ments infiniment petits, il n'en est plus ainsi pour : rieures, les forces, ont été obtenus par M. Lorentz | des déplacements finis,.et un champ magnétique : en suivant une méthode qui était le prolongement | ne pourrail durer un temps fini sans donner nais- naturel des idées de Maxwell sur la possibilité | Sance à un champ électrique. P d’une explication mécanique, indéterminée d’ail- leurs, des faits de l Électromagnétisme. L'analogie des équalions de l'induction électrodynamique et des équations de Lagrange paraissait justifier une telle explication, et il élait naturel de continuer à envisager le système éther-électrons comme un système mécanique et d'appliquer au mouvement des centres électrisés les équations de Lagrange, déduisant ainsi les forces exercées sur l’électron des énergies électrique et magnétique, envisagées comme correspondant aux énergies polentielle et cinétique du système mécanique subslitué à l’éther. On se trouve ainsi amené à appliquer au milieu éther, en considérant comme fondamentales les notions de masse et de force qu'elles impliquent, les équations de la Dynamique matérielle, déduites de principes fondés sur l'observation de la matière seule, toujours prise en masse et sans action sen- sible des rayonnements. 2. L’éther en matière. — On étend ainsi, par une induction hardie, ces principes dans un do- maine pour lequel ils n'ont pas été créés, et l’on admet aussi de manière implicite la possibilité d'une représentalion matérielle de l'éther. En dehors de celles que j'ai déjà signalées, une sem- blable tentative soulève bien des difficultés, et les efforts faits pour la prolonger de manière plus précise n'ont pas abouti jusqu'ici. L’essai le plus profond, l’éther gyrostalique de Lord Kelvin, con- viendrait à la rigueur pour représenter la propa- gation de phénomènes périodiques dans l'éther seul, mais rend impossible l'existence d'une défor- malion permanente, nécessaire cependant pour représenter un champ électrostatique constant. Les gyrostalts se relourneraient dans ce cas au bout Je crois impossible de surmonter ces difficultés ei d'aboutir à une image matérielle de l’éther, dont la nature et les propriétés sont complètement dis- tinctes, et probablement beaucoup plus simples et plus unes que celles de la matière. 3. L'action et la réaction. — Continuons, cepen- dant, dans cette voie pour nous heurter à des difti-m cultés nouvelles. Par application des équations de Lagrange, M. Lorentz obtient sur chaque électron en mouve- ment deux forces exlérieures, deux termes tradui- d « sant l’action du champ électromagnélique. À L'une est parallèle au champ électrostalique : c'est la force électrique ordinaire ; l'autre esta perpendiculaire à la direclion de la vitesse et am celle du champ magnétique : c'est la forcé électro=« magnélique analogue à la force de Laplace exercée | par un champ magnélique sur un élément de cou=« rant. Ce double résultat résume toutes les lois élémentaires de l'Électromagnétisme et de l'Électro=w dynamique, si l'on considère le courant dans les conducteurs ordinaires comme dû au déplacements de particules électrisées. $ On reconnait facilement que les forces ainsi. obtenues, exercées par l’éther sur les électrons, sur la malière qui les contient, ne satisfont pas au principe de l'égalité de l'action et de la réaction quand on prend l'ensemble des forces qui agissent à un même instant sur tous les électrons constituant la malière. Dans le cas d'un corps qui rayonne de facon dissymétrique, par exemple, il se produit un recul, une accélération que ne compense, au même instant, aucune accélération subie par une autre portion de la matière. Plus tard, au moment où le rayonnement émis rencontre des obstacles, la com= P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 265 pensation se fait (mais seulement de manière par- tielle si Lout le rayonnement n’est pas absorbé) par l'intermédiaire de la pression qu'exerce un rayon- nement sur les corps qui le reçoivent, pression dont l'expérience a démontré l'existence. L'égalité de l’action et de la réaction n'a, d’ail- leurs, jamais élé démontrée expérimentalement dans des cas semblables, et il n’y a ici aucune dif- ficulté si l'on ne tient pas à étendre ce principe au delà des faits qui l'ont suggéré. 4. La quantité de mouvement électromagnétique. — Si l’on veut néanmoins réaliser cette extension quelque peu arbitraire, on est conduit à ne pas “appliquer le principe à la matière seule, et à sup- poser à l'éther une quantité de mouvement, qui serait celle du système matériel auquel on l'as- “simile. M. Poincaré a montré que cette quantité de mouvement électromagnétique doit être proportion- «nelle en chaque point, en grandeur et en direction, au vecteur de Poynting, qui permet en même temps de définir l'énergie transmise à travers le milieu. En partant de cette notion de quantité de mou- vement électromagnétique, M. Max Abraham a pu calculer les termes, laissés de côté par M. Lorentz, “qui dépendent du mouvement de l'électron lui- même, sa force d'inerlie, par la variation de la “quantité de mouvement électromagnétique con- tenue dans son sillage. 11 s'est trouvé conduit pour la première fois, d'après la forme des termes qui représentent cette force d'inerlie, à la notion d'une masse dissymétrique et fonction de la vitesse. 5. Le mouvement quasi-stalionnaire. — Le calcul ne peut se faire complètement que dans le cas, toujours réalisé, d’ailleurs, au point de vue expérimental, où l'accélération de l'électron est assez faible pour que le sillage puisse être à chaque “instant considéré comme identique à celui qui accompagnerait un électron se mouvant avec la vitesse actuelle, mais d'un mouvement uniforme depuis très longtemps. C'est ce que M. Abraham appelle un mouvement quasi-stationnaire. Dans ce cas, le sillage est entièrement connu à chaque instant comme nous l'avons vu, donc la quantité de mouvement électro-magnétique et, par suile, sa variation qui mesure la force d'inertie. La condition du mouvement quasi-stationnaire est tout simple- ment qu'au voisinage de l’électron, là où la quantilé de mouvement électromagnélique se trouve presque entière, l'onde d'accélération émise soit négligeable par rapport à l'onde de vitesse. 6. Masse longitudinale et masse transversale. — Dans ces conditions, on trouve que la force d'inertie est proportionnelle à l'accéléralion avec un coefficient de proportionnalilé, analogue à la masse, mais qui se trouve ici fonction de la vitesse et qui augmente indéfiniment comme l'énergie cinétique, à mesure qu'on s'approche de la vitesse de la lumière. De plus, cette masse électromagné- tique n’est pas la même pour une même vitesse, suivant que l'accélération est parallèle ou perpendi- culaire à la direction de la vitesse. Il ya, par rapport à cette direction, une masse longitudinale et une masse transversale. La masse n’est donc plus une grandeur scalaire, mais possède la symétrie d'un tenseur parallèle à la vitesse. Aucun fait expéri- mental ne permet encore de vérifier cette dissy- métrie de la masse des électrons, qui ne se manifeste nettement qu'aux vitesses voisines de celle de la lumière; mais, au contraire, la variation de la masse transversale avec la vitesse a pu être constatée par M. Kaufmann sur les rayons $ du radium, constitués par des projectiles identiques aux corpuscules calhodiques. Il suffit de comparer les déviations de ces rayons dans des champs électrique et magnétique perpendiculaires à leur direction pour en déduire, par application des équations obtenues précédemment pour la dyna- mique des électrons, leur vitesse et le rapport de la charge électrique à la masse transversale des parli- eules qui les constituent. Ce rapport diminue quand la vitesse augmente, et, si nous considérons comme fondamental le principe de conservation de la charge électrique, nous en concluons à un accrois- sement expérimental de la masse transversale dans. un rapport facile à comparer avec celui que la théorie donne pour la masse électromagnétique seule. 7. La matière des philosophes. — Mais, avant de discuter les résultats de cette comparaison, je tiens à signaler une difficulté logique soulevée par la marche que nous avons suivie. Nous avons convenu de considérer comme fondamentales les notions de masse et de force édifiées par la Méca- nique pour représenter les lois du mouvement de la matière; nous concevons a priori la masse comme une quantité scalaire parfaitement inva- riable. Puis, supposant la possibilité d’une représen- tation matérielle de l’éther, nous appliquons à celui- ci les équations de la Dynamique matérielle et nous nous trouvons conduits à admettre pour les élec- trons, partie de la matière, et par suite pour la ma- tière elle-même, une masse dissymétlrique, tenso- rielle et variable. À quoi devront alors s'appliquer les équations ordinaires de la Dynamique et les notions, considérées comme fondamentales, qu'elles. impliquent? À une matière abstraite, une matière des philosophes, qui ne serait pas la matière ordi- 266 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS naire, puisque celle-ci est inséparable des charges électriques et qu’elle est constituée vraisemblable- ment par une agglomération d'électrons en mou- vement périodique stable sous leurs actions mu- tuelles? Ou à l’éther? mais nous n'avons pour lui aucune notion de ce qui peut y être masse ou mou- vement. C'est bien plutôt l'éther qu'il faut considérer comme fondamental, et il est alors naturel de le définir initialement par les propriétés que nous lui connaissons, c’est-à-dire par les champs électrique et magnétique, considérés comme fondamentaux et qu'il est possible d'atteindre, ainsi que je l'ai dit, sans admettre à aucun moment la connais- sance des lois de la Dynamique, les notions de masse et de force sous leur forme ordinaire. Nous retrouverons ces dernières comme des notions dérivées et secondaires. V. — LA DYNAMIQUE ÉLECTROMAGNÉTIQUE. 1. Changement de point de vue. — Il semble ainsi beaucoup plus naturel de renverser la con- ception de Maxwell et de considérer l'analogie qu'il a signalée entre les équations de l'Électro- magnétisme et celles de la Dynamique sous la forme de Lagrange comme justifiant beaucoup plus la possibilité d'une représentation électroma- gnétique des principes et des notions de la Méca- nique ordinaire, matérielle, que la possibilité inverse, Il nous faut alors résoudre notre second pro- blème, celui de la dynämique des électrons, de leur mouvement dans des champs donnés, sans avoir recours aux principes de la Mécanique, par des considérations purement électromagnéliques. Les équations de Hertz, qui nous ont permis de résoudre le premier problème, ne sont plus suffi- santes ici, et nous avons besoin d’un principe plus général, qui ne suppose pas donné le mouvement des électrons, mais qui le détermine. 2. Les lois d'énergie stationnaire. — Nous utili- serons ce principe sous une forme indiquée par M. Larmor, el qu'on peut envisager comme une généralisation des lois connues de l'Électrostatique ou de l'Électrodynamique. On sait que la réparti- tion des charges et du champ électriques dans un système de corps électrisés se fait Loujours de manière que l'énergie électrostatique W,, contenue dans le milieu modifié par le champ, soit mini- mum. Des principes analogues sont relatifs au champ magnétique produit par des courants d’in- tensité donnée, l'énergie W,, localisée dans le champ magnétique étant moindre pour la répar- tition réelle de celui-ei que pour toute autre répar- tition satisfaisant à la condition que l'intégrale dum champ le long d’une ligne fermée soit égale à 4x fois l'intensité des courants qui traversent ce contour: Si des déplacements sont possibles, des conduc- teurs maintenus à potentiel constant sont en équi= libre stable si l'énergie électrostatique est maxi- mum, et des courants d’intensités données sont également en équilibre stable si l'énergie de leur champ magnétique est aussi maximum. Dans tous ces cas de maximum et de minimum, une modification infiniment petite du système à partir de l’état permanent produit une varialion nulle dans l'énergie. Celle-ci est stationnaire. y 3. Principe général. — Quand, au lieu de reste permanent, l’état du système est variable et qu'il y figure nécessairement à la fois les deux sortes de champs, nous cherchons à retrouver comme dans le régime permanent une expression qui reste sta= tionnaire, c’est-à-dire dont la variation est nulle quand on suppose le système infiniment peu mo- difié à partir de son état réel. On est ainsi conduit à remplacer les énergies We, W», qui jouaient ce rôle dans le régime permanent, par une intégrale prise par rapport au temps et où figure non pas lan somme des énergies, puisque cetle quantité, égale à l'énergie totale, doit rester constante s’il n'inter- vient que des actions électromagnétiques, mais leur différence : AL J (We — Wa) dé, lo intégrale qui reste stationnaire pour toute modifi= cation virtuelle du système, cette modification étant soumise à la condition de s’annuler aux limites £,, 4, de l'intégrale, exactement comme dans le principe analogue d'Hamilton en Mécanique. Le principe de varialion nulle que nous venons d'énoncer, etque nous considérerons comme résul= tant d'une induction basée sur des principes uni= quement électromagnétiques, permet, en effet, de retrouver trois des équations de Hertz quand on admet les trois autres, et fournit de la manière la plus simple la solution que nous avons obtenue pour le premier problème au moyen de ces équas tions. De plus, le mouvement des électrons, supposé donné seulement aux instants {,, /, intervient den l'intégrale, et la condition que celle-ci soit stations naire permet de déterminer les lois de ce mouve= ment dans l'intervalle en partant d’un principen dont la signification est purement électromagné=« tique. On retrouve exactement ainsi Îles résullats de M. Abraham : Les équations du mouvement contiennent des termes qui dépendent : les uns de l'électron mobileet sontproportionnels, dans l'hypo= thèse du mouvement quasi-stationnaire, à son accé= | P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 267 lération,avecdes coefficients fonctions de la vitesse, | que nous appellerons les masses longitudinale et “transversale de l’électron; les autres de la charge et des champs extérieurs, que nous appellerons les forces et qui sont ceux donnés par M. Lo- rentz. Le mouvement ultérieur de l'électron est ainsi déterminé par l’état électromagnétique actuel du système. 4. Liaisons dans l'électron. — Pour simplifier « l'analyse et n'avoir pas à se préoccuper du mouve- “ ment de rotation de l'électron, je considère celui-ci “ comme une vacuole présente dans l’éther, les inté- grales de volume qui représentent les énergies W:, W» des champs électrique et magnétique « s'étendant seulement à l'espace extérieur à la sur- vilesse augmente. Les formules qui expriment dans ce cas la variation des masses longitudinale et trans- versale avec la vitesse sont différentes de celles de M. Abraham et de M. Lorentz, quoique donnant toujours l'accroissement indéfini des deux masses à mesure qu'on approche de la vitesse de la lumière. : : 11 Les formules ainsi obtenues pour le rapport de la masse transversale m1, seule accessible jus- qu'ici à l'expérience, à la masse m, aux très faibles vitesses, en fonction du rapport 8 — . de la vitesse de l’électron à celle de la lumière, sont : 1° Electron sphérique variable : 1]: m 3 3 FL, 118 LA ET at k AE +5 logILB TE 075 s 085 Sog 8-05 -01 face qui limite la vacuole. On peut supposer comme liaison unique, en dehors de la charge électrique “donnée, la forme de cetle surface fixée, sphérique par exemple, grâce à une action de nature incon- nue, et l’on retrouve naturellement les formules de M. Abraham pour les masses longitudinale et transversale dans le cas d’un électron sphérique. Mais on peut aussi supposer la liaison plus simple, impliquant seulement par exemple un volume déterminé de la vacuole à cause de l'incompressi- “bilité de l'éther extérieur; si l'on cherche alors quelle est, dans le cas d’un mouvement de transla- . Lion uniforme, la forme que prendra spontanément l'électron pour satisfaire à la condition de variation nulle, on trouve précisément la forme ellipsoïdale aplalie supposée par M. Lorentz, avec cette difré- rence que le diamètre équatorial augmente avec la vitesse au lieu de rester constant comme l'admet M. Lorentz, cette constance impliquant une dimi- aution du volume de l'électron à mesure que la PSP Fig. 1. — Courbes théoriques et valeurs expérimentales de la variation du rapport 8 log 8-05 en fonction de la vitesse, e m 20 Electron variable : In = Diamètre équatorial constant TE 1— 8e, 119 = In test Volume constant —— (1 — {7 5 19 = 5. Comparaison. — Les expériences de M. Kauf- mann ne sont pas encore suffisamment précises pour déterminer laquelle de ces formules repré- sente le mieux la variation expérimentale du rap- e k port 7 avec la vitesse. Pour effectuer la compa- raison, j'ai employé un procédé analogue à celui de M. Kaufmann, qui détermine les deux champs élec- trique et magnétique figurant dans les expressions . e . £ de la vitesse et du rapport — en fonction des données 111 de l'expérience, en cherchant pour quelles va- leurs de ces quantités on obtient la meilleure concordance entre la variation expérimentale et la variation théorique calculée en supposant que 268 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS toute l'iuertie de l'électron est d’origine électroma- gnétique. Pour éliminer ces constantes, je con- struis les deux courbes expérimentale et théorique V nées logarithmiques et je cherche pour quelle posi- tion de ces courbes on obtient par translation la meilleure concordance. Les résultats sont indiqués ici (fig. 1) pour les trois courbes théoriques et les mêmes séries de valeurs expérimentales. On voit que la concordance est à peu près la même dans les trois cas. Les points expérimentaux quatre séries de mesures faites par M. Kaufmann et sont marqués de signes différents qu'on peut dis- linguer en examinant altentivement les figures. Les valeurs les plus importantes au point de vue du choix de la formule sont celles qui correspon- dent aux vilesses très voisines de celle de la lumière, et qui s'élèvent, dans les expériences de M. Kaufmann, aux quatre-vingt-quinze centièmes de celle-ci. Mais les rayons deviennent alors très peu déviables et les mesures précises extrêmement difficiles. IL serait extrêmement important de pouvoir atteindre la masse longitudinale par l'emploi d'un champ électrique intense parallèle à la vitesse de l’électron, fournissant à celui-ci une énergie connue et produisant une variation de vitesse qui, mesu- rée, donnerait la masse longitudinale. e à représentant = en fonction de B en coordon- correspondent à 6. Matière et électrons. — Mais, si la précision des expériences ne paraît pas suffisante pour dé- terminer complètement la loi, la concordance est . assez bonne avec des formules établies toutes en supposant que la masse est tout entière électro- magnélique, pour qu'il soit raisonnable d'admettre qu'au moins les corpuscules calthodiques ne pos- sèdent pas d'autre inertie que celle provenant de leur charge électrique, du sillage qu'ils entrainent pendant leur mouvement à travers l’éther. Il est bien séduisant d'admettre le même résultat pour la matière tout entière en la concevant comme constituée par une agglomération d’élec- trons des deux signes; il répugne, en effet, de faire intervenir pour deux phénomènes aussi idenliques que l’inertie de la matière et celle des corpuscules cathodiques deux explicalions complèlement dis- tinctes, dont l’une, l'explication électromagnétique, est précise et confirmée par l'expérience, Landis que l’autre reslerail inconnue. L'inertie d'une semblable agglomération d'élec- trons serait la somme des inerties partielles, à cause de l'énorme distance des centres électrisés par rap- port à leur rayon, que l’on peut calculer en suppo- sant toute l’inertie électromagnétique. Dans ces conditions, les sillages des divers électrons n'’inter- fèrent pas de manière appréciable et l’on retrouve ainsi la loi de conservation de l’inertie, conséquence de la conservation des électrons dans les modifica- tions que subit la matière. Mais la théorie n’est pas incompatible, à cause de l'interférence des sil- lages, avec de petits écarts entre l'inertie d'en-. semble et la somme des inerties partielles. La complexité du système alomique auquel on est conduit, chaque atome ou molécule contenant probablement un très grand nombre d'électrons; parail, d’ailleurs, être imposée par la complexité des spectres lumineux émis par les atomes, par les électrons qu'ils renferment, lorsqu'une per- turbation extérieure vient déranger le système de son état de mouvement périodique stable, pour lequel les radiations émises par les divers élec- trons, en raison des accélérations qui les maintien-. nent sur leurs orbites intramoléculaires, se com- pensent à peu près complètement au point de vue de l'énergie rayonnée, de sorte qu’il n’y a, en général, pas de cause sensible d'amortissement pour le mouvement périodique intramoléculaire. Cetle conception, cette théorie électronique de la malière, où malière devient, au moins partiellement, synonyme d'électricité en mouvement, parait ren- dre compte d’un nombre énorme de faits, qui s'aug- mente constamment sous l'effort des physiciens impatients de contempler sous une forme moins primitive la synthèse qu'elle promet d’apporter. 7. Stabilité de l'électron. — La conception fon- damentale, celle de l’électron, ne va pas sans sou-. lever encore quelques difficultés; en dehors de l'impossibilité déjà signalée de nous représenter par des images matérielles son déplacement par rapport à l'éther, il semble nécessaire d'admettre dans sa structure autre chose que sa charge élec- trique ; il faut une action qui maintienne l'unité de l’électron et empêche sa charge de se dispersern sous la répulsion mutuelle des éléments qui la constituent. La forme de l'électron est déterminée par quelque liaison qui en assure la stabilité : la condition d'incompressibilité du milieu étant in- suflisante, puisque la forme sphérique ne corres- pondrait qu'à un équilibre instable pour un corps électrisé de volume donné dans lequel rien ne s'opposerail à la déformation. Cette liaison, qui tient à quelque propriété fon- damentale du milieu, déterminant la charge prise par les électrons lous identiques à ce point de vue, est peut-êlre en connexion étroite avec le troisième mode d'activité de l’éther, une troisième forme de l'énergie, la forme gravitation, dont notre prin- cipe d'intégrale stationnaire devrait tenir compte CN P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 269 par l'introduction de termes s'ajoutant à l'énergie électrostatique, mais infiniment moins grands qu'elle. 8. La gravilation. — La gravitation, en effet, s'obstine à rester en dehors de notre synthèse élec- tromagnétique; non seulement les aclions newlo- niennes ne paraissent pas se propager avec la vitesse ordinaire des perturbalions, celle de la lu- mière, mais encore il semble difficile de faire sortir de l'Électromagnétisme, sans en détruire les bases les plus fondamentales, telles que la notion de champ ou d'action de milieu, la possibilité d’attrac- tion d'un ensemble d'électrons neutre pour un ensemble de même nature. Il me parait vraisemblable que la gravitation résulte d'un mode d'activité de l’éther et d’une pro- priété des électrons entièrement différents du mode électromagnétique, et que nous devrons admettre, en dehors des énergies électrique el magnétique, une troisième forme distincte, celle de gravitation. Reste à comprendre comment est possible et ce que signifie l'équivalence, le passage de cette troi- sième forme dans l'une des deux premières. Aussi bien ne sommes-nous pas plus capables de com- prendre, en dehors des équations formelles qui la traduisent, la liaison entre les énergies élecirique et magnétique elles-mêmes et leur transforma- tion l’une dans l’autre par l'intermédiaire des élec- trons. 9. Une expérience nécessaire. — 11 ne semble pas impossible de faire rentrer les forces de cohé- sion dans le domaine électromagnélique, aussi bien au point de vue des attractions muluelles que des orientalions efficaces dans les milieux cris- tallisés, grâce aux champs électriques et magné- tiquescomplexesqui doivent environner un système — d'électrons neutre dans son voisinage immédiat. Les forces de gravitation seules resleraient dis- dincles, superposées aux forces éleclromagné- tiques, et aucune difficulté n’en résulle au point de vue des expériences négalives tentées pour mettre ‘en évidence le mouvement absolu de la Terre. Les résultals négatifs s'interprètent bien, avons- | nous vu, si toutes les forces intérieures à la matière sont d'origine électromagnétique; mais les forces de gravitation peuvent y être superposées sans introduire de modification sensible à ce résullat, car leur intensité est exlraordinairement faible par rapport aux actions électromagnétiques lorsqu'il n’y a pas compensation mutuelle de celles-ci, et dans toutes les expériences en question, interférences lumineuses ou équilibre d’un système élastique, les forces de gravilation ne jouaient aucun rôle appréciable. Il serait tout à fait intéressant de se placer dans un cas d'équilibre où les forces de pesanteur jouent un rôle important, et, si l'équilibre reste indépen- dant du mouvement d'ensemble au second ordre près, si l'on ne peut mettre en évidence le mouve- ment absolu, il en faudra conclure que les forces de gravitation, elles aussi, sont modifiées par le mou- vement d'entrainement de la même manière que les forces électromagnétiques, puisque l'équilibre n'est pas troublé; cela serait une indicalion im- portante pour la nécessité d'une représentation électromagnélique de la gravitation. Tant que cette constalation n'aura pas élé faite, tant que les expé- rieuces sur le mouvement absolu n'auront pas fait intervenir la pesanteur, il sera plus raisonnable de considérer la gravitation comme une action dis- tincte, qui peul intervenir dans la liaison néces- saire à l'intérieur des électrons pour leur stabilité, sans qu'il soit possible aujourd'hui d'imaginer dans quel sens peut être cherchée une compré- hension plus profonde des propriétés de l’éther et des électrons qu'il renferme. Il ne semble pas, de toute manière, et pour bien des raisons, que ce soit dans le sens d’une repré- sentation matérielle et mécanique de l'éther. VI. — RAYONS CATHODIQUES. € : : 1. Le rapport Le Avant d'examiner les con- séquences que comporte la conception électro- nique de la matière, je voudrais examiner quel- ques points relatifs aux électrons des deux signes. Ceux que nous connaissons le mieux, à beaucoup près, sont les négalifs, qui se montrent toujours identiques à eux-mêmes par toutes leurs propriétés, quelle que soit la matière qui les ait fournis. Nous avons dé;à vu comment la mesure direcle des charges conduit toujours aux mêmes résul- tats. La masse, limite commune, pour les faibles vitesses, des masses longitudinale et transversale, peut être atteinte par la mesure du rapport de la charge à la masse. Les résultats obtenus dans le cas des rayons cathodiques présentent des divergences assez notables quand différentes méthodes de mesure sont employées. Les premières valeurs furent obtenues par J. J. Thomson en combinant la dé- viation magnétique de ces rayons soit avec une mesure de l'énergie qu'ils transportent (par la cha- leur dégagée sur une soudure thermoélectrique), soit avec la dévialion dans un champ électrostatique. Le e : æ rapport — obtenu par ces deux méthodes est voisin 111 de 10° unités électromagnétiques C.(.S. Une autre méthode, indiquée par M. Schuster, P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS fut employée successivement par MM. Kaufmann et Simon. Elle consiste à combiner la déviation magnétique avec la mesure de la différence de potentiel sous laquelle les rayons sont produits. Cette méthode parait susceptible d’une précision plus grande que les précédentes, et les résultats qu'elle fournit concordent avec la valeur limite des masses transversales des rayons $ pour les faibles vitesses, bien que la méthode employée dans ce dernier cas soit différente de celle de Schuster. Le nombre obtenu est 1,86 X 107, presque double de celui de J. J. Thomson. L’explication proposée par ce dernier, d'après laquelle les rayons catho- diques observés dans un tube de Crookes ne se- raient pas produits sous la différence de potentiel totale entre la cathode et le cylindre métallique qui les recoit, mais proviendraient d'un point situé en avant de la cathode, de potentiel diffé- rent, ne parait pas entièrement satisfaisante, car on comprendrait difficilement la constance des ré- sultats de MM. Kaufmann et Simon quand les con- ditions expérimentales, la chute de potentiel en particulier, varient dans de larges limites. Un moyen de trancher la question consiste, après leur production, à faire subir aux rayons cathodiques une chute de potentiel supplémentaire et connue, et à mesurer, par la modificalion qui en résulte dans leur déviation magnétique, la chute de poten- tiel iniliale sous laquelle ils ont été produits. 9. Le corpuscule cathodique. — Quoi qu'il en soit, on peut, grâce aux résultats de M. Kaufmann, affirmer l'identité des rayons cathodiques, déjà indépendants du gaz el de l'électrode contenus dans le tube de Crookes, et des rayons $ du ra- dium. Les mesures de J. J. Thomson et de Lenard sur les rayons cathodiques émis par une surface métallique chargée négativement sous l’action de la lumière et sur les rayons cathodiques émis spon- tanément par les corps incandescents conduisent à la même identité. M. Wehnelt a montré récem- ment que les oxydes alcalino-terreux possèdent, avec une extraordinaire intensité, cette propriété d'émettre spontanément des rayons cathodiques à température élevée et peuvent fournir un moyen d'effectuer, sur cette espèce particulière de rayons, des mesures simples el précises. Enfin, on sait que la grandeur du phénomène de Zeeman, dans le cas où la raie spectrale consi- dérée présente l'aspect du triplet normal, conduit à cette conclusion, que tout au moins la lumière cor- respondant à ces raies provient de centres électri- sés négativement, présents dans la matière et ayant : e . : même rapport — que les particules cathodiques. mm De plus, la grandeur de ce rapport, mille à deux mille fois plus grand que pour l'atome d'hydro- gène dans l’électrolyse, conduit, par suite de l’iden- tité des charges électriques démontrée par M. Town- send, à considérer le corpuscule cathodique comme de masse au moins mille fois plus petite que celle de l'atome d'hydrogène, résullat en parfait accord avec la conception des atomes matériels comme formés d'un grand nombre d'électrons des deux signes. Dans l'hypothèse où la masse serait tout entière d'origine électromagnétique, la connais- Au 0 EU e »: sance du rapport — donne pour l'électron un In rayon assez petit pour être, conformément aussi à notre conception, négligeable par rapport aux dimensions atomiques. 3. Les flammes. — La faible masse du corpuscule cathodique et la possibilité de séparer de la ma- tière des centres électrisés mille fois plus petits que les plus petits atomes sont confirmées par les mesures de mobilité des ions négatifs dans les flammes. On trouve des mobilités énormes par rapport à celles qu'on observe dans les gaz aux tem- pératures ordinaires, et les méthodes de la théorie cinétique des gaz permettent de calculer à partir de cette mobilité expérimentale que les centres négatifs mobiles dans les flammes ont une masse environ mille fois inférieure à celle de l'atome d'hydrogène et doivent, par conséquent, être iden- lifiés avec les corpuscules cathodiques. À la tem- pérature ordinaire, les ions sont moins mobiles, parce que le corpuscule cathodique qui constitue le noyau de l'ion négatif s’entoure de molécules neutres du gaz par simple attraction électrosta= tique. VII. — ÉLEcrRoNs PosirIFs. RAYONS &. 1. Rayons de Goldstein, rayons «. — Notre con- naissance de la structure des charges positives est beaucoup moins avancée que pour les négatives. Deux cas importants nous metlent en présence de parlicules chargées positivement, en dehors des ions posilifs dans les gaz conducteurs, constitués aussi par des agglomérations de molécules neutres autour d'un centre électrisé; ce sont les kanal=M strahlen de Goldstein, afflux de charges positives vers la cathode, et dont la déviation électrique ets + : exe magnétique conduit pour le rapport — à des In valeurs variables d'abord dans de larges limites et plusieurs milliers de fois plus petites, en général, M que pour les rayons cathodiques. La masse de ces centres positifs est done de l'ordre de celle des atomes matériels. Les rayons « des corps radio-actifs, très absor= P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 271 bables et particulièrement faciles à observer dans le cas du polonium, qui n'en émet pas d'autres, se présentent comme tout à fait analogues aux kanal- Strahlen. La masse des particules chargées positi- vement qui les constituent est de même ordre que celle des atomes d'hydrogène et leur vitesse ne dépasse pas 20 à 25.000 kilomètres par seconde, de sorte qu'il est impossible de vérifier si leur masse est d'origine entièrement électromagnétique. D'au- “tre part, doit-on les envisager comme des électrons “aussi simples que l’électron négatif, ou sont-ils de “structure beaucoup plus complexe; sont-ils, par exemple, des atomes matériels ayant perdu un …corpuscule cathodique ? 9, Électrons ou atomes. — Dans la première “hypothèse, celle de l’électron, la grande masse des “entres posilifs conduirait à leur attribuer une dimension beaucoup plus petite qu'aux corpuscules “cathodiques eux-mêmes, la masse électromagné- “tique d'une sphère électrisée étant inversement proportionnelle à son rayon. On est ainsi conduit “à ce résultat paradoxal qu'un électron est d'autant plus petit. M. H. A. Wilson croil trouver un ‘argument en faveur de cette conception d'un élec- dans cette remarque que les rayons « sont beau- kcoup moins absorbables que des rayons 8 de même vitesse. “— Beaucoup de raisons, d'ailleurs, tendent à faire “adopter l'hypothèse contraire d'une particule « ès complexe el peu différente d'un atome. M. Ru- therford a donné des raisons sérieuses pour identifier les particules z avec les atomes d'hélium privés d’un corpuscule cathodique; d'autre part, M. Stark donne des raisons expérimentales de rapporter aux centres posilifs dans les tubes à vide Némission des spectres de raies, ce qui implique : complexité de structure. Enfin, la théorie de la décharge disruptive attribue la production de ayons cathodiques au choc contre la cathode des particules qui conslituent les rayons de Goldstein : un électron plus pelit que la particule cathodique elle-même semble difficilement pouvoir provoquer une perturbation superficielle assez intense, tandis qu un atome incapable de traverser un autre édifice atomique, et lancé avec une grande vitesse, pro- duirait une perturbation locale importante. 3. La charge positive des rayons x. — C’est peut- être aussi à la perturbalion considérable produite par les rayons + ou canal dans la matière qu'ils rencontrent et dans l'émission consécutive de rayons cathodiques qu'on doit rapporter ce fait intéressant que la charge des rayons + n'a pu, jusqu'ici, être plus inerte, je ne dirai pas plus lourd, qu'il est | “tron positif très petit et, par conséquent, très inerte | + mise en évidence de manière directe par la charge négalive que doit prendre spontanément un frag- ment de sel de polonium qui parait émettre uni- quement des rayons « très absorbables.. Quelque élevé que soit le vide fait autour d'un fragment de bismuth actif, analogue au polonium, il ne prend spontanément aucune charge et perd rapidement, au contraire, sa charge positive ou négative sans qu'on puisse expliquer cette déperdition par l'ac- tion ionisante des rayons + sur le gaz environnant, beaucoup trop rare. Le passage des rayons ©, projectiles de grosse dimension, à travers la sur- face du corps radio-actif dont ils sortent peut jouer le même rôle que l’arrivée des Æanalstrahlen sur la surface d’une cathode et provoquer l'émission de rayons B, très peu pénétrants d'ailleurs, dont la présence suffirait, jointe à celle des rayons +, pour empêcher toute charge permanente du corps radio- actif, de quelque signe qu'elle soit. 4. Les électrons positifs. — Si les centres posi- tifs que nous connaissons ne doivent pas être envisagés comme des électrons libres, il semble, cependant, nécessaire d'admettre la présence de semblables électrons qui permettraient la neutralisa- tion des charges négatives dans l’édifice atomique, mais qui, pour quelque raison, ne sortiraient de cet édifice qu'avec une extrême difficulté, contraire- ment à ce qui se passe pour les électrons négatifs. De plus, il parait nécessaire, pour que la théorie . des métaux, qui rapporte leur conduclibilité à la présence de centres électrisés libres de se mouvoir sous l’action d’un champ, puisse rendre compte de tous les faits, du phénomène de Hall en parti- culier, de sens variable dans les différents métaux, que des centres des deux signes coexistent dans le métal, libres de se déplacer dans toute son étendue, sans que les centres positifs puissent être les atomes métalliques eux-mêmes,nécessairement immobiles pour constituer la charpente solide du métal. Il est possible que les électrons positifs, qu'aucune action connue ne peut dans les gaz maintenir séparés des atomes matériels, soient libres en grand nombre dans le milieu tout différent constitué par le métal. Beaucoup de problèmes se posent ici au sujet des centres positifs. VIII. — THÉORIE DE LA MATIÈRE. RADIOACTIVITÉ. 1. L'instabilité atomique. — Examinons mainte- nant d'un peu plus près les conséquences aux- quelles conduit la conception d’une matière cons- tituée par des électrons des deux signes, d’atomes formés de centres électrisés en mouvement sous leurs actions mutuelles. Tout d’abord, en dehors de la gravitation, d'intensité infiniment petite 972 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS comparée aux actions électriques intérieures à | en résulte que la dix-millième partie seulement dé l'atome et qui provoquent tous leurs changements | ce stock est utilisée pendant celte période spécia=« d'état physique ou chimique, les lois élémentaires | lement active de la vie des atomes. Il n’y a donc d'action se réduisent aux forces de Lorentz qui | aucune difficulté à concevoir comment l'énorme déterminent, comme nous l'avons vu, l'accélération | dégagement de chaleur du radium peut être em- d'un électron en fonction du champ électrique et | prunté à l'énergie interne. du champ magnétique produits par les autres élec- Aucun atome n'étant à l'abri de cette déperdition trons au point où il est placé. Dans le cas où | d'énergie due au rayonnement lié à l'accélération. l'accélération est suffisante pour qu'il y ait rayon- | des électrons, on doit s'attendre à généralité des« nement appréciable d'énergie à distance, par l’in- | phénomènes radio-aclifs, les atomes que nous termédiaire de l'onde d’accélération, il est proba- | considérons actuellement comme stables ayant seu blement nécessaire de faire intervenir d’autres | lement une déperdilion extraordinairement lente termes dans les équations du mouvement de l’élec- tron, des forces par l'intermédiaire desquelles il puisse emprunter l'énergie qu'il rayonne et qui disparaissent dans le cas du mouvement quasi-sta- 1. Polarisation. — Je voudrais maintenant mon- lionnaire. Il ne semble cependant pas que, dans | trer en quelques mots comment la conception pré aucun cas expérimental, ces termes correctifs puis- | cédente s'adapte aisément à la représentation des sent devenir appréciables. principales propriétés électriques et magnétiques Au même point de vue, les électrons en mouve- | de la matière et a rendu possible, pour la première ment périodique dans l'atome matériel sont néces- | fois, un essai de théorie de la décharge disruptive sairement soumis, le long de leurs orbites fermées, | et de la conductibilité métallique. à des accélérations qui s'accompagnent d'énergie Une propriélé commune à toutes les formes de rayonnée, empruntée aux énergies électrique et | la matière est la possibilité d’une polarisation élec magnétique intérieures à l'atome. Ce rayonnement | trique, cause des variations dans le pouvoir induc= peut, d’ailleurs, être extrêmement faible, comme | teur spécifique avec la nature de la matière. Cette. dans les cas simples de plusieurs corpuscules | polarisation résulte, de façon toute naturelle, de la cathodiques circulant à distances égales sur une | modification qu'apporte un champ électrique exté même orbile (aulour d'un centre posilif). rieur dans le mouvement des électrons intérieurs à Mais ce rayonnement continuel, beaucoup plus | l'atome. Cette modification se traduit par un excès important naturellement quand l'atome, par un choc | moyen des centres positifs du côté où le champ» extérieur, est dérangé de sa configuration la plus |.tend à les déplacer, et un excès moyen dans Je stable, ce rayonnement est pour l'édifice atomique | temps des charges négatives de l'autre côté. Le sys* une cause de décrépitude, et, au bout d'un temps | tème prend donc en moyenne dans le temps une plus ou moins long suivant la structure, un réar_ | polarité électro-slatique. rangement profond devient nécessaire, comme une toupie tombe quand sa rotalion a suffisamment 2. Dissociation corpusculaire. — Si le champMl diminué de vitesse. Une région d'instabilité est | électrique devient suffisamment intense, commê alteinte, le réarrangement conséculif pouvant | il peutl'êlre, parexemple, pendant le passage d'un s'accompagner de projection violente de certains | de ces pulsations très brèves qui constituent les centres électrisés intérieurs à l'alome. Celle con- | rayons de Rüntgen, ou pendant le passage à tra ception fournil au moins une image des phéno- | vers l'atome d'une particule électrisée « ou 8 lancée mènes de radioactivité et des transformations suc- | avec une très grande vitesse, la modification pro cessives dans la vie des atomes dont M. Rulherford | duite sur l'atome ou la molécule peut être pl IX. — PROPRIÉTÉS ÉLECTRIQUES. a émis l'hypothèse. profonde : un corpuscule cathodique peut se trou ver arraché de l'édifice qui reste chargé positive 2, Energie interne et chaleur dégagée. — | ment; il se produit ainsi une dissociation corpu Un calcul très simple montre, d'ailleurs, que le culaire, qui permet d'expliquer la conductibilitén stock d'énergie représenté par les champs électri- | acquise par les milieux isolants, sous l’action des que et magnétique séparant les électrons contenus | rayons de Rüntgen ou de Becquerel, et qui SêN dans un atome est suffisamment grand pour ali- | manifeste surtout dans les gaz où les centres E1È GR menter pendant plus de dix millions d'années le | trisés ainsi libérés peuvent se mouvoir le plus dégagement de chaleur que M. Curie a découvert | facilement, bien que, par attraction électrostatique dans les sels de radium. Comme il paraît bien | sur les molécules neutres, ils s'entourent d'un co établi maintenant que la vie d'un atome de radium | tège qui les accompagne pendant leur déplacements est seulement de l'ordre d’un millier d'années, il Il semble bien établi que les ions négatifs ainsi | P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 273 produits dans les gaz ont pour centre un corpus- cule cathodique, puisque l'arrivée desrayons catho- diques dans le gaz y produit des ions négatifs iden- tiques aux précédents au point de vue de leur mobi- lité ou de leur puissance de condensation pour la vapeur d'eau sursaturante. Il semble, néanmoins, extrêmement imporlant de reprendre, en particu- lier, ces mesures de mobilité des ions produits par différentes causes X l'intérieur des gaz pour s'assu- rer si les différences de mobilités qui paraissent exister ont pour cause une différence dans les molécules qui constituent le cortège ou dans les centres électrisés qui lui servent de noyau. 3. Mobilités et recombinaison. — De la même manière, il importe beaucoup de pouvoir, par Pintermédiaire des mesures de mobilités, suivre avec la température la modification qui se produit dans la grosseur de l’agglomération, et de raccor- der les ions observés à la température ordinaire avec les ions incomparablement plus mobiles qu'on observe dans les flammes et qui paraissent bien “constitués par le centre électrisé seul, corpuscule cathodique et peut-être particule «. La vitesse de recombinaison des ions est encore très mal connue dans ses rapports avec les varia- tions de pression et de température, bien qu'elle joue certainement un rôle essentiel dans les phé- momènes de décharge disruptive dans les gaz à basse pression; il serait important d'être fixé un \peu mieux sur ce point. « 4. L’ionisation par les chocs. — Toute la théorie actuelle de la décharge disruptive repose sur cette conception que le choc d’une particule électrisée en mouvement suffisamment rapide contre une olécule en peut provoquer la dissocialion cor- pusculaire. . Celte idée était une conséquence naturelle du fait connu que les rayons cathodiques ou les rayons de Becquerel, constitués par de semblables parti- icules, rendent conducteurs les gaz qu'ils traversent. Si la dissociation corpusculaire produite libère à partir de la molécule un corpuscule cathodique, celui-ci peut, si le champ électrique présent dans le gaz est suffisamment intense, acquérir une vi- tesse assez grande pour se comporter à son tour comme un rayon cathodique et provoquer ainsi, de roche en proche, un accroissement rapide de la conductibilité. M. Townsend a montré comment cette consé- quence est susceptible d’une vérificalion expéri- entale très précise, et il trouve que, dans cer- aines limites de vitesse, chaque choc entre le corpuscule cathodique et une molécule est suivi d'une dissociation corpusculaire. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. La vitesse ne doit, cependant, pas dépasser une certaine limite, au delà de laquelle le corpuscule ou particule B passe à travers l'édifice atomique sans y produire de perturbation sensible. Pour qu'une décharge disruptive puisse durer sans qu'une cause extérieure vienne maintenir la production des premiers centres électrisés capables de produire la dissociation, il est nécessaire que les centres positifs, vraisemblablement atomes ou molécules privés d'un corpuscule, puissent eux aussi produire la même dissociation corpusculaire au moment de leurs chocs contre les molécules, comme cela résulte, d’ailleurs, de la conductibilité produite dans les gaz par les rayons «. Au delà de cette conception fondamentale de l'ionisalion par les chocs, la théorie de la décharge disruptive a beaucoup de progrès encore à réaliser. Les aspects extrêmement variés que prend cette décharge, la production des strates, dont une pre- mière explication a été donnée par J. J. Thomson, l'influence du champ magnétique sur les condi- tions de la décharge, les phénomènes qui se pro- duisent aux distances très faibles, de l’ordre du micron, entre les électrodes, où les molécules gazeuses ne paraissent plus jouer aucun rôle dans la production d'une étincelle entre des électrodes, sont autant de point essentiels qui altirent aujour- d’hui l'attention des physiciens. 5. L'arc électrique. — A côté de la décharge disruptive ordinaire par aigrette ou étincelle, l'arc électrique, de caractère entièrement différent, fait intervenir le phénomène nouveau de l'émission de corpuscules cathodiques par la surface des corps incandescents. La cathode dans l'arc est portée à une température suffisamment élevée, par le choc des ions positifs qui affluent vers elle, pour que les corpuscules présents dans l'électrode subis- sent une véritable évaporation et transportent la plus grosse partie du courant. En effet, un filament de charbon incandescent peut déjà, à température beaucoup moins élevée que celle de l’are voltaïque, émettre des particules cathodiques représentant une densité de courant de deux ampères par cen- timètre carré. 6. L'évaporation cathodique. — Ce phénomène, connu sous le nom d'effet Edison, est très général et a été relié de manière quantitative, par M. Ri- chardson, à l'hypothèse fondamentale de la théorie cinétique des mélaux, de la présence de particules cathodiques se mouvant librement à l'intérieur des conducteurs. A la température ordinaire, cette émission de particules se ralentit avec une rapidité telle que l'électrostatique esl possible et qu'un métal peut: 6"* 974 P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS conserver une charge permanente. Chaque cor- puscule présent dans le métal se trouve, en effet, dans un milieu de pouvoir inducteur spécifique très élevé, et un travail fini est nécessaire pour le faire passer de ce milieu dans le vide, de pouvoir inducteur égal à l'unité. Seuls les corpuscules pourvus d'une vitesse suffisante pourront fournir ce travail en sortant du métal, et le nombre de ceux-là, absolument négligeable à la température ordinaire,augmente de manière extraordinairement rapide avec latempérature. M. Richardson a montré que la variation fournie par l'expérience concorde exactement avec celle que prévoit la théorie ciné- tique des métaux, qui attribue à chaque particule électrisée libre la même énergie cinétique moyenne qu'aux molécules des gaz à la même température. 7. Les métaux. — La dissociation spontanée des atomes qu'admet la théorie cinétique des métaux, la séparation de centres électrisés libres de se mou- voir à l'intérieur du métal, est la conséquence du pouvoir inducteur spécifique élevé du milieu que constitue le métal, conformément aux lois de ré- partition prévues par la théorie cinétique. La pré- sence d'uneparticuleélectrisée libre dans une région de l’espace est d'autant plus probable que l'énergie potentielle y est plus faible, comme c’est le cas’pour un milieu de grand pouvoir inducteur spécifique. 8. Les phénomènes chimiques. — C'est par uve action du même genre que l’eau, de grand pouvoir inducteur spécifique, provoque la dissociation élec- trolytique des sels qu’on y dissout; il y aurait inté- rêt à préciser les rapports entre cette dissociation électrolytique, spéciale aux liquides conducteurs, et la dissociation corpusculaire, commune vrai- semblablement aux gaz et aux métaux. Dans la dissociation électrolytique, le ou les corpuscules perdus par l'atome métallique, au lieu de rester libres comme dans la dissocialion corpuseulaire, restent unis à un atome ou radical pour cons- tituer l'ion électro-négalif dans les électrolytes. Cette question touche à celle des rapports entre les idées actuelles et la Chimie, rapports bien obs- curs encore, et qu'il serait important d'éclaircir. La dissociation corpusculaire produite dans les gaz par les rayons de Rüntgen ne paraît liée à aucune modification chimique, et cependant, dans l'air, toute ionisation intense est accompagnée de pro- duction d'ozone. Il y a là un domaine entièrement inexploré. X. — PROPRIÉTÉS MAGNÉTIQUES. Ampère el Weber. — Cependant, les phéno- mènes complexes du magnétisme et du diamagné- tisme ont semblé jusqu'ici se laisser atteindre plus. difficilement, bien que les électrons gravitant dans.» l'atome sur des orbites fermées fournissent à pre= | mière vue une représentation simple des couranls particulaires d'Ampère, susceptibles de s'orienter sous l’action d'un champ extérieur pour donner lieu au magnétisme induit, ou de réagir par induction, selon l'idée de Weber, contre ce champ extérieur comme le font les substances diamagnétiques. : Ceux qui ont essayé de poursuivre cette idées l'ont trouvée jusqu'ici stérile: indépendamment différents physiciens sont arrivés à cette conclusion que l'hypothèse d'électrons en mouvement n0% amorti ne pouvait fournir aucune représentation: des phénomènes permanents de magnétisme ou des diamagnétisme. à Je suis parvenu à montrer, contrairement à l'opis nion précédente, qu'il est possible de donner, gräces à l'hypothèse des électrons, une signification prés cise aux idées d'Ampère et de Weber, de trouver pour le para et le diamagnétisme les interprétations, complètement distinctes qu'ils exigent, conformés ment aux lois établies expérimentalement pan M. P. Curie ; le magnétisme faible, forme atténuée du ferro-magnétisme, varie en raison inverse de las température absolue, tandis que le diamagnétismes s'est montré, dans les cas observés, à l'exception du bismuth solide, rigoureusement indépendant de la température. La théorie que je propose permet des rendre compte entièrement de ces deux faits. Je crois possible, enfin, d'éclairer de ce point de vue las question complexe de l'énergie magnétique. : Je donnerai ici seulementles résultats principaux de ce travail, qui sera publié complètement ailleurs” } 2, Les courants particulaires. — Une particule» électrisée de charge e se déplacant avec la vitesse y est équivalente à un élément de courant de moment ev. On déduit facilement de là qu'un courant particulaire, constitué par un électron qui décrit dans le temps périodique + une orbite fermée de surface S, est équivalent, au point de vue du champ magnétique à grande distance, à un 2 es ; aimant de moment magnétique M — Le normal au plan de l'orbite. 4 Un semblable courant particulaire correspondra, à chacun des électrons présents dans la molécule; et le moment magnétique résullant de celle-ci pourra être nul ou différent de zéro suivant le degré de symétrie de l'édifice moléculaire. 3. Le diamagnétisme.— Si à un ensemble de telles molécules on superpose un champ magnétique extérieur, tous les courants particulaires subissent une modification indépendante de la manière dont #4 J P. LANGEVIN — LA PHYSIQUE DES ÉLECTRONS 279 cette superposition est obtenue, soit par établisse- ment du champ, soit par déplacement des molé- cules dans un champ magnétique préexistant. Le sens de cette modification, due à l'induction subie par le courant particulaire, correspond toujours au diamagnétisme, l'accroissement du moment magné- tique M étant : He , S AT Im AM — — “dans le cas d’un courant circulaire, H étant la com- posante du champ magnétique normale au plan de l'orbite et m la masse de l’électron. 4. L'énergie magnétique. — Quand la molécule est supposée immobile, le travail nécessaire à la modification des courants particulaires est fourni par le champ électrique créé conformément aux “équations de Hertz pendant l'établissement du “champ magnétique. “— Dans le cas opposé, où la modification est due au “déplacement des molécules, le travail est fourni “aux courants particulaires par l'énergie cinétique “de la molécule ou par les actions des molécules environnantes. La propriété diamagnélique acquise “au moment de l'établissement du champ subsiste donc, en dépit de l'agitation moléculaire. « Cette modification se manifeste de trois manières distinctes : … 1° Sile moment résultant des molécules est nul, Ja substance est diamagnétique au sens ordinaire du mot, et l'ordre de grandeur des constantes dia- magnétiques observées est tout à fait d'accord avec A hypothèse de courants circulant suivant des “orbites intra-moléculaires. — Cette conception conduit à retrouver la loi d'indé- pendance établie par M. Curie entre les constantes diamagnétiques et la température ou l'état physique ; “ 2° Si le moment résultant n'est pas nul, la subs- lance possède un paramagnétisme qui masque toujours le diamagnétisme général sous-jacent, le Mouveau phénomène, dù à l'orientation des molé- Cules, étant considérable par rapport au premier, Quand la symétrie moléculaire lui permet d'appa- raitre. Les échanges d'énergie entre les aimants molé- claires et le champ magnétique extérieur, ou le mouvement d'ensemble des molécules, se font par Dintermédiaire de la modification diamagnélique. Il est possible d'en déduire la loi de variation du magnétisme faible en raison inverse de la tempé- rature absolue ; 3° Enfin, le changement de période de révolution sur les orbites correspond au phénomène de Zeeman, général comme le diamagnétisme lui- même, le fer lui-même étant diamagnétique avant que l'orientation des aimants moléculaires sous l’action du champ extérieur y fasse apparaitre le paramagnétisme. Les orbites considérées, qui représentent les courants particulaires d'Ampère, sont aussi les circuits de résistance nulle du diamagnétisme de Weber, avec cette particularité remarquable que le flux qui les traverse ne reste constant, comme le supposait Weber, que si l’inertie des électrons est tout entière d’origine électromagnétique. J'ai démontré, d'autre part, que les orbites des électrons, supposées circulaires et décrites sous l’action de forces centrales quelconques, ne subis- sent aucune déformation sous l’action d’un champ magnétique extérieur, la vitesse des électrons étant seule modifiée, et l’on peut, dans l'hypothèse où l'inertie est de nature électromagnétique, se former une conception exacte et simple de tous les faits du magnétisme et du diamagnétisme en consi- dérant les courants particulaires comme des circuits indéformables, mais mobiles, de résistance nulle et d’énorme self-induction auxquels toutes les lois ordinaires de l'induction sont applicables. XI, — ConcLusion. La perspective rapide que je viens d’'esquisser est pleine de promesses, et je crois que rarement, dans l'histoire de la Physique, on eut occasion de pouvoir regarder si loin derrière soi et si loin devant soi. L'importance relative des diverses por- tions de ce domaine immense et à peine exploré apparaît différente aujourd'hui de ce qu’elle était au siècle précédent; du point de vue nouveau, les divers plans s'agencent dans un ordre nouveau. Les notions électriques, apercues les dernières, paraissent aujourd'hui dominer tout l'ensemble, comme la place de choix où l'explorateur sent qu'il doit fonder la ville pour s'avancer ensuite vers des pays nouveaux. , Les phénomènes mécaniques, les plus évidents de tous ceux dont la matière est le siège, ont tout d'abord sollicité l'attention de nos ancêtres et les ont amenés à concevoir les notions de masse et de force, qui ont paru longtemps les plus fondamen- tales, celles à quoi toutes les autres devaient se ramener. À mesure qu'augmentaient les moyens d'investigation, que des faits plus cachés se laissaient découvrir, on a cru longtemps pouvoir les réduire aux anciens, pouvoir trouver partout une explication d’origine mécanique. La tendance actuelle de faire occuper la place prépondérante aux notions électromagnétliques se justifie, ainsi que j'ai cherché à le montrer, par la solidité de la double base sur laquelle repose la notion d'électron : d’une part, la connaissance pré- cise de l’éther électromagnétique, que nous devons 276 FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES à Faraday, à Maxwell et à Hertz, et, d'autre part, l'évidence expérimentale apportée par les travaux récents sur la structure granulaire de l'électricité. De plus, cette confiance que nous éprouvons en regardant le passé s’accroit, s'il est possible, quand nous regardons l'avenir. Déjà toute l'Optique, non seulement de l'éther, mais aussi de la matière, source et récepteur des ondes lumineuses, reçoit une interprétation immédiate que la Mécanique s'était montrée impuissante à lui donner, et cette Mécanique elle-même apparait aujourd’hui comme une première approximation, largement suffisante dans tous les cas de mouvement de la matière prise en masse, mais dont une expression plus complète doit être cherchée dans la dynamique des électrons. Bien que toutes récentes, les conceptions dont j'ai cherché à donner une idée d'ensemble parais- L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES sent ainsi se placer d'emblée au cœur de la Phy= sique entière et agir comme un germe fécond pour en cristallisera utour d'elles, dans un ordre nouveau les faits les plus éloignés jusqu'icr. Tombant dans un terrain admirablement préparé pour la recevoir, dans l’éther de Faraday, de Max® well et de Hertz, la notion d'électron, électrisé mobile, que l'expérience nous permet aus jourd'hui de saisir individuellement, qui constitue le lien entre l'éther et la matière formée d’un groupement d'électrons, cette notion a pris en peu d'années un développement immense, qui lui fait briser les cadres de l'ancienne Physique et renver ser l'ordre établi des notions et des lois pour abou=« tir à une organisation qu'on prévoit simple, har= monieuse et féconde. 5 P. Langevin, Î Professeur suppléant au Collège de tract) COMME INSTRUMENT D'ÉDUCATION PHILOSOPHIQUE: Mesdames, Messieurs, L'année dernière, des hommes éminents vous ont signalé, dans cette enceinte, les perfectionnements qu'il convient d'apporter à l'enseignement des Sciences mathématiques et des Sciences phy- siques. Là, il pouvait être question de pédagogie propre- ment dite, de méthodes d'enseignement, car, au moins pour les Mathématiques, ce qui doit être appris aux élèves des lycées et des collèges est défi- nitivement arrêté ; iln’yade variation possible que dans les manières de l’apprendre ; il existe vérila- blement un enseignement secondaire des Mathéma- tiques, parce que les Mathématiques sont une science faite. Pour les Sciences physiques, c'est déjà bout autre chose. Depuis un quart de siècle, tout se renou- velle, presque toutes les questions sont à l'étude. « De mon temps, nous disait naguère en riant un de nos maitres, on croyait que la Physique était finie ! » C’est là une illusion que l'on ne pourrait plus avoir; on ne l'a jamais eue pour les Sciences naturelles; et je dois même vous avouer tout de suite, que, de nos jours, l'expression : « Sciences naturelles » me paraît très prétentieuse. « Histoire naturelle » était plus modeste et plus convenable. AE Lande SF SON ANRRA ds ci APR en 4 Conférence faite au Musée pédagogique, le 26 jan- vier 1905, Si l'on admet, avec Auguste Comte, que « savoir c'est prévoir », la science de la vie est bien limitée ÿ. il y a fort peu de cas où l’on connaisse SUPRSAUS ment les éléments d'un fait biologique pour Dot le reproduire identique à lui-même ; avant Pasteur iln'y en avait pas un seul. Si j'inocule à un mouto les deux vaccins charbonneux, je prévois avec cer tilude que le mouton, guéri de la seconde inoculas lion, sera réfractaire au charbon; et précisément les faits d'immunité, qui sont à peu près les seuls dans lesquels on puisse, chez un être qui reste vi= vant, prévoir une partie de l’avenir, ne sont pas enseignés dans les lycées. Je reviendrai tout à l’ heure sur cette question de l'opportunité de l'enseigné* ment précoce de certains faits de Pathologie; Fr voulais seulement faire remarquer, pour l'instant que, les Sciences naturelles n'étant pas des sciences faites, 17 n'y à pas, du moins au point de vue philo sophique, d'enseignement secondaire des Sciences naturelles. | S'ilse trouve ici de nos collègues des lycées, je suis certain qu'aucun d'eux ne me contredira ; chacun d'eux fait de l’enseignement supérieur, de l’enseis gnement personnel; chacun d'eux a tiré, tant de l'observation directe de la Nature que des leçons souvent contradictoires de maitres différents, cer= laines conclusions qu'il juge bonnes et qui: sonb différentes de celles auxquelles s'est arrêlé son voi sin. Il n'y a pas d'enseignement officiel des choses de la vie. de centre. Avant donc de se livrer, au sujet des Sciences naturelles, à des discussions d'ordre pédagogique, il convient de se demander s’il n'est pas possible de tirer, de l’ensemble des faits les mieux connus à notre époque, une orientation philosophique défi- nilive, qui constituerait réellement un noyau d’en- seignement secondaire. Avant de faire de la m6- thode pédagogique, il faut faire de la méthode scien- “tilique, et je transformerais volontiers le titre de cette conférence : « Z Enseignement des Sciences naturelles comme instrument de culture philoso- phique » en celui-ci, qui me parait équivalent: « Ja “méthode scientifique en Sciences naturelles ». Étu- dier scientifiquement la vie, c'est faire de la philo- “sophie ; c'est faire la seule philosophie qui mérite “ce nom, et si l'on commence par apprendre une philosophie toute faite !, pour s'occuper ensuile de “Sciences naturelles, si l'on commence par définir, “sur la foi d'auteurs préférés, tout ce qui est relatif à la vie, pour étudier ensuite la vie, on met la charrue ravant les bœufs, pralique condamnée par la sagesse des nations. - D'autre part, si l’on renonce à toute idée précon- cue, il faut se résigner à enseigner des faits d'observation ou d'expérience, faits entre lesquels Je lien n’est pas toujours apparent et dont l'étude fatigue vite la mémoire la mieux organisée. Je crois cependant que, déjà aujourd'hui, sans faire aucune hypothèse, on peut coordonner les matières de l'enseignement par des formules générales très commodes etayant une haute portée philosophique. e Transformisme, en particulier,ne me semble pas avoir pris, dans l’enseignement des Sciences natu- elles, la place qu'il mérite. Z] a renouvelé l'esprit humain, ila modifié du tout au tout la forme même des questions que Ton se posait autrefois au sujet des manifestations de la vie; il doit se trouver par- ut, à chaque pas. Je vais essayer de montrer ici quelles sont, à mon avis, les grandes lignes de ce qu'on peut appeler actuellement le noyau scientifique de l’His- toire naturelle. ? d I Tout d’abord, je crois qu'il est nécessaire de mettre les jeunes gens en garde contre les raison- nements sfafiques ; il n’y a pas de statique en Bio- logie ; seulement, les êtres évoluent tous avec une rapidité du même ordre, et, par conséquent, quand Jun d’eux en observe un autre, il le voit immobile, inerte. Si je considère un plant de seigle en fleurs, je sais très bien qu'il provient d'une graine, qu'il donnera des graines et qu'il mourra, qu'il change 4 Et, malheureusement, cette philosophie toute faite, on la trouve dans le langage courant. FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES 19 1 1 perpéluellement, mais cela n'empêche pas que je l’observe comme quelque chose de mort. Ilse courbe au gré du vent, puis se redresse comme un ressort d'acier flexible, et ce qui me frappe pendant que je observe, ce sont ces mouvements qui mettenten jeu la propriété non vilale de l’élasticité. C'est dans cette lenteur des phénomènes vitaux que réside la plus grande difficulté d'enseignement. On pourrait peut-être y rémédier par le procédé du cinémalo- graphe. Je suppose que l’on ait cinématographié d'heure en heure, depuis sa germination jusqu'à sa mort, un plant de froment, par exemple; il sera facile, ensuite, de faire dérouler sous les yeux des élèves, en une minute, toute l'évolution individuelle de ce plant de froment ; et je crois que, si on réalisait cette opéra- tion dans les établissements secondaires, l’esprit des élèves serait frappé une fois pour toutes ; ils n'oublieraient plus jamais que le repos d’une plante n'est qu'apparent, et ils ne se demanderaient plus s’il existe dans un ètre vivant i2erte un principe créateur de mouvement. Le spectacle serait encore plus frappant si l’on pouvait faire dérouler en quelques minutes sous les yeux des élèves-l’évolution complète d'un de nos grands arbres à feuilles caduques, avec la succes- sion des bourgeonnements printaniers et des dé- pouillements automnaux; on verrait pousser les rameaux à l'aisselle des feuilles tombées, ete. On verrail croitre un arbre, ce qui n'est pas ordinai- rement donné à l’homme. Et cependant, quoique n'ayant jamais yu grandir une plante, nous savons que les plantes grandissent, parce que rous avons le souvenir de leurs formes successives ; de même, en remplaçant les minutes par des siècles, nous savons que les espèces varient sans avoir jamais vu varier une espèce, à cause des documents que nous fournit la Paléontologie; je reviendrai tout à l'heure sur cette question du temps dans l’évolution indi- viduelle ou spécifique. Une autre conséquence philosophique de cette observation au cinématographe! serait d’écarter des raisonnementsl’erreur individualiste. Nous savons bien que les individus changent; nous répétons avec Pascal : « Le temps guérit les douleurs et les querelles parce qu'on change, on n’est plus la même personne ». Mais, quoique nous le sachions, nous n'y pensons guère, parce que ces changements sont lents. Quand nous retrouvons vieillard un être que nous avons connu enfant, nous constatons surtout les variations dont il a été l'objel; au contraire, si nous vivons quarante ans avec un ami, sans le ‘ Déjà, en 1897, j'avais proposé cette méthode de démons- tration par le cinématographe (Cf. Le déterminisme biolo- gique); j'apprends que M. Pizon l'a réalisée récemment au lycée Janson de Sailly. 278 quitter jamais, nous ne le voyons pas changer; nous lui conservons le même nom, et il nous paraît être Je méme mécanisme, ce qui nous pousse natu- rellement à croire qu'il est doué de liberté absolue, puisque, étant identique à lui-même, il agit diffé- remment dans des circonstances identiques. Indépendamment même de son importance phi- losophique, l'erreur individualiste a eu des consé- quences pratiques regrettables. Elle a, par exemple, empêché de prévoir l’immunité qui suit certaines maladies infectieuses ; elle a fait considérer comme fantastique le résultat des découvertes de Jenner et de Pasteur. Un malade guérit; on dit qu’il redevient bien portant, et l’on entend par là qu'il redevient le mécanisme qu'il était avant d'avoir été malade. Cela n'est pas vrai; il est devenu un autre méca- nisme, qui ressemble à l'ancien par certains côtés, mais qui en diffère par certains autres; il s’est adapté, habitué à la maladie dont il vient de triom- pher. Voici un mouton atteint du charbon; deux enne- mis sont en présence, le mouton et les bactéridies qui sont àson intérieur; dans ce cas spécial, la lutte doit se terminer par la disparition totale de l’un des deux partis. Si c’est le mouton qui l'emporte, il sort aguerri de la bataille ; il est réfractaire à une nouvelle infection; si le mouton meurt, les bacté- ridies victorieuses sont préparées à une nouvelle victoire; on dit que leur virulence pour les mou- tons est augmentée. Voilà des faits de Pathologie qui sont à la fois très remarquables au point de vue pratique et très instructifs au point de vue philosophique ; de plus, il est très facile de les raconter dans le langage courant. Pourquoi donc ne pas les introduire dans l’enseignement secondaire, puisque l'on apprend aux jeunes gens des faits de Physiologie qui sont à la fois plus compliqués, moins féconds et souvent moins certains? L'étude de ces phénomènes donnerait, en outre, un moyen très simple d’initier les élèves au langage si précieux de Darwin et de Lamarck. J'inocule à un mouton un mélange de bactéridies différentes; les unes sont virulentes pour le mouton, les autres non. Par définition même de la virulence, les premières prospéreront, les autres disparaîtront; il y aura tri, sélection, comme dit Darwin; étant donné un certain nombre d'individus différents que l'on place dans des conditions particulières, on constate après coup que quelques-uns se conservent et que les autres disparaissent; il y a eu destruction de ceux qui ont disparu et conservation de ceux qui se sont conservés; voilà la vérité de La Palisse, à laquelle se réduitla sélection naturelle, dans laquelle tant de gens ont voulu, après Flourens, voir une providence déguisée. FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES Spencer a employé une expression analogue; il y a, dit-il, persistance du plus apte, c'est-à-dire conservalion de celui qui se conserve aux dépens de ceux qui disparaissent; mais l’on ne connaît Ie plus apte qu'après coup. | J'ai longuement développé ailleurs’ des exemples, tirés de la Pathologie et particulièrement commodes pour montrer la fécondité extrême d’un langage. qui, ne faisant aucune hypothèse, se réduit à une | constatation de résultats. Ce langage ne port naturellement de rien prévoir, mais il donne l’illus sion de la prévision quand on l’applique à la narran tion actuelle de faits historiques passés, à l'histoire de l'origine des espèces aujourd'hui vivantes. Le même mouton nous apprendra le langage de Lamarck:; je l’ai, en effet, déjà employé tout à l'heure, quand j'ai dit que le mouton guéri s’esb habituë à la maladie dont il a triomphé; que, dans le cas de la mort de l'animal, ce sont, au contraire; les bactéridies qui se sont habituées à tuer des moutons. Mais, me direz-vous, il était inutile de faire intervenir Lamarck pour construire de phrases qui sont, tout simplement, du langage cou= rant. C'est, en effet, à une constatation banale ques Lamarck s’est adressé ; il a emprunté à la sagesse des nations cet aphorisme : « les habitudes forment upe seconde nature », et, s’il en a tiré un si grand profit dans l'explication de la formation des espèces c’est que cet aphorisme résume précisément l’obsers vation la plus générale qui puisse se faire sur le êtres vivants. Étant donnée la variabililé incessante des condi tions réalisées autour d’un être vivant quelconque variabilité qui provient de ce que le jour succède à la nuit, le chaud au froid, etc., on peut dire sans exagération que vivre, c'est s'habituer sans cesse à 4 sont par trop nouvelles, il arrive souvent que l'indi vidu meurt; alors, il n’intéresse plus le biologistes d’hui n'a cessé de s’habituer depuis le jour de sa naissance; s’il a été atteint d'une maladie et sil s'en est guéri, il s’est habitué à cette maladie, etes Or, qu'est-ce que s’habituer? C'est sûreme changer. Un individu habitué à un facteur d'action, est différent de ce qu'il était avant de s'y être, habitué. Et, par conséquent, ici encore, le langage individualiste se trouve pris en défaut. Ce langage ne tient compte que des similitudes (elles sont, en effet, plus apparentes); il néglige les différences résultant des habitudes; il n’est pas précis; il n’est pas exact. Je conserve le même nom à un homme, avant et après une maladie; il ressemble beaucoup; 1 V. Traité de Biologie (F. Alcan), S 59. ñ cela est certain, à ce qu'il était d'abord; mais il en diffère aussi, cela est non moins certain; si donc j'en parle comme d'un mécanisme qui n’a pas changé, mon langage manque de précision. Dans le langage courant, dire qu'un être s’est habiluë, cela veut dire que, tout en restant semblable à lui-même, il est devenu différent. Il y a là une contradiction qu'il faut mettre en évidence avec le plus grand soin, au lieu de la cacher comme on le fait quelque- fois. Je crois même que la principale question de méthode dans l’enseignement de la Biologie peut se formuler comme il suit : Dans chaque cas, il faut insister successivement sur les similitudes et les différences. Malgré la banalité apparente de cette règle, il est facile de voir qu'elle est extrêmement importante; quelques exemples vont nous le prouver. ; IT Quand on observe des êtres quelconques, on est ‘plus immédiatement frappé de leurs différences “que de leurs analogies; un chien, un crapaud, un ver de terre et un poirier ne se ressemblent guère, "et pourtant nous disons qu'ils sont tous vivants; la recherche du caractère commun à tant d'objets dissemblables est le point le plus important de la Biologie générale; c’est le problème de la défini- tion de la vie. - Voici, au contraire, des êtres qui se ressemblent “énormément, des moineaux si vous voulez ; ils se ressemblent tellement qu'au premier abord on les \eroit identiques. Ils ne le sont pas, en réalité. Si lon recueille cent mille feuilles de chêne dans une forêt, il n'arrive jamais que deux d'entre elles soient rigoureusement égales. Et, cependant, nous oyons bien que nous devons leur appliquer la n ème dénomination de feuilles de chêne. C’est la question si délicate de la définition de l'espèce. - Un même homme, à deux moments distincts de sa vie, se ressemble à lui même, cela est certain; mais nous avons vu tout à l'heure le danger qui résulte d'une croyance hâtive à une invariabililé qui n'est qu'apparente: le problème de l'évolution individuelle consiste dans l'étude de différences äcquises, mais qui respectent certaines simili- tudes… - Dans la fabrication même de l'être vivant, que d'éléments en apparence dissemblables ! des nerfs, des os, du sang, des muscles! Et, cependant, il y a quelque chose de commun à tous ces éléments; ils portent l’estampille de l'individu auquel ils appar- tiennent. De même, un jeu de cartes est formé de cartes toutes différentes si on les regarde du côté significatif, toutes semblables si on les regarde du coté du dos. Similitudes et différences, tout est là; quelquefois c'est la similitude qui est plus frap- FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES 219 pante, quelquefois c'est la différence; il faut élu- dier les deux. Si cette nécessité est capitale quelque part, c’est surtout dans la question de la multiplication des êtres; c'est dans la reproduction des individus que, suivant le point de vue auquel on se place, on est frappé successivement par les similitudes et les différences. Tout animal ressemble à ses parents, cela est évident; mais il est non moins évident que tout animal diffère de ses parents. Et, par con- séquent, si l’on donnait aux affirmations biologiques la même précision qu'à celles des sciences dites exactes, il y aurait contradiction entre la notion d'hérédité et la notion de variation. Malheureu- sement, on se contente ordinairement, en Histoire naturelle, d’une approximation très vague; je n’en veux pour exemple que la définition de l'espèce dans les traités dont les auteurs sont cependant transformistes convaincus.On y apprend aux élèves que l'espèce est héréditaire, que les enfants sont de la même espèce que les parents, d'où la consé- quence évidente que l'espèce ne varie pas. On leur enseigne ensuite la théorie transformiste, qui veut que les espèces actuelles descendent d'espèces antérieures et différentes, alors que, par suite de la première affirmation, le fils est de l'espèce de son père, qui est de l'espèce de son grand-père, et ainsi de suite, jusqu'à l'ancêtre le plus éloigné. La contradiction est flagrante, et il ne faut pas s'étonner ensuite que beaucoup de gens aient de la difficulté de croire à la transformation des espèces. Cela est, d’ailleurs, infiniment regret- table, car la théorie transformiste devrait aujour- d'hui régner sans conteste sur toute la science: Son adoption par tous les savants dignes de ce nom est le plus grand événement de cet admirable dix-neuvième siècle, pourtant si ferlile en mer- veilles. Je reviendrai tout à l'heure sur cette question de l'importance philosophique du Trans- formisme; je veux montrer d'abord qu'on peut l’enseigner sans difficulté en montrant que l’héré- dité est une Loi approchée. III Nous connaissons bien des lois approchées, en Physiqué par exemple; nous en connaissons assez pour comprendre la signification exacte de cette expression qui paraît si peu précise, le mot Loi et le mot approché semblant contradictoires. Voici d’abord un cas dans lequel une loi approchée peut être le résultat de la superposition d'une loi exacte à une autre loi exactement exacte. Je considère un corps qui tombe; la Mécanique élémentaire m'a appris la formule algébrique de la chute des corps dans le vide; or, si je veux me servir de cette 280 FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES formule pour mesurer la profondeur d’un puits, je trouve un résultat qui n'est pas juste; heureuse- ment, la Physique m'apprend, d'autre part, la résis- tance de l'air au mouvement des projectiles et me permet de calculer le ralentissement qui en résulte dans des conditions données. Je corrige donc ma première formule par une seconde, et j'obtiens ainsi une représentation beaucoup plus satisfai- sante de la chute d’une pierre dans un puits. Pour arriver à ce résultat, j'ai artificiellement décomposé un phénomène parfaitement unique, la chute de la pierre dans le puits, en deux phénomènes imagi- naires qu'il m'est plus facile d'étudier séparément: j'ai employé un procédé que son résultat démontre légitime, et je suis, par conséquent, fondé à essayer d'appliquer le même procédé d'analyse dans d’autres cas. Si j'essaie d'employer la même règle pour la loi de Mariotte, je m'apercois rapidement que, dans l’état actuel de la science, je ne connais pas la ou les formules accessoires qu'il faut lui ajouter dans chaque cas pour la rendre correcte; je suis obligé de m'en tenir à des formules empiriques qui, utiles dans la pratique, ne satisfont pas l’es- prit, mais je puis néanmoins, malgré mon igno- rance actuelle, essayer d'appliquer à la loi de Ma- riotte le langage auquel je suis arrivé pour la chute des corps dans l'air; je puis dire d’une manière générale, quand il s’agit d’une loi aprochée : des expériences répétées au sujet de tel phénomène naturel m'ont prouvé qu'il suit à peu près la loi énoncée dans telle formule; même si je ne connais pas, à l’état isolé, un phénomène qui suive exacte- ment cette loi, je puis énoncer sans danger la loi approchée que j'ai découverte en supposant que le phénomène naturel correspondant est la superpo- sition de deux ou plusieurs phénomènes différents, dont l’un serait représenté rigoureusement par la loi découverte et dont /e ou Les autres ne me sont pas analytiquement connus. Ce langage ne fait courir aucun risque ; il permet un langage à la fois rigoureux et clair; j'ai proposé de l'appliquer en Biologie au cas de la loi approchée qu'est l'héré- dité. Prenons l’hérédité dans son cas le plus simple, dans le cas où, sans aucune complication de forme, elle se réduit à une fabrication de substances chi- miques identiques (?) à la substance vivante active que l’on étudie; dans ce cas, on remplace ordinai- rement le mot Acrédité par le mot assimilation qui veut dire : fabrication de substance semblable. C'est là la propriété vitale par excellence, c’est la seule qui permette de caractériser la vie; mais il faut immédiatement remarquer que, dans la Nature, la loi d’assimilation n'est qu'approchée, sans quoi la variation serait impossible. EL nous arrivons ainsi à définir la vie par une manifestation qui, ordinairement, n’est pas plus rigoureuse que la loi de Mariotte pour le gaz. Cette manifestation de l’activité des substances vivantes est cependant dem première importance, puisqu'elle permet seule de définir la vie; il faut donc l'introduire dans le lan- gage, par le procédé ordinaire des lois approchées La chose est d'autant plus facile que, pour cer- taines espèces au moins, Pasteur et ses élèves nous ont appris à séparer arlificiellement l’assimis lation au sens rigoureux et la variation qui sy superpose dans la plupart des exemples naturels: Nous savons cultiver des bactéridies charbon= neuses sans variation sensible ; d'autre part, nous savonstransformer, sans assimilation concomilante, au moyen d'une immersion dans l’eau pure addi= tionnée d’antiseptiques, les bactéridies ou même leurs spores en des variétés de virulence diffé- rente. Ceci nous permet, lorsque, dans un bouillon; se produit une mulliplication accompagnée de variation, de décomposer le phénomène en deux parties distinctes, comme nous l'avons fait pour la. chute d'un corps dans un puits. J'ai proposé de géné- raliser ce langage et de l'appliquer même aux cas où nous ne savons jamais, expérimentalement, séparer l'assimilation de la variation ; pour ne faire aucune hypothèse, j'ai appelé‘ condition n° 4 l'ensemble des circonstunces dans lesquelles une substance d'espèce donnée assimilerait rigoureusement, réu= nissant sous le nom de condition n° 2 l’ensemble des circonstances entièrement diverses qui font varier cette même substance. De sorte que l'his= toire tout entière d’un élément qui ne cesse pas de vivre se réduit à une succession ou une super position de conditions n° À et de conditions n° 2. G n'est là qu'une manière de s'exprimer, mais c'est une manière de s'exprimer qui permet de raisonnen avec la rigueur des sciences exactes ; grâce à elles il est facile de parler à la fois d'hérédité et de transformisme, sans se heurter à des contradic: tions flagranles. IV On dit souvent qu'il est difficile, sinon impos® sible, d'enseigner le Transformisme dans les cours élémentaires, peut-être à cause de cette contra=. diction qui se manifeste, lorsqu'on n'y regarde pas d'assez près, entre l'hérédité spécifique et la variation des espèces. Mais je vous ferai remarque que l’on enseigne déjà, en dehors de l'Histoire naturelle, des choses qui impliquent des contra= dictions apparentes de même ordre. En Géographie, par exemple, on apprend aux 1 V. Théorie nouvelle de la vie et Traïté de Biologie (op cit). FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES élèves que la Terre est ronde comme une boule et on leur parle ensuile de montagnes et de vallées. On emploie précisément, pour mettre en relief l’orographie d'un pays, un procédé qui peut nous servir de modèle pour l'exposé de la transformation des espèces. On réduit, par exemple, les kilo- mètres en centimètres pour représenter les hau- teurs verticales, tandis que, pour les distances horizontales, on réduit les kilomètres en dixièmes, en centièmes ou en millièmes de millimètre, ce qui revient à exagérer le relief dans la proportion de cent, mille ou dix mille. Et ainsi des pentes qui, sur le papier, ne seraient pas sensibles à l'œil, deviennent prodigieusement rapides. Ce procédé d’exagéralion des reliefs en Géogra- phie, parlaréduction des distances horizontales, est absolument comparable à celui que j'indiquais tout à l'heure en proposant de réduire à une minute, par le moyen du cinématographe, la durée de l’évolution d’un plant de blé depuis sa germi- nation jusqu'à sa mort. Pour la transformation des espèces à travers les époques géologiques, il ne peut plus être question . de cinématographe; mais on peut imaginer une représentation géométrique de l'état d’une espèce à chaque moment de son évolution, et alors, sui- vant la manière dont on représentera les unités de temps, on mettra en évidence soit l'hérédité, soit la variation. Je suppose, par exemple, que l’on puisse faire tenir dans les coordonnées d’un point rapporté à trois axes rectangulaires la définition d'une espèce à un moment de son évolution; un … point de l’espace représentera l’état d'une espèce à … une certaine époque. La succession des points en - fonction du temps représentera l'évolution de - l'espèce dans le temps. Eh bien! si l'on prend - comme unité de mesure du temps, sur l'axe des - temps, une grandeur considérable, l’évolution de l'espèce sera représentée par une ligne droite paral- - lèle à l'axe des temps; on en conclura l'hérédité absolue, sans variation ; on croira voir la condition n° 4. Si, au contraire, on choisit une grandeur très petite pour représenter l'unité de temps, si l’on représente cent siècles par un millimètre, l'évo- lution de l’espèce sera représentée par une courbe très notablement sinueuse; la variation sera mise en évidence au détriment de l'hérédité spécifique ; la courbe sera la démonstration du transformisme. Je sais bien qu'il est impossible de songer à faire tenir dans deux nombres la définition totale de l’état d’une espèce à un moment donné; ce que je viens de dire n'a donc pas d'application pratique et ne peut être considéré que comme un procédé verbal, destiné à montrer le rôle du choix de l'unité de lemps dans l'établissement du transformisme. D'ailleurs, à défaut de cinématographe nous mon- 281 trant en quelques minutes la variation séculaire d'une espèce, nous pouvons réaliser quelque chose d’analogue en supprimant un grand nombre de générations intermédiaires; voici ce que je veux dire : si nous avions les pattes droites de devant de deux cents générations successives de chevaux et si nous en faisions une série, nous pourrions observer cette série sans nous douter de l’exis- tence d'une évolution de l'espèce cheval. Si, au contraire, comme cela est réalisé dans les galeries de Paléontologie, nous juxtaposons une patte de cheval actuel et des pattes de chevaux fossiles ayant un nombre croissant de doigts, nous voyons, aussi bien qu'avec un cinématographe, la variation qui a conduit à la forme actuelle. L'important est que, chez les élèves, la conviction du transfor- misme soit définitivement établie et qu'ils puissent répondre, quand on leur demande s'ils ont vu varier une espèce : « Non, je n'ai pas vu varier une espèce, mais je n'ai pas non plus vu grandir un arbre, et cependant je sais que les arbres gran- dissent parce que j'ai observé plusieurs de leurs formes successives ». \} Le Transformisme n'occupe pas dans l'enseigne- mentactuel la place qu'ilmérite; il devrait dominer tout l’enseignement scientifique, car il a modifié l'opinion que l'homme s'était formée au sujet de sa propre nature; pour un transformiste convaincu, la plupart des questions philosophiques qui se posent naturellement à l'esprit humain changent de sens; quelques-unes n'ont plus de sens du tout. Avant d'essayer de montrer le bien-fondé de cette assertion, il n’est pas inutile de dire pourquoi, à notre époque, si peu de gens mérilent, dans son acception entière, la dénomination de transfor- mistes, pourquoi, en d'autres termes, si peu de savants vont jusqu'au bout du Transformisme, acceptent les conséquences entières de la théorie nouvelle. Et il ne sera pas sans intérêt de montrer que Darwin, le fondateur ou au moins le restaura- teur etle vulgarisateur du Transformisme, a adopté, l'un des premiers, la méthode défectueuse qui devait empêcher cette doctrine de donner tous ses fruits. Je commençais celte causerie en mettant avant toute autre préoccupation celle d’écarter de l'esprit des élèves toute idée. de l'existence d’entités sta- tiques en Biologie. Malheureusement, les hommes en général n’observent pas la vie au cinémato- graphe et voient à chaque instant les êtres vivants comme s'ils étaient morts. Aussi ont-ils peuplé l'Histoire naturelle de ces entilés déplorables que l'on appelle les caractères des animaux et des 282 végétaux, les caractères étant les éléments dans lesquels on peut décomposer la description actuelle d'un individu. Avec le cinématographe, on montre que ces caractères ne sont que des apparences successives comparables aux vagues de la mer; mais, dans le langage courant, ils deviennent des éléments constitutifs comparables aux pierres d’une maison! Un homme est formé avec des entités qui s'appellent : nez, bouche, œil, pied, poils, logique, intelligence, conscience morale, sentiment reli- gieux, elc., comme un palais est formé de marbre, de planches, d’ardoises, de fenêtres, etc... » Dar- win et, après lui, Weismann ont donné à ces entités staliques une existence définitive en sup- posant que chacune d’elles' est représentée par une particule infiniment petite qui est capable de la reproduire. Ces particules hypothétiques et invisibles, que Darwin appelait gemmules, avaient pour but de donner des faits d’hérédité une expli- cation analogue à celle que fournit la théorie ato- mique aux phénomènes de la Chimie. Après avoir donné une vie nouvelle à la théorie transformiste qui, comme nous le verrons tout à l'heure, devait changer le sens du mot explication et débarrasser l'esprit humain des soucis métaphysiques, le grand évolutionniste anglais a été victime de la nature humaine qui était en lui et, cherchant à fournir une explication de l'hérédité, il a failli renverser le merveilleux édifice. qu'il avait lui-même construit ; heureusement, l’absurdité des particules repré- sentalives était évidente! Ceux qui ont adopté ce système, dont les esprits peu philosophiques tirent tant de satisfactions verbales, doivent, par là même, changer du tout au tout leur conception du Transformisme. Du moment qu'il y a dans les êtres des entités constitutives représentées par des par- ticules, ces entités ontexisté de tout temps (comme Weismann le dit expressément dans sa théorie des plasmas ancestraux), et, par conséquent, l’évolution des espèces ne nous apprend pas la genèse du nez, de la bouche, de la logique, de la conscience mo- rale, etc.; il y a eu en tout temps des nez, des bouches, des logiques, desconsciences morales, etc., et l'évolution des espèces n’a consisté que.dans le remaniement des groupements fortuits de ces diverses entilés. Avec cette manière de voir, le Transformisme est une théorie insignifiante ; il n'y a pas eu, dans l’évolution des espèces, apparition, acquisition de caractères transitoires (et Weismann a nié, en effet, l'hérédité des caractères acquis; il aurait dû nier également l'acquisition même de ces caractères), mais groupements variables de carac- tères éternels. La création immédiate de toutes les espèces estaussi satisfaisante; le système des par- { Ou au moins des entités de même ordre. Cu FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATU RELLES ticules représentatives enlève toute portée philoso= phique à la théorie transformisle. Et cependant, à cause des satisfactions verbales qu'il donne, il a eu un grand succès; ilen a encore. Un de mes amis, professeur dans une université de province, m'écrivait dernièrement à peu près ceci: « Vous avez raison et je trouve avec vous que le système de Weismann n’a pas le sens commun; mais il est si commode au point de vue pédago- gique que je l'emploie dans mes cours, quitte à faire remarquer ensuite aux élèves combien il est peu philosophique ». IL est inutile d’insister sur ce que cette méthode a de défectueux, mais il faut constater que le langage weismannien est employé aujourd'hui dans presque tous les travaux de Bio- logie ; et, lorsqu'on aura laissé prendre aux jeunes l'habitude de ce langage, ils ne pourront plus s’en passer et ne seront plus capables de se débarrasser du système qui y correspond. Je ne voudrais pas comparer à la féconde théorie des atomes en Chi- mie le prodigieux échafaudage que Weismann a construit sur des bases illégitimes; mais supposez pour un instant que, chose tout à fait invraisem- blable, on découvre aujourd'hui des faits qui obli- gent de rejeter la théorie atomique, quel ne serait pas le désarroi de la plupart des chimistes? Ils ne sauraient plus parler? Puisque nous savons que le système des particules représentatives est mau- vais, ne laissons pas prendre aux élèves l'habitude du langage correspondant; évitons-leur immédia- tement l'ennui inévitable auquel ils seront acculés quand ils devront renoncer à une manière de s'ex- primer devenue très familière. VI Renonçant aux entités statiques que l’on a voulu trouver dans les êtres vivants et représenter par des particules, acceptons donc dans son entier la théorie transformiste, et n'oublions jamais que, même lorsque la lenteur de leur évolution nous les fait apparaître comme des choses mortes, les pré- tendus caractères des animaux ne sont que des as- pects successifs comparables aux vagues de la mer. Les conséquences philosophiques de cette méthode d'enseignement seront immédiates. Non seulement les élèves ne se demanderont plus s’il y a dans l'être vivant inerte un principe créateur de mouvement, puisqu'il sauront que ce qu'on appelle être vivant estune succession de manifestations ininterrompues d'une activité incessante ; ils en retireront encore le grand avantage de ne pas tomber dans l'erreur individualiste et de ne pas se laisser prendre aux raisonnements fallacieux qui, pour douer l'être de liberté absolue, le considèrentcomme identique àlui- même à deux moments différents de son existence, “ & | | | FÉLIX LE DANTEC — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES NATURELLES . ce qui est impossible! Ils comprendront, d’ailleurs, immédiatement que toutes lesnotions absolues de l’ancienne métaphysique ne peuvent correspondre à rien de significatif pour l'homme, résultat du frottement et de l'adaplation au milieu extérieur d'une série continue des générations; ils ne consi- déreront plus l'esprit humain comme une entité de l’ordre de celles que représentent les particules de Darwin et de Weismann, mais ils comprendront - que la logique humaine est le résumé héréditaire de l'expérience ancestrale; ils sauront, en même temps, quelles sont les bornes de cette logique et “comment la sélection naturelle nous assure qu'elle est d’un bon usage pour les hommes qui en sont « doués. Et, puisque la connaissance que nous avons “du monde résulle des actions réciproques des “agents naturels et de notre propre individu, cette connaissance est à l'échelle humaine: nous n'avons “plus à nous demander quelle est l'essence des phé- nomènes extérieurs, car cela voudrait dire « connaissance de ces phénomènes par un être qui n'aurait pas sa place, son échelle, au milieu … d'eux »; nous ne savons plus ce que c'est que actuels, a donné BR connaitre, s'il ne s'agit pas d’un être vivant qui connait et qui connait forcément le monde à son échelle ; il n’y a plus d’absolu.… J'ai développé ces considérations dans un livre récent! et je me contente de les signaler ici:Je vou- drais seulement montrer, en terminant, que la théo- “rie transformiste, en nous permettant de faire la “narration historique de la genèse des phénomènes au mot « pourquoi? » une signi- fication nouvelle. Et cela n'est pas sans intérêt si 4 Les lois naturelles, Alcan, 1904. 283 l'on remarque que, bien souvent, la forme seule d'une question appelle une réponse comprise dans l'énoncé même de la question; quand on dit par exemple : « Qui a créé le monde? », cela ne lai de choix que relativement à l'être qui l'a créé; mais il faut qu'un être l'ait créé! Vous vous souvenez peut-être que, quand vous étiez enfant, on vous posait la question insidieuse suivante : « Pourquoi les meuniers ont-ils des cha- peaux blancs? » J'y ai été pris comme tout le monde, et après que j'eusse offert l'explication phy- siologique ou chimique : « parce qu'il y a de la fa- rine sur leurs chapeaux », ou l'explication histo- rique : « parce qu'ils sortent du moulin où il y a de la farine », on m'a répondu tout simplement par l'explication finaliste : « pour se couvrir la tête »; et j'ai conservé, depuis, une salutaire défiance relative- ment aux acceptions multiples du mot pourquoi et du mot explication. Eh bien, la théorie transformiste nous permet de substituer, aux explications physio- logiques des faits actuels, une narration historique que l’admirable langue de Lamarck et de Darwin rend possible dans tous les cas. Voilà pourquoi le Transformisme doit être consi- déré comme ayant renouvelé l'esprit humain; voilà pourquoi, si on l'enseigne intégralement, avec toutes ses conséquences, il ruinera toute l’an- cienne philosophie et en créera une nouvelle; et c'est justement ce qui fait qu'il n’a pas encore dans l’enseignement la place qu'il mérite; c'est que, comme l’a fait remarquer Huxley, le Transformisme oblige les hommes à réviser toutes leurs convic- tions, et les hommes n'aiment pas ça ! Félix Le Dantec, Chargé de cours à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris. sse ET INDEX renouvela la science de l'étendue en fournissant aux mathématiciens les méthodes générales qui leur avaient 284 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Zeuthen (H.-G.). — Geschichte der Mathematik im xvi. und xvu. Jahrhundert. Deutsche Ausgabe von RapxaEL MEYER. 4 vol. in-8° de VIII-434 pages. (Prix: 16 Marks). B. G. Teubner, éditeur, Leipzig, 1904. Après avoir donné quelques renseignements biogra- phiques sur les mathématiciens dont il va analyser les travaux, l’auteur aborde l'œuvre des algébristes ita- liens du xvie siècle, qui découvrirent le calcul des ima- ginaires et parvinrent Jusqu'à la solution des équations générales du troisième et du quatrième degré. Ces nouvelles méthodes seraient dues principalement à Scipion Ferro, qui mourutsansles publier. Toutefois, il confia sa formule à Antoine Fiore, qui s’en servit pour proposer des problèmes à différents géomètres et, entre autres, en 1535, à Tartaglia. On doit à ce dernier savant le procédé de résolution des équations du troisième degré, qu'il eut l’imprudence de communiquer à son rival Jérôme Cardan, et ce dernier, malgré les promesses les plus formelles relativement au secret, l’inséra dans son Ars magna (1545), avec l'extension à l'équation du quatrième degré qu'avait trouvée son élève Ferrari. Un peu plus tard, le Traité d'Algèbre de Bombelli (1572) vient dignement clôturer la série des ouvrages de l'illustre Ecole italienne, en commentant magistrale- ment les acquisitions de ses prédécesseurs immédiats. Cependant, il faut arriver à Viète (1540-1603) pour voir l’Algèbre moderne s'édifier. 11 commenca d'abord par remplacer les termes connus par des voyelles A, E, I, 0, U, Yet les inconnues par des consonnes B, C, D, F. Les puissances de ces dernières étaient indiquées par les mêmes lettres avec un des indices g, e (abréviations de quadratum etde cubus) combinés par addition des expo- sants. Puis il exposa de main de maître la théorie géné- rale des équations. Là se reconnait la griffe de lion. Ce n'est pas une ébauche : «la science de bien trouver en Mathématiques ‘» s'élève tout à coup à une hauteur ines- pérée. On y trouve les méthodes encore usitées aujour- d'hui, les relations entre les racines positives et les équations du second degré et des formules générales pour résoudre, dans certains cas, celles du troisième et du quatrième degré. Les successeurs de Viète ont per- fectionné son œuvre. Ils remplacèrent ses notations, parfois assez compliquées, par des symboles plus élé- gants où plus généraux, mais les fondements de ses géniales conceptions sont restés. Puis vint la période d'or de l’histoire des sciences, illustrée par les Képler, les Cavaliéri, les Néper, les Fermat, les Descartes, les Huygens, les Roberval, les Wallis, les Pascal, les Leibniz et les Newton. Néper décrivit sa célèbre découverte des /ogarithmes dans sa Logarithmorum canonis deseriptio, publiée en 1614. Le procédé du savant écossais n'indique pas, d'ail- leurs, une connaissance des Mathématiques aussi pro- fonde qu'on le croirait ; il n'avait certes pas entrevu les analogies entre ses logarithmes et les aires de l'hyper- bole équilatère comprises entre cette courbe et ses asymptotes. De son côté, le grand astronome Képler fit beaucoup pour la propagation en Allemagne de la doc- trine népérienne, tandis qu'Henri Briggs ne tardait pas à se rendre compte de tout le parti qu'on pouvait tirer de cette précieuse invention. Il fit même un voyage pour conférer avec Néper à ce sujet et, probablement, lui sug- géra le choix de 10 comme base. Par la publication de sa Géométrie (1637), Descartes LE ARE ! C'est ainsi que Viète nomme J'Algèbre. manqué jusqu'ici et dont le défaut frappait de stérilité leurs plus louables efforts. Effectivement, les courbes découvertes par les Grecs au fur et à mesure des besoins n'étaient reliées entre elles par aucune relation. Des= cartes sentit la nécessité d'apporter quelque ordre dans ce domaine. Il fallait d'abord arriver à définir ces figures, ou, en d’autres termes, poser les règles permet= tant de les construire. Tout se ramenait, somme toute, à fixer d’une manière précise la position d'un point dans un plan. Or, celle-ci ne dépend que de deux élé= ments,ses coordonnées. Donc, la définition d’une courbe, autrement dit son équation, n’est pas autre chose que la relation entre les coordonnées de ses points. Il est aisé alors d'établir des formules générales s'appliquant ensuite à tous les cas particuliers. Quant à Fermat, «le premier homme du monde » au dire de Pascal, il se distingua surtout dans l’Arithmé-= tique supérieure. Sphinx impénétrable, il sut s’y frayer des routes qu'aucun savant n’a encore pu retrouver, malgré les ressources modernes. C’est un privilège sans exemple dans les annales de la science. Dans un autre “ordre d'idées, le nom de Fermat est intimement lié à celui de Pascal parmi les inventeurs du Calcul des pro- habilités; au seul cas particulier. de la théorie des hasards envisagé par l’immortel auteur des Provin- ciales, celui-ci substitua un corps de doctrine parfaite- ment ordonné. Dès lors, une science, sans racines dans le passé, se trouvait fondée. La méthode cartésienne fut l'origine d’une multitude de travaux au cours du xvu® siècle. De Sluse perfec- tionna le mode de construction des racines des équa- tions algébriques par l'intersection des courbes; Wallis se servit des exposants fractionnaires et négatifs ; puis apparut la méthode des indivisibles, imaginée par Cava- lieri, et qui, bien oubliée aujourd'hui, est néanmoins curieuse, car elle jette le pont entre le procédé d'exhaus- tion d’Archimède et l'analyse newtonienne. Délaissons les travaux de Roberval, qui imagina un principe général pour résoudre le problème des tan- gentes aux courbes, et la théorie des développées à laquelle Huygens attacha son nom, pour aborder la grande découverte de l'Analyse infinitésimale, que Leib- niz et Newton partagent la gloire d'avoir inventée. M. Zeuthen montre la part qui revient à chacun d'eux dans cette immortelle conquête (p. 357-413). Les éru= dites discussions du savant professeur de Copenhague peuvent, d’ailleurs, se résumer en ces lignes de Joseph Bertrand, que nous transcrirons ici, car, à notre avis, on ne saurait plus justement clore le débat : « Quoique la publication de Newton ait été postérieure à celle de Leibniz, il est prouvé qu'il ne lui doit rien; mais tout porte à croire qu'il ne l’a aidé en rien .. Si Newton, plus diligent, avait formulé dix ans plus tôt sa Théorie des {luxions, le nom de Leibniz resterait un des plus grand dans l’histoire de l'esprit humain ; mais, tout en le comp=« tant parmi les géomètres de premier ordre, c'est à ses idées philosophiquesetà l'universalité de ses travaux ques la postérité attacherait surtout sa gloire. Si Leibniz, au contraire, abordant plus tôt l'étude des Mathématiques, avait pu ravir à son rival l'honneur de leur commune découverte, on n'admirerait pas moins, dans le livre des Principes, avec la majesté des résultats obtenus, l'incomparable éclat des détails; et, en perdant ses droits à l'invention de la méthode qui s'y trouve employée avec tant d'art, Newton resterait placé au rang qu'il occupe aujourd'hui parmi les géomètres : je veux dire à côté d’Archimède et au-dessus de tous les autres. » BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Une nouvelle ère s'ouvrait donc pour les mathéma- tiques, ainsi que M. Zeuthen le fait nettement res- sortir dans les dernières pages de son livre rempli de yues très personnelles. JacQuEs Boxer. Lecomte Denis (Maurice), /ngénieur civil des Mines. — Utilisation pratique et complète d’une chute d’eau pour tous les services d’une exploitation minière. — { vol. in-8° de 96 pages avec 46 figures. (Prix : 4fr.). Veuve Ch. Dunod, éditeur. Paris, 1904. Le Congrès de la Houille blanche, tenu à Grenoble, en 4902, a mis à l'ordre du jour l'emploi des chutes d'eau. Une Commission extra-parlementaire étudie, en ce moment même, les questions multiples etcomplexes qui s’y rattachent. Il est probable que de tous ces efforts sortira une utili- sation meilleure de l'énergie que les cours d’eau met- … tent à notre disposition. Mais ce serait une erreur de croire que cette utilisation est à peu près gratuite; bien — au contraire, les travaux d'aménagement sont toujours coûteux, et souvent ils demandent à être bien conduits pour rester dans des limites de prix acceptables. Pour la réalisation de ces travaux, les guides techni- . ques sont rares. M. Lecomte-Denis a comblé la lacune, en ce qui concerne l'utilisation d'une chute pour les services d’une exploitation minière; on comprend, du reste, que les indications données par lui en l'espèce soient, pour la plupart, d'une application générale. L'ouvrage est divisé en deux parties : dans la pre- mière, sont passés en revue les divers éléments du problème et sont indiqués les moyens de transporter électriquement l'énergie captée; dans la seconde, est décrite l’utilisation de la chute de Clauzel (Ardèche), telle qu'elle a été exécutée cette année même par l’au- teur. L'ingénieur qui aura à recueillir l'énergie d'une chute trouvera dans ce livre des renseignements fort utiles. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. + 2° Sciences physiques —… Belloc, Chef des Travaux de Physique à la Faculté - des Sciences de l'Université de Caen. — Thermo- - électricité du fer et des aciers (T'hëse présentée à la Faculté des Sciences de l'Université de Paris). — 4 vol. in-8°. Gauthier- Villars, éditeur, Paris, 1904. M. Belloc s’est proposé de préciser celles des trans- formations du fer auxquelles la méthode thermo-élec- trique est sensible, et de faire ressortir les indications qu'elle est capable de fournir. Le métal que l'auteur associe au fer ou à l'acier est le platine; le thermo- _ mètre employé est le couple Le Châtelier; l'enceinte “ qui contient la double soudure chaude est de dimen- sions assez restreintes pour pouvoir être entourée de spires de platine et chauffée électriquement; le vide y … est constamment maintenu afin d'empêcher l’oxyda- - tion et la carburation. M. Belloc a opéré sur un échan- — tillon de fer et onze échantillons d'aciers préparés par les usines d'Unieux et d’Assailly ; il a relevé les f. 6. m. thermo-électriques de 20° en 20° jusqu'à 1.100°. La f. 6. m. thermo-électrique E étant une résultante complexe - d'effets thermiques, l’état de la soudure chaude est mieux défini par la considération de la dérivée STE Les CITE courbes en = présentent toutes une même allure carac- téristique. Sans parler d'un minimum commun vers 400°, il existe un maximum particulièrement intéressant, car sa valeur absolue et aussi la température à laquelle il a lieu dépendent de la teneur en carbone. Ce maximum est invariablement suivi d’un minimum corrélatif, qui diffère du maximum d'une quantité constante et se produit régulièrement 120° plus haut. Pour préciser la signification du maximum, M. Belloc détermine direc- tement les points de transformation a, 2,a,, des mêmes échantillons en appliquant exactement la méthode de 285 refroidissement de M. Osmond. Il établit ainsi que le ma- ; dE Fe : ximum des courbes en RTE dont la position varie de 8502 à 700°, en passant du fer pur aux aciers durs, coïncide toujours sensiblement avec le point le plus élevé a,, parfois avec une légère avance. La méthode thermo-électrique permet donc de mettre en évidence isolément ce point 2, et d'en manifester l'existence dans n'importe quel acier. Elle pourrait servir à carac- tériser la teneur en carbone. Mais, surtout, il ressort de là que a, est le commencement d'une modification iso- mérique qui se produit de la même manière dans le fer libre et dans la martensite, élément constitutif des aciers quand, à haute température, le carbone est à l'état dissous (carbone de trempe.) D'ailleurs, l'auteur a pu suivre ces changements d'état moléculaire pendant toute leur durée, et en montrer la réversibilité. Sur les courbes de f. 6. m., ils donnent naissance à un cycle dont le point de départ est le point a, ; la courbe obte- nue par refroidissement n'est pas superposable à Ja courbe d'échauffement. L’allure particulière du cycle, qui correspond, non pas à un retard, mais à une avance, semble établir que, dans la transformation allotropique qui commence à partir de a4,, les deux états, fer « et fer $, coexistent ; et que, quand on procède par échauf- fement, la proportion de fer « demeure supérieure à celle qui correspondrait à l'équilibre chimique, tandis que, dans le refroidissement, le phénomène est inverse. Ces résultats se trouvent, d'ailleurs, confirmés par les recherches de M. Harisson. Les cycles ne se manifes- tent plus au delà de 1.250°, démontrant par là que la transformation allotropique du fer est terminée; et cette limite est approximativement la température du point critique a, de MM. Hall et Curie. Les recherches relatives aux cycles exigent une longue durée de chauffe et portent essentiellement sur le fer, car, dans le cas des aciers, les expériences sont troublées par la décar- buration spontanée, dont l’auteur a fait à ce propos une étude spéciale. La décarburation progressive d'un acier, lorsqu'il est chauffé au delà de 920°, se produit toujours, dans quelque milieu que se trouve le métal, qu'il s'agisse d'air sec, d'hydrogène, ou même d’un vide très parfait. Elle est déterminée par la présence de gaz occlus. Lors- qu'on se place dans des conditions telles que ces gaz aient été éliminés, il se produit un phénomène inverse, une surcarburation résultant d'une volatilisation du fer dans le vide; cette volatilisation est assez notable pour produire sur les parois du ballon une couche opaque très résistante et miroitante, analogue aux dépôts obtenus par M. Houllevigue par projection catho- dique du métal. Enfin, en présence des résultats, si importants au point de vue industriel, que la méthode thermo-électrique a fournis à Barus et Strouhal sur la trempe et le revenu, l’auteur à cherché à étendre ces recherches. 11 a montré qu'il n’est plus nécessaire de recourir à l'adjonction d'un métal étranger. Il suftit, pour constituer le couple, d'associer à l'acier dur, trempé et revenu, le même acier recuit. Les courbes obtenues s'étagent régulièrement suivant la température du re- venu, et sufliraient déjà, à elles seules, à caractémser ce revenu. De plus, elles mettent nettement en évidence le point de recalescence (4, a, a, confondus en un seul dans les aciers durs), qui, sur toutes les courbes de revenu, se traduit par un même crochet et exactement à la mème tempérture. E. Hop, Professeur à l'École Navale. Ducloux (E. Herrero), Professeur suppléant à la Fa- culté des Sciences de Buenos-Aires. — Tratado elemental de Quimica. T'omo 1 : Quimica inorga- nica. Tomo II : Quimica organica. — ? vol. in-8 de 382 et 352 pages avec fiqures. Angel Estrada et C®, éditeurs. Buenos-Aires, 1904. Comme la Æevue le rappelait dans une récente chronique, l'Amérique latine a, pendant longtemps, 1 Les livres pour l'enseignement secondaire et universi- 286 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX emprunté ses ouvrages d'enseignement scientifique, secondaire et supérieur, à l'Europe ou aux Etats-Unis, dont les traités classiques; traduits en espagnol, ont fait l'éducation de nombreuses générations d'élèves, de Mexico jusqu'à Buenos-Aires. Cependant, peu à peu, une littérature scientifique nationale s'est développée dans ces pays, et c'est l'un de ses produits, le Traité de Chimie du Professeur Ducloux, que nous présentons aujourd'hui au lecteur. Il s'agit d'un ouvrage élémentaire, très analogue aux nôtres, et auquel, cependant, l’auteur a su donner l'empreinte de sa personnalité. Il a eu surtout en vue d'éveiller chez l'élève l'esprit d'observation, de lui faire sentir la nécessité de connaître le comment et le pour- quoi des mille phénomènes de la vie ordinaire qui s’accomplissent sous ses yeux, et de détruire le senli- ment d’antipathie vis-à-vis de la Chimie qui est assez commun chez le jeune homme; nous pensons qu'il y a réussi par une exposilion claire et précise et un enchai- nement judicieux des faits. Au point de vue de l'exécution matérielle, les deux volumes n’ont véritablement rien à envier à nos livres français. L'ouvrage nous paraît donc appelé à prendre une place honorable dans l’enseignement de la Chimie dans la République Argentine et dans les pays voisins. Louis BRUNET. 3° Sciences naturelles Brasil (L.). — Contribution à la connaissance de l’appareil digestif des Annélides Polychètes. L'épi- thélium intestinal de la Pectinaire. (Thèse de doctorat ès-seiences. — 1 vol. in-8°. Schleicher et Cie, éditeurs, Paris, 1904. ; Cette excellente thèse n’est pas une simple monogra- phie. On n’y trouve pas seulement la description des dispositions spéciales qui distinguent l'appareil digestif chez les Annélides polychètes en général, et chez la Pec- tinaire en particulier ; mais les faits décrits par l’auteur sur le matériel qu'il a employé servent de documents pour la discussion de plusieurs questions générales d'Histologie. Ce Mémoire appartient donc à la très esti- mable catégorie des travaux d'Histologie zoologique. Après avoir discuté les critères qui peuvent être em- ployés pour la désignation des différents segments du tube digestif, l’auteur décrit successivement les carac- tères histologiques de ces segments. Dans l'intestin moyen, on distingue trois sections (opographiquement et macroscopiquement différentes; cette division est confirmée par des caractères histologiques différentiels. La première section comprend elle-même trois divi- sions : la région des glandes claviformes, la région des diverticules cellulaires épithéliaux; la région, enfin, des cellules à racines ciliaires divergentes. La première est caractérisée par l'existence, entre des cellules cei- liées, qui forment la majeure partie du revêtement épi- thélial, de cellules glandulaires claviformes analogues à celles qu'on trouve chez beaucoup de Polychètes à l'origine du tube digestif; ces cellules glandulaires pro- viennent d'une différenciation dégénérative des cel- lules ordinaires. Dans la région suivante, celle des diverticules cellulaires épithéliaux, existent des diver- ticules cellulaires rappelant ceux que Eisig a décrits chez les Capitellidés. La troisième région est tapissée par des cellules ciliées remarquables à divers titres. Les cils ne couvrent pas tout le plateau cellulaire et n’en occupent que la région centrale; ils s'articulent sur de hauts et puissants bâtonnets, insérés chacun sur un gros granule basilaire; de chacun de ces granules part une racine ciliaire; l’ensemble des racines forme un éventail très régulier; enfin, les points de la surface cellulaire qui sont privés de cils sont munis d'une bor- dure en brosse ordinaire. La deuxième section de l'intestin moyen est parcou- taire aux Etats-Unis, dans la Revue du 30 décembre 1904, t. XV, p. 1114. rue par une gouttière vibratile longitudinale. Son épi- thélium, en dehors de cette gouttière, renferme quatre formes de cellules : cellules à ferment, cellules à sécré- tion muco-graisseuse, cellules à contenu fibrillaire, cellules à sécrétion muqueuse. Les cellules à ferment sont les plus nombreuses ; elles sont pourvues ou non de cils; outre les grains de zymogène, elles peuvent contenir des corpuscules de graisse. Des cellules ana logues se trouvent dans les cæcums intestinaux}de l’Arénicole. Dans l’une et l’autre espèces, le matériel de sécrétion se forme aux dépens de la chromatine nu- cléaire et du nucléole. Les cellules à sécrétion muco- graisseuse sont caractérisées par la présence, au voisi= nage du noyau, d'une masse hyaline renfermant un ou plusieurs corps contournés en forme de boudins. Les cellules à contenu fibrillaire doivent leur nom à des faisceaux de filaments chromophiles sitüés dans leur cytoplasme. Les cellules à sécrétion muqueuse pas raissent être le terme d’une involution, dont les deux espèces cellulaires précédemment citées seraient les deux premiers stades. La troisième section de l'intestin moyen et l'intestin postérieur n’offrent pas de disposition particulièrement intéressante. L'auteur, après cette description histologique, con- sacre un chapitre à l'examen de plusieurs questions générales de Cytologie. Il examine, tour à tour, les cils, la sécrétion, la dégénérescence cellulaire, la rénova= tion épithéliale. Sur la question des cils, il insiste sur ce que les cils sont indépendants des bordures en brosse; les deux appareils sont d'ordre différent. Les cellules à racines ciliaires divergentes, dans la troisième région de la première section intestinale moyenne, montrent côte à côte les cils et la bordure en brosse, et prouvent ainsi l'indépendance des deux formations; dans ces mêmes cellules, le cil n’est pas inséré sur un bätonnet de la brosse, mais sur un bâtonnet spécial, « le bâtonnet cili- fère », ce qui confirme l'indépendance de la brosse et des cils. Les granulations basilaires des cils sont dis- tinctes, d'ailleurs, de celles de la brosse. Les racines ciliaires, qui sont constantes à la base des cils, font partie intégrante de l'appareil vibratile ; leur disparition coïncide avec la dégénérescence du cil mobile ; leur im-= portance massive est en rapport avec l’activité du cil; c'est là tout ce que l’auteur veut dire de leur significa= tion physiologique. Quant à la sécrétion, elle se fait par des expulsions nucléaires directes du matériel de sécrétion, dont l’ori- ginesest fournie par la chromatine nucléaire et par le nucléole; les corps expulsés peuvent figurer dans le cy= toplasme sous la forme de « Nebenkerne ». La sécré= tion peut aussi se faire par l'intermédiaire d’inclusions fibrillaires comparables aux formations ergastoplas= miques, signalées par l’auteur dans certaines cellules La dégénérescence cellulaire est la conséquence iné= vitable d'une sécrétion qui est presque toujours holo= crine. La dégénérescence nucléaire s'opère par pyc= nose, caryorhexis ou chromatolyse. La cellule vieillie peut être expulsée en totalité (noyau en chromatolyse)s elle peut aussi s'atrophier sur place (noyau en pyenose ou en caryorhexis). ; L'épithélium, par suite de cette dégénérescence, doit être le siège d'une rénovation continuelle, dont l’inten= sité est en rapport avec celle de la sécrétion et dela dégénérescence que celle-ci entraîne, La régénération se fait par voie mitotique, aux dépens d'éléments su. perliciels; les cellules-filles conservent un caractère embryonnaire et sont aptes à se diviser ultérieurement à nouveau, ou bien se différencient en cellules glan=« dulaires ou trophocytes, qui, après avoir sécrété, dégé- L néreront. Quant aux amitoses, elles donneront lieu à des cellules dont les noyaux finiront par subir la dégé=" nerescence, * L'auteur a fait sur l’action du suc intestinal de lan Pectinaire des expériences, desquelles il résulte que cen sue contient une amylase, une trypsine et probable BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 287 ment une lipase. Quant aux graisses que renferment les cellules à ferments de l'épithélium, elles ne sont pas une sécrétion digestive, mais une réserve nutritive accumulée dans cet épithélium. Avec sa sécrétion de ferments agissant sur les trois catégories d'aliments (hydrates de carbone, substances protéiques, graisses), avec l'accumulation dans son épithélium de réserves nutritives (graisse) et de produits d’excrétion (concré- tions urinaires et pigments), l'intestin des Polychètes est un appareil digestif complet. La localisation de tous les phénomènes digestifs dans sa paroi et dans sa cavité en font un appareil digestif primitif. L'auteur se livre à des considérations générales intéressantes au sujet de la place phylogénique de l'intestin des Polychètes. Chez la Pectinaire, toutes les fonctions digestives de sécré- tion et d'absorption sont accumulées dans l'intestin moyen; chez d'autres Polychètes (Arénicole,Aphrodites), … des cœcums intestinaux se chargent d'une partie de - ces fonctions, pour laquelle, chez les Mollusques, il apparaît un organe spécial, le foie. L'ouvrage de M. Brasil se termine par un important chapitre de Parasitologie. Trois Sporozoaires parasites y sont décrits: Urospora lagidis, Joyeuxella toxoides, et une troisième forme innommée. La forme végétative d'Urospora vit dans le cœlome ; l’enkystement se fait . par couples, etla fécondation est hétéro-sexuelle, comme chez les Stylorhynchus et Pferocephalus. L'auteur examine la question des rapports des Grégarines et des amibocyles : les phagocytes sont indifférents vis-à-vis de la forme végétative cœlomique ; ilsle sont aussi vis- à-vis des kystes, autour desquels ils s’amassent sans y pénétrer. La mobilité des formes végétatives n’est pas … suffisante pour expliquer la répulsion des amibocytes; contre Siedlecki et avec Guénot, l'auteur admet comme plus probable l’action d’une sécrétion défensive du para- site. Le Sporozoaire Joyeuxella toxoides se présente sous - deux types : une forme grêle, offrant des phénomènes de multiplication schizogonique, et une forme trapue, qui serait un stade de multiplication sexuée. Un para- » graphe intéressant est consacré à l’action des parasites * sur les cellules de l’épithélium intestinal, observée sur « le Sporozoaire indéterminé, et surune autre Grégarine, je Doliocystis pellucida, parasite du Lipephile cultri- AI fera, qui détermine l'hypertrophie de la cellule épithé- liale sur laquelle elle s'implante. A. PRENANT, ï Professeur à l'Université de Nancy. Féré (Ch.), Médecin de Bicétre. — Travail et Plaisir. Nouvelle études expérimentales de Psycho-méca- nique. — 1 vol. grand in-8° de 476 pages et 200 fiqu- res. (Prix : 12 francs). Alcan, éditeur. Paris, 1904. - Dès le début du livre, M. Féré s'élève contre ceux qui ont représenté le travail, soit intellectuel, soit manuel, “comme une charge à laquelle l'homme puisse avoir inté- rèt à se soustraire. Le travail est une nécessité biologi- “que, dans laquelle peut se trouver le véritable bonheur. …_ L'expérimentation permet de rechercher dans quelle mesure les conditions de travail sont liées aux sensa- tions de plaisir, et ce sont les résultats de nombreuses études entreprises sur ce sujet que M. Féré a réunis dans le volume qu'il vient de publier. _ La méthode employée consiste à tracer des courbes “de fatigue au moyen de l’ergographe de Mosso, c’est-à- dire à soulever un poids un nombre de fois suffisant pour arriver à la fatigue complète, à l'impossibilité d'un nouveau soulèvement. À ce moment, on évalue le travail roduit. En répétant cette même opération, tantôt dans les conditions normales, tantôt sous l'influence d'une excitation étrangère dont on veut apprécier l'effet, on peut évaluer l’action de cette excitation sur la produc- tion de travail. . En opérant ainsi, M. Féré a réuni une quantité énorme de documents qu'il serait impossible de relater ici. Le rythme suivant lequel s'exécute un travail a une grande influence sur la quantité de travail produite. Bien des peuples et travailleurs ont trouvé cela empiriquement, et accompagnent cerlaines occupations d’une cadence dont la fréquence leur a été démontrée plus favorable. Les temps de repos doivent aussi être convenablement répartis pour donner lieu au meilleur rendement dans la durée totale; il est bon de ne pas arriver à la fatigue avant ce repos, si l'on veut qu'elle ne fasse pas trop sentir son effet sur la période de travail suivante. Il est remarquable de constater que des influences au premier abord minimes peuvent avoir un etfet très marqué. Ainsi, le seul fait d'éclairer le travailleur avec des lumières de couleur variée ne donne pas le mème résultat quelle que soit la couleur. Le rouge parait très favorable au début, mais il conduit rapidement à la fatigue ; le bleu est plutôt déprimant au début, mais permet un travail très prolongé. C’est le vert qui semble la couleur de choix : il produit l'excitation sans fati- gue rapide. M. Féré a étudié de la même façon les sen- sations sonores, olfactives, gustatives; toutes se sont montrées efficaces. Il semble que l’on ne puisse plusse figurer une seule cause d’excitation dont l’auteur n'ait examiné à fond l'effet; aussi tous ceux qu'intéresse cette question de la production du travail musculaire de- vront-ils recourir au livre de M.Féré. D°G. Weiss, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 4 Sciences médicales Héricourt (D: J.). — Les Frontières de la Maladie. — 1 vol. in-12 (Prix: 3 fr. 50). Ernest Flammarion, éditeur, Paris, 1904. Ce livre a été écrit dans un but de vulgarisation scien- tifique très louable. Il est à la portée de tous les lecteurs et vise, dans une intéressante suite de chapitres sur les diverses maladies, un but à la fois pratique et élevé. M. Héricourt part de ce principe que, d'ordinaire, le mé- decin ne traite actuellement que des maladies qui Anis- sent. Combien ilseraitplus utile s’ilpouvaitempècherles maladies de commencer ! Or, les données actuelles sur l'étiologie d'un grand nombre de maladies sont assez bien assises pour qu'on puisse, en vérité et dans nombre de cas, en empècher l’éclosion. Toutes les mesures sanitaires internationales n’ont pas d'autre objectif que celui de protéger les peuples contre les épidémies, et elles y ont maintes fois réussi. Si, dans les agglomérations plus restreintes et, partant, dans chaque famille, des mesures analogues étaient prises, on éteindrait de la sorte bien des épidémies dès leur - origine. Plus encore, si l'individu appliquait par habi- tude les préceptes de l'hygiène actuelle, il pourrait souvent éviter, non seulement les maladies transmis- sibles, mais encore les maladies chroniques produites par les troubles de la nutrition, par les conséquences morbides d'une infinité d’intoxications lentes. C'est ce que M. Héricourt montre dans les diverses parties de son très utile volume, consacrées les unes à la dyspep- sie, à l'appendicite, au brightisme, au diabète, aux maladies nerveuses et mentales, les autres aux intoxi- cations, aux infections, etc. Retenons le dernier chapitre du livre, qui expose ce que devrait être le médecin idéal. Au Jieu d'être, comme aujourd'hui l'agent de la médecine curative, si pré- caire, dit trop justement M. Héricourt, le médecin de l'avenir sera l'agent de la médecine préventive. Il vivra alors de la santé de ses clients et non de leurs maladies. Et n'est-ce pas là le rôle si important d'ores et déjà dévolu aux médecins des collectivités, tels que nos confrères de l'armée ou des grandes administrations. Signalons encore le récit très démonstratif qui clôt l'ouvrage. C’est l’histoire d’un établissement privé, employant un personnel de #4 hommes et 75 femmes, dont le chef a consenti à se soumettre aux exigences de l'hygiène moderne et qui a pu ainsi avoir, pendant plusieurs années, une mortalité nulle et une morbidité insignifiante. Ce livre, d'une science pratique indéniable, est écrit dans un esprit d'utilité sociale et de bonté; il honore son auteur. D' A. LÉTIENNE. 288 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 27 Février 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —M. G.. Carrus recherche la condition nécessaire et suffisante pour qu'une famille de surfaces u (x, y, z)—p admette des trajec- toires orthogonales planes dans des plans parallèles à Ox et constitue une famille de Lamé.— M. F. Enriques démontre le théorème suivant : Les conditions pour qu'une surface algébrique f(x, y, z) = 0 puisse être transformée birationnellement en un cylindre F(X,Y\) — 0 s'expriment simplement par les équations P,—P, —0, P, étant le genre d'ordre » de la surface f. — M. M. Fréchet a pu démontrer pour l’espace E, à une infinité dénombrable de dimensions les principaux théorèmes énoncés dans l’espace ordinaire, et cela directement, sans supposer connus ces derniers. — M. P. Fatou montre qu'une série de Taylor dont le rayon de convergence est égal à 1 et dont les coeffi- cients tendent vers 0 est convergente en tout point non singulier de son cercle de convergence. — M. M. Bril- louin démontre qu'aucun planeur rigide n'offre de sécurité. En effet, la sécurité exige que la trajectoire limite de l’aéroplane non monté reste toujours très éloignée de la verticale, ce qui est impossible avec un planeur rigide. — M. Lœwy estime que, dans bien des cas, on à attribué à la flexion des cercles des instru- ments méridiens des erreurs uniquement dues à la mauvaise définition des images des traits et à un défaut de centrage dans l'appareil d'éclairage. Il indique, d'autre part, la forme à donner aux deux surfaces réfléchissantes pour obtenir des images stellaires très régulières, dans la détermination de la constante de l'aberration et de la réfraction à l’aide de la méthode basée sur l'emploi d’un double miroir taillé dans un même bloc de verre. — M. Puiseux communique ses observations de l’éclipse partielle de Lune du 149 fé- vrier 4905. — M. Salet a fait placer un diaphragme- iris dans un oculaire astronomique, dans le but d’étu- dier l'erreur due à l’astigmatisme dans l'observation des étoiles doubles. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Gutton a constaté que, sur une photographie négative, les contrastes sont exagérés dans les régions très peu éclairées et atténués dans les régions plus éclairées. Sur l'épreuve positive, les différences d'éclairement sont, au con- traire, fidèlement reproduites. — M. E. Rogovsky indique les moyens d'observer l'émission de rayons cathodiques par l’anode. — M. Ch. Fortin à reconnu que, dans un champ électrique de 20.000 volts par centimètre, normal à la surface, la variation relative de la tension superficielle du pétrole est inférieure à 1/450°. — M. Ch. Fabry a étudié les spectres des fluorures alcalino-terreux dans l’are électrique; ils sont formés par des séries de têtes de bandes. — M. W. Duane a déterminé l'ionisation produite par une quantité d'éma- nation unité dans des conditions données. Les résultats obtenus concordent assez bien avec les prévisions théoriques. — M. P. Breuil a trouvé dans un bronze d'aluminium nommé /ortior un constituant spécial dû à l'effet de la trempe et formé d'aiguilles martensitiques parallèles. — M. G. Urbain à purifié la gadoline et a déterminé le poids atomique du gadolinium en trans- formant le sulfate octohydraté Gd*(S0*)".8H°0 en oxyde Gd20%. La moyenne des résultats obtenus est de 157,23 (0 —16). — M. L. Wintrebert a préparé un osmio- nitrite de potassium Os(Az0*)K?, en faisant agir un excès d’azotite de K sur le chloroosmiate du même métal à 80°. L'osmionitrite de Ba, traité par H°S0S, four- nit l'acide osmionitreux, qui perd des vapeurs nitreuses par concentration et parait donner le nitrite d'osmium Os(Az0°)". — M. H. Leroux, en hydrogénant le B-naph=« tol par la méthode de MM. Sabatier et Senderens, dm obtenu le décahydronaphtol-$, Eb. 115° sous 13 mm. qui est déshydraté par chauffage avec le bisulfate dem potassium, en donnant l’octohydrure de naphtalène, Eb. 190°. — MM. E. Varenne et L. Godefroy, en trai-« tant l’anéthol bibromé par KOH alcoolique, ont obtenu L l’anéthoglycol CH*O.C°H*.CHOH.CHOH.CH*,Eb.2450-2500, corps jouissant de propriétés antiseptiques et analgé- siques. 4 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Hallion rappelle qu'il a montré, dans des expériences antérieures à celles dem M. J. Tissot, l'importance pratique de l'exploration dem la pression artérielle pour éviter les accidents de l’anes-« thésie. — M. C. Phisalix a constaté que l'émanation du radium détruit la toxicité des venins des serpents, L mais reste à peu près sans action sur ceux de la Sala-« mandre terrestre et du Crapaud commun. — MM. A. Moutier et A. Challamel montrent que l'emploi de la cage auto-conductrice est préférable à celui du lit condensateur dans le traitement de l'hypertension artérielle. — M. Marage a reconnu que la surdité peut être produite par des affections très diverses; à cha- cune correspond une courbe spéciale d’acuité auditive, dont la forme est caractéristique du siège de la lésion. — M.Foveau de Courmelles à constaté que les ovaires, les seins, les ganglions lymphatiques se rétractent et s’atrophient sous l'action des rayons X.—M.J.Chaine a reconnu que les muscles polygastriques sont beau= coup plus nombreux qu'on ne le croit et que l’état de polygastricité ne constitue pas une exception dans la constitution des muscles. — M. L. Bordas a étudié les glandes salivaires, céphaliques et métathoraciques des Notonectides et des Gerrides. — M. L. Brasil a observé l'existence de phénomènes de résorption phagocytaire des éléments reproducteurs dans les vésicules sémi-« nales du Lumbricus herculeus. — M. E. A. Martel montre que les émergences ne méritent le nom de sources que lorsque leurs variations de température sont à peu près nulles, ce qui est l'indice de l’origine véritablement souterraine de leur eau. — M. L. dem Launay conclut de ses recherches à l'existence d’une formation charbonneuse sénonienne dans les Balkans. — M. G. D. Hinrichs a reconnu que les pierres mé téoriques d’Amama ont le même poids spécifique el contiennent la même proportion de fer à 0,5 °/, près elles sont donc des fragments d’une même masse cos mique uniforme. Séance du 6 Mars 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux donne. l'équation qui définit les familles de surfaces dont les trajectoires orthogonales peuvent avoir un contact du (n + 1)° ordre avec l'intersection de deux surfaces infi=« niment voisines appartenant à un ensemble de surfaces défini. — M. L. Lecornu estime que la loi de Coulomb ne constitue qu'une règle empirique assez grossière mais les difficultés théoriques qu'elle semble entrainer tiennent uniquement à ce qu'on fait abstraction de l'élasticité des solides naturels. — M. G-. Marié a étudié, les oscillations des véhicules de chemins de fer sun leurs ressorts de suspension. Des ressorts d'une grandes flexibilité et d'un frottement relatif assez élevé em= pêchent les oscillations divergentes verticales. —4 M.Driencourt indique les résultats de la détermination,s par transport de temps, des différences de longitude à Let, ARR ent À er ee me à 27 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Madagascar et à la Réunion. — M. Th. Moreux consi- dère les taches solaires comme des régions surchauffées, où les phénomènes de radiation n'existent plus, en raison précisément de l'intensité calorifique favorisant la dissociation. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. KF.-A. Forel commu- nique les observations du cercle de Bishop qui s’est manifesté à la suite de l'éruption de la Montagne Pelée, et qui s'étendent de juillet 4902 à 1904. Le phénomène a duré deux ans; il en avait duré trois après l’éruption du Krakatoa. — M. J. Boussinesq démontre que le carré d’un rayon quelconque de l'onde de Fresnel a pour inverse une fonction linéaire des trois carrés des cosinus directeurs de la vibration correspondante. — M. A. Leduc estime qu'il est impossible de déterminer Ja densité des gaz avec une précision dépassant le 1/10.000°. — M. B. Sabat à reconnu que les métaux aosorbant les rayons Becquerel et principalement les rayons $ transforment une partie de l'énergie de ce rayonnement en énergie calorifique qui, élevant la température des métaux, augmente leur résistance électrique. — M. P. Massoulier montre que l’ionisation intense dont les flammes sont le siège dépend non seu- lement de leur température, mais encore des réactions qui s'y produisent. — M. $S. Turchini a constaté que létincelle équivalente d’un tube à rayons X excité par une bobine à grosse self est plus faible que lorsqu'il est excité par une bobine à petite self, et la différence S'accentue à mesure que la fréquence de l'interrupteur devient plus basse. — M. G. Gaïllard a déterminé le temps qu'il faut compter pour voir se produire l’opa- lescence dans les solutions d'hyposulfites lors de la précipitation de ces sels par divers réactifs. — MM. A. Brochet et J. Petit ont observé que le courant à in- tensité variable provoque la dissolution du platine dans l'acide sulfurique; le courant alternatif n'a pas d'action spécifique. — M. H. Copaux a préparé le nickel et le cobalt à l’état très pur et a déterminé lcurs principales propriétés physiques : densité Co 8,8; Ni 8, 8; point de fusion : Co 15300 ; Ni 14700. — M. L.-J. Simon à étudié l’action du permanganate de potas- ium sur les sels d'hydroxylamine; ce corps ne peut ètre utilisé en liqueur acide pour le dosage de l'hydroxy- lunine par oxydation directe. — M. E.-E. Blaise à constaté que les composés mono-, di- et tri-oxydiques éthers-oxydes, acétals, ortho-éthers) donnent des owmbinaisons iodomagnésiennes du même type, ren- ermant un atome d'oxygène quadrivalent. — M. P. “Carré a observé que, sous l'influence de NaOH aqueuse, le groupe Az0* de l'alcool 0-nitrobenzylique est réduit aux dépens du groupement alcool, qui est oxydé, tandis que, sous l’influence de NaOH alcoolique, AzO? est réduit en partie aux dépens de l'alcool introduit, ën partie aux dépens de l'alcool o-nitrobenzylique. — MM. A. Haller et F. March, en traitant la méthylhexa- none par le benzylate de soude à 220°-225° pendant vingt-quatre heures, ont obtenu un mélange de 1-mé- ‘thÿl-4-benzylcyclohexanol, F. 101°,5-102, et de 1-mé- thyl-2 : #-dibenzylcyclohexanol, Eb. 257°-258° sous 21 millimètres. — MM. M. Piettre et A. Vila ont reconnu que l’oxyhémoglobine cristallisée est sensible, au point de vue spectroscopique, à des substances chi- miiques regardées généralement comme inactives. Cette sensibilité se manifeste par des variations dans la posi- tion de la bande dans le rouge. — MM. E. Boullanger et L. Massol ont constaté que l’action nocive observée par Winogradsky et Oméliansky dans le milieu ordi- naire du ferment nitrique provient de AzH° libre mise en liberté par la dose de 1 °/,, de carbonate de soude présent. — M. L. Lutz a observé que les amides sont, de tous les corps azotés, les plus assimilables; les amines occupent le second rang et les nitriles le troi- Sième. — MM. E. Charabot et G. Laloue étudient les répartitions successives de l’estragol et des composés terpéniques entre ies divers organes d’une plante an- nuelle. — M. H. Lagatu indique un mode de représen- lation uniforme graphique des documents que four- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 289 nit l'analyse physico-chimique des terres arables. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. J. Tissot montre que, pendant l’anesthésie avec des mélanges titrés de chlo- roforme, il ne peut s'établir d'équilibre de tension de vapeur entre le sang et le mélange anesthésique, parce que cet équilibre correspond pour le sang à une dose de chloroforme qui dépasse la dose mortelle. — MM. H. Lamy et A. Mayer ont reconnu qu'au cours.de la po- lyurie qui suit l'injection intra-veineuse de sucre, les cellules rénales vivantes accomplissent un travail à la fois actif et électif. — M. H. Carré a observé que l’ino- culation à un animal neuf du sang défibriné d’un animal atteint de la maladie des jeunes chiens lui donne de la fièvre, du coryza et des pustules; ce même sang, ensemencé en différents milieux, ne donne au- cune culture. — MM. E.-L. Bouvier et G. Seurat décrivent un nouveau crabe, l'£Eumedon convictor, qui vit dans un commensalisme étroit avec un oursin du genre Æchinothrix. — M. I. Borcea a constaté que, chez les Elasmobranches, le rein acquiert dans son développement une métamérie secondaire par rapport à la métamérie primaire des canaux segmentaires. — M. H. Coutière décrit une forme de phanères propres aux Pandalidæ; elles affectent la forme d’écailles lan- céolées, lisses et planes, très minces et très caduques, se recouvrant partiellement. — M. Pacaut a observé diverses anomalies de l’amitose dans les épithéliums de revêtement des Mammifères. — M. G. Delacroix établit la distinction entre la rouille blanche du tabac et la nielle ou mosaïque. Ces deux maladies sont tou- jours plus accentuées dans les années humides. La rouille blanche est due à une bactérie qu'il appelle Bacillus maculicola. — M. P. Lemoine a modifié et complété la coupe du Haut-Atlas dans la région du Glaoui (Maroc). — M. H. Mansuy a examiné les fossiles rapportés du Yunnan par la Mission Lantenois. Cet examen confirme les analogies reconnues antérieure- ment entre les faunes primaire et secondaire de la région indo-chinoise et les faunes synchroniques de l'Inde et de l'Asie centrale. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 28 Fevrier 1905. L'Académie procède à l'élection de deux correspon- dants nationaux dans la Division de Physique et Chimie médicales et de Pharmacie. MM. Jolyet (de Bordeaux) et Massol (de Montpellier) sont élus. M. Fouraier montre que la paralysie ‘générale est l'un des accidents éloignés les plus fréquents de l'in- fection syphilitique; elle commence à entrer en scène vers la sixième année et atteint un fort maximum vers la dixième année après la contamination. L'unique sau- vegarde du sujet syphilitique contre cette maladie réside dans un traitement antisyphilitique mercuriel méthodiquement institué et très longuement poursuivi. Séance du 7 Mars 1905. L'Académie procède à l'élection de deux correspon- dants nationaux dans la Division de Chirurgie. MM. Fon- tan (de Toulon) et Malherbe (de Nantes) sont élus. M. Raymond se range à l'avis de M. Fournier en ce qui concerne les rapports de la syphilis avec la para- lysie générale et insiste sur l'importance du traitement spécifique prolongé. — M. A. Joffroy estime, au con- traire, que la syphilis n’est pas la cause efficiente de la paralysie générale, et que le traitement mercuriel n’est ni préventif, ni curatif de cette affection. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 25 Février 1905. M. Er. Gérard montre que l'apparition du colibacille dans la bile diminue la teneur de ce liquide en sels biliaires, lesquels ne sont plus en suffisante quantité pour dissoudre la cholestérine, qui se dépose et devient l'amorce d’un calcul. — M. J. J. Vassal a trouvé chez 6*** 290 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES | un écurenil de l’Annam un hématozoaire endoglobu- laire pigmenté appartenant au genre Haemamæba. — M. Ch. Féré a reconnu que les formes et les objets qui se déplacent peuvent, par le mécanisme du regard, provoquer de l’activité ou de l’impotence générales qui conditionnent le plaisir ou la peine. — M. G-. R. d’AI- lonnes est parvenu à deviner, même contre la volonté, des pensées abstraites et cachées par un procédé d'ins- cription de mouvements involontaires de la main. — MM. R. Parhon et J. Papinian ont étudié les altéra- tions des neurofibrilles dans ia pellagre; elles marchent parallèlement à celles dés corpuscules de Nissl. — M. H. Cristiani a constaté que, pour qu'il yait recons- titution et évolution progressive de la greffe thyroi- dienne, il est nécessaire que l'organisme sente un besoin de fonction thyroïdienne, provenant de l'absence, de la maladie ou de l'insuffisance de la glande thyroïde. — MM. Borrel et Marchoux ont étudié une maladie des poules, transmise par les Argas et qui constitue une spirillose typique; l'infection n'est obtenue qu'à partir d’une certaine température (30°). — M. C. Jar- dim a observé que le métavanadate de soude est un agent susceptible d'empêcher l'assimilation, et exerçant une action fâcheuse sur la désassimilation. — M. N. Lobo à constaté que le persulfate de soude nuit à l’assi- milation; il s'oppose au processus normal de la désin- tégration des albuminoïdes, qui demeure incomplet. — M.C. Phisalix : Influence de l'émanation du radium sur la toxicité des venins (voir p. 288). — MM. P. Bar et Daunay ont reconnu qu'il y a tendance à la polyurie chez la femme arrivée à la fin de la grossesse normale et soumise à un régime fixe. — M. G. Billard a observé que la tension superficielle de l’urine des herbivores est faible, parce qu'elle contient normalement des sels biliaires. D'autre part, le chlorure de sodium ajouté aux urines des ictériques abaisse leur tension super- ficielle; cette réaction fait défaut avec les urines non ictériques. — MM.Widal et Rostaine ont constaté que, dans le sang des hémoglobinuriques, en dehors des crises comme pendant les crises, existe une insuffisance de l’antisensibilisatrice par rapport à la ou aux sensi- bilisatrices existantes. — M. L. Ambard a pratiqué sur lui le régime hypochloruré pendant cinquante et un jours; l'élimination chlorurée a été très régulière ; elle a baissé sous l'influence de l'ingestion de sulfate de soude. — M. André Mayer a observé que le rapport A/NaCI n'est pas constant chez l'homme sain ; il dépend de la richesse de l'alimentation en chlorure de sodium, — M. Dey- rolle indique l'habitat de quelques Crustacés décapodes et phyllopodes fluviatiles de Tunisie. M. M. Caullery est élu membre titulaire de la Société. Séance du & Mars 1905. M. P. Bonnier a observé qu'autant il est exceptionnel de trouver un trouble oculo-moteur provoqué par un trouble visuel, oculaire, autant il est fréquent de le trouver sous la dépendance d’un trouble vestibulaire, auriculaire. — M. J. Renaut considère les grains N accessoires comme de simples pièces fibrillaires de per- fectionnement de la pièce fibrillaire principale, dont la constitution intime paraît identique à la leur propre. — MM. H. Cristiani et G. de Michelis présentent un appareil simple à barbottage pour la détermination rapide de CO? de l'air. —- M. Cazalbou a observé sur deux chevaux ayant séjourné en Guinée une infection due au Trypanosoma dimorphon. — MM. J. Roger et Greffulhe ont observé en Algérie, sur des chevaux, une trypanosomiase qui se rapproche beaucoup du surra. — MM. Widal et Rostaine, en injectant à un hémo- globinurique un sérum antisensibilisateur spécique, ont empêché l'apparition de l’hémoglobine dans l'urine que le refroidissement provoque chez un tel sujet. — M. Ch. Dopter à reconnu que les paralysies qui sur- viennent chez les animaux au cours de la dysenterie expérimentale sont d'origine centrale : elle doivent être rapportées à une polyomyélite antérieure. — MM. G. Billard et F. Bellet ont observé une torsion de l'extrémité des grands os d’un des membres inférieurs" causée par l’impotence fonctionnelle du membre symé= trique. — MM. G. Billard et Perrin ont constaté que l'acide hippurique dans les urines fraiches ne donne pas la réaction d'abaissement de tension superficielle. — MM. Morel et Ch. André ont reconnu que la subs- tance excrétée par les tubes contournés des reins de grenouille est bien l'acide urique ou un corps très voisin. — MM. P. Bar et Daunay ont observé une diminution de l'extrait sec urinaire à la fin de la gros sesse normale. — M.-G. Seillière montre l'existence, dans le suc gastro-intestinal de l’escargot, d’une dias= tase hydrolysant le xylane du bois avec production d’un pentose. — M. C. França a étudié les lésions de la rage chez les Muridés : il y a hypertrophie plus ow moins accentuée des neurofibrilles. — M. Maurel à constaté que ce sont les températures comprises entre 29° et 32° qui, en général, donnent une sensation indifférente sur la peau. — M. D. Voinov estime que la glande interstitielle a un rôle de défense génitale. — M. M. Kuckuck a fait diverses expériences sur le déterminisme du sexe, d’où il lui semble résulter que l'individu possédant le plus d'énergie vitale au moment de la fécondation donne son sexe au fœtus. — M. P.\ Abric conteste l'existence de mouvements browniens à l'intérieur du protoplasme vivant. — M. J. Chevalier a constaté que l'acide protocétrarique agit sur la tunique musculaire de l'estomac et de l'intestin en produisant un effet antiémétique assez intense. = M. O. Goebel a observé que les globules de mouton, émulsionnés dans une solution salée, ne s’agglutinent jamais en présence du venin de cobra. Les globules lavés dans une solution sucrée sont, au contraires agglutinés et hémolysés par le venin. — M" J. Gatin-« Gruzewska a reconnu que, quand la teneur du foie en glycogène augmente, il se produit une diminution correspondante de la teneur en substances albumi= noides. — MM. Couvreur et Chevrotier ont constalé que le réflexe conjonctivo-respiratoire, consistant dans la possibilité de ramener la respiration arrêtée pa l'irritation. de la conjonctive, a pour voie centripète 1 branche ophtalmique du trijumeau, pour centre 1 région des tubercules quadrijumeaux et pour voie cen= trifuge le phrénique. — MM. M. Doyon et Petitjean ont étudié les lésions hépatiques et les modifications! de la coagulabilité du sang provoquées par l'injection de sérum hépatotoxique. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff montrent que l’incoagulabilité provoquée par l’atropine injectée dans une veine mésaraique ne résulte pas d’une modification dans la teneur du sang en fibrinogène. — M. G. Loisel estime que le facteur le plus puissant de la télégonie consiste dans l’impré= gnation de l'organisme femelle par l'absorption de 1 partie du sperme non utilisée dans l’acte reproducteur RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 21 Février 1905. M. A. Billet indique l'aire de dispersion de l'Ano pheles Chaudoyeï en Algérie et en Tunisie. On le trouve surtout dans les oasis du sud. — M. L. Bordas donne la description des organes reproducteurs de la Nèpe cendrée. — M. A. Briot a reconnu que les glandes salivaires postérieures des Céphalopodes sécrètent un: suc qui exerce une action paralysante immédiate sur | les Crustacés et leur permet de s'emparer facilement di ceux-ci. Ce venin n’agit pas sur le cœur, car ce dernier continue à battre. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE 4 Séance du 3 Mars 1905. y M. Ch. Nordmann : Zuregistrement continu de Pic nisation atmosphérique. L'auteur, après avoir rappelé les travaux antérieurs faits par M. Langevin et par luis même sur la question, décrit le dispositif suivant, qui paraît fournir une solution simple du problème de l'enregistrement des ions atmosphériques (problème que la méthode d'Elster et Geitel et celle d'Ebert ne permettaient pas de résoudre), et qui, contrairement au dispositif de M. Langevin, ne comporte ni mouve- ment d’'horlogerie, ni complications mécaniques d'au- eune sorte et fournit un enregistrement absolument ininterrompu. L'air atmosphérique étudié passe dans un condensateur cylindrique dont l’armature externe est reliée à une pile de charge suffisante pour produire reliée d’une part à l’une des paires de quadrants d'un électromètre Curie amorti, dont l’autre paire est au sol, l'aiguille étant chargée ; cette armature est reliée d'autre “part à un récipient métallique isolé, contenant un li- quide conducteur (de l’eau par exemple), et qui, constitué en vase de Mariotte, fournit, par un orifice capillaire d'une disposition spéciale placé à sa partie inférieure, un écoulement régulier de » gouttes de rayon r par “seconde. Celles-ci tombent dans une cuvette métallique reliée au sol, et, comme chacune d'elles emporte une charge égale à r£E (E étant à ce moment le potentiel de “l'armature intérieure du condensateur cylindrique), il s'ensuit que l'écoulement liquide enlève chaque seconde à celle-ci une charge égale à nrV. Sous l'influence du “champ produit entre elle et l’armature externe, cette “armature interne recoit, d'autre part, par seconde, une charge Q due aux ions de l’air étudié, et qui, pour une valeur donnée du courant gazeux (dont le débit est donné par un anémographe; est proportionnelle au degré d'ionisation de”cet air. Si C est{la capacité du système isolé « armature interne-vase de Mariotte », l'augmen- tation de charge de ce système dans un temps dt est égale à la'charge fournie par le gaz ionisé, dimmuée de celle qu'emporte l'écoulement liquide, ce qu'exprime la relation : CdE—Qdt—nrEdt. Dans la pratique, et conformément au calcul, l'équilibre s'établit au bout d'un temps très court entre la charge Q apportée par les ions et le courant de décharge nrV par unité de “iemps, de sorte que E—Q/nr. Les déviations de l'électromètre, enregistrées en fonction du temps sur “un cylindre photographique à fente horizontale, sont onc Sans cesse proportionnelles au nombre des ions ar unité de volume de l'air étudié. Avec un électro- ètre donné, la sensibilité de l'appareil est d'autant plus rande que E est plus grand pour une valeur donnée e Q. Il suffit, pour régler l'appareil et modifier sa sen- ibilité, de soulever ou d’enfoncer le tube qui passe ans le bouchon du vase de Mariotte; on modifie, par là ême, à volonté la vitesse d'écoulement, c'est-à-dire la valeur de nr. La seule précaution pour que l'écoulement “soit constant est de placer le vase de Mariotte dans un endroit où les variations de température ne dépassent pas une dizaine de degrés. M. Nordmann signale, en erminant, une application simple de l'appareil précé- “dent, qui permet de réaliser facilement une méthode de zéro pour les mesures de radioactivité. — M. A. Guébhard, après avoir passé en revue, sur ses anciens phototypes, les nombreux cas de silhouettage observés, soit dans ses expériences de 1903 sur l’znver- Sion, soit dans ses recherches de 1890 sur l’auréole pho- “tographique (improprement dite halo), croit pouvoir conclure que, si la formation d’une ligne noire, entre plages d’impressions très différentes, ne se manifeste réellement jamais, comme il l’a dit, que comme phase intermédiaire (amphitype) de l'inversion de surpose ou de surdéveloppement, sans dépendre directement d'aucune des circonstances particulières que lui assi- Pour cause première, ainsi que tendait à le faire croire une observation déjà discutée (Comptes rendus, & CXXVI, 1898, p. 1441) de M. Colson (Comptes rendus, & CXXVI, 1898, p. 471), certains phénomènes de diffu- Sion] à l'intérieur du*bain, pendant le développement, mais bien ceux de diffusionflumineuse à l’intérieur de la couche sensible pendant l'impression elle-même. — M. P. Curie, après avoir rappelé que, parmi les diverses théories émises pour expliquer les propriétés ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES en “le courant de saturation. L'armature interne isolée est : gnait pour causes M. P. Villard, elle n'a pas davantage: 291 des corps radioactifs, l'hypothèse qui consiste à ad- mettre la désagrégation des atomes de ces corps et la transmutation des éléments se présente aujourd'hui comme la plus vraisemblable et se trouve actuellement admise par un grand nombre de physiciens et de chimistes, entretient la Société des recherches qu'il a faites en collaboration avec M. Danne sur les lois de la disparition de la radioactivité induite par lémanation du radium. On laisse un corps solide pen- dant longtemps (plusieurs jours, par exemple) s'activer en présence de l’émanation du radium et l’on étudie ensuite la manière dont il se désactive à l'air libre. L’intensité du rayonnement est donnée, en fonction du temps, par la différence de deux exponentielles (en négligeant toutefois ce qui se passe pendant les cinq premières minutes). On a (1)1—1,[Ke-#—{(K—1)e=tf, avec b—0,000.538; c—0,000.413;K—%,2, le temps étant exprimé en secondes, I, étant le rayonnement initial. On explique convenablement les phénomènes en admettant que l’'émanation, pendant tout le temps qu'elle agit, crée avec une vitesse constante une pre- mière substance radioactive B, qui se désagrège sponta- nément suivant une loi exponentielle : dB/dt—— bB, et B—B,e-tt, b étant un coefficient caractérisant la vitesse de la désagrégation de la substance. La subs- tance B, en se désagrégeant, se transforme en une deuxième substance radioactive C, quise désagrège à son tour et disparaîtrait, si elle était seule, suivant une loi exponentielle : G=—C,e—ct, e étant un coefficient carac- téristique. Mais, comme la substance C est entretenue par la substance B, elle varie'en réalité suivant une loi plus complexe. Quand on soustrait le corps solide à l'action de l’émanation, les substances B et C existent sur sa surface dans une certaine proportion. Cette pro- portion varie en fonction du temps et, si l'on admet que le rayonnement produit par C en se désagrégeant est plus important que celui produit par la quantité correspondante de B, on trouve que le rayonnement est donné par la différence de deux exponentielles, c’est-à-dire par une formule de même forme que l’équatien (1). Dans le cas particulier où B n'émet pas de rayons et où C rayonne seule, la théorie indiqu eque l'on doit avoir : ë b 0,000.413 Érec TE 0,000.538 — 0,000,413 = 4,13; l'expérience ayant donné 4,2 pour K, on voit que l'on peut admettre que la substance C rayonne seule. On ne s'est aperçu de cette relation entre les coeffi- cients que plusieurs mois après leur publication. On peut chercher suivant quelle loi s'active un corps solide à partir du moment où il est mis brusquement en con- tact avec un volume d'air renfermant une proportion constante d'émanation. On trouve par expérience, con- formément aux indications de la théorie, que la loi suivant laquelle le rayonnement du corps { tend vers sa finale I, est la même que la loi de décroissance de l'activité d’un corps soustrait à l’action de l’émanation. On a, en effet, alors : (2) 1, —1=—1,[Ke——(K—1)e-" avec les mêmes constantes que précédemment. Enfin, dans le cas où un corps a été soumis à l’action de l’'émanation pendant un temps relativement court, la loi de désactivation à l'air libre devient très complexe. On trouve, par exemple, pour une durée d'activation de cinq minutes, que le rayonnement pendant la dés- activation décroit d'abord avec une très grande rapi- dité: au bout de quelques minutes, l'intensité du rayonnement passe par un minimum et se met ensuite à augmenter; au bout de trente minutes, le rayonne- ment passe par un maximum, puis il décroit et finit par s'éteindre suivant la loi exponentielle simple corres- pondant au coefficient c —0,000.413. On ne peut expli- quer ces phénomènes complexes dans l'hypothèse de deux substances seulement. On parvient, au contraire, à tout expliquer en supposant sur les corps activés trois substances A, B, C, caractérisées par les coefficients 292 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES d’exponentielle 2—0,004.01, b—0,000.538, e—0,000 413. La substance À est créée directement par l'émanation; elle disparaît rapidement : la quantité de A baisse de moitié en 2,9 minutes (sa vie moyenne est de 4,3 mi- nutes). La substance À, en se désagrégeant, donne nais- sance à la substance B, laquelle, quand elle est seule, se détruit spontanément avec baisse de moitié en 21 minutes (vie moyenne de B : 33 minutes). La subs- tance C est entretenue par B et se détruirait, si elle était seule, avec baisse de moitié en 28 minutes (vie moyenne de GC : 39 minutes). Les substances A et C rayonnent et ionisent l'air, B ne rayonne pas. M. Victor Henri remarque : 4° La loi de décompo- sition de l'émanation trouvée par M. Curie étant une loi exponentielle, si cette décomposition se produit d’après les mêmes lois que celles des réactions chi- miques ordinaires, il en résulterait que la décomposi- tion de l’'émanation est une réaction monomoléculaire, c'est-à-dire dans laquelle une molécule du corps se décompose. Cette conclusion élimine donc toutes les hypothèses de polymérisation d’après lesquelles plu- sieurs molécules de l’'émanation se combineraient pour faire apparaître un corps nouveau; 2 L'hypothèse de M. Curie relative à la production de deux réactions successives émanations corps B et corps B— corps GC, qui se produisent toutes les deux suivant des lois exponentielles, peut être rapprochée de certaines études expérimentales faites en Chimie physique sur des réactions successives (par exemple : hydrolyse du raffinose), dans lesquelles on a pu vérifier expérimen- talement l'exactitude de la loi de la réaction totale représentée par une différence de deux exponentielles, c’est-à-dire précisément de la forme de celle qui exprime la décomposition de l’'émanation.— M. l’abhé Varin présente une soupape a mercure pour les trompes à eau. L'appareil est tout entier en verre. Dans une ampoule à moitié pleine de mercure pénètrent : 4° En bas, un tube venant de la trompe à eau, terminé par une partie recourbée s’ouvrant tout près de la paroi de l’ampoule, à quelques millimètres au-dessus de la surface du mercure; 2° En haut, un tube de 85 centi- mètres de hauteur, relié aux appareils à vider, terminé dans l’ampoule par une pointe plongeant dans le mer- cure. Quand la canalisation est à la hauteur de la trompe, on peut prolonger le tube ascendant par un tube des- cendant qui ramène son extrémité un peu au-dessus de l’ampoule. Si l’on fait le vide dans l’ampoule avec la trompe à eau, l'air des appareils y arrive par la pointe et se rend à la trompe. La pression de l’eau qui ali- mente la trompe vient-elle à diminuer, ou même à cesser brusquement, l’eau de la trompe reflue dans l’'ampoule, avec ou sans air, et fait monter le mercure dans le tube vertical, qui se trouve ainsi fermé et inter- cepte toute communication avec les appareils à vide. Quand de nouveau la trompe fonctionne, l'eau de l'am- poule y retourne, sauf la couche de quelques milli- mètres comprise entre la surface du mercure et l'ou- verture du tube C; en même temps, le mercure baisse dans E. On facilite le retour de l’eau en plaçant la trompe en contre-bas de la soupape. Dans ces condi- tions, la soupape fonctionne de façon tout à fait satisfaisante en n’augmentant guère que de 2 ou 3 millimètres de mercure la pression résiduelle. — M. Devaux-Charbonnel propose une nouvelle méthode pour la mesure de la capacité des longs cäbles sous- marins. Les câbles sous-marins télégraphiques sont essentiellement des condensateurs. Ils se composent d'un conducteur central isolé par un diélectrique, la gutta-percha, et protégé par une couche de fils de fer jointifs. Pendant la transmission, le conducteur est relié à une pile, dont un pôle est à la terre; l’armure, en contact avec l’eau de mer, est maintenue au potentiel du sol. Le câble constitue donc un condensateur cylin- drique, dont la capacité serait fixe et bien déterminée si le diélectrique était de l'air. Malgré l’hétérogénéité que présente toujours la gutta, cette condition est néanmoins réalisée, au moins dans les conditions d'emploi des câbles. Les voltages ne sont jamais supé= rieurs à 50 volts, le nombre des signaux est toujours voisin de 10 par seconde, de sorte que les forces étectromotrices sont toujours faibles, ainsi que la fré« quence des courants. La capacité est donc une quantités qui reste constante pendant les différentes phases des transmissions. La détermination exacte de sa valeur est du plus grand intérêt. En général, la mesure d’une capacité C se ramène à celle de la quantité d’électrieM cité Q que prend un condensateur quand on le charge avec une force électromotrice E. On a, par définitions Q—CE. Pour les cäbles, la mesure de Q est dilficile, parce que le phénomène de la charge n’est pas instan= tané. L'auteur propose la méthode suivante : charger en même temps que le câble un condensateur G, de comparaison disposé en cascade. Le temps de charge est considérablement réduit. La charge est quatre fois plus rapide; elle est complète à 8 dix-millièmes près au bout de 0,8CR, c’est-à-dire au bout de 5 à 6 secondes dans les cas les plus défavorables. À ce moment, on à l'égalité : C(E— V)=CV. Il suffit de supprimer l& liaison du câble G et du condensateur C, et de relie ce dernier à la terre pour qu'il prenne instantanément un complément de charge : Q'—C,V, qu'on mesure au moyen d'un galvanomètre balistique. On mesure de même la quantité C,E— Q,. On en déduit G par la for mule simple : nn: c= 0 À 0 Q Les phénomènes d'absorption, les pertes légères dues à l'imperfection de l'isolement n'affectent pas Ja méthode. En opérant successivement avec les pôles positif et négatif de la pile, on élimine très facilement les erreurs dues aux variations du potentiel du sol tout le long du câble. Voici la série des résultats obtenus le 8 février dernier sur le câble de Brest à Dakar : 1120, 1100, 1116, 1104, 1100, 1116 microfarads. Les résultats sont assez concordants pour qu'on puisse admettre que la moyenne 1109 microfarads est exacte à 2 ou 3 microfarads près. La moyenne d’un plus grand nombre de mesures serait encore plus exacte. La capacité déduite des mesures effectuées en usine sux les différentes sections est de 1050w. Les résultats obte nus tendent à confirmer cette hypothèse, qui n'a pd encore été nettement vérifiée, que les fortes pressions atteignant 500 kilogrammes, auxquelles le cäble est soumis dans les grandes profondeurs, en dixminuant l'épaisseur du diélectrique, ont pour effet d'augmenter sa capacité. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 24 Février 1905. M. A. Trillat expose les nouveaux résultats obtenu en dosant la formaldéhyde dans les produits gazeux des combustions courantes : ils démontrent, une fois de plus, que cette aldéhyde se forme dans un gratid nombre de circonstances. Les suies de cheminées em contiennentparfois plusieurs grammes par kilogrammen à l'état polymérisé. La présence de la formaldéhyde dans l'air ambiant des cités en est donc une consé= quence, La combustion incomplète du sucre et des | matières sucrées est une véritable source d'aldéhyde formique : il en est de même de celle des baies de, genièvre, de l’encens et d'autres utilisées ancienne ment comme agents d'assainissement. Cette notion d la présence, parfois considérable, de la formaldéhyde | dans les fumées explique leur rôle dans diverses cire" constances, comme celle de la fumaison de la viande ëb celle de leur emploi pour désodoriser, grâce à la pros priété de l’aldéhyde méthylique de donner des combi= naisons inodores. — MM. A. Brochet et J. Petit, SC basant sur ce que le platine se dissout dans l'acide sul furique sous l'influence du courant à intensité variable; ce qui n'a pas lieu avec le courant continu ordinaires établissent qu'avec le courant alternatif la dissolution. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES en présence d'oxydant est due également à la variation du courant, l’action de l'oxydant se bornant, du fait de sa propre réduction, à empêcher la précipitation du platine. Le plomb se dissout dans l'acide sulfurique par un processus tout différent : il y a formation de peroxyde, lequel se trouve partiellement réduit et donne du sulfate qui, à forte densité de courant et à froid, n'est pas réduit, se détache et tombe, en même temps “que l'hydrogène correspondant se dégage. Si on élève la température ou si l'on diminue la densité de cou- rant, il n'ya pas formation de sulfate, pas d'hydrogène; la réduction est totale. Les électrodes se recouvrent “alors de plomb spongieux, tandis qu'elles restent bril- lantes dans l’autre cas. MM. Brochet et Petit indiquent également que l'oxydation de l'acide formique, des for- “miates, de l'acide oxalique, se fait très bien avec le cou- rant alternatif ; le rendement varie de 50 à 80 °/, sui- vant le corps employé, avec une densité de courant de 1 ampère par centimètre carré. —M, E, Roux expose ses recherches sur la transformation de l'amylo-cellu- lose en amidon par réversion de cette substance, et la formation d'amidons artificiels par l'action de l'eau surchauffée à 155°., — M. L. Simon entretient la Société de ses recherches sur le dosage de l'hydroxylamine et “de ses sels au moyen du permanganate de potassium. _— M. A. Conduché a étudié l’action de l’oxyurée sur les aldéhydes. L'oxyuréefde Francesconi et Parrozzani, “ou, ce qui revient au même, le mélange aqueux de cyanate de potassium et de chlorhydrate d'hydroxyla- mine, réagit sur les aldéhydes aromatiques en donnant des corps de la forme : R.CH — Az.CO.AzH° NA 0 Dans le cas de l'aldéhyde benzylique, le corps obtenu ond à 4259, Ce corps, traité par l'acide chlorhydrique, donne, suivant les conditions, du benzonitrile ou de la benzamide; réduit par lamalgame d'aluminium, il onne la benzylurée ; traité par la potasse aqueuse ou lcoolique, il donne du cyanate ou ses produits de écomposition et la B-benzaldoxime. Comme, dans ce ernier Cas, aucun agent d'isomérisation n'a agi, on eut en déduire un argument pour une formule de la -benzaldoxime : CSHS.CH — AzH ns lutôt que pour une formule purement stéréochimique : CSHSCH ‘ al on _ SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 49 Janvier 1905. - M. A. W. Campbell : Nouvelles études histologiques Sur la localisation de la fonction cérébrale. Les cer- veaux de Felis, Canis et Sus comparés avec celui de l'Homme. Cette addition au travail sur la localisation cérébrale, présenté par le même auteur à la Société Royale en novembre 1903, a pour but d'élucider cer- laines analogies fonctionnelles obscures et certaines homologies structurales concernant le cerveau. L'au- teur conclut que la stabilité du plan architectural d’un Champ donné quelconque du cortex est reliée directe- ment à l'âge phylogénique de ce cortex et à l'impor- lance, comme moyen de survivance, de la fonction qu'il dessert; et que, tandis que le cerveau humain s'est développé d'une facon plus marquée dans quelques parties que dans d'autres, cette expansion, si l’on en _excepte les aires visuelles et olfactives, a été générale en l'espèce. — M. M. Hartog a réalisé un appareil approprié à l'étude de la section axiale des champs produits par les pôles isolés d’une force dualistique. Il a ainsi observé la formation de chaines de force dans ! 293 un milieu visqueux, qui constituent un type distinet de configuration matérielle. 11 se base sur ce phéno- mène pour expliquer la figure des fuseaux achroma- tiques, qu'il attribue à l'existence d'une force dualis- tique dans la cellule en division. — M. H. G. Plimmer : Les elfets comparatifs des Trypanosomes de la fièvre de Gambie et de la maladie du sommeil sur les rats. Les organismes qui ont servi aux expériences avaient été donnés à l’auteur de ce Mémoire par le colonel Bruce et ils provenaient de singes auxquels on avait respectivement inoculé en Afrique ces affections, de sorte que, lorsque l’auteur commenca ses expériences, chaque organisme avait passé par un singe, et tous se trouvaient, par conséquent, dans des conditions sem- blables. Les rats inoculés avec le Trypanosome de la fièvre de Gambie ont vécu environ deux mois et demi; les Trypanosomes étaient présents dans le sang quatre semaines environ après l’inoculation jusqu'à la mort. Les organismes étaient présents dans le sang et dans tous les organes post mortem; la rate avait beaucoup grossi et le foie et les rognons étaient congestionnés. Les glandes lymphatiques étaient hypertrophiées. Les rats inoculés avec le Trypanosome de la maladie du sommeil vécurent sans aucun symptôme pendant une période de six à neuf mois, puis ils devinrent paralysés, d’abord de la jambe gauche de derrière, puis de l’autre, et ils moururent en l’espace de deux à huit semaines après que la paraplégie fut complète, ayant vécu ainsi de onze à douze mois. À aucune période, on n’a trouvé de Trypanosomes dans le sang, ni post mortem dans les viscères ou les glandes. Mais il s’en trouvait en petite quantité dans la moelle épinière, et l’inoculation de la moelle à d’autres rats a produit des symptômes similaires, tandis que l'inoculation des organes a été négative. On a trouvé dans les sections de la moelle épinière des formes amiboïdes et adultes de Trypano- some, ainsi que les lésions que le D' Mott a découvertes dans le système nerveux de l'homme dans les cas de maladie du sommeil, c’est-à-dire une exsudation cellu- laire considérable autour des vaisseaux. On ne trouve pas ces lésions chez les singes ; chez ceux-ci, les orga- nismes se généralisent et ne se localisent pas dans le système nerveux comme chez les rats. Ces expériences tendent à démontrer que les organismes associés à la fièvre de Gambie et à la maladie du sommeil, que quelques-uns supposent être une même affection à différents degrés, ont des effets entièrement distincts et qu'ils se distinguent aussi morphologiquement; que le Trypanosome de la maladie du sommeil peut être inoculé à des rats, ce qui avait été nié; et qu'il y a une grande ressemblance dans les lésions produites dans les systèmes nerveux de l'homme et des rats et dans la localisation de la maladie dans le système nerveux. D'après les expériences faites, il semble qu'une double infection soit possible, et qu'elle se produise vraisem- blablement dans ces maladies. — MM. W. Bulloch et E.E. Atkin : La nature de l'action opsonique du sérum sanguin. Les expériences des auteurs les ont conduits aux résultats suivants : 1° L’opsonine est présente dans le sérum normal; 2° Elle est thermolabile: 3° Elle dis- paraît rapidement du sérum quand ce dernier est mêlé avec des bactéries à 37° C. ou à 0° C.; 4 Après que l'opsonine s’est unie avec les bactéries, le mélange de sérum et de cocci peut être chauffé à 60° C. pendant longtemps sans que l'effet opsonique soit aboli; 5° Le leucocyte est pratiquement un facteur indifférent quand on compare le pouvoir phagocytaire de différents sangs; 6° La capacité des émulsions bactériennes pour extraire l’'opsonine du sérum n'est diminuée que faiblement quand on soumet ces émulsions à des températures très élevées pendant des périodes prolongées; 7° L'ac- tion de la chaleur est de détruire l’opsonine et non pas surtout de la convertir en une modification non opsonisable; 8 L'opsonine n'est identique avec aucun des anti-corps découverts jusqu'à présent dans le sérum; 9° L'opsonine est d'une constitution relative- ment simple. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Séance du 26 Janvier 1905. M. G. Forbes communique quelques recherches de balistique extérieure. Les mires de canons sont tou- jours marquées pour des conditions types de vitesse initiale et de densité de l'air. Quand celles-ci changent, les mires doivent être corrigées. L'auteur trouve par la théorie que, si la densité de l'air augmente m fois et si la portée est diminuée m fois, l'élévation et le temps de la trajectoire doivent être diminués m fois, et empi- riquement que, jusqu'à 10° d’élévation (10.000 yards pour un canon de 12 pouces), l'élévation varie très approximativement comme l'inverse de la vitesse ini- tiale élevée au carré. — M. Frank Horton : Sur le module de rigidité torsionnelle des fibres de quartz et son coefficient de température. Pour cette recherche, l’auteur a employé la méthode dynamique, et il a divisé son étude en trois parties : 1° Détermination de la valeur absolue du module de torsion ; 2 Variation du module entre 45° C. et 1002 C.; 3° Variation du module entre 20° C. et 1.000° C. Les rayons des fibres employées ont été déterminés en mesurant leurs circonférences: on enroule les fibres entre deux tubes capillaires de verre fin et on compte le nombre de révolutions exé- cutées en parcourant une distance de 5 millimètres. Au moyen de cette méthode, on a mesuré des fibres d'un diamètre de 0,001 centimètre à 0,01 °/, près. Dans la seconde partie des recherches, l’auteur a chauffé le manchon entourant la fibre en utilisant les vapeurs de divers liquides bouillant sous la pression atmosphé- rique. Il à trouvé que le module de rigidité augmente comme une fonction linéaire de la température, mais les valeurs du coeflicient de température du module obtenues avec des fibres différentes varient considéra- blement. Durant les expériences entre 20° C. et4.000° C., les fibres étaient suspendues à l’intérieur d'un tube de platine qui était chauffé électriquement. L'auteur a trouvé que le module de rigidité augmente avec la tem- pérature, tout d’abord comme une fonction linéaire de cette température; mais, à mesure que la température s'élève, le degré d’accroissement diminue graduelle- ment, et l'on observe une rigidité maximum à environ 880° C. Le point dépassé, la rigidité diminue très rapi- dement avec une augmentation de température. — MM. M. W. Travers et A. G. C. Gwyer ont comparé l'échelle de température du thermomètre de platine avec l'échelle normale à des températures allant de — 190° C. à 4440, Ils concluent qu'il est possible d'ap- pliquer la formule parabolique de Callendar et Griffiths à la recalculation des différences entre l'échelle de pla- tine et celle du thermomètre à gaz. — M. C. Niven : Sur une méthode pour trouver la conductivité calori- fique. La première partie du Mémoire contient une description détaillée des méthodes employées pour trouver la différence de température, et une description de l'appareil employé. Il renferme aussi les résultats de quelques expériences faites avec cet appareil, lesquels sont comparés avec ceux trouvés par d’autres savants. Dans la seconde partie, l'auteur donne la solution du problème mathématique de la diffusion de la chaleur dans un solide infini à partir d’une ligne le long de laquelle elle est fournie à une vitesse constante, et la solution de quelques autres questions connexes. Un résultat de cette étude suggère une méthode pour trouver la diffusivité directement, lorsque la substance occupe une étendue suffisamment grande. — M. S. D. Chalmers : La théorie des objectifs optiques symé- triques. Dans les objectifs photographiques consistant en deux lentilles semblables symétriques par rapport à un point central, la partie postérieure est généralement corrigée pour les aberrations sphérique et chroma- tique, l'astigmatisme et la courbure du champ pour les objets éloignés, et ainsi tout le système est parfaite- ment corrigé pour l'unité de grossissement. Dans ce Mémoire, l'auteur discute les aberrations pour les objets éloignés. Dans la première partie, il avait prouvé que, en première approximation, les défauts ci-dessus men- tionnés sont corrigés dans tout le système lorsqu'ils sont corrigés dans le système simple. Au moyen dev constructions géométriques, symétriques par rapport à l'axe et au point central, l'auteur étend ces rés lies à des systèmes pratiques. Les tracés de rayons parallèles, incidents sur le système combiné, sont obtenus d'après ceux de deux séries de rayons parallèles incidents sur le système simple. Les aberrations du système combiné sont exprimées en termes du système simple avec de faibles erreurs, négligeables dans les systèmes pra” tiques, dues à ce que l’image du point est imparfaite” SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Seance du 24 Février 1905. M. C. V. Drysdale donne une exposition systéma= tique de la méthode d'enseignement de l'Optique élé= mentaire qui lui a paru la plus simple et la plus natu= relle : c'est la méthode des courbures. — M. R. J: Sowter présente et décrit l'appareil à disque coloré du D' Meisling, spécialement destiné à déterminer la cécité pour'les couleurs. — M. J. Schofield expose une mé= thode illustrant les lois du pendule simple. Un pendule est pourvu à son extrémité inférieure d'un étroit châssis horizontal portant des fils transverses verticaux: Pendant les oscillations du pendule, ces fils inter- ceptent un jet de mercure, et des signaux de temps sont envoyés à l'appareil enregistreur d’un chrono= graphe. Les distances entre les fils étant connues, elles donnent avecles mesures de temps une courbe «temps déplacement » du mouvement. On peut en déduire pa les méthodes usuelles les courbes cinématiques et les équations du système mobile. Le même principe peub être appliqué au pendule de torsion. SOCIETE DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 15 Février 1905. M. F. D. Chattaway étudie les dérivés nitrohalo génés des diamines aliphatiques, tels que l’éthylène tétra-chlorodiamine CIAz.CH?.CH°.AzCF, liquide stable émettant des vapeurs très irritantes. — MM. J. Ts Hewitt et H. V. Mitchell ont étudié l’action de l'acide nitrique dilué et d’un mélange d'acides nitrique et sulfurique concentrés sur les trois nitrobenzèneazo phénols. Dans les deux cas, la substitution a lieu en ortho par rapport à l'hydroxyle. Les 0-,m-,p- nitroben zèneazo-0-nitrophénols fondent respectivement à 187% 1799 et 212, — M. Ch. Proctor décrit une méthode pour le dosage de la saccharine. — M. Th. Ed. Thorpe a examiné les changements que peut produire le dé veloppement de bactéries dans le lait dans la quantité de graisses et de solides non gras; ils sont si minimes! qu'ils n’affectent guère les résultats de l'analyse, fait qui a une grande importance pour la recherche d adultérations dans le lait aigri. — M. A. Th. de Moui pied a étudié la condensation des éthers anilinodiacé tiques, soit seuls, soit en présence de benzaldéhyde où d’oxalate d’éthyle, au moyen de l’éthylate de sodium. M. D. Me Intosh a obtenu à basse température des composés définis entre les substances organiques oxygénées et les halogènes, tels que : CH*OBr, F. — 559$ C*H‘OBr, KE. — 61°; (CHt)OCI?, FE. — 510; (CH*)0Br# F. — 68°; (CH*)?CO CE, F. — 58°; CH*CO*(C'H')CE, FE 64; etc... Ces substances sont formées avec dégage ment d’une petite quantité de chaleur; elles ont u point de fusion défini et cristallisent én aiguilles ou 60 prismes. — M. F.$S. Kipping a préparé le phényléthyls Es propylchlorosilicane Si (C2H°) (C*H°)(C‘H°)CI par action: du bromure de propylmagnésium sur le phényléthyl=n dichlorosilicane; c’est un liquide bouillant à 2550 Traité par le méthyliodure de Mg, il fournit le phényls méthyléthylpropylsilicane, Eb. 229-2310, qui est dé composé par HS0* en donnant le méthyléthylpropylsi licol Si (CH®)(C2H5) (C'H7)OH et du benzène. L'auteur æ préparé par des moyens analogues : le phénylbenzylés thylpropylsilicane, Eb. 2499-51°; le benzyléthyldichlo- rosilicane, Eb. 1680-1700, le benzyléthylpropylchlorosi- licane, Eb. 194°-196 ; etc. — MM. R. de J. F. Struthers et J. E. Marsh ont constaté que le composé mercu- rique HgC*A7°.2(AzH°.AzH.C°H°) agit sur une plaque “photographique, même à travers une feuille de papier, en formant une épaisse tache noire au développement; il agit également à une certaine distance de la plaque, à travers une feuille d'aluminium. Les constituants de ce composé ont été essayés séparément. L'action de la phé- nylhydrazine est plus faible et plus diffuse que celle du composé ; le cyanure de mercure est tantôt actif, tantôt inactif. On a reconnu que d'autres sels de mercure sont également actifs dans certaines conditions. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION CANADIENNE Séance du 26 Février 1905. M. J. M. Neil : La récupération de l’étain des vieux fers blancs (voir p. 244). SECTION DE MANCHESTER Séance du 13 Janvier 1905. M. J. H. Lester présente ses recherches sur la déter- mination de l'humidité de la pulpe de bois. Cette détermination est rendue difficile par le fait que, dans une balle de pulpe, l'humidité n’est pas répartie unifor- mément, le centre étant plus sec que la périphérie, La question primordiale consiste donc dans un bon échan- tillonnage. è SECTION DE NEW-YORK Séance du 25 Novembre 190%. M. Ph. Schidrowitz montre l'importance de l'établis- ement d'étalons de pureté pour les liqueurs fermen- ées et distillées, servant de base à la-recherche des alsifications, et indique les grandes lignes pour l’éla- boration de ces types. Séance du 20 Janvier 1905. MM. E. C. Worden et J. Motion ont déterminé la omposition des solutions qu'ils emploient dans l’ana- se volumétrique au moyen de leur densité, mesurée u picnomètre. Les résultats sont très exacts, comme e montrent des déterminations comparatives, faites ar la méthode gravimétrique. Les auteurs donnent, n particulier, des tables pour les acides sulfurique, hlorhydrique, oxalique. — M. M. L. Griffin présente uelques considérations sur les meilleures méthodes our recueillir les prises d'essai destinées à l'analyse. j SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 25 Janviér 1905. $ M. F. J. R. Carulla propose certaines modifications à apporter aux wagons-réservoirs pour le transport du goudron de houille et des liqueurs de la fabrication du gaz d'éclairage, dans le but d'en réduire l'usure. — MM. G. J. Ward et A. H. Longden montrent qu'il est nc que la vitrification du fer est due à la présence lu composé SiFe?, produit à haute température en résence d’une scorie acide, et que, dans ces condi- tions, il y a tendance pour le soufre à se combiner avec le fer fondu. — M. M. C. Lamb a déterminé la Dontite de matières minérales contenues dans les feuilles de sumac. Pour le Æhus coriaria, la moyenne est de 5,89 /, de cendres; il y a peu de cendres dans le pétiole et beaucoup dans les nervures des feuilles. Dans les feuilles de T'amarix africana et de Pistacia lentiseus, qui servent à falsifier le sumac, il y a, en moyenne, 10 °/, et 6,8 °/, de cendres, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 19 © Qt SECTION D'ÉCOSSE Séance du 31 Janvier 1905. MM. R. R. Tatlock et R. T. Thomson proposent.une nouvelle méthode pour la détermination de faibles quantités de brome et de chlore dans l'iode. A 5 ou 10 grammes de l'échantillon, on ajoute 50 ou 100 cc. d’eau et du zinc en poudre ou en petits granules, jus- qu’à ce que tout l'iode soit converti en iodure de zinc. La solution est filtrée et on y ajoute 3,5 ou 7 grammes de nitrite de soude. Puis on acidifie exactement avec de l'acide sulfurique dilué, qui précipite tout l'iode; on le sépare par filtration. S'il en reste quelques traces, on les enlève par le benzène. Dans la solution, Br et CI sont précipités par le nitrate d'argent; on filtre sur un filtre pesé. On fait alors couler lentement sur le filtre 100 cc. d’une solution ammoniacale de nitrate d'ar- gent; tout le chlorure d'argent est dissous, et le bro- mure reste sur le filtre. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 19 Janvier 1905. 4° SciENCES PHYSIQUES. — M. V. Conrad a reconnu, par des observations faites sur le Sonnblick, que la valeur de la dispersion de l'électricité atmosphérique dans l'air qui entoure un sommet dépend surtout de l'échange d'air vertical entre l’air des vallées, pauvre en ions, et l'air des hauteurs, riche en ions. —M.F.Emich a déterminé la densité de l’anhydride carbonique à 2,000° C. en le laissant s'écouler, alternativement avec de l'azote, de l'extrémité étroite d'un tube en iridium vernissé chauffé électriquement et en mesurant le carré des rapports des temps d'écoulement. Les chiffres obtenus sont à peu près les mêmes qu'aux températures ordinaires, d’où l’on déduit que les rapports des den- sités sont à peu près constants. — M. J. Donau, en faisant passer de l’oxyde de carbone dans des solu- tions d’or diluées, a obtenu une coloration pourpre, due à la formation d’or colloïdal ; ces solutions sont iden- tiques comme propriétés à celles de Zsigmondy. — MM. K. Lesch et A. Michel, en oxydant par le per- manganate l’isobutyrate d'octoglycol, ont obtenu un acide monobasique C!?H#%*05, F. 79, qui est dédoublé, par ébullition avec KOH diluée, en acide isobutyrique et en un acide CSH‘°0", donnant une lactone, F.66°-67°. — M. F. Bock, en diazotant l’anthragallolamide par le nitrite d'amyle en solution alcoolique acide, a obtenu un diazoanhydride C‘#H#0?(0H).Az°0, dont la réduction par SnCl® conduit à la xanthopurpurine, F.270°. La mé- thylation de cette dioxyanthraquinone fournit deux éthers monométhyliques tautomères. — MM. H. Meyer et O. Hônigschmid ont confirmé pour la caryophyl- line la formule C#HS%O$, Cette substance donne : un dérivé tétracétylé, F.268°-2719; un dérivé monométhylé, F.187%; un dérivé monométhylé triacétylé, F.2129°-2130, Par oxydation avec l'acide nitrique, elle semble fournir un acide C#H®0*#, dont l’éther tétraméthylique fond à 1649-1659. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Werner présente les résultats de son expédition zoologique en Egypte et au Soudan égyptien relatifs à la faune des Orthoptères; elle comprend environ 105 genres, dont 8 nouveaux. — MM. A. Kreïdl et J. Regen présentent leurs recher- ches physiologiques sur la stridulation du Gry/lus cam- pestris. La hauteur du ton émis par le grillon a été déterminée par enregistrement phonographique ; c’est en moyenne le ut’. Par l'examen stroboscopique des mouvements des ailes, on a reconnu que les élytres se meuvent en avant et en arrière 6 à 8 fois par seconde. Des 131 à 138 plaques vibrantes qui se trouvent sur chaque rayon, dans la plupart des cas il y en au moins 131 qui sont touchées dans la stridulation. — M. H. Mo- lisch a repris l'étude de la question de Ja luminescence des œufs de poule et des pommes de terre. En Alle- magne. on désigne sous le nom de sooleiern des œufs 296 qui, après avoir été cuits, sont placés dans l’eau salée afin de les conserver plus longtemps; il n’est pas rare que de tels œufs deviennent phosphorescents. L'auteur montre que ces œufs acquièrent cette propriété lorsque, dans l’espace où ils ont été conservés, ils ont été infectés avec les bactéries phosphorescentes de la viande de boucherie. Or, il est très fréquent que, dans les garde- manger, les œufs soient en contact avec de la viande, ce qui explique la possibilité de l'infection. Il en est de même pour les pommes de terre bouillies. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Janvier et Février 1905. 10 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Volterra rappelle que M. Weingarten, dans une Note sur la théorie de l'élasticité, a reconnu qu'il peut arriver qu'un corps élastique, sans subir aucune action extérieure, se trouve dans un état de tension qui varie continuellement et régulièrement de point à point. Cest le cas d'un anneau, dans lequel on a coupé une mince tranche transversale, et dont on a soudé ensuite les deux bouts. M. Volterra, à son tour, discute la question de savoir si, en plus des anneaux et d’autres corps qui occupent des espaces plusieurs fois connexes, on peut rencontrer des corps simplement connexes qui se trouvent dans les conditions précédentes. M. Volterra, dans deux Notes, donne la démonstration de plusieurs théorèmes relatifs à ces questions. — M. E. Millosevich donne communication de ses observations sur la nouvelle comète Borrelly. — Mi!° J. Cipolla s'occupe du nombre des points d'une courbe algébrique de genre p, et démontre qu'il est possible de réduire, plus encore que ne l'ont fait Hurwitz et Segre, le nombre de ces points, — M. M. Abraham : Application de la méthode de Riemann à l'intégration des équations différentielles de la théorie des électrons. — M. L. Orlando s'occupe de l'intégration de A, entre deux plans parallèles, et dans une deuxième Note étudie quelques fonctions auxiliaires. —- M. G. Lauricella : Sur les dérivées de la fonction potentielle de la double couche. — M. O. Te- done : Sur le problème de l'équilibre élastique d'un ellipsoïde de rotation. — M. T. Levi-Civita a entrepris la recherche des solutions particulières des systèmes différentiels. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. L. Puccianti transmet la description de ses recherches sur les spectres d'in- candescence de l'iode et du brome. Il résulte de ces expériences que les vapeurs de ces deux corps fortement réchauffés émettent des radiations lumi- neuses que l'on doit attribuer à la température seulement, et présentent un spectre de bandes dont les spectres connus sont les inverses. L'observation directe et la photographie de ces spectres demandent des soins particuliers, pour éviter de les considérer comme spectres continus. —M. Artom communique les résultats obtenus dans les dernières expériences exé- cutées avec son système de télégraphie sans fil, qui utilise les rayons de force électrique elliptiques ou circulaires. Avec ce système, on a l'avantage d’engendrer un champ électromagnétique d'une grande intensité dans une direction donnée, de pouvoir profiter des propriétés de la syntonie perfectionnée par M. Marconi, et enfin de pouvoir recueillir facilement, à l’aide de récepteurs aériens particuliers, les rayons dans la direction qu'ils suivent. — M. C. Chistoni donne l'en- semble des mesures pyrhéliométriques exécutées à l'aide de l'actinomètre de Violle, en 1900 et 1904, à l'Observatoire géophysique de Modène. — M. E. Teglio présente le résumé de ses observations sur les seiches qui se produisent dans le lac de Garde, et qu'il a étudiées avec un limnographe de Sarrasin, à Desenzano, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES à l'extrémité sud de l'axe longitudinal du lac. Il semble que les seiches du lac de Garde soient plus fréquentes pendant les périodes de fortes perturbations atmosphés riques, et même de phénomènes seismiques. — M. Ge Gallo, ayant déterminé l'équivalent électrochimique du tellure, en recourant à la méthode de Faraday, a trouvé un poids atomique de 127,6 qui s'accorde parfaitemen avec les dernières recherches. — MM. I. Belluccieb D. Venditori ont préparé les sels de Roussin, sur les indications de Powel, et donnent l'analyse des nitrosuls fures ainsi obtenus. — MM. C. Ulpiani et C. A. Rodano! ont soumis l'éther eyanomalonique à l'électrolyse, obtenant un produit solide, cristallisé en rombes, in soluble dans les alcalis et dont le poids moléculaire ests double de celui de l’éther. — MM. G. Plancheret G Barbieri décrivent une méthode pour la préparation électrolytique «lu nitrate cérique-ammonique, composé dont on fait un large usage dans la fabrication des sels purs de cérium, pour l'industrie des manchons Auer — Avec la collaboration de M.C. Ravenna, M. Plancher a exécuté l'oxydation du pyrrol en imide maléïque, et il parle du produit obtenu. — M. B. Oddo a étud l'action du chlorure de sulfuryle sur les combinaison organo-magnésiennes mixtes. — M. F. Giolitti applique la méthode proposée par Bôttger, et qui se rattache à l'usage de l'électromètre comme indicateur dans l’alca limétrie et dans l’acidimétrie, pour résoudre le pros blème de la basicité normale des periodates alcalins} reconnaissant ainsi la bibasicité de l'acide periodique. = MM. G. Bruni et E. Tornani ont fait des recherches sur les picrates et sur d’autres produits d'addition de composés non saturés. — M. G. Guglielmo envoie lan description de quelques appareils simples pour l’exacte vérilication de l'heure. — M. R. Perotti a reconnu que la tourbe peut servir à la transformation de la cyana mide en composés ammoniacaux, transformation utili sable pour la fertilisation des terrains. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. F. Millosevich décrit quelques formes nouvelles et un nouveau type cristal: lin qu'il a reconnu dans un échantillon d'anatase de la Binnenthal; ces cristaux présentent une double colon tion en jaune plus ou moins foncé. — M. L. Fantappié transmet une étude cristallographique du péridote qu se trouve dans les terrains volcaniques près de Viterbe _M.E. Traina a trouvé des cristaux d’anglésite dam les géodes de quelques échantillons de galène des gs ments métallifères de la province de Messine, et i présente la description el les mesures. — M. C.F. rona ajoute des nouvelles observations à son travail la faune des calcaires avec ellipsoactinides de Capri, qu confirment la présence du type titonien dans cette îles M. E. Clerici, ayant pu étudier les matériaux recuei dans un sondage près de Rome, examine la nature dé terrains rencontrés par la sonde, et les fossiles qui S% trouvent renfermés. — M. R. Perotti a trouvé un£ nouvelle manière d'isoler les micro-organismes de nitrification en recourant à des plaques de carbonat de magnésie qu'on laisse longtemps immergées dans Î liquide nutritif. — M. V. Peglioni s'occupe d'une ma ladie qui attaque l'E vonymus japonica, plante largement cultivée dans les jardins; cette maladie est prod par un oïdium. M. Peglioni décrit les particularités d résistance de ce parasite, que l'on peut combattre avec avantage en recourant au sulfate de cuivre et aux a@ ministrations de nitrate de soude aux terrains OùMS trouvent les plantes malades. ‘ Ernest Mancini. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE 5 AVRIL 1905 Revue générale à 1 ÿ Le des DIRECTEUR : TRS CRAN pd A C2, LE dede us $ 1. — Génie civil — L’attache des rails aux traverses de che- min de fer. — On se rend facilement compte de l'importance que peut avoir, au point de vue de la écurité des voyageurs, un mode d'attache inébranlable “(les rails aux traverses de chemin de fer. En France, où l’on emploie presque exclusivement des traverses “en bois, des tire-fond vissés dans la matière ligneuse maintiennent le rail soit directement, leur chapeau venant serrer le patin, soit par l'intermédiaire de coussinets avec coins. Au moment du passage des Mhrains,les traverses subissent une série de compressions momentanées, suivies de relèvements plus ou moins brusques d'après le bourrage du ballast; de plus, dans es courbes, elles sont soumises à une chasse latérale. es mouvements répétés, agissant dans des directions verses, tendent à desserrer les tire-fond et à dété- äorer leur logement, et ce fâcheux effet, qui, naturel- ment, se produit plus vite avec les bois tendres qu'avec les bois durs, nécessite une surveillance et un “entretien constants. % M. En vue d'éviter cette dislocation rapide du logement du tire-fond dans la traverse, et pour obtenir un ser- rage du rail d'aussi longue durée que possible, on a eu idée, il y a quelques années, d'introduire dans la raverse, à l'endroit du tire-fond, une cheville en bois dur taillée debout, à pans ou filetée, qu'on enfonce Comme un coin ou qu'on visse dans la cavité ménagée cet effet et dans laquelle on vient ensuite visser le i te-fond lui-même. C'est le {renail anglais, mais son bplication ne s'est guère répandue en raison des ombreux inconvénients qu'elle entraîne. Ilest difficile, effet, au trenail de supporter le serrage, les filets du tire-fond agissant comme un alésoir, et, s’il semble “résister à l'arrachement continu suivant l’axe du tire- ond, il n'en est pas de même lorsqu'il est souris à des Horts par secousses qui mächent les fibres du bois. De plus, la pose en est coûteuse, difficile à régler et impossible sans déplacement de la traverse. Pour obvier à ces difficultés, M. Thiollier, ingénieur, à proposé l'emploi de sa garniture métallique, et les nombreux essais qu'en font actuellement la plupart des grandes Compagnies, en France et à l'Etranger, sont REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. ACrCT CES pures et appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. F] CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE en train de prouver la réalité absolue des avantages annoncés par l'inventeur : qu'on s'imagine une hélice d'acier à section ovale, d'un pas égal à celui du tire- fond, dont le diamëtre intérieur est sensiblement le même que celui du noyau de ce tire-fond et qu'on incorpore à l'endroit où viendra se placer le tire-fond, dans une alvéole découpée préalablement dans la tra- verse au moyen d'un taraud tranchant; si l’on vient visser le tire-fond sur cette garniture et ensuite serrer, on comprend immédiatement que, par le contact du chapeau du tire-fond avec le rail ou avec le coussinet, la garniture augmentera de diamètre en s'appliquant contre son logement, s'encastrera dans les filets du tire-fond et fonctionnera comme un véritable ressort, s’opposant à tout desserrage spontané. Les facilités de la pose sont considérables : on peut exécuter le travail sans déplacer les traverses et, par conséquent, en pleine exploitation. Enfin, on se rend très bien compte, par la description qui précède, que le prix de revient d'une attache de ce genre, fabriquée en série, est très faible et se réduit à quelques centimes. On a adressé certains reproches à l’attache métallique : on a dit que la garniture s’oxydait sous l’action du tannin du bois et de l'eau coulant le long du tire-fond. On peut remarquer qu'il suffit de plonger la garniture dans le goudron avant la pose pour l'isoler complètement aussi bien de la traverse que du tire-fond. Quelle supériorité à ce point de vue sur le trenail en bois, susceptible de se fendre sous l'effort du serrage, de s’aléser au contact des tire-fond ébréchés et de. se prêter ainsi, en présence de l'humidité, à la végétation des champignons qui désorganisent les fibres du bois : on injecte, il est vrai, le trenail à la créosote; mais, même dans ces conditions, cette cheville de petite masse, ajoutée après coup et n'ayant pas le mème retrait que la traverse, joue bientôt le rôle d'un nœud dans le bois et la décomposition ne s'en produit guère moins rapidement. On a pu vérifier l'exactitude de ces faits dans les parties de voies souterraines, el notamment au Métropolitain de Paris, où l’on considère de plus en plus l’attache Thiollier comme un moyen très efficace pour obtenir une voie stable, d'une pose facile et d'un entretien peu coûteux. Et puis, dans un autre erdre d'idées, n'est-ce pas là la solution qui 1 298 permettra aux Compagnies de généraliser davantage l'emploi des bois tendres pour traverses et la réutili- sation des vieilles traverses hors de service? Emile Demenge, Ingénieur métallurgiste. $ 2. — Physique Recherches sur la loi de Draper. — Dans un récent numéro de 7] Nuovo Cimento (nov. 1904), M. A. Amerio publie les résultats d'intéressantes recherches qu'il vient de faire sur la loi dite de Draper. Cette loi, on le sait, a été énoncée par M. J. W. Dra- per, en 4847, sous la forme suivante : Tous les corps solides, et probablement aussi tous les métaux en fu- sion, deviennent lumineux, c'est-à-dire commencent à émettre un rayonnement propre, à une même tempéra- ture, qui est la température de la chaleur rouge et qui, d’après M. Draper, tomberait aux environs de 5250 C. La loi fut invoquée, dans la suite, par M. Kirchhoff pour soutenir sa théorie sur la relation entre les pou- voirs d'absorption et d'émission. Comme le fait voir l’auteur, d’autres physiciens, tels que Davy et Daniell, ont formulé cette même loi bien avant Draper, mais en attribuant à la température du rouge des valeurs différentes. Cette question a même été traitée, en détail, dès 1784, par Thomas Wed- gewood, d’après lequel la température en question serait de 508° centigrades. Comme, toutefois, certaines investigations entre- prises après les expériences de Draper faisaient entre- voir un désaccord avec la loi susmentionnée, l’auteur vient d'exécuter une série très complète d'expériences pour vérifier cette loi; voici les principaux résultats qu'il trouve : 1° La loi dite de Draper est inexacte; 20 Les corps possédant un rayonnement dépendant de leur température deviennent lumineux à des tem- pératures qui sont d'autant plus basses que leur pou- voir d'émission est plus grand; 30 Le pouvoir d'émission apparent dépendant de la température des substances ambiantes, la température de luminosité peut être variée en modifiant cette der- nière. Comme, toutefois, les variations du pouvoir d'émission par rapport aux ondes lumineuses restent tout à fait inappréciables jusqu'à 300°, les chiffres trouvés par l’auteur peuvent être regardés comme représentatifs des températures auxquelles les métaux en question deviendraient lumineux dans l’espace libre, même dans le cas où ce dernier serait au zéro absolu. La variation du pouvoir d'émission au milieu ambiant peut, cependant, se faire sentir dans le cas des petites longueurs d’onde et des basses températures ; 4° Les expériences faites par l'auteur sur une sphère de laiton chauffée ne suffisent point à décider si le spectre d'un corps renferme toute la série des radia- tions ou si, au contraire, les longueurs les plus petites ne se produisent que graduellement et à mesure que la température s'accroît. Mais ces mêmes expériences font bien voir qu'avant mème de devenir lumineux, les corps présentent dans leur spectre quelques radiations visibles, mais dont l'intensité est au-dessous de la limite de sensibilité de l’œil, et qui ne peuvent être observées que grâce à une superposition appropriée. Le Spectroscope à vision directe de Bla- kesley à une seule espèce de verre. — Dans le spectroscope à vision directe ordinaire, tel que l'a imaginé Amici, on dispose, l'un à la suite de l’autre, un certain nombre de systèmes de deux prismes, l'un de flint, l’autre de crown. M. Blakesley a imaginé un spectroscope à vision directe ne comprenant que des prismes du même verre et basé sur le principe fondamental suivant : Considérons la formule générale : . A+d A SD — SIN. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE dans laquelle À est l'angle de réfraction du prisme; d la déviation minima, y l'indice de réfraction. Si l'angle A est tel que la déviation d lui soit égales on à : & étant donné (c’est-à-dire le verre étant choisi), le rayon qui doit être transmis étant également donné; c'est en partant de cette formule qu’il faut construire l'angle de réfraction. L'appareil comprend : le collimateur, quatre prismes le télescope (fig. 1). Le collimateur et les deux premiers prismes forment, un système rigide ; les deux autres prismes, un second système; nous supposerons, pour le raisonnement, que le premier prisme en forme réellement deux, comme l'indique la figure accessoire (AC — C'B). L'angle de réfraction doit ètre égal à l'angle de dévia tion minimum; le rayon du collimateur doit donc tom ber sur le prisme en faisant un angle droit avec la face pa laquelle le rayon émerge; le rayon, émergeant, est per pendiculaire au côté AC sur lequel a lieu l'incidence; ce: rayon est reçu sur un prisme isocèle obtusangle dont la base BC' est parallèle au rayon ; le rayon cd émergeant de ce second prisme sera à angle droit sur la face A Télescope Fig. 1. — Disposition des prismes et marche des rayonsk dans le spectroscope à vision directe de M. Blakesley. sur laquelle a eu lieu la première incidence. D'autre rayons subiront les mêmes déviations et pourron recevoir une seconde dispersion par un prisme DEF de même angle que le premier, mais dont le sommet E soit tourné de façon que le rayon considéré en premiel lieu soit parallèle à sa direction primitive. Le télescope pourrait avoir été placé de façon à recevoir les rayons qui émergent en e (abedefqh1k est premier lieu tombe au centre du champ, il est clair qu passe encore symétriquement à travers les quatre prismes, donc avec la déviation minima, bien que rayon ne soit pas parallèle à sa direction prumiti entre le second et le troisième prisme. Sur la figure, les prismes 2 et 3 ont été représentés de la même forme que le 1 et le 4; un de leur cû n'étant pas employé, ils peuvent être, en pratique écourtés. Grâce à la qualité du verre, la vision est excellentes de À en H :la ligne F correspond très approximative ment au rayon choisi; la dispersion entre A et G es de 18020". 8 3. — Chimie La constitution des combinaisons ferro cyaniques bleues. — On sait que l'action des se de fer sur les ferrocyanures donne lieu à la précipit tion de substances d'un beau bleu, quelquefois violaë solubles ou insolubles, auxquelles on a donné les no de bleu de Prusse, bleu de Turnbull, bleu ou violet à Williamson, et sur la constitution desquelles il règ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE encore quelque obscurité. MM. K.-A. Hofmann, O0. Heine et F. Hôchtlen ! viennent de se livrer, au Laboratoire de Chimie dépendant de l'Académie Royale des Sciences “de Munich, à une étude approfondie de tous ces com- posés, et les résultats de fours recherches semblent jeter une lumière à peu près définitive sur la question controversée de la constitution des combinaisons fer- “rocyaniques bleues. Voici, d'ailleurs, les principales - conclusions auxquelles ils sont arrivés : 1° Le bleu de Prusse soluble, que l’on prépare par “l'action du ferrocyanure de potassium ({ mol.) sur un sel ferrique {moins de 4 mol.), est bien, comme Skraup “l'avait déjà indiqué, identique au bleu de Turnbull soluble, qui se forme par l’action du ferricyanure de . potassium (4 mol.) sur un sel ferreux (moins de 1 mol.). Les deux composés constituent le sel double de fer “(ferrique) et de potassium de l'acide ferrocyanhydrique “et renferment de l'eau qui ne peut être chassée sans “décomposition; la formule qui rend compte de ces “faits et concorde avec les analyses est : [Fe(CAz)°KH°}. “Fe(OH}; … 2e Le bleu de Prusse insoluble, que l'on obtient par action du ferrocyanure de potassium sur un excès de “sel ferrique ou sur un mélange de sels ferrique et ferreux, est identique avec le bleu de Turnbull inso- “luble, préparé par l'action du ferricyanure de potassium Sur un excès de sel ferreux et lavé complètement en présence de l'air. Les précipités obtenus à chaud en “présence d'acide libre sont des mélanges complexes; mais, à 15°, sans excès d'acide, il se forme toujours le el ferrique de l'acide ferrocyanhydrique, Fe7{CAz}'5 + “10H°0, dans lequel l’eau résiste à tous les moyens de .dessiccation, ce qui montre que c'est de l'eau de consti- _fution; … 3° Lorsqu'on prépare l'acide cyanhydrique par ébul- “lition du ferrocyanure de potassium avec l'acide sulfu- rique, il reste un résidu qui se colore peu à peu en bleu. Ce résidu n'est pas identique avec le précipité qui se forme à la température ordinaire par réaction “du ferrocyanure de potassium sur un sel ferreux. “Celui-ci s’oxyde, suivant les proportions du mélange, [en bleu de Prusse soluble ou insoluble; celui-là n’est oxydé que partiellement à l'air, mais il l'est totalement ar l’eau oxygénée en donnant le violet de Williamson. e corps possède une composition identique à celle du “bleu de Berlin soluble, jusqu'à la teneur en eau, mais mil doit vraisemblablement être considéré comme un polymère, de formule : Fe (OH) KH[Fe(CAzX “YFe(CAz}JKH. NFe(0H)/ 3 L'eau qu'il renferme ne peut être éliminée par dessic- Mcation. Le résidu de la préparation de l'acide cyanhy- drique serait le sel ferreux correspondant : 4 Fe L2TFe(CA2/ Fe! 1K2 K°[Fe(CAz) KE QE . ze violet de Williamson se distingue du bleu de Prusse par sa stabilité relativement élevée vis-à-vis des alcalis QUES ; —_;° Les substances bleues ou violettes mentionnées précédemment se produisent également aux dépens du mélange de ferricyanure de potassium et de sel èrrique après réduction par l’eau oxygénée. Il résulte è ce fait, ainsi que de la stabilité de ces substances -à-vis de ce réactif, que toutes renferment le com- exe ferrocyanique lié au fer ferrique, et que l'hypo- èse, adoptée jusqu'à aujourd'hui, de l'existence de complexes ferricyaniques et d’atomes ferreux situés en dehors des radicaux n'est plus admissible. wi Liebigs Annalen der Chemie, t. CCCXXXNII, n° 1, p. 1- 299 $ 4. — Physiologie Rôle des muscles spinaux dans la marche chez l’homme. — Les muscles qui s'insèrent sur la colonne vertébrale, le bassin et le thorax, jouent un rôle important dans l'équilibre du corps pendant la marche. L'action de ces muscles a été étudiée, autre- fois, par Gerdy et, plus récemment, par Paul Richer, Dubois-Raymond. M. H. Lamy a fait une analyse plus minutieuse encore de leur rôle aux différents moments de la marche‘, qu'il explique comme suit : Les muscles spinaux (sacro-lombaire et long dorsal) se contractent énergiquement à chaque pas dans la marche normale sur un plan horizontal. Cette contrac- tion est unilatérale et se produit du côté du membre inférieur oscillant; elle passe alternativement d'un côté à l'autre comme l’oscillation elle-même. Elle débute à l'instant précis où le talon du membre portant vient rencontrer le sol. C'est une contraction soudaine, brusque, se produisant à la facon d'un réflexe qui serait provoqué par le contact du pied opposé avec le sol. Elle dure tout le temps de l’oscillation de la jambe. On peut la sentir en placant soi-même pendant la marche les mains sur la région lombaire. La chrono- photographie la révèle nettement. Cette contraction, dans la marche, est liée, non à la progression, mais à la translation du poids du corps d'un pied sur l’autre; elle se produit sous la mème forme aussi bien dans l’oscillation sur place que dans la marche en avant. Son rôle, dans la marche, est d'assurer l’équilibration latérale du tronc; elle s'oppose à l'inflexion latérale de la colonne vertébrale du côté où porte le poids du corps, et au déplacement de la verticale passant par le centre de gravité du corps en dehors du pied portant sur le sol. La contraction unilatérale de la masse sacro-lombaire s'accuse par un changement d'aspect caractéristique dans la configuration des reliefs musculaires du dos : à tel point qu'à la simple inspection de ces régions, chez les individus maigres et musclés, on peut recon- naître quel est le côté sur lequel porte le poids du corps, soit dans la marche, soit dans l’oscillation sur place. $ 5. — Sciences médicales Type infantile du gigantisme.— On à pu voir dans cette Fevue quelles étaient les idées actuelles sur le gigantisme*. MM. Brissaud et Henry Meige ont mis en évidence les liens de parenté qui unissent le gigan- tisme à l'acromégalie. Le gigantisme doit ètre consi- déré comme une maladie de la croissance ; liée à une hyperactivité des cartilages juxta-épiphysaires de con- jugaison et à la persistance anormale de ces cartilages après l’époque de la majorité, où normalement ils dis- paraissent. L’acromégalie est une affection liée, elle aussi, à un trouble de l’ostéogenèse, mais qui ne se produit qu'après la disparition des cartilages de conju- gaison et qui se traduit, non par une augmentation en longueur de tout le squelette, mais par un accroisse- ment des « extrémités des os et des os des extré- mités », suivant la formule de M. P. Marie, auquel est due la connaissance de l’acromégalie. Chez certains sujets, le trouble ostéogénique se ma- nifeste d'abord par le gigantisme; puis, lorsque les cartilages de conjugaison ont disparu, par l’acroméga- lie. C’est le type acromégalique du gigantisme. Chez d’autres, les cartilages de conjugaison persistent au- delà du terme normal; la croissance en longueur peut donc se poursuivre; on a affaire alors au {ype infantile du gigantisme. C'est un nouvel exemple de ce genre { Nouvelle Iconographie de la Salpétrière, numéro 1, 1905. 2 E. Fexpez : Le Gigantisme chez l'homme (Revue Géné- rale des Sciences, 28 février 1904). 300 que MM. Brissaud et Henry Meige ont présenté à la Société de Neurologie de Paris (Janvier 1905). Le sujet en question, bien qu'il fût âgé de trente ans, pré- sentait les signes extérieurs de l'infantilisme : absence de poils, conformation un peu féminine; sa mentalité élait aussi enfantine. Cependant, on remarquait chez lui l'ébauche de quelques déformations acromégaliques. L'examen radiographique à fait voir que les soudures épiphysaires élaient en voie de disparition. Il s'agit donc d'un géant qui, après avoir présenté le type infantile, tend à se rapprocher du type acromégalique. Il est intéressant de noter la coexistence, dans la famille de ce malade, d’un certain nombre d'anomalies corporelles : le gigantisme chez un ascendant, l'obésité chez une sœur, une longévité anormale chez d'autres membres de la famille, ainsi qu'une fécondité excessive accompagnée d’une grande léthalité. On trouve ainsi rapprochées une série d'anomalies évolutives de l'indi- vidu et de l'espèce. N 6. — Enseignement et Sociétés Au Muséum d'Histoire naturelle.—Le Ministre de l'Instruction publique est venu récemment au Muséum inaugurer la vitrine des grands carnassiers quaternaires, offerte par M. Edmond de Rothschild. Cette vitrine, dont la Æevue a déjà parlé, renferme une véritable ménagerie d'animaux quaternaires contre les- quels nos ancêtres préhistoriques ont eu à lutter : il s'y trouve, en effet, les squelettes de trois ours, de trois lions, d'une hyène et d'un loup des cavernes. Ces squelettes ont des attitudes variées, comme à l'état de vie. C'est dire que leur reconstitution a été une besogne délicate; car non seulement les osse- ments fossiles sont extrêmement fragiles et doivent être maniés avec de grandes précautions, mais le nou- veau système de montage employé a augmenté encore les’ difficultés. On a remplacé, en effet, les tiges verti- cales en fer qui soutenaient le squelette par des tiges dabier aussi minces que possible et qui suivent la courbure des os de façon à constituer au squelette une armature peu visible. Enfin, une attitude plus vraie a élé donnée aux squelettes en se basant sur des photo- graphies instantanées d'animaux vivants voisins des animaux fossiles. Le Ministre, avant de se retirer, a promis de faire tous ses efforts pour faire augmenter les ressources mises à la disposition du Muséum pour ses collections, car il trouve dérisoires les sommes inscrites au budget. Il estime qu'il y aurait aussi nécessité à modifier les conditions d'avancement des assistants. Société de Géographie de Paris. — La Société de Géographie de Paris, dans sa séance du 17 mars, a distribué les prix suivants pour l’année 4905 : Prix Jean Duchesne-Fournet (6.000 francs et une médaille spéciale) : M. Auguste Chevalier, pour sa Mis- sion scientifique Chari-lac | Tchad; Médaille d'or de la Société : M. Paul Doumer, son ouvrage : L’Indo-Chine française. Prix Ducros-Aubert (1.400 francs et une médaille d'or) : M. Léon Diguet, pour les résultats scientitiques de ses voyages en Amérique; Prix Edouard Foa (1.500 francs et une médaille spé- ciale) : M. N. Willatte, pour ses travaux astronomiques el sa mission au Sahara en 1904; Prix Louise Bourbonnaud (médaille d'or) : le com- mandant Alex. Moll, pour sa mission de délimitation Niger-Tcehad (1902-1904); Prix Léon Dewez (médaille d’or) le capitaine Besset, pour ses explorations dans le Tidikelt et le pays des Touaregs du Nord; Prix Auguste Logerot (médaille d'or) pour : le D' Ch. Ma- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE (1895-1905); Prix Alexandre de la Roquette (médaille d'or) à M. Erich von Drygalski, pour ses explorations au Groens land (1891-1893) et dans l’ Antarctique (1901-1903); Prix Conrad Malte-B run (médaille d’or) : le D'Otto Nordenskjold, pour son expédition antarctique suédoise, (1903-1904) ; Prix Jules Girard (médaille d'or) M. Bénard, pour ses travaux océanographiques ; | Prix Erhard | (médaille d’or) : M. Marius Chesneau pour ses travaux car tographiques ; | Médaille de vermeil de la Société : M. P. Joussetl pour l’ensemble de ses publications géographiques; Prix Charles Maunoir (médaille de vermeil) 2 M. Charles Alluaud, pour les résultats scientifiques de“ ses voyages à Madagascar et dans l'Afrique orientales (1894-1904) ; Prix Juvenal Dessaignes (médaille de vermeil) M. Joseph Deydier, pour ses travaux sur la Guyane fran çaise; Prix Janssen (médaille spéciale de vermeil). M. l'abbé Aloys Froc, pour ses travaux à l’Observatoires magnétique et météorologique de Zi-Ka-Weï; Prix Francis Garnier (médaille d'argent) : M. Charles. Lemire, pour l’ensemble de ses publications géogra: phiques, de 14895 à 1904; . Prix William Huber (médaille d'argent) : M. le Dr Hans Schardt, pour ses travaux sur la structure de Alpes; Prix Alphonse de Montherot (médaille d'argent) M. Félix Hémon, pour l'ouvrage Sur le Yang-Dsè (1900-1901) ; Prix J.-B. Morot (médaille d'argent) : M. P. La Portes pour ses explorations des Glénans et du Raz de Seins Prix Alexandre Boutroue (médaille d'argent) M. Etienne Clouzot : les Marais de la Sèvre niortais@ et du Lay, du X® à la fin du XVE siècle. Prix Charles Grad (médaille d'argent) : M. W.-A.-B Coolidge, pour ses travaux historiques sur les Alpes; Prix Alphonse Milne-Edwards (médaille d’ argent) e le Dr Ant. Magnin, pour son ouvrage : la Végetationl des lacs du Jura; Médaille d'argent de la Société : le R. P. Morice, pour son exploration de la vallée du Netchakok (Ca nada te d'argent de la Société : le lieutenant Pierre Castel, pour son ouvrage : Tébessa. Prix Jomard (ouvrage : les Monuments de la Géogr phie) : M. Henry Vignaud, premier secrétaire de l'Ame bassade des Etats-Unis, pour ses travaux relatifs l'histoire de la Géograghie. M séance s'est terminée par une conférence de Alluaud, qui a rendu compte de la dixième Mission ER qu'il vient d'effectuer dans l'Afrique oriens tale. Ce voyageur a d'abord visité l'Afrique anglaises l'aide de l’Uganda Railway, long de 1.000 kilomèt et allant de Mombaza à Port- Florence, sur le lac Vics toria. Cette colonie anglaise est plutôt indienne pal l'utilisation méthodique des Hindous selon les ap tudes de chaque caste. ! Dans l'Afrique orientale allemande, M. Alluaud visité les lacs et le massif du Kilimandjaro, ce pic nes geux de 6.000 mètres, sous l'équateur. Il en a étudié la faune et la flore dans les différentes zones : la 70 des cultures jusqu'à 1.800 mètres, celle de la for 6 équator iale jusqu’à 3.200 mètres, celle des prairies jus qu'à 4.000 mètres, plus haut le désert alpin, et enfin# 5.200 es les glaces éternelles. Les documentsse ientifiques rapportés par M. Allwaud et étudiés en ce moment au Muséum, sont nombrouxel importants. Charles: A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 301 LE MODE DE FORMATION D'UN DÔME VOLCANIQUE ET LA CRISTALLISATION DES ROCHES ÉRUPTIVES D'APRÈS LES OBSERVATIONS FAITES AU COURS DE L'ÉRUPTION DE LA MONTAGNE PELÉE! 3 L'éruption de la Montagne Pelée, qui, en mai 1902, “à débuté de la façon foudroyante que l’on sait, ne + pas seulement célèbre dans l’histoire du 4 volcanisme par la catastrophe sans précédent qui, en moins d'une minute, a anéanti une ville floris- + et ses 28.000 habitants; son étude apporte, en RE un jour inattendu sur quelques questions capi- | Miles du volcanisme et de l’histoire des roches. Je ï ne m'occuperai ici que de deux d'entre elles, le mode de formation des dômes volcaniques et la produc- “tion du quartz dans les roches éruptives. en ee 5 2: I. — LES DÔMES VOLCANIQUES. * . pa ns F. À Parmi les divers Lypes de montagnes qu'édifient - les volcans, les cônes à structure stratifiée, pourvus un cralère, sont aujourd'hui connus dans les - moindres détails de leur structure et de leur mode … de formation, grâce à l'étude de nombreux volcans $ en activité, venant éclairer celle des volcans éteints. 1 n'en est pas de même pour les montagnes en - forme de dômes, généralement dépourvues de cra- “tère, que constiluent en particulier, dans un si grand nombre de régions volcaniques, les rhyolites, les trachytes, les phonoliles, les andésites, dômes qui, depuis qu'il existe des observateurs, ne s'étaient jamais produils au cours d'une éruplion étudiée. Ces diverses roches étant peu fusibles, on suppo- “sait bien à priori quel avait pu être le mécanisme de la production des dûmes qu'elles forment, méca- “nisme consistant dans l'accumulation de matériaux peu fluides au voisinage d'un orifice de sortie; mais la démonstration directe de cette hypothèse restait à faire. Les dômes volcaniques n'ont pas toujours une forme régulière : ils sont souvent hérissés d'aspé- rilés à aspect étrange, d'aiguilles ruiniformes. L'opinion généralement admise pour expliquer ces “Singularités morphologiques consistait à supposer “que les dômes qui les présentent ont été primi- “_…_. L'Académie des Sciences vient de publier, sous les “auspices des Ministères de l'Instruction publique et des Colonies, un livre intitulé : La Montagne Pelée et ses érup- tions (Paris, Masson, éditeur, 1 vol. in-4° de ee pages avec 238 figures dans le texte et 31 planches en héliogra- D re), dans lequel M. A. Lacroix a donné les résultats “des deux Missions scientifiques qu'il a dirigées à la Martinique æn 1902-1903 : les figures ci-jointes en ont été extraites avec | l'autorisation de l'éditeur. QUARTZIFÈRES tivement recouverts par des matériaux de pro- Jection, enlevés plus lard par l'érosion qui les a eux-mêmes profondément entamés, de telle sorte que toutes ces irrégularités étaient considérées comme dues à un processus destructif. En 1866, l'éruption du Georgios, à Santorin, sem- bla, à ses débuts, devoir fournir la lumière désirée sur ces importantes questions. Les géolagues accou- rus pour étudier cette éruption, dont M. Fouqué a fait une étude magistrale, virent surgir des flots des amas de blocs incandescents d'andésite, roulant les unssur les autres, laissant pressentir, plutôt que voir le magma igné sous-jacent, édifiant ce qui a été désigné alors sous le nom de cumulovolcan. Mais, bientôt, l’amas ainsi construit était décapité par de violentes explosions, des blocs de lave et des cendres s'accumulaient autour d’un cratère béant ; le cumulovolcan s'était transformé en un cône stratifié à cratère, des flancs duquel s'épanchaient des coulées de lave qui agrandirent rapidement l'ilot nouveau-né. Ce que la fin de l’éruption de Santorin avait caché aux yeux des observateurs, la Montagne Peiée devait nous l'apprendre. IL. — LA MONTAGNE PELÉE ET SON ÉRUPTION. Le massif de la Montagne Pelée constitue la partie septentrionale de la Martinique; sa superficie totale est d'environ 120 kilomètres carrés, soit environ le sixième de l'ile. Il offre à peu prèsles dimensions du massif du Vésuve, compris dans son ensemble géo- logique, mais avec une altitude un peu plus grande. La Montagne Pelée a, en effet, la forme d'un cône assez régulier, dont le diamètre de base varie de 11 à15 kilomètres; son altitude maximum élait, avant l'éruption, de 1.351 mètres. De nombreuses vallées, généralement encaissées, s'irradient dans tous les sens à partir du sommet; l’une d'elles, celle de la Rivière Blanche, sur le versant Sud-Ouest, a eu une importauce toute particulière au cours de l’éruption. Le sommet de la montagne est formé par un pelit plateau, sur lequel se trouvait un étang minuscule, le lac des Palmistes. Une éminence en forme de dent, le morne La Croix, qui, avant l'éruplion, était le point culminant de l'ile’, se dressait sur l'un de 1 Des éboulements dans la caldeira ont réduit ce morne à un petit rocher ne dépassant le niveau de l'étang remblayé 302 A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE ses bords; à ses pieds, du côté du Sud-Ouest, s'ouvrait une vaste cavité, béante, dont le fond était occupé jadis par une pelite cuvette géné- ralement asséchée et appelée, pour cetle cause, l'Étang Sec. Cette grande cavité, dite de l'Élang Sec, n'était autre chose que la caldeira d'un ancien volcan; c'est elle qui a été le centre unique de l'éruption actuelle. Elle était bordée de tous côtés par de hautes falaises, sauf du côté du Sud-Ouest, qu'entaillait une échancrure en forme de V, dirigée du côté de la malheureuse ville de Saint-Pierre, distante d'environ 8 kilomètres. La Monta- gne Pelée pré- = sente unecon- SDIE stitution géo- logique fort simple, de na- ture unique- ment volcani- que. À sa base se rencon- trent des brè- ches et des conglomérats à gros blocs, comparables à certains de ceux du Can- tal, et recou- verts par un épais man- teau de ponce. Zn Toutes les ro- mA Can 3 F PIE 278 \\ ÿ ches qui S'y A EE rereiN trouvent sont des andésites Fig. 1. — Le sommet de la Montagne Pelée en mars 1903. — La vieille caldeira de ses maisons : . l'Étang Sec est en partie remplie par le dôme de formation récente : l'aiguille : à hypersthe- est formée par le point 1579. Cette carte est la projection sur un plan horizontal de pierre. ne, roches delafgure Le même. constituant phénomène aussi quelques dykes et coulées de moindre im- portance. Les traits essentiels de l’éruption actuelle peu- vent être résumés en quelques lignes. Les phéno- mènes précurseurs ont été peu importants, débu- tant en février 1902 par le réveil de vieilles fumerolles. Le 24 avril, pour la première fois, on voit s'élever de l'Étang Sec une colonne de vapeurs chargée de cendres; dans la nuit du 3 au 4 mai, celles-ci deviennent plus abondantes et sont entrai- nées sur toute la Martinique. Le 5, une violente explosion dans la cuvette de l'Étang Sec rejette à l'extérieur l’eau et les cendres que d'une vingtaine de mètres à peine : son altitude est ac- tuellement d'environ 1.230 mètres. qui s'y étaient accumulées; la masse boueuse qui en résulte dévaste la vallée de la Rivière Blanche et fait, à son embouchure, les premières victimes. Pendant les jours suivants, de la lave s'accumule dans la vieille caldeira enveloppée par un manteau de vapeurs; puis, le 8 mai, à 8 h. 2 du matin, il en part subitement, par l'échancrure signalée plus haut, ce que nous savons maintenant avoir été une nuée ardente, masse énorme et très dense de gaz, de vapeurs et de matériaux solides à haute tempéra- ture, dévalant sur les flancs de la montagne, sous la double influence de l'explosion initiale et de la gravité. Sur son passage, dans un sec- teur de près de 100°, tout est ravagé et brûlé; la nuée 7 tre UE F7 7 7 VILLE LT LEZ rss traverse la rOIx 1 . 4 ° LOU S | ville de Saint- \P/mistes! Pierre, avec une vitesse probable d'environ 150 . mètres à la seconde, en- sevelissant la nombreuse population de cette floris- sante cité sous les rui- nes incen- diées de ses. édifices et de is à à KE se renouvelle le 20 mai ; puis, avec une intensité moindre, le 26 mai, le 6 juin, le 9 juillet; enfin, une éruption plus violente survient le 30 août. À partir de ce moment, l’activité diminue, avec, cependant, quelques périodes plus ou moins longues de suracz tivité. Le travail du volcan se manifeste dès lors surtout par l'accroissement lent d’un amas de lave, toujours localisé dans la vieille caldeira. De no vembre 4902 à février 1903, de nombreuses nuées ardentes se succèdent, et c'est alors qu'il m'est possible de faire l'étude détaillée de ce phénomène si remarquable. Celte période de suractivité est séparée d'une autre, qui a duré d'août à sep tembre 1903, par une série de mois plus tran= quilles. Depuis lors, l'aclivilé s'est apaisée, sans cependant avoir complètement cessé ; il ne se pros, A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 303 duit plus guère que de minimes changements, in- interrompus, dans le sommet du dôme. III. — LE DÔME CONSIDÉRÉ DANS SON ENSEMBLE. Pour bien comprendre le mécanisme de la forma- tion de l'’amas de lave en forme de dôme, il est nécessaire tout d’abord de défnir en quoi il con- sistait lorsque, au commencement d'oclobre 1902, il m'a été possible de l’étudier d’une facon précise dans tous ses détails '!. Il remplissait en partie la vieille caldeira de l'Étang Sec; mais il y occupait une position un peu dissymétrique que met en évi- dence le plan ci-joint (fig. 1); il était soudé à sa partie occidentale près du pi- ton du Petit Bonhomme. Entre les pa- rois vertica- les de la cal- deiraet ce dô- me, se trou- vait une pe- - titevalléecir- . culaire, que j'ai appelée la rainure du cratère : elle présentait une profon- deur varia- - blequi, grâce - aux éboule- “ ments du “ vieux sol et d du dôme, a été en s'atté- , nuant progressivement. La largeur de cetle rai- - nure était, elle aussi, variable (150 à 250 mètres). — En certains points, elle s’est beaucoup agrandie, au 1. cours de l’éruption, par l'éboulement des parois de la caldeira, alors qu'au contraire, du côté de - l'Ouest el du Nord, elle a été peu à peu comblée … par les produits de l’écroulement du dôme. — Le dôme était essentiellement constitué par une 1 Nous sommes arrivés à la Martinique, MM. Rollet de Bis, Giraud et moi, le 23 juin 1902 et y avons séjourné jus- “qu'au 17 août. Pendant cette période, la montagne est res- “ iée couverte, et du dôme nous n'avons pu voir que la base de l'éboulis descendant dans la vallée de la Rivière Blanche. Les observations consigné es dans cet article ont été faites - pendant mon second séjour aux Antilles, qui a duré du 4er octobre 1902 au 13 mars 1903, et a été favorisé par quelques périodes de beau temps, bien que le brouillard qui cache presque constamment le sommet de la Montagne Pelée ait été une gène presque continuelle pour les obser- valions. En mars 1903, j'ai été remplacé par M. Giraud, mon collaborateur du premier voyage. Rivière Blanche, puis les bords Sud (Petite (Photographie faite à l'aide d'un téléobjectif Gaumont, de l'Observatoire du Morne des Cadets.) ossature continue, mais fendillée, d'andésite, se dres- sant localement en murs presque verticaux du fond de larainure; ils ont été, progressivement, en partie masqués par des éboulis, résultant de l’accumula- tion des blocs qui se détachaient continuellement de leur surface. L'un de ces éboulis avait une importance spéciale : partant presque du sommet, il se prolongeait par l'ouverture en V de la caldeira jusque dans la haute vallée de la Rivière Blanche. Le sommet du dôme élait formé par une crête dentelée, ébouleuse, qui me rappela aussitôt l’aspect de la surface des coulées andésitiques de Santorin, que j'avais vues quelquesannéesauparavant.Iln’exis- tait aucune ouverture béante, aucun cratère ; les vapeurs S'é chappaient de toutes parts par les fissures qui crevassaient cette énorme masse so- lid'emAmce moment, le dôme pou- vait avoir de 7 à 800 mè- tres de plus grand dia- mètre de ba- se ; l'altitude de son som- mel était d'environ 1.310mètres, ce qui repré- sente, pour l’amas de la- ve, une hauteur de 350 à 400 mètres. A partir de la nuit du 3 au 4 novembre, de son sommet s'est dressée une masse rocheuse en forme d’aiguille aiguë qui, pendant de longs mois, est devenue une caractéristique nouvelle et étrange de la topographie de la Montagne Pelée (fig. 2). Je vais montrer comment s'est produit cet édifice com- plexe, en considérant tout d'abord la masse mêm du dôme, puis son aiguille terminale. Fig. 2. — Le dôme et son aïquille, le 11 mars 1903. — Au premier plan, on voit (de gauche à droite) le piton du Petit Bonhomme, l'échancrure en V souvrant sur la Savane) et Est de la vieille caldeira. IV. — LE DÔME PROPREMENT DIT ET SON MODE DE FORMATION Les renseignements que j'ai pu recueillir sur les débuts de la naissance du dôme, bien qu'incomplets, démontrent, cependant, que ceux-ci ontété la repro- duction des phénomènes caractéristiques des pre- mières semaines de l'éruplion de Santorin. Des A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLC\NIQUE lémoins parlent, en effet, de blocs incandescents roulant à la surface d’un amas de lave, qu'ils ont comparé à un tas de bois de charbonnier; l'incan- descence y était variable, se déplaçant sans cesse; c'est le 6 mai que, pour la première fois, le phéno- mène a été observé. D'une observation que je consignerai plus loin en parlant de l'aiguille, il me semble possible de con- clure que chacune des fortes éruptions a été accom- pagnée par l'arrivée rapide éruptives ont élé minutieusement notées jour et nuit'. Il a été possible alors de constater notam- ment que la base du dôme s’avancait lentement du côté du Sud-Ouest, continuant ainsi une pro- gression dé- Morne La Croix 1850") > à à Jà constatée ge des après l’érup- TAN tion du 9 juil- let, et mieux encore à mon d'une grande quantité de ! PET retour au com- matière fondue venant de Zaruse Emi lAtaug Je mencement la profondeur et qu'ainsi, FU PA a on d'octobre (fig. l'amas en voie d'édification 3). a dû, à chaque paroxysme, Pendant la subir un accroissement et nuit, nous en particulier un exhausse- ment brusque. Un récit qui m'a été fait par un specta- teur digne de foi prouve, d’ailleurs, que, le 8 mai ausoir,lalave incandescen - te devait s’è- tre élevée dé- jà à une hau- teur voisine de celle des bords de la cal- deira, c’est-à- dire de 1.200 mètres d'alti- Arivieis Hlarñe {il à tude (le fond MX semblable à de la caldeira celle du trou avait proba- decoulée d'un blement une haut four- altitude d'un neau, ne tar- millier de mè- daitpas à s’as- tres) : l'érup- sombrir en se tion du 30 refroidissant août et ses peu à peu. préliminaires Parfois, ces ont été encore taches lumi- caractérisés neuses affec- PANNE SCE | Fig. 3.— Coupes N.E.-S. 0, du sommet de taient la for- croissement D de son vo- ! vers stades de la croissance du dôme. nées, plus OU lume. moins recti-… Mes observations précises sur le mécanisme de cet accroissement ne datent véritablement que du milieu d'octobre, époque à laquelle débutait une nouvelle période de suractivité; à ce moment, j'avais installé, au Sud et à l'Est du volcan, deux postes d'observation desquels les moindres manifestations 31 Jiullet 1902 Ki] À Octobre 1902 avons Vu SOU- vent apparai- tre subite- ment, en di- vers points de Moine La Goù(230") dôme, et en particulier à son sommet, des taches lu- mineuses ex- trèmement brillantes, produites par l’arrivée au jour de ma- tière incan- descente qui, la masse du lignes, indiquant la production de fissures dans lesquelles, à plusieurs reprises, j'ai pu Suivre £ 1 L'observatoire du Morne des Cadets a été dirigé el l'est. encore par le capitaine Perney, le poste d'Assier par l'enseigne Le Cerf, puis par l'adjudant Guinoiseau, qui ont été pour moi de dévoués collaborateurs. A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 305 la marche ascendante de la luminosité, ce qui démontre que la surface incandescente n'était pas simplement une cicatrice, déterminée dans une masse à haute température par la chute d'une por- tion desa surface. Pendant les périodes de suracti- vité, ces phénomènes lumineux ont été souvent particulièrement intenses, et alors tout le sommet du dôme rougeoyait. L'explication de la naissance et du développe- ment de ce dôme ne laisse guère de place au doute; dès le début de l'éruption, le magma fondu a envahi le fond de l'Etang Sec, arrivant par une ou plusieurs ouvertures, d'où ne s'étaient jusqu'alors dégagées que de la vapeur d’eau et des cendres; en raison de sa grande viscosité el des conditions topographiques du fond de la caldeira, il s’est trouvé dans l'impos- - sibilité de s'écouler au dehors; il s’est donc accu- mulé sur place, se solidifiant rapidement à sa péri- - phérie, s'entourant ainsi d'une carapace, bien vite - fissurée par le retrait et par la continuité de la poussée interne, qui tendait sans cesse à faire éclater cette enveloppe trop étroite. Tant que l’amas - a été peu important, il a dû être recouvert de blocs - incohérenls, mis ainsi en liberté et roulant à sa - surface, reproduisant en un mot le cumulovolcan - de Santorin; mais l’afflux très rapide d'une grande “quantité de matière a dù bientôt (8 mai?) faire “surgir de cette masse de déblais des parties “rocheuses à parois trop raides pour permetllre l'accumulation de débris à leur surface. Dès lors, le “trait caractéristique était fixé et une différence radi- “cale avec les débuts de l'éruption de Santorin “établie : un dôme de roche continue avait surgi du cumulovolcan; grâce à sa situation topographique “ sommet d'une montagne, il allait être possible se te - ère. don di | La Art, d'en suivre l’évolution. Les faits dont j'ai été le témoin à partir d'oc- “iobre ont été la continuation réduite du même “phénomène ; ils ontessentiellement consisté dans le “hourgeonnement de la masse fondue à travers la “carapace, qui enveloppait le magma encore impar- “faitement consolidé. Ce bourgeonnement était un . phénomène lent, mais il n'en élait pas toujours ainsi : fréquemment, sous l'effort d'une poussée “plus violente, on voyait d'une région du dôme, “toujours la même, s'écrouler d'énormes blocs qui “roulaient dans la haute vallée de la Rivière “Blanche : ce n'étaient pas seulement des frag- -ments de la carapace, mais bien souvent aussi des portions du magma expulsées de l’intérieur du dôme et solidifiées avant même d'arriver au jour. Pendant les observations de nuit, c'élait un spec- tacle merveilleux que de voir tomber en cascades ces blocs incandescents, qui, se brisant au cours de leur chute, se multipliaient et formaient des trai- nées lumineuses, bondissant sur les pentes de la monlagne; partis d'une altitude supérieure à 1.300 mètres, ils arrivaient parfois au voisinage de la mer, après un parcours de plusieurs kilo- mètres. La théorie de la formation du dôme peut donc se résumer en quelques mots : accumulation sur place de lave pâteuse, rapidement solidifiée périphéri- quement, dislocation de la carapace superficielle ainsi produite, puis bourgeonnement du magma encore pâteux à travers les fentes et les fissures de cette enveloppe. Je n'ai pas parlé des diverses hypothèses qui ont été émises par plusieurs géologues au début de l'éruplion sur la base d'observations incomplètes. Celle d’après laquelle le dôme ne serait qu'un amas de débris projetés el relombés dans le cratère, puis plus ou moins refondus par des dégagements de gaz à haute température, ne résiste plus aujour- d'hui à la discussion. Je ne nie pas qu'à l'origine les produits de projection des paroxysmes aient pu, eux aussi, contribuer à l’accroissement de la masse du dôme, mais leur rôle a été certainement minime. Le peu d'importance des projections verticales est l’une des caractéristiques de cetle éruption, ce sont les nuées ardentes qui ont été par excellence les agents de transport des matériaux solides; or, celles-ci ont été dirigées de haut en bas et, bien loin d'avoir pu augmenter la masse du dôme, elles y ont déterminé des pertes de matière sans retour. V. — L'AIGUILLE ET SON MODE DE FORMATION PAR EXTRUSION. Pendant les premiers jours d'octobre 1902, le sommet du dôme ne m'a pas semblé subir de changement notable; mais, vers le milieu de ce mois, nous avons constaté qu'il augmentail de hauteur assez rapidement sur une longueur hori- zontale d'environ 200 mètres et dans une direction Nord-Sud. Des éboulements le modifiaient conti- nuellement; la partie la plus élevée se déplaçait vers le Sud, formant une pointe aiguë. Le 3 no- vembre au matin, l'altitude de celle-ci était de 1.370 mètres; à 1 h. 30 un éboulement lui faisait perdre plus de 20 mètres. Dans la nuit suivante, a commencé à se dresser à sa place une aiguille rocheuse, dont j'ai suivi depuis lors avec un intérêt passionné les incessantes vicissitudes; elles ont consisté en un mouvement discontinu d'ascension, corrigé par de nombreux écroulements. J'ai donné, dans mon livre récent, les très nom- breux croquis et les photographies que j'ai fait faire de l'Observatoire par mon collaborateur, le capilaine Perney, chaque fois que la montagne élait découverte: ils montrent dans leurs moindres 306 A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE détails les variations de forme et de hauteur de celle aiguille. Je me contenterai de reproduire ici quelques photographies faites des bords du cratère, ainsi que le diagramme (fig. 7) schématisant la marche du phénomène étrange el émouvant auquel nous avons assisté : celui d’un piton rocheux, dont l’incandescence apparaissait dès la nuit venue, qui surgissait du sol, se dressant dans les nuages en haut de ce piédestal gigantesque qu'est la Mon- tagne Pelée; sa hauteur au-dessus de ce piédestal a atteint le maximum de 476 mètres. L'inspection du diagramme donné plus loin montre que l'histoire de celte aiguille se divise en un certain nombre de stades. Dans une première phase d'ascension, extrèmement rapide, l'aiguille est partie de 1.343 mètres (nuit du 3 au 4 no- vembre 1902) pour atteindre 1.575 mètres le 24 novembre, ce qui correspond à une montée moyenne de plus de 10 mètres par 24 heures, avec des accentualions très notables. Du 24 novembre 1902 au 6 février 1903, s'é- tend une premièrephase d'écroulement ; chaque chute a été accompa- gnée d'une remontée brusque qui, à part deux exceptions, ne compen- sait pas les pertes; il en résulte dans le dia- gramme une série de dents, dont chacune est plus petite que celle qui la précède; on verra plus loin quelle est l’impor- tance théorique de cette constatation. Le 7 fé- presque entièrement écroulée ; le point culminant du dôme n'a plus que 1.380 mètres, c'est-à-dire quelques mètres seulement de plus que le 3 no- vembre. Aucune remontée ne se manifeste sur le diagramme au cours de celle deuxième phase d'écroulement. Enfin, à partir du 10 août 1903, sur l’empla- cement du milieu de l’ancienne aiguille, s’en édifie une nouvelle, de diamètre plus petil; en même temps, des bourgeonnements se produisent dans le voisinage et il se forme notamment une crête rocheuse, très analogue à celle du début de mes observations en octobre 1902. L'histoire de l'aiguille, ou plutôt des petites ai- guilles successives, va dès lors devenir assez mono- tone; pendant la fin de 1903 et la plus grande partie de 1904, la courbe des variations n’est plus qu'une ligne sinueuse, ne s'éloignant guère, en plus ou en moins, de 1.450 mètres; peu à peu, en outre, l’acti_ vité au sommet du dôme se déplace vers le Nord- Est, où elle persiste ac- tuellement: les produits de son écroulement ne se déversent plus dans la Rivière Blanche,mais dans ce qui reste de la _rainure du cratère. J'ai calculé que la grosse aiguille eût at- teint une altitude d’au moins 2.200 mètres le 6 juillet 1903, si elle n'avait subi aucun ébou- lement; elle eût formé . alors une colonne d’an- désite de 850 mètres de | hauteur. Sisa forme avait vrier au Soir, l'aiguille Fig. 4. — L'aiguille du dôme se dressant dans la caldeira élé parfaitement cylin- AAC BEC ER QE 2 en arrière des restes du Morne La Croix. — Elle est L ; était réduite à un chicot polyédrique (Photographie faite de l'emplacement du lac drique, et si son dia-. dont l'altitude n’était des Palmistes (remblayé) le 8 novembre 1902). plusque de1.424 mètres. Dès le 7 février, commence une seconde période d'ascension, moins rapide que la précédente, mais qui conduit à une altitude plus élevée. Le 25 mars, le précédent maximum de 1.575 mètres est aiteint ; jusqu'au 98 juin, l'altitude du sommet reste supé- rieure à 4.500 mètres; elle a même dépassé 1.600 mètres du 10 au 31 mai, puis du 25 juin au 6 juillet, jour où elle a atteint son maximum de 1.608 mètres. Pendant cette longue période, il ne s'est produit que trois chutes importantes, immé- diatement réparées par une brusque remontée. Du 6 au 7 juillet, l'aiguille perd 63 mètres par un éboulement; des accidents du même genre se succèdent bientôt et, le 10 août, l'aiguille est mètre avait été exacte- ment de 150 mètres (voir fig. 5), son volume n’eût pas été inférieur à 15 millions de mètres cubes. Cette masse énorme de} roche s’est en grande partie écroulée ou à été emportée par les nuées ardentes dans la vallée de la Rivière Blanche. Il me reste maintenant à discuter le mécanisme de la production de l'aiguille; il ne s'agit plus; comme pour la masse du dôme, d'une injection de matière fluide dans les fissures d'une carapace consolidée, ou, tout au moins, les injections de ce genre qui se sont produites au début n'ont pas tardé à devenir tout à fait accessoires, puis à cesser. Li J'attribue la production de l'aiguille à l'extrusion : + A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 307 d'une masse solide d'andésite, sortant par une ou- verture de la carapace, ouverture que je compa- rerai volontiers à une filière. Cette extrusion de bas en haut a été discontinue, mais sans qu'il se soit jamais produit de mouvement en sens inverse. Les incessantes diminutions, venant compenser les mouvements ver- ticaux, ont tou- jours élé causées par des éboule- ments, résultant « de phénomènes d'écrasement, de fissuration (fen- tes de retrait), par des dégage- “ ments gazeux de + tout genre, mais - surtout par les éruplions de - nuées ardentes. _ Je puis, d'’ail- leurs, apporter des preuves pré- cises à la théorie que je propose - pour expliquer _ ce phénomène, - quinesemblepas À avoir élé jus- … qu'à présent ob- servé au cours de - l'éruption d’au- … cun volcan. Pen- “ dant les premiè- res semaines de _saproduction,en … novembre 1902, _ l'aiguille mon- tait verticale- L ment; des bords —du cratère, du “ Morne La Croix, j'ai pu constater qu'elle était … limitée du côté de l'Est par deux faces presque … planes, se coupant sous un angle obtus; leur sur- … face était couverte d'une fine poussière blanche et … portait des fissures, ainsi que des cannelures ver- …. Licales, À partir du mois de décembre, l'aiguille a … perdu sa verticalité, elle s'est un peu courbée vers le Sud-Ouest; ses parois dans les autres directions se modifiaient en même temps; de polyédrique, la forme générale est devenue peu à peu cylindrique; la filière s'était usée et avait pris une section cireu- laire. Les figures 4 et 5 représentent deux photo- graphies faites du même point, à cinq mois de an :» 227 Fig. 5. — L'aiguille du dôme, photographiée le 15 mars 1903 du même point que la figure 4. — Elle est devenue cylindrique. La hauteur de son sommet au-dessus du Morne La Croix, ancien point culminant de l'ile, est de 349 mètres. distance ; elles montrent les deux termes extrêmes de cette transformalion.} L'agrandissement de la figure 5, que j'ai reproduit en héliogravure dans mon livre, permet de voir deux catégories de stries; les unes, verticales, ne sont pas rigoureusement parallèles à la génératrice du cylindre : elles pré- sentent une lé- gère torsion hé- licoïdale vers le Sud; les autres, qui ne sont pas distinctes dans la similigravure ci-jointe à cause de sa trop petite échelle, consti- tuent des cour- besemboitées qui correspon- dent à l’intersec- lion de l'aiguille avec la filière ; elles ontenregis- tré la disconti- nuité de l’extru- sion. Ces phénomè- nes de courbure etde torsion sont dus à ce que, par suite de la ren- contre d'un obs- tacle, l'ascension se faisait moins vite du côté du Sud-Ouest que des autres. Ils ont déterminé dans cette direc- tion un écrase- mentcontinu qui a facilité l'œuvre des nuées ardentes : les écroulements qui en ont été la conséquence ont ainsi produit la structure ruiniforme de la portion de l'aiguille qui dominait le grand éboulis descendant dans la vallée de la Rivière Blanche. Ces écroulements, modifiant sans cesse cette face de l'aiguille, y déterminaient la pro- duction de cicatrices, dont l'incandescence four- nissait la preuve de la haute température à laquelle se maintenait encore l'aiguille, après son extrusion. Cemouvement de baseule vers le Sud-Ouest (fig. 6) n’est pas le seul qu’ait subi l'aiguille; à la fin de juillet 1903, alors que sa hauteur élait très réduite, elle en a subi un autre en sens inverse, moins ac- centué et moins durable. A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE Il me reste maintenant à discuter la cause de ce singulier mode de formation de l'aiguille. Tant que la carapace du dôme a été peu épaisse, l'effort de la poussée interne (dégagements de produits gazeux et apport de matière fondue), s’effectuant d’une facon lente et modérée, a pu faire céder ses parois dans toutes les directions et déterminer ainsi des bour- geonnements de lave non localisés. Mais, peu à peu, les parois de cette carapace sontdevenues as- sez épaisses pour résister a ces poussées; les ma- tériaux récents ont dû se frayer un chemin à tra- vers le dôme dans le sens de la verticale. Lors- que, vers le mi- lieu d'octobre 1902, après un repos de deux moisetdemi,une période de sur- activité nouvelle s’est ouverte, le sommet du dû- me, moins résis- tant que sa base, s'est mis à bour- geonner le long d'uneligne Nord- ‘Sud, correspon- dant sans doute à la réouverture d'une ancienne fissure et peut- être à une ouver- lure provisoire que je n'ai pas vue moi-même, mais que M. Heil- prin assure avoir constatée lors du paroxysme du 30 août. L'activité étant faible au début, une partie de cetle fissure a dû s'oblurer à nouveau et, dès lors, Lout l'effort de la poussée s'est concentré sur un espace extrêmement limité. Les apports solides, ne venant de la profondeur qu'avec lenteur et en médiocre quantité, ont pu se consolider sous la carapace, à proximilé de cet orifice, à travers lequel ils ont été ensuite poussés lentement. Il n’est pas douteux que, si alors il s’élait pro- duit un paroxysme violent, son premier résultat eût été de faire sauter l'aiguille et de déboucher Fig. 6.— L'aiguille du dôme, photographiée le 9 mars 1903 du bord Sud du, cratère. — Elle se dresse au sommet du dôme, entourée à sa base par les éboulis résultant de son incessant écroulement, l'ouverture qu'elle obturail; mais, au commence- ment de novembre 1902, les phénomènes explo- sifs étaient peu intenses, et quand, à la fin du même mois, ils augmentèrent de violence, la masse de l'aiguille était devenue suffisante pour résister à leur effort; aussi les nuées ardentes se frayèrent- elles alors un chemin au-dessous de la racine de l'aiguille, du côté du Sud-Ouest, là où se trouvait un point de moin- drerésistance dansla carapace. Par suite de la position de ce point de sortie, chacune de ces nuées à entrainé la chute d'une portion de l'ai- guilleelle-même. L'inspection du diagramme de la figure 7 montre combien étroitement étaient liés le phénomène ex- plosif et l’ascen- sion de l'aiguille. On voit, en effet, que, dans la pre- mière période d'écroulement, chaque chute de notre monolite accompagnait l’éruption d’une nuée ardente, et qu'aussilôt après celle-ci, l'aiguille subissait une brusque remon- tée. L'apport nouveau venu de la profondeur, qui se déchargeait en partie à l'air libre, venait donc, une fois que l'ouverture provisoire ouverte par l'explosion était obturée, compenser les dégâts que celle-ci avait produits dans l'aiguille. Lorsque dans la seconde période d’exhaussement, les nuées ardentes se firent plus rares, l'ascension de l'aiguille se produisit d’une facon lente, mais continue ; alors encore, chaque nuée importante entrainait une chute d’abord, puis, immédiatement après, une brusque remontée de l'aiguille. Dans la deuxième période d'écroulement, au contraire, la démolition de l'aiguille a été con- LE) Le cn RS ÉSS $ A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE tinue, sans tentatives de remontée et en même temps sans éruptions notables de nuées ardentes. Cette constatation est importante, car elle montre qu'une nuée ardente est bien le résultat d'un phénomène explosif et n'est pas simplement une avalanche de blocs incandescents, entrainant à sa suite un formidable nuage de poussière brû- lante. Le changement de régime de l'aiguille, à partir de la période de suraclivité d’août-septembre 1903, est dû sans doute à ce que la carapace du sommet du dôme a été alors disloquée par les incessantes 309 à rechercher quelles conséquences elles entrainaient dans la structure et la composition minéralogique des laves qui les ont construits. C'était, en effet, une occasion unique de recueillir quelques observalions sur cette question si obscure de l'histoire des magmas acides. Malheureusement, s'il a été facile d'approcher à moins de 250 mètres du dôme, il n’a pas encore été possible de le toucher. Mais les matériaux qui le constituent ont été mis à notre portée par trois mécanismes distincts : 1° Par les projections verlicales des éruptions paroxysmales : “&- 18. T 10 SN EN| RARE ++ ! +— | a | £ TEA | | | le — l — —s re Ê 1 (221 | A | JE Lsco ns] | : HA) | | | | Ë te) 1 Î L + se) | l | (a è | L | JE fl | | 1] je il La pe | - Î Î is | ns OR : ee cl Ed D à Ce LCL AI A STE Ï. (EC de] ù et | De F1 ++ | t “3%0| | de! Agde | | | | | | L — | | PE Le Je En 54 14 pal [nf | î ï - =, | . - : A Resennene ft rares: AUTE | rm nie ol Ft; 1 | 1 k | ER ES Légende 0! | GRAPHIQUE DES VARIATIONS DE HAUTEUR DU DÔME | Dr que Rare Slneke . l | | DE LA MONTAGNE PELÉE + ES dan ee ou T T 1 «Mesures du emma du dôme. Ti | | A | | DL MAN j (2821! JEs - | 00) -— 1e ! | me. | (el } | Il T1 1} | EE: | a | | | | | | Ë | | | | (A | A Î Ï Î Î : | | | | | PA EN | | [x de l'Aguille | | [= Î Î Î | Î Ï | I | E = J NE #| Panel | (NUE + NN | bn | ohseles L : | La Ë | Æ 1 L sl Ke te | ] Il Î Ï Ï rl Re a IE A Ie | | | 11 ë | | | [E | | | | Fe AE PRE PAT Buitrer ses FE | ER Acrosne | movemene [ ; Fig. 7. — Graphique des variations d'altitude du sommet de l'aiguille du dôme en {onetion du temps, montrant leur relation avec les éruptions de nuées ardentes. explosions donnant naissance aux nuées ardentes, qui, d'après MM. Giraud et Perney, se succédaient parfois en grand nombre dans une même journée et se dirigeaient dans des directions variées. Elles ont probablement débouché la fissure par laquelle _ sortait la crête Nord-Sud d'octobre 1902, et, dans tous les cas, ont permis à la poussée d'être moins - localisée qu'auparavant. VI. -— LES ROCHES CONSTITUANT LE DÔME ET LE MODE DE FORMATION DES ROCHES ÉRUPTIVES QUART- ZIFÈRES. Les conditions de formation du dôme et de son aiguille étant établies, il y avait un intérêt capital 2° Par les nuées ardentes:; 3° Par les écroulements tranquilles dans la val- lée de la Rivière Blanche, où des millions de mètres cubes de laves et de cendres ont été trans- portés. J'ai recueilli une très importante collection d'échantillons, en notant avec le plus grand soin les conditions dans lesquelles chacun d’entre eux a été rejeté hors du dôme. Je vais exposer le résullat de leur étude. Ce qui donne un intérêt spécial à ces matériaux, appartenant au groupe des andésites à hypersthène, c’est leur nature chimique. Je donne ci-après en À la composition de la lave actuelle (moyenne de huit analyses faites par M. Pisani), et en P celle de Ja 310 A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE matière vitreuse qui en a été extraile après élimi- mination de tous les minéraux cristallisés. A B SUIS G1,88 IHO2 0,31 AO 18,30 RERO CURE re 4,97 FeOLRTeE : ho 4,32 Mg0O. 5 2,71 CROELET 6,32 Na OUR ds 41 KO 1,09 P205: CA 0,09 » Perte au feu. . 0,19 0.62 100,35 99,69 Quand on calcule, à l’aide de ces résultats, la quantité de silice nécessaire pour saturer l'alu- mine, les alcalis et la chaux (production de feld- spaths), puis (après déduction de la magnétite) la magnésie et le protoxyde de fer (formation de pyroxènes), on constate qu'il reste un excès de 19,56 °/, de silice libre dans l'andésite et de 34,02 °/, dans son verre. Ces andésiles doivent donc être considérées comme des roches acides, bien que leur teneur totale en silice ne soit pas excessive. De nombreuses analyses permettent de montrer qu'elles présentent, suivant les échan- tillons, de petites différences de composition chi- mique, mais celles-ci ne sont liées systématique- ment niau temps, ni aux variations de composition minéralogique et structurelle dont je vais m'oc- cuper. Comme la plupart des roches volcaniques, les andésites de la Montagne Pelée renferment des cristaux visibles à l'œil nu (phénocristaux) et une pâte, dont l'anatomie intime ne peut être décelée qu'au microscope. Elles présentent des aspects extérieurs fort divers, suivant que cette pâte est vitreuse (et, dans ce cas, continue ou ponceuse) ou enfin pierreuse. Mais, quelle que soit la variété con- sidérée, les phénocristaux sont identiques; ce sont des feldspaths tricliniques zonés (andésine à bytow- nite), de l'hypersthène, de la titanomagnélite et parfois, mais toujours en quantité très réduite, de l'augite, de l'olivine, de la hornblende, de l’apatite et de l’ilménite. Cette constance dans la nature et même dans la proportion des phénocristaux, quelle que soit la structure de la pâte qui les englobe, démontre d'une facon évidente que leur genèse a été soustraite aux conditions de la consolidation définitive du magma, qui, elles, ont varié : ce sont elles qui ont imprimé leur caractéristique dans la pâte de la roche. On peut donc affirmer que ces phénocristaux ont bien été amenés tout formés de la profondeur, qu'ils sont bien réellement d'origine intratellurique. En quoi consistent les variations de cette pâte en fonction des conditions de sa consolidation? Les bombes rejetées par les grandes explosions des paroxysmes, les masses rocheuses entrainées par les nuées ardentes, quand celles-ci se succédaient à de courts intervalles ou étaient très importantes, représentent les formes de refroidissement le plus rapide du magma fondu. Elles sont exclusivement constituées par les types à pâte vilreuse; suivant que le dégagement des gaz inclus dans le magma s’est fait à plus ou moins haute température, il s’est produit soit des andésites à pâte obsidiennique, soit des ponces : ces dernières n'ont été, d’ailleurs, abondantes que dans les grandes nuées du 9 juillet et dans quelques-unes de celles du voisinage du 30 août. Cette origine des ponces est bien mise en évidence par la structure de certaines des grosses bombes que j'ai étudiées. Celles-ci sont constituées, en effet, par une écorce à pâte vitreuse entourant un centre très ponceux. Leur structure si régulière tient à ce qu’elles ont été formées par la projection d'une portion du magma possédant encore un état assez päteux; à leur arrivée dans l'atmosphère, leur extérieur s'est brusquement consolidé, sous forme d’un verre continu, se fendillant par retrait. Sous cette enveloppe protectrice, le centre s’est refroidi plus lentement et les gaz occlus n’ont pu se dégager qu'avec peine, par suite de la viscosité croissante du verre; il en est résullé les bulles globuleuses ou étirées, caractéristiques de la ponce. Du conflit entre la contraction de l'écorce et la dilatation du noyau, est née la structure des fentes en croûle de pain, qui rendent si curieuse cette calégorie de bombes. Les éboulements tranquilles du dôme entre le 30 août et le milieu de novembre, les produits des premières nuées de novembre 1902, puis de celles de décembre 1902 et de janvier 1903 ont fourni un type pétrographique différent des précédents : il consiste en andésites pierreuses, dans lesquelles se sont développés en abondance des microlites pyroxéniques et feldspathiques. Ces roches sont certainement des débris de la carapace du dôme et de l'aiguille; le refroidissement sur place des roches qui les forment a été assez lent pour permettre un recuit plus ou moins prolongé. Cette opinion, qui lie les variations de cristallinité de la pâte à une vitesse plus ou moins grande de refroidissement du magma, peut être démontrée expérimentalement dans le laboratoire par la fusion partielle de la roche qui nous occupe et par son recuit; on peut ainsi faire apparaître progressive- ment, au milieu du verre, des microlites d'hypers- thène et de plagioclases, semblables à ceux de nos types les plus cristallins. On sait combien sont fréquentes dans la pâte des roches acides les lamelles de cette variété cristalli- sée de silice, à laquelle on a donné le nom de A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 911 tridymite. Je ne crois pas que, jusqu'à présent, on ait jamais déterminé directement les conditions dans lesquelles se forme ce minéral; les roches qui nous occupent fournissent à cet égard des rensei- gnements précis. La tridymite manque presque complètement, on pourrail même peut-être dire complètement, dans tous les types vitreux. Elle apparait, au contraire, dans les types microlitiques; rare dans ceux rejetés en novembre 1902, elle est devenue avec le temps de plus en plus abondante. Sa production implique donc nécessairement que 1 monté de son aiguille et se dressant dans la caldeira de l'Etang Sec, retour en France; mais, en janvier 1904, mon ancien collaborateur, le capitaine Perney, a bien voulu me recueillir une nombreuse série d’échan- tillons, dans la haute vallée de la Rivière Blanche, au bas de l'éboulis du dôme; en avril, de nou- veaux spécimens ont été prélevés plus haut, à mi- hauteur de cet éboulis; depuis plusieurs mois, il ne se produisait plus de nuées ardentes; les biocs roulant constamment à la surface de cet éboulis provenaient exclusivement de la pelite aiguille en voie de très lente extrusion. en arrière de la croupe de la Petite Savane, LE E. 8. — La Montagne Pelée vue des ruines de Saint-Pierre en mars 1903. — On voit nettement le dôme récent, su- + J qui fait partie de l'ancien sommet de ‘la montagne. tt L 4 De roche, une fois solidifiée, soit maintenue à haute température pendant un temps plus ou moins long. de ne pense pas, cependant, que la tridymite soit due “exclusivement à un recuit, comme les feldspaths de la pâte; elle se présente, en effet, surtout dans les _ fines cavités de la roche, en cristaux drusiques, dont la production semble indiquer l'action plus ou — moins directe d'agents volatils; il est vraisem- “blable que ceux-ci consistent essentiellement dans la vapeur d'eau mise en liberté par la consolidation du magma; le refroidissement lrop rapide des pon- ces ne lui a pas permis d’agir pendant un temps Suffisant pour y faire naitre la tridymite. La continuité de mes observations minéralo- giques a été interrompue en mars 4903 par mon La composition minéralogique de la roche avail beaucoup changé, bien que les caractères exlé- rieurs fussent restés les mêmes; aux minéraux de la pâte des typesles plus cristallins décrits plus haut, s’ajoutaient en quantité considérable des grains et de petits cristaux bipyramidés de quartz, offrant l'analogie la plus grande avec ceux de la pâte de tant de porphyres quartzifères. 11 reste généralement encore de la matière vitreuse; mais, parmi les nom- breux échantillons dont j'ai étudié les plaques minces, se trouvent des passages insensibles à des types holocristallins que j'avais recueillis en octobre 1902 sur les bords du cratère, où ils avaient été rejelés par l’éruption du 30 août. Pour la première fois au cours d'une éruption 312 volcanique, il à donc ainsi été possible de constater la production du quartz, ce minéral cependant si répandu dans la Nature et dont le mode de for- mation dans les roches éruptives est reslé jusqu'à présent la plus passionnante des énigmes. Nous pouvons, d’ailleurs, discuter les conditions dans lesquelles il a pu prendre naissance. On vient de voir, en effet, qu'il est absent dans tous les produits rejetés violemment et refroidis brus- quement; il n'existe pas davantage dans celles des roches ayant subi un recuit, et que j'ai de bonnes raisons pour considérer comme formant la partie superficielle de la carapace du dôme; il est donc nécessaire d'admettre qu'il a cristallisé dans l'inté- rieur même du dôme, et cette condition a été cer- tainement réalisée pour les blocs quartzifères holo- cristallins rejetés par les explosions de la grande éruption du 30 août, qui a dû entamer profondé- ment la masse de l’amas de lave. Il faut, en outre, admettre que celte cristallisalion profonde ne s'est effectuée qu'au bout d’un temps assez long, car, lors de la rapide extrusion de la grande aiguille de 1902- 1903, je n'ai jamais trouvé trace de quartz dans les produits de sa démolition, alors que ce minéral est constant dans ceux de la petite aiguille du com- mencement de 1904, qui, elle, ne s'élevait qu'avec une extrême lenteur. Quel est maintenant le mécanisme probable de la production de ce quartz? L'examen microscopique prouve qu'elle s’est effectuée après celle des micro- lites feldspathiques qui, ainsi que je viens de le montrer, s'obtiennent facilement dans le labora- toire par fusion ignée. J'ai essayé de soumettre le verre de la roche à des recuits variés, effectuant d’ailleurs celte expérience par acquit de conscience, les insuccès des anciennes expériences de MM. Fou- qué et Michel-Lévy ayant montré d'une façon péremptoire que le quartz ne cristallise pas par celte voie purement ignée; je n'ai pas été plus heu- reux que mes maitres. M. Morozevicz a bien obtenu de petits cristaux de quartz en recuisant une rhyolite entre 800 et 1.000°, mais à la condition d'incorporer dans le verre de l'acide tungstique, jouant le rôle de minéralisaleur que, dans mon cas, je crois pouvoir attribuer à la vapeur d’eau. Il est possible de préciser les limites de tempé- rature maximum de celte cristallisation; elle a été certainement inférieure à 1.210°C., puisque c’est là, d'après les expériences de M. Dœlter, la tempéra- ture de fusion du labrador’, dont les cristaux intratelluriques abondent dans notre roche; sa postériorité aux microlites feldspathiques rend, en outre, assez vraisemblable qu'il s’est produit, alors 1 D'après de récentes expériences de M. Brun, la tem- pérature de fusion du labrador serait plus élevée et attein- drait 1.3700 C. A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE | fragments de la partie profonde du dôme (sous-marin), 4 que le verre était à peu près enlièrement consolidé (c'est-à-dire au-dessous de 1.150° C.) et peut-être même à une température inférieure à celle de la consolidation définitive de celui-ci. Les petites explosions répétées, les dégagements gazeux de toute natures'échappantsans cesse des pa- rois fissurées du dôme, démontraient qu'une grande ÿ quanlité de vapeur d'eau ne cessait de se dégager violemment du magma en voie de consolidation. La carapace complètement solidifiée et la lave à plus haute température qu’elle recouvrait restaient done soumises à l'action persisiante de celte vapeur, acquérant, gràce à la consolidation pro- gressive du magma, une tension de plus en plus grande, jusqu à ce qu'elle fût suffisante pour s'ou=M vrir un passage à l'extérieur. Le dôme enveloppé de sa carapace doit donc être, en définitive, considéré ; comme un immense vase clos, soumis à une haute température, etrenfermant de la vapeur d’eau sous pression ; or, on connait les célèbres expériences de Sénarmont, de Daubrée, de Friedel et de Sarrazin, dans lesquelles ces savants ont fait cristalliser du quartz en chauffant en tube scellé avec de l’eau, soit de la silice amorphe, soit des silicates alcalins ou alcalino-terreux. Il est logique, par suite, d’attri- buer à un phénomène du même genre la production du quartz dans nos roches, les 37 °/, de silice libre du verre fournissant l'élément nécessaire à la réac- tion ; comme danslesexpériences précitées, la forma lion soit du quartz, soit de la tridymite qui l'accom- pagne doit dépendre simplement de la température. Il est d'une importance capitale pour l’histoire des roches quartzifères de pouvoir démontrer, par une observation en quelque sorte vivante, que la cristallisation du quartz dans un magma à haute température n’exige pas nécessairement que celui=" ci se trouve enfoui à une très grande profondeur, comme cela a été certainement le cas pour beau- coup de granites, mais qu'elle est déjà possible sous la mince carapace solidifiée d'un dôme volea= sique se produisant à la surface du sol, dès ques sont réalisées les conditions de pression nécessairess et suffisantes”. | GR E D A EAP EN QE PISTES « Nécessaires et suffisantes, car le quartz n'existe sou cette forme dans aucune des andésites de composition ana logue qui forment des coulces à la Martinique. L'andésite à hypersthène de l'éruption de 1866, à Santorin est plus riche encore en silice libre que celle de la Mon tagne Pelée, mais nous n'en connaissons que les types d consolidation superficielle; aussi ne renferment-ils pas 4 quartz, pas plus d'ailleurs que les andésites similaire constituant des coulées dans le reste de l'archipel de Sans torin, Par contre, j'ai trouvé du quartz en abondance it les enclives homoæogènes holocristallines de ces même roches, enclaves ayant, elles, cristallisé en profondeur. Auss me parait-il évident que si, dans l'avenir, il se produit à Santorin une grande éruption à forme explosive, elle reje tera, comme celle du 30 août à la Montagne Pelée, de A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 313 Je m'empresse d'ajouter qu'il existe un autre mode possible de cristallisation du quartz dans les -oches du genre de celles qui nous occupent, mais » qui ne peut être invoqué pour les laves actuelles de la Montagne Pelée : je veux parler de la cristal- lisation de la silice en excès dans le verre sous - l'influence de circulations d'eau superficielle, cris- {allisation s’effectuant bien longtemps après l'ar- - rêt complet de l’activité volcanique. Je puis mon- trer, en effet, qu'à la Martinique, tous les Lypes “de roches volcaniques, dans lesquels le calcul -décèle l'existence d'un semblable excès de silice, présentent par place à leurs affleurements, dans des condilions où l'action secondaire n'est pas douteuse, des éponges pæcilitiques de quartz glo- Dulaire’ qui viennent mouler tous les éléments de la roche, sans que, pour cela, leur composition chi- mique ait élé en aucune façon changée. L'observation des roches quartzifères de l'érup- tion actuelle conduit, en outre, à quelques autres «conclusions. Elle montre, en particulier, qu'il n’est - pas légitime d'homologuer les phénocristaux et la ‘päte des roches éruptives possédant une structure porphyrique, suivant que celles-ci renferment ou non du quartz. Dans une roche sans quartz, une andésite normale par exemple, il existe deux {emps distincts de consolidation, mais un seul mode de cristallisation, celui de la fusion ignée. Dans une andésite quarlzifère au contraire, il faut distinguer _deux temps et deux modes de cristallisation; les icrolites de feldspaths et de métasilicales, en efet, sont, tout comme les phénocristaux, essen- liellement des produits de la fusion ignée, ou tout au moins ils peuvent prendre naissance par sa seule intervention, alors que pour le quartz, ainsi “que je viens de le démontrer, il faut quelque chose d'autre. Il existe donc une différence plus grande entre les divers minéraux de la pâte d'une roche quartzifère qu'entre quelques-uns de ceux-ci et les phénocristaux intratelluriques. Enfin, à un point de vue général, on voit que l'existence ou l'absence du quartz dans les roches “éruptives semi-cristallines acides n'a qu'une signifi- cation purement minéralogique, puisqu'un même magma de composition chimique constante peut, au cours d'une même éruption, fournir des andésites à pâte quartzifère et d'autres sans quartz. La né- leessité d'un criterium chimique, venant éclairer 2 “Ceux-ci seront, au moins en partie, constitués par des norites où des micronorites quartziféres. —… La structure de ces roches est, par suite, différente de elle de la lave actuelle : par contre, elle rappelle tout à fait celle de certains porphyres à quartz globulaire du Massif Central de la France, dans lesquels les microlites feldspa- tiques sont noyés dans des éponges de quartz globulaire et dans lesquels il n'existe pas de phénocristaux de quertz bipyramidé. Ces roches sont donc d'anciens trachytes ou andésites quartziliés. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. l'étude minéralogique des roches, apparait plus nettement encore, quand, étendant la question, on compare l'andésite de l’éruption actuelle aux da- cites, plus anciennes, de la Martinique. Celles-ci possèdent, en effet, sensiblement la même compo- sition chimique que cette andésite, mais elles sont caractérisées par l'abondance de phénocristaux de quartz bipyramidé accompagnés de biotite et de hornblende, et disséminés dans une pâte qui, elle aussi, peut être vitreuse, microlitique et non quartzifère, ou holocristalline et riche en quartz. En terminant, je ferai remarquer qu'il en estpour cette question de l’origine du quartz, comme pour celle du mode d'édification des dômes volcaniques; depuis longtemps, la formation de ce minéral dans les roches éruptives par une voie presque secon- daire, mais immédiate, avait été pressentie par bien des pétrographes. C'élait une idée que M. Fouqué exprimait volontiers dans son enseignement, avec le regret de ne pouvoir l’appuyer sur des preuves directes; elle a été aussi émise par M. Michel-Lévy. Mes observations lui apportent une première base solide et indiquent la voie dans laquelle des expé- riences nouvelles devront être entreprises pour lui donner la consécration d'une démonsiralion expé- rimentale. VIT. DÔME. — LA CONSTITUTION MINÉRALOGIQUE DU Les observations exposées plus haut permettent de prévoir dès maintenant quelle est la constitu- lion minéralogique inlime de ce dôme. Sa parlie centrale doit être formée par un culot d'andésite à pâte quartzifère, plus ou moins complètement mi- crogrenu! ou grenu, culot entouré d'une enveloppe d'andésite dépourvue de quartz, microlitique ou vitreuse suivant les points, en tous cas riche en tridymite. Cetle enveloppe est certainement tra- versée par des veines d'andésile (dont la structure peut être différente), produites par la consolidation de ces bourgeonnements que leur incandescence nous a souvent permis de voir apparaitre. J'ai rencontré dans la vallée de la Rivière Blanche de nombreux blocs de hrèches ignées, fournissant la preuve que ces veines d'injection sont par places rendues bréchiformes par les nombreux fragments de toute taille qu'elles englobent. D'autres échan- tillons, recueillis dans la même vallée, démontrent la production, dans le dôme, de hrèches de fric- tion, et il me semble bien probable que l'étude de leur distribution montrera plus tard que les phé- ‘ Les blocs rejetés par l'éruption du 30 août 1902 et les en- claves rapportées par la lave d'avril 4904 contiennent mème des types à structure granitoïde:; il n'est donc pas impossible que la partie la plus lentement refroidie en profondeur soit constituée par une véritable norite quartzilère, 914 A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE nomènes dynamiques, dont la formation de l'ai- guille a été la manifestation la plus grandiose, se sont produits, en plus petit, dans de nombreux autres points de la carapace disloquée. Enfin, il n'est pas douteux que le culot quartzi- fère lui-même ne soit traversé par des veinules de cristallinité différente, postérieures à sa consolida- tion définilive, alors qu'inversement, les racines de la première aiguille et les restes des aiguilles de formation plus récente fourniront l'exemple de dykes quartzifères, émergeant de la carapace formée par l’andésile sans quartz. Les produits d’éboulement qui recouvrent loca- lement l’andésite continue du dôme, et qui ont comblé une partie de la rainure du cratère, consti- tuent une brèche incohérente, à structure chao- tique, formée par des blocs anguleux de toutes di- mensions, réunis par des matériaux plus fins. Il est fort vraisemblable que, dans leurs parties pro- fondes, en contact avec la roche en place, ces brèches sont cimentées par places par des veinules de lave compacte, ayant bavé à travers les fentes de la carapace, et ayant pu s’en échapper, grâce à la protection contre un refroidissement brusque, due aux parties superficielles constituant un man- teau mauvais conducteur de la chaleur !. La puissance de l'érosion dans les pays tropicaux est telle que les matériaux incohérents, actuelle- ment entassés sur certaines parties du dôme, ne tarderont pas à être entamés : une fois l'érup- . tion terminée, les parties superficielles, fendillées, du dôme s'écrouleront assez vite, et peut-être ainsi le culot quartzifère central apparaîtra-t-il à nu dans un avenir peu éloigné. En tous cas, c'est par un mécanisme de ce genre qu'à la Martinique même les pitons dacitiques du Carbet, qui présentent tant d’analogie de forme et, sans doute, d'origine avec le dôme récent, montrent surtout à nos yeux des dacites à pâte quartlzifère, alors que, de loin en Join seulement, apparaissent des dacites à pâte dépourvue de quartz, que je considère comme les homologues des andésites sans quartz qui forment la carapace de notre dôme. En résumé, la coexistence dans un même dôme de roches, différentes à la fois par léur structure et par leur composilion minéralogique, mais possé- dant une mème composition chimique, passant les unes aux autres, se pénétrant mutuellement sous ‘ Les dimensions de cel article ne me permettent pas d'entrer dans le détail des transformations minéralogiques que l'action des fumerolles détermine dans l'intérieur du dôme aux dépens des roches qui garnissent les cheminées souterraines : elles sont nombreuses, variées et importantes et apportent notamment d’intéressantes indications sur le mode de formation de la cordiérite. Je les ai étudiées en détail dans mon livre à l'aide des blocs rejetés par l'érup- tion du 30 août. forme de dykes ou de veines, n'implique pas néces- sairement des conditions ni un âge bien distinets de mise en place, pour chacune d’entre elles, puis- que quelques mois ont suffi à l'édification de cet ensemble compliqué que doit être le dôme de la Montagne Pelée. VIII. — GÉNÉRALISATION DES OBSERVATIONS PRÉCÉDENTES. Le dôme de la Montagne Pelée est de bien petite taille à côté de Lant d'autres, connus dans de nom- breuses régions volcaniques; il n’est cependant pas téméraire de penser que les conclusions auxquelles conduit son étude sont susceptibles d’une très grande généralisation et qu’elles nous apportent la clé de la genèse de la plupart des dômes volca- niques, sinon de tous, et en particulier de ceux des dômites de la chaîne des Puys, des pitons de pho- nolite et de quelques-uns de ceux d’andésite du Massif central de la France. La naissance de son aiguille fournit aussi une explication possible de l'origine de ces dents à formes bizarres auxquelles je faisais allusion au début de cet article, de ces dents qui hérissent la surface des dômes andési- tiques de beaucoup de régions et dont M. Stübel a figuré de si beaux exemples, observés par lui dans les volcans de l'Amérique équatoriale. Comme l'aiguille de la Montagne Pelée, elles sont très vrai- semblablement le résultat d'un phénomène cons- tructif et non destructif, ainsi qu'on le pensait jusqu'à présent. Depuis quelques mois d’ailleurs, de nombreux géologues ont cherché, dans leurs observalions récentes ou anciennes, des faits pouvant être expli- qués par ce qui s'est passé à la Martinique. M. Hovey a fait remarquer que les dômes de l'ile de Saba et de la Soufrière de la Guadeloupe ont probablement une origine du même genre; mes observations personnelles en ce qui concerne cette dernière m'ont conduit à la même opinion. M.Stübel vient à nouveau de figurer un certain nombre de ces géants andésitiques de l'Equateur et de la Bolivie dont il s’est fait l'historiographe, et il n'hésite pas à leur appliquer une même conclusion. Sir Richard Strachey a faitla même assimilation pour certaines dents basaltiques du Dekkan, M. Bran- ner pour le pic phonolitique de Fernando de Noronha, M. Israël Russel pour le dôme rhyolitique occupant le centre du Panum Crater (Californie), et pour le piton d'andésite à hornblende de l'ile de Bogosloff, M. N.-H. Winchell pour le pic phonoli- tique d'Heen-ya-Kaga, dans le Dacota, enfin, M. Otto Lang pour le piton basaltique du Gudensberg près | + ê Cassel et M. Boule pour les dômes de phonolite du Cantal et du Velay. ds A. LACROIX — LE MODE DE FORMATION D'UN DOME VOLCANIQUE 315 Malgré la vraisemblance de toutes ces comparai- sons, il me parait nécessaire de procéder sans hâte «et de ne pas rejeter à priori dans tous les cas les anciennes interprétations; il faut étudier de nouveau à de plus près ces montagnes volcaniques à la lumière “des faits récents, avant de se prononcer d'une façon “définitive. Il sera utile, notamment, de préciser, “dans chaque cas particulier, quel rôle ont pu jouer, dans la construction de ces édifices volcaniques, les ‘deux mécanismes distincts mis en évidence par l'étude de l’éruption de la Montagne Pelée'. Dans les massifs déjà entamés par l'érosion, cette analyse ne sera pas toujours facile : de grandes difficultés se dresseront quand il faudra faire la part des écroulements contemporains de l'édification du dôme et de ceux dus à sa vieillesse. Mais, par contre, les outrages de l'érosion permettront de rechercher s'il existe, comme à la Martinique, dans l'intérieur de ces dômes, des variations systéma- tiques de composition minéralogique et de struc- ture; je viens de montrer plus baut que j'ai pu constater leur existence dans les pitons du Carbet. À POUR QU'UN MAGMA PUISSE ÉDIFIER UN DOME. ï IX. — CONDITIONS NÉCESSAIRES à En considérant la question à un point de vue plus général encore, on peut se demander quelles D les conditions nécessaires et suffisantes pour “qu'un magma en voie d'épanchement puisse édifier un dôme. « Une seule condition parait être vraiment indis- “pensable : c'est que le magma soit émis à l’état lrès visqueux. La viscosité est une propriété qu'acquiè- rent très rapidement les magmas acides au moment de leur épanchement, car ils sont peu fusibles; c’est pourquoi les roches constituant les dômes appar- | tiennent généralement à des types pétrographiques l riches en silice (rhyolites, trachytes, dacites, andé- ( Siles), ou tout au moins pouvant fournir en abon- (a nce de l’orthose (phonolites). Mais une semblable | b \ “viscosité peut être aussi acquise par les magmas basiques, beaucoup plus fusibles que les précé- “dents ; il suffit, pour cela, qu'ils soient émis à une 2 : ; : ; à br. peu élevée ou, ce qui revient au même, ? Au cours de l'été dernier, j'ai constaté qu'au pied du dôme lu puy de Sarcouy, la roche massive est cachée en partie ar une brèche de blocs anguleux, réunis par des matières nes, qui parait identique à la brèche d'écroulement dela Mon- agne Pelée. J'ai trouvé dans le dyke de trachyte domitique du funiculaire de la Bourboule des surfaces de glissements polies comparables à celles de l'aiguille. Dans un récent article (La Géographie, 15 janvier 1905), M: Boule a appelé l'attention sur le dôme phonolitique du roc d'Onzières (Cantal), qui présente une surface cylindrique, lisse, cannelée verticalement, rappelant également celle de l'aiguille, avec une vitesse suffisamment faible pour permettre un refroidissement assez rapide. Il n'y a donc aucune impossibililé théorique à l'existence de dômes de roches basiques. On vient de voir, du reste, dans l'énuméralion donnée plus haut des dômes signalés récemment par divers auteurs, que plusieurs exemples de basalte y figurent; peut-être même ne serait-il pas difficile d'en trouver en Auvergne : la production du piton basaltique de la Banne d'Ordanche au Mont-Dore, en particulier, pourrait bien être expliquée par un semblable mécanisme. La formation d'un dôme ne dépend donc pas tant de la composition chimique du magma qui le pro- duit que des conditions dans lesquelles s'effectue son émission; mais certains magmas réalisent ces conditions plus facilement que d'autres. Il est possible de trouver une démonstration de celte proposition sans quilter la Montagne Pelée. Celle- ci nous montre, en effet, depuis 1902, l’emboitement de deux types de montagnes volcaniques, tout à fait différents au point de vue structurel et au point de vue génétique, puisqu'un dôme s’y est édifié au milieu de la caldeira d'un vieux cône de projection, sans cependant qu'il y ait eu changement dans la composition chimique du magma qui a fourni la matière de l’un et de l’autre. C’est l'inverse de ce qui s'est passé, au cours d'une même éruption, à Santorin, où un cône de projection est venu coiffer un cumulovolcan. Enfin, dans les contre- forts de la Montagne Pelée et dans ceux du Car- bel, se rencontrent d'antiques coulées des mêmes andésiles. Une grande viscosité, qui, dans le cas de l’érup- tion actuelle, dépend à la fois de la faible fusibilité du magma et de la lenteur de son émission, jointe à la discontinuité des dégagements de gaz et de vapeurs et à une disposition topographique privilé- giée, a conduit à la formation du dôme dont j'ai suivi pas à pas l'histoire. Si cette même quantité de lave avait été épanchée à une plus haute température et dans un temps très court, elle eût, sans aucun doute, donné naissance à une véritable coulée. Si, enfin, le dégagement des gaz et des vapeurs avait été plus violent et, en outre, ininterrompu pendant l'ascension de la lave, celle-ci n'eût pu former des masses continues; elle eût été pulvérisée par par- celles; il se fût ainsi produit une nouvelle édition des éruplions antéhistoriques, qui ont couvert les flancs de la Montagne Pelée de son épais manteau de cendres, et le résultat de l'éruption eût été un banal accroissement de volume du cône ancien de projection. A. Lacroix, Membre de l'Institut, Professeur au Musénm d'Histoire naturelle. R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS L'INSTITUT ÉLECTROTECHNIQUE DE L'UNIVERSITÉ DE LILLE 316 I. — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS. $ 1. — Nécessité d'une éducation scientifique. Dans des articles retentissants sur l'enseigne- ment supérieur des sciences”, M. Appell, membre de l'Institut et doyen de la Faculté des Sciences de Paris, et M. Colson, ingénieur des Ponts-et-Chaus- sées et conseiller d'État, ont parlé de la formation scientifique des élèves des écoles industrielles avec une hauteur de vues et une compétence remarquables. La justesse des conclusions de M. Appell n'a échappé à personne: on ne saurait méconnaitre que cette formation est insuffisante, devant les exigences et les tendances de plus en plus scien- tifiques de l'industrie moderne. Et, d'autre part, tout le monde admettra que, si les grandes Écoles industrielles envoyaient leurs élèves dans les Facultés des Sciences pour faire leur formation scientifique, cette réforme ne pro- duirait pas seulement les résultats heureux d’une éducation scientifique plus approfondie ; elle allé- gerait le budget de ces écoles et créerait, par ce fait, de nouvelles ressources pour enrichir et per- fectionner le matériel scientifique et technique; les nations étrangères, comme la Suisse, la Belgi- que, l'Allemagne, ont compris de cette manière la formalion scientifique de leurs industriels. Les esprits, en France, ne sont peut-être pas mûrs pour cette réforme, et l'état actuel de la plu- part de nos industries ne l'exige pas encore; elle entrainerait, d'ailleurs, falalement une augmenta- tion de la durée des études. Le nombre et la variété des exercices qui éclaircissent et précisent l’ensei- gnement oral, qui en font vraiment un enseigne- ment fécond, demandent à l'étudiant beaucoup de temps, et celle nécessité oblige à réduire notable- ment les heures de courset les matières ense:gnées. L'ingénieur, pour acquérir la même quantité de connaissances, meltrait plus de temps à l'Université qu'à l'école; c’est là un grave écueil, car le temps presse, et les difficultés de la vie, pour beaucoup de jeunes gens, imposent la limitation de la durée des études. Cette nécessité, el l'obligation d'une fcr- mation technique suffisante, peuvent se concilier par une spécialisation des études elles-mêmes; ‘ Revue générale des Sciences, 30 mars 1904. nous verrons plus loin dans quel sens il faut l’en- tendre. $ 2. — Nécessité de la spécialisation. Constatons, pour le moment, que cette spécia- lisation est nécessaire pour les chimistes et les électriciens, car la Chimie et l’Électricité se déve- loppent avec une intensité si puissante que le chi- miste ou l’électricien qui veut être à la hauteur de sa tâche est obligé de se consacrer à la branche spéciale qu'il a choisie. Cette spécialisation est déjà possible dans cer- laines industries, et tend à le devenir de plus en plus dans beaucoup d’autres : Le chimiste altaché aux usines des fours à coke de nos grandes exploi- tations minières et l'ingénieur électricien qui dirige la station centrale n'ont pas besoin de posséder les multiples connaissances techniques de l'ingé- nieur qui dirige le travail du fond de la mine. D'autre part, il suffit de jeter un regard altentif sur les transformations incessantes de l’industrie pour y reconnaitre les tendances, nettement carac- térisées, d’une évolution progressive et continue, vers une organisation profondément différente de son organisation passée. Dans l'usine restreinte, créée par la machine à vapeur, l'ingénieur doit remplir des fonctions très diverses ; dans une sucrerie, par exemple, certains chimistes doivent être à la fois chimistes, mécani- ciens et électriciens, mais cette multitude de fonc- tions ne sera plus possible dans l'usine de l'avenir. L'introduction, dans chaque industrie, du prin- cipe fécond de la division du travail, la nécessité de produire beaucoup pour produire à bon compte, conséquence de cette loi que le fonctionnement et l'établissement d'une machine ou d’une usine quel- conque sont d'autant plus économiques que sa puis- sance est plus élevée, conduisent logiquement et fatalement à la constitulion d'entreprises colossales, où chacune des multiples opérations industrielles qui concourent au but final a son organe propre: Dans cet organisme gigantesque qu'est acci- dentellement l'usine d'aujourd'hui, mais que sera presque partout l'usine de demain, la spécialisas Lion qui s'applique au travail de la machine et de l'ouvrier s'étend, dans une certaine mesure, au, domaine de l'esprit qui le dirige. Si l’on excepte le directeur technique, qui doit avoir une compétence générale, chacun des ingé= nieurs devra se cantonner dans un domaine limité, 4 ’i R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS 317 de la pratique, et le succès de l’entreprise dépen- dra de la compétence de chacun d’eux dans le rôle spécial qui lui sera dévolu. Le besoin d'une culture scientifique approfondie, le développement de chaque branche de la science, la nécessité de limiler la durée des études, impo- … sent une formation nouvelle d'ingénieurs spécia- - lisés. La formation rationnelle de ces ingénieurs spé- ‘ cialistes peut être faite à l'Université, en adjoignant … à l’enseignement scientifique général un enseigne- ment technique capable de donner à l'étudiant les …_ connaissances et les aplitudes nécessaires pour | aborder la pratique. $ 3. — L'enseignement scientifique et technique des applications dans les Universités. À d K } En même temps que l'Industrie se développait - avec des tendances et des exigences de plus en plus scientifiques, les Facultés des Sciences et les Uni- « versités s'organisaient, d'autre part, pour l'ensei- gnement technique, par une extension logique de leurs enseignements scientifiques. L'introduction de l’enseignement appliqué £ les Universités ne date pas d'aujourd'hui; « longlemps déjà, … régions industrielles, Lille notamment, avaient des L. d'enseignement appliqué et des chaires mixtes d'enseignement général et appliqué, répon- “3 * dant aux besoins de l'industrie de la région. Avec 1 la création des bourses de licence et d'agrégation, - l'enseignement des Facultés gagna en ampleur et “en profondeur : les chaires mixtes devinrent sur- tout des chaires d'enseignementscientifique général. Après la réforme de la licence et la fondation des Universités, les enseignements appliqués repa- rurent; on créa des certificats de Mécanique ap- pliquée, de Physique industrielle et d'Électrotech- nique, de Çhimie appliquée. Le programme de “ces enseignements appliqués était un complé- ment aux enseignements généraux dont ils déri- vaient; il comprenait l'étude scientifique et appro- fondie des phénomènes, des appareils et des éthodes de l'industrie mécanique, électrique et “chimique. La nécessité de compléter ces enseigne- 5 théoriques par un enseignement HIERRQUE amena naturellement les Universités à créer des _ Instituts techniques : — 1° L'introduclion de l'enseignement scientifique et théorique des applications industrielles dans les “Facultés des Sciences était une extension logique “des enseignements généraux. En effet, après la Chimie générale qui étudie les lois et les propriétés générales des corps, il est rationnel d'étudier plus en détail les réactions secondaires qui, dans les phénomènes industriels, se greffent sur les réac- dans depuis les Facullés des Sciences des tions principales; il est logique d'appliquer les lois de la Mécanique rationnelle et de la Physique aux phénomènes plus complexes de la pratique. applications présentent, d’ailleurs, au seul point de vue scientifique, un intérêt aussi grand que cer- taines parties, reconnues classiques, de l'Optique, comme la diffraction ou la polarisation chroma- tique ; en Électrotechnique, par exemple, la concor- dance de la théorie et de l'expérience est remar- quable, et certaines lois générales de l'induction trouvent leurs meilleures vérifications quantita- lives dans l’industrie électrique elle-même. Celle vérité est si bien admise aujourd’hui que, dans tous les cours d'Électricité, même les plus scientifiques, le chapitre de l'Electrotechnique prend une large place; 2 L'introduction de l’enseignement scientifique des applications dans les Universités a été une heureuse innovation. Pendant longtemps, les Fa- cultés des Sciences, qui avaient mission de cultiver et d'approfondir la Science, et l'Industrie, qui appliquait les découvertes scientifiques, vécurent côte à côte sans se connaitre. L'enseignement appliqué a créé des relations fécondes entre l'In- dustrie et l'Université. Ne sont-ce pas, d’ailleurs, ses réflexions sur la puissance motrice du feu qui ont conduit Sadi- Carnot au célèbre principe qui domine aujourd'hui la science tout entière; n'est-ce pas l’étude atten- live d'un fait industriel qui a ouvert à Pasteur la voie de ses impérissables travaux? Mais, pour qu'il soit plus utile à l'industrie et lui fournisse des collaborateurs précieux, il faut ajouter à l’enseignement théorique un enseigne- ment pratique et technique. Ces 1. Les objections. — Celte tendance utilitaire présente un écueil très grave pour l'Université, et a élé vivement combatltue par quelques-uns de ses membres les plus éminents: « Né des Sciences géné- rales, disent-ils, l'enseignement appliqué, d’abord exclusivement scientifique, deviendra insensible- ment plus technique. Le développement excessif des applications et la durée limitée des études tendent nécessairement à faire considérer l'ensei- gnement général, par l'étudiant d'abord et par le professeur lui-même, comme un enseignement encombrant, qu'il fautréduire au minimum ; etcette diminution progressive de l’enseignement théo- rique et général, devant l'accroissement incessant des applications, réduira la Faculté à une simple école industrielle. » On ne saurait méconnaitre d'enseignement supérieur, qui coudoie constam- ment le domaine de la technique, ne perde, par ce contact incessant et l'appät de certains avantages, que le professeur 318 le goût et l'amour désintéressé des recherches scien- tifiques, et qu'il n'arrive parfois ainsi à mettre au même rang les connaissances théoriques, les for- mulesempiriques et les mille détails dela technique. L'étude des applications, conçue dans ce sens étroitet simplement pratique, serait la ruine du haut enseignement et réduirait les Facultés à des écoles d'application de second ordre. L'introduction des Sciences appliquées dans les Universités, loin de produire les effets heureux que l'on a exposés, ne serait qu'une mauvaise concurrence pour les Écoles industrielles existantes et un germe de mort pour les Universités elles-mêmes. « En laissant pénétrer l'enseignement technique dans les Facultés des Sciences, dit M. Appell, on amènerait rapidement la déchéance de la Science française et, par suite, l’affaiblissement des études techniques elles-mêmes. » 2. Les remèdes. Les Instituts techniques. — Pour éviter ces résultats funestes, M. Appell pro- pose une solution nette et précise : « Les deux enseignements, scientifique et technique, dit-il, doivent avoir leurs organes propres : les Instiluts techniques des Universités doivent être nettement séparés du service de l’enseignement général et se borner à donner un enseignement professionnel à des étudiants qui suivent ou ont suivi l’ensei- gnement général de la Faculté des Sciences. » Con- formément à ce programme, il faut que l'enseigne- ment scientifique soit donné par les professeurs de la Faculté, el l'enseignement technique uniquement par des ingénieurs et des praticiens. Il faut que le professeur de sciences appliquées conserve à son enseignement son caractère général et profond, qu’il ne descende dans les multiples détails de la technique et dans cette région semi-obscure de la pratique que pour y jeter la lumière de la science, que pour grouper, dans une théorie rationnellement déduite des principes de la Science générale, ces observations confuses et embrouillées, consignées par la pratique ; que, tout en s'y initiant lui-même, il laisse à des praticiens et à des ingénieurs le soin de faire la formation technique. 3. Les diplômes techniques des Universités. — Müis celte séparalion des deux enseignements ne produirait qu'un résultat illusoire si les diplômes techniques remis par les Universités étaient dé- livrés sans qu'il ait été donné un enseignement supérieur, d’un caractère suffisamment général. Or, le principe de la spécialisation, que nous avons invoqué tout à l'heure, peut inspirer des craintes légitimes à cet égard, et que rendent plus vives la réforme de l'École Normale et la suppression des dispenses militaires. R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS | par M. Colson subsiste pour les autres. Malgré l'étendue considérable du domaine de la Chimie et de l'Électricité théoriques et appliquées, le chimiste ou l’électricien ne peut se borner unique= ment à l'étude de la Chimie ou de l'Électricité. Cer- laines études de Physique et de Mathématiques lui sont indispensables. Il serait inadmissible que le chimiste de nos Universités maniät le spectroscope, le polarimètre, la bombe calorimétrique, etc., sans connaître au moins la théorie élémentaire de l’ap=« pareil; que l'ingénieur électricien connût les dé-= lails pratiques du fonctionnement des générateurs et des récepteurs sans en posséder les raisons théoriques. « L'Université doit faire des maîtres eb non des contremaitres. » De plus, la science géné-M rale de l'ingénieur sorti de nos Universités ne doit, pas se limiter étroitement à la connaissance des” lois de Chimie, de Physique et d'Éleclricité qui ne lui sont que d'un intérêt pratique; il faut, autant que possible, que son érudition s'étende à toutes les parties de la science connexes de la branche spéciale qu'il étudie. L'électricien, en particulier, ne saurait oublier que c’est la recherche désintéressée de l'explica- tion d’une observalion fortuite de Galvani qui con= duisit l'immortel Volta, par des expériences d’élec tricilé statique sans aucune utilité immédiate, à celte découverle géniale de la pile, dont découlam toute l'Électrotechnique moderne. Il se souviendra que c'est par ses connaissances d'Optique physiquem que Ferraris fut amené à créer les moteurs àm champ tournant. Les études générales des parties de la science 0 l'ingénieur se spécialisera ne sauraient donc subi aucune influence débilitante par la coexistence de l’enseignement technique dans l'Université. Mais en est-il de même des enseignements géné= raux qui n'ont pas ce caractère d'êlre indispen= sables : l’Optique, l'Acoustique, la Capillarité s'il s'agit des électriciens ; la Cristallographie, la Miné ralogie, l'Optique, la Chaleur, la Thermodynamique; l'Électricité s’il s'agit des chimistes. Sans doute, l'enseignement du P.C.N. sera pour ces derniers d'un précieux secours, mais la difficulté signalée Il ne serait pas rationnel de donner aux futurs rale, sans doute. Il semble donc nécessaire que 1 Universités qui forment des ingénieurs électricie ou chimistes se plient à cette nécessité, non pas sacrifier les enseignements d'une utilité moins in médiate au futur praticien, mais au moins de Jes” organiser de façon qu'ils puissent servir, à la foi à ceux qui ne désirent en apprendre que les prin= cipes et les lois fondamentales, et à ceux qui veulent les étudier dans les détails. Il suffit, p | 3 R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS 919 Î cela, que le professeur traite, en une première série de leçons, les principes fondamentaux et les lois principales et que, dans une seconde série, il entre d'une façon plus approfondie dans les détails. Quant à l’enseignement technique, son pro- gramme doit procéder du même esprit que l'édu- cation scientifique elle-même. En technique, le domaine est immense ets'accroit tous les jours; il est incontestable que la multi- plicité des connaissances ne peut être nuisible, mais cette abondance même impose un choix. Il sera possible de glisser sur l'accessoire, que l’in- dustrie apprendra sans effort; mais il importera avant tout d'armer le futur ingénieur de tout ce qui lui sera indispensable pour conduire ses concep- tions théoriques jusqu'à la réalisation pratique. Il sera essentiel de développer dans l'étudiant le sens pralique, Sans lequel l'imagination la plus puissante demeure stérile pour l’industrie. Exercices et conférences techniques, toujours poussés jusqu'aux exemples numériques et, si pos- sible, jusqu'à la réalité pratique, conférences indus- trielles, contacts fréquents avec l'Industrie, rien ne saurait être négligé pour habituer l'étudiant à tenir un compte judicieux des exigences économiques et pratiques. 4. La forme des examens. — I] est un autre point essentiel auquel les Universités doivent s'at- tacher avec un soin jaloux : c'est la forme des examens. Il faut que chacun d'eux comprenne des épreuves écrites, pratiques et orales, chacune d'elles étant éliminatoire; car ces trois épreuves sont néces- “saires pour juger de l'efficacité de l'enseignement scientifique de l'Université. Il faut encore que chaque branche de l'enseigne- -ment général soit l'objet d’un examen particulier : ‘il importe que le candidat ne puisse racheter son “ignorance sur une matière fondamentale par une “compélence ou une aptitude en d’autres plus ou moins importantes. … Ce régime, copié sur celui des certificats d’études Supérieures, donnera au candidat plus de tendance -à l'étude particulière d’une branche de la science : il le contraindra à fixer son espril dans une voie déterminée plutôt que d'éparpiller ses efforts dans -des directions différentes, et contribuera ainsi puissamment à l'éducalion scientifique de l’étu- diant. >. Les recherches scientifiques. — Enfin, l'Uni- versité ne doit pas oublier que son rôle n’est pas seulement d'enseigner la science faite, mais de faire de la science; elle doit, dans une certaine mesure, inculquer à quelques-uns de ses élèves les mieux doués l'idée d'approfondir les phéno- mènes de la technique et les initier aux recherches personnelles. Si l’enseignement industriel dans l'Université conserve dans son intégrité les traditions élevées de l’enseignement supérieur général dont il est sorti, il remplira le rôle que les initiateurs émi- nents qui l'ont provoqué lui ont assigné. Les Uni- versités resteront fidèles à leur mission supé- rieure d'être des foyers scientifiques; elles devien- dront les promoteurs et les agents féconds du progrès industriel. C'est dans ces idées que l’enseignement indus- triel de l'Électricité est conçu dans les Universités de Nancy, de Grenoble, de Lille ; j'en décrirai, à titre d'exemple, l'organisation dans cette dernière ville. II. — L'ENSEIGNEMENT ÉLECTROTECHNIQUE DE L'UNIVERSITÉ DE LILLE. La ville de Lille, située dans une des régions les plus industrielles de la France, à proximité de riches mines de houille qui, dans un avenir peu éloigné, deviendront autant de foyers d'énergie électrique alimentant la région de force et de lu- mière, était tout indiquée pour devenir un centre de hautes études électrotechniques. A la Faculté des Sciences, un Institut de Physique industrielle à été organisé; des cours etdes labora- toires électrotechniques ont été fondés et largement dotés par l'État et l'Université. Ces cours et ces laboratoires sont fréquentés par les ingénieurs qui veulent compléter leurs connais- sances en Électrotechnique et par les étudiants qui veulent entrer dans l'industrie sans passer par au- cune école spéciale. Ces derniers reçoivent à la Faculté les connaissances générales nécessaires pour comprendre l'Électrotechnique et ils sont préparés par des maitres spéciaux à la pratique et à la technique de l'ingénieur. La durée de leurs études est de trois ans. $ 4. — Enseignement théorique. L'enseignement théorique est donné par les pro- fesseurs de la Faculté. Il comprend l'étude des Mathématiques générales, de la Physique générale, de l'Électrotechnique, de la Physique industrielle et de la Mécanique appliquée, avec des travaux pratiques coordonnés à l'enseignement. Le programme de Mathématiques générales com- prend l'Algèbre supérieure, la Géométrie analyti- que, le Calcul différentiel et intégral, la Mécanique rationnelle, et se confond avec le programme du Certificat de Mathématiques générales de la Faculté des Sciences. La Physique générale comprend essentiellement 320 R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS À l'étude de la Chaleur, de la Thermodynamique et de l'Électricité générale, et accessoirement l'étude des phénomènes fondamentaux, des lois fondamentales de l’Optique, de l'Acoustique, de la Capillarité et de l'Élasticité. Le cours de Physique générale est bisannuel ; mais les parties les plus importantes, comme l'Électromagnétisme, sont traitées tous les ans. La /’hysique industrielle comprend l'étude suienlifique du chauffage et de l'éclairage, la vaporisalion, les phénomènes des chaudières à vapeur, l'étude des phénomènes physiques que présentent les moteurs à vapeur et à gaz. L'Ælectrotechnique théorique est l'étude appro- fondie des lois de l'électricité générale, du fonetion- nement des générateurs et des récepteurs d'énergie électrique. Le cours de Physique industrielle et d'Électrotechnique est bisannuel; cependant, les parlies fondamentales, comme les moteurs, sont également traitées Lous les ans. La Mécanique appliquée, basée sur la Mécanique rationnelle, comprend la Cinématique et la Dyna- mique appliquées, l'Hydrodynamique, l'étude des moteurs hydrauliques et thermiques, la traclion mécanique, la résistance des matériaux; le cours est bisannuel; malières fondamentales sont traitées tous les ans. La Chimie générale a été systématiquement écartée du programme des études; on a pensé que, pour comprendre la Physique générale et l'Électri- cité, les connaissances de Chimie du baccalauréat (mention Sciences), exigées pour l'entrée à l'Institut technique, suffisaient pour l'électricien. D'autre part, ilest certain que, pour faire de l'Électrochimie, il faut être beaucoup plus chimiste qu'électricien, etle temps que l’on aurait pu distraire à l'ensei- gnement général des Mathématiques et de la Phy- sique n'aurait pas été suffisant pour acquérir des connaissances et des aptiludes vraiment utiles en Chimie, mais aurait affaibli notablement les études fondamentales de Mathématiques et de Physique. L'enseignement oral est doublé de conférences avec interrogations et corrections d'exercices, et de problèmes sur des applications théoriques et numériques des lois et des théories exposées; les exercices et les problèmes conslituent de véri- tables compositions écrites, qui habituent l'élève à la rédaction, à la clarté et à la précision. La Physique générale et industrielle, l'Électro- technique, la Mécanique appliquée, comprennent de nombreuses manipulations ou essais expliqués dans des conférences spéciales précédant les travaux pratiques. Chaque manipulation fait l'objet. d'un rapport écrit corrigé par le professeur et le chef des travaux. L'élève est dressé à l'observation les précise des faits, il est habitué à se rendre compte: de la sensibilité de la méthode et des appareils par l'évaluation de l'erreur relative. Pour éviter les fausses manœuvres qui détériorent les appareils,s" tout élève est obligé, avant de manipuler, de faire le schéma théorique de la méthode, d'y faire cor- respondre un deuxième schéma pratique réalisé: sur les appareils qu'il manipule; il lui est recom- mandé de ne faire passer le courant qu'après avoir: montré sa manipulation ainsi préparée au chef des travaux ou aux préparaleurs. $S 2. — Enseignement technique. L'enseignement technique est donné par des. ingénieurs et des praticiens; il comprend : 4° le: dessin industriel ; 2° des essais de machines; 3° des conférences techniques, des projets, des visites. d'installations électriques et des stages dans les diverses usines de la région. Le dessin industriel est enseigné par un pro- fesseur de dessin de l'École des Arts et Métiers de: Lille, en prenant comme modèles les diverses parties des appareils et des machines utilisés dans l'industrie électrique. L'enseignement est conduit de facon que l'ingénieur qui sort de l'Institut soit capable de faire un croquis coté et le dessin indus- triel d’un appareil, sous la forme et avec les détails suffisants pour être exécuté dans les ateliers. Les débutants commencent par faire le croquis coté et le dessin d'appareils un peu rudimentaires, comme des vis, des interrupteurs, des commuta- teurs, etc.; les plus habiles s’exercent sur des dynamos et des alternateurs. $ Afin de pouvoir commander et juger en connais- sance de cause les ouvriers ajusteurs, menuisiers, tourneurs qui seront sous ses ordres, il faut que l'ingénieur soit initié lui-même au travail du bois, du fer et du cuivre. L'étudiant est exercé à ces travail manuel de V'alelier par des mailres spéciaux de l'École supérieure professionnelle de Lille: Depuis les commençants, qui n'ont jamais pris une lime en main, jusqu'aux élèves qui sont su le point d'entrer dans l'industrie, chacun travaille à l'exécution d’un appareil électrique utilisable: C'est ainsi qu'ils réalisent, suivant leurs aplitudes” des interrupteurs, des commutateurs, des rhéostats des transformateurs, des bobines de self-inductiony des appareils de mesure, ete., dont le croqui préalable a été fail par eux à la leçon de dessins ils sont, en outre, exercés à faire des bobinages" des épissures, etc. L Les essais de machines, de canalisalions, d'ac= cumulateurs, sont extrèmement variés et adaptés | au cours; ils sont exposés dans des conférences spéciales, faites par le professeur et le chef des travaux, sous la forme même où ils sont exécutés R. SWYNGEDAUW — dans l'indusirie el sous la forme plus précise où ils pourraient se faire. Un rapport soigneusement rédigé, avec un tracé correct de courbe s’il y a lieu, est exigé après chaque essai. La totalité des essais électrotechniques en courant continu et alternalif est faite en une année, et sert ainsi à la revision du cours de l’année et de celui … de l’année précédente. —._ Ces essais sont faits sur des machines et des installations comparables par leur puissance à celles que l’on rencontre dans l'industrie. Les laboraloires … d'essais, dont la superficie atteint 300 mètres carrés, U commencés en 1896 par M. Camichel, comprennent 4 aujourd'hui une salle de génératrices et une autre ê de réceptrices, et une salle de haute tension; la … salle des génératrices contient un moteur à gaz de … 25 chevaux, des dynamos, alternateurs et conver- …. ltisseurs de 25 à 10 chevaux, et des tableaux de “distribution. Deux batteries d'accumulateurs de 66 éléments chacune sont : l’une, de 250 ampères- heures, chargée à l’aide d’un survolteur, et l’autre, de 90 ampères-heures, chargée en deux demi-bat- teries par une seule dynamo. | Les laboratoires d'essais des élèves comprennent n un grand nombre de machines, des moteurs et - alternateurs synchrones et asynchrones, mono, di et triphasés, des moteurs en série et dérivation, un groupe de machines identiques d'une force de 6 chevaux, et un groupe de 2 alternateurs, avec - tableau pour couplage en parallèle. Les élèves commencent par étudier les tableaux à de distribution de la salle des génératrices qui sont à distance du mur; cette étude est facilitée par ce “ri que toutes les canalisations de l'Institut sont su à en fil recouvert attaché sur porcelaine. A la salle des génératrices, elles aboutissent aux ta- bleaux,où des manettes permettent de commander les machines et distribuent l'éclairage et l'énergie dans tous les laboratoires de l'Institut. Des dispo- “cilifs de sûreté allénuent les dangers des fausses “manœuvres possibles pour des débutants. Il est, “d'ailleurs, exigé de ceux-ci des schémas théoriques a pratiques des opérations qu'ils ont à faire, et qu ils ne doivent commencer qu'après contrôle du “chef des travaux ou des préparateurs. À la salle “des réceplrices, les canalisations qui proviennent “de la salle des génératrices aboutissent à des prises de courant à proximité des diverses machines d'es- sais et fournissent le courant continu, mono, di ou triphasé. Toutes les installations sont volantes; les élèves doivent monter leur essai à partir des prises de courant jusqu'aux bornes du moteur à étudier. Hs ne travaillent, d'ailleurs, dans cette salle que lorsqu'ils ont acquis une certaine habileté et une expérience technique dans la salle des génératrices. Ds font, en dernier lieu, les essais de haute tension L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS 321 en courant continu et en courant allernalif par transformateurs. Les conférences techniques sont faites tous les ans par des ingénieurs sur les matières suivantes : 1° Construction et calcul des dynamos et allerna- teurs ; 2° Accumulateurs ; 3 Distributions d'énergie, canalisations, appareils employés en courant con- tinu et allernatif; Applications mécaniques de l'électricité ; 6° Entretien et acci- dents des dynamos ; 7° Traction ; 8° Télégraphie et téléphonie ; 9° Constructions industrielles. Les conférences sur les distributions et le trans- port d'énergie, la construction des générateurs et récepteurs, et la traction sont faites par un ingé- nieur électricien spécialement attaché au labora- toire; d'autres conférences sur diverses applica- tions de l'électricité sont faites par des ingénieurs praticiens particulièrement compétents. C’est ainsi que les applications dans les mines, les appareils de levage et de manutention, les {urbo-généra- teurs, la construction des moteurs asynchrones, la léléphonie et la télégraphie ont été traités celte année par des professionnels. Des projets sur la distribution et le transport de l'énergie, sur l'éclairage et la traction, sur le cal- cul des générateurs et récepteurs à courant con- ünu et alternatif, sont donnés et corrigés avec le plus grand soin. Les visites d'installations électriques sont faites pendant le semestre d'été, un jour par semaine, sous la direction du professeur d’Électrotechnique et de l'ingénieur, chef des travaux. Pendant ces visites, l'étudiant de troisième année est chargé de s'enquérir auprès des industriels, des ingénieurs el des contremaitres qui dirigent l’usine, de tous les détails techniques, pratiques ou économiques qui concernent le moteur à gaz ou à vapeur, et l'ins- tallation électrique. Il doit notamment profiter de ces visites pour se familiariser avec les divers Lypes de chaudières ou de moteurs mécaniques utilisés dans l'industrie; il complète dans les livres tech- niques les renseignements qui lui ont élé fournis. A la suite de la visite, les élèves font un rapport écrit à tour de rôle sur l'installation qui fail l’objet de l’exeursion; ils exposent ensuite, à quelques jours d'intervalle, cette visite, dans une conférence qu'ils font à leurs camarades en présence du pro- fesseur et de l'ingénieur de l'Institut, qui les cri- tiquent. Pendant les vacances garanties suffisantes Out sur la recommandation des s{ages dans les ° Éclairage; 5° , les élèves qui offrent des du professeur, autorisés à faire usines de la région. Comme on le verra plus loin, comprend la présentation d'un appareil industriel entièrement construit et étudié par le candidat. l'examen final 322 R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITÉS L'étudiant commence par étudier les propriétés électriques des divers matériaux qu'il utilisera pour la construction de son appareil; il en fait le projet complet, dresse le croquis et le dessin de ses diverses pièces et soumet ce premier travail au professeur et à l'ingénieur électricien. Si le projet est accepté, l'élève le réalise maté- riellement à l'atelier. Lorsque son appareil est ter- miné, il l'étudie complètement au point de vue expérimental. C’est le rapport complet de l’exécu- tion et de l'étude de cet appareil qui est présenté à l'examen final du diplôme. Cet exercice électrotechnique présente un en- semble d'épreuves pratiques et techniques très in- téressantes et d'une très grande utilité pour les élèves. Il peut être remplacé par une recherche originale sur une question d'Électrotechnique , assez importante pour être publiée dans un journal d'Électrotechnique. Le professeur conseille ce travail aux élèves dont les aptitudes et l'esprit d'observation sont jugés suffisants pour mener à bonne fin l'étude qu'il propose. C’est ainsi qu'ont été étudiées au labora- toire la distribution du flux dans l’entrefer d'un moteur asynchrone et la réaction magnétique de l'induit dans une dynamo à courant continu. $ 3. — Examens. Diplôme d'ingénieur électricien. Pour entrer à l'Institut électrotechnique, il faut passer avec succès un examen sur le programme de Mathématiques, de Mécanique, de Physique et de Chimie des première et deuxième parties du baccalauréat (Sciences, Latin ou langues vivantes). Cet examen est de la même difficulté que ce der- nier et se passe dans la même forme, le deuxième lundi de novembre. Sont dispensés de cet examen les bacheliers, les candidats munis de titres équivalents au bacca- lauréat et les admissibles aux grandes Écoles Centrale, Polytechnique, Mines, ete. Le diplôme d'ingénieur électricien de l’Univer- sité de Lille est délivré aux étudiants qui ont subi avec succès les quatre examens suivants : 1° Mathématiques générales : 2° Physique générale (chaleur et électricité) ; 3° Physique industrielle et électrotechnique; 4 Électricité et Mécanique appliquées. Les examens se passent à la fin et au commence- ment de chaque année scolaire, en même temps et dans les mêmes formes que les certificats d’études supérieures. Chacun des trois premiers se compose : 1° D'une épreuve écrite, éliminatoire, d'une du- rée de quatre heures, sur une question de cours et un problème; 2° D'une épreuve pralique, également élimina- toire, d'une durée de quatre heures, sur une mesure ou un essai industriel ; 3° D'une épreuve orale. Pour chacun d’eux, le jury se compose de trois professeurs de la Faculté. Le quatrième examen comprend : 1° Un avant-projet électrotechnique, d'une durée de huit heures; 2° Une épreuve pratique d'une durée de quatre heures sur la préparation ou l'exécution d'un essai industriel ; 3° Une épreuve orale sur l'Électricité et la Mé- canique appliquées ; 4° La présentation d’un appareil entièrement étudié et construit par le candidat ou la soutenance d'un travail original sur une question électro- technique. Le dessin et le travail manuel entrent dans l’ap- préciation de la première et la quatrième épreuve de cet examen. . Le jury du quatrième examen comprend les pro- fesseurs de Physique industrielle et de Mécanique appliquée et un ingénieur désigné par le Recteur de l'Académie. Ù Cet examen ne peut être subi que par les candi- dats qui ont accompli la dernière année de scola- rité à la Faculté des Sciences de Lille, et qui ont subi avec succès les trois premiers examens de Mathématiques, de Physique générale et d'Électro- technique. Les étudiants bacheliers peuvent, pendant leurs trois années d’études, devenir licenciés en passant trois des certificats d’études supérieures suivants : Mathématiques générales, Physique générale, Phy= sique industrielle et Mécanique appliquée, dont les programmes diffèrent peu ou point des pro- grammes indiqués plus loin. $ 4. — Dispenses. 1° Un certificat quelconque d'études supérieures de Mathématiques dispense de l'examen de Mathé= matiques générales ; 2 Le certificat de Physique générale dispense de l'examen de Physique générale; celui de Phy= sique industrielle dispense de l'examen de Physiqué industrielle et électrotechnique ; 3 Les anciens élèves des grandes Écoles (Poly technique, Centrale, Mines, Ponts et Chaussées, ete.); qui ont satisfait aux examens de sortie, sont dis= pensés des examens de Mathématiques et de Phy= = sique générale. Les Ingénieurs diplômés de l'Institut industriels du Nord de la France sont dispensés de l'examen, de Mathématiques générales. Dans certains cas exceptionnels, et sur avis fav oi rable des professeurs, des élèves n'appartenant pas er « fin de la deuxième année, l'élève passe l'examen - de Physique générale; les interrogations hebdo- - madaires sur les divers cours de Physique géné- AN" de - exercices pratiques sont sanctionnés par des notes - qui sont consignées sur le livret scolaire de l'étu- R. SWYNGEDAUW — L'ENSEIGNEMENT TECHNIQUE DANS LES UNIVERSITES 323 aux catégories visées ci-dessus peuvent être dis- pensés d’une ou deux années d’études. $ 5. — Distribution des études. Les études peuvent se faire en trois ans. La plupart des cours sont linographiés et distribués aux élèves. Dans la première année, les élèves suivent et étudient principalement le cours de Mathématiques générales, qui comprend deux cours et une conférence par semaine pendant toute l’année, et, en outre, une conférence de Mécanique ralionnelle par semaine pendant le deuxième se- mestre. Il comporte de nombreux exercices. Les étudiants suivent, en outre, deux cours de Physique générale sur la Thermodynamique et l'Électricité. Ils ont trois séances de deux heures de dessin industriel et trois heures de travaux d'atelier par semaine. Ils sont, en outre, interrogés à tour de rôle chaque semaine sur les cours de Physique générale, et les notes qu'ils obtiennent dans les divers examens et exercices forment le livret scolaire de l'étudiant et servent au classe- ment des élèves ; il en est tenu compte dans les examens ullérieurs. À la fin de la première année, les élèves sont obligés de passer l'examen de Mathématiques gé- nérales, qui leur donne le droit de passer en seconde année. Pendant la deuxième année, l'élève étudie prin- cipalement la Physique générale; il a trois heures de cours et de conférences de Physique par semaine, et, si c'est possible, un cours sur les lois fondamentales de l'Oplique, de l'Acousti- que, etc. ; il fait de nombreux exercices sur l'Élec- tricité et la Thermodynamique et il a une séance de travaux pratiques de trois heures par semaine; il suit, en outre, deux cours et une conférence d'Électrotechnique et de Physique industrielle et six heures de manipulations, de mesures ou d'’es- Sais ; il a trois séances de dessin de deux heures et trois heures d'atelier par semaine. En outre, il participe aux excursions du semestre d'été. A la rale, industrielle ou électrotechnique et les divers diant et servent au classement. Pendant la troisième année, l'étudiant suit deux cours de Physique industrielle, d'Électrotechnique | théorique et une conférence spécialement consa- crée à la correction des exercices et à la révision des cours de l’année précédente; deux cours de Mécanique appliquée ; les conférences techniques des ingénieurs; il fait six heures de mesures éiectri- ques par semaine, douze heures d'essais électro- techniques divers, trois heures d'atelier, prend part aux excursions électrotechniques du deuxième semestre et accomplit les stages dans les usines. IL passe l'examen de Physique industrielle et d'Électrotechnique et celui d'Électricilé et de Mé- canique appliquées, qui se rapportent à des notions connexes, envisagées aux points de vue scientifique dans le premier, technique dans le second. Le classement de sortie se fait d'après les notes obtenues dans les divers examens, et d'après le livret scolaire des trois années d'étude. En résumé, les études sont sanctionnées de deux manières distinctes : 1° par les examens de fin d'année, permettant de passer d’une année d'études à l'autre ou conférant le diplôme ; 2° par le classe- ment sanctionnant les interrogations et les exer- cices qui ne sont pas l'objet d'un examen de fin d'année. L'un des cours d'Électrotechnique est ouvert au public pendant un trimestre; il est destiné à faire connaître aux ingénieurs et aux industriels de la région de Lille, qui ne sont pas des spécialistes en Électricité, les applications les plus importantes et les plus intéressantes pour la région. Sous la forme élevée en même temps que pra- tique où il est concu, l'enseignement électrotech- nique de l’Universilé a gagné de jour en jour en considération et en importance. Depuis le mois d'octobre 1902, époque à laquelle l’organisation décrite a été mise en vigueur, le nombre des élèves ingénieurs est passé de 6 à 20, et, parmi eux, nous trouvons des ingénieurs des Mines, d'anciens élèves de l'École Polytechnique, des élèves diplômés de l'Institut industriel du Nord. Grèce à un Comité de patronage, les élèves sorlis ont été placés dans l'industrie régionale et y sont vivement appréciés. Ces heureux résultats sont une preuve nouvelle que la voie inaugurée par les Universités peut être féconde; en se mêlant de plus en plus intimement à la vie régionale, les Universités peuvent acquérir la place prépondérante qui leur est due pour le plus grand bien de l’industrie et du pays. R. Swyngedauw, Chargé de l'Enseignement électrotechnique L à l'Université de Lille. 324 MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX LES YEUX ET L'ADAPTATION AU MILIEU CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX L'étude de la faune abyssale a été l'une des ques- lions de la Zoologie qui ont le plus attiré l'attention pendant la seconde moitié du xix° siècle. Il y a cinquante ans, l'existence même d'êtres vivants dans les grandes profondeurs élait généralement uiée, en dépit de quelques faits positifs qui en attes- taient la réalité, mais avaient passé plus ou moins inaperçus. C'estaprès 1860, sous la suggestion de ces quelques données isolées, que, dans tous les pays, les zoologistes provoquèrentuneexploralion desgrands fonds; sir Wyville Thomson en Angleterre, L. et Al. Agassiz et le comte de Pourtlalès en Amérique, À. Milne Edwards en France, elc., furent les prola- gonistes de ce mouvement. Il est inutile de rappeler ici les nombreuses expéditions qui furent organi- sées partout pour l'étude des abysses. Il en est sorti la connaissance d’une faune considérable et Spéciale”, d'un extrême intérêt pour la Biologie géné- rale. Sans doute, aucun grand groupe zoologique nouveau na élé révélé. EL il a fallu abandonner l'idée que les abimes de la mer recélaient vivant tout un monde témoin d'époques géologiques anté- rieures. Mais toutes ces formes nouvelles, apparte- nant à un milieu biologique très particulier, et arrivant à des naturalistes au moment même où le transformisme prenait défini- tivement possession de la science, fournissaient un champ d’études d'une ampleur et d'un relief mer- veilleux. Ce mouvement est loin d'être terminé, comme l’attestent les expéditions récentes ou en cours. Ce qui apparait surtout comme l’œuvre à accomplir encore, c'est de mettre en valeur, au point de vue de la Biologie générale, tous les types abyssaux, en expliquant leurs particularités par celles du milieu; de ce côté, la tâche est à peine commencée et promet beaucoup. L'histoire des organes visuels nous en parait fournir la preuve. la connaissance Des conditions physiques principales qui font lindividualité du domaine abyssal, telles que la constance d'une tempéralure basse, voisine de 0° en général, la haute valeur de la pression, ele., l'ab- ? De nombreux ouvrages de vulgarisation dans les diverses langues ont présenté au public l'ensemble de nos connais- sances à ce sujet. Voir notamment : En. Perrier : Les Explo- rations sous-marines; Sin WyviLe Tuomson: The Depths of the Sea, ete. sence de lumière est peut-être le facteur qui a ew sur les organismes le retentissement le plus marqué, et en tout cas le plus palpable. Les rayons solaires ne pénètrent pas profondé- ment dans la mer. On peut délimiter, avec Chun, la zone abyssale par l'absence de lumière. La lumière détermine, en effet, la composition d'ensemble de la faune des diverses couches des eaux océaniques. Dans la zone superficielle (0-80 mètres environ) éclairée, la vie est de beaucoup la plus dense; en particulier, les végétaux à pigments assimilateurs: (algues à chlorophylle et ses succédanés) y pros- pèrent. De 80 à 350 mètres environ, l'éclairement est de plus en plus faible; les végélaux (phyto- planklon) s’y font de plus en plus rares, ne s'y reproduisent plus. Au delà de 400 mètres, ce sont les ténèbres complètes et la disparition de la vie: végétale {en dehors des bactéries). Seuls des ani- maux peuplent l’espace obscur de la zone abyssale, et, si l'on fait abstraclion des débris de végétaux morts tombant de la zone éclairée, leur régime est nécessairement carnassier. Le rappel de ces quel- ques données suffit à montrer l'importance capitale de la lumière. Dans l'étude des organismes abyssaux, une dis- tinction considérable s'impose, qui n'a pu être faile avec précision que dans ces dernières années et qui est fondamentale pour l'interprétation des formes et des organes. Il faut séparer nettement lesanimaux vivant sur le fond même, ou henthiques, fixés ou mobiles, et ceux qui, dans les grandes pro- fondeurs, mènent une vie pélagique, c'est-à-dire nagent ou flottent entre deux eaux, y cherchant leur subsistance et s'y reproduisant, sans rapports: avec le fond; ils composent la faune bath ypélagique: L'existence de cetle seconde calégorie n'élait pas évidente 4 priori, Al, Agassiz avait mème cru pou= voir la nier, à la suite de recherches faites dans le Pacifique, entre Panama et les îles Galapagos. Mais toutes les expéditions récentes, en parliculier cellem du National (Plankton-Expedition) et celle de law Valdivia, ont établi la réalité d’un bathyplankton à tous les niveaux, allant, d’ailleurs, en se raréfiant… avec la profondeur, dans les diverses régions de l'Atlantique, de l'Océan Indien et de l'Océan Antarc= tique. f Les premières explorations abyssales avaient été * 1 : Aus den Tielen des Weltmeeres, Iena, 1900, MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX 325 consacrées surtout à la faune benthique par la nature même des engins employés, filets trainant sur le fond, dragues ou chaluts; lorsqu'on les - remontait, des animaux bathypélagiques pouvaient bien s'y engager accidentellement; ils étaient mélangés à ceux du fond et l’on ne pouvait les dis- tinguer qu'hypothétiquement, d'après leur allure générale, guide certainement précieux, mais qui a conduit à des erreurs d'interprétation assez nom- - breuses. Il est telle catégorie de poissons abyssaux, - comme les Ceratiidæ (voisins des Baudroies), que l’on a, sur la foi de leur aspect, considérés comme - des formes sédentaires du fond, et que la Va/divia a récoltés, nageant à plus de mille mètres au- - dessus de celui-ci. La distinction de la faune bathy- - pélagique à élé rendue possible par l'emploi des - filets dits à plankton, que l'on ne descerd pas jus- - qu'au fond lui-même, et que l'on remonte ensuite; ces filets sont généralement construils avec une . soie à bluter très fine; ils filtrent la colonne d'eau - qu'ils traversent en remontant, retenant tous les organismes qu'elle contient, même et surtout ceux - qui sont très petits. Chun a introduit, l'un des pre- « miers, dans la pratique de ces pêches, le flet à fer- - melure, fermant à la façon d'un porte-monnaie.On - le descend fermé jusqu'à une profondeur donnée p, ; ou l’ouvre alors, à partir du bateau, à l'aide d’un “ mécanisme convenable, et on le remonte. Le filet se ferme automatiquement au bout d'un temps réglable … à volonté, et, suivant la vitesse de la montée, élant . parvenu à un niveau p. Il n'est donc resté ouvert “que dans l'intervalle des niveaux p, — p, qu'on peut “faire varier ad libitum. On peut donc, avec ce filet, “pêcher des organismes à un niveau connu, et l'on “conçoit que l’on ail ainsi des documents précis très : importants qualilativement. Malheureusement, dans “les conditions où l’on opère à la mer, la simplicité “et la robustesse sont les premières qualités des “appareils, et le filel à fermeture a donné parfois des “déboires dans son fonctionnement. Il faut dire, “cependant, qu'il a été suffisamment perlectionné “pour rendre de réels services. Quantitativement, il donne peu, à cause des dimensions restreintes qu'on est obligé pratiquement de conserver à son orifice. Mais les documents recueillis peuvent servir “de points de repère pour ceux que fourniront des “méthodes plus grossières. M. J. Richard, l'actif collaborateur du Prince de Monaco, a construit, “pour les dernières campagnes de la Princesse Alice, un filet à plankton, s'ouvrant en un carré de vaste ouverlure (2 mètres de côté) et formé par de la toile d'emballage. Ce filet à large ouverture, et d’une construction peu coûteuse, a procuré des récoltes abondantes. Il ne faut pas se dissimuler que tous ces engins sont encore des plus primitifs et des plus défectueux pour l’objet que l’on a en vue. Sans doute, ils caplurent des organismes sim- plement flottants et petits; mais les animaux de taille un peu considérable et doués de mouvements propres agiles, comme les Crustacés et surtout les Poissons et les Céphalopodes, n'y sont pris que tout à fait exceptionnellement. La règle est qu'ils échap- pent : leur capture est un hasard. Aussi ne doit-on pas perdre de vue que nous ne connaissons fort probablement qu'une très faible portion de ces représentants les plus parfaits de la vie bathypé- lagique. Le Prince de Monaco a employé, avec assez de succès, une autre catégorie d'engins, plus efficaces à certains égards, mais d’un maniement assez dif- ficile. Ce sont de grandes nasses, où l’on a placé des appâts et que l'on immerge pendant deux à trois jours, à une profondeur déterminée. Il s’y prend parfois un nombre considérable d'animaux intéressants et on les obtient dans un meilleur état qu'avec les filets. Par ces divers moyens, pour défectueux qu'ils soient, l'existence d'une faune bathypélagique a été mise hors de doute, et son individualité est bien accentuée. La structure des organes, parliculière- ment des organes sensoriels, comme ceux que nous allons étudier, révèle des différences carac- téristiques avec les animaux benthiques. Mais il est évident qu'il n’y a pas, entre les deux faunes bathypélagique et benthique, une discon- Uinuilé marquée. D'abord, beaucoup d'organismes peuvent appartenir à l’une ou à l’autre, suivant les phases de leur existence. Les larves d'animaux du fond ont fréquemment une vie pélagique. Sur un même organisme, On verra, à ses stades succes- sifs, les empreintes des deux adaptations : certains animaux des grands fonds ont même peut-être des larves qui remontent très près de la surface, jusque dans la zone éclairée. Ces mouvements verlicaux du plankton ont une grande importance pour la Biologie générale, mais ils sont encore à peu près ignorés, au moins dans le détail, et ne pourront être précisés que par des pêches extrêmement nom- breuses etméthodiques. L'auteur qui s’est l’un des premiers el le plus systématiquement altaché à les meltre en évidence est précisément Chun, et il en a donné dans les divers groupes des exemples typiques. Aux considérations précédentes, il faut ajouter, pour justifier la continuité entre les faunes bathypélagique et benthique, que les êtres vivant dans les couches voisines du fond représentent naturellement une transition entre elles, comme cela a lieu dans la région littorale. Ainsi se présente la répartilion d'ensemble des éléments de la faune abyssale. Telles sont les causes de complexité inhérentes à la question elle- même et les difficultés matérielles qui expliquent 326 que nos progrès y soient lents. A celles que j'ai exposées plus haut, il ne faut pas manquer d'ajouter une autre : les animaux, que les divers engins, dragues, chaluts ou filets ramènent sur le pont du bateau, y arrivent dans un état des plus pré- caires, mourants où morts, du fait du change- ment brusque de milieu, mutilés ou tués par le filet et les chocs subis à son intérieur, ou parfois, dans les engins les plus favorables, comme les nasses, dévorés par des compagnons de captivité. Ces malériaux, d'une capture si incertaine, sont donc souvent impropres aux études d'ordre physiolo- gique ou simplement histologique auxquelles on voudrait les réserver. II Les considérations précédentes étaient néces- saires pour faire apprécier l’état actuel et la signi- lication de la question proprement dite que nous voulons étudier : les tranformations des organes visuels chez les animaux abyssaux. Il semble à priori que l'absence de lumière de la zone abyssale doive entrainer l'atrophie générale des organes visuels. L'œil, n'ayant plus aucune occasion de fonctionner, devrait régresser et dispa- raitre, conformément aux lois de Lamarck. C'est, d'ailleurs, ce qui arrive pour une autre faune obseuricole, plus facilement accessible, pour les espèces terrestres vivant sous le sol, les espèces aquatiques des eaux souterraines, les animaux des grottes, etc. Il y a là une tendance générale à l’atrophie des yeux et au développement corrélatif d'autres organes sensoriels, en premier lieu d'or- ganes tactiles. Beaucoup de représentants de cette faune ne diffèrent d'espèces superficielles d’où ils sont dérivés que par des caractères de cet ordre, sur- tout par des différences dans la pigmentation géné- rale et la structure des yeux'!. Quelques travaux, comme ceux de R. Schneider sur les Crustacés des mines de Klausthal* (Gammarus et Asellus), mon- trent même que l'intensité de ces modifications augmente avec le temps; les individus qui habitent une mine récente et vivent depuis moins de généra- tions à l'obscurité sont beaucoup moins modifiés que ceux des puits remontant à trois ou quatre siècles. Dans ce cas donc, auquel je me contente de faire allusion, on voit l'action directe de l'obscurité sur l'organe visuel. Pour la faune abyssale marine, le problème est beaucoup plus complexe; car, si, dès les premières 1 Voir, pour l'ensemble de la question : A. PAckaRp : Cave Fauna of North America, Washington, 1889; O. HamaAnN : Europäische Hühlenfauna, lena, 1896; A. Viré : La faune souterraine de France, Paris, 1900. 3 Sitzungsber. Akad. Wiss. Berlin, 1885 el 1887. MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX expéditions, on a rencontré un certain nombre de formes à yeux réduits ou même complètement atro- phiés, il s'en est révélé plus encore dont les yeux étaient hypertrophiés. Les deux cas ne sont donc pas comparables. Nous nous bornerons à considérer, dans ce qui va suivre, les groupes où les yeux sont normale- ment le plus hautement organisés, c’est-à-dire les Poissons, les Mollusques Céphalopodes et les Crus- v FBoppeayf del Fig. 1. — Céphalothorax de divers Mysidæ abyssaux mon- trant la régression des yeux 0e : 1. Boreomysis obtusala (yeux d'aspect normal); II. B. microps (yeux réduits); III. 8. scyphops (pédoncules oculaires transformés en cupules et n'oflrant plus la structure d'yeux); IV. Petal- ophthalmus armiger (transformation-analogue); V. Pseu- domma roseum (pédoncules oculaires aplatis et soudés en une plaque frontale); VI. Amblyopsis abbreviata (pédoncules oculaires aplatis en deux plaques sans struc- ture d'yeux). tacés. Ce sont les mieux étudiés el ceux où les transformations sont naturellement les plus consi- dérables. Or, on ne connait, jusqu'ici, aucun Cépha- lopode aveugle; les Poissons aveugles sont très» peu nombreux. Chez les Crustacés, l’atrophie de l'œil est plus fréquente dans les divers ordres et FT MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX elle offre lous les degrés. Chez les formes supé- rieures (Décapodes et Schizopodes), où il y a une paire d'yeux latéraux pédonculés à facettes, la régression se marque extérieurement par la dimi- nution de taille et de mobilité des pédoncules, la - dépigmentation des facettes ; à un degré plus avancé, - par leur disparition et la transformation des pédon- cules en appendices variés, épines, lamelles, tiges "poilues ou écailles pouvant se souder à la carapace. Nous nous bornerons ici, pour donner une idée de ces faits aujourd'hui classiques, à reproduire, après Ray Lankester' et d’après les mémoires de G.-0. Sars, une série de J/ysidæ très caractéristique à cet égard (fig. 1). Les divers groupes de Décapodes “offrent des séries analogues ?. L'étude histologique -des transformations de ces yeux est beaucoup “moins avancée. Il y aurait lieu de la faire, sur des “matériaux bien préparés, avec les méthodes dont on dispose actuellement. Cette préoccupation n'a pas échappé aux naturalistes de la Valdivia, et la publication des résultats de cette expédition nous “a apporté el nous apportera des renseignements “importants dans celte direction. Nous savons déjà que l’atrophie des yeux des Cruslacés marche d’une “façon générale de la périphérie au centre. Le gan- “glion optique est la parlie qui persiste le plus - longtemps. | Si l’on comprend la transformation du pédoncule oculaire des Crustacés en un appendice plus ou | . moins tactile, comme dans les exemples précédents, il est plus difficile de s'expliquer les cas où, à la place de l'œil disparu, on trouve un organe ayant “là forme d'un réflecteur brillant. Tels sont certains ‘Poissons, comme le Parathronus bicolor, où les “yeux sont remplacés par des réflecteurs paraboli- “ques à éclat métallique, et des Crustacés, comme “certains Aalocypridæ. Peut-être s'agit-il d'organes lumineux méconnus. III Dès les premiers temps des explorations sous- “marines, le paradoxe apparent résultant de l’atro- leur hypertrophie chez d'autres a été expliqué par luminosité propre des êtres de la faune des ands fonds. La phosphorescence est une propriété très répandue chez les êtres vivants”, surtout chez les animaux marins et spécialement dans la faune abyssale. Les bactéries lumineuses même semblent yêlre particulièrement fréquentes. On a donc émis Quarterly Journ. of. Micr. Science, t. XLVII, 1903. 2 V. Laxxesren, /. e., et ORTuANN in Bronn's Klassen und Ordnungen des Tierreichs, t. V, Crustacea, p. 1191. à V. Rapx. Dusors : Rev. génér. des Sciences, 15 juin 1894, et Leçons de Physiologie générale et comparée (Paris, Carré et Naud, 1898). 327 l'hypothèse que la lumière ainsi produile avait maintenu les yeux en étal fonctionnel dans les grandes profondeurs. L'étude de la phosphores- cence el des organes lumineux est donc intimement liée à celle des yeux. Nous ne voulons pas examiner ici le mécanisme de la production de la lumière animale. D'après les travaux de M. Raph. Dubois, un des auteurs qui ont le plus étudié la biophotogénèse d'une facon expé- rimentale, elle se ramène au conflit de deux subs- tances, auxquelles ila donné les noms de luciférine et de luciférase, cette dernière ayant les propriétés d’un ferment diastasique et appartenant vraisem- blablement à la famille des oxydases; l'oxygène paraît jouer un rôle actif dans la production de la lumière. Les progrès si rapides que l'étude des phé- nomènes diastasiques est en train d'accomplir ne manqueront pas d'avoir leur retentissement dans le domaine de la phosphorescence animale. En nous bornant au côté morphologique de la question, nous voyons la lumière jaillir, dans les cas les plus simples, à l'intérieur de l’unique cellule qui constitue les Noctiluques, au sein du protoplasme; à un degré de différenciation plus grand, elle est produite dans des organes de nature glandulaire richement vascularisés et innervés, et au contact de l'eau ou de l'oxygène, quand la sécrétion de ces organes est mise en liberté; dans des conditions encore plus spécialisées, mais très fréquentes, la lumière jaillit dans des organes clos. Ces organes (et c'est là un point qui augmente la connexité de leur étude avec celle des yeux), dont le rôle est de projeter un faisceau lumineux, se sont différenciés d'une façon analogue à l'œil et, jusqu'à ces dernières années, ont été souvent considérés comme des yeux accessoires. La ressemblance de la structure dans les deux cas n'a rien d'étonnant; dans l’un, il s’agit de recevoir un faisceau lumineux dans l'intérieur sur la rétine; dans l’autre, de le projeter, à partir d'un point intérieur. L'analogie du dispositif anatomique est du même ordre qu'entre un appareil photographique et une lanterne à pro- jeclions. L'histoire des organes lumineux est un des cha- pitres de la Biologie dont l’origine et les progrès sont récents, et sur lesquels il reste le plus à apprendre. Les organes lumineux ont longtemps et fréquemment passé inaperçus parce qu'ils ne luisent, et ne sont ainsi bien apparents, que sur l’animal vivant et même bien portant. C'est donc presque toujours par des analogies de structure avec des organes qui ont été vus lumineux, qu'on peut les déterminer comme tels sur les cadavres ou les matériaux conservés que le zoologiste a seuls à sa disposition en général. Or, celte structure | offre une très grande variété, qui correspond pro- 328 bablement à des différences dans le fonctionne- ment, dans la nature, la couleur de la lumière, etc. Aussi l'interprétalion physiologique de ces organes, le rôle des diverses parties, le siège de la lumière sont-ils encore souvent incertains. Résumons rapi- dement ce que l’on a appris, dans ces dernières années, à leur sujet chez les Crustacés, les Céphalo- podes et les Poissons. Les Crustacés sont très fréquemment phospho- rescents, mais des organes lumineux localisés n'ont guère été rencontrés jusqu'ici que chez les Schizopodes Euphausides. On y trouve un de ces organes incorporé dans l'œil lui-même a (fe MAletU3 "pet, d'autres, en nombre variable, placés, soit à ia base de certaines pattes thoraciques, soit métamériquement, à la face ventrale des an- ueaux abdominaux. Cette seconde caté- gorie est constituée par de petites sphères pig- mentées en rouge, MmO- biles à l’aide de mus- cles spéciaux et qui projettent ainsi leur faisceau derayons dans des directions variées. Leur structure (fig. 2), bien étudiée, notam- ment par Chun', donne “une idée assez com- plète d'un de ces or- ganes bien différencié. La voici dans ses traits essentiels. Un corps strié central s/r est, d'après Chun, le siège de la lumière. Le fond de l'organe est formé par un réflecteur hémisphérique, rfl, recouvert extérieurement par la couche pig- mentée pg rouge. En avant du corps strié se trouve ane lentille réfringente /. Un nerf arrive latérale- ment à l'organe, qui est abondamment baigné par un sinus sanguin. Les organes lumineux de l'œil (fig. 3) sont d’un type un peu différent. On n’y voit plus de lentille, le nerf arrive par le sommet de l'organe et le réflecteur a la forme parabolique. Les figures 12 et 13 montrent quelle est la position de l'organe lumineux dans l’ensemble de l'œil. Le dimorphisme que nous venons de constater Fig. 2. 1 Cuux : Leuchtorgan und Facettenauge, Biolog. Centralbl., t. XIII, 1893, et Atlantis, ch. VI, Bibliotheca Zoologica, Ileft 19, 1896. MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX — Organe lumineux thoracique de Nematoscelis rostrata (coupe longitudinale). — n, n', n ment; rA, réflecteur; str, corps strié (d'après Chun, Biolog. Centralbl., {. XIII). dans les Euphausides n'’estrien auprès de la variété que nous offrent les Poissons. Ici, le caractère glan-m dulaire est nettement accentué, mais avec un polymorphisme étonnant que mettent bien en évi=" dence les recherches récentes de Brauer', sur les collections de la Va/divia. Un type moyen nous en est fourni par la figure 4 qui représente un de ces organes chez un S{omias. On y constate : l'élément fondamental, c'est-à-dire les cellules glandulaires dr photogènes, à contenu granuleux et à noyau périphérique ; des cellules réfringentes /, dont l’en- semble forme lentille; un tissu particulier z: joue le rôle de réflecteur, et le tout est enveloppé vers la profondeur par un manteau de pig- ment; du côté exté- rieur, le tégument est lransparent à la façon d'une cornée. Il s'agit ici d’un organe clos; mais, quelquefois, on a une glandeouverte (or- ganes tentaculaires des Ceratiidæ et Oncoce- phalidæ). La nature i glandulaire est mas- quée chez les Mycto-n phides, mais les re- cherches de Brauer in- diquent la communau- té d’origine de ce cas et des précédents. En- fin, sans entrer davan-m tage dans des détails, parmi les plus curieux de ces organes, sont ceux, d’ailleurs très, répandus, qui, simples: ou associés de façons complexes, sont disposés autour des veux, projetant souvent (comme dans le cas de la figure >) leur lumière dans la chambre antérieure de l'œil. Chez les Céphalopodes, la phosphorescence, sous vent magnifique et de couleurs variées, a été cons tatée tout d'abord par Vérany à Nice, en 1834, s des Alistioteuthis; mais les organes lumineux eux mêmes n'ont guère été étudiés qu'à partir de 1893, en) France par Joubin*, en Anglelerre par Hoyle. Ces auteurs les ont signalés dans plusieurs familles des Décapodes (tous les Myopsides et quelques OEgop= | he as RER NE !, nerfs: , lentille; pg, pig- sides). Les récoltes de la Valdivia ont permis à, Et RENE ee PA A RER | 1 Brauer : Ueber die Leuchlorgane der Knochenfisches Verhdl. Deutsch. Zool. Gesellsch., 1904. 3 2 Jourix : Bull. Soc. Sc. et Méd. de l'Ouest, L. 11, 1893, els — V. Notice sur ses trav. scientiliques, Rennes, 1902. MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX 329) Chun ! d'étendre ces observations. Comme chez les Poissons, le nombre, la disposition et la structure . des organes lumineux sont des plus variés. Nous en reproduisons ici un exemple emprunté au genre Calliteuthis (fig. 6). On y retrouve les parties correspondant aux cas qui précèdent : le tissu photogène phot rappelant celui des Poissons, le tissu réfringent formant lentille /, un réflecteur supérieur spec, l'enveloppe pigmentaire pg et, à l'intérieur de celle-ci, un tissu formé de cellules fusiformes constituant un {apis, grâce auquel ces organes ont souvent l'éclat de la nacre. L'homologation des parties dans les divers cas des autres Céphalopodes —. É Æig. 3. — Organe lumineux intraoculaire (voir fig. 12 et 13) de Nematoscelis rostrata (Coupe longitudinale). — Même signification des lettres que dans la figure 2, 1 n'est pas sans présenter parfois une certaine incer- tilude ; le tissu photogène, en particulier, est assez “difficile à identifier, en l'absence de constatations et d'expériences précises in vivo. — Pour donner une idée du polymorphisme des “organes lumineux des Céphalopodes, nous ajoute- -rons que, dans le genre T'haumatolampas découvert par la Va/divia, les organes lumineux, au nombre Lotal de vingt-six (sur les tenlacules, autour des yeux, à la face ventrale du corps, dans la cavité palléale), n’appartiennent pas à moins de dix types distincts. La riche vascularisation, presque absolument générale dans tous ces organes, indique que le ? Cuux : Ueber Leuchtorgane und Augen der Tiefseecepha- lopoden, Verhdl. Deutsch. Zool. Gesellsch., 1903. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, sang doit jouer un rôle dans la production de la lumière, soit par l'apport d'oxygène, soit par celui de substances diastasiques. Quant à l’innervalion, elle est plus ou moins bien différenciée; diverses Fig. 4. —Organe lumineux latéral de Stomias. — dr. cel- lules photogènes; 1, tissu formant lentille; r, réflecteur. (d'après Brauer, Verhdl. deutsch Zool. Geselisch., 1904). observations faites sur les Céphalopodes paraissent bien indiquer que, là, la luminosité est soumise à la Fig. 5. — (Œïil et organe lumineux périorbitaire de Cyclothone (d'après Brauer, /bid.). volonté de l'animal; dans d’autres cas, elle peut être purement réflexe. Le rôle biologique des organes lumineux, en l'absence d'expériences suivies, est loin d’être bien connu. L'éclairement qu'ils produisent est-il uti- 1"* 390 —— lisé directement par l'individu qui les porte? La réponse semble devoir être affirmative pour un certain nombre, dont les faisceaux éclairent le champ visuel de l'animal, comme, par exemple, les organes intra- ou périoculaires ; mais quelle est la fonction de ceux de ces derniers qui projettent leur lumière dans la chambre antérieure de l'œil? Est-ce, comme le suggère Brauer, de rendre l'œil sensible à cerlaines radiations spéciales? La plupart de ces organes sont placés de facon Big. 6. — Coupe longitudinale d'un organe lumineux de Calliteuthis reversa. — Spec, miroir; pg, pigment; c. fusif, cellules fusiformes (réflecteur); phot, lissu photogène; 1, 1!, tissu réfractant (lentille); chr, chromatophore (d'après Chun, Verhdl. Deutsch. Zool. Gesellsch., 1903). que les yeux ne peuvent voir l’espace éclairé; leur signification est donc différente. On à émis l'hypo- thèse qu'ils attiraient des proies par leur lumino- sité, hypothèse assez plausible, d'après ce que l’on sait de la faune superficielle et des expériences de pèches faites la nuit avec des lampes à incandes- cence immergées. Enfin, dans ces derniers temps, une autre expli- cation a été proposée par Brauer. Le nombre et la disposition des organes lumineux sont des plus variés suivant les espèces. Dans certains Poissons, ils sont disposés par rangées latérales; ailleurs, ils sont aussi serrés que les glandes cutanées d'une MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX Salamandre. Chez les Céphalopodes, on a pu cons- tater, d'une facon positive, qu'ils émettaient des lumières de couleurs variées, soit directement, soit par des phénomènes d'interférence, ou par la couleur des réflecteurs ou celle des pigments tra- versés par le faisceau lumineux. De plus, dans leur variété, ces organes sont excellents pour déter- miner les diverses espèces. À chaque espèce cor- respond une disposition propre; les deux sexes, souvent, offrent des différences caractéristiques. Il faut donc se représenter que, dans les eaux obs- cures des abysses, où les couleurs ne seraient pas visibles, où, d'ailleurs, presque tous les animaux ont une coloration tégumentaire uniforme, rouge chez beaucoup de Crustacés, noire chez beaucoup de Poissons, ces organes lumineux réalisent, pour chaque espèce et même pour chaque sexe, un dessin lumineux coloré caractéristique ; il est très plau- sible d'admettre alors que leur ensemble soit l’équi- valent biologique des couleurs et du dessin du tégument chez les animaux de la zone éclairée, et jouent le même rôle, extrêmement complexe” d'ailleurs. À cela se rattachent toutes les ques- tions de mimétisme ; par le dessin se recon-M naissent sans doute les congénères, les deux sexes à d'une espèce. On peut penser que les organes lumineux des animaux de profondeur ont une» fonction analogue. Il appartiendra aux explorations futures de s'appliquer à résoudre tous ces pro-M blèmes, qui, jusqu'ici, ont élé naturellement subor- donnés aux questions fauniques et taxonomiques. | + IL Si la lumière produite par les animaux abyssaux explique chez eux la conservation des yeux, il reste à rendre compte de la disparition de ces organes chez un certain nombre d'entre eux. On à depuis longlemps cherché la raison de ces diffé- rences dans les divers modes de vie. Les yeux s’atrophient chez les formes du fond, dont l’exis= tence est parliculièrement sédentaire, surtout chez celles qui sont enfoncées dans la vase; ils se conser vent chez les espèces agiles et surtout chez le pélagiques. C’est, en effet, chez ces dernières, € particulièrement chez celles qui ont un facies net tement prédateur, que les yeux s'hypertrophient Mais celte explication, qui parait vraie en généralf ne s'applique pas à tous les cas. Il y a des animau nageurs chez lesquels les yeux s'atrophient : tels les Mysidæ qui sont figurés au début de cet article; Les Æryonidæ, ces Décapodes que l'on ne con naissait avant les explorations abyssales que dans les dépôts jurassiques, et dont la plupart (Polycheles, Willemæsia, ete.) vivent sur le fond} sont aveugles ; mais il en est de même, dans celte en gay. - # F4 Ts MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX 331 famille, du genre Æryonicus, qui est pélagique. Les Amphipodes, du groupe des Hypérides, péla- giques typiques, sont représentés dans les grands fonds par des espèces parfois très grandes, dont les unes ont les yeux les plus gros que l'on connaisse chez les Crustacés (Thaumatops), dont les autres (Mimonectes) sont aveugles. Ces exceptions tien- nent à ce que le déterminisme de la régression n'est pas aussi simple. Il faudrait, sans doute, tenir compte du passé de chaque espèce, ordre de faits, d'ailleurs, à peu près inaccessible. Tout indique aussi que les circonstances du dévelop- pement ont une grande importance, et Doflein! vient de faire, à ce sujet, en étudiant les Crabes de la Valdivia, une série de constatations très sugges- tives. On peut distinguer parmi les Crabes, tous ani- maux du fond, deux catégories d’après leur strue- ture et leur mode de vie probable. Les uns sont “très sédentaires, les autres agiles; or, les premiers ont les yeux plus ou moins atrophiés, les seconds les ont bien conservés. Cela rentre dans la règle précédente. Mais le développement fournit une autre distinction entre ces animaux, qui aboutit à deux catégories composées des mêmes espèces qu'avec le critérium précédent. Comme les Déca- podes portent leurs œufs sous la face ventrale, on connait ceux d'un grand nombre d'espèces de profondeur, et, depuis les observations de Wil- lemæs-Suhm, pendant la campagne du Challenger, on à élé frappé du fait que, chez un grand nombre de Crustacés abyssaux, les œufs sont gros, peu nombreux, à éclosion plus tardive, en général, que “dans les formes littorales correspondantes. Pour “les Crabes, il en est ainsi. Il y a toute une série “d'espèces dont les œufs, au lieu d’éclore à l’état de Zoia, de mener une vie larvaire pélagique, et de retomber au fond après la mélamorphose, éclosent “au stade Megalopa où même déja semblables à adulte et mènent immédiatement la vie séden- “taire de celui-ci sur le fond. Doflein a dressé la liste des espèces où il en est ainsi et la liste de “celles où les œufs, restés petits et nombreux, don- nent une Zoæa pélagique. Or, il se trouve que chez es premières l'œil est atrophié, tandis que chez les secondes il est conservé. Sans pouvoir établir avec précision qu'il y a là une relation de cause à effet, £es coïncidences répétées autorisent à le supposer. Les larves pélagiques des animaux des grands fonds effectuent des migrations verticales considé- tables, soit activement, soit passivement emportées par les courants. Ainsi s'explique la capture acci- dentelle, près de la surface, de formes qui ont un te à Dorce : Die Augen der Tiefseekrabben, Biolog. Cen- dralbl., {&. XXIII, 1903, et Wissensch. Ergebn. der Deutsch. Diefsecexpedition, t. VI, 1904 (Brachyura). facies abyssal très accentué. Chun en a cité une série d'exemples typiques : tels sont, entre autres. les Stylocheiron, Euphausides essentiellement de profondeur, qu'il a récoltés quelquefois dans les couches superlicielles, aux Açores, à la pleine lune, période où paraissent exister là des cou- rants de fond considérables. Chez les Crabes en question, une phase larvaire pélagique, et parfois temporairement superficielle, revenant à chaque génération, a pu fort bien contribuer à conserver les yeux, tandis qu'ils disparaissaient chez les types où le jeune mène d'emblée la vie benthique. Cette remarque s'étend d'elle-même aux autres Crustacés du fond, comme les Galathéides (Gala- thodes, Ptychogaster), les Ervonides, dont les œufs sont souvent très gros et la métamorphose très abrégée. Il y a là une direction où il serait utile de faire des observations nombreuses et précises. Doflein a montré, du reste, à la fin de ce même Mémoire, que l'analyse permettait d'étendre encore les conséquences morphologiques de ces remarques éthologiques. On trouve là une applica- tion des idées émises autrefois par Moritz Wagner sur l'importance de l'amixie comme cause de la formation d'espèces nouvelles. Ces idées ont été reprises plus récemment par Düderlein! et ont conduit cet auteur à formuler la loi suivante : Le nombre des formes adaptatives et géographiques d'un type donné, existant sur une aire donnée, est en raison inverse du degréde vagilité (possibilité de déplacement) du type considéré. Les types fixés, comme les coraux étudiés particulièrement par Dôderlein, offrent un nombre presque infini de variations qui sont, pour le zoologiste, un obs- tacle énorme à la détermination. Les Lypes très mobiles, comme les oiseaux de passage, offrent, au contraire, des espèces très uniformes et bien déli- mitées. Tous les naturalistes pourront faire et ont déjà fait de nombreuses applications de ce prin- cipe (Mollusques des faunes insulaires, etc.). L'uni- formité des types vagiles s'explique par le mélange et les croisements constants d'individus de diverses localités; tandis que, chez les espèces sédentaires, si une variation survient en un poinlsur un certain nombre d'individus, elle s'y maintient el s'élablit en une variété, par la limitation des croisements aux individus relativement peu nombreux de la localité considérée”. Or, les Crabes abyssaux nous offrent une applicalion lrès intéressante de ces principes et qui explique, en particulier, un exemple célèbre, mal interprété jusqu'à ces derniers temps. ! DôperLEIN : Ueber die Beziehungen nahe verwandter Tierformen zu einander. Zertsch. f. Morph.u. Anthrop., t.1V, 1902. , 2 11 y aurait lieu d'appliquer, en outre, à ces variations les lois mendéliennes. 392 Comme le fait observer Doflein, les espèces de Crabes agiles (Ger yon, Platymaia, Lispognathus), à yeux bien conservés, à vie larvaire pélagique, sont bien délimitées morphologiquement et très uni- formes sur de grandes étendues géographiques, landis que les types sédentaires, à yeux atrophiés, sans formes larvaires pélagiques, offrent des espèces très nombreuses et parfois mal définies. Ainsi, aux très nombreuses formes que le genre Ethusa présente dans les eaux peu profondes, cor- respond, en profondeur, un nombre non moins con- sidérable d'espèces d'Æfhusina; on doit y voir pro- bablement des variétés locales nées par amixie. Or, Wyville Thom- son, au cours des premières expé- ditions anglaises (Lightning, Por- cupine), avait si- gnalé une espèce voisine des £{hu- sa, qui, depuis, a élé appelée Cy- MmOnomus franu- latus, et il avait noté que, chez des exemplaires vivant à moins de 400 brasses, la régression des yeux élait bien AVR considé- re moins FES rable que chez II a prétation chez les des individus Fig. 7. — Région frontale de Cymonomus granulatus (I) et de C. Normanni Cyclodorippe urI=n dragués entre 5 d et 700 brasses. Il é attribuait ces va- riations à l'influence directe de la profondeur. Celte opinion a été combattue par divers auteurs, notamment par Bou- vier. L'étude des échantillons de W. Thomson a été fort judicieusement re- prise, l'an dernier, par E. Ray Lankes- ter!, et ils ont été comparés aussi àdes Cymonomus voisins recueillis en divers points par le Blake, le Talisman,\ Ingolf, la Valdivia et dé- crils comme espèces distinctes. La conclusion à Normanni; a!, antennule; a, Fig. 8. Cymonomus granulatus récolté par la Valdivia (d'ap. Doflein: — Rostre et yeux d'un Biolog. Centralbl., t. XXII). 1UT/0C. Cite 11); la pédoncule oculaire de C. granulatus; Ia, pédoncule oculaire de antenne; r, rostre; e, œil (d'après Ray Lankester : Quart. Jour. Micr. Se., t. XLVII). roi MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX été que les différences signalées par Sir Wyville Thomson sont d'ordre géographique et non pas EN relation avec la profondeur plus ou moins grande ; ces individus diffèrent entre eux non seulement par les yeux, mais par le rostre, etc., et autant que les autres Cymonomus provenant des diverses expé- ditions citées. Lankester donne à ces diverses formes la valeur d'espèces; Doflein en fait des simples variétés géographiques de l'espèce unique Cymonomus granulatus, divergences d'apprécialion et de nomenclature sans importance au fond. L'existence de ces variations s'explique en tout cas fort bien par J'amixie. La figure 7 représente. les deux types de Cymonomus gra= nulatus signa- lés par Wyville. Thomson, et si souvent cités, eb les pédoncules oculaires corres- pondants, et la. figure 8, les yeux d'un exemplaire de la Valdivia publié par Do- flein. , Cet auteur a” retrouvédes faits auxquels il con- ) vient de donner 7 DS la même inter Kart D cilera, forme as sez voisine des, Cymonomus. Des exemplaires provenant de diverses localités" et de diverses profondeurs montrent, ainsi que l'indiquent les figures 9 et 10, de grandes différences dans le degré de régression des yeux. Ici, en outre Doflein a pu comparer des échantillons de niveau différents, mais de localités très voisines (Japon) et retrouver les mêmes variations, ce qui indique rait que ces variations peuvent se produire su des points très rapprochés géographiquement. Si nous cherchons maintenant à résoudre Î question posée en tête de ce paragraphe : quell est la cause efficiente et quel est le mécanisme d la disparition des yeux? nous trouvons dans le données précédentes des indications qui nous paraissent plaider dans le sens lamarckien, c’est- dire en faveur d’une action directe du milieu. Là conclusion nous parait s'imposer mieux encore qu pour la forme obscuricole non marine, où pourtant la tendance à la cécité est générale. Car, dans les MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX 333 abysses, nous voyons que précisément les types qui deviennent aveugles sont ceux, ou qui vivent dans des conditions les soustrayant plus ou moins à l’action de la phosphorescence animale, ou qui, par _les conditions de leur développement, sont soumis, pendant toute la série phylogénétique, à l'obscurité et ne remontent pas temporairement à la lumière. C'est donc surtout la continuité ou la discontinuilé de l’action du milieu obscur qui paraît faire le dé- part entre les formes où l'œil régresse et celles où il s'hypertrophie et s'adapte, comme nous allons l'étu- dier maintenant. L'action de la sélection peut évi- + demment se faire sentir, mais il nous semble que Je facteur déterminant, primaire, est l’action externe du milieu. Il n’y a là évidemment qu'une présomp- tion ; il ne peut êlre question d'une preuve rigou- reuse, mais elle nous paraît en harmonie avec les D continue du milieu. Ces cas nous semblent établir une forte présomption en faveur de l’action la- marckienne. C’est done de ce côté qu'il faudrait, à notre sens, chercher à accumuler les observations et les expériences, si tant est que ces dernières soient faisables dans les limites de temps dont nous disposons. Mais, si nous concluons à une action primaire et prépondérante des facteurs lamarckiens pour la régression des yeux, il ne faut pas chercher à tout expliquer par là. Le cas du genre Cymonomus, avec ses nombreuses formes locales, où non seule- ment les yeux, mais une foule d’autres caractères (rostre, etc.) ont varié, comme cela ressort des figures publiées, éveille l’idée de mutation au sens de de Vries. Nous nous bornons à cette indicalion:; il est évident qu'à propos de chaque cas parti- Fig. 9. Fig. 10. Fig. 9. — Coupe d'un œil de Cyclodorippe uncifera dragué par 50 mètres de profondeur. Fig. 10. — Coupe d'un œil d'un individu de la même espèce, dragué par 700 mètres de profondeur. faits et introduire dans la question le minimum de “postulats gratuits. Weismann etles néodarwiniens voient, dans ce cas comme dans les autres, l'inter- vention prépondérante et déterminante de la sélec- lion, l’appliquant directement pour la formation des “yeux hypertrophiés, expliquant les atrophies par “la cessation de la sélection et la variation désor- donnée qu'ils appellent panmixie. Mais c'est préci- -sément là une de ces arbitraires, comme il en entre dans la plupart des raisonnements weismanniens, grâce auxquelles il est toujours possible de faire rentrer les faits dans une forme logique d'argumen- tation, sans pour cela qu'on arrive à la fin à la solu- “tion unique nécessaire que doit renfermer la réalité; tout comme dans un problème de Mathématiques où le nombre des variables arbitraires est supérieur à celui des équations et où il y a une infinité de Solulions qu'on obtient à volonté en donnant à certaines de ces variables une valeur particulière. La faune obscuricole non marine nous présente un certain nombre de cas, comme, par exemple, celui des mines de Klausthal, où elle est d’origine très récente et où l’on saisit l’action graduelle et culier, c'est tout le problème transformiste qui se pose. y Nous n'avons jusqu'ici envisagé que le cas, plu- tôt exceptionnel, où les yeux s’atrophient; il est non moins intéressant de considérer celui, beau- coup plus fréquent, où ils se conservent et même s’hypertrophient, ou mieux s'adaptent. C'est là une étude qui est à peine commencée, mais qui, ainsi qu'on va le voir, a déjà donné des résultats extré- mement intéressants en eux-mêmes et par leur signification générale. Il y a là surtout l'indication d'un très grand nombré de questions à résoudre; nous nous bornerons à quelques-unes pour les- quelles une solution a été proposée et qui, en parti- culier, sont des exemples très netsde modifications parallèles dans des groupes indépendants, sous l’action des mêmes conditions de milieu, ou, d'un mot, des exemples de convergence. Beaucoup des transformatiens de l'œil chez les animaux abyssaux sont parallèles à celles que l'on rencontre parmi les animaux terrestres noc- 334 MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX turnes, dont l'œil s'est aussi adapté à la vision dans des milieux très faiblement éclairés. Cette adapta- tion particulière a été jusqu'ici insuffisamment étu- diée. On sait, cependant, que, chez les Vertébrés nocturnes, Mammifères (Chauves-Souris, Lému- riens, etc.) ou Oiseaux, etc., d'une manière géné- rale, la nyctalopie est corrélative d'un accroisse- ment dans les dimensions du globe oculaire et dans le pouvoir régulateur de l'entrée des rayons lumineux (ouverture de l'iris). H. Milne Edwards" a résumé ce que l’on connaissait, il y a vingt-cinq ans, à cet égard et fort judicieusement pressenti l'intérêt de l'étude de cette adaptation spéciale de l'œil : « Je suis disposé, dit-il, par exemple, à croire que la grosseur des yeux de la plupart des Jeunes Crustacés pélagiens est en rapport avec les conditions d'éclairage dans lesquelles ces animaux se trouvent », et il oppose les gros yeux des larves pélagiques des Crabes à ceux, plus petits, des adultes littoraux. Il y aurait évidemment beau- coup à faire dans cette direction : on sait que la plupart des formes pélagiques ont des yeux très développés ; on n’a pas suffisamment rattaché ce fait aux conditions physiques où elles se trouvent, en particulier à leurs mouvements verticaux, à leurs migrations le jour ou la nuit, ete... Chun est l’auteur que ces questions ont le plus préoccupé et nous allons voir qu'il y a moissonné des résul- tats importants. Sous son impulsion, l'Expédition de la Valdivia y apportera une contribution intéres- sante. C'est chez les Crustacés qu'une partie des faits les plus significatifs ont été rencontrés, et, comme ils reposent sur des interprétations assez récentes de la vision chez ces animaux, il n’est pas inutile de rappeler tout d'abord rapidement les conditions de celle-ci. Les Crustacés supérieurs ont, comme on sait, des veux composés. Chaque facette (fig. 11) forme un œil élémentaire, où l’on peut distinguer : 1° une partie dioptrique, composée d’une cornée (simple différenciation de la çuticule) plus ou moins convexe et d’un corps réfringent ou cône cristallinK; 2° une partie sensorielle S ou rétinule, compre- nant généralement 7-8 cellules allongées suivant l'axe de la facette et ayant différencié collective- ment, suivant l'axe, une production particulière en forme de bâtonnet, le rhabdome. Aux rhabdomes aboutissent les terminaisons des fibres du nerf optique ÆVf; c'est lui qui recoit et transforme les impressions lumineuses. Entre les différentes facettes, se trouvent des cellules pigmentaires qui les isolent les unes des autres par un manchon absorbant. Cet appareil pigmentaire se compose de 1 I. Mine Enwanps : t. XIL, p. 417, 1877. Lecons sur la physiologie, ete., deux portions : l’une associée à la partie dioptrique; nous l’appellerons pigment iridien /p; l'autre asso ciée à la partie sensorielle, nous l’appellerons pigment rétinien Æp. La physiologie des yeux à facettes a fait, assez récemment, de grands progrès entre les mains de S. Exner ‘. Exner, en effet, a fait une étude précise des propriétés optiques des cônes cristallins eb montré que ce sont des corps où l'indice de réfrac- tion croît d'une façon continue de l’axe à la surface: latérale suivant les directions radiales. Il a cons- truit la marche des rayons lumineux à leur inté- rieur, qui est très. différente de ce qui se passe dans les lentilles sphériques. Je ne puis entrer ici dans le détail, pour lequel je renvoie à son ouvrage. Je me contente d'indiquer qu'il a été amené à conclure que, dans les yeux des Arthropodes, la cornée ne joue qu'un très faible rôle et que les: cônes cristallins doivent, comme l'avait supposé autrefois J. Müller, donner des images réelles et droites. Il l’a, d’ailleurs, vérifié expérimentalement d'une facon très ingénieuse. Il a fait aussi expérimentalement une autre constatalion capitale. C’est que, au moins chez les. Arthropodes qui voient le jour et la nuit (papillons nocturnes, la plupart des Crustacés, etc.), les pig- ments iridien etrétinien sont mobiles. A la lumière, ces pigments se disposent comme dans la moitié gauche de la figure, l'iridien étant descendu vers les rétinules, le rétinien ayant rejoint le premier; tandis qu'à l'obscurité (voir la partie droite de la figure) ces pigments s'écartent, l'iridien envelop pant plus ou moins complètement les cônes cristal- lins, le rétinien étant repoussé souvent jusque dans la couche des fibres du nerf optique. C'est ce qu'il a vu en sacrifiant des papillons de nuit ou des Crustacés, après séjour à la lumière ou à l’obs- curité et étudiant directement l'œil. Ges migrations du pigment ont été constatées de même par M. Ste-m fanovska ?, sur divers Insectes et Arachnides, par: W. Scezezawinska® chez divers Crustacés, et enfim par G. H. Parker‘ dans le même groupe. Exner am montré qu'elles avaient une importance capitale: pour la vision. Dans la position diurne du pigment, les diverses rétinules, étant entourées latéralement d'un écran absorbant, ne peuvent recevoir que les rayons arrivant suivant leur axe, c’est-à-dire pro= venant du cône cristallin qui leur correspond direc= tement. Sur chaque rhabdome se forme une image partielle droite; l'image d'ensemble résulte de l'apposition deloutes ces images partielles; c'est lam ; 1 S, Exner : Die Physiologie der facettierten Augen Cr Insekten und Krebse — Leipzig et Vienne, 1891. | ? Recueil Zcol. Suisse, t, V, 1889. % Archives de Biologie, t. X. 1891. 4 Mittheil. Zool. Stat. Neapel, 1895. MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX J39 vision en mosaique de J. Müller; elle est la règle chez les Arthropodes diurnes. Tandis que, dans la position nocturne du pigment, les rélinules, étant à nu, peuvent recevoir latéralement des rayons sortis obliquement des extrémités inférieures des mn LE 191814 PDUIXO1T Fig. 11. S, rhabdomes ; Sbh, soies sensorielles. autres cônes cristallins. Chacune recevra donc plusieurs faisceaux qui se superposeront. Il y aura ainsi un renforcement de l'impression optique, propice à la vision dans un milieu peu éclairé. Un groupe de cônes cristallins concourra done à donner par superposition sur un rhabdome une — Schéma d'œil de Crustacé (Crabe, coupe longitudinale). — Æ, facettes: C, A droite, détail d'une facette image unique; Exner à vérifié aussi ce point expé- rimentalement sur des yeux de Vers luisants'"(ZLani- pyris nocliluca). La réalisation de ces images par superposition est l’écartement naturellement favorisée entre les par cônes cristallins et les cônes cristallins: No, nerf optique; Brachyoures de la Valdivia). cornées:; K, Jp, pigment iridien; Ap, pigment rétinien; Z, lame fénétrée:; AVf, fibres nerveuses: d'après Doflein : rhabdomes, et l’on constate, en effet, chez les Arthro- podes nocturnes, un allongement de cette région de l'œil. Une discussion détaillée montre que ces images par superposition doivent donner une repré- sentation moins nelte de la forme des objets que la vision par apposition, où chaque image partielle est 3306 très pure; ici, autour du rhabdome, où se peint l’image proprement dite d’un point lumineux, tous les rhabdomes voisins, à l'intérieur d'un cercle que nous appellerons cercle de diffusion, sont plus ou moins confusément impressionnés, et, s'il s'agit d'un objet étendu, il ya chevauchement de ces cer- cles de diffusion les uns sur les autres. Par contre, s'il s'agit de points lumineux petits et mobiles, le cercle de diffusion se déplace avec l'objet, et l'œil se trouve par là particulièrement bien adapté pour la perception de ces points dans l’obscu- rité. Exner a montré aussi que, dans les cônes cristal- lins, la lu- mière pouvait cheminer par réflexion to- tale sur leurs parois, et il a pu faire de cela des ap- plications in- téressantes. Il y a là, on le voit, tout un ensemble de données phy- siologiques, qui ont fourni à Chun no- tamment, et à d’autres en- suite, la clé de la plupart des particula- rilés des yeux des Crustacés abyssaux. Remarquons, avant d'y arriver, que lesmigrations pigmentaires sous l'influence de la lumière, qui, d'après ce qu'on vient de voir, ont une valeur déci- sive pour la nature de la vision chez les Arthro- podes, ont leur équivalent histologique chez les Vertébrés et les Céphalopodes. Chez les Vertébrés, les bâlonnets et les cônes situés à la face posté- rieure de la réline sont plus ou moins noyés dans du pigment appartenant à l'épithélium rétinien externe. Chez les Céphalopodes, où les bâtonnets sont à la face antérieure, ils sont aussi envelop- pés d'un pigment qui se relie, par des trainées, à une couche très pigmentée placée à la face pos- térieure. < MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX Fig. 12. — Coupe longitudinale de l'œil de Nematos:elis rostrata. — F, région frontale; S, portion latérale: f. rud., facettes rudimentaires; €, cornées; con., cônes cristalins; rh, rhabdomes; ph, organe lumineux (d'après Chun, Biol. Centralbl., &. XII). Or, chez des Grenouilles, Engelmann ‘a constaté expérimentalement qu'à l’'obscurilé le pigment se rétracte dans l'épithélium, laissant à nu les cônes et bälonnets, et, chez les Céphalopodes, Rawitz*° a fait la constatation des mêmes migrations du pig-" ment à la lumière et à l'obscurité. Si nousexaminons maintenant les yeux des ani- maux abyssaux, nous voyons d'abord, chez les. Poissons, les Céphalopodes et les Crustacés, des faits significatifs et {rès généraux dans la distribu- tion du pig- ment. Celui- ci, chez les animaux diur- nes, formait desécrans qui paraissaient | protéger les appareils sen- soriels termi- naux (cônes, bâtonnets,. rhabdomes) conlre une ac- tion trop vive delalumière; or, dans les animaux a- byssaux,nous voyons : 1°sa diminution et même sa dis- parition ; 2°sa NN AS RS SH (rer répartition PANSUESES (quand il per- siste) dans la position cor- respondant à l'obscurité chez les ani- maux de la zone éclairée. C'est ce que Chun, Brauer et Doflein ont constaté et systématisé chez les Céphalopodes, les Poissons et les Crustacés. Chun à montré, de plus, que le pigment qui, chez les types de la région éclairée, est mobile, se fixe dans la position d'obscurité chez. ceux qui y vivent en permanence, c'est-à-dire Chez les formes nettement abyssales. Il a eu l'occasion en effet, de récoller, à la surface, des formes essen- tiellement abvssales, comme les Schizopodes dur ‘ Sur les mouvements des cônes et des bäfonnets pigs menlaires et la rétine sous l'influence de la lumière et dun système nerveux, 18$#. LA ? Zool. Anzciger,t. XIV et Archiv. für Anat. und Physiol (Phys. Abth.), 1892. y à MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX 337 genre S{ylocheiron, qui y avaient été accidentelle- ment ramenées par des courants; malgré un séjour de quelques heures à la lumière, le pigment iridien avait conservé la position de l'obscurité (fig. 13). Il a fait aussi cette autre conslatation, non moins intéressante, que cette dis- position du - pigment était . beaucoup - plus nette . chez les adul- tes que chez les individus jeunes et les - larves, par exemple chez _ les Poissons et les Cépha- lopodes. Cela s'explique ai- sément parce que l'adulte ne quitte pas la profon- deur, tandis que les jeu- nes remon- tent plus ou moins près de la surface. La _ disposition du pigment dans l'œil de- _vient donc “une sorte de . crilérium du - niveauauquel - vit l’animal. MPour les “ Crustacés, . l'existence de deux nappes Dencrs iridienne et . rétinienne), influencées par les condi- lions généra- les précéden- tes, a conduit à la réalisation de plusieurs types d'yeux chez les formes abyssales. Les deux pig- ments ont pu être conservés, quoique réduits comme quantité et écartés l’un de l’autre dans la position nocturne. C'est ce que montrent des formes qui ne sont pas spécifiquement abyssales, mais que Fig. 13. — Coupe longitudinale de l'œil de Stylocheiron masligophorum. — Mèmes lettres; pg. ir., pigment iridien; ret, rétinules ; {ap, tapis (d'après Chun : Bioï. Centralbl., t. XII). l’on trouve plus ou moins fréquemment près de la surface, par exemple les diverses espèces d'£Zuplau- sia et le Nematoscelis rostrata, dont la figure 12 représente une coupe de l'œil. Au contraire, le pig- ment rélinien a complètement disparu chez une au- tre espèce de Nematoscelis, N. Mantis, et dans le genre voisin, S{ylo- cheiron (fig. 13), qui sont destypes fran- chementabys- saux; il n'y a plus du tout icinde pig= ment réti- nien.Nousap- pellerons, avec Chun, ces yeux iri- do-pigmentai- res, et tous les yeux pré- cédents sont nettement adaptés, d’a- près ce que nous avons dit plus haut, à la vision par superpo- sition.Au con- traire, chez les Sérges- tes, dont plu- sieurs espèces sont nette- ment bathy- pélagiques, le pigment iri- dien a dispa- ru, et il s'est conservé plus ou moins de pigment réti- nien qui en- veloppe les rhabdomes. Ce sont des yeux rélino-pigmentaires, et ils pa- raissent en contradiction avec la théorie précé- dente. Mais, ici, il semble bien que la lumière arrive aux rhabdomes par réflexion totale dans les cônes cristallins, qui présentent à leur extrémilé | inférieure un prolongement filiforme courbé; ce MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX sont des yeux à fonctionnement catoptrique spécial, et la contradiction disparait ainsi par une étude plus approfondie !. Des veux rétino-pigmentaires se retrouvent dans les Crustacés pélagiques, chez les Phronimides et, chez les Hypérides, parmi les Amphipodes, et aussi chez les Polyphémides d’eau douce, qui, dans les lacs, mènent une vie aralogue. En étudiant l'œil chez les divers Crabes récoltés par la Faldivia, Doflein® a aussi rencontré chez ces animaux les mêmes adaptalions variées du pigment; on peut penser à priori que tel ou tel type est réalisé suivant un déterminisme que nous ne connaissons pas encore. L'extrème variété des disposilions observées par Doflein montre quel Fig. 14. — Coupe de l'œil d'Argyropelecus alfinis. — r, ré- tine principale; rr, rétine accessoire; ce, cornée; s, selé- rotique: p, p', pigments (d'après Brauer : Sitzher. Ges. f. ges. Naturw. Marburg, 1901). vaste champ de recherches est ouvert aux zoolo- gistes. Nous n'avons, en effet, considéré jusqu'ici que le pigment ; mais les yeux des animaux abyssaux offrent beaucoup d’autres particularités liées au milieu. Telle est la présence fréquente d'une sur- face réfléchissante à éclat métailique, en arrière des éléments sensibles, d’un fapis, comme chez les animaux terrestres nocturnes, lapis qui peut faire luire l'œil dans l'obscurité et faire croire fausse- ment à une phosphorescence de l’organe visuel. Les variations relatives des divers éléments consti- tuants, variations qui présentent des combinaisons extrêmement nombreuses indiquant autant d’adap- ! Caux : Atlantis, p. 231. # Loc. cit. tations spéciales, il s'en faut qu'elles soient toules expliquées. À titre de document, nous signalerons dans cette direction une observation de Doflein sur quelques Crabes, tels que le Pleistacantha Mose- leyi, dont l'œil est bien conservé et du type irido- pigmentaire ; les rhabdomes sont très longs et pré- sentent un renflement, immédiatement au-des- sous des cônes cristallins, juste sous le pigment iridien, puis une portion étroite et enfin une partie dilatée ayant la même structure que l’exlré- milé distale. Doflein suggère que peut-être le ren- flement distal donnerait au Crabe des images par apposition et le long renflement proximal des images par superposition; il y aurait là une divi- sion du travail très curieuse; cet exemple montre quel intérêt peut offrir l'analyse précise de la struclure fine de l'œil. Parmi les modifications les plus appréciables, sont celles de la taille même des yeux qui, chez beaucoup d'animaux abyssaux, augmente dans de très fortes proportions, ainsi qu'on l’a remarqué depuis longtemps, phénomène d’ailleurs parallèle à ce que présentent beaucoup d'animaux terresires nocturnes. Chez certains Schizopodes, comme le Stylocheiron mastigophorum, l'œil peut atteindre le sixième de la longueur du corps. Beaucoup de Poissons, des Céphalopodes, ont ainsi des yeux énormes; parfois ils sont portés sur de longs pédoncules, comme chez certains jeunes Céphalo- podes voisins des Üwenia et de curieuses larves de Poissons qu'a récoltées la Va/divia et que Brauer a nommées, à cause de cela, S{ylophthalmus. L'œil perd aussi quelquefois dans ces groupes sa forme sphérique; son axe optique se déplace, sa rétine subit des modifications de structure et de position considérables. Chun, sur les Céphalopodes, et Brauer, sur les Poissons, ont vu dans certains yeux la rétine atteindre, à certains points correspondant proba- blement à un maximum d'acuité visuelle, une très grande épaisseur. Chez un PBathyteuthis, il y a ainsi une région de la rétine où les bâtonnets, par- ticulièrement serrés, atteignent 0,4 à 02,5 de longueur. De ces diverses modifications de forme et de structure, les plus curieuses sont celles auxquelles Chun a donné le nom d’yeux télescopiques et qui, par un phénomène de convergence remarquable, se rencontrent chez des Poissons, des Céphalo= podes et des Crustacés (Schizopodes et Phronimes), dans les trois cas chez des types nettement bathy=m pélagiques et prédateurs. Les yeux télescopiques,s chez les Poissons, ontétlé constatés pour la première fois dans les matériaux de la Va/divia (fig. 14); c'est une disposition qui parait exister d’une facon plus oumoinsaccentuée chezun assez grand nombre d'espèces appartenant à des familles très diverses; Cr SP SE A LEaùc ; MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX ce qui indique une adaptalion convergente. Tandis que les Poissons ont habituellement des yeux assez aplalis, placés latéralement et ayant des champs visuels distincts, fournissant par conséquent une vision monoculaire, dans les types en question, les yeux se sont allongés, prenant une forme de tubes cylindriques, avec une cornée et un cristallin très convexes, un iris rudimentaire, une rétine très épaisse localisée sur le fond de l'œil, sauf une portion plus mince différenciée occupant la face - postérieure du tube (rétine accessoire rr). Les deux yeux, en se modifiant ainsi, se sont rapprochés de la ligne médiane, presque au contact, et disposés parallèlement comme les deux tubes d'une lor- gnetle de théâtre, s’allongeant parallèlement au - plan sagillal, soit ventro-dorsalement, soit postéro- antérieurement. Des yeux de tous points analogues ont été ren- contrés parmi les Céphalopodes, chez deux Octo- podes de la Va/divia : même disposition en lor- gnette, mêmes particularités internes. Autant que l'on peut interpréter le fonctionnement de ces yeux, il semble bien, comme l'indique Chua, qu'ils sont très myopes et qu'ils réalisent, avec la vision binoculaire, une sensation très nette des reliefs et des variations de distances. Si l’on réfléchit que les Poissons et les Céphalopodes qui les portent sont des animaux carnassiers vivant dans des ténèbres, où la plupart des proies ont des organes lumineux, on voit que ces yeux sont bien adaptés à la révéla- tion de la présence de ces proies à faible distance. Parmi les matériaux de la Valdivia, Brauer a pu, en outre, suivre la différenciation graduelle de ces yeux télescopiques chez les jeunes individus des espèces où on les rencontre. Il est extrêmement remarquable de trouver une disposition équivalente à la précédente chez les - Crustacés, dont l'œil est construit sur un principe entièrement différent, et cet exemple est d'autant plus instructif que nous assistons, chez une série d'espèces, à la réalisation progressive de l'œil téles- copique, et à une division du travail des plus nettes. Il s'agit des yeux des Euphausides bathypélagiques. -Nous devons ces constatations à Chun; elles remon- tent déjà à plus de dix ans‘. Elles ont précédé, par conséquent, celles que nous venons de relater chez les Poissons et les Céphalopodes; elles ont eu pour base les travaux d'Exner dont nous avons parlé. L'œil des Euphausides les moins spécialisés, que lon rencontre non seulement en profondeur, mais aussi près de la surface (Æuphausia, etc.), est sphé- rique; toutes ses facettes sont semblables. Ces yeux offrent, comme nous l'avons déjà dit, un organe lumineux inclus à la face inférieure. Chez le Caux : Biolog. Centralblatt, t. XIII, 1893, 339 Nematoscelis rostrata, dont nous avons déjà parlé, et qui est plus bathypélagique, les facettes de la région dorsale de l'œil (fig. 12) s'allongent; l'œil total se décompose ainsi en deux portions, que nous appellerons frontale et latérale. Cette transforma- tion est bien plus accentuée chez le Nemaloscelis mantis, qui, d'ailleurs, est beaucoup plus can- tonné dans les profondeurs, et plus encore chez le Stylocheiron mastigophorum, qui est le plus vrai- mentabyssal des Euphausides (fig.13). L'œil frontal a pris une individualité et une longueur considéra- bles; c'est l’équivalent de l'œil télescopique des Poissons et des Céphalopodes, d'autant que la dis- eussion minutieuse de son fonctionnement conduit à admettre, avec Chun, que lui aussi est adapté surtout pour révéler à l'animal des points lumineux mobiles, passant à son voisinage et au-dessus de lui. Il y a ici, en plus, division du travail, car l'œil latéral auquel est annexé l'organe lumineux habituel à conservé la structure normale. On voit combien les travaux d'Exner fournissent une explication de ces yeux si singuliers. Une série parallèle à celle des Euphausides se rencontre chez les Mysides; elle s'y est établie d'une facon indépendante, par convergence. Le genre Prutomysis offre une différenciation équiva- lente à celle du Stylocheiron en œil frontal et œil latéral. Chez l'Arachnomysis, l'œil frontal s’est encore accentué, mais l'œil latéral à disparu. D'autre part, parmi les Amphipodes, l'œil des Phro- nimides, avec son allongement énorme des facettes frontales, doit s'interpréter à la lumière des faits précédents. Celui des Sergestides de même. Et enfin, chez les Polyphémides, Chun a mis également en évidence la différenciation d'un œil frontal offrant les mêmes rapports physiologiques. L'ana- logie se complète même ici du fait que, dans le genre Evadne, on trouve l'équivalent du cas de l'Arachno- mysis : l'œil frontal subsiste seul, l'œil latéral a disparu. Si l’on rapproche tous les faits précédents, on ne peul nier combien suggestive est l'étude des adap- tations de l'organe visuel dans le milieu abyssal. Il y a une vingtaine d'années, Gerstäcker, examinant l’ensemble de ce que l'on savait alors sur cette queslion et n’en apercevant que les faits apparem- ment contradictoires, tels que régressions et hyper- trophies, y voyait la preuve que l'adaptation est un mot vide de sens. Nous coneluons, au contraire, avec Chun, que ces organes montrent une plasti- cité énorme et parfaitement coordonnée aux condi- tions de milieu. L’œil, d’ailleurs, ne varie pas seul. Doflein a mis en évidence, sur les Crabes, combien il y avait une corrélation salisfaisante entre les va- riations des yeux et celles des autres appareils sen- soriels (organes tactiles, olfaclifs, statocystes, elc.). MAURICE CAULLERY — LES YEUX CHEZ LES ANIMAUX ABYSSAUX Mais l'interprétation des faits est délicate, le déter- minisme précis des divers cas est difficile à saisir, étant donnée l'inaccessibilité du monde abyssal. De là des incertitudes et des tâtonnements inévitables. VI Il nous semble que, si les explorations abyssales futures doivent tendre à compléter l’œuvre des précédentes au point de vue purement systéma- tique et faunique, le moment est venu de les orienter en même temps davantage (les deux ten- dances n'ont rien d'incompatible) vers l'étude du monde abyssal au point de vue de la Biologie géné- rale. L'étude des adaptations des divers organes, basée sur des recherches d'anatomie fine et d'his- tologie, peut avoir une précision beaucoup plus grande aujourd'hui qu’à l'époque du Porcupine et du Challenger, par le progrès de la technique histo- logique et des connaissances de faits de toute nature. Le rattachement des structures anatomiques aux conditions d'existence, leurs variations aux di- verses phases dela vie de l'individu, corrélatives des différences d'éthologie, sont des domaines encore peu explorés. C'est la marque propre des travaux de Chun d’avoir cherché toujours à saisir ces corré- lations. C'est une des préoccupations dominantes qu'il a apportées dans la direction de la campagne de la Va/divia et qui, plus que la découverte d’un certain nombre d'espèces nouvelles, fera l'intérêt particulier des résultats de cette expédition. On comprend donc que la nature même du sujet que nous venons de traiter nous conduisait naturelle- ment à y chercher des exemples et des documents. En indiquant cette direction de recherches, nous exprimerons, comme une autre conclusion, le regret que la France n'ait plus actuellement dans toutes ces entreprises qu'une part trop restreinte. Au début du xrx° siècle, le nombre et l'importance des croi- | sières d'exploration qu’elle organisait, et où la Science et la Zoologie, en particulier, avaient une large place, en faisaient l’initiatrice des autres nations; les publications des voyages de l’'As- trolabe et de la Zélée, de la Coquille, ete., en font encore foi aujourd'hui, ainsi que les noms de | Quoy et Gaimard, Lesueur, etc. Depuis plus de vingt ans que le Talisman a accompli sa dernière campagne, en pleine paix, dans les années d'expan- sion scientifique universelle les plus actives qu'on ait connues, on ne compte guère chez nous que la modeste expédilion du Caudan, entreprise presque privée, dont les résultats considérables, eu égard aux ressources mises en œuvre, font le plus grand honneur à son organisateur, M. R. Kæhler, profes- seur à l'Université de Lyon.Mais, pendant ce temps, partout des expéditions considérables s’effectuaient. Le Prince de Monaco nous en donnait l'exemple répété et fécond. L'Allemagne a successivement équipé le National (Plankton-Expedition, 1887), la Valdivia (1898-1899) et le Gauss (Expédition alle- mande antarctique,1901-1903),avec des programmes et une aire d'exploration de grande envergure, sans compter de plus modestes et nombreuses initiatives privées. La Belgique, l'Angleterre, l'Ecosse, la Suède, ont organisé des expéditions antarctiques !. Le Danemark publie les résullats de la croisière de l’Zngolf dans le Nord. La Norvège a fait l’expé- dition de Nansen, celle de Sverdrup, sans compter les croisières régulières qu'effectue son Service des pêcheries, avec un vapeur spécial, le Michel-Sars. L’Autriche, avec la Pola, a étudié les grands fonds de la Méditerranée et de la mer Rouge. La Hol- lande a, sous l’'habile direction du Professeur Max Weber, réalisé une exploration admirable des mers de la Malaisie, avec le Siboga. Aux Etats-Unis, AI. Agassiz, le vétéran des recherches sur le monde abyssal, a fait une série de campagnes de dragages eten accomplit une encore en ce moment dans les grands fonds du Pacifique oriental. Cette énuméra- | tion, incomplète et limitée à peu près aux grandes entreprises d'Etat, est assez significative pour qu'il soit inutile d'insister davantage sur notre regret- table inaction. Maurice Caullery, Maitre de Conférences à la Faculté des Sciences de Paris. i L'Expédition antarctique Charcot associe cependant la France à toutes ces explorations. Mais c'est une entreprise particulière (ce qui ne fait qu'augmenter le mérite de som initiateur), dont les ressources étaient très limitées. À | È | À BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 341 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Bernard (F.). — Aménagement des eaux à Java. Irrigation des rizières (/tapport établi à la suite d'une Mission d’études aux Indes Néerlandaises.) — 4 vol. in-4° de 1v-80 pages, avec 75 figures dans le texte, et 16 planches hors texte. (Prix : 45 fr.) Ch. Béranger, editeur. Paris, 1904. Le capitaine F. Bernard, de l’Artillerie coloniale, nous donne, en ce volume très dense, les principaux résul- tats de ses enquêtes et de ses études sur l’organisation … de l'irrigation à Java. L'ouvrage se compose, en somme, } de deux parties : dans la première, l’auteur nous expose en détail l’économie de quelques-uns des prin- cipaux groupes de travaux en vue de l'aménagement des eaux : travaux de Demak, du Brantas, du Solo, irri- gations de Tegal et travaux du Pemali, irrigations de Tji Hea; dans une seconde partie, il résume les faits qui caractérisent les modes de construction et les types d'ouvrages à Java, les méthodes de distribution de l'eau dans les rizières et enfin les résultats généraux des irrigations. Il convient de noter brièvement les idées essentielles qui se dégagent de cet ample dossier, établi d’une manière si consciencieuse el si impartiale, et confor- mément à la vraie méthode d'observation. Avec raison, M. Bernard a donné comme titre à son livre « Aménagement des eaux »; car les entreprises d'irrigation doivent aboutir, en un pays comme Java, non seulement à amener l'eau sur les terres en temps voulu, mais encore à assurer partout le drainage des eaux surabondantes, et à prémunir les terres et les hommes contre les terribles dangers des crues. C’est en comprenant ainsi, dans son sens plein, l'irrigation, qu'on s'explique qu'en un pays aussi arrosé l'irrigation s'impose. Voilà des territoires qui recoivent par an 3 et 4 mètres d’eau (voir le tableau de l'Annexe : Chute - d'eau moyenne en dillérents points de Java, p. 79); mais cette eau tombe par averses violentes, lrès inéga- ÿ lement réparties dans l’année; les cours d'eau sont caractérisés par une grande irrégularité de débit : le - Toentang, par exemple, passe de 3m*5 à 400 mètres cubes (p. 9); le débit du Pemali varie de 5 mètres … cubes à 960 (p. 30); celui du Solo, le plus impor- tant fleuve de Java, passe de 9 mètres cubes à 2.300 (p. 20), etc. L'eau, tombant sur les versants très … raides des nombreux cônes éruptifs de cette ile très «montagneuse, emporte sans peine les terres peu résis- — lantes; et elle va s’accumuler dans les plaines basses, voisines de la mer : tel est l'ensemble du cadre géogra- phique qui nécessite l'intervention humaine en vue d'une meilleure répartition de l’eau, la richesse souve- raine. L'irrigation est d'autant plus nécessaire que la * pour a augmenté dans des proportions quasi fa- …_buleuses : 4,5 millions d'habitants en 1815 et 25 millions aujourd'hui; 25 millions sur une surface de 130.000 kilomètres carrés, cela fait une densité de 192 habitants “par kilomètre carré. Cette énorme population se nour- rit principalement et presque exclusivement de riz, c'est- à-dire d'une céréale qui demande énormément d’eau, et avant les labours, et pendant toute la croissance : « L'irrigation, à partir du moment où le riz a été repi- ué, doit être continue; il faut éviter avec soin que leau reste stagnante; un léger courant empêche la formation de mousses et les parasites qui gêneraient la croissance de la plante. C’est pour cela que les indi- gènes pratiquent les irrigations, même dans les districts où les pluies sont le plus abondantes. Il en est ainsi, ET INDEX par exemple, autour de Buitenzorg, bien que la chute d'eau annuelle y alteigne 4,33 et que les averses se produisent presque régulièrement chaque jour » (p-. 58). On calcule que, pour l'irrigation d'une rizière, il faut compter au total un peu plus d’un mètre cube par mètre carré .(p. 62). Quelles sont les conditions de l'irrigation? Les eaux sont assez abondantes el violentes et les versants sont assez raides pour que les indigènes n'aient eu qu'à ouvrir des saignées sur les cours d’eau afin de consti- tuer des canaux d'arrosage; maintes fois ils ont ajouté dans le lit principal un petit barrage élémentaire, simple barrage en lit de rivière, souvent emporté et souvent reconstruit. Les Hollandais ont travaillé avec patience et prudence à améliorer peu à peu les irriga- tions indigènes; après de longs tâtonnements, ils onf résolu, depuis 1885, de ne plus entreprendre, hors les cas de force majeure, aucun travail d'ensemble sans qu'une étude complète et minutieuse en ait été faite; l’on a commencé à cette époque dans toute l'ile des levés topographiques à grande échelle des’ terrains irrigables; en dix ans, on n’a pas dépensé à cet effet moins de 4.500.000 francs (p. 8). C'est de ces enquêtes scientifiques que sont sortis les grands projets, dont le plus considérable est celui du Solo. M. Bernard nous décrit en détail ce projet, dont l'exécution complète exigera encore plusieurs années, et qui doit permettre d'irriguer cent cinquante-six mille hectares. Ce projet est très intéressant à tous les points de vue; il révèle d’une manière typique les conditions de l'irrigation à Java. 11] se compose essentiellement d'un barrage-déversoir et d'une prise d’eau établis à Ngloewak, et d’où part, sur la rive droite du Solo, un énorme canal de cent soixante-neuf kilomètres de lon- gueur ; ce canal ménage la pente des eaux, et il doit ètre défendu par des aqueducs ou des siphons contre tous les nombreux affluents qu'il est obligé de couper; en outre, c'est de lui que partent tous les canaux secon- daires, y compris ceux qui doivent, après avoir traversé le Solo lui-même à l’aide de grands siphons, apporter Jusque sur la rive gauche l'eau d'irrigation (p. 22-26 et pl. X). On devine, d'après ces simples indications, quelle prodigalité de travaux d'art de toutes sortes représente un plan aussi grandiose. Et cela nous fait apprécier toute l'importance de cette observation que place plus loin l’auteur : « Il ya ainsi sur chaque canal un nombre considé- rable d'ouvrages d'art. Sur le canal principal de Tji Hea, long de dix-sept kilomètres, il y en a soixante-dix-huit en y comprenant les ponts. Aussi le canal principal est-il la partie la plus coûteuse des systèmes d'irrigation. Dans le système du Solo, le barrage et la prise d’eau ne coûteront que 3.515.000 francs, soit 1/23 de la dépense totale; le barrage et la prise d’eau du Pemali coûtent 400.000 francs, soit la onzième partie de l’en- semble. Ce sont cependant ces ouvrages qui inspirent d'ordinaire le plus d'inquiétude. On ne les entre- prend pas sans hésitation » (p. 54). Après avoir lu ces lignes, on retrouve avec quelque léger scepticisme les affirmations suivantes, qui reviennent plus d'une fois sous la plume de M. Bernard : «Les systèmes modernes entrepris avec méthode à la suite d'études complètes ont été, au contraire, exécutés rapidement et avec des frais infiniment moindres.» Quoi qu'on en puisse dire, les projets du Solo appartiennent par excellence à la catégorie des grands projets modernes dont les Hol- landais sont très fiers; or on n'a pas encore le droit de regarder ces expériences nouvelles comme décisives et surtout comme moins coûteuses que les travaux BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX antérieurs; on sait si peu ce que coûtera finalement l'irrigation du Solo, que M. Bernard nous déclare, à la page 26, que les premières prévisions ont dû être tout simplement doublées et que les nouveaux devis s'élè- vent à 39 millions de florins, soit 80 millions de francs; enuneautre page, sans donner d'ailleurs d'explication, il évalue ces mêmes travaux à 50 millions de florins (p- 3). A coup sûr, les Hollandais ont été les initiateurs de vrais progrès; ils construisent avec toutes les res- sources modernes de Part de l'ingénieur, et le livre si pie ant de M. Bernard abonde en renseignements chniques d'une grande valeur; mais, s'ils ont très dome nt raison de faire préc éder leurs entre prises de travaux scientifiques préliminaires, ne risquent-ils pas de se laisser entrainer à des plans’ d'aménagement des eaux plus vastes peut-être et plus délicats que ne le comportent les conditions essentielles du cadre géo: graphique? Telle est, d’une manière précise, la question à discuter. — En tout cas, ils ont eu jusqu'ici la sagesse d'étendre le système des irrigations en restant fidèles à quelques-uns des principes des indigènes; dans toute l'ile de Java, qui est une terre classique des barrages {voir p. 38. et suiv.), i/ n'y a pas encore de vrai bar- rage-réservoir; il y à que des barrages-déver- soirs; car j'omets à dessein les simples réservoirs appelés wadouk, ét qui sont du même type que les tanks de l'Inde anglaise. Au reste, les conditions climatéri- ques de Java sont telles que des barrages-déversoirs suflisent à assurer l'irrigation pérenne, el grâce à l'ir- igation pérenne, on peut très heureusement multi- plier les récoltes de riz sur une même terre; on peut mème faire avant les récoltes de riz d'enrichissantes, mais épuisantes récoltes de canne à sucre ou de tabac (voir p. 76); et je suis bien, en principe, de l'avis du capitaine Bernard sur les avantages incomparables de l'irrigation pérenue (p. 57); toutefois, le problème technique, économique et géographique, sous sa forme complète, n'est pas le suivant : l'irrigation pérenne vaut-elle Mn que l'irrigation d'une saison? mais celui-ci : y a-t-il intérêt, dans tel ou tel cadre géogra- ii ue déterminé, à à conquérir les avantages de l'irri- galion pérenne par la construction dispendie use et souvent périlleuse de grands barrages-réservoirs? Tel est le problème qui ne s'est pas encore posé à Java, el il importe de le noter; mais nous ne pouvons géné- raliser les observations de Java sans l’aborder de front et sans constater d'abord qu'à Java il n'y à que des barrages-déversoirs. Avec quels faits économiques l'extension de l'ir- rigation à Java est-elle en connexion ? M. Bernard nous fournit encore lous les renseignements nécessaires pour répondre amplement à cette question. Les Hol- landais ont créé un service central et autoritaire, le Waterstaat (p. 66 et suiv.), analogue à l'/rrigation Department de l'Egypte. L'exploitation et la surveil- lance de l'irrigation sont d'autant plus rigoureuses, l’organisation est d'autant plus précise que la quantité d'eau disponible est faible par rapport à la surface à irriguer : c'est le cas de Demak (p. 65). On a inauguré un régime sévère de «rotation», ne distribuant l’eau aux divers propriétaires que selon un tableau rigoureuse ment établi. Enfin, si l’eau est gratuite (p. 77), en revanche beaucoup des {ravaux généraux et surtout les terrassements sont assurés par la main-d'œuvre gratuite de la population, c'est-à- dire par la corvée (p. 72). Nous retrouvons là toute une série de faits économiques et sociaux qui ont, ailleurs aussi, accompagné le déve- loppement de lPirrigation. M. F. Bernard, dont nous avons lu le livre avec une altention très assidue elavec un très grand profil, nous permettra-t-il de lui demander, s'il réédite son ouvrage, d'ajouter à son volume, qui manque complètement de bibliographie, des références, notamment des réfé- rences aux publications hollandaises officielles ? Guidé par un sérieux exposé comme le sien, on serait très heureux de pouvoir se reporter, pour l'étude plus détaillée d’une question particulière, aux sources qu'il à lui-même si consciencieusement consultées? L'ouvrage est accompagné de 16 planches donnant les plans et les coupes d'un grand nombre de travaux d'art, et qui se recommandent à l'attention des ingé- nieurs. JEAN BRUNHES, Professeur de Géographie à l'Université de Fribourg (Suisse). 2° Sciences physiques Hiorns (A.-H.), Directeur de l'Ecole de Métallurgie de Birmingham. — Métallographie. Traduit par E. BAzIN. — : vol. in-8° de 205 pages et 96 figures (Prix : 9 fr.). Ch. Béranger, éditeur. Paris, 4904, La science ae aphique, qui a trouvé son origine dans les recherches de Sorby et son développement dans les magnifiques travaux de M. Osmond, a, depuis peu de temps, fait son entrée dans l'industrie. En France surtout, les aciéries, notamment celles de là région du Centre, l'utilisent sur une importante échelle; nombreux sont déjà les laboratoires industriels pos= sédant une installation micrographique. Le livre de M. Hiorns, qui, pour la première fois, donne une monographie de la Métallographie, vient done à son heure. Mais il est fort regrettable que ce traité ne soit pas à l'abri d° importantes critiques. La principale réside, et ceci ne dépend pas que de l’auteur, dans l'exécution des mier rographies, qui est véritable= ment détestable. 11 y en a fort peu qui soient lisibles: je mets au défi un métallographe de reconnaître de la perlite dans les photographies relatives aux aciers. De plus, l’auteur n'a pas fait ressortir le rapproche= ment important qui existe entre la constitution et, partant, la micrographie et les propriétés mécaniques, c'est-à-dire l'utilisation des alliages. C'était là évidem= ment le point intéressant, et il est à peine effleuré en ce qui concerne les laitons et les importants travaux de M. Charpy. Enfin, certains chapitres manquent de clarté; c’est notamment le cas de celui qui traite du polissage : M. Hiorns y indique de très nombreuses méthodes qui, toutes, empiètent les unes sur les autres; il eût été plus sage d'indiquer celle qui est, à l'heure actuelle, utilisée par tous les micrographes. ; Ces importantes critiques indiquent-elles que ce livre ne présente aucun intérèt? Nullement : l’auteur y traite quelques questions nouvelles, notamment celles des impuretés dans le cuivre, des maillechorts, ete. qui ‘peuvent mettre sur la voie les expérimentateurs: Entin, l'on doit ajouter que M. Bazin, qui à traduit. l'ouvrage, a fait de nombreuses annotations particu= lièrement intéressantes; le chapitre sur le microscope, qu'il a cru devoir transformer, donne une description très complète des appareils utilisés. Il faut toutefois noter qu'il n’est déjà plus au point; il ne parle pas? en effet, des Abrhiete perfectionnements apportés ad mic roscope de M. I. Le Châtelier. Quoi qu'il en soit, il était à souhaiter que le premief traité de Métallographie présentät un ensemble plus attrayant et permettant de mieux juger cette nouvelle science, qui joue déjà un rôle si important dans l'ins dustrie. LÉON GUILLET, Docteur ès sciences. Young (Sydney), Professeur à Trinity College (Dublin). — KFractionnal Distillation. — 1 vol in-12 de 284 pages avec 72 fig. Macmillan and: O9 éditeurs. Londres, 1904. 4 Nos lecteurs GE les beaux travaux de M. Sydney Young sur la distillation fractionnée, ce savant en ayant récemment exposé ici-même les prin cipaux résultats’. L'ouvrage qu'il publie sous ce titre, renferme le développement et les applications pratiquess de ces recherches : il sera consulté avec fruit par tous. ceux, savants ou industriels, qui ont à faire usage 4 ce procédé, ‘ Voir la Revue du 15 novembre 1904, p. 981 et suiv. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 343 3° Sciences naturelles Lutz (Louis), Professeur agrégé à l'Ecole Supérieure de Pharmacie de Paris. — Les Micro-organismes fixateurs d'azote. — 1 vol. in-8° de 183 pages. — Lechevalier, éditeur. Paris, 1904. Voici un ouvrage qui vient à son heure; le besoin s'en faisait sentir; il peut donc compter sur un bon accueil. . Ily a, dans toutes les branches de la science, des “ questions qui frappent plus particulièrement l'atten- k tion. Celle qui fait l'objet de l'ouvrage de M. Lutz est de ce nombre. Son ancienneté, son importance pra- tique, son intérêt théorique et la somme énorme d'efforts qui lui ont été consacrés, permettaient de » prévoir qu'elle était appelée à fournir le sujet d’un ouvrage spécial, et à sortir des cadres, trop étroits, des manuels et des Traités généraux. Considérée dans son histoire, elle a revêtu des aspects bien différents. Les agronomes de l'Antiquité avaient déjà remarqué que les cultures de Légumi- neuses augmentent la fertilité naturelle du sol. Cette opinion s’est confirmée avec les progrès de l’agricul- Re. Les chimistes modernes l'ont précisée en montrant “que ces plantes sont des collectrices d'azote. Cet excédent d'azote a été attribué à des causes multiples, “parce que les auteurs n'étaient pas suffisamment … armés pour établir rigoureusement le déterminisme « des expériences. Il est arrivé ce qui arrive toujours … dans des circonstances semblables : c’estque les théories rivales renfermaient une part de vérité sans qu'aucune . parvint à fournir une interprétation satisfaisante du « phénomène. …_ Le dernier mot est revenu à la Bactériologie. On ….sait aujourd'hui que ce sont les micro-organismes qui … président à la fixation de l'azote gazeux sur le sol ou - ans les végétaux. La question semble donc s'engager “dans une voie sûre, avec des méthodes nouvelles et « capables d'élucider tous les problèmes difficiles qu'elle - soulève. Voilà en quelques mots la matière de l'ouvrage que M. Lutz a eu l’idée heureuse d'entreprendre. Le titre quil lui a donné semble laisser supposer qu'il n'a envisagé qu'un côté de la question. Il n'en est rien. Mais on concoit qu'il a dû élaguer, car l'historique, Surtout, est imposant, autant par son étendue que par les noms qui s’y rattachent. L'auteur l’a exposé dans le premier chapitre; il tient juste la place nécessaire pour donner au lecteur une idée nette des divers aspects que la question a présentés dans le temps. » M. Lutz à ensuite abordé l'étude des divers micro- organismes capables de faire entrer l'azote libre dans es combinaisons organiques. Dans les conditions naturelles, les uns réalisent cette synthèse dans le sol même; les autres exigent le concours d'un végétal supérieur, dont ils deviennent les hôtes (Légumineuses et Bactéroïdes), ou simplement les commensaux (Algues vertes et Bactéries). C'est dans cet ordre que l’auteur décrit ces divers micro-organismes. Dans la première catégorie, se rangent le Clostridium Pasteurianum, l'Azotobacter chroococum et agilis, le Bacillus Ellenbachii (alinite); un chapitre spécial est consacré à ce dernier. - Däns la seconde catégorie, on trouve la Bactérie des nodosités des Légumineuses. Parmi tous les microbes fixateurs d'azote, ce dernier tient une place à part. Ses rapports avec la plante, ses caractères morphologiques 3 ÉRSES les caractères et les propriétés de ses cultures en milieu artificiel, ont été exposés d'une “facon complète, sans excepter les nombreux essais que on a faits en vue de l'inoculation du sol et de la pro- duction abondante de tubercules radicaux sur les dif- férentes espèces de Légumineuses utilisées dans la grande culture. Le chapitre VIII traite des tubercules radicaux des plantes autres que les Légumineuses. Le IX° et dernier chapitre est consacré à l'étude de lafixation de l'azote gazeux par les Algues et les Bac- téries associées; il se termine par une révision rapide des travaux, encore bien contradictoires, sur l’assimila- tion de l'azote libre par les Mucédinées et les Cham- pignons. On voit donc que l’auteur n'a rien négligé de tout ce qui se rattache à la grande question de la fixation de l'azote gazeux par le sol ou les végétaux, sous l'in- fluence de réactions biochimiques. Cet ouvrage, clairement et méthodiquement exposé, rendra les plus grands services, non seulement aux savants de laboratoire qui s'intéressent à la Microbio- logie, mais aussi à ceux qui sont chargés de répandre les notions qui relèvent de cette science; il sera mème accueilli avec faveur par ceux qui visent de préférence, dans leur enseignement, les applications pratiques, et ceci, je le dis à dessein, parce que le titre, un peu spécial, choisi par l’auteur, pourrait, peut-être, éveiller chez quelques-uns une certaine hésitation. P: Ma, Chef de Laboratoire à l'Institut Pasteur. Freer (P.-C.), Superiutendant des Laboratoires du Gouvernement aux Iles Philippines. — Report of the Superintendant of the Government Labora- tories in the Philippine Islands for the year ended September 1th 1903. — 1 vo/. 1n-8° de 282 pages avec 200 planches ct fiqures. Manille, Bureau of Insular Aflairs, 1904. Dans l’œuvre de transformation et de mise en valeur que les Américains ont entreprise aux Iles Philippines, une: place à part doit être réservée aux Laboratoires du Gouvernement. Institués depuis deux ou trois ans à peine, ils ont déjà rendu à l'hygiène publique, à l’agri- culture, à l'industrie naissante, des services signalés, dont on peut se rendre compte par la lecture du volu- mineux Rapport que M. P. C. Freer vient de consacrer à leur fonctionnement pendant l’année 1903. En attendant l'édification de bâtiments spéciaux, conçus suivant les données et avec les ressources de la science et de l'architecture modernes, ces Laboratoires ont dû se contenter d'installations provisoires, qui ont quelque peu gêné leur fonctionnement, mais qui font paraître d'autant plus remarquables les résultats obtenus. Le Laboratoire des serums a pour tâche principale la préparation de la vaccine. Des étables ont été cons- truites pour 200 animaux environ; le virus à été renou- velé par une importation fraiche du Japon, et plus de 900.000 doses de vaccin ont été préparées en six mois. Le mème Laboratoire s'occupe ensuite de la préparation du sérum contre la peste bovine, dont le besoin se fait sentir depuis longtemps dans les Iles Philippines; aujourd'hui, cinq chevaux immunisés fournissent déjà régulièrement du sérum antipesteux, qui est envoyé dans toutes les îles et inoculé au bétail avec le concours d'employés du Laboratoire. Les demandes considérables de vaccin et de sérum ont absorbé à peu près tout le temps du personnel; l'accroissement prochain de ce dernier, dirigé par le Dr J. W. Jobling, lui permettra de se livrer bientôt à la préparation d'autres sérums prophylactiques et d'entreprendre des recherches originales. L'œuvre du Laboratoire biologique comprend deux parties : le diagnostic et les recherches pathologiques. Quelques chiffres donneront une idée de l'importance de la première : en six mois, plus de 7.000 diagnostics, bactériologiques ou autres, ont été portés pour les hôpitaux ; 20.000 rats et souris ont été examinés pour déterminer la présence ou l'absence de la peste; 500 tissus ont été préparés pour l'examen microsco- pique; enfin un grand nombre d'autopsies ontélé faites. Là encore, l'abondance du travail courant a limité le temps consacré aux recherches. Cependant, le directeur du Laboratoire, le D° W. E. Musgrave, à achevé un 344 travail considérable sur les Trypanosomes et les trypa- nosomiases, où il traite spécialement du surra des Iles Philippines; on y compte par miliers les chevaux morts de cette maladie. Aujourd'hui, une quarantaine est imposée aux chevaux importés dans les îles et des mesures ont été prises pour détruire les agents d’infec- tion. Le directeur du Laboratoire entomologique, M. Ch. S. Banks, s’est surtout consacré à l'étude des insectes parasites du cacaoyer. Rien n'avait encore été fait au point de vue de l'entomologie économique des Philip- pines. Les observations faites par M. Banks lui ont per- mis de rédiger des instructions de grande valeur, qui, envoyées aux planteurs de cacaoyers, leur donnent les moyens de préserver ou de protéger leurs plantations. D'autres recherches ont été entreprises sur les insectes parasites des essences forestières; une étude sur les moustiques et les mouches qui transmettent la malaria et le surra est en projet. Le Laboratoire de Chimie a eu à répondre à de con- tinuelles demandes d'analyses de la part d’autres Admi- nistrations : analyses de fausses monnaies, analyses mé- dico-légales, analyses de minerais, de sols, d’eaux, etc. D'autre part, il a terminé, sous la direction de M. Sher- man, un travail considérable sur le caoutchouc et la gutta-percha aux Iles Philippines ; on y trouvera la distribution géographique des plantes productrices, les méthodes pour recueillir le latex, ses propriétés, la préparation et la composition des produits obtenus. Enfin, une étude des gommes et résines des Philippines a été entreprise par M. Bliss; il a examiné les produits connus sous le nom de brea, d’où l’on extrait l'huile d'élémi, et d’autres analogues; parmi les huiles essen- tielles obtenues, l'une renferme une grande quantité de pinène presque pur. Un Laboratoire de Botanique a également fonctionné ; il a déterminé de nombreuses plantes et poursuivi la confection d’un herbier; il est possible qu’un Jardin botanique lui soit prochainement adjoint. Enfin, un Laboratuire de Biologie marine est également en projet. Ces brèves indications permettent de se rendre compte de l'effort accompli par les Américains pour l'étude scientifique de leur nouvelle colonie ; les sacri- fices qu'ils se sont imposés trouvent déjà leur récom- pense dans les progrès de l'hygiène publique et le développement des exploitations agricoles. Louis BRUNET. 4 Sciences médicales Dubois (D'), Professeur de Neuropathologie. — Les Psychonévroses et leur traitement moral. Leçons faites à l'Université de Berne, avec préface de M. DÉJERNE, Professeur à la Faculté de Médecine de Paris. — 4 vol. in-8° de 557 pages. (Prix : 8 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1904. L'auteur englobe sous le nom de psychonévroses ou de nervosisme toute une série d’affections du système nerveux où prédomine l'influence psychique et qui sont plus ou moins justiciables d’un traitement psychique ou psychothérapie : ce sont la neurasthénie, l’hystérie, l'hystéro-neurasthénie, les formes légères d'hypocon- drie et de mélancolie ; enfin, certains états de déséqui- libre psychique plus graves. A vrai dire, ces affections sont toutes, par leur étiologie, par leur nature, par leurs symptômes, et aussi par le traitement qu'elles ré- clament, des maladies mentales, des psychoses. Le nervosisme étant ainsi délini un mal avant tout psy- chique, la thérapeutique physique et médicamenteuse doit passer au second plan et le traitement psychique, la psychothérapie, au premier. C’est, d'ailleurs, notons-le en passant, cette thérapeutique qui, depuis fort long- temps déjà, est employée dans les asiles d’aliénés pour combattre les troubles nerveux énumérés plus haut, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4 et les aliénistes connaissent bien et les indications du traitement moral et ses heureux résultats. & Les psychonévroses, telles que les définit M. Dubois; ne tiennent donc ni à des lésions grossières (méningo= encéphalites, etc.), ni à des intoxications. Ce sont des « états d'âme » sur lesquels il est possible d'agir par l'influence morale. Les stigmates mentaux du nervo= sisme sont la suggestibilité, la fatigabilité, l'émotivité et la sensibilité exagérées. L'auteur étudie ces traits caractéristiques des sujets atteints de psychonévroses;m puis il examine les diverses formes cliniques du ner, vosisme : hystérie, neurasthénie, mélancolie, ete. Abor= dant ensuite le traitement moral de ces états, il expose dans une étude magistrale sa thérapeutique des psy= chonéyroses : la psychothérapie rationnelle a pour but d'établir chez le malade la conviction de guérison; il faut, non par la suggestion à l’état de veille ou dans l'hypnose, mais par la persuasion, changer l’état d'âme du sujet, faire disparaître les auto-suggestions, les idées fixes, rééduquer la volonté. « Le névrosé, dit M. Duboisÿ est sur la voie de la guérison aussitôt qu'il a la con- viction qu'il va guérir; il est guéri le jour où il se croit guéri ». Pour que cette œuvre psychothérapique, qui consiste à changer la mentalité d'un sujet, puisse s'ac= complir dans les conditions les plus favorables, il convient d'avoir recours simultanément au repos au lit prolongé durant six semaines, à l'isolement et à la suralimentation; mais ces derniers moyens ne sont que des auxiliaires qui favorisent l'action de l'agent curateur essentiel, le traitement moral. Le Professeur Dubois étudie en détail l'influence de sa méthode thé= rapeutique sur les différents symptômes des psycho névroses : troubles digestifs, circulatoires, urinaires, sexuels, moteurs, troubles du sommeil, crises nerveu= ses, etc. Toutes ces manifestations sont justiciables de la psychothérapie, ainsique le montrent de nombreuses ob- servations, des dialogues instructifs. Il est vrai que pour réussir il faut, chez le médecin, une confiance imper= turbable dans la puissance de la logique, une influence persuasive incontestable; il doit savoir varier ses argu-— ments, convaincre le sujet que son mal n'est pas une maladie corporelle, mais une psychopathie, répondre aux objections d'une façon qui frappe l'esprit du patients amener enfin le malade à la capitulaton en le pour= suivant jusque dans les derniers retranchements. A une époque où, malgré les résultats obtenus pan les médecins aliénistes, on s’obstinait à traiter les névroses uniquement par des moyens physiques ous par la thérapeutique médicamenteuse, M. Dubois as eu le mérite, ainsi que l’a dit le Professeur Déjerime dans sa Préface, de montrer le rôle primordial, sinon unique, qui incombe dans le traitement des psycho= névroses à la pédagogie psychique, à la rééducation de la raison, et de baser résolument toute sa thérapeus tique sur ce principe. Aussi l'ouvrage de M. le Profes- seur Dubois nous parait-il appelé à un retentissemen légitime. C'est l'œuvre d'un médecin-psychologue d'une singulière pénétration, d'un thérapeute profondément convaincu et d’un directeur de conscience persuasifs Parmi les critiques qu'on peut adresser à l'auteur, notons brièvement l’optimisme excessif dont il es animé, son exclusivisme thérapeutique et aussi, paë fois, l'imprécision de son diagnostic. Les Psychonévroses et leur traitement moral de vraient être lus et médités non seulement par Je aliénistes et neurologistes, mais encore par les psycho logues, les pédagogues, et aussi par les médecins pras ticiens, qui, jusqu'alors souvent désarmés et privé d'une idée thérapeutique directrice en présence des manifestations déconcertantes et mal interprétées de psychonévroses, sauront désormais quelle place revien dans ces cas à la psychothérapie rationnelle, à savoir | première. Dr PAUL SÉRIEUX, Médecin en chef des Asiles publics d'aliénéss de la Seine. . 24 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 345 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 43 Mars 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux déter- mine les surfaces applicables sur le paraboloïde de révolution. — M. P. Painlevé critique les recherches récentes de M. Lecornu sur le frottement de glissement et maintient que, pour une valeur donnée de la vitesse de glissement et de la pression normale, la force de frottement ne dépend pas seulement de la nature des “Surfaces en contact, mais encore de la répartition des pressions dans les solides, au voisinage des points de contact. — M. R. Liouville donne une nouvelle con- firmation de l'exposant 2/3 pour la puissance de la pression à laquelle est proportionnelle la vitesse de combustion des poudres colloïdales. — M. E. Jouguet “montre que la dissociation en arrière de l'onde explo- sive peut être assez forte sans que les résultats donnés ‘par sa formule pour la vitesse de cette onde cessent de concorder avec les valeurs observées. — M. Ed. Maillet … à étudié les variations des débits des systèmes de x ré- servoirs cylindriques qui communiquent soit par des orifices, noyés ou non, soit par des déversoirs superfi- ciels supposés non noyés (à crête horizontale). 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. A. Guébhard : Sur la cause du silhouettage photographique (voir p. 187 et 291). — M. A. Breydel signale un moyen destiné à éviter les dangers @e l'électricité atmosphérique pour l'aérostation. — M. A. Leduc discute le degré de pré- cision qu'on peut atteindre dans la détermination des poids atomiques de l'hydrogène et de l'azote, et montre que ce dernier est certainement inférieur à 14,01. — M. G. Friedel montre que l'hypothèse réticutaire doit se baser sur les propriétés vectorielles discontinues de Ja matière, c'est-à-dire sur l'existence des faces planes et des arètes rectilignes. — MM. J. Ville et E. Derrien ont constaté que, sous l’action d’une addition de fluo- mure de sodium, la bande rouge la plus foncée du spec- tre de la méthémoglobine acide disparait pour faire place à une nouvelle bande plus foncée dont le centre est à A— 612. — M. “M. Chanoz a déterminé pendant une année la conductibilité électrique de l’eau potable, “dérivée du Rhône, qui alimente Lyon après filtration. Elle est relativement constante, et correspond à celle ‘de solutions de NaCI contenant 1,53 à 1,85 grammes par litre. — MM. E. Jungfleisch et M. Godchot ont préparé Vacide d-lactique pur par action de H?S sur le d-lactate “de zinc. Il cristallise en aiguilles prismatiques fondant wers 250-260; son pouvoir rotatoire diminue quand la dilution augmente. — MM. F. Couturier et L. Meu- nier, en faisant réagir l’amalgame de magnésium sur la diméthylcétone, ont obtenu un produit magnésien, qui est décomposé par l’eau en donnant l'hydrate de pina- “coline ; le produit magnésien, soumis à la distillation sèche, fournit de l’'oxyde de mésityle. — M. R. Les- pieau, en déshydratant par P?0*% l'éther CH°0C*Hÿ. CHOH.CHE.CO*H, a obtenu l'acide oxéthylcrotonique CH°OC°H5.CH : CH.CO*H,F.45°, qui est oxydé par le per- manganate de baryum en acide éthylérythrique CH?0 C?H°.CHOH.CHOH.CO*H, F.90°-92°, — M. L.-J. Simon a constaté que le nitrate d'hydroxylamine, additionné d'une quantité d'oxalate disodique supérieure à une demi-molécule, se comporte à l'oxydation comme loxalate d'hydroxylamine pur. — M. À. Astrue à pré- paré les glycérophosphates acide et neutre de pipéra- zine. — MM. A.-Ch. Girard et E. Rousseau ont com- paré la culture du tabac à fumer avec celle du tabac à priser; la différence essentielle réside dans les exi- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. gences de potasse, beaucoup plus élevées pour le tabac à fumer. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Moutier et A. Chal- lamel sont parvenus à abaisser la pression artérielle au-dessous de la normale par la d'Arsonvalisation. On la relève par l'application de courants de haute fré- quence et de haute tension le long de la colonne verté- brale. — M. C.Zalackas à constaté que le Nasturtium officinale est, par excellence, l’antidote de la nicotine, à condition qu'il soit injecté à temps. — M. G. Loisel, en injectant à des cobayes des extraits ovariens de grenouille, à vu survenir une chute de poils pro- noncée, puis l’amaigrissement et, chez les femelles, une tendance marquée à la stérilité. — M. L. Brasil a constaté que, chez les Monocystis du Lombrie, la con- jugaison est anisogame; l’isogamie tend à devenir l’ex- ception chez les Monocystidés. — M. H. Coutière a étudié les Alpheidae rapportés des Laquedives et des Maldives par l'Expédition Gardiner. 11 y a 76 espèces, dont 48 nouvelles. — M. J. Chautard à examiné un certain nombre de fossiles recueillis au Sénégal, sur les côtes du Baol et dans le pays de Sine. Leurs carac- tères doivent faire rattacher à l’'Eocène moyen les ter- rains où ils ont été rencontrés. — M. E. Fournier signale des phénomènes de capture de cours d'eau datant du xvu®, du xvure et du début du xix° siècle, et prouvés par l'examen comparé de cartes remontant à ces époques et de cartes de l’époque actuelle. Séance du 20 Mars 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Fréchet a dé- montré directement les propositions suivantes : Lors- qu'on à pu définir la limite d’une suite d'éléments au moyen de l'écart, on peut affirmer que, pour de tels éléments : 1° Tout ensemble dérivé est fermé; 2° Toute opération fonctionnelle continue dans un ensemble compact et fermé y est uniformément continue. — M. Pigeaud communique ses recherches sur le calcul des arcs encastrés. — M. A. Hansky à photographié la couronne solaire au sommet du Mont-Blanc à l’aide de la grande lunette de 12 pouces en employant des écrans colorés absorbant le spectre depuis À — 660 jusqu'à la limite du spectre. Les résultats obtenus sont encoura- geants. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Ed. Branly décrit un dis- positif qui permet de contrôler, au moyen d'ondes élec- triques, des actions produites à distance, telles que : entrainement d'un moteur électrique, allumage de lampes, explosion. — MM. A. Broca et Turchini ont constaté qu'on peut utiliser, pour produire des courants de haute fréquence de période calculable, des bouteilles de Leyde en verre, à condition d'introduire dans les formules une capacité environ moitié de celle qu'on mesure pour des charges d'environ une seconde. — M. G. Meslin a déterminé par sa méthode le coefficient d'aimantation spécifique et la susceptibilité magnétique d’un grand nombre de sels. — M. P. Villard : Sur le silhouettage photographique (voir p. 187). — M. W. Duane a étudié l’ionisation produite entre des plateaux parallèles par l’'émanation du radium. Le courant produit par l'unité d'’émanation est égal à 0,63 [d— ({—e-—4)], d étant la distance des plateaux et e la charge des ions. — M. R. de Forcrand montre qu'il y aurait de nombreux avantages à admettre que l'atome d'hydrogène est divalent el à doubler toutes les valences admises pour les éléments. — MM. M. Berthelot et Gaudechon ont poursuivi leurs recherches thermochi- miques sur la strychnine et la brucine. La dissolution de la brucine dans HCI et H*S0* dégage à peu près les CEE 1 340 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES mêmes quantités de chaleur, et il en est de même pour | la strychnine. — MM. P. Freundler et Ledru, en bro- | mant la paraldéhyde sèche entre — 5° et 0°, ont obtenu le bromacétal et, comme produit accessoire, l’aldéhyde tétrabromobutyrique. Le bromacétal, chauffé avec M£, donne naissance à de l’oxyde d’éthyl-vinyle CH? : CHOC:H5, à du bromure et à de l’éthylate de Mg. — M. I. Bay indique que la coloration bleue donnée par la diphénylamine avec l'acide nitrique se produit avec un grand nombre d'oxydants et même après un certain temps d'exposition à l'air. — MM. L. Vignon et A. Si- monet ont prépas un certain nombre de dérivés diazoïques de la diphénylamine avec les toluidines, xylidines et naphtylamines R.Az?.A7(C1).— MM.E.E. Blaise et A. Luttringer sont parvenus à caractériser les lactones en faisant réagir sur elles l'hydrate d'hydra- zine, qui conduit à la formation d'hydrazinolactones à point de fusion bien défini. — M. L. Brunel, en oxydant les deux thymomenthols, a obtenu une même thymo- ménthone, CH#0, liquide, d—0,911, Eb. 2129. Par hydrogénation, elle reforme le fG-thymomenthol. — M. A. Trillat explique le rôle antiseptique et conser- vateur des fumées dans une foule de circonstances par la présence constante de la formaldéhyde dans leurs parties gazeuses ou solides. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau signale les variations d'éclat et les éclipses totales des images pri- maires formées sur la rétine par de très faibles sources lumineuses de valeur constante. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff ont reconnu que l'intoxication subaiguë des chiens par l'huile phosphorée détermine : la dégénérescence graisseuse du foie, la disparition du fibrinogène du plasma sanguin, l'incoagulabilité du sang. — M. et M®* L. Lapicque ont observé que la loi d'excitation des muscles, quoique toujours la même pour les différents muscles, peut se présenter sous des allures très diverses, par suite des durées différentes des processus d’excitation. — M. H. Sérégé expose les raisons anatomiques, physiologiques, anatomo-patholo- giques et cliniques qui plaident en faveur de l’indépen- dance des lobes du foie. — M. J. Tissot montre que la polypnée estune des causes déterminantes des accidents de la chloroformisation ; dans les périodes de polypnée, il convient d'administrer l'anesthésique avec prudence. — M. Ch. Henry présente un nouveau dynamomètre totaliseur-enregistreur pour la mesure de l'énergie mus- culaire disponible. — M. H. Guilleminot à reconnu par de nombreuses mesures que, chez les tuberculeux au début ou chez les prétuberculeux, le cœur est plus petit que la normale, tandis que, chez les tuberculeux qui ont guéri de leurs lésions, il parait être au-dessus de la normale. ACADEMIE DE MÉDECINE Séance du 14 Mars 1905. MM. V. Cornil et P. Coudray ont étudié sur le chien l'influence des corps étrangers traumatiques introduits dans l'articulation. En général, l'existence d’une couche très épaisse de fibro-cartilage à la face osseuse ‘d’un corps traumatique libre semble indiquer que ce corps est resté en contact prolongé avec son point d'origine. — M. H. Huchard à constaté que l'acide formique, ingéré sous forme de formiate de soude et à la dose de 2 à 3 grammes par jour, provoque une augmen- tation, parfois considérable, de la force musculaire et une action tonique sur le cœur et les vaisseaux, et d'autre part une action diurétique très nette. Le pouvoir toxique des formiates est très faible. — L'Académie continue à discuter la question des rapports de la syphilis avec la paralysie générale. Séance du 21 Mars 1905. M. Cadiot est élu membre titulaire dans la Section de Médecine vétérinaire. M. Kermorgant présente un Rapport sur les maladies endémiques épidémiques et contagieuses qui ont régné dansles colonies francaises en 1903. — MM. A. Calmetteh et Breton ont réussi à provoquer expérimentalement l'infection ankylostomiasique chez le chien en injec= tant sous la peau de la région interscapulaire des larves enkystées d'Ankylostomum caninum où d'A. duodenales SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Seance du 411 Mars 1905. M. Ch. Féré signale une atrophie des testicules coïincidant avec l'augmentation de volume du Corps thyroïde chez un paralytique général. — Le même auteur a déterminé la durée de l'influence des excita= tions sensorielles sur les mouvements volontaires. —= M. L. Camus a observé que la disparition plus ow moins tardive des greffes parathyroïdiennes chez les animaux normaux ou partiellement éthyroïdés semble se produire comme celle des greffes du corps thyroïde — MM. M. Doyon et Billet ont constaté que le retaïd de coagulation du sang provoqué par l'injection d’atro= pine dans la veine mésaraïque ne s'accompagne jamais d'hypoleucocytose, mais parfois d'hyperleucocytose. = MM. M. Doyon et N. Kareff montrent que le foie intervient dans les modifications de la coagulabilité du sang produites par l'injection d’atropine. — MM. G: Billard, F. Bellet et Maltet ont reconnu que les modifications observées dans le développement des os chez le lapin après larrachement ou l’élongation du sciatique s'expliquent par des troubles vaso-moteurs et des troubles trophiques. — MM. G. Billard eb Ch. Bruyant ont constaté que des alevins de truite, placés dans de l'eau contenant des cultures d'algues, y conservent une très grande vitalité. — M. J. Le Goff propose une méthode de dosage de certaines substances réductrices des urines au moyen du bleu de méthylène en milieu alcalin. — M. F. Battelli a observé que l'extrait des globules du chien ou du cobaye privés de stroma fait baisser la pression artérielle et est toxique si on l'injecte dans les veines d’un lapin immunisé contre ces globules. — M. S. Ramon y Cajal, par Sa méthode à l'argent réduit, a trouvé, dans les ganglion rachidiens de l'homme et des Mammifères, outre la cellule unipolaire glomérulée classique : un type mul tipolaire, un type fenêtré, un type couvert de fossettes __ MM. M. Caullery et A. Chappellier décrivent un procédé commode pour inclure dans la parafline des objets microscopiques. — Mi: P. Cernovodeanu el M. V. Henri ont observé que l'hémolysine du sérum de chien est absorbée par les globules de poule pendant les dix premières minutes qui suivent le mélange à 319% — MM. M. Gompel et V. Henri ont reconnu que le sue pancréatique kinasé, additionné à un mélanges d'albumine d'œuf crue et d'albumine coagulée, digères d'abord l’albumine crue. La digestion de l’albuminë coagulée commence lorsque celle de l'albumine crue est déjà très avancée. — M. Ch. Dopter a constaté que dans le sérum d'animaux vaccinés contre l’un des bacilles dysentériques, il existe une sensibilisatrice spécifique, nettement décelable par la réaction de fixa tion de Bordet, pour le bacille utilisé pour l’immunisä tion. — M. E. Géraudel a observé que la capillarisation du courant de décharge porto-sus-hépatique est totale au niveau du parenchyme hépatique. — M. G. LOisel Stérilité et alopécie chez les cobayes soumis à l'influence des poisons ovariens de grenouille (voir p. 345). = même auteur à étudié l'hérédité de la coloration du plumage chez les pigeons voyageurs ; ni la loi de Mendels ni celles de Galton et de Pearson, ne s'appliquent aux résultats observés. — M. E. Géraudel poursuitses recherches sur la structure du foie et le bourgeon glandulaire hépatique. 1 Séance du 18 Mars 1905. ; M. W. Giesbrecht estime que la luminosité d animaux n'est pas un processus vital, mais un pros cessus physico-chimique. — M. Ed. Retterer a | constaté que le genou du Chimpanzé possède un fibro- ; ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 347 cartilage interne en forme de. ménisque et un fibro- cartilage externe circulaire ou mieux annulaire. — M. L. Dor propose d'employer l'essence de moutarde comme liquide conservateur des pièces anatomiques. — M. J. Jolly estime que la forme normale des glo- “bules rouges des Mammifères est la forme discoide. Les formes de cupules plus ou moins excavées qu’on «observe quelquefois sont l'ébauche d'un gonflement …ù à l'hydratation inégale de la membrane. — M. Ch. Dopter à observé une sensibilisatrice spécifique dans le sérum des malades atteints de dysenterie bacillaire. — M. G. Mioni pense que, pour avoir des résultats comparables dans l'évaluation de là vitesse initiale de lhémolyse, il faut qu'une quantité constante de liquide hémolytique soit mise en contact avec une quantité toujours constante d’émulsion globulaire. — MM. Haa- land et Yourewitch ont étudié une pasteurellose sévissant en même temps sur les lapins, les cobayes et les souris, et qui se manifeste chez le lapin par une sécrétion purulente du nez. — M. Thooris a constaté “de nombreux cas d'helminthiase chez des anineurs “soldats dans un régiment à Lille; ils constituent une menace réelle pour le recrutement. — M. J. Rehns décrit quelquès actions biologiques du radium. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff : Action de lintoxication phosphorée chez le chien (voir p. 346). — M. R. Legendre a constaté la présence de granulations colorables par le vert lumière dans les cellules ner- veuses d'Helix aspersa et leur cylindraxe. — M. Laf- forgue signale de nouveaux cas de typhus récurrent en Tunisie, dont quelques-uns ont présenté un haut “degré de gravité. — M. E. Fauré-Frémiet décrit l'organisation d'une amibe, le Cochliopodium pellu- cidum. — M. H. Vincent montre que le bacille fusi- forme n’est pas identique avec le Spirillum Sputigenum, omme Plaut l'avait annoncé. — M. et Mme L. La- picque : Durée des processus d’excitation pour diffé- ents muscles (voir p.346). — M. E. Laguesse a cherché “à établir le nombre normal des îlots de Langerhans “dans le pancréas de l’homme. Il trouve, en moyenne, ans les conditions normales, un ilot ou un peu moins d'un îlot par millimètre carré. — Mi: P. Cernovodeanu PER eat Go — “chien que ne le font les globules de poule. — M. A. m…Trillat : Propriétés antiseptiques de certaines fumées voir p.346). — M. L. Léger a découvert un nouveau rypanoplasme, qu'il nomme Tr. intestinalis, vivant en parasite dans le tube digestif d'un poisson de mer, & Box boops. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 14 Mars 1905. . MM. Coyne et Cavalié ont observé, dans les zones de ramollissement et de destruction de la carie de livoire, des ostéoclastes qui participent à la destruc- ion du tissu et paraissent jouer un rôle très important dans le processus de la carie. — M. J. Chaine montre Mque tout état dans lequel un muscle polygastrique n’a pas une direction parallèle à l'axe du corps est une disposition acquise dans le cours du développement phylogénique. —- M. Mongour a constaté qu'à la période “cholémique mais acholurique de l'ictère catharrhal 4 rthopigmentaire, aussi bien qu'à la phase chlolurique ët cholémique, le liquide céphalo-rachidien ne contient | bas de pigments biliaires. — MM. H. Sérégé et E. oulié ont reconnu que le foie droit et le foie gauche nt une vitesse de circulation du sang différente, upérieure pour le foie droit. Cela explique que le foie auche renferme plus de glycogène que le droit, car il S'en débarrasse moins rapidement. _ SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 17 Mars 1905. … M. A. Cotton présente à la Société un télescope, que absorbent bien plus vite l'hémolysine du sérum de | verre la signature de Foucault. Ce miroir présente, en effet, un intérêt particulier, le rapport entre le diamètre © ; 1 : et la distance focale ayant la valeur ,— : c'est la seule +,.) fois que Foucault a entrepris de surmonter les difli- cultés que l'on rencontre dans la construction d’un miroir aussi ouvert. Avant que l’on remette cet instru- ment à l'Observatoire de Paris, auquel la Société de Physique l’a elle-même donné, M. Cotton a été autorisé par le Conseil à refaire l'argenture du miroir, à étudier l'instrument et à le présenter à une séance de la Société. M. Cotton rappelle à ce propos les différents procédés employés pour l'étude et pour la retouche des miroirs et des surfaces optiques en général. — M. V. Henri: Lois d'action des diastases : 1° Toutes les diastases possèdent les propriétés générales sui- vantes : a) Chaque diastase agit sur des corps bien déterminés; dans beaucoup de cas, il a été possible d'établir une relation entre les propriétés stéréochi- miques des corps qui sont attaqués par une diastase donnée; b) Toutes les diastases forment des solutions colloïdales; c) 11 y a une disproportion énorme entre la quantité d’une diastase et la quantité de corps qui peut être transformée par une diastase donnée: ainsi, par exemple, on peut avec { milligramme d'invertine transformer 20 grammes de saccharose en un mélange de glucose et de lévulose: d) Les diastases ne s'affai- blissent pas pendant leur action; elles apparaissent donc, à ce point de vue, comme indestructibles. Ces propriétés générales montrent que les actions diasta- siques font partie du groupe des actions catalytiques produites par les colloïdes. Il y a donc intérêt à étudier en détail les lois d'action des réactions catalytiques produites par des colloïdes; cette étude a été entreprise par Bredig il y a déjà quatre ans; 2° Lorsqu'on étudie les actions diastasiques, on observe les caractères suivants : a) Les réactions diastasiques sont lentes; ce ne sont pas des réactions instantanées; il y a donc lieu d'étudier la courbe qui exprime la vitesse de ces réac- tions. L'auteur a montré que l'on trouve des courbes qui sont dans certains cas (invertine, maltase) plus rapides qu'une logarithmique simple; dans d'autres cas, au contraire, on trouve des courbes plus lentes (par exemple pour l’action de l'émulsine); b) La vitesse initiale d’une réaction diastasique dépend de la con- centration du corps à transformer; M. Victor Henri à établi, il y a deux ans, que cette relation est de la forme suivante : : ee na vitesse initiale = ———, 1 + ma dans laquelle » et m sont deux constantes et a la con- centration du corps sur lequel agit la diastase; c) Les produits d’une réaction diastasique ralentissent cette réaction; d) Un grand nombre de corps solubles agissent sur la vitesse d'action d'une diastase : certains l’accé- lèrent, d'autres la ralentissent; parmi ces corps, il en existe un certain nombre qui agissent à des doses extrêmement faibles : on les désigne par le nom de poisons; 3° Dans l'histoire de l'étude théorique des lois d'action des diastases on peut distinguer trois phases. a) Au début, on a comparé les actions diastasiques à des réactions chimiques se produisant dans un milieu homogène; ) Ensuite, on les a comparées à des actions catalytiques se produisant en milieu homogène; «) Enfin, on les rapproche maintenant des réactions catalytiques se produisant dans des milieux hétérogènes. C'est cette dernière question que l'auteur examine ; #° Il y a un an (36 janvier 1904), Nernst a publié quelques considéra- tions théoriques sur la vitesse des réactions chimiques se produisant dans des milieux hétérogènes. Lorsque la réaction a lieu seulement au contact de deux phases, par exemple l'attaque d’un métal par un acide, le processus total se décompose en trois parties : «, dif- fusion de l’un des corps vers la surface de séparation entre les deux phases; £, transformation s'accom- lui a légué M. de Romilly, et dont le miroir porte sur le : plissant à cet endroit; 7, diffusion au dehors des corps ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES qui apparaissent. Nernst suppose que, dans beaucoup de réactions, le processus 8 est très rapide, pour ainsi dire instantané; la vitesse de la réaction ne dépendra donc que de la vitesse de diffusion. Le problème de Cinétique chimique se trouve donc ainsi ramené à un problème physique de vitesse de diffusion. L'auteur montre, par deux exemples, que les réactions cata- lytiques produites par les colloïdes ne peuvent pas ètre considérées comme se ramenant à un simple processus de diffusion du corps réagissant vers la surface des granules colloidaux. Nous devons admettre l'existence d'un deuxième processus lent, par exemple admettre que la réaction au contact des deux phases ou dans l'intérieur de l’une d'elles (à l'intérieur des granules) est lente; 6° L'hypothèse à laquelle on est ainsi amené peut être exprimée mathématiquement. Soient, au moment {, x la concentration du corps qui se trans- forme au dehors, dans le liquide intergranulaire, y sa concentration au contact immédiat ou dans l’intérieur des granules, là où se fait la transformation. Si la réaction elle-même est monomoléculaire, on aura les deux relations suivantes : (1) == =IKS vitesse de la réaction elle-mème, Le dx : : RUE (2) RTS —K,(x— y), vitesse de la diffusion. [ En différentiant la deuxième équation et en substituant 1x y : 7 . les valeurs = et “*, on obtient l'équation : dt di d?x é LINGE PE me (KR) 7 PKKIx 0. Donc l'intégrale générale des équations (1) et (2) est x— Cest ee Mt Au début, pour {—0,-on a x—a, concentration initiale; done €, +c,—a. De plus, pour les diastases, la vitesse initiale est de la forme : 4 1 + ma ; donc, pour {= 0 : dx AE CORTE Et par conséquent, r r a Ke; + Kics — Tee La formule définitive qui exprime l'action des diastases est donc : — (Ks— A)e—Kt—(K — A) e— Kit]; Ra=rii dans cette formule, te 1 + ma On voit immédiatement que, pour K, très grand (dif- fusion très rapide), la formule précédente devient x—ae Xt; de même, pour K très grand (réaction ins- tantanée), on a x = ae-Kit, De plus, si nous admettons que K, est plus grand que K, lorsque K sera > À on aura une courbe plus lente que la logarithmique (c’est le cas de l’émulsine); si, au contraire, KA, la courbe sera plus rapide qu'une logarithmique (c'est le cas de l'invertine et de la maltase). M. Victor Henri montrera, dans une prochaine communication expérimentale, comment les différentes expériences peuvent être représentées par la formule précédente. On voit donc que la loi générale d’une réaction se produisant en milieu hétérogène a pour expression : x— ee, avec la restriction €, + €, — a. On se demande que signifie, dans le cas des diastases, l'expression de la vitesse initiale : >— Kt Cie CSC TER dt {+ ma? quelle est la représentation physique qui nous permet M d'interpréter cette expression ? Nous devons rapprocher les actions diastasiques des phénomènes d'absorption étudiés pour différents colloïdes par de nombreux auteurs; ces recherches montrent que tout corps soluble additionné à une solution colloïdale se répartit M entre les granules etle liquide intergranulaire ; lorsqu'on augmente la concentration du corps dehors, la concen- tration dans les granules augmente d'abord rapidement et ensuite de plus en plus lentement; la courbe d'ab- sorption obtenue en portant en abscisses les concen- trations dans le liquide intergranulaire et en ordonnées les concentrations dans les granules est identique à celle qui relie la vitesse initiale de l’action d'une dias- tase à la concentration du corps à transformer. On peut donc admettre que le corps transformé par la dias- tase se répartit entre les granules et le liquide inter- granulaire suivant la loi générale d'absorption des colloïdes. On verra comment cette hypothèse peut être vérifiée par des expériences dans lesquelles on étudie l'action de différents colloïdes sur la vitesse des réac- tions diastasiques. — M. Abraham présente à la So- ciété un modèle de supports pour appareils de phy- sique, qui a été combiné par M. C.-V. Boys et construit par la Scientific Instrument C°, de Cambridge. Ce sont des trépieds en fonte ou en bronze, ayant soit 722,5 de rayon et une hauteur de 2t%,5 ou de 7°%,5; soit 470,5 de rayon et une hauteur de 3°%,6 ou de 7,6. Des rai nures radiales Sont ménagées dans leurs faces supé- rieures, pour recevoir les vis calantes des appareils. On peut aussi visser un plateau sur ces trépieds. Pour obtenir un support de hauteur quelconque, il suffit de placer un certain nombre de trépieds les uns sur les autres. Grâce à l'emboîtement des pieds dans les rai- nures, la stabilité du support est extrèmement remar- quable. Le prix de revient de ces supports est insigni= fiant, une fois le modèle établi. Ils semblent pouvoir rendre de très réels services dans tous les laboratoires. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 10 Mars 1905. MM. L.-J. Simon et Chavanne ont entrepris l'étude du glyoxylate d'éthyle; ils entretiennent la Société des premiers résultats de leurs recherches. — M. F. March a présenté, au nom de M. A. Haller et en son nom personnel, les résultats de leur étude sur l’action des alcoolates de sodium sur la 6-méthyleyclohexanone, et montré qu'ils réagissent à 200-220°, en autoclave, à la fois comme réducteurs et substituants de cette cétone On obtient par ce nouveau procédé, et en une seule opération, des homologues et isomères du menthol, identiques à ceux que fournit la réduction des méthyl=Mk alcoyleyclohexanones synthétiques. Ils ont ainsi pré paré les méthyleyclohexanols propylés, isobutylés, iso= amylés en position 3 ou 4, leurs phényluréthanes ou leurs éthers acétiques. La réaction qui leur donne naissance peut être représentée par l'équation : 2 C6H#20 + R.CHEONa + R.CH?OH CH.CHS ca Ce = | + CSHMO + R.COONa. cu Jenon CH.CHER La méthyleyelohexanone échappe en partie à l'alcoy lation par suite de sa transformation en alcool corress pondant, que lon à caractérisé par sa phényluréthane (EF. 115-1169), non encore préparée. L'alcoylation n& s'arrête d'ailleurs pas à une monosubstitution : avec le benzylate de sodium, on peut isoler à la fois l'alcool monobenzylé, qui fond à 101°,5-102, et le dérivé diben= zylé, qui bout à 257-258° sous 21 millimètres. Le pres mier de ces composés s'obtient également par l'actio de l’aldéhyde benzoïque sur le B-méthyleyclohexano sodé et se trouve identique au composé obtenu pal ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 349 M. O. Wallach dans la réduction de la benzylidènemé- thylcyclohéxanone (F. 97°). Les auteurs se proposent d'étendre cette réaction à d'autres cétones. — M. L. Bouveault entretient la Société de ses recherches sur la réduction des éthers-sels par le sodium. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 26 Janvier 1905 (suite). M. G. W. Walker étudie l'impulsion produite sur les ions par les perturbations électromagneétiques. montre que la propagation de perturbations polarisées planes à travers une portion de l’espace contenant des ions sup- pose une impulsion des ions positifs et négatifs qui peuvent se trouver dans ou contre la direction de pro- pagation suivant les circonstances initiales. Comme le mouvement suivant l'axe des z ne dépend pas de l’orien- tation du plan de polarisation, on arrive à des résultats analogues pour les perturbations non polarisées. Le rétablissement des vitesses initiales par rapport à l'ori- gine, après le passage de ce qu'on peut appeler une pulsation complète, montre qu'aucune énergie (par rap- port à l'origine) n'est soustraite d’une facon perma- nente par les ions ; quoique, durant une partie de la pulsation, de l'énergie soit soustraite, elle est exacte- ment restituée pendant l’autre partie. Par contre, si l’on tient compte de la radiation de l'ion, ce n’est plus le cas. De l'énergie est soustraite d'une façon définitive des pulsations, et elle est rayonnée par l'ion. Dans ce cas, le passage d'une pulsation complète ne rétablit les vitesses originales que si l'énergie absorbée par les ions est rayonnée avant la fin du passage de la pulsation. Ce n'est pas le cas, en général. Donc, si l’on tient compte de la radiation, il y a toujours une accélération des ions. L'auteur applique ces résultats à la théorie des substances radio-actives, qu'il considère comme la source de per- turbations électro-magnétiques qui ionisent les gaz dans leur voisinage immédiat; il se forme alors un flux d'ions positifs et négatifs et probablement aussi de molécules neutres, à la fois émanant de la substance et y arrivant. — MM. L. Chapman et C. H. Burgess : Note sur la cause de la période d'induction chimique dans lunion de l'hydrogène et du chlore. Les auteurs ont démontré que la période d'induction, dans l'union de l'hydrogène et du chlore exposés à la lumière, qui a été attribuée par divers auteurs soit à un changement dans la condition physique du chlore ou du mélange d'hydrogène et de chlore, soit à une formation primaire … d’un composé intermédiaire instable, est due à la pré- sence d'impuretés. Les impuretés sont celles qui réa- uissent avec le chlore, telles que l'ammoniaque et anhydride sulfureux. A la température ordinaire, dans l'obscurité, la réaction entre ces substances et le chlore n'est pas complète. À la lumière ou par l'élévation de la température, ces impuretés peuvent être entière- ment éliminées. Le temps nécessaire pour leur éloi- gnement est la période d'induction, pendant laquelle le chlore est rendu incapable de combinaison avec l'hy- … drogène. On a, de plus, supposé que, si on laisse repo- ser pendant quelque temps dans l'obscurité un mélange induit d'hydrogène et de chlore, il faut l'induire à nou- “eau avant que la combinaison se produise à son couxs — normal. Ce n'est pas le cas si l'on substitue un actino- pute de quartz à celui de verre. — Sir W. Crookes a étudié l'effet des radiations solaires et d'autres radia- ions sur la couleur du verre. On sait que beaucoup dé verres incolores contiennent du manganèse, qui y à - été introduit pour neutraliser la couleur provenant de “la présence du fer. Ces verres, exposés pendant long- temps à la lumière solaire, prennent peu à peu une . coloration violette. L'auteur a reconnu que la même coloration se produit sous l'influence des rayons du radium. Il est possible que le rayonnement solaire con- tienne des radiations qui se rapprochent de celles du radium. — M. F. Fox : Sur le percement du tunnel du pion et la distribution des températures rencon- es. SC AE CRUE SRE CRUE © pe SR dre: A4 # « L4 , L | Séance du 2 Février 1905. M. C. Chree éludie au point de vue mathématique la méthode récemment indiquée par M. A. Mallock pour déterminer le coefficient d’élasticité de volume des métaux par l'observation directe de l'extension d'un cylindre droit creux sous une pression interne uni- forme. 11 montre que les résultats obtenus par M. Mal- lock ne peuvent ètre exacts que dans certaines limites indiquées. — Lord Rayleigh : Sur la compressibilité des gaz entre une atmosphère et une demi-atmosphère de pression. Ce Mémoire contient un compte rendu détaillé des observations mentionnées dans la notice préliminaire de février 1904. Des résultats sont main- tenant donnés pour l'air, l'anhydride carbonique et l'oxyde nitreux. La table suivante indique les valeurs de B pour les divers gaz à des températures spécifiées, B étant le quotient de la valeur de pv à une demi- atmosphère par la valeur-de pv à une atmosphère entière : B TEMPÉRATURE (HE 2 1 6 SON EME ASE PCA ATITIER 1102 Hydrogène Nec A0 309 10,7 ZOPE RE UUDAS 14,9 Oxyde de carbone. . . . 1,00026 13,8 JAN bo EN ANS 06 von ou ALNUIRES 11,4 Anhydride carbonique. . 1,00279 15,0 Oxydenitreux "ee 00327 11,0 Au moyen d'une formule donnée par D. Berthelot, les compressibilités à 0°C. sont déterminées, et appli- quées pour déduire le rapport des densités, telles qu'on les observerait à 0°C. sous de très basses pressions. D'après la loi d’Avogadro, ce sont les poids molécu- laires relatifs. D'après les densités de l'azote et de l'oxy- gène, on obtient Az—14,008, si O—16; et d’après celles de l'oxygène et de l’oxyde nitreux, on trouve que Az —13,998. Le premier nombre est probablement le plus exact. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 10 Mars 1905. M. A. Campbeïl décrit deux méthodes par lesquelles les lectures d'une boîte de résistances reliée avec un thermomètre à résistance de platine donnent directe- ment la température sans l'emploi d'aucune formule ou table. Dans la première méthode, la résistance variable du bras de mesure du pont de Wheatstone est shuntée avec une résistance appropriée. Quand le shunt a là valeur propre, la variation de résistance dans le bras de mesure nécessaire pour établir l'équilibre est propor- tionnelle à la température du platine avec une assez grande exactitude jusqu'à 1.000 C. Dans la seconde, le bras de mesure est une boucle de résistance fermée, une extrémité du bras étant un point fixe de la boucle, tandis que l’autre est une glissière qui se déplace le long de la boucle. La résistance totale du bras est reliée par une loi parabolique simple avec l'excès X de la lecture de la glissière sur la lecture du 0. L'auteur montre comment on peut calculer les valeurs de la résistance de la boucle et du zéro de facon à rendre cette formule parabolique identique à celle qui donne la variation derésistance en fonction de la température d'un spécimen quelconque de platine. Quand les résistances ont ces valeurs, les lectures X sont proportionnelles à la température du platine. — M. Chree a étudié au point de vue mathématique le problème des tensions qui se manifestent dans la croûte terrestre avant el après le percement d’un puits. Si l'on considère la Terre élastique formée d’un noyau incompressible et d'une croûte compressible dont l'épaisseur n’est qu'une faible fraction du rayon terrestre (hypothèse la plus vraisemblable), on trouve que la pression horizontale à laquelle elle est soumise s'évanouit à la surface et est, en première approximation, fonction linéaire de la profondeur, comme la pression verticale. Dans cette hypothèse, une petite portion de matière, à quelques ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES kilomètres de profondeur, avant le percement du puits, est analogue à un cylindre solide, exposé à des pres- sions normales différentes sur ses extrémités planes et sa surface courbe. La pression verticale à une profon- deur donnée est probablement un peu moindre que la pression qui existerait à la même profondeur dans un liquide de même densité moyenne que la croûte super- licielle ; la pression horizontale peut être aussi grande que la pression verticale, mais elle est probablement moindre, à moins que la matière ne se comporte comme un solide incompressible. Après le percement du puits, la matière entourant immédiatement les parois est semblable à un cylindre creux dont la paroi interne est libre de tensions, tandis que des pressions normales agissent sur sa surface extérieure et ses extrémités planes. La matière située immédiatement au-dessous du trou est dans la position d’un bouchon dans une bouteille de bière, Il y a tendance à une rup- ture des parois ou à un flux de matière. — M.J. Mor- row étudie les vibrations latérales des barreaux de section uniforme ou variable. L'auteur montre qu'en supposant un type de vibration en rapport avec les conditions observées aux extrémités du barreau, la période peut être obtenue approximativement d'une facon simple, et que, par un procédé d'approximation continue, la période et le lype de vibration peuvent être déterminés dans un grand nombre de cas. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 2 Mars 1905. MM. F. B. Power et F. Tutin ont préparé à l’état pur les sels de l'acide glycérylphosphorique C#H*(OH. O.PO(OH}; les différences de composition et de pro- priétés attribuées à ces sels par divers auteurs sont dues à la présence de sels du di-éther en proportions variables. M. A. W. Stewart, pour expliquer la transmutation des isomères géométriques, admet comme phase de la réaction la formation et la rupture d’un composé tétra- méthylénique. Dans le cas des acides maléique et fuma- rique, le composé intermédiaire serait un acide tétra- méthylène-1 : 2:3:4-{étracarboxylique, dans lequel les groupes carboxyliques attachés aux atomes de carbone 1 :2 se trouvent sur le côté de l'anneau opposé à celui où se trouvent les groupes attachés aux atomes 3 : 4. Un anneau tétraméthylénique de ce genre peut se scin- der de deux manières : soit par rupture des liaisons entre 1 et 2 et 3 et 4, soit par rupture entre { et 4 et 3 et 2; dans le premier cas, il: se produit de l'acide fumarique ; dans le second, l'acide maléique est régé- néré. — MM. J. $S. Hills et W. P. Wynne ont constaté que les propriétés purgatives du Linum cathartieum sont dues à un glucoside incristallisable, qui, par hydro- lyse, fournit du glucose etde la Zinine, C**H?0?, F.203e, insoluble dans l’eau. Elle contient 4 groupes méthoxy- liques; par oxydation avec l'acide nitrique ou le per- manganate, elle donne de l'acide oxalique. — MM. J. J. Dobbie etCh. K. Tinkler ont reconnu que les spectres d'absorption du méthiodure de phénylacridine et de l'hydrate qui en dérive par l’action des alcalis diffèrent considérablement, tandis que celui de la dernière substance se rapproche du spectre de la dihydrophé- nylacridine. Cette ressemblance est inexplicable si l'on ne considère pas l'hydrate comme un carbinol ayant les mêmes relations avec la dihydrophénylacridine que la cotarnine avec l'hydrocotarnine. — Les mêmes au- teurs ont trouvé que les formes stables et instables des diazosulfonates isomères el des diazocyanures isomères dérivés de la p-anisidine et de la p-chloraniline donnent des spectres identiques ou très voisins. Ce résultat con- firme l’hypothèse de Hantzsch, d’après laquelle ces subs- tances sont des modifications syn et anti. — M. J.C. Brown a déterminé à nouveau avec une grande exac- litude les chaleurs latentes d'évaporation du benzène et de ses homologues. — MM. W. H. Perkin jun. et S. S. Pickles, en réduisant l'acide isophtalique par l'amalgame de sodium à 45°, ont obtenu deux acides tétrahydroisophtaliques, l'acide A, KF. cis-A5, F. 1659, Bouillis avec KOH concentrée, ils don- nent l'acide A*, F. 2440: l'acide cis, chauffé avec HCI à 1709, fournit l'acide trans-A5, F, 2250-2270, -- M. R. E. Doran à étudié l'influence de la température sur la réaction entre le thiocyanate d’acétyle et certaines bases. Avec l’aniline, il se produit à froid un thiocya- nate; à chaud, une thiocarbimide. — M. Th.S. Patter- son à déterminé la rotation du tartrate d'éthyle en solution dans le chloroforme; ce solvant exerce une diminution marquée sur le pouvoir rotatoire. —M.A.W.M Stewart a étudié l'addition du sulfite acide de sodium aux composés cétoniques. Comparant les résultats ob= tenus avec l’acétone, l'acétoacétate d'éthyle et lacé- tone-dicarboxylate diéthylique, on trouve que le rem- placement d’un hydrogène par un carboxyle augmente la vitesse d’addition, et que la substitution d'un 2° car- boxyle à un autre hydrogène l’accélère encore plus. — MM. R.S. Morrell et A. E. Bellars ont essayé de recon- naître la disparition des différents sucres, durant leur oxydation par H°0? en présence de sulfate ferreux, en observant la diminution de l'angle de rotation, concur- remment avec la variation du pouvoir réducteur et de l'acidité. On constate que, pour des additions succes- sives de H°0? jusqu'à 1 mol.-gr. pour le même poids d'hydrate de carbone, la diminution de l'angle est proportionnelle à la quantité ajoutée et au sucre oxydé. — MM.J. B. Cohen et H. G. Bennett out étudié Ja chlo- ruration des chloronitrobenzènes isomères. : SOCIÉTÉ ANGLAISE .DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Séance du 6 Février 1905. M. W.-P. Dreaper expose une nouvelle théorie de la teinture, dans laquelle les conditions de la teinture sont les suivantes : 1° Un état de solution du colorant ou du mordant entre certaines limites d’agrégation; 2° Un état de la fibre correspondant à ce degré d’agré- gation; 30 Une « localisation » effective du colorant, avec concentration subséquente du colorant dans la substance de la fibre ; 4° Une dé-solution, due à l'attrac- tion secondaire entre la substance de la fibre et le colorant, ou « effet de concentration ». Dans des cas rares, l'attraction chimique peut jouer un rôle dans le processus à ce stade. 11 n'y a pas de preuves en faveur d'une solution solide dans la teinture. SECTION DE NEWCASTLE Séance du 16 Février 1905. MM. H.-S. Pattinson et G..-C. Redpath ont étudié les diverses méthodes pour séparer et déterminer le zinc dans les blendes et d'autres produits naturels ou artificiels. En général, pour la rapidité et la conve- nance, ils préfèrent la méthode de Schulz et Low, qui. peut, en outre, être avantageusement employée pour la séparation du zinc dans l'analyse des minerais de fer. Des deux méthodes au sulfure, celle de von Berg doit être préférée, à cause de la plus grande densité du précipité de sulfure, qui se lave plus rapidement quen dans la méthode de Lewis. SECTION DE NEW-YORK Séance du 16 Décembre 1904. M. H. Lieber montre que, pour obtenir les effets radio-actifs maxima avec une quantité donnée de radium, il est essentiel que les parois du contenant n'interceptent ni les rayons &, ni l'émanation, et que le radium soit étendu à l'état de couche infiniment mince. L'auteur propose l'emploi d'enduits de radium, quil obtient de la façon suivante : Le radium est dissous, dans un solvant approprié, et dans cette solution ON trempe un support convenable; on le retire avec une certaine quantité de solution de radium qui y adhères 168°, et l'acide M ss ? Î $ | : $ î ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Le solvant s'évapore rapidement et laisse la substance couverte d’une pellicule très mince de radium. On peut l'employer sous cette forme, et on obtient des effets beaucoup plus énergiques qu'avec le radium enfermé dans une enceinte, mème en feuille d'aluminium exces- sivement mince. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 12 Janvier 1905. M. E. Warburg présente un Mémoire de M. U. Bebn, privat-docent à l'Université de Berlin, sur le rapport de la calorie moyenne (de Bunsen) à la calorie de 150 C. On connaît la grande importance qu'aurait l'unification » internationale de l’étalon de chaleur. Alors que l'erga été adopté comme unité théorique dès 1896 par le Committee on Electrical Standards (Comité des Etalons électriques), l'étalon 4,2 Joule? à été proposé comme unité pratique. Cette unité, tout en s'approchant de la calorie de 7°, devrait être établie rigoureusement dans ses rapports avec la chaleur spécifique de l'eau. Or, on a formulé dans ces dernières années des objections contre le choix de cette unité pratique, et beaucoup de savants lui préfèrent actuellement un étalon direc- tement basé sur la capacité calorifique de l'eau. C'est afin de raccorder entre elles les différentes calories qu'on pourrait adopter dans cet ordre d'idées que . l'auteur établit le rapport de la calorie moyenne (de Bunsen) à celle de 15°, en se servant du calorimètre à glace. Il s'agissait de déterminer la quantité de mer- cure pénétrant dans le calorimètre par suite de l'intro- duction d'une calorie de 15°. C'est à cet effet qu'on a évalué les quantités de mercure pénétrant dans le calorimètre à glace, lorsqu'on y introduit : 4° Un gramme d’eau à 10°; 2° Un gramme d’eau à 20°. Ces quantités permettent de trouver facilement la quantité correspondant à la calorie de 15°. Comme résultat de ces expériences, on trouve que le rapport des deux calories est de 0,9997. — M. J. Schur présente une Note sur une classe d’ensembles finis de substitutions linéaires. L'auteur y détermine le moindre multiple commun des ordres de tous les ensembles finis de substitutions linéaires à n variables dont les traces appartiennent à un corps numérique algébrique donné. 0 d'mms: nié à Den à tot 4 | : | Séance du 19 Janvier 1905. M. Klein présente un Mémoire sur les goniomètres- théodolites. Après avoir discuté la conversion du poly- mètre à cristaux en goniomètre-théodolithe, l'auteur expose les avantages que présente l'emploi d'une modification de ce dernier pour la mensuration des angles et pour les calculs de cristaux basés là-dessus. — M. Stumpf vient d'étudier les fonctions et phéno- mènes psychiques. La décomposition des fonctions psychiques en phénomènes s'est trouvée impraticable dans tous les cas. La différence établie est parmi les plus rigoureuses que nous connaissions. L'expérience rend cependant probable aussi une variabilité récipro- quement indépendante des fonctions et des phéno- mènes dans de larges limites. L'étude des phénomènes en eux-mêmes et de leurs lois immanentes, loin d'appartenir à la physique ou aux sciences philoso- phiques, constituerait un groupe de recherches indé- pendantes et fort étendues. Séance du 2 Février 1905. é M. Môbius présente un Mémoire sur les caractères esthétiques des insectes, mémoire où il considère les formes et les colorations de ces animaux ‘au point de vue de l'esthétique. On sait que les insectes dépassent - toutes les autres classes d'animaux par la variété infinie … de leurs formes, colorations et modes de mouvement : ils courent, sautent, grimpent, volent, nagent, percent, de leurs couleurs embrasse toutes celles que la Nature roduit sur les autres corps. Mais l'impression esthé- tique qu'ils produisent dépend encore de leur grandeur, — creusent ou piquent, suivant les cas, et la multiplicité, et tout particulièrement de la grandeur relative des différentes parties de leur corps. Les insectes multico- lores ou d’une coloration violente attirent le regard plus fortement que ceux d'une couleur simple ou double, et la conception de l'unité esthétique de l'individu eu devient plus difficile, l'œilerrant d’une couleur à l’autre. Plus les dessins colorés s’harmonisent avec la forme du corps et plus ils seront agréables à l'œil. Les stries longitudinales sont plus belles que les transversales ou que les taches clairsemées. Les bords sombres plaisent à l'œil plus que les clairs, qui distraient le regard du milieu de l'ensemble. Les ailes de papillon à bords sombres et dont la couleur va en s'éclaircissant vers le milieu du corps se prêtent d'une facon très agréable à la perception de l'unité esthétique de l'ensemble. — M. W. Ostwald a fait des études iconoscopiques dans le but de trouver des réactions colorimétriques per- mettant de déterminer, de concert avec les recherches microscopiques, la technique de la peinture des tableaux. — M. Konigsberger présente un Mémoire sur les équations aux dérivées partielles de la Mécanique géné- rale résultant de la variation des intégrales multiples. L'auteur y développe les conditions explicites de l'existence d’un potentiel cinématique d'ordre supé- rieur à un nombre quelconque de variables dépen- dantes et indépendantes, et cela sous une forme plus simple que ses devanciers. A l'aide des résultats ainsi obtenus, il étudie la question de savoir lesquelles des équations bien connues aux dérivées partielles em- ployées dans la Physique mathématique doivent leur origine au principe de Hamilton, étendu à un nombre quelconque de variables, admettant par conséquent une interprétation mécanique dans le sens des prin- cipes mécaniques étendus. En se basant sur ses der- nières publications, l'auteur traite en même temps le principe d'énergie pour les cas précités. — M. Kohl- rausch présente une étude expérimentale de MM. L. Holborn et L. Austin, à Charlottenburg, sur la chaleur spécifique des gaz aux températures élevées. Les valeurs trouvées par les auteurs dans la région de 20° à 400° concordent pour l'air et l'azote avec les chiffres trouvés par Regnault pour un intervalle plus petit, alors que, dans le cas de l'oxygène, les auteurs trouvent une chaleur spécifique plus grande. La mé- thode employée consistait à chauffer les gaz dans un tube en nickel de 8 millimètres de diamètre, rempli de copeaux métalliques et maintenu à une température constante par un courant électrique. Le calorimètre en argent, où le gaz transmettait sa chaleur au tube rempli de sciure métallique, renfermait un demi- litre d’eau et était entouré d'une enveloppe d'eau dont la température se maintenait constante à 1/10 de degré près. Les températures du gaz avant son entrée dans le calorimètre étaient mesurées à l'aide d'une pile thermique. ALFRED (GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 3 Février 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. F. Mertens : Sur les équations cycliques. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. O. Tumlirz : Les états stables et labiles des liquides et des vapeurs. — M. W. Pscheidl : Calcul d'une nouvelle lentille aplanétique. — M. L. Linsbauer décrit deux appareils qu'il a construits pour déterminer l'intensité lumineuse à diverses profondeurs dans l’eau. Le premier, qui sert pour les grandes profondeurs, est basé sur l'exposition, pendant un temps variable, d’une préparation photo- graphique à une profondeur déterminée; il _est déclanché par un courant électrique. Le second, pour les petites profondeurs, est analogue,i mais il est déclanché par une corde. — M. K. Hopfgartner établit le titre des solutions de permanganate en dis- solvant des poids connus d'argent dans des solutions acidifiées d’alun de fer; il se forme une quantité A no ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de sel ferreux équivalente à celle d'argent, et celui-ci est titré par le permanganate, dont la teneur se trouve ainsi établie. — M. L. Langstein : Les hydrates de carbone de la globuline du sang (HI). — M. P.-Th. Muller a étudié les modifications chimiques de la moelle osseuse au cours des processus d’immunisation. L'augmentation des albuminoïdes dans le sang chez les animaux infectés provient d’une plus grande produc- tion de ces derniers dans la moelle osseuse. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H.-H. Schinz commu- nique ses recherches sur la flore du Zambèze inférieur. — M. G. von Bukowski a étudié les dépôts tertiaires de Davas en Asie mineure. D’après la faune fossile recueillie, ils paraissent appartenir à l'étage aquitanien. Séance du 9 Février 1905. SCIENCES PHYSIQUES. — M. Eûü. Mazelle a déterminé la dispersion de l'électricité atmosphérique à Trieste chaque jour depuis le {°° mars 1902 jusqu'au 30 no- vembre 1903. La moyenne de la dispersion montre une période annuelle, double, aussi bien pour la dispersion positive que pour la négative; les maxima tombent en avril et en septembre, les minima en février et juin. La dispersion négative est plus forte que la positive; le quotient des valeurs mensuelles de ces deux disper- sions passe par un maximum en août et par un minimum en février. Les deux dispersions augmentent avec la vitesse du vent; elles diminuent quand l’humi- dité relative augmente. — M. R. Lichtenstern a obtenu, par l'action du carbonate de potasse sur un mélange de emails de et d’'isopropylacétaldéhyde, un aldol (CH*)CH.C(CH20H}.CHO, dont l'oxine fond à 930. Par es de l’aldol en solution alcoolique avec l’amalgame d’Al, on obtient un alcool trivalent çEH°#.CH.C(CH?OH)", Eb. 156-158° sous 15 millimètres. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 25 Février 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P.-H. Schoute : Les systèmes non linéaires de sphères en contact. Configu- ration des centres de similitude de » 1 espaces sphé- riques Sn (M, ri) à centre Miet rayon ri,(i—1,2,...u—1), donnés ‘arbitrairement en E,. La construction des espaces sphériques S;(M,r) touchant 1 +1 espaces sphériques donnés S, (Mi, r;). Réduction du cas général du problème de la recherche du système simplement infini des espaces SRoen iques S, (M, r) touchant » espaces sphériques donnés Sa (Mir), (11, 2, ...n), au cas par- ticulier où les centres des » espaces sphériques se trouvent dans un E,_2:. Lessystèmes Sz et Si_x_1 d'es- paces sphériques et d'infinités 4rk et n — k — 4rte Jouis- sant dé la propriété que chaque espace sphérique de S; touche chaque espace sphérique de Si_x-1. — M. J. de Vries : Sur un complexe tétraëédral parti- culier : Etude analytique du complexe tétraédral des normales du système : x : FO _— d'ellipsoides homothétiques et concentriques, à l’aide de coordonnées de droite. — Ensuite M. J. de Vries présente encore : Sur un groupe de complexes à cônes de complexes rationnels. Cette communication est en rapport intime avec une étude antérieure (Æev. génér. des Se.,t. XIV, p.795). L'auteur s s'imagine deux plans 6, % et dans le premier un faisceau (s) de rayons à sommet sS, dans le second la série ({) des tangentes d’une courbe rationnelle +, de classe »; il suppose une correspon- dance projective (ou homographique) entre les Re s du faisceau (s) et les tangentes £ de la série (t). Les transversales, communes de rayons homologues s, t engendrent le complexe en question. Le cône de complexe de l'ordre n1 et de la classe 27 admet une arête de multiplicité 7. Le complexe admet un point principal de multiplicité », le point S, et n +1 points principaux simples. La surface de complexe d'une droite est de l’ordre 4», etc. 2° SGIENGES PHYSIQUES. — M. J. P. van der Stok pré- sente : 49 L’ « Annuaire de l'Institut royal néerlandais de Météorologie », année 1903, A. Météorologie ; B. Magnétisme terrestre ; 20 Etudes des phénomènes de marée sur les côtes néerlandaises (résultats d'observa- tions faites à bord des bateaux-phares néerlandais). — M. A. F. Holleman présente la thèse de M. H. Ver- meulen : « Plaatsbepaling der isomere dinitroani- solen ». Etude sur la structure des dimitroanisols isomériques. 3° SGIENCES NATURELLES. — M. M. W. Beyerinck pré- sente : Une sarcine de fermentation anaërobie obliga- toire. Si l'on verse sur du terreau de jardin une solu- tion de peptone sucrée, acidiliée avec de l'acide phosphorique au titre de 8 c. c. normal par 100 c. ce. de liquide nutritif, et que l’on remplisse de ce mélange un flacon tout à fait fermé, afin que l'air soit exclu, une forte fermentation se développe à une température de 35 à 40° C., après douze heures. Pour le sucre, on peut se servir de glucose, de maltose ou de saccharose, mais non pas de mannite ou de lactose. On trouve que cette fermentation est causée par une espèce de sarcine à larges cellules, mesurant de 3 à 4 p. L’exclusion com- plète de l'air empêche le développement du ferment alcoolique, et le haut titre d'acide celui des ferments lactique et butyrique. En inoculant une goutte d'une fermentation en train de nouveau dans le même liquide nutritif privé d'air, la fermentation commence déjà après quelques heures, tandis qu'au fond du flacon se forme un dépôt épais, consistant tout à fait ou en ma- jeure partie en sarcines, mais qui, sous certaines con- ditions, peut contenir aussi des ferments lactiques. Si l'acidité est assez haute, on réussit, après deux ou trois inoculations, à obtenir une culture pure de sarcines. Pour être sûr du succès des expériences de réinocula- tion, il faut qu'on éloigne l'air du liquide par ébullition et qu'on fasse l’inoculation avant que la fermentation commence à ralentir. Pourtant, après quelques inocu- lations, la faculté de fermenter semble décroitre en tout cas, et la sarcine meurt. Bien que la sarcine soit une anaérobie obligatoire, qui ne croit pas du tout à la pression atmosphérique ordinaire, on peut la cultiver dans des conditions pseudo-aérobies, c'est-à-dire dans des flacons aérés, pourvu qu'on prenne une quantité abondante de terreau. Le terreau lui-même absorbe un tel volume d'oxygène que la sarcine qui, en réalité, est micro-aérophile, peut consumer le reste. L’acide phosphorique peut être remplacé par l'acide lactique et même par les acides chlorhydrique et nitrique; mais ceux-ci sont moins recoinmandables. La sarcine crois- sant très rapidement dans la profondeur de tubes rem- plis d'agar ou de moût, il est facile d'en obtenir des colonies parfaitement pures. Quand on transporte une colonie ainsi obtenue dans du moût non acidifié, la fermentation est déjà manifeste après une heure. Après vingt-quatre Re la quantité de gaz produit par un volume de 50 ec. c. de moût, à la concentration de 10°/, d'extrait, est ra à 150 c. c.; il est com- posé de 75 °/0 d'acide carbonique et de 25 °/o d'hydro- M gène. Dans cette expérience, l'acidité monte jusqu'à M 6 c. c. normal pour 100 c. c., par un acide provenant, de la sarcjne elle-même. Beaucoup moins forte que dans du moût, la fermentation se déclare dans du bouillon à, glucose ou dans de l’eau de levure à maltose, tandis que “dans du bouillon à saccharose elle cesse déjà après quelques heures. Si les expériences se font avec des cultures pures, l'addition d'acide affaiblit non seu- lement la force végétative de la sarcine, mais encore sa | ? fonction de ferment. P. H. ScnouTe. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. : Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, {, rue Cassette. . N°8 30 AVRIL 1905 Revue générale Sciences pures el appliquées 4 . 16° ANNÉE | DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et ia Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Génie civil Les turbines à gaz. — Après le succès obtenu par différents systèmes de turbines à vapeur dans bien des domaines qui, autrefois, étaient uniquement réser- vés à la machine à piston, il fallait s'attendre à l'ap- parition d’un nouveau type de moteur. On pouvait essayer, en effet, de combiner les avantages de la turbine, — simplicité de construction, dimensions ré- duites et facilité de surveillance, — avec celui d'une consommation réduite, caractéristique du moteur à gaz, autre rival de la machine à vapeur classique : en un mot, de construire une machine à gaz basée sur le principe même de la turbine à vapeur, c'est-à-dire une turbine à gaz. Construite sous des dimensions limitées, même pour des rendements considérables, une machine pareille serait d’un coût d'établissement peu élevé. Sa surveillance, grâce au petit nombre de parties rota- loires, serait très simple, et l'acquisition du terrain oc- cupé par elle serait hautement facilitée par son faible encombrement. Tels sont les principes que M. Riedler, professeur à l'Ecole Polytechnique de Charlottenbourg, vient d'ex- poser à la dernière réunion annuelle de l'Association des Ingénieurs Allemands. Suivant l'opinion de ce sa- vant, la turbine à gaz serait, en effet, le moteur de l'avenir, destiné à dépasser et la machine à vapeur et le moteur à gaz modernes. L'idée d’une turbine à gaz -est, d’ailleurs, loin d'ètre neuve: c’est M. Redtenba- cher qui, dans son Traité sur la machine calorique, appela dès 14853 l'attention sur le fait que ce type de machine serait l'idéal parmi les moteurs à air chauffé, bien que la nécessité de vitesses énormes le conduisit à penser que la réalisation pratique de son idée serait impossible. Or, nos méthodes de construction méca- nique ont été grandement perfectionnées depuis lors: en même temps, la construction des turbines à vapeur modernes à donné le moyen de réduire les vitesses à des limites convenables grâce à une division de la chute de pression. - _ Une turbine à gaz, inaginée par le D' F. Stolze, de Berlin-Charlottenbourg, a été présentée en 4873 à l'Office Prussien des Brevets; mais, en raison de cir- constances toutes particulières, le brevet sollicité n'a REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. : = été délivré qu'en 1897. Cette turbine, que la Gasturbi- nen-(esellschaft Stolze s'est chargée de construire. éveille en ce moment une certaine attention parmi les ingénieurs. Un grand moteur, d'un rendement utile de 200 che- vaux, est en cours de construction à Berlin; voici la description succincte de cette machine : Sur un axe commun sont montés deux systèmes de turbines de construction différente; l'un de ces systèmes sert de compresseur d'air, tandis que l’autre imprime à l’axe un mouvement rotatoire sous l’action de l'air chauffé. L'un et l’autre consistent en plusieurs séries de palettes fixes attachées à l'enveloppe de là machine et de palettes mobiles, d’une construction analogue, montées sur un cône rotatoire tournant avec l'arbre de la turbine. Or, l’un de ces systèmes de pa- lettes aspire de l'air frais pour le comprimer à une pression donnée, et le chasser à travers un réchauffeur chauffé par les gaz d'échappement; la plus grande por- tion de cet air entre ensuite dans un compartiment recouvert d'une matière incombustible, alors que le reste est amené au-dessous de la grille d'un générateur où il gazéifie un combustible approprié. Le gaz ainsi formé pénètre dans le compartiment précité où, étant brülé par l'air comprimé, il se transforme en acide car- bonique et en vapeur, tout en développant une grande quantité de chaleur; ces gaz entrent ensuite dans le second système de turbines, où ils fournissent du tra- vail utile par leur expansion à travers les différents degrés. Ce processus est, on le voit, analogue au cycle caractéristique de toutes les machines à combustion interne, leque; consiste en une aspiration d'air suivie de la compression du mélange, de sa combustion, de l'expansion et de l'échappement des gaz. Il est vrai que, dans la plupart des moteurs à explosion construits actuellement, le mélange a lieu avant la compression, et la combustion se produit sous des pressions crois- santes. Le cycle de la turbine à gaz ressemble surtout à celui du moteur Diesel. Le rendement de la turbine peut, sans doute, être porté au delà de celui de tous les types de moteurs existants. Le cycle de Carnot y est, par exemple, réalisé d'une façon plus approchée que dans n'importe quel autre type de moteur. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE nl Il va sans dire qu'au lieu de gaz de générateur, toute autre espèce de gaz peut être employée, aussi bien que l'air carburé ou les vapeurs de benzine, d'alcool ou de pétrole. Relevons, en passant, la grande importance pratique qu'aurait cette machine pour la construction des automobiles, où l'on ne possédait jusqu'ici aucun autre moteur à marche continue que les électromo- teurs à accumulateurs, qui présentent tant d'inconvé- nients. A. Gradenwitz. $ 2. — Physique La phosphorescence des sulfures alea- lino-terreux. — On sait, depuis les travaux de Becquerel, que la couleur de phosphorescence d'un sulfure varie avec son origine, et, pour une même préparation, change souvent avec le temps et la tem- pérature. Le magistral Mémoire que MM. Lenard et Klatt viennent de consacrer à cette question’, et qui clôture une longue série de recherches ?, donne l’expli- cation de l'extraordinaire complication du phénomène. La phosphorescence appartient seulement aux pré- parations qui contiennent, à côté du sulfure alcalino- terreux, des traces de certains métaux actifs (cuivre, plomb, argent, zinc, manganèse, nickel, bismuth, an- timoine) et une substance étrangère ou fondant (telle que le sulfate de sodium, le fluorure de calcium, etc.), dont le rôle est vraisemblablement de dissoudre le sulfure et le métal actif de manière à permettre l'union intime, dans un même groufement, des atomes du métal alcalino-terreux, du métal actif et du soufre, éléments essentiels du phénomène. En effet, un sulfure pur, ou simplement additionné de métal actif, n’a qu'une phosphorescence très fugace, très faible, sans couleur définissable, et attribuable à l'existence accidentelle et inévitable de traces infimes de métal dans le premier cas, de fondant dans le second, car l'addition du fon- dant au sulfure pur exalte la phosphorescence dans d'énormes proportions, et lui donne un caractère nette- ment défini, le caractère correspondant à l'un des métaux actifs. L'étude méthodique d'un nombre con- sidérable de phosphores purs, c'est-à-dire de prépa- rations contenant un seul sulfure et un seul métal actif à côté de fondants variés, a donné les résultats suivants : L'émission phosphorescente se compose toujours de bandes séparées, dont chacune à une position fixe dans le spectre. Chacune de ces bandes à une individualité propre, et une indépendance absolue vis-à-vis des autres, à tous les points de vue. Elle caractérise un .métal donné dans un sulfure donné; elle est évoquée par des radiations de longueur d'onde déterminée et toujours plus courte; pour chacune d'elles, il y a des fondants qui augmentent, d'une manière tout à fait indépendante, son intensité et sa durée. On conçoit dès lors que la combinaison, dans les préparations mal définies des premiers observateurs, d’influences diverses et inconnues ait été la pierre d’achoppement qui rendait impossible toute explication tant que l’on con- sidérait la préparation comme un tout. Au point de vue de l’action de la température, chaque bande offre trois états distincts. Entre — 180° et une température #,, variable d'un phosphore à un autre et d’une bande à une autre pour chaque phos- phore, mais définie dans tous les cas, il y a simulta- nément, pendant l'excitation, phosphorescence à amortissement extrêmement rapide et mise en réserve de l'énergie d’excitation; cetle énergie peut rester latente pendant un temps extrêmement long, et n’est dissipée dans la suite que si l'on dépasse la tempé- rature {, (état momentané inférieur ou état froid). Un phosphore dont les bandes seront dans cet état à la température ordinaire aura donc une lueur fugitive, { Ann, d. Physik, t. XN,p. 225-282; 425-484; 633-672, 1904, ? Wied. Ann., t. XXXVIII, p. 90, 1889, et Ann. d. Physik, t. XII, p. 439, 1903. L et l’on pourra, longtemps après qu'il a cessé de luire, ramener la phosphorescence en élevant sa température Entre 4, et f,, il y a encore mise en réserve (croissant asymptotiquement avec l'intensité et la durée de l'illumination) de l'énergie d’excitation; mais il y a en même temps dépense, sous forme lumineuse, d’une partie de cette énergie ; la bande arrive graduellement à son intensité maxima, qu'elle conserve plus ou moins longtemps quand l'excitation a cessé, puis s’efface gra duellement ‘état durable). Au-dessus de £,, il n'y a plus d'accumulation d'énergie : la bande apparaît et dis= paraît très vite (état momentané supérieur, ou état chaud); enfin, au delà d’une température {,, la phos-= phorescence n'est plus excitable par la lumière. Les différentes bandes d’un même métal sont à ce point indépendantes que jamais l'énergie due aux radiations qui évoquent une certaine bande n'est dissipée par le rayonnement d'une autre. En rapprochant ces faits de l'existence des séries spectrales des métaux, dont chacune correspond à un état vibratoire déterminé de l'atome, on est conduit à attribuer la même cause à chaque bande de phos- phorescence. Les groupements actifs doivent posséder à la fois, parmi leurs périodes vibratoires possibles, celles des radiations excitatrices, et celles desradiations émises: c'est sous des influences étrangères, vraisem= blablement d'ordre chimique, que l'atome métallique choisit les périodes qu'il adopte pendant la phospho= rescence. L'action de la lumière est probablement une action photo-électrique, car les radiations excitatrices appartiennent toujours à l'ultra-violet où à la partie la plus réfrangible du spectre, et les sulfures des seuls métaux reconnus comme actifs sont sensibles à une action de ce genre. La phosphorescence serait due au retour à leurs trajectoires originelles, suivant un mous vement oscillatoire, des charges électriques négatives arrachées aux atomes pendant l'excitation. Le Mémoire de MM. Lenard et Klatt est accompagné d'un très grand nombre de tableaux et de graphiques auxquels devront se reporter tous les physiciens qui s'occuperont désormais de la question. Les auteurs signalent, enfin, l'extrème sensibilité de la phosphores- cence comme moyen de constater la présence de traces des métaux actifs; les masses de ces métaux qui rendent phosphorescents les sulfures alcalino-terreux sont, en effet, de l’ordre du cent-millième. Les expé= riences ont montré que le cuivre est extrêmement ré- pandu dans le règne minéral, fait à rapprocher de la diffusion, révélée par le spectroscope, du sodium à la surface de la Terre. $ 3. — Electricité industrielle Le régime futur de l'électricité à Paris. — On sait que les concessions des Secteurs qui distribuent actuellement l'énergie électrique dans Paris viendront à expiration d'avril 1907 à décembre 1908, et l'on se préoccupe, depuis quelque temps déjà, de la grosse question du régime qui succèdera au régime actuel. En juin dernier, la Ville de Paris demandait, sur ce sujet, l'avis de plusieurs ingénieurs et constructeurs étrangers. Puis le Préfet de la Seine instituait, le 6 août, ; une Commission chargée d'étudier la question, qui consulta les constructeurs français et demanda au Service d'éclairage de la Ville de lui présenter une étude pouvant servir de base à ses discussions. Cette Commission a déposé récemment son Rapport, rédigé par M. Picou, et dont l'une des annexes est formée par l'étude de M. Lauriol, ingénieur en chef des Services généraux d'Eclairage de la Ville. Ces importants docus= ments viennent d'être publiés en partie 17 ex{enso, en partie résumés, dans La Revue électrique *; ils sont ‘ M. Lenard a montré que l'arc est formé de flammes emboitées les unes dans les autres, et dont chacune n'émel que les raies d'une seule série spectrale (Ann. d. Physik, t. XI, p. 636, 1903). . L 2? La Revue électrique, t. II, n° 29, p. 129 et suiv, te CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 399 précédés d’une Introduction, due à l'éminent directeur de ce journal, M. J. Blondin, dont nos lecteurs nous sauront gré de leur mettre quelques passages sous les Yeux : ! « En ce qui concerne la nature et la tension «des courants primaires, presque tous les projets -sont d'accord pour préconiser les courants triphasés à 8.000 ou 12.000 volts. On constate le mème accord en ce qui concerne la nature et la puissance des moteurs pri- … naires : turbines à vapeur de 10.000 chevaux environ. 11 n'y a divergence que pour le nombre et l'emplace- * ment des usines : M. Lauriol préfère une seule usine, “dont l'alimentation en charbon serait assurée par les chemins de fer du Nord et le canal Saint-Denis (lequel fournirait également les pertes d'eau de condensation): les autres projets prévoient au moins deux usines, pour des raisons de sécurité, et les placent sur les bords de la Seine pour avoir l'eau en abondance, bien que cette Situation puisse avoir l'inconvénient d'augmenter le prix du transport du charbon, celui-ci venant, pour la majeure partie, des mines du Nord et devant, par suite, subir les frais (1 franc environ par tonne) résultant d'un changement de compagnie pour parvenir sur la rive gauche de la Seine. « Où la divergence s'accentue, c'est sur le choix du système de distribution. La distribulion par courants triphasés avec quatre conducteurs, dont un neutre, et à 110 volts entre ce dernier et l’un des autres, paraît Line évonc rallier la majorité des avis. C’est, en effet, le plus économique comme installation et comme exploi- tation; mais le réglage de la tension chez les abonnés “est assez délicat, et c'est la raison principale qui le “fait rejeter par la Commission technique pour l’alimen- “ation de la partie centrale de Paris. On lui reproche “encore de ne pas être aussi apte que les systèmes à “courant continu à l'éclairage. Mais, bien que nous ne “voulions prendre position dans une question qui a été “examinée par d'éminents techniciens, il nous semble “que ce défaut, fondé aujourd'hui, peut devenir demain “une qualité. Les nouvelles lampes à incandescence éco- “nomiques demandent, en effet, une tension tantôt “supérieure, tantôt inférieure aux 110 volts que l’on “propose pour la distribution par courant continu “pour les lampes Nernst, il faudrait 200 volts; pour les “lampes;à filament métallique {osmium, tantale, zircone), 30 à 50 volts conviendraient mieux. Une distribution “triphasée à 200 volts entre conducteurs extérieurs per- “mettrait donc d'alimenter directement les premières et es facilités de transformation qu'offrent les courants alternatifs, en général, permettraient peut-être d’ali- menter économiquement les secondes par transfor- mateurs, malgré les pertes dues à la transformation. ‘un autre côté, les progrès récents des lampes à arc à flamme et des lampes à courants triphasés peuvent aussi amener l'éclairage par arc alternatif à avoir un aussi bon rendement que l'éclairage par arc continu. « Quoi qu'il en soit, il paraît admis en principe que a distribution, dans la région centrale, doit se faire par courant continu, 3 fils, 110 volts sur chaque pont. « Une autre question, examinée dans {plusieurs projets, et qui intéresse le consommateur plus encore que le producteur, est le prix de vente. L’A//gemeine Hektricitæts Gesellschaft, escomptant l'utilisation de “l'énergie électrique par les gros industriels et les com- pagnies de traction, considère comme très rémuné- rateur un prix de vente maximum de 0 fr. 20 le kilowatt-heure. « La Compagnie de Creïl, reprenant les propositions faites par M. Coizeau, prévoit 0 fr. 50 pour l'éclairage ébles usages domestiques, 0 fr. 25 pour la force motrice “et 0 fr. 35 pour l'éclairage public, avec des rabais dépendant des bénéfices nets du concessionnaire. : Lauriol propose une tarification dépendant de Pheure à laquelle l'abonné utilise l'énergie : 0 fr, 23 le kilowatt-heure aux heures de faible consommation, 0 fr, 70 aux heures de forte charge, La Commission technique propose un tarif basé sur la durée d’utilisa- tion, et arrive au prix de 0 fr. 532 le kilowäatt-heure pour une durée d'utilisation de quatre cents heures et descendant à 0 fr. 165 pour mille heures; ces chiffres devraient, d'ailleurs, être majorés du bénéfice de l'exploitant et de la quote-part des redevances de la Ville. « Au sujet de ces farifs, nous nous bornerons à faire remarquer que les chiffres prévus par M. Lauriol et par la Commission technique ‘en y ajoutant la majo- ration signalée) conduisent, pour les gros consom- mateurs de force motrice, qui arriveront à payer le prix minimum, et pour les petits consommateurs, qui généralement paieront le tarif maximum, quel que soit celui des deux modes de tarilication adopté, à des prix de vente plus élevés que ceux appliqués à Berlin, où le kilowatt-heure est vendu 0 fr, 20 pour la force motrice et 0 fr. 50 pour l'éclairage. » $ 4. — Chimie biologique Origine du fibrinogène. — Le sang circulant contient en dissolution une substance albuminoïde, le fibrinogène, capable de fournir, sous l'influence d'une diastase issue des leucocytes en dehors de l'or- ganisme, la fibrine, substance fondamentale du caillot sanguin. D'où provient ce fibrinogène? Dans quel tissu, dans quelles conditions, sous quelles influences prend-il naissance ? Ces questions ne sont pas encore résolues, et l’on ne saurait énoncer à ce sujet que de gratuites hypothèses. Mais, sans prétendre avoir résolu le pro- blème, MM. Doyon, Petitjean, Morel et Kareff viennent de nous fournir de très intéressants documents, dont il conviendra de tenir compte dans l'établissement de la solution définitive. Ils démontrent que l'intégrité anatomique du foie est une condition nécessaire de la présence du fibrinogène dans le plasma sanguin et conséquemment de la coagulabilité du sang. Leur démonstration repose sur deux ordres de faits : 1° la constitution du sang à la suite d’'injections de sérum hépatotoxique ; 2° la constitution du sang dans l'intoxication sub-aiguë par le phosphore. Pour obtenir un sérum hépatotoxique, MM. Doyon et Petitjean injectent, à trois reprises espacées de trois à quatre semaines, dans la cavité péritonéale d’un canard, de la pulpe de foie de chien finement broyé, mélangée d’eau salée physiologique. Environ deux semaines après la troisième injection, le canard es! saigné, et le sérum issu du caillot sanguin est asepti- quement recueilli. De ce sérum, MM. Doyon et Petil- jean injectent 40 c.c. en une seule fois dans la cavité péritonéale d’un petit chien de quatre kilogs environ. Le chien, après une période de bonne santé apparente, devient abattu, affaibli, et refuse de manger. On pra- tique alors (quatre semaines environ, après l'injec- tion du sérum de canard) une saignée carotidienne. Le sang reste absolument liquide pendant un quar! d'heure et ne fournit ensuite qu’un très fin caillot, se désagrégeant sous l'action d'une minime agitation. Une seconde saignée, pratiquée une demi-heure après la première, fournit un plasma fluoré dans lequel on dose le fibrinogène : 100 e.c. de plasma contiennent 0 gr. 08 de fibrinogène, quantité inférieure à la nor- male. A l'autopsie,,on constate une altération macro- scopique et microscopique du foie. On sait qu'en faisant ingérer à un chien de l'huile phosphorée (huile dans laquelle on a fait dissoudre du phosphore à raison de 1°/,, par exemple) en petite quantité (1 à 2 c.c., par exemple, par jour pour un chien de six kilogs), on détermine la production d'une dégénérescence graisseuse du foie, condui- sant en quelques jours à la mort. En examinant le sang de chiens soumis à cette intoxication, MM, Doyon, Morel et Kareff ont constaté que, dans les périodes pré- mortelles, le sang extrait des vaisseaux est incoagulable ou ne coagule que lentement ou imparfaitement, et que la quantité de fibrinogène y est très réduite : elle 396 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tombe, par exemple, à 0,07 ou 0,08 °/,. Cette diminu- tion du fibrinogène est en rapport avec l’altération profonde du tissu hépatique, et non avec l'intoxication phosphorée directement; car, chez le coq, qui, à la suite d'intoxication phosphorée, meurt sans altération hépa- tique, la coagulabilité du sang et sa teneur en fibrino- gène ne sont pas modifiées. Ces faits ne suffisent pas, sans doute, pour résoudre la question de l'origine du fibrinogène ; ils ne permet- tent pas surtout d'attribuer au fibrinogène une origine hépatique ; mais ils sont importants parce qu'ils nous fournissent une donnée expérimentale sur une ques- tion pour laquelle on était jusqu'à ce jour en pleine hypothèse. $ 5. — Physiologie Un nouveau procédé pour produire lanes- thésie du corps humain. — Les procédés usuels préconisés pour la production de l’anesthésie et de l'analgésie générales présentent de nombreux incon- vénients, et compromettent souvent la vie même des malades. On sait, d'ailleurs, que l’état de santé de certains individus ne permet l'application d'aucun anesthésique général, à cause des effets désastreux que celui-ci pourrait exercer sur le cœur. Aussi l'on com- mence, depuis quelques années, à appliquer l’anesthésie loéale dans tous les cas qui s'y prêtent et à limiter l'analgésie à la partie directement intéressée du corps. Les substances qu'on emploie à cet effet en injection sous-cutanée sont cependant, en général, loin d’être anodines et leur action est, en tout cas, sujette à des incertitudes. Au Congrès annuel de la Société Odontologique Suisse, tenu l’année dernière à Lausanne, M. C. Re- dard, professeur à la Faculté de Médecine de Genève, a appelé l'attention sur un procédé tout nouveau qu'il vient d'imaginer pour la production de l’analgésie et de l'anesthésie générales, procédé basé sur l'effet des rayons bleus. C'est un fait connu depuis longtemps que chacune des couleurs fondamentales exerce un effet psychique propre et caractéristique. Voici comment le médecin venevois, d'accord, du reste, avec de nombreux psycho- logues, énonce les résultats des recherches qu'il a faites à ce sujet : le rouge produit un état d'excitation et d'énervement désagréable, le jaune donne lieu à la mélancolie et à la tristesse, alors que le bleu est d’un effet nettement calmant et produit un sentiment de bien-être. Les couleurs complémentaires exercent des effets essentiellement identiques. Or, en continuant ses investigations, M. Redard vient de découvrir que /e bleu non seulement agit comme sédatif, mais exerce un cilet analgésique très marqué, à tel point que des opérations chirurgicales de courte durée, telles que, par exemple, les opérations dentaires, peuvent parfaitement se faire dans le rayon d'action de ce nouvel anesthésique. Pour employer le procédé, point n’est besoin d'un dispositif dispendieux; une lampe à incandescence électrique de 16 bougies, un réflecteur nickelé et un voile bleu sont, en effet, tout ce qui est nécessaire. La lampe, munie “d'une ampoule en verre bleu, est disposée à une distance d'environ 15 centimètres des yeux (qui doivent se trouver au foyer des rayons), tandis que la tête du malade et la lampe elle-même sont recouvertes d'un voile en satinette bleue, écartant la lumière diffuse du jour. Il importe surtout de rassurer le malade, de lui rap- peler qu'il ne sentira aucune douleur, pourvu qu'il fixe les yeux sur la lumière bleue. Les rares insuccès ren- contrés dans l'application de cette méthode semblent ètre dus au fait que les malades, au lieu de fixer l’am- poule avec les yeux grands ouverts, fermaient ces der- niers. L'anesthésie s'établit au bout de deux à trois minutes, ce qu'on constate à une dilatation de la pupille; c'est alors qu'il convient de procéder à l'opé- “pendant plusieurs mois, comme un enfant, adoptant ration. Celle-ci étant terminée, le malade s'éveille aussi- tôt et déclare n'avoir rien senti. Quant à savoir comment se produit ce remarquable phénomène, les hypothèses les plus variées se présen= tent à l'idée. On pourrait croire qu'il est dù à quelque effet hypnotique; mais, comme les rayons rouges eb jaunes produisent des effets nettement négatifs, cette hypothèse ne parait guère admissible. Ce qui est incontestable, et M. Redard vient de l’aflirmer de nou- veau dans une toute récente conférence devant PInsti= tut national genevois, c'est que le cerveau se trouve influencé par l'intermédiaire du nerf optique. Mais le mécanisme de cette influence est loin d'être éclairei. Faisons remarquer que d’autres médecins ont expé- rimenté ce même procédé avec autant de succès. $ 6. — Sciences médicales Le puérilisme. — Sous ce nom, M. Ernest Dupré a désigné un état mental qui, semblant indiquer une sorte de régression de la mentalité vers l'enfance, se caractérise par une modification singulière des senti= ments, des goûts, des tendances, des appétits, du lan- gage, des gestes, modification telle que le sujet semble redevenir un petit enfant. Cet état mental peut s'observer au cours des affections organiques de l’en- céphale, dans certaines intoxications, dans l'hystérie. Il a été entrevu par les anciens auteurs; mais Ceux-ci ne paraissent pas en avoir apprécié toute l'importance sémiologique. M. E. Dupré s'est attaché à analyser les caractères de cet état psychopathique *. ue puérilisme peut être une manifestation transi= toire suscitée par une cause aiguë ou subaiguë (choc moral, intoxication, surmenage); d'autres fois, il s'agit d'un état permanent à évolution lente progressive : le puérilisme mental s'observe souvent dans les démences, organiques. Exemple : une femme de quatre-vingts ans du Service du Professeur Brissaud, à l'Hôtel-Dieu, démente sénile; sâteuse, paralysée du côté gauche, présenta brusque- ment le syndrome du puérilisme mental. Elle s’est mise à affecter les manières, le ton et le langage d'une petite fille, demanda des poupées et se comporta, l'intonation et la mimique d’une fillette. Il s'agit là de puérilisme sénile, régression de la personnalité PSY- chique au stade de l'enfance. Ce n'est pas à propremen parler le « retour à l'enfance » des vieillards, pros clamé par la langue populaire. Le vieillard en enfance rappelle l'enfant par son humeur capricieuse, S0 égoisme, son incapacité de se conduire seul, en somme) par la pénurie de ses facultés psychiques et physique Dans le puérilisme mental, c'est le fonds même de la personnalité qui est moditié. On ne connaît pas sa pathogénie; inais on peul imaginer qu'il est favorisé par la loi de linvolution sénile de la mémoire disparition des souvenils récemment acquis, et, par contre, résurrection brès vivace des souvenirs de la vie enfantine, entraînant des réactions appropriées à la première étape de l'existence | $ 7. — Géographie et Colonisation Le caoutchouc dans l'Afrique occidentale française. — Le Gouvernement général de l'Afriqué française vient de prendre une mesure ayant pour d'amener les indigènes à améliorer la qualité du caon (- chouc qu'ils préparent, de telle sorte que cette qualit se rapproche de celle dite « para », qui est la mieux cotée sur le marché. On sait que déjà la Guinée frans caise, en faisant refuser par ses douanes tout caoutchoues impur, est parvenue à faire coter ce produit, quand i Congrès de Bruxelles, 1903; Congrès de Pau, 190%: No velle Iconographie de la Salpêtrière, 1901-1905; thèse Soullard, 1904, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 357 porte la marque de sortie de Conakry, 10.000 francs la tonne. L'arrèté pris par le Gouvernement général est rédigé en ces termes : La circulation du caoutchouc adultéré par l’intro- duction de matières étrangères est interdite dans toute l'étendue de l'Afrique occidentale française. La circu- lation des caoutchoucs préparés avec des liquides fer- mentescibles d’origine animale sera interdite à partir du 1° janvier 1907. Il est interdit aux personnes se livrant à la récolte du caoutchouc de pratiquer des incisions sur les arbres et plantes à caoutchouc à moins d’un mètre de l'issue du sol, de pratiquer des incisions annulaires, de prati- quer des incisions distantes de moins de 15 centimètres les unes des autres et d'une profondeur telle qu'elles entament l’aubier. Des arrêtés des lieutenants-gouverneurs pourront interdire la saignée des essences à caoutchouc pendant les mois de l’année où se fait plus particulièrement la montée de la sève. Des arrêtés du Gouverneur général, prissur la propo- sition des lieutenants-gouverneurs, après avis du Con- seil d'administration, pourront fermer à l'exploitation les régions ou parties de régions où cette mesure de préservation s'imposerait par suite de l’appauvrissement des essences. Dans les régions à caoutchouc, des peuplements pourront être constitués par décisions des lieutenants- gouverneurs autour des villages, par leurs soins et à leur profit. Ces peuplements devront être voisins du village ; ils seront la propriété collective des habitants du village, qui auront la charge de leur entretien. Il sera institué, dans les centres à caoutchouc, des écoles professionnelles pratiques du type de celle de Bobo-Dioulasso, où seront enseignés les meilleurs pro- cédés de récolte et de coagulation du caoutchouc. Ces écoles seront organisées de facon que le plus grand nombre d'indigènes puissent y passer dans le cours d'une même année. N 8. — Enseignement et Sociétés L'Institut géographique de Bruxelles. — La Géographie est certainement une des connaissances qui se sont le plus profondément renouvelées au cours des dernières années. Sous l'influence de maîtres tels que MM. Ratzel, en Allemagne, Suess, en Autriche, Elisée Reclus, Vidal de la Blache, de Lapparent, en France, l'enseignement de la Géographie est devenu vraiment scientifique. La preuve en est dans la création — auprès de presque toutes nos Universités — de ces Instituts géographiques, véritables musées et laboratoires en même temps, grâce auxquels la branche à enseigner acquiert enfin la personnalité qui lui est nécessaire. Il est permis d'espérer que l'expérience faite en ce mo- ment au Lycée Condorcet ne tardera pas à être géné- ralisée : M. Paul Privat-Deschanel vient d'y être chargé de l’enseignement séparé de la Géographie. à L'Institut géographique de l'Université nouvelle de Bruxelles a été fondé en 1897; Elisée Reclus, qui en fut l'organisateur, n'a pas cessé de le diriger, et cela sufi- rait déjà pour faire ressortir la valeur de cette intéres- Sante création. i/Institut s'efforce de grouper dans l'Université nouvelle et en dehors, parmi toutes les per- Sonnes de bonne volonté, des étudiants et des étu- diantes qui s'intéressent à la Géographie, ainsi qu'aux branches connexes, les pratiquent et en propagent - l'enseignement. C’est, en effet, un des caractères essen- _tiels de l'Institut, œuvre de recherches et de vulgari- sation à la fois, d'être largement ouvert à tous, afin de diffuser dans la plus grande mesure les connaissances géographiques. Le travail y est aussi solide que désin- téressé ; aucun diplôme officiel n’est décerné et la fré- quentation est absolument libre, sans frais d'aucune sorte. C’est un des principaux soucis de l’Institut de se tenir au courant de la littérature géographique contem- | | | poraine. La Bibliothèque, cataloguée avec soin, com- prend 9.300 livres, brochures et tirages à part; la mapo- thèque possède plus de 7.000 cartes en une ou plusieurs feuilles, sans compter celles que renferment les recueils de la Bibliothèque. La collection des gravures, dessins et photographies contient près de 15.000 pièces clas- sées, de sorte que l’ensemble des documents de l’Insti- tut comprend plus de 32.000 numéros. Des Mémoires originaux sont publiés en proportion des ressources; ils sont actuellement au nombre de 10, et plusieurs autres sont en préparation’. L'Institut a donné une large place à la cartographie ; bon nombre de cartes et diagrammes, livrés à la publicité, y ont été dressés par ses collaborateurs. Au moment où la Géographie commence à jouir en France de la faveur à laquelle elle à droit, il nous a paru intéressant de signaler la création originale de l'Uni- versité nouvelle de Bruxelles, en rendant hommage au Maitre éminent qui en est l'âme et qui en fut l’inspi- rateur. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle (Suisse). Institut de France. Les subventions du legs Debrousse. — L'Institut de France, toutes les Académies assemblées, à consacré sa séance trimes- trielle de mars au rapport de la Commission du legs Debrousse. Cette fondation annuelle, qui s'élève à Ja somme de 30.000 francs, a été faite « dans l'intérêt des lettres, des sciences e: des arts ». Sur le Rapport de M. Poincaré, l’Institut a accordé les subventions suivantes : Publication des Tables de la Lune : 5.000 francs; Journal des Savants : 5.000 francs; catalogue des œuvres de Leibnitz : 3.000 francs; étude des l'uniciers à Naples : 3.000 francs; travaux d'installation de la bibliothèque de Chantilly : 7.000 francs; installation d'un appareil sismographique à l'Observatoire de Paris : 3.000 francs. Un reliquat de 4.000 francs est réservé pour l’année prochaine. $S 9. — Sciences diverses Sur la Représentation proportionnelle. — Dans un récent article®, M. Meyer a consacré quelques lignes à une étude que j'ai publiée il y a environ deux ans et qui a été annexée à la proposition de loi de la Lique pour la Représentation proportionnelle. Cette étude est, à vrai dire, une analyse de la méthode d'Hondt et non une démonstration mathématique. Il me parait, d'ailleurs, excessif de considérer cette ques- tion comme du domaine exclusif des Mathématiques, car, comme je l'ai dit dans ma Note précitée, le point de départ de toute méthode me parait échapper à l'Analyse mathématique : je veux parler de la concep- tion que chacun se fait du meilleur système; c’est là un élément tout à fait subjectif, qui n'a rien à faire avec l'Arithmétique. Toute la difficulté réside donc dans la position du problème. En cela, je crois m'être placé à un point de vue tout à fait rationnel, bien qu'il soit contesté par M. Meyer, qui interprète, d'ailleurs, mon texte d'une 1 Voici la liste des Mémoires publiés à ce jour : SémirADzkI : La Nouvelle Pologne, épuisé. — VauGran Cor- xisx : Formation des dunes de sable, 37 p., 1900. — HExRy Bexssr : Fleuves sous-marins, 31 p., 1900. — Varère MAES : Projection sphérique comparée aux autres projections, 43 p., 4904. — G. MarmeLut : L'accroissement du delta du Pô au xixe siècle, 36 p., 1904. — Ecisée RECLUS : L’enseign = ment de la Géographie, 12 p., 2€ éd., 1902. — G. GUYON Un nouveau planétaire, 13 p., 1902. — R. H. CobriINGTON : La Magie chez les Insulaires Mélanésiens, 31 p., 1903. — P. KROrOTKINE : Orographie de la Sibérie, 119 p., 1904 — E. Sacre : L'Esperanto, 15 p , 1905. : , 2 A. Meyer : La théorie des élections et la représentation proportionnelle. Revue gén. des Sc., des 15 et 28 février 1905, LNVI/ pr14ef158: 398 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE \ façon inexacte. Je dis en propres termes : « Ce qui eca- ractérise l'avantage dont jouit une liste, ce n’est pas le nombre absolu des sièges qu'on lui attribue, mais le rapport de ce nombre au nombre des électeurs de cette liste ». C'est la définition même de la représentation pro- portionnelle. Il s'agit, en effet, de représenter les par- LS proportionnellement à leur importance numé- rique. Si un parti comptant A électeurs dispose de a sièges, d HEC . : le rapport x représente, si j'ose ainsi parler, la frac- tion de député dont jouit chaque électeur, et ce rap- port mesure rigoureusement l'influence parlementaire de chaque électeur de la liste considérée. La représen- lation serait rigoureusement proportionnelle si le a \ : à rapport 3 avait la même valeur pour toutes les listes en présence. Soit, par exemple, une circonscription de N électeurs, ayant à nommer 2 députés. En toute rigueur, le coeffi- s : : Er cient l'influence de chaque électeur serait N° Suppo- sons que quatre listes soient en présence et obtiennent respectivement À, B, C, D voix, pour a, b, e, d sièges. On devrait avoir : Mis, dans la pratique, ces égalités ne peuvent être vériliées et, parmi les quatre premières fractions, cer- autres sont 2e a ar ENG taines sont inférieures à N et les supé- rieures à 2 eures à —: N Ce sont ces écarts qu'il importe d'envisager : ce sont, d'ailleurs, ceux que J'ai considérés dans ma Note, et non pas, comme paraît le croire M. Meyer, des écarts, fictifs d'ailleurs, sur le nombre de suffrages. Quoi qu'il en soit, il demeure bien évident que, pour comparer les avantages attribués à certaines listes, il est nécessaire de comparer les fractions : ah ecratd AIBIACARDE Quant aux condilions qu'on impose à la meilleure répartition, elles sont, je le répète, quelque peu con- ventionnelles, et le raisonnement mathématique ne peut intervenir ici. J'ai montré que la méthode d'Hondt est celle qui réduit au minimum les avantages dont bénéficient cer- tains partis, c'est-à-dire celle pour laquelle les erreurs par excès sur les nombres : Éd le re! AUSERETRADÉ sont minima. (Ce point est mis eu lumière avec la plus grande netteté par la méthode graphique de M. Hagen- bach-Bischoff.) J'ai eu soin d'ajouter que, si ce prin- cipe est assez rationnel pour être accepté, il n'a rien d'absolu; on pourrait tout aussi bien admettre que le meilleur système est celui qui réduit à leur minimum les erreurs par défaut, en d'autres termes, celui pour lequel les préjudices causés aux listes les moins favo- risées soient aussi faibles que possible. On pourrait aussi rechercher une répartition dans laquelle les valeurs absolues des écarts soient minima. On peut, comme on le voit, se poser le problème de plusieurs manières; mais le résultat obtenu par la mé- thode d'Hondt peut être regardé comme satisfaisant. D'autre part, cette méthode est d'une application extrêmement simple et on peut raisonnablement s’en contenter. M. Meyer n'admetl pas le principe que j'ai énoncé ci-dessus et déclare que la représentation proportion- nelle a pour but de donner à chaque parti, à moins d'une unité près, le nombre de sièges qui lui revient. M. Meyer commet une confusion qui n'échappera pas à quiconque est quelque peu familiarisé avec la nuance qui sépare les erreurs absolues des erreurs relatives; l'erreur de M. Meyer vient de ce qu'il considère comme équivalents des partis qui ne le sont pas. Les différents partis ne forment pas des groupes identiques, et l’on doit considérer beaucoup plus les unités qui les com- posent et qui, elles, sont équivalentes. C'est pourquoi j'ai affirmé qu'une méthode ne repose sur aucune base rationnelle si elle n’est pas fondée sur la considération du rapport que j'ai désigné sous le nom de coefficient d'influence d'un électeur. Partant de ce point de vue, on n'adopte pas néces- sairement la méthode d'Hondt, mais on n’est certaine- ment pas conduit au système suisse. On reproche à la méthode d'Hondt de ne pas fournir une proportionnalité parfaite; cela n’est contesté par personne et aucun système ne saurait échapper à cette objection; cet inconvénient tient à la nature même du problème. L'objection qui paraît avoir le plus de poids aux yeux des partisans du système suisse est que la méthode d'Hondt conduit à avantager de plus d’un siège certains partis, alors qu'un avantage d’une frac- tion de siège suffirait pour leur assurer une représen- tation supérieure à la moyenne de leur circonscription. A priori cet argument n'est pas dépourvu de valeur si l’on considère indistinctement les différents partis sans tenir compte de leur importance numérique. Toutefois. on conçoit sans peine qu'entre deux avantages, l'un de un siège et demi accordé à 50.000 électeurs, et l’autre de un demi-siège accordé à 10.000 électeurs, le premier constitue la faveur la plus faible. D'après le système suisse, deux partis de 25.000 électeurs chacun pour- raient bénéficier séparément de trois quarts de siège; mais, réunis, ils ne pourraient bénéficier que d’une fraction inférieure à l'unité, de sorte que ces deux partis réunis seraient moins bien représentés que s'ils étaient séparés". Il est facile de construire des exemples où cette éventualité se présente. On voit donc que l’objection précédente tombe d'elle-même. Si, pourtant, on admettait que chaque liste ne pourra jamais être avantagée de plus d’un siège, ce n'estpas encore à la méthode des plus grands restes qu'il faudrait recourir, car cette méthode repose, comme je l'ai déjà dit, sur la substitution des erreurs absolues aux erreurs relatives. Une plus longue dissertation sur ce point serait sans objet. Je n'ai, du reste, pas l'intention d'exposer en détail la théorie de la Représentation proportionnelle; je vou- lais simplement rectifier celles des inexactitudes de M. Meyer qui me concernent, et montrer que, si la méthode d'Hondt n’est pas parfaite, elle est toutefois assez rationnelle pour être appliquée de préférence à la méthode suisse, à laquelle elle ne le cède en rien sous le rapport de la simplicité. L. Rouyer. 1 Ce n'est pas forcément, ni même généralement le cas. Si deux partis LE 25.000 électeurs, après avoir obtenu chacun, dans le système suisse, a sièges, présentent un excédent de voix correspondant à 3/4 de siège, deux cas peuvent se présenter : 1° cet excédent est le plus fort de tous ceux des diverses listes en présence : chacun des deux partis recoit done 1 siège supplémentaire, et les deux obtiennent en touts 242 sièges ; 20 cet excédent est inférieur à ceux des autres listes et les deux partis n'obtiennent en tout que 2 a sièges Si les deux partis n’en forment qu'un seul, le parti fusionné obtient du premier coup 2 (a +3/4\=— 24 41 +12 sièges. Deux cas se présentent encore : 10 Si l'excédent de 1/2 est le plus fort excédent, le parti fusionné obtient 2142 sièges, donc autant que lorsque les partis étaient séparés; 20 Si l'excédent de 1/2 est inférieur à ceux des autres listes, le parti fusionné obtient 2a+4-1 sièges; il peut done perdre 1 siège sur le cas le plus favorable pour les artis séparés, mais il en gagne toujours 1 sur le cas le moins favorable où les partis séparés n'avaient que 22 sièges. (Note DE LA RÉDACTION.) PRE PONT EPS PPS SL r | 1 £ mt” A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES 309 LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES AU COLLÈGE DE FRANCE ! La fonction vitale que remplit le Collège de France, dans l’organisme de l’enseignement supé- “rieur, n'a guère varié depuis sa fondation; il a été créé et il a vécu pour l'avancement des Sciences et . des Lettres. Il laisse aux Universités la préparation … des licences et des doctorats, au Museum les vastes collections et les sciences naturelles qui sont leurs \tributaires, aux Ecoles d'application le soin de former des ingénieurs et des techniciens. Son domaine propre est la culture des branches “nouvelles de la science, de ces rameaux encore délicats, qui bientôt feront, eux aussi, partie de off l'ensemble louffu et se grefferont sur le tronc | - majestueux des connaissances humaines. Aussi “a-t-on affaire dans cette enceinte à un auditoire spécial, souvent peu nombreux, composé de pro- -fesseurs et de penseurs; il n'en est pas qui soit - plus digne d'efforts, de la part des maitres qu'ils viennent écouter, et dont l’assentiment soit plus désirable. . Un de nos plus illustres administrateurs, Ernest Renan, cité par M. Abel Lefranc dans son Histoire du Collège de France, a magistralement caractérisé cette noble mission : « Le Collège de France, dit-il, répond à des besoins qui tiennent si profondément “au progrès de l'esprit humain, que la manière, “plus ou moins fidèle, dont il remplit sa mission peut être prise comme mesure du développement “scientifique à un moment donné. Les époques où “le Collège de France a compté dans son sein les hefs du mouvement intellectuel ont été les époques LE . en grands résultats; les moments où le - Collège de France, transformé en succursale des “établissements ordinaires, n’a fait que répéter les “doctrines reçues, sans poursuivre aucune méthode nouvelle, ont été des temps de décadence scienti- que. » I. — LES PREMIERS TITULAIRES. A ce point de vue, le passé de la chaire d'Histoire nalurelle du Collège de France est instructif et de bon exemple; elle n'a pas encore connu ces temps de décadence que redoute Ernest Renan. Elle fut menacée de suppression, en compagnie de celles de Médecine pratique, de Chimie et d'Anatomie, au moment où l'Assemblée Coustituante s'occupa | d'agrandir le Jardin du Roi et de le doter de ne 50e = 1, UT 7 0 Te 1 Lecon d'ouverture au Collège de France, le 2 février 1905. chaires nouvelles. Mais cette mutilation rencontra fort heureusement des adversaires délerminés, qui eurent le lalent de faire ressortir victorieusement que le but des deux illustres établissements était tout différent et qu'il y aurait grand péril, pour les progrès de la Science, à dépouiller le Collège de France de sa fière devise, omnia docet, dont il se parait à juste titre depuis François I°". La chaire d'Histoire naturelle fut inaugurée, en 1778, par Daubenton; il est curieux de constater que cet illustre savant doit ètre compté parmi les premiers naturalistes ayant introduit l'emploi du microscope dans l'examen des roches et des minéraux ; en 1782, on le voit utiliser cet instru- ment pour éludier les dendrites el en mesurer les délicates anaslomoses au moyen d'un micromètre. Il est, avec Vicq d'Azyr, un des fondateurs de l'Anatomie comparée, et cumule, en 1793, sa chaire avec une de celles que la Convention vient de créer au Museum ; par dérogation spéciale, en con- sidération de son grand âge, il est autorisé à y transporter ses lecons du Collège de France; le fondateur de la Minéralogie, Haüy, a été son élève. Le 18 nivôse an VIIL (1800) est une date mémo- rable pour la chaire dont nous esquissons l'his- toire; le grand Cuvier est appelé à y succéder à Daubenton; il la conserve, avec son suppléant La Métherie, jusqu'en 1832. Créateur de la Paléonto- logie, Cuvier a développé, dans ses cours du Museum, la parlie purement scientifique de son œuvre, réservant au Collège de France les considé- ralions historiques et philosophiques, qui se rat- tachent à l'Histoire naturelle. Dès lors, cette branche si importante des sciences géologiques, qui a lrait à l’histoire de la vie depuis les périodes les plus reculées jusqu’à nos jours, s’est tout naturellement trouvée rattachée aux grandes collections du Museum et à sa chaire de Paléontologie. Elie de Beaumont succède, en 1832, à Cuvier et va occuper, durant quarante-deux ans, la chaire du Collège de France qui, dédoublée en 1837, por- tera désormais le nom de chaire d'Histoire natu- relle des corps inorganiques. Nous commençons à peine à juger impartiale- ment l'œuvre d'Elie de Beaumont; on lui doit la première carte géologique d'ensemble de la France, tracée au 500.000°, en collaboralion avec Dufrénoy; à l'époque déjà reculée où elle a paru (en 1840), elle consliluait un chef-d'œuvre, méritant 360 A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES à lui seul la grande réputation qui entoura, dès lors, ses auteurs. Le travail assidu sur le terrain, la coordination des résultats acquis dans un ensemble de régions comprenant une partie des Alpes, les Cévennes et les Pyrénées, en un mot l’étude, si restreinte fût-elle, de la face de la Terre devaient nécessai- rement conduire Elie de Beaumont aux considéra- lions générales et aux idées d'ensemble; elles se sont traduites par deux Mémoires touchant l’un au volcanisme, l’autre aux régions plissées et sou- levées du Globe; le premier traite des émanations volcaniques et métallifères, le second, plus célèbre, des systèmes de montagnes. Sans doute, le défaut absolu de renseignements sur la géologie des cing-sixièmes du Globe nuit à l'observateur, que son esprit géométrique conduit, en outre, aux solu- tions trop rectilignes; mais que d'idées nouvelles, et combien M. Suess, son continuateur, mieux documenté et pouvant suivre de plus près la Nature, a raison de rendre justice à Elie de Beaumont et de saluer en lui un précurseur de génie! On a beaucoup critiqué le réseau pentagonal, qui l'avait séduit, parce que c'est le réseau de grands cercles le plus riche en éléments de symétrie qui puisse couvrir régulièrement la sphère; mais, ici encore, l'idée était féconde. Depuis lors, la science a progressé; la face de la Terre est mieux connue. C’est en 1883" que M. Suess a commencé à faire paraître ce monument des con- naissances actuelles en Géologie qui a nom l’Anélitz der Erde et dont M. de Margerie” nous à donné une traduction fidèle, complétée par des notes ori- ginales de grande valeur. Justice est désormais rendue aux idées fécondes d'Elie de Beaumont; le réseau pentagonal lui-même a servi de parrain au réseau tétragonal de Lowthian Green”, sinon dans ses détails, au moins dans son idée maitresse. Ainsi nous voyons que les noms des premiers litulaires de cette chaire nous rappellent, dès l’ori- gine, les grandes conquêtes de l'esprit humain dans le domaine de la science géologique, qui est, à pro- prement parler, l'histoire ancienne de la Terre : d'abord le premier outil de travail vraiment précis est créé; la Paléontologie prend naissance et ne cessera dès lors de se développer et de s'associer fidèlement à la Stratigraphie, qui ne peut se passer de son aide, surlout pour les comparaisons à dis- tance. Puis l’enseignement de celte chaire met en hon- neur le tracé sur le terrain des contours géologiques ! Deuxième volume en 1888, troisième volume en 1901. ? Premier volume en 1897, deuxième en 1900, troisième en 1902. % Vestiges ol the mollen lulu, 1887. Globe, London, 4875, et Hono- et préside à la naissance de la tectonique et à l'étude | des systèmes de montagnes. Il est intéressant dem noter, dès à présent, quels développements rece- vront bientôt les notions dont Elie de Beaumont s'est servi pour classer ces systèmes; les régions plissées sont nettement séparées de l’avant-pays les sinuosités compliquées des zones de plissement } sont suivies à travers le Globe tout entier; M. Suess spécifie soigneusement, toutes les fois que la préci=" | sion est possible, l’âge des mouvements et le sers dans lequel se sont produites les poussées horizon: tales qui infléchissent, puis couchent les plis den l'écorce terrestre, comme si ces roches étaient" devenues aussi plastiques que les métaux laminës » dans les expériences de Tresca. M. Heim fait paraitre ses coupes des M suisses; les plis couchés y atteignent des ampli- tudes FO on tale extraordinaires. Au nord dem 4 l'Ecosse, M. Lapworth montre que les écailles calé-” doniennes sont poussées vers le Nord sur le gneissn $ des Hébrides; M. Tœrnebohm établit la largeur invraisemblable des chevauchements scandinaves, transportés vers le Sud-Est. M. Marcel Bertrand démontre l'extrème généralité des nappes de char-" riage dans les Alpes et forme une pléiade de disci- | ples qui vérifient et amplifient les prévisions de leur maître. 5 Les observations précises s'accumulent; elles attendent encore une explication d'ensemble. Mais, : dès à présent, M. Suess est parvenu à grouper, dans un plan harmonieux, les Alpes et les Altaides pro= prement dites, les Dinarides et les chaines de bor=M dure de l'Asie méridionale : ila établi, sur des bases inébranlables, la symétrie du Globe autour de l'axes méridien de l'Allantique; il a récemment dessiné) d'une façon magistrale l'ossature des chaînes de l'Asie autour de la plate-forme cambrienne du Baïkal. Nous voici arrivés à la période, pour ainsi dire, contemporaine de la chaire dont nous cherchons à retracer l'histoire. Charles Sainte-Claire-Deville; d'abord suppléant d'Elie de Beaumont, lui succède en 1875. Grand voyageur, explorateur hardi de plusieurs centres volcaniques encore en ignition, ill poursuit l'étude patiente et approfondie de ces ma jestueux appareils qui s'appellent les Antilles, l& Vésuve, l'Etna, Ténériffe, le Cap-Vert; il entrainé à sa suite son élève Fouqué, à qui il inocule la pass sion des voyages et des explorations périlleuses, el qui lui succédera bientôt. den «* II. — La VIE ET L'ŒUVRE DE FOUQuÉ. En pleine force de l’âge et du talent, Fouqué est. bien préparé, par ses patientes études physiques eb chimiques, pour rénover loute une branche de la “ W, A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES 361 science ; il va doter l'étude des roches des moyens d'invesligation que, dès 1815, Cordier appelait de ses vœux, en déplorant l'insuffisance des procédés de diagnostic dont on disposait alors. Né à Mortain, le 21 juin 1828, Fouqué est reçu à Saint-Cyr en 4847 ; mais il n'entre pas à celte École, non plus qu'à celle d'Administration, où il est admis en 1848; il se réserve pour l'École Normale, où il entre en 1849. Nommé préparateur d'Histoire naturelle à l'École - Normale, il publie, en 1853, en collaboration avec Henri Sainte-Claire-Deville, une note sur les pertes, » par la chaleur, des minéraux fluorés et notamment de la topaze. Après une fugue de quelques années dans l'in- - dustrie des produits chimiques, Fouqué se laisse tenter par les études médicales; il passe, en 1858, sa thèse de doctorat en médecine : Sur un mode particulier d'emploi du thermomètre. Entre temps, il avait professé le cours de Physique au Lycée Bonaparte, pendant quelques années. En 1861, il accompagne, comme aide volontaire, Charles Sainte-Claire-Deville au Vésuve, alors en éruplion, et il assiste son maître dans l'étude ap- profondie des fumerolles de ce volcan; les explo- raleurs avaient fait tous leurs efforts pour voir en . évolution les fumerolles les plus chaudes; mais ils n'avaient plus trouvé que les efflorescences salines qu'elles laissent, une fois éteintes; par contre, l'étude des fumerolles d'ordre inférieur avait été des plus faciles. Dès lors la vocalion de Fouqué se déclare et sa voie esttracée; il la parcourt avec une ténacité admi- rable et qui fait contraste avec les fluctuations des premières années, qui ont suivi sa sortie de l'École Normale. Quand j'ai fait sa connaissance en 1874, »il était encore aide volontaire de Charles Sainte- Claire-Deville, alors suppléant d'Élie de Beaumont. Il possédait la haute estime de la plupartdes minéra- logisles ; Daubrée, notamment, recourait volontiers à sa sagacité bien connue et le consultait sur les zéolites découvertes à Plombières; Charles et Henri Sainte -Claire- Deville l'aimaiect d'une affection sincère; mais on élait si habilué à le voir travailler “sans bruit, dans le laboraloire du rez-de-chaussée -du Collège de France, lorsqu'il revenait de ses - lointaines missions, que l'idée ne vint même pas - à Charles Sainte-Claire-Deville, devenu le succes- “seur d'Élie de Baumont, de lui offrir la place de préparateur alors vacante. Ayant appris qu'une compétition le menaçait, Fouqué se décida à faire valoir ses Litres : « Comment, mon cher ami, vous désirez être mon préparateur », lui dit Charles Sainte-Claire-Deville, « je vous choisis et vous serez aussi mon suppléant ». En 1865, Fouqué visite à deux reprises diffé- RC a rentes l'Elna, en pleine éruplion; il y fait deux séjours d'un mois, le premier au milieu des neiges du sommet, ayant pour tout abri un bloc de lave renversé. Grèce à cel énergique mépris des cir- constances fortuites, il peut étudier à loisir les fumerolles les plus chaudes; il assiste à la pro- pagation, de haut en bas, de la fracture radiale qui, partant du centre du volcan et de son sommet, s'abaisse peu à peu sur son flanc Nord-Est. En même lemps, les cônes adventifs de projection et les points de sortie de la lave s'abaissent eux aussi, (toujours alignés sur la déchirure initiale. Le spectacle est grandiose; l'aire des projections, d'abord influencée par les vents d'Ouest, puis par les vents d'Est, occupe un immence espace ellip- tique dans lequel sept cralères parasites se distin- guent par la violence des explosions dont ils sont le siège. Fouqué a rapporté, de ce double séjour au sommet de l'Etna, des trésors d'observations sur les fumerolles, les courants de laves, leurs tunnels, leurs moraines et enfin les éluis protec- teurs dont ils entouraient certains arbres sécu- laires; il en a fait plus tard l'objet de leçons impressionnantes. Durant cette même année 1865, Fouqué profite de son voyage pour étudier la chimie volcanique des iles Eoliennes et visiter de nouveau le Vésuve et la Solfatare. À son retour, il fait paraitre, dans les Annales des Missions scientiliques et étrangères, un Mémoire étendu sur les phénomènes chimiques qui se produisent dans les volcans; ce mémoire lui sert de thèse pour le grade de docteur ès sciences physiques: il la soutient avec grand succès, le 9 août 1866. Santorin fait partie d'un groupe d'iles volcaniques encore en ignition, au Sud de la mer Egée; il constitue une sorte de cirque, vaste cratère sous- marin, à bords en partie exondés, et occupe le milieu de l'arc volcanisé qui s'étend d'Aegine- Methana, à l'Ouest, à Nisyros, vers l'Est, en passant par Milo. L'affaissement qui a donné naissance à la mer Egée puise une partie de son intérèl dans sa posi- tion même, en plein milieu des plis alpins; en effet, la prolongation des Alpes Dinariques passe par le Péloponèse et l'ile de Crête, et ses plis ont élé poussés vers le Sud; au Nord, les plis alpins proprement dits s'étendent jusqu'aux Balkans et à la Crimée, et sont poussés vers le Nord. La mer Egée est donc du type des affaissements en ovale méditerranéen, de même que la Hongrie et les fosses italiennes; mais elle passe au type inter- médiaire d’effondrements, accolés aux plis en festons qui bordent les rivages asiatiques méri- dionaux, tels que ceux des iles de la Sonde; en outre, le groupe de Santorin, caractérisé par un 362 A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES magma relalivement très acide, fait partie du plus récent des affaissements de la Méditerranée. Fouqué s'est donné tout entier à l'étude de cet archipel; il y a fait quatre séjours, dont deux prolongés. Son premier voyage à Santorin date de 1866; il observe les débuts de l’éruption, qui a altiré l’at- tention du monde savant sur le petit groupe volcanique en ignition dans la mer Egée. Le dé- veloppement des centres éruptifs naissants se manifeste sous forme d'ilots de nouvelle forma- tion, émergeant doucement du fond de la mer et composés exclusivement de fragments entassés de lave solidifiée dans l’eau; sous ces blocs brille la lave incandescente, et les premières excursions de Fouqué au sommet du Giorgios et d'Aphroëssa sont vraiment émouvantes à tous les points de vue. Ces sortes de cumulo-volcans, à l'érection des- quels il assiste, correspondent à la prolongation de puissantes crevasses qui viennent de fissurer l’ancien sol de Néa-Kaméni, dont une moitié s'affaisse, pendant que l’autre se soulève par mou- vements lents. Dès que les cumulo-volcans sont suffisamment émergés, des explosions formidables se produisent et ébauchent à leurs sommets des cavités en forme de cratère ; il en sort des coulées d’andésite très visqueuse, qui se tiennent encore sans morcelle- ment sur des pentes lelles que la théorie des cra- tères de soulèvement y perd son principal et der- nier argument. Un petit cratère d'explosion se produil presque sous les pieds du courageux et patient observateur, en un point où la température avait été peu à peu en augmentant, et avait fini par donner naissance aux fumerolles sèches les plus chaudes, inversant ainsi l'ordre habituel de ces émanations volcaniques. Enfn, l'étude des sels et des gaz de ces fume- rolles comporte, à Santorin, des enseignements nouveaux : les plus chaudes sont riches en hydro- gène; celles qui jaillissent sous la mer donnent des bulles de gaz qu'on peut enflammer à volonté; leurs variations, dans le temps, sont des plus netles; tel évent perd rapidement son hydrogène en se refroidissant, et s'enrichit, à proportion, en acide carbonique. Les croûtes salines des fume- rolles sèches sont riches en sels magnésiens, et c'est là un fait rarement constaté. En cette même année 1866, Fouqué pousse ses explorations jusqu'à la partie occidentale de l'arc volcanique êt visite Methana, Sousaki, Milo. Il con- tracte, dans cette dernière île, le germe d'une fièvre intermittente, dont il a souffert toute sa vie ; et, cependant, la silicification des laves de Milo lui parait si intéressante qu'il n’a jamais regrellé son passage dans ce pays malsain. L'annonce d'une période d'activité volcanique à Terceira entraine Fouqué à faire une excursion dans l'archipel des Açores, dès le commencement de l’année 1867; il y trouve une éruption avortée, mais des fumerolles intéressantes, riches en mé- thane (gaz des marais) et contenant aussi de l'hy- drogène ; les immenses cratères ou caldeiras de la région attirent son attention; puis il retourne à Santorin pour étudier les cités prébistoriques ensevelies sous les projections ponceuses d'une ancienne éruption acide, que l'exploitation de ces ponces comme pouzzolane vient de mettre à découvert; l’affaissement qui a donné naissance à la baie actuelle est postérieur à ces ponces, el l'apparition des Phéniciens à Santorin, qui est postérieure au creusement de la baie, date de l’an 1500 av. J.-C. ; l’on peut ainsi juger de l'antiquité des premiers habitants de Santorin. Deux tremblements de terre violents, quoique localisés, attirent Fouqué à Mételin et à Céphalonie; il en rapporte des renseignements intéressants et des dessins précis de maisons fissurées et dé- truites. Lors du départ du jeune explorateur pour une de ses missions, Elie de Beaumont, lui faisant ses dernières recommandations : &« Vous allez peut- être, dit-il, observer des faits qui ne cadrentpas avee les opinions actuellement établies ; à votre relour, ne craignez pas de les signaler, quelle que soit la théorie qu'ils ébranlent ». Elie de Beaumont faisait ainsi allusion à la théorie des cratères de soulève- ment, qu'il soutenaitavec ténacité et qui s'appuyait sur la prétendue impossibilité, pour les laves, de couler en nappes larges, épaisses et compactes, sur des pentes dépassant quelques 10°. Fouqué reve- nait de Santorin avec de nombreuses observations contredisant péremptoirement cette prétendue im- possibilité; il redoutait fort sa première entrevue avec le maître. Elie de Beaumont l'interrogea du regard avec bonté; le disciple se contenta d’ineli- ner la tête, d’un air contrit, en signe affirmatif; le maître garda un silence digne et médilatif, mais il conserva à Fouqué sa bienveillance, qui ne pas- sait pas pour banale. En 1869, nous retrouvons Fouqué parcourant le Apennins en compagnie de M. Gorceix, et étudiant w les lagonis, gaz combustibles, volcans boueux et salzes de cette région. Il découvre à Sassoni des dégagements d’hydrure d'éthylène (éthane) qui l'in- citent à comparer ces émanations avec celles des puits pétrolifères des États-Unis. Les deux collabo- rateurs rapportent les éléments d'un important Mé- moire sur les nombreuses analyses qu'ils ont pu mener à bien. Un deuxième voyage aux Acores, en 1873, est. consacré à l'ascension du volcan de Pico et à l'exa= , € axsE VE ner — PR LÉ nd cu ré ® v” men des sources geysériennes de San-Miguel, riches en silice. Nous touchons à la fin de la première période de ;. la carrière scientifique de Fouqué ; avec une incom- « parable énergie et un courage inconscient du dan- “ser, il a multiplié ses courses aux tentres volca- niques de l'Italie méridionale, de la Grèce et des Açores. Les analyses effectuées sur place et contrô- “Jées au laboratoire, les matériaux de toute sorte mrecucillis et déjà partiellement étudiés, représen- “tent un trésor inépuisable dont il n'a pu utiliser ‘qu'une partie, sa vie durant. à. En 1873-1874, il est chargé de la suppléance du cours d'Elie de Beaumont ; en 1875-1876, de celle de Charles Sainte-Claire-Deville. C'est durant ce “dernier cours qu'il introduit en France l'étude mi- erographique des roches, dont Sorby en Angleterre, fogelsang en Hollande, Zirkel et Rosenbusch en Allemagne avaient établi les premiers rudiments. A proprement parler, la première Note de Fou- Bt collaborateur, quand je me décidai à présenter à la Société géologique de France (séance du “ques caractères microscopiques des roches acides nciennes. Nous eûmes à peu près pareil succès, “chacun de son côté : au cours de la discussion qui plaques minces de son élève favori : « Les pétrographes sont C'est en 1875 que nous avons combiné nos efforts et lié la fidèle collaboration qui nous a permis de triompher allègrement des commencements tou- jours difficiles, que la routine et un esprit conser- ateur ménagent, en général, à l'introduction de È Fouqué venait de faire paraitre sa Note sur de nouveaux procédés d'analyse médiale des roches ; elle contenait deux très belles photographies de plaques minces de Santorin et la découverte impor- tante de procédés mécaniques et chimiques d’épu- ralion des minéraux composant les roches: celles-ci, réduites en poudre, sont attirées par un électro- A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES 363 amant qui retient les minéraux ferrifères, ou sont traitées par l'acide fluorhydrique qui attaque rapi- dement les minéraux acides et respecte les éléments ferro-magnésiens. Dès cette époque, Fouqué avait en portefeuille presque tous les éléments, déjà rédigés, de son livre sur San{orin; il y était retourné une troisième fois en 1875, pour constater les der- niers changements survenus, du fait des phéno- mènes éruptifs décroissants. Lauréat du prix Cuvier en 1876, il est, en 1877, nommé titulaire de la chaire qu'il a occupée durant vingt-sept années. En 1880, il est appelé à faire partie de la Commission de la Carte géologique de la France; en 1881, il entre à l'Académie des Sciences, dont il sera président en 1901. Dès lors, sa vie laborieuse, pour se dépenser sur des théätres moins lointains et en des besognes plus variées, n’en est pas moins utile au progrès de la science. Il altaque, dans la Haute-Auvergne, l'étude de quatre feuilles au 80.000° : Brioude, Saint-Flour, Aurillac, Mauriac, et leur consacre douze années de courses sur le terrain, dans un pays encore mal préparé à la vie de touriste et, à cette époque déjà lointaine, plulôt sauvage et peu hospitalier. IL y menait une vie d’anachorète, oubliant souvent de déjeuner et portant lui-même sur son dos la récolte journalière de roches, qui constitue maintenant, au Collège de France, une magnifique collection, attendant encore une étude définitive; car Fouqué ne nous a donné que ses cartes, leurs notices, un résumé de la succession des éruptions dans le Cantal, et quelques analyses détaillées très instructives. Quand on parcourt ces belles régions, où un volcan, de la taille de l'Etna, montre à nu ses assises dans les ravins profonds creusés en éventail autour de son sommet, on est frappé de la justesse de coup d'œil du chercheur qui a su en déméler les prin- cipales périodes d'activité, distinguer les brèches éruptives des brèches de remaniement, et nommer les innombrables roches qui s'étagent, se coupent et s’entremélent dans ce majestueux Cantal. En 1879, Fouqué se décide enfin à faire paraître son livre sur Santorin et, avec son nouveau colla- borateur, il publie la Minéralogie micrographique, dont les planches ont contribué à vulgariser les nombreuses structures d'association des minéraux, révélées par le microscope; les 800 exemplaires de ce grand ouvrage sont épuisés en dix ans. De 1878 à 1882, les synthèses artificielles des minéraux et des roches, par fusion ignée et recuits successifs, occupent les deux collaborateurs, qui résument leurs travaux el ceux de leurs prédéces- seurs dans un volume paru en 1882, A la suite du grand tremblement de terre qui a ravagé, en 1885, la plus grande partie de l'Anda- 30% A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES lousie, Fouqué accepte la direction d’une Mission, chargée par l'Institut d'en étudier sur place les effets et les causes; il en rapporte, avec son colla- borateur, programme d'expériences sur la vitesse de propagalion des secousses dans les sols de diverses natures; ces expériences, effectuées au moyen d'explosifs ou de chocs d’un marteau-pilon, et d'un appareil basé sur l'enregistrement pholo- graphique des vibralions d'un bain de mercure, sont poursuivies à l'Observatoire de Meudon, au Creusot, dans les mines de Commentry, dans le marbre de Saint-Léon; elles révèlent que, dans le granite, la vitesse de propagalion dépasse 3.000 mètres par seconde, pour descendre au-des- sous de 300 mètres dans les sables de Meudon. Les vitesses de propagation des séismes des antipodes, à travers le Globe terrestre, ont récemment con- firmé l'exactitude de ces expériences. Les Romains faisaient usage d’une couleur bleue, dite bleu égyptien ou vestorien, dont la résistance aux agents chimiques et la belle teinte frappent les yeux dans les fresques de Pompéi et du Vatican. Cette couleur était inconnue de l’industrie moderne : Fouqué en a déterminé la composition : c'est un silicate double de cuivre et de chaux ; il se présente en lamelles quadratiques, à un axe négatif, et s’ob- tient par fusion ignée et recuitaurouge vif; un excès, même léger, de température l’altère, ce qui explique les insuccès préalables aux études poursuivies par l'auteur, en 1889. Après avoir à peu près épuisé la série des repro- ductions artificielles par fusion purement ignée et nous avions songé à aborder à notre lour la voie tracée par les mémorables synthèses de Sénarmont, de Daubrée et de Friedel, en chauffant divers silicates en vase clos, en présence de l’eau sous pression. Jusqu'au rouge naissant, en pre- nant les précautions nécessaires pour obtenir une fermeture hermétique, on obtient les ininéraux dont la science est redevable aux savants dont nous venons de rappeler les noms : quartz, feld- spaths, zéolites, ete. Mais, pour reproduire les struc- Lures des roches acides, et notamment le granite, il était nécessaire d'atteindre le rouge vif et, jus- qu'en 1891, aucun vase clos n'avait pu résister à une pareille température, en présence de l’eau sur- chauffée. Nous avons utilisé d’épais creusets en platine iridié, à 20 °/, d’iridium, qui ont conservé jusqu’à 41.000° une résistance suffisante, et nous avons obtenu ainsi la transformation des verres de granite et de porphyre en un magma fondu et bul- leux, chargé de microliles d'orthose, de mica noir et de spinelle. La déterminalion des plagioclases en plaque mince est un des problèmes les plus difficiles qui se soient posés aux pétrographes; elle a été résolue un recuit, journées à fouiller au microscope mes préparations de diverses facons, dont le point de départ estm toujours la connaissance exacle de l’ellipsoïde des indices par rapport aux clivages faciles des feld=« spaths. Il faut, en outre, connaître avec précision la composition chimique du plagioclase à l'étude. Dès 1892, Fouqué a courageusement abordé ce pro blème ardu, en partant des seclions perpendicu=\ laires aux bissectrices, mesurant leur signe, l'angle du plan des axes avec les traces de clivages faciles séparant avec un soin extrême les produits de den“ sités diverses au moyen des liqueurs lourdes, et les analysantentin parla méthode d'Henri Sainte-Claire Deville. Il faut avoir assisté à ce labeur prolongé pour juger des efforts qu'exige le progrès de l& science. En octobre 1893, Fouqué parait satisfaib de son œuvre; il m'écrit : « J'ai passé de bonnes d'Auvergne et de quelques autres endroits, ak point de vue de la composition des feldspaths en grands cristaux. L'application de mon procédé, basé, comme vous le savez, sur l'examen des sec- tions perpendiculaires aux bissectrices, marche merveille. On n'éprouve vraiment de difficultés que dans quelques cas exceptionnels, où les repères clivages ou macles, font défaut, ou bien encore quand la macle de Carlsbad offre une pénétralion anormale. » En septembre 1894, la note est changéen et plus pessimiste : « J'ai travaillé et travaillé encore à mettre au net mes documents sur les feldspaths, mais je suis effrayé des lacunes que j@ vois dans ce travail et des vérifications qui: mêm restent à faire. Je ne le finirai certes pas, au moins | tel que j'aurais voulu le faire. Un de ces jours, : quand je perdrai patience, je publierai ce que j'ai { entre les mains; mais c'est bien ennuyeux de“ publier quelque chose qui ne vous satisfait pas» Ce travail a paru en 1896; c'est un monument durable, et les citations que j'ai extraites de ma modeslie, de sa conscience toujours en éveil, et de son extraordinaire puissance de travail. Les derniers travaux de Fouqué ont trait à des analyses e vergne. Il avait peu d'estime pour ce mode un peu sommaire d A ME et le cat tros théos partager Le “te (6 tree sceptique : « N | quoi bon, disait-il, s'évertuer à déterminer la come position minéralogique normale d'une roche, quand on possède des moyens sûrs d'apprécier, sa composition réelle? » La réponse à cette question doit, en réalité, tenir compte de ce fait que la com= position en bloc des roches d’une série déterminée. décèle, lorsqu'elle est convenablement interprétées un air de famille, une consanguinité qu'on peut difficilement apprécier d'une autre façon avec un® A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES 365 suffisante délicatesse. C’est ainsi qu'à ce point de vue les analyses publiées par Fouqué, en 1902 et en 1903, nous ont fourni de précieux points de repère sur la série du Cantal. Nous avons terminé la revision rapide des prin- cipales étapes de la vie scientifique de Fouqué; nous voudrions caractériser en quelques mots son œuvre et en faire ressortir l'importance capitale : “ Fouqué a été l’un des rénovateurs de l'étude des phénomènes volcaniques et des produits éruplifs. ; 4° Il débute en confirmant, complétant et géné- “ ralisant les données que la science doit à Charles “ Sainle-Claire-Deville sur les émanations volatiles “(les volcans. Fouqué démontre que les produits des fumerolles sont principalement fonction de leur température, ce qui explique la liaison apparente entre la composition d'une fumerolle, sa place par rapport au centre éruptif, et le temps écoulé depuis le commencement de l’éruption. Elles dérivent » donc les unes des autres, par disparition successive de certains éléments, au fur et à mesure de la baisse de température, et nor par apparition de produits nouveaux. Tous les produits volatils des éruplions volca- niques peuvent se rencontrer dans les fumerolles - d'ordre supérieur et cessent d’apparaître dans + celles d'ordre inférieur, à mesure que la tempéra- - ture s’abaisse et devient insuffisante pour les vola- - Liliser ou pour produire la réaction chimique d’où “ils dérivent. Il suffit donc de dresser une liste des produits constatés dans les fumerolles les plus chaudes; les coupures sont ensuite et ne peuvent être qu'arbitraires. On doit à Fouqué la découverte, dans les fume- rolles. du carbonate de soude, du carbonate d'am- - moniaque et de l'hydrogène libre; les travaux - récents de M. Armand Gautier ont montré l'impor- “lance capitale de ce dernier élément, qui donne “ naissance aux flammes accompagnant les éruplions volcaniques. 2 L'étude approfondie de la grande éruption de “1866 à Santorin démontre avec évidence qu'il est nécessaire de suivre minutieusement toutes les phases de ces grandioses manifestations de J’aëti- -vité interne du Globe; Fouqué prépare, par l'étude “détaillée des cumulo-volcans des Kaménis, celle { que M. Lacroix vient de nous donner sur le cumulo- volcan de la Montagne Pelée. Tout, dans cette œuvre magistrale qui a nom Santorin et ses éruplions, témoigne du courage téméraire, de la conscience et de la profonde per- _spicacité de l'observateur; il détruit, chemin faisant, la théorie déjà vermoulue des cratères de soulève- ment et montre le merveilleux parti que l'étude des roches tirera désormais du microscope et des procédés de purification de leurs minéraux élémen- LR RS A ee 7 SR ee ut | taires; enfin, ses nombreuses analyses chimiques des roches, des minéraux et des fumerolles servi- ront maintes fois d'exemple el de documents à ses successeurs. Le tracé des contours géologiques détaillés sur les cartes au 80.000° du Cantal, du Cézalier et du versant sud du Mont-Dore fait connaitre la straligra- phie d’une des plus instructives régions volcaniques du monde; la plupart des conclusions du maitre ont résisté à l'épreuve de vingt-cinq ans de durée qui sépare les explorations de Fouqué des revisions à grande échelle confiées à un de nos plus éminents disciples et collaborateurs, M. Boule. Fouqué avait reconnu l'existence de trachytes anciens très acides, à la base des éruptions andésitiques ; M. Boule les à montrés associés à des phonolites et les à datés avec précision : ils sont du Miocène supérieur; la séparation des brèches éruptives et remaniées à été prévue et décrite dans la notice d'Aurillac. 3° Toutes ces séries éruplives si variées, Fouqué les a soumises à l'étude microscopique en plaques minces. Avant le développement des méthodes micrographiques nouvelles, il fallait bien recon- paitre, avec Cordier, que la science des roches s'ar- rêlait à celles dont les éléments sont discernables à la loupe ou délerminables en poudre grossière sous le microscope. Fouqué était passionné pour les progrès de son instrument favori : malgré l’aridité du sujet, il à consacré plusieurs leçons à développer à son auditoire les exlinctions en zones, au moment de l'apparition de mon Mémoire sur ce problème; il n'a eu de cesse que je n'abordasse l’étude des feldspaths zonés, étude qui me paraissait hérissée de difficultés et que j'aurais abandonnée, s’il ne m'avait encouragé à maintes reprises et réconforlé par son juvénile enthousiasme. 4 C'est à Fouqué que la science doit les ingé- nieuses méthodes de purification des minéraux engagés dans les roches, basées sur l'emploi d'un puissant électro-aimant et sur l'attaque plus ou moins ménagée à l'acide fluorhydrique; gràce à ces procédés très pratiques, on peut séparer presque rigoureusement les éléments acides des éléments ferro-magnésiens el épurer ceux des minéraux que l’on veut soumettre à une analyse précise. Tous les minéraux des principales roches de Santorin ont été ainsi séparés et analysés ; nous avons réussi, de la même facon, à isoler le zircon dans les roches à mica noir. C’est du Laboratoire du Collège de France qu'est sortie la première étude sur les liqueurs denses et leur emploi comme moyen de préparation méca- nique : le maître avait signalé le bi-iodure de mer- cure et de potassium comme propre à cet usage à l'un de ses préparateurs en quête d'un sujet de thèse. pe 506 5° Enfin, l'étude, si patiemment prolongée sur le terrain, des roches volcaniques a induit Fouqué aux expériences synthétiques de reproduction par fusion ignée et recuit prolongé, auxquelles il m’a associé. Les minéraux que cette méthode a permis de reproduire sont nombreux : oligoclase, labra- dor, anorthite, amphigène, néphéline, enstatite, hypersthène, pyroxène, péridot, spinelle, fer oxydulé, fer oligiste. Les cinq premiers n'avaient encore été reproduits par aucune autre méthode; mais elle a eu surtout pour mérite de s'appliquer à la reproduction d'associations complexes, identi- ques à la plupart des roches volcaniques basiques de la Nature : celles-ci se font, comme toutes les roches, en présence de gaz et de vapeurs; mais l’action minéralisatrice de ces émanations volatiles rétrocède, pourles roches basiques, devant la simple influence d'un recuit prolongé à deux ou trois températures décroissantes, convenablement choi- sies pour amener la cristallisation successive des silicates naturels : andésites, labradorites, basaltes, leucotéphrites et leucilites, néphélinites, ophites, météorites ont été ainsi fidèlement reproduites, non pas sous forme de scories plus ou moins cristalli- tiques et vitreuses, mais bien sous forme de roches largement cristallisées, avecles allongements et les aplatissements favoris de leurs éléments et la difré- rence de grain entre les éléments du premier temps et ceux du second, connus sous le nom de micro- lites. Cerlains magmas nous ont aussi montré que, par fusion ignée, ils produisent de tout autres associa- tions que celles qui pouvaient être prévues : ainsi un mélange, par parties égales, de mica noir et de microcline s'est transformé en une leucitite à péridot, démontrant ainsi la parenté de certains lamprophyres avec les roches d’épanchement à feldspathides, parenté qui a été plus tard retrouvée, dans des séries naturelles de roches de l’Absaroka, par M. Iddings. Je me rappelle le jour où nous avons reproduit pour la première fois des microlites d'oligoclase; la fusion et le recuit avaient fourni une sorte d'émail blanc, analogue à du verre dévitrifié; sa poussière agissait peu sur la lumière polarisée; Fouqué était découragé; j'emportai, séance tenante, le petit creuset, pour y faire tailler sans retard quelques plaques minces; une heure après, nous étions en exlase devant un bel agrégat de microlites feldspa- thiques, aplatis suivant la face g!, présentant les macles de l’albite et de Carlsbad, et en tout si semblables aux magmas des andésiles naturelles que nous ne pouvions plus douter d'une longue suite de succès. Nous n'avons certainement jamais ressenti une émotion plus vive, une satisfaction plus intense. Il ne faut pas oublier que nos prédé- A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES F cesseurs ne disposaient pas de l'examen microsco- pique : aucune de ces roches artificielles, si con- vaincantes et si nettement déterminables, n'aurait pu être étudiée sans le secours du microscope et des plaques minces; l'espèce d'émail plus ou moins. foncé qui les compose est, en effet, aussi peu déter- minable, à la loupe, que la pâte des basaltes et des roches compactes, Fouqué est mort à soixante-seize ans, subite- ment, dans la malinée du 7 mars 1904, en pleine possession de sa lucide inteliigence, entouré de sa famille patriarcale et de la digne compagne de sa noble vie. C'était un maitre profondément dévoué à ses élèves, un ami incomparable, une âme ferme, droite et tidèle; quand il s'était donné, il ne se reprenail plus ; mais son amitié n'était pas banale, et il ne la prodiguait pas. Il n’était pas partisan des hypothèses hasardées, qu'il faut remanier sans cesse ; sa tendance était aux observations précises, aux expériences soigneusement conduites et dosées, Il avait coutume de dire que les fondements de l'enseignement géologique sont, en Stratigraphie la Paléontologie, en Pétrographie la Minéralogie micrographique et la détermination de la structure d'association des minéraux élémentaires ; pour lui, l'analyse chimique ne devait s'effectuer que sur des minéraux soigneusement triés et purifiés. Doué d'un grand charme d'’éloculion, il parlait une langue pure et limpide; il écrivait d'un style simple, mais harmonieux, et son esprit, essentielle- ment logique, se pliait tout naturellement aux développements méthodiques et bien ordonnés. La levue des Deux-Mondes avait accepté plusieurs fois sa collaboration, notamment à propos des anciens volcans de la Grèce (1867), de l’éruplion des Acores (1873), el des applications modernes du microscope à la Géologie (1879). En 1890, il fut chargé de lire une étude sur le Plateau Central, en« séance solennelle des cinq Académies. | Fouqué a laissé, à tous ceux qui l'ont connu, le souvenir d’un homme de devoir et de conscience, età plusieurs de ceux qui l'ont aimé un vide irré= parable. con T dE: COR TT III. — PROGRAMME DE LA CHAIRE ACTUELLE. Sd Sin se Ce résumé, inégalement développé, du passé de la. chaire d'Histoire naturelle des corps inOrga niques du Collège de France serait incomplet, Si nous ne tentions d'y adjoindre une énuméralion sommaire des branches nouvelles de la science» qu'elle doit cultiver, de celles, tout au moins, qui. ; sont encore en voie d'évolution; il s’agit presque d’une encyclopédie; nous pouvons, cependant, en, élaguer la Paléontologie, qui a son domaine propre A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES ailleurs qu'au Collège de France, bien qu'il soit fier des grands noms de Daubenton et de Cuvier. $ 1. — Tectonique. 1. Zones de plissements. — Nous avons vu plus | haut que la connaissance parfaite de la face de la À Terre est désormais lribulaire des cartes géolo- — giques détaillées ; en France, nous sommes sur le point de terminer celle au 80.000°, à la naissance de laquelle Élie de Beaumont a présidé en 1868, et nous appelons de lous nos vœux la confection d'un canevas topographique plus précis et à plus grande échelle, qui seul convient à la représentation gra- phique des régions compliquées, que nos éminents collaborateurs ont dû aborder avec des minutes insuffisantes. Parmi eux, je veux rendre hommage aux tra- vaux d'un ami, dont les conceptions sagaces ont récemment renouvelé l'intérêt que présente l'étude des zones de plissement de l'écorce terrestre : Mar- cel Bertrand a montré dans nos Alpes, et aussi dans les plis de notre système hercynien, la généralité “du phénomène des nappes de charriage, tout en restant dans celte sage réserve dont M. Suess nous a donné l'exemple. Un grand nombre de disciples se sont élancés, surtout en France et en Suisse, sur les traces des maitres ; lès faciès des nappes uperposées ont été soigneusement comparés à eux des racines encore en place, et ces données récises ont ajouté une valeur spéciale aux tra- “aux récents de MM. Schardt, Kilian, Haug, Lu- geon, Termier. - Mais la moisson d'observations, dignes de foi, Sur les nappes de charriage est loin Apres encore ; Le. rendus de ne Académie des Sciences, et dans laquelle il appelle l'attention sur les nom- breuses lherzolites et serpentines que contient d'or- naire la base des nappes de charriage, ainsi que r la forme en festons imbriqués et en guirlandes de leur périphérie, bien différente des conver- °n n'est pas Fee la cause même des forces tan- entielles qui ne soit en litige : Élie de Beaumont a cherchait dans le refroidissement du Globe et ans la diminulion progressive de son diamètre. ist ne sont qu'une variante de cette théorie. Celle de l « Zsostasie » est bien différente: elle s'appuie sur les variations de la pesanteur et sur la nécessité permanente, pour la croûte terrestre, d'obéir à ces variations, qui s'effectuent en général à l'inverse de ce qu'on aurait pu prévoir. 367 Comme on le voit, les systèmes de montagnes sont encore une des grandes inconnues de la tec- lonique ; leur étude exige de nouveaux efforts, parce que la théorie n'en est pas faite : les expé- riences synthétiques ne sont ici d'aucune valeur : car la similitude n'existe pas en Mécanique; par suite, les observations sur le terrain doivent être patiemment poursuivies dans leurs plus petits détails, puisque nous ignorons si ce ne sont pas ces détails qui nous donneront la clef de l'en- semble. Aires d'affaissement. — Tantôt en dehors et au pied des régions plissées, tantôt à leur intérieur et, semble-L-il, parfois à leur clef de voûte, on observe de grandes aires d'affaissement dont font partie les fosses marines et certains bassins ter- resires nettement circonscerits, M. Suess a remarqué que les premières ne sont généralement pas volca- nisées,tandis que les fractures qui bordent les secon- des donnent passage aux cheminées volcaniques. C'est à l'enfoncement de ces aires, puis à leur comblement par les dépôts siratifiés, que M. Suess attribue en partie les mouvements eustatiques de l'Océan, c'est-à-dire les régressions et les trans- gressions marines généralisées, dont on trouve la trace bien évidente à plusieurs époques de l'his- toire géologique du Globe. Dans un remarquable Mémoire sur les géosynelinaux (1900), M. Hang a heureusement développé et modifié ces premières données, en établissant le contraste absolu qui existe entre les sédiments synchroniques des géo- synclinaux et des autres régions du Globe. Ici encore, que de reslrictions, que de problèmes pendants, que de patientes observations néces- saires ! $ 2. — Volcanisme. I semblait, après Santorin, que l'étude d’un volcan en ignition eût à peu près dit son dernier mot; celle que M. Lacroix vient de terminer, au sujet de la Montagne Pelée, montre bien que le volcanisme est un sujet inépuisable d'observations nouvelles : il a vu naître et monter un cumulo- volcan aérien de 300 mètres de hauteur, sous forme d'un piton laminé de roche päteuse, portée à la température du rouge vif à l'intérieur, et s'écrou- lant périodiquement à la périphérie; l’andésite à hypersthène de l'écorce originelle fait place main- tenant, sans changement de magma chimique, à des dacites à quartz libre de seconde ou même de troisième consolidation; c'est la première fois qu'il a été donné à l’homme de voir naître, consciem- ment, sous ses yeux, une roche à quartz libre. Santorin, la Martinique sont deux étapes capitales dans cetle grandiose étude du volcanisme, dont il ne faut pas se lasser de scruter les annales. 368 A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES $ 3. — Métamorphisme et roches de profondeur. L'étude micrographique des plaques minces s’est heureusement associée à l'examen stratigraphique des roches de profondeur, de leurs contacts et, plus généralement, des roches cristallophylliennes ; les phénomènes de métamorphisme, qui étaient expliqués dans les termes vagues dont l'ancienne Pétrographie élait bien forcée de se contenter, ont pu enfin être précisés dans leurs détails et recher- chés dans leurs causes. Il y a déjà longtemps que les paléontologistes sagaces s'étonnaient de la ri- chesse et de la perfection de la faune dite pre- mière, de celle qu'on trouve dans les premiers sédiments fossilifères; la transformation d’une partie de l'écorce terrestre per ascensum leur pa- raissait nécessaire pour expliquer la disparition des faunes vraiment primordiales. L'étude des roches métamorphiques et de pro- fondeur à précisé le mode de transformation vrai- semblable et, par suite, la genèse des granites, des gneiss et des micaschisles; elle a pour base solide l'examen approfondi des transformations que les granites font subir aux diverses natures de strates qu'ils touchent et aussi celui des phéno- mènes endomorphes subis par ces roches, qui digèrent en profondeur une partie de leurs sal- bandes. Nous avons été suivi, dans cette voie fé- conde, qui comprend aussi les enclaves des roches volcaniques, par des maitres tels que MM. Lacroix et Barrois; mais tous les détails de ces transfor- mations si curieuses sont à étudier, et le sujet tout entier est tributaire d'expériences synthétiques ncore incomplètes. Dans un autre ordre d'idées, le microscope commence à peine à démèêler l’origine de certains dépôts sédimentaires, tels que les phosphates, les minerais de fer, les dolomies, etc. M. Cayeux nous a montré, par ses recherches originales, que de surprises uous réserve l'avenir dans celte voie nouvelle. $ 4. — Reproductions artificielles. IL semble que les synthèses par fusion ignée et recuit n'aient plus de grands secrets à nous révéler; mais l'action de la chaleur en présence de l’eau sous pression n'est pas aussi avancée, et cependant c'est ce genre de synthèse qui doit nous donner la clef des roches de profondeur, du mélamorphisme et de la genèse des gneiss. L'expérience de 1891, dans des creusets hermétiquement clos en platine iridié, nous a montré que le verre de granite fond vers 1.000°, en présence de l'eau surchauffée, et se transforme en un trachyte micacé; cette unique et insuffisante synthèse réduit déjà de moitié l'épaisseur probable de l'écorce terrestre; il faut reprendre et varier ces expériences d'un intérêt capital. $ 5. — Chimie des émanations volatiles et des magmas. 1. lumerolles. — Si un sujet semblait épuisé, tout au moins pour ce qui concerne l'observation sur le lerrain et l'analyse dans le laboraloire,s c'élait celui des fumerolles volcaniques. Et, cepen« dant, M. Armand Gautier a récemment renouvelé l'intérêt de ces études, en montrant qu'il suffil dem chauffer au rouge une quantité suffisante de roche de profondeur, granite, porphyre bleu, ophite,« lherzolite, pour obtenir la plupart des éléments gazeux des fumerolles. Les travaux célèbres de M. Moissan sur les carbures métalliques expliquent eux aussi, les fumerolles carbonées. Plus récemment encore, M. Lacroix a rapporté de la Martinique les observations les plus inatten dues sur les nuées ardentes, ces fumerolles gigan= tesques et homicides, si mal connues jusqu'à pré= sent; en même lemps, il nous a fait connaitre. d’autres fumerolles qu'on peut appeler posthumes; et qui naissent le long des anciens cours d'eau el dans les anfractuosilés du sol, comblées par les apports conglomératiques et cinéritiques des nuéess ardentes. û | & £ | 2. Gites métallifères. — On doit à M. de Launay de nombreuses observations sur la genèse et l’oris gine des gites métallifères; leur nature et Ja richesse de leur minéralisation dépendent directe ment de la nature des fumerolles qui leur ont donné naissance et, dans une certaine mesure, dé la distance à laquelle le gite mélallifère se trouvé du magma éruplif qui lui est lié. Il en résulte une relation entre la constitution d’un gite métallifèr et sa profondeur, qui est elle-même fonction dea profondeur que les érosions ont atteinte dans là région éludiée. Il est naturel que, dans les 70 plissées de l'écorce terrestre, l'érosion soit d'au tant plus grande que le système de montagnee plus ancien; on voit, dès lors, comment M: Launay est amené à interpréter les types régios naux, scandinave, saxon, algérien, et par quel considérations analogues il a été induit à suppos que, dans le noyau encore incandescent et se fluide du Globe, les éléments chimiques se son écartés du centre en raison inverse de leur po alomique. 3. Magmas.— Tout récemment, les pétrographe 1 américains et, à leur tête, M. Iddings ont propose une classification et une nomenclature, basées une composition minéralogique calculée, déduit | de l'analyse chimique en bloc. C’est peut-être alee | A. MICHEL-LÉVY — LA CHAIRE D'HISTOIRE NATURELLE DES CORPS INORGANIQUES 369 un peu loin, et le procédé présente tout au moins l'inconvénient de mêler, dans une même recherche, » la teneur de la roche en éléments ferro-magné- siens et son originalité magmatique; or, c'est cette dernière originalité qui présente un intérêt durable, . quand elle existe réellement dans une série . donnée. - Le tracé de diagrammes représentatifs et le calcul assez aisé de paramètres caractéristiques permettent souvent de spécifier les qualités chi- .miques communes à une série; c'est ainsi que le groupe de Santorin dérive d'un magma voisin de celui des Antilles, et qu'il est plus acide que celui de l'Etna, beaucoup plus que ceux du Cantal et du Mont-Dore. Il est certain qu'il faut recourir à ces considérations quand on veut distinguer, par exemple, les différentes sortes d'andésites entre elles, et prévoir que, par cuisson en présence de l'eau, sous une pression déterminée, le magma qui donne l’andésite à hypersthène de la Montagne Pelée se transformera en dacite à quartz libre. Ces méthodes, loules modernes, démandent à “être poursuivies et vulgarisées, corrélativement avec les délerminations micrographiques précises. | f $ 6. — Micrographie et Minéralogie. plaques minces des roches, dans lesquelles les “ minéraux, laillés au hasard de leur orientation, Rchetent celte infériorité par leur grand nombre, “sont maintenant très connues, bien qu'elles ne soient guère mentionnées que pour la forme dans les programmes universitaires. Il ne faut pas, d’ail- eurs, oublier que la détermination pratique et ra- pide de certaines familles difficiles, comme les lagioclases, a encore fait des progrès notables en 1904, ce qui ne permet pas de dire que c’est là de ‘histoire ancienne. - Mais ce qui est moins connu el sur quoi nous “oulons insister, c'est que, si, pour progresser, la Science nouvelle’ a dû emprunter à la Minéralogie “es méthodes en les modifiant convenablement, ar réciprocité elle a rendu à sa sœur ainée les ervices les plus signalés. D'abord, elle lui apprend se servir de plaques très minces et lui montre les clusions et les impuretés des minéraux réputés les plus purs; elle lui fait connaitre l'incroyable iffusion de certains minéraux, tels que l’apatite, sphène, le zircon, dans la Nature; elle l’accou- lume à l'association et à la transformalion usuelles “de l'épidote en zoïsite, du pyroxène en amphibole. . Enfin, elle lui montre nettement les macles micros- _copiques, autrefois superposées el indéchiffrables en plaques trop épaisses. _ Mallard s'appuie sur les nouveaux procédés pour commencer ses admirables études sur les Les méthodes micrographiques, applicables aux REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. anomalies optiques dans les cristaux pseudo- cubiques; puis, de proche en proche, il découvre la loi qui régit les macles par mériédrie et par pseudo-symétrie (pseudo-mériédrie). Il devait être donné à un de ses élèves, M. G. Friedel, de com- pléter, tout récemment, l'œuvre du maitre et de donner une forme simple et définitive à la loi qui régit toutes les macles. Quand Des Cloizeaux fait sa dernière grande dé- couverte, celle du microcline, ce sont les plaques minces des pétrographes qui lui montrent les filonnets d'albite traversant le nouveau feldspath, et c’est la méthode des éclairements communs qui démontre que l'orthose, en apparence associé au microcline, n'est qu'une associalion submicros- copique de lamelles maclées de ce dernier mi- néral. IV: — ConNcLUSION. Comme on peut en juger, les branches nouvelles de la science de la Terre assurent à cette chaire un domaine presque illimité ; il y a lieu d’être effrayé de la longueur des avenues, à peine lracées, qui s'ouvrent de toute part devant nous. Et encore avons-nous passé sous silence la bathymétrie et la chimie des fonds de mer et des lagunes, qui pré- parent les récurrences de faciès caractéristiques dans la série des étages géologiques ; nous avons également omis les curieuses modifications et épi- génies dues aux eaux d'infiltration, qui, circulant jusqu'au niveau des vallées les plus profondes, prêtent une vie toujours re#ouvelée aux roches préexistantes, et creusent des canaux souterrains, aussi pittoresques que dangereux pour la purelé des sources d'eau potable. Enfin, nous avons laissé de côté l'étude du modelé des terrains aux diffé- rents âges, qui vient en dernière analyse se con- fondre avec la Géographie physique, devenue une science indépendante, entre la Géologie et la Géo- graphie. Nous ressemblons à l'explorateur des hautes cimes, qui s’est attaqué à l'escalade de quelque pic compliqué et infranchissable. Haletant, il monte péniblement ; l'air s’est raréfié autour de lui et les forces lui font défaut. Alors, il s'arrête et jette un coup d'œil sur le chemin déjà parcouru. L'horizon s'est élargi, la vue s’est transformée, les détails semblent d'une nelteté surprenante. L'enthou- siasme lui fait oublier sa fatigue et il repart pour le sommet, qu'il n’atteindra jamais. Puissent nos efforts ne pas paraitre trop indignes de ceux de nos illustres prédécesseurs. A. Michel-Lévy, Membre de l'Académie des Sciences, Professeur au Collège de France Directeur du Service de la Carte géologique de la France. s* 310 L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE MODES DE FORMATION ET DE PRÉPARATION DES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE Indépendamment de l'intérêt direct que pré- sentent cerlaines d'entre elles, les aldéhydes saturées de là série grasse constituent, par suite de l'extrême plasticité de leur molécule, les plus féconds agents de synthèse dont dispose la Chimie organique ; aussi, depuis longtemps, leur obtention et leur préparation ont-elles fait l'objet de très nombreuses recherches. Celte multiplicité de ten- talives montre qu'aucune d’entre elles n'a complè- tement résolu le problème. Si, en effet, on se livre à une révision critique et expérimentale des travaux un peu anciens, on se trouve obligé de reconnaître que les méthodes les plus classiques, ou bien ne donnent que de mauvais rendements et des produits impurs, ou bien n'offrent aucun caractère de géné- ralité et sont applicables tout juste à trois ou quatre termes de la série. Tout récemment, des méthodes très variées ont été publiées qui ont rendu aisée la préparation d'un grand nombre d'aldéhydes et laissent entrevoir dans un avenir prochain la résolution du problème dans toute sa généralité. On peut obtenir une aldéhyde à l’aide d'une matière première dont le squelelte d'atomes de carbone est identique au sien; il peut encore être plus compliqué ou plus simple. Nous dirons qu'on a employé dans le premier cas une méthode de transformation, dans le second une méthode de dégradation ou analytique, dans le dernier une méthode synthétique. Ï. — MÉTHODES DE TRANSFORMATION. Les méthodes appartenant à cetle calégorie peuvent elles-mêmes se subdiviser en six groupes, suivant qu'on emploie un procédé d'hydrolyse, d'hydratation, d'isomérisation, de déshydratation, d'oxydation ou, enfin, d'hydrogénation. $ 1. — Méthodes par hydrolyse. Tous les dérivés des aldéhydes : acétals, imines, oximes, hydrazones, phénylhydrazones, semicar- bazones, ele., sont susceptibles de régénérer les aldéhydes correspondantes par hydrolyse, quand on les lraite par les acides sulfurique ou chlorhy- drique étendus el bouillants. Mais cette opération ne peut évidemment constituer un véritable mode de préparation qu'à une condilion, c’est que la matière première en question n'ait pas été obtenue en partant de l'aldéhyde elle-même. Nous en consi: dérerons, dans la suite, sous réserve de la condition précitée, l'obtention comme équivalant à l’obten- tion de l’aldéhyde correspondante elle-même, et nous en parlerons en temps et lieu. $ 2. — Méthodes par hydratation. Une seule classe de corps serait susceptiole de fournir les aldéhydes par pure hydratation : ce serait celle des hydrocarbures acétyléniques mono- substitués. Or, seul le premier terme de la série, l'acélylène, justifie cette prévision. Si, quand on le traite par l'acide sulfurique à 80 °/,, il ne donne que des produits dont, jusqu'à ce jour, l’élude est » incomplète, en revanche, comme l'a constaté M. Kutscheroff, au contact du bromure de mercure et de l’eau, il se transforme nettement en aldéhyde, après avoir donné naissance à un composé inler- médiaire qui, d’après les tout récents travaux de MM. Biltz et Hofmann, serait le lribromomereuri- acélaldéhyde, formé suivant l'équation : CH? + 3 HgBr° + H?0 — CHO — C(HgBr) + 3HBr. | ; A M. Desgrez est même parvenu à obtenir de la paraldéhyde contenant une pelite quantité d’al- déhyde non polymérisée en chauflant avec de l’eau à 325° l’acétylène lui-même ou, mieux, un corps susceptible de fournir ce gaz par sa décompo= sition, l'acide acétylène-dicarbonique. Quant aux homologues monosubstitués de l’acé- tylène R— C: CH, au lieu de donner naissance aux aldéhydes R— CH°— CHO, il fournissent less acétones R.CO.CH°. $ 3. — Méthodes par isomérisation. Certains alcools non saturés sont capables de donner naissance à des aldéhydes par isomérisation C'est, par exemple, d'après MM. Sabatier et Sen= derens, le cas de l'alcool allylique, qui, en passant sur du cuivre réduit chauffé entre 180 et 300°, sem transforme en aldéhyde propionique; malheureu=" sement, celte intéressante réaction n'a pu élré généralisée, à cause de la difficulté que l’on éprouve à se procurer ce genre d'alcools. Parmi les autres alcools qui pourraient s'isomé- riser en aldéhydes figurent les hontologues 8-subs= titués de l'alcool vinylique : R : NE R.CH : CH(OH) ou pr : CH (OH). Æ + En réalité, on n'a jamais obtenu avec certitude L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE mais on a souvent préparé leurs éthers halogénés : . R CH:CH(X)ouleurséthers-oxydes: R.CH : CH.0.R'. La saponification des premiers par l'acide sulfu- rique étendu, des seconds par l'eau et la litharge, … conduit effectivement à l'aldéhyde correspondante “ (£ltekof). Les homologues monosubstitués de l'oxyde | d'éthylène, ou oxydes des glycols x primaires-secon- … daires, peuvent êlre isomérisés, soit en aldéhydes, soit en acétones : pee R.CH — CH? Su7s (e) R.CH°.CHO R.CO.CH* ou Mais on obtient exclusivement l'aldéhyde quand R représente un radical aromatique ou quand on a affaire à des dérivés disubstitués asymétriques : PIN PRIT EPS. R R ÿe— ce —" \CH.CHO. RER ni Ô en, Cette transposition se produit sous l'action de Ja chaleur seule entre 500 et 600°, ou entre 200 et - 300° si les vapeurs sont en contact avec l’alumine - pulvérulente, entre 150 et 200° lorsqu'on opère en “vase clos avec de l'eau additionnée de petites quantités d'acide chlorhydrique ou de sels tels que les chlorures de zinc ou même de plomb; enfin, “elle peut se réaliser à la température ordinaire au contact du chlorure de zinc fondu. Aux résultats fournis par les phénomènes d'iso- -mérisation se rattache l'expérience de MM. Lwoffet Scheschukoff, qui, en abandonnant à la température - ordinaire, avec de l'acide chlorhydrique étendu, .l'isopropénylcarbinol CH: C(CH°).CH°OH, ont réussi à transformer ce dernier en aldéhyde isobutylique. ais, comme ces auteurs ont obtenu dans la même opération l'isobutylèneglycol (CH°*:C(OH).CH°OH, est-à-dire le produit d’hydratation de l'alcool thylénique primitif, la formation d'aldéhyde iso- butylique est due à la déshydratation de ce glycol à, comme la suite le démontre. $ 4. — Méthodes par déshydratation. Nous ferons rentrer dans cette catégorie tous les rocédés qui consistent à enlever non seulement ine molécule d'eau, mais aussi une molécule d’al- tool, d'acide chlorhydrique ou iodhydrique, à cause de l'identité du mécanisme. — Toutes les fois qu'au cours d'une réaction on peut transitoirement former un oxyde de glycol x, on doit s'attendre, d'après ce que nous avons vu dans le paragraphe précédent, à obtenir, suivant les cas, un mélange d'aldéhyde et de cétone ou une aldéhyde seulement. … C'est ce qui arrive lorsqu'on soumet à l’action des déshydratants acides (chlorure de zinc solide 371 ou acide sulfurique étendu) les glycols «; on ob- lient alors, avec les glycols primaires-secondaires, simullanément!, une cétone et une aldéhyde : R.CHOH.CHOH ou R.CH®.CHO + H°9 R.CO.CH3 + H°0, tandis qu'avec les glycols primaires-tertiaires, on a une aldéhyde exclusivement : R NC{(OU).CHEOH — R CH.CHO + F0. R” R/ C’est encore ce qui a lieu lorsque, suivant Carius, Linnemann, Eltekoff, Charon et Séailles, on chauffe en tube scellé avec de l’eau, ou mieux avec de la litharge, les éthers mono et di-halogénés, et prin- cipalement les éthers iodhydriques de ces mêmes glycols «. En particulier, comme l'a montré M. Bou- gaull, dans le cas de certains composés aroma- tiques mixtes, on peut même réaliser, d'un seul coup, par l’action de l’iode et de l’oxyde de mer- cure, la transformation d’un hydrocarbure éthylé- nique en aldéhyde. La monoiodhydrine qui prend d'abord naissance, sous l'influence d'un excès de réactif, et par suite d’une transposition moléculaire qui a le plus grand rapport avec l'isomérisation pinacolique, est transformée en aldéhyde : 2[0CH*.CH#.CH : CH.CH°] + HgO + 21 + H°0 — 2{[(0CH®).CSH*. CHOH. CHI. CH°] + Hg! ; OCH*CSH*.CH (OH).CHE.CHS=— HI + OCH°.CH°.CH—CH.CH*; (o) OCH*.CH*.CH — CH.CH* — CHO.CH(CHS).C°H*.OCHS. X \ (e] Enfin, nous devons citer ici les récents travaux de MM. Béhal et Sommelet, grâce auxquels nous savons également que la désalcoylation, à l'aide de l'acide oxalique desséché, des mono-éthers oxydes des glycols primaires-terliaires x est susceptible de fournir des aldéhydes. II y a départ d'une molécule d'alcool, qui se combine à l'acide oxalique : BR cs RAR | DA ï EH ECHO, MA RECU Les méthodes de déshydratation et d'isomérisa- Lion ont, comme on le voit, d’étroits rapports entre elles. Leur intérêt, au point de vue théorique, est très grand ; mais, au point de vue pratique, elles emploient, en général, comme matières premières, des substances (rop peu répandues pour pouvoir servir de base à des procédés de préparation. $ 5. — Méthodes par oxydation et déshydrogénation. La déshydrogénalion des alcools primaires est le procédé fondamental d'obtention des aldéhydes; cs 1 19 L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE c'est lui qui leur a donné ce nom. PDübereiner d'abord, J. Liebigt, et enfin A. Pfeiffer, employant comme agents de déshydrogénation, ceux-là le noir de platine, le chlore, le bichromate de potassium additionné d'acide sulfurique, celui-ci l'acide chro- mique, firent principalement porter leurs efforts sur l'alcool ordinaire. Plus récemment, Schwartz, étudiant les résultats de l'oxydation de divers alcools, constata que les produits secondaires, qui prennent toujours nais- sance en quantité importante dans ces opérations, sont des acétals et des acides dans les cas des alcools méthylique et éthylique, des acides et des éthers dans le cas des autres alcools, et même des acétones dans certains cas spéciaux. MM. Fossek, Rousset et Bouveault ont, d'autre part, montré qu'on peut diminuer la quantité de ces produits secondaires en ayant soin de toujours maintenir le corps à oxyder en excès, par rapport à l'oxydant, ce qui est réalisé lorsqu'on fait tomber le réactif oxydant dans l'alcool. Tant que l’aldéhyde est assez volatile pour distiller, grâce à l'élévation de température produite par la réaction, le rende- ment est satisfaisant: ainsi, il est encore de 50 °/, dans la préparation de l'aldéhyde isovalérique. Dès qu'au contraire, par suite de l'élévation du poids moléculaire, l'aldéhyde devient difficilement en- trainable par la vapeur d'eau, elle est oxydée en acide qui, au contact de l'excès d'alcool, est éthé- rifié. Avec l'alcool décylique normal et le mélange chaud d'acide sulfurique étendu et de bichro- mate alealin, on obtient presque exclusivement du décanoate de décyle. Nous n'avons pu arriver à un rendement de 25 °/, en aldéhyde qu’en employant l'acide chromique en milieu acétique soigneuse- ment refroidi. On à cherché à déshydrogéner les alcools pri- maires à l'aide de réactifs différents de ceux dont nous venons de parler, et, entre autres, à l'aide des gaz tels que l'air, le chlore, l'anhydride azoteux, le peroxyde d'azote et l'ozone. L'air chaud, en présence d'un corps poreux (métal, oxyde ou coke), qui donne d'excellents résultats lorsqu'il s'agit de préparer l'aldéhyde formique, semble malheureusement inapplicable avec les autres alcools; il en est de même du chlore. L'anhydride azoteux et le peroxyde d'azote peuvent être employés, mais donnent de mauvais rendements. Quant à l'emploi de l'ozone, tout ré- cemment préconisé par M. Harries, il constitue une méthode très intéressante en principe, mais insuffisamment généralisée jusqu’à présent pour qu'on puisse en apprécier la valeur pratique. A côté des méthodes précédentes, une autre, qui découle d'un principe très différent, mais qui, par sa nouveaulé et sa simplicité, offre le plus grand intérêt, est celle de MM. P. Sabatier et J. Sen- derens. Tous les procédés d'oxydation déshydrogènent avec formation et départ d'eau : R.CH?0H + O0 = R.CHO + H°0. Or, on concoit qu'on puisse également déshydro= géner sans oxyder, de façon à ce qu'il y ait sim= plement départ d'hydrogène : Or R.CH°OH — R.CHO + I. MM. Sabatier et Senderens, tenant compte de ce fait bien connu que la pyrogénation des alcools Î donne naissance à une certaine quantité d’aldéhyde, ont transformé cette vague observation en une méthode de préparation appelée à rendre de grands services. En faisant passer les vapeurs des alcools pri maires, à des températures variables pour chacun d'eux, mais comprises entre 200 et 300°, sur du cuivre pulvérulent et fraichement réduit, ils ont provoqué le dédoublement très net de ces alcools en hydrogène et aldéhydes. Le procédé, qui est. excellent pour les premiers termes de la série;s devient moins bon pour les alcools plus compli= qués; son emploi semble particulièrement indiqué pour la préparation de l’aldéhyde isobutylique, si. pénible à obtenir par les méthodes d’'oxydation. La décomposition dés alcools en aldéhydes e hydrogène par pyrogénation catalytique a fait aussi le sujet de recherches plus récentes de M. Ipatief® Ce savant, qui opère avec des oxydes variés et à des températures plus élevées que celles qu'emploients, les deux auteurs précédents, oblient égalemen des résultats intéressants ; mais, pour une prépas ration proprement dite, sa méthode est loin d’avoir les avantages de celle de MM. Sabatier et Sende rens,. L'oxydation des alcools primaires peut encore être réalisée d’une manière médiale; c'est ce qu arrive si on les transforme d'abord en hydrocarbur nitré, éther nitreux ou éther nitrique. Nef à montre que le nitréthane sodé était décomposé par l'acide sulfurique avec formation d’aldéhyde. Nous avons nous-même cherché à produire rationnellement des aldéhydes en décomposant les éthers nitreux ou nitriques à l'état naissant; mais nous n'avons obtenu de ce côté que des résultats nuls ou médiocres, les moins mauvais en faisant tomber dans un alcool refroidi des cristaux des chambres de plomb. D'autres auteurs n'ont pas craint de chercher plus loin encore la solution du problème : ils ont soumis à l'oxydation des hydrocarbures éthylé= niques et des amines, c'est-à-dire des corps qui ne possèdent plus la fonction alcool. … Bien quil semble à priori que l'oxydation des , hydrocarbures éthyléniques à double liaison ter- minale doive donner naissance à des aldéhydes, on - n'obtient, sauf dans le cas de l’éthylène, que des acétones (Berthelot) : R.CH: CH + O0 —R.CO.CH. De ce côté, comme tout à l'heure à propos de lhydratation des hydrocarbures acétyléniques, l'échec est donc complet. Les tentatives d'oxydalion des amines ont eu plus de succès. Depuis longtemps, Carstanjen a fait voir que l'éthylamine, oxydée par le permanganate de potasse, donne l'aldéhyde ordinaire. Plus récem- ment, M. Berg a préparé des aldéhydes à l’aide des amines disubstituées grâce à un processus ana- “logue. Ainsi, la di-isobutylamine, traitée par les hypochlorites, fournit la diisobutylchloramine, que la potasse transforme en isobutylidène-isobutyla- mine; cette dernière est à son tour aisément dédoublée par les acides minéraux étendus en iso- butylamine et aldéhyde isobutylique : (CH°)°CH.CHE. Az (Cl).CH°.CH(CH°}? — HCI + (CH) CH. CH : Az.CH°.CH(CH}; CH° °CH .CH : Az.CH£.CH (CH À + H°0 :CHS ?CH.CHO + AzH®.CH®.CH (CH. Malheureusement, de pareilles opérations sont longues et peu avantageuses ; aussi la conclusion qu'on peut tirer de ce qui précède est que, de tous “les procédés d'oxydation connus, les deux plus pratiques sont encore le procédé à l'acide chro- nique et celui de MM. Sabatier et Senderens. $ 6. — Méthodes par hydrogénation. On a obtenu des aldéhydes saturées par l'hydro- énation des aldéhydes « 8 non saturées. M. Lieben et ses élèves ont trouvé qu'au contact “des alcalis étendus les a/déhydes à radical pri- maire R-CH°-CHO se condensent, soit entre elles, Soit avec d’autres, pour donner des aldéhydes « 8 non salurées : R'.CHO + R.CH®.CHO = H°0 + R'.CH : CR.CHO Ces dernières, kydrogénées en solution acide, Soit au moyen du zinc ou de l’amalgame de sodium et de l'acide sulfurique, soit au moyen de la limaille m élange d'aldéhyde saturée, d'alcool non saturé et d'alcool saturé : R!. CH : CR.CHO + H° = R'.CH?.CHR.CHO æ ou —R'.CH : CR.CH°OH À et R.CH:CR.CHO + 2H? — R'.CH?.CHR.CH?OH # La multiplicité des produits qui se forment dans celte hydrogénation exclut la possibilité d'un fort e fer et de l'acide acétique, se transforment en un. L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE 1 313 rendement pour chacun d'eux. Mais l'ensemble des deux procédés de condensation et de réduction constitue la première méthode synthétique qui ait été publiée et, par surcroit, une des plus intéres- santes que l'on connaisse. Il suffirait peut-être de la faire bénéficier des perfectionnements que lui ont récemment apportés MM. Fischer et Hoffa', à propos de l'obtention de l’aldéhyde hydrocinna- mique, pour lui voir prendre une importance de premier ordre. L'hydrogénalion des eux-mêmes n'a jamais pu être réalisée directement, mais on a été plus heureux avec leurs sels. Depuis longtemps, Limpricht, etensuite Piria, en calcinant les sels de calcium des acides gras avee le formiate de calcium, ont préparé les aldéhydes correspondantes : acides R.CO cs 0,—Ca î | —=R.CHO + CO“Ca. BE 000 Cette manière de faire fut modifiée par M. Bo- gouch, qui remplaça le formiate par l'oxalate de calcium, puis par M. Krafft, qui améliora les ren- dements dans le cas des acides à poids molécu- laire élevé, en opérantia pyrogénation dans le vide et en substituant les sels de baryum à ceux de calcium. Cette méthode, dont l'inconvénient est de ne donner que de faibles rendements et des produits d'une purification difficile, n’en présente pas moins un intérêt considérable : d'abord parce qu'elle part des acides, c’est-à dire de la plus répandue des matières premières, et surtout parce qu'elle a servi de base aux mémorables travaux de MM. Lieben et Rossi, qui ont permis d'établir, par la synthèse, la constilution des alcools primaires, des aldéhydes et des acides normaux jusqu'aux termes en C7. La première idée de réduire un chlorure d'acide revient à M. Lippmann, qui obtint l'alcool benzy- lique en faisant passer un courant d'acide chlorhy- drique sec dans du chlorure de benzoyle recouvrant de l’amalgame de sodium liquide. M. Linnemann, en remplacant le chlorure par l'anhydride, put obtenir les alcools éthylique, propylique et butylique, ainsi qu'une trace d'étha- nal. M. Saytzeff améliora la méthode en employant le chlorure d'acide mélangé à l'acide lui-même et à l'acide acélique cristallisable; mais il fit porter ses expériences sur un chlorure d'acide qui, dans ces conditions, ne donne précisément pas d'aldé- hyde. ——————————————…—…—…—…——……—….…—…—…—…—…"_—…——————————————— 1 Pour obtenir l'aldéhyde hydrocinnamnique, MM. Fischer et Hofa transforment l'aldéhyde en acetal, hydrogènent ce dernier au moyen du sodium et de l'alcool, et hydrolysent enfin l'acétal hydrogéné. 3TÀ L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE M. A. Baeyer constata qu'en traitant le chlorure de valéryle par l'amalgame de sodium et l'acide oxalique, on réalise la formation d’aldéhyde valé- rique, d'acide valérianique et de valérianate d'amyle, c'est-à-dire « des mêmes produits que donne l'oxydation de l'alcool amylique ». Le procédé préconisé par M. Saytzeff ne fut à notre connaissance appliqué qu'une seule fois par M. Tissier, qui prépara ainsi deux corps nouveaux : l'alcool triméthyléthylique (CH°° CG. CH?OH et l’al- déhyde correspondante. Dans le même ordre d'idées, il faut enfin signa- ler que M. Freundler a obtenu récemment les aldé- hydes éthylique et butylique en traitant, par un couple zinç-cuivre formé par réduction au moyen de l'hydrogène, les chlorures d'acides dissous dans l'éther anhydre. M. Freundler attribue la formation d'aldéhyde à la présence d'hydrogène occlus. II. — MÉTHODES PAR DÉGRADATION OU ANALYTIQUES. Ces méthodes peuvent s'appliquer à deux séries de corps : aux acides-alcools secondaires et aux hydrocarbures non saturés. Les acides-alcools secondaires x sont suscep- libles de donner des aldéhydes en diverses cir- constances : soit, par exemple, lorsqu'on les soumet à une décomposition pure et simple, soit encore lorsqu'on les oxyde avec ménagement. La décomposition des acides-alcools + donne les aldéhydes avec de l'acide formique ou les produits de destruction de ce dernier : &. CHOH.COH = R.CHO + HCO'H ou —R.CHO + H?0 + CO En présence de certains oxydants doux, l'aldé- hyde est accompagnée d'acide carbonique : R.CHOH.COH + O0 = R.CHO + CO? + H°0. La décomposition pyrogénée de l'acide lactique CH — CHOH — CO’H et de son sel de cuivre ont fourni à Engelhardt de l’aldéhyde ordinaire. De même, l’action de l'acide chlorhydrique sous pres- sion ou celle de l’acide sulfurique plus ou moins étendu ont donné: avec l'acide glycolique de l’aldé- hyde formique, avec l’acide lactique de l’aldéhyde ordinaire, et avec d’autres acides-alcools des aldé- hydes plus compliquées (Pelouze, Hein!z et Erlen- meyer). Plus récemment, M. Blaise, qui a étudié avec grand soin la pyrogénalion des acides-alcools secon- daires «, a constaté que, sous l’action de la cha- leur, cesacides sont d’abord transformés en lactides, qui se décomposent ensuite en aldéhyde et oxyde de carbone sans qu'il se fasse d'acide formique : R. CH — CO 70 —2c0+72R.CHO. M. Blaise a même pu tirer de cette réaction une À véritable méthode de préparalion des aldéhydes dew poids moléculaire élevé. La méthode de dégradation par oxydation des acides-alcools a été employée d'abord par J. Liebig; qui obtint de l'aldéhyde en traitant l'acide malique par l’acide sulfurique et le bioxyde de manganèse. M. A. von Bæyer a régularisé ce procédé en rem- placant l'acide sulfurique par l'acide phosphorique et le bioxyde de manganèse par le bioxyde de plomb. Il put ainsi obtenir de l'aldéhyde isobuty- lique; mais, de leur côté, MM. Blaise et Guérin ont trouvé plus avantageux d'employer, pour la prépa- ration de l’undécanal, l'acide sulfurique et le bioxyde de plomb. : Pour ce qui est de l'application des méthodes des dégradation aux hydrocarbures non salurés, on sail depuis longtemps que, sous l’action des réac- tifs oxydants, les hydrocarbures aromatiques non saturés sont coupés à l'endroit de la double liai-. son, et que cette scission donne une aldéhyde aro- malique : ainsi on obtient la vanilline par oxyda-. tion de l'isoeugénol, en particulier au moyen de. l'ozone. Cette intéressante observation vient d’ élre” étendue à la série grasse par M. C. Harries. Cet. auteur à pu préparer ainsi un certain nombre d'al-. déhydes à fonction simple ei à fonction complexe qui ont pris naissance par le mécanisme suivant ? Lorsqu'un courant d'oxygène fortement ozonisé passe dans un corps non saluré énergiquement refroidi, il y a fixation d'ozone et formation d'un ozonide extrèéèmement explosif : Amber 1 Won men ei PES RQ ne NE ARE A R Nu R” 1 | NR 0O—0 NA 0 Si l’on opère en présence d’eau et à la tempéra ture ordinaire, l’ozonide se décompose, au fur ebi mesure de sa formation, en eau oxygénée et deu molécules acétoniques (ou aldéhydiques si R et représentent un atome d'hydrogène) : R R" R [Le Doc 20:= H°0+- COCO Dr CEE O — H°0 A ÿ QE III. — MÉTHODES SYNTHÉTIQUES. | Cons Re, La première en date est celle de MM. Lieben eb Zeisel, que j'ai déjà décrite comme méthode d'hy- d L. BOUVEAULT — LES ALDÉHYDES SATURÉES DE LA SÉRIE GRASSE 379 drogénation (page 373). Ce qui a empêché son exten- sion, c’est que le résullat principal de l'hydrogéna- tion des aldéhydes non saturées estnon pas, comme on pourrait s'y attendre, la formation d’aldéhydes saturées, mais plutôt celle d’alcools. Une autre méthode synthétique est celle que “ nous avons publiée récemment en collaboration, «M. Wahl et moi, et qui permet de s'élever graduelle- ment d'une aldéhyde grasse R.CHO à son homo- “ logue supérieure R.CH°.CHO. . Ce procédé consiste à déshydrater, au moyen du ; chlorure de zinc en solution acétique, les produits “de condensation des aldéhydes avec le nitromé- “thane, et d'hydrogéner ensuite par l'amalgame d'aluminium les hydrocarbures éthyléniques nitrés ainsi formés. On obtient alors, avec la plus grande netteté, l'oxime de l’aldéhyde homologue supérieure : : ÿ R.CHOH.CH?.A7z0? = H°0 + R.CH : CH.Az0? + R.CH : CH.A70® + 2H° = R.CH°?. CH : AZOH + H°0 4 En possession d'une semblable oxime, il est lrès « facile de préparer par hydrolyse l'aldéhyde corres- . pon dante. … L'inconvénient de celte méthode est qu'elle exige — comme malière première une aldéhyde. Il est évi- — demment beaucoup plus avantageux de partir d’un “acide ou d’un alcool; la réaction de Grignard, qui emploie comme matière première les éthers halo- « génés des alcools, est venue fort à propos pour faci- liter ces recherches. IL s'agissait de transformer R.X en R.CHO. … La transformation des nitriles en acétones sui- “vant la méthode indiquée par M. Blaise (action “des réactifs organo-magnésiens sur les nitriles) laissait présumer que la résolution du problème “était possible; malheureusement, l'acide cyanhy- “drique, qui, en se condensant avec les dérivés ma- “snésiens, devait conduire aux aldéhydes, décom- pose ces dérivés organo-métalliques comme le ferait le gaz chlorhydrique. — Il en est de: même, comme l'a aussi constaté M. Béis, de la formiamide et, en général, de tous les dérivés de l'acide formique contenant un atome d'hydrogène lié à un atome d'oxygène ou à un atome d'azote. Les formiamides disubstituées, tant grasses qu'a- romaliques, ont heureusement conduit au résultat Cherché ; elles réagissent suivant le schéma : Per, à /R NÉ , /9—Mecl — CO — "—__ MeCIl = R/—C A + g EEE Nr Quand on traite ensuite par les acides minéraux élendus, on a : 770 — Mel R" — CHE /R + HCI + H°0 YAZC R° R — R!— CIO + AzHL NC + MgCl + H°0. NR! Ce processus n’a, d’ailleurs, lieu qu'avecles éthers halogénés des alcools primaires et secondaires; quant aux éthers des alcools tertiaires, nous avons réussi à en préparer les dérivés organo-magnésiens jusqu'alors inconnus, mais nous avons trouvé que ces dérivés ne se condensent d'une manière normale qu'avec l'acide carbonique. Quand on les traite par les formiamides disubstituées, il ne se fait qu'une quantité insignifiante d’aldéhyde, tandis que le produit principal de la réaction est formé d'hydro- carbure non saluré et d’une substance basique. Dans le cas du chlorure d'amyle tertiaire et de la diéthylformiamide par exemple, la réaction se passe suivant l'équation : CH | VCHE 2C2H5 —C— MeCl H— CO A7 —Mg0 + MgCE NH CH CH CH: | ,CHS ICS CH: CO CH CCE A7 CNRS CH® | Ncens CH Le plus avantageux est de se servir des alcala- mides grasses et particulièrement de la diéthyl- formiamide, assez facile à sécher et à purifier et très aisée à préparer par simple chauffage de molé- cules égales d'acide et de base. Nous n'étions pas seul à chercher dans la réaction de Grignard la solution du problème de la prépa- ration des aldéhydes. Peu de temps après notre publication, plusieurs autres méthodes ont vu le jour, basées également sur l’émploi du même réactif. C'est ainsi que MM. L. Gattermann et F. Maffezoli ont pu obtenir des aldéhydes en condensant les dérivés organomagnésiens avec le formiate d'éthyle à une température voisine de — 50° : al H.CO.OCA15 + R.MgCl = R.CHO + Le ; Ï Nocefrs on sait qu'aux températures voisines de 0° il se fait exclusivement l'alcool secondaire R.CHOH.R. M. Zelinski a trouvé que l'acide formique lui- même était capable de donner des aldéhydes avec les mêmes dérivés organométalliques. Il se fait d'abord le sel mixte H.CO.0.Mg.CI, capable de réagir ensuite sur une nouvelle dose de réactif de Grignard. MM. Bodroux et Tschitschibabin ont constaté simullanément que ces mêmes dérivés organo- 376 G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE A magnésiens se condensent avec l’orthoformiate d’éthyle en donnant un acétal : OC2H° O0 CH OC? CHZ + Mg R.MeCl—R Me à Noces Nil HS + H® aisément hydrolysable en aldéhyde. Dans le même ordre d'idées, il faut également signaler que la condensation des dérivés organo- magnésiens avec l’'éthoxyacétate d'éthyle, conden- sation réalisée simultanément par MM. Béhal et Sommelet et Palomaa, donne une série de glycols « primaires-lerliaires monosubstitués R°C(OH). CHOCH*. Les deux premiers auteurs seuls, par le chauffage avec l'acide oxalique desséché, ont transformé ces glycols en aldéhydes symétriques R°CH.CHO. De même, la condensation de l’éthoxyacétonitrile avec un dérivé magnésien fournit une acétone R.CO.CH*.OC?H, condensable à son tour avee un second dérivé magnésien pour donner le glycol RR'C(OH).CHOCH*, que le même acide oxalique transforme en une aldéhyde de formule dissymé- trique RR'CH.CHO. Enfin, en condensant les dérivés magnésiens avec la monochloracétone, M. Tiffeneau a obtenu des chlorhydrines de glycols : RAGE CEEC AK CH? OH que les méthodes classiques (chauffage avec dem l'eau et de l’oxyde de zinc) transformeront sans doute en aldéhydes. Pour terminer, je dirai quelques mots d'une der- nière méthode synthétique, dont le principe est dû à Erlenmeyer, mais qui n'avait été appliquée par lui qu’à l'aldéhyde phénylacétique. Cette méthode î vient d'être récemment exposée par M. Darzens el repose sur la condensation du chloracétale d’éthyle ; avec les acétones de la série grasse ou les aldéhydes aromatiques en présence de l’éthylate de sodium. On oblient ainsi des éthers-oxydes de glycols, dont la saponification doil, comme l’on sait, donner naissance à de l'acide carbonique et à une aldéhyde : RS CO) + CH2CI.CO2C2H° + CH°ONa R/ St Late es R = CHO+NaCl+ NC—CH.c0œH» R/ NY 0 Re Sc en — con = co + cr. co. REZ R7 Ô Les méthodes d'obtention des aldéhydes sont, comme on le voit, extrêmement nombreuses et va- riées. Les dernières venues se complètent d’une manière très heureuse. Grâce à elles, un certain nombre d'aldéhydes cesseront d'être des raretés de laboratoire pour devenir produits industriels. L. Bouveault, Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Paris REVUE ANNUELLE D’EMBRYOLOGIE ; I. — PARTHÉNOGÉNÈSE NATURELLE ET ARTIFICIELLE. Depuis 1901, époque à laquelle nous donnionsici l’état de celte question, de nouveaux essais de par- thénogénèse expérimentale ont été faits. Bien qu'un excellent compte rendu de ces expériences récentes ait été donné ici même par Bohn', nous croyons devoir y revenir pour ceux qui suivent notre Revue d’Embryologie et pour compléter l’article de Bohn lui-même. C’est d'abord Bataillon * qui nous montre que les œufs vierges d’Amphibiens sont mis en mouvement par la chaleur comme par les solutions plasmolysantes; il a obtenu les meilleurs résultats avec une exposition de trente minules à 35° envi- ron. Dans ces conditions, dit-il, les œufs montrent des blastomères nucléés et des cytoblastomères. Dans les zones en pleine activité, il y a des karyo=x cinèses normales ou anormales, des cytasters (Wil=m son) ou astrosphères (Morgan), et des divisions des cylasters. Cetle année‘, Bataillon nous montre des œufs de Lamproie donnant de très belles morulas sous l'in= fluence de solutions de saccharoseset de chlorure de sodium à 5 ou 6 °/,, de même que des œufs immatures de Crapaud se segmenter sous la seul action de l’eau ordinaire. D'un autre côté, Treadwell, faisant agir une solus tion à 2 °/, de chlorure de potassium sur des œufk de Podarke obscura, a montré qu’on obtenait ainsi des clivages de protoplasma seul (pseudo-clivages à côlé de clivages complets qui ne ressemblent pas pourtant, aux phénomènes de la véritable segmen: 1 G. Bonn : Influence du milieu extérieur sur l'œuf, Rev. gén. des Se., 15 mars 1904. ? E. BATAILLON Nouveaux essais de parthénogénèse expérimentale chez les Amphibiens. C.r. Ac. Sc., 21 avril 1902, p. 918-920. 4 BATAILLON : G. r. Ac: SC:, t ICXXXVIL et C.r-150 Biol., 7 mai 1904. 2 A.-L. Taxanwezc : Notes on the nature of « Artificial Parthenogenesis » in the Egg of Podarke obscura. Biologit Bullet., octobre 1902, p. 235-240 avec 12 fig. G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 377 tation. À côté de ces essais de parthénogénèse arti- … ficielle, il est intéressant de noter les expériences … de W. Tonkoff', qui a voulu se rendre compte de lPinfluence du chlorure de sodium sur des œufs fécondés de Triton tæniatus. Tonkoff a vu ce sel ralentir le développement, en modifiant plus ou moins la segmentation suivant le degré des solu- tions : les solutions de 8 à 9 °/, arrêtent la segmen- lation avant la gastrulation; celles de 1 °/, ne per- mettent que quelques clivages. Enfin, C. Viguier vient de faire paraitre un nouveau Mémoire” qui semble devoir remettre tout en question pour ce qui concerne les expériences de parthénogénèse artificielle qui ont été faites dans ces dernières années, du moins sur les ovules d’Echinodermes. Il y a lieu de se demander, en effet, si les prétendues fécondations chimiques ne sont point, purement et simplement, des cas de parthénogénèse. Déjà Greel*, ‘en 1876, avait montré que l'œuf d'Asterias rubens pouvait présenter une parthé- nogénèse naturelle conduisant le développement “jusqu'au stade gastrula. Malgré le nombre des observateurs qui étudiaient les phénomènes de la ‘fécondation et du développement sur les œufs - d'Echinodermes, le fait observé par Greef ne fut confirmé que quatorze ans après, par O. Hertwig, pour l'Asterias glacialis'. Or, il y a quatre ans, C. Viguier” observa de son côlé la parthénogénèse nalurelle chez trois espèces d’oursin, appartenant à trois genres différents : Sphærechinus, Toxo- pneustes et Arbacia, et conduisant jusqu'au stade -pluteus. Quelque temps après, un auteur ilalien, “Ariola, venait également critiquer les théories de Lœb et montrer, quoique moins nettement que Viguier, la possibilité de développements parthé- -nogénétiques naturels chez l'Arbacia pustulosa”. Læb répondit à ces auteurs en mettant en doute les résullats qu'ils avaient obtenus; il s'attaque à a méthode de Viguier’ en parlant de fécondation ! W. Towxorr : Ueber den Einfluss von Kochsalzlüsungen auf die erste Entwicklung des Tritoneies. Arch. f. mikr. Anat., t. LXII, 1903, p. 129-137, avec 1 pl. ? C. Vicurer : Contribution à l'étude des variations nalu- elles ou artificielles de la parthénogénèse. Ann. des Se. nat. (Zoologie), 1903, t. XVII, p. 1-141, avec 2 pl. # Greer : Ueber den Bau und die Entwickelung der E:hi- noderme, 5te Mit. L. Parthenogenesis bei den Seesternen. Sitzungsber. der Ges. zur Befôrd. der ges. Naturwiss. zu arburg, mai 1876 (cité par Viguier; p. 2). … + O. HerrwiG : Experimentelle Studien am thierischen Ei. Jen. Zeitschr., 1890, t. XIV (cité par Viguier). C. Viuxer : Fécondation chimique ou Parthénogénèse ? Ann. des Sc. nat. (Zool.), 1900, t. XII. 5 NV. ArroLa : La natura della Partenogenesi nell Arbacia pustulosa. Atti della Soc. Liguslica di Scienze natur. e geo- “grafiche, 1902, t. XII, 12 p. et 1 pl. « : J. Lors : Experiments on artificial parthenogenesis in Annelids (Chœtopterus) and the nature of the process of Ærtilization. Am. Journ. of Phys., t. V, 1901, p. 423-459. … Jo. : Uber Methoden und Fehlerquellen der Versuche über L' A involontaire des œufs témoins, el suppose qu'Ariola a eu affaire à des parasites". Mais Ariola* et Viguier reviennent sur la question pour maintenir absolu- ment leur manière de voir. Viguier’ n'a pu déter- miner d’une facon précise les conditions suivant les- quelles se produit la parthénogénèse, mais il pense que ces condilions dépendent d'abord du degré de température de l’eau, et ensuite de l'âge de l'œuf pondu. Pour ce qui concerne la température, il a vu la parthénogénèse augmenter au fur et à mesure que la saison s'avancait et s'arrêter avec le retour des basses températures; pour ce qui concerne l'âge, ce seraient les œufsles plus âgés qui jouiraient de la faculté de se développer normalement sans fécondation. Comme Greef l'avait vu pour l'As{erias rubens, comme Lœæb l’avait signalé, du reste, dans ses expé- riences, le développement des œufs parthénogéné- tiques se fait un peu différemment que celui des œufs fécondées:; ordinairement en relard sur ceux-ci, ils peuvent être aussi en avance. De plus, Viguier à remarqué que la fécondation d'œufs pouvant se dé- velopper parthénogénétiquement amenait un relard dans l'évolution de ces œufs; le spermatozoïde jouerait donc ici un rôle inhibiteur analogue à celui de certains agents physiques, tel que celui de l'acide carbonique entre les mains de Delage. Du reste, tous les œufs d’un oursin ne se comportent pas de la même façon : 1° Les uns, même mürs, ne donnent par féconda- lion que des larves non viables: 2% D’autres ne donnent deslarves viables qu'après fécondation ; sans l'action du spermatozoïde, ils ne donnent rien; 3° D'autres ne donnent des larves qu'après avoir élé fécondés parthénogénéliquement; ils donnent des œufs moins avancés; 4° D'autres donnent les mêmes larves viables qu'ils soient fécondés ou non; 5° D'autres enfin ne se développent bien que parthénogénétiquement; fécondés, ils sont retardés dans leur évolution. Viguier conclut : «Si je n'ai pas encore pu déter- miner les condilions précises de ces changements, leur apparition suecessive nous montre que les œufs passent par l'état fécondable avant d'arriver künstliche Parthenogenese. Arch. [. Entw. mech., 1902, t. XII, p. 481-486. J. Lors : Ueber die Einwände des Herrn Ariola gegen meine Versuche über künstliche Parthenogenese. Arch. f. Entw. mech., 1902, t. XIII, p. 451-486. 2 V. AnrozA : La peudogamia osmotica nei Batraci. Arch. f. Entwicklungsm. d. Organismer, 1903, t. IX. In. : Le ipotesi nella partenogenesi sperimentale e la fecondazione normale. Afti della Societa Ligustica di Scienze natur., 1903, t. XIV, 11 p. 3 Vicurer : Loc. cit. et Rev. gén. des Se., 30 mai 1904, p. #15. 318 . LOISEL — REVUE ÿ ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE à l'état parthénogénélique ». Mais l’ordre des chan- gements que nous donne ici l'auteur correspond-il bien à l'évolution physiologique normale des œufs d'oursin; autrement dit, les œufs n° 4 sont-ils tou- jours des œufs jeunes, les n° 5 toujours des œufs âgés? Viguier le dit sans le démontrer. Or, il peut faire aussi que les différences dans la poten- tialité des œufs correspondent à des différences originelles dans leur nature chimique et non à des stades différents de leur évolution; il est facile de constater, en effet, que, dans un même ovaire, dans une même ponte, les ovules, tout en pré- sentant les mêmes caractères physiques, sont loin d’avoir la même vitalité. D'un autre côté, Viguier s'avance peut-être un peu trop lorsqu'il dit que sa conception particulière est « d'accord avec les faits de parthénogénèse saisonnière connus chez beaucoup d'animaux », car, là encore, il faudrait déterminer auparavant le point de départ de l’évolution ontogénélique; si nous faisons commencer celle-ci au début de l'an- née, au printemps, nous voyons, au contraire, la parthénogénèse précéder la reproduction sexuée. Et c’est ainsi que Lichtenstein, à la suile de ses belles recherches sur le Phylloxera, concluait que l'apparition de l'individu sexué vient terminer le cycle du développement. Quoi qu'il en soit, et pour revenir à notre sujet, on peut se demander, en présence des résultats opposés obtenus par Viguier et par les savants américains, la bonne foi d'aucun d’eux ne pouvant être mise en si vraiment les uns et les autres se sont toujours mis dans des conditions d'expérience identiques. Et quant aux réactifs nombreux qui ont été employés pour obtenir des développements, nous pensons qu'ils agissent seu- lement en augmentant le pouvoir parthénogéné- tique, qui, pour nous, existe naturellement, au moins en puissance, chez tous les œufs. C'est du resle la conclusion à laquelle arrive Delage à propos de l'œuf d’Asferias glacialis”. doule, IT. — RECHERCHES NOUVELLES SUR LA FÉCONDATION. Les facteurs qui agissent dans la rencontre des deux éléments fécondants continuent toujours à occuper les biologistes. Reginald Buller reprend la question dans un important travail consacré surtout à l'étude de la fécondalion chez les œufs d’Echi- noïdes”. Voici ses principales conclusions : La { Y. Decace : Nouvelles recherches sur la parthénogénèse expérimentale chez l'Asterias glacialis. Arch. Zool. exper., 1902, t. X, p. 213-235. Voir la suite de ces expériences, Zd., 190%. II. ? A.-H. Recinazo BuLcer : Is Chemotaxis a Factor in the Fertilization of the Eggs of animals ? Quart, Journ. of micros. c., 1902, t. XLVI, p. 145-116 avec 4 fig. rencontre des spermatozoïdes avec la surface de Ja zone pellucide est une affaire de chance et non de chimiotaxie. Le nombre d'œufs et de spermato- zoïdes produits, la mobilité de ces derniers, les courants marins, sont là des facteurs tout à fait m suffisants pour amener la rencontre des éléments. Le passage du spermatozoïde à travers la zone pellucide, observé principalement dans le genre Echinus, est plus ou moins en direction radiaire. Ce phénomène peut être dû à une stéréolaxie, mais une explication purement mécanique semble plus probable à Buller. Les spermatozoïdes éludiés ne semblent réelle- ment pas sensibles aux influences chimiques, tono- tactiques (de +ovos, Lension) ou héliotactiques (de fluos, soleil). On a fait là des généralisations trop hâtives de ce qu’on a vu dans certaines plantes. Comme Massart, chez la Grenouille, et Dewitz, chez des Insectes, Reginald Buller a vu que les sper- matozoïdes des Echinoïdes se collent facilement par la pointe de leur tête conique aux verres porte et couvre-objet, ainsi qu’à d’autres surfaces. Ce phé- nomène joue sans doute un rôle dans leur altache à la zone pellucide et dans leur cheminement à travers son épaisseur. La pénétration et la destinée du spermatozoïde ont élé suivies dans ces dernières années par Con- klin, Van der Stricht, Magini et Brachet,. Conklin a vu en 1901, chez la Crepidula”, que la tête et la pièce moyenne du spermalozoïde entrent seules dans l'œuf; cette entrée se fait pendant la pro- phase de la formation du premier globule polaire. Le spermalozoïde s'avance dans l’intérieur du cyto- plasme en laissant derrière lui une trace de son pas- sage; pendant ce temps, sa tête se transforme en pronucleus et sa pièce moyenne se résout en un grand nombre de granules fortement colorables. Au moment de l’anaphase de la seconde matura- tion ovulaire, des radiations cytoplasmiques appa= raissent autour des granules de la pièce moyenne; de la sorte se constilueune sphère mâle, semblables à celle qui se forme au même moment dans l'œuf. Chaque sphère reste en contact avec son noyau correspondant et, lorsque les deux noyaux germi= nalifs sont arrivés au contact l’un de l’autre, less deux sphères se fusionnent en une masse granu= leuse qui forme une aire plus sombre autour des ,. PS . } noyaux sexuels. Dans l'intérieur de cette aire, less deux centrosomes se divisent bientôt, puis un, faisceau central apparaît entre eux et le premiers clivage de l’œuf commence. : Conklin reconnaît maintenant qu'il n'y a pas de « quadrille des centres », comme il l'avait encorë à 1 Voir Joe. cit., dans notre Revue de 1901, Rev. gén. des Sc., 1901, p. 1130. L es ne G. LOISEL admis en 1894. Ce qui l'avait induit en erreur, dit-il, c'était une lobulalion ou même une frag- mentation de la sphère qui se produisent dans cerlains cas. D'un autre côté, ajoute-t-il, il est de toute évidence que les centrosomes qui président au clivage de l'œuf ne dérivent pas exclusivement du noyau mäle ou du noyau femelle, mais que l’un provient bien de la sphère de l'œuf, alors que l’autre dérive de la sphère spermatique. La pénétralion du spermatozoïde dans l'œuf des Mammifères n'avait élé observée jusqu'ici que par Sobotta et Tafani; elle vient de l'être de nouveau par Van der Stricht'! dans l'œuf d'une Chauve- souris ( V. zoctula). Chez cette espèce, un premier globule polaire est toujours expulsé à l'intérieur de l'ovaire, avant l'ovulation; c'est au stade du second fuseau de maturation que l'ovule tombe dans la trompe, où il va bienlôt expulser un second globule polaire. A ce moment, l'ovule est enlouré de sa zone pellu- cide et d’un amas épais de cellules folliculaires correspondant au disque proligère. C’est à travers cet épithélium ovulaire que le spermatozoïde se fraie alors une voie pour arriver en contact avec La - l'ovule mür. Dans une communication ultérieure - (loc. cit., 1903), Van der Stricht dit qu'il lui a été - donné d'observer deux fois un joli cône d’impré- » gnation, existant au niveau du pôle d'expulsion - des globules polaires. Ce cône, formé par un sou- lèvement du vitellus, est constitué par une subs- tance claire, homogène, d'une structure différente - de celle du vitellus plastique voisin. Il renferme la . tête du spermatozoïde. Celui-ci entre tout entier à - l'intérieur de celui-là et sa queue persiste très long- temps à côté de la tête transformée en pronucleus. -Van der Stricht remarque que la pénétration du 2h spermalozoïde peut se faire au pôle où se détachent les globules polaires de mème qu'au pôle opposé, et probablement à tout autre endroit de la surface de l'ovule. La tête ne paraît pas subir une rotation de 480°, analogue à celle décrite lors de la fécondation d'autres œufs. Quand le spermalozoïde pénètre par le pôle végétatif, il n'y reste que très peu de Lemps. - Rapidement, dit Van der Stricht (1903), la tête se déplace en se transformant légèrement, pour atteindre le centre de l'œuf. Van der Stricht a “observé également la migralion du jeune pronu- cleus femelle vers le pôle animal. À ce moment, le itellus plastique s’accroit toujours de manière à envelopper les noyaux sexuels. Le trajet suivi par le spermatozoïde dans l'œuf _de grenouille, depuis la surface jusqu'à sa ren- contre avec le pronucleus femelle, est indiqué par 4 O. Van ver Srricur : Le spermatozoïde dans l'œuf de Chauve-souris (V. noctula). Verhandl. der Anatom. Gesells. in Halle, avril 1902, p. 163-168, avec 1 fig. — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 319 une trainée noire que l’on considère comme des grains de pigment entrainés de la surface. Il est plus probable que cette pigmentalion se forme sur place et est déterminée par le contact même du spermatozoïde; c'est, du moins, ce que nous sug- gère cette conclusion du Mémoire de Brachel (1902), que nous analysons en parlie autre part : «... Tout cela indique que la pigmentlalion, dans l'œuf des Amphibiens, est une des manifestations extérieures de l'activilé normale, une des formes sous les- quelles les matériaux ovulaires réagissent vis-à-vis des formes internes et externes qui sont la cause directe de l’ontogénèse et qui la dirigent » (p. 230). Ajoutons que Brachet a vu que cette trace se trouve exactement dans le plan de symétrie de l'œuf fécondé *. Les recherches nouvelles dont nous avons rendu compte plus haut semblent donc indiquer que les Fig. 4. — Production, par diffusion, de trois ensembles de ligures rappelant trois phases différentes de la karyo- cinèse (d'après trois photographies de Leduc). gonades se. rencontrent et se fusionnent sous l’in- fluence d'aclions purement physiques. Ces actions ne sont pas encore réellement connues. Des expé- riences bien curieuses de Leduc? remettent en avant la théorie des « champs de force » de Fara- day pour expliquer l'attraction des deux pronu- cleus mâle et femelle et la division cinétique qui succède immédiatement à cette attraction; cer- taines des photographies de Ledue montrent, en effet, des cellules artificielles et des cristaux de nitrate de potasse, par exemple, qui, mis en contact, se comportent physiquement comme les 1 A. Bracuer : Sur les relations qui existent chez la Gre- nouille entre le plan de pénétration du spermatozoide dans l'œuf, le premier plan de division, et le plan de symétrie de la gastrula. C. R. Assoc. des Anat., 1903, Liége, p. 111- 114. ? Une partie des travaux de Leduc se trouvent dans la thèse d'un de ses élèves : Bécrakp, Rôle biologique des sels, Paris et Nantes, 1903. Voir également. S. Lenuc : Diffusion des liquides; son rôle biologique. C. r. Ac. des Se., 5 déc. 190%. 380 G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE ee ——_—_—"—…"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"…"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"—"— deux pronucleus de l'œuf; d'un autre côté, dans le phénomène biologique de la karyocinèse, on voit apparaitre dans le protoplasma des figures ana- logues aux spectres des champs magnétiques. Nous reproduisons ici, à titre documentaire (fig. LU), des photographies inédites que M. Leduc nous à complaisamment envoyées. Ce sont des photographies de figures obtenues par diffusion de deux substances différentes mises au contact l’une de l’autre et dont l'aspect rappelle trois phases successives de la karyocinèse : la formation des chromosomes, le fuseau et la division du noyau. La ressemblance entre les deux ordres de phé- nomènes est évidemment très grande. Mais cela ne veut pas dire qu'il y a identité, et, comme l'avait déjà fait remarquer Giardina !, une des erreurs communes à toules les théories des cen- tres de force est de considérer le fuseau aussi bien que l’aster de la figure milotique comme des portions constituantes d'un seul et unique sys- tème, comparable à celui des lignes de force dans les champs magnétiques. Tandis que des études plus récentes montrent que le fuseau est formé par la substance nucléaire, elles montrent également, à mon sens, qu'il s'agit, au contraire, de deux sys- tèmes dynamiques, centrés l'un et l’autre à l'inté- rieur des centrosomes, mais distincis de ces der- niers : l’aster, expression des rapports entre les centres et le cytoplasma, et le fuseau, expression de la relation entre les centres et le noyau. Quoi qu'il en soit, il semble bien que des phéno- mènes chimiques accompagnent également l'acte de la fécondation. La « mêlée sexuelle » dont parle Léger” dans sa description si intéressante de la fécondation chez certaines Grégarines nous semble démonstrative à cet égard. Chez ces animaux, on voit, à un certain moment de leur existence, deux individus s'accoupler dans une enveloppe com- mune ; Léger a vu que l’un de ces individus don- nait des éléments mâles, l’autre des éléments femelles. On peut donc les considérer respectivement comme mâle et femelle ; mais il est difficile, en gé- néral, de distinguer sur eux des caractères sexuels secondaires. Léger et Duboscq*, cependant, ont montré que la grégarine mâle se distingue, dès le début de l’enkysltement, par des caractères cytolo- giques spéciaux, notamment par la présence de cordons musculoïdes du côté du plan d’accolement. Dans d’autres lypes, on voit l'individu femelle ! A. GrarniNa : Note sul mecanismo della fecondazione e della division cellulare, studialo principalmente in uova di Echini. Anat. Anz., 1902, t. XXI, 561-581, avec 4 fig. ? L. Lécer : La reproduction sexuée chez les Siylorhynehus. Arch. f. Protistenkunde, 190%, 303-357, 2 pl. et 8 fig. * Lécer et Dusosco : La reproduction sexuée chez Ptero- cephalus. Arch. Zool. exp., notes, 1903 (4). prendre un plus grand développement et déprimer M l'individu mâle. É Leséléments sexuels se forment ici par la multipli- calion continue du noyau primitif, puis par l'émigra- tion de ces noyaux secondaires à la périphérie du corps grégarinien, enfin par l'individualisation, au- tour de chaque noyau secondaire, d'une certaine par- tie de la masse du corps grégarinien. C’est le stade de perlage de l'auteur (fig. 2), dont chaque perle représente un gamète encore indifférencié. A ce stade, il est presque impossible de distinguer la grégarine mâle de la femelle; mais bientôt se pro- duit la différenciation sexuelle, et cela sans qu'on assiste jamais à aucune réduction chromatiqueréelle dans une des chambres du kyste. Dans celle qui contient la grégarine femelle, par exemple (fig. 3, /), chaque petite perle hyaline grossit pour se transfor- mer directement en un œuf. Dans l’autre chambre, Fi TRE NES TERRES À a Fig. 2. Fig. 3. Ne (Hamm) à Ja fin du stade de perlage. Fig. 3. — 1d., vers la fin de la différenciation sexuelle. — m, chambre mâle; f, chambre femelle; e, couloir mitoyen (d'après Léger). celle qui contient par conséquent la grégarine mäle, chaque gamète s’allonge radialement (11) de manière à former un petit spermatozoïde qui finitl par se délacher du corps générateur. Les éléments sont de deux sortes : les uns, très grands et fusi= formes, sont des éléments stériles et dégénératifs; les autres, beaucoup plus nombreux, sont plus courts et piriformes et représentent les éléments fertiles. Par leurs mouvements propres, ces deux sortes de spermatozoïdes, mis en liberté dans la chambr mäle, se dirigent bientôt avec une merveilleus précision vers la chambre femelle, sans doute sous l'action d’une substance attractive sécrétée par les œufs au moment de leur maturité. Mais les éléments femelles ne semblent pas exers cer une vive attraction sur les gros spermatozoïdes" fusiformes, tandis qu’au contraire les spermatozoïs des piriformes se montrent beaucoup plus 5 sibles. « On les voit, en effet, parcourir les groupes, 3 — Portion du kyste de Stylorhynchus a ED CEA » G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 381 « d'œufs, les tâtant de la rostre mobile pour faire leur — choix. Souvent un œuf est fixé au bout du rostre (fig. 4, 1), entrainé quelque temps, puis abandonné pour être remplacé par un autre.» Finalement l'œuf, glissé le long du rostre, vient s'accoler latéra- lement à la partie antérieure du corps du sperma- tozoïde, où on le voit encore quelque Lemps sous forme d’une saillie arrondie (fig. 4, Il); puis les - deux éléments se fusionnent en une seule masse arrondie, et la fécondation est terminée. C'est surtout lorsque le spermatozoïde est entré dans l’œuf que l’on voit nettement se produire des phénomènes chimiques. Déjà en 1883, Édouard Van Beneden' avait vu que les spermatozoïdes libres d’Ascaris megaocephala ne prennent pas le carmin picrique ou boracique ni la fuchsine, alors qu'ils se colorent entièrement en rose sous l'action de ces substances lorsqu'ils sont entrés dans l'œuf. Magini”, étudiant à nouveau les phénomènes intimes de la fécondation chez l'Ascaride, arrive à un Fig. 4. — encontre des deux gamètes de S. oblongatus (1) et début de la copulation (Il) (d'après Léger). certain nombre de conclusions dont voici les prin- cipales : Dès le moment où le spermatozoïde est arrivé “dans le vitellus ovulaire, il se forme en lui des hangements qui ne consistent pas toujours, ni seulement, en des affinités nouvelles pour les matiè- res colorantes. Ces changements sont complexes, “d'ordre chimique, et intéressent aussi bien la “matière proloplasmique que la substance chro- “-matique. Ainsi les colorants à fonction acide (rouge congo, fuchsine acide, éosine, aurantia) teignent seulement les spermatozoïdes une fois entrés dans d'œuf; il en est de même pour certains colorants à " Archiv. de Biolog., t. IV. > G. Main : Sui cambiamenti microchimi e morfologici degli spermatozoïde e delle cellule ovariche nella feconda- “ione. Bullet. della reale Accad. med. di Roma, 1902, & XXVIII, p. 237-260, avec 1 pl. acide et basique, se comportent dans l’œuf comme les peptones". Cette double fonction peut s'expliquer par l’action d'un ferment protéolytique ovulaire, qui viendrait peptoniser les matières albuminoïdes consti- tuantes du protoplasma des spermatozoïdes. Et, en effet, on voit en réalité celle portion corticale subir un ramollissement et une dissolution progressive, formant ce que Carnoy etLebrun ont appelé la plage de fusion et d’autres auteurs la zône de détritus. Il faut remarquer, cependant, que certaines matières colorantes ayant une fonction basique, telles que le-brun de Bismarck, le violet de méthyle, etc., ne sont pas fixées par lies spermatozoïdes libres. Il est donc nécessaire que des recherches ultérieures viennent nous donner l'explication de ces exceptions. Comment maintenant agit le spermatozoïde sur l'œuf? Est-ce à la façon d’un ferment, comme le pense Kulagin‘? Est-ce en lui apportant des | substances neutralisantes, des toxines ovulaires, comme les recherches que nous poursuivons en ce moment tendent à nous le faire croire ? On ne sait encore rien de bien nel à ce sujet. Quoiqu'il en soit, la fécondation a pour premier effet d'arrêter les processus mortels de l’ovule. Ce phénomène, disent Læb et Lewis (loc. cit.), n'est pas sans analogie dans la matière vivante : nous savons, par exemple, qu'un apport d'oxygène diminue l’action fermentative des zymases; et les expériences de Spitzer (cilé par Læb.et Lewis) semblent bien montrer que les noyaux contiennent des agents oxydants, les nucléoprotéides. Or les phénomènes vilaux qui suivent la fécondation con- sistent en une série de divisions cellulaires rapides, dans chacune desquelles les substances contenues dans le noyau se répandent au milieu du cytlo- plasme. Il est donc concevable, ajoutent Lœb et Lewis, que ces mélanges périodiques de substances nucléaires et cytoplasmiques peuvent modifier les processus chimiques de l'œuf et faire échouer celui de ces processus qui conduirait à la mort. Cette explication n’est, certes, pas suffisante. Le spermatozoïde, lui aussi, est un élément qui va mourir s’il ne rencontre pas l'ovule déterminé” ; or ! Les peptones. dit en effet Armand Gautier, jouissent du double caractère acide et basique, à la facon des albumi- noïdes, mais bien plus accentué que chez ces derniers. En tant qu'acides, les peptones s'unissent aux alcalis et terres alcalines pour donner des peptonates solubles. En tant qu'alcaloïdes faibles, les peptones précipitent par les acides phosphotungstique et phosphomolybdique. A. GaurTier : La chimie de la cellule vivante, p. 105. 2 Zoolog. Anz., 189Y, XXI, 653-665. # Disons ici, à propos de la nocivité de l'eau douce sur les spermatozoïdes d'Oursins, que les ré ‘entes observations de Viguier et de Fischer ne sont pas concordantes. C. Viguier (loc. cit., p. 15) a vu que les spermatozoïdes 382 G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE il trouve déjà dans le cyloplasma ovulaire des con- ditions telles qu'il peut continuer sa vie cellulaire. Pour R. Hertwig', tout le mystère de la féconda- tion se réduirait à une sorte de régulation dans les rapports volumétriques du protoplasma el du noyau. Hertwig avance d'abord cette idée que ce rapport doit être constant pour une espèce déter- minée. Ur, dans une cellule quelconque, dans l'œuf en particulier, la nutrilion a pour conséquence de troubler cette constance : le noyau tendant, par exemple, à se développer aux dépens du prolo- plasma. Le rôle du spermatozoïde serait alors de venir rétablir l'équilibre vital, en remaniant la cellule mourante, comme le font, chez les Protozoaires, l'enkystement ou la conjugaison ; il déterminerait une activité nouvelle des échanges entre le noyau et le protoplasma, échanges qui se traduisent sur- tout, pour Hertwig, par une excrétion, dans le protoplasma, d'une cerlaine quantité de granules de substances chromatiques provenant du noyau (chromidies ou système chromidial). III. — LA GaASTRULATION DES VERTÉBRES. Depuis plusieurs années, de nombreux et impor- tants travaux d'embryologie ont été consacrés aux premières phases du développement des Verlé- brés. Ce sont d'abord et avant tout les recherches de Mitrophanow, professeur à l'Université de Var- sovie, et celles de son élève J. Tur. Les premiers travaux de Mitrophanow? sur ce sujet lui ont permis d'abord de ramener à quatre types les différentes formes de gastrulalion des Verlébrés 4° Le lype de l'Amphioxus ou type primilif (archigastrula) ; 2 Le type des Amphibiens, qui dérive du précé- dent et qui comprend l’amphigastrula des Cyclos- tomes, des Ganoïdes, des Dipnoïques et des Amphibiens; 3° Le lype discogastrula des Sélaciens et des Téléostéens, qui, pour Mitrophanow, constitue nn type à part, ne formant pas trait d'union avec le suivant; de Toxopneustes et d'Arbacia, immergés dans l'eau douce pendant deux ou cinq minutes, perdaient de très bonne heure leur faculté fécondante, alors que, dans les m'umes conditions, Fischer dit avoir conservé du sperme d'Arhacia, capable de féconder des œufs frais, pendant des temps variant de vingt-quatre à cent trente-trois heures et demie Fiscuer : Am. J. of Physiol, 1903, t. VIII, p. 431, cité par Viguier). 1 R. HerrwiG : Ueber Wesen und Bedeutung der Befruch- tung. Sitzungber. Math. Phys. CI. Ak. Wiss. München, 1902, t 1, 51-13, et Biolog. Centralbl., 1903, t. XXII. ? Ueber den Gastrulationsvorgang bei den Amnioten. Verhand!. der Anat. Gesellsch., 1898, 218-229, 15 fig. 4° Enfin, le type des Reptiles ou périgastrula, qui dérive probablement indirectement de l'amphigas- trula des Amphibiens. IL y aurait lieu loutefois de distinguer dans ce cas : a) une forme primitive, celle des Reptiles, chez laquelle la gastrula est précédée d’un épaississement de l'ectoderme (bouclier embryonnaire de Will) et se forme ensuite sur le bord du disque germinatif; À) une forme secondaire, celle des Oiseaux et des Mammifères, chez laquelle des modificalions de la structure de l'œuf reportent la gastrulation plus près du centre du disque germinatif. Si nous lais- sons de côté le premier type de gastrulation, sur lequel nous ne connaissons aucun ur nouveau important, nous n'avons que l'embarras du choix, par contre, parmi les Mémoires qui ont élé con- sacrés aux autres Lypes. $ 1. — Gastrulation des Amphibiens. La façon dont Brachet! comprend la gastrulation chez l'Axolotl diffère complètement de celle qu'ont admise jusqu'ici tous les auteurs ayant étudié le développement des Amphibiens urodèles. La majorité des embryologistes admettent, en effet, que la gastrulation consiste ici en une inva- gination, au niveau de la lèvre dorsale du blas- topore, des cellules de l'hémisphère supérieur et de la zone marginale. Cette invagination, dont le résultat est la formation de l'archentéron s'accroît, s'enfonce dans la cavité de segmentation et la fait disparaitre. La voûte archentérique est, par consé- quent, formée par des petites cellules à petits grains vilellins provenant de l'hémisphère supérieur ou animal de l'œuf. Cetle gastrula est complétée par une épibolie de l'hémisphère inférieur par les cellules animales, épibolie qui se poursuit jusqu'à ce que le blastopore soit devenu circulaire. Brachet nous montre d’abord ia segmentation de l'œuf d'Axolotl conduire à la cavité de segmen< tation bien connue dont le plafond est formé de petites cellules ectodermiques et le plancher des crosses cellules vitellines (fig. 5). Mais, pour Bra= chel, ce stade embryonnaire représente une gas trula en voie de formation, et le processus quis lui a donné naissance mérite le nom de « clivage gastrulien ». En effet, dit-il, si, dans la figure 5, ons enlève par la pensée toute la masse vitelline qui s'étend du pôle inférieur jusque un peu en dessous du plancher de la cavité de segmentation, on aurai 4 uue gastrula simple avec un large blastopore cireu laire et une vaste cavité archentérique. Le Las topore et la cavité archentérique sont donc d° abords purement virtuels et comblés par la masse des Dr LR US PE RER ee 1 A .Bracuer : Recherches sur l'ontogénèse des Amphibienss $ urodèles et anoures (Siredon piscilormis et Rana tempora ia} Archiv de Biolog., 1902, t. XIX, extr. de 243 p. et pl. G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE 383 grosses cellules vitellines, mais la gastrula serait … dès ce moment formée. Bientôt un sillon apparaît en une certaine région … de l’hémisphère inférieur de l'œuf (B1) ; c’est le dé- - but du blastopore réel ; ensuite une fente se produit, au sein de la masse endoblastique, sur le prolon- gement de l'encoche blastoporale, et constitue la première ébauche de la cavité archentérique; cette fente est d'autant plus facile à voir que la surface libre des cellules bordant immédiatement l'archen- léron devient très noire par l'accumulalion d'une grande quantité de granulations pigmentaires. En -mêème temps, il se produit un cheminement de la lèvre blastoporale vers le pôle inférieur; puis la cavité de segmentation disparait ou se réduit à une is. 5. — Coupe sagittale et médiane d'une Jeune gastrula u'AxXolotl grossie de 38 diam. (d'après Brachet) — CS, cavité de segmentation; BI, blastopore. TRE La mince fente, par suite d'un déplacement des cellules endodermiques du centre vers la périphérie, autre- ent dit par suite d'une invagination réelle, active, des cellules qui délimitent la cavité de segmen- lalion. C'est surtout du type de développement pré- nté par les Urodèles que se rapprochent les gas- ulations des Cyclostomes, des Dipnoïques et des yimnophiones. Tous les auteurs admettent aussi ii une invagination des micromères se faisant au iveau du blastopore; mais Brachet, se basant sur à travail de Ruel (1891) sur le Petromyzon, de Semon' et de Keer* (1901) sur les Dipnoïques, pense jue les faits observés se rapprochent en bien des points de ceux qu'il a vus chez l'Axolotl et qu'ils Sont susceptibles de la même interprétation. EI . J. Gramam Keer: The development of Lepidosiren para- dOxa. Part. 11. Quart. Journ. of micr. Se., t. XLN. À Semox : Die Fruchtung und Entwickelung der Keimblätter Passant ensuite à l'étude de la Grenouille, Bra- chet décrit tout d’abord un clivage gastruléen sem- blable à celui de l'Axolotl, avec quelques différences surtout dans le temps d'évolution des parties. « Chez la Grenouille comme chez l'Axolotl, dit-il, il se produit un clivage gastruléen, subdivisant la zone marginale en deux parties, l'une enveloppant l'autre ; la première est en continuité avec la voûte de la cavilé de segmentation, la seconde avec son plancher. Ce clivage amène la formation d’un ecto- blaste et d’un endoblaste gastruléens. » Vient ensuite un second processus semblable à celui de l'Axololl : les cellules du plancher de la cavité de segmentation émigrent par groupes et traversent la cavilé de segmentation jusqu'à en venir tapisser la voûte. C'est, en réalité, mais sous une modalité spéciale, une véritable invagination des couches superficielles de l'endoblaste. Tels sont, pour Brachet, dans le clivage gastruléen et dans l'invagination des cellules endoblastiques, les facteurs véritables de la gastrulation des Amphi- biens. Au cours de son travail, Brachet montre que la distinction entre cellules animales ou embryou- naires et cellules végétatives, vitellines ou nourri- cières, qui est déjà abandonnée par de nombreux auteurs, doit être définitivement rejelée!. « Toutes les cellules sont embryonnaires au même titre, dit-il. Elles n'entrent pas toutes en activité en même temps, elles n’ont pas non plus toutes une activité égale, mais elles interviennent toutes dans l'édification des organes et des tissus. » L'hypo- blaste de la voûte du tube digestif, le mésoblaste, la corde dorsale, procèdent, en dernière analyse, de la transformation et de la différenciation des grosses cellules vitellines de l'hémisphère infé- rieur de la blastula. En définitive, l'interprétation de Brachet arrive à rapprocher la gastrula des Amphibiens beaucoup plus de celle de l'Amphioxus que de celle des œufs méroblastiques. « Il n’y à pas encore, chez les Amphibiens, de vilellus nutritif passif, distinct du germe; le type de la gastrulation n'est pas modifié par ce vitellus passif, et la gas- trula en formation d’un Axolotl et même d'une Grenouille peut se ramener à une jeune gastrula d'Amphioxus, dont l’endoblasle, qui formera la paroi digestive ventrale future, serait stratifié et formé de nombreuses cellules, remplies de grains vitellins volumineux. » bei Ceratodus Forsterei. Zoolog. Forschungsreïse, fig. 18 cité par Brachet). 4 C'est von Baer, le premier, qui distingua dans les œufs de Grenouille et de Poulet une partie germinative et une partie nutritive. Mais déjà, Swammerdam, dans sa Bible de la Nature, avait suggéré cette idée que l'hémisphère noir de l'œuf de Grenouille donne seul naissance au corps de l'embryon. G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE Il ne nous appartient pas de dire si la conception nouvelle de Brachet traduit bien la réalité des faits. Déjà avant lui, plusieurs embryologistes, Lels que Marshall (in Vertebrate Embryology, New-York, 1893), avaient avancé que l’archentéron des em- bryons d'Amphibiens est formé par un clivage au milieu des cellules vitellines, qui formeraient ainsi les parois dorsale et ventrale de l'intestin primitif. Mais, à la même époque où Brachet défendait cette même opinion, paraissaient deux Mémoires, l'un au Japon, de Ikeda, qui montrait la cavité archenté- rique se faire aussi par clivage, l’autre en Amérique, de M'° King”, qui voyait au contraire, chez le Cra- paud, la gastrulation se faire par invagination des cellules de la superficie de l'œuf. Il est intéressant de noter que Miss King voit, comme Brachet, les cellules bordant la paroi dorsale de l'archentéron se charger de grains de pigment en abondanec, du côté de la surface libre surtout. Cela avait déjà été remarqué, du reste, par d'autres observateurs el dans d'autres œufs. Chez la Chauve-souris, par exemple, Van der Stricht (1903) voit, lors de la division de l'œuf, que le deutoplasma a une ten- dance à se concentrer du côté des plans de segmentation, c'est-à-dire vers la surface interne de la morula. Rhumbler * considère ce phénomène de pigmen- tation localisée comme étant l'effet d'une pression mécanique. Jordan (Journ. morphol., 1893, t. VIII) et Brachet y voient, au contraire, un phénomène d'activité physiologique, se traduisant par une divi- sion plus active des cellules renfermant du pigment. Il est à remarquer, en effet, que les grosses cellules vitellines qui composent l'hémisphère inférieur de l'œuf des Batraciens se divisent moins fréquem- ment que les petites cellules pigmentées de l’hémi- sphère supérieur. Brachet pense également qu'il y a un rapport évident entre l'activité cellulaire et la présence de pigment. Il montre ainsi que, dans la gastrula des Ainphibiens, la pigmentation est un phénomène biologique qui caractérise l'activité cellulaire chez la Grenouille, activité qui consiste en une transformation spéciale de certains éléments du corps cellulaire pendant cette phase active. Les cellules qui, après une phase de grande activité, rentrent dans un repos relatif, perdent la plus grande partie de leur pigment; au bout d'un certain temps, elles redeviennent plus volumineuses et à grains vitellins plus gros. Mais la pigmentation ne caractérise l’activilé cellulaire que sous certaines de ses formes et à certaines phases du développe- ! HELEN DEAN Kiwe : The gastrulation of the Egg of Bufo Lentiginosus. The Americ. Nat., 1902, t. XXXVI, p. 528-548 et 12 figures. L. Ruvuezer : Mechanik der Pigmentzusammenhäufungen in den Embryonalzellen der Amphibieneier, Arch. 1. Ent- wicklungsmech., 1899, L. IX. | Anat. Anz., 1899, t. XVI, p.529). Rs ment. Il faul dire toutefois que les œufs des Batra= 4 ciens étudiés par Ikeda ne renferment pas de pigment, du moins de pigment noir. $ 2. — Passage de l'œuf holoblastique à l'œuf méroblastique. Il serait très intéressant maintenant de pouvoir comparer la gastrulation des Amphibiens avec celle des autres Vertébrés à œufs holoblastiques (Cyclo=M stomes, Ganoïdes et Dipnoïques); on pourrait trou= | Fig. 6. — Œuf de Grenouille. L=) Fig. 9. — Œuf de Lépidostée. Fig. 6 à 9. — Segmentations comparées des œufs de Gre nouille, d'Esturgeon, d'Amia et de Lépidostée, montr les formes de passage entre l'œuf holoblastique (Grenouille) et l'œuf méroblastique (Lépidostée). — Les deux colonnes de gauche montrent les premiers stades de la segmens lation vus de trois quart et de profil; la colonne de droite montre la fin de la ségmentation (stade morula} ver ainsi toutes les formes de passage entre les œuls holoblastiques et les œufs méroblastiques des Sélas ciens, des Poissons osseux et des Amniotes. Ma nous ne trouvons à signaler dans cet ordre d'idée que le Mémoire de Eycleshymer' sur le développ ment du Lépidostée. Cependant, cette étude, venant — L ‘ Azserr CHAuNCEY Eyccesuyuen : The early development, | of Lepidosteus osseus. Extrait de The Decennal Publications, University of Chicago, 1903, t. X, 16 p., 2 pl. (Voir également. | FA Ÿ G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE aprèsles travaux antérieurs de Dean’, de Sobotta ‘et de Whilman and Eyecleshymer”, permet déjà de poser les jalons au moins d’un travail d'ensemble qu'il … serait lrès important d'entreprendre. Le premier de ces jalons est fourni par l'œuf de l'Eslurgeon, qui ressemble étroitement à l'œuf des Amphibiens; vient ensuite l'œuf d'Amia, dont la segmentation holoblastique est déjà un peu modifiée ; puis l'œuf de Lépidostée, où la tendance méroblastique est - encore plus nette et qui peut conduire directement au lype de segmentation de l'œuf des Téléostéens (fig: 6 à 9). Il est curieux et important de remarquer, avec Eycleshymer, que, chez ces trois Ganoïdes, les trois premiers clivages sont verticaux, alors que, chez “… les Amphibiens, le troisième est loujours hori- : zontal. Dans l'œuf d'Esturgeon, on observe pourtant « beaucoup de variations dans la disposition des Fi trois premiers sillons, et le troisième peut quelque- - fois passer dans un plan horizontal; les variations “sont moins fréquentes dans l'œuf d'Amia, où l’on ne “voit presque plus jamais de troisième sillon hori- zontal; par contre, les variations dans la position … des sillons verticaux sont nombreuses; ils passent à travers le pôle de l'œuf, formant de véritables méridiens, ou passent à côté, donnant ainsi un type bilatéral (Whitman and Eycleshymer). Chez le -Lépidostée, dans la plus grande partie des cas, les sillons: sont rarement méridionaux et presque toujours parallèles au premier et au second sillon. “ Dans le quatrième clivage, on trouve aussi les “transitions intéressantes, passant du lype hori- “ontal de l'Acipenser, par le Lype horizontal modifié “ou circulaire de l'Amia, au tvpe vertical du Lépi- dostée. pu: d = $ 3. — Développement des Téléostéens. : Vésicule de Kupffer. 1 Nous avons à signaler ici deux Mémoires impor- “tants, l'un de Bæke*, l’autre de Swaen et Brachet°. Chez les Sélaciens, comme chez les Téléostéens, “le blastoderme s'élend à la surface du vitellus de “manière à l'envelopper complètement, de la même 3 1 B. Dean : The early Development of Gar-pike and Stur- …ceon. Journ. morph, Boston, t. XI. 1895, 1-62. In. : The mcarly Development of Amia. Quart Journ. of micr. Sc., 1806, t. XXX VIII. p. 413-444. —: Sosorra : Die Gastrulation von Amia calva. anat. Gescllsch., 1896, p. 108-111, avec 6 fig. SG. O. Wairuax and À. C. EvcresnyueR : The Egg of Amia n° its Cleavage. Journ. morph., Boston. 4896-97,t. XII, 309- 355. + J. Borre : Beitrige zur Entwickelungs-geschichte der Weleostier. I. Die Gastrulation und Keimblätterbildung bei Murænoïden. Overdruk uit Petrus Camper, DI. I, A. 2, 1903, 56 p. 2 pl. et 18 fig. > À. Swaex et À. Bracuer : Etude sur la formation des feuillets et des organes dans le bourgeon terminal et dans la queue des embryons des Poissons téléostéens. Arch. de Biol., 1904, t. XX, 461-610, 4 pl. Verhandl. REVUE£ GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 389 facon que cela se produit chez les Oiseaux. Cepen- dant, alors que cet enveloppement est fort lent chez les Sélaciens, Swaen et Brachet montrent qu'il se produit très rapidement chez les espèces de Téléos- iéens qu'ils ont étudiés. De même, alors que l’ar- chentéron est une vaste cavilé béante chez les pre- miers, il est représenté, chez les Téléostéens, par une fente virtuelle, comprise entre la face infé- rieure de l'endoblaste et la surface du syncitium vitellin sur laquelle il repose. Beaucoup d'autres différences existent entre les deux types, mais nous les réserverons pour en parler dans une pro- chaine revue, où nous traiterons de la question générale du mésoderme dans la série animale. La vésicule de Kupffer, sur laquelle on a beau- coup discuté, continue toujours à altirer l'attention des embryologistes. Cette vésicule, qui a été nom- mée ainsi par Henneguy en 1880, est une formation propre aux embryons des Téléostéens. Elle est formée par une invagination endodermique qui est située en arrière de la fusion de la notocorde, im- médiatement en avant du bourgeon caudal, et qui va se mettre en contact avec l'axe nerveux. Henneguy l’a considérée comme le premier vestige de l'intestin postérieur; Cunningham, Kowalewski el Ziegier ont voulu y voir une invagination gas- truléenne et. en effet, Kupffer, d’abord, puis Bæke, récemment, ont vu cette vésicule communiquer avec une invaginalion ectodermique correspondante et venir s'ouvrir à l'extérieur. Swaen et Brachet n'ont pas observé cette commu- nication de la vésicule de Kupffer avec l'extérieur. Quant à la vésicule elle-même, ils la considèrent comme étant une simple dilatation du tube digestif, qui peut se former dans le tronc ou dans la queue de l'embryon; dans ce dernier cas, elle est mani- festement l'homologue de la vésicule terminale de l'intestin caudal des Sélaciens. L'importance mor- phologique de cette vésicule serait très peu grande; son rôle serait surtout physiologique. À Dans le Poisson-Chat, silurien d'Amérique. apparlenant au genre Ameiurus, dans la Truite et quelques aulres espèces, Summer! montre que le sac creux de la vésicule de Kuplïer est remplacé par un bourgeonnement cellulaire plein, provenant, chez la Truite du moins, de la proliféralion de l'épithélium intestinal. Chez les Scorpènes, la réduction est encore plus grande, car on ne trouve à sa place qu'un petit nodule cellulaire. S $ 4. — Gastrulation des Reptiles. Nous aurons l'occasion de revenir plus loin sur ce type de gastrulation en traitant de la ligne pri- 1 B. Sumuer : The Teleost gastrula and its modifications. The Amer. morph. Soc., compte rendu in Science, 1900, €. H, p. 169. g* 380 EEE EE TT TT era mitive. Disons seulement ici que Ballowitz” a déerit, sous le nom de « stade prostoma », les variations individuelles nombreuses que présente l’invagi- pation gastruléenne de 7ropidonotus natrix. Jan Tur (voir plus loin) montre que ces variations sont encore plus grandes chez le Lézard ocellé que chez la Couleuvre. Elles permettront probablement d'éta- blir une liaison entre le prostome des Reptiles et la gouttière primilive des Oiseaux; dans certains cas, en effet, le développement de la lèvre posté- | rieure du prostome est arrêté jusqu’à sa pleine dis- parition, et le blastopore prend alors l'aspect d'une goultière. $ 5. — Oiseaux et Mammifères. Chez les Oiseaux et chez les Mammifères, la gastrula est représentée par le « prolongement céphalique » et le canal notochordal; elle est pré- cédée par le « bouton de Hensen », homologue du prostoma des Reptiles, et qui est le véritable début de la différenciation morphologique de l'embryon. L'étude de ces formations se confond, du reste, avec celle de la ligne primilive dont nous allons parler maintenant. IV. — SUR LA LIGNE PRIMITIVE. La ligne primitive est, comme on le sait, une région linéaire où l'ectoderme épaissi tend à s'unir à l'endoderme. Cette ligne, qui apparaît transiloi- rement sur le blastoderme dans l'axe du futur embryon, en arrière et sur le prolongement de l'axe nerveux, a été mise neltement en évidence, pour la première fois en 1866 par Darsy, dans l’em- bryon de Poulet. Depuis, elle a été retrouvée chez les Mammifères aussi bien que chez les Oiseaux, où elle est actuel- lement bien connue. Il n’en est pas de même chez les Reptiles et surtout chez les Anallantoïdiens. Chez les Poissons téléostéens, une ligne primitive rudimentaire a été décrite en 1884 par Henneguy, sous la forme d'un bourgeon caudal qu'OEllacher a décrit également chez les Sélaciens. Chez les Balraciens, Alice Johnson*® avait décrit une ligne primitive, en avant du blastopore, le long d'un sillon médian que l’on voit en cette région. Dans la même région, Semon, chez le Ceratodus, et Braus, chez le Triton”, ont retrouvé une solution de continuité linéaire qui règne sur la ligne médiane, dans l’ectoderme. Brachet affirme que M!° Johnson à été induite en 1 E. Baizowrrz : Archiv. f. Anat. A bth.), 1902, Heft 3 u. 4. 2 (juart. jour. of. micr, Sc., 1884. # H. Braus : Rückenrinne und Rückennaht der Tritongas- trula. Anat. Anz., t. XX, 6 novembre 1901, p. 238-240, à fig. und Physiol. (Anat. G. LOISEL — REVUE ANNUELLE D'EMBRYOLOGIE erreur par un matériel défectueux; quant à la suture dorsale (Rückennaht) de Semon et de Braus; sa signification reste encore très obscure; ce qui chez les Amphibiens, représenterait la ligne pri mitive des Amniotes, ce serait, d'après l'opinion admise généralement, le blastopore tout entier. Cependant, chez la Grenouille, Brachet (/oc. cit p. 183 et 187) admet la formation d'une courte ligne primitive, en avant de la lèvre blastoporale\ dorsale ; en cet endroit, en effet, les coupes trans versales montrent l'endoblaste médio-dorsal très épais, et en rapport inlime avec l’ectoblaste. » | Cette formation, que Brachet rapproche par anal logie de la ligne primitive des Amniotes, doit être interprétée par lui comme représentant la trace | du cheminement de la soudure des lèvres blasto= porales. « Il faut bien reconnaitre, ajoute-t-il, quele terme de ligne primitive est ici assez inexact, parce que, chez les Amphibiens, la ligne située en avant de la lèvre dorsale du blastopore, où les trois feuil= lets sont fusionnés, ne représente que la partie antérieure de la vraie ligne primitive des Am= niotes, la partie postérieure étant représentée, chez. les Amphibiens, par ce qui reste encore ouverlm du blastopore. » Dans tous les cas, cette formation est très courtes à tous les stades ; elle s'étend sur 15 ou 20 coupe au maximum ‘; on doit en conclure qu’au fur età mesure que le blastopore se ferme, les parties anté rieures de la ligne primitive se différencient. En réalité, toutes ces formations, de même que celles décrites chez les Reptiles sous le nom d ligne primitive par Balfeur et Stahl, ne désigneraien qu'un épaississement ectodermique ou plutôt ecto mésodermique de la partie caudale de l’écusso embryonnaire; si on voulait les homologuer avec« la ligne primitive des Sauropsidés, il ne faudrai voir en elles qu'un « nœud primitif » (Mitropha: now). C'est ce qui permet à certains auteurs dé pouvoir avancer que la ligne primitive, au vrai sen du mot, n'a été constatée que chez les Oiseau et les Mammifères. , | Tur* vient, cependant, de la retrouver d'une façon" | constante chez le Lézard ocellé. L'apparition de la ligne primitive est précédée, dit cet auteur, n la formation d'un « écusson embryonnaire », qui | apparait au centre de l'aire transparente, comme, chez les Oiseaux. Ordinairement, mais pas tou jours, on peut observer, dans la partie poslérieure de cet écusson, une tache plus sombre qui cons# titue la plaque primitive où mieux la plaque pr'oston ! En 1888, O. Schultze avait décrit une longue ligne pri= mitive chez la Grenouille; pour Brachet, ce serait là une erreur due à un artifice de préparation (v. p. 188). ? Jean Tur : Sur la ligne primitive dans l'embryogénie de Lacerta ocellata Daud. Anat: Anz., 1903, t. XIII, p. 198- 199; 5 fig. à miale (Urmundplatte de Ballowitz). C'est dans cette région que la ligne primitive se forme aux dépens de l’ectoderme, et cela d'emblée dans loute sa lon- gueur, chez le Lézard comme chez la Poule. La ligne primitive a été de nouveau étudiée chez les Oiseaux, soit expérimentalement, soit par l’ob- “servation. De lous les travaux qui ont été faits sur ce sujet, nous ne retiendrons que les vues “d'ensemble de Mitrophanow, publiées en russe, “mais dont l'auteur a bien voulu nous envoyer une traduction‘. “ On peut distinguer dans le développement pri- mitif des Sauropsides les stades suivants généraux de la synthèse morphologique : — 1° La formation dans l’ectoderme d’un épaissis- “sement général moyen, auquel on peut laisser le “nom d'écusson embryonnaire (Embryonalschild, | Kuper). —_ Chez les Repliles et Oiseaux aquatiques, cet épaississement devient le plus considérable dans “sa région postérieure, et la partie épaissie se “élache quelquefois plus ou moins distinclement, mais sans contours nets. On pourrait bien nommer cette partie une plaque primitive, mais Mitrophanow mirouve que c'est mieux de ne pas le faire pour éviler “le malentendu, et parce qu'on peut observer cet épaississement local plus prononcé aussi chez “d'autres oiseaux (la Poule); Mitrophanow propose “de le désignér sous le nom d'épaississement pri- -mitif, ou bien de plaque prostomiale (Urmundplatte de Ballowilz), jusqu'au moment de l'apparition des formations plus déterminées ; “ 2° L'apparition d'un nœud primitif. - Chez les Reptiles, cette formation devient un nœud proprement dit au moment de la formation à sa surface d'un sillon transversal droit ou courbé l'enfoncement prostomial). Chez les Oiseaux, ce nœud, S'il apparaît en général (Corvus frugilequs, “Auas domestica, Sterna bivundo, Coturnix commu- is), ne porte pas de sillon pareil et se transforme irectement en une ligne primitive; celle-ci, com- parativement aux Reptiles, présente pour les Oiseaux une formation nouvellement acquise, car n'y a pas de formations homologues à ce stade _ le développement des Reptiles. TE 4 “1 Voici la bibliographie des travaux’de MrrroPnaxow sur 6,6.10-1). Hantzsch”a découvert que, chez un grand nombre de pseudo-acides, cette inégalité est renversée ; citons, par exemple, l'isonitrosométhylpyrazolone, l’isonitrosodicétohydrindène, l'isonitrosothiohy - dantoïne, etc., tous acides plus faibles que l'acide acétique et dont les sels de sodium sont absolu- ment neutres, plus neutres que l’acélate de sodium. Le dinitroéthane en solution aqueuse conduit bien moins que le phénol; le phénate de sodium déeime ayant une hydrolyse de 3 °/,, on s'attend à un coefficient plus grand encore pour le sel sodique du dinitroéthane; or, l'hydrolyse n’est pas déce- lable, et sans doute inférieure à celle de l’acétate de sodium. Hantzsch considère cette anomalie comme caractéristique des pseudo-acides, et essaie de l'expliquer en faisant remarquer que la forme aci du sel (ex. : CH'.CH:AzO.ONa) correspond à un acide aci (CH°.CH : AzO.OH) qui est nécessai- rement plus fort que le pseudo-acide d’où l’on part (CH*.CH*.Az0*°). Cette tentative d'explication n'est pas correcte. Kaufmann”a montré, en effet, que les formules fon - damentales restent les mêmes, et, quelles que soient les constitutions de l'acide et du sel, on doit avoir dans tous les cas KL e. Jusqu'ici on n’a pas trouvé la raison de ce désac- cord. Nous avons montré plus haut qu’on a le droit d'appliquer aux pseudo-acides les méthodes et les raisonnements ordinaires, en ce qui concerne la conductivité moléculaire et les chaleurs de neutra- lisation. Hantzsch et Farmer? avaient déjà prouvé, sur le sel de sodium de l'isonitrosoacétone, que le coefficient d'hydrolyse mesuré par les procédés habituels satisfait bien à la loi de l'équilibre. Les modes opératoires, ainsi que les calculs, paraïssent donc hors de discussion. De nouvelles expériences contribueront sans doute à nous expliquer la cause de l’anomalie *. ! Hanrzscu et Barrn: Ber., t. XXXV, 1902, p. 210. ? Zeitsch. f. physik. Ch., &. XLVII, 1904, p. 618 et Ber., t. XXXVII, 4904, p. 2468. 3 Ber., t. XXXII, 1899, p. 3105. * II faudrait, à notre avis, s'assurer de la parfaite réver- sibilité du phénomène de neutralisation, et montrer que, dans chaque cas, le corps primitif peut élre intégralement mis en liberté par un acide fort, tel que HECI. VIT. “CONCLUSIONS. elles sont les principales méthodes de diagnose des pseudo-acides; nous les caractériserons en employant une expression mathématique, et dirons qu’elles indiquent toutes des conditions suffisantes de transformation. A la rigueur, aucune de ces con- ditions n'est nécessaire, et, en fait, l'une ou l’autre manque chez la plupart des pseudo-acides. Cepen- dant, vu leur nombre assez considérable, nous pouvons, sans trop craindre d'erreur, déclarer normal un acide qui ne présente aucun des indices de transformation précédemment énoncés. Mais, par contre, nous rangerons parmi les pseudo-acides les corps considérés jusqu'ici comme normaux, el chez lesquels nous découvrirons quel- ques-unes des propriétés anormales que nous ve- nons de passer en revue. Le phénol et ses dérivés (crésols, acides oxyben- zoïques, etc.) nous paraissent être dans ce cas‘. Le phénol possède un grand coefficient de tempé- rature, et sa chaleur d'ionisation est énorme : qg= — 5.500 cal.-gr. (en tenant compte de l’hydro- lyse du phénate de sodium). En second lieu, la dif- férence optique A,'en solution aqueuse, dépasse de plus d'une unité le nombre 1,6 des acides nor- maux. I est singulier aussi de voir que le phénate d'ammonium ne se précipite pas en solution ben- zénique*, bien que la quantité de gaz ammoniac absorbé s'élève à 25,3 °/, (théorie 17,3,°/). Une dis- cussion approfondie montre que, si le phénol se transforme, il ne peut subir qu'une transposition dans le 2oyau; avant de nous prononcer définiti- vement, il faut attendre des expériences plus nom- breuses sur la réfraction des composés aroma- tiques. Résumons les faits acquis. Les pseudo-acides en solution dans l'eau (ou dans un milieu ionisant) paraissent ne renfermer que deux espèces de par- ticules, la molécule ordinaire, non ionisée, et la molécule aci, ionisée. Quand l'acide conduit bien, il est principalement constitué par la forme aci : ; AZO® CAZ C— Az0? c cz T0 N 470.0H NC—aAZzH Nitroforme. Cyanoforme. C0 )C°H° .CO0C*H° HAz:C:0C ou Gaz. CC 0H te SCOOCEHS k Non Ether cyanomalonique. 1 Bauer : Thèse de l'Université de Nancy (190%), p. 104 à 121. 2 Voir ABeGG : loc. cil. 3 Jlanrzsen et Dourruss : loc. cit, Emi FE ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE 423 Si l’acide conduit peu, la forme ordinaire prédo- mine, avec une faible proportion de la forme aci (exemples : p-nitrophénol, oximidocétones, éthers oximidocyanacétiques, nitramines, éthers acylcya- nacéliques). Enfin, lorsqu'on ne constate pas de conductibilité appréciable, le corps n'existe pratiquement que sous la forme ordinaire (nitrométhane, dinitroéthane, acide cyanhydrique, malonitrile, éther cyanacé- tique ‘, éther malonique, etc.). L'introduction d'un métal dans la molécule d’un + pseudo-acide, surlout d'un métal alcalin ou alca- - lino-terreux, provoque aussitôt la transformation, « le changement de structure, quel que soit le milieu, ionisant ou non. Quand, par exemple, le corps pur … est incolore et le sel sodique coloré au sein de + l'eau, on constate que la couleur, signe de la trans- - formation, persiste pendant l’évaporalion, jusque - dans l’état solide, non ionisé. …—. Dansla classification électrochimique des métaux, à nous trouvons d'abord les métaux alcalins et alca- Duno-terreux, puis Al, Zn, Fe, Pt, ensuite l’Aydro- gène, suivi du cuivre, du mercure et de l'argent. On conçoit que les métaux qui viennent en tête de la liste ne donnent naissance qu'à la forme aci, à “cause de leur grande puissance de transforma- «Lion. …._ Quant aux métaux placés après l'hydrogène, ils se “comporteront sans doute comme l'hydrogène lui- “même, c'est-à-dire pourront donner naissance soit “au sel ordinaire, soit au sel aci. C'est ainsi que l’on “connait deux sels de mercure isomères du nitro- forme’; d'abord le sel hgC(AzO?) (en posant % Hg 5 c Ko 5 }: incolore, stable dans les milieux non hg— dissociants tels que l’éther et la benzine, et le sel de l’aci-nitroforme : AzO°? C— AzO*? \z0.0 Ag jaune, conducteur en solution dans la pyridine ou dans l’eau. L'argent se comporte sans doute de même et est susceptible de former des sels ordinaires où le métal est directement uni au carbone; cette re- marque rend peut-être compte des résultats diffé- rents obtenus dans certaines synthèses avec les iodures alcooliques, suivant qu'on les fait réagir sur le sel de sodium ou sur le sel d'argent. Nous voyons que la question des pseudo-acides est intéressante à plus d’un titre. Cette étude nous a montré comment, sans empiéter le moins du monde sur le terrain de la Chimie pure, les mé- thodes physico-chimiques savent pénétrer certains problèmes, les poser et les élucider. Les réactifs de la Chimie organique sont souvent impuissants à déceler certaines transformations, puisque ce sont eux qui les provoquent. Il faut étudier la substance à l’état statique et les procédés physiques le per- mettent seuls. La Chimie organique recouvre tous ses avantages quand il s’agit de fixer la constitution des corps avant et après la transformation. Chimie pure et Physico-chimie se trouvent être ici ce qu'elles seront de plus en plus fréquemment dans l'avenir : deux sciences connexes, deux alliées ‘. P.-Th. Muller, Professeur à l'Université de Nancy. LE PROBLÈME DE L’EXPLOITATION AGRICOLE “ La Guinée française est formée de deux parties “bien distinctes : les montagnes du Fouta Djallon “et une bande très basse, de 10 à 20 kilomètres de profondeur, qui s'élend le long de la mer d’un bout à l'autre de la colonie et qui semble constiluée par les alluvions amenées des derniers contreforts du Fouta par les rivières qui en descendent : Mella- iorée, Forécariah, Dubréka, Bramaya, Rio Pongo, Rio Nunez, Compony. Cette basse plaine est décou- pée par une infinité de creeks qui réunissent les ee SR en a À Pour la conductibilité des éthers acyleyanacétiques, Cyanomalonique, malonitrile, etc., voir Guincanr : Thèse, Paris, 1897, p. 106 à 120 (publiée à Caen chez Delesques). ? Ley et Kissez : Ber., t. XXXII, 1899, p. 1357. EN GUINÉE FRANÇAISE différentes rivières et dans lesquelles la mer re- monte jusqu'au pied des montagnes. Une popu- lation assez abondante y habite et vit surtout des rizières qu'elle cultive el du commerce qu'elle fait comme intermédiaire entre les Européens et les indigènes de l’intérieur. C’est sur cette partie basse que s'est portée jus- qu ici toute l’activité des Européens. Je voudrais résumer ici les résultats d'essais agricoles que j'ai poursuivis dans cette région, en Mellacorée, avec l’aide de collaborateurs très com- pétents : M. Jacquey et M. Dor, qui est mort mal- heureusement à la peine. 1 Conférence faite au laboratoire de M. Haller, à la Sorbonne. à LO Æ I Les planteurs pourront se procurer en Guinée toute la main-d'œuvre qui leur sera nécessaire. Dans la région basse, les villages qui se trouveront autour des plantations suffiront à la fournir. Pour ma part, je dus, au début, payer mes noirs 25 francs par mois en espèces, plus une ralion journalière de riz de 750 grammes qui me revenait à O fr. 22, et les enfants de douze à quinze ans, 15 francs, plus la ration. J’eus ainsi, à peu près continuellement, de cinquante à qualre-vingts per- sonnes, suivant les besoins du moment. On pouvait penser que le paiement des travail- leurs pourrait être fait à l’aide de marchandises au lieu d'espèces. Je l’ai proposé aux indigènes de nos rivières ; ils s’y sont refusés. Ils préfèrent aller acheter les denrées curopéennes dont ils ont be- soin à Conakry ou à Sierra Léone, où ils trouvent un grand choix. Je n'ai fait aucun effort pour les pousser à ac- cepter des marchandises, car je n'y aurais pas trouvé grand avantage. Il aurait été nécessaire de posséder un stock assez considérable, car les in- digènes veulent pouvoir choisir. Les débouchés sont limités, les marchandises se conservent diffi- cilement dans ces pays et un planteur ne peut guère êlre en même lemps un commerçant. Je ne maintins ces chiffres de 15 et 25 francs que pendant un mois. Gräce à une période inlermé- diaire, où j'introduisis le lravail à la lâche, je pus ramener ie salaire des hommes à la journée à 20 francs et celui des enfants à 10 francs, plus la ration pour tous. Pendant la seconde partie de 1902, J'arrivai même à ne payer les hommes que 15 francs par mois, plus la ralion, ce qui me revenait à peu près par jour, tout compris, à 0 fr. 65. Le procédé que j'ai employé va à l'encontre de toutes les idées élablies. Tout le monde déclare, en effet, en Afrique, qu'une fois que l’on a payé un certain prix à un indigène pour son travail ou pour les produits qu'il veut vendre, on ne peut plus abaisser ce prix. Je ne sais point si cela est exact pour les produits, mais cela ne parail pas l'être pour le travail, Le principal, pour qu'un indigène travaille chez un planteur, c’est qu'il s’y trouve bien. Lorsque l'on s'établit pour la première fois dans un pays et que l’on y est inconou, il faut attirer le noir et lui donner un salaire, sinon plus élevé, du moins égal au salaire moyen du pays où l'on se trouve. Une fois qu'il vous connait, on est devenu un peu son mailre et l’on peut essayer peu à peu d'abaisser ce salaire, qui, du reste, est toujours beaucoup plus élevé que celui qu'il gagnerait s'il élail employé par un autre indigène. Acluellement, cependant, il serait imprudent de ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE : 4 L ‘4 compler sur le prix de 0 fr. 65 la journée. Les tra- vaux du chemin de fer ont produit une élévation de prix de la main-d'œuvre, et, dans bien des cas, il faudra payer 1 franc et mème 1 fr. 25 par jour. IT Les travailleurs recrutés, la première chose à faire, c'est de défricher le terrain que l’on veut planter. Celte question des défrichements se pose différemment selon qu'il s'agit des régions sou- danaises, qui sont caractérisées par la grande herbe de brousse, et des pays à fortes pluies, où l’on trouve presque uniquement des taillis. La disparition presque totale des taillis au Soudan tient à deux causes : les feux de brousse et les ter- mites. Pendant les huit mois de saison sèche, la végéta- tion s'arrête presque complètement, et les incendies allumés par les indigènes brûülent les liges des plantes qui ne contiennent pas de latex. Le dépla- cement des cultures contribue, du reste, beaucoup à empêcher les taillis de se constituer. Les arbustes sont coupés à un mètre au-dessus du sol; le feu brüle les petites branches qui pourraient repousser pendant la saison suivante, et les termiles entrent ensuite en scène. Les termiles ne s’attaquent pas généralement aux plantes bien portantes; mais, dès que celles-ci ont une cause quelconque d’affaiblissement, elles sont immédiatement attaquées, et il suffit d’un ar- rêt d'un an dans la végétalion pour que les racines soient entièrement dévorées. Dans les régions semi-équaloriales comme la Guinée, les souches restent, au contraire, vivaces, eb les termites ne les détruiraient que si elles étaient taillées tous les ans pendant plusieurs années. Les taillis, étant verts toute l'année, ne sont point dévas® tés par les incendies, et si, à la fin de la saison sèche; la paille de brousse peut être incendiée, l'extrémit seule est brûlée; il reste toujours des feuilles vertes et le défrichement n'en est guère avancé. L'opinion générale est assez contraire aux feux de brousse, mais je pense que c’est à tort. Au Soudan, la sécheresse est telle qu'il serait imposs sible de les empêcher. Ils out le grand avantage de détruire une grande quantité d'insectes, qui, san cela, rendraient ces pays inexploitables. En outre des matières sèches, car les champs seraient très" rapidement infestés de termites altirés par ces dé tritus et les semences seraient vite dévorées. laillis au commencement de la saison sèche, d | les laisser sécher le plus longtemps possible et de ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE les brûler ensuite. Il reste alors à dessoucher, et, dans certains cas, ce peut être une grosse besogne. Les indigènes, pour préparer leurs champs, se bornent à couper les taillis sans dessoucher, et, si la terre est assez bonne pour que l’on puisse faire plusieurs cultures successives au même endroit, ils coupent chaque année les rejets qui repoussent:; mais la souche se fortifie et se ramifie, de telle sorte que les racines finissent par s’enchevêtrer et qu'il est très pénible et très long de les arracher. Pour ma part, il m'est arrivé de dépenser jusqu'à mille journées d'ouvrier par hectare. En l'élat actuel des choses en Guinée, il faut admettre que l'on ne pourra travailler le sol qu'à la pioche et non à la charrue. Dans les terres du littoral, en effet, les troupeaux vivent très mal, et,en outre, le dessouchement qu'il serait nécessaire d'ef- fectuer pour permettre le passage de la charrue serait trop coûteux pour les cultures extensives. Dans le Fouta, par contre, le sol est trop incliné pour qu'il puisse être labouré; les pluies entrai- ueraient toute la terre. Ce serait une erreur que de vouloir donner aux indigènes de pelites pioches semblables à celles qu'ils mañient dans l’intérieur. Ils s’habituent très bien à se servir de bonnes houes. Il n'est point nécessaire que celles-ci soient lourdes, car la terre, au moment où on la travaille, c'est-à-dire pendant les pluies, est très friable. Une fois la plantation faite, vient la question du binage. Dans les pays à humidité constante, on peut dire que ce doit être la préoccupation de tous les iustants de l’agriculteur. Si le dessouchage n'a pas été complet, les souches émettent continuellement des rejets. Si, comme le font actuellement les indigènes, on change éhaque année les cullures de place, il est peut-être plus . économique de couper simplement ces rejels que d'exécuter un dessouchage ; mais, dans les cultures - permanentes, un dessouchage complet est abso- - lument nécessaire, ne serait-ce que pour diminuer » les frais de binage. Ce dont il est le plus difficile de se débarrasser, ce sont des mauvaises herbes. Si l’on nettoie sans pré- -cautions spéciales un champ pendant les pluies, il sera de nouveau, au bout de quinze jours, couvert ‘une herbe de 50 centimètres de hauteur, et, au out d’un mois, cette herbe aura de un à deux mètres de hauteur. Pour se débarrasser de ces herbes, il faudrait n'être entouré que de taillis ou détruire ces herbes à des kilomètres à la ronde pour éviter que le vent ne vienne apporter les graines dans les _lerrains cultivés. Il faut avoir soin de faire les binages avant que les graines des herbes soient mûres. Ce qui complique la chose, c'est que ces herbes arrivent à maturité, même pendant les 425 pluies. On peut admettre, d'une façon générale, que l'on doit faire un premier binage un mois avant les pluies, un deuxième au début, un troisième à la fin des fortes pluies et un au commencement de la saison sèche; quelquefois même sera-t-on obligé d'en faire un au milieu de la saison sèche. En Guinée, les dates seraient à peu près : 4% mai, 15 juin, fin août, commencement novembre et quel- quefois janvier. III Nous devions nous rendre compte de la néces- sité de ces binages et de leur haut prix de revient dès le début de nos cultures. Le climat de la Guinée française est caractérisé par une saison de pluies qui dure sept mois, pen- dant laquelle il tombe de 4 à 6 mètres d’eau, et une saison sèche de cinq mois. Ce climat rend toute une série de cultures au moins très aléatoires, comme celles des épices, du cacao, du coton. L'état du marché du café rend les plantations nouvelles dif- ficiles à constituer, et tout est encore trop incertain en matière de plantations de caoutchouc pour qu'il soit opportun d'en entreprendre pour le moment. L'inconnu était tellement grand en matière agri- cole, en Guinée, que nous pensämes, pour notre part, que le plus sage était de commencer par nous livrer à des cultures simples, de façon à être fixés rapidement sur le prix de revient de la main- d'œuvre et sur la richesse des terres. Nous nous décidämes à entreprendre d'abord la culture du ricin. Le marché de celte graine est, en effet, considé- rable et en voie de s’augmenter, au lieu de se res- serrer comme celui de la plupart des produits co- loniaux. Celte plante pousse à l'état sauvage dans toute l'Afrique, et tout le monde assurait que l’on pourrait la cultiver sans difficulté en Guinée. Nous crûmes pouvoir nous fier à celle opinion. Il faut dire, sans tarder, que cette culture de ricin élait, quoi qu'on en ait pu penser, mal choisie. Le climat de la Guinée ne vaut rien pour le ricin cul- tivé ; j'en fis l'expérience. Quelques jours après les premières pluies de fin d'avril, nous fimes les semis, que nous poursuivimes sur 60 hectares. Presque toute les graines levèrent et, un instant, nous pûmes croire à un plein succès. Malheureusement, lorsque les pluies devinrent abondantes, cette activité de la végétation ne con- tinua pas. Les jeunes plantes, qui, en un mois, avaient alteint 20 centimètres de bauteur, s'arré- tèrent là. Elles devaient rester ainsi toute la saison des pluies. Par endroits, elles avaient 0%,50 de hauteur, mais perdaient peu à peu leurs feuilles. Nous fimes enlever continuellement les mauvaises herbes, mais cela n’eut pas de résultat. Nous 126 ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE crûmes un instant qu'à la fin des pluies on pour- rait faire un second semis, qui aurait plus de succès par suite d'une sécheresse relative, et nous mimes à plusieurs reprises de nouvelles graines dans la terre. Elles ne levèrent même pas, quoique de bonne qualité, la terre étant trop saturée d'humidité, et, plus tard, il eut été néces- saire d’arroser pour les faire germer et croître. Les pieds de ricin plantés dans notre jardin d'essai devaient nous donner la raison de cet échec. Dès notre arrivée, nous avions mis en terre dans ce jardin un.certain nombre de graines. Comme les pluies n'étaient pas assez fréquentes, nous les arrosämes avec soin. En vingt jours, nous avions des plantes de 17,50 de hauteur avec des feuilles de 0,50 de largeur, et un mois après elles avaient 3 mètres de hauleur et les feuilles un mètre de largeur. Si ces plantes avaient résisté en parlie à l'humidité, c'est qu'elles avaient été assez fortes lorsque les pluies étaient venues pour ne pas en être affectées. Par la suite, nous devions nous rendre compte que le sol lui-même ne convient pas très bien à cette plante. Nous avions, en effet, introduit à grands frais des graines du Brésil et des Indes. L'espèce du pays donne des graines trop difficiles à décortiquer pour que leur culture soit avantageuse. Nous avions pu compter que tout au moins les plants du jardin donneraient beaucoup de graines. Il n’en a rien été. Peu à peu, les feuilles de ces plantes ont dégénéré et les bour- geons ont moisi. Le climat était incontestablement trop humide. La culture du ricin doit être faite sur une trop grande échelle pour que, si l'on est obligé d’'arroser et de mettre des engrais, on puisse obtenir un pro- duit rémunérateur, à moins de conditions toutes spé- ciales dans lesquelles on ne se trouve pas en Guinée. Ces expériences sont à reprendre dans les pays réellement tropicaux. On peut relirer, cependant, de ces essais de culture de ricin un certain nombre d'enseignements; mais, avant de les examiner et de voir quels sont les autres cultures auxquelles on peutsonger en Guinée irançaise, je voudrais passer en revue diflérents produits végélaux que l’on pourrait songer à exploiter sans cultures, plantes à fibres et essences forestières. IV Une des plantes tropicales les plus intéressantes est le raphia. Toutes ses parties sont utilisables, mais celles qui donnent lieu au commerce le plus important sont les lanières de fibres tirées des feuilles, qui servent comme lien en agricullure, et le piassava qui sert à faire les brosses. Le piassava est exporté en notable quantité de Liberia et de différents points de la côte, mais on n'en fabrique pas en Guinée. Dans certaines espèces, les fibres cylindriques qui forment le pétiole de la feuille sont très ri- gides dans leur partie inférieure et donnent nais- sance au piassava. Pour l’extraire, les indigènes refendent les tiges en lamelles, les écrasent avec un maillet et les metlent rouir une semaine dans la vase des marigols. Ils séparent ensuite les fibres une à une à la main. Cette préparation pourrait êlre effectuée mécani- quement. Pour notre part, une fois le rouissage et le nettoyage exécutés, nous avons opéré la | décortication à l’aide d’un raspador qui nous ser- vait pour nos études et nous avons obtenu de bons résultats. Dans une exploitalion régulière, il serait bon d'avoir un jeu de cylindres qui permet- trait d'effectuer le broyage, opération très longue si elle est exéculée à la main. Il ne semble pas, cependant, que cette exploita- tion puisse avoir un grand avenir en Guinée Fran- çaise car les forêts de raphia n'y sont jamais très grandes. Les indigènes les détruisent pour faire leurs rizières, et il ne serait pas pratique d'aller chercher la matière première en plusieurs points différents : les plantes à fibres ne donnent guère plus de 5 °/, de fibres sèches et nettoyées. Pour # une tonne de produit, il faut donc 20 tonnes de matière première. Ce produit ne pourrait être exploité que par les indigènes, comme cela a lieu au Liberia; mais nous avons pu nous assurer qu'ils ne le trouvaient pas assez rémunérateur. Le commerce du caoutchouc les a habitués a de plus gros bénéfices. De même ne semble-t-il pas qu'il faille espérer pouvoir tirer parti du raphia proprement dit. Ces fibres sont oblenues en séparant l'épiderme externe de la feuille du tissu et de l'épiderne op- posé. À cet épiderme externe les fibres des tissus sous-jacents restent adhérentes et forment les la= nières mises dans le commerce. Comme il faub traiter les feuilles une à une, c'est une opération fort longue, et il ne parait pas qu'aucune aelion mécanique puisse intervenir. Nous avons essayé de faire faire cette opération par nos ouvriers et nous avons trouvé qu'une per- sonne habile ne pouvait guère décortiquer plus de 1 kilog de lanières par jour. Le prix moyen du ras phia est, en Europe, de 0,70 le kilog. en gros. Comme: il y a de gros frais d'emballage et de transport, il ne faudrait pas qu'il y eut plus de 0,30 à 0,35 den frais de main-d'œuvre. Les indigènes ne veulent pas se contenter de ce prix. 9 Il en est de même pour certaines Malvacées. M Des fibres de valeur sont celles que l'on peut. retirer des feuilles des Elœis (palmiers à huile) ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE 127 Leur principale qualité est d’être très fines et très résistantes. Nous ne connaissons aucune tentative pour en tirer parti, mais elles ont vivement intéressé les spécialistes à qui nous les avons montrées. Leur extraction est malheureusement très difficile ; le peu d'épaisseur de la feuille, semblable à une feuille de papier, rend impossible le décortiquage avec les machines que nous connaissons. Le rouissage par l’eau ne donne aucun résullat; les cellules de la plante sont, en effet, imprégnées d'huile qui em- pêche l’eau d'entrer en contact avec elles et de les détruire. Nous avons essayé de différents procédés chimiques; tous attaquent les fibres. En somme, toutes ces plantes à fibres demandent de nouvelles études; mais on peut admettre qu'elles n'exislent nulle part en Guinée en assez grande quantité pour qu'elles puissent être exploitées sans être l'objet d'une culture spéciale. L'unique essence forestière importante en Guinée française est le palétuvier*. Les forêls de palétuviers forment à peu près toute la basse côte et les rives des rivières jusqu'aux points où s'arrête l’eau de mer. Si ces arbres pou- : vaient être de quelque valeur, ce serait une véritable fortune pour ces pays. Le principal défaut du bois est qu'il est géné- ralement d'un petit diamètre. En outre, il est diffi- « cilement utilisable en meruiserie ou charpente, à - cause de sa très grande dureté et de son poids et … de ce fait qu'il se fend facilement. Des échantillons -que j'ai présentés à Hambourg furent jugés intéres- “ sants comme pilotis, mais difficiles à placer, leur - résistance à l'humidité, très grande en réalité, étant 4 inconnue sur la place. Ces bois pourraient être «utilisés pour des traverses de chemin de fer; mais, — pour le moment, le prix de celles-ci est trop bas — pour supporter les prix de transport. En revanche, l'attention se porte de plus en plus … sur les écorces des paléluviers; les Allemands sur- “tout s'en préoccupent beaucoup. L'École de Tan- L nerie de Freiburg fait faire des expériences répé- ñ tées, et le docteur Buss s’est consacré à cette étude. “Le rendement en matières tanniques atteint jus- qu'à 50 °/,. L'inconvénient est que les cuirs sont “leints en rouge. Cet inconvénient est fout relatif, … puisque les cuirs sont le plus souvent reteints après le lannage ; mais c'est là une couleur à laquelle ne ont pas habitués les marchands et ils n’en veulent “pas. Il semble que l’on ne puisse décolurer ces écorces qu'en les mélangeant avec d’autres, notam- ment avec des écorces de chênes : le pourcentage en substances lanniques en est abaissé. En outre, c'est un produit nouveau, et tout cela fait qu'on + sit. te. Ci 3 « h ! Sur cette question de woir la collection du Jourual d'Agriculture notamment les n°s 2, 34 et 37. l'exploitation des palétuviers, Tropicale, n'obliendra pas, actuellement, pour ces écorces, les prix que l’on serait en droit d'espérer. Quoiqu'il en soit, elles n'en restent pas moins intéressantes, et le premier point est de savoir à quel prix on pourrait se les procurer à la côte. On pensait en Guinée, lorsque je commençais à m'en occuper, que l'on ne pourrait pas en acheter aux indigènes à moins de 70 francs la tonne sèche. Ce prix est trop élevé, et je pensai qu'en faisant travailler directement les noirs el en les payant à la tâche, on pourrait l’abaisser de beaucoup. Après toute une série de tâtonnements, je trou- vai que le mieux était de fournir aux indigènes les pirogues dont ils avaient besoin pour opérer la cueillette et tout l'outillage nécessaire, consistant en paniers, maillets, sacs, etc. Je leur assurai 5 cen- times par 4 kilogs d'écorces fraiches qu'ils m'appor- teraient, en déduisant de la somme que je devais ainsi leur payer la valeur de la ration que je leur fournissais. La perte au séchage est à peu près de moitié. La tonne d’écorce sèche me revenait ainsi à 25 francs de main-d'œuvre pour la cueillette. Les frais de lo- cation de pirogues et de manutention pour le sé- chage revenaient à 10 francs par tonne, ce qui mel- tait la (onne sèche rendue en magasin à 35 francs. Je crois qu'il ne faudrait pas compter à l'avenir sur ce prix de 25 francs pour les frais d’écorcage, car le prix de la main-d'œuvre augmente tous les jours du fait des travaux publics. D'après ces données, on pourrait, sans grande chance d'erreur, dresser comme ci-dessous le prix de revient de la tonne rendue sur les marchés d'Europe et provenant d'une exploilation qui em- ploierait 200 récolteurs et qui produirait environ 1.800 tonnes par campagne de 7 mois, dimanches, déduits, le séchage et le concassage devant être faits mécaniquement : ETAISAIÉCOTCAT EC EEE ee ONCE 35 fr. Transport en rivière : 3 chalands à 10.000 fr. tissement en 5 ans) . . . . UN on) 10 pirogues à 500 fr. (amortissement en2ans. 1,35 Soit en chiffres ronds. . . . Fe er de EYE Frais de séchage et de broyage É amortissement d'un matériel de 10.000 fr. en à ans et bois de chauffage. . Manutention : chargement, déchargement, séchage, mise en sac . : . . . Sarsiou autres emballanes-1u- 00-00... 0e» Deux Européens : 46.000 fr. l'an. : Transport de l'usine jusqu'en DAS commissions. assurances, etc.. . . ; ; 030 Construction, petit outillage. ete. 50.000 fr. amor- tissement en 5 ans). . . re TE 5 50 Intérêt à 5°/, d'un capital de 350. 000 fr. Imprévu 10.000 fr. par an. . . . . . . . . . . . + 5 50 MORIN CRIE (amor- broyage, Depuis quelque temps, il arrive annuellement une certaine quantité d'écorces de palétuvier à ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE Hambourg, de la Côte orientale d'Afrique, et elles sont côtées aux environs de 108 francs la tonne. Il ne nous paraît pas que, pour le moment, on puisse espérer un prix plus élevé pour les écorces de la Côte occidentale. Dans ce chiffre de 124 fr. 50 la tonne que nous indiquons, nous n'avons pas fait rentrer les bénéfices; on voit donc que cette exploitation, dans les conditions actuelles, ne serait pas possible. Si les indigènes voulaient vendre directement les écorces séchées, les frais seraient peut-être moins élevés; mais il semble que ce serait une opération très aventurée. En effet, les variétés de palétuviers sont très nombreuses et les écorces présentent des carac- tères différents. Cerlaines écorces, comme celles du Souneratia easeolaris et du Heritiera liloralis, ne contiennent que de 13 à 15 °/, de matières tan- niques, tandis que celles du Pruguiera hymnor- rhiza, dépouillées de rythidome, en contiennent jusqu'à 51 °/, (Buss). Ce qu'il y a de plus grave, c'est que, pour peu que ces écorces aient été lavées, leur teneur en tan- nin disparaît presque et que, suivant l’âge de l’arbre, la teneur varie. C’est ainsi que des essais faits simultanément à Berlin et à Freiburg ont donné des résultats très différents parce qu'ils avaient porté sans doute sur des écorces récoltées difré- remment£. Il serait très difficile d'empêcher les indigènes de mélanger des écorces plus ou moins riches, si celte récolte ne se fait sous la surveillance d'Européens. Pour ma part, je ne considère pas ces résullats comme définitivement négatifs. Il faudrait surtout obtenir des usines un prix correspondant à la va- leur réelle de ces écorces et qui doit dépasser cer- tainement 150 francs. On pourrait envisager le traitement sur place; mais je considère que la fabrication d'extraits mous, seuls avantageux en l’espèce, serait une in- dustrie trop coûteuse à établir pour le moment en Afrique Occidentale, ou tout au moins que ce sera une opération dangereuse tant que l'on n'est pas plus fixé sur la valeur de ces écorces. En tout cas, la raréfaction des matières premières tannantes et l'énorme quantité de palétuviers dont on peut disposer font qu'à défaut d'entreprises spéciales, les grandes compagnies commerciales existant à la côte et les gouvernements des colo- nies ne sauraient sagement se désintéresser de l'exploitation de ce produit. v Parmi les produits de grande culture qu'il peut venir à l'idée d'exploiter en Guinée francaise se CS trouvent les arachides, dont on a fait autrefois un gros commerce. Il ne semble point, cependant, que des exploitations dirigées par des blancs puissent être consacrées à cette culture dans ces pays. Le climat de la Guinée est trop humide pour les ara- chides, et celles que les indigènes cultivent luttent difficilement actuellement contre celles du Sénégal. Le produit obtenu dans ces conditions ne serait pas suffisamment rémunérateur. Les sésames seraient plus intéressants, mais le rendement de cette plante semble capricieux. Les indigènes assurent que l'on obtient certaines années de mauvais résultats. Il serait du plus haut intérêt pour la colonie que cette culture fût étudiée par les jardins d'essais et que l’on poussàt les indigènes à l'entreprendre en grand, car ce semble être une des rares plantes qui s’accommodent de ce climat. Pour ma part, une fois que je fus décidé à aban- donner le ricin, mon attention se porta sur les bananiers. Les revues coloniales parlaient alors (1902) beau- coup de l'exploitation des produits des Musas, farine et fibres. L'abacca, qui produit le chanvre de Manille, estun Musa, et les autres variélés de Musas contiennent, elles aussi, des fibres. Ces fibres sont en moindre quantité et plus difficiles à extraire; mais, tandis que la production de l'abacca paraissait compli- quée en dehors de son pays d'origine, il semblait que l'on pourrait se livrer facilement à la culture des autres variétés de bananiers, el que, si le rendement était inférieur à celui du Musa textilis, le prix du produit pouvait supporter cet écart. On pensait, de même, que l’on pourrait exploiter M les fruits en en tirant de la farine. Cette fabrica- tion rendait possible l'exploitation de bananiers situés en des points d’où l’on ne pouvait sorlir les fruits frais, à cause du trop grand éloignement des marchés de vente. Cette farine paraissait avoir certains avantages au point de vue nutritif et les débouchés semblaient assurés; l'expérience men parut d'autant plus intéressante qu’elle pouvaitm m'aider à avoir une opinion sur l'exploitation des fruits frais pour l'exportation. j Malheureusement, on ne peut guère compter obtenir, même en gardant là peau, plus de 4 kilogse £ de farine par régime de plantain, et 3 kilogs par régime de bananes, et cela pour de beaux régimes de 25 kilogs. De même, pour les fibres, le rendemen est très réduit, et M. Van den Ploeg, de la Haye,u montré comment le transport de la matière pre mière était une grosse dépense ’. Pour que cette exploitation soit possible, il fau RE TL ee D ! Voir sur celle question la collection du Journal d'Agri culture tropicale, qui à poursuivi à ce sujel une enquête approfondie: ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE % 12 Le] drait done que les Musas ordinaires fussent des plantes qui poussent pour ainsi dire sans soins et sans frais. Il n'en est malheureusement pas ainsi en Guinée. M. Van den Ploeg, qui a cultivé à Java 1.000 hec- lares de Musas pour l'exploitation industrielle, a “été tout étonné de voir que ces Musas ne lui rap- portaient pas de fruits. La raison en est toute “simple : c'est qu'il avait voulu faire sa culture d'une “facon économique, la seule possible en l'espèce, et “que le manque d'engrais et d'arrosage avail “amené le manque de fruils. “ Je considère que mon expérience de Benty a “démontré la chose. … Je plantai 8.000 rejets de différentes espèces, que “je me procurai dans le pays au prix de 0 fr. 05 “pièce, dans des trous de 0"60 de profondeur et 0"50 de largeur, espacés de 5 mètres sur une “élendue de 20 hectares. Dans 4 hectares, je plantai à 2°,50. Dans toute la partie espacée à 5 mètres, “une fois que mes plantes eurent à peu près un mètre “de hauteur, je les laissai sans binages. D'après ‘opinion générale, elles auraient dû devenir assez fortes pendant les pluies pour résister aux hautes “herbes. Il n'en fut rien: leur végétation resta “tationnaire. La brousse les envahit et en élouffa me plus grand nombre. Les bananiers des 4 hectares que j'avais binés ‘avec soin, mais sans leur donner d'autre engrais ‘qu'un peu de guano, atteignirent pendant la saison des pluies 1%,50; mais on aurait dû s'attendre à un bien plus grand développement. - À partir de ce moment, je considérai que la lerre de Guinée n'élait point assez riche pour que l’on put espérer y faire, d’une façon rémunératrice, des “cultures extensives, s'il était nécessaire de faire Bervenir des engrais. Je m'attachais alors à voir de quelle façon se posait le problème des cultures ntensives, rendant possible l'application de pro- édés de culture perfectionnés qui remédiraient à à nature du sol et du climat. Celle même culture des bananiers, jointe à la ulture maraichère, devaient me servir dans ce but, d'autant plus que là on pouvait tirer partie des expériences du Jardin d'essai. ml y a à peu près quatre ans, un pied de Musa inensis provenant du Muséum de Paris fut intro- uit par M. Teissonnier au Jardin d'essai. Ce pied tmultiplié et servit à former une bananeraie qui lus de deux milles souches actuellement. De nombreuses applications d'engrais furent aites, et voici comment M. Teissonnier les analyse’: «Aupoint de vue cultural, le bananier est carac- térisé par ses exigences, en polasse. L’acide phos- Journal officiel de la Guiuée française, mai 1903. phorique et l'azote ayant une importance moins grande, il était de toute nécessité de trouver une bonne formule à appliquer au bananier. Nous savons que le sol de la Guinée, d'une façon géné- rale, manque de potasse el d'acide phosphorique, et que la culture du bananier ne peut être praliquée sans avoir recours à l'emploi des engrais minéraux, ces deux éléments jouant un rôle important dans la fructification. Il va sans dire que l'emploi exclusif des engrais chimiques est à rejeter, car on ne doit pas perdre de vue que le sol d’une bananeraie doit contenir une quantité notable d'humus, qui pourra être fourni par le fumier de ferme ou les composts, ces derniers pouvant être fabriqués chaque année à peu de frais et en grande quantité. « La formule d'engrais chimique employée au Jardin d'essai, qui a été arrêlée après deux ans d'expérience, est la suivante : PATES PRE MN RE RES LC M QE OC Potasse 11,02 Acide phosphorique 10,20 CHAUSSEE A RS PRE EE ANR ANS LT Chaque touffe de bananiers reçoit par an 6 kilogs de ce mélange. Le bananier étant une plante traçante et les arrosages élant faits en saison sèche, cetle fumure doit être appliquée par petites doses, afin que les plantes puissent uliliser la plus grande partie des éléments fertilisants. De plus, l'emploi des engrais chimiques doit être suspendu pendant la saison des puies. Les touffes de bana- niers devront donc recevoir un kilog du mélange cité plus haut par mois, en trois ou quatre appli- calions pendant toute la saison sèche. « En dehors de cette fumure, les plantes doivent recevoir deux fois par an compost ou fumier de ferme, destiné à fournir l’humus indispensable pour la végétation. Il faut done compter pour la culture du bananier dans la colonie 4 fr. 50 d’en- grais par louffe et par an; on obtient ainsi, dès la deuxième année de plantation, des régimes d'une régularité parfaite, portant 10 à 12 mains. « À raison d'environ 1.000 louffes de bananiers à l’hectare, on voit, par ce qui précède, que la dé- pense d'engrais est de 1.500 francs par an et par hectare. La culture du bananier doit donc être une culture purement intensive, et il serail impru- dent d'opérer sur de grandes étendues de terrain. « D'autre part, si l'on se base sur un rendement moyen de 4.000 régimes à l'hectare, il est facile de voir que la culture du bananier en Guinée est sus- ceplible de donner de forts bénélices. Il faut ajouter à ces exigences d'engrais la nécessité d’un arrosage donnant 80 litres d'eau par souche et par semaine pendant les cinq mois de saison sèche. Si l'on n'arrosail pas, la végétation A 430 serait à peu près arrêtée pendant tout ce temps et les rendements en seraient affectés d'autant. Les plantations de bananes devront donc se trouver dans une région où l’on trouvera sûrement de grandes quantités d’eau en saison sèche. Comme, en outre, il faudra pouvoir arriver au port rapide- ment, les environs du chemin de fer paraissent les plus intéressants à ce point de vue. Aux environs immédials de Conakry, se trouve une plaine d’une centaine d'hectares, où est situé le Jardin d'essai, et qui est toute allotie en diffé- rentes concessions données soit à des indigènes, soit à des Européens. Vient ensuite la presqu'ile à l’extrémilé de laquelle se trouve Conakry et qui constitue ce que l’on appelle la plaine de Dixim. Cette plaine, d'une dizaine de kilomètres de lon- gueur, a fort peu de valeur au point de vue des cul- tures. Les roches y affleurent presque constamment et elle est presque entièrement desséchée par les vents marins.Quatre lorrents, dont ceux de Bassia et de Rotouma, s'y trouvent bien, mais ils sont très encaissés et leurs rives sont très rocheuses. Le chemin de fer commence ensuite la montée du Kakoulima, dont il longe les flancs pendant à peu près 60 kilomètres. Un bas-fonds d’une vingtaine d'hectares, où se trouvait la première infirmerie du chemin de fer au 45° kilomètre, serait exploitable et pourrait peut-être être irrigué natu- rellement:; mais il est à près de 80 mètres en con- trebas de la ligne et il semble qu'il serait difficile d'élablir une halte du chemin de fer dans cetle région. Partout ailleurs, les environs de la ligne sont très rocheux et les pentes sont trop fortes pour per- mettre les cultures. On arrive ainsi au village de Kouria, au 65° kilo- mètre, à plus de 200 mètres d'altitude, où l’on ren- contre l'Ouankou, qui a une largeur de plus de 6 mètres. Le chemin de fer longe à flanc de coteau larive droite de cette rivière pendant une douzaine de kilomètres à une distance de 100 à 150 mètres. La bande de terre ainsi délimitée peut se prêter à la culture. Il ne semble pas, cependant, que l’on puisse faire de l'irrigation naturelle. La rivière n'a pour ainsi dire pas de courantpendant la saison sèche, etsi l'on voulait faire un barrage, les nombreux thalwegs qui coupent la vallée rendraient difficile l'établissement d'un canal d'irrigation. En revanche, l'arrosage à l’aide de pompes ne serait peut-être pas très coûteux, car, la rivière n'étant pas très encaissée, ii n'y aurait qu'à refouler l’eau dans la partie haute de la bande de terrain, qui ne doit pas présenter une dénivellation de plus de 7 à 8 mètres. ÉMILE BAILLAUD -— L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE Il doit être noté, cependant, que plusieurs points de cette bande sont marécageux et doivent être inondés pendant la saison des pluies; par consé- quent, ils sont impropres à la culture. Ë Je n'ai point examiné la rive gauche, car l'Admi nistration semblait vouloir la réserver pour les indigènes ; mais elle comporte une certaine quant de terres utilisables. Après celte zone, il y a une grande région d'une quarantaine de kilomètres de longueur qui està peu près inexploitable. La voie passe dans les gorges du Badi et du Tabili, qui sont enserrées entre des! montagnes à pic, el les roches affleurent presqs partout. k La voie remonte le Badi, et, après les grandes chutes de celte rivière, qui prend alors le uom de Samou, on retrouve une région analogues à celle de Moncton, | La partie cullivable, d’une longueur d'à peu près 20 kilomètres, n'est pas plus large que celle de celle dernière rivière, mais l'irrigation serait peut= ètre plus facile. Le Samou présente, en effet, une succession de chutes qui permettraient peut-être la construction de canaux de dérivation. Une grande boucle de la rive gauche pourrait probablement être arrosée de cette façon; ce ne serait pas, du reste, sans grande dépense, parce qu'il faudrait creuser plus d'un kilomètre de canal dans un grès très difficile à travailler. La ligne arrive ainsi sur les plaleaux de Fri- guiagbé, où elle s'arrête actuellement. En somme, au point de vue agricole, le prin=M cipal avantage de la ligne de chemin de fer dans» la parlie qui va être ouverte à l'exploitation est qu'elle permet d'accéder dans des région élevées. La première zone cultivable est à 200 mètres d'altitude et la seconde à 300. Cela est une bonne chose au point de vue de la salubrité ; cela permet surtout d'arriver facilement auprès des ruisseaux d'eau douce dans des parties où ils! ne sont pas très encaissés. Quelques personnes qui ont visité la ligne aprèsh moi, avec l'intention d'y établir des plantalionss ont été effrayées de ce que les espaces cultivablesh étaient très limités, que, même en ces points, | profondeur de la terre est très faible, ne permet tant pas la culture d'arbres à racines pivotantes, que les affleuremnents de roches y sont très fré quents, de sorte qu'il pourrait arriver que, sut 20 hectares, il n'y en ait que la moilié de culti- vables, ce dont on ne se rendra compte qu'après une étude approfondie du terrain. Il faut considé: rer, cependant, que, si l’on se livre à des cultures analogues à celle des bananiers, de grandes éten dues de terre ne sont pas nécessaires. Il semble que ce qui a le plus influé sur les ren À dements obtenus au Jardin d'essai, c'est la combi- naison du fumier à l’engrais, et c'est à mes yeux là que réside une des principales difficultés du pro- blème. L'élevage est, en Guinée, une chose difficile, du fait des maladies qu'ont les bêtes et de l'insuffi- sance des pàlurages en saison sèche, car on ne peut “donner aux animaux autre chose que de l'herbe. “Les indigènes vendent trop cher le manioc et les “plantes analogues pour que l'on puisse songer à leur en acheter pour la nourriture du bétail, et, quant à la cullure directe, je n'y crois pas, car ce serait une culture extensive. D'un autre côté, le “long de la ligne, on ne pourra guère avoir les étables à côté des plantations, car les päturages ne se trouvent en saison sèche que là où il y a un marécage en saison de pluie, et le LES du fumier sera une difficulté de plus. Il sera peut-être plus facile de se procurer l'humus nécessaire à l'aide de composts, qui doivent jouer un grand rôle dans l'agriculture tropicale; mais c'est là un point qui reste à préciser. Ce dont devront être bien persuadés ceux qui voudront entreprendre des plantations de bananes, Le'est qu'il existe des difficullés de culture, que sans beaucoup d'engrais et d'eau on n'arrivera à rien, quelles que soient les conditions climatériques apparentes. Jusqu'à ces derniers temps, on parait, en effel, ne s'être préoccupé que des queslions de transport et d'écoulement des bananes sur les marchés d'Eu- rope. On n'a pas assez tenu compte des conditions mêmes de production. Il apparaît bien qu'en Guinée, du fait des diffi- leultés d'arrosage et des nécessités d'engrais, les frais de culture des bananiers seront très élevés. Il faudra donc que le rendement à l'hectare soit aussi très élevé, plus élevé qu'ailleurs, aux Canaries par “exemple. « Quelques personnes poursuivent actuellement Wexpérience, entre autres MM. Dubot et Vacher : elle est du plus haut intérêt. : Les plantations d’ananas peuvent aussi offrir des énéfices en Guinée si l'on ne s'attache pas à la production des fruits de luxe, car les meilleures qua- li lités viennent de pays où il ne pleut presque pas. Enfin, l'attention doit se porter sur les kolatiers. J'est er probablement cette plante-qui donnera 4 meilleurs résultats, car elle est en Guinée dans Son pays d'origine et les débouchés de son fruit sont presque illimités. On devra seulement ne pas oublier que, comme toutes les autres, celte culture doit être faite avec beaucoup de soins et ne pas êlre laissée au hasard. Il semble bien que ce n'est que dans des cultures de ce genre que pourront s'engager les capitaux ÉMILE BAILLAUD — L'EXPLOITATION AGRICOLE EN GUINÉE FRANÇAISE 431 européens, car les conditions climatériques rendent toutes les autres exploitations aléatoires en Guinée. Les plantes qui s'accommoderaient de la séche- resse pendant le temps de leur maturité, comme les plantes textiles el oléagineuses, souffrent du torrent d’eau de l'hivernage, et c’est pour cela que, quoi qu'on en ait dit, il ne peut être question d'’ex- ploiter le coton dans la plus grande partie de ce pays, el les plantes qui supporteraient un climat humide ne peuvent résister à la saison sèche. Nous avons montré comment l'humidité de la saison des pluies et les rosées de la saison sèche entretiennent toute une végétalion indigène extré- mement vivace, de sorle que, dans les plantations, les travaux de nettoyage du sol doivent être cons- tants et deviennent une très grosse dépense. On peut admettre que le rendement à l'hectare de plantes qui feraient l'objet de cultures exlen- sives ne dépasserait guère 700 francs. La main- d'œuvre nécessaire pour combattre les mauvaises herbes coûterait aux exploilations européennes plus que celte somme. Ces cultures doivent donc être laissées en Gui- née aux indigènes, qui n'ont point de frais géné- raux et à qui la main-d'œuvre ne coûte pas cher; mais les jardins d'essai doivent s'acharner à per- fectionner ces cultures et à montrer aux noirs quels sont les moyens propres à faire obtenir de bons résultats. Ce qu'il faut pour les Européens en Guinée, ce sont des cultures qui rapportent beaucoup à l'hec- tare, de facon à ce qu'on puisse surmonter les dif- ficultés d'entretien, enrichir le sol et pratiquer l'irrigation. VA Lorsque l'on examine sérieusement par l’expé- rience, comme nous l'avons fait, cette question de l'exploilalion agricole de l'Afrique occidentale, on voit que la grande difficulté vient non pas de Ja main-d'œuvre, comme on l'avait cru jusqu'ici, mais bien de la pauvreté du sol. C'est là une chose sur laquelle on ne saurait trop insister. D’après l'opinion qui parait prévaloir actuellement, il semble qu'il n’y a qu'à semer pour récolter. C'est ainsi que l’on peut lire dans un des derniers rapports parlementaires sur l'Afrique occidentale : La luxuriante nature des tropiques prodigue les richesses; de ce sol en perpétuelle fermentation transpirent nalurellement les produits qu'il suffit de drainer. Et le kolatier, le tabac presque sauvage, et le riz et le sorgho, {dont la génération spontanée promet par avance la nourriture aux pionniers, tout s'offre généreusement; il suffit de savoir prendre. » Il faut en finir avec cette légende. La réalilé est que, pour obtenir des produits du sol de l'Afrique occidentale, les hommes peinent tout autant que dans tout autre pays au monde. Dans les rizières, qu'ils travaillent journellement sous la pluie et dans l’eau jusqu'aux genoux, alors qu'ils prennent soin de repiquer chaque plante une à une ou qu'ils récoltent chaque épi presque l’un après l’autre, dans leurs champs d'arachide, de coton ou de sorgho, qu'ils ne peuvent faire à la même place que tous les dix ans, dans les taillis où les lianes donnent parcimonieusement quelques goultes de latex, les noirs offrent un tout autre spectacle que celui de gens qui n’ont qu'à recueillir les produits d'une nature prodigue. Ce qui est vrai, c'est que celte terre de l'Afrique occidentale est pauvre, ne contenant que des élé- ments qui, du fait du climat ou pour loute autre cause inconnue, s’assimilent mal, où les phéno- mènes essentiels, comme ceux de la nitrification, ne se font que difficilement. En outre, quelque paradoxal que cela paraisse, les terres vierges n’y existent pas. Sauf dans la grande forêl, qui ne recouvre qu'une faible partie de l’ensemble, tout a été défriché et, depuis des centaines d'années, cultivé. 11 n'y a de terre en friche que là où elle se repose et là où les populations ont été décimées par les guerres, et les indigènes ne connaissent pas les moyens de rendre au sol sa fertilité. En outre, il ne faut pas oublier que presque tous les produits végélaux qui peuvent être fournis par l'Afrique occidentale ont à lulter contre les pro- duits similaires qui proviennent de pays où l'on emploie les procédés de culture les plus perfection- nés, alors que le nègre n’a comme outil que sa pioche el ne sait améliorer sa terre que par des assolements. Il ne faut pas poser en principe que ces procédés de culture modernes sont hors de la portée de l'in- digène et qu'ils ne conviennent pas à la terre d'Afrique occidentale, car il faudrait de ce fait renoncer à toute espérance de voir ce pays lutter contre ceux qui fournissent actuellement les pro- duils de grande consommalion. La capacité de production du noir est, en effet, limilée aux moyens que l’on meltra à sa disposition. Il ne faut pas invoquer comme une preuve du contraire l'exemple du Sénégal, qui paraît se déve- lopper grâce à la seule initiative indigène. Les ara- chides du Cayor profitent de conditions toutes spé- ciales qui leur permettent de lutter contre celles d'autres contrées. Du reste, elles ne peuvent résis- ce pays est limitée à la surface de terre exploitable! On affirme que la quantité des produits d'expor tation augmente chaque année, mais on oublie de constater qu'il en est de même des importations de denrées alimentaires. D'une manière générale, en effet, admettre que l'indigène met en valeur actuellement le plus de terre qu'il peut. Si l’on veut qu'il cultive des produits qu'il ne doit pas consommer, il fau! lui fournir en échange ces produits de consomma® tion qui lui font défaut ou lui apprendre à pre duire davantage pour une même somme de travail Je sais bien que cette transformation des modes de culture indigène est difficile, très difficile mêmes mais ce qu'il peut y avoir de plus dangereux, c'est d’en nier la nécessité. Lorsque l’on à suivi les conseils que les membres de la Mission de Trentinian ont élé des premiers à donner et qu'après avoir fait profes* sion de beaucoup de scepticisme, on a commencé la campagne que poursuivent actuellement les Associations cotonières, on a cru que tout le pro blème consisterait à obtenir de l’indigène quil voulut bien culliver du coton. On commence à se rendre compte de ce que nous n'avons cessé d’assui rer dès le début : que ce n'était pas là le point délicat. Lorsque nous disions que l'on devait altendre de l'Afrique mieux que ce que l’on en obtient actuelle ment, nous ne nous faisions aucune illusion s 1 ces difficultés qui devaient apparaitre peu à peus Nous ne cesserons de les signaler, persuadé que le parti pris qui consiste à ne pas vouloir les enwi sager peut être plus néfaste que cetle opinion qu consistait, il y a peu de temps, à dire que le pro blème de la mise en valeur de l'Afrique occidentale élait insoluble. L'Afrique occidentale peut et doit devenir riches mais il ne faut pas oublier que ce n'est pas RM quelques années que se sont développés lAuslras lasie et le Nouveau Monde et bien considérer que ce seront les indigènes qui tireront probablem le plus grand avantage de cette mise en valeur Emile Baïllaud, Ancien directeur de la Société ayricole et industrielle de la Guinée française. ! Voir Lecowre : Journal officiel du Sénégal, 190% Ra port sur la cullure des arachides en Egypte. ; 1° Sciences mathématiques D'Ocagne (Maurice), Zngénieur des Ponts et Chaus- sées, Chef du Service des cartes, plans et instru- ments de précision du Département des Travaux publies, Repétiteur à l'Ecole Polytechnique. — Le- çons sur la Topométrie et la Cubature des ter- rasses, comprenant des notions sommaires de Nomo- graphie. — 1 vol. in-8°. Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1904. - Cet ouvrage est la publication des lecons professées - par l’auteur, depuis 1896, à l'Ecole des Ponts et Chaus- ….sées. Le petit nombre de ces lecons a forcé M. d'Ocagne à condenser les développements donnés à certaines … questions; il a donc élagué tous les détails de descrip- tion, en y suppléant en fait par des exercices pratiques sur le terrain, et s'est appliqué tout particulièrement - à dégager surtout les idées générales. C’est là, d'ail- leurs, une méthode excellente pour un enseignement … destiné à de jeunes ingénieurs ayant tous une instruc- “tion préalable des plus élevées, et la publication des “leçons à pris ainsi un caractère beaucoup plus scienti- “fique que celui des traités ordinaires de Topographie; “ la Topométrie ainsi traitée forme une véritable intro- … duction à la Géodésie. L'ouvrage se divise en deux parties : l’une consacrée “à la Topométrie, c'est à-dire à la Topographie géomé- “trique, la seconde à la Cubature des terrasses. …_ Le chapitre I® traite des organes principaux que «l'on retrouve dans tous les instruments : niveaux, ver- “niers, mires, elc., qui sont décrits individuellement. I] y a lieu d'y signaler iout particulièrement une “théorie géométrique du réglage du niveau, entièrement nouvelle, établie en toute généralité et non pas seule- ment pour le cas où le plan moyen de la bulle est - parallèle au plan vertical qui contient l’axe de rotation, ainsi qu'on l'admet implicitement dans la théorie ordi- naire. Le chapitre II est consacré à la planimétrie : mesure des angles horizontaux au moyen des différents instru- ments topométriques; mesure des distances soit direc- tement, soit par des procédés stadimétriques; exposé - des méthodes générales de la planimétrie, intersections, - cheminements, rayonnements et relèvements. L'auteur “a donné dans ce chapitre, qui est remarquablement raité, un développement assez considérable à la ta- - chéométrie et expose avec détails les principes de plu- - sieurs instruments récents, tels que le diastimomètre - Sanguet, le tachéographe Schrader avec mise au point momie Carpentier, et le tachéomètre de Sanguet. … A propos des méthodes générales, M. d'Ocagne à eu … lheureuse idée de donner, en quelques pages, des notions très suffisantes sur les levers.photographiques qui peuvent, dans certains cas, rendre d'excellents ser- vices, ainsi que l'a montré M. Henri Vallot dans l'éta- . blissement de la carte du massif du‘Mont-Blanc. Enfin, lauteur donne un théorème entièrement général pour la vérification des angles d’un cheminement. Dans le chapitre III (altimétrie), on passe en revue tout d'abord les divers instruments et les diverses méthodes de nivellement direct et de nivellement trigonométrique; puis l’auteur, qui a collaboré pendant plusieurs années au nivellement général de la France, traite avec assez de détails l’objet, l’organisation géné- rale, les méthodes et les résultats de ce très important Service. Le chapitre IV (Théorie générale des raccordements) est entièrement original. Il faut y remarquer : la théorie BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 133 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX des raccordements circulaires doubles, dont on donne une solution générale fondée sur trois théorèmes simples de Géométrie dus à l’auteur; la théorie des raccordements à courbure progressive, où M. d'Ocagne a résumé et (rès simplement exposé les travaux ardus de de Leber, et, à la fin du chapitre, des tables numé- riques pour la solution du problème des raccorde- ments par la clothoïde, qui est théoriquement la plus satisfaisante. La deuxième partie de l'ouvrage à trait à la cubature des terrasses et comprend deux chapitres. Dans Île premier, où l’auteur expose les procédés de cubature proprement dite, il a fait abandon, pour l'évaluation des volumes et des surfaces des terrasses, de l’ancienne méthode géométrique par décomposition en troncs de prisme limités à des paraboloïdes, et envisage l’évalua- tion des volumes comme une intégration approchée, ce qui est beaucoup plus simple. Pour l'évaluation des profils, il passe en revue, en les réduisant à leurs lignes essentielles, les principaux procédés mécani- ques, géométriques, analytiques et nomographiques en usage. On se souvient, d’ailleurs, qu’en ce qui concerne les abaques à entre-croisement proposés en si grand nombre pour ce problème, M. d’Ocagne est le premier qui les ait ramenés à l'unité dans un Mémoire des Annales des Ponts et Chaussées reproduit dans son traité de Nomographie; il y a fait voir comment toutes ces questions, diverses en apparence, se ramènent à une solution unique par particularisation de trois fonctions arbitraires. L'auteur termine ce chapitre en mettant en évidence les avantages de la solution par les points alignés, qui est exposée élémentairement, mais avec toutes les indi- cations pratiques nécessaires. Dans le dernier chapitre : Compensation et mouve- ment des terres, nous nous bornerons à signaler un exposé très simple du procédé de Brückner. L'auteur résume enfin, dans une annexe de 20 pages environ, les principes de Nomographie de l'utilité la plus courante pour les ingénieurs. On voit, par cette analyse rapide, combien sont nom- breuses les matières traitées par M. d'Ocagne dans ses lecons de Topométrie et combien profitable peut en être la lecture; cet ouvage, digne en tous points de son savant auteur, est d'autant plus remarquable qu'il est condensé en un nombre très restreint de pages; il paraît devoir être indispensable à tous les ingénieurs qui auront à s'occuper de questions de routes, de chemins de fer, de canaux ou d’hydraulique agricole. R. BourGeois, Membre correspondant du Bureau des Longitudes, Chef de la Section de Géodésie au Service géographique de l'Armée. 2° Sciences physiques Tammann (Gustave), Professeur à l'Université de Gôüttingen. — Krystallisieren und Schmelzen. — 1 vol. in-8° de 346 pages avec 88 fig. (Prix : 10 fr.) J.-A. Barth, Leipzig, 1904. Plusieurs physiciens et chimistes ont admis l'exis- tence d'un état critique des solides analogue à l'état critique des fluides. Cette hypothèse parait, a priori, peu plausible à M. Tammann, pour une raison qui ne manque pas d'un certain poids : Un état cri- tique d’une substance est caractérisé par l'identité des propriétés et la miscibilité complète de deux phases de cette substance. Or, il est difficile de conce- voir que cette condition se réalise quand l’une des phases est anisotrope (ou cristallisée), l'autre isotrope (solide amorphe, fluide ou gazeuse). Dans la première, en effet, les propriétés sont fonctions de la direction; dans la se elles sont indépendantes de cette direction. Pour ce mème motif, il n’est guère possible d'imaginer la transformation continue de l’une des phases en l’autre, qu'impliquerait l'existence d'un état critique. Toutefois, n’estimant pas ces arguments suffi- sants, M. Tammann s'est proposé de soumettre la question au contrôle de l'expérience, et c’est le résultat de ses recherches qu'il a résumé ici. L'étude expérimentale de la fusion rencontre, dans la pratique, des difficultés bien plus grandes que l'étude de la vaporisation. En particulier, elle exige l'emploi de pressions très considérables, qui sont sou- vent à l’extrème limite de ce que nos moyens actuels permettent de réaliser. S'il existe un état critique du solide, les deux phases ont alors mème volume spécifique et la chaleur de fusion devient nulle. Mais on peut, en général, trouver une série de températures et de pressions pour les- quelles la différence (v— v'— Av) de volume entre le cristal et le liquide est nulle. Supposons construites les surfaces dont les coordonnées sont (T, p, y) et (T, p, v!) : ces surfaces se coupent suivant une courbe. Projetons cette courbe sur le plan (T, p); pour tous les points de cette projection, Av — 0. Construisons les surfaces (T, p, E}) et (1, p, Ep); E et E', étantles quan- tités de chaleur nécessaires pour échauffer le cristal ou le liquide du zéro absolu à la température de fusion sous pression constante, ce que nous appellerons désor- mais, pour abréger, énergies du cristal et du liquide: pour tous les points de la projection sur le plan (T, p) de l'intersection de ces deux surfaces, la différence d'énergie AE sera nulle. La condition nécessaire pour qu'il puisse exister un état critique, c’est que ces deux courbes Av —0, AE —0 se coupent sur la courbe de fusion. Malheureusement, il est pour ainsi dire impossible de déterminer entièrement ces trois courbes. Tout ce qu'on peut faire, c'est de déduire, de leurs portions accessibles à l'expérience, leur allure générale, leur position relative probable, et d'examiner si elles peuvent se concilier avec la condition qu'on vient d'énoncer : en d’autres termes, il faut recourir à des extrapola- tions. On vérifie ainsi que les isobares du volume et de l'énergie du cristal et du liquide se coupent au zéro absolu ; du moins, les écarts ne sont pas supérieurs à ceux qu'entrainent les erreurs expérimentales. Les isobares du volume se déterminent par la mé- thode des floitteurs. La différence d'énergie du cristal et de la matière amorphe peut être déduite de la différence entre leurs chaleurs de dissolution ou par la méthode calorimétrique. La différence Av sur la courbe de fusion ne suit aucune loi générale. La variation de la chaleur de fusion avec la pression et la température peut s'établir par des calculs de Thermodynamique. D'après ce que l’on sait, il semble que cette variation s'effectue dans les limites corres- pondant aux deux équations : + — const. Or, on ne constate jamais de diminution appréciable de à, quand la pression augmente le long de la courbe de fusion : À, reste à très peu près constant ou même croit légèrement, tandis que Av décroit nettement. La concavité de la courbe de fusion dépend du signe d(Av) dT quand cette dérivée est négative, ce qui est le cas pour toutes les courbes déterminées jusqu'ici. Une variation adiabatique de la pression supportée par un mélange de cristal et de liquide provoque une variation secondaire de la pression en sens contraire de la variation imposée. Ap = const. ; de la dérivée . elle est dirigée vers l'axe des p BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Température maxima de fusion. — D'après l'allure des courbes de fusion déterminées entre p=1 kilo- gramme et p— 3.000 kilogrammes, la pression corres: pondant à la température maximum de fusion n'est, pour aucune des quarante substances étudiées, infé= rieure à 5.000 kilogrammes. On n’a pu dépasser là pression correspondante que pour le sel de Glauber; elle est inférieure à 3.000 kilogrammes. Détermination de la courbe de fusion. — Le dispo- sitif expérimental est, en principe, celui qui à été employé par Mousson pour montrer la fusion de la glace à basse température, sous l'influence de la pres- sion. La substance est enfermée dans un canal (eb, fig. 4) creusé dans un bloc d'acier, long de 40 centi- mètres sur un diamètre de 10 centimètres. Le canal pré- sente, dans sa partie inférieure, un diamètre de 3 milli- niètres sur une longueur de 25 centimètres, s’élargit ensuite en cône jusqu'à un diamètre de 5 millimètres, redevient cylindrique sur 5 centimètres et s'élargit brusquement à 40 millimètres. Dans la partie ede est ajusté un.piston d'acier trempé dont la partie supé= rieure est taraudée, pour permettre de l’introduire et de le retirer à l’aide d’un gros fil d'acier. La subs- tance est introduite à l’état liquide dans le cylindre, de manière à le remplir jusqu'en d ; puis on y place la tige-signal, fil de platine long de 45 centimètres-sur un diamètre de 2 millimètres, terminé par deux boutons d'acier trempé. En ed on met un petit cylindre d'ébonite ajusté et on le chasse à l’aide du piston d'acier jus- qu'à ce que son extrémité inférieure c! s'engage en c dans le canal. Le cylindre a d'acier est disposé sur deux tourillons dont l'axe passe par son centre de gra- vité, ce qui permet de le retourner sans bruit, et plongé dans le bain des- tiné à faire varier la température. Au moment où on chavire le cylindre, si la substance est fondue, on entend la tige de platine tomber sur l’ébonite. La ë pression se déduit des coordonnées connues de la courbe de fusion ou des déplacements du cylindre d'ébonite. On adopte comme température la moyenne li des deux températures observées, la pour Ja fusion plus basse quand on ne perçoit aucun FE Ja bruit, la plus élevée quand ce bruit . SU?stance Sous pression. s'entend nettement au moment du ren- versement. * Transformation des substances polymorphes. — Lorsque les courbes de tension de vapeur correspon= dant à deux phases se coupent sur le plan (T, p), le point d'intersection est toujours un point triple, c'est- à-dire le point d’intersection des courbes d'équilibre de trois phases stables simultanément en ce point. Mais le point d'intersection de deux courbes de fusion OU de transformation n’est pas nécessairement un‘ point triple. L'existence de ce point triple est lié à la stabi- lité relative des phases. Pratiquement, on peut dire que l'ordre des stabilités des phases cristallisées est ordre inverse de leurs tensions de vapeur et de leurs tempé= rature de fusion sous la pression p—1. Pour déters miner l'ordre des températures de fusion, on introduit entre deux lamelles de verre (couvre-objets) un peu de la substance polymorphe fondue; on provoque la for= mation des diverses variétés de cristaux, et, en élevants lentement la température, on suit la disparition des taches très nettes formées par des rayonnements d’ais guilles cristallines, L'ordre des stabilités est aussl l'ordre inverse des solubilités. Il faut tenir compte, dans ces expériences, des phé= nomènes de faux équilibre, étudiés par M. Duhem. Vitesse d'écoulement des substances cristallisées. = D'après Poynting, les corps cristallisés, en particulier la glace, peuvent fondre à une température notable- ment moins élevée que la température correspondant 6 tune A à ? | BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 435 à la courbe de fusion normale, quand on les soumet à une pression très élevée, dans des conditions telles que le liquide puisse s'écouler librement. Ostwald a géné- …ralisé cette hypothèse et admet que toute substance possède deux courbes de fusion, définissant les tempé- ratures et les pressions auxquelles fond la substance, l'une quand la même pression règne sur le solide et sur le liquide, l'autre quand le liquide peut s'écouler librement. Il est relativement aisé de construire cette deuxième courbe de fusion ou de véri- lier si elle existe. On sou- mettra le corps cristallisé à une pression mesurable. Tant que le frottement intérieur ne sera pas extrémement grand, le solide commencera à s'écouler. Si l'on peut dé- terminer la vitesse d'écoule- ment, en fonction de la tem- pérature et de la pression, on constatera, au moment où la substance fond, une discontinuité dans la varia- tion de cette vitesse. L'appareil doit être disposé de manière que la pression mesurée soit bien celle qui s'exerce sur les portions du solide qui prennent part au mouvement d'écoulement Fig. 2. — Cylindre pour de plus, cette pression doit l'écoulement«des subs- être constante et la subs- tances cristalliséessous tance fondue doit s'écou- doc EF À, cylin- Jer librement, sans reflux et SF PMETrEerOrE sans exercer de contre-pres- sion. La substance est introduite dans un cylindre à parois épaisses et comprimée à l’aide d’un piston de orme particulière (fig. 2). L'écoulement se fait par Pespace annulaire haut de Ovm,5, et la matière cristal- lisée sort sous forme d’un tube mince qui se brise en enant heurter la partie supérieure élargie du piston. AD a A qu Ve) 0000000000 é- Ê 6 | 3. — Appareil pour la compression du cylindre de la qure 2. — À, cylindre; B, plateau d'acier: C, banc de nte: D, boulons: E, piston; H, levier: G, tige suppor- at des poids; 1, cadre; L, vis; N, écrou: O, P, fils de courant actionnant une sonnerie; R, repère. 2] débris tombent entre là paroi et le milieu évidé > la tige du piston, sans faire ultérieurement obstacle passage du liquide. Dn peut augmenter la vitesse d'écoulement en don- & à la base inférieure du piston une forme conique. e cylindre A (fig. 3) repose sur un plateau d'acier B, par trois boulons d'acier D au banc de fonte C. La partie inférieure du cylindre A et une portion des boulons D plongent dans un bain qui sert à régler la température. La pression s'exerce par l'intermédiaire du levier H, dont le point fixe est a, qui appuie sur le piston E en pet recoit en € la force produite par des poids que supporte la tige G ou par des fils. Si la pression doit être inférieure à celle qui correspond au poids du levier H, on compense en partie ce poids en soutenant le levier par un cordon qui passe sur une poulie et supporte à son autre extrémité un bassin dans lequel on ajoute des poids. Le levier H passe dans un cadre I qui peut se dé- placer à l'aide de la vis L et est guidé dans son mou- vement par la tige M. En tournant l'écrou N (dont la tranche porte 100 divisions, chacune de 0,7 mm), on peut dégager le levier H et amener la petite lame de platine O, fixée sur sa face supérieure, en contact avec le fil P et fermer ainsi le circuit d'une sonnerie. Quand la sonnerie fonctionne, on note la division qui fait face au repère R. Au bout d'un temps déterminé, on répèle le même réglage, ce qui fait connaitre la quan- tité dont le piston s'estenfoncé; cette quantité est pro- portionnelle à la vitesse d'écoule- ment. Au moment de la fusion, le mouvement du piston subit une accélération brus- que. Cette accélé- ration s'observe seulement quand b{\ [b Fig. 4. Fig. 5. Fig. 4. — Appareil pour déterminer les courbes de fusion. — AEB, canal: F, manomètre à ressort; G, robinet; CC, volant; D, vis de compression; a, piston avec bouchon d'ébonite; H, H, cadre. Fig. 5.— Détails des joints de la figure 4. — a, rondelle, pressée par une vis contre l'ouverture bb, la pression atteint la valeur qui correspond à la courbe de fusion normale; il n’y a donc qu'une seule courbe de fusion. Détermination de la courbe de fusion. — La subs- tance étant maintenue à température constante, on fait varier la pression qu'elle supporte, puis on observe la variation secondaire qui se produit en sens con- traire de celle qui a été provoquée. Cette variation est beaucoup plus considérable, quand le changement d'état à lieu. Le canal A (fig. 4), pratiqué dans le bloc d'acier, communique avec l'intérieur d'un cylindre à parois épaisses ayant une capacité d'environ 400 centimètres cubes. F est un manomètre à ressort, G un robinet par l'intermédiaire duquel le canal ABE peut être isolé de la pompe qui sert à le remplir d'huile de ricin. On comprime l'huile jusqu'à 500 atmosphères, puis on ferme le robinet et, faisant avancer la vis D au moyen du volant C, on met en mouvement le cadre HHBH, ce qui force dans le cylindre le piston aa terminé par un bouchon d'ébonite. Dans le canal E, perpendiculaire au plan de la figure, est disposé un robinet à pointeau, qui permet d'isoler le manomètre F et le cylindre d'acier auquel aboutit le canal A. Quand ce robinet est fermé, la pression 136 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX (même à 3.000 kg) se maintient pendant des semaines. La course du piston est de 8 à 9 centimètres, ce qui correspond à une augmentation de pression de 1.000 ki- logrammes environ. Les variations de pression plus grandes s'obtiennent en augmentant la quantité d'huile introduite dans le récipient. La substance est enfermée dans un tube de verre, dont l'ouverture inférieure plonge dans un godet de mercure attaché par des fils aux anneaux de caout- chouc. Ces anneaux protègent, en outre, le verre contre la rupture, pendant qu’on visse le cylindre. Le tube de verre est complètement noyé dans le mercure, pour assurer la diffusion rapide de la chaleur. La construction des joints est représentée par la figure 5. La rondelle aa est fortement pressée contre l'ouverture bb par une forte vis, qu'on serre à bloc en frappant quelques coups de maillet sur le manche de la clé. M. Tammann à réussi à construire les courbes de fusion et les diagrammes caractéristiques d’une quaran- taine de substances. {1 est impossible dé nous étendre ici surles résultats qu'il a obtenus. Signalons seulement, parmi les plus intéressants, le diagramme de l'iodure de méthylène, tétramorphe dans la région étudiée, avec six points triples, et l'existence de deux modifica- tions de la glace, stables à basse température sous forte pression. Il semble bien que l'auteur ait obtenu tout ce qu'il est actuellement possible d'obtenir. Sans doute, il peut arriver que les progrès de la technique permettent dans l'avenir d'aller plus loin. Mais ces recherches n'en constituent pas moins une étape importante dans l'étude de cette question difficile. M. Tammann, avec une sagacité et une habileté d’expérimentation peu communes, à appliqué la règle qu'il énonce lui-même incidemment : « Pour déterminer des diagrammes caractéristiques complets, il faut procéder, avec calme et méthode, du connu à linconnu, et n'être pas avare de son temps. L'étude de liodure de méthylène a exigé environ quatre cents heures de travail. » Marcez LAMOTTE, Maitre de Conférences à l'Universite de Clermont-Ferrand. Tortelli (M.), Directeur du Laboratoire des Douanes, à Gènes (Italie). — Analisi chimica qualitativa. — 4 vol. de 336 pages, chez l'auteur, Génes, 1904. Le volume du D' Tortelli est intéressant à signaler par la forme claire et précise sous laquelle il est pré- senté. Après avoir décrit le mode opératoire emplové dans les essais par voie sèche et par voie humide, il donne successivement les réactions des métaux et des métal- loïdes, en indiquant pour chacun de ces groupes la méthode systématique permettant de les séparer et de les caractériser. X. Rocques, Ingénieur-chimiste, Ancien chimiste principal du Laboratoire municipal de Paris. 3° Sciences naturelles Guérin (Paul), Professeur agrégé à l'Ecole supé- rieure de Pharmacie de Paris. — Les Connais- sances actuelles sur la Fécondation chez les Phanérogames, avec Préface de M. le Professeur GuiGNarD, membre de l'Institut. — 1 vol. in-8&° de 160 p. avec 31 fiq. (Prix : 10 fr.). Joanin, éditeur. Paris, 1904. Voici un travail qui vient à son heure et qui recevra un accueil favorable non seulement des botanistes, mais encore de tous ceux qui s'intéressent aux questions générales de la Biologie. La question de la féconda- tion chez les plantes supérieures s’est enrichie, depuis une vingtaine d'années, d'un nombre considérable d’acquisitions nouvelles, aussi remarquables par leur importance phylogénétique que par la lumière qu'elles ont projetée sur des phénomènes restés jusqu'à ce jour sans interprétation suffisante; ces faits, épars dans une littérature très chargée, avaient besoin d’être coordon=M nés même pour les spécialistes, qui n’ont pas toujours le loisir de recourir aux Mémoires originaux. M. Guérin n’a pas reculé devant la tâche ardue se condenser ces recherches innombrables en n’insistant que sur celles qui méritent de fixer l’attention; il nous présente ainsi un tableau bien complet et bien ordonné de l’état actuel de nos connaissances sur la fécondation chez les Phanérogames, et nul ne pouvait le faire aveë plus de compétence. Cette étude est divisée en deux parties, l’une relative aux Angiospermes et l'autre aux Gymnospermes. Les recherches récentes sur la fécondation ont, en effet, accentué les différences qui, à ce point de vue, séparent ces deux groupes. Chez les Angiospermes, le dévelop pement du gamète mâle, celui du gamète femelle ét fécondation proprement dite font l’objet de trois cha- pitres d'un grand intérêt. Les deux premiers four nissent à l’auteur l’occasion de préciser nos connais sances actuelles sur la réduction chromatique, et, après un exposé très clair du développement normal, de passer en revue, avec une remarquable érudition, les nombreuses anomalies signalées dans la formation du grain de pollen ou du sac embryonnaire. Le cha=s pitre consacré à la fécondation est l’un des plus atta= chants; la double fécondation des Angiospermes, dé=« couverte pour la première fois, en 1899, par Nawaschine et Guignard, a été, depuis cette époque, en raison de sa haute signification, l’objet de recherches inces= santes de la part de très nombreux observateurs: M. Guérin a relevé avec un soin minutieux et une fidélité parfaite toutes les observations relatives à ce sujet et, par là, à contribué à démontrer la généralité du phénomène. Le sujet l’'amenait naturellement à aborder la question de la parthénogénèse et à com= parer les résultats fournis par l'étude des plantes à læ parthénogénèse expérimentale, observée chez les anis maux. Les dernières considérations du chapitre sont consacrées au phénomène si curieux des xénies; inexplicable, tant que la double fécondation elle= même est restée ignorée. Chez les Gymnospermes, l’auteur a dû, en raison de la diversité des phénomènes sexuels, étudier dans chacune des trois familles, Cycadacées, Conifères et Gnétacées, les appareils sexuels mâle et femelle et les phénomènes de la fécondation. Chez les Cycadacées, le développement et la conformation des anthérozoïdes ciliés, le mode tout particulier de fusion du noyau mâle avec le noyau femelle, qui le reçoit d'abord dans une « cavité réceptrice », la nature encore obscure du blé pharoplaste sont discutés avec beaucoup de sagacilés Les Conifères ne présentent pas moins de questions @ suspens : nombre des cellules stériles dans les grains de pollen des divers genres, date de l'apparition des cloisons, présence constante d’une cellule du canal; faut, en particulier, savoir gré à M. Guérin d'avoir apporté de la clarté dans la terminologie variable et, pa conséquent, confuse des divers éléments du grain de pollen des Conifères. Quant aux Gnétacées, on trouveras dans ce travail, l'analyse des recherches classiques d Karsten, de Strasburger et de Lotsy. k L'ouvrage se termine par deux chapitres du plus haut intérèt sur la comparaison des phénomènes morpho logiques de la fécondation chez les animaux etes plantes et sur l'interprétation de ces phénomènes; n'était guère possible de résumer plus clairement le récentes hypothèses sur la nature intime du phénomèn: et sur la dissociation de la fécondation végétative, simpl stimulus au développement, et de la fécondation génés ratrice, mélange des qualités héréditaires. 3 Un index bibliographique très complet, placé à suite de chaque chapitre, et de nombreuses figure complètent fort heureusement ce travail. ps F. PÉCHOUTRE, ? : | Professeur au Lycée Louis-le-Grand® s BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Demeny (G.), Professeur de Physiologie appliquée à l'Ecole de Gymnastique de Joinville. — Mécanisme et Education des Mouvements. — 1 vol in-S° de 523 pages et 565 figures de la Biblioth. scrent. internat. (Prix : 9 fr.). Alcan, éditeur, Paris, 1904. Depuis un certain nombre d'années, la gymnastique est entrée dans une voie nouvelle. Elle à cessé de con- sister uniquement en une série de manœuvres plus ou moins violentes et généralement d'autant plus appré- ciées qu'elles étaient plus difficiles à exécuter. Sous l'influence de doctrines venues de l'étranger, on a compris et reconnu qu'un entraînement modéré, bien gradué et accessible à tout chacun, a sur le dévelop- pement du corps une influence plus heureuse que les exercices compliqués et pénibles aux agrès. M. Demeny est de ceux qui ont le plus contribué en France à pousser l’enseignement de la gymnastique dans cette voie et à le faire reposer sur des principes rationnels. Le livre qu'il publie aujourd’hui fait suite à son ouvrage sur les bases scientifiques de l'éducation physique. Dans le premier chapitre, ayant pour titre : « Descrip- tion et mécanisme des mouvements », nous trouvons d'abord l'anatomie sommaire du squelette humain, des principales articulations et des muscles qui agissent sur elles. L'auteur étudie la manière dont les divers mouvements peuvent s’exécuter et quelle est leur amplitude naturelle. Le second chapitre, intitulé : « Analyse des attitudes et des mouvements », est extrèmement important, car on y trouve l'exposé de toutes les bases de la Mécanique animale. Pour que le corps soit en équilibre dans une position déterminée, il faut que la verticale du centre de gravité tombe en dedans du polygone des points d'appui. M. Demeny montre comment cette condition est réalisée dans les diverses attitudes, comment on passe d'une posilion à une autre et quel est le rôle des muscles dans ces divers cas. Puis il fait la même étude pour les différents mouve- ments. Nous voyons alors intervenir un facteur impor- tant, qui ne jouait aucun rôle au repos : c’est l’inertie de la matière. Enfin, l'auteur passe en revue une série de mouvements éducatifs. Toute cette partie de l'ouvrage contient de nombreuses figures se rapportant soit à des attitudes ou à des mouvements de la vie ordinaire, soit - à des exercices sportifs, tels que boxe, escrime, etc. - Le troisième chapitre est consacré à la locomotion pédestre, marche, course à diverses allures, saut, etc., . les deux suivants à la locomotion à l'aide des bras et aux divers autres modes de progression, cyclisme, danse, natation, etc. “ La plupart des documents qui ont servi à rédiger ces … (rois chapitres ont été obtenus au moyen de la chrono- «photographie, qui, dans un si grand nombre de cas, a — permis de faire l'étude des mouvements d'un corps. “ Ces documents sont reproduits intégralement ou sché- - malisés selon les besoins. — Entin, le volume se termine par un chapitre sur les …_ « Conditions économiques de l'utilisation de la force k musculaire ». C’est là, au point de vue pratique, évidem- ment, une des questions les plus importantes de la - Mécanique animale. Comment, dans les divers cas qui “se présentent à nous, faut-il s’y prendre pour produire un travail déterminé dans les conditions les plus éco- “nomiques ? Malheureusement, le plus souvent, nous - manquons de données pour résoudre ces problèmes. “M. Demeny nous donne celles qu'il a pu se procurer, en particulier dans la marche, où l’on peut parcourir un certain espace de facons bien différentes en variant les allures et les repos. Il y a généralement une solution de moindre fatigue. : La lecture de ce livre sera certainement utile à tous ceux qui s'intéressent aux questions de sport ou d'édu- cation physique et qui désirent appliquer ces exercices au développement du corps et à l'entretien de la santé. Dr G. Weiss, Professeur agrégé à la Feculté de Médecine de Paris. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 437 4 Sciences médicales Belot (D' J.) — Traité de Radiothérarie. 2° édition, revue et augmentée, avec une prélace de M. le D Broco. — 1 volume grand in-8 de 528 pages avec figures et planches. Steinheïl et Ci, éditeurs. Paris, 1905. Nous connaissons pas mal de traités de radiothérapie, parus surtout à l'Etranger, mais nous n'en connaissons aucun qui soit plus complet et plus au courant que celui de M. Belot, dont vient de paraitre, peu après la première, une deuxième édition. L'auteur ne s'est pas contenté, en effet, d'exposer longuement dans son livre ses travaux personnels; il s'est surtout donné la tâche d'exposer tout ce qui avait été fait d'important sur le sujet, essayant même de prévoir les applications nouvelles dont la liste S'allonge si régulièrement chaque jour. Cent pages mettent le lecteur au courant de Ja partie technique; c’est la première partie du livre. Elle comprend les machines et les principaux appareils utilisés, surtout en France, pour produire et mesurer les rayons X. La deuxième partie, déjà plus étendue, comprend, pourrait-on dire, toute la radiophysiologie, c'est-à-dire : les propriétés biologiques des rayons de Roentgen, l'anatomie et la physiologie pathologique, les facteurs radiothérapiques, etc. Ce n'était certes pas la plus commode. La troisième partie est, à mon avis, la partie mai- tresse de l’œuvre : comme étendue, comme origina- lité, comme quantité et qualité des documents qu'elle met au jour, et surtout comme utilité. L'auteur y passe en revue toutes les formes pathologiques auxquelles la radiothérapie, à tort ou à raison, a été appliquée. Il dit les résultats, les doses, la technique spéciale s'il y en a une, les fautes à éviter, etc. C’est le meilleur des guides, et l'on croirait presque, à le lire, que rien n'est plus facile que de mener à bien un traitement radio- thérapique. La question du cancer y tient cent bonnes pages, et l’on s'aperçoit, en lisant, que ce n'est pas trop, tellement la question est fouillée et sagement exposée. Elle a, d’ailleurs, tant d'importance ! En résumé, beau et bon livre, clairement écrit par un auteur précis et des plus compétents : que peut-on demander de mieux ? D' J. BERGONIÉ, Professeur à la Faculté de Médecine de Bordeaux, De Rothsehild (D' H.), Médecin en chef de la Poly- clinique H. de Rothschild. — Traité d'Hygiène et de Pathologie du Nourrisson et des Enfants du premier âge, publié sous la direction du D' H. pe Rorascaizv. — Tome I], avec127 figureset 22 planches (Prix : 15 fr.). O. Doin, éditeur. Paris, 1905. Il y à quelques mois, la Revue generale des Sciences présentait à ses lecteurs le tome I du Traité d'Hygiène et de Pathologie, publié sous la direction de H. de Rothschild. Le tome II vient de paraître. Il comprend huit parties : Pierre Bonnier étudie les maladies du nez, du larynx et de l’oreille; Péchin, les maladies des yeux; Gastou, l'hygiène et la pathologie cutanées ; Perret, les mala- dies du cœur; Kahn, les maladies du foie et de la rate: Marcel Deschamps, les maladies du péritoine. Les ma- ladies de l'appareil respiratoire font l’objet de travaux de la part de Roques, Audion, Brunier, M. Perret et P. Ehrhardt. L'ensemble de ces études forme un gros volume, excellente mise au point de ces importantes questions de Pathologie. L'hygiène et la pathologie du nourrisson méritent une place à part en médecine, car les maladies de l'enfant se répercutent sur toute la vie de l'individu, retentissent souvent sur toute la race à venir. C'est rendre service au corps médical que de publier un bon traité concernant cette pathologie. D: P. DesFosses. g+* ACADÉMIES ET SOCIËTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS 10 Avril 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Eug. Fabry signale des fonctions entières, de genre p et p-1, dont la diffé- rence est constante. — M. P. Zervos étudie le problème de Monge dans le cas de quatre variables. — M. Bel- zecki donne la solution du problème de l'équilibre d'élasticité des voûtes en arc de cercle. — M. L. Torres, étudiant la stabilité longitudinale des ballons diri- geables, arrive à des résultats différents de ceux du Ci Renard; d'après lui, par l'emploi du ballonnet de poupe, on diminue le poids dont on peut disposer dans la nacelle et, en même temps, on fait monter le centre de gravité du système, ce qui est nuisible au point de vue de la stabilité. — M. H. Poincaré présente le Rap- port de la Commission chargée du contrôle scienttique des opérations géodésiques de l’'Equateur. Les obser- valions ont subi d'assez grands retards par suite des conditions météorologiques défavorables et de l'état de santé du personnel; mais il y a lieu de prévoir qu'elles seront terminées vers le milieu de 1906. — M. H. Des- landres, à propos des essais de M. Hansky pour pho- tographier la couronne solaire, en dehors des éclipses totales, au sommet du Mont-Blanc, pense qu'on na pas réduit au minimum un obstacle important: Ja lumière diffuse de l'appareil, et propose un dispositif qui écarte complètement la lumière du disque. — MM. Rambaud et Sy présentent leurs observations de Séance du la comète Giacobini (1905 à) faites à l'équatorial coudé. ‘de l'Observatoire d'Alger. — M. A. Hansky à fait des observations actinométriques au sommet du Mont- Blanc en août et septembre 1904; il en déduit pour la constante solaire la valeur 3,23 cal. 20 Scnnces PHYSIQUES. — M. A. Leduc a constaté qu'en faisant ceristalliser du bismuth dans le champ magnétique, chaque cristal tend à s'orienter, au mo- ment de sa formation, comme il le ferait ensuite s'il était isolé; le champ détermine donc, dans sa propre direction, un tlassement maximum, c’est-à-dire un maximum de perméabilité — M. P. Massoulier montre que l'ionisation des flammes dépend non seu- lement de la température, mais aussi des réactions chimiques qui s'y produisent. — M. M. Chanoz à constaté l'existence d'une différence de potentiel au contact des dissolutions miscibles d'électrolytes. Cette différence est d'autant plus grande que la surface de séparation est plus nette. — M. N. Egoroff, ayant soumis du quartz incolore à l’action des rayons du radium, y à observé ensuite un dichroïsme identique à celui qu'on observe ordinairement dans le quartz enfumé. Le quartz naturel à stries enfumées, chauffé, présente de son côté des phénomènes thermo-électri- ques. — M. V. Crémieu décrit un dispositif auto- amortisseur applicable aux mouvements pendulaires et oscillatoires. 11 consiste en principe en un second pendule, disposé à l'intérieur du premier. — M. En. Touchet présente une photographie d'éclair montrant une incandescence de l'air environnant. D’après lui, il faut attribuer à l’incandescence des gaz de l'air la lueur continue qui persiste quelques instants après certains éclairs. — M. Th. Moureaux a observé au Val- Joyeux, le 4 avril, jour du grand tremblement de terre de Lahore aux Indes, des variations de l'aiguille aimantée qui sembkent en rapport direct avec ce phé- nomène. — M. F. Wallerant à obtenu, par fusion de mélanges d’azotates de thallium et d'’ammonium, et refroidissement, trois séries de cristaux. — M. R. de Forerand à déterminé la chaleur de formation de l'hydrure de sodium; elle est de 16 cal. à partir de Pet Na solides: c’est la valeur de l'acidité de la molécule d'hydrogène solide. — M. M. Guédras à constaté la formation d’éthers de la glycérine lorsqu'on met er contact la glycérine et l'acide acétique en présence de caséine ; ce dernier corps paraît Jouer un rôle cataly= tique. — MM. R. Lespieau et Chavanne ont préparé à l'état liquide l’allène CH?: G : CH: et l'allylène CH : C.CH* isomères; le premier fond à — 146° et bout à — 322; le second fond à — 1109 et bout à — 259,5. — M. A Frébault à hydrogéné le benzonitrile et le paratolu=M nitrile en présence de nickel réduit vers 2509. Avec le premier, on obtient la mono- et la di benzylamines ; avec le second, il se forme des p-méthylbenzylamines: — MM. Z. Vignon el A. Simonet ont préparé une série de composés diazoaminés nouveaux par copula= tion de divers dérivés diazoïques avec la diphényla- mine. Ces diazoaminés secondaires se transforment par transposition moléculaire en azoïques; soumis à l'action des acides, ils dégagent leur azote diazoïque avec for- malion d’un phénol et d'une amine secondaire. — M. A. Kling a mis en évidence l'existence de deux hydrates CHSO?.H20 et CH°O®. 2 H°O dans les solutions aqueuses d’acétol; il paraît également se former des hydrates à 4 el à 5,5 H°0. — M. P. Lebeau, en faisant réagir le sodammonium sur les composés halogénés monosubstitués des carbures forméniques, a obtenu les carbures correspondants. — M. A. Perrier a étudié la formation et le rôle des matières grasses chez les Champignons. Leur formation n’est pas en relation directe avec la nature de l'aliment ternaire offert à la plante; l'alcool les produit au même titre que les hydrates de carbone. Ce sont donc des produits de synthèse complexe, formés par l'intermédiaire de la matière albuminoïde elle-même. — MM. R. Lépine et Boulud ont constaté que le temps de réduction de l'oxyhémoglobine du sang ne varie pas par la dilution; il est très augmenté par l’anémie et par l’anesthésie chloroformique ; il n’a pas varié dans plusieurs infec- tions. — MM. M. Piettre et A. Vila montrent que l'oxyhémoglobine cristallisée de Hoppe-Seyler possède un spectre à trois bandes; la malière colorante du sang, dès qu'elle est mise en liberté, n’est plus iden- tique à ce qu'elle est dans le complexe globulaire. — M. F. Maignon a reconnu que l'alcool et l’acétone se rencontrent à l’état normal, d'une facon constante, dans tous les lissus de l'organisme, dans le sang et dans l'urine ; ce sont des produits normaux de l'économie” — MM. L. Hugounenq ét A. Morel ont préparé l’hé- matogène aussi pur que possible par la méthode de Bunge; ils lui ont trouvé la composition suivante : CG 43,5; H 6,9; Az 12,6; P 8,7; Fe 0,455; "Ca 0,3528 Mg 0,126; S, traces; O0 27,367. — MM. A. Fernbach @f J. Wolff montrent que l’état de liquéfaction de l’ami= don joue un rôle très important dans sa saccharifica= tion par les diastases. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Chauveau présente ses recherches sur le mode de formation de l’image acci= dentelle et l'influence que le conflit de cette image avec l'image primaire exerce sur l'éclat et la visibilité des objets. — M. Th. Lullin a observé qu'en fixant atten= tivement un petit carré de papier noir fixé sur un écran, phosphorescent, on le voit disparaître complètement une légère déviation du regard le fait aussitôt repa= raitre. — M. A. Charrin a étudié expérimentalement l'influence des dyscrasies acides; elles abaissent la résis= tance de l'organisme aux infections. — MM. L. Lapicque et P. Girard ont reconnu que la formule de Dubois É d.”" 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 439 .E—c$, qui exprime le poids de l’encéphale en fonction du poids du corps chez les Mammifères, s'applique aux Oiseaux ; r— 0,56. — M. R. Perrier a constaté qu'il n'existe, chez les Edentés lardisrades,aucune connexion entre les organes génitaux et la région inguinale; il n'y a ni repli, ni ligament inguinal. Les Edentés se sont probablement séparés de la souche commune des Mam- mifères avant que ne se soit établi le processus de la descente des testicules. — M. E. L. Bouvier donne la description des Pénéides et des Sténopides capturés dans l'Atlantique oriental par les Expéditions fran- caises et monégasques. — M. G. Bonnier a étudié les plantes du plateau des Nilghirris (Indes). Ce plateau n'est pas à une assez grande allilude pour que les végé- laux y acquièrent tous les caractères des plantes de la région alpine; mais ils ont cependant certains carac- tères alpins. D'autre part, le climat tempéré du plateau permet aux plantes cullivées de nos contrées de sy . développer et de s'y reproduire. —M. H. Jumelle décrit une nouvelle Euphorbe à caoutchouc de Madagascar, qu'il nomme Æ. elastica. Un litre de latex donne, au moins, 320 grammes de caoutchouc. —M.P. Becquerel a observé que le chloroforme agit sur les graines sèches en dissolvant les matières grasses de la cellule et en produisant une plasmolyse etune contraction du pro- toplasma et du noyau. — M. A. Lacroix montre que la considération des enclaves homæogènes des roches vol- caniques d'une province pétrographique donnée a une importance capitale pour l'histoire du magma dont elles proviennent les unes et les autres. — M. C.G. S. Sand- berg considère le granite des Alpes occidentales comme étant d'âge oligocène; il se base pour cela sur l'étude des blocs exotiques des Klippe qui sont de la même nature que le granite des Alpes. — M. Grand-Eury présente ses recherches sur les Zhabdocarpus et sur l'évolution des Cordaïtées. Séance du 17 Aout 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Mason présente ses recherches sur l'équation différentielle y"+XA (x) ÿ—=0. — M.R. Liouville cite de nouveaux exemples montrant que la vitesse de combustion des poudres est bien proportionnelle à la puissance deux tiers de la pression ; si l'on suppose que celte vitesse est propor- ‘tionnelle à la pression elle-même, les écarts entre les résultats théoriques et expérimentaux sont beaucoup plus élevés. — M. Pigeaud montre que, lorsqu'un arc est associé à un longeron par des montants verticaux articulés, on peut l'assimiler, dans la pratique, à un arc de même nature, considéré isolément, ayant une étudie la théorie du vol à voile et montre que, pour s'élever dans le vent, l'aéroplane voilier, quelle que soit sa trajectoire, doit toujours venir dans le vent relatif. — M. Bertin présente quelques considérations sur le principe des navires à flottaison cellulaire. — M. F.Ros- sard adresse ses observations de la nouvelle comète “Giacobini (1905 4) faites à l'Observatoire de Toulouse. - 2° SciENCES PHYSIQUES. — M. L. Houllevigue a con- -staté que les pellicules transparentes de fer ionoplas- ique, placées dans un champ magnétique perpendicu- laire à leur plan et traversées normalement par de la lumière polarisée, transforment une vibration recti- ligne en une vibration elliptique dont le grand axe est incliné sur le plan de la vibration incidente. —MM.J.de Kowalski et P. Joye, étudiant le spectre d'émission de l'arc électrique à haute tension, ont observé l'exis- ence de vapeurs métalliques aux environs de la ca- thode et cela dans un état et à une température ana- -logues à ceux qu'on trouve dans le cône d'une flamme gaz. — M. G.-A. Hemsalech propose un nouveau dis- itif pour l'étude des étincelles oscillantes, basé sur emploi d'un courant d'air qui sépare les oscillations. ‘inclinaison des oscillations sur la direction du cou- nt d'air permet de mesurer la vitesse des particules azote qui transportent le courant; pour une fréquence de 27.400, cette vitesse est de 29 mètres par seconde. section eLun momentd'inertie différents.—M.Alb.Bazin : — M. L. Benoist décrit une méthode et un appareil de | dosage de l'électricité pour les applications médicales de l'électricité statique. Un électro-densimètre, com- posé d’un électromètre et d’un disque d’épreuve, donne la densité électrique en franklins par centimètre carré (3 X 10° franklins — 1 coulomb.). — MM. Hauger et Pescheux présentent un avertisseur de la présence de gaz d'éclairage ou de grisou: il est formé d’une balance | de précision, en équilibre dans l'air ordinaire, et qui s'incline dans un air de composition différente en met- tant en mouvement une sonnerie. — M. Guinchant a constaté que la cristallo-luminescence de l'acide arsé- nieux en solution dans HCI est un cas de tribo-lumi- nescence; le dissolvant n'a d'autre influence que de permettre la formation de cristaux non cubiques, seuls tribo-luminescents par leur transformation en cristaux cubiques. — M. F. Bodroux, en faisant tomber du carbonate neutre d'éthyle dans de l'éther tenant en dissolution le dérivé magnésien de l'aniline, a obtenu la phényluréthane correspondante. Les autres amines aromatiques se comportent de même. — M. H. Bierry à constaté que le suc pancréatique de jeunes chiens à la mamelle ne contient pas de lactose; le suc pancréatique de la chienne en lacta- tion ne renferme pas de ferment soluble capable d'hy- drolyser le sucre du lait. — M. F. Maignan a reconnu que les muscles, prélevés sur un animal vivant et pla- cés dans des conditions permettant leur survie, pro- duisent de l'alcool et de l'acétone; mais, tandis que l’acétone va constamment en augmentant, l'alcool aug- mente pendant les premiers jours et diminue ensuite. — MM. F. Bordas et Touplain proposent l'emploi de la centrifugation (2.000 tours à la minute) pour l’épui- sement successif de la matière grasse par l’éther et du sucre par l’eau dans l'analyse des cacaos et des choco- lats. La même méthode permet des économies consi- dérables de temps dans l’analyse du lait. —- M. E. Ni- colas propose de rechercher comme suit le formol dans le lait : Précipiter la caséine par l'acide acétique ou lactique, et filtrer; ajouter au filtrat quelques cristaux d'amidol et boucher le tube : une belle fluorescence verte indique la présence de formol; la réaction est sensible au 1/500.000°. — M.J. Dumont expose sa méthode pour l'analyse minéralogique des terres arables. , 39 SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran préconise, dans l'infection due au Trypanosoma qambiense, la mé- thode thérapeutique suivante : traitements successifs à huit ou dix jours d'intervalle, chaque traitement com- portant une forte dose d'acide arsénieux et une forte dose de trypanroth en injections. Trois ou quatre traite- ments ont suffi pour guérir deux singes. — M. Cluzet a recherché la durée de l'excitation des nerfs par la quantité minimum d'énergie chez l'homme et se pro- pose d'employer ces valeurs au diagnostic de certains cas pathologiques. — MM. A. Charrin et Moussu ont constaté que la rate exerce sur le foie une indéniable action, qui consiste essentiellement dans une fonction biligénique. — M. A. Frouin à reconnu que l'action excitante du suc intestinal sur la sécrétion entérique n'est pas due à la sécrétine. La sécrétine ne saurait exister dans la sécrétion spontanée de l'intestin. — M. H. Coutière a déterminé quelques Crustacés recueil- lis avec le filet à grande ouverture dans les campagnes de la Princesse Alice. — M. C. Gerber a étudié la fausse cloison des Crucifères. Elle est constituée, pour lui, par la concrescence de deux carpelles placentaires avec ce qui reste de l’axe floral (tissu parenchymateux le plus généralement), concrescence se produisant dans la portion de la région de la nervure médiane de ces feuilles carpellaires qui contient les faisceaux inverses. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 18 Avril 1905. M. R. Brunon estime que la valeur nutritive du lait doit se mesurer, non par l'expérimentation ou par l'analyse du lait, mais par l’état des nourrissons qui le recoivent. Le lait de vache stérilisé à l’autoclave à 102 pendant quarante-cinq minutes conserve sa valeur nutritive. La suralimentation est la cause fréquente des accidents d'entérite. — M. Suarez de Mendoza donne lecture d'un. Mémoire sur le traitement des corps étrangers de l'æsophage. — M. Moty lit une observation de péritonite par étranglement interne: laparotomie, colotomie, guérison. à Séance du 25 Avril 1905. M. A. Laveran présente un Rapport sur un Mémoire de MM. L Martinet J. Girard relatif à un cas de try- panosomiase chez un blanc. Il s’agit d'un missionnaire ayant vécu au Congo; il présentait la plupart des symptômes de la maladie du sommeil. L'examen du sang et du liquide cérébro-spinal montra des Tr. gam- biense peu nombreux, qui, inoculés aux animaux, ame- nèrent généralement la mort. Le malade recut des injections d'acide arsénieux ; mais, ayant quitté l'hôpital pour là campagne, son état s'aggrava et il succomba rapidement. — MM. Mosny et Malloizel donnent lec- ture d'une Note sur une forme d'encéphalopathie saturnine consistant en une méningo-encéphalite satur- nine aiguë précoce. — M. Leredde lit une Note sur la radiothérapie dans le traitement de l’eczéma. — M. Mi- rovitch communique un travail intitulé : Quelques considérations sur l'influence nocive de la vélocipédie de l’automobilisme sur la vision et les moyens d'y remédier. SOCIÈTÉ DE BIOLOGIE Séance du 8 Avril 1905. MM. M. Caullery et F. Mesnil décrivent deux Ha- plosporidies nouvelles, parasites de poissons marins, pour lesquelles ils créent le genre nouveau Ichthyo- sporidium. — MM. A. Gouin et P. Andouard ont admi- nistré du vanadate de soude à une génisse à la dose de 8 milligrammes par 100 kilogs et à dix jours d’inter- valle ; l'effet a été une diminution rapide du poids et de la croissance. — MM. A. Raiïlliet el A. Henry ont étudié un Nématode recueilli dans des tumeurs du gros intestin d'un noir africain. C'est un Sclérostomien nouveau, que les auteurs nomment Œsophagostomum Brumpti. — M. Ch. Porcher à constalé que la biliru- bine est le pigment principal de la bile de bœuf et qu'elle coexiste toujours à côté de la biliverdine quand bien mème la bile est devenue franchement verte. Les pigments biliaires résistent à la putréfaction et peu- vent encore être décelés avec netteté dans la bile pu- tréfiée par la réaction de Gmelin. L'auteur indique la meilleure manière d'observer cette dernière. — M. Léo- pold Lévi considère la faim comme la sensation cons- ciente d'un appel adressé, suivant un mode paroxys tique, au centre général de régulation de l'activité diastasique nutritive de l'organisme, — M. C. França a étudié la constitution et le mode de formation des nodules rabiques chez le renard inoculé avec le virus de la rage. — M. A. Frouin à reconnu que la séeré- tion abondante obtenue dans les premiers temps après avoir pratiqué une fistule se correspond à ja sécrétion physiologique. J. Krassilstschik a étudié une affection Aa te des Lépidoptères pro- duite par un sporozoaire nouveau, qu'il nomme Miero- klossia prima. — MM. M. Doyon, A. Morel et G. Péju proposent de doser le fibrinogène en acidifiant le plasma fluoré par l'acide acétique. Ils ont extrait du loie privé de sang, par une solution de NaCl, une sub- stance albuminoïde qu'ils n'ont pu jusqu'à présent dif- férencier du fibrinogène sanguin. — MM. P. Carnot et À. Chassevant ont constaté que l'estomac ne paraît retenir que difficilement l'albumine liquide ; par contre, il retient remarquablement lalbumine solide. — M. Laignel-Lavastine à observé que la méthode d'im- prégnalion argentique de Ramon y Cajal met en évi- dence avec une très grande élection les grosses cellules | ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES cylindriques des cordons médullaires des surrénales du chien, du lapin et du cobaye. — MM. H. Lamy €t A. Mayer ont déterminé les variations de concentra- tion de quelques éléments de l'urine à la suite d’injee= tions intra-veineuses des divers cristalloïdes. — MM. L. Lapicque et P. Girard : Poids de l'encéphale en fonction du poids du corps chez les Oiseaux (voir p. #38): — M. et Mn: L. Lapicque, répondant aux critiques de M. Hoorweg, montrent que la loi d'excitation électrique figurée par la quantité en fonction de la durée est bien une courbe concave vers l'axe des x. — MM. Edm. et Et. Sergent ont examiné le sang de 82 Rana escu- lenta algériennes; en hiver, il était toujours indemne; en été, il contenait, chez la plupart, des Hématozoaires. — Les mèmes auteurs ont trouvé des embryons de Fi- laire dans le sang du dromadaire, — Enfin, ils ont cap- turé à Biskra un Culicide nouveau, qui y est {très com- mun, et qu'ils nomment Grabhamia subtilis. Séance du 15 Avril 1905. M. D. Voinov estime que la fonction de défense de la glande interstitielle est limitée surtout à la protection de la glande et de la fonction génitales. — M. H. Cris- tiani et Mie S. Frigoff ont constaté qu'il serait dan- gereux d'employer la subeutine comme anesthésique local dans la pratique chirurgicale des greffes thyroï- diennes, car cette substance provoque de graves lésions dans les tissus ureffés. — MM. G. Linossier et G.-H. Lemoine ont observé la disparition de l'oligurie or- thostatique normale chez la femme enceinte et lappa- rition d'une oligurie clinostatique; cela tient à ce que, chez elle, le rein se trouve dans des conditions stati- ques plus défectueuses quand elle est couchée que quand elle est debout. — MM. Levaditi et Sevin ont étudié Finfluence des sérums normaux des Mammi- fères et des Oiseaux sur le Trypanosoma paddæ: seul, celui du rat est doué de qualités immobilisantes et lytiques manifestes. Le mécanisme de limmunité natu- relle vis-à-vis du trypanosome chez ce dernier se dis- tingue nettement du mécanisme des cobayes et des souris, qui sont également réfractaires. — M. E. Nico- las : Recherche du formol dans le lait (voir p. #39). —= M. F. Cathelin présente un nouveau cyloscope à air, sans partie optique, à lampe renversée au plafond. — M. H. Bierry eslime qu'on ne peut affirmer la pré- sence de la lactase dans un liquide que pour un dé- doublement de lactose ajouté supérieur ou égal à 20° Il n'a pu déceler la présence de lactase dans le sue pancréatique du chien. — M. A. Frouin : Action du suc intestinal sur la sécrétion entérique (voir p. #39). =— M. M. Doyon montre que la disparition du fibrinogène et l'incoagulabilité du sang après l’ingestion du chloro= forme ne se produisent que si le foie est nécrosé. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff ont reconnu que l'action du tissu pulmonaire empêche la coagulas lion du sang. — MM. A. Gilbert el P. Lereboullet signalent plusieurs cas de cirrhose biliaire d’origine éberthienne. — M. L. Nattan-Larrier à éludié cyto= logiquement les pleurésies cancéreuses; elles'se carac- térisent par la présence de bourgeons cellulaires polymorphes, de cellules réfringentes vacuolaires, trrés gulières, à noyaux multiples, l'absence des éusinophiles. M. L. Lévi montre que les viciations de la faim dépendent de l'intoxication du centre bulbaire régula= teur des actions diastasiques nutrilives. MM. A. Mayer et G. Stodel ont constaté qu'à la suite des in= jections d'argent colloïdal dans le sang les granulations d'argent n'apparaissent que dans les cellules rénales vivantes et disparaissent peu à peu; elles sont localisées dans le protoplasma cellulaire des tubes contournés et des branches ascendantes. — M. G. Bohn signale de nouveaux exemples de mouvements rotatoires d'ori= gine oculaire chez les Annélides, les Gastéropodes, les Crustacés et les Poissons. Chez les Crustacés, en parti= culier, les mouvements rotatoires sont assez variés eb se produisent avec une extrème facilité sous la simple influence d'un éclairement inégal des deux yeux. + mamans sms pme ue à ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ñ RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 4% Avril 1905. MM. Ch. Pérez et E. Gendre décrivent un procédé de coloration de la névroglie chez les Ichthyobdelles et les résultats de l'examen des coupes ainsi traitées. — MM. Lañfite-Dupont et Maupetit ont constaté que les variations de pression des liquides labyrinthique et céphalo-rachidien sont accompagnées d'un mouve- ment en sens direct de la pression artérielle. — MM. J. Bergonié et L. Tribondeau ont reconnu que les testi- cules rendus aspermatogènes par l'action des rayons de Rüntgen restent aspermatogènes., — MM. J. Sabra- zès et J. Bonnes ont fait l'examen du sang dans l’acro- mégalie; il ne s'écarte de la normale que par une diminution légère du taux de l'hémoglobine, par une faible leucocytose et par une lymphocytose relative et absolue très marquée. — MM. J. Sabrazès et L. Mu- ratet signalent l’extrème vitalité de l'Anguilla vulgaris dans l'eau stagnante où se sont développées un grand nombre d'algues vertes. RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 11 Avril 1905. MM. Oddo et Rouslacroix ont observé chez les con- valescents l’évolution d’une mononueléose typique et . constante, qu'ils désignent sous le nom de mononu- . cléose de convalescence. — M. A. Billet montre que la forme particulière de l'hématozoaire du paludisme décrite récemment par MM. Sergent est une forme hémogrégarinienne, qui constitue le trait d'union entre les Hemamwæba et les Hémogrégarines. — M. C. Gerber a reconnu que le pétale des fleurs normales de Cruci- fères est l'état réduit d'un phyllome trilobé dont les deux lobes ne sont plus représentés chacun que par un faisceau longeant les bords voisins du sépale médian et du sépale latéral entre lesquels le troisième lobe se développe en pétale. Chez les Giroflées doubles, les trois lobes du phyllome pétalique sont bien développés. — M. G. Quintargt a observé une Cercaire parasite nou- velle sur le Barleeia rubra. M. Imbert est élu membre titulaire de la Réunion. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 11 Avril 1905. M. R. Maire admet que la première et la seconde division du noyau secondaire de la baside, chez les Basidiomycètes, sont respectivement, au même titre hc les divisions correspondantes de l'asque, une mitose hétérotypique et une mitose homotypique. — MM. L. Richon et P. Jeandelize «écrivent trois cas d'insuftisance thyroïdienne expérimentale fruste chez » le lapin. — M. Th. Guilloz montre que le produit du numéro de l'oculaire par le produit du numéro de l'objectif du microscope doit être supérieur à 6.000 fois - l'ouverture numérique de l'objectif pour pouvoir béné- ficier dans l'observation de tout le pouvoir séparateur de l'instrument. — M. Gault communique ses recher- ches anatomiques sur les régions glottique et sous- glottique du larynx de l'homme. = SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 7 Avril 1905. M. A. Pérot indique le principe de deux instruments “— nouveaux du Laboratoire d'essais du Conservatoire des … Arts et Métiers : 1° Un manomètre absolu permettant la mesure de pressions de 24 kilogs. C'est un manomètre à branches multiples (fig. 1), dans lequelles branches où le mercure s'abaisse présentent des renflements cylin- driques a,, a,, etc., à la partie inférieure, et les autres des renflements b,, b,,ete., à la partie supérieure. Les ro- binetsR,,R,, etc., permettent de mettre en court-circuit C4 4 = t chacune des branches; une colonne à air libre termine l'instrument. L'appareil est rempli de mercure et d'huile de vaseline de facon qu'à l’état de repos le mercure remplisse les renflements inférieurs. Une canalisation permet d'évacuer l'huile dans un récipient spécial V. Deux vases m, et », contiennent du mercure et de l'huile, de sorte que le gaz comprimé ne soil pas en contact avec l'huile. Soit P la pression à dé- terminer, H sa mesure en colonne d'un liquide | dont la densité serait la | | différence entre la den- | sité d du mercure et | celle à de l'huile. Soit | la différence de niveau el de deux renflements et supposons qu'on ait : H=PA+ avec h> D". On fermera p robinets de court-circuit, R, étant ouvert, et l’on fera agir graduellement la pres- ; sion. Le mercure se dé- Fig. 1. — Schéma du manorètre nivellera et l'huile se dé- ä branches multiples du Labo- versera dans le vase V: ratoire d'essai du Gonserra- : : toire des Arts et Métiers. quand le mercure appa- raitra dans les vases b, on fermera R, : la colonne à air libre se dénivellera et Péquilibre sera atteint quand on aura, en désignant par les petites lettres les niveaux des liquides dans les ren- flements correspondants et par le symbole (a, a , +3) l& différence de hauteur entre les niveaux 4, et 4, pi: P—(»,,m,) d+4(a,,n,)8+(b,,a,)d+Æ(a,,b,)è+ (a, a) d. On aura alors des niveaux mercuriels dans des vases larges de section S et une colonne à air libre de petite section s. Imaginons que la pression vienne à varier : les niveaux des vases larges varieront de €, la colonne à air libre variant de q, tels que eS — gs, et la mesure de la variation de la pression sera approximativement eù + qd ou EI {ST Dans l'instrument actuel g— 0,021. On voit "que la variation de pression sera presque intégralement in- diquée par la colonne à air libre seule; c'est la pro- priété principale de l'instrument, qui permet de ne lire qu'une fois dans le cours d’une série d'opérations les niveaux du mercure dans les vases larges et de se borner à observer la colonne à air libre : la sensibilité pour les variations de pression est la même, à peu de chose près, que si l’on avaitune colonne unique. L'appareil a été construit par la maison Bourdon. 2 Appareïl à vo- rilier les sextants. Le sextant est un appareil délicat, dont les indications sont sujettes à caution parce qu'il ne possède qu'un vernier. Celui-ci donne les dix se- condes. Or, il est facile de se rendre compte, par l'étude des erreurs d'excentricité, que cette précision est illu- soire. Il suffit de quelques centièmes de millimètre d'erreur sur la position du centre de l’alidade pour amener des erreurs d’une minute. Des erreurs peuvent venir aussi des flexions résultant de la légèreté de la construction. L'appareil vérificateur permet de déter- miner les écarts entre les rotations du miroir et les angles lus sur l’alidade. La méthode consiste, l'instru- ment étant tenu par sa poignée, c'est-à-dire dans les con- ditions même de son emploi, à faire tourner le miroir du sextant d'angles lus sur l’alidade, de copier ces angles par une méthode optique et de les mesurer. Le cercle de l'appareil vérificateur peut être lié à un prisme à 3 faces dont les arêtes sont parallèles à l'axe, qui, d’ail- leurs, peut tourner indépendamment de lui et qui est destiné à faire le tarage de l'instrument. Une lunette ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES autocollimatrice permet d'orienter les faces du prisme. Cette méthode est générale et se prête à la vérifica- lion de tous les cercles, à condition qu'on puisse dé- placer le prisme indépendamment du cercle ou de l'alidade, et ceci est toujours réalisable. La lunette peut être indépendante du cercle; il suflit qu'elle soit stable. L'appareil a 66 construit par M. Jobin. — M. de Kowalski : Sur le spectre d'émission de l'arc élec- trique à haute tension. À la séance du 9 février 1904, l'auteur à présenté les résultats de ses expériences sur l'arc électrique jaillissant entre électrodes métalliques à haute tension et démontré qu'il existait un accord entre ces expériences et la théorie de M. Stark. D'après M. Stark, l'arc électrique commence à se produire au moment où la température de la surface de la cathode est assez haute pour produire une sorte d'évaporation du métal de la cathode. On pouvait done s'attendre à ce qu'aux environs de la cathode laspect du spectre lumineux de l'arc influencé par les vapeurs métalliques serait différent du spectre aux environs de l’anode. Il était aussi très intéressant d'étudier l'influence qu'au- rait l'intensité du courant dans Parc sur l'aspect de ce spectre. L'auteur a entrepris dans ce but de nouvelles expériences dont il présente ici les résultats. N'ayant pas à sa disposition des machines à courant continu à haute tension, il a été obligé d'employer à leur place des bobines d'induction. Pour obtenir un arc Jaillissant entre électrodes métalliques avec l’anode et la cathode nettement définies, il faut que le courant d'une bobine soit suffisamment dissymétrique, mais il est facile d'y arriver en employant un interrupteur approprié. Ce sont surtout les interrupteurs rotalifs à turbine avec jet de mercure qui répondent le mieux aux condilions de l'expérience. Cet interrupteur à l'avantage de permettre d'employer des courants très intenses et de mesurer exactement le nombre d’inter- ruptions. Les photographies des spectres ont été ob- tenues au moyen d'un spectrographe à lentille de quartz et à prisme de Cornu. Voici quelle était la dis- position des expériences : À une distance d'environ 20 à 25 centimètres de la fente du spectrographe était placé le spectro-déflagrateur avec des électrodes en cadmium ou en zinc. Le spectro-déflagrateur était relié au secondaire de la bobine d'induction, la distance des électrodes était d'environ 15 millimètres. Dans ces con- ditions, on obtenait une décharge à arc avec environ 20 interruptions par seconde et un courant de 6 am- pères dans la bobine primaire. Pour avoir un spectre de comparaison, on mettait une batterie de condensa- teurs, de 0,003 microfarad de capacité, en parallèle avec le déflagrateur. La décharge se transformait alors en décharge oscillante par étincelles. Le spectre de cette dernière décharge est suffisamment connu, grâce aux belles recherches de M. Hemsalech, et pouvait être em- ployé comme spectre de comparaison. Les résultats obtenus ont confirmé les prévisions. Les photographies présentent d'abord un spectre à bandes dues aux va- peurs nilreuses qui se forment dans l'arc. Mais, du côté de la cathode, en haut, on remarque, en outre, de fortes lignes coupées, dues au métal formant la ca- thode. Ces lignes apparaissent exclusivement à la ca- thode. On l’a vérifié en inversant le courant. Elles appa- raissent alors au bas du cliché. La longueur de ces lignes dépend de l'intensité du courant dans l'arc. En augmentant l'intensité, certaines lignes traversent toute la hauteur du spectre en s'élargissant du côté de la cathode. L'étude de la position de ces lignes coupées donne des résultats intéressants. Pour le cadmium, on observe les lignes suivantes : 5086 1800 1678 ms une double 3404 3261 3466 à une double 3467 Pour le zinc : $ 1 6 une double une double n » > : Cr CR SE 4 î ï ae Se 3 201: Or ces lignes se trouvent être celles mêmes que M. de Walteville avait trouvées dans son remarquable travail sur les spectres des flammes. Elles sont identiques avec les lignes caractéristiques pour le spectre des métaux évaporés dans le cône de la flamme. Il y à lieu de re=. marquer que. la ligne 3282, très faible dans la flamme du zinc, apparait d'une manière très nette dans le spectre de l’auteur. Tous ces faits démontrent dome définitivement l'existence des vapeurs métalliques aux environs de la cathode, et cela dans un élat et à ume tempéralure analogues à ceux que lon trouve dans le cône d’une flamme à gaz. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 9 Février 1905. Sir N. Lockyer et M. F.E. Baxandall : Sur la ligne stellaire située près de Xk 4686. Dans ce Mémoire, les auteurs attirent l'attention sur une ligne très distincte, d'origine inconnue, qui apparait dans une des photo- graphies du spectre de l'hélium près de À 4686. Il est dé montré qu'une ligne très apparente voisine de la même longueur d'onde se trouve dans le spectre de la chro- mosphère, des nébuleuses, des étoiles à lignes bril- lantes, de certaines étoiles d'Orion, et dans € Puppis; le Professeur Pickering a, d’ailleurs, trouvé que le: spectre de cette dernière éloile contient une nouvelle M série de lignes qu'il considère comme appartenant à l'hydrogène. La longueur d'onde moyenne de la ligne stellaire, comme cela découle des observations utili- sables déjà publiées, paraîl concorder très étroitement . avec la longueur d'onde delaligne trouvée dans lespectre M de laboratoire, et les auteurs en concluent que l'identité des deux lignes est probablement réelle. Rydberg a démontré que la ligne située près de À 4686 est la pre= mière ligne dans la série principale de l'hydrogène, et les auteurs de ce Mémoire considèrent que celte ligne \ étrange du spectre del’hélium estprobablementla même ligne. Cependant, ils ne peuvent indiquer aucune raison pour son apparition dans une seule des nom- breuses photographies du spectre de l'hélium prises à Kensington. —- Sir N. Lockyer et M. F.E. Baxandall : Note sur le spectre de & Centaure : Dans cette Note, les auteurs donnent une analyse de quelques-unes des. lignes brillantes du spectre de & Centaure. Cette étoile n'étant pas observable à Kensington, une excellente reproduction, due au Professeur Pickering, à été em> ployée comme base pour l'analyse. Les lignes brillantes: principales appartiennent à l'hydrogène, comme Picke- ring el d’autres savants l'ont indiqué. Pour les lignes brillantes secondaires, on n'a jusqu'à présent suggéré aucune origine. Dans cette Note,les auteurs montrent que la principale des lignes brillantes secondaires con= corde très exactement par sa position avec la plus forte des lignes élargies du fer..Il en résulte que les lignes stellaires et terrestres ont probablement une origine identique. Les mêmeslignes sont visibles dans le spectre des Novae à leur origine. — Sir N. Lockyer et M. F.E. Baxandall : Le spectre d'arc du scandium et ses rap= ports avec les spectres célestes. Ce Mémoire contient un rapport sur les lignes du spectre d'arc de l'élément rare le scandium entre À 3900 et À 5720. La photo graphie employée pour la réduction a été prise au moyen d'un grand réseau concave de Rowland, ayant une surface de 14 1/2 X 5 cm., et un rayon de 9,45 m. L'échelle de la photographie est telle que la distance entre K et D est de 77 cm., ce qui équivaut à 2,6 dixièmes, de mètre par millimètre. Les auteurs donnent une analyse des lignes en ce qui concerne leur apparition, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES = = = dans le spectre de Fraunhofer. Is montrent que pres- que toutes les lignes les plus fortes existent comme lignes solaires, mais la grande majorité des lignes plus faibles que l'intensité 6 (intensité maximum 10) man- quent dans le spectre solaire. De courtes indications - sont aussi données sur les relations des lignes d'arc du scandium avec les lignes des spectres de la chromos- phère, des taches solaires et des étoiles. Les plus fortes lignes du scandium sont spécialement proéminentes dans le spectre chromosphérique, les mêmes lignes étant apparentes dans le spectre stellaire du type Po- larien (par ex.y Cygni). Dans le type Cygnien stellaire plus élevé (x Cygni), les lignes les plus fortes du scan- + dium sont présentes, mais faibles. Aux degrés encore plus élevés des spectres stellaires, les lignes du sean- dium font défaut. En ce qui regarde les spectres des taches solaires, on trouve que la seule ligne solaire du seandium (À 5672,047) indiquée par Rowland dans la région F à D est presque toujours bien marquée et elle se présente souvent parmi les douze lignes les plus élargies enregistrées à Kensington dans les spectres de | taches. — Sir William Crookes : Sur l’europium et | | son spectre ultra-violet. Exner et Haschek ont mesuré les longueurs d'onde des lignes de l'europium sur un échantillon fourni par Demarçay. Une comparaison de leurs lignes avec celles de l'auteur montre que la sub- > stance n'était sûrement pas pure. L'europine d'Urbain n'est pas tout à fait aussi exempte d’impuretés que sa ‘He L'auteur à pu découvrir les lignes suivantes ans les photographies qu'il a prises. Le gadolinium est représenté par des lignes très faibles : 3450,55; 3481,99: 3585,10: 3646,36; 3654,79; 3656,32; 3664,76 : 3697,90:; 3699,89: 3743,62: 3768,32; 3796,58: 3805,70; 3890,83 ; 3851,16 ; 4050,08 : 4225,33. L'yttrium est repré- senté par la ligne 3774,51 ; le lanthane par la ligne 3988,66, et le calcium par les deux lignes 3933,825 et 3968,625. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 29 Mars 1905. . La Société procède au renouvellement annuel de son Bureau. Sont élus : Président : M. R. Meldola : * Vice-présidents : MM. H. T. Brown, H. B. Dixon, W. R. Dunstan, D. Howard, A. Smithells, W. P. Wyanne: Ë Secrétaires : MM. M. ©. Forster et A. W. Crossley; Secrétaire étranger : Sir W. Ramsay ; Trésorier : M. Al. Scott. ‘ SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 17 Février 1905. M. L. Graetz présente un Mémoire sur les radiations du peroxyde d'hydrogène. La plupart des résultats expérimentaux trouvés auparavant par l'auteur relati- .vement aux effets photographiques du peroxyde d'hy- drogène viennent d'être confirmés par MM. Precht et Otsuki, qui, cependant, pour expliquer ces phéno- _mènes, invoquent l'hypothèse d’abord proposée par l'auteur, et abandonnée dans la suite, à savoir que ces effets seraient dus aux vapeurs de H°0°. Après avoir démontré que l'hypothèse en question n’est nullement la seule admissible, M. Graetz expose les raisons qui militent en faveur de sa manière de voir actuelle, et d’après laquelle ce serait une émanation extrèmement volatile qui produit ces phénomènes. Cette émanation _consisterait, dans l'hypothèse la plus plausible, d'atomes d'oxygène libre, c'est-à-dire de O et non pas de 0°. On pourrait, cependant, penser également à des électrons ou, enfin, à quelque matière inconnue présente en quantités minimes. Séance du 3 Mars 1905. : , M. S. Czapski fait la nécrologie de M. F. Abbe, _ l'éminent physicien décédé à Léna le 14 janvier 1905. é On sait que Abbe, fondateur et copropriétaire des Ateliers d'Optique de C. Zeiss, fut un homme éminent au double point de vue du savant et du philanthrope. Comme savant, il a fait époque par ses travaux d'Op- tique technique, qui sont demeurés classiques, el l'institution Carl Zeiss reste pour attester son œuvre philanthropique. Comme cet homme était d’une extrême modestie, il est excessivement difficile de faire la part de ses œuvres; presque toutes les inven- tions rendues publiques pour le compte de la maison Carl Zeiss étaient en réalité dues soit à lui-même, soit tout au moins à son initiative. — M. R. Reïiger étudie le rapport e/y pour les rayons cathodiques d'origine différente. Les rayons cathodiques émis par les isolants et ceux qui prennent naissance au sein même du gaz n'avaient pas encore été soumis à l'expérience. D'autre part, la grande différence des phénomènes électriques présentés par les conducteurs d’un côté, et les isolants et les gaz de l’autre, faisait voir tout l'in- térêt qu'il y aurait à déterminer, pour ces cas aussi. le rapport en question. Or l'auteur, qui vient de rem- plir cette lacune, fait voir que ce facteur est indépen- dant des phénomènes électriques présentés par le corps qui les émet. Aussi M. Reiger n'hésite-t-il pas à formuler cette proposition toute générale : L'ordre de grasdeur de , = À “4 À ÊE ÊE 8 & y 5 Aigle Bonnepal. f Chäml 23 UT 28 Méanartin net É ÊS 5 % ‘€ d LT NS Ptsde Chalanson VA AIS à = we “ ce “RCRadrière 1 SE a re S Lans cri g: à /G Perron > .. RES Fermi frs CM En * De SAME 32 2 ES cRRA É 4 * Bollecombe Val} € © StMichel 22% hope Petit sh re > Wii Mont-Cenis 3 É Are À Q 5 Nr £ * 5 METRE. Modes 2? 5 - END \ Ë ë. {4 A É 4° 4 Fer Pa ANT pe ne Îles sue rouges z à % = Ê . 2 = A à. le ë CG 1 } rs it MOnt-Blanc EY à £ nn Be mme ER é EE SiTour À Col de laSeigne FEV < Lanslebranlette "1 Mc À à 2 DHGerrers A2 PA © . Martigny éÈ © Col de Balme fe oter o/du Pt St Bernard do Sassière à | ar. Borremans, 5 Rue Ha Fig. 1. — Carte physique de la Savoie. - massif cristallin, où ses flanes sont creusés dans de , à Saint-Maurice même, le lit de la rivière est très È hautes murailles de gneiss et de schistes houillers. | étroit: le rétrécissement y est même tel qu’un pont À Saint-Maurice, la rivière atteint la couverture | d’une seule arche fait communiquer les deux rives. #66 J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE Ce cours actuel serait dû, d’après -M. Lugeon', à un phénomène d'épigénie. Une dépression en hémicyele contournant la colline de Chiètres serait un ancien cours du Rhône rempli aujourd'hui par un cône de déjections : la rivière, obéissant à la loi des vallées monoclinales, coulait autrefois vers le point le plus bas des couches, au pied de la mon- tagne. Quant à la persistance de la barre calcaire, en amont et en aval de laquelle les terrains sont plus érodés, elle serait due à des influences déri- vant de la Tectonique et de la genèse même du ter- rain. Ce cas se produirait chaque fois, ou à peu près, qu'une vallée passe de la région cristalline dans la région calcaire. Le Rhône entre ensuite dans les Préalpes, qu'il traverse jusqu'au Léman; la vallée devient plus riante et s'élargit. Pour en déterminer les raisons géologiques, nous étudierons, avec M. Lugeon*, les divers plis rencontrés — particulièrement les syn- clinaux — en remontant de l'aval vers l'amont et nous constaterons que la plupart s'infléchissent vers la vallée transversale. Le pli syncliral des Rochers de Naye-Gramont présente un plonge- ment vers la vallée très net, qui est de 28,5 °/, d'un côté et de 50 °/, de l’autre. Le synclinal des Agittes montre un noyau de Malm qui, de la Sarze, fait une chute moyenne de 50°/,. Le pli de Linleux-Blanscex a aussi une pente vers la vallée très accentuée, et, en face de ce pli, un deuxième synclinal des Agittes descend fortement. On arrive à une région où des masses triasiques et jurassiques se présentent en recouvrement sur la Molasse rouge, dont le plon- gement est en moyenne de 8°/,. Près de Colombey, on voit, sous cette Molasse et dans le Flysch, deux plis urgoniens dont les axes s'infléchissent de 30 à 35 Ces plis ne sont plus visibles sur la rive droite, et l’on peut remarquer iei que la position de la vallée ne correspond plus à l’axe de l'inflexion lransver- sale. En outre, les massifs de Morcles et de la Dent du Midi paraissent faire exception; la méthode ne peut donaer que des résultats incertains, par suite du contournement des couches, et l'emplacement de la coupure pourrait être attribué, en ce point, à un phénomène de surimposition. La vallée du Rhône offre un modelé qui, d'après certains auteurs*, ne relèverait pas de l'érosion par les eaux courantes, mais des actions glaciaires. : M. Lucron : Sur la fréquence dans les Alpes de gorges épigénétiques et sur l'existence de barres calcaires de quelques vallées suisses (Bull, de l'Université de Lau- sanne, n° 2, 4901). 2 M. Luceon : Recherches sur l'origine des valiées des Alpes occidentales (Ann. de Géog., t. X, n° 52 du 15 juillet et n° 5% du 15 novémbre 1901). # L'hypothèse glaciologique que nous exposons ici est présentée avec beaucoup de netteté par l'abbé L. de Lagger dans les Annales de Géographie (t. XI, p. 411, 1903). S'il n’y a pas concordance entre l'embouchure des vallées latérales et la vallée principale, la cause; d'après eux, devrait en être attribuée au « surcreu= sement » résultant de ce passage des glaciers. Leur épaisseur ne cessait de s’accroitre par l'apport des affluents, et l’affouillement du lit devait progresser jusqu'au Léman; vers le milieu du lac, le niveau des chaînes en bordures était moins élevé et les glaciers auraient franchi leurs berges pour s'étaler dans la plaine suisse. L’érosion aurait alors perdu de son intensilé; le thalweg se serait relevé pour former la contre-pente d’aval. Ce faconnement au= rait débuté avec la première invasion glaciaire, et ne se serait achevé qu'avec la dernière, alors que le glacier, cantonné dans le sillon de la vallée, ali= gnait, aux environs de Thonon et d’Evian, les beaux remparts de ses moraines latérales, et, en amont et en aval de Genève, les matériaux de sa moraine frontale. L'hypothèse du creusement glaciaire expliquerai la topographie de la vallée, qui est profondémen creusée de Brigue au Léman, ainsi que celle du lac: L'épaisseur considérable du glacier de la vallée principale aurait produit l’exhaussement du nivea de base des glaciers latéraux, dont l’action étai ainsi allénuée. Après le relrait définitif des glaces ces cours d'eau affluents, perdant pied à leur dé bouché dans la vallée principale, descendaient en cascades et entreprirent le sciage des gorges qu'ils! continuent à entailler encore à l'heure actuelle. L'action érosive des glaciers, quoique admise pañ des savants éminents, comme MM. Davis et Penk, est contestée par des géologues non moins compé tents, qui refusent aux glaciers le pouvoir de creu= ser et d'excaver leur plafond, tout en leur recon naissant la facullé de reculer et de dresser leurs berges. Le « surcreusement » ne semble pas devoir êlr@ invoqué comme preuve de cetle action et le phéno mène d'affluents aboutissant à une altitude supé rieure à celle du thalweg de la vallée principalë peut, d'après M. Kilian', s'expliquer de la façon suivante : la partie haute des vallons latéraux été préservée pendant longtemps de toute érosion ultérieure par un manteau glacé permanent, alors que la vallée principale et la partie basse des vallon se trouvaient dans le périmètre d'action des érosions fluviales, et soumises, à diverses reprises, à des creusements et à des approfondissements d'origine fluvio-glaciaire. Toute brusque rupture de pente, comme l’a fait remarquer M. de Martonne*, est 1 W. Kizrax : Note sur le « surcreusement » (Uebertiefung} des vallées alpines (Bull. Soc. géol. France, 3° sén &. XXII, 1900, et Ann. Université Grenoble, &. XHI, 190k 2 E, pe MarroNwE : Sur la formation des cirques (Ann: 0 Géographie, t. X, 1901). J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE 167 trace de la limite entre deux régions où les forces naturelles travaillent d'une manière différente à la dénudation. Quant à l'origine des lacs de la bordure des Alpes, — problème qui ne nous parait pas encore définilivement résolu, — une explication qui parait plausible est celle émise par MM. Heim et Æppli, qui l’attribuent à un affaissement de la chaine. D'après ces auteurs, un lassement en bloc se serait produit entre la première el la seconde époque glaciaire, comme le prouve, aux environs de Zurich, l'inclinaison inverse des terrasses de gra- vier de la première glaciation (//eekenschotter)*. Cette manière de voir a été acceplée par de nom- breux savants (MM. Forel, Delebecque, etc.) *. Le Rhône valaisan, d'après M. Lugeon*, aurait été tributaire du Rhin, à l'époque pliocène. Il se serait écoulé par la vallée morte d'Attalens, en sui- vant le cours actuel de la Broie, pour se rendre par le lac de Morat dans le bassin du Rhin. La Dranse du Chablais aurait été tributaire du même fleuve, mais aurait eu son écoulement par le lac de Neuchâtel. Un cours latéral de l'Arve aurait d'abord capturé la Dranse; ce serait ensuite un tributaire de celle-ci qui aurait occasionné le cours du Rhône. L'hypothèse du Rhône rhénan, qui avait déjà été émise par Rütimeyer, a été combattue récemment par M. Æberhardt*, qui soutient qu'elle ne con- corde pas avec ce qu'il connaît des formations alluviales de la région du Seeland. ! Dr Ærpri : Erosionsterrassen und Glacialschotter in ihrer Beziehung zur Entstehung des Zurichsees (Mat. carte géol. Suisse, XXXIV, 1894). ? L'histoire quaternaire de la région bordière du Léman est, en réalité, beaucoup plus complexe. Elle vient de faire l'objet d'études d'un vif intérêt, dues à M. M.-H. Douxami {C. R. Acad. Se.,S février 1904) et Ch. Jacob (Ann. ens. sup. Grenoble, 1. XVI, 2€ trimestre 1904). Ce dernier auteur a pu distinguer, dans les environs de Thonon, les formations alluviales suivantes, en partant des plus anciennes : Pou- dingue de la Dranse, Glaciaire élevé, Cônes de déjections anciens de la Chavanne, Glaciaire inférieur, Terrasses de Thonon, Della de la Dranse, Alluvions modernes. — La région aurait subi une phase de creusement, postérieurement au Glaciaire élevé et aux cônes de déjections anciens de la Chavanne, phase suivie d'une progression du glacier du Rhône en contre-bas des dépôts précédemment formés. Le lac se serait constitué alors et aurait établi son niveau à une altitude inférieure, à l'altitude maximum des dépôts glaeiaires inférieurs. Cette interprétation parait justifiée, car nous-même avons observé dernièrement à Loisin, à l'altitude de 471 mètres, à quelques kilomètres à l'Est du lac de Genève, des dépôts morainiques très nets reposant directement sur des allu- vions fluvio-glaciaires. Les matériaux glaciaires du Bas-Chablais sont très peu altérés, et les deux séries appartiendraient, d’après M. Jacob, à la dernière grande période glaciaire (période de Würm de M. Penck). Le Glaciaire inférieur ne serait que la récurrence du Glaciaire éleve. (Vote ajoutée pendant l'impression.) 3 Lucrox : Le Rhône tributaire du Rhin (C. R, A.S., 41 janvier 1K97). * De R. Ægeruanor : Note sur le Quaternaire du Seeland {Archives des Sc. phys. et nat. de Genève, 4° p., t. XVI, 1903). Au sorlir du Léman, le Rhône recoit les eaux de l'Arve, et, après avoir traversé la plaine de Genève, que domine la chaîne du Crédo-Reculet, entre dans le Jura méridional. Son histoire géologique a élé retracée dans ses traits principaux par M. Douxami ?. Ce géologue a nettement établi que le cours actuel du fleuve est en rapport avec la Tectonique de la région, et s'effectue dans des vallées synclina- les, pour passer des vallées orientales dans celles de l'Ouest par des cluses. Il traverse, tout d’abord, au « Défilé de l'Écluse » l’anticlinal du Crédo, qui subit, en ce point, un abaissement d'axe considé- rable : l’Urgonien du Plat des Roches étant à 1.400 mètres, celui de l'entrée du défilé à 420 mètres el celui du Vuache à 940. La cluse est antéglaciaire ou tout au moins interglaciaire, comme l'a prouvé la découverte, faite par M. Renevier ?, d’un dépôt de sable stratilié, dans la partie la plus étroite du défilé et sous les moraines. Un premier creuse- ment aurait pu coïncider avec un mouvement d'exhaussement du chainon, au-dessus du plateau miocène. L'érosion aurait été facilitée par les pro- grès du soulèvement et par le passage des glaciers qui se sont élevés au-dessus du Vuache et sur toute sa longueur. Les flancs du Crédo, d'après MM. Falsan et Chantre’, sont recouverts, jusqu'à une certaine hauteur, d'épaisses couches d’alluvions dans les- quelles sont intercalés des bancs de boue à cailloux striés et à blocs erraliques. Ces auteurs expliquent l'altitude à laquelle se trouvent ces alluvions et leur enchevêtrement avec des lits de boue glaciaire par la confluence, en ce point, de deux glaciers. Il peut paraître plus simple d'y voir un stationnement du glacier principal, suivi d'avancées et de reculs. Le chainon du Vuache est un anticlinal faillé dont le flanc oriental a élé poussé sur le flanc occi- dental ‘. Le fleuve suit la ligne de contact anormal sur près de 1 kilomètre de longueur, et creuse ensuile son lit autour des rochers de Léaz, qu'il a déblayés des alluvions et des dépôts morainiques qui l’encombraient, pour se diriger vers Bellegarde. Il coule dans les alluvions interglaciaires, les grès tendres de la Molasse et du Gault, ainsi que dans les calcaires plus durs de l'Urgonien. C'est dans 4 Douxamr : La vallée du Rhône à travers le Jura, etc. 2 Renevier : Sur un glissement de terrain au Fort de l'Ecluse (Bull. Soc. vaud. Se. nat., 1883, p. XVI). # Fazsan et CHanTRE : Monographie géologique des anciens glaciers et du terrain erralique de la partie moyenne du bassin du Rhône, Paris-Lyon, 1880. # M. H. Schardt, qui a publié une remarquable étude sur cette petite chaine, considère la faille du Vuache comme verticale. Une poussée Sud-Est et une faille parallèle à l'inclinaison des couches du versant oriental, ayant pro- duit la surélévation de ce versant, nous parait mieux répondre à la réalité des faits. H. Scaarpr : Etudes géolo- giques sur l'extrémité méridionale de la première chaîne «lu Jura. Bull. Soc. Vaud. Se. nat., L. XXVII, p. 69, 1891. 458 ces calcaires mêmes que son lit est creusé à Belle- garcle, et, comme ceux-ci sont supportés par des couches plus facilement délitables, il circule au- jourd'hui au-dessous, en disparaissant partielle- ment; c’est ce qui a été appelé « la Perte-du- Rhône ! ». Nous avons ohservé un phénomène analogue près de l'ancien pont de Grésin, où le fleuve est profondément encaissé et où l’on peul neltement étudier le travail de creusement qui se continue encore aujourd'hui avec une certaine islensité. Les parlies tendres sont affouillées par les eaux, ce qui produit l’éboulement des parties dures restées en saillie. Certaines tranches de grès plus résistantes surplombent le gouffre, mais ne tarderont pas à s'ébouler. Si le cours du fleuve, du défilé de « l'Écluse » à Bellegarde, n’est pas encore arrivé à maturité et est loin d'avoir acquis son profil d'équilibre, nous ne pensons pas, comme l’a soutenu M. le général Bourdon *, que ce fait puisse avoir pour cause un soulèvement récent du sol. Il nous paraît plus plausible de l’attribuer à ce que les eaux ont eu à déblayer, pour le creusement de leur lit, une quan- tilé considérable de formations alluviales. Lorsque le fleuve, à une époque relativement récente, s’est vu dans la nécessité de s'attaquer à des terrains plus consistants, son régime primitif a dû se modi- fier pour s'adapter à de nouvelles conditions géné- tiques, Le Rhône reçoit la Valserine à Bellegarde, et lui emprunte sa vallée jusqu'à Culoz. Les deux rivières réunies se sont creusé un lit, en certains points très profond, dans un synclinal situé entre le Colombier d’une part, le Vuache et le Gros Foug, de l’autre. Entre Culoz et Chanaz, le fleuve franchit obliquement une cluse considérablement élargie par les érosions et séparant la chaine du Grand- Colombier de celle du Mont-du-Chat et coule jus- qu'à Lucey au pied de cette dernière. Il est à noter qu'au début du Pléistocène le fleuve passait par la eluse du chemin de fer de Culoz à Amnbérieu. Il ne s’est détourné que plus lard vers le Sud, dans la direction de Belley. En elfet, il résulte des recherches de MM. Depéret et Kilian * que la rivière a déposé à cette époque une haute terrasse de graviers alpins gris, s'élevant à plus de 120 mètres au-dessus du thalweg du ! M. E. Martel a fait remarquer, à juste titre (Congrès des Socictés Savantes d'avril 14904), qu'au Pont de Lucey, le Rhône voit son cours se modifier brusquement et qu'il perd en largeur ce qu'il gagne en profondeur. De ce pont au confluent de la Valserine, le fleuve se trouve confiné en une élroite ruelle ou Ælamme, dans laquelle sa profondeur serait considérable (40 mètres d'après M. Brillouin). ? G, Bournon : Le canon du Rhône et le lac de Genève (Bull, Soc, Géographie, AS94). * Cn. Depérer : Feuille de Lyon 220.000 (C, R. coll. carte géol. Irance, p. 72, 1898). J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE fleuve actuel; il en existe deux lambeaux, près de Virieu, à l’entrée nord du tunnel et à la sorlie sud, à Maniole; enfin, un autre au nord du village de Contrevoz. Celui-ci se continue dans la cluse de Rossillon, où l'érosion en a enlevé la plus grande partie. Cependant, on observe deux collines, au débouché de l’Albarine, dans la plaine d’Ambérieu, qui sont constituées en majeure parlie par les gra- viers de la haute terrasse. Elles dessinent nette- ment, conclut M. Depéret, si on les rejoint entre elles par la pensée, le triangle d’alluvions du Rhône s’étalant à la sortie de la cluse. Quant aux terrasses d'alluvions qui s'observent soit entre Virieu-le-Grand et Belley, soit plus à l'Est encore, le long du trajet actuel du fleuve, elles appartien- nent à des époques plus récentes. Le Rhône à entièrement abandonné aujourd'hui la cluse dont nous venons de parler, qui à été remplie par les éboulis après le retrait des glaciers. Il se dirige vers Yenne par les plaines de Lavour et de Cressin pour traverser de nouveau en cluse, au défilé de Pierre-Châtel, la chaine du Mont- Tournier. Ce défilé, que nous avons eu occasion de visiter pour des études stratigraphiques, est traversé par la rivière en sens inverse du plonge- ment des couches; celles-ci se correspondent sur les deux rives. Le premier creusement doit dater de l’époque du soulèvement progressif du Jura, et c'est par là que devait s'échapper une partie des eaux du synclinal tertiaire de Novalaise. En effet, on observe, en amont du Pont de la Balme, un res- serrement de la gorge d'un pittoresque effet. Elle est divisée en deux par un énorme rocher à pie, ce qui témoigne du déplacement du cours d’eau qui la sillonnait jadis et de l'ancienneté de son creuse- ment. Le Rhône actuel ne l’a occupée qu'à la fin du Quaternaire, après avoir partiellement détruit les dépôts morainiques des environs de Massi- nieu et avoir entraîné les alluvions qui l'encom- braient. La cluse de Pierre-Châtel traversée, le fleuve ne s'éloigne d’abord que fort peu du pied du Jura. Il coule ensuite dans les formalions quaternaires, sauf vers Sault-Brénaz où il coupe une dernière fois un chainon jurassien, pour continuer, jus- qu'aux environs de Lyon, dans la large vallée qui ionge le plateau bressan. À son arrivée dans cette ville, il se coude brusquement et descend presque en ligne droite, du Nord au Sud, jusquà la mer. Nous ne nous occuperons pas de cette partie de son cours, qui a été magistralement décrite, il y à quelques années, par M. Ch. Depéret”. 1 Cu. Depérer : Apercu sur la structure générale et l'his loire de la formation de la vallée du Rhône (Ann. de Géo- graphie, p. 432, 15 juillet 1895). } J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE 469 III Les Dranses, le Giffre et l'Arve, qui drainent les régions du Chablais et du Faucigny, en Haute-Savoie, ont leur lit élabli dans les vastes plis couchés que nous ‘ avons décrits dans une précédente étude. - Celles de ces rivières qui traversent les Préalpes - médianes obéissent encore aux inflexions synclinales transverses. La Dranse du Biot, par exemple, a son … cours ordonné, entre Saint-Jean d'Aulph et le pont de Bioge, par une série de plis transversaux qui sont parmi les plus caractéristiques des Alpes fran- çaises. Il en est de même pour la Dranse d'Abon- dance, bien que les plis y soient moins neltenient . accusés. — Nous devons indiquer relativement à la gorge “creusée par le premier de ces cours d’eau, en aval -de Saint-Jean d’Aulph, un cas d’épigénie frappant. La rivière y coule dans une fissure si étroite que la route a dû être établie en tunnel. À côté existe un col plus bas que le haut de la fissure “et rempli de dépôts morainiques. Ce col est l’ancien chenal de la rivière, comblé à une altitude supé- rieure à celle du haut de la fissure. Le cours d’eau, en s'enfonçant après la phase de comblement, a scié l'éperon rocheux sur lequel se trouvait le “point bas de la nappe alluviale?, Le massif de la Brèche du Chablais, que les deux -Dranses traversent en amont, n’a pas subi, comme . l'a montré M. Lugeon, des plissements aussi régu- euliers. On y remarque, cependant, trois inflexions synclinales; mais, sauf une exception partielle, ‘aucune de ces inflexions n'a donné naissance à des allées. Le manteau de Flysch, qui enveloppait la masse charriée, devait avoir une telle épaisseur que, “lorsque les rivières s'y sont établies, les plis devaient être invisibles à la surface. On doit donc “considérer le cours supérieur des deux rivières - comme dû à des phénomènes de surimposilion. L'Arve et le Giffre se présentent dans des condi- lions peu différentes. Le premier sort du synclinal de Chamonix, pour pénétrer en celuse dans la “chaîne des Aiguilles-Rouges-Prarion. Son lit se creuse ensuite au travers des grands plis couchés s'étendant de la Dent du Midi au Mont Joly. Quant au Giffre, il coupe également les mêmes plis pour entrer dans la région de la Brèche. Ces divers plis Sont traversés obliquement par uneinflexion syncli- nale, mais cetle inflexion n'a pas été suivie par les deux rivières et c'est encore à des phénomènes de surimposition qu'il faut nous adresser pour expliquer celte anomalie. La surface structurale, a CS te Ras J. Réviz : Les grandes nappes de recouvrement des Alpes françaises (Rev. gén. des Sciences, 15 novembre 1902). = LuceoN : Sur la fréquence dans les Alpes de gorges épigénétiques, etc. par suile de l'existence de grandes masses de Flysch, devait bien être différente de celle qui nous apparait aujourd’hui. En aval de Cluses, l’Arve coule entre les plis du Genevois sur la rive gauche et ceux des Préalpes sur la rive droite. Le cours de la rivière, comme l'écrivait M. Haug, dès 1892', correspond ici à une grande ligne tectonique. Les montagnes qui se mon- trent sur les deux rives, ajoutait plus tard le même auteur”, présentent des dissemblances frappantes. Un sillon a done dû exister dès le début, et il est tout à fait normal que la rivière s'y soit établie. Elle longe au-dessous de Bonneville les collines du Faucigny, pénètre dans la dépression située entre le Salève et les Voirons, pour contourner, près d'Etrembières, la première. de ces montagnes et rejoindre le Rhône dans la plaine de Genève. La vallée se fait remarquer par une immense trainée morainique, — la Plaine des rocailles, — sur laquelle est construite la ville dè la Roche et qui s'étend, en forme d'hémicycle, de la gorge du Borne à Reignier. Elle est formée presque unique- ment de malériaux calcaires et imprime un cachet spécial à cette partie du massif*. Le Giffre. bénéficie, dans sa partie inférieure, d'une série plus ou moins régulière d'inflexions transversales. Il se dirige d’abord Est-Ouest, pour passer à la direction Nord-Sud, être capturé par l'Arve, en aval de Mieussy, ct s'y déverser à Mari- guier. La dépression de Saint-Jeoire est une vallée morte. M. Lugeon fait remarquer, à ce propos, que celte capture doitremonter à une date relativement ancienne, par suite de l'importance d'un cours d'eau obséquent, le Hérisson, ainsi que de celle de la partie inférieure du Risse. Le cours d’eau obsé- quent présente même le faitcurieux de couler vers l’intérieur des Alpes, par suite de la réversion de la pente dans la vallée capturée *. Les affluents du Giffre sont dirigés sensiblement Nord-Sud, et, d’après M. Douxami”, leur profil d'équilibre n’est pas définitivement fixé. Ce sont : le torrent de Salles, né dans un cirque glaciaire, qui se réunit au torrent des Fonds venu du col d'An- terne; le torrent du Gers, qui a élé capturé par le torrent des Fonds, ainsi que l'indique le coude brusque qu'il présente vers Entre-deux-Monts:; le Mont d’Ant, qui descend du cirque de Voconant et 4 E. HauG : Sur la formation de la vallée de l'Arve (C, A. A. S., t. CXV, p. 899, 21 novembre 1892), 3 E. Hauc : Etude sur la tectonique des Hautes Chaines calcaires de Savoie, t. VII, /. cit., p. 87, 1895). 3 Voir, au sujet de cette moraine, G. MancLano : Note sur la géologie des environs d'Annecy, la Roche, Bonneville (Bull. Soë. de la Carte, n° 6, novembre 1889). 4 M. Luceox : Recherches sur les vallées, etc., L r. 5 Douxamur : Les phénomènes glaciaires et post-glaciaires du Massif de Platé (Haute-Savoie) (Bull, Soc. linéenne de Lyon, 1902). 170 J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE se réunit à la vallée principale par une cascade, au sud de Samoëns. Les affluents de l'Arve sont également perpendi- culaires à la direction de la vallée et arrivent à celle-ci par de brusques ruptures de pente. Ce territoire, loujours d'après M. Douxami, porte des | traces remarquables du passage des glaciers qui, dans la vallée de l’Arve, de Servoz à Cluses, s'éle- vaienljusqu'àunealtitude supérieure à 2.000 mètres. Leur présence explique l'aspect de muraille escar- pée verlicale que présente la rive droite de la vallée. Le Glacier du Giffre se réunissait à celui de l'Arve dans la région du col de Châtillon. Enfin, les massifs des Fiz et des Grands Vents avaient des glaciers spéciaux, dont les uus étaient les affluents du gla- cier de l’Arve, et les autres de celui du Giffre. IV La loi formulée plus haut, relativement aux vallées transversales, ne se vérifie nulle part avec autant de netteté que dans le massif des Bauges, en Savoie, que nous avons souvent parcouru et qui à élé étudié par M. Lugeon dans le travail déjà cité. Les chaines y ont une direction sensiblement N. N.E. àS. S. O. et sont au nombre de 7 : Semnoz- Nivollet, Margériaz, Colombier, Trélod, Arclusaz, Sambuy et Belle-Etoile. Elles sont coupées transver- salement, à part les deux dernières, par le cours d'eau du Chéran, dont la position a été fixée par l'abaissement de l'axe des plis. Cette rivière prend sa source dans la vallée de Bellevaux, où elle est formée par la réunion des « Nants »° d'Orgeval, du Haut- du-Four et de la Chapelle. Elle coupe en cluse, du point dé jonction de ces divers torrents, tous les plis du massif situés à l'Ouest. Elle entre à Ecole dans une vallée plus large, creusée dans le Jurassique et oblique à la direction de la chaine; en ce point, elle coule au niveau de la plaine en décrivant quelques méandres sur un lit d’alluvions; puis la vallée se resserre pour être très étroite sous le bourg du Châtelard, où elle est creusée dans les roches plus dures de l’Urgonien el les marno-calcaires de l'Hau- lerivien. L'inflexion synclinale est ici d’une grande nelteté. La vallée s'élargit de nouveau, à partir d’Atilly, où le cours d'eau entaille les marnes bariolées de lAquilanien el une terrasse d'alluvions fluvio-gla- ciaires qui présente, en ce point, un assez beau dé- veloppement. Après avoir traversé l’anticlinal du Margériaz, qui s’infléchit également, et le synclinal molassique de Leschaux, le Chéran se détourne à l'Ouest, sous le pont de la Charniaz, pour couper le Semnoz, dont la cluse serait due, d'après M. Lugeon, 1 On désigne sous ce terme, en Savoie et en Suisse, les torrents et les cours d'eau à faible débit. à un phénomène d'antécédence!. Il sort du massif sous le pont de l'Abime, où il est profondément encaissé, pour venir se jeter dans le Fier, non loim de Rumilly. Nous devons signaler, près du pont de l’Abîme, une accumulation de dépôts glaciaires qui consti= tuaient une moraine frontale barrant complètement la vallée. En prenant contact avec la partie amont de celte moraine, le Chéran change légèrement de direction, en s'appuyant vers la droite. Il est permis d'en conclure, avec M. Lugeon, que la moraine à rempli complètement la vallée et que c’est à gauch de la coupure actuelle que se trouve l’ancien lit de la rivière, occupé aujourd'hui par des formations morainiques. û Une vallée longitudinale du même massif, celle du Châtelard-Entreverne, présente quelques phé= nomènes mérilant de fixer l'attention. Elle est par= courue par cinq cours d’eau, dont deux s'écoulenk suivant l’axe du pli synclinal, tandis que les trois autres sont transversaux. L'un de ces derniers, le torrent de Bellecombe, sort par l'inflexion de l’anti= clinal occidentalet du synclinal lui-même. Cette in= flexion ne se présente pas dans l’anticlinal oriental! qui à été attaqué par érosion régressive et divisé en trois tronçons. | Les plis des Bauges sont plus attaqués par l’éro sion que ceux du Genevois et, à part le Semnorz, le: Margériaz et la Sambuy, aucun anticlinal n’a con: servé sa carapace d'Urgouien; plusieurs de ces anticlinaux sont même sillonnés par des cours d'en longitudinaux. La raison doit en être attribuée à la surélévation du massif. Une disposition orographique de même nature s'observe dans la vallée d'Entremont (massif de} Chartreuse), — dont nous avons étudié la constitu tion géologique”, — et dont le centre est formé p une voûte anticlinale, dans laquelle le torrent du Cozon a creusé son lit. Il vient se jeter dans lé Guiers-Vif, rivière qui prend sa source au plateau de l'Alpette pour traverser en cluse de nombreux plis qu'elle entaille profondément de Saint-Pierres d'Entremont à Berland. A l'Est de cette vallée haute el la séparant de la vallée du Grésivaudan, existe un immense gradin, syaclinal non érodé et surélewe se terminant au Nord par le Granier et au Sud pa la Dent de Crolles. V demande de nouvelles recherches. “| ?J. Réviz : Sur la structure de la vallée d'Entremont el du plateau de Montagnole (Bull. Soc. géol. de France, 3 55 t. XXVIII, p. 873, 1900). "#1 J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE #71 coupures transversales que parcourent l'Arly, le Doron de Beaufort, l'Isère et l'Arc, délimitant des massifs montagneux qui ont recu des géographes des noms spéciaux, mais qui, en réalilé, appar- tiennent à un même groupe tectonique. Comme le - faisait remarquer il y a fort longtemps Ch. Lory', la continuité des grands accidents Jlongitudinaux n'est point réellement interrompue par cescoupures, qui ne font que mettre la structure géologique en plus complète évidence. Elles ont une importance de premier ordre au point de vue del'hydrographie, parce qu'elles sont comme les grands fossés d'écou- lement où les vallées alpines se réunissent pour former les principales rivières. Toutefois, le regrelté savant ne considérait pas ces accidents transversaux comme dus simplement à l'érosion. Ils étaient, pour lui, des cassures vives et netles, que les eaux avaient élargies là où leurs parois élaient formées de matériaux tendres, mais dont elles n'avaient guère modifié les formes que par l’ablation des parties les plus disloquées. Cette manière de voir ne peut plus être acceptée aujourd'hui, car M. Marcel Bertrand démontrait, le premier en 1894”, que cette partie des Alpes, comme celles éludiées plus haut, porte les traces d’un système régulier de plis orthogonaux, c'est-à-dire de plis perpendiculaires à ceux du système prin- cipal. De ces plis transversaux, les uns n'ont qu'un développement purement local et accidentel, tandis que d’autres ont la forme de larges ondulations affectant des ensembles de plis. « L'existence de ces plis transversaux, écrivait M. Bertrand", n’est pas une hypothèse: elle est très marquée en beau- coup de points par l’abaissement aligné du fond des synclinaux ou par la surélévation des têles d'anticlinaux ‘». Nous allons décrire, à grands traits, deux cou- pures des plus remarquables, celles de l'Isère et de l'Arc, qui, au point de vue géographique, ont tou- - jours eu une grande importance : ayant servi et servant encore de principales voies de communica- tion entre la France et l'Italie. 1 Cu. Lorv : Essai sur l'orographie des Alpes du Dau- phiné et de la Savoie considérée dans ses rapports avec la “Structure géologique de ces montagnes (Ann. du Club alpin français, 1"e année, 1874). 2 M. BERTRAND Etudes géologiques dans les Alpes _ francaises. 3 M. Bekrrawn : Loc. cil. Des constatations analogues ont été faites par M. Ter. mier dans le massif du Pelvoux. Il semble, dit cet auteur, y avoir quelques relations entre la topographie de ce massif et les ondulations transversales. Les grandes vallées du VMénéon, de la Séveraise, du Gyr correspondraient à des Synelinaux transversaux; de même aussi la Romanche, d'Auris au Dauphin, et de La Grave au Lautaret. D'autre part, certaines arêtes très continues et très élevées pour- raient résulter d'anticlinaux transversaux. Il faudrait cepen- dant, conclut ce savant, se garder de trop généraliser. La haute vallée de l'Isère, non loin de la source de la rivière, est creusée dans une série d'assises appartenant au Trias, dont les allures ont élé reconnues par M. Marcel Bertrand et que nous avons également étudiées, ce qui nous permet de confirmer et de compléter ses observations. Les plis sont formés par des quartzites, des cal- caires en dalles (calcaires phylliteux), des schistes, des calcaires dolomitiques (cargneules) et des cal- caires compactes. Ils sont sinueux et s’embhoitent les uns dans les autres. « Chaque pli anticlinal, dit M. Bertrand, se renverse invariablement, tout le long de son parcours, Sur celui qui lui fait suite du côté de l'Italie ». La vallée suit l'axe de ces sinuo- sités emboîtées jusqu'aux Brévières. Assez étroite, en amont du hameau du Fornet où elle a son lit creusé dans des calcaires compactes, elle s'élargit à la hauteur du village de Val d'Isère, pour se res- serrer entre Daille et Tigne, s'élargir près de ce dernier village, construit dans une petite plaine alluviale, et se resserrer, à nouveau, en amont du hameau des Brévières. Les défilés que nous venons d'énumérer sont très pittoresques et dus à la dif- férence de dureté des matériaux traversés : les parties étroiles étant creusées duns les quartzites et les calcaires compactes, tandis que les parties élargies sont ouvertes dans les schistes et les cal- caires dolomitiques. Le fleuve, à la sortie de la gorge des Brévières, touche à une zone de schistes lustrés dépendant du massif de la Grande Sassière, pour s'encaisser ensuite dans des roches cristallines considérées comme primilives par les anciens géologues, mais qui appartiennent au Permien, comme l’a indiqué M. Bertrand. Dans la traversée de ces assises, ainsi que dans les grès houillers, qu'elle atteint à là Thuile, la vallée n’est qu'un étroit couloir, perpen- diculaire à la direction des plis. Elle se poursuit avec des caractères assez uniformes jusqu à Bourg- Saint-Maurice, ne présentant des parties élargies qu'au point où débouchent des torrents latéraux, qui ont produit des cônes de déjeclions, sur lesquels sont habituellement construits les villages. Un de ces torrents, le « Nant de Saint-Claude », a enseveli, en aval de la montée de Sainte-Foy, le hameau du Champet, dont on peut voir encore les maisons enfouies au milieu des malériaux éboulés. La petite ville de Bourg-Saint-Maurice, située en aval, est assise au milieu d'une vallée pittoresque et fertile, remplie par les cônes de déjections des torrents du Recluz du Versoyen et de l’Arbonne, qui viennent déboucher dans l'Isère. En amont de (P. Terwrer : Sur la tectonique du massif de Pelvoux, Bull. Soc. géol. Fr., 3° série, t. XXIV, p. 134, 1896.) 4 M. Benrrann : Etudes dans les Alpes francaises, loc. cit., P. ss. cette ville, à Séez, le fleuve fait un coude brusque pour se diriger au Sud-Ouest, en prenant un cours oblique à la direction des plis. Il reste jusqu'à Aime dans la bande houillère, formée de grès noirâtres et de schistes argileux, dans lesquels ont été ouverles récemment d'assez nombreuses exploitations d'anthracites. à Indiquons dans cette région, d'après M. Kilian, entre Bellentre et Bon-Conseil, trois niveaux de moraine de fond, formant trois plateaux s'abaissant vers l'aval et bien visibles aux Chapelles, à la Thuile et à Vulmis. « La plus inférieure de ces banquettes, celle de Vulmis-Bon-Conseil, accuse une pente vers l'aval notablement plus grande que celle du thalweg actuel de l'Isère, dont elle se rapproche progressi- vement’. Cette disposition, d'après le savant pro- fesseur de Grenoble, représenterait une série de glaciations séparées par des phases de creusement, pouvant être dues aux eaux de fonte des phases interglaciaires ou à une recrudescence de l'activité érosive du glacier, correspondant avec une période de rétrécissement de ce dernier. La première inter- prétation lui parait plus vraisemblable. À partir d'Aime, la vallée, que dominent à l'Est les contreforts du Mont-Jovet, — l'un des plus beaux belvédères des Alpes, — est creusée dans les terrains secondaires (Trias et Lias), qu'elle tra- verse plus ou moins obliquement à leur direction. Elle suit même, en certains points, l'axe de quel- ques-uns d'entre eux. Très large en aval même du bourg d’Aime, où la route est sur un cône de déjec- lions, tandis que la rivière coule en contre-bas, elle se signale au « Saut-de-la-Pucelle » par un phénomène d'épigénie, se rétrécit à Villette par suite de la présence de calcaires saccharoïdes et bréchoïdes, s'élargit à Centron où passe un anti- clinal de Gypse, pour se resserrer encore à l'« Élroit ou Détroit du Ciex » (calcaires du Lias inférieur): en ce point, la roule a été creusée en tunnel, par suite de l’étroitesse de la vallée. Un phénomène d'épigénie absolument remar- quable s'observe encore près du village de la Plom- bière. La rivière a été détournée vers l'Est, où elle coule très encaissée, en décrivant un fort contour, tandis que la route est dans une dépression située entre le flanc ouest de la chaîne et des rochers à pic isolés au milieu de la vallée. La dépression à élé remplie par des dépôts glaciaires et des éboulis qui ont imposé au fleuve son cours actuel. La vallée s’encaisse de nouveau près du pont Ador et la rivière,qui, depuis Bourg-Saint-Maurice, coulait du Nord-Est au Sud-Ouest, tourne brusque- ment vers l'Est, par suite d'un rehroussement des plis, pour se diriger ensuite, à partir de Moûtiers, L W. Kicran : Quelques observations nouvelles en Taren- laise (Bull. Soc. géol. de France. 4e série, t. III, p. 298). J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE du Sud-Est au Nord-Ouest. Elle reçoit le Doron de Bozel, — grossi du Doron de Belleville, — en aval des dernières maisons de cette ville, et pénètre dans. un pittoresque défilé (Siboulet ou gorge de Pont- Séran) dont elle sort à Aigueblanche. La vallée s'élargit près de celte localité (beaux cônes de déjections) en entrant dans la zone synclinale du col de la Madeleine, pour se rétrécir à Notre-Dame- de-Briançon en pénétrant dans l'anticlinal eris- tallin. Celui-ci s'accidente de synclinaux houillers et liasiques, qui sont marqués dans la topographie et atteignent la vallée en aval de Feissons (Houiller), près de Rognaix et de Cevins (Lias) et à Saint- Paul (Houiller). L'Isère recoit dans cette partie de son cours less eaux d'un certain nombre de torrents latéraux qu s'échelonnent de la vallée de Naves à celle de Tours. Ils sont très encaissés dans les schistes: cristallins redressés (Lorrent de la Grande-Maison, torrent du Bavel entre Rognaix et Saint-Paul), tandis qu'ils ont un lit plus large lorsqu'ils sont creusés dans des assises moins résistantes. Ils sont alors plus dangereux, et ont accumulé de gigantesques cônes de déjections à leur débouché dans la vallée principale. Arrivée à Tours, la rivière se détourne brusque- ment pour se diriger à l'Ouest et arroser la belle vallée du Grésivaudan, que nous étudierons d’une façon spéciale, après avoir décrit le cours de l’Are. En résumé, c'est à la tectonique qu'il faut nous adresser pour comprendre cette coupure transver- sale, due principalement, en amont de Moûtiers à la sinuosité des plis,et, en aval d'Aigueblanche, à des La haute vallée de l'Arc, comme celle de l'Isère, est une impasse d'où l'on ne peut aller dans les vallées piémontaises que par des cols de glaciers d’un difficile accès. Elle est creusée, en amont de abaissements d'axe. | qui consistent en gneiss glanduleux rapportés au Permo-Houiller par M. Marcel Bertrand. Nous avons æ Bonneval, parallèlement à la direction des couches, | près des chalets de « Piedmonté », où on les voit affleurer au milieu des calcaires dolomitiques et des schistes lustrés. La rivière, en amont du confluent de la Lenta,s a une direction franchement Est-Ouest; sa vallée s'élargit près de Bonneval, où existent de magni-= fiques cônes d’éboulis, pour reprendre la direction Sud-Ouest et se rétrécir en aval, par suite de l’exis- tence d’un important massif de serpentine. Ce massif existe au même niveau sur les deux rives et 4 est brusquement tranché sur la rive droite, d'après x M. Marcel Bertrand, par un accident transversal tandis que, sur la rive gauche, il repose directement sur le Permo-Houiller, puis en est séparé par - ST I RS EE DR Sn ln Ve che pu les étudier dans la descente du col de l'Iseran, | u J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE 473 quelques bancs calcaires et par une bande assez large de Schistes lustrés se continuant jusqu’au pied du glacier du Vallonet". Ce massif traversé, c'est dans les Schistes lustrés que l’Are a creusé son lit, et c'est dans celte forma- tion qu'il reste jusqu'à Termigaon. Ces schistes ont une grande uniformilé de composition, mais la direclion peut en être suivie grâce à des lambeaux - de calcaire triasique, dont les affleurements ont été - relevés avec soin par MM. M. Bertrand et Zaccagna, qui en interprétent de façon différente la significa- tion”. Ces affleurements permettent de reconnailre une certaine sinuosité dans la direction des plis, sinuosité qui a été suivie par la rivière, à part - quelques rares exceptions dues à l’action des Lor- . rents latéraux. La vallée principale ne se signale, au point de vue … des phénomènes qui nous occupent, que par la pré- sence de terrasses inlerglaciaires entre les vallées - de l’Arvérole et du Ribon, ainsi que par l'existence - d’un énorme éboulis qui s'observe entre Bessans et Lanslevillard. Il a barré la vallée sur plusieurs kilomètres de longueur. Nous y avons vu des blocs mesurant plusieurs mètres cubes. Les cônes de déjections sont également bien développés aux environs de Lanslebourg, où la vallée est largement ouverte et d'où se détache la - route conduisant sur le plateau du Mont-Cenis. Ce plateau est une large combe, dominée au Nord et à l'Est par une enceinte de hautes cimes de schistes lustrés qui constituent la ligne de partage des eaux. On peut attribuer la formation de cette combe aux grands amas de gypses intercalés dans les schistes et qui ont élé et sont encore continuellement dis- sous par les eaux provenant des versants voisins. Deux terrasses d'alluvions peuvent s’observer en - aval de Lanslebourg : l’une à 10 mètres au-dessus «de la rivière, qui est postérieure à la dernière gla- -cialion, et l'autre à 50 mètres environ, qui lui serait “antérieure. Nous avons pu constater, au-dessus de “cette dernière, l'existence de dépôts glaciaires d'une certaine épaisseur. Un lambeau de la terrasse inter- “slaciaire existe également plus en aval et au point “où la route fait un coude brusque pour descendre sur Termignon. En ce point, le cours de l'Arc, pro- - fondément encaissé, se signale par un phénomène dl'épigénie. La rivière a été rejetée sur la gauche par la présence de ces alluvions situées dans le ! M. Berrrano : Eludes dans les Alpes. Loc. cil. ? Ces schistes appartiennent au Trias supérieur et au Lias pour M. Marcel Bertrand, tandis qu'ils sont Précambriens pour M. Zaccagna: cela étant, les affleurements de calcaire indiquent des anticlinaux pour le premier de ces auteurs, et des synclinaux pour le second. C'est la manière de voir de M. Bertrand qui est actuellement admise par la majorité des géologues alpins. * Les matériaux fluvio-glaciaires n'étant que peu altérés, la terrasse de “0m peut être considérée comme interstadiaire. thalweg primitif, et n’a pu relrouver le lit qu'elle s'était creusé avant la dernière glaciation, Termignon, situé au débouché du torrent de la Leysse, qui descend du massif de la Vanoise, marque le point terminus de l’encaissement de la vallée dans les schistes lustrés. L’Are, qui depuis Lanslebourg avait une direction Est-Ouest, a son lit reporté sur la droite par la présence d'un cône de déjections et revient ensuite à la direction Sud- Ouest qu'il conserve jusqu'à Modane, Son cours esl alors presque parallèle à la direction des plis. Le thalweg est creusé dans les gypses, sur la plus grande partie de ce parcours, et l’on ne voit plus dans le bas que des terrasses d'âge récent : les dépôts glaciaires se trouvent plus haut et bien développés, sur la rive droite, aux environs des villages de Sollière, Sardière et Aussois. Ils recou- vrent une lerrasse d'érosion qui va s’abaissant vers l'aval et indique un stationnement du glacier, avant la dernière période de retrait. Les calcaires du fort de l’Esseillon présentent des stries et un poli remar- quable, témoignant de l'intensité de l’action gla- ciaire dans cette partie du massif. En aval, le roc Tournié, célèbre par ses cristaux d'albile, se pré- sente comme un récif au milieu de la vallée. L'étude de la rive droite permet d'observer, entre Modane et l'Esseillon, un certain nombre de plis. Ils ont été magistralement décrits par M. Marcel Bertrand et il nous parait inulile d'y reve- nir. Ils n'ont d'ailleurs joué aucun rôle sur la direction de la rivière, dont le lit s'est naturel- lement établi dans les masses gypseuses plus facilement délitables. L'Arc fait un coude brusque à Modane pour se diriger vers l'Ouest et couper en cluse l’anticlinal houiller, qui est l'axe de symétrie des Alpes de Savoie. Cet anticlinal forme un faisceau de plis, dont nous avons pù constater la réalité en faisant l'ascension des chalets dominant Orelle, d'où l'on voit les assises dessiner sur la rive gauche un synclinal très net sous la pointe de la Sandoneire. Cette gorge de l'Arc, dans la traversée de la bande houillère, a un aspect sauvage et désolé, qu'augmente encore la présence de noinbreux cônes d’éboulis qui descendent jusqu'au thalweg, encom- brant, par places, le lit de la rivière. Le vallée s'élargit, près de Saint-Michel, au pas- sage d'une bande de couches triasiques, pour se rétrécir au « Pas-du-Roc », où les calcaires com- pactes du Lias inférieur ont opposé une résistance plus grande aux effets de l'érosion. En aval, la vallée, toujours nettement transversale, coupe un ensemble de terrains repliés sur eux-mêmes — que nous avons étudiés avec M. Kilian' — et qui sont 4 W. Kizran et J. Réviz : Contribution à la Géologie des J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE extrêmement délitables (cargneules et gypses, schistes argileux liasiques, schistes argileux ter- tiaires, etc.) Les versants sont profondément ravinés par de nombreux torrents latéraux. Deux d'entre eux : le torrent de « Saint-Martin-de-la-Porte » et le torrent de «Faint-Julien » ont produit des cônes de déjections d'une énorme épaisseur, dans lesquels la rivière a dû se frayer un nouveau lit. La voie ferrée traverse en tunnel le premier de ces cônes, sur une longueur de 280 mètres. Quant au torrent de Saint-Julien, l'Administration des Forêts a fait creuser récemment une galerie, sur sa berge gauche, et a mis ainsi la vallée à l'abri de ses ravages. L'Arcentre, en aval de Saint-Jean-de-Maurienne, dans une gorge très étroite, appelée le « défilé de Pontamafrey ». La rivière creuse ici son lit dans le massif cristallin du Rocheray, ondulation anticli- nale s'enfoncant au Nord et au Sud sousles terrains liasiques. La vallée semble faire ici exception à la loi de l’abaissement des axes, que nous avons for- mulée. Cette anomalie peut s'expliquer de la façon suivante : lorsque l'érosion s’attaqua à la chaine alpine, elle dessina les premiers linéaments de la vallée dans les assises tendres du Lias. Ce ne fut que plus tard, et une fois ce cours nettement fixé, que les roches cristallines furent mises à nu; elles apparaissent maintenant comme par une bouton- nière au milieu de la couverture de terrains secon- daires. La vallée s'élargit à La Chambre en pénétrant dans un synclinal liasique, pour se resserrer en entrant dans la chaîne cristalline. Elle présente encore une succession de bassins et de gorges dus à la différence de dureté des roches traversées. C'est ainsi qu'on peut observer un resserrement à Epierre, où passe une bande de granulite. En aval de cette localité, la vallée, plus large, présente sur la gauche une terrasse d'érosion sur laquelle sont construits les villages de Saint-Alban et de Saint-Georges d'Hurtières. Ce « surcreusement » de la partie de la vallée où coule actuellement la rivière, à plus de 200 mètres au-dessous du plateau, semble devoir être attribué aux eaux des fontes interglaciaires ou post-glaciaires. L'action érosive devait être plus intense, au sorlir de la gorge d'Epierre, les parties lalérales situées en aval étant d’ailleurs partiellement recouvertes par les dépôts morainiques, dont des lambeaux peuvent se voir en de nombreux points (le Grosset, Vernerens, Saint-Alban, ete.). La topographie de cette partie de la vallée se présente avec un cachet glaciaire caractéristique. La route qui conduit d Aiguebelle à Epierre, par Saint-Georges d'Hurtières, s'engage, an sortir de chaines intérieures des Alpes francaises. Paris, Imprimerie Nationale, 1904, la première de ces localités, dans un couloir sauvage creusé entre les rochers de Charbon- nière et les contreforts de la grande chaine. En arrière, et au milieu d’un cirque rocheux, se trouve un petit lac; enfin, une autre barre ro- cheuse, formant comme un promontoire au milieu de la vallée, vient aboutir au hameau de la Pouille. Tous les rochers sont polis et moutonnés dans leur partie amont, et il en est de même de ceux que longe la route avant son arrivée sur le plateau. L'Arc, au sortir d'Aiguebelle, entre dans un synclinal de terrains secondaires (bord subalpin) pour pénétrer, au-dessous d’Aiton, dans la vallée du Grésivaudan, et se jeter dans l'Isère, près du bourg de Chamousset'. Une terrasse d'alluvions interglaciaires s'observe sur la rive gauche de cette vallée, et se relie de façon manifeste à des dépôts morainiques sur lesquels sont construits l’église et le château de Chamousset. Un gradin plus élevé, recouvert de nombreux blocs erratiques de gra- nulile, se voit, plus à l'Est, près du fort de Mont- Perché, témoignant d'une glacialion antérieure à celle qui a accumulé des alluvions dans le bas de la vallée. Comme conclusions, uous pouvons dire ici encore que la coupure transversale a une origine ancienne. Si elle ne fournit pas un exemple de l'existence de plis transversaux d’une certaine importance, c'est que, — si celte influence à jamais existé, — les ondulations superficielles ont été depuis longtemps effacées par l'érosion el ne se font pas sentir dans la partie profonde des plis, la seule qui nous soit conservée. VI Revenons aux chaînes calcaires de Savoie. Elles sont traversées, d'Ugine à Annecy, par une dépres- sion occupée par le lac d'Annecy dans son extré- mité aval, et qui est due, à partir de Faverges, à des ondulations de plis étudiés par M. Lugeon. Cette dépression esl une « vallée morte », c'est-à- dire une vallée qui a été abandonnée par les puis- sants cours d'eau qui la sillonnaient autrefois. Une autre « vallée morte » non moins impor- tante est celle de Chambéry, donl nous avons fait une étude minutieuse. Elle est oblique à la direc- tion des plis de Montmélian à Challes, et doit éga= lement être considérée comme une ondulation syn- clinale transverse. Le pli occidental du faisceau anticlinal de la montagne Saint-Michel s’abaisse nettement près de Challes-les-Eaux, en venant pas- 1 L'Arc entre Aiguebelle et Chamousset, l'Isère entre Albertville et Montmélian ont fait l'objet, au siècle dernier, de travaux d'endiguement absolument remarquables. (Voir à ce sujet J. Réviz et J. ConcxLee : Guide du Touriste, du Naturaliste et de l'Archéologue en Savoie, Paris, Masson.)» RE ARE A va m TRS mamie. =» ser à l'Ouest du village de Saint-Jeoire. Il forme, en ce point, une barre rocheuse, — appelée le « rocher Kazar », — détruite plus au Sud par l’éro- sion, mais dont la continuation doit être cherchée sur le versant est de la chaine du Granier. En elfet, nous avons trouvé un lambeau de Jurassique “au milieu des éboulis de Myans, jalonnant ainsi la “direction du pli. Les couches se relèvent dans les “environs de Bellecombe Isère), sous le Granier, “où elles alteignent une certaine altitude. L'inflexion transversale est non moins nette aux “environs immédiats de Chambéry, où l'on voit les plis de la chaîne du Nivollet-Revard s’enfoncer sous “la vallée pour se relever au Sud et former le fais- eau de plis de Montagnole-Entremont'. Quant à la + située en aval de la ville et à l'ouest de ces plis, c'est une vallée longitudinale (synelinal), qui se poursuit au Nord par les synclinaux du lac du “Bourget et de la vallée de Rumilly, au Sud par ceux “de la vallée de Couz et du col du Mollard; c'est dans ce synclinal longitudinal, ainsi que nous Javons montré”, que viennent se relayer des plis “appartenant les uns au Jura méridional (Cham- botte, Rocher-du-roi- Vivier), et les aulres au mas- “sif de la Chartreuse {chaine du Corbelet-Hauterans). Les relations de ces deux vallées mortes avec la vallée du Grésivaudan ont permis à M. Lugeon d'ex- -pliquer la formation de celte dernière, et nous lui empruntons les considérations qui vont suivre *. «— Le Grésivaudan n'est plus en relalion, comme les vallees que nous venons de décrire, avec la Structure des couches. Il présente plutôt des carac- tères sculpturaux que des caractères Lectoniques, et coupe obliquement une série de plis placés en bordure du massif cristallin. - La partie située en amont d’Alberlville est tra- Sersée par l'Arly et le Doron, qui se jettent aujour- d'hui dans l'Isère, mais qui s'écoulaient autrefois “ers le Nord. Leur cours s'est modilié à la suile de Captures qui sont la cause de l'encaissement actuel de ces rivières. Tous deux se sont creusé des gorges très pittoresques, et celle par laquelle Sécoule l’Arly est particulièrement remarquable. C'est encore par la dépression de Faverges- Annecy que dut s'écouler l'Isère peu après le sou- lèvement définitif des Alpes, landis que l’Are devait se diriger par le synclinal de Tamié. Quant à la vallée transversale de Chambéry, elle devait êlre parcourue, au même moment, par des eaux descendant des bassins actuels du Bréda et du = J. Réviz et J. Vivien : Note sur la structure de la chaine Nivollet-Revard (Bull. Suc. gévl. de l'rance, 3e série, & XXVI, p. 365, 1898). » ? J. Réviz : Sur la structure de la vallée d'Entremont et du plateau de Montagnole (Bull. Soc. géol. France, 3e série, & XXVIIE.) ® M. Luceox : Recherches sur les vallées, etc. - J. RÉVIL — LA FORMATION DES VALLÉES DES ALPES DE SAVOIE 475 Gelon (massif d'Allevard). Postérieurement et pen- dant les phases interglaciaires, elle a élé parcourue pur l'Isère et l'Arc, ainsi qu'en témoignent les ter- rasses d'alluvions qui s'échelonnent à divers ni- veaux. La partie actuelle de la vallée du Grésivaudan comprise entre les deux dépressions synelinales n'exislait donc pas au début de l'émersion: il y avait là un seuil assez analogue à la parlie monta- gneuse comprise entre l’Arly et l'Arve. Ce seuil était constitué par des terrains très délitables appartenant au Lias et au Doyger : aussi les rivières, dont le lil s'élait établi en conformité des conditions structurales, ont-elles vu leur cours se modiltier par l'effet de l'érosion régressive. Les terrains composant le seuil étaient particulière- ment favorables à la création de vallées subsé- quentes, qui ont pu suivre, sans peine, l'approfon- dissement des vallées transversales. Elles sont ensuile arrivées à les capturer, lorsque les cols qui les séparaient se furent suffisamment abaissés. C'est ainsi que les affluents du Drac ont successi- vement capturé l'Arc, puis l'Isere, et celle-ci le Doron de Beaufort et l’Arly. La grande vallée du Grésivaudan est donc posté- rieure à la formation des Alpes et due uniquement à l'érosion ainsi qu'au déchaussement par la base de plis obliques par rapport à elle’. Une vallée qui lui est parallèle, et dont l'histoire est à peu près analogue, est celle du Gelon, creusée par des torrents provenant du massif d'Allevard. Le plus important est le Bréda, qui a été capturé par un cours d'eau subséquent descendant vers l'Isère. La vallée du Gelon s’est alors trouvée sé- parée de son troncon supérieur; elle n’est plus par- courue aujourd'hui que par une rivière, aux allures indécises, et nullement en rapport avec la dépres- sion dans laquelle elle cireule *. Tout le versant de la chiine de Belledonne qui regarde la vallée du Grésivaudan porte les traces indéniables de l'action glaciaire. Les parois ro- cheuses y sont sillonnées de nombreux torrents latéraux qui leur donnent un cachet spécial; les parties hautes consistent en aizuilles plus ou moins déchiquetées qui surplombent de pelits cirques, où ! D'après M. P. Lory séance Soc. géol. France. 5 juin 1904), la vallée du Grésivaudan, de Montmélian à Grenoble, et celle du brac ne paraissent point avoir subi une migration gra- duel'e, à partir du bord cristallin. Elles longent le pied de l'anticlinal liasique. dont la retombée constituait dans la surface structurale une forte dénivillation. Quant au contraste qu'offrent ces deux vallées, il résulterait, d'après ce savant, du fait que les glaciers de Belledonne auraient «surcreusé» le Grésivaudan, tandis que ceux du Drac auraient, au contraire, effectué des remblaiements. ? D'après M P. Lory (C. R , coll. p. 1903). le « surereuse= ment » des vallées de la Rochette et d'Allevard serait sur- tout dù à l'action des glaciers, et n'aurait point dépendu seulement du jeu de l’érosion régressive. se trouvent encore quelques névés, derniers té- moins des glaciers qui venaient rejoindre l'im- mense fleuve glacé lorsqu'il remplissait la vallée principale. VII Cette longue étude montre combien est complexe et important le problème de la formation des val- lées, et quel intérêt il présente pour qui veut com- prendre l’évolution géographique d'une région donnée. De nombreux facteurs entrent en ligne de compte : les plus importants sont ceux qui ont trait à la struclure du sol, à la nature de ses matériaux, enfin aux agents extérieurs dont l’action a été de niveler la terre ferme. Sous l'action de la pesanteur, l'écoulement des eaux s’est établi, sur la surface topographique ini- tiale, à l’aide de rivières en relation avec la struc- ture de la région. Celles-ci ont cherché à gagner les rivages marins par les chemins les plus courts. Postérieurement, se greffèrent sur elles d’autres rivières qui, lorsqu'elles s’atlaquèrent à des ter- rains éminemment délitables, formèrent des vallées qui purent acquérir un beau développement. Ce fut là l’origine de ces vallées longitudinales, comme celle du Grésivaudan, qui se sont constituées par l'association de troncons conséquents et d’autres subséquents : ces derniers étant plus spécialement dus à l'érosion. R. ROMME — L'EXODE RURAL ET LA TUBERCULOSE A LA CAMPAGNE 1 Le modelé par les actions glaciaires a joué un grand rôle dans les contrées montagneuses; les phases d'avancées et de reculs des glaciers per- mettent d'expliquer bien des anomalies. Des causes agissant vers l'aval ont pu également intervenir et permettent, d'après certains savants ‘, d'élucider le « phénomène des terrasses s’échelonnant à divers niveaux. D'autres auteurs, à la tête desquels est M. Penk, concluent à la fixité du niveau de base, et, pour eux, ces phénomènes ne seraient dus qu'à des causes agissant vers l’amont. C'est du domaine m de la Géologie, comme nous l'avons dit en débutant, | que dépendent ces diverses recherches. Il est juste M de dire, cependant, qu’en fournissant des données sur le rôle des agents qui ont concouru au modelé, la Géographie peut, de son côté, jeler une vive lumière sur certaines questions géologiques. En reconnaissant, par exemple, la liaison intime de certaines formes du relief avec les glaciers, elle sera un guide sûr dans l'appréciation de leur ancienne extension. La Géologie et la Géographie physique ont donc de nombreux points de contact, et il est indispen- sable, à ceux qui cultivent cette dernière, de con- naitre les résultats généraux auxquels est arrivée la première de ces sciences pendant la seconde moilié du siècle qui vient de finir. J. Révil, Président de la Société d'Histoire naturelle de Savoie. - fs edge L’'EXODE RURAL ET LA TUBERCULOSE À LA CAMPAGNE Quinze ans à peine se sont écoulés depuis que la Russie s’est engagée, grâce aux capitaux français, dans les chemins épineux de la grande industrie. Quelques années plus tard, un statisticien russe, Taugane-Baranovsky, écrivait ceci : « Le petit industriel rural ne peut pas lutter contre la concurrence des fabriques. Il n’a plus rien à faire dans son village, — la terre ne pouvant combler le déficit du cultivateur industriel, — et, dans ces conditions, le paysan se voit obligé d'aller au loin pour chercher du travail. C'est de cette façon que l'exode rural commence. « Ainsi, dans le gouvernement de Pskow, le nombre annuel moyen des passeports délivrés aux hommes, qui était de 11.176 pendant la période décennale 1885-1895, s’est élevé en 1896 à 45.973. La plupart d’entre eux (paysans) se rendent à Saint-Pétersbourg et y travaillent dans les usines et les fabriques ou s’y engagent comme portiers, cochers, camionneurs. » J'ai tenu à citer tout au long ce passage, parce M. Vandervelde* nous montre, en effet, comment qu'il nous permet de saisir sur le vif le mécanisme de l'exode rural, courant irrésistible qui arrache le paysan de la terre et le porte vers la ville, vers les centres industriels. Ce phénomène, d'une si haule portée sociale et économique, est un phénomène général auquel aucun pays n'échappe. Dans un livre admirablement documenté, l'agriculture élant une industrie essentiellement saisonnière, le paysan ne peut subsister de sa terre qu'à la condition d’équilibrer son budget par les revenus tirés d'une occupation accessoire, généra lement une industrie primitive et familiale, comme le lissage, la filature, la poterie, la dentellerie, tabletterie, elc. Or, toutes ces industries ont été progressivement ruinées par la grande indus ne © 1 Voir sur ce sujet les remarquables travaux du général gique de France. | ? E. VANDERVELDE : L'exode rural et le retour aux nn Paris, 1903. | E R. ROMME — L'EXODE RURAL ET LA TUBERCULOSE A LA CAMPAGNE 417 trie, par la machine perfectionnée qui travaille vite et à bon marché, par la concentration des capitaux qui diminue les frais de production. Ne pouvant plus vivre de son lopin de terre, le paysan se voit done obligé de quitter la campagne et d'aller cher- cher du travail dans la ville. Les autres causes qui, d'après M. Vandervelde, contribuent au dépeuple- ment des campagnes, à l'exode rural, sontla déca- dence de la propriété paysanne, le morcellement du sol, la suppression des biens communaux, … l'industrialisation des campagnes, qui remplace la main-d'œuvre agricole par des machines à la va- … peur ou à l'électricité, les crises agricoles, etc. C'est dire par quelles racines profondes l'exode rural tient à notrelrégime économique. Seul, il nous permet de comprendre pourquoi, au commen- cement du xix° siècle, on ne comptait en Europe que 21 villes de plus de 100.000 habitants, tandis que, vers 1900, le nombre de ces villes s'élevait à 447, avec plus de 40 millions d'habitants, soit le dixième de la population totale. Quand on connaît les ravages que la tuberculose exerce dans les grandes villes et la rareté relative de cette affection dans les campagnes, on saisit tout de suite les liens qui rattachent l'exode rural au problème de la tuberculose. Les lignes qui suivent n ont d'autre prétention que d'établir avec quelque précision le rapport qui existe entre ces deux phénomènes. : Il En attirant le paysan dans les villes, la grande industrie ne tarde pas à lui faire sentir la griffe de la tuberculose. Qu'elle en fasse un domestique “ou un petit employé, qu'elle le conduise, comme “c'est le plus souvent le cas, à l'usine, dans une -mine où une carrière, qu'elle le jette enfin dans la “population flottante dont les occupations sont en grande partie industrielles, — le résultat est le “même : l'immigré paiera son tribut à la tuberculose qui règne en maitresse dans les villes. à M. Georges Bourgeois! à justement consacré à “cette question une étude remarquable, qui mérite «certainement le grand succès qu'elle a obtenu. F Prenant Paris pour exemple, il nous montre que, sur une population tolale de 2.657.335 habitants, indiquée par le dernier recensement de 1901, on “compte 1.694.898 immigrés, et seulement 962 437 nés à Paris. Autrement dit, sur 100 Parisiens, on trouve 63 immigrés pour 37 indigènes. Or, quelle est chez les uns et les autres la mortalité par tuber- _culose? Aprèsles rectifications nécessaires, M. Bour- a Ê + ! D' G. BourGeois : L’exode rural et la tuberculose. Paris, 1905. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, geois arrive aux chiffres de 43,2 °/,,, chez les pre miers, et de 39,7 chez les seconds. La différence de 3,5 °/60 qui existe entre les deux chiffres donnés par M. Bourgeois représen- terait donc la part d’acclimatement que les immi- grés paient à la tuberculose. Elle mesurerait, en quelque sorte, les méfaits de l'exode rural en matière de tuberculisation du pays. Il est vrai qu'elle ne représente qu'une-moyenne. Il suffit, en effet, de se reporter à un tableau‘ (tableau VIII, p. 40) dressé par M. Bourgeois, pour voir que les frais d’acclimatement en monnaie de tuberculose sont, dans la grande majorilé des cas, bien plus élevés, et que, pour certains départements, la mortalité tuberculeuse est, chez les immigrés, le double de ce qu'elle est dans le pays d'origine. Toutefois, le département est une unité com- plexe, où le travail industriel côtoie trop souvent le travail agricole. Pour avoir la mesure des méfaits de l'exode rural, j'ai pensé que l'analyse devait être poussée plus loin que ne l’a fait M. Bourgeois, et qu'il fallait prendre, pour terme de comparaison, la tuberculose rurale. Il m'a semblé que le raison- nement qu'on devait tenir était le suivant: Sur 10.000 campagnards qui immigrent dans les villes, un certain nombre succombent à la tuberculose ; combien auraient échappé au mal s'ils étaient res- tés à travailler la terre? Il est évident que la réponse à celte question ne peut être fournie que par une étude systématique de la tuberculose à la campagne. Seulement, quand on aborde cette étude, on se trouve en face de documents disparates, d'une valeur inégale et d’un interprétalion assez difficile. IT Sinousconsultonsles tableaux statistiques dressés pour la France par les soins de M. Brouardel*, on constate que la mortalité par tuberculose descend progressivement de 49,9 °/,,, dans les villes ayant une population de plus de 50.000 habitants, à 31,7 °/,, dans les villes dé 4.000 à 5.000 habitants. MORTAL. TUBERC. MORTAL. TUBERC, par 10.000 hab. par 10.000 hab. DÉPARTEMENTS restés immigrés dans le pays à Paris en 1902 Haute-Marne. . . . . . 20 12 Haute-Loire. -. - . - . 25 18 NIOVER he res alt 21 42 NOSBeS LR ET 28 61 TEE EMENRS SNEPE 31 33 MeUSE RER EC 33 57 Deux-Sèvres - = : . . : 35 43 Morin 36 75 VALISES RER 37 29 CAIVaTOS RE 39 43 Indre-et-Loire .: . . . . 50 36 2 P. BROUARDEL : Travaux de la Commission de la Tuber- culose, Paris, 1900, 410** 4118 R. ROMME — L'EXODE RURAL ET Celle diminution se faisant d'une facon régulière- ment progressive en rapport avec la diminution numérique de l’agglomération, on est tout surpris de voir celte mortalité monter à 35,2 °/,, dans les villes de 2.000 à 3.000 habilants, et atteindre 18,8 °/0 dans les agglomérations comptant 1.000 à 2.000 habitants. D'après M. Brouardel, seule une enquête spéciale pourrait élucider cette tuberculi- sation de la campagne. Les slatistiques officielles allemandes’ nous ré- servent une autre surprise. Dans les deux rubriques | qu'elles comportent, elles notent pour les indivi- | dus de 0 à 45 ans une mortalité de 14,04 °/%9 dans 28 grandes villes, et une mortalité de 7,27°/669 en dehors de ces grandes villes. D'après tout ce que nous savons sur la fréquence de la tuberculose sui- vant les âges, nous pouvons donc nous attendre à trouver une proportion analogue pour les adultes. Il n’en est rien. Par 10.000 habitants de quinze à soixante ans, la mortalité de tuberculose est de 26,99 dans les grandes villes, et de 25,45 en dehors de ces villes. Cette constatalion, avons-nous dit, est une véri- table surprise. Et, de fait, quand on consulte la sta- tistique officielle pour la Prusse”, on constate que, pour l’année 1901, la mortalité de tuberculose, sans distinction d'âge, a été, par 10.000 habitants, de 47 dans les communes de campagne, el de 22 dans les communes urbaines. Une autre publica- tion officielle’ nous montre même qu'entre quinze et soixante ans la mortalité par tuberculose en Allemagne est d'autant plus grande dans une région donnée que le taux de sa population urbaine est plus élevé‘. C’est ainsi que, pour 10.000 habi- tants, cette mortalité est de 33,5 dans le district de Dusseldorf, dont la population urbaine forme 64,1 °/, de la population totale, et de 17,2 seule- ment dans le district de Gumbinen, dont la popu- lation urbaine ne forme que 16,6°/,; de la popula- tion totale, Une conclusion analogue découle d’une autre statistique Ÿ, qui nous montre que, sur 4.000 1 Raras : Ergebn.d. TodesursachenstatisL. des Jahres 1898. “Mittheil. a. d. Kaiserl. Gesundheitsamte, vol. VI, p. 289. Berlin, 1901. { ? Die Sterblichk. nach Todesursachen, Preussische Statist., n° 17, p. 4. Berlin, 1903. * HameL : Deutsche Heiïlst. f. Lungenkr. Tuberkul, Arboit. a. d. Kaiserl. Gesundheitsamnte, fase.2. Berlin, 1904. PROPORTION ‘le la population urbaine en °/e MORTAL. TUBERC. pour 10.00 hab. (1897-1899) : DISTHICTS DHSSENIOLI RER 64.1 33,5 COlGERDE RE EE RETE 53.3 39.2 NVieSbalcn 46,7 34,4 KOSIMERNMGRE INR 27,6 19,9 Marienwerder . . 24,6 17 BC | GUMDINEN PET 16,6 47,2 * Slatistik der Ursachen der lin, 1904. Erwerbsunfäihigkeit, ete. Ber- LA TUBERCULOSE A LA CAMPAGNE cas d'invalidité par tuberculose, on en compte (pour les années 1896-1899) 78 chez des agriculteurs, 169 chez les employés de commerce, et 206 chez les ouvriers. On peut encore citer, dans le même ordre d'idées, la proportion dans laquelle l'agriculture et le tra= vail industriel sont représentés dans les sanato- riums populaires allemands. D’après les chiffres que M. Hamel donne pour les quatre sanatoriums de Grabowsee, Ruppertshain, Planegg et Gürbers- dorf, cetle proportion est de 49,5 à 59,1 °/, pour les ouvriers, landis}que pour l’agriculture, y com- pris tout travail à l’air libre, elle n’est que de 14 à 19,4°/,. Le même fait apparait encore dans la monographie de M. Baudran”, qui, en étudiant la. mortalité de tuberculose dans le département de l'Oise, nous montre les différences que présente celte mortalité dans les cantons industriels et dans les cantons agricoles ou mixtes. III Cependant, les statistiques globales offrent cet inconvénient que les facteurs à tendances opposées s'y annihilent. Cet inconvénient n’existant pas dans les petites enquêtes locales, celles-ci acquièrent ainsi une importance très grande dans la ques- ion qui nous occupe, celle de la tuberculose à la campagne. Parmi le très petit nombre de travaux de ce genre, il faut certainement citer en première ligne celui de M. Durozoy :. En prenant pour champ d'observation un canton du département de l'Oise, il nous montre la façon dont la tuberculose se présente dans les villages qu composent ce canton (fig. 1). De ces villages, trois. sont franchement industriels (filature de coton eb de chanvre, fabrique de brosses) : la mortalité pa tuberculose y oscille entre 36 et 61 °/4,, : elle dé passe, par conséquent, celle de Lyon. Par contre dans deux autres villages essentiellement agricoles elle est de 0 dans l’un et de 10 °/,,, dans l’autre Elle monte enfin à 46 °/,,, dans un troisième vil lage, dont une partie de la populalion est restée fidèle au travail des champs, tandis que l'autre partie est occupée dans les usines voisines. L'enquête publiée dernièrement par M. Fischer? montre également que c’est bien au genre de wie et de travail qu'on doit attribuer Ja mortalité tubet culeuse si élevée chez les ouvriers. Cetle enquêle 1 G. Bauoran : Les foyers tuberculeux en France. Pariss 1904. 2 Durozox : La tuberculose au village. Paris, 1904. 3 F. Fiscuer : Ueber Entstehungs- und Verbreitungsw der Tuberk., etc., in Beitr. z. Kliu. der Tuberkulose, 1908 vol. LI, p. 19. AT PR T7 Ed R. ROMME — L'EXODE RURAL ET LA TUBERCULOSE A LA CAMPAGNE (mi faite dans la région de la Forêl-Noire, à porté sur deux villages, dont une partie de la population est reslée agricole, landis que l’autre va travailler Lous les jours dans une usine voisine. Or, le rapport entre la mortalilé tuberculeuse dans la population agricole et dans la population ouvrière est comme 0,7 à 1,7 dans le premier de ces villages et comme 0,6 à 2,1 dans le second. En nous en tenant à ces chiffres, nous pouvons donc dire que la tuberculose fait au moins deux fois plus de victimes dans les centres industriels que dans les campagnes. Or, il est intéressant de noter que, d'après le recensement‘ de 1896, on compte en France, sur une population active d'environ 21 millions, un peu plus de8 millions d'agriculteurs et près de 7 millions d'ouvriers. Si nous ajoulons que 40 à 50 °/, des ouvriers sont des immigrés de campagne, on comprend l'importance de l’exode en ce qui concerne le développement de la tuberculose. Cependant loutes les victimes de l'exode rural ne deviennent pas forcément ouvriers industriels. Bon nombre d'entre eux gagnent leur vie comme em- ployés de commerce ou comme domestiques?. Malheureusement, nous ne possédons aucune sta- listique établissant plus ou moins exactement la mortalité tuberculeuse dans ces professions. Je ne puis donc que citer les chiffres que j'ai déjà signalés, à savoir que, sur 1.000 rentes d'invalidité! pour lu- berculose, on en comple en Allemagne 78 pour les agriculteurs, 169 pour les employés de commerce, 146 pour les domestiques et 206 pour les ouvriers. Les fails que nous avons cités ne nous per- meltent pas d'évaluer en chiffres précis les frais d'acclimatement que le paysan immigré dans la ville paie à la tuberculose. Ils nous montrent, cepen- dant, avec la dernière évidence, le rôle énorme et certainement prépondérant que l’exode rural, con- séquence inévitable de notre régime économique. joue dans la tubereulisation d’un pays. On comprend ainsi que M. Baudran”* ait pu écrire que « les com- Résult. slatist. du recensement des industries et pro- fessions, t. IV, p. 18. Paris, 1901. be recensement de 1896 donne pour ces deux catégories les chiffres de 1.602.056 (commerce, spectacles, banquet) el Ale 955.138 (soins personnels, services domestiques). 3 G. BauDRAN : /. c., p. 64. munes où l'induslrie manque ne! deviennent pas, d'emblée, tuberculeuses et que cette maladie tire 1 72 Ourscam Dreslincourt Longueil-Annel Machemont Maretzs/Matz Aibecourt S'Leger-aux-Bors Thourotte Vendelicourt -le-Mont Plessis-Brior /rac Barlly Cambronne Carlepont Chevincourt Villages : ET veau de mortalité t: (csv 7 iles de de 100 900 à 40 000 À. Te 1 —_ + JE: I LS SES) + more. Éub. maximum + :s de 10.000 2 20, + Lu et rndi sépre) ON+FHXOn + om e Agriculéur LE ES FBORREMANS cel Fig. 1. Mortalilé tuberculeuse dans les villages d'un canton de l'Oise (cette mortalité est ramenée au laux par 10.000 habitants). son origine de la ville, pelite ou grande, industriel pouvant devenir dangereux ». D'R. Romme, Préparateur à la Faculté de Médecine de Paris. foyer 480 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Stolz, Professeur à l'Université d'Innshruek, et Gmeiner, Professeur à l'Université allemande de Prague. — Einleitung in die Functionentheorie (INTRODUCTION A LA THÉORIE DES FONCTIONS). — { vol. in-8°, de vi-242 pages. Teubner, éditeur. Leipzig. L'ouvrage appartient à la collection des Manuels (Lehrbücher) que la maison Teubner édite depuis plusieurs années. On publie une première partie, dont voici le résumé : I. Variables réelles et fonctions réelles : II. Fonctions réelles à deux ou plusieurs variables réelles ; IT. Variables complexes et leurs fonctions; IV. Fonctions rationnelles et entières ; V. Séries de puissances entières. La seconde partie contiendra : VI. Caractères de convergence et de divergence pour les séries ; VII. Théorie (d'après Weierstrass) d’une fonction monogène, analytique, à une variable ; VIII. Fonctions circulaires; IX. Produits infinis; X. Fractions continues finies; XI. Fractions continues infinies. Il s'agit d’un ouvrage d'enseignement, mais d'un caractère scientifique fort élevé. D'ailleurs, aujourd'hui, les théories nouvelles se dépouillent vite de la compli- cälion, parfois superflue, introduite par l'inventeur, se décintrent, et prennent place dans l'enseignement avec des démonstrations clarifiées et classiques. MM. Stolz et Gmeiner ont fait un manuel extrème- ment utile, complet, bien ordonné, bien « à jour », avec des exercices et des exemples nombreux et bien choisis. Ce dernier point a son importance. Dans les théories un peu abstraites, il est quelquefois moins difficile d'établir l'existence d’une propriété que d'en trouver des exemples effectifs. LÉON AUTONNE, Maitre de Conférences à la Faculté des Sciences de l'Université de Lyon. Habets (Alfred), Professeur ordinaire à la Kaculté technique de l'Université de Liége. — Cours d'Ex- ploitation des Mines. Tome II. — 1 vol. yr. 1n-8° de 645 pages. Le Soudier, éditeur. Paris, 1904. On connaît l'importance de l’enseignement donné à l'Ecole technique de Liége, qui forme tous les ans d’ex- cellents ingénieurs pour les industries minières et métallurgiques de Belgique et de l'Etranger. M. Habets à publié le cours d'Exploitation des mines qu'il y pro- fesse, et cet ouvrage, très développé, vient occuper un rang des plus honorables à côté de ceux, universelle- ment connus, de M. Haton de la Goupillière en France, et de M. Kôhler en Allemagne. Les généralités sur les gisements minéraux qui pré- ludent ordinairement à tous les cours similaires n’ont pas trouvé place ici, en raison du développement donné à cette question dans les lecons de Géologie pure et appliquée, professées à l'Ecole. Pour une raison ana- logue, l'auteur a très peu insisté sur la préparation mécanique des minerais ou des charbons : la théorie des appareils faisant partie du cours de Métallurgie, il s'est contenté d'indiquer les principes qui président à la préparation mécanique des charbons et à la fabrica- tion des agglomérés. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Après avoir passé en revue les travaux nécessaires ET INDEX pour avoir accès au gisement, c'est-à-dire tout ce qui se rapporte aux excavations souterraines et aux travaux d'art qui en découlent, il eût été logique d'étudier immédiatement les moyens d'exploiter ce gisement et de reporter à la suite, à titre de corollaires, les ques- tions de transport et d'extraction. L’inversion à été voulue, afin de fournir aux élèves le moyen de mieux üirer parti des visites d'installations minières qu'ils auront à faire dès la première année. Ceux-ci auront certainement plus de facilités pour étudier d'abord ces dernières questions, qui ont, du reste, un rappport in- time avec les méthodes d'exploitation adoptées. L'auteur s'étend longuement au début sur tout ce qui concerne les travaux de mines, sur les outils du mineur depuis les plus simples, pics ou rivelaines, jusqu'aux perforatrices et autres machines bosseyeuses, haveuses, etc., destinées à fissurer ou à rainurer les roches, sur les explosifs qui sont aujourd'hui les auxi- liaires indispensables du mineur, sur les travaux d'art, soutènements des galeries et des puits, percements des tunnels, fonçages des puits dans les terrains aquifères ou non, etc. Le transport et l'extraction sont réunis ensuite dans un mème chapitre, car l'extraction y est considérée comme un transport plus ou moins vertical dans un puits. Les deux grandes subdivisions de ce chapitre reposent sur cette idée que les véhicules, au moyen desquels est effectué le transport, sont ou non pourvus deroues. Voies, wagonnets, locomotives, chaînes flottantes, câbles, cages, guides, molettes, tambours, freins, etc., forment autant d'articles qui sont décrits dans tous les détails et sous tous les aspects. à L'étude des différents systèmes d'exploitation pro= prement dite débute naturellement par celle des tra vaux de recherches qui servent à reconnaitre l'exis- tence du gisement et à en apprécier l’exploitabilité. C'est là qu'interviennent les sondages et tubages, dont nous avons un exemple si actuel et si intéressant dans les recherches de houille en Campine et en Meurthe-et- Moselle. Puis, viennent les diverses méthodes d’exploi- tation à ciel ouvert, souterraines avec ou sans remblai. Cette partie est remarquablement claire et précise. Après avoir consacré quelques pages à l’administra- tion et posé les principes si importants de l’établisse- ment des prix de revient dans une mine, M. Habets s'arrête sur toutes les questions dont dépendent actuel- lement la sécurité et l'hygiène des mineurs, c'est-à- dire l’aérage, l'éclairage et le sauvetage. Il explique très bien l'influence heureuse qu'a eue l’organisation des Commissions dites du grisou sur les progrès cons- tants de l’aérage des mines depuis vingt ans. Tous les travaux récents de nos ingénieurs au corps des Mines français : Fuchs, Le Chatelier, Chesneau, Lebreton, Rateau, Léon, etc., sont soigneusement relatés et mis à la place qui convient à leur science élevée et désins téressée. Les procédés d’épuisement complètent l'en= semble des moyens que le mineur est obligé d’avoir à sa disposition pour lutter contre les difficultés si nom= breuses que la Nature oppose sans cesse à ses efforts et à son énergie : moteurs à maîtresses tiges avec ou san rotation, pompes à vapeur où hydrauliques, et, enfin, pompes électriques qui, en dehors des mines à grisou présentent tant de facilités au point de vue des trans- missions à distance. L'étude de la translation des ouvriers dans les puit el celle de la manutention des produits à la surface terminent cet ouvrage très développé, auquel les ingés nieurs auront certainement recours avec fruit. ÉMiLE DEMENGE, Ingénieur civil. nt DEPREE TER CR CE ame. Ste y: BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 181 2° Sciences physiques Von Jüptner (Hans baron), Professeur à l'Ecole des Mines de Leoben. — Eléments de Sidérologie, traduits de l'allemand par E. PonceLcer et A. DELMER, ingénieurs. Première partie : Constitution des allia- ges de fer et des scories. — 1 vol. gr. in-8° de 333 pages avec 91 figures. (Prix : 18 francs). Ch. Bé- ranger, éditeur. Paris, 1905. Un métallurgiste francais, C.-E. Jullien, dont la voix un peu mordante, mais souvent prophétique, a long- temps crié dans le désert, classait les produits sidérur- giques, avec les alliages, les verres, les poteries, les roches ignées, dans ce qu'il appelait d'un nom pitto- resque : « le crassier de la nomenclature de Lavoi- Sier{ ». Le crassier, c'est, au voisinage d'une usine, l'endroit où on amoncelle les « crasses », c'est-à-dire les résidus encombrants et sans valeur actuelle, qui deviennent parfois, comme il est arrivé pour les scories phospha- tées du procédé Thomas, des mines d'une exploitation fructueuse. Il est certain que la Métallurgie n'avait pas ses coudées franches dans le maillot rigide de la chimie des composés définis; elle attendait, pour se déve- lopper, du moins comme science, un espace plus libre, et elle l'a trouvé dans le champ de la Chimie physique, dont elle est devenue un des domaines les plus cultivés. Le baron de Jüptier, professeur à l'Ecole des Mines de Leoben, puis à l'Ecole technique supérieure de Vienne, dont un traité de docimasie a déjà été traduit en francais, à été l'un des premiers à comprendre l'évolution métallurgique, le premier, croyons-nous, à tenter la synthèse des données nouvellement acquises. Son titre, la « Sidérologie », est à lui seul un pro- gramme. {1 annonce « la science qui non seulement détermine la composition intime morphologique et chimique des alliages du fer (Sidérographie), mais qui recherche en mème temps la facon dont cette compo- sition se trouve modiliée par les influences extérieures et qui établit les relations existant entre cette compo- sition et les propriétés physiques et mécaniques de ces alliages ». Une telle entreprise est difficile et ingrate. Quand une science est en pleine formation, les résultats s'accu- mulent rapidement : ils s'ajoutent, se complètent, sou- vent aussi se contredisent et se corrigent. Le livre d'aujourd'hui vieillira vite et il faudra bientôt le remettre à jour. C'est ce qu'a fait M. de Jüptner avec le plus grand zèle et l'ouvrage allemand en est à sa troisième partie. C'est la première seulement dont MM. Poncelet et Delmer nous présentent la version francaise : elle date donc de quelques années et, pour être tout à fait au courant, il faudrait y joindre les publications ulté- rieures qui n'ont pas encore été traduites et qui deman- deraient à l'être. Cette première partie prend comme point de départ la théorie des solutions d’après les travaux de ses créa- teurs, Van’t Hoff, H. Le Chatelier, Ostwald, Nernst, etc., et y rattache, d’abord les alliages en général, puis les alliages du fer en particulier et les scories des opéra- “tions sidérurgiques, autant qu'il était possible de le faire avec les matériaux dont disposait l'auteur. M. de Jüptner est extrèmement consciencieux : il S'est toujours documenté directement aux sources et n'en a négligé aucune. Il résume tous les travaux, les discute, y ajoute les siens et les problèmes qui ne sont … pas encore résolus se trouvent du moins posés. Les chapitres relatifs aux scories, avec la description des - recherches de Vogt sur la structure microscopique, de -Gredt et Akermann sur la température de formation et de fusion des silicates, seront presque inédits pour les lecteurs français. L'ensemble forme déjà un édifice Sn 1 Baudry, éditeur, Paris, 1810. consistant, que l'on verra se continuer et s'achever dans les parties suivantes : il évitera des recherches toujours longues, souvent impossibles, dans la littéra- ture technique de tous les pays et, permettra à ceux qui n'ont pas suivi au jour le jour le mouvement de se faire une idée exacte de l'état de la science sidérurgique. Les traducteurs se sont convenablement acquittés de leur besogne. Nombre de pages, tirées des travaux de nos compatriotes, ont subi l'épreuve, qui eût pu leur ètre épargnée, d’une double traduction du français en allemand et de l'allemand en francais ; et elles retrou- vent, sinon leur forme originale, du moins leur sens. Le signataire de ce compte rendu demande la per- mission de le terminer en remerciant personnellement M. de Jüptner pour l'attention continue qui a été prêtée à ses recherches et la place qui leur à été attribuée dans l'ouvrage. F. Osmoxp, Ancien Ingénieur aux Usines du Creusot. 3° Sciences naturelles François-Francek (Ch. A.), Professeur au Collège de France, Membre de l Académie de Médecine. — Cours du Collège de France de 1880 à 1904 et Travaux du Laboratoire de 1871 à 1904. — 1 vol. in-8 de 392 pages. Doin, éditeur. Paris, 1904. Dans cet ouvrage, il serait trop aisé et superflu de louer le fond; il suffit, pour qu'on en concoive l'intérêt, du titre qui en désigne le contenu et du nom dont il est signé. Tout résumé qu'il est, l'exposé en est clair, le style concis, sans sécheresse. Dans ses principaux chapitres, on s'apercoit à peine qu'il est formé de fragments, tant l'enchainement est logique et continu. Par là s’atteste, d’ailleurs, la méthode et l'esprit de suite avec lesquels l’auteur avait réalisé la tâche expé- rimentale qu'il s'était prescrite. Ainsi l'œuvre se prète, mieux peut-être que l’auteur ne le pense, à une lecture suivie, tout en conservant essentiellement, grâce au dispositif typographique et à une table détaillée, le caracfère d'une œuvre à consulter. La consulteront ceux qu'intéressent soit la Physio- logie normale, soit la Physiologie pathologique, soit encore la Psychologie, dans ses rapports avec ces deux sciences. Ils y verront certaines méthodes poussées à un degré remarquable de perfection; ils y trouveront un copieux recueil d'observations importantes, faites avec une telle rigueur, notées avec un tel souci d'exacti- tude, si délibérément expurgées d’aperçus conjecturaux et d'inductions téméraires, qu'à travers les vicissi- tudes des théories scientifiques leur intérêt propre ne saurait guère subir d’atteintes. Presque tous les travaux de M. Francois-Franck ont été exécutés avec l’aide de la méthode graphique, qu'il a beaucoup contribué à perfectionner pour l'adapter à ses recherches personnelles. Il à utilisé également la méthode photographique, introduite par Marey dans la pratique expérimentale. Il à eu l'ingénieuse idée de combiner les deux méthodes, de façon à en tirer un contrôle réciproque des plus utiles; il a inauguré ainsi la méthode « grapho-photographique ». Sur les appli- cations infiniment variées de ces méthodes générales, sur les ressources qu'elles peuvent offrir dans chaque cas particulier, le livre de M. François-Franck contient de précieuses indications. Quant aux documents que l’auteur a rassemblés, ils sont trop condensés pour que nous en puissions extraire une véritable analyse, trop nombreux même pour que nous en puissions faire une complète énumération ; nous en citerons simplement un certain nombre dans un rapide aperçu. La première partie de l'ouvrage est consacrée au système nerveux. Les recherches exposées concernent la sensibilité en général, la physiologie du système nerveux, le bulbe rachidien, la moëlle, les nerfs péri- phériques, le cerveau et les appareils nerveux orga- niques représentés par le graud sympathique et le pneumogastrique. On sait l'importance des lravaux que M. Francois- Franck, avec la collaboration de M. Pitres, à consacrés à certaines fonctions du cerveau et, en particulier, aux localisations cérébrales. Cette question a soulevé des controverses nombreuses, et la doctrine des localisa- tions cérébrales n'est pas encore acceptée par l'unani- mité des physiologistes. « Cela tient surtout à ce que les considérations théoriques ont été mêlées aux dis cussions de faits. » On ne peut douter, aujourd'hui, qu'à certaines lésions cérébrales localisées répondent cer- tains troubles moteurs définis; il y a done des locali- sations cérébrales ; énoncer cette proposition, ce n'es autre chose qu'exprimer un fait. Mais avancer que l'écorce du cerveau renferme, dans les points consi- dérés, des centres psycho-moteurs, c'est-à-dire des groupes de cellules nerveuses formant des organes complets et suffisants du mouvement volontaire, c'est déjà proposer une explication hypothétique et quin'est pas seule plausible. M. François-Franck soumet à une critique pénétrante les différentes conceptions qui se sont fait jour à ce sujet. Quant à lui, se fondant sur des arguments divers et principalement sur les caractères particuliers qu'il à pu assigner, avec M. Pitres, aux mouvements provoqués par les excitalions de l'écorce, il estime « qu’on est conduit à assimiler beaucoup plu- tôt à une surface sensible spéciale qu'à une zone mo- trice la zone excitable du cerveau ». L'épilepsie cérébrale, l'influence du cerveau sur les fonctions organiques, les expressions des émotions (étudiées au moyen de la photographie), la circulation du sang dans l’encéphale, sont aulant de questions que l’auteur à longuement approfondies. Il critique d’une facon détaillée la théorie dite phy- siologique des émotions, ou théorie de James-Lange; il réfute, par des arguments nombreux et péremp- toires, qui empruntent à sa compétence reconnue une autorité particulière, cette conception erronée à la- quelle les psychologues ont fait trop facilement crédit. Le chapitre relatif à la physiologie du grand sympa- thique el du pneumogastrique, considérés dans leurs fonctions sensitives et motrices diverses, contient, entre autres documents importants, une étude très complète du nerf vertébral, étude qu'on peut regarder comme un modèle d'analyse expérimentale. La deuxième partie se rapporte à l'apparerl cirecula- toire : elle occupe le quart de l'ouvrage. Aueun des organes de la circulation n'a échappé aux investigations de l’auteur. L'étude des changements de volume du cœur à fourni de nombreux éléments à l'analyse de la fonction cardiaque et assure une base expérimentale aux théories des souffles extracardiaques, du bruit de valop, etc. La solidarité fonctionnelle du cœur -droit et du cœur gauche n’est pas complète au point de vue de l'énergie des contractions, mais, par contre, elle ne se dément jamais au point de vue du synchronisme, contrairement à ce qu'avaient avancé certains auteurs, s'appuyant sur des arguments insuffisants ou fournis par une technique défectueuse. C'est à tort aussi que des physiologistes ont voulu voir, dans la diastole des ventricules, autre chose qu'un simple relàächement musculaire, et soutenu la théorie de la « diastole active ». M. Francois-Franck n'a paslaissé d'apercevoir et de réfuter encore d’autres erreurs, qu'une observa- lion insuffisante avait accréditées. Associant, dans ces derniers temps, l'exploration photographique du cœur aux explorations graphiques, il à pu confirmer, d'une façon générale, les faits qu'il avait recueillis déjà, et les soumettre à une analyse encore plus fouillée. On sait que l'nner vation accélératrice el modératrice du cœur à fait, de sa part, l'objet d'intéressantes recherches, d’où résulte cette notion que les nerfs dits accélérateurs sont en même temps loni-cardiaques, c'est-à-dire renforcent l'énergie de la contraction car- diaque en même temps qu'ils en accélèrent le rythme. Inversement, les nerfs d'arrêt sont à la fois ralentis- sants et myoatoniques, Mais l'influence sur l'énergie du myocarde n’est pas cependant indissolublement liée à BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX | l'influence sur le rythme. Cela étant donné, on pour- rait supposer que ces deux actions, dissociables, s'exer- cent par des filets nerveux dissociés; mais M. François- Franck ne tient pas cette hypothèse pour nécessaire ni même pour vraisemblable; il croit, d'ailleurs, qu'une foule d'actions dédoublées du même genre ne néces- sitent pas des nerfs indépendants, mais « résultent de l'influence des mêmes cordons nerveux sur les attri- buts multiples des appareils nerveux périphériques ». L'auteur à longuement et minutieusement étudié la sensibilité du cœur; il a montré que les réactions ré- flexes spéciales, dont MM. Ludwig et de Cyon avaient trouvé dans le nerf dépresseur la voie de transmission, n'étaient pas, tant s'en faut, les seules qui pussent avoir dans la sensibilité cardiaque leur point de départ. C'est ainsi qu'il a mis en évidence, dans une série de travaux, desréactions réflexes respiratoires (inhibitoires et spasmodiques), portant soit sur les appareils moteurs extérieurs et intérieurs (larynx, bronches), soit sur les vaisseaux pulmonaires, à la suite d'irritations endo- cardiaques et aortiques variées. Quant aux réactions réfléchies de l'endocarde sur le myocarde, elles ne sont pas toujours d'ordre dépresseur; elles peuvent être des réactions d'excitation, qui, loin d'abaisser la pression artérielle, l’exagèrent. De même peut-il se produire, dans ces conditions, des réactions vaso-motrices géné- ralisées, à prédominance constrictive, qui renforcent l'hypertension dans les artères. Par ces travaux, non seulement des questions de Physiologie normale ont obtenu des éclaireissements, mais encore des problèmes de Pathologie ont reçu des solutions salisfaisantes. A plusieurs de ces problèmes, cédés d'analyse expérimentale. Tel a été le cas, par exemple, quand il a reproduit systématiquement, chez des animaux, la plupart des lésions valvulaires connues des cliniciens, ou lorsqu'il a réalisé, par des méca- nismes précis, des insuffisances valvulaires purement fonctionnelles, transitoires, liées à une distension excessive du cœur, Il a pu, dans maintes circonstances, appliquer la méthode graphique chez l'homme malade, et, de même qu'il fit par là profiter la Clinique des ressources. techniques de la Physiologie, de même il enrichit la Physiologie de diverses notions dont les hasards de la Clinique favorisent l'acquisition. Ainsi en fut-il lorsqu'il explora le retard du pouls sur la svstole ventriculaire, et en nota les variations normales et pathologiques (notamment dans les cas d'anévrismes, où cette explo- ration est demeurée un utile moyen de diagnostic); lorsqu'il étudia le cours du sang dans l'aorte chez l'homme, d'après l'analyse des battements anévris- maux; lorsque, par des investigations comparatives chez l'homme sain, chez le malade et chez l'animal, il établit les caractères et les conditions provocatrices des souffles veineux et du pouls veineux normal et pathologique, ou qu'il détermina le mécanisme des accidents causés par l'introduction de l'air dans les veines. La contribution à l'étude de l'appareil vaso-moteur est considérable. Pour cette étude, des perfectionnements sont apportés à la technique ancienne. Certaines causes d'erreur, insuffisamment suspectées jusque-là, son mises en lumière. Il est démontré, par exemple, que certaines réactions vasculaires, provoquées dans un territoire par l'excitation du bout périphérique d'un iilet nerveux qui y affère, ne sont pas toujours, comme on à pu le penser, liées à l'excitation directe des filets vaso-moteurs, mais bien à l'excitation de filets sensibles à trajet récurrent, et aux réflexes qui s'ensuivent. I apparaît, d'autre part, que les vasodilatations actives, ou vasodilatations proprement dites, ont pu être con fondues avec expansions des vaisseaux sous la poussée intérieure d'une pression sanguine accrue). Grâce à une technique à la fois sûre et relativement simplifiée, un grand nombre de territoires vasculaires: 1 M. Franck a d'ailleurs appliqué directement les pro-. des vasodilatations passives (simples. nn ES Se BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 183 ont pu être explorés simultanément, etde cette manière la répartition des réflexes vaso-moteurs dans l’orga- nisme a pu être établie : ilse trouve que cette répartition ne trahit pas constamment, tant s'en faut, une compen- salion réciproque entre la circulation superficielle et la circulation profonde ; la formule dite « loi du Balan- cement », par laquelle a été exprimé ce rapport, est trop absolue. À cette question se relie celle de Ja spé- cificité des réactions vaso-motrices des différents nerfs et surfaces sensibles. Les expériences de MM. Hallion et Comte, sur les réflexes vaso-moteurs explorés chez l'homme à l’aide d'un pléthysmographe nouveau, s'y rattachent aussi. i La seconde moitié du volume comprend les travaux relatifs aux autres chapitres de la Physiologie. L'appareil respiraioire a ét6 exploré à l'aide de la méthode graphique et grapho-photographique. Ainsi ont été analysés les mouvements extérieurs de la respi- ration, et spécialement les mouvements du diaphragme, au sujet duquel sont apportés un grand nombre de documents nouveaux. L'auteur étudie ensuite, au point de vue de leur sensibilité propre, des réflexes variés dont elles sont les points de départ, des mouvements dont elles sont le siège, et enfin au point de vue de leur circulation locale, les diverses parties de l'appareil res- piratoire : fosses nasales, larynx, trachée et bronches, pe L'innervation vaso-motrice du poumon a été ‘objet d'une étude particulièrement approfondie et précise, que comportait l'importance du sujet et que justifie la valeur des résultats obtenus. Dans l'appareil oculaire, M. François-Franck a étudié très complètement l'innervation de l'iris; il a établi, entre autres points, l'indépendance des mouvements de la pupille par rapport aux modifications de la cireula- tion intra-oculaire, les fonctions sensitives des nerfs ciliaires, le rôle du ganglion ophtalmique dans l'irido- dilatation réflexe. De l'appareil digestif, il a exploré l'innervation motrice, sensitive et vaso-motrice, dans chacune des portions : région bucco-labiale et langue, œsophage et cardia, estomac, intestin. Dans son laboratoire, MM. Courtade et Guyon ont scrulé avec soin l'innerva- tion motrice et inhibitoire de ce dernier organe Lui- même, avec M. Hallion, a poursuivi l'étude de l’innerva- lion vaso-motrice, mésentérique et intestinale. Sur l'appareil locomoteur, ont porté des expériences . graphiques et grapho-photographiques relatives aux réflexes médullaires, aux réactions motrices d’origine corticale, à lexcitabilité des nerfs moteurs et des muscles (Denis Courtade), aux exercices gymnastiques. Par ses recherches sur la chaleur animale, l'auteur a été conduit à rejeter l'existence de nerfs calori- fiques ou frigorifiques, et celle de « centrés ther- miques » spéciaux, conclusion qui se dégage également des travaux exécutés dans le laboratoire par M. J.-F. Guyon. Des études sur les effets de la réfrigération artificielle, sur la température du cerveau et ses varia- tions fonctionnelles, appartiennent au même chapitre. Les apparerls de sécrétion ont été envisagés à divers points de vue. M. Francois-Franck a étudié, avec M. Hallion, à l'aide d'appareils volumétriques nouveaux, l'innerva- tion vaso-motrice de la glande sous-maxillaire, du pan- créas, du foie, du corps thyroïde, de la rate. Dans son laboratoire, MM. Enriquez et Hallion ont contribué à l'étude de la sécrétine. L'auteur rapporte encore ses recherches sur l’'innervation vaso-motrice du rein, celles de MM. Courtade et Guyon sur la motricité et la sensi- bilité vésicales, celles, enfin, de MM. Carrion et Hallion, - d'une part, de M. R. Quinton, d'autre part, sur la toxi- cité urinaire. Une étude sur l'innervation vaso-motrice des organes génitaux est annexée à la même série. Le chapitre suivant résume les expériences ayant trait aux injections d'eau salee dans les veines, réalisées Il | par M. Hallion, soit avee M. Carrion, soit avec M. Enri- quez, et les recherches de M. Quinton sur l’eau de mer, milieu organique. Ces dernières études sont parmi celles qui ont conduit M. Quinton à cette conclusion générale que « la vie animale, apparue à l'état de cellule dans les mers, à maintenu, à travers toute la série évolutive, les cellules constituant les organismes dans leur milieu marin », et à cette conception égale- ment nouvelle de l'organisme : « Un organisme, si élevé que soit le rang qu'il occupe dans l'échelle animale, est une colonie de cellules marines. » L'ouvrage se termine par une partie relative aux substances toxiques, particulièrement étudiées au point de vue de leurs effets cardio-vasculaires ; ce sont Fatro- pine, le chloral, la digitaline, la strophantine, le chlo- roforme, la cocaïne et la nitrite d'amyle. Un dernier chapitre est consacré à l'exposé des recherches de MM. Enriquez et Hallion sur la toxine diphtérique. D' HALLION, Chef des travaux de Physiologie pathologique à l'Ecole des Hautes-Etudes. 4 Sciences médicales Broca (A.), Professeur agrégé à la Faculte de Méde- cine de Paris. — Leçons cliniques de Chirurgie infantile. 2° série. — 1 vol. gr. in-8° de 584 pages, avec 98 figures dans le texte. (Prix : 10 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1905. Les lecons cliniques faites par des professeurs de talent ont toujours beaucoup de succès auprès du public médical, surtout quand elles ne se perdent pas dans les discussions théoriques, mais qu'elles embrasse détail tous les points pratiques intéressants à connaître. Ce souci des détails utiles a été la raison pour la- quelle fut enlevée en quelques mois une première série de leçons cliniques publiées il y a deux ans à la même librairie; il fera le succès de la deuxième série. L'auteur, en trente-cinq lecons, passe en revue les points principaux de la chirurgie infantile. La syphilis, avec ses localisations osseuses, fait le sujet des cinq premières lecons. La fuberculose osseuse, cette plaie de l'enfance, nous vaut un grand nombre d'excellents chapitres : signes de début du mal de Pott; ostéo- arthrite tuberculeuse sacro-iliaque et sacro-lombaire, coxalgie subaiguë et arthrites non tuberculeuses de la hanche, tuberculose osseuse multiple et infiltrante des nourrissons, etc. D'importantes lecons sont consacrées aux ostéomyélites, à l'ostéomalacie infantile, aux ar- thropathies des hémophiles, etc. M. A. Broca étudie longuement et complètement la question des hernies de l'enfant: après avoir décrit leurs variétés anatomiques et cliniques, les causes de leur étranglement, il nous dit pourquoi et comment il faut les opérer. On lira avec fruit les pages consacrées à l'hyper- trophie ganglionnaire simple, à son diagnostic avec le lymphadénome bénin, le sarcome ganglionnaire, la tuberculose. Les abcès péri-pharyngiens forment le sujet de la trente-deuxième leçon. La trente-troisième traite de la gangrène symétrique des extrémites et contient, sur les engelures graves des enfants, beaucoup de renseignements précieux. ' L'ouvrage se termine par deux questions qui ne sauraient manquer dans un livre de Chirurgie infan- tile : la question de la mastoïdite, la question des appendicites. L'auteur montre que l’appendicite n'est pas une maladie aiguë, mais est, en général, une lésion chronique à épisodes aigus. On trouvera dans le nouveau livre de M. Broca bien des points nouveaux mis au jour, nombre de faits élucidés par l'esprit clair du chirurgien de l'Hôpital des Enfants-Malades. Dr P', DEsFosses. 184 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 25 Avril 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — MM. le duc de Guiche et H. Gilardoni décrivent le principe d'un nouvel embrayage. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. D. Gernez a reconnu que la lumière émise par les cristaux d’anhydride arsénieux se produit au moment de la rupture de ces cristaux; c’est un phénomène de triboluminescence. — M. Ch. Fabry à appliqué au spectre solaire sa méthode de spectroscopie. interférentielle. Cette mé- thode permet l'application facile de la photographie et par suite, l'étude des petites longueurs d'onde, invi- sibles à l'œil. — M. S. Turchini a étudié les variations d'éclat données par un tube de Crookes à l’aide de l'illumination d'un écran fluorescent. L’éclat de l'écran croit avec l'intensité à étincelle équivalente constante ; à intensité constante, il diminue quand la fréquence des interruptions augmente. — M. P. Breuil a examiné au microscope divers échantillons de caoutchouc en coupes minces ou pellicules. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. P. Fliche a constaté que l'Euphor bia latyris se montre, en Lorraine, dans les Jeunes taillis parce que ses graines, conservées dans le sol, recoivent alors la quantité de chaleur nécessaire pour germer; mais que, le taillis atteignant l’âge de quatre ans, les graines, n'ayant plus cette même quan- lité de chaleur, restent à l’état de vie ralentie jusqu'à l'exploitation suivante. M. C. Gerber résume ses recherches sur le diagramme joie des Crucifères. La formule florale est : S (242,). P E (2 + #a). C (2x 2m). — M. M. Molliard, en Ne nt du mycélium stérile de morille obtenu en cultures pures dans un sol contenant des pommes, a obtenu des morilles nor- males avec appareil ascosporé. — M. Ed. Griffon a constaté que, chez les bourgeons, les jeunes rameaux feuillés, les jeunes feuilles, vrilles et entre-nœuds, la respiration est plus forte que l'assimilation avec une faible intensité lumineuse; mais c'est le contraire qui se produit quand la lumière est forte. Séance du 1% Mai 1905. 19 SoreNoEs PHYSIQUES. —- M. P. Langevin montre que la théorie des électrons prévoit, de manière com- plète et pour tous les ordres d’approximation, l'impos- sibilité de mettre en évidence par des mesures statiques le mouvement de translation de la Terre, — M. Mas- cart signale l'enregistrement, au pic du Midi et au parc Saint-Maur, des secousses sismiques du 29 avril. M. Guinchant a observé de nouvelles réactions lumi- nescentes dans la réduction des hypochlorites; la cause de l'émission de la lumière serait la production et la décomposition immédiate de chlorure d'azote. M. E. Mathias, par la mesure expérimentale de la cha- leur de vaporisation apparente de lacide carbonique au delà de la température critique, a démontré l’uni- variance des états saturés en équilibre. — M. A. Pon- sot montre que la formule classique donnant le déga- gement de chaleur dans le déplacement de l'équilibre d'un système capillaire est inexacte, ainsi que les con- séquences qu'on à pu en déduire. — M. E: Rogovski a constaté que la différence de température entre la surface de fils d'argent parcourus par des courants électriques et.celle de l’eau qui les entoure diminue avec le diamètre des fils, avec la température de l’eau ambiante, avec la vitesse du courant d’eau. — M. M. Berthelot a observé qu'aux hautes températures | l'oxygène traverse la paroi d'un tube de silice fondue en proportion plus forte que l'azote; la perméabilité pour l'hydrogène est encore plus considérable, — Le même auteur montre que l'azote et l'hydrogène purs ne se combinent pas à 1.300° dans le tube chaud-froid ; à la même température, AzH° subit une décomposition complète et non réversible. M. A. Ditte a constaté que l’action de Hgl sur l'acide sulfurique pur au delà de 2009, qui conduit à la formation de petites quantités d'iode, doit être attribuée en partie à l'oxygène de l'air, et surtout à la présence de petites quantités de SO“. Dans la liqueur, il se forme un composé de sulfate et d'iodure mercurique. — M. C. Matignon, en chauffant dans un courant de CI et de HCI chargé de vapeurs de SCIE la matière solide obtenue par évaporation de la solution chlorhydrique des oxydes des terres rares, à obtenu facilement les chlorures anhydres des métaux rares. — M, E. Rengade à observé que le césium- ammonium se décompose spontanément, mais très lentement, en amidure et hydrogène. L'amidure s’oblient plus rapidement par action de AzH° sur le métal à 1200; il est décomposable par l’eau en ammo- niaque et hydrate de césium. M. E.-P. Alva- rez à conslaté que l’amidonaphtolsulfonate de soude -1:2:6 en solution à 5 °/, constitue un excellent réactif des sels de potassium neutres. — M. E.-S. Bel- lenoux propose le remplacement du nitrate de soude par le nitrate de chaux comme engrais en Agriculture. — MM.J. Ville et E. Derrien, par l'action de HF dilué sur la méthémoglobine, ont obtenu à l'état cristallisé une combinaison fluorée de ce corps, à spectre carac- téristique. M. F. Battelli et Ml° L. Stern ont trouvé, dans plusieurs tissus, de même que dans le sérum sanguin, une substance ayant les propriétés d'un ferment et présentant le pouvoir de détruire l’anticatalase, en protégeant ainsi la catalase; ils la nomment philocatalase. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Clément à adminis- tré avec succès l'acide formique dans deux cas de tremblements très intenses, qui ont presque entière- ment disparu. — M. St. Leduc a reconnu que la con- traction musculaire à pour conséquence l'élévation de la pression osmotique dans le muscle; elle peut dépas- ser 2,5 atm. Cette élévation est d'autant plus grande que les contractions sont plus prolongées ou plus fortes. — MM. C. Vaney el F. Maignon, étudiant le chimisme des métamorphoses du ver à soie, ont constaté une formation intense d’albumines solubles et de glycogène pendant le filage, et, à partir du moment où la chrysa- lide est formée, une consommation constante de ces substances. — M. G. Fron a observé que le mycélium de morille a besoin, pour son développement, d'une forte alimentation hydrocarbonée (inuline, glucose, amidon); il est moins exigeant sous le rapport des principes minéraux, mais réclame néanmoins des phosphates, azotates et sels de Ca et de Mg. — MM. F: Foureau et L. Gentil communiquent leurs observa= tions sur les régions volcaniques traversées par la Mission saharienne. Séance du 8 Mai 1905. 1° SCIENCES M proposé de déterminer, en Géométrie non euclidienne, tous les couples de surfaces applicables l’une sur l'autre, de manière qu'aux lignes asymptotiques de l’une GOrReSpOnSE un réseau conjugué tracé sur l’autre, — . Ed. Maillet établit l'impossibilité en nombres entiers réels de plusieurs équations indéterminées ATHÉMATIQUES. — M. Alph.‘Demoulin s’ESs{ de la. forme x ya — bz4. — M. G. Rémoundos commu= # * di ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 83 nique quelques résultats auxquels l’a conduit lapplica- tion du théorème fondamental de M. Borel à la théorie des nombres et à celle des fonctions. — M. G. Marié - étudie les oscillations des véhicules de chemin de fer à l'entrée en courbe et à la sortie. Les oscillations de la caisse sur les ressorts en travers se font autour d’un point sensiblement fixe, le centre d'oscillation. — Le P. Colin adresse le résultat de ses travaux géodésiques et magnétiques aux environs de Tananarive. — M. E. — Esclangon présente ses observations de la comète Giacobini 1905 à, faites au grand équatorial de l'Obser- …vatoire de Bordeaux. À 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Duhem cherche à déterminer théoriquement l'hystérésis magnétique pro- …luite par un champ oscillant superposé à un champ constant..— M. G. Urbain a observé, avec la solution neutre du chlorure de gadolinium, dans l’ultra-violet extrème, un spectre d'absorption nouveau. — M. D. — Gernez à constaté que la luminescence qui se produit “ lorsqu'on agite des solutions concentrées du sulfate de “potassium pendant qu'elles cristallissent n’a lieu qu'au moment de la rupture des cristaux déjà formés; c'est donc un cas de triboluminescence. — M. A. Ponsot, “étudiant les phénomènes qui se produisent dans les espaces capillaires, arrive à la conclusion que le volume spécifique de chaque fluide n'est pas le même dans toute son étendue. — MM. André Broca et Turchini ont déterminé la résistance de divers fils métalliques “pour les courants de haute fréquence. Les résultats “présentent avec ceux déduits de la loi de Kelvin des écarts notables, supérieurs aux erreurs d'expérience. — M. Ph.-A. Guye propose un nouveau mode de calcul des poids moléculaires exacts des gaz liquéfiables à partir de leurs densités, qu'il nomme méthode par réduction des éléments critiques. — M. G. Belloc, au cours de recherches sur les gaz occlus dans les aciers, a constaté l’osmose de l'oxygène à travers les tubes de silice fondue aux hautes températures; en même temps, la silice fondue se dévitrifie. — MM. A. Haller et M. Desfontaines signalent de nouveaux cas d’exalta- tion du pouvoir rotatoire de molécules aliphatiques en passant à l'état de composés cycliques : éthers $- “méthyladipiques—-éthers méthylcyclopentanecarboni- ques correspondants. — M. A. Joannis, en faisant réagir le potassammonium sur le bromure de baryum —ammoniacal, à obtenu du bromure de potassium, de l'amidure de baryum et de l'hydrogène. — M. G. Mal- fitano, par l'hydrolyse de solutions diluées de chlo- rure ferrique et filtration sur membrane de collodion, a obtenu des résidus colloïdaux répondant aux formules Re°CI5.n Fe*(OH)5 ou ICI.» Fe’(OH)5. — M. H. Dejust à constaté que l’oxyde de carbone, agissant à la tempéra- “ture ordinaire et à sec sur l'oxyde d'argent. le ramène immédiatement à l’état métallique, avec une élévation de température qui porte la masse vers 130°. Cette réaction peut servir à déceler des traces d'oxyde de “carbone dans l'atmosphère. — M. Roederer, par l'action “de AzIl* sec sur le strontium refroidi à —60°, a obtenu du strontium-ammonium Sr(AzH*)° — M. P. Alvarez, “en faisant réagir l'acide iodhydrique naissant (acide phosphorique + iodure) sur une solution d'acide os- mique, a obtenu un nouvel iodacide osmieux 1°0s.2HI, “qui, dissous, possède une belle couleur vert émeraude. Cette réaction peut servir à caractériser à la fois losmium et les iodures. — M. H. Moïssan, en faisant réagir l’'anhydride carbonique sur l'hydrure de potas- Sium, au delà de 54°, a obtenu l’oxalate de potassium, réalisant ainsi la synthèse complète de l'acide oxalique : 2KH + 200? — K?C°0'+H°.— M. E. Chablay, en faisant réagir les métaux-ammoniums sur les dérivés halogénés du méthane, a obtenu : avec le chlorure de méthyle, du méthane et de la méthylamine; avec le chloroforme et l'iodoforme, du méthane et des traces d'acétylène et d'éthylène. — M. P. Lebeau a fait des constatations identiques avec les mono-chlorures forméniques; il obtient toujours d'une part le carbure, d'autre part lamine primaire correspondante. — M. A. Kling, étudiant l’action des alcalis sur les solutions aqueuses d’acétol, a reconnu que ce dernier se comporte comme un pseudo-acide. — M. C. Marie, par réduction élec- trolytique des acides nitrocinnamiques, à obtenu les acides azoxycinnamiques et aminohydroxycinnamiques correspondants. — M. Eug. Roux à constalé que les amidons artificiels sont saccharifiables par le malt, comme la fécule, en donnant les mêmes produits maltose et dextrines, le maltose étant seulement en plus forte proportion. — MM. A. Trillat et Sauton ont appliqué au lait la méthode de recherche de lammo- niaque basée sur la réaction de l’iodure d'azote. Le lait de vache saine, trait avec propreté, ne doit pas contenir d'ammoniaque. — M.F. Wallerant a constaté l'existence d’une transformation polymorphique par action mécanique dans le mélange cristallisé d’azotate de thallium et d’ammonium. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran signale l'existence, dans le sang normal, de formes plus ou moins modifiées qui peuvent ètre confondues avec des hématozoaires endo-globulaires : hématies vacuolaires, hématies nucléées, hématies moucheté hémato- blastes. Ces causes d'erreur sont relativement faciles à éviter. — MM. M. Doyon et J. Billet ont constaté que, dans l’intoxication chloroformique, c'est le foie qui est lésé à l'exclusion des autres organes, sauf, cependant, du rein. — MM. H. Guillemard et P. Vranceano ont reconnu qu'à l'état physiologique la toxicité alcaloïdique entre pour 20 à 25 °/, dans la toxicité globale de l'urine. — M. Ch. Porcher a observé, chez la chèvre sans mamelles, lors de l'accouchement, une hyperglycémie très accentuée, dont la glucosurie est le signe immé- diat. — MM. C. Vaney et F. Maignon ont étudié l'influence de la sexualité sur la nutrition du Bombyx mori aux dernières périodes de son évolution. — M. N. Bernard montre que certaines Orchidées (Odonto- glossum, Vanda, etc.), connues des horticulteurs pour la difficulté exceptionnelle de leur germination, dépen- dent d'espèces spéciales de champignons endophytes, sans lesquels elles ne peuvent vivre. — M. Ch. Répin pense que les substances utilisées effectivement par la morille pour sa nutrition sont, non les sucres fermen- tescibles, comme l’admet M. Molliard, mais des com- posés du groupe des celluloses. — M. Cayeux, étudiant l'état de conservation des minéraux de la terre arable, a reconnu, dans tous les échantillons : 4° des minéraux inaltérables; 2° des minéraux susceptibles de se dissoudre sans laisser de produits d’altération; 3° des minéraux altérés. ACADEMIE DE MEDECINE Séance du 2 Mai 1905. M. Goldschmidt lit un travail intitulé : Variole et vaccine dans le département du Bas-Rhin pendant le premier tiers du xiIx° siècle. — M. Durante donne lec- ture d'un Mémoire sur les dystrophies osseuses congé- nitales, l'achondroplasie et le rachitisme. Séance du 9 Mai 1905. M. P. Bouchet lit un travail intitulé : Observation et jugement en chirurgie; leur rôle respectif, leur soli- darité, leur synthèse. — M. Couteaud donne lecture d'un Mémoire sur un polype tuberculeux du genou. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 6 Mai 1905. M. J. Krassilshtshik étudie le développement de la Mikroklossia prima; il suit d'abord exactement celui des Coccidies, puis rappelle ensuite celui de certaines Microsporidies. — M. A. Dastre montre qu'il y a dans l'organisme des organes formateurs et des organes des- tructeurs de fibrinogène. — M. Ed. Retterer estime que l'apparition des protovertèbres dans l'embryon des i Mammifères détermine la première métamérie et porte 486 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sur les téguments, les myotomes, les nerfs et les vais- | fois plus dans le foie que dans les centres nerveux, CEM seaux intersegmentaires. D'abord d'apparence uni- forme, le rachis membraneux présente à son tour une succession de disques alternativement sombres et clairs (2° métamérie). Les changements qu'il présente] dans son évolution, sont dus aux transformations d’un seul et même élément conjonctif : d'abord cellule proto- plasmique, puis élément réticulé, ensuite cartilagineux ou fibro-cartilagineux, enfin osseux. — MM. Ch. Achard. L. Gaillard et G. Paisseau ont constaté que les modi- fications cellulaires que provoquent les écarts de con- centration du sang par suite d'injections massives exercent peut-être une influence sur la quantité de l'urine émise, mais ne paraissent pas modilier profon- dément les rapports des divers matériaux de l'urine. — M. L. Marchand a étudié les lésions du cortex sous- jacentes à des épaissements méningés chez certains aliénés chroniques; elles sont très superlicielles, mais étendues. — M. M. Langeron propose l'emploi du lactophénol de Amann pour le montage des Nématodes. — M. G. Billard rappelle que le chlorure de sodium, qui élève la tension superficielle des urines humaines normales, abaisse la tension de celles des Herbivores. — MM. G. Billard el Perrin ont étudié les variations de la tension superficielle des urines au cours de quel- ques maladies : érysipèle, variole,néphrite — M.H. Cris- tiani à reconnu que le tissu parathyroïdien transplanté est susceptible de donner lieu à des greffes persistantes au même titre que le tissu thyroïdien; il présente, en outre, une résistance très remarquable comparati- vement au tissu thyroïdien. — M. F. Battelli et M! L. Stern : La philocatalase et l'anticatalase dans les tissus animaux (voir p. #84). — MM. C. Nicolle et C. Comte montrent que les corps en anneaux décrits par MM. Ser- sent dans le sang des paludéens paraissent être la con- séquence du procédé employé pour étaler le sang. — MM. P. Carnot et P. Amet ont constaté que l'augmen- lation extrêmement considérable de poids provoquée par une série d'intoxications très légères est un phé- nomène général, en partie indépendant de la nature même du poison absorbé. — M. E. Maurel arrive à la conclusion que chaque région et chaque organe ont un zéro physiologique qui leur est propre ; il est susceptible de varier comme leur propre température, et il est inférieur à la température normale de quelques degrés. —- M. A. Frouin signale des travaux de Schemiakine qui confirment ses propres recherches sur la sécrétion du suc gastrique. — M. Pinoy démontre l'existence, chez les Myxamibes, de diastases, notamment de la gélatinase, analogues à celles qu'a trouvées M. Mouton chez les Amibes. — M. A. Borrel à observé, chez des souris cancéreuses, une infection vermineuse et la pré- sence de spirochètes dans les sinus sanguins. — M. F. Lange met en évidence l'existence d’une exo- toxine sécrétée par le bacille typhique vivant. — M. H. Vincent montre que le bacille fusiforme jouit de propriétés pyogènes; mais il emprunte une partie de son activité à son association avec un spirille. — Le mème auteur à reconnu que les stomatites secondaires, particulièrement la stomatite mercurielle, sont dues pour la plupart à des bacilles fusiformes associés à des Spirilles. — M. A. Pi y Suner à observé que les com- posés d’origine catabolique qui sont les facteurs de l’urémie produisent un état d'inhibition dans l'activité sécrétoire des épithéliums rénaux. L'injection de sang urémique est toujours la cause d'un accroissement de la densité urinaire et produit toujours l'apparition d'albumine dans l'urine. — M. Ch. Féré montre que le chatouillement offre des risques, par l'excitation ou par la dépression qu'il produit suivant la dose. RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 2 Mai 1905. M. G. Denigès a étudié la localisation de l'arsenic dans les organes d'animaux ayant subi l'intoxication lente ou aiguë. Il en trouve, en moyenne, trente-cinq qui infirme la loi de Scolosuboff. L'auteur recommande l'emploi de la solution chlorhydrique d'acide hypophos phoreux pour la détermination de l’arsenie en toxico= logie. — M. Ch. Mongour signale un cas de néphrite dans lequel les ædèmes sont d'autant plus accusés et les urines d'autant moins abondantes que la station debout se prolonge davantage.— M.J. Chaine a observé que le digastrique, parallèle à l'axe du corps chez les formes inférieures, devient de plus en plus oblique par rapport à ce dernier axe à mesure que la tête s'incline. — M. Cavalié à reconnu que la substance de l’ivoire des dents décalcifiées est décomposable en feuilles ou lamelles verticales qui rayonnent de la cavité pulpaire vers l'extérieur. Parallèlement, sur des dents normales non décalcitiées, il existe des plans lamellaires verticaux et rayonnants de substance moins dense. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 5 Mai 1905. M. le Vice-Présidentannonce le décès de MM. H. Dufet, président, et le Colonel Renard, membre de la Société. M. Blanc étudie /a résistance au contact de deux mé taux. Le contact étudié était le contact entre deux sur faces d'acier bien polies, et la résistance était mesurée par le dispositif ordinaire du pont de Wheatstone ; on« pouvait faire varier l'intensité du courant qui traversailM le contact. L'établissement du courant provoque une diminution progressive dans le temps et irréversible dem la résistance du contact, qui constitue le phénomène de la cohération; la résis'ance tend vers une limite donnée pour une intensité donnée, et la valeur de cette limite diminue quand l'intensité augmente. En outre, la résistance du contact varie réversiblement en fonc- tion de l'intensité, quand la durée du passage du cou- rant est trop faible pour que la cohération puisse se produire, ou encore quand la cohération est terminée pour les intensités considérées. Si l'on renverse le sens du courant pendant que la cohération s'effectue pro gressivement dans le temps, les premières inversions produisent une chule de résistance très marquée qui s'atténue peu à peu; on à même ensuile une augmen- tation très faible, et tout effet disparait finalement quand j la cohération est terminée. D'autre part, si l’on étudie la résistance du contact en fonction de la pression, on constate que les résultats expérimentaux ne s'accordent | pas avec les conséquences qu'on peut déduire des for mules données par Hertz pour calculer la déformation des surfaces et, par suite, la résistance du contact. On est amené à supposer qu'en outre de la déformations élastique il se produit en chaque point de contact une modification qui diminue la résistance en ce point. Cette modification change surtout les résultats pour les faibles pressions, et la courbe de la résistance descendi d'abord, à mesure que la pression augmente, beaucoup» plus vite que ne l’indiqueraient les formules de Hertzs De plus, la modification dont on est obligé d'admettre l'existence n’est pas instantanée, mais progressive dans le temps; elle est, au moins en partie, irréversible, cam on trouve une résistance plus faible pour la même valeur de la pression quand on fait décroitre la pression après être allé jusqu'à une valeur maxima. Ces ana logies avec la cohération se précisent encore par le fait suivant : si l’on produit la cohération du contact pen= dant qu'on augmente la pression, la résistance, qui diminué brusquement, reste constante pendant u certain temps, pendant que la pression continue à augmenter, et ne se remet à diminuer que lorsque ] pression à subi une augmentation notable. Si lo cohère, au contraire, pendant qu'on diminue la pres sion, la résistance se remet à augmenter, comme ell le fait quand elle n’est pas cohérée, et l’on n'a aucun discontinuité dans la courbe. Les modifications dues à la cohération et à la pression paraissent donc analogues On à examiné au microscope la surface supérieure d'un contact formée d'un couvre-objet de microscope recous ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 187 vert d'une couche d'argent transparente ; la deuxième partie du contact était une sphère d'acier parfaitement “polie; les anneaux produits entre les deux surfaces per- “mettent de mesurer leur distance. On constate qu'avec “une différence de potentiel faible, le courant ne passe L u'au contact optique, et il n'y a pas d’étincelle; on “ne peut produire la cohération qu'à ce moment, et elle Se produit sans qu'on voie ni étincelle, ni fusion. La Surface ne présente aucune modification apparente. Une autre expérience montre que le phénomène est “purement superliciel : on peut faire deux gouttes de Mercure très propres qui se touchent sans se mélanger: Si le mercure contient des traces d'oxyde, les deux méouttes forment un cohéreur et ne se mélangent pas par la cohération, malgré leur fragilité. Tous ces faits ugeèrent un rapprochement entre le phénomène de la cohération et celui de soudure par diffusion des métaux, réalisée sous l’action de la pression dans les expériences e W. Spring. Le courant provoquerait cette diffusion, omme le fait la pression. On peut se rendre compte de cette action du courant et de la cohération par la “théorie cinétique des métaux. — M. H. Buisson pré- sente les résultats de la nouvelle détermination de la Masse du décimètre cube d'eau pure (par la méthode de MM. Macé de Lépinay, Benoît et Buisson). Le pro- blème de la détermination de la masse du décimètre Meuhe d'eau pure est le même que celui de la détermi- ation du rapport du décimètre cube au litre, volume “occupé à 4° par 1 kilog d’eau. La méthode consiste à mesurer un même volume avec les deux unités. Dans le cas actuel, on prend un solide bien défini, un cube, fait d'une matière inaltérable, le quartz, dont le volume e déduira de mesures de longueur. On l'évalue en tres, par la méthode des pesées hydrostatiques. Pour “éviter les erreurs provenant des accidents possibles, on détermine d'abord sa masse M, puis à loisir sa densité relative à l'eau, soit d,. 3 St son volume à 0°, en litres. dimètres d'arête, ont été faites par M. Benoît, au Bureau f hternational des Poids et Mesures. Les dimensions Séométriques ont été mesurées optiquement, suivant l méthode déjà publiée de MM. Macé de Lépinay et Buisson. Par l'emploi de deux phénomènes d'interfé- ences, les franges des lames parallèles épaisses etcelles les lames mixtes, on obtient l'épaisseur de la lame sans ire intervenir son indice ni aucune autre surface rangère. On :nesure les parties fractionnaires des tdres d’interférence, et, par l'emploi de la méthode des excédents fractionnaires, on en détermine les parties entières. Il faut, pour cela, employer plusieurs adiations ; on s'adresse à celles du cadmium, dont les apports des longueurs d'onde sont connus par les esures de MM. Michelson et Benoit. On à d'abord une eur approchée de l'épaisseur par une mesure au hèromètre, qui suffit jusqu'à 4 centimètres, mais qui bit être précisée par des déterminations optiques, pour e lame de 5 centimètres. Tous les appareils sont dis- és dans une cave, bien à l'abri des variations de mpérature. Une mesure dure quelques minutes seu- ent, de sorte que la température du quartz est faitement définie. L'erreur commise sur chaque esure d'épaisseur ne dépasse pas 04,01. La taille des ubes est presque parfaite. Les variations d'épaisseur our un couple de faces ne dépassent pas 0,2 pour le ïbe de 5 centimètres d’arête, de sorte que l'épaisseur byenne s'oblient sans aucune incertitude. De plus, les igles dièdres ne diffèrent pas d'un angle droit de plus à quelques secondes. Les résultats sont les suivants : volume du cube de # centimètres est de 59m1 88842 59cm 88998: celui du cube de 5 centimètres est m1,66033 et 12222 ,66390. On en déduit : 1 —11%% 000026 A1—114m5,000029, soit, pour la masse du décimètre cube deau, 9995,974 et 9995,971. Ce dernier nombre est, d’ail- leurs, provisoire, tous les calculs devant subir une revi- lon définitive. L'écart entre ces deux valeurs est donc de 3 milligrammes etsemble donner une limite de l'erreur possible. Ces nombres se rapportent à l'eau saturée d'air. M. Ch. Ed. Guillaume insiste sur la grande importance du problème traité par MM. Macé de Lépinay, Benoit et Buisson, et auquel il a consacré lui-même plusieurs années de mesures qui viennent d'être achevées. Les expériences de ces dernières années ont montré que la relation entre le kilogramme et le mètre a été réalisée avec une précision admirable et vraiment ines- pérée, circonstance extrêmement heureuse pour l'har- monie des relations métriques et l'expansion future du système. — M. Le Bel rend £ompte de la suite de ses expériences sur l'équilibre thermique’. Les anciens appareils à lames minces d'or recouvertes de sullure de fer et bitume de Judée ont continué, depuis plus d’un an, à donner le même excédent de température (0°,03). L'un d'eux, entouré d'hydrogène et renfermé dans du verre à couverele mastiqué, a été plongé dans la vaseline; l'excédent observé est encore de 09,02, Ces observations sont faites maintenant dans une cave pro- fonde de 20 mètres à température très constante. La nature des voûtes en calcaire parait exercer une influence favorable: au contraire, les matières vitri- fiées, verre, etc., semblent diminuer les chiffres ob- servés. Un bloc de granit entouré d'asbeste à fourni de 09,03 à 0v,04. Le soufre, la barytine et le plâtre de car- rière ont fourni des résultats analogues, mais ces trois matières subissent une certaine altération spontanée qui nécessite une observation de plus d’une année; leur effet, d'abord décroissant, tend vers une constante. L'auteur a étudié ensuite les phénomènes qui se pro- duisent avec des fils métalliques minces, On sait qu'un fil de platine très mince fond dans la flamme d'un bec de Bunsen; on s’expliquait ce fait en admettant que le platine déterminait une combustion plus vive, mais le même fait se reproduit avec une lampe Nernst, qui fond très bien les fils minces et ne réussit pas à fondre un petit cavalier de fil plus épais à cheval sur le fila- ment chaud. En dernier lieu, on peut fondre le fil mince facilement en faisant passer le courant dans un fil plus épais enroulé en spirale. L'auteur se réserve d'étudier l'action des fils minces par des mesures ther- miques directes; il pense que cette étude est néces- saire avant de tirer des conclusionssur les observations ci-dessus. SOCIÈTE CHIMIQUE DE PARIS Séance du 1% Avril 4905. M. Maguery a repris l'étude de l’action des chlorures d'acides sur les xylènes, en présence du chlorure d'aluminium, et de différents réactifs sur les xylylcé- tones. En simplifiant les méthodes employées .précé- demment, il a obtenu l'acétylparaxylène avec un ren- dement de 80 °/,; il bout à 105° sous 12 mm., son oxime fond à 67° el sa semicarbazone à 172. La méthylparaxylylcétone donne avec I.Mg.CH* le dimé- thylparaxvlylcarbinol (CH*)2CH°.COH(CH*),F. 439, Cet alcool tertiaire, déshydraté par l'acide oxalique des- séché, donne l'isopropénylparaxylène (CH*)*C‘H*.C : CH*{CH), bouillant à 189-190 (non cor.) sous 747 mm. Ce carbure fixe 2 atomes de brome et perd ensuite facilement HBr. L'isopropénylparaxylène, traité en solution alcoolique par L et HgO, donne seulement l'iodhydrine correspondante, qui, traitée par AzO*A# en solution alcoolique, donne par transposition molé- culaire (comme l’a montré M. Tiffeneau pour le méthoéthénylphène) une cétone houillant à 131-133° sous 21 mm., dont la semicarbazone fond à 183°. L'auteur continue cette étude. — M G. Darzens com- munique la suite de ses travaux sur la méthode de synthèse des aldéhydes qu'il a précédemment indiquée. — M. L. Lindet a montré l'influence retardatrice que possèdent l’arsenic et ses composés sur la formation de la rouille; on ne trouve dans le commerce ni fer ni acier arsenical, et cette observation ne semblait pas ‘ Voir le compte rendu de la séance du 20 mars 1905. 188 comporter d'applications immédiates. M. Nay de Mézence a pu, grâce à l’obligeance de la Société pari- sienne de cémentation, exploitant les procédés J. Le- carme, faire cémenter superficiellement à l'arsenic une tôle d'acier; ainsi que le montrent les échantillons, l'acier cémenté à l’arsenic a résisté à la rouille, tandis que le témoin, exposé en même temps à l'air humide, s’est recouvert d'oxyde de fer. — M. J. Bougault com- munique les recherches qu'il a effectuées pour la caractérisation de la soude par le réactif de Frémy. — M. Haller présente une note de M. Barthe sur la puri- lication de la pyridine. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 2 Février 1905 (suite). M. R.-C. Maclaurin présente une théorie mathéma- tique de la réflexion de la lumière près de l'angle de polarisation. Les formules qu'il obtient sont appliquées au cas de la réflexion et de la réfraction quand les deux milieux sont le diamant et l'air, et les résultats théoriques sont comparés avec ceux des expériences de Jamin sur le même objet; l'accord est satisfaisant. — M. H.-G. Lyons a étudié les relations entre les varia- tions de la pression atmosphérique dans le nord-est de l'Afrique et les crues du Nil. D'une manière générale, la courbe des crues du Nil varie en raison inverse de la pression barométrique moyenne des mois d'été, de hautes pressions accompagnant les basses eaux, et de faibles pressions les hautes eaux. Ces variations de pression offrent une grande analogie sur de vastes étendues : de Beyrouth à Maurice et du Caire à Hong- Kong, et sont du type « indien » de Sir N. Lockyer ou du type « direct » de Bigelow. Parfois, cependant, la pression à Beyrouth et au Caire est en désaccord avec celle du reste de cette aire, et s'approche du type « Cordoba » de Lockyer ou du type « indirect » de Bigelow. C'est la confirmation d’autres faits qui tendent à montrer que l'Egypte appartient à la classe des « aires exceptionnelles temporaires » de Bruckner. Une pression supérieure ou inférieure à la normale «dans les mois de la saison pluvieuse en Abyssinie coïn- cide toujours avec un défaut ou un excès des chutes de pluie. Dans six années sur sept, on peut prédire très exactement la crue de mois en mois. — M. W.-N. Shaw a recherché la relation entre les pluies d'automne et les rendements en blé de l'année suivante. montre que le rendement en blé d’une année semble dépendre principalement de l’absence de pluie dans l'automne précédent et très peu d'autres facteurs. Pour l’Angle- terre, il a établi l'équation suivante : Rendement —39,5 buschels par acre— 5/4 (chute de pluie de l'automne précédent en pouces). Elle se vérilie assez bien pour une période de vingt et un ans. Séance du 9 Février 1905 (suite). M. J.-A. Fleming présente ses recherches sur la conversion des oscillations électriques en courants continus au moyen d'une soupape à vide. L'auteur à constaté que, lorsqu'une lampe électrique à incandes- cence à filament de carbone contient une paire de fila- ments, où un filament simple et une plaque métallique scellée dans le globe, l’espace vide qui les sépare pos- sède une conductivité unilatérale d'espèce particulière quand le filament de carbone ou l'un des deux filaments est rendu incandescent. Cette conductivité unilatérale existe même avec des courants alternatifs de haute fréquence et estindépendante de la fréquence. L'auteur a cherché à l'employer à la rectiGcation des oscillations électriques et à la mesure de celles-ci dans un galva- nomètre ordinaire, et il y est arrivé par un dispositif convenable. Pour la transformation des oscillations électriques en courant direct, on peut employer avec avantage deux soupapes à vide de ce genre el un galva- nomètre différenciel. — M. J.-A. Fleming : Sur un instrument pour la mesure des oscillations électriques longues et aussi des inductances et capacités faibles ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES } (voir p. 402). — M. A.-M. Field : Sur une aire de per= turbation magnétique locale à East Loch Roag, Lewes (Hébrides). — M. G.-T. Beilby : ?hosphorescence causée par les rayons y et 8 du radium. Voici le résumé des conclusions auxquelles l’auteur est arrivé : 4° Cer= tains types de phosphorescence sont dus au mouves ment ou déplacement moléculaire qui est produit pañ la chaleur, par des tensions mécaniques ou par l'énergie radiante; 2 Certains autres types se distinguent pan leur apparition à trois stades, appelés ici phosphores= cence primaire, secondaire et ravivée. Ceux-ci peuven être expliqués par des changements atomiques dans lesquels l’affinité chimique est le facteur de contrôle; 3° Les phénomènes de ce type semblent montrer qu'une espèce d’électrolyse se produit dans les solides exposés aux rayons $ ou cathodiques; que les produits de l’élec= trolyse sont isolés l'un de l’autre, comme dans un élec trolyte visqueux, et que c'est la destruction de ceb isolement avec la recombinaison des ions qui causes la phosphorescence ravivée. Lorsqu'on expose des cristaux jaune-canari de platinocyanure de baryu aux rayons 6 el y pour quelques heures, ils deviennent rouges, et leur phosphorescence dans les rayons descend à 8°/, de sa valeur originelle. Ni la couleur ni la phosphorescence ne sont restaurées par une exposi= tion au soleil ou à la lumière du jour diffuse. Le seul moyen pour rétablir complètement ces qualités est 10 dissoudre le sel dans l’eau et de le cristalliser. De cette facon, le sel rougi est entièrement reconverti dans là forme jaune, et aucun signe n'indique que la rubéfac= tion ait été associée à quelque changement chimique permanent. On a alors recherché les changements phy= siques possibles. Lorsque la structure cristalline du sel jaune est altérée soit par un écoulement sous pression mécanique, soit par déshydratation par la chaleur, i se produit un changement de couleur très apparent, les jaune-canari faisant place à une couleur rouge brique intense, tandis que la phosphorescence dans les rayon du radium tombe à 27 /, de sa valeur originelle. Par solution et cristallisation, ces formes amorphes repren: nent leur état cristallin jaune avec toute sa valeur phosphorescente. Les effets produits par les rayons 8 sont donc très analogues à ceux produits par le chan gement de l’état cristallin à l’état amorphe. D'après les premières observations de l’auteur sur les changements que le changement G—A produit par l'écoulement sous pression serait renversé, en élevant la tempéra=« ture de la substance jusqu'au point de stabilité de l® phase A. En tenant compte de la difficulté causée pa la présence de l’eau de cristallisation et de sa perte partielle en chauffant le sel, on trouve que le chan gement A—>C se produit dans le sel qui coule mé | caniquement à une température d'environ 90°, Ka couleur étant ainsi changée du rouge au jaune et | phosphorescence élevée de 2 0/4 à 33 0/, de sa valeum originelle. L'auteur à trouvé aussi que les cristau rougis parlesrayonsBpeuventêtre partiellement rétablis dans leur première condition de couleur et de phospho rescence en les chauffant rapidement dans un tube capillaire scellé à environ 120, Par ce traitement, là phosphorescence est élevée de 8 °/, à 33 °/, de St valeur primitive dans les cristaux jaunes. L'analogien entre les changements de phase causés par l'écoulement sous pression et le changement qui résulte de l’exposi tion aux rayons 6 est ainsi complète; on en conclut qué la surstimulation à laquelle les molécules vibrantes des cristaux de platinocyanure sont soumises sous l’action des rayons $ pendant la période préliminaire de phos phorescence brillante conduit à un état analogue à celui de la fatigue élastique dans les fils métalliques ow les fibres de verre vibrants. Jusqu'à un certain point cette fatigue peut être annulée lorsque le déplacement relatif des molécules de leurs relations cristallines\ propres n'a pas dépassé un certain point; mais, au de de ce point, il n'y à pas d’auto-restauration, et l'emplo de la chaleur est nécessaire pour donner aux molé- cules la liberté de mouvement suffisante pour les rendre capables de retourner à leurs positions cristal- ines. Le degré final de fatigue permanente ou de sur- “iension dans le sel correspond à la condition amorphe “résultant d'un écoulement produit mécaniquement. L'instabilité comparative de la structure cristalline de “ce sel a permis de diriger l’attention sur la part qui peut être jouée par la structure physique dans la phos- phorescence. Mais la persistance de la phosphores- Lcence, mème dans l'état amorphe, indique clairement mquil est nécessaire de donner une explication plus uénérale de ces phénomènes. Cette nouvelle explication a été obtenue par l'étude de l'action des rayons $ et y “sur le quartz, le verre, le spath calcaire et les sels aloïdes de potassium. Dans ces substances, en plus d'une phosphorescence primitive, les rayons produisent certains effets de coloration bien distincts : le quartz devient brun, le spath calcaire jaune päle, le verre rouge ou brun, le chlorure de potassium rouge-violet et le bromure et l’iodure bleus à verts. De plus, que la colo- ration dure pendant des mois, ou seulement pendant quelques instants, on découvre que la phosphorescence est ravivée lorsqu'on chauffe la substance, tandis que la “couleur pälit ou disparait. Dans le quartz, le verre etle path calcaire, il est facile de localiser le siège de la phosphorescence dans les couches qui ont été pénétrées met colorées par les rayons. Cette pénétration peut atteindre la profondeur de plusieurs millimètres, et, dans les substances comme le quartz, le verre ou le 12 calcaire, il est certain que, quels que soient les changements qui se produisent dans ces couches, ils Mioivent être de nature chimique et tout à fait soustraits aux influences atmosphériques. Toutefois, l'hypothèse “qui consiste à croire que la coloration est due à la réduction de l’un des éléments de la substance, le potas- “sium dans le verre, par exemple, apporte seulement “une explication partielle du phénomène. 11 est néces- “saire de supposer que la séparation et la rétention des “ions métalliques doivent également comprendre la “séparation et la rétention des ions du radical acide vec lequel le métal était combiné. De plus, pour que es différents ions puissent être maintenus séparés, les olécules non altérées doivent agir comme des bar- rières ou des isolateurs pour prévenir leur recombi- ison. Mais les molécules ne sont pas toujours des l es immuables, car, lorsque la température est élevée, leur mobilité s'accroit, et leur pouvoir isolant iminue d'une façon correspondante. Des expériences ) ont été faites sur la conservation du pouvoir phospho- rescent latent à toutes les températures entre —100° et [3 300°. Tandis que, pour chaque substance, il y a un degré de température au-dessous duquel sa capacité de conservation est au maximum, l'intervalle dans lequel conservation peut se produire est quelquefois très étendu. Pour le spath calcaire, la conservation se pro- duit sur toute l'étendue de température étudiée, tan- dis que, pour le platinocyanure de baryum cristallisé, elle est seulement observée entre les températures de 1000 et —50°. Séance du 16 Février 1905. M. B. Hopkinson : Les eflets des tensions momen- fanées dans les métaux. Si lon suspend un fil métal- que à un support solide et massif, et si un poids en ombant le frappe en un point de son extrémité infé- eure, avec une vitesse V, on calcule facilement la sion en un point quelconque du fil et à n'importe quel moment subséquent, si le fil était parfaitement élastique. Lorsque le poids frappe, une vague d’exten- on s'élève dans le fil et avance avec une rapidité —VE/p, représentant le module de Young, et p la densité. Pour l'acier, a est d'environ 17.000 pieds par seconde. Lorsque l’ondulation atteint l'extrémité supé- mieure, elle se réfléchit le long du fil. Voici ce qui se passe en un point du fil: lorsque l'ondulation l’atteint, TS nent ue HE LA ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 489 la déformation, qui était nulle, devient subitement V, x; elle diminue ensuite, lorsque l’'ondulation s’en éloigne, d’après une loi exponentielle, jusqu'à ce que l'ondula- lation réfléchie l’atteigne; à ce moment, elle augmente encore Jusqu'à V/a. Par conséquent, chaque parcelle du fil métallique est soumise à une tension qui croît subitement et diminue très rapidement ensuite. La déformation maximum pour un moment ou un point quelconque se produit à l'extrémité supérieure du fil, où elle est de 2V/4 au moment où l’ondulation arrive à ce point. Pour une hauteur de chute de 10 pieds et un fil de fer, 2V/a est égal à 0,003, et la tension corres- pondante est d'environ #2 tonnes par pouce carré, de sorte que, de cette facon, on peut produire des déforma- tions momentanées dépassant largement la limite élas- tique. Dans les expériences décrites dans le Mémoire, l'extension momentanée à 20 pouces de l'extrémité supérieure du fil, produite par un coup, a été mesurée électriquement, et comparée à celle donnée par la théorie élastique. Quand les deux valeurs s'accordent et qu'il ne persiste qu'unefaible extension permanente, il s'ensuit que la théorie s'applique bien et que la substance est essentiellement élastique jusqu'à la déformation maximum ainsi calculée, si elle est appli - quée pour le temps indiqué par la théorie. De cette manière, on prouve qu'un fil métallique supportera un poids, supérieur momentanément à celui qui (supporté d'une facon constante) le briserait, avec seulement une très petite extension permanente. Pour le cas du fil de fer, la limite élastique est de 17,8 tonnes par pouce carré, et la tension de rupture de 28,5 tonnes, et on à trouvé qu'un poids atteignant 33,5 tonnes et excédant la limite élastique pendant 41/1000 de seconde produit une très faible extension permanente. Des résultats semblables ont été obtenus avec les fils de cuivre. — M. W. Rosenhain indique une nouvelle méthode pour étudier la micro-structure des métaux. Pour examiner directement une pièce de métal sur laquelle on a produit des bandes de glissement, il faut s'adresser à une section transversale, à condition que la section soil produile avec une tranche absolument nette; mais on n'obtient aucun résultat utile en coupant simplement le spécimen et en polissant la section. Les bords des spécimens préparés par les méthodes usuelles de polis- sage sont généralement arrondis et il devient impos- sible de mettre au point sur un bord défini avec les lentilles de grande puissance. L'auteur a donc adopté le principe de soutenir la surface qui, dans la section, devient le bord, au moyen d'une couche adhérente de matière dure; pour cela, ilemploie un dépôt d'un autre métal obtenu électrolytiquement. Les échantillons em- ployés consistent en bandes d'acier doux sur lesquels on applique un dépôt électrolytique de cuivre après avoir produit les bandes de glissement. Puis les spéci- mens sont coupés transversalement; pour obtenir un poli satisfaisant, on a dù renoncer au rouge, qui produit une rainure entre le fer et le cuivre, et adopter l'oxyde calciné de magnésie. Après Le dernier polissage, on attaque légèrement à l'acide picrique. Les échan- tillons ainsi traités, sur lesquels on à produit des bandes de glissement par une déformation, montrent alors sur la ligne de séparation des gradins ou dents de scie bien marqués, que l’auteur considère comme la section des bandes de glissement. Quoique petits, ils sont très distincts et possèdent un caractère géométrique; M. Rosenhain conclut qu'ils sont causés par le glis- sement sur des surfaces de clivage des cristaux. — M. Charles G. Barkla : La radiation Hôntqgen pola- risee. Des expériences sur la radiation secondaire des gaz et des solides légers soumis aux rayons X ont con- duit à la théorie que, pendant le passage de la radiation Rôüntgen à travers de telles substances, chaque électron a son mouvement accéléré par les champs électriques intenses dans les pulsations primaires, et devient, par conséquent, l’origine d'une radiation secondaire, qui est plus intense dans la direction perpendiculaire à celle de l'accélération de l’électron et disparaît dans la 490 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES direction de cette accélération. La direction de l'in- tensité électrique en un point dans une pulsation secondaire est perpendiculaire à la ligne réunissant ce point el l'origine de la pulsation, et se trouve dans le plan qui passe par la direction de Paccélération de l'électron. Un faisceau secondaire dont la direction de propagation est perpendiculaire à celle du primaire, d'après celte théorie, sera polarisé dans un plan, la direction de l'intensité électrique étant parallèle au front de la pulsation dans le rayon primaire. Si le rayon primaire est dans un plan polarisé, la radiation secon- daire des électrons à une intensité maximum dans une direction perpendiculaire à celle du déplacement élec- trique dans Île rayon primaire et une intensilé nulle dans la direction du déplacement électrique. Dans ces expériences, la radiation secondaire des substances légères était trop faible pour permettre cle mesurer avec exactitude lintensité de la radiation tertiaire. Une considération de la méthode de production des rayons Rüntgen primaires dans un tube à rayons X fait cependant supposer une polarisation partielle du rayon primaire procédant de lanticathode dans une direction perpendiculaire à celle de la propagation des rayons cathodiques incidents, car il y a probablement à l’anticathode une‘plus grande accélération le long de la ligne de propagation des rayons cathodiques que dans une direclüon à angle droit; par conséquent, dans un faisceau de rayons X, s'avancant dans une direction perpendiculaire à celle du courant cathodique, il y au- rait une intensité électrique plus grande parallèlement au courant que dansune direction à angle droit. En em- ployant un Lel faisceau comme radiation primaire, et une substance légère, telle que l'air, le papier ou l'alu- minium comme radiateur, on a trouvé que l'intensité d'un faisceau secondaire indiquée par un électroscope atteint le maximum lorsque la direction jdu courant cathodique est perpendiculaire à celle de propagation du faisceau secondaire, et le minimum lorsque les deux sont parallèles. Un certain nombre d'expériences ont rendu cette preuve de polarisation partielle con- cluante. Lorsqu'on à employé comme radiateurs des mélaux plus lourds, tels que le cuivre, létain et le plomb, qui émettent une radiation secondaire différant sensiblement de la primaire qui l'a produite, on n'ob- serve aucune variation dans l'intensité de la radiation secondaire lorsqu'on tourne le tube, quoique des expé- riences aient été faites avec des radiations primaires variant considérablement en pouvoir pénétrant. Séance du 23 Février 1905. M. F. W. Edridge-Green : leux cas de vision lri- chromique. Lauteur à observé deux cas très remar- quables de vision trichromique présentés par deux savants anglais. L'un, le Professeur J. J. Thomson, voit seulement trois couleurs dans le spectre brillant rouge, vert et violet. Il ne peut distinguer la nature du jaune pur, telle que la sensation donnée par la flamme du sodium dans le spectre. Pour lui, il n’y à pas de cou- leur définie à la partie du spectre où les gens à vue normale voient du bleu pur. Il voit en vert rougeûtre les régions orange et jaune et en gris violet les bleues; À 5950 (orange-jaune) est le point qui diffère le plus du rouge et du vert. Il n'y a pas eu de raccourcissement d'une des extrémités du spectre. L'auteur à ensuite soumis M. J. J. Thomson à une série d'épreuves vi- suelles. Avec son appareil pour déterminer la dimen- sion des différen'es parties monochromatiques du spectre, il a trouvé qu'il ne distingue pas les diffé- rences de teintes. En l’éprouvant avec un appareil de Raleigh pour obtenir du jaune spectral par un mélange de rouge et de vert, la couleur du mélange qui semble jaune à M. Thomson a toujours paru verte à l'auteur. On à choisi ensuite diverses couleurs pour des essais de classification. Lorsqu'on lui a demandé de prendre tous les jaunes, le Professeur Thomson a choisi ceux qui avaient de l'orange. Il à eu beaucoup de peine pour assortir les couleurs. De même que dans les cas obser- . | ont obtenu une imine, K. 126, qui est résolue quant vés précédemment, les effets de contraste simultané élaient beaucoup plus marqués que dans la vue nos male. Pour lui, deux laines ont changé de couleur & étant mises en contraste, tandis que l’auteur ne cons= latait aucun changement. Dans des essais sur des lan ternes colorées, le Professeur J. J. Thomson nomm correctement le vert et le violet avec et sans les verres neutres, et il les a vus à la distance normale, Il a ew une certaine difficulté pour le jaune et le bleu. Ile désigné le « jaune pur » par « jaune verdâtre ». L'autra cas est celui de M. P. S. Barlow, étudiant au Labor toire Cavendish, et il est semblable à bien des égards au cas précédent. L'auteur emploie le terme trichro= mique pour établir le fait que les personnes ayant cette vision voient seulement trois couleurs dans le spectre brillant, tandis que la vue normale en distingue six eh peut, par conséquent, être désignée par hexachromique Il est probable que l'apparence du spectre brillant au trichromiques est très semblable à celle du spectre de faible luminosité aux personnes à vue normale, les quelles n'apercoivent alors que trois couleurs : rouges vertet violèt. La perception défectueuse des différences! que l'on trouve dans ces cas rend compte de la plupart des faits. Ces deux cas approchent de la vision tétras chromique, lorsque la flamme du sodium parait don ner naissance à une sensation distincte. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 1% Avril 1905. M. R. J. Sowter communique ses recherches su les lentilles ellipsoïdales. Il donne une solution simplè des deux problèmes suivants : Déterminer le pinceau astigmatique après réfraction d’un pinceau astigma tique par une lentille ellipsoïdale; trouver la lentille ellipsoïdale équivalente à deux lentilles cylindriques placées à une distance définie et dont les axes sonb inclinés d'un certain angle. — M. W. Watson éludie la détermination du moment d'inertie des aimants employés pour la mesure de la composante horizontale du champ terrestre. Il pense qu'on obtiendrait des ré sultats plus uniformes et plus comparables en déten minant une fois pour toutes, avee grand soin, 18 moment d'inertie d'un barreau type el en déterminant le moment d'inertie des barreaux des divers magnéto inètres par comparaison expérimentale avec le barreal type. Le moment d'inertie augmente d'environ 0,1 04 pour une augmentation de pression atmosphérique de 16 centimètres. — M. W. Watson exécute enfin uns série d'expériences de cours illustrant les propriétés des ions gazeux produits par le radium el d'autres sources. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 6 Avril 1905. M. Ch. Ed. Fawsitt à constaté que la diméthyleanb mnide se décompose par chauffage avec les acides dam les sels d'ammonium el de méthylamine correspons dants:; le mécanisme du changement correspond à un réaction du 1% ordre, ayant une vitesse six fois plus erande que celle de la décomposition de la carbamide —_ M. M. O. Forster et Mile H. M. Judd, en faisül réagir l'iodure d'éthylmagnésium sur l’'a-cyanocamphrè lätivement par les acides en acétylcamphre et ammo uiaque. — M. H. A. D.Jowett a préparé les substances suivantes : 4:3-diméthylglyoxaline, Eb. 165° sous | 10 mm.; 1 :4:5-triméthylglyoxaline, F. 46°; 2-bromo | 1:4:5-triméthylglyoxaline, F. 83°; bromométhylhep | tylcétone, Eb. 122°sous 15 mm. — M. F. P. Leach, |) l'action de KCAz sur les nitrosochlorures de limonèn a obtenu deux nitrosocyanures isomères; le dérivé cristallise en prismes, E. 909-91°; le dérivé & en aiguilles K.1400-141°, — MM. H. Jackson et D. Northall-Laur | ont étudié l’action de CO sur AzH* lorsqu'on les chau en présence de platine ou qu'on les soumet à des étin- celles électriques ou des décharges de haute fréquence. La principale réaction est la formation de cyanate ….d'ammonium, qui se transforme rapidement en carba- “mide. L'hydrogène dégagé réagit en partie pour former le l’eau, qui concourt à la production de carbonate d'ammonium. — M. J. S.S. Brame, en faisant réagir lacétylène sur des solutions chlorhydriques diluées de chlorure mercurique, à obtenu une substance cristalline de constitution CICH : CH.HgCI, identique à celle qu'a déjà décrite Biginelli. L'action des alcalis sur ce composé fournit un acétylure 3C*4g.H°0. — M. D. Mc Intosh à préparé à basse température des composés cristallisés du chlore avec les alcools méthylique et éthylique : CH*OCI, F. — 96°; C*H°OCI, F.— 88°. Le dérivé CH*#OBr fond à — 53°. On obtient des dérivés analogues avec les éthers-oxydes et lacétone. — M. N. V. Sidgwick explique la réac- 5 É des cyanures métalliques avec les halogénures à organiques par la formation d'un composé d'addi- tion intermédiaire. M. A. Slator a éludié la réaction entre le thiosulfate de sodium et les acétates halogénés organiques. C'est une réaction bimolé- culaire, liée à la présence du ion S?0*"'; la vitesse de réaction est proportionnelle à la concentration de te ion. — MM. A. E. Dixon el J. Hawthorne ont fait réagir le thiocyanate d'acétyle sur l’aniline à des tem- pératures diverses en présence d’un solvant inerte. Le thiocyanate réagit tantôt comme acide thiocyanique, en donnant du thiocyanate d'aniline C°H*AzH*.HSCAz, “ut comme thiocarbimide, en formant de l’acétyl-phé- nylthiocarbamide CH*CO.AzH CS.AzHC'H5. — M. J. Y. fi Buchanan décrit une méthode pour déterminer le poids spécifique des sels solubles par déplacement “(lans leur propre eau-mère. En l’appliquant aux halo- “génures alcalins, il a obtenu vers 23° les résultats sui- vants : KCI, 1,951; KBr, 2,679; KI, 3,043; RbCI, 2,706; _RbBr, 3,210; Rbl, 3,428: CsCI, 3,982; CsBr, 4,455; “CSI, 4,508. — M. S. Ruhemann poursuit l'étude de la combinaison des mercaptans avec les composés céto- niques non saturés. — M. J. T. Nance, en chaullant de la poudre de magnésium avec du charbon de bois pulvérisé, a obtenu un résidu jaunâtre qui, traité par HCI dilué, donne un gaz contenant de l'hydrogène et de l’acétylène; il s’est formé probablement un carbure mMoC°. — M. F.S. Kipping met en évidence l'existence “ue formes isomères c1s et trans des acides d-bromo et d-chloro-camphosulfoniques; il existe de même des formes normale et iso de l’«-bromo et de l’a-chloro- camphre. — MM. F. S. Kipping et A. E. Hunter montrent que la /-phényléth\lamine paraît subir une racémisalion pendant la préparation de son dérivé benzoylé. — MM. Al. Findlay et W. E. S. Turner ont “déterminé les valeurs de la constante de saponification en solution aqueuse de divers phénylacétates, mandé- lates et phénylméthoxyacétates. Les résultats montrent que le groupe méthoxyle à une grande influence accé- lératrice sur la vitesse de saponificalion, qui peut être q 3 2. quintuplée. Le remplacement de l’'H de l’hydroxyle par un alkyle diminue la vitesse de saponification propor- tionnellement à la masse du groupe alkyle. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 3 Mars 190ÿ. — M. J. Grossmann propose une nouvelle méthode pour l'essai de l'indigo. Elle repose sur ce fait que les impuretés de l'indiso naturel ne sont solubles qu'aussi “longtemps que la solution est acide. Si la solution est neutralisée par le carbonate de calcium pur, les impu- -retés sont entrainées avec le précipité de sulfate de calcium et la solution filtrée peut être titrée par le per- manganate de la facon ordinaire. 7? ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SECTION DE NEW-YORK Séance du 20 Janvier 1905. M. A.-A. Clafiin décrit un procédé de tannage rapide pour le.cuir destiné à la fabrication des semelles, qui donne du cuir de bonne qualité moyenne en vingt-cinq à trente jours. On y arrive par l'emploi d'appareils mécaniques. Séance du 24 Février 1905. MM. C. Richardson et C.-N. Forrest ont constaté que le tétrachlorure de carbone est un bon solvant pour déterminer le caractère des bitumes. Il doit être employé à une température inférieure à 25° et doit être exempt de sulfure de carbone. Séance du 2% Mars 1905. M. N.-J. Lane a déterminé les constantes de l'huile de graines de plaqueminier : d—0,92437; F.—— (6°; indice d’iode, 114-116. C’est une huile semi-siccative, de couleur jaune-brun, ne contenant pas d'acide ara- chidique. SECTION D ÉCOSSE Séance du T Mars 1905. M. J.-S. Mac Arthur fait l'historique du procédé d'extraction de l’or par la cyanuration. Il y aurait lieu de chercher des améliorations dans les directions sui- vantes : abaissement du prix du eyanure de potassium, augmentation de rendement du procédé, récupération du cyanure. SECTION DE LIVERPOOL Séance du 8 Mars 1905. M. E. Carey montre qu'en brülant la poussière de charbon, on obtient une meilleure évaporation d’eau par kilog de combustible qu'en brûlant la houille ordi- naire non réduite en poussière. La poussière doit être desséchée au moyen d'air porté à 1200. Le brûleur consisie en une trémie continuellement agitée, de laquelle la poussière est projetée dans le foyer par un balai qui tourne à raison de 800 à 1.000 tours par minute. Ce combustible produit peu de goudron et de fumée. Séance du 12 Avril 1905. M. M. Muspratt étudie l'industrie actuelle de la distillation du bois et montre que ses deux conditions de succès sont : 1° Bois à bon marché; 2° Débouchés pour le charbon de bois. C'est aux Etats-Unis et au Canada qu’elle est le plus développée. L'auteur donne le calcul des prix de revient dans divers pays. SECTION DE LONDRES Séance du 6 Mars 1905. M. H.-E. Armstrong communique, sous le nom de mécanique du feu, le résumé de ses recherches sur la combustion de l'hydrogène, des hydrocarbures, de l'oxyde de carbone et du carbone, qui ont déjà été signalées dans cette Æevue. SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 22 Mars 1905. M. J. White communique quelques réflexions sur les méthodes types d'analyses, recommandées généra- ralement par des Associations officielles, mais que chaque chimiste à la liberté d'adopter, de :odifier ou d'améliorer. Il s’est produit à l’origine un mouvement d'opposition contre ces méthodes, mais elles se répan- dent aujourd'hui de plus en plus. — M. S F. Burford montre que, depuis que la méthode de Leffman-Beam pour la détermination des graisses du lait devient d'un usage courant, il y a lieu d'examiner l’alcool amylique employé à cette réaction. Il a, en effet, trouvé dans le commerce des alcools amyliques anormaux [qui don- nentune quantité de graisse bien supérieure à la réalité. 492 — M. T. A. Gérard à déterminé la composition de divers savons pour le dégraissage des textiles. Quelques- uns contiennent des quantités non négligeables de graisse libre (jusqu'à 2,7 °/,), qui est sans utilité; il y aurait lieu de spécitier un maximum de 0,6 °/,. SECTION DU YORKSHIRE 20 Mars 1905. MM. W. M. Gardner et L. L. Lloyd communiquent leurs recherches sur l'adoucissement des eaux. Dans la plupart des cas, il suffit d'enlever la dureté temporaire par réaction avec la chaux; lorsqu'on veut faire dispa- raître la dureté permanente, il faut un autre traitement à la soude. L’hydrate de baryte serait un excellent adoucissant, mais son prix élevé {ne permet guère de l’employer que dans des cas restreints. — MM.B. North et W. Blakey proposent une nouvelle méthode pour l'établissement de solutions types d'acide sulfurique ; elle repose sur l'emploi de bicarbonate de soude pur et sec. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 17 Mars 1905. M. E. Take a étudié les points de transformation des bronzes aluminium-manganèse de Heussler. Ce savant, on se le rappelle, vient de préparer, avec des composants très peu magnétisables, des alliages d’une susceptibilité magnétique fort élevée, dont la valeur maxima est environ un tiers de celle du fer le meilleur au point de vue magnétique. À teneur d'aluminium croissante, la susceptibilité s'est trouvée augmenter, atteignant un maximum pour une proportion atomique du manganèse à l'aluminium égale à l'unité, après quoi elle se remet à décroitre lentement. Or, on comprend l'intérêt qu'il y aurait à étudier les phénomènes de transformation de ces alliages, c’est-à-dire les températures auxquelles se produit une diminution subite ou une perte complète de la nature ferromagnétique de ces corps, aussi bien que les points caractérisés par le passage d’une ligne limite entre deux phases. L'auteur a étudié à ce point de vue une série de sept alliages de Heussler, par des méthodes balistique et dilatométrique, à l'état artificiel- lement vieilli: Les phénomènes constatés sont repré- sentés par des graphiques et discutés en détail dans le mémoire de M. Take; les températures de transfor- malionu ne sont pas le plus souvent d’une constance absolue, mais changent de position pour des cycles réitérés. — M. F. Kleint présente un Mémoire sur le frottement intérieur des mélanges binaires de l'hydro- gène, de l’oxygène et de l'azote. Voici les principaux résultats trouvés par l’auteur : Des additions faibles d'oxygène ou d'azote augmentent considérablement le coefficient de frottement de l'hydrogène, tandis que ce dernier gaz ne modifie que très peu les coeflicients de l'oxygène ou de l'azote. Le frottement des mélanges étudiés est parfaitement exprimé par la formule de Sutherland dans l'intervalle de température de 0° à 1839. Les constantes de cohésion s'obtiennent approximati- vement par la règle des mélanges en partant de celles des gaz purs. La formule de Puluj n’est admissible qu'à titre d’approximation, l'accord étant le meilleur dans les cas où les coefficients de frottement ne diffèrent pas trop les uns des autres. La formule de Thiessens repré- sente, d'autre part, très bien les résultats des observa- tions. — MM. H. Stelzner et J. Niederschülte étudient les pressions de vapeur et plus particulièrement celles des corps solides. Les courbes obtenues par les auteurs ressemblent à celles relatives aux liquides, montrant toutes une allure exponentielle. Les pressions de vapeur ne sont pas régies non plus par la loi de Dalton dans le cas des corps solides, c’est-à-dire que les courbes caractéristiques de différentes substances ne sont point parallèles. Dans les sels halogènes du mercure, la pres- sion de vapeur est d'autant plus petite que le poids moléculaire est plus grand. — MM. J. Precht el Seance du ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES C. Olsuki communiquent une note sur le rayonnement du peroxyde d'hydrogène, note où ils tâächent de réfuter les objections de M. Graetz formulées à propos d'un autre récent travail des mêmes auteurs. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 30 Mars 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. L. Weinek : Sur la théorie des horloges solaires. — M. K. Zahradnik : Sur une relation cubique birationnelle et son application. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. N. Stücker a déterminé, par la méthode des mélanges, au moyen d'un four électrique et d'un thermo-élément platine-platine- rhodium, les chaleurs spéciliques du fer, du molybdène;, du manganèse, du magnésium, du bismuth et du plomb jusqu'à des températures de 6250. — MM. F. Streintz et ©. Strohschneider étudient le rayonnement des métaux Mg, Al, Zn et Cd, qui peut être mis en évidence par impression sur une feuille imbibée de KI ou sun une plaque photographique. De l'épaisseur des images produites par les métaux, on déduit une série d’inten= sités qui concorde avec la série des tensions électri ques des métaux. Les auteurs admettent l'existence d'un rayonnement métallique. — MM. R. Wegschei- der et H. Walter ont déterminé les densités des solu= tions de carbonate de soude et de soude caustique entre 60 et 80° C. Ces densités peuvent être représentées par une formule concordant assez bien avec les résul= tats obtenus. — M. R. Wegscheider donne des for mules d'interpolation permettant de calculer les cha= leurs infinitésimales de solution et de dilution, si importantes pour l'étude thermodynamique des équis libres hétérogènes et inaccessibles à la détermination expérimentale directe. Quelques applications sont faites ‘aux sels Na°CO*,KCIO“,NaAzO'. — M. F. von. Lerch à observé que le Th X n’est précipité par les! métaux ou par électrolyse que de ses solutions alcas lines. En solution acide, il ne se précipite que l’activité. induite. L'activité qui diminue de moitié en une heure est un produit de décomposition de l'induction thorique ordinaire, qui diminue de moilié en 10,6 heures. = M. K. Auer von Welsbach montre que l'ytterbium se compose en réalité de deux éléments qu'il a séparés à l'état pur par des méthodes appropriées. Leurs spectres d’étincelles ajoutés reproduisent le spectre de lytters bium. Les sels de ces deux éléments sont incolores eb n'offrent pas d'absorption dans le spectre visible. Par contre, leur présence provoque une modification coms plète du spectre de l’erbium.— M. J. Munk, en faisant, agir H?S0* dilué sur le glycol provenant de la réduction du propionaldol, a obtenu un hydrocarbure éthylénique C“H#°,Eb. 69, de l’isopropyl-éthylcétone et un oxydë double C®H#0?,Eb. 214°. — M. A. Wassmuth commus nique ses recherches sur l'analyse du sérum sanguli par la mesure de la conductibilité électrique à l'étab normal et dilué. 3° SorENCES NATURELLES. — M. V. Grafe a étudié les échanges respiratoires de la levure desséchée et chauffée à diverses températures. Jusqu'à 50°, l’activité respiras toire et fermentative va en augmentant, puis elle va em diminuant graduellement jusqu'à 440°. De 410 à 1309, plus grande partie de la zymase devient inactive ebll vie est détruite, car il n'y à plus multiplication des cels lules; cependant, il y a encore absorption d’O et déga gement de CO*; ces phénomènes d’oxydation qui ne sont plus liés à la vie de l'organisme sont appelés pal l'auteur « oxydation morte ». Vers 190, l'oxydation morte diminue rapidement pour disparaitre complète ment entre 200° et 205°. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. rs 16° ANNÉE NET 15 JUIN 1905 Revue générale des NCréncCe pures et appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Art de l'Ingénieur Les explosions de chaudières et le rem- placement des moteurs à vapeur par les moteurs à combustion interne. — Les explo- - sions de chaudières viennent d’être, dans le dernier numéro des Annales des Mines, l'objet d’un Rapport des plus intéressants de M. Walckenaer, intitulé Aevue périodique des accidents d'appareils à vapeur, et qui traite des accidents survenus aux locomotives et aux locomobiles batteuses. - Les locomotives, bien qu'elles aient fait un peu trop parler d'elles dans ces derniers temps, sont compara- tivement inoffensives. Leurs explosions n’occasionnent guère plus d'une mort par 30.000 locomotives en usage et par an; mais il n’en est pas de même des /ocomo- biles batteuses, dont le danger est au moins six fois plus grand. 11 n’y a pas à s’en étonner, si l’on songe à . l'ignorance et à l’incurie du personnel qui conduit la plupart de ces machines, souvent, d'ailleurs, très an- ciennes et déplorablement entretenues. Les conclu- - sions de M. Walckenaer à ce sujet sont formelles et méritent d'être reproduites in extenso, parce qu'elles “indiquent, à côté de ce mal, un moyen simple, et peut- “être unique, d'y remédier, par l'emploi de moteurs à essence et à pétrole, pratiquement inexplosibles : « C’est, dit M. Walckenaer, l'entretien et les condi- “tions d'emploi qu'il importerait surtout de réformer. On n'est plus là sur le domaine du constructeur. Men- tionnons cependant que celui-ci, pour réduire la fré- quence des excès de pression, ferait bien de substituer à la vieille soupape de sûreté, chargée par l'intermé- “diaire d’un levier facile à surcharger ou à caler, un Lype bien choisi de soupape à grande levée, pressée “directement par un ressort à l'abri du déréglage. Il est utile aussi, contre l'éventualité des manques d'eau, que des plombs fusibles soient disposés au ciel des foyers. .« Passons à ce qui dépend des usagers. Les locomo- biles à vapeur qui fonctionnent dans nos campagnes Sont, dans la grande majorité des cas, la propriété des entrepreneurs de battage : l’agriculteur n'a que rare- ment intérêt à posséder lui-même un engin qu'il n’uti- liserait que pour une seule opération, car la machine à vapeur nécessite une mise en train trop coûteuse et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. trop longue pour les travaux accessoires et intermittents de la ferme. C'est donc des entrepreneurs de battage, principalement, que l’amélioration devrait venir. Il faudrait que ces industriels fussent mieux instruits des nécessités de l'entretien, plus soucieux des obligations que l’article 36 formule et qui ne sont, d’ailleurs, que la conséquence de leur devoir professionnel, mieux regardants pour les dépenses de réparation; ils ne de- vraient pas prolonger outre mesure le service des loco- mobiles fatiguées par un long usage. S'ils sont dépour- vus, par eux-mêmes, de capacités techniques, il leur faudrait recourir, aussi souvent qu'il est nécessaire, aux avis des hommes de l’art et les suivre. L'abondance des dépôts auxquels donnent lieu la plupart des eaux leur conseillerait de s'intéresser, plus qu'ils ne l’ont fait jusqu'à présent, aux appareils portatifs proposés pour l’épuration préalable‘. Ils devraient veiller eux- mêmes au bon état des organes de sûreté et ne confier la conduite des locomobiles qu'à de bons préposés, sérieux et sobres. « Malheureusement, ce programme est vaste. Remar- quons toutefois une circonstance qui, dans une certaine mesure, en facilite l'accomplissement. Autrefois, l’en- trepreneur louait toujours ses services à prix fixe par journée de travail. Aujourd'hui, l'usage se répand du règlement à façon, d'après la quantité de grain battu. Il devient dès lors avantageux pour lui de ne emploi d'un matériel plus puissant : de substituer à l'unité traditionnelle de 6 chevaux l'unité de 12 à 14 chevaux, à la mode anglaise, partout où cette unité reste assez aisément transportable. On arrive ainsi à des condi- tions industrielles qui facilitent, en les rendant propor- tionnellement moins coûteuses, les mesures d'entretien et les autres précautions d'ordre technique. « Autre chose est à signaler. Les progrès de l’art ont maintenant ouvert une voie nouvelle : la solution peut être cherchée dans la substitution, à la machine à va- peur, de moteurs à combustion intérieure alimentés au pétrole. : « Il s’agit ici de l'huile lampante, pétrole américain, pétrole russe ou même huile de schiste, suivant les 1 Cf. Max. RinGELManN : Le Matériel agricole, 14° livraison de Ja Mécanique à l'Exposition de 1900, p. 25. il 49% circonstances du marché local. L'essence de pétrole, outre qu'elle est trop inflammable pour être manipulée à proximité des bâtiments de fermeet des tas de paille, coûte trop cher pour soutenir, dans cette application, la concurrence de la houille. A plus forte raison en serait-il de même de l'alcool. On sait que M. Maximi- lien Ring-lmann, essayant comparativement l'alcool dénaturé, l'essence minérale et le pétrole lampant dans deux moteurs à quatre temps, l'un de 2 à 3 che- vaux (Brouhot), l'autre de 3 à 4 chevaux (Benz), a trouvé comme résultats moyens! : ALCOOL ESSENCE PÉTROLE dénaturé minérale lampant Consommation { kilogs. 0,156 0,400 0,438 par cheval-heure ? lit 0,906 0,563 0,532 Prix du litre, hors Paris. 1f, 00 0f,50 01,30 Prix du combustible par cheval-heure of, 90 0f,2$ 0f, 16 « Dans le Concours international de carburateurs, qui a eu lieu en 190% par les soins de la Commission technique de l'Automobile Club de France, les essais effectués au pétrole lampant ont donné les résultats ci-après : CONSOMMA - PUIS- VITESSE TION MOTEUR CARBURATEUR SANCE par minute p'ch.-hre De Dion-Bouton. Claudel. , . Sch. 1.510 tours. 01,480 Gautreau. . Gautreau . . 6 — 1.410 — 01,680 ob Rorec el LONSUEMATe. MS 650 — 01,690 Gillet-Forest . { Gautreau . Re GO 01558 « Somme toute, pour les puissances qui conviennent aux locomobiles agricoles, le moteur à pétrole lampant peut être regardé comme consommant, en nombre rond, de 0,5 à 0,7 litre par cheval-heure, ce qui fait de Ofr.15 à 0 fr.20 de combustibleau prix moyen de 0 fr. 30 par litre. I n'y a pas de dépense d’eau sensible si l’ap- pareil est pourvu d'un refroidisseur ; on n’a à subvenir qu’à la perte d’eau par évaporation. « Quelle est, en face de ces chiffres, la situation de la machine à vapeur? Pour la puissanceet dans les condi- tions d'emploi des locomobiles à battre, il ne faut guère compter sur une dépense de moins de 3 ou 4 kilogs de charbon par cheval-heure; acheté au prix de 25 ou 30 francs par tonne, ce combustible, après transport à pied d'œuvre et en tenant compte des déchets de route, revient moyennement à 40 francs. C’est donc, par che- val-heure, une dépense de combustible de 0 fr. 12 à 0 fr. 16, à laquelle il faut ajouter les frais occasionnés par l’approvisionnement en eau, dont la machine con- somme environ 20 litres par cheval-heure. « On s'explique donc aisément les progrès du moteur à pétrole, soit comme engin d’entrepreneur, soit comme appareil faisant partie de l'outillage propre d’un domaine. Pour ce dernier genre d'application, en particulier, il présente sur la machine à vapeur l’avan- tage d’être toujours prêt à fonctionner et de n’exiger pour sa mise en train ni dépense de combustible, ni perte de temps (un quart d'heure suffit au maximum); on peut donc l’employer, non seulement au battage de la récolte, mais à des travaux variés. « La question de sécurité, objet de notre étude, peut trouver ainsi une solution particulièrement satisfai- sante, les moteurs à combustion intérieure étant prati- quement exempts du danger d’explosion. » $ 2. — Physique La cause de l'effet de Volta. — Lorsqu'on rend conducteur d'électricité le gaz séparant deux plaques de métaux différents, ces dernières prennent une diffé- rence de potentiel donnée, analogue à celle qui se pro- Recherches sur les moteurs à alcool (C. R. de l'Acad. des Se., t. CXXV, octobre 1897, p. 566). CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE duit entre les pôles d’une pile galvanique. Pour exciter cette conductivité, on dispose de différents moyens : lumière ultraviolette, flammes, rayons Rônt- gen, etc. La méthode la plus commode est cependant l'emploi des corps radio-actifs, tels que l'uranium, le radium, le polonium, etc. C’est ce dernier procédé qu'adopte M. A. Greinacher dans un récenttravail sur la cause de l'effet voltaïque!. L'auteur étudie d'abord le rapport entre le potentiel de charge et la force électromotrice. Il trouve qu'à distance croissante des plaques, le potentiel de charge s'accroît d'abord et se met à tomber ensuite, rapidement d'abord, puis de plus en plus lentement; le maximum corres- pond à la distance d'environ 12,2, Ces phénomènes. sont, semble-t-il, dus à la relation qui existe entre la résistance intérieure de la pile et la distance des plaques. L'auteur constate ensuite que le potentiel de charge s'approche le plus près de la force électromotrice pour une résistance minima de la pile. Quant à la cause de l'effet électromoteur de la pile gazeuse, le gaz rendu conducteur parait jouer le rôle de l’électrolyte des piles galvaniques. Les métaux oxydables se recouvrent d'une mince couche d'oxyde, absorbant l’eau de l'air ambiant : c'est cette membrane liquide sur les pla- ques métalliques qui serait l’excitateur d'électricité principal. Afin de vérifier cette hypothèse, l’auteur fait disparaitre autant que possible cette membrane; alors la force électromotrice des métaux oxydables dispa- rait aussi presque entièrement. Les expériences faites sur l'argent et sur le platine n'ont pas, au contraire, donné de résultats bien nets, la force électromotrice ne diminuant pas d'une facon appréciable, même dans le cas d’un chauffage très intense. $ 3. — Électricité industrielle Un nouveau type de dynamo. — Une dynamo donnant des courants d'intensité constante pour une valeur quelconque de la vitesse du moteur serait évi- demment d'une grande utilité dans tous les cas où la force motrice change fréquemment d'intensité (mou- lins à vent ou à eau, trains de chemin de fer, etc.) On peut arriver, il est vrai, à ce résullat, au moins eu partie, par un jeu d’engrenages compliqués; mais ces derniers, outre la consommation d'énergie à laquelle ils donnent lieu, ne sont pas sans nuire à la sécurité du fonctionnement. Or, la dynamo récemment inventée par le D'E. Ro= senberg, et construite par l’Allgemeine Elektrizitæts= Gesellschaft, constitue une véritable machine à inten= sité constante, qui se prête surtout à l'éclairage des trains de chemin de fer; aussi, de nombreux trains appartenant aux Chemins de fer d'Etat prussiens et bavarois viennent d'en être munis. Le principe sur lequel se base la nouvelle dynamo peut être résumé comme suit : Le champ transversab perpendiculaire au champ primaire, présent dans toute dynamo ordinaire, ést plutôt gènant en raison de la déformation qu'il produit; aussi, dans le cas des machines ordinaires, on tâche de le compenser en don= nant des dimensions convenables à l'inducteur et à l'induit, ou bien en se servant de dispositifs auxiliaires spéciaux; or, c'est précisément ce champ transversal que l'inventeur a mis à profit, en ajoutant une seconde. paire de balais, tandis que les balais correspondant ceux d'une dynamo ordinaire ont été mis en courts circuit. : 10 Quant aux conditions magnétiques de cette machines le champ original, dont le flux quitte, par exemple, le pôle inférieur pour se rendre à travers l'induit vers les, pôles supérieurs, pourra être très petit dans le cas où la machine fonctionnerait à toute vitesse; il suffit, en effet, d'induire un faible voltage dans linduit pour lancer à travers ce dernier le courant normal ou un& partie de ce dernier, les balais étant mis en court CIRE oo 1 Annalen der Physik, n° 4, 1905. RL CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 195 euit. Le courant d'induit produira un champ transver- sal d’une intensité bien plus grande que le champ pri- maire et qui est déplacé de 90° dans le sens de la rotation; son axe de symétrie sera horizontal. Or, on sait bien que laréaction d'induitaffaiblit toujours l'intensité du champ sur le bord antérieur des pièces polaires, tout en la renforçant sur le bord postérieur. Lorsque la machine tourne vers la droite, un pôle nord se superpose par conséquent sur la moitié gauche de la pièce polaire supérieure et un pôle sud sur la moitié droite, alors que sur la moitié droite de la pièce polaire inférieure vient se poser un pôle sud et sur la moitié gauche un pôle nord. Les polarités dues au champ original se combineront à celles du champ secondaire trans- versal pour former un champ résultant. Les balais auxiliaires dans l'axe vertical ne sont influencés que par le champ secondaire horizontal, et, comme ce dernier s'intervertit toutes les fois que la rotation change de signe, les balais donneront un cou- sant de direction constante. L'ampère-mètre ou le volt-mètre d'une dynamo pareille, ayant été reliée à une résistance et dont la vitesse angulaire est réglée depuis la limite maximâ jusqu'aux valeurs les plus petites, restera sensiblement immobile, surtout dans le cas des tensions relativement petites. La machine s'ajustera par conséquent pour donner un courant d'intensité pratiquement constante. Si le cireuit extérieur renferme une résistance cons- tante, l'on obtiendra une tension approximativement constante à partir d’un nombre de tours donné, alors que, dans le cas d'une batterie d'accumulateurs inter- calée dans le circuit extérieur, la tension dépend du nombre de cellules et des conditions de charge de la batterie. La tension de la dynamo s'adapte à celle qui règne dans la canalisation électrique. $ 4. — Agronomie L’hydraulique agricole.— Il vient d’être institué au Ministère de l'Agriculture, près la Direction de l’'Hydraulique et des améliorations agricoles, un Comité spécial chargé de l'étude scientifique des divers pro- blèmes que soulève l'exécution des travaux dont ce service a la direction. On sait combien ces problèmes sont encore peu connus. Qu'il s'agisse de travaux d'irrigation ou de drainage, de l’utilisation agricole des eaux d'égout ou - des eaux résiduaires d'industrie, de la mise en valeur … de terres pauvres ou incultes, de l'application de l'énergie électrique en agriculture ou industries rurales, les données nécessaires pour effectuer ces entreprises dans de bonnes conditions font actuellement défaut. Ainsi, l'on ne possède que des connaissances imparfaites sur les propriétés physiques et mécaniques des sols, sur le régime des eaux superficielles et le mode de … circulation des eaux souterraines, sur le mode d'action —…. et le rôle des eaux d'arrosage, etc. Il y a donc intérêt à … srouper sur ces diverses questions des faits expérimen- “ aux suffisamment nombreux pour qu'il soit possible … d'établir des règles dans lesquelles la pratique courante - trouvera de précieux renseignements. —. Ce sera le rôle du nouveau Comité de procéder ou «de faire procéder à l'étude de ces diverses questions. —_À la tête de ce Comité ont été placés : MM. Müntz, Michel-Lévy et Violle, membres de l'Académie des Sciences; Grandeau, professeur au Conservatoire des “Arts et Métiers; Calmette, directeur de l'Institut Pasteur “de Lille; Bordas, professeur suppléant au Collège de …—rance; Dabat, directeur de l'Hydraulique agricole au Ministère, etc. $ 5. — Biologie - La vie dans la nature à l'abri des microbes. — Pasteur avait émis l'opinion que les nombreux mi- crobes qui peuplent le tube digestif des animaux pour- æaient bien être indispensables, ou tout au moins très utiles à la digestion, et conséquemment à la vie de leur hôte. Il y a une dizaine d'années, MM. Nuttall et Thierfelder, en nourrissant aseptiquement de petits cobayes extraits aseptiquement de l'utérus maternel et conservés dans une enceinte aseptique, s'assurèrent que la nutrition est possible en l'absence des microbes : les petits co- bayes étaient capables de digérer les biscuits et le lait aseptiques et de les utiliser pour leur nutrition, car ils augmentaient de poids. Schottelius, en répétant l'expé- rience sur de petits poussins, n'obtint pas des résultats aussi favorables, car les sujets en expérience dimi- nuèrent de poids ét dépérirent manifestement. Ces expériences établissent qu'on peut faire vivre aseptiquement de jeunes animaux pendant un certain temps; mais elles semblent démontrer que les jeunes animaux aseptiques ne sauraient accomplir leur com- plet développement. Nous disons : « semblent démon- trer », car il est possible que le retard de développe- ment et le dépérissement constatés soient la consé- quence de l'usage d'aliments spéciaux bien plutôt que de l’asepsie intestinale. : En ce qui concerne les animaux supérieurs, la ques- tion est donc encore en suspens. M. P. Portier appelle à ce sujet l'attention sur les nombreuses espèces d'insectes qui, par leur genre de vie, à une certaine période de leur développement, peuvent être préservées de toute contamination : telles sont, par exemple, les larves mineuses qui creusent une galerie dans l'épais- seur des feuilles. L'œuf des Microlépidoptères est pondu soit à la face inférieure, soit plus souvent à la face supérieure de la feuille ; il est collé à l'épiderme et forme une petite masse globuleuse et transparente qui a environ 60 à 80 de diamètre. A l’éclosion, la jeune chenille pénètre directement dans l'intérieur de la feuille en rongeant l'épiderme sous-jacent à l'œuf, épiderme qui peut être stérile, au moins dans un certain nombre de cas. Elle dévore les cellules à chlorophylle, se creusant un loge- ment dans l'épaisseur de la feuille, mais respectant scrupuleusement les cellules épidermiques, de sorte que, pendant toute son existence, elle se trouve parfai- tement isolée du milieu ambiant par une cloison trans- parente. N'est-ce pas là, réalisée dans la Nature, l'expérience de vie aseptique si difficile à organiser dans les labo- ratoires pour les animaux supérieurs? M. P. Portier extrait aseptiquement la larve de sa logette et, après l'avoir sectionnée, la laisse tomber dans un tube contenant du bouillon de culture, pour véritier l'asepsie de ses tissus. Les chenilles de Lithocolletis (L. du chêne, de l’orme, du prünier) sont aseptiques dans le tiers des cas, environ. Les chenilles du N'epticula du rosier se sont montrées aseptiques dans tous les ças (15 observations). Ces intéressantes observations montrent, avec une grande élégance, que, pour ces larves tout au moins, la vie aseptique est possible, et que le développement normal et les métamorphoses qu'il comporte ne néces- sitent nullement la présence de microbes dans le tube digestif. Le Coolie japonais. — Ce n'est que depuis le début de la guerre de Mandchourie que l'Europe com- mence à bien connaître le Japon. Aussi les erreurs concernant l'Empire du Soleil-Levant et ses habitants semblent-elles encore loin d’être toutes dissipées. C'est ainsi qu'un grand journal parisien prétendait, il y a quelques mois à peine, que les Nippons sont trop mal nourris pour pouvoir fournir un effort considé- rable ou un travail pénible et continu. Les événements d'Extrème-Orient se sont chargés d'infirmer cette assertion. ta bataille de Moukden, notamment, où, pendant dix Jours, presque sans reprendre haleine, par un froid et des ouragans de neige terribles, les soldats du Mikado se sont rués sur leurs héroïques adversaires et ont fini par les terrasser, 496 cette lutte gigantesque, d’où les « pygmées jaunes » sont sortis vainqueurs, est une preuve éclatante de l'énergie formidable de la race nipponne. L'alimentation japonaise, si nous la comparons au régime des races de l'Europe et de l'Amérique du Nord, doit, en effet, nous paraitre insuffisante. Mais, d’un autre côté, l'observation nous permet d'affirmer que le travail mécanique fourni par l'ouvrier japonais est plu- tôt supérieur qu'inférieur au rendement de la machine humaine occidentale. A l'appui de celte thèse, nous relaterons le fait sui- vant, dont nous avons élé témoin à Moji, le Cardiff Japonais, où — au cours d'un récent voyage en Extrême- Orient — notre bateau relàcha pour faire du charbon. Il s'agissait d'embarquer 2.000 tonnes de combus- Fig. 1. — Chalands amenant le charbon au navire, tible. La rade étant encombrée de transports de l'Etat, y faisant escale dans le même but, et beaucoup d'ou- vriers du port, les plus vigoureux surtout, étant déjà partis pour la guerre, nous ne pümes nous procurer que 240 coolies, dont un tiers de femmes et d'enfants. Is furent divisés en huit équipes d’une vingtaine d'hommes et d’une dizaine de femmes et d'enfants chacune. Comme nous étions à l'ancre au milieu du détroit de Simonoseki, le charbon nous était amené dans des chalands, d’où un échafaudage de planches, de bam- bous et de cordages, rapidement gréé le long des flancs du navire, permettait de le monter à bord. Une dizaine de coolies de chaque équipe formaient la chaîne sur les degrés de l'échafaudage et se pas- saient les paniers jusque sur le pont; une douzaine d’autres, femmes et enfants surtout, les faisaient ensuite glisser jusqu'aux soutes sur des planches incli- nées et rejelaient Îles paniers vides dans les chalands. Le reste des coolies était occupé à arrimer la houille CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE dans les cales ou à remplir les paniers dans les cha- lands. Au bout de vingt-cinq heures d’un travail ininter- rompu exécuté par les mêmes coolies, les 2.000 tonnes de charbon se trouvèrent dans les soutes. Chacune des huit équipes en avait embarqué 250 tonnes : 10 tonnes ou Î{ wagon par heure; et cette quantité avait été manipulée par tous les coolies échelonnés sur l’écha- faudage. Placés à côté et à environ un demi-mètre de distance verticale les uns des autres, ils eurent à se passer environ 25.000 paniers de 10 kilogs chacun. Le travail utile fourni par ces hommes est donc relati- vement facile à estimer, et nous ne croyons pas nous tromper de beaucoup en l’évaluant à 200.000 kilogram- mètres au moins. Or, M. Armand Gautier, le savant professeur de la Faculté de Médecine de Paris, nous apprend qu'un bon ouvrier qui se livre à un exercice soutenu, sans être excessif, fournit dans sa journée un travail utilisable de 75.000 à 80.000 kilogrammètres. Si notre estimation est correcte, nos coolies japonais produisirent done, pendant vingt-cinq heures consécutives, un travail qu'un bon ouvrier européen ne fournit que pendant une dizaine d'heures par Jour. D'autre part, étant donné le mode d'exécution du travail et en tenant compte du poids des paniers vides, du frottement, des déplacements du corps, des excès de travail du cœur et de la respiration, etc., ces 200.000 kilogrammètres de travail utilisable doivent correspondre à un travail réel d'environ 500.000 kilo grammètres, c'est-à-dire à près du double de la somme d'énergie totale qu'un très bon ouvrier de nos climats, allant jusqu'à la fatigue, produit dans une journée de dix heures. Je dois ajouter que, si certains de nos coolies, sur- tout les femmes et les enfants, donnèrent quelques signes de fatigue vers la fin de leur longue journée de travail, beaucoup d’entre eux disposaient encore d'une réserve d'énergie leur permettant de rire et de chanter et que la bonne humeur, ce bien précieux des grandes masses japonaises, ne cessa de régner jusqu’au bout. Et un contremaitre m'aftirma quaprès une dizaine d'heures de repos ils seraient prèts à reprendre leur rude labeur. Voyons maintenant si l'alimentation du coolie japo- nais peut nous fournir l'explication de son activité prodigieuse. Elle se compose presque exclusivement de riz, de légumes, de plantes marines, d'un peu de poisson, de thé et de condiments. Parmi ces derniers, le rôle le plus important semble appartenir au choyou, sorte de sauce très riche en principes azotés, obtenue par lä' fermentation du pois de Soja (Soja hispida) avec du riz ou du froment. Les repas de nos coolies, au nombre de trois pendant toute la durée de leur présence à bord, furent peu copieux. Certains d’entre eux se contentaient du con- tenu d'une boîte rectangulaire en bois blanc d'environ 20 X 15X5 centimètres et divisée en deux comparti- ments inégaux, dont le plus grand contenait du riz cuit à l’eau, l’autre, des légumes ou un peu de poisson et quelques condiments. D’autres se faisaient servir par un cuisinier ambulant un grand bol de riz et plusieurs bols plus petits contenant les autres aliments en petites quantités. Comme boisson, de l’eau ou du thé très léger et sans sucre. Un marchand de tabac, allumettes, ete., qui était venu s'établir à bord, avait apporté une demi- douzaine de flacons de saké (eau-de-vie de riz) qui lui restèrent pour compte. On m'affirma que les repas auxquels j'avais assisté constituaient le régime à peu près invariable de tous les jours et qu'un grand nombre de ces braves gens avaient encore momentanément supprimé un de leurs trois repas quotidiens afin d'en pouvoir consacrer le montant à la Croix-Rouge ou à d’autres œuvres patrio= tiques. Nous n'avons ni analysé ni même pesé la rations , Eh CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 197 alimentaire du coolie japonais. Ce que nous pouvons affirmer, néanmoins, c'est qu'elle est loin de lui fournir les 167 grammes d’albuminoïdes, 71 grammes de graisses et 692 grammes d'hydrates de carbone néces- saires à l’ouvrier européen soumis à un travail fatigant*. Ce qui nous frappe surtout, c'est la faible quantité d'albumine et de graisse que contient la nourriture japonaise. On sait que le riz est la moins ricke de toutes les céréales en matières grasses et azotées: et la consommation d'autres aliments, poissons et légumes, est si peu considérable qu'elle ne peut pas remplacer la viande, le pain, le fromage, les légumes secs et la graisse, l'huile ou le beurre de l'ouvrier européen. Nous savons, d’ailleurs, depuis les expériences récentes du physiologiste américain Chittenden et les travaux Fig. 2. — Coolies japonais montant des paniers de charbon 1e long d'un échafaudage placé sur les flancs du navire. de Hirschfeld, Koumagawa, Klemperer et d'autres, que 8 grammes d'azote, équivalant à 50 grammes d'albu- mine, suffisent à un adulte actif de poids moyen. D'autre part, l’atavisme, l’accoutumance à leur régime presque végétarien permet aux Japonais de mieux s’assimiler les substances protéiques contenues dans les végétaux. Encore, pour permettre à l'économie de produire un elMort mécanique soutenu, faut-il que l'alimentation lui fournisse une certaine quantité de chaleur. Pour pouvoir se livrer à un travail fatigant d'une dizaine d'heures par jour, l'ouvrier de nos climats a besoin de 4.200 calories, qui lui sont fournies par la combustion des principes alimentaires énumérés plus haut. En produisant un travail total de 280.000 kilo- grammètres, il n'utilise que 659 calories, c’est-à-dire 15,7 °/, des calories alimentaires totales. Le reste est .* ARMAND GauTIER : « L’Alimentation et les Régimes chez l'homme sain et chez les malades ». perdu par la vaporisation de la sueur et de l’eau expirée ou rayonné par la peau sous forme de chaleur. Or, le coolie japonais est loin de disposer de 4.200 ca- lories, et s'il fournit une somme de travail égale ou même supérieure, c'est qu'il doit être capable de mieux utiliser l'énergie totale disponible, de transformer un plus grand nombre de calories en force mécanique aux dépens de celles qui sont perdues par l’évaporation et le rayonnement. En Europe, pour augmenter le rendement de la ma- chine animale, on a surtout recours à une alimentation riche en principes azotés el notamment à la viande, dont la combustion donne moins d’eau que celle des matières ternaires pour un même nombre de calories produites. Nous avons vu qu'il n’en est pas ainsi au Japon. Le régime y est pauvre en azote, et la chair, à l'exception d'une petite quantité de poisson, en est presque abso- lument exclue. Il existe donc, — et c'est encore l'avis de M. Armand Gautier, — en dehors des albuminoïdes, des aliments qui favorisent ou excitent l’action musculaire et per- mettent de transformer un plus grand nombre des calories disponibles en travail. Ces aliments nervins, nous les trouvons parmi Jes issons aromatiques ou spiritueuses,et les condiments. En fait de boissons aromatiques, les Japonais ne con- naissent guère que le thé, dont ils font une consom- mation assez considérable sous forme d'infusion très légère. Il est certain que la théine est un tonique mus- culaire; pas assez puissant, cependant, pour remplacer les matières albuminoïdes dans l'alimentation : les ouvriers anglais, grands consommateurs de thé, n’en sont pas moins gros mangeurs de viande. Quant à la boisson fermentée la plus connue au Japon, c'est le saké, l'eau-de-vie de riz. Mais la consommation qu'en fait le coolie n’est ni assez forte ni assez fré- quente pour lui permettre de jouer un rôle bien impor- tant comme aliment ou comme excitateur nerveux. C'est donc dans les condiments — peut-être dans ceux d'origine marine ou dans le choyou — qu'il con- vient de rechercher les agents nervins capables de pro- duire cette résistance étonnante à la fatigue, cette énergie physique prodigieuse qui caractérise la race nipponne. Et il serait à la fois intéressant et utile — si la chose n'a pas encore été faite — d'étudier l'alimen- tation japonaise à ce point de vue. D' F. Weisgerber. bo $ 6. — Sciences médicales Le système séparatif dans lPassainisse- ment urbain. — M. le D’ J. Trollat', de Lyon, vient de faire sur ce sujet une étude approfondie, d'où nous extrayons les renseignements suivants : — On sait le double but du système séparatif : d'une part, écoulement direct, dans les cours d’eau, des eaux pluviales et des eaux de lavage des rues peu contami- nées, grâce à un premier réseau de conduites, et, d'autre part, évacuation, vers les usines d'épuration, des matières fécales, des urines et de la plus grande quanlité des eaux ménagères et industrielles, grâce à un second réseau. D’après l’auteur, ce système présente sur le tout à l'égout d’incontestables avantages; en elfet, les cours d'eaux sont mieux protégés: les inconvénients résultant des odeurs dégagées par les ouvertures ou regards disparaissent, car les égouts séparatifs conte- nant les matières putrescibles forment un système absolument clos depuis leur lieu d'origine jusqu'à l'usine d'épuration; la pression est moins forte et il y à bien moins de fuites ou fissures; enfin, il y a trois avantages très importants : c'est d’abord que le système séparatif n'exige qu'une quantité d'eau très faible, c'est qu'il supprime les champs d'épandage dont on connaît les multiples inconvénients, c'est enfin qu'il ! Thèse de Lyon, 1904-1905. 498 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE coûte moins cher que le tout-à-l'égout, tout en parais- sant plus compliqué : ainsi M. Trollat a calculé qu'à Lyon, l'établissement du tout-à-l'égout reviendrait à 17 millions, tandis que l'installation du système sépa- ratif ne coûterait qu'environ 11 millions. Ce système, d’ailleurs, a fait ses preuves en Angleterre, en Italie, en Allemagne, au Transvaal, en Russie et même en France, à Cannes, à Levallois, à Trouville : dans cette dernière ville même, la mortalité a baissé de 10 2, depuis son installation, et le nombre des cas de fièvre typhoïde a surtout diminué d’une façon remarquable. $ 7. — Géographie et Colonisation L'ivoire au Congo français. — Le Commissaire général du Congo français, M. Gentil, vient de prendre deux arrêtés intéressants et dont on ne saurait trop le féliciter: Considérant que l’ivoire constitue dans notre colonie l'un des éléments de trafic les plus importants et qu'il y à lieu, par suite, aussi bien dans l'intérêt du com- merce que dans un but de conservation de l'espèce, de ne pas détruire les jeunes éléphants porteurs de dents de petites dimensions, M. Gentil interdit, dans toute l'étendue du Congo francais et dépendances, la vente et l'exportation de pointes d'ivoire de 2 kilogrammes et au-dessous. Le second arrêté spécifie qu'à dater du 1‘ janvier 1906, l’ivoire ne sera plus admis au nombre des produits à recevoir au titre de l'impôt indigène. . Par mesure transitoire et jusqu’au 31 décembre 1903 inclus, l'ivoire ne sera plus accepté, au titre de l'impôt, que dans la proportion du tiers par rapport à la quan- tité de caoutchouc remise, au même titre, à l'Adminis- tration par chaque tribu ou groupe d’indigènes. Ces mesures étaient réclamées depuis longtemps par tous ceux qui s'intéressent à la question de l'éléphant et qui n'ignorent pas que c’est à bref délai la dispa- rition de cette espèce si l'on ne combat pas par des moyens énergiques, dans les pays congolais, francais et belges, la fièvre de la recherche de l'ivoire, La Culture du coton dans la vallée du Nïi- ger. — A plusieurs reprises, la Æevue a parlé de l'œuvre entreprise par l'Association cotonnière colo- niale. On sait qu'actuellement l'industrie cotonnière francaise demande la plus grande partie de sa matière première à l'Amérique, et l'on sait aussi que la spécu- lation y cause des différences de prix très préjudiciables aux intérêts de notre industrie francaise. De plus, on peut toujours craindre que l’industrie américaine tende à absorber toute la matière première nationale. C’est pour éviter ce danger, en développant la culture du coton dans nos colonies, que l'Association cotonnière a été fondée. Or, il semble que, dans la région du Niger, les essais tentés parallèlement par l'Administration et l'Associa- tion cotonnière soient sur le point d'aboutir à des résul- tats pratiques. Les indigènes acceptent avec empressement les nou- elles graines qui leur sont fournies, à tel point que ceux du Djenné, auxquels il n’en avait pas été distribué l'an dernier, sont venus jusqu'à Ségou supplier qu'on leur en donnût. Le coton produit par ces graines s’ap- proche de plus en plus de la qualité réclamée par l'in- dustrie française. L'Association cotonnière, dit son président, M. Es- nault-Pelterie, devra se préoccuper de créer le mouve- ment commercial pour l'achat de ce coton. Si les prévisions de M, Merlaux-Ponty, gouverneur du Haut- Sénégal et Niger, se réalisent, d'ici quelques années le coton soudanais pourra alimenter une grande partie de nos usines francaises. Grâce au chemin de fer du Niger au Sénégal, il est possible d'évaluer les frais de transport de Ségou au Havre à 80 francs environ la tonne, prix qui n’a rien de prohibitif pour la matière: première dont il s'agit. « - Û . S 8. — Enseignement et Sociétés Ecole nationale supérieure des Mines. — Le Ministre des Travaux publics vient de décider que: des conférences seraient faites aux élèves de 3° année de l'Ecole nationale supérieure des Mines, sur les: premiers soins à donner aux ouvriers en cas d'accident. Le D' Carnot, professeur agrégé à la Faculté de Méde= cine de Paris, médecin de l'Ecole, a été chargé de ces: conférences. C'est là une excellente innovation, qui ne pourra donner que de bons résultats si l’on en Juge par ceux qui ont été obtenus dans un enseignement analogue- donné depuis longtemps à l'Ecole Centrale, dans le: cours d'Hygiène industrielle professé par le D: Saint- Yves-Ménard, membre de l'Académie de Médecine. Les jeunes ingénieurs ne seront ainsi que mieux préparés aux devoirs et aux responsabilités de leur: profession. Statistique des étudiants. — Le Bulletin admi- nistralif du Ministère de lInstruction publique du 8 avril 1905 publie la statistique des étudiants au: 15 janvier 1905 dans les Universités et Ecoles d’ensei- gnement supérieur. Nous en extrayons les chiffres: suivants, intéressant les Facultés et Ecoles de Médecine,. des Sciences et de Pharmacie : MÉDECINE SCIENCES PHARMACIE. BATIS SENTE SA) 1.605 1.237 Marseille "0 278 238 168- BeSaDCOD RE 50 163 28- Bordeaux Rte 120 317 231 Cam EME RU 37 69 48: CIermOnT RENE 61 9% 43 DONS EE FRERE 85 128 29 Grenohle FARM 62 161 39: a! ADULTE AE 274 182 4591 OT ee 5 lee 903 541 210- Montpellier eee" 540 297 209: N'ADCYER RE 273 581 79 POITLET SR 43 129 4% Rennes. AU EC: 161 233 100 LDoUlOUSe EEE 432 30% 135 Une Ecole navale de commerce en Es-— pagne. — Le ministre de l'instruction publique d'Espagne vient d'accorder son appui à un projet ori= ginal d'Ecole navale de Commerce qui fut proposé il y a trois ans au Congrès pédagogique catalan. Il s'agit de la création d'un navire-école sur lequel! les jeunes gens se destinant au commerce se prépare raient à cette carrière en naviguant dans toutes less parties du monde, en acquérant ainsi la connaissances pratique des langues étrangères et en étudiant sum place les débouchés commerciaux. Le programme d’études de cette école s'étendra sum trois années et comportera autant d’itinéraires : 49 Jan Méditerranée ; > le nord de l'Europe; 3° l'Afrique ocet dentale et l'Amérique latine. Le corps des professeurs sera recruté dans les grands centres commerciaux d'Europe. Les élèves ne seront pas admis au-dessous de quinze ans, ni au-dessus de» vingt-deux. Le prix d'admission pour chaque cours» annuel sera de 3.250 pesetas, tout compris. A la fin des trois années, les élèves recevront un diplôme spécial: Académie royale des Sciences de Lis= bonne. — Dans sa séance du 4 mai 1905, l'Académi royale des Sciences de Lisbonne a élu Membre corress pondant M. Ernest Lebon, lauréat de l'Académie Frans caise, professeur agrégé de Mathématiques au Lycée Charlemagne, à Paris. * JACQUES HADAMARD — RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE 499 RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE Les discussions qui ont eu lieu en 1904 au Musée pédagogique, et dont Ascoli a rendu compte ici- même peu de temps avant sa mort prématurée, ont mis ou remis à l’ordre du jour une série de questions d'enseignement scientifique. Il me semble qu'il y a lieu de revenir sur celle qu'a posée M. Marotte : la méthode heuristique. Rappelons que cette méthode dérive, en principe, de celle que Socrate employait et à laquelle il donnait le nom de Maïeulique. « En principe », car il s’en faut, nous le dirons plus loin, que la méthode socratique proprement dite soit notre modèle idéal, ni même qu’elle soit une véri- table méthode heuristique. Mais, dégagé de cette * forme particulière, le principe subsiste avec toute son importance, et les tentatives faites en ces der- nières années à l'Étranger pour l'appliquer méritent d'attirer l'attention. « Chez nous, dit M. Marotte, le professeur expose presque constamment, tandis que l'élève reste passif. En Allemagne, le professeur est un guide et l'élève est actif. « Toute la classe se passe en interrogalions frac- tionnées, très courtes, passant rapidement d’un élève à un autre pour les maintenir tous attentifs. Ces interrogations sont dirigées par le maitre de façon ou bien à faire découvrir par les élèves la pro- priété mathématique à démontrer, ou bien à leur faire dégager de l'expérience faile sous leurs yeux la loi physique à conslater. » Une telle manière de procéder intéresse évi- demment les Sciences physiques ou naturelles comme les Mathématiques, et non seulement toutes les sciences possibles, mais toutes les branches pos- sibles de l'enseignement. Appliquée aux sciences expérimentales, la méthode porte souvent chez nous le nom américain de rediscovery. Mais mé- thode heuristique ou rediscovery représentent en gros? une seule et même tendance : faire retrouver à l'élève le plus grand nombre possible des vérités que l’on a en vue. I A cela, quels seront les avantages et quelles seront les objections ? Au lieu de chercher les avantages que présente la ——————————————"% _ _____———”" * Revue du 30 mai 1904, ? Le mot de rediscovery évoque, en réalité, la double dif- férence qui sépare — on commence et l'on continuera de plus en plus, je l'espère, à pouvoir dire : qui séparait — l'enseignement américain des sciences expérimentales de . notre enseignement francais, à savoir : 19 la vue directe des êtres et des phénomènes, chose inconnue dans nos méthode, il importe de chercher tout d’abord ceux qu’elle ne présente pas, car, prise à la lettre, elle tendrait tout simplement à transformer tous les élèves en inventeurs. Il faudra donc montrer com- ment on n'entend point s'adresser à des Archimède ou à des Newton, comment, en un mot, on vise quelque chose de possible et non pas d’utopique. Puisque le système fonctionne en Allemagne, il faut croire qu'il est viable et que l'idéal qu'il pro- pose peut être atteint, au moins à un certain point de vue et dans une certaine mesure, qui restent à définir. À quelque point de vue et dans quelque mesure que ce soit, on provoque ainsi l’activité de l'élève. Cet avantage, le premier de tous, ne peut manquer d'en entrainer d'autres, qui sont loin eux-mêmes d'être négligeables. C'est ce qu'a aussi constaté M. Marotle : « Les classes faites par cette méthode, nous dit- il, sont bien plus animées que celles faites avec la mélhode d'exposition. « L'emploi de la méthode heuristique esl une garantie que l'enseignement ne surpasse pas la capacité de l'élève, qu'il est sûrement compris et relenu. » Et les objections ? Il y en a de toutes sortes. Faut-il rappeler celles qu'on a opposées cette année‘ à M. Brücker, professeur au Lycée de Ver- sailles, lorsqu'il a exposé, pour l’enseignement des sciences naturelles, une forme de la méthode qui nous occupe ? Certaines pleines d'ironie : faire travailler les élèves et les exercer à l'observation, « c’est moins faligant que de faire un cours » ; — d'autres pleines de bon sens : si l'on modifiait les procédés, suivant le nombre des élèves, « cela ferait deux méthodes d’enseignement ». Ces choses, et d'autres de même force, et de pires encore, ont été dites sérieusement au Musée péda- gogique. On les a énoncées sans rire et écoutées sans pleurer. M. Brücker a même élé obligé d'y répondre ; nous en sommes dispensé : contentons- nous de renvoyer au volume qui contiendra ces discussions, et où, cela va sans dire, tout ne sera pas du même style. lycées jusqu'en ces tout dernières années; 29 l'emploi de la méthode heuristique. Le premier aspect a surtout attiré l'attention dans les récentes réformes. Le second, lui aussi, est digne d'intérêt. ‘ Dans les séances du Musée pédagogique, qui ont fait suite à celles de 1904 et ont été consacrées aux Sciences naturelles et à la Géographie. 500 II Les objections sérieuses — hâtons-nous d'en venir à elles — existent. Il faut même, à mon sens, en tenir le plus grand compte, si l’on ne veut pas aboulir à un échec dont la méthode elle-même ne devrait pas être rendue responsable. En ce qui concerne les Mathématiques, elles ont été présen- tées d’une manière tout particulièrement intéres- sante, forte etcomplète”, par M. Durand, professeur au Lycée Louis-le-Grand. C’est donc lui que je me trouve amené à combattre pour les réfuter. Car, disons-le tout d’abord, je ne saurais m'as- socier aux conclusions de l’auteur. M. Durand n'est pas, si l’on veut, entièrement opposé à l'usage de la méthode heuristique. Mais c'est, en quelque sorte, par faveur grande qu'il est disposé à l'ad- mettre (qu'il veuille bien me pardonner si, peul- être, j'exagère sa pensée) comme une distraction pour l’auditoire, comme un moyen — ni meilleur, ni plus mauvais qu'un autre — par lequel on peut essayer de varier son enseignement. Il en déclare donc dangereuse l'application continue. Si par « continue » il faut entendre « constante et exclusive », je suis de son avis. Deux des inconvénients qu'il signale me paraissent, en effet, rédhibiloires dans ces conditions : le temps consi- dérable qu'elle exigerait; puis la confusion qu'elle engendrerait, le tort qu'elle porterait à la clarté. Les deux objections n’en font qu'une, il est vrai. S'il faut éviter la perte de temps qu'occasionnerait la « redécouverte » de tout un cours scientifique, c'est surtout parce que l'auditoire risquerait d'y perdre de vue la marche des idées, ou même d'avoir tout à fait oublié à la fin ce qui aurait été dit au commencement”. Mais, si l’application de la méthode heuristique doit être faile avec mesure, si je ne crois pas qu'elle ‘ L'enseignement des sciences mathématiques et des sciences physiques. Conférences du Musée pédagogique (1904), p.171 et suiv.: Paris, Imprimerie nationale, 1904. ? Je ne vois pas qu'il y ait lieu d’invoquer contre la mé- thode heuristique l'objection (la plus puissante, sans doute, aux yeux de plusieurs) relative à la discipline. Elle exigera sans doute plus d'efforts avec la méthode heuristique qu'avec un enseignement dogmatique, ex professo, tel qu'il a existé autrefois. Mais il en sera forcément de même dès qu'il y aura interrogation, dès que les élèves interviendront autre- ment qu'en écrivant sous la dictée; pourquoi le procédé heuristique présenterait-il, à ce point de vue, d'autres diffi- cultés que n'importe quel autre mode d'enseignement ad- mettant cette intervention? Or, je ne crois pas qu'à l'heure actuelle personne songe à se passer d'elle, comme on le faisait trop souvent autrefois. Dans les classes de lettres proprement dites, elle est d'ailleurs permanente. Le pro- fesseur n'y prend, pour ainsi dire, jamais la parole d'une façon continue. Il n'y aurait aucun obstacle, pour les pro- fesseurs de sciences, à opérer de même, — je parle des circonstances où l'enseignement scientifique est pris au sérieux, et laisse de côté, par conséquent, les sections A et B. JACQUES HADAMARD — RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE doive régner seule désormais et faire disparaitre entièrement l’enseignement didactique (je désigne- rai ainsi, pour abréger, lout ce qui est enseigne- ment proprement dit, par opposition à ce qui est « heuristique »), je n’estime pas non plus qu'elle doive ne jouer qu'un rôle purement épisodique; au contraire, on doil s’efforcer de l’employer d'une facon continue, c'est-à-dire d'y faire appel cons- tamment et à toule occasion. Le jugement que nous serons conduit à porter sur la nouvelle méthode dépend, en effet, de l'objet que nous avons en vue. Sile but dernier de l'enseignement était la connaissance de telle ou telle partie du programme, il n’y aurail qu'à cher- cher le moyen le plus simple et le plus rapide pour acquérir cette connaissance, et à rejeterles autres: tout au plus en fera-t-on usage de temps en temps « pour changer ». Il n'est pas démontré, je le veux bien, que la méthode heuristique réponde à cet idéal. Mais celui-ci n’est pas, que je sache, le seul que nous devions viser : ce n’est pas lui que l’on a en vue quand on parle du caractère éducalif de l’enseignement. Or, à mon avis, ce caractère édu- catif dépend en grande parlie de la méthode heu- rislique. Nous chercherons, en un mot, à appliquer cette méthode, non parce qu'elle permet d'acquérir plus aisément les mêmes connaissances, mais parce qu'ainsi acquises, elles enseigneront mieux à rai- sonner. 1 Tout en n'élant pas, nous l'avons dit, plus dis- posé que M. Durand à en admettre un usage exces- sif, qui compromettrait la clarté de l’enseignement, nous ne partageons pas toute sa tendresse pour certaines lecons parfaitement « claires, concises, bien composées », qu'il craint de voir disparaitre, et que critique M. Marotte. Si la méthode heuris- tique conduisait parfois à en diminuer le nombre, je n’en ferais pas, moi non plus, un grief bien sérieux contre elle. Qui d’entre nous ne se rappelle de pareilles leçons. et n’en a ressenti les inconvé= nients? Figées dans leur perfection, elles appar= tiennent, en somme, à la catégorie des « idées fos= siles » dont parle M. Marotte un peu plus loin. Les élèves qu'on en fait profiter sont comme ces voya= geurs trop bien guidés qui se figurent connaître un pays parce quils en ont vu — sans incident fâcheux, assurément, et sans temps perdu — ce qu'on a bien voulu leur en faire voir. Si nous pensons, el je ne vais pas à l'encontre, qu'elles ont, elles aussi, des avantages et qu'elles sont propres à séduire l'esprit, ce sont elles quen nous offrirons à nos écoliers de temps en temps « pour changer ». à + Est-il, d’ailleurs, tellement évident que les. 4 JACQUES HADAMARD — RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE 501 Mathématiques soient plus aisément et plus sûre- ment comprises par ces leçons modèles que par la méthode heuristique ? Cela HÉBEnd de ce qu'on entend par « comprendre ». « Ce mot — disait M. Poincaré au Musée pédago- gique — a-t-il le même sens pour tout le monde? - Comprendre la démonstration d'un théorème, est-ce examiner successivement chacun des syllogismes dont il se compose et constater qu’il est correct, + conforme aux règles du jeu? De même comprendre * . ILest clair que M. une définition, est-ce seulement reconnaitre qu'on sait déjà le sens de tous les termes employés et constater qu'elle n'implique aucune contradiction ? « Oui, pour quelques-uns ; quand ils auront fait cette conslatalion, ils diront : J'ai compris. Non, pour le plus grand nombre. Presque tous sont plus exigeants : ils veulent savoir, non seulement si tous les syllogismes d’une démonstration sont corrects, mais pourquoi ils s'enchainent dans tel ordre plutôt que dans tel autre. Tant qu'ils leur semblent engendrés par le caprice et non par une intelligence constamment consciente du but à atteindre, ils ne croient pas avoir compris. » J'ai tenu à citer tout au long ces paroles : elles pourraient servir d'épigraphe au présent article. Poincaré met le doigt sur la » plaie. Ceux dont il décrit ainsi l’état d'âme, et qui, . sans s’en douler eux-mêmes, veulent, à juste titre, pour comprendre, aulre chose que ce que notre ‘enseignement leur offre en général, représentent bien souvent la majorité. A ce mal, dont souffre gravement l'enseignement - des Mathémaliques au lycée, j'espère que la mé- - thode heuristique pourra apporter un remède. Ce que je sais, c'est que les autres méthodes actuelle- “ment en usage ne paraissent guère capables de la remplacer à ce point de vue. J'espère avoir montré pourquoi il ne suffira pas, É pour abandonner celte méthode, de constater que . son application soulève des difficultés : il faudra prouver que ces difficultés sont insurmontables, ou, du moins, assez graves pour nous forcer à renoncer aux avantages prédominants qu’elle com- 1 porte. Ce n’est pas une raison, bien entendu, pour qu'il - ne soit pas indispensable de se préoccuper de ces . difficultés et de les résoudre. Je crois, avec M. Du- rand, qu'on n'y a pas assez songé jusqu'ici. On s'est mis à parler de la méthode heuristique; on ena discuté les mérites et les défauts, sans s'être entendu sur la facon dont on la conçoit. Je ne pense pas cependant qu'elle s'improvise; et, pour ma part, depuis de longues années que je l’applique, l'expérience me conduit sans cesse à modifier, sur un point ou sur un autre, ma avoir la prétention d'énoncer des règles C'est dire que je ne saurais défini- manière de procéder. tives; je croirai avoir atteint mon but si les réflexions que je vais présenter en amènent d'autres”. III Tout d'abord, comment les collégiens résoudront- ils des questions qui n'ont pu être élucidées sans le génie d’un Archimède, d'un Pythagore ou d’un Newton? C’est, nous l'avons vu, l'objection qui se présente immédiatement à l'esprit. M. Durand, qui la pose, fournit implicitement la réponse quand il compare les Mathématiques à un escalier à gradins irréguliers, dont quelques-uns sont trop hauts pour être franchis sans l’aide du maitre. La conclusion ressort avec évidence. Si les gra- dins sont trop hauts, il faut y pratiquer d’autres gradins plus petits. On devra fractionner les ques- tions de manière à les mesurer aux intelligences auxquelles on les présente. Pour ceux qui tiendront à opérer prudemment, ou que le niveau de la classe obligera de le faire, il n’y aura à ce fractionnement aucune limite. Plus l'auditoire aura besoin d'être ménagé, plus on pourra simplifier les questions. Aucune ne le sera au point que sa résolution soit sans bénéfice pour l'esprit. Par exemple, l'exécution pure et simple d’un calcul algébrique dont la marche vient d'être indiquée par le professeur est déjà un exercice profitable. Quelques-uns de ces calculs pourront êlre tout à fait analogues à ceux qui sont proposés d'habitude en devoirs. Je ne vois pas d’inconvé- nient à ce que l’un de ces devoirs soit une partie du cours ; je vois, au contraire, toute espèce d'avan- tages à faire sentir aux élèves que cette partie ne compte pas au point de vue de la difficulté, puis- qu'elle ne diffère pas de ce qu'ils sont habitués à faire par eux-mêmes. Mais, en général, on pourra bientôt faire un pas de plus, et, au lieu de procéder à des calculs pour lesquels l'application des règles n'offre aucune sorte de difficulté, en proposer d’autres où cette application exige un certain effort d'attention, où, par exemple, elle cache des pièges, comme ceux que l'intervention des inconnues auxiliaires réserve souvent aux débutants. Les questions « heuris- tiques » se borneront alors le plus souvent à crier casse-cou. Tailler des marches dans les pentes qu'il s'agit Au moment d'envoyer lignes à l'impression, je recois le nouvel ouvrage L'enseignement des Sciences ma- thématiques et physiques dans l'enseignement Secondaire ces des garçons en Allemagne, Imprimerie nationale, 1905) dans lequel M. Marotte répond, pour sa part, au désir que j'ex- prime ici, en précisant la manière dont la mé ‘thode est appliquée en Allemagne. J'en reparlerai un peu plus loin. 502 JACQUES HADAMARD — RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE de gravir : telle sera donc notre première préoccu- pation, et cela, évidemment, quel que soit l'ordre de sciences que nous ayons à enseigner. IV En ce qui concerne les Mathématiques, nous pouvons nous rassurer d'autant plus aisément que le fractionnement est déjà fait, pour la plus grande part, dans l’état actuel de l'enseignement. Aucune question n’est, en fait, présentée dans les termes où elle s'est posée aux inventeurs. Toutes sont résolues par une série d'étapes successives, mar- quées d'avance et assez nombreuses pour qu'au- cune d'entre elles, pour ainsi dire, ne soit infran- chissable à un élève convenablement guidé ‘. Qu'’entendrons-nous donc par ces derniers mots ? Si le fractionnement a été suffisant, certaines parties de la solution pourront peut-être êlre trouvées spontanément par les bons élèves. Il serait impru- dent, en tout cas, de demander à tous le même effort, et il ne me paraît nullement utile de se bor- ner à ce qui peut être ainsi résolu. Comment alors nos questions pourront-elles faire naître ce qui n'apparaïîlrait pas sans elles? Devront-elles être une manière dissimulée d'’in- diquer nous-même la solution, de sorte que notre interlocuteur croira avoir tout trouvé, tandis que tout lui aura été suggéré sans qu'il sans doute? Cette manière d'opérer est celle de Socrate lui- même (du moins si, en l'absence de document de première main, nous pouvons compter sur un dis- ciple — se nommät-il Platon — pour rendre fidèle- ment la pensée du maitre). M. Durand critique cette méthode qui croit avoir atteint son but lorsqu'elle est arrivée à tromper l'élève sur le résultat qu'il a obtenu et sur ceux qu'il est capable d'obtenir. Sur ce dernier point, on peut répondre, avec M. Tannery, que les devoirs seront là pour mettre l'élève en face de sa propre faiblesse, et qu'il y a là un premier et précieux moyen d'appliquer la mé- thode heuristique. D'autre part, est-il bien certain que le trompe- l'œil dont se méfie, à juste litre, M. Durand soit particulier à celle-ci? Si on veut le rechercher par- tout où il existe, on le retrouvera sans peine dans l’enseignement acluel, grâce au fractionnement auquel nous venons de faire allusion et qui fait disparaître l'intelligence, si importante et si féconde en soi, de la nature de la difficulté*. Et surtout, si 4 En réalité, les démonstrations qu'on a l'habitude de proposer comme problèmes sont souvent bien plus diffi- ciles à trouver que ne le seraient la plupart de celles du cours. ? Ma propre expérience m'a montré, comme éminemment quelque chose est propre à faire naître des illusions particulièrement fächeuses de cette nature, ce sont précisément les leçons /rop bien fuites dont nous à parlions tout à l'heure. Il y paraît bien, quand il 1 s'agitdese rappeler etde retrouver, lemoment venu, : ces élégantes constructions. Elles séduiront au pre mier abord; d’autres, moins parfaites, prendront | leur revanche le lendemain : en particulier, les démonstrations obtenues heuristiquement. i Encore faut-il qu'elles le soient d'une manière véritablement heuristique, et tel n'est guère le cas, | nous venons de le dire, pour la méthode socratiquem proprement dite. La faible part d'initiative qu’elle provoque ne serait certes pas sans présenter déjà quelque utililé, — quand ce ne serait que celle dew montrer constamment au professeur si ce qui pré- cède a été compris ou non. On est cependant en droit, somme toute, de ne voir en elle qu'un Moyens moins direct, moins clair et moins commode d'ex-# position, de lui reprocher, en un mot, et de lui reprocher sans indulgence, toutes les difficultés que peut faire craindre l’emploi de la méthode” heurislique, puisqu'elle n’en présente point, ou à un bien faible degré, les avantages. Aussi, cette dissimulalion, ces questions habile ment posées, captieuses en quelque sorte, ne me paraissent-elles nullement de miset: M. Durand compare l'élève à l'enfant qu'un presti=s digitateur a fair monter sur l'estrade pour lui tirer des poches, du nez, des oreilles, une multitude” d'objets inattendus et hétéroclites. Eh bien! il est essentiel que le prestidigitateur dévoile son « truc », que le maitre explique comment ses ques tions ont amené au but. Ent Fe 2 En réalité, « truc », l'erreur est de croire qu'il y a um un escamotage quelconque, que nouë devrons imiter le juge d'instruction — un jug d'instruction malhonnête — cherchant à obtenim l’aveu d'un inculpé. Le caractère de nos questions} à mon avis, sera tout autre, et bien simple : elles seront celles que l'élève aurait dù se poser lui même, celles que, instruit par cet exemple, il dev. se poser lui-même une autre fois. Ce que seront ces questions, comment il fau apprendre, non pas seulement au maître, mais utile au point de vue «heuristique », la question suivante «En quoi le problème actuel diffère-t-il des problèmes ant logues déjà traités? » 1 La méthode allemande, telle qu'elle nous est déeri (Marotte, ouvrage cité, page 26) à propos du théorème « Ja somme des angles d’un triangle est égale à deux droits» n'est pas entièrement à l'abri de l'objection précédentes Dans cet exemple — qui n'est, d'ailleurs, pas parmi les pl simples au point de vue qui nous occupe — le point sil transport des angles en un même point) est « escamotés Comme M. Durand, je voudrais voir, dans ce cas, le pros fesseur dire nettement les choses et faire remarquer qu'il indique cette partie de la solution. JACQUES HADAMARD — RÉFLEXIONS SUR LA MÉTHODE HEURISTIQUE 503 l'élève lui-même à les diriger, c'est ce que j'ai essayé ailleurs’ d'esquisser. J'ai tenté, autrement dit, de dégager les règles que tous les mathémaliciens suivent inconsciem- ment lorsqu'ils raisonnent ou, du moins, les princi- pales d’entre elles, celles qu'on retrouve sensible- ment les mêmes, dans la plupart des exemples. Ce sont, d'ailleurs, des règles de bon sens, des truismes “pour ainsi dire. Elles reviennent, en somme, à poser “correctement le problème principal. - Doit-on dire que cela suffit toujours pour le ré- “soudre? Évidemment non : nul ne peut avoir la pré- tention de réduire la science en machine. Une fois qu'on à bien compris la position de la question, “il reste néanmoins, en général, quelque chose à trouver. … De ces deux éléments de la solution — l'applica- tion de règles nécessaires de logique ou l'invention proprement dite — quel est celui qui manque le plus souvent aux élèves? Tout porterait à croire que c'est le second; l'expérience montre que c'est le premier, celui qui, semble-t-il, ne devrait pas compter. Il s’agit, par exemple, d'un cercle; l'élève n'ignore pas la définition du cercle : il la dira sans hésitation si vous la lui demandez. Mais, de lui-même, il ne se la demandera pas et ne pensera pas que ce soit le moment de se la rappeler. Il ne pensera pas à se demander quelle est l'hypothèse du théorème qu'il doit démontrer, ou il négligera de s’en servir. C'est ‘d'une de ces causes ou d’autres lout analogues que proviendra la plupart du temps son embarras. Quand on l'aura astreint à « substituer la définition | au défini », à utiliser toute l'hypothèse, quand encore — il faut avoir interrogé des étudiants de Faculté . pour imaginer l'ignorance qui, actuellement, peut Subsisler sur ce point après des années d'études mathématiques — on l’aura forcé à s'assurer que chacune des transformations qu'il fait subir à la “question n’en altère pas la signification véritable, On constalera que l'aide qui lui est ainsi apportée est, la plupart du temps, la seule dont il avait besoin. — L'enseignement ainsi entendu, tout en étant heu- ristique, restera, comme on le voit, didactique en un certain sens : il enseignera des règles de mé- ….thode au lieu de résultats. Seulement, bien entendu, ce ne sera pas un exposé à priori; il sera exclusi- vement pratique et interviendra à mesure que les occasions se présenteront de le donner. On voit par là comment nous pourrons réaliser ce double idéal, en apparence contradictoire, d'une méthode qui ne doit ni abandonner l'écolier à ses Lecons de Géométrie élémentaire (géométrie plane), Note A. propres forces ni lui souffler directement ou indi- rectement ce qu'il doit dire. Il est clair que nous sommes loin du reproche de dissimulation que nous avions craint d'encourir tout à l'heure. Non seulement nous n’aurons pas à faire illusion à nos élèves, mais nous leur montrerons soigneu- sement ce qui leur aura manqué. Nous n’aurons. pas à craindre, dans ces condilions, le danger, Lrès grave évidemment, dont nous menace M. Durand et qui a particulièrement frappé M. Tannery : cette sorte de frottement au départ, grâce auquel l'esprit attendrait toujours du dehors l'impulsion initiale: qui le mit en mouvement. Cette impulsion, les. règles dont nous avons parlé ont précisément pour objet de la fournir. À nous de forcer l'élève à s'en servir et de lui faire sentir qu'il est dans son Lort en ne les appliquant pas. V Pour arriver à ce résultat, faudra-t-il, comme nous l’avions pu supposer plus haut, faire traiter. heuristiquement {outes les questions? Evidemment non : cela n'est ni indispensable, ni même dési- rable. On appliquera la méthode heuristique, pas assez pour s'ynoyer, assez fréquemment, cependant, non seulement pour la faire comprendre, mais pour faire sentir qu'on aurait pu l'employer toujours si on l'avait voulu. Nous laisserons tout d'abord de côté les quelques. questions véritableraent difficiles, où la difficulté ne se laissera pas fractionner, toutes celles, en un mot, où il faudrait intervenir autrement que par les règles lrès générales de méthode dont nous avons parlé, combinées avec l'intuition que l'on peut natu- rellement obtenir de l'élève. Celles là, si tant est qu'elles existent, sont l'exception; les autres sont assez nombreuses pour qu'il faille choisir entre elles. Nous pourrons écarter encore, en particulier, non seulement les solutions plus ou moins artifi- cielles, — il est clair qu'il ne faut, autant que possible, les enseigner ni par la méthode heuris- tique, ni autrement, — mais aussi, au moins au premier abord, les démonstrations très parfaites, très systématisées, dans lesquelles on est trop souvent obligé de masquer l’idée primitive par la perfection des détails : — toujours les « idées fos- siles». Le théorème des projections est fait pour- être enseigné ex professo, et aussi la méthode des isopérimèlres, si elle n'avait pas heureusement disparu des programmes; mais il n’en est pas de même pour la méthode des périmètres. Non seu- lement cette dernière ne renferme rien qui ne- puisse être rediscovered, mais l'élève peut et doit 504 ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON prendre conscience que (à un point près peut-être, : la position même de la question‘) besoin de l’apprendre pour la savoir. L'expérience fera trouver à chacun la mesure convenable, d'autant plus aisément que rien n'em- pèche ici d'opérer d'une manière progressive. Rien n'oblige non plus à introduire la méthode heuristique sous une forme unique. Elle peut être substituée à l’enseignement didactique; mais elle peut très utilement aussi être employée avant lui, le professeur résumant, — ou, quelquefois, faisant résumer, — sous forme concise, les raisonnements qu'il a fait trouver par la classe, s’il juge que l'ordre et la clarté l’exigent. il n'a pas Me voilà bien près d’être d'accord avec M. Durand, qui — je n'ai pas de peine à l'en croire — emploie, lui aussi, quelquefois la méthode heuristique et n’a pas attendu, pour cela, qu'on en parle. Mais on voit aussi sur quel point je me sépare de lui. Je ne crois pas qu'il consente, comme je le demande, à ap- pliquer cette méthode assez souvent pour montrer qu'on peut et même qu'on doit l'appliquer presque toujours. Or, c’est précisément cela qui constitue pour moi l'essentiel. L'important n'est pas d'arriver à faire employer la méthode pendant la classe, mais L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON I. — GÉNÉRALITÉS. L'industrie moderne consomme une très grande quantité de matières usantes ou « abrasifs » ?. Dans chaque usine, on s’en sert journellement pour l’affütage des outils des machines; il est inté- ressant de constater qu'avec un objet complète- ment opposé, l'emploi des matières usantes y est aussi important que celui des matières lubréfiantes. Dans la plupart des ateliers, les abrasifs pénè- trent sous la forme de toiles, de papiers enduits, ou bien de meules; ce sont eux qui servent aussi bien pour la rectification des organes les plus ténus et les plus délicats de la mécanique de précision que pour l’ajustage des ‘plus énormes pièces de lu ! Bien entendu, cette difficulté est dissimulée dans le fractionnement que l'enseignement actuel applique d'une manière systématique. 2 Tiré du latin « abradere », « ôter en raclant ». Nous proposons en francais, pour désigner les matières usantes, l'adoption de ce terme, déjà employé dans les pays de langue anglaise; sa racine a, du reste, déjà servi à créer dans notre langue le mot « abrasion », usité dans la l(ermi- nologie géologique. de la faire employer aprés, lorsque l'élève est. abandonné à lui-même. F4 Tout d’abord — pardon pour cette tautologie qui le faisait remarquer M. Tannery, la correction de ces mêmes problèmes soit particulièrement impor=« tante sous ce point de vue. . Ensuite et surtout dans la revision, dans l'étude du cours, d'une lecon à l’autre. C’est là qu'on ne doit pas négliger, à mon sens, de rendre l'emploi de la méthode heurislique aussi continu que pos: sible. Un bon élève doit être habitué, en principes à n’en pas connaitre d'autre. | C'est cela, si je ne me trompe, qu'il faut entendre par « apprendre à apprendre ». Ou cette devise — qu'on n'applique peut-être pas autant que l'on en parle — ne veut rien dire du tout, ou elle veut dire que, à sa sortie du collège, le jeune homme doit être mis à même de remplacer à son usage les professeurs qu'il quitte. Je ne sais si la méthode heuristique permettra de réaliser cet idéal, mais je crois bien qu'elle seule, convenablement appl quée, peut prétendre, dans le domaine qui nous occupe, à y travailler efficacement. Jacques Hadamard, Professeur adjoint à la Sorbonne. Professeur suppléant au Collège de Frances et qui leur doivent ce cachet de « terminé » d'avenant. qui a marqué la marche de la plupart des autre industries ; elle était restée, comme matériau peu, veaux produits artificiels (carborundum, corinda vait autrefois, elle a ouvert le champ à de nouvelle et fertiles applications. ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON 505 LA 2 “nous montrera le géologue déterminant la nature, “les affinités et la répartition des roches éruptives à “corindon, qui, il y a peu d'années encore, étaient seulement connues comme curiosités pétrographi- ques ; elle nous fera voir ensuite l'ingénieur, à la lumière de ces travaux, recherchant dans ces mêmes roches le corindon en quantités économi- quement exploitables, Dans les pages qui vont suivre, nous examinerons d'abord très rapidement les matières usantes an- ciennement employées, en insistant toutefois par- ticulièrement sur l’émeri. Nous nous attacherons ensuite au corindon pur el étudierons ses propriétés brasives, ses modes de gisement et ses méthodes de traitement. En finissant, nous parlerons som- airement des autres nouveaux abrasifs et les omparerons au corindon dans leur lulte pour la onquête du marché. IL. — ABRASIFS ANCIENS AUTRES QUE LE CORINDON PUR. Y $ 1. — Propriétés fondamentales des abrasifs. « Dans un abrasif, la propriété qui prime toutes Nes autres est la dureté, en attachant à ce mot le “sens restreint que la Minéralogie lui attribue; nous entendrons donc par dureté la capacité que possède un corps de rayer certains corps, dont la “dureté est ditemoindre, et d'être rayés par d’autres, “dont la dureté est dite plus grande. — Pour exprimer ce caractère, le minéralogiste Mohs a établi une échelle numérique où le chiffre 4 représente la durelé du talc, minéral très facile- “ment rayable à l'ongle, et le chiffre 10 celle du Miamant, minéral qui raie tous les autres et n'est | rayé par aucun; les intermédiaires ont élé choisis E rbitrairement. Cette échelle de Mohs, qui est la plus | fréquemment employée en Europe, est la suivante : 10° diamant. Remarquons qu'il n'y a pas propor- tionnalité entre la dureté de ces corps et le chiffre “! V. dans cette Revue (30 janvier 1905) F. Osmonr et G. Carraun : Les enseignements scientifiques du polissage, 51 et suivantes. Les plaques minces, employées pour étude micrographique des roches, permettent d'observer juelques-uns des phénomènes décrits. Les minéraux y pré- sentent parfois des rayures périodiques, remarquablement mettes et fortuitement produites par la matière usante. Je 1eS ai constatées surtout dans les plages de quartz. Aussi la liste des corps capables d'être employés comme matière usante est-elle très grande! En fait, ceux qui présentent une réelle importance écono- mique et qui servent aux usages de l'industrie, les seuls dont nous nous occuperons ici, sont en nombre très restreint. Disons tout de suite que c’est principalement par leur dureté que les anciens abrasifs se distinguent des nouveaux. Tandis que les premiers (saufl’émeri) ne dépassent pas une dureté de 7, les derniers jouissent d'une dureté de 9 et au-dessus (sauf l'acier broyé). $ 2. — Les abrasifs anciens autres que l'émeri. Les matières usantes anciennement connues peu- vent être rangées en deux grandes classes : celle des abrasifs artificiels, et celle des abrasifs na- turels. La classe des abrasifs artificiels est la moins abondante et la moins importante; elle est repré- sentée par le verre pilé, qui sert à la fabrication du papier de verre, et par le rouge d'Angleterre ou colcotar (Fe*O°). Au contraire, la classe des abrasifs naturels compte de nombreux produits; nous la diviserons, par suile, en trois groupes basés sur leur compo- sition chimique : 1° Les abrasifs siliceux, formés de silice pure non combinée ; 2° Les abrasifs silicatés, formés de silice com- binée à différentes bases; 3° Les abrasifs alumineux, où l'élément efficient comme abrasif est l’alumine pure. 1° Les abrasifs siliceux appartiennent tous à la famille du quartz; ils sont composés exclusivement de silice ; leur dureté est de 7. Ce sont : a) Le quartz filonien, qui, broyé et pulvérisé, est employé au polissage du bois et des pierres; on en fait aussi du papier dit « papier de verre » ; b) Les sables quartzeux servent aux mêmes usages. On les trouve, en particulier, à différents étages de l’Eocène et de l'Oligocène du bassin de Paris ; c) Consolidés, ils constituent le grès, que l'on emploie généralement en meules dans de multiples applications. C'est le grès de Fontainebleau, résul- tant de la cimentation de sables d'âge stampien, qui forme la plupart des pavés de Paris. A leur sortie de la carrière, ces pavés sont pleins de cohé- sion et le marteau les attaque difficilement. Mais quand, une fois polis et usés par le roulage et les coups répétés, ils sont mis au rebut, il suffit d'un seul coup de marteau bien appliqué pour les désa- gréger complètement et les faire tomber en une fine poussière, qui constitue un excellent abrasif; d) Les silex, concrétions qui se trouvent en 506 ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON abondance dans les assises crélacées et, en particu- lier, dans celles du bassin de Paris. On les broie et les emploie aux mêmes usages que les sables ; e) Les meulières, provenant de la décalcification de calcaires siliceux, servent comme meules pour la mouture ; f) Nous pouvons adjoindre à cette liste le éripoli, opale pulvérulente, d'origine chimique ou orga- nique (diatomées, radiolaires, spongiaires, etc.); sa dureté est moindre que celle des produits pré- cédents. 2° Les abrasifs silicatés comprennent une roche, la pierre ponce, résultant de la consolidation de laves volcaniques acides dans des conditions par- ticulières, et un minéral, le grenat almandin. Ce dernier est parfois un élément constituant des roches éruptives, mais le plus souvent on le ren- contre dans les schistes cristallins. En particulier en Espagne, à Hoyazo, près du cap de Gate, des sables grenatifères sont assez activement exploités; ils proviennent du démantèlement d'une andésite ayant digéré des gneiss à grenat. On rencontre des sables semblables en Bretagne. Ces sables ne contiennent pas seulement du grenat, mais encore une certaine quantité de magnétite, du spinelle, un peu de corindon, etc., minéraux lourds et durs qui se sont concentrés avec lui. Comme la dureté du grenat est élevée et varie de 6,5 à 7,5, il est très employé pour la contrefaçon des meules d’émeri, mais il est loin de les valoir; cependant, sa fracture généralement irrégulière augmente son rendement, ainsi que nous le verrons plus loin. Le papier de grenatest très employé dans la cordonnerie; un des meilleurs grenats provient dela Caroline du Nord‘. 3° Le groupe des abrasifs alumineux est unique- ment constitué par l'émeri. $ 3. — L'Émeri. Sans nous éloigner de notre point de vue, nous nous arrêterons plus longuement sur ce corps. En effet, à cause de la prépondérance qu'il a longtemps exercée et qu’il exerce encore sur le marché, il se trouve être le principal concurrent des nouveaux abrasifs ?. L'émeri est une roche de couleur gris de fer, généralement rubanée, mais parfois massive, essen- tiellement composée d’un agrégat, finement grenu ou compact, de corindon (Al°0°) et d'oxydes de fer (magnétite et hématite). 1 Voir J.-H. Paarr : The production of abrasive materials in 1901. U. S. Geological Survey, Washington, 1902, p. 34. ? En outre, rien n’a été publié en France sur l'émeri depuis de nombreuses années, Pour ce qui concerne la minéralogie et la géologie de cette roche, ainsi que la bibliographie du sujet, voir G. Tscnenmak : Ueber den Smirgel von Naxos. Tschermak's mincralogische und petrographische Milthei- lungen, t. XIV, p. 310, Vienne, 1894. C'est l’ile de Naxos, dans l’Archipel grec, qui fournit, sinon la plus grande quantité, du moins la meilleure qualité d'émeri. Ses gisements étaient déjà connus dans l'Antiquité; ils se trouvent en masses lenticulaires allongées, de 5 à 50 mètres d'épaisseur, dans un calcaire saccharoïde, au milieu de schistes cristallins. Nous discuterons leur mode de formation plus loin, quand nous examinerons la géologie du corindon. La densité des échantillons oscille de 3,64 à 4,07; il est impossible de baser sur elle un indice de leur pureté. | - Les grains de corindon sont généralement angu- leux et, dans de nombreux gisements, ils sont par- tiellement colorés en bleu. Leur grosseur varie de Onm,05 à 0,52, À côté de la magnétite et de l'hé-" matite, qui, avec le corindon, constituent ses élé- ments essentiels, l'émeri contient encore de nom- breux éléments accessoires. Parmi ceux-ci, les minéraux les plus abondants sont la tourmaline «4 la margarile, souvent visibles à l'œil nu, le chlori- toïde et la muscovite; le diaspore, le disthène, la. staurotide, la biotite et le rutile ne s'y présentent qu’en pelites quantités; le pléonaste, l'idocrase et la pyrite sont encore moins fréquents. A cause de la finesse de ses différents consti- tuants, on ne fait pas subir à la roche de sépara- tion mécanique. Elle est simplement broyée, pulvé= risée, et, par tamisage, classée en grains de différentes grosseurs. On prépare aussi une poudre plus fine, appelée « potée d’émeri ». Cette dernière opéralion s'appelle le « minutage ». Elle consiste à brasser vigoureusement la matière dans une cuve remplie d'eau ét à l’abandonner ensuite au repos, au bout de cinq minutes, de dix minutes, de quinze minutes, etc., on recueille la poudre déposée, qui est ainsi de plus en plus fine, et on obtient ce que l'on appelle l’émeri cinq minutes, l'émeri dix minutes, l’émeri quinze minutes, etc. Cette ma= nœuvre est très délicate et exige une très grand habileté pour ne pas mélanger les particules d diverses grandeurs. L'ouvrier parisien à acquis l'émeri préparé à Paris une grande réputation» L'émeri est livré au commerce sous forme de grains, poudre, de meules et d'enduits de papier ou de toile. C'est uniquement la présence du corindon qu donne à l'émeri sa capacilé abrasive; c'est pou cela que nous l'avons classé comme abrasif alumi neux, malgré la présence d'autres minéraux. La magnétile et l'hématite, qui forment la grande masse de ces derniers, ont une dureté de 5,5 à 6,24 par conséquent lrès inférieure à celle du corindon,. qui, nous l'avons vu, est de 9; le minéral le plus dur qui s'y présente en quanlité notable est las tourmaline, qui n’atteint que 7,5. Dans le travail, ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDO N 507 ces matières neutres, incapables d'un effet utile, ne servent qu'à échauffer et à encrasser: de plus, enrobant plus ou moins les grains de corindon, elles les empêchent d'agir avec toute leur efficience. Pour cette raison cependant, la meule d'émeri, plus » élastique, sera, dans quelques cas, préférée à la meule de corindon, trop brutale. Dans quelques cas aussi, On utilisera la propriété des meules d'émeri d’être très résistantes, pour associer cet abrasif au corindon; en mariant ainsi leurs qua- lités, on obtiendra des meules très résistantes et très coupantes. L'effet ulile d'un émeri étant donc fonction de la quantité plus où moinsimportante de corindon qu'il contient, il est nécessaire, pour apprécier les qua- lités d’un tel abrasif, de connaitre sa teneur en ce minéral. Nous reproduisons ci-dessous, d’après Tscher- mak?, les analyses chimiques de deux émeris de . Naxos, tous deux très riches en corindon: celui de Kremno a une densité de 3,71 et celui de Renidi » de 3,98. KREMNO RENIDI QU RENE IE 5,64 5,45 CR ER ATIALSE RTE A5 0,88 SOS AMEN HE. en Le 27,67 56,52 RESUSSe eET OANUE 33.36 34,65 MIROIR Pe TETIEr 0,83 0,43 CD. Luis sut 0,43 0,90 NERTICORIET PEN MRNENE Traces 0,60 ROM Se Er 0,31 0,40 AUS NANTES MEN ASS Traces Traces. GIE PR MEET » Traces. Perteiaurfeu, 2% 0,70 0,42 ; 100,09 100,25 Leur composilion minéralogique est la suivante : $ : . KREMNO RENIDI * "A7 = ; Corindon. . . . 52,4 50 # MACNEE PRE PE 32,1 33 H Tourmaline AE 11,5 9 é, Phoritordes - 7-1. » 4 k MUSCOVITE = RE 2,0 3 ) Marsariten 01.0 0: 2,0 » J RÉUNIE » 1 { 100,0 ‘00 $ Ÿ (La totalité des oxydes de fer a été calculée comme - magnétite). Ces chiffres de 52,4 °/, et de 50 °/, en corindon sont très élevés et ne sont obtenus que dans des échantillons d'excellente qualité. La teneur — moyenne des émeris que l'on trouve dans le com- —merce varie de 30 °/, à 40 °/,. k. Il est bon de remarquer que le vourcentase en .corindon d'un émeri ne résulle pas de la lecture “immédiate de son analyse chimique. En effet, le ! Loco cilato, p. 325 et suivantes. FA chiffre porté en regard d'AlO* ne représente pas uniquement la quantité de corindon que contient la roche, mais aussi la part d'alumine qui entre dans la composilion des divers silicates complexes, tels que tourmaline, chloriloïde, muscovite, mar- garile, part qui ne peut pas être comptée comme matière abrasive. Pour apprécier cette teneur en corindon, il est nécessaire de passer, par le calcul, de la composition chimique totale à la composition minéralogique quantilative, ou bien d’avoir recours à un essai direct. En résumé, la supériorité de l'abrasif « corindon » sur l’abrasif « émeri » réside dans les faits sui- vants : Dans l'abrasif « corindon », la totalité de la matière travaille et contribue à l’effet utile. Dans l'abrasif « émeri », le minéral corindon est le seul élément actif, les autres minéraux n'ayant d'autre rôle que celui de témoins inutiles et même génants. Le prix de l’émeri, à Paris, varie suivant les qua- lités, c'est-à-dire suivant la teneur en corindon, de 250 francs à 350 francs la tonne. Les gisements de Naxos‘ appartiennent au Gou- vernement grec; ils sont exploités, mais très pri- mitivement, par les habitants, qui en extraient annuellement 5.000 à 6.000 tonnes. Le prix de la tonne sur le quai de Syra, dans une île voisine, est fixé à 106 fr. 50, tandis que le prix de revient ne s'élève qu'à 53 fr. 20. Le bénéfice du Gouvernement grec comme vendeur est donc de 50 °/,. En 1903, où la production a été de 5.813 tonnes, le revenu, de ce fait, a été d'environ 300.000 francs, somme qui est employée à l'amortissement de la dette publique. La Turquie d'Asie, dans les environs de Smyrne (Aïdin) et de Kulah, a une produclion de 17.000 à 20.000 lonnes. Cet émeri, bien moins apprécié que celui de Naxos, est vendu par tonne de 70 à 100 francs à Smyrne, et de 50 à 100 francs à Kulah. Les Etats-Unis” extraient environ 4.000 tonnes d'émeri par an des mines de Chester (Massa- chussets) et de celles de Peekskill (New-York). Leur production pourrait être facilement augmentée sans la concurrence des bas prix des émeris de Turquie et de Naxos, qui arrivent dans les ports comme lest. L’importation annuelle alteint de ce fait le chiffre de 12.000 tonnes. On trouve encore de l’émeri* à Jersey, en Italie (Parme), en Espagne (Ronda), en Saxe, au Pérou, aux Indes et dans de nombreux autres points; mais ces gisements sont peu ou pas exploités. 4 5.-H. Prart : Loco citato, p. 41. The Engineering and Mining Journal, New-York, february 16, 4905, p. 347. > J.-H. Pratr : Loco citato, p. 51. * Fucss et pe Lauxay : Traité des gites minéraux et métal- lifères, t. 1, p. 601 et suivantes, Paris, 1893. 08 ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON II[. — LE CORINDON ! $ 1. Ses propriétés abrasives. Sous forme de pierre précieuse ou de minéral non transparent, l'alumine cristallisée est connue aux Indes depuis la plus haute antiquité. Elle était désignée sous le nom de « Korund », terme sans- crit dont nous avons fait le mot corindon. Les gise- ments de Cachemire, pour le saphir, ceux du Siam, de Ceylan et surtout ceux de Birmanie, pour le rubis, sont les plus célèbres. C'est en particulier de ces derniers qu'on tire ces pierres de couleur « sang de pigeon », dont la valeur est très supé- rieure à celle des plus beaux diamants de même poids. Au corindon, les Hindous attachent encore de nos jours de précieuses vertus surnalurelles ou médicales. D'après eux, certains rubis influent sur la vie, la mort, la richesse, le bonheur de leur pos- sesseur, tandis que le saphir le délivre de ses mau- vaises passions; par contre, les variétés communes agissent plus prosaïquement comme fébrifuge et contre les hémorragies. Mais ce n'est pas dans cet esprit que nous l’étu- dierons ici. Nous nous bornerons à examiner, parmi toutes, celles de ses propriétés qui ont de l’impor- tance au point de vue abrasif. Dans la nature, le corindon se présente en cris- taux dont les dimensions varient depuis celles que nous avons vues au corindon microscopique de l'émeri jusqu'à une longueur de 20 centimètres ; il se trouve masses cristallisées sans formes extérieures propres, dont le poids atteint parfois 700 kilogs. Sans insister sur ses propriétés cristallogra- phiques et opliques, rappelons seulement qu'il cris- tallise dans le système rhomboédrique en donnant des formes généralement allongées suivant l'axe ternaire, tandis que la plupart des cristaux de reproduction artificielle sont tabulaires et aplatis perpendiculairement à cet axe. Notons encore que son indice de réfraction assez élevé, n,—1,7676 (saphir), le met en bonne place parmi les pierres précieuses. Le corindon est de l’alumine pure cristallisée; aussi en 1 Pour tout ce qui est relatif au corindon, nous avons principalement eu recours aux ouvrages suivanls : W.-G. Mizcer : Report of the Bureau of mines, Toronto, années 189$ et suivantes. J.-H. Prarr : The oceurence and distribution of corundum in the United States. U. S. Geological Survey, Washington, 1901. ? Nous verrons plus loin que le rubis, le saphir, l'éme- raude orientale, la topaze orientale, elc., sont des pierres précieuses très différentes, il est vrai, comme couleur, comme prix, mais qui toutes possèdent une même compo- silion chimique, celle du corindon: c'est de l'alumine pure cristallisée,. dans ses variétés hyaline et incolores, il répond à la formule AlFO°. IL est rarement aussi pur et il contient presque toujours de la silice, de l'oxyde de fer et de l’eau, impuretés qui agissent soit sur la dureté du minéral, soit sur sa qualité en tant que produit commercial. La teneur en eau a une action directe sur la dureté du minéral; plus ce dernier est anhydre, plus il est dur. En fait, presque tous les corindons, saufles cristaux transparents, contiennent de l'eau”, dont la quantité varie depuis une trace jusqu'à 2°/,. La silice provient de ce que, si le corindon offre une très grande résislance aux agents chimiques des laboratoires, il est au contraire, dans la nature, très facilement altéré en de nombreux minéraux silicatés, auxquels il fournit de l’alumine *. Dans le traitement industriel, ces minéraux, en général plus légers que le corindon, qui a une densité de 3,95 à 4,1, se séparent facilement de lui après broyage. Il n'en va pas de même de l’oxyde de fer, sous la forme de magnétite et d'hématite, dont la densité est voisine de 5, et qui se trouvent en général asso- ciées au corindon dans la roche mère elle-même. On n'arrive, par suite, que très difficilement à en débarrasser le produit commercial, qui en contient toujours une petite quantité. Quand elle existe, la coloration des cristaux de corindon est due à des traces d'impuretés diverses, qui n’ont aucune influence sur la dureté du miné- ral; en particulier, la couleur du rubis et du saphir est causée par de très petites quantités de chrome ou de fer. Si la dureté est la première qualité d'un abrasif, elle n’est cependant pas la seule; il faut encore qu'en s'usant les grains de l'abrasif conservent toujours des angles vifs. S'il en était autrement, le grain, au bout de quelques instants de travail, ne présenterait à la pièce qu'une surface mousse, inapte à y produire un effet abrasif. C’est ce qui se passe pour les matières qui ne possèdent pas de plans de clivage. Au contraire, dans les ma- tières qui offrent des plans de clivage, la pointe usée sera remplacée par une ou plusieurs pointes, ou plutôt arêtes, dites « arêtes conpantes » nous velles, suivant que la fracture du grain se sera effectuée suivant un seul ou plusieurs plans diffé- rents. Toutefois, ces clivages ne doivent pas être trop faciles, sinon le grain se désagrégera trop vite et tombera rapidement en poussière. Le corindon est privilégié à ce point de vue; il ‘ Cetle eau est due à la présence d'hydrates d'alumines ® À. Lacroix : Minéralogie de la France et de ses colonies t. II, p. 240, Paris, 1901. ® J1 faut en excepter quelques corps qui, comme 1e grenal, ont une cassure conchoiïdale ou très irrégulière; qui permet la régénération de pointes actives. 30% ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON présente non pas des plans de clivage, mais des plans de moindre résistance, dits plans de sépara- tion, suivant la face perpendiculaire à l'axe ternaire a! (111) et suivant les côtés du rhomboëdre pri- mitif p (100); les plans de séparation se distinguent . des plans de clivage en ce qu'ils ne se produisent . pas en nombre illimilé comme ces derniers. Cette précieuse propriété ne se constate pas à un même degré dans tous les échantillons de corin- don de provenances diverses. Chez quelques-uns, . ces plans de séparation n'existent qu'en trop petit … nombre, tandis que dans d’autres, au contraire, ils sont trop multipliés et provoquent une usure trop . rapide de la matière. C'est ce qui se produit, par exemple, dans un certain corindon blanc que l’on trouve en Géorgie et qui possède des plans de | séparation si rapprochés et si développés, que, quand on l'écrase, il se réduit presque complète- - ment en poudre. De ce fait, tous les corindons ne sont donc pas propres à fournir une matière abrasive de bonne qualité. Notons, en passant, que la dureté, résistance à l'usure, est indépendante de la résistance au choc, ou fragilité. Le diamant, le plus dur de tous les | minéraux, se brise très facilement sous l'action, à même légère, du marteau. Un bon abrasif ne devra . pas être trop fragile, sinon il se cassera quand il viendra au conlact de la pièce à travailler; par contre, s'il n'est pas assez fragile, il la martèlera. … Les corindons subissent d'une façon très variable “l'action de la chaleur. La plupart peuvent être employés pour la confection des meules dites céra- - miques, si les oxydes de fer et les silicates qui les ; accompagnent ont été suffisamment éliminés; si- à non, à la faveur de la haute température et de À l'agglomérant qui contient aussi de la silice, il se « formera des silicates facilement fusibles, qui s’op- poseront à une bonne fabrication. D’autres corin- dons, eux, une fois chauffés, possèdent le défaut de se réduire en poussière. En définitive, nous conslatons que les diverses qualités que nous venons de reconnaître néces- Saires pour un corindon apte à être employé omme abrasif sont impossibles à apprécier à la lecture d’une analyse chimique ou à la suile d'un examen microscopique. Pour déterminer les qua- ités coupantes d'un corindon, il est nécessaire en construire une meule et de se livrer sur elle à n essai direct. $ 2. — Géologie du corindon. à Jusqu'à ces dernières années, le corindon était “considéré comme un minéral peu répandu dans l'écorce terrestre, en dehors des quelques points “où on le connaissait comme élément de l'émeri. Depuis peu, les études des pétrographes se sont par- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 509 ticulièrement portées sur les roches éruptives à corindon, et en ont montré la grande diffusion; à la suite de ces recherches, la liste des gisements con- nus s'enrichit, tous les ans, de localités nouvelles. C'est précisément à la même époque que le corindon a été recherché comme abrasif. Il est inté- ressant de noter le développement de cetle appli- cation industrielle, suivant sans retard les premiers travaux purement scientifiques des géologues, s’en inspirant dans ses recherches et fournissant, par la découverte d'affleurements ou par l'ouverture d’im- portantes carrières, de nouveaux matériaux pour des études théoriques, dans des conditions d'ob- servation particulièrement favorables. Le corindon se rencontre dans quatre sortes de gisements : dans les roches éruptives (intrusives ou volcaniques), dans les roches sédimentaires modifiées par les précédentes, dans les schistes crislallins et, enfin, dans les alluvions qui résultent du démantèlement par les eaux de tous les gise- ments précédents. 1. Dans les roches éruptives. — C'est Moroze- wicz' qui, un des premiers, a montré que, dans les roches éruptives, l'alumine joue un rôle de tous points semblable à celui de la silice. La plupart des roches éruptives fondues ou magmas contiennent dans leur composition de l'alumine et de la silice: partant de ce point de vue, Morozewicz a classé ces magmas alumino- silicatés en deux groupes à développements paral- lèles, subdivisés eux-mêmes en trois types : Groupe A : 1) Magma sursaturé d'alumine. — saturé d'alumine. — non saturé d'alumine. 2 1 Groupe B : 1) Magma sursaturé de silice. 2) — saturé de silice. 3) — non saturé de silice. Quand, dans le magma, la silice se trouve en excès, la roche qui résulte de sa consolidation, si elle est holocristalline, renferme du quartz: de même, quand le magma est sursaturé d’alumine, cette dernière, lors de la solidificalion, peut se séparer en corindon. Ainsi le granite et la syénile à corindon sont l’un et l’autre des magmas alu- mino-silicatés saturés, le premier par la silice, le second par l’alumine. Les deux roches diffèrent entre elles en ce que le quartz de l'une est remplacé dans l’autre par du corindon. 1 Voir J. Morozewicz : Experimentelle Untersuchungen über die Bildung der Minerale in Magma. Tschermak's Muneralogische und Petrographische Mittheilungen, p. 202 et suivantes, t. XVIII, p. 219, Vienne, 1898; et aussi W.-G. Mreuer et J.-H. PraTT : Loco citato, passim. Leg ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON Dans la Nature, on rencontre beaucoup plus de magmas sursaturés de silice que de magmas sursa- turés d’alumine. Aussi, les rares roches à corindon connues autrefois passaient-elles pour des excep- tions; les anciennes classifications n'en tenaient pas comple. Aujourd'hui, il n’en est plus de même, et l'on connail, dans le groupe sursaturé d’alumine, de nombreuses roches éruptives de profondeur cor- respondant à la famille des roches quartzifères ; par contre, la plupart des équivalents des roches volcaniques reslent encore à découvrir. M. Morozewicz a encore subdivisé ces roches à magma alumino-silicaté sursaturé d’alumine, que nous considérons ici, en deux parties, suivant que le Corindon y est associé à un feldspath alcalin ou à un feldspath calcosodique. Ces roches, dont un grand nombre de gisements sont connus en Russie, au Canada, aux Indes, etc., se rangent donc en : a) Corindon + feldspath alealin = syénites à co- rindon; b) Corindon + feldspath calcosodique — anor- thosites à corindon. Quand aux éléments de a) vient s'ajouter la né- phéline, nous avons les syénites néphéliniques à corindon. a) Syénites à Corindon. — Dans l'Oural, ces roches se rencontrent en gros filons ou en amas dans le gneiss, le granite et la syénite. Leur structure est parfois à très gros éléments ; le eorindon, en cristaux bleus qui atteignent jus- qu'à 10 centimètres de longueur et 1 centimètre. d'épaisseur, est entouré complètement par le felds- path orthose, auquelilest, par suite, nettement an- térieur. C'est la pegmalite à corindon, absolument comparable à la pegmatite proprement dite, où le quartz est englobé par l'élément feldspathique. La quantité de corindon y alteint 35,40 °/,; on ny constate que très peu d'éléments accessoires. A côté de ces roches, il en existe d’autres à élé- ments beaucoup plus petits, à structure grenue, qui sont constitués par du corindon, en cristaux d'un centimètre et plus, et de l’orthose microper- thitique, accompagnés plus ou moins abondamment de mica noir. Ge sont les syéniles à corindon pro- prement dites, ayant comme équivalents, dans la série quartzifère, les granites ordinaires. Elles con- tiennent 18,55 °}, de corindon (Nikolskaja Ssopka). Des roches semblables sont connues aux Indes et au Canada (Ontario). Dans cette dernière région, il s'y ajoute souvent de la hornblende et de la magné- tite, et de la muscovite et de l’apatite; de plus, il y a passage gradue]l de la syénite à corindon à une syénite néphélinique, qui elle-même contient par- fois du corindon, mais en moindre quantité que la roche précédente. b) Anorthosites à corindon. — À une roche de l’'Oural, anciennement connue et décrite par Rose, M. Morozewicz a donné le nom de Xyschtymite. Elle est composée d'un mélange grenu de petils cristaux automorphes de corindon, de 2 à 3 milli- mètres de longueur, et d’une masse grisâtre qui aété reconnue pour être le feldspath anorthile‘, sur laquelle on distingue des paillettes de biotite. C'est une anorthosite à corindon, dont la teneur en ce dernier minéral est de 47,51 ‘/,. Elle se trouve en filons ou en amas entre le granite et la serpentine. Une roche composée de corindon et de feldspath - oligoclase forme un filon dans la péridotite du Spanish Peak (Californie). On lui a donné le nom de plumasite*. Elle contient 16 °/, de corindon en cristaux ayant jusqu’à 5 centimètres de plus grande dimension. Une roche semblable, formant un filon: épais, existe à Mosso Santa Maria (Piémont) et a été autrefois exploitée. En dehors des roches précédentes, dont il con- stitue un élément essentiel et très abondant, le corindon est connu comme élément accessoire d'un certain nombre de roches. C'est en particulier le granite qui est le gisement des célèbres saphirs du Cachemire. Il nous faut encore considérer les gisements de” corindon qui se trouvent non dans des roches plus ou moins acides, comme les précédentes, mais dans des roches aussi basiques que les péridotites. Dans la Caroline du Nord, où ce genre de gise- ment a été et est encore plus ou moins activement exploité, la péridotite dominante est une dunite, parfois altérée en serpentine. Elle est en contact avec un gneiss amphibolique. Le corindon n'est pas un de ses minéraux accessoires; il est con" centré au contact de la péridotite et du gneiss, eb il en est séparé par une série de zones intermé-"M diaires d’altération (chlorite, enstatite, ete.). 1 M. J.-H. Pratt est d'avis que ce corindon s’est formé par «différenciation magmatique ». D'après lui, il élait contenu dans une solution de la masse fondue de la péridotite, au moment où cette roche a fait intrusion dans les roches déjà existantes; i a été un des premiers à se séparer le long de lx bordure extérieure, là où la masse a commencé à se refroidir; des courants de convection tendaient & amener dans cette zone de nouveaux matériaux qui contribuaient à son enrichissement en corindon. Une semblable hypothèse peut être invoquée pour la présence du corindon (comme aux États 1 G. Rose avait en 1842 attribué ce minéral à une espèt nouvelle, qu'il avait nommée Barsowite. M. Max Bauer en montré l'idendité avec le feldspath calcique. ? Voir A. LACROIX : corindon. Bulletin de la Société francaise de Mincralogie p. 147, Paris, 1905. # Loco citato, p. 16 et suivantes, 1901. A propos de la plumasite, roche Éd #. Pa PA A ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DÉS ABRASIFS ET LE CORINDON Unis) dans la harzburgile, dans la serpentine, dans la norite, et pour les gisements d’émeri de Chester dans le Massachussets *. Au lieu de cette hypothèse de la différenciation, .que nombre d’esprits se refusent à admettre, ne serait-il pas plus simple, pour expliquer au moins quelques-uns des cas précédents, d'adopter les idées francaises sur le métamorphisme des roches el de les ramener par suile au mode de gisement suivant? 2. Dans les roches mélamorphisées par les roches éruplives. — Les pélrographes français pensent que les magmas sont composés de deux parlies ; l’une qui, en se solidifiant, constitue la roche éruptive; l'autre, formée d'éléments minéra- lisateurs, qui exercent sur les roches voisines ce que l’on a appelé les phénomènes de métamor- phisme exomorphe. Le corindon, indubilablement ainsi formé, existe dans nombre de roches mélamorphisées, en général en petits cristaux, où il faut voir l'apport et l’in- fluence de fumerolles sur les matériaux préexistants dans la roche sédimentaire. Il n’est pas plus diffi-. cile d'admettre que, grâce à l'arrivée de minérali- sateurs et à leur action sur des sédiments riches en alumine, le corindon ait pu se former en plus grande quantité. On constate un phénomène du même * Nous donnons ci-dessous quelques analyses de roches éruptives à corindon; nous les accompagnons de la teneur en ce minéral : (a) (b) (c) (d) (e) SIDE UE 52,34 10,06 22,52 16,80 41,32 A0. ,46:05 13,65 16,51 13,89 30,36 KO 0,45 0,35 2,20 0,16 1,35 FeO ADR » » » » 1.55 Mg . .. 0,16 0,15 1,34 0,61 2,4% CAO 0,20 0,30 6,64 1,26 15,45 Na°0. 4,17 3,11 1,00 0,38 1,88 K°0 6,58 5,20 0,58 0,13 0,66 |; 2 2 FEMERR 0,40 0,46 1,58 0,76 0,10 COY 20. » » » » 0,58 Corindon. 18,55 35,40 47,51 59,51 » 99,50 99,28 99,88 100,10 101,69 (a) Syénite à corindon, Nikolskaja Ssopka (Persalane, Indare, Uralase, Uralose). D'après Morozewicz, loco citato, p. 219. (b) Syénite à corindon, Pegmatite, Monts Ilmen (Persa- lane, Indare, Uralase, Uralose). D'après Morozewicz, id. (c) Anorthosite à corindon, Kyschtymite, Borsowka (Per- Salane, Siberare, Borsowase, Borsovose). D'après Moro- ZEWICZ, loco citato, p. 212. (d) Anorthosite à corindon, Kyschtymite, Borsowka (Pef- Salane, Siberare, Kyschtymase, Subrang?). D'après Moro- ZEWICZ, id. (e) Anorthosite à corindon, Ontario (Persalane, Canadare, Canadase, Subrang ?) D'après W.-G. Miccer, Rapp. Bur. Mines, Toronto, 1899, p. 227. Ces analyses ont été prises dans l'ouvrage de H. S. Wa- Shington : Chemical Analyses of Igneous Rocks, U. S. Geo- logical Survey, Washington, 1903. Les termes entre paren- thèses indiquent les noms de ces roches d'après la nou- elle classification chimique américaine quantitative. 511 ordre dans la formation des roches à axinite (liniu- rite) dans certains contacts du granit. Quoi qu'il en soit, nous nous bornerons, sans prendre parli, à enregislrer ces deux hypothèses. 3. Dans les schistes cristallins. — Le corindon a été trouvé fréquemment dans ce mode de gisement; on l’a rencontré dans le gneiss, le micaschiste, dans les cipolins (émeri), el aussi associé au disthène, mais en quantités très variables. Tandis que, dans ce dernier gisement, dans le Connecticut, il existe en masses pesant parfois 700 kilogs, il constitue dans les cipolins de Birmanie, à Ceylan et au Siam, les rubisetles saphirs si rares, mais si recherchés. Il est bien difficile d'émettre une hypothèse plau- sible quant à la genèse de ce minéral dans ces schistes cristallins. Bien souvent, dans le voisinage de ces roches, on a constaté la présence de roches éruptives dont le corindon peut, par suite, être un produit de méta- morphisme. Parfois, comme à Naxos pour l'émeri, l'absence de roche éruptive dans le voisinage et la forme des gisements empêchent de faire cette supposition. On peut admettre alors que le corindon provient de la transformation, sous l’action du métamorphisme général, de couches de bauxite ou alumine hydratée, qui se forme comme produit de décomposition des roches feldspathiques dans certains cas où cette décomposition n’a pas lieu par formation de silicate d'alumine ou kaolinisation. 4. Dans les alluvions. — Les gisements dont ila été question dans les trois catégories précédentes se désagrègentsous l'influence des actions atmosphé- riques, et leurs éléments subissent des sorts divers. Le corindon, à cause de sa dureté élevée et de sa grande résistance aux agents chimiques, résiste à l'usure et à la décomposition; il se retrouve dans les alluvions, où souvent il se concentre, grâce à sa densité élevée, dans des parties plus riches. Ce sont ces alluvions qui sont exploitées surtout pour l'extraction des pierres précieuses. Il est pré- férable de chercher à les retirer de gisements secon- daires que de la roche mère elle-même. En effet, en plus des difficultés particulières dues à la téna- cité de la roche, que cette recherche peut présenter, l'éclatement des mines et le broyage des blocs dé- tériorent considérablement les minéraux précieux. — L'industrie du corindon. Gisements du Canada . g 2. Pour nous rendre compte du détail de la nature des gisements de corindon, de leur mode d’exploi- 1 Voir W.-G. Mizzer : Loco citato, passim. 512 ALBERT DE ROMEU -- L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON tation. et des méthodes de traitement de la roche extraile, nous ne saurions mieux faire que d’exa- miner l'état de cette industrie au Canada. C’est, en effet, ce pays qui possède les gisements de la plus grande importance économique, puisqu'à eux seuls Ces roches à corindon sont ou des syéniles ou des syénites néphéliniques. On constale que, le long d’un même affleurement, elles passent insen- siblement de l’une à l'antre, ou à une syénite néphélinique totalement dépourvue de corindon. Fig. 1. — Vue générale des carrières de la Canada Corundum Company à Craigmont (Ontario). ils fournissent la presque totalité du minéral pro- duit sur le marché; en outre, leur exploitation ne datant que de ces lout dernières années, les usines qui traitent le produit sont celles qui ont reçu les derniers perfectionnements. Le corindon est connu au Canada surtout dans l'Est de l’état Cette remarque est d'un intérêt considérable pour la recherche des gisements exploitables; en effet, elle permet, dans la prospection, d'éliminer les filons de granit et de syénite non néphélinique qui recoupent aussi les gneiss et qui ne ren- ferment jamais de matière ulile'. En général, c'estdanslasyé- d'Ontario,au nord du lac du même nom. Les affleurements se réparlissent géographique- ment sur bandes distinc- tes, dont celle du nord, la plus importante, s’é- tendsurunelon- gueur de 110 ki- lomètres et une largeur de 3 ki- lomètres dans les comtés de Haliburton, de Hastings et de trois nite proprement dite que le co- rindon se trouve en plus grande abondance, et, quand cette ro- che passe à la syénite néphéli- portion de co- rindon diminue proportionnelle: ment à la quan- tité de néphé- line. Cette règle n'est cependant pas absolue. La « Canada Corundum Com- Renfrew. Ces affleure- mentssontcons- uitués par des dikes ou des petits massifs de roches éruptives, qui traversent le gneiss amphibolique d'âge primitif (laurentien) qui forme la roche do- minante de la région. Hio..2: — Détail d'une carrière à Craïgmont (Ontario). considérables dans la commune de Raglan, comté d'Hastings: 1 Notons qu'on à constalé en certains points la présence d'anorthosites à corindon; jusqu'ici, elles n'ont pas été exploitées. nique, la pro-. pany,L'»explois M te des gisements ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON 513 La roche traitée, dont nous avons eu des échan- tillons entre les mains, est une syénite à très gros grains, contenant en moyenne 15 °/, de corindon. Ce minéral est accompagné du feldspath potas- sique microcli- ne et d’une grande quantité de feldspath cal- cosodique, qui rend la roche moins acide que les syénites or- dinaires et tend à la faire passer à une syénile basique ou mon- zonite. Les élé- ments accessoi- res sont le mica blanc muscovite et la magnétite; celle-ci est par- ticulièrement abondante. Il n'est pas rare que les cristaux de corindon atteignent des dimensions de 1 à 2 décimèlres | cubes; les feldspalhs qui les englobent prennent | une taille cor- respondante et la roche est une véritable peg- malite à énor- mes éléments, absolument comparable, comme nous l'a- vons vu plus haut, aux peg- matitessirépan- duesoüle quartz est entouré par le feldspath. Parfois la ro- che contient aussi de la bio- tile, de l’apatite et de la horn- blende. Les filons se poursuivent sur de grandes dis- tances, parfois plus de 20 kilomètres, avec une épaisseur d'une centaine de mètres. Tel des gise- - ments appartenant à la concession de la Canada — Arrivée du minerai à la partie Supéricure de l'usine Fig. 3. à Craiymont (Ontariv). Fig. 4. — Vue générale de l’usine à Craigmont (Ontario). — La roche brute entre à la partie supérieure de l'usine, et le corindon ressort à la partie inférieure sous la forme de produit commercial. Corundum Company, celui de la York Branch, a été reconnu sur une longueur de 1.500 mètres; il possède une largeur de 80 à 100 mètres. Notons que ce gisement estconstiluépar une syénite né- phélinique très riche en corin- don, ce qui est une exceplion, comme nous l'a- vons vu anté- rieurement. Le gisement actuellement ex- ploité (Craig Mine) est un fi- lon qui a une direction E.O. elest plaqué sur le flanc d'une colline de 1.500 mètres de lon- gueur et de 120 mètres de hau- teur (fig. 1), qui a sensiblement la même pente que lui. Au bas de la colline, il a 30 mètres d'épaisseur, tandis qu'à la parlie supérieure, érodé par les actions gla- ciaires, qui se sontexercées très intenses dans la région, il n’a plus que 10 à 12 mètres. Les exploita- tions se font à ciel ouvert par des carrières (fig. 2), dont quelques - unes ont une profon- deur horizontale de 21 mètres et une hauteur de 18 mètres. La roche, abaltue à la mine en gran- des masses, el éclatéeensuite à la dynamite en niorceaux ma- niables à la main, est chargée dans des wagonnets, et trans- portée, sur une voie de niveau (fig. 3), à l'usine, | qui se trouve à peu de distance. ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON L'usine est placée sur le flanc de la colline (fig. 4). Le minerai brut entre à la partie supérieure et ressort à la partie inférieure sous forme de produit commercial. A la sortie des wagonnets, arrivant de la car- rière, le minerai est jeté dans une trémie d'une contenance de 450 tonnes; il tombe de là dans un gros broyeur Blacke de 60 X 37 centimètres, puis est envoyé dans trois autres broyeurs Blacke de 22 X 37 centimètres, qui le réduisent en morceaux de 2 à 3 cenlimèlres cubes. Ces morceaux sont écrasés par six paires de rouleaux Overstrom de 40 X 100 centimètres. Les opérations précédentes constituent le broyage; les opéralions suivantes sont des opérations de classement et de sépara- tion. A la sortie des rouleaux, le minerai est envoyé dans deux séries de trommels à toiles de 3 milli- mètres. Au-dessous, se trouvent seize tables Overs- trom et Wilfley, où sont dirigées les parties les plus fines, et trois jigs, où l'on envoie les grains les plus gros. Les « têtes » et les « milieux » des jigs sont rebroyés et passent dans une nouvelle série de tables. Les « milieux » des tables passent dans cinq autres tables, et le corindon, séparé du feldspath, mais encore accompagné de magnétite, tombe dans sept fosses d’une capacité de 40 tonnes chacune. : Le minerai est ensuite séché dans un séchoir à tuyaux de vapeur. Il se rend, après, aux séparateurs magnétiques, qui enlèvent la magnétite. Il est divisé ensuite en vingt numéros de grains par des écrans présentant de 8 à 200 fils. Le produit est alors examiné au point de vue de la qualité; on considère qu'il ne doit pas contenir plus de 2 °}/, d'impuretés. S'il en renferme davantage, on le fait passer sur des tables et dans des jigs Hooper pneu- matiques. Le corindon, après toutes ces opérations, est mis en sacs de 50 kilogs el ainsi livré au consom- mateur. L'usine est capable de broyer quotidiennement 400 tonnes de minerai; les autres appareils ne sont susceptibles de traiter que la moitié de ce chiffre. Si besoin est, il sera facile de la parfaire en installant le supplément d'appareils, pour lesquels les bâtiments sont dès maintenant disposés. De ce fait, l'usine peut atteindre une production de 20 tonnes de corindon par jour. Le corindon est transporté en bateau de l'usine à Barry's Bay, où il est chargé sur les wagons du Canada Atlantic Railway ; de là, il est expédié direc- tement sur les Etals-Unis, ou sur Montréal, port d'embarquement pour l'Europe. $ 4. — Usages et emplois du corindon:. Comme abrasif, le corindon est employé à l’état de grains, de papier ou de toiles enduits, et d'agglo- mérés, qui sont généralement des meules. Disons seulement quelques mols sur ces dernières. Les principales qualités que l'on cherche à obtenir dans une meule, c'est qu'elle soit à la fois résistante et coupante. C'est celte dernière con- dition qui est la plus importante; si la meule est coupante, elle travaille vite et la production de l'ouvrier qui l'utilise se trouve augmentée; la supé- riorité du corindon sur les anciens abrasifs est évidente à ce point de vue. La question de la résis- tance à l'usure de la meule ne vient qu'en seconde ligne; nous avons vu plus haut que, dans certains . cas parliculiers, on était ainsi amené à mélanger l'émeri au corindon. Mais cette considération de durée de la meule doit être primée par celle de la rapidité du travail; l'économie de main-d'œuvre paie rapidement la meule. La fabrication a aussi une grande importance; ilen existe de nombreux procédés. Suivant que la meule sera destinée à tel ou tel usage, on emploiera tel ou tel autre de ces procédés. Le procédé général consiste à mélanger le corindon avec un agglomé- rant; on donne au mélange la forme et les dimen- sions voulues, on le comprime et on le soumet à l’action de la chaleur. Suivant la température atteinte, on peut classer les meules en deux caté- gories : 1° Meules de fabrication ancienne, où la tempé- ralure est variable de 0 à 400°. Les agglomérants peuvent être du caoutchouc, de la gomme laque, un ciment magnésien ou un silicate. 2° Meules de fabrication nouvelle où la tempéra- ture dépasse 400°. Ce sont les meules céramiques ou vitrifiées. L'agglomérant est un kaolin; on mélange le corin- don en grains à la pâte; on moule à la forme vou- lue et on sèche dans des fours. On solidifie ensuite par une cuisson à haute température dans des fours spéciaux. : La supériorité de celte dernière fabrication con-. siste en ce que les grains sont partiellement isolés et non complètement noyés dans l'agglomérant ; leurs angles peuvent mordre; ils agissent un peu comme les dents d’une fraise. Ces meules sont aussi très poreuses, et l’agglomérant se réduit en poussière aussitôt qu'il est en contact avec la pièce à couper. Nous avons vu qu'en dehors de ses usages abra- sifs le corindon est très recherché pour la bijou- ! Voir W.-G. MILLER : Loco cilato, passim. Loco citalo, passim; J.-H. PRAnT : »- RÉ os = nntsti = terie; ses diverses variétés byalines constituent le rubis, le saphir, le saphir blanc, l'améthyste orien- tale, l'émeraude orientale, la topaze orientale, etc. Les rubis de pelite dimension sont très employés en horlogerie où, à cause de leur dureté, ils servent de pivots de montre. On a cherché à utiliser le corindon pour la fabrication de l'aluminium, dans le four électrique: mais son prix est trop supérieur à celui de la bauxite, minéral qui lui est, par suite, préféré, malgré la purification qu'on est opus de lui faire subir. Dans les alliages aluminium-cuivre et ferro-alu- minium, On a essayé l'emploi du corindon, mais son usage a été abandonné. ‘Enfin, on tente depuis quelque temps de s’en servir en céramique, comme produit réfractaire. $ 5. — Statistique. Comme nous l'avons vu, la production indus- trielle du corindon a été, dans ces dernières années, limitée aux Etats-Unis, aux Indes Anglaises et au Canada. Les stâtistiques officielles publiées par le Geolo- gical Survey des Etats-Unis, si précieuses à con- sulter généralement, ne donnent que l'indication totale de l'émeri et du corindon extrails de son ter- ritoire. Il est, parait-il, assez difficile d'obtenir des chiffres dignes de foi, les producteurs se refusant à fournir des informations. Cependant, il n'y a eu aucune production de corindon en 1902, dans la North Carolina, qui en fournissait la plus grande partie, el la presque totalité des produits extraits était de l'émeri. Nous donnons la statistique des années 1897 et 1898 d'après le Ængineering and Mixing Journal de New-York (in Miller, Loco citato, 1899). 293 tonnes. PRO ARE Re crus 186 — Dans ces dernières années, la production a dû être presque nulle. Aux Indes, la statistique du corindon ne doit pas on plus être très exacte. Le Geological Survey des ndes indique les chiffres suivants : PORASOIBRE 12. RS dx 150 tonnes ABOR S AEES MNTe La 3230 — ARIR NE NRC 380 — ANTON SRE TT EE 238 — AU RARE ME T AT 69 — ESPERANT 22 — BDD EE Te Ra et 2 Le Rien … C'est au Canada que, dans ces dernières années, ni production a été la plus élevée. RENNES. Nr 351 tonnes JET RER 697 — EUR + + ER 1.170 — ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON IV. — ABRASIFS ARTIFICIELS ‘. un 1. — Carborundum. Le carborundum, découvert par Acheson, est un carbure de silicium contenant 32 °/, de carbone et 68 °/, de silicium. Il est obtenu au four électrique en cristaux enchevêtrés, tabulaires, d'assez petite taille (ne dépassant pas, en général, 1 centimètre de de plus grande dimension), mais brillants et très durs. Ces cristaux sont broyés, lessivés pour les débarrasser des impuretés, et classés en grains de différentes grosseurs. Le carborundum a une dureté un peu inférieure à celle du diamant ; aussi, dès le début, il fut em- ployé par les lapidaires pour remplacer la poudre de ce minéral ; depuis, son emploi s’est généralisé et étendu aux mêmes usages que les autres abrasifs. Sa fabrication est concentrée, aux États-Unis, à l'usine de Niagara Falls, qui, dans ce but, emploie 3.000 chevaux. De 450 kilogs en 1892, sa produc- tion est montée à 1.698 tonnes en 1902. Le prix actuel est de 800 francs la tonne, pris sur place: Voici la production de cette usine dans ces der- nières années. DS PIS ES EN OMONOOT 450 kilogs RCE OPEN 6.800 — AVE e M ee 27.000 — A'SIS TM EME 101.000 _ ABOGT fee, CA 5 2 550.000 — ARTE 7 ete 570.000 — LÉO ARE PACE ETS 650.000 — LRO AMIS TENUE 800.000 — UD MONET PP © 1.200.000 — LOL MENNEER re - 1.760.000 — CUS à MEME RENE 1.698.000 — L'augmentation n’a pas élé proportionneilement la même en 1902 que dans les années précédentes. Cela est dû, parait-il, à une interruption dans la fourniture du courant électrique et au manque de matières premières, causé par la grève des mineurs de Pennsylvanie. On fabrique aussi du carborundum en différents pays, notamment en France et en Autriche. La quantité produite, sans que nous possédions les chiffres exacts, est beaucoup moins forte qu aux États-Unis. Comme abrasif, on reproche au carborundum sa très grande fragilité; d’un bon rendement au début du travail, il se brise ou s'écrase très rapidement en une poudre très fine. De plus, ne possédant pas de plans declivage, ses grains s'usent, parait-il, sans régénérer d'arêtes coupantes, comme nous l'avons vu plus haut pour le corindon. La forme aplatie des cristaux placerait aussi les grains, dans les meules, dans de moins bonnes conditions de travail, puis- mate- 1902 et 1903. 1 Voir J.-H. PRaTT : rials. U. S. Geological Survey, The production of abrasive Washington, = 516 ALBERT DE ROMEU — L'INDUSTRIE DES ABRASIFS ET LE CORINDON qu'une grande partie présentent à la pièce des sur- faces planes. La grande difficulté dans la fabrication du car- borundum est de produire une matière uniforme ; résultant d'opéralions séparées, le produit ne pos- sède pas toujours les mêmes propriétés abrasives, qui peuvent même varier parfois suivant les diffé- rents points du four. Cependant, après de nom- breuses expériences, on serait arrivé, paraît-il, à obtenir un produit sensiblement homogène. $ 2. — Corindon artificiel. Le corindon artificiel a été obtenu pour la pre- mière fois par Gaudin en 1837. Depuis, de nom- breux travaux ont été effectués sur ce sujet par Ehelmen, H. Sainte-Claire Deville et Baron, Feilet Frémy, et M. Verneuil; ces recherches ont eu sur- tout en vue la production des pierres précieuses ayant la composition de l'alumine; il ne nous appartient pas de les examiner ici. Nous nous bor- nerons à passer en revue les différentes tentatives industrielles qui se sont effectuées pour obtenir le corindon artificiel, en vue des usages abrasifs. a) Une usine a été établie il y a peu d'années à Niagara Falls. Sa méthode de fabrication a été tenue secrète. On sait cependant qu'elle consiste à soumeitre dans le four électrique la bauxite (alu- mine hydratée), provenant de la Géorgie et de l'Arkansas, à une très haute température et à une très grande pression. Nous avons vu que c’est dans ces conditions que se sont probablement formées certaines roches à corindon, dans le laboratoire de la Nature. La compagnie qui exploite celte usine a, paraît-il, rencontré des difficullés pratiques qui l'ont em- pêchée de produire beaucoup. Dans le four, la masse se boursouflant, il se forme des géodes tapissées de fines aiguilles; le produit une fois broyé, ces aiguilles passent en long à travers les tamis, et sont ainsi classées avec des grains de dimensions moindres. Ce corindon artificiel n’est pas livré sur le mar- ché, et est exclusivement employé par la Com- pagnie elle-même à la fabrication de ses produits manufacturés. La production annuelle ne peut done pas être appréciée. b) Diamantite. Un brevet français a été pris sous ce nom par M. Werlein. Le procédé a été exploité autrefois à Rheinfelden (Allemagne); nous ignorons si la fabrication continue encore. c) Corindon provenant des déchets des opéra- tions alumino-thermiques !. Par la réduction des oxydes métalliques par | ! Voir cette evue, L'Aluminothermie, par M. Matignon. | l'aluminium, une certaine quantité de corindon est produite dans l'aluminothermie et reste comme M résidu de l'opération. Cette quantité d’abrasif, ainsi M mise sur le marché, est aujourd'hui encore insigni- fiante et n'a été que très peu employée; mais il fau- dra compter avec elle au fur et à mesure que ces procédés se développeront. ; Ce corindon artificiel a une très grande dureté, surtout quand il résulte de la fabrication du chrome, dont il conlient alors toujours des traces. $ 3. — Acier broyé. L'acier broyé est fabriqué en grande quantité dans une usine spéciale à Pittsburg. La majeure partie est employée à la laille des pierres, surtout du marbre et du granite. L'acier broyé de belle qualité, sous le nom d’« acier émeri » ou de « rouge », sert pour le polissage dans la verrerie. Le prix est de O fr. 55 le kilogramme à Pittsburg. La production des cinq dernières années est la sui- vante : ie LPO Re HEC ECC TOUDERESE TUDIE RES 1902. . 2 am de er 300 tonnes. L 330 350 340 360 Pour être complet, citons encore l’adamite, pro- duit fabriqué à Vienne (Autriche) et travaillé aux États-Unis, mais sur lequel nous ne possédons pas de renseignements précis”. V. — ConNcLuUSIONS. La lecture des pages qui précèdent aura con- vaincu le lecteur de l'importance, pour l'industrie des abrasifs, de l'entrée en jeu du corindon, du carborundum et du corindon artificiel. 11 est de toute évidence que, sans remplacer complètement l'émeri, ils tendront à s’y substituer dans un grand nombre d'emplois; ils augmenteront ainsi très considérablement le cercle de ses usages. Quant à dire quel est, parmi ces trois abrasifs nouvellement venus, celui qui prendra la prépondérance sur le marché, il est impossible dès maintenant de le savoir. Nous n'avons pu que nous borner à consta= ter l’élat actuel de leur développement, sans préju= ger ce que réserve l'avenir. Albert de Romeu, Ingénieur des Arts et Manufactures. ! Pour fixer les idées du lecteur, nous indiquons ci-des= sous le prix des principaux abrasifs, pris à Paris en grains et par tonne : ‘ Corindon du Canada 700 fr. à 1.000 fr. Emeri de Naxos. . 300 fr. à 350 fr. » Emeri de Turquie. 250 fr. à 300 fr. Grenat (brut) SOUDE M0 UE Pierre ponce des iles Lipari . . 60 fr. bal 5 = 0 125 fr. ROUSOE RER 90 fr. à 200 fr. Carborundum . S00 fr. à 1.100 fr. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 517 REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE I. — QUESTIONS D'INTÉRÊT GÉNÉRAL. $S 1. — Bibliographie. Au point de vue bibliographique, signalons : 1° Plusieurs nouveaux périodiques de Physio- logie : a) L’Archivio di Fisiologia (Florence, Ariani), dirigé par le Professeur Fano, de Florence, avec le concours du Professeur Borrazzt, publiant surtout des travaux de Physiologie expérimentale, mais aussi des revues synthétiques et des disserlations philosophiques. Les auteurs sont libres d’em- ployer l’une des quatre langues officielles adoptées par les Congrès internationaux de Physiologie : français, italien, allemand ou anglais. Parmi les nombreux et intéressants articles que contient le volume I (650 p., 108 fig. et 21 pl.), nous trouvons une notice biographique consacrée à E.-J. Marey, ornée d'un beau portrait du célèbre physiologiste. L'Archivio di Fisiologia est édité avec un luxe et une élégance typographiques tout à fait dignes de l'antique renom artistique de la cité des Mé- dicis. : b) Les Archives internationales de Physiologie (Paris, O. Doin), publiées par LéoN FREDERICQ et Paurz HEGER avec le concours d'un grand nombre de physiologistes de différents pays. Signalons parmi les collaborateurs français : Dastre, Morat, Hédon, Wertheimer, Arthus, Jolyet, Delezenne, et, parmi les étrangers : Prevost, Pawlow, Exner, Hen- sen, Fano, Kossel, Langley, Mislawski, Morokowetz, Einthoven, Bohr, Hamburger, Cybulski, Herzen, Jaquet, Klug, Kronecker, Mares, Pekelharing, - d'Udranszky, Zwaardemaker, etc. Voici en quels termes les éditeurs justifient la créalion d’un nouveau recueil français : « Les physiologistes anglais, allemands et ita- liens possèdent un nombre suffisant de Revues spé- … ciales publiées dans leur langue. Mais les physio- logistes francais et surtout les belges, les hollan- dais, les hongrois, les suisses, les russes, ete., dont un grand nombre ont coutume de rédiger leurs travaux en langue francaise, sont moins bien pourvus : le seul recueil français, l'excellent Jour- mal de Physiologie et de Pathologie générale de Boucnarp et Caauveau, doit, en effet, mesurer la place qu'il accorde à la Physiologie pure; et, cepen- | dant, le nombre des travaux qui attendent leur publication augmente de jour en jour, notam- ment en Belgique. « C'est ce qui nous a décidés à entreprendre la publication des Archives internationales de Phy- siologie, destinées aux travaux de Physiologie, à l'exclusion de la Morphologie et de la Pathologie. Ces Archives seront, sans aucun doule, principa- lement alimentées par des travaux scientifiques rédigés en français, mais ne provenant pas de France. Elles ne sont donc pas appelées à faire, à proprement parler, concurrence au Journal de Phy- siologie et de Pathologie générale. » Les Archives internationales de Physiologie don- nent, pour chaque mémoire, l'indice numérique de la classilication décimale (élaborée par la Société de Biologie de Paris et adoptée par l’Znstitut biblio- graphique international de Bruxelles), concurrem- ment avec celui de l'Index Catalogue publié par la Royal Society de Londres, ainsi que des indica- tions bibliographiques sur feuilles volantes, impri- mées au reclo seulement, de manière à pouvoir être découpées et utilisées pour la confection de fiches bibliographiques. Une autre innovation bibliographique à recom- mander : chaque mémoire est suivi d'un court r'é- sumé, rédigé d’une facon objective, de manière à pouvoir être utilisé directement et immédiatement comme « Analyse » ou « Æeferat » par ies rédac- teurs des « Æevues annuelles de Physiologie » et des « Jahresberichte ». Le volume I des Archives internationales de Physiologie, que nous avons sous les yeux, ren- ferme 31 mémoires (1 vol. de 500 p., 111 fig., 10 pl.) sortis des laboratoires de Paris, Montpellier, Genève, Lausanne, Saint-Pétersbourg, Prague, Bu- dapest, Kolozsvär, Utrecht, Groningue, Leyde, Bruxelles, Liége. c) The Journal of experimental Zoology (Balti- more, 1, 1904), édité par Brooks, CaS'rLe, CONKLIN, Davenrorr, JENNINGS, HARRISON, JAcQUES Loër, Mor- GAN, PARKER, WuirmaAN et Wizsow, et destiné sur- tout aux travaux expérimentaux sur la Phy- siologie générale, normale et pathologique : activité cellulaire, aclion des milieux, croissance et dé- veloppement, régénération, évolution, varialion, hérédité, etc. d) Le nouveau Journa de Psychologie normale et pathologique, fondé par PIERRE JANET el GEORGES Dumas (I. 1904, Paris, Alcan), contient dans son pre- mier volume plusieurs articles sur la physiologie du système nerveux. 2 La continuation des Zrgebnisse der Physio- logie, par ASuER et SPIRO ; Du Dictionnaire de Physiologie de Cu. RicueT; Du Traité de Physique biologique de n'ARSONVAL, CHAUVEAU, etc. ; 518 LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE Du grand ouvrage de HAMBURGER : Osmotischer Druck und Ionenlehre (vol. HI). 3 Plusieurs traités de Physiologie, notam- ment : Handhuch der Physiologie des Menschen, publié par W. Nacez, de Berlin. Ce grand traité, en quatre gros volumes, comprendra une série de monogra- phies rédigées par des spécialistes, passant en re- vue tous les chapitres de la Physiologie. La pre- mière partie du volume IIT, contenant la physio- logie des organes des $ens, vient de paraître chez Fr. Vieweg, à Brunswick. J. Démoor : Cours de Physiologie générale. Bruxelles, Lamertin, 1905, 223 p. in-8°. Tuornron : Elementary practical Physiology. Lon- don, in-8°, 332 p. BLAIN : Tableaux synoptiques de Physiologie, in-8° de 171 p. A. Françors-Franck : Cours du Collège de France de 1880 à 1904. Paris, Doin, 1904, 400 p. 4° Une série assez nombreuse de monographies parmi lesquelles nous citerons: RosenTuaL : Der physiologische Unterricht und seine Bedeutung für die Ausbildung der Aerzte. Thieme, Leipzig, 1904. F. Le Danrec: Les lois naturelles (réflexions d'un biologiste sur les sciences). Bibliothèque scienti- fique internationale. F. Alcan, Paris, in-8°, 1904. Jacques Loeg : Sludies in general Physiology. Univ. of Chicago Press, 1904, 2 vol. À. GAuTIER : L'alimentalion et les régimes. Paris, 1904. WicBrAnD et SAENGER : Die Neurologie des Auges. Wiesbaden, Bergmann, 1904, 3 vol. La première partie du volume III traite de l'anatomie et de la physiologie des centres optiques et des voies op- tiques. RENÉ Quinron : L'eau de mer, milieu organique. ‘Constance du milieu marin originel, comme milieu vital des cellules, à travers la série animale. Paris, Masson, 1904, vir-503 p. ALEx. Gurwirscs : Morphologie und Biologie der Zelle. Fischer, lena, 1904. ApoLr Fick : Gesammelle Schriften. III. Würz- burg, Stahel, 1904, 7179 p., 102 fig., 41 pl. Russez H. CurrTENDEN : Physiological Economy in Nutrition, with special reference to the minimal proteid requirement of the healthy man. An exp. study. New-York, Stokey, 1904. A. D. Wazcer : Eight leclures on signs of life from their electrical aspect. London, in-8° de 184 p. Mosso : La fatigue. Trad. de l'italien, in-8° de 348 p. T. JErFRY Parker : Leçons de Biologie élémen- taire. Trad. de l'anglais par A. Marie. Paris, 1904, in-8°. = G. Weiss : Précis de Physique biologique. Paris, 1904, in-8° de 526 p. HENRY BoRDiER : Les rayons N et les rayons N'. In-16°, 95 p. Juztus ScureIBER : Ueber den Schluckmechanis- mus. Berlin, Hirschwald, in-8°, 1904. J. ANGLAS : Les animaux de laboratoire. La gre- nouille (anatomie et dissection), 7 planches colo- riées à feuillets découpés el superposés. Paris, Reinwald, 1905. $ 2. — Nécrologie. Parmi les morts de l’année, citons : Ch. RouGEer, ancien professeur de Physiologie à la Faculté de Médecine de Montpellier et au Mu- séum de Paris; Maenus Buix, professeur à Lund; Cu. E. MarEey, professeur au Collège de France et Directeur de l'Institut Marey ; O. C. Lovéw, ancien professeur de Physiologie à l'Institut Carolin de Stockholm; Fayez, professeur de Physiologie à l'Ecole de Médecine de Caen; HupeErT, ancien professeur de Chimie physiolo- gique à la Faculté de Médecine allemande de Pra- gue ; Ducraux, Directeur de l'Institut Pasteur ; G. von LteBrc, privatdocent de Pneumothérapie à la Faculté de Médecine de Munich; Franz RiEGuz, professeur de Clinique à l'Univer- sité de Giessen; Josepu SERGEN, professeur de Balnéologie à l'Uni- versité de Vienne; Le D’ LiEBauLT, de Nancy; NiEmiLowiez, professeur de Chimie médicale à la Faculté de Médecine de Lemberg. $ 3. — Institut Marey. L'Association internationale des Académies, dans sa seconde assemblée générale tenue à Londres, du 25 au 27 mai 1904, a approuvé la nomination de MM. Lippmann, Lévy, Amagat, Charles Richet, Einthoven, Grützner, Langendorff, Schenck, Atha- nasiu comme membres rouveaux de l'Association inlernalionale de l’Institut Marey. Elle a adopté la résolution suivante : « Après avoir pris connaissance du Rapport du regretté Ma- rey, en date du 5 mai 1904, sur les travaux de l'Institut Marey, elle félicite la direction de l’/nsti- tut Marey d'avoir obtenu en France la reconnais- sance d'utilité publique et assuré ainsi la perma- nence de cet organisme scientifique international. Elle fait des vœux pour la réussite des travaux scientifiques entrepris à l'Institut. » M. le Professeur Chauveau a été nommé Direc- teur de l’Zustitut Marey. PE MT TE PR mt à mo = ; . ' LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 519 $ 4. — VI: Congrès international de Physiologie. L'année 190% a vu naître la Deutsche physiolo- gische Gesellschaft (Société allemande de Physio- - Jogie), qui a tenu sa première session à /?reslau, el “qui se réunira pour la seconde fois à Marburq, à - l'Institut de Physiologie du Professeur ScuExck, du . 14 au 16 juin 1905. Le grand événement physiologique de l’année a ‘été la réunion du VI° Congrès international des - physiologistes, qui a tenu ses séances du 30 août ‘au 3 septembre dans les superbes locaux des Zns- - tituts Solvay au Parce Léopold à Bruxelles. Ce Congrès a élé extraordinairement brillant tant par le nombre élevé (251 membres, dont 91 Belges, 44 Français, 23 Allemands, 21 Anglais, 21 Ilaliens, 10 Suisses, 8 Autrichiens, 7 Hollandais, > Russes, 3 Grecs, 2 Espagnols, 2 Suédois, 2 Japo- nais, 2 Canadiens, { Espagnol) el par la valeur de ses participants, que par sa parfaite organisation ‘scientifique el l'éclat des fêtes offertes aux congres- sistes par les villes de Bruxelles et d'Anvers, par M. et M®° Solvay, par M. et M" Errera, etc. Mais c'est surlout par l’abondance, la variété et d'importance des communicalions et des démon- »strations expérimentales que les séances du Congrès de Bruxelles ont dépassé toule-atlente. On y a traité la plupart des questions de Physiologie en ce moment à l'ordre du jour ; les physiologisles pré- - sents ont eu la bonne fortune d’y entendre discuter ces questions par les spécialistes les plus auto- risés. Aussi, je ne crois pouvoir mieux faire que de -prendre comme base de ma revue annuelle les notes se rapportant aux sujels traités au Congrès de Bruxelles, quitte à les compléter à l'occasion. Les “citations abrégées (C. Re. Congr. Physiol.) que je “donne plus loin se rapportent au compte rendu du Congrès paru dans le volume II des Archives inter- “nationales de Physiologie (p. 1 à 166). “ Parmi les résolutions d'intérêt général qu'a prises le Congrès de Bruxelles, il faut mentionner “la nomination d'une Commission internationale “Chargée de s'entendre avec la direction du Conci- Jium bibliographicum de Zurich, en vue d'étendre à da bibliographie physiologique le travail précédem- ment accompli pour la Zoologie par la constitution Eur catalogue sur fiches. : MM. Bowditch (Boston, U.S. A.), Fano (Florence), Æredericq (Liége), Grützner (Tubingue), Kronecker (Berne), Mislawsky (Kasan), Sherrington (Liver- pool) et von Kreidl (Vienne) sont désignés pour faire partie de celte Commission internationale, qui ‘pourra se compléter par l’adjonclion de nouveaux membres. M. Mosso, directeur de la Slalion physiologique du Mont-Rose, a rendu compte des travaux accom- plis depuis trois ans et a montré en projections les installations actuelles au sommet du Mont-Rose, ainsi que les plans de la future station physiolo- gique d’Alagna située un peu plus bas. L'Assemblée a confirmé le mandat confié précé- demment aux membres de la Commission interna- tionale du laboratoire de Physiologie du Mont-Rose: MM. Mosso (Turin), Tigerstedt (Helsingfors) el Zuntz (Berlin). Elle a entendu une série de rapports spéciaux présentés au nom de l'Institut Marey (Commission internationale pour l'unification des méthodes en Physiologie) : Rapport de M. Einthoven (Leyde) sur l’unifica- tion des mesures de force électromotrice en Phy- siologie et l'emploi du galvanomètre à fil; — de M. Athanasiu (Paris) sur l'unificalion des procédés de la méthode graphique, notamment de la trans- mission par l'air et du tambour à levier, — de M. Kronecker (Berne) sur l'emploi du cylindre tournant, habituellement mis en usage par les physiologistes pour recueillir les différents tracés chronophotographiques. L'Association de l’Institut Marey avait, d’ailleurs. profilé du Congrès pour tenir à Bruxelles sa session annuelle. Avant de se séparer, le Congrès a désigné Heïdel- bergcomme siège du prochain (VII*) Congrès inler- national de Physiologie, qui aura lieu dans la pre- mière quinzaine du mois d'août 1907. Le Comité directeur international chargé d'orga- niser ce Congrès se compose de Sir Michael Foster (Cambridge), président honoraire, et de MM. Kossel (Heidelberg), président, Bohr (Copenhague), Bow- ditch (Boston, U.S. A.), Cybulski (Cracovie), Dastre (Paris), Einthoven (Leyde), Frederieq(Liége), Heger (Bruxelles), Hensen (Kiel), Exner (Vienne), Johans- son (Stockholm), Kronecker (Berne), Langley (Cambridge), Luciani (Rome), Mislawski (Kasan), Nicolaïdes (Athènes), Prevost (Genève), Richet (Paris), Wedensky (Saint-Pétersbourg), membres, et Dastre (Paris), Fano (Florence), Grützner (Tu- bingue), Porter (Boston, U. S: A.), Sherrington (Liverpool), secrétaires généraux. C'est, en somme, le même Comité que celui du VI: Congrès, sauf que M. Blix, décédé, est remplacé par M. Johansson et qu'on a nommé un secrétaire général distinct pour les Etats-Unis d'Amérique, M. Porter, de Boston. I" "CIRCULATION: 4, Cœur isolé des Mammifères. — Depuis quel- ques années, on a décrit plusieurs procédés qui per- : mettent de répéter, sur le cœur du chien ou du 520 ", LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE lapin extrait du corps, les expériences classiques exécutées jusqu'à présent sur le cœur de grenouille isolé. Je me borne à rappeler les travaux de Newel Martin, Langendorff, Porter, Locke, que j'ai eu l'occasion d'analyser ici. Plusieurs variantes inté- ressantes de ces expériences ont été répétées avec plein succès devant les membres du Congrès. M. Heymans ‘, de Gand, nous a présenté un cœur de chien À complètement isolé, dont l'aorte était reliée au bout central de la crurale d'un autre chien vivant B, Ce dernier B fournissait donc le sang ar- tériel destiné à nourrir le cœur A. Le sang, après avoir traversé la substance du cœur A, était re- cueilli par un entonnoir et retournait, par un tube approprié, à une jugulaire du chien B. Le chien B avait d’ailleurs recu une injection d'extrait de sang- sue, préparation qui suspend, comme l’on sait, la coagulation du sang, et permet de faire circuler ce liquide dans des tubes de verre ou de caoutchouc, sans avoir à craindre les obstructions par dépôt de tibrine. M.E.A.Schæfer”a utilisé également le procédé de Langendorff pour exécuter de nombreuses expé- riences sur les vaisseaux coronaires du cœur des Mammifères. Le résullat auquel il est arrivé, c’est que le calibre de ces vaisseaux ne présente aucune varialion ni sous l'influence de l'excitation des diffé- rents nerfs afférents du cœur (pneumogastriques, accélérateurs), ni sous celle d'une injection d’adré- naline. Ils semblent donc ne contenir aucun ap- pareil nerveux. Mais leurs parois musculaires se contractent sous l'influence des excilants ordinaires qui agissent directement sur les fibres lisses des vaisseaux. Les expériences ont été exécutées sur des cœurs de Mammifères extraits et alimentés artificiellement. On enregistrait la pression dans le ventricule gauche, ainsi que le débit de liquide nutritif. 2. Hiestauration du cœur du chien envahi par les trémulations fibrillaires. — M. d'Halluin*, de Lille, a démontré avec succès un procédé qui permet de rappeler à la vie le cœur du chien déjà envahi par les trémulations fibrillaires, qui, dans les condi- lions ordinaires, sont considérées comme l’avant- coureur immédiat de la mort définitive du cœur. Chez un chien à poitrine ouverte, l'application du courant induit (électrodes reliées à la bobine se- condaire du chariot de du Bois-Reymond) à la sur- face du cœur produit immédiatement les trémula- tions et le délire du cœur; M. d'Halluin ranime le cœur et parvient à rétablir les pulsations ryth- miques normales par le massage du cœur, combiné . À. Congrès Physiol., p. 99. . R. Congrès Physiol., p. 141. * C, I. Congrès Physiol., p. 68. QQ * avec l'injection intra-veineuse de chlorure de po- tassium (20 centigrammes par kilog d'animal). M. H.E. Hering, de Prague, avait d'ailleurs déjà signalé l’aclion suspensive que le chlorure de po- tassium exerce sur la fibrillation du cœur‘. 3. Théories myogène et neurogène de la pulsation cardiaque. — La question de l’origine neurogène ou myogène de la pulsation cardiaque a été l'objet d'une discussion approfondie. M. Kronecker est un partisan convaincu de la fhéorie neurogène, qui fait jouer aux centres nerveux intra-cardiaques le principal rôle dans la genèse des pulsations car-" diaques et dans la succession rythmée des con- tractions des oreillettes et des ventricules. Les conditions dans lesquelles se produisent les trémulations fibrillaires et les particularités qu'elles présentent lui paraissent inexplicables dans la théorie myogène. On peut lui répondre que la théorie neurogène n’en donne pas non plus une explication satisfaisante. L'éminent physiologiste de Berne a répété, avec M. Spallitta, devant le Congrès, sur le cœur du chien, une expérience très intéressante se rappor- tant à l’action d’inhibition des pneumogastriques, s'exerçant sur les ventricules pendant la trémula- tion isolée des oreillettes”. Cette trémulation est réalisée par l'application de courants d’induction sur une oreillette. Les ventricules continuent à battre; mais ils s'arrêtent sous l'influence de l'ex- citalion électrique du bout périphérique d'un pneu- mogastrique, excitation qui ne supprime, d’ailleurs, pas entièrement les trémulalions auriculaires. Cette expérience à élé présentée comme argument en fa= veur de la théorie neurogène. 4. Le faisceau musculaire inter-auriculo-ventre culair'e, lien physiologique entre les oreillettes et les ventricules. — La théorie myogène admet, comme l'on sait, que les pulsations naissent par automatisme dans la musculature des oreillettes, au voisinage des orifices veineux (ou d’un orifice veineux). De là, la contraction se propagerait à la facon d'une onde, à travers les oreillettes, qui se contracten d'abord, aux ventricules dont les muscles sont à leur tour envahis par l'onde de contraction. Cette théorie suppose l'existence de ponts musculaires reliant la substance contraclile des oreillettes celle des ventricules. Or, tous les traités d'Anatomie humaine décrivent la musculature des oreillette comme enlièrement séparée de celle des ventri cules, et, jusque dans ces derniers temps, la notion ! Centralbl. f. Physiol., 41 avril 1903, p. 2. ? C. R. Congrès Physiol., p. 113. 4 ; LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 5921 voix isolées, n'appartenant d'ailleurs pas à des ana- tomistes. C'est ainsi que Gaskell (1883), pour le cœur de tortue, Stanley Kentet W. His jun. (1894), pour le cœur des Mammifères, avaient tour à tour affirmé l'existence de ponts musculaires reliant les oreillettes aux ventricules. Mais leurs affirmations n'avaient trouvé aucun écho. La question a été reprise simultanément à Leip- zig, à Liége et à Berlin. M. Robert Retzer (Leipzig), travaillant sous la direction du Professeur Spal- teholz ‘, a découvert, dans la paroi interauriculaire du cœur des Mammifères, un paquet de fibres mus- culaires qui se dirige vers la cloison interventricu- laire et s'y continue directement avec la muscula- ture des deux ventricules. Des préparations fort démonstratives ont été produites au Congrès de : Bruxelles. À Liége, M. Humblet * était arrivé, de son côté, aux mêmes résultats en ce qui concerne la partie anatomique du sujet. Lui aussi avait décrit et figuré, dans la cloison interauriculaire, un fais- ceau musculaire interauriculo-ventriculaire venant du pourtour du trou de Botal, se dirigeant vers l'origine de l’aorte et s’y divisant en deux faisceaux passant respectivement dans la paroi du ventricule droit et du ventricule gauche. De plus, M. Humblet a institué une série d'expériences ayant pour but de sectionner le faisceau en question sur le cœur vivant, pour vérifier s’il constitue réellement le lien physiologique qui assure la communauté de rythme des oreilleltes et des ventricules, ou, plus exactement, l'alternance des pulsations ventricu- laires et auriculaires. On comprend combien l'exé- cution de ces expériences est aléatoire et délicate, puisqu'il s'agit d'aller couper à l’intérieur du cœur un petit fsisceau museulaire, en évilant de provo- quer les contractions fibrillaires et le délire du » cœur, et tout en n'inlerrompant que momentané- « ment la circulation cardiaque. Les insuccès opéra- - toires ne se complent pas, et l'on ne peut songer à répéter une expérience aussi incertaine devant un aréopage de physiologisles dont le temps est pré- cieux, et qui sont sollicités de tous côtés par d'au- tres attractions intéressantes. Aussi M. Humblet …_ avait-il renoncé à démontrer devant le Congrès de “ Liége l'expérience fondamentale de section du “ faisceau interaurieulo-ventriculaire. Quand l'expérience réussit, c'est-à-dire quand le | cœur continue à battre malgré les mutilations aux- “quelles on a dû le soumettre, toujours la section du faisceau interauriculo-ventriculaire provoque l'arythmie des pulsations, c'est-à-dire détruit la communauté de rythme des oreillettes et des ventri- cules. M. Humblet joint à son travail des graphiques Le ! Arch, f. Anat., 1904. ? Arch. int. Physiol., 1904, I, p. 278. montrant qu'après cetle opération les oreillettes, d'une part, les ventricules, de l'autre, battent cha- cun de leur côté avec un rythme propre indépen- dant. Les résultats de cette expérience sont tout à fait d'accord avec ce que réclame la théorie myo- gène. M. Philips’ constate que, si l’on faradise les oreil- lettes d’un cœur de chien vivant mis à nu, leurs parois se mettent à fibriller, landis que les ven-, tricules continuent à battre, mais d’une façon très irrégulière. Le spectateur a l'impression que les mouvements désordonnés des ventricules résultent d’une lutte entre la tendance aux pulsations normales, inhé- rente aux ventricules, et l’action des trémulations fibrillaires des oreillettes, qui cherchent à se pro- pager des oreillettes aux ventricules par l’intermé- diaire du pont musculaire auriculo-ventriculaire. Nous prenons ici, pour ainsi dire sur le fait, l'action des ondes musculaires de fibrillation des oreillettes, interférant avec les pulsations propres des ventri- cules. La combinaison de ces deux influences pro- duit un rythme ventriculaire absolument désor- donné, intermédiaire entre les pulsations normales et la fibrillation, que je ne puis mieux qualifier qu'en l'appelant l'afolement ou le rythme allolé des ventricules. Cet affolement du rythme ventriculaire disparaît et fait place à des systoles lentes et absolument régulières aussitôt qu'on sectionne ou écrase le faisceau musculaire auriculo-ventricu- laire. M. Stassen * étudie les ex/rasysloles provoquées par excitation électrique directe appliquée sur le cœur du chien, pendant l'arrêt des pulsations obtenu par faradisalion du pneumogastrique. L'ex- citalion de l’oreilletle donne lieu à une pulsation complète à rythme ordinaire. L'excitation du ven- tricule provoque également une pulsation ou extra- systole complète, mais à rythme inverse, c'est-à- dire que la pulsation ventriculaire précède la pulsation auriculaire. La théorie myogène nous donne de ce fait une explication très naturelle. L'onde de contraction, née dans les ventricules par excilation artificielle, s'est propagée iei aux oreil- lettes par l'intermédiaire du faisceau auriculo-ven- triculaire. Cette propagation rétrograde parail se faire avec une lenteur remarquable. En effet, l'in- tervalle qui sépare la systole des oreillettes de celle des ventricules, dans ces pulsations à rythme ren- versé, est au moins double de l'intervalle qui, nor- malement, s'interpose entre les contractions des deux ordres de cavités du cœur, dans les pulsations à rythme normal direct. ‘ Arch.int. Physiol., 11, p. 259. ? Arch. int. Physiol., I { LÉON FREDERICQ — REVUE ©? 19 19 ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 5. Reviviseence du cœur fœtal dans l'espèce hu- maine. — M. À. Kouliabko, de Tomsk*, a complété par de nouveaux détails les communications qu'il avait publiées antérieurement sur la reviviscence du cœur d'enfant ou de fœtus, plusieurs heures ou même plusieurs jours après la mort. Les partieula- rilés les plus intéressantes furent présentées par deux cœurs de fœtus, l’un du septième, l’autre du huitième mois. Un de ces cœurs, soumis à la circu- lation artificielle au moyen de liquide de Locke saturé d'oxygène, vivait encore {rois jours (!) après son extirpation hors de la poitrine. 6. Cinématographie appliquée à l'étude de la pul- sation du cœur et des autres mouvements physiolo- giques. — Il y a quelques années, j'ai signalé une étude de cinématographie du cœur menée à bonne fin par Ludwig Braun (1898), de Vienne. Le Profes- seur François-Franck, assisté du D' Hallion, à fait au Congrès, au moyen des appareils de projection de la maison Gaumont, de Paris, deux séances de démonstrations cinématographiques du plus haut intérêt”. Les mouvements expressifs généraux et faciaux, la mimique des sourds-muels, les mouvements respiratoires, thoraciques, abdominaux el laryngés, les battements du cœur ont élé successivement projetés devant l’audiloire émerveillé et lui ont donné l'illusion de la réalité. La méthode du savant professeur du Collège de France a ceci de particulier qu'elle reproduit simul- tanément par la photographie les changements de volume ou de forme des organes et l'expression graphique de ces varialions. Dans le même champ photographique est disposé l'organe, musele, cœur, diaphragme, rate, mésentère, cerveau, etc., qui subit l'action d'un poison, d'une excitation ner- veuse, etc., ou qui fonctionne spontanément, et l'appareil enregistreur sur lequel viennent s'ins- crire les courbes myographiques, cardiographiques, respiratoires, manométriques, volumétriques. La photographie de l'organe en mouvement et des tracés est ainsi recueillie sur une même pelli- cule cinématographique. On y ajoute l'inscription manuserile des manipulations expérimentales que subit l'organe, les divisions du temps, etl'on a ainsi les documents les plus précis sur les modifications que présentent l'organe ou le tissu vivant. Quand l'éclairage solaire est insuffisant, M. Fran- cois-Franck utilise l'illumination avec la poudre de magnésium à déflagration lente (éclairage durant d'une seconde à une ou deux minutes). | Citons, parmi les autres travaux se rapportant à R. Congrès Physiol., p. 111. AC 3 C. R. Congrès Physiol., p. 82 l'étude de la circulation : les démonstrations, par M. L. Camus‘, d'un appareil pour l'étude du cœur isolé ; Par M. Lombard”, d'un mode d'inscription sphyg-M mographique de l'expansion longitudinale d'une artère isolée ; Celle du procédé de suture artérielle avec con- | servation de la perméabilité du vaisseau, par M. Frouin ?; la présentation du pléthvsmographe digital de Hallion et Comte ‘; une communication de M. Vaschide sur les rapports de la cireulalion sanguine avec la mesure de la sensibilité tactile. IfT. — RESPIRATION ET CALORIFICATION. 1. Apnée par injection intra-veineuse de soude. — On sait combien la théorie de la régulation des mouvements respiratoires et celle de l'apnée est en" core controversée. Pour un certain nombre de physiologistes, c'est la teneur du sang en acide carbonique qui cons- titue le principal facteur de cette régulation. Chaque fois que l’hémalose est gênée, le sang s’artérialise moins bien dans le poumon, s'y débarrasse d’une façon plus incomplète de son acide carbonique. C'est ce sang à vénosité augmentée qui, transporté par la circulation dans les centres respiratoires de la moelle allongée, y provoque une stimulation exagérée, d'où augmentation des mouvements res- piraloires et ventilation pulmonaire plus complète Dans l’apnée provoquée par une ventilation exagé- rée des poumons, le sang s'artérialise plus com- plètement, il se débarrasse mieux de son acides carbonique; il en contient si peu que le stimulus” qu'il exerçait sur la moelle allongée peut se trouver momentanément suspendu ; les centres respira toires, n'étant plus excités, cessent d’agir et l’ani= mal suspend sa respiralion : il est à l'état d’apnée Si la théorie qui fait jouer à l’abaissement de la tension de CO* dans le sang artérielle principal rôle” dans la production de l'apnée est exacte, tous les moyens qui réalisent cette diminution de CO devront produire l’apnée. C'est ce qu'a montr M. Mosso‘ par une série de beaux graphiques de suspension respiratoire obtenue chez le chien et L lapin par des injections intra-veineuses de soude La soude, en se combinant à CO*, supprime l’action de cet excitant. è Les expériences de Mosso sur les centres res piratoires sont une confirmation précieuse de 1 . Congrès Physiol., p. 51. d R. Congrès Physiol., p. 121. ; R. Congrès Physiol., p. 83. . R. Congrès Physiol., p. 90. . Congrès Physiol., p. 151. . R. Congrès Physiol., p. 128. 00900 me) REZ LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 223 celles de Plumier, qui avaient conduit aux mêmes conclusions et confirmé la théorie de l'apnée soute- nue par l’auteur de ces lignes. 2. Circulation pulmonaire. — Les recherches de M. Plumier ‘nous donnent pour la première fois un tableau complet des phénomènes de la circulation pulmonaire étudiée dans des conditions méca- niques qui se rapprochent de l’état physiologique. L'ouverture de la poitrine et la respiration artifi- cielle, qui semblent indispensables pour l'étude de la pression du sang dans les vaisseaux du poumon, altèrent profondément les conditions mécaniques des organes thoraciques.M. Plumier a évité ces per- turbations en utilisant un procédé d'ouverture temporaire du thorax *. Ce procédé consiste à ou- vrir la poitrine latéralement par une incision li- néaire : on peut alors appliquer à loisir divers instruments sur le cœur, les vaisseaux ou les nerfs, à condition d'entretenir la respiration arli- ficielle. Ce temps de l'opération terminé, on referme le thorax, dont on assure l’occlusion hermétique au moyen de pinces spéciales, de manière à rétablir le vide pleural et les conditions mécaniques de la res- piration normale. L'animal se remet immédiate- ment à respirer spontanément : on évite donc les troubles inséparables de la respiration artificielle. On constate, en effet, que la pression artérielle, qui était tombée à un taux misérable pendant le temps d'ouverture du thorax, reprend sa valeur normale aussitôt que la cage thoracique est refermée et que les condilions de l’aspiralion pleurale sont réta- blies. Parmi les nombreux résultats intéressants de ces recherches, je citerai ceux qui ont trait à la question si controversée des nerfs sensibles du poumon. L'auteur a démontré que les poumons du chien contiennent des fibres nerveuses centri- pètes, empruntées au pneumogastrique. Ces fibres se distribuent à la face interne des alvéoles : lors- qu'elles sont excitées par des vapeurs irritantes (am- moniaque,aldéhyde formique), elle provoquent par voie réflexe le ralentissement du rythme respira- toire, la chute des pressions artérielles carotidienne et pulmonaire, ainsi que le ralentissement du rythme cardiaque. Tous ces réflexes font nécessai- rement défaut si les pneumogastriques ont été coupés au préalable. L'injection directe d'’ammoniaque, soit dans le tissu du poumon, soit dans une jugulaire, excite localement les vaisseaux du poumon et amène leur constriction, d'où hausse de pression dans l'artère pulmonaire et baisse de la pression carotidienne. 4 Archiv. int. Physiol., I. ® Décrit dans : Travaux du laboratoire de Léon Fredericq, 1885-1886, I. M. Langlois! a découvert, chez certains animaux à sang froid (lézards de la région saharienne), un véritable système régulateur de la température interne. Ces animaux montrent, quand la surface de leur crâne (plaque centrale correspondant à l'œil pinéal) est exposée au rayonnement calorifique, une polypnée thermique comparable à celle du chien. Cette polypnée à pour résultat l’'évaporation d'une quantité notable d’eau à la surface pulmonaire et joue un rôle de protection efficace contre l'éléva- tion de température dont l'animal est menacé. MM. Galbraith? et Sutherland Simpson ont étendu à un grand nombre d’animaux les observations et expériences que l'on avait faites sur l'homme au sujet des variations diurnes de la température. On sait que la tempéralure de l'homme est plus élevée de trois quarts de degré environ pendant le jour (maximum le soir) que pendant la nuit (mini- mum le matin avant le lever). Ces variations sont dues aux différences des conditions physiologiques : repos musculaire, sommeil, faible activité des or- ganes digestifs, ele., pendant la nuit. En effet, la courbe diurne de température pré- sente une allure inverse (maximum la nuit, mini- mum le jour) chez les individus que leur profession oblige à travailler la nuit et à se reposer le jour. Les auteurs anglais ont confirmé tous ces faits chez toute une série de mammifères el d'oiseaux. Seuls, les animaux à habitudes nocturne, comme le hibou, ont le maximum de température pendant la nuit. Les singes que l'on tient éveillés et à la lumière pendant la nuit, dans l'obscurité pendant le jour, présentent également l'inversion classique de la courbe de température. Enfin, si un singe est conservé pendant plusieurs fois vingt-quatre heures dans un local à éclairage uniforme (lumière continue ou obscurité continue), il continuera à présenter pendant quelque temps les oscillations diurnes de la température interne. Ces oscillations, dues vraisemblablement à un effet de l'habitude de l'organisme, sont fort diminuées, d'ail- leurs, et vont en s’atténuant. IV. — DIGESTION Le plexus nerveux d'Auerbach et les mourve- ments de l'intestin grêle. — La question de l’ori- gine myogène ou neurogène des mouvements, si controversée en ce qui concerne le cœur, se pose également pour l'intestin. Un bout d’intestin grêle, enlevé à un animal vivant, pourra continuer pendant longtemps à exécuter des mouvements, si on le con- serve dans un milieu approprié. Le meilleur milieu © PAS 1 C. R. Congrès Physiol., p. 118. VAR 2 C. R. Congrès Physiol., p. 84. Se = à (ae _ mLiBr \ \ SF, MA s 524 est ici le même que pour le cœur, c'est-à-dire une solution saline (liquide de Ringer ou de Locke) isotonique avec le sang et saturée d'oxygène, solu- tion dans laquelle on plonge le bout d'intestin sur lequel on expérimente. M, Magnus‘ a fait, devant le Congrès, une série de démonstrations, prouvant la grande importance des éléments nerveux dans la production des contractions de l'intestin. On sait que l'intestin est formé de trois tuniques ou enve- loppes membraneuses concentriques, qui sont, en allant de dehors en dedans : 4° la tunique séreuse ou péritonéale, qui n'intervient pasici; 2°la tunique musculaire, formée de deux couches: l'externe, peu épaisse, composée de fibres musculaires longitudi- nales; l’interne, plus épaisse, à fibres circulaires. Entre ces deux couches musculaires, se trouve un plexus nerveux assez riche, formé de nombreux ganglions ou centres nerveux cellulaires, le plexus myentérique d'Auerbach; 3° la tunique muqueuse, présentant dans sa portion externe un second plexus nerveux, le plexus sous-muqueux ou plexus de Meissner. M. Magnus a montré que l'inlestin conservé dans le liquide de Ringer présente deux espèces de mou- vements rythmés : des contraclions dites pendu- laires, se succédant à quelques secondes (5" à 7!) d'intervalle, et d’autres à rythme plus lent, em- brassant chacune plusieurs contractions pendu- laires (20" à 100"). Une élévation de la température accélère le rythme de ces mouvements ; le froid les ralentit. L'asphyxie (cessation de l'apport d'oxy- gène) arrête les mouvements au bout de deux heures environ. On constate alors que les fibres longitudinales sont relàächées au maximum, tandis que les fibres circulaires sont immobilisées dans un état de contraction énergique. Magnus a fait re- marquer qu'on ne pouvait guère s'expliquer cette façon différente de se comporter d'éléments histo- logiques de même nature qu'en admeltant que lasphyxie n’agit pas directement sur les fibres musculaires, mais les influence par l'intermédiaire des éléments nerveux du plexus d'Auerbach. Le fameux réflexe intestinal étudié sur l'animal vivant par Nothnagel, Bayliss et Slarling, et qui consiste dans ce fait qu'une irritation locale de l'intestin provoque une contraction musculaire en amont de l'endroit irrité, et un relâchement des muscles en aval, ce réflexe se montre également sur l'intestin isolé. Ce réflexe favorise, comme on sait, la progression du contenu intestinal vers l'anus. M. Magnus à prouvé le rôle important joué par le plexus nerveux d’Auerbach et dans la production des mouvements pendulaires et dans la produc- ! CL. R. Congrès Physiol., p. 123. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE tion du réflexe intestinal de Bayliss et Starling. Voici quelques-unes de ses expériences : un bout d'intestin est ouvert suivant la longueur ; on enlève la muqueuse (avec la sous-muqueuse et le plexus de Meissner); la couche restante, comprenant, outre le péritoine, les muscles et le plexus d'Auerbach, exécute encore les deux ordres de contractions rythmées et montre même le réflexe de Bayliss et Starling. On peut pousser l'isolement anatomique plus loin et séparer la couche de fibres circulaires de celle des fibres longitudinales: dans ce cas, ie plexus nerveux d'Auerbach reste adhérent à la couche des fibres longitudinales. Ces dernières continuent à exécrter les mouvements rythmés spontanés, tandis que la couche de fibres circu- laires, privée d'éléments nerveux, reste immobile et ne se contracte que si on l’excile directement. : Elle est capable aussi de transmettre l’onde de con- traction. M. Magnus a fort justement conclu de ses expériences que, dansles mouvements de l'intestin, l'automatisme et la rythmicité élaient d'origine nerveuse, tandis que la contractilité et la conduc- ubilité devaient seules être rapportées à l'élément musculaire. Nous ne pouvons décrire ici les procé- dés fort ingénieux d'enregistrement des mouve- ments intestinaux imaginés par l’auteur. Ajoulons que la méthode consistant à étudier les propriétés physiologiques de l'intestin enlevé à l'animal vivant et plongé dans un liquide physio- logique saturé d'oxygène a été utilisée avec succès par M. Kouliabko pour l'étude de l’action de divers poisons M. W. B. Cannon’ a utilisé le procédé qui consiste à étudier aux rayons de Rüntgen {écran fluorescent) la progression des matières alimentaires dans lestomac et dans l'intestin grêle. Les aliments sont mélangés d'une substance inerte, opaque aux rayons X, le sous-nitrate de bismuth. L'auteur avait recueilli des photographies sériées, qui lui ont permis de reconstituer les mouvements et de les démontrer par la méthode stroboscopique (zootrope). M.Grützner* a éludié les mêmes processus physio= logiques par une autre méthode. Les différentes portions d'un même repas sont colorées différem- ment, les unes au tournesol bleu par exemple, puis on tue l'animal à un certain stade de la digestion: A l’aulopsie, on reconnait dans l'estomac une stra= tification particulière des aliments : les dernières portions avalées se placent au centre et n'arrivent que fort tardivement en contact avec la surface dem l'estomac et avec le suc gastrique acide (qui les eo= lore en rouge). ! C. R. Congrès Physiol., p. 58. ? C.'R. Congrès Physiol., p. S8. LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 525 V. — SYSTÈME NERVEUX. 4. Grandeur et décadence du neurone. — A difré- rentes reprises, j'ai eu l’occasion de m'occuper ici de la théorie du neurone. L'ancienne conception du système nerveux opposait, comme on le sait, les fibres nerveuses aux cellules nerveuses et les considérait comme deux catégories distinctes d’élé- ments. Dans la comparaison classique qui assi- mile le système nerveux à un réseau télégraphi- que, les cellules nerveuses étaient les analogues des bureaux télégraphiques d'où l'on envoie ou recoit les dépêches; les nerfs représentaient les fils reliant les différents bureaux ou cellules entre elles ou avec la périphérie. Cette conception a fait place à la théorie du neu- rone, en vertu de laquelle fibres et fibrilles ner- veuses ne sont que les prolongements naturels des cellules nerveuses. Fibres et corps cellulaires ne seraient que les parties de l'élément unique du système nerveux que Waldeyer a baptisé en 1891 du nom de zeurone. \ Le neurone est formé . d'un corps cellulaire, masse de protoplasme en partie granuleux, en partie fibrillaire, renfermant un noyau et émettant des prolongements de deux espèces : 4) prolonge- ments protoplasmatiques ramifiés, semblant n'être que la continuation du corps cellulaire (prolonge- ments cellulipèles); b) prolongement unique, simple sur une grande longueur, le cylindraxe ou prolongement cellulifuge. Les prolongements des différents neurones, qui les font communiquer entre eux, ne se continueraient pas directement d'un neurone à l'autre; ils seraient simplement juxtaposés, articulés les uns avec les autres; et c'est aux points de contact, de contiguïlé, et non de continuité (Ramon y Cajal), que se ferait le pas- sage de l’influx nerveux d'un neurone à l'autre. Le neurone était considéré comme un individu cellulaire dans toute la force du terme, au point de vue embryologique, morphologique et fonctionnel. Il était censé dériver d’une seule cellule embryon- paire transformée, dont l'individualité morpholo- gique était pleinement conservée, puisque les pro- longements restaient distincts, ne se soudant même pas aux prolongements des cellules voisines. L'in- dividualité nutritive du neurone s'affirmait par la solidarité de ses différentes parlies. Depuis Waller - (1852), on sait que toute fibre nerveuse sectionnée dégénère dans son bout périphérique, c’est-à-dire dans la parlie qui se trouve séparée du corps cel- lulaire. On a basé sur ces fails de dégénérescence toule une méthode d'étude de la texture des cen- tres nerveux, en suivant hislologiquement les alté- rations consécutives à la lésion d'une partie du neurone (lésion expérimentale ou pathologique). REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Grâce à cette dégénérescence, on peut déterminer exactement le trajet des fibres qui dépendent de tel ou tel groupe de cellules nerveuses. Dans la théorie du neurone, lorsque le bout pé- riphérique d'un nerf se régénère après section, la restauration a toujours pour point de départ le moignon du bout central. Le bout central bour- geonne et envoie un prolongement qui s’'allonge peu à peu et va gagner la périphérie en se lais- sant guider par le tissu dégénéré du bout péri- phérique. On a décrit au neurone une sorte de vie propre et indépendante. Le neurone serait doué de plasti- cité, ses prolongements présenteraient des mou- vements analogues aux mouvements amiboïdes (J. Demoor, M" Stefanowska, etc.). C’est en se ba- sant sur l'existence de ces mouvements amiboïdes que MM. Mathias Duval, Lépine, Rabl-Burckhard ont émis leurs théories histologiques du sommeil, de l'exercice, de l'habitude, etc. Comme on le voit, la théorie du neurone s’ap- puyait sur une série de faits d'ordre fort différent, anatomiques, embryologiques, physiologiques et cliniques. Elle était fort commode au point de vue didactique ; aussi ne doit-on pas s'étonner de sa rapide fortune. Depuis quelques années, principalement sous l'influence des travaux de Bethe, Apathy, etc., une réaction s'est produite. Les différents faits sur lesquels la théorie du neurone prenait ses plus fermes soutiens ont élé mis en doute. Betlfe, Apa- thy et d’autres considèrent tout l'édifice comme ar- tificiel et destiné à s'écrouler définitivement. On nie l'origine unicellulaire du neurone ; on nie l'in- dividualité morphologique du neurone en revenant à la notion de la continuité des fibrilles nerveuses allant d'une cellule à l’autre. On nie l'amiboïsme et la plasticité du neurone, Enfin, on nie également l'individualité du neurone sur le terrain de la dé- générescence wallérienne et de la régénération in- dépendante, autogène, comme on la nomme, du bout périphérique seclionné. Ces deux derniers points ont fait l’objet de plu- sieurs communications et de discussions inléres- santes au Congrès de Bruxelles. M. Albrecht Bethe! y a répété et complété ses an- ciennes affirmations et y a fait des démonstralions fort probantes. Il coupe un nerf et arrache son bout central, afin de rendre impossible toute sou- dure avec le bout périphérique. Après quelques jours, il constate la dégénérescence du bout péri- phérique et la perte de ses propriétés physiologi- ques {inexcitabilité). Mais cette dégénérescence n'est pas définitive. OR 1 C: R. Congrès Physiol., p. #5. lo 526 Après quelques semaines, on constale que le nerf a recouvré son excilabilité : l'irritation élec- trique du bout périphérique provoque les contrac- tions musculaires d'usage. L'examen histologique y montre un grand nombre de fibres complètement régénérées. Cette régénération est autogène, car la dissection la plus minutieuse ne révèle aucune connexion anatomique de quelque importance avec le système nerveux central; l'excitation du nerf régénéré ne donne, d'ailleurs, lieu à aucun effet réflexe ni douloureux. | En sectionnant le nerf régénéré, M. Bethe à pu obtenir une seconde fois la dégénérescence. M. A. van Gehuchten‘ a fait des constatations ana- logues. Il estime, cependant, qu'en présence des ré- sullats négatifs obtenus par d’autres auteurs, et vu la haute portée doctrinale de la question, de nouvelles recherches seraient justifiées. MM. LangleyetAnderson:, sans vouloirnierlapos- sibilité d'une régénération autogène des fibres ner- veuses séparées du système nerveux central, n'ont pu réussir à la mettre en évidence d’une facon irré- futable. Ils insistent sur la facilité avec laquelle s’établissent des connexions entre le bout périphé- rique du nerf sectionné et le bout central, soit du nerf coupé, soit plutôt des troncs nerveux voisins. Il leur a semblé que le nombre de fibres régénérées dans le bout périphérique correspondait assez bien au nombre de fibres contenues dans les filets ner- veux anastomotiques. Là où ces filets nerveux ne purent être démontrés, le bout périphérique du nerf coupé ne contenait pas de fibres régénérées. Leurs expériences parlent en faveur d'une régéné- ration ayant exclusivement pour point de départ les portions de nerf en rapport avec les centres nerveux. M. H. Braus* a cherché à résoudre la question par une méthode expérimentale aussi originale que démonstrative. Il ampute sur des larves de Batra- ciens les moignons des pattes, et les greffe à d'au- tres endroits du corps. La greffe prend générale- ment fort bien et les pattes transplantées se déve- loppent aisément dans leur nouvelle position. Mal- gré l’allération complète des rapports anatomiques des parties déplacées, on voit les nerfs y alteindre leur développement normal. La dissection de l’en- droit d'implantation n'y révèle que des anasto- moses nerveuses insigniliantes avec le système ner- veux central. Il est de toute évidence que la plus . grande partie des fibres nerveuses dans les troncs des membres transplantés ont dû se former sur . place et ne proviennent pas du système nerveux central. La doctrine de l’action trophique et géné- tique du corps cellulaire du neurone s'accorde dif- C. R. Congrès Physiol., p. 156. C. R. Congrès Physiol., p. 4114. C. R. Congrès Physiol., "p.55. 1 3 LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE ficilement avec les résullats de ces diverses expé- riences. Dans la théorie du neurone, on s'explique fort bien la dégénérescence wallérienne du bout péri- phérique du nerf coupé. C’est ce que van Gehuchten appelle la proposition affirmative de la loi de Wal- ler, proposilion que personne ne songe à nier COm- plètement. [l n'en est plus de même de la proposi- lion négative contenue dans la loi de Waller, pro- position en vertu de laquelle le bout central du nerf coupé ne devrait subir aucune altération. Il résulte, en effet, des nombreuses recherches expéri- mentales de van Gehuchten‘ et d’autres, que, dans certaines circonstances, par exemple à la suite non de la section d'un nerf, mais de son arrachement, on observe non seulement la dégénérescence wal- lérienne directe du bout périphérique, mais égale- ment la dégénérescence wallérienne que l’auteur appelle indirecte et qui envahit tout le bout cen- tral. Cette dégénérescence indirecte a toujours pour point de départ l'atrophie rapide des cellules d'origine, atrophie qui elle-même est de règle après l'arrachement du nerf; mais qui peut se montrer parfois après la simple section. Cette dégénéres- cence est descendante; elle débute à la cellule d'ori- gine etse propage, de là, dans une direction cellu- lifuge, vers l'endroit lésé. Selon Durante, les dégénérescences qui suiventles lésions du système nerveux ne restent pas toujours limitées aux neurones lésés, mais peuvent passer d'un neurone à l’autre. MM. Babinski, Pitres, Kronthal, Durante ont relevé de nombreux cas où la dégénérescence wallérienne directe est inconslante ou irrégulière dans les tubes nerveux d'un même tronc ou même dans les diffé- rents segments d'un même tube nerveux. En présente de l'ensemble de ces faits, qui montrent combien peu les dégénérescences se limitent aux territoires du neurone, Nissl en arrive même à douter des conclusions tirées jusqu'ici de l'étude des dégénérescences secondaires des voies motrices, dont le trajet semblait établi d'une facon irréfutable, à partir des cellules corticales, suivant les voies pyramidales. Il semble résuller de tous ces travaux que le neurone n'a pas la signification d’une individualité morphologique unicellulaire; que, dans tous les cas, la fibre nerveuse périphérique ne peut être consi= dérée comme un simple prolongement émané d'une cellule nerveuse ou comme une portion de cellule: Le nerf périphérique parait bien être un élément | histologique autonome, d'origine pluricellulaire: | Si le neurone survit aux attaques dont il est l’objet de tous côlés, ce sera donc comme zndividualité —— |" ‘ C. R. Congrès Physiol., p. 155. | | 3 1 ", LÉON FREDERICQ — REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE 527 pluricellulaire, comme individualité plutôt physio- logique et fonctionnelle qu'anatomique. Durante a proposé le nom de zeurule pour désigner cette nouvelle conception du neurone. A ceux que cette question intéresse, nous re- -commandons la lecture d'un article critique très documenté, dû à la plume savante de M. J. Grasset et paru dans l'Année psychologique de 41904 (X, p. 260-283). 2, Métabolisme des ner fs.— C'était, il y a quelques années, une opinion recue et indiscutée que les . nerfs périphériques fonctionnent sans dépense appréciable et ne sont pas susceptibles de fatigue. . MM. Früblich, Tait, von Baeyer' ont montré récem- | ment que les fibres nerveuses ont, comme les autres + tissus, besoin d'oxygène pour fonctionner et sont, | par conséquent, le siège de phénomènes de com- + bustion et d'usure. Les nerfs de grenouille s’as- - phyxient plus ou moins vile quand on les con- - serve dans une atmosphère inerte, ne contenant pas d'oxygène; ils perdent leur excitabilité et leur conductibilité. Si l’asphyxie n'a pas duré trop longtemps, on provoque la restauration du nerf en permettant à nouveau l'accès de l'air ou de l'oxygène. Un contact de quelques minutes avec le gaz vivifiant suffit pour assurer de nouveau le fonc- tionnement du nerf pendant plusieurs heures, alors - que le nerf est de nouveau soustrait à l'action de l'oxygène. Il y a donc un véritable emmagasine- ment de l'oxygène par la substance nerveuse. M. Thunberg a mesuré directement, au moyen de son microspiromètre, la valeur de la respiration “élémentaire des nerfs de lapins extraits du corps. - La consommation de l'oxygène et la production de CO* sont très appréciables (2 29Mu3 (° par gramme de nerf et par heure). On commence ainsi à apprécier à leur juste valeur les phénomènes chimiques du métabolisme des nerfs, et à mettre en doute la doctrine de l’infa- tigabilité des nerfs et de leur fonctionnement sans dépense d'énergie. 3. Vitesse de T'infux nerveux.— On a cru pendant ongtemps que la vitesse de propagation de l’exci- lalion dans les nerfs avait une valeur typique. Les différences que l'on avait trouvées entre la vitesse e l'influx nerveux chez l'homme et chez la gre- ouille s’expliquaient, en eïet, très naturellement ar la différence de température des nerfs sur esquels on (Helmholtz,. Baxt) avait expérimenté. Les expériences faites sur les nerfs des Vertébrés “inférieurs et des Invertébrés ont montré que la D entre la vitesse trouvée chez la gre- mu. Zeits. f.-allyem. Physiol., 1903-1904. nouille et chez l'homme était fortuite, et que celte vitesse variait notablement d’un animal à l’autre et, chez un même animal, d'un nerf à l’autre. L'auteur de ces lignes avait {rouvé autrefois une vitesse de 6 à 12 m. dans le nerf de la pince du homard (au lieu de 27 m. par seconde pour le nerf sciatique de grenouille). M. Carlson a multiplié récemment les expériences de ce genre. Chez six espèces de Mol- lusques de Californie, il trouve des vitesses variant entre 44 em. (Ariolimax columbianus) et 435 cm. (Loligo pealii) par seconde. Chez un poisson (Bdellostoma Dombeyi), on trouve 250 cm. pour le pneumogastrique, 450 em. pour le nerf mandibulaire et 250 à 450 cm. dans la moelle épinière; chez une couleuvre, 1.050 em. pour l'hypoglosse, 1.600 em. pour la moelle épinière. Chez les Myriapodes et les Annélides, la propaga- tion de l'excitation dans la chaine ganglionnaire, ventrale présente des différences énormes : 5-4 em. à 9 cm. chez le Cerebratulus et 694 em. par seconde chez le Bispira polymorpha, 20 em. chez l’Zulus, 250 cm. chez le Scolopendra. 4. Réllexes cutanés normaux el anormaux.— Les physiologistes, et surtout les neuropathologistes, ont décrit dans ces derniers temps un grand nombre de réflexes cutanés, normaux et anormaux, c'est-à- dire de mouvements réflexes que l’on provoque avec plus ou moins de certitude par l’excilation de certaines régions de la peau. Ainsi, chez les indi- vidus normaux, l'excitation de la plante du pied par piqûre provoque la /exion des orteils. On admet, en général, que les réflexes cutanés uormaux s'opèrent dans la moelle épinière par les voies pyramidales ou voies corlico-spinales di- rectes. En effet, ces réflexes disparaissent chez les malades atteints de dégénérescence ou d’altéra- tions des cordons pyramidaux de la moelle épi- nière. Ils ne se montrent pas non plus chez les très jeunes enfants, chez lesquels, comme on le sait, les voies pyramidales n’ont pas encore atteint tout leur développement. Le réflexe normal de flexion des orteils est, chez ces malades ainsi que chez les jeunes enfants, remplacé par un réflexe anormal d'extension (réflexe ou signe de Babinski des orteils. Les réflexes anormaux ainsi que les réflexes ten- dineux suivraient la voie extra-pyramidale (cor- tico-spinale indirecte). Le type du réflexe tendineux est le réflexe tendineux rotulien décrit pour la pre- mière fois par Westphal, il y a près de trente ans. Il consiste, comme on sait, dans un mouvement d'extension brusque de la jambe provoqué par la percussion du tendon rotulien au-dessus du genou. Les réflexes tendineux s'exagèrent chez les malades | dont les voies pyramidales sont malades. LÉON FREDERICQ -— REVUE ANNUELLE DE PHYSIOLOGIE ——————————@—àp————a——@—@—— a —2à2— rl se: 5. Coordination réllexes locomoteurs. M. Philippson‘ a vu persister, chez le chien à moelle dorsale coupée, une série de mouvements réflexes des membres postérieurs, parfaitement coordonnés. IL a étudié les conditions de production d’une série de réflexes simples des pattes, dont la combinaison correspond aux mouvements normaux de progres- sion des membres postérieurs : il montre que les mouvements de la marche dans le train postérieur du chien se réduisent à une série, un enchaîne- ment de réflexes successifs, qui se déterminent les uns les autres. des 6. Effets réflexes différents provenant de la même région sensible de la moelle. — M. Sherrington* a pareillement étudié diverses particularités des mouvements réflexes chez le chien à moelle isolée (par section). Les réflexes spinaux provoqués dans la patte postérieure par excitation de la plante du pied varient suivant la forme de l'excitation. Une pres- sion extérieure exercée de manière à agir sur les nerfs sensibles de la partie profonde de la plante provoque un réflexe d'extension de la patte. Une piqûre de la plante provoque, au contraire, un réflexe protecteur de flexion et de rétraction de la patte. Pour obtenir le réflexe de grattage, il faut | exciter les terminaisons nerveuses des poils et celles que l'auteur appelle nocipientes (nerfs de la douleur). Une même région de la peau est ainsi reliée par plusieurs catégories de nerfs centripètes à plusieurs régions motrices de la moelle épinière. M. et M" Lapicque ont démontré, au moyen de leur interrupteur balistique, les lois de l'excitation du nerf moteur par le courant électrique. BR. Congrès Physiol., p. 156. LG: 2 C. R. Congrès Physiol,, p. 144. VI. — QUESTIONS DIVERSES. Rayons N.— Les fameux rayons N continuent à faire beaucoup de bruit dans le monde scientifique, notamment dans celui des physiologistes. M. Lam- bert, de Nancy, avait bien voulu, au Congrès de Bruxelles, se mettre à la disposition de ses collè- gues pour leur démontrer quelques-unes des par- licularités physiologiques de ces rayons. Malheu- reusement, les conditions de ces démonstrations délicates étaient nécessairement fort défectueuses. Il fallait, au milieu de la fièvre du Congrès, s’arra- cher aux attractions multiples offertes par les expériences faites dans d'autres locaux, et venir à la hâte, entre deux fractions des séances ordi- naires du Congrès, s'enfermer dans la chambre obseure de M. Lambert et chercher à y retrouver le calme nécessaire et le repos rélinien complet indispensable aux essais tout subjectifs sur les- quels devait se baser la constatation de l'action des rayons N. Il s'agit, en effet, d'apprécier dans l’obseurité de faibles différences d'éclat d’une surface phospho- rescente peu lumineuse. Un certain nombre de physiologistes ont cru voir quelque chose, mais on pouvait se demander s'il ne s'agissait pas de phénomènes d'auto-sugges- tion pure. L'insuccès relatif de ces expériences ne doit cependant pas procurer un triomphe facile aux adversaires des rayons N. Ce n’est que par des essais prolongés, répétés dans de bonnes con= dilions, qu'on peut espérer se faire une conviclion raisonnée et sérieuse sur une question aussi diffi= cile. L'enquête expérimentale se poursuit en ce moment de différents côtés. Il est prudent d'en attendre les résultats avant de se prononcer. | Léon Fredericq, Professeur de Physiologie à l'Université de Liée os Ep. ne | [a ( tite r ST BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques D’Ocagne (M.), Professeur à l'Ecole des Ponts et Chaussées, Répétiteur à l'Ecole Polytechnique. — Le Calcul simplifié par les procédés mécaniques et graphiques. 2° édition. — 1 vol. 1n-8° de 228 pages, avec 75 fiqures dans le texte (Prix :5 fr.). Gauthier- Viilars, éditeur, Paris, 1905. La Bibliothèque générale des Sciences vient de s'enrichir d'un traité qui faisait réellement défaut sur les simplifications mécaniques et graphiques des calculs que l’on doit effectuer, soit pour mettre en «uvre ou pour coordonner les résultats de l'expérience, soit même pour aborder des recherches d'ordre général d’après des données numériques variables. Il faut rappeler que M. d'Ocagne avait déjà publié, en 1894, les conférences sur le calcul simplifié qu'il avait faites au Conservatoire des Arts et Métiers. Mais, sous cette forme très condensée, l'exposé était incomplet ‘et ne constituait pas le livre documentaire qui nous était devenu indispensable, et que M. d'Ocagne nous offre aujourd'hui dans la nouvelle édition, remaniée et considérablement augmentée, de son premier travail. L'auteur passe en revue successivement : les instru- ments arithmétiques, les machines arithmétiques, les instruments et machines logarithmiques, les tables numériques, les tracés graphiques (calcul par le trait) et les tableaux graphiques (calcul nomographique). Dans chacun des chapitres, une partie historique très _ solide, et qui a dû demander un travail considérable, indique les étapes successives de chacun des procédés de calcul simplifié et nous amène à la description des derniers instruments, machines ou procédés divers les plus perfectionnés: il est d’ailleurs difficile d'analyser, dans une courte note bibliographique, un ouvrage aussi complet au point de vue documentaire, et nous ne pouvons guère qu'indiquer sommairement le contenu de chacun des chapitres. Les chapitres I à IV, formant la première partie de l'ouvrage, sont spécialement con- sacrés à la simplification du calcul par les propres ressources de l’Arithmétique et de la Mécanique. Dans le chapitre 1, nous retrouvons les instruments arithmétiques manuels, mais non mécaniques, addi- tionneurs et multiplicateurs, maniés comme jouets dans la jeunesse et repris plus tard, à l’âge mür, pour faciliter les calculs simples. Combien de fois, par exemple, ne nous sommes-nous pas servis, à défaut de machines, des réglettes de Genaille que nous nous “tions fabriquées? Que d'ingéniosité développée dans les petits perfectionnements apportés à ces instru- ments très simples, depuis le boulier de nos écoles primaires jusqu à l'appareil de Bollée, en passant par Parithmographe Troncet? Mais ces instruments intéressants ne sont pas assez rapides pour le calculateur, et, depuis Pascal, on a cherché à construire ou à perfectionner de vraies machines à rouages plus ou moins complexes. Ces appareils mécaniques nous sont parfaitement décrits dans le chapitre Il, et même on s'étonne que des appareils si difficiles à réaliser au point de vue mécanique aient-pu être analysés d'une manière aussi claire. C'est ainsi qu'après la lecture, les célèbres machines de Thomas, de Château (Dactyle), de Tche- bichef, de Bollée, de Babbage, de Scheutz n'ont plus guère de secrets. Dans le chapitre III, l’auteur rappelle d'abord sous une forme accessible à tous le principe des logarithmes æt explique le fonctionnement des machines loga- rithmiques, depuis les règles à calcul que tous les ingénieurs ont aujourd'hui sous la main jusqu'à la savante machine de Torres, servant à résoudre les équations algébriques de degré m en réalisant maté- riellement le principe des logarithmes d'addition de Gauss. Le chapitre IV, très court, traite des tables numé- riques à entrées multiples, qui sont pour le calculateur d'une importance capitale, en tenant de facon perma- nente à sa disposition les matériaux accumulés par des efforts antérieurs. Enfin, la seconde partie, formée des deux derniers chapitres, fait ressortir le secours que le calcul peut attendre de la Géométrie, soit par la simplicité et la facilité d'application des propriétés des figures (calcul par le trait, chapitre V), soit à l’aide des procédés généraux de la Nomographie {chapitre VI). Ce dernier chapitre, qui est entièrement consacré à l'exposé, sous une forme facile à saisir, des prin- cipes les plus courants de la Nomographie, offre un intérêt considérable en raison de la simplicité et de la généralité des méthodes qui y sont indiquées; il résume très heureusement, au point de vue spécial des calculs, le traité de Nomographie que M. d'Ocagne à publié en 1899 et où il a, pour la première fois, cons- titué en corps de doctrine cette branche nouvelle des Mathématiques appliquées. Il s’en dégage, d’ailleurs, de facon fort nette, la démonstration des grands avan- tages pratiques de la méthode des points alignés, pro- posée dès 1884 par l’auteur lui-même, et dont l'extrême fécondité est attestée par les applications très nom- breuses, très diverses, dues à des techniciens de toutes spécialités, dont le livre fournit la mention. Rappelons, en outre, que cette méthode est la première en date de celles qui utilisent systématiquement, au lieu de lignes cotées, de simples points cotés (échelles graduées), dont les avantages pratiques sont considé- rables. Disons, en terminant cet apercu rapide, que, suivant son habitude, l'éditeur Gauthier-Villars à anis tous ses soins à l'impression de l'ouvrage, mis en vente sous une élégante reliure, et qui est vraiment digne de figurer, à titre de « Traité sur les méthodes de calcul », dans les bibliothèques de tous ceux qui s'intéressent aux sciences et à leurs applications numériques. BARRIOL, Actuaire, Directeur de l'Institut financier el des Assurances, Sauvage (Edouard), Professeur à l'Ecole nationale supérieure des Mines. — Manuel de la Machine à vapeur. — 1! vol. in-12 de 426 pages, avec 250 figures (Prix : 40 fr.). Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1905. Le sous-titre de cet ouvrage indique que c’est un « guide pratique donnant la description du fonctionne- mentet des organes des machines et des chaudières à vapeur, à l'usage des mécaniciens, chauffeurs, dessina- teurs et propriétaires d'appareils à vapeur ». Ces mots valent dans leur laconisme toute une préface, car, en disant pour qui il a écrit ces pages, l’auteur fait savoir de quelle manière il a traité la question; son nom dit le reste. Il paraît presque inutile après cela de donner le titre des douze chapitres dont se compose le manuel: ils constituent un programme complet d'étude des appareils à vapeur. La grande réputation du savant pro- fesseur de l'Ecole des Mines nous dispense de faire ressortir la méthode excellente et la remarquable lucidité avec lesquelles sont traitées les multiples ques- tions de la génération et de l'emploi de la vapeur; seule, peut-être, la surchauffe a-t-elle été laissée un peu trop 530 dans l'ombre; le paragraphe consacré aux prix de revient est aussi un peu écourté, quoique fort inté- ressant. Les figures sont très belles et très claires : l'auteur, qui en a donné le dessin, et l'éditeur, qui les a fait exécuter, méritent tous deux d'être loués à cet égard, ainsi que de l'exécution typographique, qui est élégante et irréprochable. A. Wirz, Professeur à la, Faculté libre des Sciences de Lille. 2° Sciences physiques Abraham (Henri), Maïtre de Conférences à l'Ecole Normale Supérieure.— Recueil d Expériences élé- mentaires de Physique. 2° partie. — 1 vol. in-8° de 454 pages avec 424 fiqures. (Prix : 6 fr. 25.) Gau- tler- Villars, éditeur. Paris, 1905. La Revue générale des Sciences à déjà rendu compte ? du premier fascicule de cet ouvrage, dont la publication a été provoquée par les récentes réformes de l'Enseignement secondaire. On sait que l’enseignement de la Physique, accom- pagné d'exercices pratiques au laboraroire, se trouve réparti sur trois années dans les nouveaux « cycles d'études ». Les cours relatifs à une ou deux seulement de ces années existaient dans les lycées, au moment où ce premier fascicule a paru, de sorte que les sujets d'expériences qui y sont traités (Mécanique, Hydrosta- tique, Chaleur) suflisaient, à cette époque, aux parties déjà existantes du nouvel enseignement. Depuis lors, l’organisation des cours a été complétée, et la troisième année des cycles fonctionne actuelle- ment en même temps que les deux premières. D'autre part, dès l'an dernier, les résultats donnés par l'introduction des exercices pratiques de Physique dans ces classes avaient paru assez bons pour que la Commission interministérielle, nommée pourla révision des programmes des Classes de Mathématiques spé- ciales, ait émis le vœu de voir introduire également ces exercices dans les programmes de préparation aux urandes Ecoles du Gouvernement. Ce vœu a été ratifié en haut lieu, et cette partie de l’enseignement aura, dès cette année, une sanction aux examens d'entrée de l'Ecole Polytechnique. On comprend alors que les professeurs de Physique attendaient impatiemment la publication de la seconde partie de l'ouvrage de M. Henri Abraham. Cette seconde partie, qui est notablement.plus étendue que la première, se rapporte à l'Acoustique, à l'Optique et à l'Electricité. On y retrouve les qualités qui distinguaient le premier fascicule. L'auteur donne la description, succincte, mais cependant complète, d'une foule de dispositifs permet- tant de réaliser, avéc un matériel généralement simple et modeste, de nombreuses expériences qualitatives et quantitatives. C’est, naturellement, l'Electricité qui, avec la multi- plicité et la souplesse des combinaisons auxquelles elle se prête, occupe la majeure partie (environ les deux tiers) de l'ouvrage. On trouve là, non seulement des expériences très démonstratives appartenant à la catégorie des « expé- riences de cours », mais des indications détaillées sur les mesures des diverses grandeurs qui se rattachent aux phénomènes électriques et magnétiques. La plupart de ces mesures ne se rapportent pas seu- lement aux questions qui sont du domaine exclusif du laboratoire, mais à celles qui sont du domaine de la pratique industrielle courante, de sorte que la réunion de ces méthodes intéressera aussi bien les techniciens en matière de mesures électriques que les professeurs de Physique proprement dits. Gel ouvrage comble, de la manière la plus heureuse, une lacune qui existait dans l’enseignement expéri- Rev. gén. desmSc., t. XV, p. 611 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX mental de la Physique, et l'on peut assurer que ce se— cond fascicule sera accueilli, par tous ceux qui sont chargés de cet enseignement, avec la même faveur que son aîné. E. COLARDEAU, Professeur de Physique au Collège Rollin. Galine (L.)etSaint-Paul(B.). — Éclairage (Huiles, Alcool, Gaz, Electricité, Photométrie). 2° édition. — 1 vol. in-8° de 696 pages et 308 figures. (Prix :15 fr.) Veuve Dunod, éditeur. Paris, 1905. Ce livre est actuel, car nous traversons une époque qui est bien celle de la lumière à outrance. Nous sommes loin du quinquet traditionnel : la lutte sans merci de l’électri- cité et du gaz se continue depuis plus de vingt ans, avec des armes à peu près égales, et a contribué à ces. admirables résultats qui nous ont rendus, les uns et les autres, si difficiles sur la qualité et l'intensité de: l'éclairement. Les auteurs de lÆclairage ont bien compris l'intérêt qui s'attache également aux diverses sources de lumière, et, dans leur ouvrage, ils ont attri- bué à peu près autant d'importance ‘au gaz et à l’élec- tricité. La fabrication du gaz est décrite dans tous ses détails, et les données techniques, très complètes, sont tou- jours accompagnées de figures, qui sont loin de nuire à l'exposé. Le gaz produit doit être ensuite distribué et consommé : des chapitres très fournis sont consacrés à l'établissement des conduites et compteurs et des brüleurs. C'est dans cette partie de l'ouvrage que sont décrits les multiples progrès qui ‘ont eu le plus d’in- fluence sur le sort de l’industrie du gaz et lui ont per-- mis de lutter avec succès contre l'éclairage électrique : c'est là qu'on trouvera des renseignements théoriques. et pratiques très intéressants sur la lumière incandes- cente et sur les foyers intensifs à haute pression. De nombreux tableaux, donnant à la fois les pouvoirs éclai- rants et les consommations des divers systèmes de becs, montrent comment l'amélioration porta des deux côtés, grâce aux beaux travaux des Auer, Baudsept, Denay- rouse, Kern, etc. Une histoire complète du gaz de houille de Lebon devait entraîner celle de tous les gaz spéciaux plus ou moins pratiques dont on a parlé dans ces der- niers temps : acétylène, gaz à l'air, gaz à l'huile, gaz à l’eau. Le seul à retenir est ce dernier, en raison de l'importance capitale qu'il est en train de prendre dans les usines à gaz, où il contribuera à abaisser le prix de revient du mètre cube de gaz en utilisant une bonne partie du coke, sous-produit de la distillation, et en empêchant la dissociation des hydrocarbures à l'intérieur l'Eclairage auraient-ils pu s'arrêter un peu plus sur un facteur qui n'est plus négligeable pour le gazier. Cette légère critique mise à part, il faut reconnaître que l'étude est très complète et rendra des services pré- cieux aux ingénieurs d'usines à gaz. L'éclairage électrique est passé en revue avec la mème conscience ; mais ici la production du courant est mise de côté, les auteurs se contentant d'étudier de très près les différents régulateurs de lampes à are en vase clos, les lampes à courants alternatifs et les laim- pes à incandescence. La fabrication des charbons et. des lampes, ainsi que les installations électriques avec appareils et accessoires, complètent nécessairement ce véritable manuel de praticien. MM. Galine et Saint- Paul donnent quelques indications sur les autres modes d'éclairage : à l'huile végétale, aux huiles miné- rales et à l'alcool, et terminent leur intéressant traité par un véritable cours de photométrie, où ils expli- quent les méthodes les plus récentes employées au- jourd'hui pour la mesure des foyers colorés ou très intenses. Le dernier chapitre sera du goût des gens prati- ques, car les auteurs ont eu l'heureuse idée d'y trai- ter dans toute leur ampleur de véritables projets d’é- clairage, établis sur des données très précises. Ce sont là des gabarits dont on pourra tirer très avanta- geusement parti dans tous les cas. ÆEmice DEMENGE, Ingénieur civil. des cornues. Peut-être les auteurs de- ne. Ts CR L« \ L ‘+ l 1 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 31 Pacottet (P.), Chef de laboratoire à l'Institut national agronomique. — Vinification (Vin, Eau de vie, Vinaigre). — 1 vol. in-16 de 448 pages de l'Encyelo- pédie agricole (Prix :5 fr.). Baïllière et fils, éditeurs. Paris, 1905. Le volume de M. Pacottet contient un résumé de l'état actuel de nos connaissances en vinification. Ces connaissances sont évidemmentencore fortincomplètes, et celte industrie agricole, si importante en France, est susceptible de grands progrès. M. Pacottel expose ceux qui ont déjà été accomplis. Nous avons des données assez précises sur la composition des raisins et des moûts, sur les conditions de fonctionnement des levures. Nos connaissances sont moins avancées en ce qui concerne les maladies des vins; il est vrai que c’est là une question fort délicate. M. Pacottet, qui l'a étudiée avec M. Mazé, de l’Institut Pasteur, n'a pas cru devoir faire figurer dans son volume les résultats qu'il à obtenus et qu'il n'a pas jugés assez complets. Nous espérons que ces travaux feront prochainement l'objet d'un volume qui sera accueilli avec grand intérêt par les œnologues. : M. Pacottet a terminé son livre par un chapitre sur les Eaux de vie et un chapitre sur le Vinaigre. X. ROCQUES, Ingénieur-chimiste, Ancien chimiste principal du Laboratoire municipal de la Ville de Paris. 3° Sciences naturelles Parker (T. J.), Professeur de Biologie à J Université d'Otago. — Leçons de Biologie élémentaire. — 1 vol. in-8° de 496 pages, avec 127 illustrations. Tra- daction sur la dernière édition anglaise par le D' A. Marie. GC. Naud, éditeur. Paris, 1904. La Biologie est une science abstraite, qui est plutôt constituée par des idées scientifiques que par des faits. Pour essayer de faire comprendre ces idées aux débu- tants, on peut leur faire étudier une série appropriée de types concrets d'animaux et de plantes. L'idée n’est pas neuve : il y a déjà longtemps que Huxley et Martin l'avaient appliquée dans leur traité de Biologie pratique; elle a été reprise par M. Parker, professeur de Biologie à l'Université d'Otago, en Nouvelle Zélande. L'ouvrage de M. Parker comprend, en effet, un exposé de la structure, de la physiologie et de la biologie de quarante-deux types d'organismes, classés d’après l'ordre croissant de leur complexité. Vingt de ces types sont des organismes unicellulaires et non cellulaires (?). Le premier étudié est naturellement l’'Amibe; la des- cription que Parker donne de cet animal si simple est, à mon sens, trop classique : elle est excellente au point de vue morphologique, mais les caractères généraux des êtres vivants s'en dégagent mal; en particulier, l'importance du noyau, son rôle dans l'assimilation, ne sont pas suflisamment mis en évidence; si Parker insiste sur le mode de nutrition de l’Amibe, qu'il qualifie de nutrition holozoïque et continue, par opposition à la nutrilion holophytique et périodique de l'Hæmato- coceus, et à la nutrition saprophyte et continue de l'Heteromita, n'indique pas les expériences si simples et si élégantes (coloration sur le vivant) qui ont permis de mettreen évidence la fonction digestive chez les orga- nismes unicellulaires. Ainsi, dès le début, se manifeste la tendance d'esprit dominante de l'auteur : les con- Sidérations tirées de la forme priment celles tirées de la fonction ; et c’est vraiment fâächeux dans un livre qui à la prétention d'enseigner la Biologie. C'est surtout la complexité variable de la structure qui paraît intéresser Parker, car, après avoir décrit les organismes monocel- lulaires les plus simples (Amibes, Levures, Bactéries), ildécrit les organismes unicellulaires ou non cellulaires, chez lesquels on trouve une complexité considérable de la structure, et montre que cette complexité est atteinte tantôt par différenciation du corps cellulaire (cinq types d'Infusoires ciliés), tantôt par différenciation d'une enveloppe cellulaire ou par formation d'un squelette (Foraminifères, Radiolaires, Diatomées), tantôt par élon- gation du corps (Mucor, Vaucheria, Caulerpa). Parmi les être pluricellulaires, il distingue de même des agrégats linéaires (Penicillium, Agaricus, etc.), des agrégats superficiels (Wonostroma), des agrégats solides à diffé- renciation cellulaire poussée plus ou moins loin. La forme étant presque tout pour l’auteur, peu lui importe le milieu où cette forme se trouve réalisée. Sur 42 types étudiés, il en a choisi seulement 13 vivant dans le milieu marin; or, dans l’eau douce, les manifes- tations vitales sont beaucoup moins intenses et moins variées que dans l’eau de mer; maintenant, on considère mème souvent les types d'eau douce comme dérivant des types marins par une sorte de dégradation, et l'on a été jusqu'à voir dans certains Protozoaires des Méta- zoaires dégénérés. Ainsi, le livre de Parker ne nous pré- sente guère que l'un des multiples aspects de la vie sur notre planète. Il est vrai qu'il est plus facile de se pro- curer des êtres d’eau douce que des êtres marins; mais Parker ne peut invoquer cette excuse, car son traité n'est pas un traité pratique. Il le dit lui-même : ayant à décrire un type de Ver annelé, il substitue le Poly- gordius, animal marin excessivement rare, au Ver de terre, séduit par la simplicité des formes chez le Poly- gordius. « Cette substitution n’est, dit-il, bien entendu, possible qu'en raison de la destination du livre, écrit pour l'étude et non pour le laboratoire; mais j'ai la con- viction intime que l'étudiant qui connaîtra la descrip- tion du Polygordius, ne fut-ce que d'après des figures et des descriptions, sera beaucoup plus à même de profiter, par une étude pratique, de la connaissance de l’un des vers supérieurs ». Cette phrase caractérise l'auteur et son livre : il choisit le Polygordius parce qu'il réalise un schéma morphologique ; la Biologie de Parker rappelle la Zoologie concrète du Professeur De- lage : c’est l'étude d'une série de types morphologiques. Il est vrai que l'ouvrage renferme, en outre, la discussion, en un certain nombre de leçons spé- ciales, de quelques sujets d'importance générale : cellules et noyaux, biogénèse et abiogénèse,.… origine des espèces..…., spermatogénèse et ovogénèse….; mais, en lisant ces pages, on se croit reporté à plus de trente ans en arrière, à une époque où l'on discutait avec acharnement sur la théorie cellulaire, la génération spontanée, les limites des deux règnes du monde orga- nique. Actuellement, ce ne sont plus ces'questions qui passionnent les biologistes : ceux-ci s'intéressent sur- tout à l'influence du milieu et du genre de vie sur la matière vivante: on suit l’évolution des formes depuis l'œuf jusqu'à l'adulte, en cherchant, au moyen d’obser- vations physiologiques, à se rendre compte du conflit entre les causes actuelles et les causes passées. Or, c'est à peine si l’auteur signale les phénomènes de la seg- mentation de l'œuf, de la formation de la blastule, de la gastrule, pendant lesquels une masse de proto- plasma qui a cessé d'assimiler subit en quelque sorte passivement les forces héréditaires; c’est là une lacune regrettable que, dans l'enseignement élémentaire de la Biologie en France (P. C. N.), on a comblée depuis long- temps. De plus, l'étude des animaux supérieurs élant négligée, se réduisant à celle du Polygordius, de l'Etoile de mer, de l'Ecrevisse, de la Moule d'eau douce, du Chien de mer, une foule de questions relatives à la vie parasitaire, à la vie pélagique, à la progénèse, à la pæci- logonie, à la castration parasitaire, au mimétlisme..., sont complètement laissées de côté. i L'ouvrage est plutôt un livre d'Anatomie comparée, qui n'a même pas le mérite de se lire facilement. Gest dommage, car il serait important d'avoir un livre de Biologie vraiment moderne, facilement lisible, suscep- tible de contrebalancer, dans une certaine mesure, l'influence néfaste de certains traités, tels que cer- tains traités français de Botanique. GEORGES BON, Agrégé et docteur ès sciences, Préparateur-chef à la Faculté des Sciences de Paris. 4 Sciences médicales Blanchard (R.), Membre de l Académie de Médecine, Professeur à la Faculté de Médecine de Paris. — Les Moustiques : histoire naturelle et médicale. — 1 vol. in-8° de xi-673 pages et316 fiqures.(Prix:25 fr.). F, de Rudeval, éditeur. Paris, 1905. L'étude des Moustiqueset des maladies qu'ils inoculent à l'homme constitue le chapitre le plus important et le plus intéressant de la Médecine contemporaine. Quand Patrick Manson, Ross, Grassi et Finlay eurent démontré qu'ils étaient les agents d'inoculation de la filariose, du paludisme et de la fièvre jaune, tout le monde voulut étudier ces dangereux insectes. On en récolta dans toutes les régions ; les musées et les labo- ratoires en recurent de tous les points du globe, et les spécialistes luttèrent d'activité pour résister au flot envahissant et pour décrire, les premiers, les espèces les plus intéressantes. Nous sommes loin, à l'heure actuelle, des six espèces de Culex décrites par Linné. En 1900, M. R. Blanchard comptait déjà 237 espèces de Moustiques ; en 1901, M. Théobald élevait leur nombre à 319, etil n'est pas téméraire de penser que le nom- bre actuel est d'environ 400 espèces réparties dans 54 genres. Il est vrai qu'il yaurait bien descritiques à faire à ces travaux : beaucoup d'espèces, décrites comme nouvelles, ne le sont pas, et certains genres, eux-mêmes, ne sont pas à l'abri de toute critique. Les travaux de M. Théobald sont venus révolutionner complètement la classification des Moustiques; mais, en donnant trop d'importance à des caractères essentiellement secon- daires, et d'ailleurs souvent très difficiles à constater, tels que la forme et la disposition des écailles, ils ont produit une classification par trop artificielle et com- pliquée, qui a rendu l'étude des Moustiques extrème- ment difficile pour les non spécialistes. Le livre du Professeur Blanchard rendra, à ce point de vue, d'immenses services, car c'est une mise au point des travaux les plus récents. On y trouvera la diagnose de tous les genres et de presque toutes les espèces, dia- gnose quise trouve singulièrement facilitée par de nom- breuses clefs dichotomiques. C'est un livre qui va devenir le livre de chevet de tous les médecins de marine ou des colonies. Il leur permettra de détermi- ner eux-mêmes les espèces qu'ils auront rencontrées. Dans une seconde partie, M. Blanchard étudie les Moustiques en tant qu'agents pathogènes. Il se trouve ainsi amené à décrire les parasites qu'ils trans- mettent à l’homme et les redoutables maladies qui en sont la conséquence : paludisme, fièvre jaune, lilariose. Nous indiquerons en passant que cette partie n'intéresse pas seulement les médecins, mais aussi les naturalistes et les vétérinaires, puisque, entre autres exemples, à propos du paludisme, l’auteur passe en revue toutes les hémosporidies et décrit, à propos de la filariose, la Æilaria jmmitis du chien. On trouvera des données extrêmement importantes qui ne se ren- contrent encore dans aucun ouvrage classique; c’est ainsi que les récents travaux de Schaudinn, qui vien- nent bouleverser nos conceptions relativement à la biologie des Hématozoaires, y sont exposés de main de maitre. A propos du paludisme, l’auteur discute la question de l'unité ou de la pluralité des espèces d'hématozoaires, et il montre qu'indubitablement il existe au moips trois espèces (Plasmodium vivax, P. malariae et P. falci- parum), dont il donne, avec détails, le développement et la diagnose. L'un des chapitres les plus importants, pour les notions pratiques qui en découlent, est certainement celui de la prophylaxie. L'auteur montre comment on peut détruire les Moustiques sous leurs différents états et, en particulier, comment pratiquement on peut détruire les larves et les nymphes par le pétrolage des eaux. Il décrit les différents moyens qui per- mettent de se protéger contre la piqûre et insiste BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX plus particulièrement sur les toiles métalliques, qui constituent, à l'heure actuelle, le mode de protection le plus simple et le plus effectif. On trouvera égale- ment un excellent exposé des mesures préventives prises à la Havane contre la fièvre jaune. Les gouvernements et les municipalités trouveront là le meilleur exemple à suivre pour protéger une ville ou un port contre les terribles fléaux transmis par les Moustiques. Quant à ceux qui ne peuvent se protéger par les procédés de prophylaxie mécanique, ils apprendront comment on peut établir une thérapeutique préventive et curative : la méthode préventive de Grassi par l'ésanophèle et tous les documents relatifs à la réglementation légale du traitement préventif en Italie par la quinine. On ap- prendra, enfin, dans les pays où les Pouvoirs publics se désintéressent des grandes questions d'hygiène publi- que, comment l'initiative privée peut grouper les efforts et tirer parti des différentes méthodes prophy- lactiques en vue d’assainir toute une région. La Lique corse contre le paludisme et la Ligue contre le paludisme en Algérie en constituent chez nous le meilleurexemple. Les médecins et les administrateurs pourront donc apprendre comment on peut détruire les Moustiques et se mettre à l'abri de leur piqûre; comment on peut assainir les campagnes, les villes etles ports; comment on peut se mettre à l'abri des hématozoaires et les détruire quand ils ont envahi notre organisme. C’est, on le voit, un chapitre d'hygiène pratique d’une importance incontestable. Il n’est pas jusqu'aux travailleurs de laboratoire à qui ce livre ne doive rendre de signalés services, en indi- quant aux voyageurs, naturalistes ou médecins, com- ment ils pourront récolter et élever les Moustiques; comment ils devront les conserver, les préparer et mème les expédier en vue des recherches anatomiques ou des collections. Ainsi sera facilité le travail prélimi- naire qui permettra ensuite aux spécialistes des déter- minations plus faciles et plus exactes sur des exem- plaires en parfait état. Le livre du Professeur Blanchard, sous une forme aussi précise que possible, résume l’état de la science dans des questions qui intéressent au plus haut point la médecine européenne et surtout la médecine colo- niale. C'est un livre qui sera lu par les professeurs comme par les étudiants, par les médecins traitants comme par lessavants de laboratoire. par les médecins de marine et les médecins coloniaux, les colons et les administrateurs, les voyageurs et les naturalistes. C'est, en un mot, un livre qui était impatiemment attendu par tous ceux qui s'intéressent aux questions qui y sont traitées; ils auront maintenant la chance de ne plus avoir à se livrer aux recherches pénibles et souvent fastidieuses que l’auteur à eu le courage de s'imposer pour élaborer cet important travail. Le Professeur Blanchard était, du reste, mieux placé que quiconque pour mettre au point ces ques- tions, qu'il enseigne à la Faculté de Médecine de Paris. Il existe encore des personnes qui pensent que la chaire d'Histoire naturelle médicale est restée ce qu’elle était autrefois; en réalité, elle a subi une évolution naturelle et s'est transformée en chaire de Parasito- logie. Rien, mieux que le présent ouvrage, ne peut montrer l'importance de cette science nouvelle, qui marche actuellement à la tête du mouvement médical moderne et que les ignorants seuls peuvent encore considérer comme accessoire. Il s’agit, en réalité, de notions fondamentales que M. R. Blanchard enseigne non seulement aux étudiants de la Faculté de Paris, mais encore aux nombreux docteurs français et étran- sers qui viennent suivre les cours de l'Institut de Médecine coloniale, fondé à Paris sur son initiative. Disons, en terminant, que ce livre fait grand honneur à la maison d'éditions R. de Rudeval par la facon élé- gante dont il est présenté, comme par la perfection des figures et du tirage. De J. GurarT, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 939 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER __ ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 15 Mai 1905. | M. le Président annonce le décès de M. A. Potier, . membre de l’Académie. — M. Louis Henry est élu correspondant pour la Section de Chimie. 15 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Stephanos étudie - le problème des forces donnant lieu à des trajectoires - coniques. En dehors des solutions comprises dans le + cas considéré par Bertrand, ce problème n'admet aucune autre solution. — S. A. le prince de Monaco décrit des expériences d'enlèvement d'un hélicoptère exécutées dans une salle du Musée de Monaco. — MM. J. Mascart et W. Ebert décrivent la nouvelle lunette méridienne photographique pour la détermi- | nation des ascensions droites installée à l'Observatoire de Paris sur les indications de M. Lippmann; avec quelques perfectionnements, cet appareil pourra rendre de grands services à l’Astronomie d'observation. | 2° ScrENGES PHYSIQUES. — MM. J. Violle et Th. Vau- tier ont étudié la propagation des sous musicaux dans un tuyau de 3 mètres de diamètre et de près de 3 kilo- mètres de longueur. Ils conservent toutes leurs pro- » priétés acoustiques ; les sons graves sont transmis avec la mème vitesse que les sons aigus; la durée de propaga- tion des harmoniques est indépendante de la hauteur du son fondamental initial et de la nature de l'instrument. — MM. Ch.-Eug. et H. Guye ont étudié l'influence … des pressions élevées sur la décharge disruptive dans | les gaz. Jusqu'à 10 atm., le potentiel explosif croît mé ti matin à linéairement avec la pression ; au delà, le rapport du potentiel explosif à la pression va en diminuant. — M. G.-A. Hemsalech a reconnu que les courants de … Foucault augmentent la fréquence d’oscillation par seconde de l'étincelle oscillante sans influer sur le nombre des oscillations dans chaque décharge. L'hys- térésis du fer détruit les oscillations et en diminue plus ou moins la fréquence. — M. S. Turchini a observé que l'impression radiographique à intensité constante d’un tube à rayons X augmente avec l’étincelle équiva- lente jusqu'à 10 centimètres d'étincelle; au delà, la courbe est pratiquement confondue avec une asymp- tote horizontale. — M. Eug. Bloch a constaté que les ions contenus dans les gaz issus d’une flamme pren- nent, au bout d'un temps suffisamment long, une mobilité d'équilibre de l’ordre de 0,01%%, Ils doivent donc être classés dans la catégorie des gros ions. — M. G. Meslin à étudié le coefficient d'aimantation des solutions aqueuses ; le pouvoir magnétique ne se con- serve pas toujours dans le phénomène de la dissolu- tion, du moins lorsqu'il s'agit de sels fortement magné- tiques. — M. P. Weiss, par l'étude des propriétés ferromagnétiques de la pyrrhotine, montre que l'édifice complexe du cristal est formé par la juxtaposition de cristaux élémentaires associés dans le plan magnétique sous des orientations différant de 120°. — M. A. Gué- bhard montre l'identité de cause du silhouettage blanc et du silhouettage noir en photographie. — M. D. Ger- nez estime que la tribo-luminescence n'est pas une propriété spéciale surtout aux composés organiques; on l'a déjà trouvée sur 70 composés purement miné- Taux. — M. Pernter montre que le halo extraordinaire décrit récemment par M. Besson lève tous les doutes uant à la réalité de l’arc tangeant de Bravais. — M. M. Berthelot a reconnu qu'à la température de ramollissement, la paroi des vases de verre, comme elle des vases de silice fondue, est perméable aux gaz; ces vases sont alors susceptibles d'échanger, par voie osmotique, les gaz qu'ils renferment avec les gaz atmosphériques. — M. C. Matignon a déterminé quelques propriétés des chlorures anhydres de La, Pr, Nd et Sa; D—3,947; 4,017; 4,195; 4,465; F—907e, 8180, 7859, 686°; chaleur de formation — 80,3 cal.; 73,9 cal.; 71,6 cal.; 64,2 cal. — M. P. Alvarez, en fai- sant agir sur un sel soluble de rhodium un excès de soude, puis le mélange gazeux obtenu par action à froid de HCI concentré sur HCIO*, à obtenu une belle coloration bleue caractéristique, due à la formation de perrhodate de sodium. — M. E. Chablay, en faisant réagir les métaux-ammoniums sur les alcools primaires, secondaires ou tertiaires, a obtenu avec un bon ren- dement les alcoolates : RCH°OH + AzH°Na — R.CHONa — AZI H. — M. A. Kling a préparé le propionyl- carbinol et quelques-uns de ses dérivés; les réactions de cet alcool montrent qu'il est comparable à son homologue inférieur l’acétol et qu'en solution aqueuse il prend la forme C2H5.C(OH).CH? Non — MM. A. Guyot et J. Catel : Contribution à l'étude des dérivés du benzodihydrofurfurane (voir p.537). — MM. A. Haller et C. Martine, en hydrogénant la pulé- gone en présence de nickel réduit, ont obtenu : 1° des pulégomenthones, C#HO, dont le mélange bout à 94-95° sous 468 ; [xs — — 5043; 2° des pulégomen- thols, C!‘H°°0, dont l’un est identique au menthol naturel et l’autre fond à 840-850; ce dernier donne un phtalate qui, saponifié par la potasse, fournit un pulé- gomenthol isomère, liquide sirupeux. — MM. L. Ma- quenne et Eug. Roux ont constaté que l’amidon natu- rel est un mélange-de deux substances essentiellement différentes : l’'amylocellulose, intégralement soluble dans l’eau surchauffée, se transformant en maltose sous l’action du malt, et l’'amylopectine, non sacchari- fiable par le malt, se gélatinisant sous l'action de l’eau bouillante. L'amidon artificiel ne diffère de l'amidon naturel que par l’absence d’amylopectine. — MM, M. Piettre et A. Vila, à la suite de la communication de MM. Ville et Derrien, estiment quil n'y a pas encore de raisons suffisantes pour admettre l'existence d'une méthémoglobine fluorée. — M. F. Battelli et M'e L. Stern admettent que l’anticatalase forme probable- ment avec la catalase une combinaison labile, qui est détruite par la philocatalase avec régénération de la catalase. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. R. Odier a étudié les terminaisons des nerfs moteurs dans les muscles striés de l'homme; un nerf afférent aborde perpendiculaire- ment une fibre musculaire et s'engage sous le sarco- lemme. — M. E. Solvay essaie de dissocier les deux éléments de la dépense énergétique du muscle en tra- vail : l'énergie de sustentation et le travail d'élévation. — M. G. Delacroix décrit une nouvelle pourriture bac- térienne des choux, qui se produit surtout dans les sols tourbeux de marais desséchés et qu'il attribue à un bacille qu'il a isolé : le Bacillus brassicaevorus. — MM. E. Chuard et F. Porchet ont constaté que le trai- tement à la bouillie bordelaise laisse sur les feuilles de vigne (prises au moment de la vendange) de #,5 à 19 °/, du cuivre appliqué, le traitement à la bouillie bour- guignonne de 3,3 à 22 °/,, et le traitement au verdet neutre de 8,8 à 31,9 °/,. — M. H. Lagatu expose un projet de classification et de nomenclature des terres arables d’après leur constitution mécanique. — M. A. Lacroix a reconnu que les carbonates de magnésie de Santorin représentent, à l’état naturel, les diverses D34 formes de magnésie blanche des laboratoires; ils ne doivent pas être considérés comme des minéraux pri- maires de fumerolles volcaniques, mais comme des produits formés par une réaction secondaire aux dépens des minéraux normaux de celles-ci. — MM. M. Lugeon et E. Argand ont observé, dans la partie de la zone Mont Rose-Piémont comprise entre Bonneval et le massif du Tessin, l'existence de sept nappes de recou- vrement superposées, plus ou moins digitées, toutes déversées vers l'extérieur de la chaîne. Séance du 22 Mai 1905. 41° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Lebesgue indi- que une condition générale de convergence des séries de Fourier. — M. E. Vessiot présente ses recherches sur les courbes minima. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Duhem a comparé ses résultats théoriques sur l'hystérésis magnétique produite par un champ oscillant superposé à un champ constant à ceux que M. Maurain a obtenus expérimen- talement. La théorie proposée explique bien les faits observés. — MM. A. Jaquerod et O. Scheuer ont déter- miné la compressibilité de différents gaz au-dessous d'une atmosphère et en ont déduit leurs poids molécu- laires par la méthode des densités limites. Ceux-ci coïncident pratiquement avec les résultats des meil- leures méthodes analytiques pour les gaz éloignés de leur point d’ébullition; pour les gaz facilement liqué- fiables, les poids moléculaires calculés sont trop faibles. — M. Ph.-A. Guye à déterminé le poids atomique de l'azote d’après le rapport des densités de l’azote et de l'oxygène. Il trouve 14,009, valeur qui concorde avec la moyenne des autres déterminations physico-chimi- ques. — M. H. Pélabon a étudié la fusibilité des mélanges que le sulfure d'antimoine forme avec le sulfure cuivreux et le sulfure mercurique. Les résultats permettent de calculer la constante cryoscopique du sulfure d’antimoine, qui estégale à 788. — M. Ph. Lan- drieu a déterminé les limites de la réaction entre l’acé- tone et le chlorhydrate d'hydroxylamine et les varia- tions de cette limite avec la dilution. Le phénomène est représenté par la formule X/(1 — x)N — constante, où x est la proportion d'oxime formée et N le nombre de molécules dissoutes. — Mi: P. Cernovodeanu et M. V. Henri poursuivent leurs recherches physico-chi- miques sur l'hémolyse. Il existe une relation très étroite entre la vitesse d'absorption de l'hémolysine par les globules et la loi suivant laquelle se produit l’hémolyse. — M. E. Chablay, en faisant réagir les métaux-ammo- nium sur les alcools polyatomiques (glycol, glycérine, érythrite, mannite), a obtenu des alcoolates monosubsti- tués. — M. R. Marquis a constaté que, en présence de corps capables de se combiner à l'hydroxylamine, deux molécules d'acide benzhydroxamique perdent une molécule d'hydroxylamine pour former une molécule d'acide dibenzhydroxamique. — M. Ch. Schmitt a pré- paré les éthers mésoxaliques avec un rendement attei- gnant 65 °/, en faisant passer un courant de vapeurs nitreuses dans les éthers maloniques correspondants en présence d'anhydride acétique et d’éther. Ces éthers se condensent avec les éthers cyanacétiques en présence de pyridine. — MM. R. Fosse et L. Lesage ont préparé les sels doubles halogénés de quelques métaux et du dinaphtopyryle.— MM.J. Wolfet A. Fernbach étudient les circonstances qui influent sur l’état physique de l'amidon. Par un simple changement dans la réaction des sels qui l’accompagnent, on arrive à rendre l’ami- don impropre à la coagulation. — M. Ch.Porcher, par l'application du procédé de von Wittich (à l’éther saturé d'eau) à l'intestin des animaux à la mamelle, a obtenu un extrait très riche en lactase et très propre à l'étude de cette diastase.— MM. G. Halphen et A. Ri- che ont constaté que l'addition de faibles quantités d’aci- des aux solutions de colorants dits acides augmente leurs propriétés tinctoriales dans les coupes histologiques ; la teinture des colorants basiques est facilitée par la présence de petites quantités d’alcalis. Ces résultats ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES s'expliquent en tenant compte des propriétés à la fois acides et basiques des albuminoïdes. — M. G. André a étudié les transformations des matières azotées chez les graines en voie de maturation; elles sont inverses de celles qui se produisent pendant la germination. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Fauvel a étudié sur lui la valeur alimentaire des différents pains. Le pain complet n'offre aucun avantage sur le pain bis; il ne fournit pas sensiblement plus d'acide phosphorique assimilable et il abaisse le taux de l'urée au lieu de laugmenter. Le pain bis, au contraire, donne des résultats supérieurs au pain blanc, sans avoir aucun des inconvénients du pain complet, — MM. L. Vallois etC. Fleig ont étudié le graphique respiratoire chez le nouveau-né ; l'irrégularité si prononcée qu'il manifeste ne paraît résulter que du manque d'habitude de cette fonction nouvelle et de l’imperfection ou de l'absence des actions régulatrices. — M. J. Chaine expose ses idées sur l'origine des insertions tendineuses des muscles polygastriques. — M. Y. Delage à constaté qu'une augmentation de pression osmotique n’est pas nécessaire pour déterminer la parthénogénèse expéri- mentale ; d'autre part, il a obtenu la segmentation avec des solutions de chlorure de manganese, de phosphate acide de sodium, etc. — $S. A. le Prince de Monaco indique les principaux résultats de la campagne scien- tifique de la Princesse Alice en 1904. — M. L. Gau- tier a observé que la plante hospitalière pour laquelle le Melampyrum pratense semble avoir une préférence marquée est le hêtre; ses suçcoirs se fixent aux racines et s’allient intimement aux mycorhizes de l'arbre. — M. C. Houard à étudié les variations des caractères histologiques des feuilles dans les galles du Juniperus oxycedrus du Midi de la France et de l’Algérie. — M. L. Jecker décrit quelques minéraux des mines de zinc et de plomb du Djebel Resas (Tunisie), en parti- culier la cérusite et la badhillite. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 16 Mai 1905. M. Kermorgant présente-le Rapport sur le concours pour le Prix Larrey. — MM. El. Metchnikoff et Em. Roux présentent leurs recherches microbiologiques sur la syphilis. On sait que Schaudinn a observé récemment, dans plusieurs accidents primaires syphi- litiques chez l'homme, la présence de deux espèces de spirilles : le Sp. refringens, relativement grand, à spires en forme de vagues, facilement colorable, et le Sp. pallida, très petit, en forme de tire-bouchon et ne se colorant que par des substances spéciales (solution de bleu d'azur et d'éosine de Giemsa); ce dernier serait l'agent spécifique de ‘la syphilis. MM. Metchnikoff et Roux ont recherché le spirille päle dans les lésions des singes syphilitiques et ils sont parvenus à l’observer dans quatre cas sur six. Leurs recherches viennent done confirmer les travaux de Schaudinn. Séance du 23 Mai 1905. MM. Ehrlich et Ramon y Cajal sont élus associés étrangers de l’Académie. M. L.-G. Richelot présente un Rapport sur un Mémoire de M. Suarez de Mendosa relatif au traite- ment des corps étrangers de l’æsophage. L'auteur y recommande la dilatation de l’œsophage à l’aide de l'instrument Collin-Verneuil ou du ballon de Tarnier, combinée avec l'extraction au moyen du panier de Graefe. — M. P. Fabre a étudié les effets provoqués par les piqüres des Hyménoptères sur l'orgauisme; ils constituent un véritable empoisonnement. Les piqûres d’abeilles, outre un œdème érysipélateux des régions: atteintes, peuvent provoquer des troubles généraux graves et même la mort. La piqûre du bourdon, et sure tout celle des guêpes et des frelons, semblent intro= duire dans l'organisme un poison plus subtil; une piqûre suflit bien souvent à produire des troubles dem nature syÿncopale et à amener des éruplions générali=\ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 33 sées et fréquemment une véritable éruption d'urticaire. Presque toutes les fonctions de l’organisme peuvent être troublées à la suite de piqüre. Le traitement local consiste en application immédiate, sur la région piquée, d’eau de chaux, d’ammoniaque liquide, de vinaigre. Comme traitement général, on devra favoriser … l'élimination du venin : 1° par la peau, en provoquant - la sueur par des liquides chauds aromatiques; 2° par les reins, en employant les diurétiques; 3° par les voies digestives, à l’aide de vomitifs et de purgatifs. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 43 Mai 1905. MM. J. Chifflot et CI. Gautier maintiennent formelle- ment l'existence de mouvements browniens des granu- lations cytoplasmiques chez diverses algués. — M. E. Guyénot communique ses recherches anatomiques et physiologiques sur la vessie natatoire des Cyprinidés. — M. C. Fleig expose ses essais de préparation d'une antisécrétine. Les sérums normaux sont déjà doués de propriétés neutralisantes vis-à-vis de la sécrétine, mais elles ne paraissent pas augmenter sous l'influence jd'injections de sécrétine. — M. F.-J. Bosc estime que e molluscum contagiosum de l'homme est une maladie bryocytique, virulente, contagieuse et inoculable, mais localisée au point d'inoculalion, La tumeur est consti- + tuée par une prolifération pure de cellules épithéliales * malpighiennes, renfermant des inclusions de volume variablé, dont les plus volumineuses sont vraisemblable- ment de nature parasitaire. — M. Ch. Porcher a observé, lors de la délivrance des chèvres sans mamelles, une hyperglycémie très accentuée dont la glycosurie est le signe. — MM. Ch. Achard et L. Ramond ont cons- taté une action favorable des solutions salines isoto- niques sur les altérations cellulaires dues à la tonolyse ou à la toxolyse. — M. H. Plaut prétend que le Spirit lum sputigenum n'est pas identique au vibrion du cho- léra et appartient, sans aucun doute, aux associations bactériennes des angines ulcéreuses.— M. H. Vincent réfute les assertions précédentes et montre qu'il y a des formes d'angines dues au fuso-bacille seul. — - M.E. Nicolas pense que les dérivés sulfo-conjugués, - relativement abondants dans les urines d'herbivores, contribuent, dans une notable proportion, à donner à la tension superficielle de ces urines sa faible valeur. — M. Ch. Féré a étudié l'influence de quel- ques excitations sensorielles successives sur le travail. Il montre, d'autre part, que les effets immédiats de la représentation mentale du mouvement augmen- tent le travail avec l'exercice. — MM. A. Gouin et P. Andouard ont reconnu que le régime alimentaire aune grande influence sur l'hydratation des tissus du corps des Bovidés. — M. P. Remlinger a recherché à quel moment le bulbe des lapins rabiques de passage devient virulent; c’est au 3° jour que la virulence commence à se montrer. — MM. A. Trillat et Sauton : Sur la présence de l'ammoniaque dans le lait de vache (voir p.537).— M.E. Géraudel montre que la différencia- tion du bourgeon hépatique en cellule biliaire et cellule hépatique est la conséquence de la double circulation “capillaire de la glande hépatique. Séance du 20 Mai 1905. MM. M. Labbé, Tison et Cavaroz ont constaté que a courbe de l'acidité urinaire observée aux différentes heures du jour est toujours comparable à elle-même, à condition qu'on l’observe chez un sujet sain et sou- mis à un régime alimentaire convenablement réglé. es substances acides s’éliminent surtout dans les eures qui suivent les repas, en présentant un maxi- num d'élimination 2 à 4 heures après le repas. — M. J. Roger et Greffulhe ont observé sur 4 chevaux, en Algérie, une trypanosomiase qui présente de grandes essemblances avec le surra. — M. G. Delamare décrit ne nouvelle méthode de coloration tétrachrome, où imultanément l'hématoxyline colore en violet les ét de nd lé. à in nes LÉ tite Qc noyaux, l'acide picrique en jaune les protoplasmes et libres musculaires, la fuchsine acide en rose les fibres conjonctives et l'orcéine en noir les fibres élastiques. — M. Marie et M'!° M. Peletier ont obtenu des résul- tats encourageants dans le traitement des accidents convulsifs, épileptoïdes et cataleptoïdes des aliénés par l'injection de sérum marin. — M. Sakorraphos à pra- tiqué l'examen du sang dans un cas d'acromégalie : il y avait oligémie, sans disproportion entre les éléments cellulaires du sang. — M. E. Maurel a observé que le zéro physiologique dans le lit est de 33°-3%9, c'est-à-dire plus élevé que pendant le jour sous les vètements. — MM. J. Jolly et J. Stini ont évalué la masse totale du sang chez le rat blanc; elle est d'environ 4,5 cc. par 100 grammes. —- M. Dehon décrit les méthodes qu'il a employées pour ses recherches sur l'inanition chez le jeune chat. — M. E. Lenoble estime que, chez un enfant à gros foie et à grosse rate, si l'on constate une réaction myéloïde intense accompagnée d'altérations sanguines, 1l y a toute probabilité pour qu'on se trouve en présence d'une syphilis héréditaire. — M. R. Le- gendre a constaté que, fréquemment, le protoplasma des cellules nerveuses d’Helix est formé d’une zone interne périnucléaire, où se trouve la plus grande par- tie des neurofibrilles et de la substance chromophile, et d’une zone externe, moins dense, où se rencontrent les filaments névrogliques et les lacunes. — MM. C. Levaditi et F. Lange ont reconnu-qu'il y a une spi- rillose vraie du lapin, causée par le spirille de Marchoux et Salimbeni, spirillose analogue à celle de la poule, mais plus brève et bénigne. — M. C. Levaditi à observé la présence du Spirochaete pallida dans les lésions cutanées (bulles de pemphigus) de la syphilis congénitale. L'infection se transmettrait de la mère au fœtus par la voie placentaire. — Me et M. C.-L.Gatin ont étudié l’action de quelques diastases animales sur les mannanes du salep et celles de l’albumen de carou- bier; aucune n’est parvenue à provoquer l’hydrolyse. — M. J. Nageotte a étudié, par la méthode de l’alcool- ammoniaque de Ramon y Cajal, un cas de tabes amyo- trophique ; il a observé une régénération des fibres à myéline dans les racines antérieures et des fibres sans myéline dans les racines postérieures. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff indiquent les précau- tions à prendre dans l’étude de l’action du poumon sur le sang. — MM. M. Doyon et J. Billet montrent que, dans l'intoxication chloroformique, l'incoagulabi- lité du sang et la disparition du fibrinogène du plasma ne se produisent que lorsque le foie est nécrosé ou gravement atteint. Dans le foie, on constate des hémor- ragies, une accumulation de leucocytes dans les espaces intercellulaires et des lésions des cellules hépatiques. — Ml° P. Cernovodeanu et M. V. Henri ont observé que l'hémolyse produite par le mélange de deux sérums est plus forte que la somme des hémo- lyses de chacun séparément. Un sérum non hémoly- tique vis-à-vis de certains globules peut empêcher l’'hémolyse de ces globules par un autre sérum. Les phénomènes de l’hémolyse peuvent s'expliquer en admettant qu'il existe dans le sérum une seule subs- tance complexe ; celle-ci se transforme petit à petit à mesure que l’on chauffe le sérum, de sorte que, dans le sérum chauffé à 56°, l'hémolysine est à un état phy- sique un peu différent de celui sous lequel elle se trouve dans le sérum non chauffé. — M. L. Launoy à poursuivi l'étude des modifications de la cellule hépa- tique au cours de l’autolyse aseptique. — MM. H. Roger et M. Garnier ont constaté que, des deux réseaux capil- laires placés à l'origine de la veine porte, celui de l'in- testin représente un excellent milieu de culture pour le bacille charbonneux, tandis que celui de la rate sert à la destruction de cet agent pathogène. — M. C. Foà a déterminé la réaction des liquides de l'organisme au moyen de la force électro-motrice qui se développe entre une électrode à H immergée dans le liquide vis- à-vis d'une électrode normale à calomel dont on con- naît le potentiel, méthode qui permet de trouver la 536 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES concentration des ions H et OH. Il a ainsi reconnu que l'urine humaine est un liquide sensiblement neutre ; le suc pancréatique de chien correspond à une solution de KOH voisine de n/10.000. — MM. Bierry et E.-F. Terroine ont constaté que le suc pancréatique du chien, obtenu par injection de sécréline, contient de la maltase ; il suffit pour la mettre en évidence d’une très légère acidité du milieu. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 49 Mai 1905. M. P. Langevin : Sur les ions de l'atmosphère. L'auteur rappelle qu'il a démontré la présence cons- tante dans l'atmosphère d'ions de faible mobilité, ana- logues à ceux que produisent les actions chimiques (oxydation du phosphore, combustions, etc.). Le nombre de ces gros ions est, en général, au voisinage du sol, considérable par rapport à celui des ions ordi- naires, de mobilité environ mille fois plus grande, que produisent les radiations provenant du Soleil ou des matières radio-actives présentes dans le sol ou dans l'air. L'existence de ces gros ions permet d'inter- préter de manière simple la diminution progressive du courant qu'on peut faire passer dans une masse limitée d'air aussitôt après son introduction dans un récipient métallique fermé portant une élec- trode centrale isolée reliée à un électromètre. Cette diminution, qui dure environ une heure pour un réci- pient de 80 centimètres de diamètre quand une diffé- rence de potentiel de 700 volts est maintenue entre l'électrode et la paroi, a été observée en particulier par M. Mac Lennan et rapportée par lui à existence, dans l'air, d’une radio-activité induite qui disparaît spontané- ment après l'introduction de l'air en vase clos. Cette explication semble insuffisante, car elle implique une loi de variation du courant indépendante du champ électrique employé pour la mesure, tandis que l’expé- rience donne une influence considérable de ce champ. La diminution du courant se produit de manière toute différente, suivant qu'on maintient le champ de façon continue où qu'on l'établit seulement au moment des mesures ; elle est d'autant plus rapide que ce champ est plus intense, et peut même être remplacée par un accroissement si l’on supprime le champ après l'avoir maintenu pendant un temps suffisant. De plus, le pas- sage de l'air sur un tampon d'ouate avant son intro- duction dans le récipient supprime la diminution de manière complète, sans que l’ouate manifeste une radio-activité comparable à celle que nécessiterait l’ex- plication proposée. La présence, dans l'air introduit, de gros ions, que le champ ne peut recueillir qu’en un temps très long, d'autant plus long que le champ est plus faible, représente, au contraire, très bien tous les faits précédents, l’ordre de grandeur des mobilités néces- ; : : 1 Go saires étant toujours de 200 de millimètre par seconde dans un champ de 4 volt par centimètre. De plus, l'in- troduction artificielle dans le récipient de gros ions, produits par une flamme ou par la combustion du tabac, donne lieu à des phénomènes plus intenses, mais exactement semblables aux précédents, s'accor- dant qualitativement et quantitativement avec les pro- priétés des ions peu mobiles. L'origine de ces gros ions semble être la suivante : On sait que l'air renferme toujours des particules qui servent de germes pour la formation des gouttes dans une atmosphère légèrement sursaturée de vapeur d’eau, En se basant sur ces phé- nomènes de condensation, M. Aiïtken a pu mesurer le nombre de ces particules, peut-être résidus de gouttes évaporées, et l’a trouvé, au voisinage du sol, de l’ordre de 100.000 par centimètre cube. Les ions ordinaires, produits continuellement par les radiations diverses, sont attirés électrostatiquement par ces particules, dont le pouvoir inducteur spécifique est différent de celui du milieu, et les chargent. Cette transformation des particules neutres en gros ions est limitée par la recombinaison des gros ions ainsi formés avec les petits ions de signe contraire, et, si les petits ions des deux signes sont également nombreux, il s'établit un régime permanent dans lequel une fraction seulement des particules est transformée en gros ions des deux signes, fraction qui dépend de la grosseur des particules, mais est indépendante du nombre des petits ions, puisque les deux phénomènes inverses de diffusion et de recom- binaison se font avec des vitesses proportionnelles à ce nombre. L'expérience confirme entièrement ce résultat et toutes les conséquences de la théorie précédente l'introduction d’une substance fortement radio-active dans un récipient contenant de l'air chargé de parti- cules en suspension ne modifie nullement le nombre des gros ions. De plus, l'accroissement du courant constaté précédemment après une suppression momen- tanée du champ s'explique par la présence des parti- cules neutres qui ne se chargeaient pas lorsque le champ extrayait rapidement du gaz les petits ions à mesure de leur production, et qui se transforment à leur tour en gros ions après la suppression. L'accu- mulation des gros ions au voisinage des électrodes doit également intervenir et peut se démontrer expé- rimentalement par l'influence électrique qu'ils exercent sur les électrodes. La théorie précédente prévoit égale- ment que toutes les particules deviendront des gros ions si l'air ne renferme que des petits ions d’un seul signe, et l'expérience confirme cette prévision dans des circonstances variées. En particulier, l’action de la lumière ultra-violette sur une lame de zinc chargée négativement produit des gros ions négatifs dans l'air uon filtré, et leur nombre est de l’ordre de 100.000 par centimètre cube, conformément au résultat déduit par Aitken des expériences de condensation, tandis que le nombre des gros ions de chaque signe était d'environ 10.000 auparavant. L'expérience précédente fournit un moyen simple de confirmer avec précision l'absence complète dans l'air d'ions de mobilités intermédiaires entre celles des petits et des gros ions. Ces derniers, dont la grosseur minimum, déduite de leur mobilité ({0uy de diamètre environ), correspond à l'épaisseur de la tache noire dans les lames liquides minces, consti- tuent une catégorie bien distincte des ions ordinaires et doivent ètre étudiés indépendamment au point de vue des variations de leur nombre dans l'air. L'action directe sur l'air de la lumière ultra-violette produite par un arc à charbons donne des petits ions négatifs et des gros ions positifs, ainsi que M. Lenard l'avait observé. Cet effet, attribué par lui à une action directe de la lumière sur le gaz, disparaït de manière complète, au moins en ce qui concerne les gros ions positifs, quand l'air est filtré sur un lampon d’ouate. 11 semble donc provenir, contrairement à l'opinion de M. Lenard, d'une action photo-électrique de la lumière sur les barticules ou poussières contenues dans l'air, qui pro- P I , voque l'émission par celles-ci de corpuscules négatifs et les transforme en gros ions positifs. L'action de la umière ultra-violette de l'arc sur L'air privé de pous-" Î ltra-violette de la 1 sières ne produit pas d'ions de faible mobilité. 1] serait intéressant de savoir comment l'effet photo-électrique sur les particules en suspension dans l'air dépend de. leur nature. — MM. A. Broca et Turchini ont étudié la résistance de divers fils métalliques pour les cou- rants dé haute fréquence, et ils ont trouvé certains écarts entre l'expérience et la théorie de Thomson qui semblent dus à une cause systématique. Ils ont employé un électrodynamomètre composé d’une lame d'alumi= nium de 30 microns d'épaisseur, fixée à ses deux extré- mités, verticalement d’un côté, horizontalement de l'autre. Cette lame, de 80 centimètres de longueur, flé= chit très aisément en son centre. Deux lames fixes agissent sur ce point quand un mème courant les par= court ainsi que Ja lame mobile. Les déviations de la lame mobile sont lues au moyen d'un microscope. On mesure ainsi l'intensité efficace du courant qui chauffe le fil étudié. On mesure cet échauffement au moyen 4 nc EE Ur Pure Fm gré be re ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 537 d'un calorimètre convenable. Dans ces conditions, en employant comme interrupteur une turbine à mercure, qui seule donne une régularité suflisante d'interruption, on obtient des résultats susceptibles d'être mesurés. La précision avec laquelle les courants sont réglés est d'environ _ Les auteurs ont mesuré les capacités pour les fréquences même d'emploi. Ils ont, pour cela, mesuré exactement les capacités pour des courants alternatifs de #2 par seconde, et ils ont étudié la varia- tion du pouvoir inducteur spécifique de leur verre en fonction de la fréquence. Ils ont ensuite employé d'autres bouteilles de Leyde, qu'ils ont mesurées par comparaison avec les premières, pour les fréquences employées, par une méthode de résonance. Le calcul de la self a été fait en supposant le circuit composé d’un même fil, et de la longueur réelle totale qu'il pos- sède, puis en attribuant au fil de ce diamètre, dans la self totale, une fraction de la self ainsi calculée, égale à la fraction de la longueur totale qu'il occupe. La somme des nombres ainsi obtenus donne la self du circuit total. Les résultats obtenus sont les suivants : 1° Cuivre: Les points se rangent sur une même courbe, dont les écarts avec la loi de Thomson pour les fré- quences moindres que 1.000.000 peuvent peut-être s'expliquer au moyen de la présence d'une faible frac- tion de fer dans le cuivre employé. Au delà, les nombres mesurés présentent avec la loi de Thomson des écarts considérables, dont la cause est à étudier; 20 Fer : Le fer donne des résultats tout à fait aberrants. Il faudrait mettre dans la formule une valeur de y voi- sine de 100 pour rendre compte des faits. Celle-ci, d’ailleurs, est une fonction très rapide de l'intensité efficace, pour une mème fréquence. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 12 Mai 1905. M. A. Trillat, en collaboration avec M. Sauton, présente une Note sur un procédé de recherche de l’ammoniaque dans le lait et sur l'interprétation que l'on peut en tirer dans le domaine de l'hygiène. Ce pro- cédé est basé sur l’action du trichlorure d’iode, qui a la propriété de déféquer le lait et de donner en même temps, dans le filtrat saturé par l'eau de chaux, la co- loration noire de l’iodure d'azote qui caractérise l'am- moniaque. Les auteurs ont étudié les causes de la for- mation de cet ammoniac dans le lait en pratiquant des ensemencements avec des germes divers; ils ont reconnu que le lait normal n’en contient pas et que la présence de lammoniac dans un lait doit le faire considérer comme suspect. MM. Trillat et Sauton ont étudié aussi une nouvelle méthode de dosage de la matière albuminoïde du lait, basée sur l’action insolu- bilisante de l’aldéhyde formique en présence d'un acide à chaud. En opérant dans des conditions déter- mines, la matière albuminoïde, au lieu d'être coagulée, est obtenue à l’état de poudre qui est ensuite faci- lement lavée et dégraissée. — M. À. Guyot expose les résultats de recherches effectuées en collaboration avec M. J. Catel sur les dérivés du benzodihydrofurfurane. En traitant la monophénylphtalide par le bromure de phénylmagnésium, ils ont obtenu le diphényloxy-ax/- # benzo-6f'-dihydro-xx-furfurane : / CH.C°H° CH >0 + CH. Me Br co CH.C'H + CH 0 see 74N BreMgO CSH5 HOM"C'H Ce composé ne présente pas de point de fusion délini ; il perd, en effet, avec la plus grandé facilité 1 molécule d’eau par dessiccation à l’étuve ou, mieux, par addition d’une goutte d'HCI à ses solutions alcoo- liques, ou même par simple ébullition de ses solutions acéliques, et se transforme quantitativement en un produit cristallisé en feuillets dorés, d'un jaune intense, dont les solutions benzéniques présentent une fluorescence verte de toute beauté, et auquel les auteurs assignent la formule de constitution ortho-qui- nonique suivante. : C:C'H° No NX C.C5H5 PONTS Le fait que ce composé se transforme facilement en diphényl-4x!-benzo-68"-dihydro-xx'-furfurane par ré- duction et en ortho-dibenzoylbenzène par oxydation justifie cette formule de constitution. Ce nouveau mode de formation de l’o-dibenzoylbenzène présente une assez grande importance, car il permet de préparer facilement des quantités considérables d’un composé jusqu'alors très rare et dont l'étude est encore à faire ; MM. Guyot et Catel désirent se la réserver pour quelque temps. Traité par l’'amalgame de sodium, l'o-dibenzoyl- benzène fixe quatre atomes d'hydrogène et se trans- forme en o-dibenzhydrylbenzène : C‘H*(CH.OH.C‘H°}?, qu'on obtient encore par réduction du diphényloxy- axl-benzo-ff'-dihydro-xa-furfurane, par fixation de deux atomes d'hydrogène et rupture du noyau furfu- ranique. Enfin, par addition de quelques gouttes d’HCI aux solutions acétiques de l’o-dibenzhydryl-benzène, on provoque par déshydratation la formation d’un noyau furfuranique et on reproduit le diphényl-xx!- an! benzo-66'-dihydro-x/«-furfurane : /CH.CSH CSH4Z 0 CH. CH déjà obtenu par réduction du produit de déshydratation jaune décrit plus haut. — M. P. Lebeau fait une com- munication concernant l'emploi des métaux ammo- niums en Chimie organique. L'action de ces composés sur les dérivés monosubstitués des carbures saturés conduit à la préparation des carbures correspondants. En même temps, on obtient une amine primaire. Le pouvoir hydrogénant du métal ammonium est dû à sa transformation en amidure, et l'amidure, réagissant sur le dérivé halogéné, fournit lamine. Ce résultat a pu être vérifié dans l’action directe de l'amidure sur le dérivé halogéné. Le chlorure de méthyle fournira, par exemple, du méthane et de la monométhylamine : 2 CH°CI + AzHSNa? — CH + CH*AZH? + 2 NaCl + AzH®. Le pouvoir hydrogénant des métaux ammoniums permet la transformation des dérivés perchlorés des carbures : le tétrachlorure de carbone donne du méthane pur. SECTION DE NANCY Séance du 17 Mar 1905. M. A. Guntz expose la suite de ses recherches sur le baryum. En dissociant dans le vide, vers 1.200°, de l'hydrure de Ba exempt de Hg, on obtient par conden- sation sur un tube en acier poli, refroidi par un cou- rant d'eau, un métal cristallisé qui, à l'analyse, indique 99,4 °/, de Ba. — MM. A. Guntz et H. Bassett jun. ont mesuré les chaleurs de formation de Cal et Ca’Na?(Ca — H°—- Ca? +46 cal.,2 ; Ca’ Na —CaNa°-111 cal. 2), ainsi que la chaleur d'oxydation du Ca. Ils ont trouvé 151 cal. 9 pour Ca + O0 — CaO. Ce nombre est donc de 20 cal. plus grand que celui de Thomsen. — M. G. Rœæ- derer communique le résultat de ses recherches sur les combinaisons du Sr avec l'ammoniac, recherches exécutées à partir de Sr pur et cristallisé, obtenu par dissociation de l'hydrure. Par l’action de AzH° pur et 538 sec sur le Sr refroidi à — 609, il a obtenu une combi- naison à laquelle ses analyses permettent d'attribuer la formule Sr(AzH®°. M. Rœderer continue l'étude de ce produit, ainsi que celle des réactions que fournit la solu- tion de strontium-ammonium dans l’'ammoniac liquide. — M. P. Th. Muller a mis à profit des déterminations récentes de Deussen (Zeits. f. anorg. Ch., t. XLIV, 1905, p. 312) sur la conductibilité de l'acide fluor- hydrique à 0° et à 25°, pour calculer sa conductibilité limite et sa constante d'affinité à ces deux températures. On s’est servi des données de Noyes et Sammet pour HCI, et de Kohlrausch pour les coeflicients de tempé- rature des mobilités du Cl et du F. Voici les mobilités trouvées. 0° 25° POUTACIEERE 10,00 25,33 LÉRNRRE 238,80 365,40 DT Lame 26,66 54,41 On en déduit la conductibilité limite de HF : 265,50 à 0° et 419,80 à 25°. A l’aide de ces nombres on calcule les constantes d'affinité Ko — 140,44.40— 4 et "K2 —6,57.10— 4. Ainsi, l'acidité de HF est plus grande à 0 qu'à 259, ainsi que le faisait prévoir sa chaleur de neu- tralisation, qui est supérieure à 13,7. De ces constantes d’affinité, on tire facilement la chaleur d'ionisation de HF, qui est positive et égale à 2,9 cal. pour les solu- tions diluées, d'où une chaleur de neutralisation de : 46,6 cal. La Thermochimie nous donne, pour des solu- tions de concentration ordinaire, des nombres très voisins, compris entre 16,1 et 46,4 cal. — MM. EP. Th. Muller et C. Fuchs, dans le but de connaître les cha- leurs spécifiques aux environs de la température ordi- daire, ont employé le procédé suivant : on fournit au liquide toujours la même quantité de chaleur au moyen d’une résistance traversée par un courant constant pen- dant un même temps. Cette résistance se compose d’un serpentin en verre rempli de mercure et plongeant dans la solution. Le nombre de calories K absorbé par le système était déterminé au moyen d'eau distillée. En écrivant : (A + px) ({— 1") = K, où A représente le poids en eau de l'appareil, p le poids de substance, {— 1 l'élévation de température (qui est en moyenne de 2°,6), on tire x qui est la chaleur spécifique cherchée.l Les expériences faites en double concordent généralement à 0,002 près. Ce procédé a permis de déterminer la chaleur moléculaire du groupement — CH?— à l'état dissous; sa valeur est de 22 cal. pour les acides et de 17 cal. pour les alcools. De cette étude et de celles d’autres auteurs, on a pu tirer entre autres les conclu- sions suivantes : La chaleur spécifique moléculaire de bons électrolytes varie dans de grandes proportions avec la dilution, tandis que celle des mauvais et des non électrolytes est à peu près constante. — MM. A. Guyot et-P. Pignet communiquent les résultats de leurs recherches sur quelques dérivés de l'acide diméthyl- amido-benzylbenzoïque. Par condensation de la dimé- thyl-aniline avec le chlorure de cet acide, en présence de AICF, ils obtiennent une cétone (F.133), qui leur à donné par réduction au moyen de l’amalgame de Naun hydrol (F.98-99); celui-ci, par une réduction plus profonde, par Zn et HC], se transforme en le dérivé méthanique, correspondant (F. 890: CHE CN > —{ Nacre} Az(CH?}? NU /CH° VIN ANT ‘ NN co << arc} “ NGHOE—C ca arc — ? AZ(GH°)* NA Non DazCH : Au contact de H?SO* concentré, l'hydrol perd une molé- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1. cule d’eau, et donne le dihydrure de phénylanthracène tétraméthyl-diamidé de constitution (I): ANA ANT | 20e NAN PA NA TOR Q :)AZ(CH F—1670 I ANVAANANTT ue INA È N { 3\2 Fo )Az| CH) IT Par oxydation de ce composé au moyen du chloranile, on passe aisément au dérivé anthracénique vrai (Il); mais il n'a pas été possible, par oxydation plus pro- fonde, d'obtenir les anthranol et oxanthranol corres- pondants. Les auteurs'ont pu toutefois préparer ce dernier corps, avec d'excellents rendements, par oxydation directe de la cétone primitive au moyen du chloranile. La réaction s'effectue vraisemblablement en plusieurs phases. Quelle que soit d’ailleurs l'interpré- tation admise, il résulte de la formation de ce produit que, dans l’oxanthranol, les deux auxochromes amidés sont respectivement en para vis-à-vis des deux carbones 7. La formule de constitution suivante est alors la seule qui puisse convenir (Î) : HO CE JAGR) Be HO, 24 SAZ(CHS) | B, x APR (AE E de AN Gn A NN co /N 7 AACHP) 1 Il C’est donc un isomère du tétraméthyl-diamido-phényl- oxanthranol, décrit par MM. Ilaller et Guyot‘ (Il). Ces deux produits présentent sensiblement le même point de fusion (207-2082) et les mêmes réactions colorées; mais ils se distinguent nettement par leurs solubilités, qui sont très différentes. — MM. E.-E. Blaise et *H. Gault ont poursuivi leurs recherches sur la con- densation de l’éther oxalacétique avec les aldéhydes. Les aldéhydes acycliques se comportent en général comme l'aldébhyde formique précédemment étudié; une molécule d'aldéhyde se condense en présence de pipéridine avec deux molécules d’éther oxalacétique par élimination d'une molécule d’eau. On obtient ainsi successivement, suivant que l’on part du méthanal, de l'éthanal, du propanal ou de l'œnanthol, des méthylène, éthylidène, propylidène, œnanthylidène-dioxalacétates d'éthyle : C2H5C00 — CO — CH — COOUC?H$ | CH—R CH°COO — CO — CH — COOCHS Tous ces éthers cristallisent avec une molécule d’eau. La saponification par les acides étendus donne avec le méthylène-dioxalacétate d’éthyle un acide bibasique dicétonique, l'acide dioxopimélique : COON.CO.CH*. CH2.CH°.C0.COO0H, F.127 avec décomposition, et avec l'éthylidène-dioxalacétate l'acide méthyldioxopimélique COOH.CO.CHE.CH(CH*).CH2.C0.COOH,F.160°avec décom= position. Ces acides se laïssent facilement cycliser par départ d'une molécule d'eau et donnent naissance aux deux acides pyranedicarbonique et méthylpyranedicars bonique. Les aldéhydes cycliques se comportent d’une M 1 Haccer et Guxor : Bull. Soc. ch., t. XXV, p. 315, 1901, : $ ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 539 facon tout à fait différente, et il semble difficile de généraliser leur action sur l'éther oxalacétique. La benzaldéhyde se condense avec l’éther oxalacétique en présence de diéthylamine, molécule à molécule, par départ d'une molécule d'alcool et formation de l’éther cétophénylparaconique étudié par Wislicenus. L'ani- saldéhyde, la métanitrobenzaldéhyde se condensent de facon identique. L'aldéhyde salicylique, en présence de HCI, élimine, au contraire, une molécule d'eau entre une molécule d’éther oxalacétique et une molécule d'aldéhyde, en donnant le salicylidènemonoxalacétate d’éthyle, F.88-89°, — MM. E.-E. Blaise et A. Courtot, en poursuivant leurs recherches sur les acides non saturés $y, ont pu préparer de nouveaux acides-aldé- . hydes y. En partant de l'acide diméthylisopropénylacé- - tique, ils ont obtenu par fixation de Br l'acide «xÿ-tri- méthyl-B6y-dibromobutyrique. Chauffé, cet acide perd HBr et donne d'abord la bromolactone correspondante, puis la lactone non saturée &y. Celle-ci, dissoute dans . KOH, donne le sel de l'acide-aldéhyde correspondant. | Ont été ainsi préparés les acides-aldéhydes y, aaf-tri- . méthylés et ax-diméthyl-B-phénylés. Les auteurs pro- posent de leur donner les formules de constitution _ suivantes : n 8 Ë 3 6] 65 u 3 HO CH QU HO /CH /CE N NS / NX MÈS H” | H | cu H/ | FOUNNE Li (0) C—=0 L'existence de la fonction alcool a été mise en évi- dence par l'obtention facile de phényluréthanes, éthers- oxydes (non acétals) et d’éthers-sels (acétates). L'exis- tence de la chaine lactonique a été démontrée par des mesures physico-chimiques à l’aide de la méthode de Traube. — MM. E.-E. Blaise el M. Maire ont préparé les cétones non saturées 45 par déshydratation des célones-alcools 6. Ces dernières sont obtenues à partir des éthers des acides-alcools $, préparés par conden- sation des éthers bromés des acides gras avec le - trioxyméthylène, les aldéhydes ou les cétones en pré- | sence du Zn. On saponifie ces éthers, on protège la fonction alcool par traitement du chlorure d’acétyle, ce qui, dans le cas des fonctions alcool primaire ou secondaire, donne le dérivé acétoxylé. On fait le chlo- rure d'acide, que l’on traite par des dérivés organomé- talliques mixtes du Zn. On a ainsi la cétone acétoxylée qui, par simple traitement à la KOH aqueuse, fournit la cétone non saturée af par perte d'une molécule d'acide acétique. Si la fonction alcool de l’acide-alcool est tertiaire, ce dernier est déshydraté par le chlorure d'acétyle:; mais, dans ce cas, le traitement du chlorure de l'acide non saturé par les dérivés organozinciques donne directement la cétone non saturée 48 avec de bons rendements. On obtient les cétones vinylées en chauffant avec de la diéthylaniline les cétones 5-chlo- rées obtenues par action du chlorure de l'acide B-chlo- ropropionique sur les dérivés organozinciques. Les auteurs ont encore obtenu des cétones non saturées æ5 à partir des cétones à fonction alcool tertiaire, pré- parées par action des organomagnésiens sur l'éther Semiorthoxalique. Ce procédé, qui donne de bons résultats, a l'inconvénient d'exiger, pour une réaction pote cinq molécules d’organomagnésien pour une élher. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 23 Février 1905 (suite). MM. F. Keeble et F.-W. Gamble : /{echerches sur Ja physiologie de la coloration des Crustacés supé- meurs. Les auteurs arrivent aux conclusions sui- vantes:: 1° Les chromatophores d’Hippolyte et de Cran- jou sont des structures multi-cellulaires. Leurs bran- hes se différencient en un ectoplasme plus ferme et un endoplasme mobile plus fluide dans lequel le pig- ment se présente; 2 En plus des pigments, de la graisse, sous forme de globules incolores, se présente dans les chromatophores d'Hippolyte. Cette graisse réside dans des cellules spéciales des chromatophores et montre une mobilité semblable à celle des pigments ; 3° Si l’on nourrit et garde dans l'obscurité, ou si l’on affame et conserve à la lumière un chromatophore d'Hippolyte, il perd peu de sa graisse chromatopho- rique. Cependant, une déplétion de la graisse se pro- duit chez les animaux affamés et gardés dans l’obscu- rité. Ces mêmes animaux, lorsqu'on les expose au soleil pendant cinq à six heures, présentent de la graisse dans leurs chromatophores. Ces résultats indi- quent que la graisse chromatophorique incolore est une substance nutritive de réserve et amènent à la conclu- sion que, pour l'accumulation de cette graisse de réserve, la lumière joue un rôle important. A l'époque où les Hippolyte varians s'établissent sur les algues du bord de la mer, l'animal est incolore ou à rayures brunes faibles. A ce degré, il est extrêmement sensible aux conditions de la lumière qui l'environne, s'appro- priant la couleur de son entourage dans les vingt- quatre heures. Si l'on change l'entourage, un change- ment sympathique de couleur a lieu en trois jours. Des Hippolytes à moitié développés ou entièrement développés sont moins susceptibles. Pour ceux-là, un changement de couleur sympathique prend une semaine ou plus. — M. G. Murray : Sur une nouvelie Rhabdosphère. L'auteur attire l'attention sur l'intérêt que possèdent les Rhabdosphères et les Coccosphères, non seulement pour les naturalistes, mais pour les géologues et ceux qui étudient les dépôts marins pro- fonds. L'auteur nomme la nouvelle espèce 2. Black- maniana, d'après M. V. H. Blackman, qui a fait aussi une étude approfondie de ces organismes (Phrl. Trans., B, vol. exc, 1898). L'auteur l'a recueillie pendant le voyage de retour du Cap de la Discovery par 28°25' de latitude S. et 23956! de longitude W.; elle diffère des autres formes connues, qui sont au nombre de deux seulement, en possédant une forme eflilée, aiguë, épineuse, contrastant avec la forme en trompette et en massue des deux espèces connues. Aucune trace de cette nouvelle forme n'a encore été découverte dans les dépôts marins profonds ou les formations géolo- giques. L'auteur pense qu'il en est ainsi en raison de la petitesse et de l'extrème ténuité des spicules. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 19 Avril 4905. M. W. C. Ball, en dissolvant du nitrate de bismuth dans une solution concentrée de nitrate d’ammonium, ajoutant le liquide à une solution saturée de nitrite de sodium refroidie à 0° et acidifiant avec des vapeurs nitreuses, a obtenu un nitrite complexe Bi (Az0*}, 2AzH*Az0%.NaAzO®, cristallisant en octaèdres jaunes. En faisant passer des vapeurs nitreuses dans del'hydrate de bismuth en suspension dans une solution concentrée de nitrite de potassium, on obtient un composé jaune- orange Bi(AzO?}#.3KA7z0°.H°0. — MM. W. H. Perkin jur. et S. S. Pickles, en partant de l'acide A'-tétrahydro-p- toluique, ont fait la synthèse des A*-p-menthénol ($S', A3:5-};-menthadiène, p-menthanol (8), A$-p-menthène et p-menthane, et des composés homologues contenant le groupe méthyle en moins. — Les mêmes auteurs ont préparé les composés aliphatiques de même consti- tution que le terpinéol et le dipentène, et ont reconnu, par la comparaison des propriétés, que la structure cyclique exerce une grande influence sur celles-ci. — M. G. Young a préparé le C-phényl-s-triazol, F. 119, 5- 120° au moyen du C-phénylhydroxy-s-triazol. — MM. P. F. Frankland et E. Done ont résolu dans ses constituants actifs l'acide glycérique (obtenu par l’action de la chaux sur l'acide d-glucuronique) au moyen de la fermentation ou par les sels de brucine. Les sels de baryum des acides obtenus par les deux méthodes ont la même rotation : [æln — — 10°9.— M. J.-A.-N. Friend 540 à constaté que de petites quantités de permanganate de potasse peuvent être déterminées iodométriquement en présence de persulfate de potasse pourvu que la solution soit suffisamment diluée avant l'addition d'iodure et que l'acidité soit réduite à un minimum. ACADEMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 23 Février 1905. MM. E. Fischer et A. Abderhalden présentent un Mémoire sur les phénomènes manifestés par plusieurs polypeptides à l'égard du ferment pancréatique. D’après les observations de MM. Fischer et P. Bergell, les dipep- tides artificiels présentent des différences très nettes à ce point de vue quant au degré auquel ils se trouvent décomposés. Or, le suc pancréatique pur, retiré des chiens par le Professeur Pawlow à Saint-Péters- bourg, vient de permettre aux auteurs d'étendre leurs recherches aux polypeptides plus compliqués. L'examen de 12 polypeptides synthétiques, dont 7 se scindent sous l'influence du suc pancréatique, fait voir que l'effet du ferment dépend autant de la nature des amino-acides que de la structure et de la configuration de la molécule. Séance du 2 Mars 1905. M. Muller-Breslau étudie la théorie de l'équilibre des masses sablonneuses, indiquantun procédé approxi- matif simple pour déterminer la pression sur les sur- faces de glissement courbes, procédé qu'il utilise pour le calcul de la pression de la terre sur les murs de sup- port. Cette communication est suivie du rapport des essais de l’auteur pour déterminer photographiquement la forme de la surface de glissement. — M. Sachau présente un Mémoire sur les traités arabes d'Ophtal- mologie. Les imprimés et les manuscrits dont il dis- pose permettent à l’auteur de rechercher et d’ex- poser la science et l’art ophtalmologiques des Arabes d'abord dans leurs rapports avec les Grecs, puis dans leur développement indépendant, national, qui fait l’objet de 13 des 30 traités d'Ophtalmologie arabe dont nous ayons Connaissance. Séance du 9 Mars 1905. M. Vogel rend compte des recherches sur l’astre double spectroscopique Algol et Misar faites l’année dernière à l'Observatoire astrophysique de Potsdam, et sur des investigations plus récentes faites dans ce même laboratoire sur les spectres des terres rares. Les résultats donnés par les observations d'Algol et de Misar concordent parfaitement avec ceux qu'on à obtenus en 1889 et 1901. — M. J. H.Van't Hoff continue ses recherches sur les dépôts de sels océaniques, sur lesquels il présente son 41° mémoire. En collaboration avec MM. Voerman et Blasdale, il a trouvé que la température de formation du pentasulfate potasso-cal- cique à partir de la syngénite et du gypse est égale à 320. Cette température est, dans le cas d'une forma- tion naturelle, réduite à tel point par les sels accom- pagnants que ce composé, quoique n'ayant pas encore été trouvé à l'état de minéral, existe probablement dans tous les endroits où la syngénite et le gypse se trouvent en présence. — M. Vogel présente une notice de M. Hartmann, Professeur à Potsdam, sur les repré- sentations monochromatiques de la nébuleuse d'Orion. Sur la base d'observations spectroscopiques et en employant des filtres lumineux appropriés, l'auteur réussit à produire des vues photographiques de cette nébuleuse , faisant voir que les substances qu'elle ren- ferme ne se trouvent pas uniformément réparties dans dans toutes ses parties. — M. Kohlrausch présente un mémoire de MM. Holborn et F. Henning sur l'émis- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sion lumineuse et le point de fusion de plusieurs métaux. Les données des pyromètres optiques sont rapportées, en général, au rayonnement du corps «noir » dont on connaît les rapports avec la température et la longueur d'onde. Cette échelle de températures est, du reste, susceptible d’une reproduction sûre par un corps noir chauffé électriquement. Les températures observées au moyen de pyromètres diffèrent, par consé- quent, pour la plupart des corps, des températures vraies (dans l'échelle centigrade) dans une mesure qui dépend du pouvoir de rayonnement des corps. Aussi les progrès de la pyrométrie optique dépendent des déterminations de l'émission de plusieurs corps dans ses relations avec le rayonnement noir et cela pour de larges intervalles de températures. Les auteurs choi- sissent à cet effet le platine, l'or et l'argent, métaux précieux dont le rayonnement diffère beaucoup du rayonnement noir et qui ne s'altèrent pas par chauffage à l'air. Les expériences de MM. Holborn et Henning font voir que, pour une longueur d'onde donnée, le rapport du rayonnement partiel du métal poli à celui du corps noir — tous les deux étant rapportés à une même tem- pérature (à savoir le pouvoir d'absorption du métal) — est indépendant dans la région visible du speëtre: le pla- tine émettant environ 1/3, l'or 1/8 et l'argent 1/14 du rayonnement «noir» dans la lumière rouge. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 17 Mars 1905. MM. H. Rubens et E. Ladenburg ont étudié le spec- tre d'absorption de l'acide carbonique pour les rayons à grandes longueurs d'onde. Le fait que cet acide est un composant de notre atmosphère a donné lieu de bonne heure à des recherches sur l'absorption dans ce gaz des rayons caloriliques. Or, ce problème a augmenté d'intérêt depuis que M. Arrhénius a fondé son ingénieuse théorie de l’origine des périodes glaciaires sur la teneur variable en acide carbonique de l'air atmosphérique: Cette théorie se base sur l'hypothèse qu'une diminution d'environ 20°/,de cette teneur entrainerait une décrois-= sance considérable de l'absorption du rayonnement tellurique, ayant pour conséquence un refroidissement de quelques degrés centigrades de la surface de la Terre: Les expériences jusqu'ici faites ne permettaient pas de vérilier l'hypothèse de Arrhénius. Aussi les auteurs ont-ils tâché de fournir un complément aux données expérimentales publiées jusqu'ici. Les courbes données dans le Mémoire original font voir que les bandes d'ab= sorption s'élargissent de beaucoup pour des couches d'épaisseurs croissantes. On voit également que les bandes se déplacent, dans ce cas, vers la région des, longueurs d'ondes croissantes. Les auteurs constatent encore une décroissance très faible de l'absorption totale, pour des pressions partielles diminuantes’ décroissance qui, cependant, est bien plus petite que celle qu'a observée M. Angstrôm pour les bandes d’'abs sorption à petites longueurs d'onde. Le centre de gras vité des bandes semble encore, lorsque la pression dimi nue, se déplacer un peu du côté des ondes croissantess Comme la diminution du pouvoir d'absorption trouvées par les auteurs n'est que de 1/30 pour la variation de 20 °/, dans la teneur d'acide carbonique, le refroi dissement de la surface de la Terre ainsi produit n@ serait pas suffisant à expliquer l'origine des périodes glaciaires. ALFRED GRADENWITZ. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, {, rue Cassette. 30 JUIN 1905 ES DirecrEUR : $ 1. — Mathématiques Les principes des Mathématiques et le problème des ensembles. — Nous avons reçu de M. J. Richard, professeur au Lycée de Dijon, la lettre suivante : « Dans son numéro du 30 mars 190%, la Æevue si- #nale certaines contradictions qu'on rencontre dans la théorie générale des ensembles. « Il n'est pas nécessaire d'aller jusqu'à la théorie des ombres ordinaux pour trouver de telles contradic- tions. En voici une qui s'offre dès l'étude du continu, et à laquelle plusieurs autres se ramèneraient proba- lement : … « Je vais définir un certain ensemble de nombres, que je nommerai l’ensemble E, à l’aide des considéra- tions suivantes : - « Ecrivons tous les arrangements deux à deux des vingt-six lettres de l'alphabet francais, en rangeant ces arrangements par ordre alphabétique, puis, à la suite, tous les arrangements trois à trois, rangés par ordre alphabétique, puis, à la suite, ceux quatre à quatre, etc. Ces arrangements peuvent contenir la même lettre répétée plusieurs fois, ce sont des arrangements avec répétition. j & Quel que soit l’entier p, tout arrangement des vingt-six lettres p à p se trouvera dans ce tableau, et comme tout ce qui peut s'écrire avec un nombre fini de mots est un arrangement de lettres, tout ce qui peut Sécrire se trouvera dans le tableau dont nous venons d'indiquer le mode de formation. « La définition d’un nombre se faisant avec des mots, et ceux-ci avec des lettres, certains de ces arran- “cements seront des définitions de nombres. Biffons de nos arrangements tous ceux qui ne sont pas des défini- tions de nombres. : … « Soit u, le premier nombre défini par un arrange- ment, ”, le second, v, le troisième, etc. « On à ainsi, rangés dans un ordre déterminé, tous es nombres définis à l'aide d'un nombre fini de mots. « Donc : Tous les nombres qu'on peut définir à l’aide d'un nombre fini de mots forment un ensemble dénom- brable. « Voici maintenant où est la contradiction. On peut ë REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Revue générale Sciences pures et appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aäresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproductionget la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE former un nombre n'appartenant pas à cet ensemble. « Soit p, la nième décimale du ze nombre de l’ensemble E; formons un nombre ayant zéro pour partie entière, et pour sim décimale p+1, si p n'est égal ni à 8 ni à 9, et l'unité dans le cas contraire ». Ce nombre N n'appartient pas à l'ensemble E. S'il était le mème nom- bre de l’ensemble E, son nième chiffre serait le mème chif- fre décimal de ce nombre, ce qui n’est pas. « Je nomme G le groupe de lettres entre guillemets. « Le nombre N est défini par les mots du groupe G, c'est-à-dire par un nombre fini de mots; il devrait done appartenir à l'ensemble E. Or, on à vu qu'il n'y appartient pas. « Telle est la contradiction. « Montrons que cette contradiction n'est qu'appa- rente. Revenons à nos arrangements. Le groupe de lettres G est un de ces arrangements; il existera dans mon tableau. Mais, à la place qu'il occupe, il n’a pas de sens. Il y est question de l’ensemble E, et celui-ci n'est pas encore défini. Je devrai donc le biffer. Le groupe G n'a de sens que si l’ensemble E est totalement défini, et celui-ci ne l’est que par un nombre infini de mots. {n'y a donc pas contradiction. « On peut encore remarquer ceci : L'ensemble de l'ensemble E et du nombre N forme un autre ensemble. Le second ensemble est dénombrable. Le nombre N peut être intercalé à un certain rang X dans l’ensemble E, en reculant d'un rang tous les autres nombres de rang supérieur à X. Continuons à appeler E l'ensemble ainsi modifié. Alors le groupe de mots G définira un nombre N'diflérent de N, puisque le nombre N occupe maintenant le rang k, et que le km chiffre de N' n'est pas égal au kïne chiffre du km nombre de l'ensemble E. » J. Richard, Professeur au Lycée de Dijon. Les contradictions que nous signalions précédem- ment: dans la théorie des ensembles, et dont M. J. Ri- chard étudie et éclaircit d'une manière définitive un autre exemple, ont, de nouveau, attiré l'attention de M. Hilbert. C'est un sujet sur lequel il revient dans sa Communication présentée en août 190% au Congrès de 1 Revue du 30 mars d:rnier. LA % © ra (Rs) Heidelberg, communication qui vient d’être traduite en français par M. Pierre Boutroux!. M. Hilbert fait spécialement allusion au paradoxe qui concerne l’« ensemble de tous les ensembles », et qui, en effet, est, au premier abord, assez troublant, du moins sil est bien spécifié qu'un ensemble ne doit pas se renfermer lui-même comme élément. Faut-il admettre que l'ensemble E, ayant pour éléments tous les en- sembles possibles, existe, — puisqu'il suffit, pour con- stituer un ensemble, d'avoir défini ce qui en fait partie et ce qui n’en fait pas partie? Faut-il admettre qu'il n'existe pas, puisque, dans le cas contraire, Eserait, par définition, un ensemble non contenu dans E ? Nous voilà revenus à Zénon d'Elée. Pour échapper à ce paradoxe, M. Hilbert, dans la nouvelle théorie qu'il propose, juge nécessaire de chan- ger complètement la définition du mot « ensemble » : il regarde la notion d'un ensemble comme antérieure à celle de ses éléments, au lieu qu'elle en soit le résultat. C'est, au moins en principe, une manière d'opérer assurément légitime, comme toutes les conventions. Ce qui est moins évident, c'est l'utilité d’un pareil chan- gement. Il ne nous parait pas nécessaire, en tout cas, pour éclaircir la contradiction signalée plus haut celle-ci, à notre avis, relève des remarques de M. Ri- chard, lesquelles ont une portée tout à fait générale et ne doivent pas être perdues de vue dans ces sortes de discussions. Pour former un ensemble avec certains éléments, encore faut-il que ceux-ci existent au préa- lable. I ne nous paraît pas douteux qu'une solution tout analogue ne s'applique à l'antinomie de M. Burali Forti* sur l'ensemble W de tous les nombres ordi- naux. Celui-ci, comme l'ensemble E de tout à l'heure, devrait, en conséquence, être considéré comme non existant *. Au reste, il est évident 4 priori qu'un changement dans les définitions n'est pas nécessaire pour réfuter une antinomie, et même qu'il n'y suffit pas à pro- prement parler. Dans le cas présent, par exemple, la contradiction n’est pas évitée par ce seul fait qu'on a proposé d'étudier des « ensembles hilbertiens » (c'est-à- dire des ensembles définis à la facon de M. Hilbert) : il faudrait encore interdire d'étudier des ensembles défi- nis par la voie classique. Du moment que cette der- nière est légitime (ce qui est assurément le cas, puisque c'est une définition nominale), il est clair que, correcte- ment employée, elle ne doit conduire à aucune contra- diction. La solution qui consiste à considérer les nombres ordinaux comme existants, mais l’ensemble complet de ces nombres comme non existant, avait été indiquée par M. Hilbert en 1900 au Congrès de Paris, mais sous une forme différente, qui se rattache d'ailleurs au sujet de sa Communication de 1904. Dans cette dernière, en effet, bien que la question des ensembles tienne, comme nous venons de le voir, une certaine place, l’objet principal est plus général. Il se rattache à un ordre d'idées sur lequel l’auteur a insisté à maintes reprises dans ces dernières années. Pour fonder une théorie mathématique ou logique, M. Hilbert admet qu'il est nécessaire et suffisant de trouver une liste d'axiomes desquels on puisse prouver : 1 L'Enseignement mathématique, 15 mars 1905. ® Circolo Mat. di Palermo, 1897. # C'est par cette voie que le paradoxe de Burali Forti nous parait devoir être éclairci, et non par celle que propose M. Félix Bernstein (Math. Annalen, t. LX, 2% cahier), laquelle consiste à admettre qu'on ne peut pas ajouter 4 au nombre ordinal W. Cette hypothèse n'est pas défendable: à notre avis, l'opération W + 1 est définie par G. Cantor d'une manière tout à fait générale, et cette définition ne souffre aucune difficulté, quel que soit W. — Seulement, l'ensemble W, qui, par hypothèse, était jusque-là le plus général que l'on püt former avecles objets de pensée d'ores el déjà existants, cesse de posséder cette propriété après l'introduction du W + {ième objet. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1° Qu'ils sont exempts de contradiction; 2 qu'ils sont! indépendants entre eux et suffisent pour raisonner sur la théorie en question. Autrement dit, parmi les divers modes de définition utilisés en Mathématiques, il pré= conise, à l'exclusion de toutes les autres, les définitions « par postulats ». On peut contester la légitimité de ce point de vue, et particulièrement l'opportunité de recourir aux défi- nitions par postulats dans les cas où les délinitions « nominales‘» sont possibles, c’est-à-dire où les no= tions à définir peuvent être construites de toutes pièces à l'aide de notions plus simples. Notons cependant que, même alors, les définitions par postulats ou par axiomes ont une fécondité à laquelle les définitions nominales ne peuvent prétendre, grâce aux généralisations qu’elles permettent. Pour ce cas de notions « dérivées », l'absence de contradiction entre les axiomes est aisée à vérifier. Il suffit, précisément, d'alléguer la constitution, à l’aide de notions antérieurement acquises, d'un concept satisfaisant à ces axiomes. C’est ce qui arrive pour la Géométrie, que l’on peut construire à l’aide des nom bres. Seulement, comme nous venons de le voir, ce cas simple des notions dérivées est aussi, en général, le moins intéressant. Pour les notions premières elles-mêmes, la difficulté est tout autre et paraissait jusqu'ici insoluble. C'est à elle que s'attaque, cette fois, M. Hilbert. Cette difficulté, comme dans toutes les démonstrations négatives, réside dans la multiplicité des raisonnements, des combinaisons logiques que l’on peut former avec les axiomes fondamentaux. C'est prévoir, en quelque sorte, la série complète des résultats qui pourront être obtenus par ces combinaisons logiques, que d'affirmer à l'avance que ces résultats ne présenteront pas de contradiction. Mais, avant tout, il faut commencer par poser la question. Qu'entendrons-nous par toutes les combi- naisons logiques possibles? C'est, on le sait, un sujet profondément étudié, dans ces dernières années, par toute une école de logiciens, tels que MM. Peano, Rus- sell, etc.Une coordination serait souhaitable, entre les travaux de cette Ecole et les recherches actuelles de M. Hilbert, et l’on peut regretter que, dans la rédaction sommaire qu'il a présentée à Heidelberg, l’auteur n'ait pas eu le temps d'indiquer la concordance entre les deux points de vue. Il est clair, par exemple, qu'il y aurait lieu de savoir si toutes les règles de logique, telles qu'elles ont été posées par les auteurs que nous venons de nommer, sont introduites dans les combi- naisons logiques dont il s'agit. Au premier abord (Joe: cit., p. 94), on est tenté de croire que le seul principe du syllogisme est pris en considération; mais la fin du travail (p. 102) semble indiquer que les choses ne doivent pas être entendues ainsi. D'autre part, les principes de logique énoncés jusqu'ici sont-ils les seuls qui existent et qui pourront ètre utilisés par l'esprit humain? Tout ce que nous pouvons dire, c’est que tous les raisonnements — partis culièrement tous les raisonnements mathématiques — à actuellement construits paraissent reposer sur ces principes seuls. Mais, aussi bien qu'il a pu exister, dans 1 l'histoire de la pensée humaine, une époque où per sonne n'avait songé à se servir, par exemple, de l'in= duction complète, il n'est pas absolument évident que l'avenir ne fera pas découvrir quelque autre propriétés des notions premières, non réductible à celles que nous connaissons. j Si l'on considère les principes généraux de la Logique déductive comme préexistant aux Mathématiques; M. Hilbert ne peut, on le voit, affirmer l'absence de contradiction de ses axiomes que moyennant un pos= tulat, à savoir l’inexistence de principes logiques encor@ inconnus. S'il est vrai que cette inexistence est assez Le TEE D RTE APT NE SAP PE DRE 1 Voir Coururar: Définitions et démonstrations mathéma tiques, Enseignement mathématique, 45 mars 1905. a di ! | | | | marches lentes, les fréquences 25 ou 50, usilées dans la pratique. Le choix de l’induit comme partie fixe des grands alternateurs s'impose par deux raisons très simples : d'abord, il est plus facile d'isoler, pour de très hautes tensions, des parties fixes que des parties mobiles, soumises à la force centrifuge; ensuite, le grand moment d'inertie des inducteurs convient bien pour constituer un volant de la machine motrice. On construit ainsi, à l'heure actuelle, des alternateurs pouvant produire directement 10.000 à 12.000 volts. Pourquoi cette disposition si logique ne s’étend- elle pas aux machines à courant continu ? Unique- ment parce que, dans ces machines, les balais sont solidaires de l'inducteur, et que, par suite, si l’on rendait celui-ci mobile, il faudrait faire aussi tour- ner ceux-là, ce qu'on ne s'est pas encore résigné à faire, au moins pour les génératrices; si l'on ajoute à cela que le collecteur des dynamos à courant con- tinu est toujours une pièce délicate et dont il est difficile d'isoler convenablement les lames consé- eutives, on reconnaitra sans peine que les alterna- teurs se prêtent mieux que les dynamos à la pro- duction directe des hautes tensions. Comme dans la machine à courant continu, le circuit induit des alternateurs se compose de barres logées dans des rainures pratiquées suivant les génératrices de l'armure. Il comporte un, deux ou trois enroulements, suivant qu'il s'agit d'un induit mono, di ou triphasé. Les formes des machines paraissaient ainsi à peu près définitivement fixées lorsque l'apparition des turbines à vapeur vint {out modifier : la grande vitesse à laquelle doivent tourner ces moteurs impose des formes nouvelles pour les machines électriques; pas un instant, en effet, il ne vint à l'idée de renoncer aux avantages si précieux des groupes électrogènes et de commander par cour- _roie ou par engrenage les anciennes machines à marche lente. Ici encore, comme précédemment, nous aurons - Surtout en vue les alternateurs, bien que, dès maintenant, on construise également des groupes: lurbine à vapeur, dynamo à courant continu. - Tout d'abord. nous remarquerons que les grandes vitesses exigées par les turbines entrainent pour les alternateurs un faible nombre de pôles : la p relation entre la vitesse angulaire, exprimée en . Lours par minute, et le nombre des pôles, pour - une fréquence donnée, est représentée par une hyperbole : on voit, par exemple, que, pour la fré- - quence 25, la vitesse de la machine doit être de 4.500 tours par He si l’alternateur est bipolaire et de 750 s'il est à 4 pôles ; il résulle de là qu'aux grandes vilesses, on a très peu de choix pour la PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE 549 vitesse et pour le nombre de pôles ; les machines lentes, au contraire, sont beaucoup plus souples el permettent une grande indétermination dans le choix des vitesses et lenombre de pôles. C'est là une difficulté sérieuse dans la construction des turbo- alternateurs. En fait, les turbines sont construites en général pour 3.000 ou 1.500 tours par minute, quelquefois 750 ou 500. A ces grandes vitesses, on ne pouvait plus songer aux inducteurs volants de grand diamètre : il fallut donc, bon gré mal gré, réduire ce diamètre et revenir aux faibles diamètres d'autrefois; mais, comme on prétendait garder le terrain conquis dans l'élévation des puissances el construire des turbo-alternateurs de 5.000 kilowatts et plus, deux moyens seuls restaient disponibles : allonger la machine parallèlement à l'axe, et, si cela ne suffi- sait pas, élever, grâce à des perfectionnements de la construction mécanique, la force centrifuge tolérée à la périphérie de la partie tournante. L'un et l’autre procédé ont été employés : en effet, si nous comparons les dimensions analogues des inducteurs tournants de deux alternateurs tri- phasés de 350 kilowatts à 2.000 volts entre bornes, mus l’un par turbine à 3.000 tours par minute, l’autre par machine à vapeur à 142 tours «par minute, nous voyons : 1° que la dimension paral- lèle à l’axe s’est allongée dans le turbo-alternateur de 65 à 80 centimètres; % que le diamètre s’est réduit dans une proportion bien plus grande de 310 à 50 centimètres; 3° comme conséquence, que la force centrifuge est beaucoup plus grande dans le premier que dans le second. Un calcul facile montre que, dans le premier, la force centrifuge est de 2.500 grammes-force par gramme-masse à la périphérie avec une vitesse de 80 mètres par seconde, tandis que, dans le second, elle est seu- lement de 40 grammes-force par gramme-masse à la périphérie avec une vitesse de 24 mèlres par seconde. On concoit aisément que, dans ces conditions, une augmentation de puissance des turbo-alter- nateurs ne peut plus guère être recherchée dans une augmentation de vitesse, et que le seul moyen qui reste disponible est un accroissement des dimensions parallèles à l'axe : nous trouvons ainsi que deux alternateurs de 5.000 volts à 1.500 tours par minute, l'un de 480 kilowatts, l'autre de 2.000 kilowatts, ont à peu près le même diamètre (95 centimètres environ), mais ont des longueurs respectives de 460 et 1.200 centimètres, Ces efforts excessifs, dus à la force centrifuge, devant lesquels on aurait reculé dans la con- struction ancienne, ont conduit à des formes toutes nouvelles pour les inducteurs tournants; il n'y a plus de pôles saillants; l’âme de l'inducteur 550 PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE est un cylindre rainuré suivant les génératrices; les conducteurs, parcourus par un courant con- tinu, qui font de cel inducteur un puissant électro- aimant, sont logés dans les rainures et main- tenus en place par des coins très résistants et solidement encastrés; les portions de fils exté- rieures aux rainures sont enroulées sur une portion lisse du cylindre et maintenues en place par des freltes métalliques solides : si l'on réfléchit que ces frettes doivent subir des efforts de 30 kilogs par millimètre carré, et, d'autre part, n'être pas magnétiques pour éviter des dérivations magné- tiques nuisibles, on reconnaïîtra que le problème n'était pas facile à résoudre : les aciers au nickel, si bien étudiés par notre confrère, M. Guillaume, ont seuls permis d'y arriver. Ces difficultés ne sont pas les seules; un équili- brage parfait des parties lournantes est nécessaire à ces grandes vitesses, tant au point de vue sla- tique (centre de gravité sur l’axe) qu'au point de vue dynamique (coïncidence des axes de symétrie et d'inertie) : quiconque assiste, dans les ateliers de construction, à ces opérations d’équilibrage, croit retrouver, pour ces puissantes machines les délicates méthodes de nos laboraloires de Phy- sique. Tous ces obstacles, et bien d’autres encore, ont été surmontés, et dès maintenant le turbo-alterna- teur semble être la grande machine de l'avenir. IT Trois grands problèmes préoccupent actuelle- ment les électriciens au sujet des alternateurs ; ce sont : 1° le couplage; 2° le compoundage; 3° la destruelion des harmoniques. 1° Le couplage en parallèle des alternateurs s'est imposé dès que l’on a réalisé de grandes usines composées de plusieurs groupes électrogènes de- vant entrer successivement en fonclion suivant les demandes de puissance sur le réseau; toutes les machines devant avoir exactement la même fré- quence, leur isochronisme rigoureux s'impose, d'où ure difficulté toute nouvelle que ne connais- saient pas les dynamos à courant continu. Les propriétés mêmes des courants alternatifs, heureusement, apportent une solution à un pro- blème que des régulateurs de vitesse purement mécaniques auraient été incapables de résoudre : en effet, si une machine tend à se mettre en avance sur les autres, la puissance qu'elle doit fournir augmente et la fait ralentir; sa marche a done tous les caractères d’un équilibre stable; l'équilibre, troublé un instant par une cause acci- dentelle quelconque, se rétablit par une série d’os- cillations dont la période dépend uniquement du moment d'inertie et des constantes électriques de l'alternateur; la loi de ces oscillations est celle du mouvement pendulaire, et leur période est, par conséquent, proportionnelle à la racine carrée du moment d'inertie, el en raison inverse de la racine carrée du couple supplémentaire (ou couple syn- chronisant) développé par un écart angulaire égal à l'unité. Lorsque l'alternateur est conduit par une ma- chine à vapeur à piston, le couple moteur lui-même est périodique, et la marche de la machine sera d'autant plus stable que sa période d'oscillation propre et la période du couple moteur seront plus différentes ; au contraire, si ces périodes coïncident ou sont voisines, les oscillations s'amplifieront et bientôt l'alternateur tombera hors de phase, acei- dent qui peut être des plus graves, le réseau se trouvant en court circuit sur l'alternateur décroché. On reconnait là Ja théorie ordinaire de la résonance qui joue un si grand rôle dans toutes les parlies de la Physique. Il est essentiel non seulement d'éviter autant que possible des oscillations, mais de les amortir rapi- dement dès qu'elles tendent à se produire ; c’est là le rôle des circuits amortisseurs de M. Leblane, qui consistent en une série de barres de cuivre traver- sant de part en part les pôles inducleurs, et mises en court circuit de part el d'autre de la machine par deux cereles également en cuivre. Ce système joue exactement le rôle des cadres d'aluminium qui, dans cerlains modèles, amortissent les oscillations du galvanomètre Deprez-d’Arsonval. L'étude des conditions du maintien rigoureux de l'isochronisme des allternateurs couplés a conduit à une conclusion paradoxale : c’est que les régula- teurs de vitesse des machines motrices doivent ne pas être trop sensibles, certains auteurs mêmes ont été jusqu à dire: doivent être supprimés, sauf un seul. On conçoit, en effet, que si, lorsqu'une avance d'un des alternateurs se produit, la machine motrice a un régulateur assez sensible pour s’ae- commoder immédiatement au supplément de puis- sance exigé par cette avance, le mécanisme pure- ment électrique du maintien de l’isochronisme, que nous avons décrit plus haut, ne pourra se produire, et l'écart angulaire de l’allernateur ira en s'exa- gérant de plus en plus. 2% Le compoundage des machines électriques est un problème déjà ancien, puisque Marcel Deprez en a donné une solution bien connue, pour la dynamo à courant continu, dès 1881. Ce problème consiste, comme on le sait, à maintenir automali- quement la tension conslante aux bornes d'une machine, quels que soient les incidents qui se pro- duisent sur ie réseau qu'elle alimente. Or, ce pro= blème est beaucoup plus difficile à résoudre pour PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE les alternaleurs que pour les machines à courant continu : dans les alternateurs, en effel, la chute de tension aux bornes, pour une excitation donnée, dépend de deux variables, le débit et la différence de phase entre le courant et la lension ; tandis que, pour les machines à courant continu, elle ne dépend que d’une variable, qui est le débit. Si le compoundage avait uniquement pour but d'éviter un réglage à la main pour le remplacer par un réglage automatique, il serait déjà important, mais ne le serait que dans des cas particuliers. Mais ce qui fait la véritable importance du com- poundage des machines, en particulier des alter- nateurs, c'est qu'il permet une économie sensible sur leur construclion. Ce point de vue n’est pas évident, el mérite d’ar- rêter quelques instants notre attention : prenons un alternateur ordinaire, à faible chule de tension, et pour lequel, par conséquent, un réglage à la main suffit ; en augmentant la profondeur des rainures de l’induit, nous pouvons y loger plus de fils; en dimi- nuant l'entrefer, nous pouvons augmenter, pour une même excitation, le flux utile ; toutes ces modi- fications augmentent, sans dépense de malière, la tension de la machine et, par suile, sa puissance; mais elles augmentent aussi la réaction de l’induit, de sorte que, pour maintenir constante la tension entre la marche en charge et la marche à vide, la gamme des varialions du courant inducteur doit êlre telle que le réglage à la main devient impos- sible; c'est ici qu'intervient l'utilité du compoun- dage. Des solutions purement électriques du pro- blème ont été données dans ces dernières années, par MM. Maurice Leblanc, Boucherot, Blondel; des solutions électromécaniques, c'est-à-dire faisant entrer en jeu simultanément le réglage de l’excita- tion et celui de la machine motrice, par M. Routin et M. Picou. Le système de M. Boucherot, qui parait le plus répandu à l'heure actuelle, consiste dans l'emploi, sur chaque phase, de deux transformateurs, l’un dont le primaire est en dérivation sur les bornes . de l'alternateur, l’autre dont le primaire est en Série avec le circuit général. Les secondaires de ces transformateurs, convenablement calculés, sont en série, et les forces électromotrices ainsi oble- nues sont ulilisées à produire un champ tournant dans l’entrefer d'une machine spéciale qui servira d'excitatrice. Dans ce champ tourne, avec une vitesse différente, un induit à collecteur; grâce à un enroulement spécial de cet induit, on s'arrange de manière que les pôles électriques restent fixes sur le collecteur, comme dans les machines à courant continu ordinaires ; des balais placés en ces points recueillent donc un courant continu qui sert à l'ex- citation de l'alternateur principal et dont l'intensité & 554 se règle automatiquement pour maintenir constante la tension aux bornes. 3° Les forces électromotrices produites par les alternateurs ne sont pas rigoureusement sinusoï- dales ; comme toute fonction périodique du temps, elles peuvent être considérées comme la superpo- sition d’un terme fondamental, le plus important de tous, et d'une série d'harmoniques de périodes sous-multiples de la période principale ; ces harmo- niques sont dus à deux causes : en premier lieu aux formes respeclivés des pièces polaires et des bobines induites; en second lieu à la présence sur l’armature des rainures et des dents qui produisent des fluctuations du flux et, par suite, de la force électromotrice. On peut prévoir sinon la grandeur, au moins l'ordre de ces derniers : par exemple, un allernateur triphasé à une rainure par pôle et par phase donne surtout les harmoniques qui ont > fois et 7 fois la fréquence du terme fondamental; de même, pour 2? rainures par pôle et par phase, il donne les harmoniques 11 et13, et enfin, pour 3 rai- nures par pôle et par phase, les harmoniques 17 et 19, et ainsi de suite. La production de ces harmoniques est à lous les points de vue nuisible, et l'on voudrait à tout prix se rapprocher d'une courbe sinusoïdale; de nom- breuses tentatives ont été failes dans ce sens : on à taillé d'une manière plus ou moins empirique les bords des pièces polaires; on a incliné les rainures sur les généralrices du cylindre d'armature; on à proposé de composer l'induit de deux moitiés légè- rement décalées l'une par rapport à l'autre; tous ces moyens ont donné de bons résullals; mais ce n’est que tout récemment que M. Maurice Leblanc s’est altaqué directement au problème et a présenté ce qu'il a appelé énergiquement : un étouffeur d'harmoniques. Ce système, fondé sur un principe analogue à celui de l'amortisseur, et qui n'estautre chose qu'un amortisseur de grande résistance, est encore trop nouveau pour qu'on puisse porter un jugement sur lui. III Les diverses génératrices électriques étant ainsi décrites, voyons la place qu'elles tiennent dans les stations centrales modernes. Les moteurs qui les conduisent peuvent être hydrauliques, à vapeur ou à gaz. Nous n'avons pas à rappeler ici l'importance des installations hydro-électriques : on évalue à plus de 500.000 chevaux la puissance ainsi utilisée en France. Basses chutes à grand débit, hautes chutes à faible débit, voila les deux extrêmes entre les- quels se placent toutes les grandes usines exis- tantes. Comme exemple des premières, nous cite- Do? rons l'usine des forces motrices du Rhône, à Jonages, près de Lyon, qui produit 12.000 chevaux avec une chute de 11 mètres et des allernateurs à marche lente de 120 tours par minute; comme exemple des secondes, l'usine de Vouvry, près du lac de Genève, qui utilise une chute de 1.000 mètres de hauteur, avec des alternateurs de 2.000 kilo- watts à grande vitesse, à induit tournant, qui font 1.000 tours par minute. ] L'installation hydro-électrique la plus grandiose à l'heure actuelle est celle du Niagara, où l’on trouve à la fois un débit colossal et une hauteur déjà très notable (40 mèêtres environ). Cette installation se partage entre cinq Compagnies qui peuvent disposer de 750.000 chevaux, sur lesquels 455.000 seulement étaient installés en octobre 1904, et 115.000 vendus; le capital immobilisé par ces cinq Compagnies est de 132.500.000 francs. ? Dans les installations mues par la vapeur, l’an- cienne machine à piston est encore loin d'être détrônée par la turbine; la double et triple expan- sion, la surchauffe, les économiseurs, l’augmenta- tion de la puissance des uuilés ont abaissé la consommation à 5 kilogs de vapeur par cheval- heure. Comme exemple d'une des plus importantes stations à vapeur du monde, nous citerons celle du Métropolitain de New-York, qui alimente 800 trains circulant sur un réseau souterrain de 24 kilomètres environ. Cette station comprend neuf groupes électrogènes de 8.000 chevaux chacun. Les machines à vapeur sont à double expansion, avec cette dispo- sition particulière que les cylindres à haute pres- sion sont horizontaux et les cylindres à basse pres- sion verticaux, la course des pistons étant la même pour chacun d'eux. ! Le caraclère d'homogénéité que nous avons reconnu dans les groupes électrogènes se retrouve dans l’ensemble des grandes usines à vapeur telles que celle dont nous parlons maintenant; la mani- pulation du charbon et des cendres prend un caractère tout à fait scientifique : le charbon est élevé, par des wagonnets se mouvant sur un plan incliné, jusqu'au faîte du bâtiment où, suivant un usage très répandu maintenant, se trouvent les soutes à charbon, en sorte que, ce premier travail effectué, c’est la pesanteur seule qui conduira le charbon des soutes aux foyers des chaudières, puis les cendres des foyers aux wagonnets destinés à les enlever; le chargement des chaudières se fait d'une manière tout à fait automatique, et les chauffeurs sont entièrement supprimés; partout la main- | d'œuvre est réduite à sa plus simple expression; partout la manœuvre des wagonnets se fait par traction électrique et moteurs à courants alter- natifs; ce système est capable d'élever 200 tonnes PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECIINIQUE de charbon par heure, ce qui est beaucoup plus que suffisant puisqu'on peut admettre en nombre rond que, à pleine charge, une usine de 80.000 che: vaux comme celle-ci brûle 80 Lonnes de charbon par heure. Une remarquable installation du même genre est à citer à l'usine centrale du Métropolitain de Paris. Nous avons déjà attiré l'attention sur l'impor- tance Lous les jours plus grande que prennent les groupes électrogènes mus par turbine à vapeur : la turbine de Laval, qu'on ne peut se dispenser de citer ici, la turbine Parsons, la première qui ait réalisé de grandes puissances avec une marche relativement lente, la turbine Rateau en France, la turbine Curtis en Amérique, sont les plus connues. Malgré l'inconvénient de leur grande vitesse, les turbines ont tellement d'avantages que leur usage se répand de jour en jour; cela est si vrai que la Commission chargée de l'étude du régime futur de l'électricilé à Paris n'a pas hésité un instant à recommander, pour une installation qui atteindra 80.000 kilowatts, l'usage de turbo-alternateurs de 5.000 kilowatts ou plus chacun. Il est curieux de constater que l’on retrouve aujourd'hui, sous ces formes puissantes, le principe qu'Héron d’'Alexan- drie avait utilisé il y a plus de vingt siècles dans une machine qui n'était qu'un jouet. Le principal avantage des turbines, qu’elles doivent précisément à leur grande vitesse, est le moindre encombrement : un groupe de 3.200 kilo- watts pèse 20 tonnes, dont 9 pour la turbine et 11 pour l'alternateur ; le même groupe, avec une machine à piston, pèserait 400 tonnes; le premier a un encombrement horizontal de 16 mètres de longueur sur 3%,50 de largeur, soit 56"?; le second occuperait environ 280"%?, La turbine Curtis, dont l'axe est vertical, a un encombrement horizontal encore plus réduit : 7 °/, de celui d'une machine à vapeur de même puissance. Les turbines comportent encore de nombreux avantages : la circulation uniforme de la vapeur toujours dans le même sens laisse chaque point à la même température, et par suite évite les con- densations et vaporisations successives si nuisibles dans la machine à vapeur; la régularité de la vitesse et l'absence de tout couple périodique sont, comme nous l'avons vu, des avantages précieux au point de vue du couplage des alternateurs; l'ab- sence de matières lubréfiantes dans les parties en contact avec la vapeur permet une surchauffe plus considérable que dans les machines à vapeur ordi- naires, où les huiles sont détruites par une sur- chauffe trop élevée et où l’on ne peut guère dépasser. 250°, tandis qu'on va jusqu'à 300° dans les tur- bines; l’eau de condensation, qui n’est pas souillée D. on mé ist eh ec. PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE 553 par des malières grasses, peut immédiatement servir à l'alimentation de la chaudière. Grâce à toutes ces qualités, la consommalion de vapeur s'est abaissée aujourd'hui à moias de 5 kilogs de vapeur par cheval-heure, c'est-à-dire est devenue comparable à celle des meilieures machines à vapeur. L'inconvénient le plus grave est la nécessité d'une condensation extrêmement parfaite : on atteint aujourd'hui couramment des vides de quelques centimètres de mercure, le rendement de la turbine baissant extrêmement vile avec un mauvais vide au condenseur'; ceci exige une ali- mentation en eau très abondante et telle qu'on ne peut la trouver, pour de grandes installations, qu'au bord d’un fleuve ou d'une rivière; un autre inconvénient est la difficulté de construire des groupes de faible puissance, non au point de vue de la turbine qui, au contraire, se prète très bien à ces faibles puissances, mais au point de vue de l'alternateur, et surtout de la dynamo à courant continu. Un usage extrêmement intéressant des turbines à basse pression a été fait par M. Rateau pour uti- liser les vapeurs d'échappement des machines à vapeur ordinaires sans condensation; ces vapeurs s'écoulent d'une manière intermittente à chaque coup de piston; grâce à un appareil extrêmement ingénieux, qu'il nomme un accumulateur de cha- leur, dont la capacilé calorifique emmagasine, puis restitue de la chaleur, M. Rateau transforme cet écoulement intermittent en écoulement continu propre à alimenter une lurbine; c'est ainsi qu'aux mines de Bruay, la vapeur d'échappement d’une machine d'extraction à 0,9 kil./cm* est détendue par l'intermédiaire d’un accumulateur de chaleur, d'une turbine à basse pression et d'un condenseur jusqu'à la pression de 0,15 kil./em°. La lurbine actionne deux dynamos à courant continu, dont l'énergie, aux frais d'installation près, est absolu- ment graluite, puisqu'elle utilise des vapeurs qui, auparavant, se perdaient librement dans l’atmo- - sphère. Si l'on réfléchit que, dans les mines, par exemple, cerlaines machines d’extraclion consom- - ment en moyenne 5.000 à 6.090 kilogs de vapeur par heure, que dans les aciéries cerlains laminoirs - consomment jusqu'à 20.000 kilogs de vapeur par heure, et que ces machines marchent souvent sans condensation, on verra que, par l'applicalion des turbines à basse pression et d’une condensation aussi parfaite que possible, on pourra gagner de 1 4 kilog de vapeur, se détendant depuis la pression de 40 k/em? jusqu'à la pression atmosphérique normale, donne théoriquement 39.000 kgm. : se détendant jusqu'à une pres- Sion de 0,206 k/em®, il donne 59.000 kgm., et, jusqu'à une pression de 0,070 k/cm?, 72.000 kgm. 600 à 700 chevaux dans le premier cas, et près de 2.000 dans le second’, qu'on pourra utiliser et transporter sous forme électrique. La dernière source motrice que nous avons à examiner estle moteur à gaz; réduit pendant bien longtemps à la production des pelites puissances, il s'est développé depuis quelques années avec une rapidité extraordinaire; on peut voir aujourd'hui des moteurs à gaz à 4 cylindres en double tandem, à double effet, de 6.000 chevaux, ayant un rende- ment thermique (rapportentre la puissance utilisée et la puissance contenue dans la bouille) de 38 °/,. Il va sans dire que ces puissantes machines n'ulilisent pas le gaz de ville; elles utilisent uni- quement le gaz pauvre (et, dans ce cas, la consom- mation s'abaisse à 450 grammes de houille par cheval-beure), ou les gaz perdus provenant des hauts-fourneaux ; cette dernière application surtout semble prendre actuellement un développement grandiose : un haut-fourneau produisant 100 tonnes de fonte par jour donne environ 16.000 mètres cubes de gaz par heure, qui peuvent produire une puissance d’au moins 2.000 chevaux; dans ces conditions, le kilowatt-an reviendrait à 100 ou 120 francs (intérêt et amortissement compris); On évalue à 600.000 chevaux la puissance ainsi perdue en Allemagne pour une production de 8.000.000 de tonnes de fonte; on peut dire que, lorsque toute celte puissance sera utilisée, et elle ne peut l'être que sous la forme électrique, læ production de fonte deviendra l'accessoire, el celle de l'énergie électrique la principale dans les pays de hauts-fourneaux. IV L'énergie électrique étant produite par un des procédés que nous venons d'étudier, il s’agit de la transporter; les distances de transport augmentent tous les jours ; San Francisco utilise pour ses tram- ways l'énergie produite par les chutes de l'Ubax, à une distance de 355 kilomètres. Le système le plus généralement employé est celui des courants triphasés à haute tension l'énergie est produite au moyen de groupes électro- gènes de 1.000 à 7.000 kilowatls, directement jus- qu'à 10.000 ou 12.000 volts environ, par transfor- mation jusqu'à 25.000 volts, et souvent par double transformalion au-dessus de 25.000 volts. La tension la plus élevée en France est de 28.000 volts (réseau de l'énergie électrique du lit- toral méditerranéen), en Europe de 40.000 volts (transport de Gromo à Membro dans le nord de ! Voir P. Cnazerr : L'utilisation des vapeurs d'échappe- ment. Revue générale des Sciences, t. XV, p. 1041. D94 l'Italie), en Amérique de 50.000 volts (Missouri River power C°). En général, les lignes employées pour les très grandes distances sont aériennes, en cuivre, ou quelquefois en aluminium ; les hautes tensions que nous venons de signaler amènent à employer des isolateurs à plusieurs claches et de très grandes dimensions pour éviter les décharges disruptives; ceux de la Missouri River ont 22 centimètres de diamètre et 43 centimètres de hauteur. Pour la même raison, et pour éviter les effluves entre fils, les conducteurs doivent être très écartés les uns des autres : dans la même installation, les trois fils de la ligne triphasée occupent les trois sommets d'un triangle équilatéral de 2 mètres de côté. Les lignes souterraines, dont on peut évaluer le prix à trois fois celui des lignes aériennes, sont beaucoup moins répandues; cependant, on sail aujourd’hui consiruire des câbles qui, aux essais, résistent à une tension de 100.000 volts ; des théo- ries nouvelles et fort simples ont montré que, dans un câble, toute la masse de l'isolant ne tra- vaille pas à la même tension, et que c'est dans le voisinage immédiat du conducteur que le gradient de potentiel est le plus élevé"; ce sont donc les régions où il faut surtout employer des isolants à grande rigidité électrostatique. La plus longue ligne souterraine (comme transport) qui existe en France est une ligne de 13 kilomètres à 10.000 volts sur le réseau de la Méditerranée; des câbles à 26.000 volts sont en service à Toulon. Les lignes aériennes ont, par rapport aux lignes souterraines, le grave inconvénient d’être exposées aux accidents dus à l'électricité atmosphérique. Les coups de foudre directs sont rares, et les élec- triciens, à l'heure actuelle, semblent craindre sur- tout lesélévations de tension causéesindirectement soit par des phénomènes d'influence électrosta- tique, soit par des phénomènes d'induction provo- qués par les décharges oscillantes dues aux coups de foudre voisins. Il semble que, tant que l’isole- ment des lignes était médiocre, comme c'était le cas pour les lignes'à basse Lension, les élévations anormales de tension ne se produisaient pas, l'équilibre ayant le temps de s'établir suffisamment par la faible conductibilité des supports. Mais, à mesure que l'isolement est plus soigné, les hautes tensions dues aux phénomènes atmosphériques peuvent se développer sans se dissiper au fur et à mesure, et alors elles cherchent un point faible où elles provoquent des désordres importants. La ! Un cäble armé, construit pour supporter 25.000 volts, avec A4mm,5 d'épaisseur d'isolant, supporte 5.000 volts par millimètre dans le voisinage du conducteur, et seule- ment 2.210 volts par millimètre dans le voisinage de l'en- veloppe. PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE question des parafoudres deslinés à intervenir en cas de décharge brusque, et des limiteurs de ten- sion destinés, par des fuites volontairement établies, à empêcher toute élévation de tension, est donc devenue capitale dans les transmissions à longue distance. Mais, qu'il s'agisse de câbles souterrains ou de lignes aériennes, d’autres élévations de tension sont à craindre : ce sont celles qui sont dues soit à la résonance inattendue d'un harmonique de la ten- sion principale, dont la période se trouve coïncider avec celle des oscillations propres de la ligne, soit à la rupture brusque d'un court-circuit qui provoque ce que l'on appelait autrefois un extra-courant de rupture, extra-courant dont le calcul est fort com- pliqué si l’on veut tenir compte de toutes les circon- stances qui interviennent. Aussi les parafoudres et limiteurs de tension sont-ils aujourd'hui considérés el étudiés comme des appareils de protection contre toutes les élévations anormales de tension, que ces élévations soient d'origine atmosphérique ou autre. Les appareils accessoires dans ces grandes lignes de transmission prennent une grande importance : c'est ainsi que les interrupteurs deviennent de vé- ritables machines; la rupture de l'arc dans l'air entrainerait à des dimensions tout à failexcessives ; aussi, l'usage est-il très généralement répandu aujourd'hui de rompre ces ares dans l'huile. Nous citerons ici un interrupteur triphasé, à huile, ca- pable d'interrompre une puissance de 750 kilowatts sous 30.000 volts. Les disjoncteurs du Métropoli- tain de New-York, qui peuvent couper 5.000 kilo- watts sous 11.000 volts, sont d'un type analogre. En général, le courant triphasé à haute tension n'est pas utilisé tel quel à la station d'arrivée; ilest soit transformé en courant triphasé à tension moindre,soit même transformé en courant continu à basse ou moyenne tension par commutatrices ou par groupes moteurs-généraleurs. Parallèlement au système de transmission par courants triphasés à haute tension, se développait, M sur un champ d'action plus restreint, le très inté= ressant système série à intensité constante par courants continus à haute tension. Ce système, auquel s'attache invinciblement le nom deM.Thury, « consiste à placer en série, sur un même circuit, toutes les génératrices d’une part, toutes les récep- trices de l’autre, et à faire varier suivant la demande de puissance, non pas l'intensité du courant, qui reste constante à toute charge, mais la tension de la station génératrice. Le plus récent exemple et le plus beau d'un transport par courant continu série est celui de Saint-Maurice-Lausanne, sur une distance de 56 kilo- mètres; le courant est constant et maintenu, quelle que soit la demande de puissance, à 150 ampères. La tension, au contraire, peut varier de 0 à 23.000 volts. A l’arrivée, le courant principal met en mouvement des groupes moteurs-générateurs, de manière à transformer le système à intensité constante, qui se prête bien aux longues transmissions, en système à potentiel conslant, qui se prête mieux aux distri- butions urbaines. Parmi ces groupes, les uns don- nent du courant continu à 500 volts pour les tramways, les autres du courant triphasé à 110 volts pour l'éclairage. 1l est assez curieux de rencontrer ici un système où l'énergie est /ransportée sous forme de courant continu et distribuée sous forme de courants triphasés. Tout récemment, un grand transport par le sys- tème du courant continu série vient d'être décidé entre Moutiers et Lyon, à une distance de 180 kilo- mètres : la tension atteindra 57.600 volts, et l’in- _Lensité constante sera de 75 ampères, ce qui cor- respond à une puissance maxima de 4.320 kilowatts. LS d'A. à Lo À À te _ Parmi lesdiverses formes sous lesquelles peut être utilisée l'énergie électrique, la plus importante est la forme mécanique. Les moteurs à courant continu, les moteurs, synchrones ou asynchrones, à courants alternatifs polyphasés sont classiques aujourd'hui. Le seul problème qui restait à résoudre jusqu'à ces derniers temps était celui du moteur monophasé; on possédait bien, il est vrai, le moteur asynchrone monophasé; mais ce moteur démarre mal et par des artifices compliqués; c’est surtout à ce point de vue d’un puissant couple de démarrage que se sont placés les inventeurs récents, et en particulier l’un des plus distingués de nos anciens élèves de l'École ‘supérieure d'Électricité, M. Marius Latour. Ces nou- veaux moteurs, dont l'avenir semble considérable pour la traction électrique, sont fondés sur l’artifice du collecteur étendu aux courants alternatifs. Tout le monde sait que, si l’on envoie un courant alter- nalif dans un moteur ordinaire à courant continu xcité en série, ce moteur se met à tourner : cela tient à l’une des lois fondamentales d'Ampère, à savoir que le sens des actions qui s’exercent entre … deux circuits ne change pas si l’on renverse à la fois le courant dans l’un et l'autre de ces deux circuits. Mais un moteur simple ainsi constitué a des incon- _—énients graves : en premier lieu, les courants induits dans les noyaux massifs des inducteurs (Courants de Foucault) entrainent une perte d'énergie considérable et, par suite, un mauvais rendement : il est facile de remédier à cet incon- Yénient en substituant aux noyaux massifs des noyaux de tôle feuilletée; en second lieu, la self- induction considérable de ces moteurs réduit beau- “coup la puissance qu'on peut leur demander pour PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE 20 un volume ou un poids donné : parmi les différentes solutions qu'on a données du problème, consistant à réduire cette self induction sans rien sacrifier sur le couple utile, l’une des plus ingénieuses est due à M. Marius Latour ; elle consiste à placer, à angle droit avec les balais ordinaires, c’est-à-dire suivant la ligne des pôles, deux autres balais réunis en court-circuit; la théorie complète de ce moteur est trop délicate pour pouvoir être abordée ici. Nous n'avons pas à décrire les applications véri- tablement innombrables qu'ont aujourd'hui les moteurs électriques: applications aux ateliers de toute espèce, ateliers mécaniques, ateliers de fila- ture et de tissage, etc.; applicalions aux appareils de levage, grues, treuils, ponts roulants; appli- cations aux mines, pompes, ventilateurs, trac- teurs, ete., où la plus puissante des machines mi- nières, la machine d'extraction, commence à être commandée électriquement’. Mais l'industrie où les moteurs électriques ont exercé la plus pro- fonde influence est celle de la traclion : nous ne rappellerons que pour mémoire l'immense développement des tramways électriques, dont les réseaux atteignent une longueur de 36.400 kilo- mètres en Amérique, et nous rechercherons seule- ment les tendances qui se manifestent actuellement pour la traction des trains lourds sur les lignes interurbaines de grande longueur. Ces tendances peuvent se ramener à deux : la substitution aux trains remorqués par une locomolive de trains constitués par des voitures toutes automotrices, et l'emploi des courants alternatifs à haute tension. La première disposition a l'avantage de substi- tuer à un moteur unique, qui deviendrait trop puis- sant et peu maniable, une grande quantité de moteurs plus petits, alteignant directement les essieux de toutes les voitures. L’adhérence ulile est ainsi augmentée, on se débarrasse du poids mort de la locomotive, et le réglage de tous ces moteurs de moyenne puissance est plus facile que celui d’un ou de deux moteurs de très grande puissance. Ce réglage s'effectue de la manière sui- vante : le contrôleur (pour conserver le mot main- tenant passé dans l'usage pour désigner l'appareil de réglage placé sous la main du mécanicien) ne commande plus directement le courant envoyé aux moteurs ; ilne commande que des relais placés sous chaque voiture. Aussi ce contrôleur peut-il 1 La machine d'extraction, à marche essentiellement in- termittente, et mue jusqu'ici par la vapeur, entraîne des dépenses excessives de vapeur (jusqu'à 43 kilogs de vapeur par cheval-heure sur le câble d'extraction). En employant des moteurs électriques, et en emmagasinant l'énergie pen- dant les périodes de descente soit dans de lourds volants, soit dans des batteries d'accumulateurs, on annonce des consommations de18 kilogs par cheval-heure ; en fait, dans une installation existante, on a constaté des économies de 1/3 sur le combustible employé. 556 PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE ètre de dimensions très réduites, puisqu'il n'y | passe pas de courants faibles, et il est curieux de constater que l'appareil de manœuvre des trains lourds à grand nombre de voitures est de dimen- sions plusrestreintes que le contrôleur ordinaire de nos tramways. Les relais dont il a été question opèrent d’ailleurs, sous chaque voiture,les manœu- vres ordinaires de réglage, c'est-à-dire : au démar- rage, la suppression graduelle des résistances en série, les deux moteurs de chaque voiture étant en série, puis, une fois ces résistances supprimées, la mise en parallèle des deux moteurs avec résistance en série, et enfin, pour les grandes vitesses, la suppression totale des résistances, les deux mo- teurs élan! en parallèle. La deuxième tendance qui se manifeste dans la grande traction comme dans les transports à grande distance, c'est l'emploi des hautes tensions. Les moteurs de traction, qui sont si exposés aux courts-circuits, ne se prètant pas à l’utilisation di- recle de ces hautes tensions, un intermédiaire est indispensable. Dans lesinstallations les plus répan- dues jusqu'ici, cet intermédiaire se {trouve dans les sous-slations de transformation. Dans ces sous- stations, l’énergie électrique, amenée sous forme de courants alternatifs à haute tension, est trans- formée d’abord en courants allernatifs à basse tension par des transformateurs statiques, puis en courant continu ou par des commulatrices des groupes moteurs générateurs, et enfin transmise aux trains en marche par des frotteurs appropriés. Ces sous-stations sont fort coûteuses et d’inslal- lation et d'entrelien : aussi la tendance actuelle est- elle de transmettre directement le courant à haute tension aux trains en marche, de le transformer en courant à basse tension au moyen de transforma- teurs statiques placés sur ces trains eux-mêmes, et de l'utiliser sous forme alternative sans le transfor- mer en courant continu : c'est donc la question des moteurs à courants allernatifs qui se pose d'une manière à peu près forcée, à moins qu'on ne redresse le courant alternatif par un commulateur tournant synchrone en évitant les étincelles par des artifices appropriés. Une qualité qui prime tout dans les moteurs de traction est la possibilité de démarrages puissants et rapides. Or, jusqu'à ces dernières années, les moteurs triphasés pouvaient seuls, en courants alternatifs, être agencés de manière à avoir cette propriété, que possède à un si haut degré de per- fection le moteur série à courant continu. Mais l'emploi du courant triphasé exige au moins deux contacts frottants, en admettant que l'on se serve des rails comme troisième conducteur ; ou est donc amené à celte difficulté considérable : établir deux ou trois contacts frottants, à haute tension, entre une ligne fixe et un train à grande vitesse; comme exemple de la tentative la plus inléressante faite dans ce sens, nous citerons les essais faits en Alle- magne sur la ligne Marienfeld-Zossen, de 93 kilo= mètres de longueur. Le courant triphasé, à 14.000 volts entre fils, est amené à la voiture par prises de courants à archet. La voiture porte 4 moteurs de 200 kilowatts chacun, pouvant atteindre 600 kilo- watts au démarrage; le courant est transformé sur la voiture, soit à 1.200 volts (Siemens), soit à 500 volts (A. E. G.); on a atteint, sur une voie exceptionnellement bonne et préparée pour cet essai, des vitesses de 200 kilomètres par heure. L'inconvénient des deux prises de courant n'est pas le seul des moteurs triphasés ; ces moteurs sont d'une construction délicate, à cause du très faible entrefer qu'ils doivent avoir; et, de plus, ce sontdes moteurs à vitesse presque rigoureusement cons- tante. On a essayé, pour faire varier cette vitesse, un grand nombre d'artifices, dont voici les prinei- paux : passage de la connexion en étoile à la con- nexion en triangle des enroulements ; montage en cascade de deux moteurs, le rotor du premier, au lieu d’être en court-circuit, étant fermé sur le rotor du second, et le slator de celui-ci en court-circuit: changement du nombre de pôles du moteur par des connexions convenables. Tous ces artifices sont plus ou moins compliqués ou insuffisants, et l'on ne retrouve plus ici la souplesse du courant ccn- linu. Aussi espère-t-on beaucoup des nouveaux moleurs à courants alternatifs à collecteur dont nous avons parlé plus haut et qui partagent jusqu'à M un cerfain point les qualités des moteurs à courant continu. Ilexiste dès maintenant un certain nombre de lignes à traction alternative monophasée à prise transformateur placé sur la voiture même, et le réglage de vitesse s'obtient soit par l'intercalation » ‘ ee { de contact unique; la tension est abaissée par un : : de bobines de réaction, soit par la variation du rap-« port de transformation du transformateur. : Parallèlement à ces tentalives se développent aussi d'intéressants essais de traction par courant Ÿ continu à haute tension : comme exemple, nousg citerons la locomotive construite par la Compagnie“ de l'Industrie électrique pour la ligne de Saint Georges-de-Commiers à La Mure (Isère), qui com= porte 4 moteurs de 125 chevaux chacun, à 600 volts, constamment en série; le courant, à 2.400 volts, est amené à la locomotive par deux archets; le” milieu du circuit des moteurs est à la terre pan l'intermédiaire des rails, en sorte que la différence de potentiel dangereuse n'est que de 1.200 volts. Les projets de grande traction électrique se développent rapidement; la Suède estime qu'avee@ ses 100.000 chevaux de chutes d’eau elle pourrait. alimenter ses 4.350 kilomètres de chemin de fer eb ' +4 k lé PAUL JANET — TENDANCES ET RECHERCHES ACTUELLES DE L'ÉLECTROTECHNIQUE réaliser ainsi une économie de 50°/, sur les 20 mil- lions qu'elle dépense annuellement; la Suisse estime que 30.000 chevaux hydrauliques pourraient être ulilisés sur ses voies ferrées; en France, l'exploitation électrique de portions de réseaux (Paris à Jnvisy sur la Compagnie d'Orléans, Paris à Versailles sur la Compagnie de l'Ouest, le Fayet- Saint-Gervais sur le P.-L.-M.) a donné d'excellents résultats. VI La dernière grande application dont j'ai à re- -chercher l’évolution actuelle est l'éclairage. L'incan- descence du charbon soit dans l'arc, soit dans la dampe à incandescence, est jusqu'ici la source de lumière généralement employée. Peut-on trouver mieux que le charbon? Il est permis de le supposer; des propriétés du charbon le rapprochent, en effet, du corps noir théorique; et l’on sait qu'il existe des corps réels ayant un rendement lumineux meilleur que celui du corps noir. Dans le domaine de l'arc au charbon pur, on essaie de substituer des mélanges de plus en plus riches en sels métalliques. Ces charbons, introduits en 1900 par M. Bremer, ont été très étudiés et per- feclionnés en France par notre confrère M. A. Blondel; les charbons de M. Blondel, par exemple, -sont formés d'un mélange de charbon et de matières minérales (en particulier fluorure de calcium addi- tionné de borates alcalino-terreux) contenant jus- -qu'à 50 ou 60 °/, de malières minérales ; ce mélange forme un cylindre central protégé par une mince couche de charbon pur; on l’emploie comme pôle positif et, à l'inverse des arcs ordinaires, on le place en bas; le négatif, situé en haut, est formé par un crayon de charbon ordinaire. Les principes physiques de ces arcs sont tout différents de ceux des arcs ordinaires. Dans ceux- “ei, la véritable source de lumière (pour 85 °/, de flux lumineux total environ) est non pas l'arc lui- même, qui, malgré sa haute température, est peu » éclairant, mais le cratère positif sur lequel se produit la base de l'arc et dont la température n'est limitée que par la température d’ébul- lilion de la substance qui forme l’électrode : on cherche donc à élever cette température au maxi- mum en choisissant le corps le plus réfractaire, c'est-à-dire le carbone. Au contraire, dans le cas de charbons fortement minéralisés, les sels fusibles de chaux, par exemple, qui entrent dans leur composition, ont un point de volatilisation relativement bas, et la température -du cratère devienttrès inférieure à celle des char- bons ordinaires; mais alors l'arc lui-même est lumineux et constitue une véritable flamme très “clairante; grâce au pouvoir émissif sélectif de ces RIVUE GÉNÉRALE DE3 SCIENCES, 4905. 9 1 vapeurs, qui favorise l'émission des rayons lumi- neux au détriment de celle des rayons obscurs, cette incandescence est plus avantageuse au point de vue du rendement que celle du charbon : aussi descend-on à des consommations spécifiques extré- mement faibles, 0,02 watt environ par lumen. Parallèlement à ces recherches sur l’are s'effec- tuent des recherches analogues sur les lampes à incandescence : la lampe Nernst a élé la première tentative, réellement couronnée de succès, de substi- Lution au charbon d’autres corps rayonnants; ces corps sont des oxydes métalliques, ou conducteurs de 2° classe, qui sont sensiblement isolants aux températures ordinaires, et ne deviennent conduc- teurs que lorsqu'ils ont été préalablement chauffés. Dans une autre voie, on a cherché à substiluer au charbon des métaux à grand pouvoir réflecteur, qui utilisent mieux que le corps noir l'énergie rayonnée; on se souvient que, bien avant la lampe à incan- descence à filament de carbone dans le vide, on avait songé à utiliser le platine; mais le point de fusion de ce métal était encore trop bas pour en utiliser convenablement l’'incandescence ; toutes les recherches récentes ont été dirigées en vue de .trouver un métal rayonnant plus réfractaire encore que le platine : la lampe à osmium de Auer, la lampe à tantale de Siemens et Halske rentrent dans cette catégorie; on sait aujourd'hui préparer le tantale sous forme de fils étirés de cinq cen- tièmes de miliimèlre de diamètre, qui peuvent être portés dans le vide à une température fort élevée sans fondre : dans ces conditions, la consom- mation s'abaisse à 1,5 watt par bougie. A cause de la grande conductibilité du métal employé, le filament de ces lampes doit avoir une longueur très considérable (650 millimètres pour une lampe de 25 bougies et 110 volts) et être replié en zigzag pour tenir dans une ampoule ordinaire. Enfin, nous devons signaler une lampe toute récente, due à M. Canello, et qui présente le plus grand intérêt : elle se compose d'un filament formé d'oxydes alcalino-terreux, et recouvert d'une mince couche d'osmium métallique : elle participe donc à la fois de la lampe Nernst et de la lampe Auer. Telle est la vue d'ensemble que je désirais donner sur les développements actuels de l'Élec- trotechnique ; deux caractères essentiels s'en dégagent la tendance constante vers la grandeur des résultats et vers la simplicité des moyens d'action; grandeur et simplicité, ce sont aussi les caractères des sources d’où tout est sorli, je veux dire des immortelles découvertes d'Ampère et de Faraday. Paul Janet, Professeur à l'Université de Paris, Directeur du Laboratoire central et de l'Ecole supérieure d'Electricité 12* 558 A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE LES IDÉES ACTUELLES SUR LA CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE Chaque fois qu'en Chimie surgit une théorie nouvelle ou une explication nouvelle d'un fait expérimental connu, il est rare qu’elle soit adoptée sans conteste. L'opposition qu'elle rencontre sus- cite des travaux et des recherches dont la science tire profit, et ia discussion, parfois très longue, prend fin lorsqu'une expérience décisive vient lever tous les doutes. Il peut alors être intéressant de jeter un coup d’æil en arrière el de résumer les phases successives du débat. A ce point de vue, il n'est pas de question plus captivante que celle de la constitution des matières colorantes, en particulier de celles qui se ratta- chent au triphénylméthane. L'histoire de leur constitution remonte, pour ainsi dire, à l'époque de la découverte des colo- rants synthétiques. C'est, en effet, en 1856, année même où Perkin découvrit la mauvéine, que Nathanson signala la formation du rouge d’aniline. L'application pratique de cette observation re- vient tout entière à des chimistes français, qui surent donner à cette industrie naissante une impulsion remarquable. C'est alors qu'apparais- sent coup sur coup : la fuchsine de Verguin, le violet impérial et le bleu de Lyon de MM. Girard et de Laire, le violet de Paris de M. Lauth, le vert méthyle de MM. Lauth et Baubigny, etc. Dès 1862, Hofmann avait déterminé la compo- sition de la fuchsine industrielle, obtenue par oxvdation de l'aniline commerciale, et avait trouvé quelle constitue le chlorhydrate d'une base C°H'*Az?.H°0, qu’il appela rosaniline. La formation d’un composé en C”, en parlant de l'aniline qui renferme C?, s’expliquait difficilement. Au contraire, lorsqu'on eut remarqué que l'aniline pure, aussi bien l’aniline préparée industriellement par Nicholson à Manchester que celle qu’on extrait de l’indigo, est absolument incapable de fournir du rouge, mais qu'elle en fournit quand on y mélange de la p-toluidine', Hofmann crul pouvoir inter- préler la réaction par l'équation : CSHS.AZH? + 2 (C'H°)AZH® + Of — C#HAA7%0 + 2H°0. Cette équation devint insuffisante lorsque M. Coupier, industriel de Poissy, annonça le fait de la formation d'un rouge de toluène par oxydation de loluidine absolument exempte d'aniline. Gette toluidine était préparée au moyen de loluène pur ‘ La seule alors connue, par un procédé identique à celui qui permettail d'obtenir l’aniline en partant du benzène pur. Comme on savait que la paratoluidine, oxydée seule, ne fournit pas de matière colorante, le fait annoncé par M. Coupier parut tellement intéres- sant que la Société industrielle de Mulhouse char- gea M. Rosenstiehl de répéter l'expérience. Dans un remarquable Mémoire, M. Rosenstiehl non seu- lement confirma la découverte de Coupier, mais en donna, de plus, l'explication rationnelle, en démon- trant que la toluidine commerciale est un mélange de paratoluidine, déjà connue, et d’un isomère liquide, la pseudo-toluidine ou orthotoluidine ‘. Le rouge de Coupier provenait donc de l'oxydalion simultanée de l’ortho et de la para-loluidine, tandis que le rouge de Hofmann provenait de l'oxydation du mélange d’aniline el de para-toluidine. Ces rouges élaient-ils identiques, et étaient-ils, de plus, identiques avec le rouge commercial résul- tant de l'oxydation du mélange d’aniline et des toluidines isomères? Telle est la question qu'on se posait alors. Il était difficile d’y répondre, car on n'avait encore que des idées très vagues sur la constitution de la fuchsine. Tandis qu'Hofmann était plulôl enclin à la considérer comme un azoïque, Kékulé admettait pour elle la formule d’une triamine cy- clique : CSHS — A7H — CSHS — CH° CSHS — CH° Le fait le plus important qu'il convient de noter, c'est celui signalé par Caro et Wanklyn?. Ils démon- trèrent que le produit de l’action de l'acide nitreux sur la rosaniline, déjà préparé par Hofmann et par Paraf et Dale”, est un vérilable diazoïque possé- dant toutes les réactions des diazoïques de Griess. En particulier, ce composé, bouilli avec l’eau, perd son azote et fournit un produit très voisin de l'acide rosolique, préparé par Kolbe et Schmidt au moyen du phénol et de l'acide oxalique*. Ainsi se trouve établie la relation qui relie l'acide roso- lique à la fuchsine, relation rendue encore plus évidente par les travaux de Caro et Gracbe ”. 1 Ann. de Ch. et Phys., 1872, p. 189. ? Proc. Roy. Soc:, &XW, p: 210: # Berichte, t. X, p. 1016. * Liebig's Ann., t. CXIX, 160. 5 Liebig's Ann., t. CLXXIX, 184. EE RELE CT I. — LA FORMULE DE£ FiscHER-NIETzKi. Les recherches classiques de Caro et Graebe sur les - quinones les avaient conduits à représenter l'acide rosolique par une formule quinonique et à admetlre, de plus, que la fuchsine constitue l’imine correspondant à cette quinone : CH?.C°HS.AzH ( CH?.C‘H*,0 ) AzH®.CSHS OH.CSu* ; CHE.C9H4,0 Ÿ Acide rosolique. CH°.C°H*.AzH Rosaniline. Cette formule n'expliquait pas la faculté que | possède la fuchsine de donner si facilement un dérivé diazoïque. MM. E. et O. Fischer, qui s'occu- paient alors des hydrazines, furent amenés à étudier le diazoïque de la fuchsine, ce qui les conduisit à leur remarquable travail sur la constitution de la fuchsine et de l'acide rosolique *. La rosaniline, traitée par les réducteurs, fournit une base dont les sels sont incolores et qui, pour cela, est désignée sous le nom de /eucaniline. Celle-ci, diazotée, puis bouillie avec l'alcool, con- duit à un hydrocarbure CH”, dont la synthèse a établi la constitution : c'est le diphényltolylmé- thane. . Au contraire, si l'on soumet au même traitement la leucaniline provenant de l'oxydation de la p-tolui- dine en présence d’aniline, qui a été appelée para- leucaniline, on arrive à un hydrocarbure différent, le triphénylméthane C°H". Sa synthèse, faite par Kékulé et Franchimont au moyen du dichlorure de benzyle et du mercure-diphényle, établit sa cons- titution *. Après avoir montré par la méthode de dégrada- tion que le carbure fondamental de la para-fuch- sine est le triphénylméthane, MM. Fischer ren- dirent leur démonstration complète en remontant de l'hydrocarbure à la matière colorante. En effet, le triphénylméthane, traité par l'acide nitrique, donne un dérivé trinitré, dont le carbinol fournit par réduction successivement la para-rosa- niline, puis la para-leucaniline : CH(C'H5) —> C(CH*:Az0°) —> C.(CH*.AzH°} | OH OH 1 iphénylméthane. Trinitrophényl- Triamido-triphényl-car- carbinol. binol ou p-rosaniline. C(CSH*.AzH°} | N. H D p-leucaniline. Quant à la fuchsine commerciale, elle renferme, à la place d'un noyau benzénique, un noyau tolué- ! Liebig's Ann.,t. CXCIV, 285. 2 Birichte, t, V, 906. A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE ! | 299 nique. C'est donc l'homologue supérieur de la para- fuchsine. Cette notion des fuchsines homologues a été développée par les belles recherches de MM. Ro- sensliehl et Gerber‘ et de M. Noelting. Il en résulte donc que la fuchsine commerciale n'est pas identique à la para-fuchsine obtenue à l’aide de | l’aniline et de la p-toluidine. L'équalion de Hof- man doit donc être modifiée ainsi : 2(C5H5. AzH®?) + C'H7AzH° + Of = C!°H!7Az%0. H°20 + 2H°0, pour expliquer la formation de la p-rosaniline, tan- dis que l'équation : CSHSAZH® + C'H7AZH? + CHAZH® + O$ Ortho-toluidine p-toluidine. — C*H°470.H20 + 2H°0 explique celle de la rosaniline commerciale. Une autre conséquence, c'est que les dérivés phénoliques provenant de la décomposition, par l'eau, des diazoïques de la rosaniline el de la p-rosaniline doivent être différents. Le premier correspond, en effet, à l'acide rosolique obtenu en oxydant le mélange de phénol et de crésol, et le second est de l’aurine, qui se prépare au moyen du phénol pur. L'acide rosolique est donc l'homo- gue supérieur de l’aurine. On comprend maintenant le rôle capital joué par la para-toluidine dans la formation du rouge ou de l'acide oxalique dans le préparation de l’aurine. Ils ont tous deux pour but de fournir le carbone central du triphénylméthane. Enfin, une conclusion s'impose : c'est que forcé- ment, parmi les trois groupes amidés, au moins J'un est en para. Les recherches ultérieures de Fischer*, et de Graebe et Caro‘, confirmées par les nombreuses synthèses effectuées depuis, ont démontré que les trois groupes AzH° occupent tous la position para vis-à-vis du carbone méthanique. La formule de constitution de la para-rosaniline est donc : La p-fuchsine et, d'une manière générale, les fuchsines, qui, seules, sont colorées, résultent de la combinaison des rosanilines avec un acide, avec élimination d’une molécule d’eau. Tous les sels des fuchsines sont exempts d'oxy- 1 Ann. Chim. et Phys. (5), t. VII, p. 116. 2 Berichte, t. XXIIL, 2204. 3 Berichte, t. XI, 1348. 560 A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE gène (sauf, naturellement, celui qui est contenu dans la molécule de l'acide). La manière la plus simple, pour MM. Fischer, de concevoir ce départ d’eau de la molécule des carbinols au contact des acides, c’est de supposer qu'il a lieu entre l'oxhydrile carbinolique et un groupe amidé : (AzH?.CSH#}C.CSH#.AzH? — H?0 he = (AzH?.C°H#}2C — CH — AH. L'aurine, qui est l’anhydride du trioxytriphényl- carbinol, sera : (OH. CH C — CH — 0, (ESS et la p-fuchsine, qui est un chlorhydrate, devra être écrile : (AZH2 CH CE CHE Re Parmi les nombreux composés du carbone, il y en a fort peu qui soient colorés. On a expliqué leur coloration en l’attribuant à la présence, dans leur molécule, de groupements atomiques spé- ciaux. Cette conception ingénieuse est due à M. Witt°. Si l’on considère les composés suivants : le nitro- benzène, le nitrophénol, la p-nitraniline, l'amido- phénol, la p-phénylène-diamine et l’hydroquinone : A20° Az0° AzH° CH. Az0?, Ce ONCE CRU AIRGNE OH AzH® OH (1) @) Pot) (1) AzH° OH CH et He \ AzH° OH (5) (6) seuls (2) et (3) sont colorés. Comme le nitrobenzène n’est pas coloré, on doit en conclure que c'est l’as- sociation des groupes AzO* et OH, ou AzO* et AzH”, qui provoque la coloration. Le complexe C'H°.Az0° qui leur est commun est dit chromogene, le groupe AzO‘estle chromophore; quant aux groupes AzH° et OH, qu'il faut intro- | duire dans la molécule chromogène pour faire apparaitre la coloration, ils sont dits auxochromes. Une des fonctions chromophore les plus répan- dues est la fonction quinonique. La quinone était | représentée au début comme un peroxyde : C1) O — CH — 0 ou HC CH ESS nel Jen C—— 0 ! Friscner et Scamipr : Zeitschr. f. Farben-u. Textilchemie, 1904, p. 4. ? Berichte, t. IX, 522. Si l'on rapproche la formule de la fuchsine et de l'acide rosolique de MM. Fischer de celle de la qui- none, on constate une analogie parfaite : CG — CH#— AzH.HCI, ŸC— cons — 0. JÉSPIERE AT | Eee © | Plus lard, lorsque, par suite des travaux de M. Fittig, on a été amené à considérer la quinone comme une dicétone à doubles liaisons alipha- tiques : CHACH DC C0 CH CH la formule de Fischer fut modifiée en conséquence par M. Nielzki. Dès lors, si l’on admetavec M. Witt la fonction chromophore des liaisons quinoniques, on trouve réunies dans la fuchsine et dans l'acide rosolique toutes les conditions pour que ces corps soient colorés. Ils renferment les chromophores : > "C'HS-A7H Net > : CHF: 0 en même temps que des auxochromes AzH° et OH; par conséquent, leur coloralion intense se trouve expliquée. If. — LA FORMULE DE M. ROSENSTIENL. Dans une longue suite de Mémoires, M. Rosens- tiehl s'est élevé contre cette manière de voir!. Il explique la formation des sels colorés des carbinols par l'éthérification du groupe hydroxyle : (AzH®.CSH#$ = C.OH + HCI — H°O + (AzH°.CSHt) = C.CI: p-rosaniline. p-fuchsine. Les arguments de M. Rosensliehl peuvent être classés en deux catégories : ceux, en quelque sorte, de nature exclusivement théorique, et ceux qu'il déduit de l'expérience. Nous allons les examiner successivement. Les arguments théoriques ont souvent le tort de perdre de leur force au fur et à mesure que nos connaissances s'élargissent. Ainsi, il est incontes- table que le retour au carbinol, dans le traitement du violet crislallisé par la soude, se trouve expli- qué d'une manière beaucoup plus simple par la formule de M. Rosenstiehl que par celle de MM. Fischer-Nietzki : ((CH:}: Az. CH4}—C. C1 Le : NaOH=NaC )H. (EH: Ar, CHH 4 GC: A (OH Ne A tEBIRe è Cl Avec celte dernière, il faut nécessairement faire 1 ‘ Bull. Soc. chim., (1893), p. 117; V1894), p. 213; (1896), p. #52: t. IX, p. 838. tete dt. des LL ag he db LE co A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DO TRIPHÉNYLMÉTHANE intervenir une transposilion moléculaire. A l’époque des travaux de M. Rosenstiehl, ces phénomènes étaient encore considérés comme des exceptions. II n'en est plus de même aujourd'hui, où l’on connaît un très grand nombre de transpositions parmi lesquelles celle d'un simple groupe hydroxyle est une des moins compliquées. De même, s’il y avait alors « un défaut de logique évident à admettre, pour une base, une autre cons- titution que pour ses sels», ce défaut n'existe plus actuellement. On connait des classes entières de composés qui n’ont pas la même constitution quand ils sont à l’état libre et quand ils sont à l’état de sels. Tels sont, par exemple, les dérivés nitrés, les dérivés cétoniques, les dérivés nitrosés, etc., corps désignés précisément, à cause de cette propriété, sous le nom de pseudo-acides ou pseudo-bases. Enfin, pour M. Rosenstiehl, il n’est pas nécessaire de faire intervenir des liaisons quinoniques pour se rendre compte de la coloration des fuchsines. Considérons la p-leucaniline qui est : (AzH?. C°H*°CH. Pour M. Rosenstiehl, la p-fuchsine, c’est de la leucaniline où l'atome d'hydrogène du méthane est remplacé par Cl; il peut être également rem- placé par Br, 1, SO*H, etc. Comme le triphénylchlo- rométhane est incolore, il faut alors admettre que c'est l'introduction des groupes AzH? en para qui produit la coloration. Mais si, au lieu de la leucani- line, on considère le trinitrotriphénylméthane : (AzO®.CSH*ŸCH, M. von Richler a constaté qu'il donne avec les alcalis une coloration bleue, qu'il suppose due à la formation du sel sodique : (AzO*. CH‘) .CNa. Il semble done, pour que le corps soit coloré, - qu'il faille que le radical introduit dans les noyaux benzéniques ait une fonction chimique opposée à celui qui est substitué au carbone méthanique. La coloration aurait alors sa cause dans une dissymétrie fonctionnelle. Cette règle n'a rien d’absolu : d'abord, parce que le sel sodique bleu de Richter est purement hypothétique et n’a jamais été isolé; ensuite, parce que, d’après ce qui vient d'être dit, on devrait s'attendre à ce que le cyanhy- drate de rosaniline soit coloré. Il a bien la consli- tution : (AzH°.CsH*)°C.CAz, car il a été transformé … par MM. Fischer et Jennings en triphénylacétoni- trile*, et pourtant il est incolore. L'argument le plus sérieux invoqué par M. Rosens- tiehl est celui de la formation des polychlorhydrates des rosanilines, qui repose sur des données expé- rimentales très précises. Si l'on admet la formule de M. Rosenstiehl, on ? RosexsrienL : Bull. Soc. chim., t. XXXIII, p. 342 et 426. = Berichte, t. XXVI, 2221. 561 voit que la fuchsine renferme encore rois groupes amidés libres; elle doit done pouvoir fixer trois molécules supplémentaires d'hydracides pour don- ner un tétrachlorhydrate de rosaniline’. Au con- traire, avec la formule de constitution admise par M. Nietzki, qui ne possède plus que deux groupes amidés, la limite de saturation doit être atteinte | quand la fuchsine aura fixé 2HCI de plus, pour donner seulement un trichlorhydrate (IL): CSH, AZH°. HCI CI1.C(CSH*.AzH°.HC1) C= C°H#"A7H> HO. CH! : Az. HCI (1) (11) L'expérience démontre, en effet, que l'acide chlor- hydrique se fixe sur ces molécules pour donner, comme le veut la théorie de M. Rosenstiehl, un tétrachlorhydrate de rosaniline. Cette constatation, qui semblait décisive, a beau- coup perdu de sa valeur depuis que M. Miolati à montré que la p-leucaniline elle-même CH (C°H”. AzH?)} peut également saturer quatre molécules d'HCI. Ce résultat, d’abord contesté par M. Rosens- tiehl, a été confirmé récemment par MM. O. Fischer et Schmidt*, qui ont montré, de plus, que l'hexa- méthylparaleucaniline peut aussi fixer quatre HCI, de même que la leuco-base du vert malachite, le tétraméthyl-diamidotriphénylméthane, en fixe trois. On ne peut évidemment pas invoquer ici l’éthérifi- cation du groupe carbinolique qui est absent. III. — LES FUCHSINES SONT DES CORPS NON SATURÉS. A la vérilé, un fait dont on n'avait pas tenu compte dans les expériences précédentes, c'est que la quantité d’acide chlorhydrique fixée dépend beaucoup de la température. Si la rosaniline absorbe 4 HCI à la température ordinaire, elle en absorbe davantage quand la tem- pérature est plus basse. Dans une série de Mémoires tout récents, M. Schmidlin a décrit les trichlorhydrates d’un cer- tain nombre de fuchsines, qui constituent ce que l'on peut appeler les sels normaux, d’aprèsla théorie quinonique. Ces sels, qui forment des cristaux noirs, traités par HCI, HBr, absorbent ces gaz en quantité d'autant plus grande que la température est plus basse. Il se produit, en même temps, des changements de coloration des plus intéressants. Ainsi, le trichlorhydrate de p-rosaniline absorbe à la température ordinaire 2 HCl en devenant rouge; à — 70°, il fixe de 3 à 4 HCI et devient orangé ; enfin, dans l'air liquide, la quantité totale d'HCI absorbée ! Berichte, t. XXNIII, 1696. 2 Zeitsch.f. Farben u. Textilchem., 1904, p. 1. 62 A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE par la rosaniline est de 8 molécules. Le corps est alors tout à fait incolore *. Ces phénomènes sont reversibles, car, si on laisse s'élever la température, le corps blanc passe par tous les états intermé- diaires et revient au trichlorhydrate noir. L'existence des trichlorhydrates de rosaniline avait déjà été entrevue par Hofmann dès 1862. M. Hantzsch a également décrit le tribromhydrale de l'hexaméthylpararosaniline *. Quant au chlorhydrate blanc, qui renferme 8 HCI, obtenu par M. Schmidlin, des expériences de ther- mochimie et de dissociation le conduisent à sup- poser qu’une des huit molécules se trouve simple- ment à l’état de dissolution solide. S'il en est ainsi, il en résulte que le trichlorhydrate normal peut encore se combiner à quatre molécules d'HCI pour former un heptachlorhydrate incolore. MM. Prudhomme et Ravaut ‘ ont fait voir, il y a déjà longtemps, que les fuchsines sont également capables de fixer l'ammoniac sec en proportion équivalant à peu près à deux molécules de ce gaz. Il étaitintéressant de voir si la quantité d'ammoniac fixée augmente à des températures plus basses. M. Schmidlin a (rouvé que la p-fuchsine absorbe, à — 15°, à peu près 3, 9 molécules de AzH° en de- venant presque blanche, et que le violet cristal- lisé, qui est son dérivé hexaméthylé, absorbe à — 23° exactement 4 molécules de AzH° en donnant un corps parfaitement blanc. Ces composés ne sont autre chose que des produits d’addition, car, dans le vide, ils perdent leur ammoniac et régénèrent le corps primitif. Enfin, les fuchsines sont également capables de donner des produits d'hydralation incolores. Ainsi, M. Schmidlin a préparé un trichlorhydrate de la rosaniline, homologue de la rosaniline ordinaire {qu'il appelle rosaditoluidine), lequel est incolore. Il renferme de l’eau, et, à 509, il perd quatre molé- cules d’eau pour régénérer le trichlorhydrate noir. Demême,MM.Lambrechtet Weil'ontdécritun chlor- hydrate de rosaniline incolore : C?H?'Az*O.2HCI + 3H°O, et un oxalate incolore du vert malachite : CH"AZ"0. 2CH°0°—+E 3H°0, qui, tous deux, perdent quatre molécules d’eau quand on les chauffe en donnant les sels colorés. On est donc en droit de considérer ces quatre molécules d’eau, dont dé- pend la nature colorée de ces sels, comme devant intervenir dans la constitution intime de la molé- cule. Ces résullats concordent pour montrer que les sels colorés sont susceptibles de fixer quatre molé- cules, soit d'acide chlorhydrique, soit d’ammo- 4 C. R., t. CXXX VIII, 1508. ? Berichte, t. XXXIII, 752. 3 Bull. soc. chim., t. IX, 710. 4 Berichte, t. XXXVIIL, 3058 et +326. niaque, soit d’eau, pour donner des produits d'ad- dition incolores. Tout se passe comme si, dans la molécule des sels, il y avait encore quatre doubles liaisons aliphatiques libres. Or ces faits, qui s’expliqueraient difficilement avec la formule de M. Rosenstiehl, deviennent naturels si l’on se rappelle que, dans la formule de Fischer-Nietzki, il y a précisément dans le groupe chromophore quatre liaisons aliphatiques : CH— CE à Let C= AzH.HCI. CH — CH/ / Si l’on admet que HCI, AzH°, H°O se fixent sur ces doubles liaisons pour donner un noyau du cyclohexane, le groupement chromophore aura disparu, et l’on conçoit que ces produits d'addition : CH CH "1 | IN sn AO if AE .HCI HCL.AZH%.C'HS C—CK > C TM LT RO ESS nl HCI.AzH. Co | CL CHER soient parfaitement incolores. IV. — La FORMULE DE M. Huco Werx. De l'examen des deux formules en présence, celle de M. Rosenstliehl, qui fait des fuchsines de véritables éthers, et celle de M. Nietzki, qui en fait des sels, on peut tirer un certain nombre de conclusions. Il existe, en effet, entre les éthers et les sels des différences assez notables. Tout d'abord, tandis qu'en général les éthers ne sont pas disso- ciés par l’eau et ne conduisent pas le courant, les sels sont des électrolytes et sont plus ou moins dissociés. On pouvait donc s'attendre à ce que l'étude physico-chimique des fuchsines dût fournir des renseignements uliles. En réalité, les expériences ébullioscopiques de MM. Haller et P.-Th. Muller ‘ ont montré que les fuchsines, en solution aqueuse à chaud, se condui- sent comme des molécules non dissociées. Au contraire, d’après l'étude de la conductibililé de leurs solutions, M. Miolali? a conclu que les fuchsines sont des sels de bases fortes. La conduc-« tibilité de la p-fuchsine à 25° est, pour r — 198, de u — 84,24, et n’augmente que faiblement avec la dilution ; pour v — 1024, elle est de u — 93,27. Ces données montrent que, déjà pour une dilution de y — 198, la dissociation est presque tolale. Une seconde conséquence très importante qui s'impose, suivant que l’une des deux formules est la vraie, est celle-ci. Si la formule de M. Rosens- tiehl est exacte, l'action des alcalis sur la fuchsine,; 11C. R,,t. EXX, p. 410. ® Berichte, 1. XXVIII, 1696. A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE 63 qui fournit le carbinol, s'explique facilement CI. C (CHE. AzH?}° + NaOH — OH.C(CSH*. AzH2} + NaCI. Au contraire, avec la formule de Nietzki, le pre- mier terme intermédiaire doit être ou bien la base ammonium, Où son anhydride : C‘H*.AzH°}° & ou C< , CH. AZI CSH4: AzH2 (OH NGC: AH Mais, avant de résoudre cette question, il con- vient de se demander si la constitution carbino- lique de la rosaniline satisfait à toutes ses pro- priétés. M. Weil! a trouvé que l'atome d'oxygène de ces bases est doué de propriétés spéciales, qui le rapprocheraient plutôt d'un oxygène aldéhy- dique. C’est ainsi qu'il réagit avec l'hydroxylamine, la phénylhydrazine, et qu'il se laisse facilement éthérifier par les alcools *. De plus, les propriétés basiques des rosanilines étant plus prononcées que celles des leucanilines, il faut admettre que le remplacement de l'hydro- gène par OH a augmenté la basicité. M. Weil, pour expliquer ce fait, ne voit pas d'autre possibililé que de représenter la p-rosaniline par la formule d'une base ammonium : (AzH®.C°H*}?C:CSH‘AzH°0H. On comprendrait alors pourquoi la rosaniline décompose les sels ammoniacaux à chaud; mais il resterait un fait que cette formule n'explique pas. C’est que, si l'on dissout une base carbinolique .dans un acide étendu et froid, elle s'y dissout sans coloration; celle-ci n'apparaît qu'en chauffant. Or, il est bien évident qu'avec une telle consutu- tion la couleur doit apparaître immédiatement : (AzH®.C‘H*=C : CH“ : AZH°OH + HCI — H°0 + (AzH°.C°H*ÀC : CSH: : AzH°CI. Tous ces fails se représentent mieux, d'après M. Weil, si l’on écrit la rosaniline comme une base oxydique : (AzH®?. CSH#2C— CH — ia NS 0 Hi - Cette formule n'est plus nécessaire aujourd'hui, - depuis que les propriétés basiques du triphényl- - carbinol ont été mises en évidence par les travaux - de M. Gomberg‘ d'une part, et de MM. Baeyer et Villiger de l’autre. Ils ont démontré, en effet, que … Le triphénylcarbinol, traité en milieu éthéré à froid par HCI sec, se transforme en triphénylchloromé- * Berichte, t. XX VIII, 205. 20. Fiscaer : Berichte, t. XXXIII, 33560. — Fiscer et R. Weiss : Zeitsch. f. Farben- u. Textiléhemie, 1902, p. 1. 3 Berichte, t. XXXV, 2397. thane : la réaction est, en tous points, comparable à l’action de l'acide chlorhydrique sur la potasse : C91F)}?C.OH + HCI — H°0 + (CSHS}C. CI. Les propriétés basiques sont encore beaucoup plus marquées dans Je trianisylearbinol. Si l’on représente la basicité du triphénylcarbinol par 1, la basicité du p-trianisylcarbinol sera, d'après MM. Baeyer et Villiger ‘, représentée par 286. On concoit alors que, si l’on a affaire à du tri- phénylcarbinol dans lequel on a substitué trois groupes amidés, comme c'est le cas pour la para- rosaniline, on arrive à une molécule douée de propriélés extrêmement basiques, sans qu'il soit nécessaire, pour l'expliquer, de lui donner une constitution différente. I ne semble donc pas qu'il puisse subsister des doutes sérieux sur la véritable nature carbinolique des rosanilines *. Voyons maintenant la question de la base, qui, selon la formule quinonique, doit se produire comme terme intermédiaire entre le sel coloré et la base carbinol incolore. V. — LES BASES AMMONIUM DE MM. Hawrzscu ET OSTWALD. C'est M. Georgievics qui, le premier, considérant le précipité rouge qui se forme lorsqu'on ajoute un excès de soude à un sel de rosaniline, formula l’hy- pothèse de l'existence d’une base colorée *. Il y fut amené en étudiant les phénomènes de la teinture de matières chimiquement indifférentes, où doit être exclue toute probabilité d'une combinaison chimique entre la base colorée et la matière teinte. Les expériences de M. Georgievics ont été atta- quées par M. Weil, qui a prétendu que le précipité coloré observé par le premier renfermait de la fuchsine entraînée: il en est résulté une discussion assez longue, qui semble êlre restée stérile *. Une donnée beaucoup plus précise et plus impor- tante est due à Homolka *. Il à montré que l’on peut aisément mettre en évidence l'existence de plu- 1 Berichte, t. XXXV. 3013. ? Depuis la composition de cet article, M. Weil a légèrement modifié son ancienne formule. Pour expliquer les réactions aldéhydiques du groupe OH, il admet que les carbinols ont la constitution : 0 = H CIS) — C7 — 3 == H Berichte, t. XXXNIII, p. 275 3 Monatshefte, t. XVI, p. 4. 4 Berichte, t. XXIX, 1541, 2677, et Berichte, t. XXIX, 2015. 5 Nrerzki : Chimie des matières colorantes organiques, 1901, p. 146. 1905). 54 A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE sieurs bases correspondant aux fuchsines. L’expé- ! tion progressive de la solution, peut être suivie rience réussit mieux avec l'homologue supérieur de la fuchsine commerciale, le chlorhydrate de tri- amidotritolylcarbinol ou fuchsine N. Si l’on traite une solution aqueuse du colorant par un excès d'alcali, il se forme un précipité rouge qui est soluble dans l'éther en jaune orangé. Cette solution élhérée contient une base capable d’absor- ber énergiquement l'acide carbonique pour donner le carbonate de tritolylrosaniline rouge. Au con- traire, si l'on chauffe quelque temps la solution alcaline, la base précédente se transforme en car- binol plus difficilement soluble dans l'éther, en donnant une solution incolore d'où l'acide earbo- nique ne précipite plus rien. Il est probable que la base de Homolka constitue précisément ce produit intermédiaire reclamé par la formule quinonique. C'est ou bien la base ammo- nium ou son anhydride. S'il était possible de préparer une solution aqueuse de celte base colorée, l'étude de sa con- ductibilité devrait montrer le phénomène suivant : comme toutes les bases fortes, la conductibilité au début devrait avoir une certaine valeur dépendant de la concentration de la solution en ions OH, puis, la base se transformant en carbinol non éleclro- lyte, la conductibilité devrait diminuer jusqu'à devenir nulle. Cette expérience directe étant impossible, MM. Hantzsch et Ostwald * ont tourné la difficulté en prenant la conductibilité d'un mélange équi- moléculaire de soude et du chlorhydrate d'une rosaniline, c'est-à-dire du système : A.CI1 + NaOH — NaCI + A.OH. Sel coloré. Base ammonium. Comme les solutions sont diluées, on peut admettre que la double décomposition est instan- tanée et que la conduclibilité iniliale est bien due à la somme des conductibilités des ions : ACL Naï-P'OH!. (L) Or, connaissant les conductibililés des chlorhy- drates ACI, et se rappelant que la conductibilité est une propriété additive des ions, il suffit de retrancher de la conductibilité du sel la conductibi- lité de l'ion CI qui est connue pour en déduire la conductibilité de l'ion coloré A’. Tout étant connu dans la somme (I), on peut calculer la conductibi- lité initiale du système : sel coloré + NaOH. La conduetibilité est, en général, plus petite que la valeur calculée, par suite de l’isomérisation de la base ammonium en carbinol qui ne conduit pas. &elte isomérisalion, qui est visible par la décolora- 1 B.,t. XXXIII, 278 et 753, Hanrzsou, B., 317, 3434. | de NaCI, est égale à y pas à pas en étudiant la conductibilité, qui diminue de plus en plus pour atteindre finalement une limite qui est celle de la conductibilité du chlorure de sodium. Ou bien, si on diminue la conduectibilité prise à chaque instant de celle de NaC!, la diffé- rence sera la conductibilité de la base ammonium, laquelle tendra vers zéro. La conductibilité limite du chlorhydrate du violet cristallisé à 25° est de w == 97,6; la conducti- bilité propre de l’anion CI étant à cette température de 70,2, la conductibilité due au cation coloré est 97,6 — 70,2 — 927,4. Connaissant la conductibilité de l'ion coloré, on en déduit celle de la base ammo- nium : CH°;1 [lan cnrs canne | .OH, NGI on lui ajoute la conductibilité propre de l'ion OH, qui està25°de 196, ce qui fait196-L27,4—223,4=vu. On aurait de même à 0° w — 128,2. L'expérience montre que la conductibilité à 25° du système A.CI + NaOH = NaCI + A.OH, diminuée de celle us — 100,05" an02MelERES de 108,3. À 0°, il y a donc encore dans la solu- tion environ 80 °/, de base ammonium; mais cette quantité diminue rapidement, comme le montre la | conductibilité, qui, après soixante minutes, n'est plus que de u— 32 à 25° et u — 67,8 à 0°. Enfin, après quarante-trois heures, elle tombe à 4,3., Pour la pararosaniline, l'expérience à 25° donne: les nombres suivants, après déduction de la conduc- tibilité de Na : L'isomérisalion est beaucoup plus rapide. Ces faits démontrent l'existence des véritables: bases des malières colorantes, dont les rosanilines. ou carbinols ne sont que les pseudo-bases,. Ils sont en contradiction formelle avec la formule de M. Rosenstiehl, d'après laquelle le passage du sel coloré à la rosaniline incolore est immédiat. Quelle peut être la constitution des véritables bases colorées? Lorsqu'on décompose une fuchsine diluée par une molécule de soude, on obtient une solution claire, dont la couleur n’est pas modifiée;, ce n'est que par un excès de soude qu'on obtient le précipilé rouge, d’où l’éther extrait la base de Homolka. Si donc il faut admettre dans la solution neutralisée par NaOH l'existence de la base ammo- nium, la base qu'extrait l'éther en présence d'un excès de soude doit être différente. M. Hantzseh admet que cette base est simplement l'anhydride de la base ammoniée, c’est-à-dire la base quino- nique elle-même : nan au un te LR EE CSH*. AZIF C'H*.AzH° _C'H®. AzH® VA mé / C— C‘H*.A7H° —> C—C'H*.A7H° — C—CSH*.AZH® K NN. NS C‘H': AZI. HCI C°H#: AzH.H°0 CH: : AzH Sel coloré. Base ammonium colorée Base iminte col. soluble dans l'eau. sol. dans l'éther. Cette base iminée, c'est, on le voit, la base hypo- thétique de MM. E. et O. Fischer, modifiée par M. Nietzki. VI. — HäALOCHROMIE ET BASES QUINONIQUES. M. Rosenstiehl avait très justement fait observer, il y a une vingtaine d'années, que le raisonnement de Fischer et Niefzki repose uniquement sur l'exis- tence de ces bases anhydres qui sont purement hy- pothétiques. Les expériences de MM. Hantzsch et Ostwald, tout en rendant l'existence des bases quinoniques rès vraisemblable, n'ont cependant pas tranché la question. Celle-ci ne devait être définitivement élu- cidée que le jour où l’on aurait trouvé le moyen d'isoler et d'analyser les véritables bases anhydres. Cette lacune vient d'être comblée, grâce aux tra- uchsines, et de MM. Bystrzycki et Herbst, dans le ‘cas des aurines. ; Ces deux derniers savants’, en chauffant à 80-200? le p-méthoxytriphénylméthane, ont réussi à lui enlever une molécule de chlorure de méthyle. Le coniposé ainsi obtenu est le diphénylquinomé- hane : IR À C'H° , / 6-CH°.OCH° — CH*CI + CH x C Ne 6H4.( Re CU 10! Le diphénylquinométhane cristallise en lablettes brunes, fondant à 167-168°, et n'est autre chose que le chromogène de l’aurine. L'aurine, d’après Graebe E , est le dérivé diparahydroxylé du pré- OH.C‘H* Dc:cHe:0. OH.C‘H* MM. Baeyer, Villiger et Hallensleben® sont arrivés à préparer facilement le diphénylquinomé- hane, en chauffant lout simplement à 150° le poxytriphénylcarbinol dans un courant d'hydro- gène : Ne 6H 4 - fi 0: CH +0: CH C°HS C.C‘H*, OH = H°0 + ce | C 5 OH … La question de la constitution des aurines peut donc être considérée comme résolue. £ Berichle, t. XXXNI, 2333. > Berichte, t. XXXVI, 2191. vaux de MM. Baeyer et Villiger, dans le cas des | A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE 565 En ce qui concerne les fuchsines, les travaux de Baeyer et Villiger ont pu faire croire à un certain moment que la formule de M. Rosenstiehl allait rentrer en faveur. Voici les considérations qui avaient fait naître ces travaux. En 1900, un chimiste américain, M. Gomberg ‘, cherchant à préparer l’hexaphénylé- thane en déchlorurant le triphénylchlorométhane par un métal, delamême manière que cela a lieu dans les synthèses de Würtz, obtint un composé présen- tant au plus haut degré les caractères d’une com- binaison non saturée. C’est le triphénylméthyle, premier exemple d'un radical isolé à l'état libre : (CH)C.C1 + Me — MeCl + (C'H5)C — Le triphénylméthyle jouit de la propriété de former des sels doubles qui sont colorés ; ainsi, avec le chlorure d'aluminium et le chlorure d’étain, il forme des composés orangés. De plus, si l’on dissout le triphénylchlorométhane dans l'acide sul- furique, il se dégage de l'acide chlorhydrique et on obtient une solution jaune. Kehrmann et Wenzel* expliquent ce fait en supposant que le triphénylmé- thyle, dans ses combinaisons colorées, possède une formule quinonique : l’action de H°SO* s'ex- pliquerait alors ainsi : CH SPES Mn NS ne + CoH5/ | 7 Ces NX CI les deux valences libres étant alors saturées par l'acide sulfurique pour former * : MM. Baever et Villiger, à la suite de leurs études sur les sels d’oxonium, ont été amenés à étudier les sels d’un certain nombre de dérivés oxygénés, en particulier ceux de la dibenzalacétone. La di- benzalacétone se combine aux acides pour donner des sels orangés, rouges ou noirs. Si l'hypothèse de M. Kehrmann dans le cas du triphénylchloro- méthane est appliquée ici, l'isomérisation en le composé quinonique ne pourra se faire que dans le sens : CSH5. CH : CH.CO. CH: CH< ». —+ CSHS.CH : CH.C: CH.CH —< Xe | — OH Mais, si, au lieu de dibenzalacétone, on prend de la dianisalacétone, les sels montrent une colora- tion encore plus intense. Cependant, ici, pour qu'il 1 Berichte, t. XXXIII, 3150. 2 Berichte, t. XXXIV, 3815. 3 GOMBERG : B., t. XXXV, 2397. 566 puisse y avoir une liaison quinonique, il faut qu'il y ait départ d'alcool : (OCH*).C‘H!'.CH : CH:CO.CH: CH: D > COCHE CHHACT : CH.CO.CH : C:€ {+ cH°oH. L'expérience montre que l'alcool reste dans la molécule et que, de plus, en décomposant ces sels colorés par l’eau, on régénère le corps primitif. Si on répète l'expérience de Kehrmann et Wenzel avec le trianisylchlorométhane, on a encore des solutions colorées et des sels doubles colorés, sans qu'on puisse constater le départ d'alcool: la formule quinonique se trouve done exclue. Le fait de donner des composés colorés est donc une propriété inhérente à la molécule, propriété désignée sous le nom d'halochromie. L'halochromie augmente avec la basicité des molécules; ainsi le triphénylcarbi- nol est halochrome; le trianisylcarbinol (para), qui est environ 300 fois plus basique, est beaucoup plus halochrome ; ses sels sont plus colorés. Le trianisyl- carbinol, traité par HCI en milieu éthéré, donne un précipité rouge qui, séché dans le vide, devient blanc en perdant HCI; il a alors la composition du trianisylchlorométhane; remis en contact avec HCI, il redevient rouge. On peut alors concevoir jusqu’à un certain point que l'introduction, dans la molécule, déjà halo- chrome, du triphénylcarbinol, de groupements basiques comme AzH”, Az(CH'} produise des corps donnant avec les acides des sels colorés, sans pour cela faire intervenir des liaisons quinoniques. C'était revenir à la formule de M. Rosenstiehl. MM. Baeyer et Villiger, ayant pu si facilement transformer le p-oxytriphényl-carbinol en diphényl- quinométhane, cherchèrent à faire la même chose avec les dérivés amidés. Ils se proposent, d’ailleurs, de continuer l'étude de l'halocromie, qu'ils ont momentanément abandonnée. Le p-amido-lriphénylcarbinol, chauffé vers 300°, donne un anhydrodérivé, qui s'obtient beaucoup plus facilement en traitant le picrate du carbinol par la pyridine. Le composé ainsi obtenu est cris- tallisé, mais est incolore, et possède un poids moléculaire double. C’est un dimère du produit cherché. Les autres essais effectués sur les amido_ carbinols, comme la p-fuchsine, la fuchsine, ont montré que ces bases, chauffées vers 200° dans un courant d'hydrogène, perdent une molécule d’eau en donnant des corps colorés présentant bien la composition des bases quinoniques cherchées C°H'Az' el C'H"Az'; traitées par HCI, elles régé- nèrent quantitativement les sels dont on est parti”. L'expérience ne devait devenir convaincante qu'à 1 JENNINGS : B., t. XXXVI, 4022. À. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE partir du moment où les corps de ce genre seraient isolés à l’état cristallisé et pur. { MM. Baeyer et Villiger sont parvenus récemment à isoler les dérivés phénylés à l’état de pureté parfaite. Pour leur nomenclature, on part du diphénylquinométhane, que les auteurs appellent fuchsone; le dérivé anhydre du p-amidotriphényl= carbinol sera la fuchsonimine : CSS CH CSS C‘n C'H°. C'H 4 ve x 4 1 1 I Z NX PEN | (00 / , S ] il O0 AzH A7 CSHE Diphénylquinométhane Fuchsonimine. ou fuchsone. Fuchsonephénylimines Pour préparer le p-phénylamidotriphénylearbi nol, on part du mono-anisyldiphénylchloromés thane, qu'on traite par l’aniline; il se fait l’anilide® OCHP. CHA, >. Az. C°H5, (ces 7 qu'il suffit de chauffer ensuite avec l'acide ben zoïque pour lui enlever une molécule d'alcool, em même temps qu'une transposition moléculaire donne le composé suivant : CHHPRNGUHE KZ C L [ CSA A7 CHE la phénylimide du diphénylquinométhane ou fuel} sonephénylimine. I cristallise en prismes rouges fondant à 133-138°; il se combine à l'eau en pré sence des acides dilués en donnant le carbinol inco lore, qui, avec les acides concentrés, régénère le sels colorés. Ce sont donc les vérilables base colorées, dont l'existence avait été démontrée p les expériences de Hantzsch et Homolka. S'il n'a pas été possible non [plus à MM. Baeye et Villiger d'isoler la base d'Homolka à l’état eri lallisé, ce résultat a été obtenu dans le cas de son, dérivé triphénylé, qui constitue la base du bleu d'aniline, et dans le cas du dérivé diphénylé dt diamidodiphénylméthane, la base du vert de 15 dine. Ces produits ainsi préparés : la p-phénylamido= fuchsonephénylimine : \ EH . AzH.C‘HS CSH5.C Nc : AZ. C'H® et la diphénylamido-fuchsonephénylimme e 1 B.,t. XXX VII, 597. A. WAHL — CONSTITUTION DES MATIÈRES COLORANTES DU TRIPHÉNYLMÉTHANE 07 CSS. AzH. COS COS. AzH. SH. C£ CS : Az. CSI feuillets noirs fondant à 168°, et des cristaux noirs - peu solubles fondant à 237-238°. Ils possèdent - toutes les propriétés qu'on peut altendre de cette » sorte de composés. | | | constituent respectivement des aiguilles ou des Ces produits constituent véritablement les subs- tances mères des malières colorantes du groupe - des fuchsines; leur existence est nécessaire avec la conception de MM. Fischer-Nietzki; elle serait, au contraire, inexplicable par la formule de M. Ro- sensliehl. VII. — FORMULES DIVERSES ET PHTALÉINES. Dans ces derniers temps, on a voulu aller plus - loin; on ne s'est pas contenté d'expliquer la diffé- rence qu'il y a entre la fuchsine colorée et les car- binols incolores; on a cherché à donner l’explica- tion de certains phénomènes secondaires. D'abord, on à cherché à se rendre compte des différentes coloralions qui se manifestent quand on ajoute un excès d'acide aux fuchsines. Si, à du violet crislal- lisé, on ajoute de l'acide chlorhydrique, la solution devient verte, puis jaune. Il s'en suit que la satu- ralion successive des groupes amidés exerce une action sur la propriété chromogène de la molécule. Les trois groupes amidés doivent done tous être en relation étroite avec le chromophore. M. Georgievics admet que tous les atomes d'azote sont unis entre eux. Comparons alors le violet erislallisé au vert malachite : C‘H4: Az (CH) C‘H: Az(CH°)° 7 71 C— C‘H+. Az(CH® C— CSH:. Az/CH°} 2 SSARMEN CSH*.Az(CH°}° CHENE k Violet cristallisé. Vert malachite. Si l’on ajoute au violet cristallisé une molécule 'HCI, cette molécule va créer une salification d'un azote, va rompre sa liaison avec l'azote voisin, et lou aura : CSH::Az(CI°) 7/4 | C—C°H. Az (CU) CI C‘H*.Az(CH:}° #4 NS L H CI | formule que l'auteur compare au vert malachite. - Il en déduit une explication de ce que les deux composés sont verts, puisqu'ils renferment le _ même groupement chromophore et qu'ils appar- tiennent, par suite, à la même série. Il semble beaucoup plus simple d'expliquer ce fait autrement, si nous nous rappelons que, par { exemple, la p-nitraniline, qui est jaune, ou la nilro- P 1 J diméthylmétatoluidine, qui est rouge, possèdent des sels qui sont parfaitement incolores, suscep- tibles de n’exister, d'ailleurs, qu’en l'absence d'eau. La coloralion, d'après Wilt, est due à l'introduction de groupes salifiables auxochromes AzH°, Az(CH°}, ou même OH, dans la molécule chromogène C'H°Az0*. Dès qu'on neutralise ces auxochromes par un acide, dans le cas des groupes azotés, ou si l'on éthérifie OH par un radical organique, leur fonction disparait et leur influence est annulée. Si l'on admet que, dans le violet cristallisé, la nouvelle molécule d'acide sature l’un des groupes Az(CH*), c'est comme s'il n'existait plus, et la molécule est comparable au vert malachite, qui ne renferme plus que deux groupes diméthylamidés. Enfin, M. Schmidlin, en se basant sur des données thermo-chimiques, parait arriver à une formule semblable à celle de M. Georgievics. Il a étudié au calorimètre le phénomène de la dissolu- tion des rosanilines dans les acides et a reconnu qu'il se compose de deux phases. Dans la première, il y a formation d’une solution incolore avec déga- gement de chaleur; puis, au bout d'un certain temps, il y a coloration progressive accompagnée d'absorption de chaleur. D'après M. Schmidlin, le composé dans la première phase incolore est le dérivé du tétraoxycyclohexane, qui existe dans les sels incolores hydratés des rosanilines. C'est ensuite la déshydratalion spontanée qui produit la colora- tion. M. Schmidlin croit devoir, pour l'explicalion de ces phénomènes, attribuer à la fuchsine la for- mule assez compliquée : AzCI AN PT | ) Ke NX COMEN He H Ÿ 7/1 2 CA HAE De On peut également ranger parmi les dérivés du triphénylméthane des malières colorantes qui ont acquis un intérêt considérable et connues sous les noms de phtaléines et de rhodamines. Les premières résultent de la condensation de l’anhydride phtalique avec les phénols, et les secondes résultent du remplacement, dans cette réaction, des phénols par les méta-amidophénols. La phénolphtaléine, la phtaléine la plus simple, possède la constitulion : /C‘H°.OH C S C9. OH : 1e CA co elle se dissout dans les alcalis avec une coloration 568 D' À. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L’ACIDE PHOSPHORIQUE rouge intense. On a admis que la coloration de ses sels provient précisément de la formation d'une liaison quinonique, qui apparaît quand, en milieu alcalin, la chaine lactonique se trouve rompue. Dans ses sels, la phénolphtaléine réagit sous sa forme tautomérique : GSHs :O QE. ON con Nosni:0 CooH De même, dans le cas des rhodamines provenant des dialkylmétaamidophénols, les sels, doués d'une coloration rouge magnifique, possèdent très pro- bablement une formule quinonique : C°H°. Az (CH) >0 7 CH \CHS:Az (CH: , SCOOH M. Bernthsen a, en effet, démontré la présence d’un groupe CO?H susceptible d’être éthérifié simple- ment par les alcools et les acides. Ces éthers sont désignés sous le nom d’anisolines et présentent un grand intérêt au point de vue linctorial. PHARMACOLOGIE DE L’ACIDE PHOSPHORIQUE PREMIÈRE PARTIE : ACTION DIGESTIVE Si l’on consulte les traités classiques de Thérapeu- tique — celui de Manquat, par exemple — à l’article « Acide phosphorique », on constate que son aclion caustique en solution concentrée est à peu près seule mentionnée; son action générale en solution diluée est à peine signalée, seulement en quelques lignes et sous les seules références d'auteurs déjà anciens (Rabuteau, Andrews, Burdach, elc.). En fail, jusqu'à ces dernières années, l'acide phosphorique était à peu près inemployé en Thérapeutique; il commence à l'être un peu plus, et nous le croyons appelé à un grand avenir : c’est ce qui nous déter- mine à lui consacrer ici cette étude. I. — INTRODUCTION S 1. — Historique moderne. Sans remonter très haut dans l’histoire de la Thé- rapeutique, on peut dire que deux hommes ont sur- tout, dans ces quinze dernières années, altaché leur nom à l'étude de cette substance : Jolly, dont le livre sur « les phosphates et leurs fonctions chez les êtres vivants » est peut-être encore, à l'heure actuelle, le travail le plus considérable sur les fonctions physiologiques des phosphates, et VIII. — Conczusrows. Il résulte, de l'ensemble de toutes les réactions que nous venons de passer en revue, que la for- mule quinonique de MM. Fischer-Nielzki permet d'en comprendre aisément le mécanisme. Cette raison suffirait à elle seule pour la faire adopter. Mais, de plus, il est incontestable que, lors da passage d'un carbinol incolore à ses sels colorés, il doit se produire, dans l'arrangement intime des atomes, des modificalions profondes dont nos for- mules doivent rendre compte. Puisqu'il a été nécessaire de représenter par des formules différentes deux corps aussi voisins comme propriétés chimiques que le sont les deux acides lactiques ou tartriques, qui se distinguent uniquement par leur action sur la lumière pola- risée, il est nécessaire, égaiement, de donner des, constitutions différentes à deux composés tels que la fuchsine et la rosaniline, dont l'action sur là lumière naturelle est si manifestement différente‘ A. Wahl, Docteur ès sciences, Préparateur de Chimie à la Sorbonnes Joulie, dont | « Urologie pratique et Thérapeutique nouvelle » n’est, en somme, qu'une étude fortemen documentée sur l'emploi thérapeutique de l'acide phosphorique. En dépit de leur incontestable valeur, ces travaux n'ont pas recu du monde médical l'accueil qu’en espéraient leurs auteurs et ne sont connus que d'un très petit nombre de thérapeutes, estimés d'un plus petit nombre encore. A nous en tenir aux seules raisons d'ordre pu rement scientifique, les raisons de ce relatif dis crédit sont multiples : 1° Les auteurs, pharmaciens et chimistes,ont faib surtout œuvre chimique, et leur thèse a paru, de ce« fait, aux médecins, bien à tort d’ailleurs, d'ordre plus théorique que pratique; 2° Celte impression a été renforcée par la consl tation de l'insuffisance évidente de la documentas thodique, qui se réduisait, à peu près, pour le tra= vail de Joulie, à sa seule auto-observation, d'ailleurs, singulièrement suggestive, mais manifestement D ! Conférence faite au Laboratoire de Chimie organique de la Sorbonne, sous les auspices de M. le Professeur A. Hallers D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE 569 insuffisante à l'édification d'une « doctrine », car c'est à l'exposé d’une véritable doctrine qu'abou- tissent les travaux de Jolly et de Joulie ; 3° Les auteurs, en effet, entraînés par leur sujet, l'ardeur de leur conviction, un désir très légitime de synthèse, ont édifié l’un et l’autre un monument physio-thérapeutique d’une telle ampleur qu'il a paru destiné à abriter la pathologie et la thérapeu- tique presque entières. Les assises chimiques, for- tement établies dans l'ensemble, ontété jugées par les chimistes insuffisantes, hypothétiques en bien des points ; les assises cliniques n’existaient guère qu à l’état de prévisions a priori; de ce fail, l'édifice a semblé à beaucoup une œuvre chancelante, de rêve et d’intentions, beaucoup plus qu'une œuvre solide, de réalité et de faits. L'’ampleur quelque peu pré- somptueuse de l'édifice a fait Lort à sa solidité. C'est à l'étude presque exclusivement clinique de Vaction pharmacodynamique de l'acide phospho- rique que nous nous sommes surtout attaché depuis plusieurs années, et, sans y trouver toujours la con- rmation des opinions des auteurs précités, nous devons reconnaître que nous les avons vérifiées en plus d'un point. L $ 2. — L'acide phosphorique officinal. L'acide phosphorique dontnousavonsusé dansnos recherches est l'acide phosphorique oflicinal, — pré- paré conformément aux prescriptions du Codex, — et renfermant par 100 grammes 50 grammes d'acide phosphorique trihydraté, correspondant à 36 gr. 4 d'acide phosphorique anhydre. Il se présente sous la forme d'un liquide clair, inodore, d'une saveur acide très forte, de la consistance d'un sirop épais, marquant 1,35 au densimètre. Nous ne l'avons jamais employé qu'en solulion très étendue, soit que nous le prescrivions pur en gouttes dans un grand verre de liquide, soit que nous le pres- rivions en solution à 1/20, associé au phosphate acide de soude par cuiller à café dans un grand erre de liquide. Le titre approximatif des solutions ainsi obte- aues variait de 1 à 3 °/. La saveur de ces solutions dans les véhicules habituels — eau, bière, vin, infusion chaude — est l ranchement acide. La sensation constrictive de la muqueuse buccale — due, sans doute, à la soustrac- On d’eau qu'il fait subir à la muqueuse — se dis- Sipe rapidement. L'addition de phosphate acide de Soude PO'.NaH° atténue considérablement l'inten- ité de cette saveur ; elle est tout à fait recomman- le. Dans bien des cas même où l’on aurait des aisons de suspecter la tolérance du patient, il sera bon de tàter cette tolérance par l'administration préalable de solutions de phosphate acide de soude. II. — ACTION DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE EN SOLUTION DILUÉE SUR LES FONCTIONS DIGESTIVES, L'action stomacale et plus généralement diges- tive de l'acide phosphorique en solution diluée doit nous arrêter longuement, car elle constitue une des actions primordiales de cette substance, d'où déri- vent un grand nombre d'actions secondaires. $ 1. — Action antiseptique. 1. Expériences de Spallanzanr. — L'acide phos- phorique — même en solution étendue — possède un pouvoir antiseptique puissant,qu'il partage, d'ail- leurs, avec les autres acides minéraux et organiques, lesquels possèdent ce pouvoir à des degrés divers, Il est intéressant de remarquer que, dès le siècle dernier, Spallanzani avait mis en évidence cette action probablement essentielle de l'acidité du suc gastrique, savoir son action antiseptique. Ses trois expériences cruciales méritent d'être rapportées : 1° Ayant arrosé des morceaux de viande, les uns avec du suc gastrique, les autres avec de l’eau, il constata que les premiers restaient intacts plusieurs jours après que les seconds étaient putréfiés; 2° Prenant l'estomac d'un serpent qui, seize jours auparavant, avait avalé un lézard, il trouva le lézard à peu près digéré, mais ne présentant aucune trace de putréfaction ; 3° Ayant introduit dans l'estomac de différents carnivores (chats et chiens) de la viande corrompue et, de ce fait, odorante, il constata qu’au bout d'un certain temps cette viande avait perdu son odeur de pourrilure. Spallanzani en conclut que le suc gastrique non seulement s'oppose à la putréfaction, mais même peut l'arrêter quand elle est commencée, bref que le sue gastrique jouit de propriétés antiputrescibles. 2. Expériences bavtériologiques contemporaines. — Les expériences bactériologiques n'ont fait que confirmer cette puissance bactéricide et antiputres- cible du suc gastrique. Strauss et Wurtz ont constaté que le bacille d'Eberth et le spirille du choléra meurent après un séjour de deux à trois heures à 38° dans le suc gastrique du chien ou de l'homme, et cela explique vraisemblablement en partie la prédisposition des dyspeptiques au cho- léra et à la dothiénentérie signalée depuis long- temps et vérifiée à nouveau pendant la guerre sud- africaine. Les spores de bacilles charbonneux ne résistent pas, en général, à heure dans le mème liquide. Des cultures de bacilles de Koch ont élé rendues inoffensives par un séjour de dix-huit à trente-six heures dans le suc gastrique d'un chien. Les auteurs précités ont démontré que cette action est bien en rapport avec la fonction un séjour d’une demi- 570 acide du suc gastrique, avec sa teneur en acide chlorhydrique et seulement avec cette acidité, car une solution d'acide chlorhydrique au même litre que la solution gastrique exerce une action anti- septique au moins égale, peut-être supérieure. Cette propriété appartient au même titre aux autres acides minéraux et à la plupart des acides organiques, à l'acide phosphorique et à l'acide lac- tique en particulier. L'expérience précitée de Spallanzani, répétée avec une solulion phosphorique, est des plus démonstratives : nous avons conservé, pendant plus d’une semaine très chaude de juillet, sans apparence de putréfaction, des morceaux de viande baignant dans une solution d'acide phosphorique officinal à 2 °/,,, alors que des morceaux témoins, baignant dans de l'eau distillée pure, étaient mani- festement corrompus, exhalant une odeur de pour- rilure très marquée dès le deuxième jour. 3. Expériences cliniques. — L'expérience cli- nique corrobore en tous points cette action anti- seplique exercée par l'acide phosphorique sur les fermentations gastro-intestinales; elle montre, en effet, que, sous l'influence de l'administration de doses moyennes d'acide phosphorique dilué, il se produit une diminution manifeste des éthers sulfo- conjugués urinaires, produits de la putréfaction gastro-intestinale, et la disparition de l’indican en particulier. Cette constatation constilue la contre- partie des expériences de von Kast, qui montra, au contraire, que, par la neutralisation artificielle de l'acidité gastrique par l'administration de fortes doses de bicarbonate de soude, on obtient toujours une augmentalion parallèle des éthers sulfo-con- jugués. En fait — en clinique — l'administration d'acide phosphorique à doses suftisantes à des malades souffrant de fermentations stomacales, se traduisant — grosso modo — par du ballonnement de l'esto- mac, après le repas, des éructalions nidoreuses ou acides, de la tension abdominale, amène très rapi- dement une atténuation considérable, voire une disparition complète de ces symptômes. C'est un des faits thérapeutiques les plus constants de l’ad- ministration de l'acide phosphorique; — mais encore est-il nécessaire, pour le constater, de l'ad- ministrer à une dose suffisante, variable, d'ailleurs, suivant le sujet, sa tolérance et l'intensité de ces fermentations. Cette action antiseptique stomacale est singuliè- rement favorisée par les mouvements péristalliques, rythmiques, réguliers de l'estomac, par lesquels les ingesta, continuellement brassés, sont amenés en contact immédiatement avec la surface glandulaire. Celte action antiseptique stomacale, en rapport D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE j avec l'acidilé du contenu stomacal, est essentielle, primordiale, hautement spécilique, capitale, car il paraît exister dans les fonctions digestives aucune fonction suppléant cette fonction antisep- tique acide à l'endroit des microbes de la putréfac- tion, et il est inutile d'insister sur le rôle considé- rable de ces putréfactions gastro-intestinales dansla genèse, le développement, la symplomatologie des affections gastro-intestinales, des affections diathé- siques et probablement dans l'évolution générâle L de l'organisme entier vers la dégénérescence sénile. Nous en concluons donc : La fonction acide du suc gastrique lui confère un pouvoir antiseptique relativement considérable à l'endroit des microbes de la putréfaction et de la plupart des microbes pathogènes. . En cas d'insuffisance de cette fonction, se tradui= sant par le développement anormal des fermenta- tions gastro-intestinales, l'acide phosphorique peut pratiquement y suppléer au même titre que l'acide chlorhydrique ou que l'acide lactique. $ 2. — Action peptonisante. L'action peptonisante de l'acide stomacal esi non moins évidente. La pepsine n'exerce son actions peptogène qu'en milieu acide ; il suffit de neutra= liser le milieu par addition de bicarbonate de soude pour supprimer complètement celte action. Nous savons, du reste, que les digeslions artificielles” peuvent être obtenues non seulement avec l'acide chlorhydrique, mais aussi avec les acides phos- phorique, sulfurique, acétique et lactique ; mais la quantité nécessaire varie avec l'acide. S 3. — Action excito-sécrétoire. Mais, quelque intéressante que soit la fonclion peptogène de l'acidité stomacale, elle est certai= nement infiniment moins imporlante que l'en semble des actions qu'elle exerce sur les sécrélions digestives, — action globaïe que l’on peut résumer dans la proposition suivante : Le contact de toute solution acide suffisamment concentrée avec la mu queuse duodéno-jéjunale est T'excitant physiologique normal des sécrétions pancréalique, biliaire, intes=« tinale. Un premier fait définitivement acquis, par les” travaux de Pawlow, Popielski, Gottlieb, est le sui=« vant : L'introduction d'un acide dans le duodénum détermine une sécrétion pancréatique abondante. De même, d'après les travaux de Enriquez, Hal- lion, Fallois, l'introduction d'un acide dans le duo-« dénum détermine une augmentation manifeste, PET % fois considérable, de la sécrétion biliaire. Enfin, Delezenne et Frouin ont montré, sur des: animaux pourvus de fistules inteslinales, que l'in LIVRE CPR D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE oduction d'un acide dans le duodénum déter- tine une sécrétion du suc intestinal dans les arlies sous-jacentes de l'intestin, et la production mouvements péristaltiques dans ces mêmes Le fait que celle excitation sécréloire se produit ême quand la solution acide est mise en contact vec le duodénum isolé oblige à admettre que cette élion est indirecte, soit qu'elle s'exerce par un lécanisme réflexe, soit en vertu d'un mécanisme umoral vraisemblablement essentiel qu'on peut ésumer comme suit : l'acide duodénal engendre, ux dépens d’une prosécréline contenue dans la luqueuse duodénale, une sécrétine qui, résorbée ar les racines du système porte, est entrainée au ie, au pancréas, à l'intestin, et en accélère l'acti- lé sécréloire. L'analyse de ce mécanisme est, physiologique- ent parlant, de la plus haute importance. Au point e vue spécial de notre étude, il nous suffit de rap- eler cette proposition essentielle, savoir : que l’aci- lé stomacale constitue un stimulant physiologique uissant des sécrétions hépatique, pancréatique, testinale. ette fonction excito-sécrétoire appartient à la netion acide en général, et non à tel acide en par- bulier; la plupart des expériences ont élé faites ec l'acide chlorhydrique, mais l'acide lactique, acide phosphorique, l'acide tartrique ont donné ès résultats de même ordre. En l'absence de séries expériences comparatives portant sur la puissance ito-sécréloire de ces différents acides, on n'en t faire état dans son choix; c'est donc iei encore clinique thérapeutique qui devra nous guider. utefois, il résulte des travaux de Pawlow qu'en des aclions excito-sécrétoires sus-rappelées, cide phosphorique en possède une qui le diffé- acie nettement de l'acide chlorhydrique : en effet, eide chlorhydrique exerce une action inhibitrice Idente sur la sécrétion du suc gastrique, ce qui plique la remarque clinique d'Albert Robin : « En lb, l'administration de l'acide chlorhydrique aux ilades qui souffrent d'une insuffisance de fonction à jamais ou presque jamais réusssi (A. Robin) »; cide phosphorique, au contraire,exerce une aclion citatrice de cette même sécrétion : « l'acide chlor- drique inhibe la sécrétion ultérieure de suc gas- que; il est très intéressant de voir que d’autres des, l'acide phosphorique par exemple,n'exercent S cette aclion inhibitrice » (Pawlow). En sorte lon peut conclure : l'acide phosphorique en so- ion diluée s'est montré, expérimentalement, @rcer une action excito-sécrétrice remarquable lensemble des sécrétions digestives (sali- uvre, gastrique, hépatique, pancréalique, intes- 0 È IL. — MÉDICATION DES INSUFFISANCES FONCTIONNELLES GASTRO-INTESTINALES. La sanction pratique de ces faits (action anti- seplique, action peptogène, action excito-sécrétoire des sécrétions digestives) devait être à priori de faire de la médication acide en général, et phos- phorique en particulier, une médication de choix dans le traitement des dyspepsies gastro-intesti- nales caractérisées par l'insuffisance des sécrétions digestives, dans celles, en particulier, où il y a hypo- acidilé stomacale primitive, c'est-à-dire insuffi- sance originelle de la sécrélion acide, que cette hypoacidité soit reconnue par l'analyse chimique du suc gastrique ou par la simple analyse clinique, souvent suffisante en pareils cas, — lranchons le mot, — souvent moins trompeuse. Celte dyspepsie gastro-intestinale hypo-sécrétoire, cette insuffi- sance des fonctions digestives considérées dans leur ensemble, qu'elle soit consécutive à une hyper-sécrétion, à un hyperfonctionnement initial, traduisant alors la fatigue, l'usure conséculive au surmenage fonctionnel, ou qu'elle soit primitive, nous à paru dans notre pratique la plus fréquente, à beaucoup près, de toutes les formes de dyspepsie : elle se présente avec une prédominance marquée chez la femme. Ce syndrome d'insuffisance digestive, de dys- pepsie gastro-intestinale se traduit en clinique de la façon suivante® : «appétit faible ou capricieux : sensalion de gêne, de pesanteur, de tension stoma- cale pendant la période digestive, se prolongeant un temps variable; sfase alimentaire stomacale, s'accusant, en clinique, outre les sensalions précé- dentes, par des régurgitations alimentaires plu- sieurs heures après les repas, par du clapolage de l’estomac le matin à jeun; fermentations gastro- intestinales, ballonnement après les repas, éructa- tions quelquefois acides. Les malades se disent grandement soulagés par les « renvois », et insistent beaucoup sur ce point. Le plus souvent, la paresse intestinale est manifeste, la constipation habituelle, coupée parfois de erises diarrhéiques; l'entéro- colite muco-membraneuse est fréquente, ainsi que les retentissements hépatiques (subictère, hyper- trophie hépatique, etc.); souvent les malades viennent consuller pour des troubles cardiaques (palpitations, tachycardie, elc.), pour des troubles nerveux plus ou moins bien définis (migraines, malaise général, vertiges, céphalalgie, asthénie générale, psychasthénie, etc). « À l'examen, on constate, de facon à peu près constante (surtout chez la femme), le relächement { AL. ManTier : La dyspepsie médicale, 5 décembre 1903. hyposthénique. Presse de la sangle abdominale, la diminution de la tension normale de l'abdomen; la palpation donne une sen- sation particulière de mollesse, d’atonie; elle ne dé- termine aucune réaction de défense, de tension ré- flexe. Inutile d'ajouter que, surtout chez la femme, les ptoses viscérales sont fréquentes : abaissement du rein, du foie, de l'estomac, voire de l'utérus. « La formule urinaire est intéressante à noter : il y a abaissement du taux de l'urée,indicanurie,sou- vent vrobilinurie et albuminurie légères; l'examen de l’urine du matin, émise à jeun, indique le plus souvent l'hyperacidité associée à l'hypophosphatie. « À se placer au pur point de vue clinique, il semble qu'on puisse étiqueter ces cas : dyspepsie gastro-intestinale hyposthénique (hypo-motrice et hypo-sécrétoire), avec stase, fermentations et relen- tissements divers (hépatiques, cardiaques, rénaux, nerveux). « Nous le répétons, peu de types cliniques sont aussi fréquents chez la femme, et les travaux mul- tiples qu'ont inspirés les ptoses viscérales, la dila- tation de l'estomac, le rein mobile, la dyspepsie flatulente, l'hépatisme, la gastrite chronique, l'enté- rite chronique, etc., cas particuliers du grand type clinique précédent de l'insuffisance digestive, le prouvent assez. » Il est bien évident, toutefois, que chaque malade traduira sa maladie à sa manière, l’'individualisera, la localisera plus ou moins, et qu'il y aura des malades qui paraîtront plus spécialement avoir de l'insuffisance stomacale, intestinale, hépatique ou pancréatique. Mais nous affirmons que, de même que l’on rencontrera rarement un malade réalisant absolument, au grand complet, sans une omission, le type clinique schémalisé ci-dessus, type idéal où nous avons rassemblé grosso modo, groupé l’en- semble des symptômes constitutifs de l'insuffisance digestive, on rencontrera bien plus rarement encore un stomacal, un intestinal, un hépatique ou un pan- créatique pur; toujours l'analyse clinique révélera, à côté des symplômes prédominants, slomacaux par exemple, l'existence de symptômes plus ou moins accusés, traduisant la souffrance des autres seg- ments du tube digestif : la Pathologie, comme la Physiologie, démontre de façon formelle l'étroite synergie fonctionnelle des glandes digestives, qui rend solidaires à l’état normal et à l’état patholo- gique les divers temps de la digestion; ce type de l'insuffisance globale des fonctions digestives nous parait donc légitime. Dans ce cas, nous avons instiluë, concurremment avec le régime diététique et les divers moyens thé- rapeuliques appropriés au cas considéré (port d’une ceinture abdominale, massage, lavage de l'in- testin, etc.), la médicalion phosphorique; et les ré- sultats ont certainement dépassé de beaucoup notre D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE attente. Dans 52 cas de ce genre, où les circonstances nous ont permis non seulement d'appliquer cette médication, mais d’en suivre les effets pendant une longue période de temps (trois mois pour le cas plus récent, près de quatre ans pour le cas le plus ancien), nous avons eu 48 améliorations tellement neltes qu'un bon nombre (la moilié environ), d fait de leur durée, peuvent être considérées comm de véritables guérisons. Nous avons eu 4 insuccès francs, dont 3 chez des névropathes (une hystériq pseudo-tabétique, un agité dégénéré supérieur a obsessions diverses, une névropathique avec crises gastralgiques),où la médication a été interrompu après vingt-quatre heures, ayant déterminé des phénomènes d’excitation nerveuse assez intense; le quatrième chez une jeune fille atteinte probable ment d'ulcus rotondum, sujette à des crises de gas? tralgie violente, où la médication a été interrompue après quelques jours sans qu’elle ait semblé toutes fois exagérer la gastralgie. 1. Action de l'acide phosphorique sur la diges tion stomacale. — Les divers symptômes susénu mérés ont été plus ou moins rapidement, plus ot moins profondément amendés, la viciation digestim et nutritive plus ou moins redressée ; — mais, nou le répétons, — horsles quatre cas rappelés où la mé dication était contre-indiquée, — nous dirons plus tard pourquoi, — tous les cas traités ont reliré dela dite médication un réel et très grand bénéfice. La sensation de plénitude stomacale, de lourdeur de pesanteur, de somnolence, après le repas est [ des premiers phénomènes amendés ; le sommeil, S s'impose encore du fait de l'habitude, perd le carac tère du sommeil lourd, pesant, des digestions dif ficiles, pour n'être plus qu'une simple sieste brève légère. Les congestions encéphaliques, la rougeu de la face, s'atténuent et disparaissent même com plètement quelquefois : tel fut le caschez une artéri scléreuse avancée, âgée de soixante-cinq ans,s jette après les repas, même peu copieux, à bouffées congestives d'une extraordinaire violent et qui, après trois semaines de traitement, éta débarrassée de ce fàcheux symptôme, qui n’a pa reparu depuis huit mois. Le ballonnement stomacal, les éruetations nid@ reuses ou acides sont de même, en général, rapide ment amendés.Enrevanche,ladilatation stomacall le clapotement, sont beaucoup plus lents à s'at ténuer; quelquefois même ils persistent, malg l'amendement considérable des autres phénomènt concomitants. live à ce sujet. Toutefois, nous ne parlageons pas l'opinion des deux premiers auteurs en ce qui con- erne l'action heureuse de la médication phospho- rique dans les dyspepsies hyperacides primitives, dans leshyperchlorhydries ; nous n’en avons obtenu ue des résultals médiocres ou mauvaisetréservons ladite médication aux dyspepsies byperacides se- condaires, hypoacides primitives, ou du moins paraissant telles cliniquement, et réalisant plus du moins fidèlement le Lype clinique sus décrit. Et c'est, pour le dire en passant, probablement pour cette circonstance que les auteurs précités ont cherché à donner à leurs diagnostics une base chi- L mique (analyse du suc gastrique, analyse d'urine), — alors que,après nos premières recherches, nous nous ‘sommes tenu surtout sur le terrain de l'analyse clinique, les analyses chimiques présentées nous ayant paru, en dépit de l'apparence, ne donner “que des indicalions d’une insuffisante rigueur. C'est à cette circonstance qu'est due probablement notre divergence sur ce point spécial. Nous ne par- “lons probablement pas le même langage : leur défi- nilion est chimique, la nôtre clinique ; nous croyons Bite dernière plus sûre à l'heure actuelle, nous allons dire pourquoi. On a pu remarquer, en effet, que — systémati- “quement — nous n'avons pas fait élat, dans notre exposé, des analyses quantitatives de suc gastrique, que, cependanl, nous avons recueillies dans un bon nombre de cas. C'est qu'en effet — en ce qui con- -cerne l'acidité en particulier — nous avons été obligé de conclure que, les coefficients d'erreur et “de variation (du fait de la technique, du fait de —l'expérimentateur, du fait de l'individu examiné, el du fait du jour et quelquefois même de l’heure -de l'expérience) étant égaux ou supérieurs, — du nème ordre de grandeur en tout cas, — aux varialions constatées, ces analyses étaient sans Le Ces variations d'acidilé gastrique d'un individu à l’autre, d'un jour à l’autre, d'une heure à l’autre, Dans la pratique de l'examen du suc gastrique, 1 s'agit non plus de l’acidité de « suc absolument », comme chez les chiens fistulisés de Pawlow, bre 1904), l'acidité vraie du suc gastrique pur ne peut théoriquement s'obtenir qu'en connaissant l'acidité relative du mélange sus indiqué et le coefficient motricité stomacale permetlant d'établir les proportions dudit mélange suivant une méthode qu'il indique. Ces seules remarques suffisent à rendre singu- lièrement suspects tous les résultats, tous les dia- gnostics basés sur la recherche quantitative de l'acidité du sue gastrique, — cas exceptésd’anachlo- rhydrie ou d'hyperchlorhydrie tels que les coeffi- cients inévitables d'erreur soient évidemment dépassés ; mais, dans nos observations, nous v’avons eu aucun de ces cas, que dépiste d’ailleurs habituellement la simple analyse clinique. Au sur- plus, le passage suivant de Léon Meunier nous parait résumer admirablement l’état actuel de la question : « Cette recherche des éléments du suc gastrique présente-t-elle une grande importance clinique ? C'est ce que nous ne croyons pas, en nous basant sur les considérations suivantes : « Si l'on prend différents malades et qu'on dose, par exemple, l'acidité de leur suc gastrique, et sion compare les chiffres rapportés, soit à la sécrélion relative, soil à la sécrétion vraie, on oblient, dans un cas comme dans l’autre, des chiffres très diffé- rents ; on constale donc que la sécrétion a une com- position variable avecchaque personne, que chaque suc gastrique a son individualité propre. « Si, maintenant, on prend le même malade, etsi on examine son suc gastrique à différentes époques, au cours d'un traitement, parexemple, on est frappé de ce fait: en comparant les acidilés de ces sues gastriques, les acidités relatives (et ce sont les seules que l’on ait étudiées jusqu'à ce jour), les acidités relalives ne sont encore nullement iden- tiques ». Et, quand nous aurons ajouté que,chez un même individu, d'un mois à l’autre, cetle acidité relative (la seule, nous le répétons, dont on ait fait état jusqu'à ce jour) peut venir du simple (120) au double (220), on se rend compte de la solidité d'un dia- gnostic établi sur de telles bases ! Sans négliger les renseignements parfois essentiels que fournit l'ana- lyse qualitative du suc gastrique, nous croyons qu'à l'heure actuelle, avec les techniques en usage, la nosologie clinique est plus rigoureuse. de 2. Action de la médication phosphorique sur les lonetions hépalo-pancréatiques. — L'action de l'acide phosphorique sur le foie se manifeste par le relèvement du taux de l’urée, la disparition de l'indican et de l'urobiline et même, ainsi que Cautru et moi-même nous l'avons obtenu dans bon nombre de cas, la disparilion ou l'atténuation 49** 574 D' A. MARTINET -— PHARMACOLOGIE DE L’ACIDE PHOSPHORIQUE rapide de la glycosurie diabétique d’origine hépa- tique. Et pourtant, à ce point de vue hépatique, l'acide phosphorique étail et est encore suspect. Assimi- lant l'acide phosphorique au phosphore, à priori et sans preuves, on accusa l'acide phosphorique d'être toxique et stéalosant. Notre ami Caulru s’est spécialement attaché à la réfutation de cet à priori, et il nous semble bien avoir apporté la preuve expérimentale formelle du non fondé de cette accusation. Avec MM. Bardet et Brun, il administra pendant un mois et demi à un canard, qui n’en fut nullement incommodé, un gramme par jour d'acide phosphorique officinal. L'animal sacrifié ne présentait aucune trace de stéatose hépatique. Il administra pendant près d'un an (414 novembre 1902 à octobre 1903), à deux cobayes de 350 grammes environ, une dose quoti- dienne de O0 gr. 50 à 1 gramme d’acide phospho- rique, sans que leur santé parût altérée; ces ani- maux furent sacrifiés en octobre 4903 : l'examen macroscopique et microscopique du foie montra un foie normal, sans apparence de dégénérescence graisseuse. Il faut remarquer que les dosèés d'expé- rimentation précitées correspondent aux doses quotidiennes effroyables de 200 grammes d'acide phosphorique officinal pour un adulte du poids moyen de 70 kilogs. Depuis, il a renouvelé des expériences sur des chiens, en administrant, pendant un an dans une première série, pendant six mois dans une deuxième, des doses quotidiennes de 1 à 2 gram- mes d'acide phosphorique officinal, sans constater cliniquement aucun trouble hépatique et anato- miquement aucune lésion. Aucun des médecins qui ont employé cette médication n’a signalé d'incident hépatique quel- conque et aucun des critiques de ladite médication n’a apporté aucun fait clinique ou anatomique tendant à faire admettre une action dégénérative hépatique. On peut donc résolument conclure que l'acide phosphorique n'est ni toxique, ni stéatosant, et qu'il ne s'est même pas montré tel à des doses élevées, qu'on pouvait a priori estimer dangereuses. En revanche, l’action excitatrice de la fonction hépato-pancréatique, a priori positive, semble bien confirmée par la clinique, car, dans trois cas où, en dehors des phénomènes dyspeptiques banaux sus- énumérés, il y avait alternative de diarrhée et de constipation avec décoloration des matières, présence de substances graisseuses et, dans un cas, glycosurie alimentaire, on obtint assez rapidement (trois à dix jours) la régularité des garde-robes, la recoloration des malières, la disparition de la graisse el la disparition de la glycosurie. Dans des cas analogues el de facon confirmalive, MM. Hallion et Enriquez ont eu de même des résultats fort satisfaisants par l'administration d’eusécréline. £ | 3. Action de la médication phosphorique sur les fonctions intestinales. — En ce qui concerne l'ac= tion sur l'intestin, elle est évidemment complexe : elle résulte, d'une part, de l'action excito-sécrétoire. exercée sur la sécrétion intestinale par toute solu= tion acide entrant en contact avec le duodénum, et; d'autre part, de l'action exercée par l'acide phos= phorique, ainsi que nous venons de le voir, sur. tous les segments de tube digestif (estomac, foie, pancréas). Le première action, excilo-sécrétoire, se traduite dans certains cas, quand il y a constipation, insuf= fisance parétique et sécréloire de l'intestin, par la régularisation des garde-robes, voire, si la dose d'acide phosphorique prescrite est trop forte, par de la diarrhée. Toutefois, il est des constipations sur lesquelles la médication acide semble avoir peu d'action. Quand elle agit, c'est seulement au bout d’un temps variable, toujours assez long, quel ques jours au moins, et non d’une facon immédiate; hors le cas de dose exagérée, et ceci est bien en rap port avec une excilation quasi-physiologique, un entrainement progressif de la fonction sécrétoiren et motrice intestinale. Jei encore, nos observations concordent de tous points avec celles qu'ont recueil=« lies MM. Hallion et Enriquez au sujet de l’eusé=" créline duodénale. Mais, inversement, s'il y a diarrhée par insuffi= sance et viciation des fonctions stomacale, hépati que, pancréatique, l'administration de l'acide, phosphorique peut, en stimulant et en régularisant lesdites fonctions, supprimer la diarrhée et régu lariser les fonctions intestinales, ainsi que nous venons d'en citer des exemples à l'occasion de l'ac= tion sur le foie et le pancréas. L'action sur l'entéro-colite muco-membraneuse est tout à fait inconstante, et, si nous en avons obtenu quelquefois des résultats extrêmement satisfaisants, nous avons eu, en nombre au moins égal, des insuccès complets; la pathogénie de cette affection, qui tend de plus en plus à en faire sou vent une trophonécrose réflexe de l'intestin explique bien ces insuccès. LA A. La médication alcaline et la médication acide dans les affections gastriques. — Quoi qu'il en soit la conclusion formelle de ces faits multiples d'ordre expérimental et clinique, est la suivante“ 1° L'acide phosphorique exerce une action exck tatrice remarquable sur les fonctions sécrétoire el motrice de l'appareil digestif dans son ensemble D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE 515 “2 Lamédication phosphorique donne des résultats evirémement satisfaisants dans lous les cas patho- logiques caractérisés par l'insuffisance des fonc- ions digestives, dans les dyspepsies hyposthéni- ues en particulier ; 3° Et, par voie de conséquence — confirmée par observation clinique — elle est contre-indiquée dans (ous les cas pathologiques caractérisés par lexagération desdites fonctions digestives, dans dyspepsies hypersthéniques en particulier. Et, avant de clore ce chapitre, une remarque impose: la médication acide, la médication phos- horique que nous préconisons ici, après en avoir vérifié longuement les résultats, dans le traitement des insuffisances fonctionnelles, digestives, semble ètre exactement la contre-partie de la médication “alcaline traditionnelle, le bicarbonate de soude “ayant fait longtemps et faisant encore peut-être à peu près tous les frais médicamenteux des diverses -médicalions antidyspeptiques classiques. La vogue de Vichy en est une éclatante démonstration. Il semble qu'il y ait contradiction absolue et que un des groupes d'observaleurs s'illusionne sur lefficacité des médicalions acide ou alcaline, et ourtant les faits sont suffisamment nombreux de part et d’autre, et suffisamment établis, pour on soit obligé d'admettre que l’uneet l’autre des tes médications ne compte plus ses succès. Le oment n'est pas encore venu, étant donnée sur- jut la nouveauté relative de l'emploi systématique la médication phosphorique, le moment n'est venu d'élablir avec précision les indications contre-indications respectives des alcalins et de ide phosphorique. Mais, dès maintenant, on peut dire que la contra- iction est moins profonde qu'elle n'en a l'air à remière vue. En effet, les partisans les plus réso- S de la médication phosphorique ne se font pas ate d'employer, concurremment avec ladite médi- tion, la médication alcaline réalisée par des talins moins solubles que le bicarbonate de soude ; mais, s’efforcant de suivre l’évolution nor- ale des processus digestifs, ils font de la médi- lion acide pendant la période stomacale de la gestion, et de la médication alcaline, pendant la Hode intestinale, imitant en cela la nature même. Quoique comparaison ne soit pas toujours rai- son et soit même souvent le contraire, on peut dire qu'il y a entre les deux médications la même différence qu'entre la méthode ancienne d'immo- bilisation rigoureuse et prolongée des fractures et la méthode moderne de mobilisation rapide et de massage; la première, n'ayant en vue que la con- solidation osseuse, supprime toute fonction mo- trice du membre lésé, et s’en remet entièrement à la seule nature médicatrice : elle est rigoureusement passive, et on en connait les résultats, l’atrophie musculaire consécutive, en particulier; la seconde, ayant en vue l’ensemble des fonctions du membre considéré, s'efforce, tout en n'entravant pas ladite consolidation, d'entretenir les fonctions cirecula- toire et motrice par un entrainement métho- dique : elle est, au sens rigoureux du mot, active, et les résultats en sont tels que que tous les chi- rurgiens l'ont adoptée à l'heure actuelle. La médication alcaline, avec son complément, une diète sévère le plus souvent lactée, inhibe les fonctions digestives, stomacales en particulier, et n'atlend la guérison que de la mise au repos de l'organe malade ; la médication acide, avec son ré- gime diététique beaucoup plus libéral, stimule, at contraire, lesdites fonctions e{ en recherche et en obtient souvent le rétablissement normal par un entrainement régulier. Nous affirmons que les ré- sultats en sont beaucoup plus satisfaisants que ceux de la précédente, mais encore faut-il que — comme le massage dans les fractures — cette médi- cation soit appliquée avec discernement. En effet, il est des fractures où la méthode ac- tive s'impose presque a priori, fractures du péroné ou du radius par exemple: il en est d’autres, les fractures compliquées, où l'indication de l'im- mobilisalion rigoureuse est formelle. De même, il est certaines formes de dyspepsies, certaines gastrites avec hyperesthésie muqueuse considé-" rable, tels les ulcères, où la médication alcaline conserve tous ses droits: ce sera à l'avenir d'éta- blir, comme nous le disions plus haut, les indi- cations précises. Dans un prochain article, nous étudierons l'ac- tion nerveuse et humorale de l'acide phosphorique. D' A. Martinet, Ancien interne des Hôpitaux de Paris, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES i° Sciences mathématiques Tannery (Jules), Sous-Directeur des études scienti- fiques à l'Ecole Normale supérieure. — Introduc- tion à la Théorie des Fonctions d’une variable. Deuxième édition entièrement relondue; tome 1 : Nombres irrationnels, ensembles, limites, séries, produits infinis, fonctions élémentaires, dérivées. — 1 vol. grand in-8° (Prix : 14 r.). Hermann, éditeur. Paris, 190%. M. Tannery nous donne aujourd'hui une seconde édition, complètement refondue, de son /ntroduction à la théorie des fonctions d'une variable : la première édition, qui parut il y a une vingtaine d'années, avait été très remarquée, tant par ses qualités de clarté, de précision et de rigueur, que par les vastes perspectives qu'elle ouvrait aux étudiants sur le riche domaine de l'Analyse moderne. Le livre n’était pas, à proprement parler, un ouvrage d'enseignement élémentaire; mais, destiné avant tout aux futurs professeurs, qui, au mo- ment de quitter les bancs de l'Ecole, ont besoin de coordonner et de préciser les connaissances acquises, il devait forcément influer sur l’enseignement des fon- dements de l'Analyse : cette influence fut, en effet, con- sidérable, et elle à heureusement persisté pour le plus grand bien des études mathématiques, malgré les néces- sités parfois fâcheuses de la préparation aux examens, et aussi en dépit des caprices de la mode. M. Tannery a jugé le moment venu de remettre son œuvre au courant des récents progrès de l'Analyse : en réalité, il a fait un livre nouveau qui, d'ailleurs, s'adresse comme l'ancien à ceux qui, déjà familiers avec les éléments, ont besoin d'assurer à leurs con- naissances des bases solides, et en même temps de les synthétiser en les réduisant à leurs éléments essentiels. Dans cette nouvelle édition, l'auteur ne s’est pas inter- dit les représentations géométriques, qui lui paraissent aussi légitimes que toute autre formule, à condition de ne pas nuire à la rigueur. Une place plus large aussi est faite à la théorie des ensembles, dont l'importance grandit chaque jour; cette théorie s'introduit naturel- lement dès l'origine, à propos du nombre irrationnel, dont la connaissance équivaut à celle d’une coupure en deux classes de l'ensemble des nombres rationnels, points de vue que, dans l'édition actuelle, M. Tannery adopte exclusivement. La théorie des ensembles est liée à la notion de limite : aussi, après avoir, dès l'abord, édifié la théorie des nombres irralionnels complétée par une courte digression sur les fractions continues considérées surtout comme moyen d'appro- ximation, l'auteur s'attaque ensuite aux ensewbles infinis de nombres dont il établit les propriétés fonda- mentales (bornes inférieure et supérieure, points d’accu- imulation) ; il les applique aussitôt à propos de la notion de limite d'une suite infinie, puis il généralise la no- lion pour des ensembles d'éléments qui ne seraient pas exclusivement des nombres, définit deux ensembles de mème puissance, étudie les ensembles dénombrables ou de même puissance que l'ensemble des nombres entiers, et distingue, parmi tous les nombres d’un inter- valle donné, l’ensemble dénombrable de ceux qui sont algébriques, les autres étant dits {ranscendants; tout ensemble qui à même puissance que la totalité des nombres de lintervalle 0-1 a la puissance du continu. Le chapitre se termine par les notions d'ensemble dérivé, d'ensemble clos et d'ensemble dense. Les cha- pitres suivants s’'appuieront sur cette théorie; ils diffè-. rent par là, el aussi en général par le plan et par des ET INDEX compléments, des chapitres correspondants de là pres mière édition. Le chapitre IT est consacré aux séries et aux pro duits inlinis : au début sont étudiées les séries harmo niques par la méthode qui, généralisée, conduit à une règle bien connue de Cauchy; ensuite, la théorie dess séries à entrée multiple et des produits infinis est facis litée par la théorie des ensembles; puis on arrive aux règles ordinaires de convergence, complétées par quel® ques théorèmes nouveaux, tels, par exemple, que & linite supérieure du rayon de convergence déduite des la règle \ n V Un : le chapitre se termine par un paragraphe sur les fracs tions continues illimitées. Avec le chapitre suivant commence l'étude des fone tions, définies au point de vue le plus général de la cor respondance entre deux ensembles ; M. Tannery établit, de ce point de vue, elcomme conséquence de la théories des ensembles, les premières propriétés, notammen celles qui se rapportent aux bornes de la fonction età sa continuité : cette étude est mise au courant des tra vaux récents. Puis l’auteur montre dans quelle mesure est admissible la représentation géomélrique usuelles des fonctions, et fait pressentir quelles hypothèses elle suppose implicitement; le chapitre se Lermine par Pap= plication de ces généralités aux fonctions les plus simples : d'abord le polynôme entier, étudié au vois sinage d'une valeur x, de la variable à l’aide des poly nômes dérivés successifs, puis la fraction rationnelle; étudiée de même dans les deux cas où x, est ou no un pôle, etenfin l'exponentielle, la fonction logarith= mique et x”. "# Un chapitre est consacré aux séries à lermes Va riables; il débute par la notion de convergence unis forme pour une fonction /,{x) de deux variables » et x dont la première prend les valeurs des nombres natus rels; des exemples simples éclairent cette notion délis cate, qui s'applique aussitôt aux séries à termes vari& bles, et notamment aux séries entières ; le chapitre se poursuit par l'étude des séries entières usuelles, et notamment des séries exponentielle et du binôme; là somme de la série exponentielle est établie par les deux méthodes : propriété de la multiplication, où 6 4 k f x \”t recherche directe de la limite de (41 + 7) pour N infini, en s'appuyant sur la convergence uniforme; comparaison de é au polynôme entier permet de mons trer la transcendance de la fonction; le développement de & conduit aux séries logarithmiques. Puis on arrié aux fonctions hyperboliques détinies à l'aide de l'expo nentielle, et enfin aux fonctions circulaires dont He développements en séries sont déduils des formules d’addition, et complétés par les expressions sous font de produits infinis et les développements polaires usuël qui préparent la théorie des fonctions elliptiques à chapitre se termine par la transformation en prod infini de la série n=+n Lanéan, n=—2 si importante dans cette théorie. Un autre chapitre traite des dérivées, auxquelles est naturellement conduit en substituant au graphiqui de la fonction un polygone inscrit de côtés indétinime décroissants. L'existence dela dérivée entraîne la conti Weierstrass, d'une fonction continue sans dérivée ; les représentations graphiques usuelles supposent l’exis- tence et mème la continuité de la dérivée. Après avoir déterminé les dérivées du polynôme et de la série entière, l’auteur étudie soigneusement les règles de calcul de la dérivée d'une fonction de fonction et d'une fonction inverse. Ensuile vient le théorème de Rolle, la formule des accroissements finis, son application aux dérivées des fonctions composées ou implicites et à létude de la variation des fonctions. Une généralisa- tion de la formule des accroissements finis, d'après M. Darboux, relie les deux théories des dérivées et des ifférences. Puis la formule de Taylor est présentée omme formule d'interpolation rapprochant la fonc- tion du polynôme entier; elle conduit à l’étude de la fonction au voisinage d'une valeur x, de la variable, notamment dans les cas d’indétermination, ce qui amène aux règles de l'Hospital complétées par une remarque de M. Appell. Tel est, en résumé, cet important ouvrage : il sera bien accueilli des mathématiciens, et en particulier des nombreux élèves de M. Tannery qui seront heu- reux de pouvoir faire, une fois encore, sous la direc- tion du maitre, la révision des fondements de leurs connaissances. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Sciences de Rouen. ebon (Ernest), Professeur de Mathématiques au Lycée Charlemagne. — Extrait du plan d’une Bi- bliographie analytique des écrits contemporains sur l'Histoire de l'Astronomie. — roch. in-8° de 19 pages, 1905. M. Ernest Lebon a présenté à la Section des Sciences du Congrès international de Sciences historiques, tenu à Rome, le Plan d'une Bibliographie analytique des Ecrits contemporains sur l'Histoire de ? Astronomie. C'est ce Plan que résume la brochure ei-dessus. Les buvrages cités sont groupés dans l'ordre de filiation des idées qui y sont émises, et l'indication est suivie d'une courte analyse où ces idées sont exposées et omparées. Il est inutile d'insister sur l'utilité que pré- sente un plan de ce genre et les services de toute sorte qu'il est appelé à rendre aux astronomes et aux histo- riens des sciences, 2° Sciences physiques Frick (D' J.. — Physikalische Technik. 7° édi- tion, revue par M. O. LenmanN, Professeur à l'Ecole technique Supérieure de Carisruhe, 4° partie. — “1 vol. de 630 p. avec 2003 figures (Prix : 20 fr.). Vieweg und Sohn, éditeurs, Braunschweïig, 1905. La Technique Physique du D' Frick jouit en Alle- magne d'une réputation de longue date et qui est d’ail- eurs bien justifiée. Ce ne fut d'abord qu'une modeste entative de réaction contre l’enseignement abstrait de Physique, tel qu'on le pratiquait trop volontiers il y quelque cinquante ans. Peu à peu, au cours de ses ééditions successives l'ouvrage s'est fort accru et la Septième édition, que nous offre aujourd'hui M. Leh- nänn, a reçu assez de remaniements et d'additions pour aire un ouvrage nouveau, La première partie du vo- lume I, la seule parue encore, renferme 630 pages avec 003 figures. M. Lehmann l'a consacrée à l'étude des tallations générales qui conviennent à un amphi- âtre de physique et aux services accessoires. Il dé- rit en détail et discute les dispositions qu'il convient ladopter dans l'ensemble de la salle, l'aménagement des tables d'expérience, de la salle de préparation des ours, de l'atelier. Les canalisations diverses qui doi- ent distribuer l'eau sous forte et sous faible pression, & gaz, l'air comprimé, le vide, l'électricité sont étudiées digneusement; puis les appareils à poste fixe, mo- èurs, pompes, générateurs électriques. L'auteur s’oc- èupe ensuite de l'atelier de réparations et de construc- m?, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ce 1 on trouve à la fin du chapitre l'exemple célèbre, dû à ! tion des instruments, des procédés mécaniques, des outils et de leurs usages. On serait peut-être tenté de trouver que ces questions sont traitées à certains égards avec un luxe exagéré de détails, si l’on ne savait par expérience que tous ces dé- tails ont leur importance pratique. Il est difficile d’ap- précier la perte de temps, sans compter les ennuis, qu'occasionne une installation défectueuse (ce qui, soil dit en passant, est le cas à peu près général de nos éta- blissements francais, et non pas seulement des an- ciens). D'autre part, la lecture de l'ouvrage de M. Lehmann m'a laissé cette impression que l’auteur n’est pas parti- san de la physique de la cire à cacheter et des bouts d’allumettes. Il m'a été agréable de {trouver mes convic- tions bien arrêtées, confirmées par une autorité indis- cutable en matière de technique physique. On prête à un savant célèbre cet aphorisme qu'un physicien doit savoir scier avec une lime et limer avec une scie. S'il est authentique, cet aphorisme n'ajoute rien à la gloire de son auteur, et j'aime à croire pour lui qu'en ce cas, il n’y attribuait pas le sens littéral que des esprits fort superficiels, armés de mains fort mala- droites, ont voulu y donner. Je suis d'avis qu'il y aurait grand avantage à bien répéter aux physiciens soucieux de cultiver les arts manuels dans la mesure de leurs moyens et de leurs besoins qu'en mécanique il n'y à pas d'à peu près. Il n'y à pas de travaux et d'outils d'amateurs, des travaux et des outils de professionnels. Il faut distinguer seule- ment les travaux bien faits ou mal faits, les outils bons ou mauvais. En particulier, on ne saurait trop insister sur ce point capital, que les résultats dépendent au premier chef de l'emploi d'outils appropriés et en bon état. L'ouvrage de M. Lehmann est concu dans cet esprit et j'y vois une qualité essentielle. Il serait vivement à désirer que la langue française possédât un livre sem- blable, adapté à nos habitudes techniques. Mais ce vœu restera platonique. Il serait bien diflicile de trouver chez nous un physicien qui, assez compétent pour ap- précier les difficultés de la tâche, consentit à l'assumer ; plus difficile encore de rencontrer un éditeur qui vou- lût entreprendre une publication aussi importante. M. LAMOTTE, Professeur adjoint de Physique à la Faculté des Sciences de Clermont-Ferrand, Muller (P.-Th.), Professeur à l’Université de Nancy. — Lois fondamentales de l’Electrochimie. — Encyclopédie scientifique des Aide- Mémoires (Prix : 2 fr. 50). GauthiPr-Villars, éditeur, Paris, 1904. Les traités de Chimie physique sont encore très rares chez nous. M. Muller est un des premiers professeurs qui, dans ses cours et dans ses publications, à su don- ner une large place à cette science, qui s'impose de plus en plus aux recherches approfondies des chimistes et des physiciens. Les Lois fondamentales de l'Electrochimie consti- tuent un des chapitres les plus importants de la Chimie physique. L'auteur les a exposées en prenant comme point de départ la dissociation électrolytique et lhypo thèse des ions. Dans ce petit livre, M. Muller à su condenser dans le minimum de pages les connaissances essentielles relatives à l'électrolyse, et l'on est tout étonné, après l'avoir lu, du grand nombre de matières qu'il contient. C'est que M. Muller possède son sujet à fond; il sait épargner au lecteur les répétitions inutiles, et tout ce qui n'est pas essentiel dans les descriptions d'appareils ou de méthode a été supprimé. Un schème, une formule même en disent souvent assez. Il est toujours facile de diluer — l'eau ne coûte pas cher ; — la réduc- tion ou, pour rester dans les termes chimiques, la con- centration est bien plus malaisée. Les calculs sont réduils au maximum de simplicité, 57 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Le lecteur est supposé au courant des notions élémen- taires relatives aux unités électriques, à la pression osmotique, aux équilibres chimiques simples. L'équation de Helmholtz sur le coefficient de tempé- rature des piles réversibles et la loi générale de l’équi- libre à température constante sont admises sans démonstration. Dans l'étude des forces électromolrices, l'auteur s'est borné presque uniquement aux phéno- mènes réversibles, les seuls qui soient régis par des lois relativement simples. Nous ajouterons que ce petit livre reproduit une par- He des cours faits par l’auteur à l'Institut chimique et électrotechnique de Nancy. La note si personnelle du professeur et sa science si autorisée font de cet exposé un ensemble bien homogène, que nous ne saurions trop recommander à ceux qui veulent comprendre et étudier sérieusement les phénomènes de l’Electro- chimie. L'auteur n'insiste peut-être pas assez sur l’électrolyse des sels fondus et sur la formation des peroxydes à l’'anode. Ce sont là, il est vrai, des études encore peu approfondies. Nous ne doutons pas que, dans une pro- chaine édition, ces sujets ne soient traités avec toute l'ampleur que leur auront donnée les travaux faits sur ces matières. AUGUSTE HOLLARD, Chef du Laboratoire central des usines de la Compagnie française des métaux 3° Sciences naturelles Weisgerber (D' F.). — Trois mois de campagne au Maroc. — 1 vol. in-8° de 240 pages (Prix : 5 fr.). Ernest Leroux, éditeur. Paris, 1905. Le Dr Weisgerber n’est pas un inconnu pour les lec- teurs de la Revue : il leur à déjà donné ici même un article sur le centre du Maroc d’une documentation sûre et précise. Ses Trois mois de campagne au Maroc, où cet article est repris, ont cette saveur et ce charme qui caractérise tous les livres réellement vécus : on sait que l’auteur est familier avec ce monde musulman au travers duquel il nous guide sans hésitation. Toujours chez lui l’épithète fait image, donne l'impression nette de la chose décrite; les termes techniques arabes y sont employés sans excès, mais avec une abondance suffisante pour donner à l'ouvrage une valeur lexico- graphique : et surtout ils y sont employés avec une correction et une justesse d'application qu'on rencontre bien rarement chez les auteurs d'ouvrages sur le Maroc. Le corps du livre est le récit du voyage accompli par l’auteur entre Casablanca et Merräkech avec une colonne expéditionnaire, une mahalla, à la tête de laquelle était le sultan lui-même. Le sultan, son entourage, les fonc- tionnaires du makhzen, les caïds, la vie du soldat, tout cela estici dépeint avec une grande netteté; et, quant au pays même, lorsque nous aurons dit que l’auteur était préparé à le décrire par de nombreux voyages antérieurs et par un long séjour à Casablanca, on com- prendra pourquoi ce simple récit nous donne une vision plus exacte des choses que maint ouvrage plus considérable. Sa lecture est donc une excellente prépa- ration à l'étude des questions marocaines. Epmonn DouTTÉ, Chargé de cours à l'Ecole supérieure des Lettres d'Alger. Lecomte (Henri), Docteur ès-sciences, Lauréat de l'Institut. — Le Coton en Egypte : Culture, prépa- ration, exportation. — 1 vol. in-8° de 162 pages. Augustin Challamel, éditeur. Paris, 1905. Ce volume est un rapport écrit à la suite d’une mis- sion confiée en 1903 à l’auteur par M. le gouverneur du Sénégal. Cette monographie reflète les préoccupations actuelles de l'industrie cotonnière francaise, désireuse de s’as- surer une production cotonnière importante sur le sol de nos colonies, en particulier dans l'Afrique occi- ‘dentale. M. Lecomte nous met en face de l'essor sans nouvelles de l'industrie et du commerce des tissus d cesse accru, de l'épanouissement de ce qu'on pour# appeler l'épopée du coton : Augmentalion, en cinq an (1898-1903), de 14 °/, du nombre des broches qui, France, travaillent le coton; augmentation de 50 9% en Italie, de 9 °/, en Allemagne, de 19 °/, en Autrie de 38 °/, en Espagne, augmentation qui est aus depuis dix ans, de 42 0/, aux Etats-Unis et dans l'Inde. Actuellement40°/, des récoltes cotonnières de l'Union américaine sont travaillées sur place; la production de coton manufacturé s'y est accrue de 60 °/, depuis 1892 et les exportations de tissus de coton se sont majorées de 146 °/, dans les huit dernières années. M. Lecomte expose ainsi dans une intéressante entrée en matiè la situation menacée et les conditions économique coton en Europe. Ce préambule justifie la tâche urgente; et déjà bien connue, de l'Association cotonnière colo: niale francaise. Celle-ci ne peut mieux faire, pour ses essais, que de s'appuyer sur l'expérience acquise em Egypte, dans une région florale et climatologique voi sine de celle de l'Afrique occidentale, toutes deux placées aux confins de la même région saharienne. La mission, et le livre de l’auteur, résultat d’une observation attentive, pourront certainement rendre des services au Sénégal et au Soudan. Analyses des sols; chutes de pluies, températures moyennes et extrème variétés et hybrides du cotonnier cultivés en Egypt sont passés en revue par l’auteur : La variété Achmoun (Gossypium barbadense v. aegyptiacum), cultivée sur tout dans la Haute Egypte, résiste mieux que les autres à la chaleur et à la privation d’eau. Elle semble don& indiquée comme utile pour le Sénégal sur les sols pe irrigués. La variété Mit ali, à grands rendements; de cueillette et égrenage faciles, de couleur beurrée se recommande aussi à d’autres titres. Enfin la variété Janoviteh, le plus long coton égyptien (35 millimètres) et le plus fin, montre ce qu'on peut espérer, viser & obtenir par une sélection raisonnée. De nombreuses photographies originales illustrent tout l'ouvrage. Les diverses opérations de la culture, assolements; préparation des terres et des billons, semailles, espas cements, choix et quantités de graines semées, binages, arrosages, influence des engrais et des fumures, prix de revient, sont donnés avec précision. ; Puis nous voyons passer en revue la cueillette, les installations d'usines pour l'égrenage, la production @ l'exportation égyptiennes. Nous avons apprécié particulièrement le chapitre relatif aux irrigations qui sont utilisées, contre rede vances, par les cultivateurs de cotonniers, On peu espérer que certaines régions de l'Afrique occidentale française pourront bénéficier, elles aussi, de grands travaux d'irrigation. Ce sont des améliorations fon cières qui exigent des capitaux considérables, il es vrai, mais qui sont d'un rendement certain et rému nérateur. Les entreprises analogues, qui existent dans le Mid de la France, ont donné de bons résultats pour d'autre cultures, et l'on peut souhaiter que les Pouvoirs publie prennent à leur charge ces installations, qui sont du domaine des travaux d'intérêt général au même titre que les voies ferrées. Combien de fois n’a-t-on pa rappelé les grands travaux d'adduction et de distn bution d’eau dont la conquête romaine a laissé la tra sur le sol de l'Afrique du Nord? Les mêmes devo nous incombent; nos connaissances scientifiques € notre outillage le plus perfectionné doivent être mis au service des plantations agricoles en Afrique occi dentale. Quel beau résultat pour notre Administration coloniale, et pour l'initiative privée, si, dans quinze ans, un grand centre de production cotonnière étail définitivement florissant dans notre colonie du Soudani EbMonp GAIN, Directeur des Etudes agronomiques et coloniales Professeur-adjoint à l'Université de Nancy. Anglas (J.), Docteur ès sciences, préparateur de …— Zoologie à la Sorbonne. — Les Animaux de labora- toire : l’Ecrevisse (Anatomie et dissection). — 4 vol. gr. in-8°, avec planches (Prix : 3 fr. 50). Schleicher frères, éditeurs. Paris, 1905. Sous ce titre : Les Animaux de laboratoire, M. Anglas publie une série de petites monographies destinées à servir de guide pour les dissections habituelles des “étudiants en sciences naturelles et en médecine; nous avons rendu compte ici même‘ de la première de ces monographies (La Grenouille). Le texte qui précède les planches donne des notions suffisantes sur la place de l'Ecrevisse dans la classification, sur la morphologie externe et, enfin, sur les organes internes, notions ‘empruntées pour la plupart au livre bien connu de Huxley, et accompagnées par des renseignements pra- iques sur la marche à suivre au cours de la dissection. Î L. CuÉxoT, Professeur de Zoologie à l'Université de Nancy. 4 Sciences médicales riboulet (H.), Médecin des Hôpitaux, Mathieu (F.), Médecin de l Assistance à domicile, et Mignot (R.), Médecin des Asiles publics d'aliénés. — Traité de l’Alcoolisme, avec préface de M. le D' Jorrroy, Pro- lesseur à la Faculté de Médecine de Paris. — 4 vol. in-8° de 480 pages (Prix: 6 fr.). Masson et Cie, édi- teurs. Paris, 1905. La multiplicité des problèmes soulevés, à des points “de vue différents, par cette question de l'alcoolisme nécessilait, pour la mise en œuvre, la collaboration de compétences diverses; elle a été fort heureusement éalisée par MM. Triboulet, Mathieu et Mignot. - Les boissons fermentées et distillées, les liqueurs, les apéritifs, sont successivement étudiés par le D' Mathieu “dans leur fabrication, leur composition, leur teneur en alcool et leur production dans les divers pays. . Le second chapitre est consacré à la toxicologie des alcools, des aromes et des boissons en général. C’est une revue critique fort claire, par le D' Mathieu, des re- cherches toxicologiques; lestravaux du Professeur Jof- froy, par suite de leur rigueur scientifique et de leur importance, sont rapportés en détail. L'auteur admet que ce qui donne aux boissons alcooliques la plus grande partie ou, pour mieux dire, la presque totalité de leur toxicité, c'est l'alcool éthylique, car. s'il’ est le moins toxique des composants, il les dépasse de beaucoup en quantité. … Les pages qui suivent, dues au D’ Triboulet, traitent de Ja physiologie de l'alcool; sont étudiées successivement, laction générale sur les tissus vivants, les conditions qui font varier l’activité du toxique, l’action sur les organes et leur fonction. L'auteur conclut que l'alcool ose tant soit peu nuisible se comporte comme un stimulant hypothétique, dont l'action définitive est de ralentir les grandes fonctions de l'organisme, par action directe ou par l'intermédiaire du système nerveux. Les altérations anatomiques des divers organes, msécutives à l'intoxication, sont décrites par le D' Triboulet dans le chapitre quatrième. … L'étude clinique de l'alcoolisme débute par une scription de l'ivresse, de ses formes habituelles et ses variétés pathologiques {Triboulet et Mignot ); Ile se poursuit par l'exposé des degrés cliniques de Pintoxication chronique, de l’état de santé et de nutri- tion générale du buveur, de la pathologie des organes atteints au cours de la maladie. Un paragraphe im- portant traite de l'influence de l’alcoolisation sur le éveloppement des maladies infectieuses ou diathési- ques, en particulier de la tuberculose. Ce chapitre V termine par la description des modalités cliniques us lesquelles se présente l'intoxication chronique par suite de l'âge, du sexe, de la grossesse, de l’hérédité. À Revue gén. des Sc., t. XV, 30 mai 1904, p. 515. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 579 La psychopathologie de l'alcoolisme a été traitée par le D' Mignot, qui s'est efforcé de distinguer les troubles mentaux relevant directement de l'intoxication de ceux qui lui sont simplement juxtaposés. Les auteurs ont eu généralement tendance à exagérer la valeur de l’alcoo- lisme dans la genèse des troubles psychiques et de la criminalité; si l’intoxication chronique se rencontre avec une fréquence marquée dans les antécédents des aliénés, cela tient à ce que l'intempérance, comme la folie et la criminalité, ne sont souvent que trois mani- festations différentes, mais voisines, d'un même état de défectuosité psychique congénitale. Chez des prédis- posés, l'alcoolisme peut tenir lieu de cause provoca- trice; il ne joue le rôle de cause efficiente que pour des espèces nosologiques en somme peu nombreuses, Celles-ci, en particulier le délire toxi-alcoolique, sont étudiées en détail. Le traitement médicamenteux de l'alcoolisme est exposé par le Dr Triboulet, et l'assistance par le Dr Mi- gnot. Pour réaliser d’une manière eflicace la cure et l'hospitalisation des buveurs, il importe de les classer, suivant les calégories auxquelles ils appar- tiennent, dans des établissements spéciaux et distincts: les alcooliques curables devraient être soignés dans.des hôpitaux organisés selon des règles maintenant bien définies ; les buveurs devenus aliénés trouveraient leur place dans les asiles actuels; quant aux alcooliques incurables, ils seraient internés dans des asiles de sûreté avec les amoraux et les délinquants à responsabi- lité partielle, qui, à l'heure présente, sont jugés comme trop déséquilibrés pour être justiciables de la prison et trop conscients pour être séquestrés dans les asiles. Afin de rendre possibles de telles mesures d'assistance et de traitement, il conviendrait de remédier à l’ab- sence actuelle de dispositions légales relatives aux alcooliques, par la promulgation d'une loi analogue à celle qui est en vigueur dans le canton de Saint-Gall. Dans le chapitre VII, le Dr Mignot résume les ques- tions médico-légales qui peuvent être soulevées tant au civil qu'au criminel au cours de l'alcoolisme. Le Traité de l'alcoolisme se termine par deux cha- pitres dus au D' Mathieu, dans lesquels il expose la démographie de la consommation de l'alcool et les moyens employés dans la lutte contre l'alcoolisme. Les conclusions des auteurs du traité esquissent un système de prophylaxie basé sur l'intervention légale et administrative, mais où l'initiative privée n en joue pas moins le rôle actif qui lui revient. Le nombre des travaux relatifs à l'alcoolisme est actuellement considérable, mais il manquait un ouvrage synthétisant les données définitivement acquises, tout en restant suffisamment documenté. Le Traité de l'al- coolisme de MM. Triboulet, F. Mathieu et R. Mignot, le seul de son genre en France et à l'étranger, comble donc une lacune et sera consulté avec profit par les médecins, les sociologues, les économistes et tous ceux qui doivent s'intéresser au redoutable fléau. Il importe de faire remarquer que, seul des ouvrages médicaux traitant de l'alcoolisme, il est intégralement scientifique. Tous les autres manquent d'impassibilité, tombent trop souvent dans le sentiment et la polé- mique. En outre, la division du travail, comme elle a été comprise, permettait seule d’épuiser un sujet dont la bibliographie comporte 15.000 titres el qui rayonne sur les sciences physiques, la biologie générale, la pathologie, la sociologie, le droit, la médecine légale. En résumé, le Traité de l'alcoolisme est une œuvre remarquable, qui fait grand honneur à ceux qui ont eu le courage d'entreprendre une tâche aussi considé- rable et le mérite de la poursuivre avec une rare ol ginalité. Il n'est que juste de louer la hauteur de vues et l'esprit philosophique des chapitres dus à M. Tri- boulet, la rigoureuse précision et la stricte probité de la partie traitée par M. Mathieu, enfin les qualités très grandes du travail de M. Mignot, sa méthode, sa clarté, sa nouveauté. D' PAuL SÉRIEUX, Médecin en chef des Asiles d'aliénés de la Seine. 580 ACADEMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADEMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 29 Mai 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. de Montessus de Ballore présente ses recherches sur les fractions continues algébriques de Laguerre. — M. S. Bernstein étudie les équations aux dérivées partielles du type elliptique et généralise une proposition relative aux fonctions harmoniques découverte par M. Schwartz. — M. M. Krause communique ses recherches sur l'inter- polation des fonctions continues par des polynomes. — M. G. Marié montre que les perturbations dues à la force d'inertie des pièces oscillantes des locomotives ne donneraient lieu qu'à une oscillation minime si elles n’agissaient qu'une fois, mais qu'elles peuvent accasionner des oscillations successives augmentant jusqu'à une limite plus ou moins élevée suivant l'in- tensité des frottements qui les amortissent. L'ampli- tude maxima de: ces oscillations augmente avec la vitesse, contrairement à ce qu'on croit habituellement. — M. E. Guyou signale des essais de transmission directe de l'heure par le téléphone ; le bruit des batte- ments de la pendule est percu directement par le des- tinataire grâce à un microphone spécial introduit dans la boite de l'instrument ; l'expéditeur se borne à numé- roter à la voix deux ou trois battements et le destina- taire continue à compter à l'oreille. De Brest, un contre- torpilleur à pu ainsi régler ses chronomètres sur la pendule de l'Observatoire de Paris. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Guébhard étudie les causes probables de l’irradiation tangentielle en pho- tographie. — M. J. Duclaux a déterminé la conducti- bilité vraie des solutions colloïdales par différence, en mesurant la conductibilité de la solution renfermant le colloïde et des traces de cristalloïdes, puis celle de la solution débarrassée du colloïde par filtration sur collodion. Il résulte des mesures que la conductibilité des solutions colloïdales, quoique faible, n’est nulle- ment négligeable. — M. Alb. Colson a constaté que le sulfate chromique vert Cr*(S0:}5.8H°0, dont la consti- tution est dissymétrique, réagit sur le chlorure de baryum avec une vitesse discontinue, qui montre l’exis- tence de deux radicaux SO dissimulés. —-M. H. Abra- ham : Fabrication électrolytique de fils métalliques très fins (voir p. 584). — M. L. Vignon a reconnu que la présence du phosphore blanc libre dans le sulfure de phosphore industriel ne peut pas être caractérisée par la méthode de Mitscherlich, mais qu'elle est faci- lement mise en évidence par l'action d'un courant d'hydrogène, qui devient alors phosphorescent. — M. P. Lebeau à observé que le propane pur bout à — 449,5 et est encore liquide à — 195v. Sa température critique est 979,5 et sa pression critique de 45 atm. — M. A. Kling à constaté que, de même que l'acétol et le propionylcarbinol, le méthylacétol existe dans ses solutions aqueuses sous une forme oxydique : CH*.C,OH).CH.CI K F A tautomère de la forme cétonique CH*.CO0.CHOH.CHS. Le méthylacétolanhydre paraît, d'ailleurs, ètre un mélange des deux formes tautomères. — M. Tiffeneau a préparé l'oxyde de méthoéthénylbenzène par action de KOH à l'ébullition où de Na métallique sur la chlorhydrine du méthoéthénylbenzène. Il bout à 84°-86° sous 45 milli- mètres; par distillation, il se transforme complètement en aldéhyde hydratropique. — MM. A. Guyot et J. Catel : Synthèses dans la série anthracénique: con ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES densation des dérivés du benzodihydrofurfurane (voi p. 537). — MM. A. Haller et A. Couréménos ont cons= taté que, vis-à-vis des éthers-sels halogénés, le camphré cyanosodé se comporte comme une molécule énoliqué et donne naissance à des éthers complexes, qui se laissent saponifier par KOH alcoolique pour fournir les acides correspondants. Le camphre cyanosodé, molé cule active, en se combinant à un éther halogéné asy= métrique et inactif par compensation, permet de le résoudre en ses deux composants. — M. E. Léger, pa” l'action de Na*0? sur l’aloine de l'aloès du Natal, & obtenu une méthylnataloémodine, qui est l'éther mé“ thylique d’une trioxyméthylanthraquinone, (OH)CSHE (CO) C'H(OH)(OCH*)CH* ; aiguilles rouge orangé, F. 2930, Par saponilication avec HC] en tube scellé, on obtient la nataloémodine (OH) CSH*(CO}C‘H(OH)CH*, EF. 2140,5, — MM. R. Duchemin et J. Dourlen ont observé que l'alcool, à la température ordinaire, est susceptible de s'oxyder lentement au contact de l'air jusqu'à l'appa= rition d'acide acétique; cette acidité est sujette à des variations dans des limites de temps assez restreintes 30 SCIENCES NATURELLES. — M. Mayet a reproduit expérimentalement chez le chien le cancer de l'homme, par injection de macération du tissu d'un myome utérin. — M. H. Carré signale l'épanchement péris cardique comme lésion caractéristique de la maladie des jeunes chiens; par contre, l’éruption cutanée de vésiculo-pustules, quoique fréquente dans cette ma ladie, n’est pas spécifique, étant due à un microcoque banal. — M. A. Desgrez et M! B. Guende ont constaté que le coefficient de déminéralisation augmente che les animaux en état de dyscrasie acide. — M. A. Mala- quin montre que la schizogenèse ou reproduction asexuelle des Salmacines et des Filogranes est reliée étroitement à la reproduction sexuelle par les phéno= mènes histogéniques qui l'accompagnent, puisque le matériel de la prolifération est homologue au maté riel sexuel lui-même. — MM. M. Caullery et F. Mesni décrivent les phénomènes de sexualité dans le déve= loppement des Actinomyxidies; ils témoignent d'une différenciation déjà très élevée. — MM. L. Mangin et P. Viala ont trouvé, sur les racines de la vigne atteinte de phthiriose ou d’autres maladies, un champignon qu'ils nomment S{earophora radicicola; il représente vraisemblablement un type primitif d'Ascomycètes à asques dissociées. — MM. A. Charrin et Le Play ou inoculé à divers animaux le champignon précédent. se montre nettement pathogène et provoque une série de désordres, tels que : pseudo-tumeurs mélaniques; anémie, altérations du squelette. — M. J. Arthaud= Berthet a étudié le rôle de lOïdium lactis dans I maturation de la crème et des fromages. — M. A. Che= valier décrit les diverses espèces de caféiers sauvages de la Guinée française. Le plus connu est le Coffea ste nophylla, donnant un produit d'un goût et d'un arome exquis. Une deuxième espèce est nouvelle; l'auteur là nomme C.Maclaudi, etle café qu'elle donne parait excel lent. — M. Deprat a observé la présence de nouméite en très petits fragments dans l'Eocène de la Nouvelles Calédonie. C'est un argument en faveur de l’âge anté tertiaire d'une partie au moins des péridotites et gabs bros néo-calédoniens dont elle provient. — MM. M. Lu geon et E. Argand, en allant de la Dent Blanche vers leg massifs tessinois, établissent l'existence de Sept nappes de recouvrement superposées. Séance du 5 Juin 4905. L'Académie présente à M. le Ministre du Commerce la liste suivante de candidats à la Chaire de Chaux; timents, céramique el verrerie du Conservatoire des Arts et Métiers : 1° M. A. Verneuil; 2° M. E. Damour; 3° M. A. Granger ; et à la Chaire de Matières colo- rantes : 4° M. Rosenstiehl; 2° M. M. Prud'homme; 3° M. P. Lemoult. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin cons- litue, en Géométrie anallagmatique, une théorie ana- logue à celle du trièdre mobile en Géométrie euclidienne et à celle du tétraède mobile en Géométrie cayleyenne. — M. Léger a poursuivi les expériences d'enlèvement avec son hélicoptère; il parvient à soulever 100 kilogs ile poids mort avec une force d'environ 12 chevaux. — M. H. Bellet indique un nouveau mode d'application du tube Pitot-Darey à la mesure de la vitesse des con- duites d'eau sous pression. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Poincaré a repris les essais de Lorentz pour mettre en concordance son hypothèse d'une contraction de tous les corps dans le sens du mouvement terrestre avec le postulat de lim- possibilité complète de la détermination du mouve- ment absolu. Il est amené à supposer que l'électron, déformable et compressible, est soumis à une sorte de pression constante extérieure dont le travail est pro- porlionnel aux variations du volume. —- M. G. Lipp- mann, en imbibant des photographies en couleurs sur pellicule bichromatée d'une solution d'iodure de potas- ium, puis d'une dissolution de nitrate d'argent, a vu es couleurs devenir extrèmement brillantes; en outre, les couleurs vues par transparence sont changées en leurs complémentaires et les négatifs ainsi obtenus sont brillants. — Le R. P. Colin communique ses obser- ations magnétiques faites à Tananarive de mai 1904 à avril 1905 : la déclinaison a diminué de 732; l'incli- maison à augmenté de 4/15! ; la composante horizontale a diminué de 0,000.28. — M. H. Hergesell décrit les ascensions de ballons-sondes effectuées au-dessus de a mer par le Prince de Monaco en avril 4905. On emploie un système de deux ballons, dont l'un doit éclater ou se détacher à une certaine hauteur, tandis que l’autre, plus petit, qui commence à tomber après Ja chute du premier ballon, sert de parachute à l'ins- rument. — M. P. Weiss à reconnu que, dans la direc- tion de facile aimantation de la pyrrhotine, l'intensité d'aimantation atteint la saturation dès les champs les plus faibles et la conserve jusqu'aux champs les plus élevés. -—- MM. A. Jaquerod et F.-L Perrot ont déter- miné la dilatation de divers gaz de 0° à 1.067°,#, point de fusion de l’or, puis leur densité et leur poids molécu- aire à cette dernière température. Ils ont {rouvé : 0,32; Az, 28,0155; CO, 28,009 ; CO*,43,992. Pour l’azote, la valeur obtenue correspond au poids atomique 14,008 ; pour CO*, il y a une légère dissociation, inférieure à 4/5.000. — M. J. Duclaux, par une méthode analogue celle qu'il a employée pour la conductibilité, a mis en évidence l'existence d'une pression osmotique notable, pouvant dépasser { mètre d'eau, dans les solu- tions colloïdales. — M. M. Berthelot critique la mé- thode de combustion progressive par un courant d'oxygène, employée par M. Thomsen pour la déter- Mination des chaleurs de combustion, et montre la supériorité de la méthode de la bombe calorimétrique. — MM. H. Moissan el Martinsen ont préparé avec acilité le chlorure de thorium Th CI* et le bromure Ph Br' par l'action du chlore ou du brome sur la fonte de thorium. Mais ces deux composés, fondus ou en vapeurs, attaquent le verre et la porcelaine avec facilité, ce qui rend difficile leur obtention dans un grand élat de pureté. — M. H. Pécheux a constaté que les alliages Sn-Al, Bi-Al et Mg-Al décomposent Peau distillée avec production d'hydrogène et oxyda- ion de l’aluminium.— M. E. Rengade, en oxydant rapi- dément par l'oxygène le césium-ammonium dissous dans un excès d'ammoniac, a obtenu les oxydes Cs°0? blanc rosé, Cs’0* jaune et un oxyde intermédiaire Cs°0* brun foncé, tous trois crislallisés. Dans l'oxydation lente, le métal-ammonium réagitsur le bioxyde formé en donnant le l'amidure et de l'hydrate de protoxyde. — MM. R. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES _—— _-—— — ———]—]— |”—’”—’”—"’"———…"”"’—…——"….—"—"—" "."." — — — — 584 Fosse et A. Robyn, en copulant le bromure de dinaph- topyryle avec la résorcine et le pyrogallol, ont obtenu un diphénol dipyrylé et un triphénol tripyrylé, inso- lubles dans les alealis aqueux, solubles dans les alcalis alcooliques. — M. E. P. Alvarez décrit une nouvelle réaction caractéristique de l'aconitine; elle consiste dans la production d'une couleur verte très intense après traitement successif par le brome, l'acide nitrique, la potasse alcoolique et le sulfate de cuivre. — MM. A. Fernbach et J. Wolf ont trouvé dans l'amidon de pois l'exemple d'un amidon naturel présentant les mêmes caractères que l’amidon coagulé produit artificiellement en partant de la fécule de pomme de terre. — MM. J. Ville et Derrien ont préparé à l'état cristallisé la mé- thémoglobine fluorée, dont l'existence est contestée par MM. Piettre et Vila. Ses cristaux sont caractérisés par leur spectre et leur dichroïsme. — M. N.-A. Barbieri montre que le protagon extrait par Liebreicht du tissu nerveux est, en réalité, un mélange de cérébrine et d'acide cérébrique de Frémy. 30 SCIENCES NATURELLES. — M. L. Lapicque à étudié les Kader et les Moudower, tribus négroïdes de l'Hin- doustan; elles sont toutes dolichocéphales; ce sont d'anciennes tribus de la plaine, réfugiées dans la mon- tagne pour échapper à leurs ennemis. — M. A. Polack a constaté que le phénomène du contraste simultané des couleurs apparaît même avec des éclairs lumineux de 05,1, ce qui élimine complètement les images acci- dentelles par mouvement de l'œil. — M. J. Tribot a reconnu que, chez le cobaye, la teneur en matières grasses des divers tissus passe par un maximum atteint vers le cent quatre-vingtième jour pour le tissu mus- culaire et le cent vingtième jour pour le tissu nerveux. La teneur en matières albuminoïdes passe par un mi- nimum aux mêmes époques. — M.J. Bergonié signale une nouvelle méthode de protection contre les rayons X qui consiste à placer tout l'entourage du malade au- dessus du plan horizontal prolongeant l’anticathode, partie indemne de rayons X, et, au-dessous de ce plan, le malade seul. —MM. A. Laveran et Vallée rapportent une expérience dans laquelle des larves de Æhipi- cephalus decoloratus, provenant d’une tique nourrie sur un bovidé infecté de spirillose, ont transmis celte ma- ladie à un bovidé sain. — M. P. Vuillemin propose de changer le nom de Spirochaete pallida donné par Schau- dinn à l'agent présumé de la syphilis, et qui ne sau- rait convenir à cet organisme, par celui de Spyronema pallidum.— M. Ch. Gravier décrit un Polychète d’eau douce, trouvé par M. Seurat dans une pièce d’eau stagnante des îles Gambier, le Perinereis Seuratr. Il paraît dérivé d’une forme marine adaptée progressi- vement à l'eau douce. -- M. Leclerc du Sablon, par des expériences de décorticalion annulaire, a mis en évidence les échanges de réserves qui ont lieu entre la tige et la racine; à la fin de l'hiver et au commentce- ment du printemps, ils vont de la racine vers la tige, et de mai à octobre en sens inverse. — MM. A. Delage et H. Lagatu ont étudié la décomposition des miné- raux de la terre arable par l'observation de celle-ci en plaques minces. — M. F. Laur annonce que le son- dage d’Atton(Lorraine)a rencontré une seconde couche de houille et qu'il s'est dégagé, en même temps, du grisou à l’orifice du trou de sonde. — M. Ch. Depéret fait un exposé critique des méthodes employées pour établir la filiation des êtres fossiles. La méthode qui repose sur la considération des adaptations lonction- nelles-lui paraît présenter de graves dangers, parce qu'elle entraine à confondre l'évolution réelle d'un groupe d'animaux fossiles avec ce qui n’est effective ment que l'évolution fonctionnelle d'un organe. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 30 Mai 1905. M. N. Gréhant est élu membre titulaire dans la Sec- tion d'Anatomie et Physiologie. M. A. Manouvriez montre des que l'infiltration 52 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES eaux salées (2 0,4) provenant de poches souterraines peut rendre les mines de houille réfractaires à l’in- festalion par les larves d’ankylostome. Dans douze fosses de la Compagnie d’Anzin où ces infiltrations existent, on n'a jamais constaté l’ankylostomiase chez les mineurs. — MM. A. Poncet et R. Leriche caracté- risent, sous le nom de tuberculose inflammatoire, une nouvelle forme de tuberculose, due à une variété de lésions toxiniennes, d'origine bacillaire, capables d’en- gendrer un peu partout des infiltrations inflammatoires et des scléroses localisées ou diffuses. Séance du 6 Juin 1905. MM. Yersin (de Nha-Trang) et E. Wertheimer (de Lille) sont élus correspondants nationaux dans la Divi- sion de Médecine. M. P. Reynier présente un Rapport sur un travail du D' Brunswie Le Bihan relalif à l'assistance médi- cale aux indigènes en Tunisie et l'hôpital Sadiki. L’au- teur à installé à Nabeul un petit hôpital, avec le con- cours financier de lAdministration des Habous. En 190%, 23.000 consullations externes ont été données, 22.000 malades hospitalisés el 660 opérés. — M. Chauvel lit le Rapport sur le concours pour le Prix Meynot. — M. Vaillard expose le grand intéret qu'il y aurait à ce que la loi sur la déclaration obligatoire des maladies contagieuses fût partout obéie au point de vue de la prophylaxie de ces maladies dans l'armée. La déclara- tion d'une maladie contagieuse permettrait de sup- primer les permissions pour les localités infectées, el d'éviter ainsi la transmission de certaines épidémies à la caserne. — M. Sevestre présente une petite ma- lade de sept ans atteinte d’achondroplasie, et dont le père est également atteint de ce vice de conformation. — M. Fabre lit une note sur le traitement des infec- tions puerpérales à streptocoque par les injections intra-utérines à l'essence de térébenthine et les injec- tions sous-cutanées de sérum lérébenthiné. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 27 Mai 1905. M. P. Salmon a constaté la présence du Spirochaete pallida chez un enfant atteint de syphilis héréditaire. — M. A.-M. Bloch présente un malade porteur d’une plaie ancienne traitée par l'exposition à la lumière du Jour; la cicatrisation est à peu près complète après dix-sept jours de traitement. — M. Thiroux a découvert chez la souris domestique, au Sénégal, un Trypanosome nouveau, auquel il donne le nom de Tr. Duttoni. — M. A. Frouin à constaté que l'injection ou l’ingestion de suc gastrique détermine une augmentation de la sécrétion stomacale; ilne s’agit pas d’une action directe, ni d'une action due aux ferments. — MM. M. Caullery et F, Mesnil : Phénomènes de sexualité dans le dévelop- pement des Actinomyxidies (voir p. 580). — M. H. Stas- Sano à reconnu que les oxydations de nature chimique ou diastasique sont accélérées par une faible quantité d’un sel de mercure, et retardées où empèchées par une quantité plus grande. — MM. Remlinger et O. Nouri ont observé que le virus vaccinal traverse la bougie Berkefeld V en conservant sa virulence. — M. A. Rodet montre que le bouillon de culture des bacilles d'Eberth est faiblement toxique, ce qui prouve l'existence d’une exo-toxine de ce bacille. — M. P. Abric a constaté que les mouvements des tentacules de l'Escargot ont moins comme déterminants directs des organes extérieurs à eux que la musculature propre du doigt de gant tégumentaire qui les forme et du tégument général céphalique. — MM. A. Gilbert ;et M. Herscher signalent l'existence d'une cholémie physiologique : la quantité de bilirubine contenue dans le sang normal est de 2,7 centigrammes par litre de sérum. — M. H. Bierry et Mme Z. Gatin-Gruzewska ont observé que l'injection d'adrénaline pure produit une glycosurie et une hyperglycémie notables; la glyco- surie parait être en relation avec le pancréas. — M. E. Fauré-Frémiet a observé, chez le Cochliopodiu pellucidum, des grains fuchsinophiles, comparables à des grains de sécrétion, dans la formation desquels le noyau joue un rôle. Séance du 3 Juin 1905. M. H. Vincent a entrepris des expériences sur le passage du virus vaccinal à travers les filtres et n'a pas encore obtenu de résultat nettement positif. — Les même auteur montre que la détermination qualitative et quantitative des microbes anaérobies dans l'analyse des eaux de boisson a une grande importance, étant donnée la relation étroite qui existe entre le degré d’adultération et la proportion de ces organismes. = M. B. Teissier présente un nouvel uréomètre utilisant la réaction des hybromites sur l’urée. — M. À. Desgrez et Me B. Guende: Varialions du coefficient de démi= néralisation dans la dyscrasie acide (voir p. 580). —= M. Dehon a constaté que le petit chat en inanition se comporte, habituellement, au point de vue de la désin: tégration protéique, comme un animal adulte, maigre; sans réserve azotée et sans réserve de graisse. MM. H. Guillemard et P. Vranceano décrivent une méthode permettant de mesurer la toxicité des alca= loïdes urinaires, par séparation de ces derniers at moyen de l'acide silicotungstique. A l’état physiolo= gique, la toxicité alcaloïdique entre pour 48 à 25 0 dans la toxicité globale de l'urine. — M. Th. Bondouy« a constaté l'existence, dans le Lathraea squamaria; d'un ferment soluble analogue, sinon identique, l'émulsine. — MM. A. Gilbert et P. Lereboullet on reconnu que, dans la cholémie simple familiale, teneur du sang en bilirubine est de 59 milligrammes par litre de sérum sanguin. — M. G. Seillière a trouvé, dans le tube digestif de certaines larves xylophages de Coléoptères, une diastase hydrolysant le xylane et qui nomme xy/anase. — MM. F. Curtin et Gellé pré sentent leurs recherches sur la sclérose amorphe dis= socianté du pancréas et signalent la fréquence des formes de transition des ilots de Langerhans dans cer taines lésions du pancréas diabétique. — M. L. Bla ringhem, étudiant l'action des traumatismes sur les plantes ligneuses, a observé la présence fréquente de fascies herbacées et ligneuses au milieu des jeunes pousses. — M. E. Maurel montre que c'est le zér@ physiologique qui règle la température du lit, qui rest sensiblement constante quelle que soit la température de l'appartement. — M. L. Lapicque : Recherches su l'ethnogénie des Dravidiens (voir p. 581). — Ml° Ch. Phi loche à reconnu l'existence de deux périodes dans l'action de l’amylase du malt sur l'amidon soluble, RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 16 Mai 1905. M. A. Weber montre que l'étude des variations de l& région ptérygoide du crâne humain se ramène à celle des variations d'importance et de direction du musele ptérygoïdien interne. — M. R. Dupond à reconnu que le bacille du charbon est doué de mouvements lents el flexueux, qui disparaissent à 50-609, — M. L. Mercier a observé des phénomènes de phagocytose très nets dans des sacs lymphaliques dorsaux de Grenouille adulte où l’on avait introduit des fragments de queues de têtards. — M. L. Cuénot présente une sole dont les deux faces sont colorées, anomalie qui semble prouver que la coloration habituelle de la face inférieure est due à une autre cause que la moindre quantité de lumière reçue, — M. P. Bouin arrive à la conclusion que les deux dénominations d’ergastoplasme et de mitochondries servent à désigner des formations idens tiques. — M. de Drouin de Bouville déduit de ses études sur la reproduction chez l'écrevisse que, pou peupler une rivière ou une pièce d'eau, il faut à déposer trois femelles pour un mäle, y introduire les écrevisses avant le 15 octobre et choisir des sujels males de taille un peu supérieure à celle des femelles: ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 383 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE Séance du 16 Mai 1905. M. Boinet signale le cas d'une vieille femme dont le poumon droit offrait deux lobes moyens et un lobe azygos et dont le poumon gauche était sillonné par une série de scissures. Les anomalies dans le nombre des lobes des poumons peuvent être interprétées en pie par les idées d’Aéby et d'Hardivillier sur l'homo- ogation des lobes pulmonaires. — M. A. Billet à observé, dans la dysenterie amibienne de Cochin- chine, une éosinophilie à la fois intestinale et héma- tique caractéristique, qui peut atteindre le taux de 42 à 25 °/, et même au delà. — M. L. Bordas a éludié la morphologie et la structure des glandes mandibu- laires des larves d'Arctiidae. — MM. Ch. Livon et A. Briot ont constaté que le suc salivaire des Céphalo- podes n'agit pas sur le système musculaire, mais qu'il est un poison pour le système nerveux des Crustacés. — M. Boy-Teissier a reconnu que l’adrénaline peut être employée dans les crises cardiaques avec cyanose et hypotension en injection sous la peau de l'abdomen à la dose de 1/2 mgr; elle élève la tension générale et soulage le cœur. SOCIÉTÉ FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 2 Juin 1905. . M. Abraham a utilisé la vitesse limite atteinte par un entonnoir pesant tombant dans un seau rempli d’eau pour produire le mouvement uniforme du chariot qui porte la plaque de verre ou le papier enfumé. MM. A. Dufour et J. Lemoïne réalisent quelques-unes des expériences auxquelles se prête l'appareil : 1° Etude du mouvement uniforme ; inscription du mouvement d'un diapason ; 2 Etude de la résistance des fluides au mouvement; 3° Inscription du mouvement d’un pen- dule libre, amorti par frottement solide, amorti par résistance fluide ; 4° Relation entre la durée de l’oscil- lation d’une lame et son moment d'inertie. L'appareil se prête, d'ailleurs, à toutes les inscriptions que l’on a l'occasion de faire dans les laboratoires de Physique ou de Physiologie. Il peut être construit économique- -ment, tout en gardant une précision suftisante pour la vérification de certains théorèmes de la Mécanique. — M. Eugène Bloch a établi antérieurement‘ l'existence de gros ions (mobilité de 16 de millimètre) dans l'air qui a passé sur le phosphore et dans divers gaz pré- parés par voie chimique. M. Langevin* a trouvé des ions analogues dans l'air atmosphérique ordinaire. La Communication actuelle a pour but de montrer l’exis- tence de gros ions dans les gaz issus d’une flamme. Ce fait était, d’ailleurs, rendu vraisemblable par les re- “cherches déjà anciennes de M. Mäc Clelland (1898). La “méthode employée a consisté à envoyer les gaz issus d'une petite flamme, et complètement refroidis, à tra- vers un condensateur cylindrique chargé. La conduc- ïbilité qu'ils y provoquent permet de construire, avec un électromètre sensible, la courbe dite de saturation. “Celle-ci, si l'on connaît le débit du gaz et les dimen- sions géométriques de l'appareil, permet très simple- ment de savoir : 4°Si l'on a affaire à des mobilités bien définies ; 2° Quelle est leur valeur approximative. Les résultats obtenus ont été les suivants : À mesure que les gaz s'éloignent de la flamme, la mobilité des ions qu'ils contiennent diminue, en mème temps qu'elle evient moins bien définie. Cette diminution est sans oute due à une agglomération matérielle croissante qui se forme autour du centre chargé. Cette agglomé- ration ne prend finalement un état stable qu'au bout »« Séances de la Société, février 1903 et février 1904. 2 Séances de la Société, novembre 1904 et mai 1905. de quinze à vingt minutes, et la mobilité correspondante, - 1 ns : : de l'ordre de 100 de millimètre, est bien celle qui est caractéristique des gros ions. L'absence d’intermé- diaires stables entre gros et petits ions est ainsi con- firmée, mais avec cette correction que la formation des gros ions peut être fort lente. M. P. Langevin pro- fite de l’occasion qui lui est offerte par la communica- tion de M. Bloch pour signaler quelques résultats expé- rimentaux qui démontrent la production d'ions de faible mobilité par les aigrettes; de gros ions sont pro- duits par laigrette dans l'air filtré sur du coton, plus facilement par la positive que par la négative. Leurs mobilités, mesurées immédiatement après leur forma- tion, s'échelonnent depuis-quelques millimètres jusque ; 1 RES bien au-dessous de 100 de millimètre. Is sont donc de grosseurs très différentes et probablement constitués par des particules métalliques arvachées à la pointe. — M. C. de Watteville expose les recherches de M. Hem- salech relatives à la constitution de l’étincelle élec- trique. Au début de ses expériences, M. Hemsalech employait, pour enregistrer le phénomène, une pellicule photographique fixée sur une roue à laquelle on don- nait un rapide mouvement de rotation. Cette méthode, dont le principe est dû au Professeur Dixon, est appli- cable lorsque la lumière émise par une seule étincelle est suffisante pour impressionner la pellicule. La roue faisant 120 tours par seconde, la pellicule était animée d’une vitesse linéaire de 90 mètres à 100 mètres par seconde. L'image de l'étincelle éclairait la fente d'un collimateur et l'image de cette fente était elle-même projetée, avec ou sans l’interposition d’un prisme, sur la pellicule tournante. Ces premières expériences ont conduit aux résultats suivants : 1° Comme les images des oscillations sont équidistantes, quelle que soit la nature des électrodes (le reste du circuit restant iden- tique à lui-même), on en conclut que la résistance entre les électrodes ne peut constituer la partie prin- cipale de la résistance du circuit. En effet, la quantité de vapeur dégagée dans la décharge varie beaucoup avec la volatilité des électrodes et il doit en ètre de même pour la résistance de cette vapeur; 2° Ensuite, fait d'une très grande importance, si l’on introduit une certaine self-induction dans le circuit de décharge, le spectre subit des modilications: en particulier, les raies de l'air disparaissent. M. Hemsalech a consacré un remarquable travail à l'étude de ces modifications et de leurs rapports avec les variations des conditions du circuit de décharge. Mais, en projetant simplement l'image de l’étincelle oscillante sur la fente du spec- troscope, on n'observe qu'une synthèse de phéno- mènes, car le spectre obtenu résulte de la superposi- tion des spectres élémentaires fournis par chaque oscillation. M. Hemsalech à essayé de les séparer en insufflant un courant d'air dans l'étincelle. Des expé- riences faites avec une simple pompe à main lui avaient déjà montré que ce procédé pourrait le conduire au résultat désiré. En effet, si l'on emploie la méthode des raies longues et courtes de Lockyer (elle consiste ici à placer perpendiculairement à la fente la ligne qui joint les électrodes) et qu'on fasse agir sur l'étin- celle un courant d'air parallèle à la fente, on observe que les raies dues à la vapeur métallique sont dépla- cées et allongées dans le sens de leur longueur, tandis que la position du spectre de la décharge initiale ne se trouve pas affectée. M. Hemsalech a été conduit à em ployer un dispositif qui consiste essentiellement en deux plaques de cuivre taillées en biseau, faisant un certain angle entre elles. C'est dans l'intervalle de ces deux plaques qu'éclate l'étincelle et que circule le cou- rant d'air. L'apparence de l'étincelle varie avec les conditions de la décharge. Si la résistance est grande et la self-induction faible, on a l'étincelle continue de Feddersen : le courant d'air lui donne l'apparence d’une longue flamme qui relie les électrodes. Si, la self- 584 ACADÉMIES ET SOCIÈTES SAVANTES induction restant faible, la résistance augmente, l’étin- celle devient intermittente. L'action du courant d'air la sépare en une série d'étincelles très fines, toutes dans la même direction et analogues à celles obtenues par Feddersen dans le miroir tournant. Enlin, l'adjonc- tion d'une bobine de self-induction auxiliaire donne lieu à l’étincelle oscillante. Lorsque le courant d'air est bien réglé, les oscillations sont très nettement séparées et occupent la même position respective d'une décharge à l'autre, de sorte que le phénomène présente pour l'œil et la plaque photographique une apparence d'immobilité. On peut en profiter pour véri- fier des formules connues; ainsi l'espacement des oscillations permet de voir que la fréquence varie comme l'inverse de la racine carrée de la capacité, etc. La courbure apparente des ‘oscillations permet de me- surer la vitesse des particules d'azote qui transportent le courant électrique. Cette vitesse diminue avec l’aug- mentation de la capacité et elle est directement pro- portionnelle à la fréquence d'oscillation. D'autres expé- riences, M. Hemsalech conclut que les courants de Foucault augmentent la fréquence d'oscillation par seconde, mais sont sans influence sur le nombre d’'os- cillations dans chaque décharge, tandis que l'hystérésis du fer détruit les oscillations et diminue plus ou moins la fréquence. — M. Armagnat présente deux nouveaux modèles d'interrupteurs de bobines construits par M. Carpentier. Le premier estun interrupteur Wehnelt dans lequel la cathode est un tube de plomb qui entoure l'anode. Quand l'interrupteur fonctionne, l'échauffe- ment de l'électrolyte détermine une circulation très active dans le tube, de sorte que toute la masse du liquide est amenée successivement au contact de l’'anode et que l'échauffement est très régulier. Le second interrupteur est une combinaison du rupteur Carpentier avec un relais polarisé. Quand le relais est excité par un courant alternatif, la palette de fer du rupteur prend un mouvement exactement synchrone avec le courant; il se produit done une rupture par période et les circuits sont disposés de telle sorte que cette rupture peut ètre réglée au moment précis où le courant passe par son maximum dans la bobine d'in- duction reliée au rupteur. — M. H. Abraham signale un procédé de fabrication électrolytique de fils métal- liques très lins.Le procédé employé est assez voisin du procédé de fabrication des fils de platine dits à la Wo/- laston, et qui est bien connu. Le fil dont on veut dimi- nuer la section est pris comme électrode positive dans une électrolyse; on mesure de temps en temps sa résis- tance électrique, et l'on arrête le courant quand la section du fil a atteint la valeur voulue. Le courant est amené à la-fois aux deux bouts du fil par des tiges métalliques auxquelles le fil a été soudé. On a soin que ces tiges ne plongent pas dans le bain électrolytique pour éviter la formation de couples locaux. Le fil pend librement au-dessous de ces tiges, et il est maintenu dans le bain par deux crochets de verre auxquels on donne une forme en col de cygne afin que, lorsque l'on retirera le fil, il ne se produise pas de lame liquide mince dont la tension superficielle pourrait amener la rupture du fil. Le bain doit être très dilué, afin que sa résistivité soit très grande, et que, par conséquent, le courant se distribue uniformément sur toute la lon- gueur du fil. On emploie l'eau distillée contenant quel- ques millièmes d'acide sulfurique pour le traitement des fils de cuivre, ou bien de nitrate d'argent pour le traitement des fils d'argent. L'opération doit être con- duile très lentement, afin que le sel métallique qui se forme autour du fil ait le temps de se diffuser dans le bain. Faute de cette précaution, le régime de l’électro- lyse devient instable. Les fils traités avec les précautions indiquées conservent une homogénéité suffisante pour qu'on puisse calculer approximativement leur nouvelle charge de rupture, tout simplement en divisant leur charge de rupture ancienne par le rapport de leur résistance électrique actuelle et de leur résistance élec- trique initiale. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 2 Mars 1905. Sir Norman Lockyer : Nouvelles recherches Sur la classification thermique des étoiles (11). Ce Mémoire contient une discussion sur les plus récentes photogra= phies obtenues avec un appareil photographique pris= matique de calcite-quartz. Chaque négatif contenait les spectres de deux étoiles obtenus dans des conditions identiques d'altitude, d'exposition etde développement; leurs températures respectives ont été estimées en com= parant les intensités relatives de leurs radiations ultra= violettes et rouges. Le terme « température » doit être entendu comme comprenant les effets possibles des variations électriques. Dans un Mémoire précédent, communiqué à la Société en février 1904, l’auteur mon- trait qu'en comparant ainsi les températures relatives des genres stellaires placés à des niveaux différents de la courbe thermique de classification chimique, leur arrangement sur cette courbe était justifié. Dans ces recherches récentes, les températures relatives des genres placés sur les mèmes horizons, mais sur des côtés opposés de la courbe, ont été comparées de façon analogue, et leur égalité de température, telle qu'elle était supposée d'après la classification chimique, a été confirmée. Les résultats ont aussi indiqué que des différences spécifiques existent, qui nécessiteront la subdivision des « genres» proposés précédemment en « espèces ». M. G. C. Simpson : L'electricité atmosphérique sous les hautes latitudes. L'auteur come munique les résultats d'une année d'observations (oct 1903-oct. 1904) sur l'électricité atmosphérique faites à Karasjok (Norvège) et d’un mois d'observations sur là radio-activité atmosphérique faites à Hammerfest. Le cours annuel du gradient du potentiel à Karasjok s'ac- corde avec la règle générale pour l'hémisphère nord: il s'élève rapidement d'octobre à février, où il atteint uns maximum, puis il s’abaisse plus rapidement jusqu’à la. fin de mai, après quoi il reste constant jusqu'en octobre: Le cours de la dissipation est exactement l'inverse de celui du potentiel, les deux courbes étant les images l'une de l’autre dans un miroir. La courbe de l'ionisations consiste en une chute presque linéaire de six mois, du commencement de septembre à la fin de février, suivie d’une ascension similaire de mars à la fin d'août. Ces. trois facteurs ont chacun une période diurne. Ils sont influencés par les conditions atmosphériques et influent les uns sur les autres : une faible dissipation et une, faible jionisation sont accompagnées par de fortes valeurs du potentiel et vice-versa. La radio-activité présente également une période annuelle, avec un maximum en décembre (129) et un minimum en juin 47), et une période diurne prononcée, avec un maxi= mum (162) dans les premières heures du matin et un minimum (58) vers midi. Elle augmente quand la tems pérature s'abaisse, s'élève en même temps que l'humidité atmosphérique, diminue quand la force du vent aug= mente. Ces observations confirment l'hypothèse d’Elsten | et Geitel que la source de l'émanation de l'atmosphère. est dans le sol. — M. R. J. Strutt présente ses rechers ches sur les minéraux radio-actifs. A1 indique les méthodes employées pour la détermination de l’ura= nium, du radium, du thorium, de l'hélium et de l'actis vité totale de ces minéraux. Les résultats obtenus lonb conduit aux conclusions suivantes : 1° La quantité des radium dans un minéral est proportionnelle à celle dé l'uranium ; 2 Les minéraux thoriques contiennent invas rviablement la combinaison uranium-radium; 3° L'hé lium ne se présente jamais, sinon en quantité très faible, quand le {horium n'est pas présent; l'hélium des minés raux est done produit probablement plus par le thorium que par le radium ; 4° Les minéraux thoriques varient beaucoup au point de vue de leur pouvoir d'émanation: — M. J. Lunt présente ses recherches sur le spectra du silicium. W a reconnu que les lignes du silicium | obtenues par Lockyer et Baxandall au moyen de tubes ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES BI D] à vide remplis de composés gazeux du silicium ont leur origine autant dans la matière du tube de verre capil- -laire que dans le composé gazeux introduit. Il a obtenu, “au contraire, un bon spectre du silicium en faisant jaillir l'étincelle, dans une atmosphère d'hydrogène, entre des perles de silicates de sodium ou de potassium. Il en résulte que la ligne À 4096,9 n’est pas une ligne du silicium; mais les lignes 4089,1 et 116,4 appar- tiennent bien à ce corps. L'auteur à trouvé deux paires de lignes nouvelles à À 4191,0 et #198,5. Enfin, il donne rune liste des lignes du fluor qui accompagnent généra- lement celles du silicium dans le spectre de ce dernier. — M. G.-W. Walker : Sur la résistance électrique au mouvement d'une sphère chargée dans un espace libre ou dans un champ de force. Séance du 9 Mars. M. R.-D. Oldham à étudié la vitesse de propagation du tremblement de terre du Guatémala du 19 avril 1902 au moyen des observations enregistrées dans un grand nombre d'observatoires sur toute la surface de la Terre. 11 à constaté que, pour la première phase (commence- ment de l'enregistrement), la vitesse apparente de pro- pagation augmente continuellement avec la distance, à peu près jusqu'à 145°, où elle commence à diminuer. La seconde phase (marquée par une augmentation soudaine et considérable de l’amplitude de la pertur- « bation) présente aussi une augmentation de la vitesse apparente de propagation avec la distance, mais elle “ne va que jusqu'à 100° environ de l’origine. Enfin la troisième phase (caractérisée par des ondulations à — longue période, suivie de plus rapides) paraît se pro- pager avec une vitesse uniforme. — M. C.-C. Farr à ht quelques observations continues de la vitesse de dissipation des charges électriques à l'air libre. La — conductivité de l'air pour les deux électricités positive et négative est très irrégulière; mais, en moyenne, … l'électricité négative est dispersée plus rapidement que “la positive. Le rapport g de la conductivité de l'air — pour l'électricité négative à la conductivité pour l'élec- …tricité positive est, en movenne, de 1,16. Mais g peut È descendre jusqu'à 0,4 lorsqu'il y a un renversement du … signe de la charge atmosphérique. L'auteur à constaté, —_ en outre, un double maximum et minimum diurne - dans la conductivité de l'air pour les charges des deux signes, mais à des heures variables suivant les saisons. — M. W.-R. Bonsfeld étudie les rapports des dimen- Sicus des ions avec la conductibilite des électrolvtes. Si les résultats de Stokes relatifs au mouvement d'une sphère dans un fluide visqueux sont appliqués au mou- vement des ions dans un électrolyte binaire, il est nécessaire, pour concilier la théorie avec les faits empiriques, de supposer que les ions sont des agrégats moléculaires en grande partie composés de molécules d'eau, la dimension d'un ion dépendant de la quantité d'eau en combinaison avec lui et étant une fonction de la température et de la concentration. Dans cette hypo- thèse, le coefficient d'ionisation devient : AA ol 1 À PTIT où L est l'hydralation et f la fluidité de la solution. vec ce coefficient d'ionisation, la loi de van't Hoff, modifiée par la substitution de l'hydratation du corps dissous à sa concentration, donne des résultats qui concordent avec l'expérience à 1/2000 près. Les olumes ioniques calculés au moyen des conductibilités s'accordent avec les volumes de solution calculés au moyen des densités, ce qui confirme l'hypothèse faite. Séance du 16 Mars 1905. M. ©. Hahn : ln nouvel élément radio-actif qui égage de l'émanation du thorium. La préparation adio-active a été obtenue du bromure de baryum radi- fère, provenant de la thorianite de Ceylan, en le frac- tionnant pour séparer le radium. Elle renfermait quelques traces de fer et d'autres impuretés dans les portions les plus solubles, et a été précipitée pai lammoniaque. De cette préparation, on a obtenu une quantité d'environ 10 milligrammes d’un oxalate forte - ment radio-actif, dégageant une forte émanalion et communiquantune brillante luminosité aux écrans sen- sibles. L'auteur à trouvé que l’émanation est iden- tique à celle du thorium; divers échantillons ont donné pour la demi-période de’ décroissance de 52 à 55 se- condes. Il à trouvé un peu plus de {1 heures 1/2 pour la demi-période de l'activité induite. L'émanation abandonnée par les 10 milligrammes d'oxalate dissous dans de l'acide chlorhydrique correspond en intensité à celle d'un kilogramme de thorium en solution: par conséquent, elle est plus de 100.000 fois plus forte que l'émanation commune du thorium comparée au même poids. Un nouveau travail a permis de séparer environ 20 milligrammes d’une substance donnant presque 250.000 fois plus d'émanation que le ihorium. I] n'a pas encore été établi si cette substance active est le constituant radio-actif constant des préparations de thorium, ou si c’est un autre élément radio-actif nou- veau. L'auteur espère obtenir un produit encore plus fortement radio-actif et pouvoir décrire plus en détail les propriétés de la substance. Des recherches récentes paraissent montrer que la quantité de cette substance dans le sol est comparable, quoique en bien moins grande proportion, à celle du radium.— Sir William Ramsay : Determination des quantités de néon et d'hé- lium dans air atmosphérique. L'auteur a déjà essayé d'estimer les quantités de krypton et de xénon dans l'air par l’évaporation de quantités relativement impor- tantes d'air liquide. Sans aucun doute, une grande quantité de krypton et une petite quantité de xénon se sont évaporées ; par conséquent, les chiffres donnés sont nécessairement des minima. Le Dr Travers et l'au- teur estimèrent grosso modo les proportions de néon et d'hélium dans l'air; on connaissait la quantité de chaque gaz obtenu, mais la quantité d'air de laquelle ils provenaient ne pouvait être que supposée. Les chiffres étaient : pour l'hélium, une ou deux parties pour un million, etpourlenéon une ou deux parties pour 400.000. La méthode ingénieuse inventée par Sir J. Dewar, qui consiste à refroidir un morceau de charbon de bois par l'air liquide et à l'employer comme absorbant pour les gaz, permet facilement d'obtenir une estimation presque exacte des quantités des constituants les plus volauls. Après que l'oxygène, l'azote et l'argon ont été absorbés d'environ 16.000 centimètres cubes d'air par le contact de 100 grammes de charbon de bois refroidi par l'air liquide, on à retiré au moyen d'une pompe le néon et l'hélium. Ceux-ci ont été débarrassés de traces de gaz plus lourds par une méthode analogue, et une séparation partielle, mais presque complète, des deux gaz a été effectuée de la même facon. Les quantités totales ont été mesurées par une sorte de burette, dans laquelle le niveau du mercure était fixé en un point, et on lisait les différences de pression. Voici les résuitals : DANS L'AIR DANS L'ARGON POURCENTAGE 1 volume impur CR dans 1 volume dans en poids en volume Néon 80.790 751 0.000.086 0,000.042.3 Hélium . . 245.300 2.300 0,000.009.56 0.000.004.0 Ensemble. 61.000 571 Il n'a pas été possible de déterminer l'hydrogène libre dans cette quantité d'air; après que le mélange impur de néon et d'hélium à été mêlé à une trace d'oxygène et soumis à l’étincelle pendant quelques minutes, on n'a observé aucune contraction : le volume des gaz était le même avant et après le passage de l’étincelle, —- MM. B. Moore, W. Alexander, R.-E. Kelly et H.-E. Roaf communiquent leurs recherches sur l'absence ou la diminution marquée de l'acide chlorhydrique libre du contenu gastrique dans les affections malignes d'organes autres que l'estomac. On sait depuis longtemps 586 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES que l'acide chlorhydrique libre fait défaut dans un urand nombre de cas de cancer de l'estomac. Ce qu'on n'avait pas encore remarqué, et ce que les auteurs mettent clairement en lumière, c'est qu'il en est de même dans la plupart des affections malignes des organes autres que l'estomac. Il en résulte que l'absence d'HCI libre dans le suc gastrique n’est pas due à une action locale sur l'estomac, mais à une modification du sang, qui peut, soit être la cause commune de la tumeur et de l'absence d'acide, soit être le résultat de la tumeur et la cause de l'absence d'acide. Les auteurs montrent que la suppression de l'acide n’est pas due à des produits secondaires formés par la tumeur maligne et qui neutraliseraient les ions acides du plasma, car, dans ce cas, la sécrétion acide devrait se rétablir après l'enlèvement de la tumeur; or, il n'en est rien. Les auteurs en concluent que c’est la condition du sang, très probablement l'absence ou la diminution marquée des ions acides, qui est la cause prédisposante à la for- mation des tumeurs. — M..E. Emrys-Roberts, au cours de recherches sur la première implantation de l'embryon du cochon d'Inde, a été frappé de la façon dont la nutrition de l'embryon s’accomplit pendant le temps qu'il reste libre dans la cavité utérine. Pour l’auteur, il recoit sa nourriture du milieu où il vit; elle est constituée par le produit de la sécrétion des glandes utérines ou autres. Cette sécrétion, qui consiste en mucus et probablement en albumine, doit être assimilée par l'embryon après avoir subi un processus de diges- tion dans les cellules du trophoblaste. Des phénomènes analogues se passent pour l'embryon humain. M. H.-C. Bastian signale deux séries de transforma- tions hétérogénétiques qu'il a observées dans les gros œufs d'un des plus grands Rotifères : 1° La transforma- tion du contenu entier d’un œuf d’Aydatina en un Infusoire cilié simple (O{ostoma); 2° La segmentation de l'œuf d'Hydatina en 12 à 20 masses sphériques, dont quelques-unes se développent en donnant des embryons de Vorticelles, d'autres des embryons d'Oxytiches. — M. J. J. Lister : Sur le dimorphisme des espèces an- glaises de Nummulites et les dimensions de la mégalo- sphère par rapport à celles des tests microsphériques et mégalosphériques dans ce genre. Séance du 23 Mars 1905. MM. H.-T. Brown et F. Escombe communiquent leurs recherches sur les processus physiologiques des feuilles vertes. Leur but était d'obtenir une mesure directe du degré de photosynthèse dans la feuille, lorsqu'elle est entourée d’une atmosphère contenant une quantité de CO* voisine de la normale (0,03 °/5), puis des indications plus exactes sur l'énergétique de la feuille, spécialement sur son pouvoir d'absorption et de transformation de la radiation solaire incidente 4° Les auteurs ont reconnu que le degré d’assimilation des feuilles dans un air enrichi artificiellement en CO° est approximativement proportionnel à la quantité de gaz présente (jusqu'à 5 ou 6 fois la quantité normale); 2 La méthode de Sachs est incapable de donner une estimation quantitative exacte du travail photosynthé- tique dans une feuille en train d’assimiler; on n'y arrive que par la détermination directe de CO? absorbé par la feuille; 3° Dans la respiration des feuilles amphistomateuses, le rapport des quantités de CO* dégagées des surfaces supérieure et inférieure est égal au rapport de distribution des stomates. Dans l’assimi- lation des feuilles amphistomateuses illuminées sur la face supérieure, l'absorption de CO* par la face infé- rieure est toujours moindre qu'on ne pourrait le sup- poser d'après le nombre relatif des stomates des deux côtés: elle tombe souvent à la moitié de ce côté; 4° Dans une feuille exposée au plein soleil, l'énergie radiante utilisée pour les processus pholtosynthétiques représente seulement une très faible partie de la radia- tion incidente totale; dans les meilleures conditions, le coefficient économique maximum est probablement de 6,5 °/,. La feuille n'utilise, d’ailleurs, que la partie du spectre solaire située entre B et GC; il en résulte que les rayons photosynthétiques, même dans la lumière d'intensité très modérée, sont encore en excès sur le pouvoir d'utilisation de la feuille, fait d'importance considérable, qui permet l'assimilation en lumièren diffuse. L'énergie superflue absorbée par la feuille est dissipée par la transpiration et l'émission thermique. — MM. H.-T. Brown et F. Escombe : Nouvelle méthode pour la détermination de l’anhydride carbonique atmo- sphériques, basée sur le degré d'absorption parlasurface libre d'une solution d’aleali caustique. — MM. H.-T: | Brown et W.-E. Wilson : Sur l'émissivité thermique d'une feuille verte dans l'air tranquille et en mouve= ment. Quand on a déterminé : 4° la quantité d’eau perdue par la feuille dans un temps donné par évapo- ration; 2° la surface de la feuille; 3° la différence exacte de température entre la feuille et l'air envis ronnant, on a toutes les données nécessaires pour calculer la quantité d'énergie en calories qui pénètre dans la feuille, par unité de surface et dans l'unité de temps, pour un excès de température de 4° de l'air environnant. On obtient ainsi l'émissivité thermique, puisque l'émission et l'absorption sont égales dans les mêmes conditions relatives. Les auteurs ont trouvé les chiffres suivants pour l'émissivité thermique en calories ps centimètre carré pour un excès de (température JE: Liriodendrum tulipifera . . . . . . . 0,01494 Helianthus multiflorus . . . . . . . . 0,01499 Tropaeolum'majus "MMM NO; 0127 Tia TEurOpala EN NN NC O0 1588 Dans l'air en mouvement, l'émissivité augmente pro- portionnellement à la vitesse du courant d'air. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 12 Mai 1905. M. A.-D. Denning décrit une méthode simple pour déterminer la constante de radiation, convenant parti- culièrement à une expérience de laboratoire. L'appareil consiste en une capsule de cuivre hémisphérique dont l'extérieur est recouvert d'un manchon parcouru par de la vapeur ou de l’eau. La surface réceptrice est une plaque d'argent et le degré d'élévation de la tempéra- ture de la plaque est mesuré au moyen d’un thermo- couple argent-constantan. Un tampon non conducteur est placé entre l'hémisphère et le disque d'argent jusqu'à ce que la température du manchon soit uni= forme. Puis on enlève le manchon, et l’on note toutes les deux ou trois secondes les déviations du galvano= mètre dans le circuit du thermo-couple. En traçant la courbe du phénomène, on en déduit l'inclinaisom initiale de la courbe, c'est-à-dire la vitesse initiale d'élévalion de la température du disque, et, connaissant les constantes de ce dernier, on peut calculer la con- stante de radiation. Les résullals sont assez exacts. — M. H.-L. Callendar considère que, pour la mesure absolue de la radiation, la méthode bolométrique de Kurlbaum estsupérieure à la méthode thermo-électrique d’Angstrüm. Dans la première, l'élévation de tempéra- ture produite par la radiation ou par un courant élec trique dans une lame métallique est mesurée par l'augmentation de résistance de là lame elle-même. En appliquant cette méthode à la mesure de la radiation: solaire, l'auteur lui a apporté quelques améliorations. Pour obtenir une compensation exacte de température pendant les observations de radiation, l’auteur, au lieu d'enfermer tout l'instrument dans un manchon à eau, équilibre le bolomètre par une résistance construite | avec le même platine et renfermée dans le manchon à eau protégé de la radiation. Pour assurer la compens sation de conduction, cette résistance est composée de deux parties, l'une semblable au bolomètre, l'autre en manganine. Pour obtenir une mesure exacte de l'aire de la radiation absorbée, on la détermine par une ' ouverture de Ja paroi du manchon à eau ayant une ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 87 largeur de 2 centimètres, un peu inférieure à celle des lames du bolomètre, de sorte que toute la radiation tombe sur les lames. Avec ces modifications, la méthode bolométrique parait aussi commode et probablement périeure en exactitude à la méthode thermo-élec- Wique. — M. W.-H. Price lit un Mémoire sur les sultats des expériences faites aux Usines Crompton, à Chelmsford, par M. C.-H. Wright, sur la possibilité demployer la résistance d'un conducteur chauffé par in courant électrique alternatif comme mesure du un courant direct faible, provenant d'une batterie accumulateurs, est superposé au système. Les diffé- rences moyennes de potentiel aux bornes permettent de comparer les résistances sur un potentiomètre. La présence d'une grande quantité d'air près du con- ‘ducteur chauffé affecte les résultats par suite des courants d'air irréguliers produits. Pour obtenir rapi- dement des résultats uniformes, il est nécessaire de placer le conducteur dans une enceinte relativement grande et vide d'air. On arrive ainsi à des résultats ässez concordants, affectés toutefois par les variations du vide provenant de la libération des gaz occlus dans € le conducteur. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 4 Mai 1905. M. J.-M. Wadmore, en mélangeant, en solution, des mquantités équimoléculaires de sulfates de sodium et d'aluminium, a obtenu une substance cristallisant en octaèdres ; c'est l’alun de sodium Na*S0O“.A1(S04#.24H°0, dont l'existence à été niée par Ostwald. Il est excessi- “vement soluble dans l’eau : { gramme d'eau à 100,6 issout 1,0711 grammes du sel cristallisé. — MM. M.-O. orster et H.-E. Fierz ont obtenu la camphoryl-d- emicarbazide par réduction de la camphorylnitroso-d- carbamide avec la poudre de zinc et l'acide acétique: “elle cristallise du chloroforme en petites aiguilles fondant à 193°. Elle se condense facilement avec la plupart des aldéhydes et des cétones en donnant des semicarbazones qui retiennent énergiquement du sol- vant de cristallisation, qui influe profondément sur leur pouvoir rotatoire. — MM. F.-R. Japp et J. Knox, en condensant le benzile avec diverses cétones non saturées, ont obtenu des dérivés de l’anhydracétone- benzile. D'autre part, le dihydrocyanure de benzile, aité par un acide concentré, fournit la diphénylacé- tamide; de même, le dihydrocyanure de phénanthra- quinone, traité par HCI fumant, donne le phénanthra- mile. — Les mêmes auteurs, en saturant une solution de mandélonitrile dans l’éther par HCI, ont obtenu la 3-céto-2 : 5-diphényl-3 : 4-dihydro-1f :4-diazine, F.196- 4197, qui résulte également de l’action de HCI sur une Solution de benzile dans HCAz alcoolique. — MM. F.-R. Japp et J. Wood ont recherché les configurations de certaines y-dicétones non saturées au moyen de l’action de l'hydrazine. Les formes cis réagissent, tandis que les formes trans ne réagissent pas. — M. H.-D. Dakin à préparé, par action de la méthylamine sur le chloro- acétylcatéchol, le méthylaminoacétyl-catéchol, C‘H* OH)*.CO.CH?.AzH.CH°, F.232, base qui serait la cétone Correspondant à l'alcool secondaire que parait être adrénaline. La réduction électrolytique de cette cétone ournit une base qui ne semble pas être identique avec Padrénaline racémique; à l’état libre, elle constitue un récipité blanc, amorphe, instable. Elle possède toute- oïs des propriétés physiologiques très proches de celles l’adrénaline. — M. J. Johnston, en méthylant cide p-aminobenzoïque par le sulfate de méthyle, a tenu l'acide p-méthylaminobenzoïque, F.144-1450, is l'acide p-diméthylaminobenzoïque, F.235-236°. — : R.-W. Gray à déterminé à nouveau le poids ato- mique de l'azote par deux méthodes : {1° Au moyen des densités relatives et des compressibilités de l'oxyde nitrique et de l'oxygène; 2° Par la décomposition de l’oxyde nitrique avec le nickel finement divisé. Il à obtenu comme valeurs moyennes 14,005 et 14,006. — M. O. Rosenheim a introduit facilement des groupes méthyle dans l'acide gallotannique au moyen du sulfate de diméthyle. Le produit obtenu parait être un acide pentaméthylgallotannique ; il fond à 95-989 en se décom- posant. Par hydrolyse acide, il fournit deux substances : l'acide triméthylgallique, F.164°, et l'acide diméthyl- gallique, F.187%. — MM. W.-R. Lang et Ch.-M. Carson ont reconnu que l'action de H°S gazeux sur SO? gazeux produit d’abord du soufre et de l'eau, d'après l'équation : 2H#S-SO*—$SL2H20; puis le soufre réagit lentement sur H°0 à haute température pour donner naissance à des acides polythioniques. A l’état liquide, il se forme également un précipité de S. — M. A.-G. Perkin a constaté que la composition exacte de la cyanomaclurine est exprimée par la for- mule C:4*0°. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE MANCHESTER Séance du 7 Avril 1905. M. W. H. Coleman décrit une soupape régulatrice pour le contrôle de l'admission de la vapeur dans les chambres de plomb. — MM. G. J. Fowler et Ed. Ar- dern ont déterminé les quantités de matières en sus- pension qui existent dans les eaux d’égouts avant et après purification ; ce sont: 1° des matériaux et détritus flottants; 2° des solides finement disséminés (hydrates de fer et d'alumine, particules d'argile ou de matières organiques); 3° des matières en solution colloïdale. Ces dernières persistent en grande partie dans les eaux traitées et peuvent obliger à de nouveaux traitements que les auteurs vont étudier. SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Avril 1905. M. R. W. Moore indique une méthode d'analyse du séné convenable pour les laboratoires des douanes : on fait bouillir 10 grammes avec un litre d'eau, filtre 200 centimètres cubes qu'on évapore à siccité, et sèche le résidu par la vapeur jusqu'à poids constant. — M. G. W. Thompson décrit une méthode pour la détermina- tion de l’acide acétique dans le blanc de plomb : elle consiste essentiellement à traiter la substance par l'acide phosphoreux et le zine, et à distiller alternati- vement en courant de vapeur et directement. On titre l'acide acétique dans le distillat par la soude N,/10. — M. M. Toch signale d'intéressantes constatations faites dans le Métropolitain souterrain de New-York à propos de la protection des poutres d'acier contre la rouille. Les poutres arrivèrent sur les chantiers déjà couvertes d’une couche de minium et d'huile de lin purs; après avoir élé mises en place, elles reçurent de nouveau une bonne couche continue de minium et d'huile de lin purs, puis une couche finale de céruse et d'huile de lin. Or, deux ans et trois mois après l'application de la dernière couche, on constata de longues et fines craquelures dans la peinture, et, en y insérant une lame de couteau, on put détacher de larges plaques de peinture, toutes recouvertes intérieurement de rouille d'épaisseur variable. Cette rouille était distribuée sous forme de feuillets superposés, où le degré d'oxydation allait en augmentant de Fe*O*.H20 à Fe*0*.2H°0. L'au- teur explique ce phénomène en admeltant qu'une couche d'huile de lin soumise à l'humidité forme avec elle une solution semi-solide, et que l’eau y est trans- portée au travers jusqu'à la surface du métal. Il en conclut qu'une peinture à l'huile de lin n'est pas propre aux travaux souterrains. SECTION DU YORKSHIRE Séance du 20 Mars 1905. MM. F. W. Richardson el A. Jaffé ont étudié la question de l'emploi de l'huile d'olive dans le peignage de la laine. Le plus ou moins grand pourcentage de l'acide oléique libre dans l'huile n’est pas une indica- lion de sa convenance pour l'huilage de la laine; la portion neutre, qui constitue la plus grande partie de l'huile, doit entrer davantage en ligne de compte. Pour déterminer si une huile d'olive produira de bons résul- tats appliquée à la laine, il suffit de l’oxyder en couches minces à 4000 F. et d'observer l'augmentation de vis- cosité. Séance du 17 Avril 1905. M. J. W. Cobb étudie la question du tirage naturel et du tirage forcé. Il arrive à la conclusion qu'une tem- pérature moyenne de 300 à 320° pour les gaz de la combustion entrant dans une cheminée, est une tem- pérature limite qu'il serait vain de dépasser dans l'espoir d'obtenir un plus grand tirage d'air: les hautes températures de cheminées sont pratiquement des aberrations. L'adjonction d'un ventilateur ne doit avoir lieu que lorsque le tirage naturel est insuffisant. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 23 Mars 1905. M. Dilthey présente un second Mémoire relatif aux bases des sciences philosophiques et qui a trait aux perceptions objectives. L'auteur y étudie le caractère structural des expériences perceptives et les relations existant entre ces dernières, en vertu desquelles elles constituent un ensemble. — M. Frobenius étudie la théorie des équations linéaires. Séparons en deux sec- tions les variables d'un système d'équations linéaires homogènes et d'un système complet de leurs solutions et faisons-en de même des matrices des coeflicients des équations et des éléments de leurs solutions. Si, dans l'une de ces matrices partielles, l'ordre est moin- dre que la valeur admissible maxima, il sera d'autant plus petit dans la matrice partielle complémentaire. — L'auteur communique encore un Mémoire de M. Issai Schur, privat-docent de l'Université de Berlin, sur une nouvelle confirmation dela théorie des caractères d'en- sembles. Dans ce Mémoire, on donne une représenta- tion élémentaire nouvelle de la théorie des caractères d'ensembles fondée par M. Frobenius. Séance du 30 Mars 1905. M. O. Hertwig présente des considérations criliques relatives à des essais d'explication récemment proposés dans le domaine de la théorie de la fécondation. Discu- tant les expériences de Loeb et d’autres savants, faites en vue d'expliquer la fertilisation comme processus chimico-physique, l'auteur présente un ensemble: de raisons démontrant l'impossibilité d'atteindre par cette voie la solution du problème, à l'heure actuelle; toutes les tentatives pareilles restent, en effet, en dehors du sujet lui-même. Séance du 6 Avril 1905. M. M. Planck présente un Mémoire sur la dispersion normale et anormale. Après avoir résumé dans deux travaux antérieurs les conclusions à tirer de la théorie électromagnétique de la dispersion, développée par lui- mème, au point de vue du coefficient d'extinction d'un milieu à absorption sélective, l’auteur fait une étude pareille (relative à l'exposant de réfraction) pour le cas spécial où les molécules (ou résonateurs) placées dans le milieu dispersif et non conducteur de l'électricité possèdent une seule vibration propre bien définie. A ce propos, l'influence des variations de densité du milieu dues à l'approche ou à léloignement mutuel des molécules est discutée en détail, en vue des résul- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES M É re tats tout particulièrement caractéristiques donnés à cet égard par la nouvelle théorie. Quant à la vérifica= tion par l'expérience, la dispersion des gaz non ionisés s'y prête le mieux, et les hypothèses de la théorie rela= tivement à la grandeur des distances de molécules voisines y sont le mieux satisfaites. Les différentes formes que prend la courbe de dispersion d'une sub= stance sont déduites et décrites sur la base des express sions de l’exposant de réfraction. — M. Klein présente une étude du Professeur W. Bergt, de Dresde, sur le massif de gabbros dans les montagnes de la frontière bavaro-bohémienne. La portion bavaroise de la région culminant au dos du Hohe Bogen, près de Furth, s8 compose d’une masse continue de diorites ou gabbross Ces roches, reliées intimement par des transitions; constituent une unité pétrographique de nature érup= tive et qui, probablement, fait partie d'un grand massih granitique des montagnes bavaro-bohémiennes. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE“ Séance du 6 Avril 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. R. Daublebsky vor Sterneck : Sur les combinaisons des restes des puis sances d’un nombre premier en des sommes déter: minées. . 20 Sciences PHysiques. — M. C. Bruckner : La réducs tion des sulfates. — M. R. Kremann a constaté que les éthers de divers alcools polyvalents (triacétine, dias cétate de glycol, hexacétate de mannite, etc.) donnent naissance à de l’'acétate d'éthyle en solution alcoolique en présence de faibles quantités de soude. Il s'agit là d'un phénomène catalytique, où la soude joue le rôles de catalysateur. Ces observations et d'autres conduiss sent à la conclusion que c'est une propriété générale des éthers des alcools plurivalents et des alcools mono valents supérieurs de se transformer, avec libération d'énergie, dans les éthers plus simples de lalcool employé comme solvant. — M. F. von Hemmelmayer, en faisant réagir P?S5 sur l’urée dans des conditions déterminées, à obtenu un corps C*H'Az'S?0°P, qu'il considère comme un thiobiuret-phosphate d'ammo= nium : CS.AzH, 0 SES 2 NCS.AzH/ NO.AzH: Il donne un sel de baryum tribasique, qui est décoms posé par H?S0“ avec formation de l'acide libre, qu cristallise. Avec la thio-urée, on n’a pu obtenir un pros duit analogue. — M. Zd. H. Skraup, poursuivant l'étude des acides diaminés provenant de l'hydrolyse de la caséine et de la gélatine, a reconnu que son acide diamino-adipique n’est autre chose que de la d-alanine, et son acide diamino-glutarique un mélange d’alanine et de glycocolle. — M. S. Wiechowski a préparé les produits de condensation de l'acide naphtaldéhydiques avec la méthyl-m-tolylcétone, la pinacoline et l'acés naphténone. — M. A. Plangger à obtenu, au moyen de l'o-tolylhydrazone de. l'isopropylméthyleétone, une nouvelle base, la B,-méthyl-Pr-triméthylindolénines qui est transformée par CH'I en l'iodure d’une méthys lène-indoline. — M. W. Duregger à obtenu par oxÿ dation de l'acide homo-oxy-salicylique un produit C#H'06, qui, par distillation sur la poudre de zinc; fournit un hydrocarbure C*H®, probablement un dis méthylfluorène. Le mème produit est transformé pa les lessives alcalines en une oxyfluorénone. Toutéfoiss l'auteur pense que le produit d'oxydation est un dérivé de la phénanthrènequinone. L. BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. LEA te (à VOIES APR ES RE Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. N° 13 15 JUILLET 1905 Revue générale Pi N0Crenc pures el appliquées DirEcrEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne !a rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Art de l’Ingénieur Les wagons de marchandises de grandes dimensions. — Dans l’un de ses derniers numéros, a Revue à déjà attiré l'attention sur l'emploi de plus “en plus fréquent des wagons à gros tonnage de 40 et 50 onnes, principalement pour les trains de charbons et de minerai. Nos chemins de fer n’ont pas tardé à suivre e progrès, des plus remarquables, comme le prouve ladoption récente de wagons de ce genre par les mines de Carmaux et par le Chemin de fer du Midi. Le premier de ces wagons, celui des mines de Car- maux, est destiné au transport des charbons ; c'est un Magon à caisse ou tombereau de 58 mètres cubes, porté Sur deux boggies écartés ‘daxe en axe de 8%,06, avec roues de 0%,90 écartées de 1,65; son poids à vide est de 15 tonnes et sa charge de 50. Le déchargement se fait d’une façon automatique par deux trémies. Le wagon de la Compagnie du Midi est une plate- forme également sur deux boggies, écartés de 7,2, pesant à vide 15 {. 4, et pouvant tenir 28,2, soit 50 tonnes de minerai de fer ou 30 de charbon. Les côtés Sont en bois, avec portes permettant une ouverture motaie de déchargement de 3,02. Le rapport ‘du poids à vide au poids de charge est de 30,6 °/,;1l a permis de réduire la tare de 15 °/, par rapport à celle des petits Wagons. F = Ces deux types de wagons sont construits par les | orges de Douai, avec chässis en acier pressé d'après | les procédés Fox Arbel ; leurs longerons peuvent attein- dre, d'une seule pièce, jusqu'à 20 mètres de longueur, ebl'on espère pouvoir abaisser la tare à 25 °/, seulement de la charge maxima. Sur cette question, si importante et actuelle, des Wagons à très grande capacité, un remarquable travail vient, d'ailleurs, d'être publié par M. Biard, ingénieur au Chemin de fer de l'Est, dans le dernier Bulletin b anvier) de la Société des Ingénieurs civils de France. M° Biard étudie le développement du matériel à mar- “Chandises, dans ces dernières années, en Amérique, en Angleterre, en Allemagne et en France. Dans tous “Ces pays, s'accentue la tendance à l'emploi de wagons h à Engineering, 1 avril, p. 436. L. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. de plus en plus grands. Aux Etat-Unis, favorisé par des circonstances particulières, et sous la stimulation d'une concurrence des plus actives entre leurs différentes lignes, l'emploi de ces grands wagons est aujourd'hui universel et des plus heureux. C'est ainsi que le remplacement de wagons de 27 tonnes par ceux de 36 tonnes, qui ne coûtent, comme prix de cons- truction, que 250 francs (ou 10 °/;) de plus pour une augmentalion de charge de 33 °/,, a permis, sur le Pennsylvania Rd, de réaliser un bénéfice de 18 °/, sur le prix par tonne offerte. Grâce à l'emploi de ces grands wagons, la charge des trains a passé, en moyenne, entre 189% et 1900, de 180 à 270 tonnes, soit une augmenta- tion de 50,6 °/,, tandis que l'effectif des wagons ne s’est accru que de 13,3 °/,, et ce avec toutes sortes d'avanta- ges corrélatifs : diminution des frais d'entretien du ma- tériel et des frais de traction, diminution de l’encom- brement des voies et des gares, augmentation de la puissance de débit des voies, réduction du nombre des trains. En France, les petits wagons à 40 tonnes constituent encore presque les deux tiers de l'effectif total des wagons de nos chemins de fer; les wagons de 20 tonnes à deux essieux sont, néanmoins, au nombre d'environ 20.000, et les grands waggons à boggies commencent, comme nous l'avons vu, à pénétrer. La Compagnie du Nord en fait construire 470 du type plate-forme à 40 tonnes, et la Compagnie de l'Est 100. La Compagnie du Nord commence à mettre en service 40 wagons- tombereaux à houille de 40 tonnes, avec un rapport de la charge utile au poids total de 75 °/,, et il parait certain que ce mouvement vers les grands wagons ne fera que s'accélérer sur nos réseaux. — Météorologie Les ballons-sondes en haute mer. — A l'occasion des ascensions internationales qui ont eu lieu récemment dans tous les observatoires aéronau- tiques d'Europe et d'Amérique, le prince de Monaco a fait, à bord de son yacht, des expériences de ballons- sondes en haute mer. Ces expériences ont été faites d'après la méthode | préconisée par M. le Professeur Hergesell, président de 13 L: 590 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE + L la Commission internationale d'Aérostation, qui accom- pagnait le prince. Cinq lancements ont été effectués, les ballons atteignant des hauteurs variant entre 4.000 et 10.000 mètres. Dans quatre cas, les enregistreurs ont donné de bons résultats, le cinquième ballon n'ayant pu être retrouvé à cause des nuages qui se sont formés pendant l'ascension. Il est donc prouvé que la méthode des ballons-sondes, si utile pour l'étude de la haute atmosphère au-dessus des continents, peut être également employée avec succès sur l'étendue des océans. C'est un heureux ré- sultat pour la Météorologie, qui dépend si étroitement des mouvements de l'atmosphère au-dessus des masses liquides qui couvrent les trois quarts de notre planète. $ 3. — Électricité industrielle Un proiet de plate-forme roulante à New- York. — Tout le monde se rappelle la plate-forme roulante de l'Exposition de 1900, due à MM. Blot, Guyennet et de Mocomble. Le succès technique de cet appareil a engagé les Américains à établir aussi un dispositif analogue en l’un des points les plus actifs du Métropolitain de New-York, sous la 34° rue, entre la 4re et la 9° avenue, coupant l'ile de Manhattan. Cette installation n’est encore qu'à l’état de projet, mais suf- fisamment étudiée pour qu'un exposé sommaire de ses principales caractéristiques prenne opportunément place ici. L'ensemble de l'installation comprendrait quatre plates-formes : deux marchant à la vitesse de 3 milles à l'heure (5 kilomètres environ), une à la vitesse de 6 milles, et l’autre, la principale, à 9 milles, La première des plates-formes à la vitesse de 3 milles resterait presque toujours immobile, ne servant qu'en temps de presse pour doubler ainsi la facilité d'accès et de départ des voyageurs. Le tout circule dans un tun- nel de 9 mètres de largeur sur 5,25 de hauteur, dont 2m,45 au-dessus de la plate-forme, et le reste au-dessous, pour le logement et l'inspection des mécanismes. Les plates-formes sont en tôle d'acier de 1,80 de longueur, recouvertes de caoutchouc, avec raccordements leur permettant de suivre les courbes des boucles, et repo- sant chacune, pär une paire de fers à T, sur des galets d'entrainement espacés de 02,90 environ. Les galets des trois premières plates-formes sont montés sur des arbres commandés par des dynamos, chacun de ces arbres portant une paire de galets de chacune des plates-formes; les galets de la plate-forme auxiliaire sont sur des arbres commandés par des dynamos indé- pendantes. Enfin, chacune des plates-formes est guidée latéralement par des galets horizontaux appuyés sur leurs fers de support. Les galets des trois plates-formes ont respectivement 200, 400 et 600 millimètres de dia - mètre. Les différents éléments des plates-formes sont reliés entre eux par des bielles de 4,17 de longueur, avec leurs axes aux centres des cercles de recouvre- ment des tôles. Le débit de cette installation serait énorme : de 47.000 voyageurs par heure, alors que celui de la sec- tion à qualre voies du Métropolilain de New-York, avec des trains express de huit voitures toutes les deux minutes el un train omnibus de cinq voitures toutes les minutes, ne débile, au maximum, que 28.000 voya- geurs; de plus, en tenant compte des arrêts de ce Métropolitain, on irait presque aussi vite avec la plate- forme. Enfin, en raison de ces arrèts et de l'énergie perdue en freinage, le Métropolitain actuel exige une dépense d'énergie électrique, à la station centrale, d'environ un kilowatt par voyageur, tandis que la plate-forme en exigerail, complètement chargée, 26 fois moins. Son poids mort, par siège, n'est que de 200 kilogs environ, au lieu de 400 à 500 avec les voitures du Métropolitain !. 1 Scientific american, 13 mai, p. 379. $ 4. — Chimie L’Electrochimie et les composés oxygénés et hydrogénés de l'Azote. — Peu à peu, les méthodes électrochimiques tendent à supplanter les méthodes ordinaires dans les préparations, surtout dans celles où, les phénomènes d’oxydation ou de réduction jouant le rôle principal, l'électrolyse permet de se pas- ser de corps étrangers, oxydants ou réducteurs. Mal- heureusement si, en théorie, le problème est simple, il n'en est pas de même en pratique, et c’est seulement par une étude méthodique, fastidieuse peut-être, mais nécessaire, qu'on arrive lentement à solutionner les questions les unes après les autres. La série des com- posés oxygénés el hydrogénés de l’azoté nous fournit à ce point de vue un exemple caractéristique. L'étude de l’action du courant sur ces composés n'est cependant pas récente, et les observations sont nom- breuses qui relatent des oxydations ou des réduc- tions sans donner, d'ailleurs, de détails précis sur les conditions expérimentales et les résultats quantitatifs obtenus. Depuis un certain nombre d'années, on à repris point par point l'étude de ces questions et trouvé un grand nombre de faits intéressants que nous verrons successivement. La série des composés de l'azote susceptibles d'être soumis à l’électrolyse en solution aqueuse est la sui- vante : ammoniaque, hydrazine, hydroxylamine, acides hypoazoteux, azoteux et azotique : AzH*, AzH°A7H?, AzH*0H, AzOH, AzO°H, AzO'H. , 4. Réduction de lacide azotique en acide azoteux (préparation des azotites). — Observée par un grand nombre d'auteurs, de Schônbein (1839) à Zechlin (1899), cette réduction a été soumise à une étude approfondie par Erich Muller et Julius Weber’, qui ont déterminé l'influence de l’alcalinité et des différents métaux sur la réduction. Ils ont constaté ainsi la nécessité d'employer une cathode de cuivre spongieux, pour éviter une réduction trop profonde dépassant le terme cherché pour attein- dre l’ammoniaque. Enfin, dans un travail récent, E. Muller et F. Spitzer* ont précisé les conditions nécessaires, qui sont les suivantes : on emploie une solution saturée d'azotate de soude, qu'on électrolyse sans diaphragme avec une anode de fer et une cathode de cuivre, dont on maintient la surface constamment spongieuse par l’adjonetion continue de petites quan= tités d'un sel de cuivre à l’électrolyte. Le rendement moyen du courant atteint 84 °/, et l’on obtient ainsi directement une solution d'azotite à 36 °/,. On voit que le problème est bien près d’une solution totale, et l'application industrielle de cette réaction ne paraît rencontrer de difficultés que du côté de l'extrae- tion définitive de l'azotite formé; cette réduction a, d’ailleurs, été brevetée de différents côtés *, 2. Réduction de l'acide azoteux ex acide hypoazo= teux. — Cette réaction, déjà ancienne ‘, ne parait pas avoir été étudiée depuis. Elle constitue cependant, d'après l’auteur, la méthode la plus pratique de prépas ration de l'acide hypoazoteux. La réduction s'effectue très simplement en employant une cathode de mercure et une solution d’azotite de soude concentrée; on arrête la réduction quand l’ammoniaque apparaît et on extrait l'acide formé en passant comme à l'ordinaire par son sel d'argent. Le rendement réel n'a pas été indiqué d'une manière explicite. : 3. Réduction de l'acide azotique en bydroxylamines — La présence de cette base dans les produits de réduction de l'acide azoteux avait été constatée déjà pan Zorn dans le travail cité plus haut; mais il s'était cons tenté de la caractériser et de l'éliminer comme nuisiblé RO RON OR A MAP PME ? 9e es 1 Zeitschr. {. Elektroch., 4. IX, p. 955, 1903. 2 Berichte, t. XXXVIII,,1190, 1905. e 3 Br. francais 264.711, 1897 — Br. allemand de la fabriques chimique Elektron, 21 avril 1902. * * Zonx : Berichte, t. XIV, p. 1509, 1879. hr RE rite ration Des Drérihe tal rase hdd detente; sims "ir / ’ F 4 + réduire est ajouté goutte à CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 591 au but quil se proposait : la préparation de l'hypo- azotite d'argent. La production de l’hydroxylamine, étudiée par Ber Suler‘ au cours d’un travail sur la . réduction des azotiles, devint quantitative grâce aux recherches de J, Tafel ?. La réduction doit être effectuée à basse température au moyen d'une cathode de plomb amalgamé dans une solution constituée par de l'acide sulfurique à 50 °/, ou de l'acide chlorhydrique à 25 °/.,. L'acide azotique à goutte dans le vase poreux qui forme le compartiment cathodique. Dans le cas où l’on à employé l'acide chlorhydrique, une simple éva- poration à sec donne un sel brut contenant de faibles - quantités de chlorhydrate d'ammoniaque, dont il est facile de le débarrasser par une cristallisation. Cette réaction a été brevetée par C. F. Boehringer et fils (brevets allemands 133457 et 137697) et par la Compagnie française des couleurs d’aniline (Brevet « francais 322943). . 4. Réduction de l'acide azotique en ammoniaque. — Cette réaction, qui représente le degré ultime de réduc- tion, se produit toujours plus ou moins dans toutes les réductions précédentes. Elle y joue un rôle nuisible, et tous les efforts des chercheurs ont eu pour but de l'éviter le plus possible. Elle ne prend un intérèt positif qu'au point de vue analytique ; elle sert, en effet, de base au procédé de dosage des azotates étudié successivement par Luckow, Wortmann, et qui a recu sa forme définitive de K. Ulsch®. Dans ce procédé, qui possède toute la précision désira- ble, on réduit complètement l'azotate à analyser sur une cathode de cuivre dans une solution d'acide sulfu- rique titrée au préalable. Il n’est pas question, dans ces diverses réductions, de l’hydrazine; ses propriétés réductrices sont telles, en effet, que, jusqu à présent, on n'a pu constater sa présence. Si même elle prend naissance, elle est immé- diatement réduite en ammoniaque; Erich Muller# a montré, en effet, combien son potentiel d'hydrogéna- tion est bas. 5. Oxydation de l'ammoniaque en acide azoteux et - azotique. — Nous avons ainsi passé en revue les réac- tions de réduction qui permettent de passer progres- sivement de l'acide azotique au dernier terme : l'am- moniaque. Pour suivre le chemin inverse par voie d'oxydation, les difficultés paraissent devoir être plus grandes encore ; le problème, attaqué de divers côtés à la fois, semble à l'heure actuelle à la veille d’être résolu. La difficulté consiste ici à ne pas dépasser le terme inté- ressant, l’azotite, et seule l'étude méthodique des deux - transformations 4) AzH* — AzO?H et b) AzO®H —> AzO°H à permis de trouver la solution en montrant l'im- portance de l'alcalinité, la nécessité d'employer une anode de fer pour éviter l'oxydation de l'azotite, et Vutilité d'ajouter de l'hydrate d'oxyde de cuivre dans les solutions pour faciliter l'oxydation cherchée. Ces recherches récentes ont été poursuivies simulta- nément par W, Traube et A. Biltz® et par Erich Muller etF. Spitzerf. - L'étude de cette série de réactions intéressantes, si elle montre la souplesse des procédés électrolytiques, montre aussi combien il faut opérer méthodiquement pour arriver à mettre au point les réactions qui parais- ent les plus simples quand elles ne sont pas envisagées au point de vue quantitatif. L'importance des notions + de potentiel d'oxydation et de réduction électrolytiques Sy affirme d'une manière continue. Ch. Marie, E Docteur ès sciences, e Préparateur d'Electrochimie à la Faculté des Sciences de Paris. Zeitschrift {. Elektrochemie, L. VII, p. S31, 1900. Zeitschrift f. anorg. Chemie, t. XXXI, p. 287. 1902. Zeitschrift f. Elektrochemie, t. I, p. 546, 1896. Zeitschrift F. anorganische Chemie, t. XXVI, p. 11,1900. ® Berichte,t. XXX VII, p.3130,1904ett. XXX VIII, p. 828, 1905. 5 Berichte, t. XXXVIII, p. 778 ct 1188. > © 16 » 5. — Zoologie P24 Les pêcheries du bane d’Arguin.— M. Gruvel, chef de la Mission chargée d'étudier sur place les moyens d'utiliser le poisson qui abonde à la côte d'Afrique, notamment au banc d'Arguin, a exposé récemment devant la Société de Géographie du Sud- Ouest les résultats obtenus. La question principale à trancher était de savoir si le poisson africain peut être séché et utilisé sous cette forme pour la consommation, ou s'il doit être con- servé dans l'huile. C’est une question très discutée. Or, les deux modes de conservation peuvent être employés, mais non pour les mêmes poissons. La sécherie établie sur la côte d'Afrique a donné de bons résultats; aussi elle à été transférée à Saint-Louis, où l'on va apprendre aux Noirs du Sénégal à sécher le poisson suivant la méthode instituée par la Mission. Ce poisson est voisin de la morue, et, à ce titre, il peut rendre de sérieux services à la consommation, bien que ne présentant pas toutes les qualités commerciales de la morue. La sole y est extrêmement abondante et d'excellente qualité; la Mission en rapporte des filets conservés dans l'huile. Les mulets y sont aussi en quantité pro- digieuse : en deux heures, on a pèché 3.500 kilogs de ce poisson. Enfin, il existe des langoustes qui peuvent rivaliser comme goût avec les langoustes de France. Le sel qui a servi à saler le poisson rapporté par la Mission provient des salines situées le long de la côte mauritanienne. Ce sel est légèrement rose, mais il devient blanc dès qu'il a été un peu lavé. Pour conclure, M. Gruvel pense qu'il y à au banc du Lévrier (Arguin) un gros avenir pour l'exploitation du poisson et du sel, qui s’y trouvent en abondance. $ 6. — Physiologie Un dispositif pour la production de l’anes- thésie électrique. — Dans un récent numéro de la Revue, nous avons donné un aperçu d’un nouveau procédé d’anesthésie, dû au D' Redard, et où les effets calmants de la lumière bleue étaient mis à profit. D'autre part, on se rappelle les expériences sur l’anesthésie par les courants intermittents à basse ten- sion, exécutées il y a quelque temps par M. Stéphane Leduc, professeur à l'Ecole de Médecine de Nantes. L'apparition sur le marché d'un dispositif pratique, construit suivant les données de ce savant, permet actuellement aux médecins d'appliquer cette intéres- sante méthode à l'abri des incertitudes qui pourraient en compromettre le succès. Les courants capables de produire soit l’inhibition parfaite de l’activité du cerveau, soit l’anesthésie locale de quelque partie du corps humain ou animal, ont l'intensité minime de 0,002 à 0,004 ampère sous une différence de potentiel variant entre 30 et 50 volts. Leurs remarquables effets sont dus uniquement à l'in- termittence rapide de ces courants, interrompus et rétablis 4.000 à 5.000 fois par minule. Pour produire l’anesthésie générale, on fixe sur le dos l’électrode positive, bien plus grande que la néga- tive, qui, à son tour, s'attache sur le front. Dans le cas, au contraire, de l’anesthésie locale, de la main, par exemple, l'électrode positive entoure le bras, tandis que la négative se place sur l’un quelconque des nerfs postérieurs du poignet : la partie de la main régie par ce nerf devient alors immédiatement insensible à toute douleur. Il est vrai de dire que la production de la narcose générale ne va pas sans une sensation plutôt désagréable, mais qui ne tarde pas à diminuer. Les contractures des muscles du visage et du cou et le fourmillement ressenti d’abord dans les doigts de la main, puis dans ceux des pieds, ne présentent cepen- dant rien d'inquiétant. Les centres du langage sont les 4 Voir la Revue du 30 avril 1905. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE premiers à être affectés, après quoi les centres moteurs du cerveau subissent à leur tour une inhibition com- plète. Bien que la respiration soit légèrement gênée, il n'y à aucun trouble sérieux à craindre, d'autant plus que le pouls n’est affecté en aucune façon. Aussitôt que le courant est interrompu, les sujets reprennent immé- diatement connaissance et, loin de subir des sensations ultérieures désagréables, éprouvent plutôt un sentiment de bien-être et de fraicheur corporelle. Les expériences définitives sur l'homme ont été pré- cédées d'une série d'essais sur plusieurs mammifères. Le dispositif employé pour ces expériences, qui est construit par MM. Reiniger, Gebbert et Schall, à Erlan- gen, consiste en un petit électro-moteur portant sur son axe un disque en matière isolante, dans la péri- phérie duquel deux à quatre segments métalliques sont encastrés. Le courant est amené d'un côté au moteur qu'il actionne, tandis que l'autre borne est reliée à deux balais mobiles glissant sur la périphérie du disque sous une faible pression. Le circuit, qui, du reste, contient une forte résistance, comporte une dérivation contenant les deux balais de contact et menant, à travers un contact glissant sur les fils du rhéostat, aux électrodes appliquées au sujet en expé- rience. Le courant traversant cette dérivation est inter- rompu et rétabli dans une succession très rapide; toutes les fois que les deux balais sont métalliquement réunis à travers un segment de pile, une fermeture se produit, qui est suivie d’une interruption quand les balais viennent se placer sur deux segments différents ou que l’un d’eux se trouve dans l'intervalle isolateur séparant deux segments consécutifs. Un des facteurs les plus importants est le rapport des temps de fermeture et d'interruption du courant ; pour réaliser la valeur 1 : 10 préconisée par M. Leduc, il faut régler le nombre de tours du moteur et la posi- tion relative des deux balais de contact. Ce dispositif sert, non pas seulement à la production de l’anesthésie générale ou locale, mais encore à l’élec- trisation du corps humain, de préférence à la bobine à induction, permettant la détermination précise de tous les facteurs dont dépendent les effets du courant. Alfred Gradenwitz. $ 7. — Sciences médicales La théorie parasitaire du eancer. — Une discussion très importante vient d'avoir lieu sur ce sujet à la Société de médecine berlinoise!, Des savants comme les Professeurs Orth, von Hansemann, 0. Israël, comme les D's Ziegler, Aschoff, Ribbert et Marchand, ont été unanimes à déclarer, au nom de l’Anatomie pathologique, que rien, absolument rien, n'autorise à considérer le cancer comme une maladie infectieuse. Leur argumentation est basée avant tout sur la spéci- ficité de la cellule cancéreuse, car un adénome ne peut donner qu'un adénome, un épithélioma pavi- menteux ne peut donner qu'un épithélioma pavimen- teux, et ainsi de suite, que l’'inoculation se fasse par contiguité ou qu'il y ail une métastase dans un organe éloigné. Si donc l'agent du cancer est un parasite, ce parasite a des propriétés singulières : quel que soit le tissu dans lequel il pénètre, il provoquera toujours une néoformation identique, reproduisant la tumeur pri- milive, ce qui est absolument contraire à ce que nous savons sur les réactions cellulaires; de plus, on sait que les cellules de l'organe envahi se comportent d’une facon absolument passive à l'égard du noyau métasta- tique, qui les repousse, qui se fait un nid au milieu «d'elles, sans provoquer de leur côté d'autres réactions. Pour les anatomo-pathologistes, cela s'explique très bien si l'on admet que la métastase se fait par la péné- ration de la cellule cancéreuse elle-même : or, la pré- sence de cette cellule à été constatée dans les lympha- ! Berliner klinische Wochenschrift, 1905, n9$ 11, 12 et 13, ct Deutsche Klinik, 1905, n°0 17. | tiques et les vai eaux sanguins de l'organe envahi Sans doute, on à invoqué l'inoculabilité du cancer, mais cette inoculabilité, telle qu'elle est pratiquée, n’est qu'une simple greffe, une transplantation de tissu cancéreux d'un animal sur un autre. Pour que les: inoculations cancéreuses soient absolument probantes, il eût fallu, disent-ils, reproduire le cancer par inocu— lation de tissu cancéreux filtré, ne contenant pas de cellules cancéreuses vivantes. Or, cette expérience, d'après eux, n'a jamais réussi. Cependant, M. Haaland!, dans un travail récent, vient de citer une expérience unique où l'injection, à la sou- ris, de liquide filtré de cancer trituré a provoqué, au bout de quatre semaines, l'apparition d’une tumeur à la vulve. Sans doute, une telle expérience, pour avoir une grande valeur, devrait être répétée plusieurs fois. Il n'en est pas moins vrai que les recherches que cet auteur vient de faire à l’Institut Pasteur sont une con- tribution très importante à la théorie parasilaire du cancer. Chez les souris, il a pu observer des tumeurs qui apparaissent spontanément et qui, par leur struc- ture, rappellent certaines formes de cancer chez l'homme. Ces tumeurs possèdent, en outre, la propriété de produire des métastases, et leur inoculation à d’au- tres souris donne souvent des résultats positifs. On à méme vu le cancer se manifester chez ces animaux, sous forme de véritables endémies, surtout dans les cas où l'on faisait vivre, dans la même cage, une souris cancéreuse au milieu de souris saines. Enfin, M. Haa— land fait remarquer que la prolifération épithéliale: dans le cancer est parfaitement comparable à celle que l’on observe dans la clavelée ou le molluscum pendu- lum des oiseaux. Tout ceci, done, semble plaider en faveur de l'existence d'un virus, théorie séduisante, qu'il appartient à l'avenir de vérifier. $ 8. — Géographie et Colonisation La culture du Coton en Afrique. — Il nous paraît intéressant de résumer les résultats positifs obte- nus par l'Association cotonnière anglaise, en indiquant les quantités de coton produites cette année sousles aus- pices de PAssociation : : Afrique occidentale, 8.000 balles {type américain), 1.750.000 francs; Afrique orientale, 10.000 balles (fype égyptien), 2.500.000 francs; Indes occidentales, 5.000 balles ({ype sea-bland),. 2.500.000 francs. L'Association, en publiant ces résulats, reproduit la, déclaration qu'elle avait faite lors de sa fondation : Elle ne désire pas cultiver le coton elle-même, mais. encourager d'autres à le faire, et, dans des pays tels que l'Ouest africain, créer une industrie indigène. Cette politique économique comporte donc deux choses : donner à l'industrie anglaise, aujourd'hui tributaire de l'Amérique, de nouvelles sources pour la matière pre- mière; créer dans les possessions tropicales de l'Angle- terre une culture nouvelle et indigène, laquelle, en augmentant la puissance d'achat des Noirs, aura pour effet d'augmenter le chiffre d'affaires entre eux et l'Angleterre. ; $ 9._— Enseignement et Sociétés Le Congrès de l'Enseignement commer- cial. — La Société internationale pour le développe- ment de l'Enseignement commercial avait organisé un Congrès qui vient de se tenir à Liége. M. Jacques Siegfried y à lu un important Rapport sur l'élat actuel de l'enseignement commercial dans le monde entier. Il a passé en revue, pour les seize prin= cipaux pays, cet enseignement à ses quatre degrés : faculté de commerce ou école des hautes études com= merciales: enseignement moyen, dont les établisse= 1 Annales de l'Iustilut Pasteur, 1905, n° 3, p. 165. 0 bai ot. er DR dé dé D TE PE NT Te 1 te re is vÉr … } CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 593 ments prennent d'ordinaire le titre d'écoles supérieures 4e commerce ou d'académies de commerce ; enseigne- ment élémentaire, comprenantles écoles primaires su- périeures commerciales et les écoles pratiques de commerce; enfin, cours commerciaux d'apprentis ou d'adultes. Le rapporteur a montré que, dans ces dernières an- nées, les efforts de tous les pays pour développer leur commerce international ont surtout provoqué la créa- tion et le développement d'écoles d'un degré de plus “en plus élevé; si bien qu'aujourd'hui on voit s'établir de véritables Facultés de Commerce, qui jouent pour cet enseignement le mème rôle que les Universités pour l’enseignement général. Ces facultés se créent “principalement en Allemagne, en Autriche, aux Etats- Unis, et l'Angleterre elle-même, autrefois si réfractaire à l’enseignement commercial, essaie en ce moment de rattraper le temps perdu. Au pôle opposé, c'est-à-dire en ce qui concerne l’en- seignement élémentaire, on s'occupe activement de l'instruction commerciale des apprentis et employés de commerce. Beaucoup de pays ont déjà déclaré obli- gatoire la fréquentation de ces écoles ou cours du soir. La France elle-même incline dans ce sens, ainsi que le montre le travail de M. Cohendy à la dernière ses- sion du Conseil supérieur de l'Enseignement technique. Aprés avoir parlé du remarquable développement de l'enseignement commercial au Japon, le rapporteur à conclu que, de tous les faits et de tous les chiffres cités par lui, se dégageait pour tous l'importance considé- rable et croissante que l’enseignement commercial à tous les degrés a prise dans la lutte ardente, mais paci- lique, que se livrent les nations pour le développement de la richesse publique et la marche progressive de la civilisation. La question de l’enseignement commercial des femmes a fait l'objet d'une discussion intéressante, . Mersenne essaya de la répéter à Paris, et, n'y ayant pas entièrement réussi, il la quitta et n'y ensa plus. Depuis, ayant été à Rome pour d'autres ffaires, et s'étant exactement informé du moyen e l'exécuter, il en revint pleinement instruit. « Ces nouvelles nous ayant été, en l’année 1646, ortées à Rouen, où j'étais alors, nous y fimes cette périence d'Italie sur les Mémoires du P. Mer- nne, laquelle ayant très bien réussi, je la répétai usieurs fois; et, par cette fréquente répétition, étant assuré de sa vérité, j'en tirai des consé- quences, pour la preuve desquelles je fis de nou- velles expériences lrès différentes de celle-là, en présence de plus de cinq cents personnes de toutes ortes de condilions, et entre autres de cinq ou six pères jésuiles du Collège de Rouen. » C'est donc « sur les Mémoires du P. Mersenne » jue Pascal commenca à faire des expériences Iydrostalique; et, assurément, Mersenne, qu'au- une recherche scientifique ne laissait indifférent, ne se désintéressa pas de ces expériences entre- prises par le fils d'un de ses amis, son ami lui- nème ; dans le dernier ouvrage qu'il ait publié, le Savant religieux nous apprend‘ qu'il a répété cer- dines expériences sur le vif argent « devant le R. P. Valier, philosophe très subtil, plusieurs autres Jésuites et devant les deux célèbres Mes- Pascal »; dans le même ouvrage, il men- 4 Lettre de Pascar à M. de Ribeyre, premier président de Cour des aides de Clermont-Ferrand (Œuvres complètes & Il s'agit de l'expérience de Torricelli. ® Novarum observationum physico-mathematicarum Be Marie Mensenxxt mini, tomus II, quibus accessitAnis- tionne ‘ les premières observations de Pascal. Le P. Mersenne ful donc très intimement mêlé aux premiers essais de Blaise Pascal sur la mécanique des fluides, et l’on peut être assuré que celui-ci eut exacte communication de ce que celui-là avait écrit à ce sujet. Or, en 1644, c'est-à-dire au moment même où l'expérience du vif argent venait à sa connaissance, Mersenne publiait un ouvrage * où, comme en la plupart des écrits du laborieux minime, les sujets les plus divers se trouvaient traités en grand désordre. L'équilibre et le mouvement des fluides étaient l’objet de plusieurs chapitres de cet ou- vrage ; en un de ces chapitres, nous lisons * les pas- sages suivants : « … VIIL. — Sur une surface plane et horizon- tale, le poids de l’eau sera égal à celui d'une co- lonne d’eau qui aurait cette surface pour base el pour hauteur la distance verticale de celte surface à la surface libre de l'eau... « IX. — La proposilion précédente semblera fort étonnante si l’on songe qu'il en découle cette con- séquence : sur le fond d'un vase quelconque, une seule livre d'eau peut peser autant que mille livrés, voire même que l'Océan lout entier. Imagi- nons, en effet, que l'Océan et la livre d’eau se trouvent contenus en deux vases ayant des fonds égaux; supposons que la base du second vase soit surmontée d'un tube si étroit que la livre d’eau y monte aussi haut que l'Océan dans l’autre vase; cette livre d'eau pressera le fond du second vase autant que l'Océan presse le fond du premier... « XI. — Supposons que l’on veuille plonger un bâton dans l'Océan ; que l'Océan soit enfermé dans. un vase dont le fond l'empêche de s'écouler, tandis que le couvercle le presse par-dessus pour l'empé- cher de monter; il ne pourra y parvenir s'il n'a une puissance qui conlienne le poids du bâton au- tant de fois que la surface de l'Océan contient la base du bâlon. « XII. — Si done, par un trou de ce couvercle, le bâton plongeait dans le vase en question, le cou- vercle éprouverait, de la part de l'eau qui se trouve au-dessous de lui, une pression de bas en haut égale à la pression de haut en bas qu'il subi- rait s’il devait porter un cylindre de bois ayant même hauteur que le bâton et mème base que le couvercle du vase où la mer est contenue. En outre, le bäton et le cylindre de bois exerceraient exactement la même pression sur les parois laté- 1 MERSENNE : Op. cit., p. 91. 2 K. Mani Mersexxr Minimi Cogitata physico-malhe- malica, in quibus tam naturæ quam arlis effectus admi- randi cerlissimis demonsirationibus explicantur; Parisüs, sumptibus Antonii Bertier, vià Jacobeà, MDCXLIV. 3 F. Mari MERSENNT Cogitata physico-mathematica ; Ars navigandi: Hydrostaticæ liber primus, pp. 227-229, 602 P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL rales du vase ; si l’on perçait une ouverture dansles |! donc, par cet intermédiaire, profiter de tout €e parois du vase, ou dans le fond, ou dans le cou- vercle, il faudrait, pour empêcher l’eau de s’échap- per, employer une force égale au poids du cylindre correspondant. « XIII. — Si l’eau venait à se congeler, le rapport de mouvements et de vitesses que nous avons con- sidéré ci-dessus n'aurait plus lieu. » Ces pages étaient publiées dès 1644, deux ans avant que Pascal ne débutàt dans l'étude de l'Hy- drostatique; elles étaient sûrement connues de lui avant qu'il ne s'essayät en celle science. Or, si nous les rapprochons des fragments, cités ci-des- sus, du 7raité de l'équilibre des liqueurs, nous ne pouvons, entre les unes et les autres, méconnaïître uné frappante analogie. Certes, la forme si particu- lière de chacun des deux esprits à imprimé sa marque, très profondément, dans les deux écrits que nous comparons; là où l'imagination exubé- rante de Mersenne cherche des figures saisissantes, des énoncés d’allure paradoxale, la raison de Pascal se montre soucieuse, avant tout, d'ordre et de clarté; Pascal se contente de mettre en balance une livre et cent livres; à une livre d’eau, Mersenne oppose l'Océan tout entier. Mais, sous ces diffé- rences tout extérieures, ne retrouvons-nous pas les mêmes vérilés? N’est-il pas évident que Pascal a tiré des Cogitala physico-mathematica les proposi- tions les plus importantes que formule le 7raité de l'équilibre des liqueurs ? N'est-il pas certain que le principe de la presse hydraulique se trouve claire- ment énoncé dans l'écrit du savant religieux, que le Principe de Pascal pourrait plus justement se nommer Principe de Mersenne? L'influence de Mersenne ne se reconnail-elle pas jusqu’en cette ingénieuse remarque qu'il suffirait de congeler l'eau pour que les lois de son équilibre en fussent toutes changées? Pascal a donc, pour constituer son Hydrostatique, largement puisé à la science du P. Mersenne. Or, puiser à la science de Mersenne, c'était s'abreuver à la tradition scientifique de l'Europe tout entière; de même, en effet, qu'il se chargeait de mander aux savants des divers pays les décou- vertes faites en France, de même le P. Mersenne s'était donné mission de faire connaître aux Fran- cais tout ce que les étrangers produisaient d'im- portant en Mécanique et en Physique. Pascal put ! Lorsque Pascal, en 1647, eut fait ‘imprimer son pelil écrit intitulé : Nouvelles expériences louchant le vide, et « en eul fait tenir en toutes les villes de France où il avoit J'honneur de connoitre des personnes curieuses de ces matières », « le P. Mersenne, ne se contentant pas d'en voir par toute la France, lui en demanda plusieurs pour les envoyer, comme il fil, en Suède, en Hollande, en Pologne, en Allemagne, en Italie et de tous les côtés » (Lettre, déjà citée, de PascaL à M. de Ribeyre). | | que l'on avait acquis de plus certain touchank l'équilibre des liqueurs; des multiples influences qu'il éprouva de la sorte, nous allons relever IeSM traces nombreuses. ot 111. — L'INLUENCE DE SIMON STEvIN. Parmi les recherches d'Hydrostatique que Pascal a dû connaitre par les écrits de Mersenne, il faut citer en première ligne celles de Simon Stevin. (1548-1620), la Statique attire aussitôt l’atten tion par son importance et par l'originalité des principes dont elle se réclame’; mais, en cettem Statique même, nulle partie n’est, par sa rigueuw et par sa nouveauté, plus digne d’admiralion que l’'Hydrostatique. Ce que Stevin a écrit sur la pression exercée pa les fluides pesants nous offre, en effet, l'exemple bien rare dans l'histoire de la Physique, d’une« œuvre qui parait presque entièrement sponlanée tandis que les découvertes hydrostatiques de Bene detti et de Galilée, dont nous aurons à parler plus loin, se rattachent par des liens encore visibles à des pensées émises par des auteurs plus anciens, notamment par Léonard.de Vinci, les rèmes énoncés par Stevin, aussi bien que les mé thodes par lesquelles le géomètre brugeois les a établis, semblent isolés de toute tradition. La première proposition de Stevin, touchant la pression que les fluides pesants exercent sur les parois qui les contiennent, est énoncée en ces termes ? : « Sur une surface place et horizontale, le poids de l'eau sera égal à celui d'une colonne d'eau qui aurait cette surface pour base, et pour hauteur Ia distance verticale de la surface à la surface libre de l’eau. » par la regarder comme évidente dans le cas 0 la surface considérée est le fond d’un vase qui a là figure d'un cylindre droit et qui est rempli par l@ quelconque de cette masse. La proposilion ainsi obtenue avait été au moin 1 Nous avons analysé les principes de la Statique de@ Stevin dans notre ouvrage : Les origines de la Statique chapitre XII : Simon Stevin (Revue des Questions scientien liques, 3° série, t. VIT, janvier 1905). ? SImonIS STEVINI : Tomus quarlus mathematicururm hypos mnematum ; de Statica: liber, quartus Staticæ : de hydrostas licis elementis, 8 theorema 10 propositio, p. 119, ' æntrevue avant les recherches de Slevin; il n'en est pas de même, croyons-nous, de celles que présente ensuite le géomètre brugeois; celles-ci ont pour objet de déterminer la grandeur, la direction et le point d'applicalion de la poussée exercée par un liquide pesant sur une paroi verlicale ou oblique; de ce problème, non résolu jusqu'à lui, Stevin donne pe ue Das) aujourd’ hui cs M. l; S Bo vi bien que la rigueur en puisse être con- A ses Éléments d'Hydrostatique, Stevin joignit bientôt un livre sur les Principes de l'Hydrosta- tique pratique; de la proposilion que nous avons ‘eproduite, il y tirait cette conséquence‘ « Supposons que les deux fonds AB et CD (fig. 2) Soient égaux entre eux; supposons aussi que la hauteur EF soit égale à la hauteur GH; mais ima- soit un cylindre dont, par conséquent, le volume sera décuple de EAB. Nous affirmons cependant que le fond AB éprouve une poussée tout aussi grande que celle du volume GCD sur le fond CD. - De ce corollaire, de diverses autres conséquences qui découlent des lois formulées aux Æ/éments d'Hvdrostatique, Stevin donne des vérifications expérimentales ingénieuses el variées; encore aujourd'hui, la plupart de ces vérifications se retrouvent, nullement modifiées, dans nos manuels élémentaires: elles sont reproduites dans les cours de nos Lycées. Les Éléments d'Hydrostatique de Stevin, rédigés en langue flamande, parurent d'abord à Leyde’, en 1586, en même temps que les Éléments de £ Srkvix : Op. cit; liber quintus Staticæ : ydrostatices: p. 11%. > De Beghinselen des -SimMox STEvIN van Brugghe, “Christoffel Plantijn, by _ MDLXXXVI. de initiis praxis Waterwichts, beschreven dver tot Leyden, inde Druckerye van Francoys van Raphelingen ; P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL 603 Statique. En 1608, Stevin les comprit dans le deuxième volume de la collection de ses Mémoires de Mathématiques", rédigés en langue flamande. Cette collection fut, en même temps, traduite en latin® par Willebrordus Snellius; la Statique, avec l'Hydrostatique, en forma le tome IV. Enfin, en 1634, Albert Girard donna une traduction francaise? des Aypomnemala mathematica. Mais le P. Mersenne n'avait pas attendu la tra- duction d'Albert Girard pour porter à la connais- sance des géomètres français les découvertes que Simon Stevin avait faites dans le domaine de l'Hydrostatique. Dès 1626, l'aclif minime avait donné une curieuse collection de petits traités * écrits en latin; chacun de ces petits trailés se compose d'une suile de propositions, empruntées à divers auteurs, et reproduites sans aucune figure ni démonstration; l'un de ces traités, par exemple, donne tous les théorèmes des Éléments d'Euclide, l’autre tous les énoncés qui se rencontrent dans les œuvres d'Archimède. Or, au livre III du traité intitulé JMecanicorum libri, nous trouvons la copie de toutes les propositions formulées par Stevin en ses Éléments d'Hvdrostatique; le nom de Stevin n'es pas prononcé en ce livre III, mais, au début du livre Il, Mersenne avait eu soin de le citer, avec Guido Ubaldo del Monte, comme un des auteurs dont il allait reproduire les pensées. Mersenne ne se contenta pas de cette première publication. En 1644, il inséra de nouveau, dans ses Cogilata physico-mathematica, les énoncés des lois hydrostatiques découvertes par Stevin*. C'est parmi ces énoncés, c’est à titre de corollaires de l’un d’entre eux, qu'il développait les considé- rations que nous avons reproduites au paragraphe précédent. ‘ Wisconslige Gedachtenissen, inhondende t'ghene daer hem in gheoeffent heeft den Doorlvchtichsten hoochghe- boren Vorst ende Heere, Maurits Prince van Orangien. Grave van Nassau, beschreven deur SIMON STEVIN van Brugghe, tot Leyden, inde Druckerye van Jan Bouvvensz, int laer MDCVIIL. ? Hvpomnemala mathematica, quo comprehenduntur ea in quibus sese exercuit illustrissimus, illustrissimo et antiquo stemmate ortus Princeps ac Dominus Mauritius, Princeps Auraicus, Comes Nassoviæ..….. conscripta a SIVONE Srevino Brugensi, Lugodini Batavorum, ex officina Joannis Patii, Academiæ typographi. Anno MDCV. 3 Œuvres mathematiques de Simon STevin de Bruges, où sont insérés les Mémoires mathématiques esquelles l'est Maurice de exercé le Tres-haut et Tres-illustre Prince Nassau, Prince d'Aurenge..…. par Albert Girard Samielois Mathematicien. A Leyde, chez Bonaventure et Abraham Elsevier, Imprimeurs ordinaires de l'Université. Anno MDCXXXIV. * Synopsis mathematica, ad clarissimum virum D. Jaco- Doctorem medicum Parisiensem. Lutetiæ, ex Stephani, MDCXXVI. — L'ouvrage ne porte aucun nom d'auteur, mais le privilège du Roï est accordé au P. Marx MERSENNE, religieux de l'ordre des Minimes. 5 K. Marint MeRSExNt Cogilata phySico-mathematica; Ars Navigandi ; Hydrostaticæ liber primus. bum Lætus, officina Rob. 60% P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL Il nous apparait maintenant comme assuré que Pascal, avant d'entreprendre aucune recherche sur l'équilibre des liqueurs, connaissait lout ce que Stevin avait découvert à ce sujet; il en avait trouvé le résumé dans les livres de Mersenne et, d'ailleurs, il est vraisemblable qu'il ne s'était pas contenté de ce résumé et qu'il avait pris connaissance des écrits mêmes du géomètre brugeois. Il n'avait donc pas eu à découvrir par lui-même la proposition qui domine tout le Traité de l'équilibre des liqueurs IV. — L'INFLUENCE DE GIOVANNI-BATTISTA BENEDETTI. Entre plusieurs des propositions énoncées par Pascal et celles que Stevin a formulées, il existe une incontestable analogie, et celte analogie n’a plus rien qui nous puisse surprendre; mais, à côté de cette analogie, une différence importante mérite d'être signalée. Stevin a exclusivement étudié la pression exercée sur les parois des vases par les liquides pesants que ces vases contiennent; jamais il ne s'est demandé comment une pression, étrangère au poids même du liquide, et exercée sur ce liquide par un piston chargé, se transmettait à un autre piston; Mersenne, au contraire, et Pascal après lui, ont regardé ce problème comme essentiel et, ce faisant, ils ont découvert le principe de la presse hydrau- lique. L'attention de Mersenne s’est-elle portée d’une manière entièrement spontanée vers ce nouveau problème? A-t-elle, au contraire, été atlirée vers lui par quelque influence autre que celle de Stevin? C’est, croyons-nous, à celte seconde question qu'il faut répondre d'une manière affirmalive, et l'in- fluence qu'il convient ici d'invoquer nous parait être celle de Giovanni-Battista Benedetti. Le recueil d’écrits, composés par Benedetti, qui a été publié en 1585 sous le Litre de Diversarum speculationan liber renferme une lettre, non datée", adressée par l’auteur à Giovanni-Paolo Capra, de Novare, maitre de l'hôtel du Due de Savoie; en celte lettre, consacrée à l'Hydrostatique, Benedetti parle incidemment de la pression qu'un liquide pesant exerce sur les parois obliques d'un vase, et le peu qu'il en dit suffit à nous montrer qu'il ne connaissail pas les lois auxquelles obéit celte pres- sion; mais cette lettre renferme, en outre, certains passages essentiels que nous allons reproduire. Ces passages, qu'annonce le Lilre même de la lettre : « De la machine qui pousse et soulève l'eau», sont les suivants : « En une fontaine, le corps de pompe où pénètre 1 Jo. Barrisrx BexeniGrr, patrilii Veneli, philosophi Diver- sarum speculationum liber; Taurini, apud hæredem Nicolai Bevilaquæ, MDLXXX V : p. 287. ‘dix fois plus large que le tuyau F, ii faudrait, pou® | substitution, en même temps, dans les deux luyaux; le piston qui chasse l’eau ne doit pas avoir un dia mètre plus grand que celui du luyau par où l'eau doit monter, et voici pourquoi : Si le premier dia= mètre était plus grand que le second, il faudrait que le poids du piston qui chasse l’eau fût beau» coup plus lourd que le volume d’eau capable de remplir un cylindre dont la hauteur serait celle dé la fontaine et la section celle du corps de pompe: « Soient, par exemple (fig. 3), F le conduit par lequel l’eau doit monter et AU Le corps de pompe supposons le corps de pompe AU aussi élevé que Je tuyau F et plus large que lui. Imaginons que ces deux vases soient pleins à bord. Il est évident que l’eau du tuyau F suffira à résister à la poussée d l'eau du corps de pompe AU et réciproquement, bien que l’eau du vase AU surpasse en volume et poids l'eau du tuyau F; le poids est divisé proporlion- nellement à la surface du fond du vase. « Revenons aux vases AU et F. De même que l'eau contenue dans F suflit à résister à l’eau contenue dans AU, de même on pourra résister à cette dernière en remplaçant l’eau du con- duit F par un poids égal de n'importe quelle matière, placée dans l'âme du tuyau F, pourvu seuleméntqu'il soit exactement adapté à la cavité interne du tuyau de sorte que ni l’eau ni l’air ne puissent passer entre la surface externe de ce piston et la surface interne du tuyau. Cela va de soi. Mais, dans le corps de pompe AU, qui, par hypothèse, est plus large que le luyauF, aucun piston ne pourra résister à la poussée de l’eau du tuyau F s’il n'est aussi lourd que loute l'eau contenue dans AU jusqu'à la hauteur du tuyau F. Si, par conséquent, l’eau du tuyau F pesait seus lement une livre et si le corps de pompe AU étaib soutenir l'eau du tuyau F, placer dans le corps de pompe AU un piston qui s'y adaptàt exactement eh dont le poids fût de 10 livres; pour qu'il fût en éla de chasser l'eau du tuyau F, il faudrait que ce piston pesät plus de 10 livres. Imaginons que ce corps soil formé d'une matière tellement plus dense que l’eau“ qu'il occupe seulement le volume EO. Le corps pesant EO suflira à pousser l'eau du ne F, mais. un corps plus léger n’y suffirait pas. » ; Benedelti a substitué un pislon à une colonne d'eau de même poids, d'abord dans le tuyau étroit puis dans le large corps de pompe; s'il eût fait colles P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL il eût été le véritable inventeur de la presse hydrau- lique; en tout cas, après avoir lu la leltre de Bene- delti à Giovanni-Paolo Capra, ni Mersenne, ni Pascal n'avaient grand effort à faire pour imaginer celle presse. Mais le P. Mersenne et Blaise Pascal ont-ils du la lettre de Benedetti? Nous savons, par son propre témoignage, que Mersenre avait eu connaissance du Diversarum speculationum liber où celte lettre est insérée; ayant, en son /larmonie universelle", à user de la notion de moment d'une force pour trailer de l'équi- Jibre de la balance, il justifie l'emploi de cette notion par ces mots : « Comme fait Jean Benoist dans son troisième chapitre sur les Méchaniques »; or, l'écrit De mechanicis est une des parties les plus impor- tantes du Piversarum speculationum Liber. I n'est pas douteux, dès lors, que Mersenne, si curieux de tout ce qui touchait la Mécanique des fluides, n'ait pris connaissance du remarquable passage que nous | avons cité et ne s'en soit souvenu lorsqu il a écrit * sur l'Hydrostatique. Par l'intermédiaire de Mersenne, Pascal a res- senli l'influence de Benedetti; il n'est pas invrai- semblable qu'il l'ait aussi subie d’une manière immé- diale, par la lecture du Diversarum speculationum liber; bien des analogies entre les écrits des deux auteurs suggèrent cette opinion. Pascal veut qu'on mette à chaque ouverture de la presse un piston « qui lui soit juste », tandis que Benedetti veut que le piston « soit adapté à la cavité interne du tuyau, de sorte que ni l'eau, ni l’air ne puisseut passer entre la surface externe de ce piston et la surface interne du tuyau ». Benedetti explique l'équilibre . de masses d’eau inégaies dans des vases communi- * quants de‘largeurs différentes, parce que « le poids - est divisé proportionnellement à la surface du fond - du vase »; Pascal observe, « pour plus grand éclair- - cissement, que l’eau est également pressée sous les - deux pistons; car si l'un a cent fois plus de poids ‘E l'autre, aussi en revanche il touche cent fois Lu de parties ». Benedetii, de la loi des vases communiquants, tire la théorie de la pompe, en Eine que l’on peut, à une colonne d'eau, ETAT ce at OT ILE OT dr he substituer un pision de même poids; par une marche exactement inverse, Pascal déduit du prin- “cipe de la presse hydraulique la loi d'équilibre hydrostalique entre deux tuyaux communiquants, car «les eaux de ces deux tuyaux sont proprement deux pistons pesant à proportion des ouvertures ». » hJ |! Harmonie universelle, contenant la théorie et la pra- tique de la musique, où est traité de la nature des sons, et “les mouvemens, des consonances, des dissonances, des “zenres, des modes, de la composition, de la voix, des “ chants et de toutes sortes d'instrumens harmoniques, par F. Mann Mersexxe, de l'ordre des Minimes: à Paris, chez Sébastien Cramoisy, MDCXXXVI. Nouvelles observations physiques et mathématiques, Ve observation, p. 17. F1 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Entre la pensée de Pascal et celle de Benedelti, il existe une affinité difficile à méconnaitre. V. — L'INFLUENCE DE GALILÉE. Cette affinité, cependant, ne va pas jusqu'à mas- quer.une divergence essentielle; la marche suivie par Pascal est, pour ainsi dire, inverse de celle qu'a suivie Benedelti. Pour Pascal, la loi d'équi- libre des liquides en des vases communiquants n'est pas un principe : c'est un corollaire; le prin- cipe des lois hydrostatiques est autre, etil se tire lui-même d’un axiome plus élevé, de l'égalité entre le travail moteur et le travail résistant, qui carac- térise l'équilibre de loute machine. Benedetti se fût bien gardé de faire appel à ce dernier principe; il y voyait un des axiomes dont se réclamait l'École de mécaniciens fondée, au xiu° siècle, par Jordanus de Nemore; et les mé- thodes de cette École élaient en butte à ses plus vives critiques ‘. Il était donc naturel que, fidèle à la méthode d'Archimède, il usät d’un principe, bien particulier il est vrai, mais dont la cerlilude expé- rimentale était immédiate. Ce n’est donc point la lecture de Benedetti qui a pu suggérer à Pascal l’idée de chercher dans la presse hydraulique une machine où « le chemin est augmenté en même proporlion que la force ». Le P. Mersenne, au contraire, était vivement sollicité par le désir de rattacher les lois de l'Hy- droslatique au principe des vitesses virtuelles qui, déjà, s'appliquait si heureusement aux diverses « méchaniques ». Mais il ne parait pas avoir com- pris de quelle manière ce principe pouvait sappli- quer à l'équilibre des liqueurs ; quelques passages de ses Cogilata nous montrent à quel point ses idées étaient fausses à ce sujet; tel, en particulier, le passage suivant? L'effet produit, dans les assemblages de corps solides, par la distance au centre de la balance ou au point d'appui du levier, est produit, dans les corps fluides, par les diverses hauteurs des tubes et par les largeurs différentes des vases; de même, en effet, qu'un poids se meut d'autant plus rapide- ment qu'il est plus éloigné du centre de la balance, de même, l'eau se meut d'autant plus rapidement qu’elle est plus éloignée de son niveau dans le tube qui la contient ou, en d’autres lermes, qu'elle s'élève davantage dans ce tube. El, de même que des poids inégaux peuvent, dans les deux plateaux d'une AE. se faire équilibre par suite des lon- 1 Cf. P. Dune : Les Origines de la Statique, chapitre X. Laréaction contre Jordanus-Guido Ubaldo-Benedetti (Revue des Questions scientifiques, 3° série, t. VI; octobre 1904). 2, Marixr Mersenns Minimi Cogilata physico-mathcema- tica; Ars navigandi, p. 228. 13* 606 P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL ; gueurs différentes des bras du fléau, de même des masses d'eau inégales peuvent s’équilibrer par suite des dispositions diverses des vases qui les contiennent... » Pascal n’eût donc pu apprendre de Mersenne l’art d'appliquer le principe des vitesses virtuelles à l'équilibre des fluides; mais il a pu l’apprendre de Galilée. En 1612, Galilée fit imprimer un écrit sur les corps flottants'. Le but principal de cet écrit est de réduire au principe des vitesses virtuelles les corol- laires qui se déduisent du principe d’Archimède. Que cette réduction procède par une méthode qui n'est point légilime, que le principe des vilesses virtuelles, appliqué à un déplacement fini, et non à un déplacement infiniment petit, doive seulement à un hasard heureux et tout particulier de produire des conséquences exactes, c'est ce que nous nous bornerons à mentionner en passant et sans y insister; aussi bien, ce que Galilée a écrit des corps immergés n'intéresse pointdirectementnotresujet. H Il n'en est pas de même d'un court passage où le grand géomètre florentin ra- mène au principe des vitesses virtuelles la loi d'équilibre d’un liquide en deux vases communiquants ; traduisons ici ce passage essentiel : « Considérons la figure ci-jointe (fig. 4); si je ne me trompe, elle pourra servir à tirer d'erreur certains mécaniciens pratiques qui, se fondant sur de faux principes, tentent des entreprises impos- sibles; un vase très large EIDF se continue par le tuyau très délié ICAB; dans ces deux vases, on à versé de l'eau jusqu'au niveau LGH. Dans celte position, l'eau demeurera en équilibre, ce qui n’est point sans étonner certaines personnes; en effet, elles ne peuvent comprendre de suite comment il se peut faire que la lourde charge de la grande masse d’eau GD, en pressant vers le bas, ne sou- lève pas et ne chasse pas la petite quantité d’eau contenue dans le tuyau CL, alors que cette petite quantité d’eau lui dispute le passage et l'empêche de descendre. Mais cet étonnement cessera sitôt n Fig. 4. 1 Discorso al Serenissimo Don Cosimo II, Gran Duca di Toscane, intorno alle cose che stanno in su l'acqua 0 che in quella Si muovono, di GALILEO GaLILEr, flosofo e matematico della medesima Altessa Serenissima ; Firenze, 1612. Ce dis- cours est reproduit dans toutes les éditions des œuvres de Galilée, que nous imaginerons que l'eau du gros tuyau s'abaisse du niveau GH au niveau Q, et que nous considérerons l'effet produit sur l’eau CL; pour donner place à l’eau qui s’est abaissée du niveau GH au niveau Q, il faudra nécessairement qu'elle s'élève en même temps du niveau L au niveau AB# la montée LB surpassera la descente GQ autant de fois que la largeur du vase GHD surpasse la largeur du tuyau LC ou, en d’autres termes, aulant de fois que la masse d’eau contenue dans GHD surpasse la masse d'eau contenue dans LG. Mais comme, em un mobile, le momento de la vitesse du mouvement compense le momento qu'un autre mobile tire de sa gravilé, qu'y a-t-il de merveilleux à ce que l'as cension très rapide de la petite quantité d'eau CB puisse résister à la lLrès lente descente de la grande quantité d’eau GD ? « Il arrive donc en cette opération exactement la même chose qu'en la balance romaine, où un poids de 2 livres en contrepèse un de 200 livres’ toutes les fois que, dans le même temps, le premier parcourt un espace cent fois plus long que le second; ce qui arrive lorsque un des bras du fléau est cent fois plus long que l’autre. » Entre ce passage, emprunté à Galilée, et ce que nous avons lu dans Pascal, l’analogie est extrèmes mais Pascal connaissait-il le Discorso intorno alle cose che stanno in su l'acqua? Mersenne, à coup sûr, connaissait ce discours el le tenait en très haute estime; en ses Cogitala physico-mathematica, il donne un exposé fort élendu' de la méthode par laquelle le grand géomètre florentin a traité des corps flottants où immergés; cet exposé est précédé d'un éloge enthousiaste de Galilée et des découvertes qui lu sont dues. Sans doute, le passage de Galilée que nous avons cité n’est ni reproduit, ni résumé par Mersenne; mais ce que celui-ci a extrait du Dis corso suffirait, même à un esprit moins puissant que Pascal, pour retrouver les idées contenues em ce passage. Et, d’ailleurs, Pascal s'était-il contenté du résumé donné par Mersenne? N'avait-il point pris connaissance de l’œuvre même de Galilée? N'avait-il point suivi le conseil de son religieux ami qui, parlant de cette œuvre, la désignait comme ® : « un petit livre subtil, écrit en italien; que je voudrais voir lu par tous les hommes si dieux »? VI. — L'INFLUENCE DE DESCARTES. Entre les dires de Galilée et ceux de Pascal, ily a cependant une nuance, et cette nuance est telle” LE, Mammi Mensextt Minimi Cogitala physico-mathema tica; De hydraulicis phænomenis, p. 193-202. x ? MersenNe : Loc. cit., p. 195. AL P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL 607 Tandis que le niveau de l'eau s'abaisse dans le tube large et s'élève dans le tube étroit, Galilée compare les vitesses simultanées de cette descente et de cette ascension; pour qu'il y ait équilibre, il veut que ces vitesses soient en raison inverse des poids d’eau qui descendent et qui montent; Pascal raisonne à peu près de même, mais ce qu'il com- pare ce ne sont point les vitesses avec lesquelles l’un des niveaux s'abaisse et l’autre s'élève; ce sont les chemins parcourus en cet abaissement et - en cette élévation. En celte divergence entre Galilée - et Pascal, nous percevons la marque très nette d'une influence nouvelle qu'a subie l'esprit de ce dernier ; cette influence est celle de Descartes. Le 5 octobre 1637, Descartes, cédant aux solliei- tations de Constantin Huygens, lui envoyait' un petit écrit intitulé : Æxplicalion des engins par layde desquels on peut avec une petite force lever un fardeau fort pesant; cet écrit était un véritable traité de Statique. Peu de temps après, le 43 juillet 1638, le philosophe en envoyait* à Mersenne une nouvelle rédaction, peu différente de la première, à laquelle il avait donné ce titre : Æxamen de la question sçavoir si un corps pèse plus ou moins estant proche du centre de la Terre qu’en estant esloigré. La Statique exposée par Descartes est tirée tout entière d'un unique axiome; voici comment Des- cartes formule cet axiome dans la pièce qu'il adresse à Mersenne : « Et la preuve de cecy ne dépend que d’un seul - principe, qui est le fondement général de toute la | Statique, à scavoir qu’il ne faut ny plus ny moins | de force pour lever un corps pesant à certaine hauteur que pour en lever un autre moins pesant "à une hauteur d'autant plus grande qu'il est moins pesant, ou pour en lever un plus pesant à une hauteur d'autant moindre. Comme, par exemple, "que la force qui peut lever un poids de 100 livres | à la hauteur de deux pieds, en peut aussy lever un de 200 livres à la hauteur d’un pied, ou un de 50 à la hauteur de quatre pieds, et ainsy des autres, si - tant est qu'elle leur soit appliquée. « Ce qu'on accordera facilement si on considère “que l’effect doit tousiours estre proportionné à | l'action qui est nécessaire pour le produire, etainsy “que, s’il est nécessaire d'employer la force par “laquelle on peut lever un poids de 100 livres à la “hauteur d'un pied seulement, cela tesmoigne que celuy-cy pèse 200 livres. Car c'est le mesme de lever 100 livres à la hauteur d’un pied, et derechef “encore 100 à la hauteur d’un pied, que d'en lever Adam et P.Tan- 431. Adam et P. Tan- 222. { Œuvres de Descartes, publiées par Ch. nery ; Correspondance, n° LXXXIX, t. I, p. ? Œuvres de Descartes, publiées par Ch. mery: Correspondance, n° CXXIX, t. Il, p. 200 à la hauteur d'un pied, et le mesme aussy que d'en lever 100 à la hauteur de deux pieds. » Ce principe de Statique fut l’objet de mainte lettre de Descartes à Mersenne‘. Descartes avait à le défendre contre certains géomètres tels que Mersenne lui-même, tels que Des Argues, qui le révoquaient en doule; ils l'avaient inexactement compris, prenant le mot force au sens où nous l'entendons aujourd’hui, tandis que Descartes y attachait la signification que désigne pour nous le mot {ravail. Il avait aussi à le soutenir contre les partisans de Galilée qui voulaient multiplier la puissance et Ja résistance non par le chemin qu'elles parcourent, mais par la vitesse dont elles sont animées; les deux règles conduisaient, en chaque cas, aux mêmes conséquences; mais celle qu’énon- cait Galilée avait pour elle l'autorité des Questions mécaniques d'Aristote; aux tenants de cette règle, Descartes montrait qu'elle élait étroitement liée aux | principes, désormais insoutenables, de la Dyna- mique péripatéticienne, tandis que celle qu'il propo- sait était indépendante de la science du mouvement. Après quelque résislance, Mersenne finit par accepter le principe de Statique que Descartes avait formulé; dûment autorisé par l’auteur, il inséra en ses Cogilala physico-mathematica* et l'axiome de Descartes, et plusieurs des conséquences qui s’en peuvent lirer. Le laborieux minime avait fait part de la Statique de Descartes aux géomètres avec qui il avait com- merce, entre autres à Roberval et à Des Argues; Pascal, assurément, ne fut point oublié. Il donna, nous venons de le voir, sa pleine et entière adhésion au principe qui porte toute cette Statique; il fit plus, et usa de ce principe pour justifier la loi essentielle de l'équilibre des liquides. NII. — L'INFLUENCE DE TORRICELLI. Pascal ne s'est pas contenté de justifier la loi fondamentale de l’Hydrostatique au moyen de l’axiome que Descartes place à la base de toute la Statique ; il l'a établie encore sur cet autre principe « que jamais un corps ne se meul par son poids, sans que son centre de gravité descende ». Cet axiome est propre, lui aussi, à porter la Sta- tique tout entière, et Pascal en a fait l'épreuve : « J'ai démontré par cette méthode, dans un petit Traité de Mécanique, la raison de toutes les multi- 4 On trouvera l'histoire détaillée de ce principe dans notre écrit : Les Origines de la Statique, chapitre XIV; La Sta- tique Francaise. — René Descartes (Aevur des Questions scientifiques, 3° série, t. VII, p. 462; 1905). 2 EF. Marins Mersennt Minimi Cogitata physico-mathe- malica ; Tractatus mechanicus, p. 35. 3 Pasca : Trailé de l'équilibre des liqueurs, chap. IL 608 P. DUHEM plications de forces qui se trouvent en lous les autres instrumens de Mécanique qu'on a jusqu'à présent inventés. Car je fais voir en tous, que les poids inégaux qui se trouvent en équilibre par l'avantage des machines, sont tellement disposés par la construction des machines, que leur centre de gravité commun ne sauroit jamais descendre, quelque situation qu'ils prissent : d'où il s'ensuit qu'ils doivent demeurer en repos, c'est-à-dire en équilibre. » Pour relrouver l'origine du principe de Statique que Pascal invoque en ce passage, il faut remonter très haut dans le passé, jusqu'aux doctrines qu'en- seignait, au milieu du xtv° siècle, l'École nomina- liste de la Sorbonne, et particulièrement Albert de Saxe; il faut suivre la tradition ininterrompue qui relie la Scolastique de l'an 1350 à Galilée. Cette œuvre, nous l'avons tentée ailleurs‘, nous ne la reprendrons pas ici; nous nous bornerons à lire les écrits où ces tendances, trois fois séculaires, ont définitivement abouti, les écrits que Pascal à dû consulter; ces écrits sont ceux de Torricelli. En 1644, parut, à Florence, le recueil des écrits mathématiques d'Evangelista Torricelli?; parmi ces écrits se trouvait le traité Sur le mouvement des graves®, que Torricelli, alors disciple du P. Castelli, avait envoyé de Rome à Galilée; le vieux géomètre, rélégué dans sa villa d’Arcetri, lerminait dans la maladie et la cécité une vie dont les soins de Vi- viani adoucissaient seuls l’amertume; il appela auprès de lui l’auteur de cet admirable Traité, et Torricelli put ainsi recueillir les derniers enseigne- ments de Galilée. La théorie du plan incliné joue, dans le lraité Sur le mouvement des graves, un rôle essentiel; Torricelli la tire du principe suivant* : « Deux graves unis ensemble ne peuventse mouvoir d'eux- mêmes à moins que leur commun centre de gravité ne descende. » À cet énoncé, Torricelli ajoute ce commentaire : « Lorsque deux graves sont conjoints entre eux de telle sorte que le mouvement de l'un entraine le mouvement de l’autre, on peutles regarder comme formant un grave unique composé de deux parties, et cela que ces deux graves soient associés l’un à (Œuvres complètes de BLAise PASCaL, 87; Paris, Iachette, 1880). { Aux chapitres XV et XVI de nos Origines de la Sta- tique; ces chapitres seront prochainement publiés dans la Revue des Questions scientiliques. ? Opera geometrica EvanGeuistTæ Tortcezzu: Florentiæ, typis Amatoris Massæ et Laurentii de Landis, 164% # De motu gravium naluraliter descendentium, et projec- torum libri duo, in quibus ingenium naturæ circa parabo- licam lineam ludentis per motum ostenditur, et universa projectorum doctrina unius, descriptione semicireuli, absol- vilur, :- TORRICELLI : L'AUTRE De molu gravium, p. 99. — LE PRINCIPE DE PASCAL l’autre par l'intermédiaire d'un levier, d'une poulie ou de n'importe quel aulre mécanisme. Or, si Ce« grave complexe est conslitué de telle sorte que son centre de gravité ne puisse descendre en aucune manière, ce grave demeurera assurément en repos dans la position qu'il occupe; faute de quoi, il se mouvrait en vain, car il se mouvrait horizontale- ment el ne tendrait pas vers le bas. » Dans le traité De motu gravium, Torricelli à appliqué ce principe au seul équilibre d’un poids sur un plan incliné; en un aulre traité’, il en a tiré la loi d'équilibre du levier. A l’aide de ces indicaz= tions, il n’était pas malaisé de déduire de ce prin= cipe la théorie des diverses machines simples; c'est ce qu'avait fait Pascal en ce petit 7railé de Méca nique qu'il avait composé et qui ne nous est point parvenu. D'ailleurs, il paraît certain que Pascal connais= sait les écrits où Torricelli avait consigné ce nouveau principe de Statique. En 164%, le P. Mersenne « espère * voir bientôt paraitre les traités célèbres composés par le très. pénétrant Torricelli, successeur de Galilée ». Ces traités furent, en effet, bienlôt connus dans le cercle des amis de Mersenne. En 1647, on igno= rait encore, dans ce cercle, le nom de celui qui avait imaginé l'expérience du vif-argent; « mais, dit. Pascal *, comme nous étions tous dans l’impatience de savoir qui en étoit l'inventeur, nous en écrivimes à Rome au Cavalier del Posso, lequel nous manda; longtemps après mon imprimé, qu'elle est vérita= blement du grand Torricelli, professeur du duc de Florence aux Mathématiques. Nous fûmes ravis d'apprendre qu'elle venait d'un génie si illustre, eb dont nous avions déjà recu des productions en Géométrie, qui surpassent toutes celles de l'Antis quilé. Je ne crains pas d’être désavoué de cet éloge par aucun de ceux qui sont capables d'en juger » Avant donc qu'il commençàt ses recherches sun l'IHydrostalique, Pascal connaissait les Opera geo metrica de Torricelli. VIII. — QUEL FUT L'OBJET DE PASCAL EN COMPO: SANT LE « TRAITÉ DE L'ÉQUILIBRE DES LIQUEURS Sans nous demander si les enseignements d8 certains d'entre eux n'étaient point la tradilion de penseurs plus anciens, de Léonard de Vinci‘ par exemple, nous avons passé en revue tous ceux quis ! De dimensione parabolæ solidique hyperbolici proble mata duo, p. 14. 2 F, Manimt Mersenn Minimi Cogilala physico- -math ei tica; phænomena hydraulica, p. 193. 3 Lettre de Pascar à M. de Ribeyre (Œuvres complètes de. BLaise PascaL, t. IT, p. 16; Paris, Hachette, 1880). “ Cf. P. Dune : Thimon Je Juif et Léonard de Vinei. Cet article sera prochainement publié dans le Bulletin Italiens P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL 609 + immédiatement avant Pascal, avaient écrit sur l'équilibre des liqueurs; nous avons vu que tous, Mersenne, Stevin, Benedetti, Galilée, Descartes, - Torricelli avaient exercé une influence sur l’auteur du Z'raité de l'équilibre des liqueurs; en ce traité, il ne se trouve sans doute aucune vérité qui ne lire - son origine de quelqu'un de ces géomètres. En conclurons-nous que l'œuvre de Pascal est une simple marquetterie, une rhapsodie sans ori- - ginalité, dont les écrils de ses prédécesseurs ont fait tous les frais? Nous pouvons deviner ce que l’auteur des Pensées eût dit d’un pareil jugement; il prévoyail, en effet, que certains le porteraient, non sur le Zrailé de l'équilibre des liqueurs, mais sur l'Apologie dont il jelait sur le papier les immor- tels brouillons ; et à ceux-là il répondait” d'avance : « Qu'on ne dise pas que je n'ai rien fait de nou- veau; la disposition des matières est nouvelle. Quand on joue à la paume, c'est une même balle dont on joue, l'un et l’autre, mais l'un la place mieux. J'aimerais aulant qu'on me dit que je me suis servi des mots anciens. Etcomme si les mêmes pensées ne formaient pas un autre corps de dis- cours par une disposilion différente, aussi bien que les mêmes mots forment d'aulres pensées par leur différente disposilion. » Que l'on ne dise donc pas que Pascal n’a rien fait de nouveau en Hydrostatique; la disposition des matières est nouvelle. Mersenne a lout lu de ce qui a été écrit sur l'équi- libre des liqueurs; mais c’est sans aucune règle ni méthode qu'il présente, en ses écrits sans ordre, les extraits de ses lectures et ses réflexions per- sonnelles. Benedetti a aperçu, grâce sans doute à la tradition de Léonard de Vinci, une grande vérité, mais il n'en a tiré aucun corollaire, pas même le principe de la presse hydraulique qui s’offrait, pour ainsi dire, de lui-même. Slevin, malgré la sévérité et la rigueur logique qu'il affecte en ses écrits, n'a pas vu que la loi de la pression exercée par un liquide sur une paroi contenait en elle les propriétés des corps flottants - ou immergés,; il a, tout d'abord, élabli ces pro- « priélés par une méthode directe et sans les ratla- cher à la loi fondamentale de l'Hydrostatique, qu’il n'a pas reliée elle-même aux principes de la Sta- . tique. Galilée, au contraire, s'est efforcé de ramener les … propriétés des corps flottants ou immergés aux “ lois générales de l'équilibre; mais il n'a pas tiré de ces lois la grandeur de la pression qu'un liquide exerce sur les parois qui le contiennent. Descartes et Torricelli, enfin, ont formulé deux 1 PascaL : Pensées, Éd. Havet, Art. VII, 9. Et principes généraux dont chacun est proprejà don- ner toute la Science de l'équilibre; mais ni lun ni l’autre de ces deux géomètres n'a fait l'application de son principe à l'équilibre des liquides. Toutes les vérilés qui doivent constituer l'Hy- drostatique ont donc élé découvertes; mais elles gisent pêle-mèle et sans rapport entre elles, atten- dant celui qui les ordonnera, qui les reliera les unes aux aûtres, qui, de ces matériaux épars, construira une doctrine logique et harmonieuse. Pascal fut cet organisateur. En la théorie de la pompe qu'avait indiquée Benedetti, il apercut la vérité cardinale de l'Hydro- statique; de cette vérité, il Lira, comme des corol- laires, et la loi de la pression exercée par une colonne fluide, telle que Stevin l'avait formulée, et les propriétés des corps immergés, connues depuis Archimède; enfin, faisant un magnifique emploi d'une remarque de Galilée, il montra que cette vérilé essentielle n'était elle-mème qu'une consé- quence et du principe de Descartes, et du principe de Torricelli. Certes, une telle œuvre, où l’auteur transforme en un principe ample et fécond ce qui, chez ses prédécesseurs, n'était qu'une simple remarque, mérite d’être appelée originale : « Je voudrais demander à des personnes équi- tables! si ce principe : « La matière est dans une « incapacité naturelle et invincible de penser », et celui-ci : « Je pense, donc je suis », sont en effet les mêmes dans l'esprit de Descartes et dans l'esprit de saint Augustin, qui a dit la même chose douze cents ans auparavant. « En vérité, je suis bien éloigné de dire que Descartes n’en soit pas le véritable auteur, quand même il ne l'aurait appris que dans la lecture de ce grand saint, car je sais combien il y a de difré- rence entre écrire un mot à l'aventure, sans y faire une réflexion plus longue et plus étendue, et aper- cevoir dans ce mot une suite admirable de consé- quences, qui prouve la distinction des natures matérielle et spirituelle, el en faire un principe ferme et soutenu d’une physique entière, comme Descartes a prétendu faire. Car, sans examiner s'il a réussi efficacement dans sa prétention, je sup- pose qu'il l'ait fait, et c'est dans celte supposition que je dis que ce mot est aussi différent dans ses écrits d'avec le même mot dans les autres qui l'ont dit en passant, qu'un homme plein de vie et de force d'avec un homme mort. « Tel dira une chose de soi-même sans en com- prendre l’excellence, où un autre comprendra une suite merveilleuse de conséquences qui nous font 1 Pascaz : De l'esprit géométrique (PascaL, Pensées Éd. Havet, p. 560). 610 dire hardiment que ce n’est plus le même mot, et qu'il ne le doit non plus à celui d’où il l'a appris, qu'un arbre admirable n'appartiendra pas à celui qui en aurait jeté la semence, sans y penser el sans la connaître, dans une terre abondante, qui en aurait profité de la sorte par sa propre fertilité. » En écrivant le 7raité d'équilibre des liqueurs, Pascal ne s’est assurément pas proposé de dé- couvrir des propositions nouvelles, mais de ranger les propositions déjà connues de telle sorte qu'elles fussent en ordre. « Je sais un peu ce que c’est, disait-il en parlant de l’ordre, et combien peu de gens l'entendent. » Il se piquait davantage, d'ail- leurs, de cette habileté à conduire ses pensées en une irréprochable méthode que de l’ingéniosité d'inventeur qu'il avait marquée en son œuvre de géomètre : « Je ne puis faire mieux entendre? la conduite qu’on doit garder pour rendre les démons- tralions convaincantes qu’en expliquant celle que la Géométrie observe. [Mon talent]* est bien plus de réussir à l’une qu'à l’autre... » Que l’on n’estime pas, d’ailleurs, besogne simple et aisée cette organisation logique de l'Hydrosta- tique; il y faut une force d'esprit peu commune : « Diverses sortes de sens droit; les uns dans un certain ordre de choses, et non dans les autres ordres, où ils extravaguent. Les uns tirent bien les conséquences de peu de principes, et c'est une droiture de sens. Les autres lirent bien les consé- quences des choses où il y a beaucoup de principes. Par exemple, les uns comprennent bien les effets de l'eau, en quoi il y a peu de principes; mais les conséquences en sont si fines qu'il n'y à qu'une extrême droiture d'esprit qui y puisse aller; et ceux-là ne seraient peut-être pas pour cela grands géomètres, parce que la géométrie comprend un grand nombre de principes, et qu'une nature d'es- prit peut être telle qu’elle puisse bien pénétrer peu de principes jusqu'au fond, et qu'elle ne puisse pénétrer le moins du monde les choses où il y a beaucoup de principes. » Il paraît donc bien vraisemblable que l'objet de Pascal n’a point été de découvrir des propositions d'Hydrostatique que nul n'ait énoncées avant lui; ce qu'il a voulu, c'est montrer comment, à partir du peu de principes d'où résultent les effets de ‘ PascaL : Pensées, Éd. Havet, Art. XXV, p. 108. 2 Pascaz : De l'esprit géométrique (Pascar, Pensées, Ed. Havet, p. 525). 3 A la place de ces deux mots, le texte de Pascal présente une lacune. 4 Pasca : Pensées, Ëd. Havet, Art. VIT, 2. P. DUHEM — LE PRINCIPE DE PASCAL ————"—"——— l'eau, on peut aller jusqu'aux conséquences les plus fines de ces axiomes. On s'explique alors mainte particularité du Traité de l'équilibre des liqueurs; on comprend pourquoi le nom de l'inventeur n’accompagne l'énoncé d'au- cune proposition, pourquoi Pascal n'a cité aucun de ses prédécesseurs, pas même Archimède, pas même le P.Mersenne, qui fut son ami et son initia- teur en Hydrostatique. Assurément, en laisant les noms des physiciens qui avaient formulé avant lui les lois de l'équilibre des liqueurs, il ne songeait pas à se faire attribuer la découverte de ces lois; qui donc jugerait Pascal si sot et si vain qu'il se fût donné pour l'auteur du principe d'Archimède? Le motif de son silence est tout autre ; ne revendi- quant rien pour lui-même des vérités qu'il se pro- posait seulement d’ordonner, il n'avait pas à faire la part d'autrui. Il n’a point voulu dire des nouveautés, mais seu- lement ranger en une suite méthodique ce que les autres avaient dit avant lui; et il n’a pas jugé que cette lâche fût indigne de son génie, car, pour la mener à bien, il fallait une extrême droiture d'es- prit. Il n'est peut-être pas inutile, aujourd'hui, de rap- peler cette opinion de l'un des penseurs les plus puissants et les plus originaux que l'humanité ait produits. Les physiciens, en effet, prodiguent volon- tiers les témoignages de leur admiration à loute découverte d’un fait nouveau ou d'une loi impré- vue; mais ils semblent priser à très bas prix les efforts de ceux qui souhaitent de mettre de l'ordre et de la méthode dans le monceau des fails que d’autres ont découverts, qui cherchent à déduire logiquement d'un petit nombre de principes la multitude des lois formulées par les inventeurs. Ne craignent-ils point d’encourir cet autre jugement de Pascal! : « Toutes ces personnes ont vu les effets, mais ils ne voient pas les causes; ils sont à l'égard de ceux qui ont découvert les causes comme ceux qui n’ont que les yeux à l'égard de ceux qui ont l'esprit; car les effets sont comme sensibles, et M les causes sont visibles seulement à l'esprit. ELN quoique ces effets-là se voient par l'esprit, cet esprit est à l'égard de l'esprit qui voit les causes comme les sens corporels à l'égard de l'esprit. » É Î P. Duhem, Correspondant de l'Institut, Professeur à la Faculté des Sciences de Bordeaux. a —_—_ —_—_—————— | 1 Pasca : Pensées, Éd. Havet, Art. V, 9. ? D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE 611 DEUXIÈME PARTIE I. — ACTION SUR LE SYSTÈME NERVEUX. L'action élective exercée sur le système nerveux par diverses substances contenant du phosphore st une notion fort ancienne et aujourd'hui forte- ment établie. Puisque tous les composés phosphorés “ont élé expérimentés, tous ont trouvé des partisans. Phosphore en nature, phosphures divers, acide phosphorique, phosphales, acide glycéro-phospho- rique, glycéro-phosphates, acide anhydro-oxymé- hylène-diphosphorique, lécithines, nucléines, cha- “cune de ces substances a, encore à l'heure actuelle, «ses fervents, et probablement ses succès dans cer- fains cas. $ 1. — Action favorable sur la psychasthénie, la neurasthénie et l'asthénie générale. Nous avons surtout expérimenté l'acide phos- phorique dans des cas variés d’asthénie générale, de neurasthénie, de psychasthénie. En ce qui concerne plus spécialement la psy- chasthénie, nous n'avons rien à retirer et peu à ajouter aux conclusions auxquelles nous avait amené la clinique en 1903*, savoir : + Dans les psychasthénies accidentelles, récentes, la médicalion phosphorique est rapidement suivie du retour à l’état normal des processus mentaux ; Dans les psychasthénies habituelles, anciennes, la médication phosphorique longtemps continuée amène une amélioration progressive ; Dans les psychataxies, chez les agités, la médi- cation phosphorique provoque une aggravation rapide de l’état pathologique. On trouvera dans l’article précité quelques obser- vations typiques de celte action si remarquable exercée sur les processus mentaux. Dans quelques M cas, l’action exercée sur le caractère, sur l'humeur, estextraordinaire : telle cas que nous citionsen 1903 “de cette dame chez laquelle la médication phos- phorique amena une telle modification heureuse du “caractère, que les enfants déclarèrent «qu’on avait | changé leur mère »; ou de cette autre dame àgée, artérioscléreuse et dyspeptique, sujette à des con- -gestions encéphaliques d'une extraordinaire vio- lence, avec idée obsédante de mort prochaine, et jui, depuis la médication phosphorique, a, suivant 4 4 Voir la première partie de cette étude dans la Revue du 0 juin 1905. —_:La médication phosphorique dans la psychasténie. Presse médicale, 21 novembre 1903. "2 ACTION PHARMACOLOGIE DE L’ACIDE PHOSPHORIQUE NERVEUSE ET HUMORALE: son expression même, « une gaieté qui n'est plus de son âge » et chante souvent, à la grande stupeur de son mari et de ses enfants. Sans être toujours aussi évidente, cette action, quasi hilarante dans le cas ci-dessus est pourtant une des actions les plus constantes: il est difficile de la définir avec précision : disons qu'elle déve- loppe souvent la gaieté, la bonne humeur, l'opti- misme. Elle n'avait pas échappé aux anciens auteurs : Judson Andrews, cité par Gübler, admi- nistrait l'acide phosphorique dans l'épuisement nerveux et la parésie cérébrale, et il en obtenait de tels résultats qu'il donnait à la solution aqueuse de cet acide le nom bien suggestif de Limonade psychologique. Gübler, lui-même, déclare que, sous l'influence de petites doses de phosphore, « l’acti- vité mentale et le pouvoir musculaire s’accroissent le tour d'esprit devient gai et la sensibilité tactile s'exalte ». Cetle proposition s'applique absolument à l'acide phosphorique. Le fait que le phosphore en nature partage cette propriété hilarante amène à penser qu'elle est due à une action spéciale, élective du phosphore et de l'acide phosphorique sur les centres nerveux; à l'exception des phosphu- res, les autres composés phosphorés ne semblent pas posséder cette propriété à un degré égal. L'action sur la neurasthénie est non moins évi- dente, et nous pourrions reproduire à ce sujet les propositions précédentes relalives à la psycha- sthénie ; ajoutons que la dyspepsie et la constipation habituelles chez les neurasthéniques sont heureu- sement amendées; la phosphaturie à peu près constante disparait rapidement. Mentionnons, enfin. l’action tout à fait remar- quable exercée par la médication phosphorique sur ces élats inclassables nosologiquement, états que nous étiquetterons, faute de mieux, crises dasthé- nie générale et qui sont caractérisés par le syn- drome suivant, que reconnaîtront bien ceux qui y sont sujets : sensation de lassitude, de fatigue, d'as- thénie extrême, avec sensation parfois très accen- tuée de tension, de congestion rénale, douleurs arti- culaires, en particulier dans les membres inférieurs, surtout à l’occasion des mouvements, tension quasi douloureuse, pesanteur dans les mollets, s’accompa- gnant de dilatation des veines et de signes d'hypo- tension vasculaire, sensation de barre, de pression douloureuse entre les deux omoplates, quelquefois cryesthésie, phosphaturie abondante. Il ne s'agit pas là d’une entité morbide, mais d'un syndrome 612 très fréquent. Les causes provocatrices en sont mulliples : froid, fatigue, émotions, infections di- verses, etc. Certaines personnes y sont particuliè- rement sujeltes et ont plusieurs crises par an, sous les influences les plus diverses et sans qu’on puisse les rattacher à une cause morbide unique et bien définie, en vertu sans doute d'une prédis- posilion nerveuse ou humorale incomplètement déterminée. états sont très heureusement amendés et parfois même disparaissent complèle- ment. Ces S 2. — Hypothèse sur le mécanisme de l’action. Cette aclion toni-nerveuse n'appartient pas en propre à l'acide phosphorique. Le phosphore et les autres composés phosphorés la possèdent à des degrés divers. Le phosphore nous parait devoir être écarté de la thérapeulique comme difficile- ment maniable et extrèmement dangereux. Quant aux autres composés phosphorés, à l’ re glycéro- phosphorique, aux lécithines, à l'acide anhydro- oxv-méthylène-diphosphorique, aux nucléines, il n'est pas douteux qu'ils ne donnent quelquefois des résultais fort satisfaisants, de même que l'acide phosphorique, dans tous les cas de débilité, thénie, d'insuffisance nerveuse. L'acide phospho- rique nous a paru donner des résullats supérieurs. Il est, d'ailleurs, digne de remarque que toutes les substances précilées ont ceci de commun d’avoir un noyau phosphorique, d’être en somme des acides phosphoriques substilués; ces acides phosphoriques substitués divers ne sont nullement identiques aux acides phosphoriques subslitués constitutifs de nos Lissus, de la substance ner- veuse en particulier. On ne peut donc concevoir chimiquement leur assimilation, leur identiti- cation aux tissus en admettant ladite assimilation, que de la façon suivante : 1° destruction de la molécule ingérée, et retour vers une forme plus simple, vers l'acide phosphorique; 2 recons- titution d’une molécule d'acide phosphorique subs- titué (lécithine, nucléine, etc.), identique à celle du tissu considéré par combinaison et synthèse. Dès lors, il semble plus simple et plus rationnel d’administrer d'emblée l'acide phosphorique ou le phosphate acide de soude, qui semblent de toute facon devoir constiluer le point de départ du pro- cessus de synthèse assimilateur. Ajoutons, enfin, que l'amélioralion des processus digestifs, démontrée dans notre première partie, joue certainement un rôle considérable dans l’ac- tion toni-nerveuse constatée, lant en ce qu’elle améliore la nutrition générale, en particulier celle du système nerveux, qu’en ce qu’elle régula- rise le travail de la digestion et qu'elle diminue la dépense nerveuse nécessitée par ce travail ; celle d'as- D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE action appartient en propre à l’acide phosphorique; à l'exclusion des autres substances phosphorées. Il. — ACTION HUMORALE. $ 1. — Exposé de Joulie. L'étude de l'action humorale de l'acide phospho= rique est moins avancée — et pour cause — que celle des actions digestive et toni-nerveuse. Cette action humorale est évidemment directe et indi recte; elle résulte, en effet, d’une part du passage dans le sang des dérivés de l'acide phosphorique,m du phosphate acide de soude en particulier, d'autre part de la modification apportée au résultat de la digestion du fait de l’action antiseptique et excito= sécréloire de l'acide phosphorique. La première sem traduit, entre autres phénomènes, par lé relèvement de l'acidité urinaire; la seconde, au contraire, & souvent pour conséquence l’abaissement, en appa- rence paradoxal, de cette acidité, probablement par“ diminution des fermentations acides digestives (bu- Lyrique, lactique). Il est cerlain, quoique nous n'en ayons encore aucune preuve directe, que le sang subit des modifications parallèles. Joulie! à écrit à ce sujet les lignes suivantes : | L'acidité a pour principale utilité de maintenir en dissolulion dans le sang les phosphates de chaux, de magnésie, le phosphate ammoniaco-ma- gnésien et l’oxalate de chaux. Ces sels, apportés par l’alimentation ou produits par la désassimila= tion, pénètrent dans la circulation, grâce à l'acide | chlorhydrique de l'estomac pendant la digestion, M ou sont recueillis par le sang dans les tissus qu'il traverse. Les phosphates alcalino-lerreux sont uti- lisés par le travail vital des cellules, qui en font une consommation relativement restreinte, si bien que le surplus, chez l'adulte, doit ètre éliminé par les urines et ne peut l'être que grâce à l'acidité du sang, ces sels étant insolubles, ou à peu près, dans: les nue neutres ou alcalins. « On s'est beaucoup préoccupé de l’encombre- ment des organes par les urales, et, bien que l’en- combrement par les phosphates alcalino-terreux ait été nettement signalé par Bouchardat, qui le décrit, dans son Trailé d'Hygiène, sous le nom de phosphypostase, on a oublié d'y songer dans un grand nombre de cas de goutte, de rhumalisme et de seléroses diverses, dans lesquels le phosphate de chaux était assurément le principal coupable. M « Les dépôts d'urates ne sont possibles que faute d'eau pour les dissoudre et les entrainer dans l'urine. Mais les dépôts de phosphates de chaux se produisent infaillibiement chez Lout sujet { ———————————— F ! Joue : L'acidité urinaire. Conférence faite à l'Institut Pasteur le 19 mars 1901. hd D: A. MARTINET — PHARMACOLOGIE LE L'ACIDE PHOSPHORIQUE 613 ê dont le sang et, par suite, l'urine touchent à une acidité inférieure à la normale. Or, les maladies par “encombrement, qui sont essentiellement d'origine mécanique, sont aussi bien provoquées par le sable phosphatique que par le sable urique, qui obstruent “également les capillaires et amènent, par consé- quent, des accidents identiques. « Nous ne craignons donc pas d'affirmer que, si les urates peu solubles sont, à juste titre, considérés “comme ennemis de la santé humaine, le phosphate de chaux est un ennemi bien autrement redou- table, puisque l'alimentalion nous l'apporte en quantité importante, et qu'il devient très facile- nent insoluble dans le sang et l'urine pour peu que l'acidité baisse, quelles que soient les quantités d'eau utilisées au lavage du sang et des reins. » M. Joulie montre ensuite, avec pièces anato- miques à l’appui, la fréquence de cette phosphy- postase, -de cetle goutte phosphatique chez les her- bivores, le cheval en particulier; il eite une observation curieuse d'un cas méconnu, chez homme, de cette phosphyposlase : le malade, un berger, était couvert de tumeurs dont certaines étaient ouvertes et laissaient échapper un jus épais, de couleur chocolat elair, contenant de nom- breuses parcelles blanchâtres de toutes dimensions. D'autres étaient encore fermées, mais très dures et évidemment remplies d'une matière pierreuse. À 'autopsie, on a vu que toutes contenaient des grains plus ou moins volumineux, depuis le sable fin jus- qu'à la grosseur d'un pois, presque exclusivement composés de phosphate de chaux. Et M. Joulie ajoute : « A un moindre degré, la phosphypostase produit le rhumalisme noueux avec ses déformations et les tophus des goutteux, dans lesquels on trouve souvent beaucoup d'urates et peu de phosphate de chaux; mais quelquefois aussi de fortes proporlions de ce phosphate, ainsi que le constate une analyse de Lhéritier, qui à trouvé 42°/, de phosphates de chaux, 49°/, d'urates et 9 °/, de matière organique et d’eau. « Aujourd'hui, tout cela se comprend facilement: es urates se déposent dans les organes chaque fois que l’eau manque pour les dissoudre et les faire passer à la dialyse rénale. L'hyper-acidité du sang, révélée par celle des urines, favorise également leur dépôt en diminuant leur solubilité. Mais hypo-acidité du sang, qui est favorable à la dis- solution des urates, détermine le dépôt des phos- Phates de chaux en les rendant insolubles ; de sorte que les tophus et les concrétions se construisent alternativement en urates pendant les périodes “d'oligurie et d'hyper-acidité, et en phosphate de haux pendant les périodes d'hypo-acidité. Il im- tilés d'eau suffisantes, et en outre de maintenir l'acidité du sang au degré nécessaire. » On peut, semble-t-il, on doit souscrire entière- ment à ces lignes; mais le problème est devenu beaucoup moins simple quand M. Joulie a cru pou- voir conclure, de ses nombreuses analyses, à l'ex- trême fréquence de l'hypo-acidité humorale, en particulier chez les arthritiques. $ 2, — Discussion des hypothèses de Bouchard et de Joulie. Le problème ainsi posé a soulevé et soulève encore d’ardentes controverses ; l'accord est loin d'être fait, et cela tient d'abord à ce que les adver- saires emploient un langage différent et ne peuvent, de ce fait, se comprendre. Qu'on en juge : le point central du débat est, en somme, le suivant : pour les classiques (Bouchard), les arthritiques sont des hyper-acides, et l'acide urique la cause prochaine de tous les accidents arthritiques; sanction pra- tique: traitement alcalin ; pour les néo-thérapeutes (Joulie), les arthritiques sont presque toujours des hypo-acides, et le phoshate de chaux, la cause pro- chaine de tous les accidents arthritiques; sanction pratique : traitement acide. La contradiction ne peut pas être plus complèle, et nous ne craignons pas d'affirmer : 4° que les deux propositions contradictoires viennent de l'emploi abusif des mêmes termes en un sens différent; 2° que chacune des propositions ren- ferme une part de vérité; 3° que, sans doute, on se rapprocherait davantage de la vérité en disant : les accidents si multiples et si dissemblables qu'on a coutume de désigner sous la dénomination géné rique d'accidents arthritiques sont habituellement provoqués par la présence en excès dans le sang et la précipitalion dans les tissus, soit d'acide urique, soit de phosphate de chaux; dans le pre- mier cas, les malades sont habituellement hyper- acides, dans le second cas hypo-acides ; la médica- tion qui leur convient logiquement est une question d'espèce et de moment. En ce qui concerne la nécessité préalable d'une terminologie précise, il suffit de se demander tout d'abord s'il existe une définition satisfai- sante et généralement acceptée de l'arthritisme. Il ne parait pas douteux que nous ne SOMmnIes pas en état — à l'heure actuelle — d'en donner une défi- nition pathogénique, anatomique et clinique r'iqou- reuse, indiscutable. X est même bien probable que ce mot nous sert à désigner un groupe de faits fort disparates et de nature sans doute très différente. Au nom de la réalité clinique et de la clarté doc- trinale, il serait donc désirable de ne pas jeter au travers de la discussion une entité morbide aussi mal définie et — jusqu'à plus ample informé — de 614 parler nommément d'espèces cliniques saisis- sables : de la goutte, de la lithiase urique, de la lithiase oxalique, du rhumalisme chronique défor- mant (en s'efforçcant d'en préciser la variété), de l’artério-sclérose, du diabète dit diathésique, etc. Voilà une première cause de confusion. Une deuxième et plus importante tient à la signi- lication attachée aux mots hyper et hypo-acide. Ici la confusion est évidente. Quand Bouchard parle de l'acidité urinaire, il a en vue l'acidité de l'urine des vingt-quatre heures, l'acidité globale calculée d’après les méthodes usuelles et courantes de l'aci- dimétrie. Joulie ne tient compte que de l'acidité de l'urine du matin, émise à jeun, acidité calculée d’après une technique spéciale, dite du « sucrate de chaux », qui, d'après cetauteur, « donne toute l’aci- dité physiologiquement el médicalement utile à déterminer, dans l'état actuel de nos connais- sances ». Nous ne savons pas si cette dernière proposiliôn est acceptable, mais il est certain que la différence des lechniques et la différence du choix des échantillons d'urine examinés suffisent à rendre la comparaison scienlifiquement im- possible. Dès lors, hypo et hyper-acides n'ayant cer- tainement pas le même sens — dans les deux partis — toute discussion à ce sujet est a priori vaine. Ainsi que l'exprimait si nettement Linossier lors d'une discussion à la Société de Thérapeulique le 22 décembre 1900, « les variations de l'acidité de l'urine au réveil ne sont pas du tout parallèles aux variations de l'acidité moyenne, en sorte que la plupart des malades classés parmi les hyper-acides par les procédés usuels sont étiquetés hypo-acides si l’on suit les préceptes de M. Joulie ». Mais ce qui semble bien évident en certain cas, c'est le rôle des acides gras, si bien établi par Bou- chard dans la genèse de certains accidents dits arthritiques. Les faits sont quelquefois tellement significatifs que force est de les reconnaître, et ces « arthritiques », pour employer la terminologie en usage, sont bien des hyper-acides ; mais ce seraient de « faux hyper-acides », d’après Joulie et son élève Cautru. « L'hyper-acidité dont quelques-uns sont réellement atteints a toujours pour cause une dyspepsie par fermentation formant dans l'esto- mac des acides organiques qui, passés dans le sang, en augmententl'acidité. L'emploi, pendant quelques jours, du carbonate de chaux ou de magnésie, deux heures après les repas, a vile raison de cet excès d’acidité, et souvent on s'apercoit, en fai- sant une nouvelle analyse, que le sujet est, en réalité, en état d'hypo-acidité plus ou moins intense. L'hypo-acidité se manifeste de différentes façons, amenant un cortège de symptômes quelquefois très différents et constiluant cette diathèse protéiforme qu'on est convenu d'appeler l’arthritisme. » Il fau- D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE drait donc distinguer une acidilé humorale, nor- male en quelque sorte, acidité due surtout au phos- phate acide de soude, acidité qui pourrait être exagérée (hyper-acides vrais\ ou diminuée (hypo- acides); et une acidité anormale, due surtout aux acides gras résultant de fermentations digestives, pathologiques, qui créerait une hyper-acidilé appa- rente derrière laquelle se dissimulerait une hypo- acidité vraie. Cette conception est très soutenable, et bien des faits cliniques plaident en sa faveur. Mais enfin, normale ou anormale, l'hyper-acidité se rencontre fréquemment, même dans l'examen de l'urine du réveil avec la technique de Joulie, et en admettant comme normaux les chiffres qu'il indique comme tels. Et c’est là encore un autre gros point d’interro- gation. Joulie donne comme normal le rapport 4,5 de l'acidité urinaire exprimée en acide phospho- rique à l'excédent de la densité de l'urine examinée sur l’eau. De nombreux examens pratiqués tant par nous-même que par Joulie ou son élève Nicolaïdi, par Linossier, Barde, Cautru, etc., nous pensons qu'on peut conelure, comme pour l’acidité du suc gastrique, que : 1° Chaque indi- vidu en apparence de santé paraît posséder un coefficient personnel d'acidité urinaire, ce taux pouvant varier d’un individu à l’autre de 2 à 5°/,; 2° chez un même individu, cette acidité peut pré- senter d'un jour à l'autre des variations fort étendues; 3° cette recherche n'a peut-être pas toute la valeur clinique qu'on y a cru attachée. Est-ce à dire qu'il faille faire table rase des travaux précités ? Nous croyons, au contraire, qu'ils renferment une grande part de vérité et, comme nous le disions au début, ce travail n'a justement pour but que d'en vérifier cliniquement la portée pathogénique et thérapeutique. Mais, comme le faisait remarquer si justement M. Linossier (/0c0 . citato), « l'argument que le bon effet de la théra- peutique par l'acide phosphorique est une démons- tration de l'insuffisance d’acidité des sujets traités ne semble pas démonstratif. Cet acide peut agir par un tout autre mécanisme qu’en relevant l'acidité. M. Cautru obtient, nous dit-il, la disparition de la glycosurie diabétique par l'acide phosphorique. Or, sa disparilion par les alcalins est un fait d’obser- vation presque quotidienne. La même argumenta- tion nous ferait donc conclure, chez les mêmes malades, à l'hypo et à l'hyperacidité ». On ne saurait mieux dire. En effet, si, très souvent, — Joulie reconnait nette- ment le fait dans ses écrits, — les arthritiques sont atteints de dyspepsie avec fermentations acides, si ces acides gras jouent, comme cela est bien vrai- semblable, un rôle important dans la genèse de cerlains accidents dits arthritiques, l'acide phos- { L phorique peut el doit agir surtout gràce à son action antiseptique et eudigestive en supprimant ces fermentations et les acides gras qui en sont le ésullat, point n’est besoin de faire intervenir le relèvement problématique de l'acidité humorale. $ 3. — Réalités cliniques. A s’en tenir aux seules réalités cliniques, on peut, on doit admettre avec Joulie que a précipitation des phosphales peut jouer un rôle important dans La phosphypostase de Bouchardat, réalisée au #rand complet dans quelques observations hu- la composition chimique de certains calculs si iches en phosphates, la dégénérescence calcaire des parois vasculaires dans l’artério-sclérose et J'athérome, semblent bien démontrer la réalité de “cette pathogénie. Morel-Lavallée a publié une observation tout à fait démonstrative, où celle pré- ipitalion des phosphates a été saisie sur le fait: il s'agissait d'une lymphangite tronco-vasculaire “ulcéro-calcifiante de la peau avec production de calculs et d'infiltralions (vasculaires, cutanées, articulaires) d'un calcaire phosphatique chimi- quement pur. Les ulcérations culanées, en parti- ulier, se recouvrirent d'infiltrations calcaires sur leurs bords, tandis que leur orifice donnait issue “aux particules calcaires empilées dans les lympha- tiques obstrués ou amoncelées dans le tissu cellu- laire. Ces dépôts salins, au lieu d’être constitués, comme on aurait pu s’y attendre, par des urates acides, avaient pour unique composition des phos- phates du sang devenus tribasiques et insolubles. C'est un véritable cas de goutte cutanée phospha- “tique. Nous en ignorons la fréquence, mais enfin ette observation prouve bien la réalité du processus morbide susmentionné. Peut-être faut-il rapprocher de ces cas es résultats parfois si brillants obtenus par Joulie, Nicolaïdi, Cautru, Thiroux et par nous-même dans le traitement, par la médication acide, de certains rhumatismes chroniques, noueux, tro- phiques, déformants? Dans deux cas, suivis main- tenant depuis plus de deux ans et dans lesquels les “déformations épiphysaires énormes s'accompa- gnaient de raideurs musculaires douloureuses de a nuque et des lombes en particulier, et détermi- “naient une impotence presque absolue avec atrophie “consécutive, la médication phosphorique, continuée -avecténacité,amena assez rapidement une réduction plissement marqué des masses musculaires, une _Sédation considérable des douleurs, permettant une . mobilité relativement très grande. Dans un des cas D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE évidente des déformations osseuses et un assou- G15 où l’atrophie rapide et précoce soulignait l'origine tropho-névrotique probable, l'affection ci-dessus s'était développée consécutivement à une crise violente de rhumatisme articulaire aigu insuffi- samment traitée; l’autre cas, elle avait succédé à une phlébite double d'origine puerpé- rale. Dans ce dernier cas, l’excrélion urinaire put être parfaitement suivie, et les résultats que résume le tableau ci-dessous sont bien suggestifs : dans DÉCEMBRE 1902 : AVANT LA MÉDICATION PHOSPHORIQUE Urine du malin. Densité . Sr ee PANIERS EURE .021 ACRONES ARC NE PCR RTL 7.1 4°63 Phosphatie . 1,97 Urine des 24 heures. Acide phosphorique total . Aroterte UT e- ei Ull Acide urique . DÉCEMBRE 1903 : APRÈS UN AN DE MÉDICATION PHOSPHORIQUE Urine du matin. DERSILÉ PSE EN RELE Len 020 AO dite De ER QU EN er 11 21 Phosphatie . . 1,40 Urine des 2% heures. Acide phosphorique total . 1,67 Azote de l’urée . . . RTE 7 LS Acide urique . . 0,61 On constatait done dans ce cas, cliniquement des plus favorables, après un an d'absorption quoti- dienne de 0 gr. 50 d'acide phosphorique et de 1 gramme de phosphate acide de soude, un abais- sement marqué de l'acidité urinaire (trop élevée au début), un abaissement parallèle de l'élimina- tion des phosphates tant dans l'urine du matin que dans celle des vingt-quatre heures, un abais- sement exceptionnel du taux de l’urée, un taux sensiblement constant de l'acide urique. Ce résultat urologique, paradoxal, mais rigou- reux, montre, comme nous l'avons répété maintes fois, que l'administration d'acide phosphorique n’a pas pour conséquence nécessaire un relèvement de l'acidité urinaire et, partant, humorale. C'est ainsi que, même dans quelques cas où luri- cémie était évidente, la médication phosphorique, associée à vrai dire à des pratiques diurétiques, eut les résultats les plus satisfaisants. Tel fut le cas, par exemple, chez une dame de quarante ans, grasse, présentant de la lipomatose généralisée, quasi symétrique, sous forme de tumeurs adipeuses de volume variable, souffrant depuis longtemps de rhumatisme goutteux et de dyspepsie hypomotrice et hyposécrétoire avec dilatation, fermentalion évi- dentes; l'acidité urinaire totale était faible, l'acide urique en excès (0 gr. 92); l'examen microscopique de l'urine décelait la présence de nombreux cris- taux d’urate de soude et d'oxalate de chaux. La médication fut la suivante : acide phosphorique, 616 D' A. MARTINET — PHARMACOLOGIE DE L'ACIDE PHOSPHORIQUE 0 gr. 50 pro die pendant le repas, eau d'Évian à 10 heures et à 4 heures, poudre alcaline deux heures après le repas. Deux mois après, les dou- leurs avaient à peu près complèlement disparu, en même temps que les articulations avaient repris une grande souplesse; la dyspepsie s'était consi- dérablement amendée, et, chose curieuse, en même temps que l'acidité urinaire s'était relevée, les cris- taux d'urale de soude et d’oxalate de chaux avaient disparu. On nous objectera de suite que notre mé- dication diurétique (eau d'Évian) était suffisante à provoquer ces résullats; mais, dans le courant de l’année, la malade avait, sans résultat appréciable, fait à domicile deux cures de Contrexéville de trois semaines, ce qui enlève à l’objection beaucoup de sa valeur. Cette observation est une des plus nettes que nous ayons eue; — elle n’est pas unique. Joulie, Nicolaïdi, Cautru, nous-même en avons observé maints cas. Ce n'est pas à dire que ladite médica- tion nous paraisse la médication type de l'uricé- mie; nous constatons simplement qu'elie nous a franchement réussi dans certains cas et que c'est une question d'espèce, el ne voulons, quant à pré- sent, pour n'en pas amoindrir la puissance démon- stralive, en proposer aucune explication. Nous l'avons employée souvent avec amélioration évidente chez les artério-scléreux. Si l'on se rap- pelle le rôle important joué par la précipitation des phosphates dans les processus scléreux et le rôle solubilisant possible et même probable de l'acide phosphorique, l'administralion eñ parait ralion- nelle; elle nous a paru légitimée par les faits. La pathogénie des accidents dits arthritiques est encore entourée de bien des obscurités; elle est probablement multiple. Le rôle des phosphates parait évident en bien des cas; dans d'autres, s’il n'est pas démontré que l'acide urique soit l'agent efficient desdits accidents, suivant la remarque Judicieuse de Mathieu, « s’il n’est pas le coupable, il est tout au moins le témoin »; l'intervention du système nerveux est souvent éclatante, elle est parfois dissimulée; c'est pourquoi nous croyons plus scientifique de considérer des espèces cliniques particulières et bien définies; toutefois, ces acci- dents n’en ont pas moins une cause étiologique com- mune ; ils sont tous la conséquence d'une nutrilion défectueuse, qu'elle soit relardante, en rapport avec une oxydation insuffisante et une acidité excessive des milieux organiques, comme le soutiennent Bence Jones, Beneke et Bouchard, ou, au contraire, qu'elle soit accélérée, comme l'enseignent Lécor- ché et Robin; ce qui est certain, c'est qu'elle est vicieuse. Nous avons vu quelle action eutrophique puissänte exerçait sur les processus digestifs et, partant, nutritifs la médication phosphorique; ce relèvement des processus digestifs, ce redresse= ment des processus nutritifs nous parait être la cause prochaine des processus curateurs. Rappelons, pour finir, Zaclion exercée par l'acide phosphorique sur l'acidité urinaire. Nous avons vu qu'elle peut s'exercer en deux sens : elle diminue l'acidité urinaire, indirectement, par suppression des fermentalions stomacales acides; elle l'aug- mente, directement, par passage dans l'urine sous forme de phosphate acide de soude. Nous neretien= drons que cette dernière action directe. R. Hutchinson a expérimenté les acides miné- raux ordinaires (chlorhydrique, sulfurique, azo= tique), et avec les acides organiques (tartrique,« acétique, citrique et lactique). Il trouva qu'ils exer- cent peu d'action sur l'acidité urinaire, étant neu- tralisés et excrétés principalement à l’état de sels d’ammoniaque. Finalement, l'acide phosphorique et le phosphate acide de soude furent donnés el exercèrent une aclion manifeste sur l'acidité uri- naire; ce qui élait d’ailleurs bien à prévoir, l’aci- dité normale de l'urine étant principalement due à ce sel acide. Ce fait est d'observation courante. En fait, depuis longtemps, l'acide phosphorique et le phosphate acide de soude sont employés, sur- tout en Anglelerre et en Amérique, comme acidi- fiants et antiseptiques urinaires. Ils se montrent des plus efficaces, soit seuls, soit associés à un désinfec- ant urinaire, tel l'urotropine, dans le traitement des infections chroniques des voies urinaires; en moins de vingt-quatre heures, ils rendent acide. une urine ammoniacale. Nous les avons souvent employés dans ces cas avec le plus franc succès. III. — Conccusrows. Cette pharmacodynamie de l'acide phosphorique s'écarte en plus d'un point de la pharmacodynamien classique de cette substance, à franchement parler inexistante, puisqu'elle n’a guère en vue que les accidents provoqués par l'administration de solu- tions concentrées, caustiques, sinon toxiques. Il appartient à chacun de vérifier les propositions susénoncées et. d'en établir nouvelles. Le champ d'expérience est assez vaste, les fails acquis déjà assez nombreux et fortement établis, les pro- blèmes pathogéniques et thérapeutiques soulevés suffisamment compréhensifs el importants pour encourager les chercheurs. Il est toute une partie de la question que nous avons systématiquement écartée de notre exposé, — parce qu'elle est insuf= fisamment connue encore, — savoir l’action de la médicalion phosphorique sur les infections aiguës et chroniques. L'étude en sera certainement fruc=M tueuse. D' Alfred Martinet, Ancien interne des Hôpitaux. de BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 617 1° Sciences mathématiques Ostenfeld (A.), Professor an der technisechen Hocl- schule zu Kopenhagen.— Technische Statik. Vorle- sungen über die Theorie der Tragkonstruktionen. Deutsche Ausqabe besorgt von D. SkouGe. — 1 vol. gr. in-8°, de #57 p. (Prix : 12 marks.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1904. Cetouvrage contient, avec plus de développements, les lecons de Statique technique professées par M. Ostenfeld 1 l'Ecole technique supérieure de Copenhague. Il s'adresse à la fois aux ingénieurs et professeurs de Mécanique appliquée : tous y trouveront d'intéressants apercus théoriques conduisant à des méthodes d’un emploi très facile et un grand nombre d'applications usuelles accompagnées d'exercices numériques déve- loppés avec grand soin. L'auteur suppose que le lecteur possède les premiers éléments de Slatique graphique (propriétés du polygone - funiculaire, etc.). Il consacre la première partie de son ouvrage à l'étude des types les plus simples de poutres et fermes. Dans une seconde partie, il examine d'abord, d'une manière tout à fait générale, le rôle du principe des déplacements virtuels dans les problèmes relatifs aux fermes. C’est là une des parties les plus impor- -tantes de l'ouvrage, car elle forme le point de départ delathéorie générale des poutres et fermes; elle fournit, “entre autres, les principes fondamentaux pour le calcul des déformations. Quant à la méthode, l'auteur accorde une part à peu près égale au calcul numérique et aux procédés gra- - phiques, en donnanttoujours la préférence à la méthode - la plus pratique. H. Feur, Professeur à l'Université de Genève. Lapostolet (N.), Zngénieur en chef des Services de jour des Mines de Carmaux.-— Traité général de l'emploi de l'électricité dans l'Industrie minière. — 1 vol. gr. in-8° de 290 pages avec 67 figures. {Prix : 7 fr. 50.) VYe Charles Dunod, éditeur. Paris, 1905. Ce livre est venu à son heure : c'est un recueil très complet de toutes les applications aux mines qui ont été remarquées dans le domaine de l'électricité indus- trielle aux dernières grandes expositions de Paris et de Dusseldorf. L'auteur à su rassembler et coordonner les multiples études partielles qui ont paru à ce sujet dans les périodiques spéciaux de ces dernières années, en en extrayant, avec la conscience d'un vrai praticien, our les bien mettre en évidence, les données essen- tielles et les renseignements indispensables pour tout ingénieur que la question intéresse. Son ouvrage est à Ja fois un excellent guide pour le mineur, qui y puisera les éléments d'Electricité dont il ne pourrait plus se passer aujourd'hui,et pour l'électricien, auquel 1! don- nera l'occasion de rechercher dans les besoins des mi- eurs de nouvelles applications de son industrie. Le livre débute par un cours sommaire d'électricité. ous les principes qui régissent les génératrices, les canalisations, les réceptrices, les transformateurs, les tableaux de distribution, y sont passés en revue; mais, ès l'origine, l'auteur montre la préférence bien mar- quée qu'il faut donner aux courants triphasés en raison des usages très variés auxquels on à à répondre dans és mines. Là, plus que partout ailleurs, en effet, il faut echercher une facilité de transformation en haute ou basse pression permettant le transport économique à grande distance ou l'emploi d’un faible voltage en vue BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX de la sécurité. Avec les moteurs asynchrones à courant triphasé, on peut démarrer sous forte charge, doubler et même tripler la charge normale sans grand change- ment de vitesse. Le chapitre où l’on compare les ren- dements et'les consommations des diverses sources d'énergie est fort intéressant, el chacun pourra y recon- naître et discuter son cas, chiffres à l'appui. Après cette première partie, plutôt théorique, sont décrites toutes les applications qu'on peut faire de l'électricité aux différents organes mécaniques auxquels le mineur est obligé d’avoir recours : c’est d'abord l’abatage, c'est-à-dire la séparation de la couche de minerais en morceaux, qui nécessile plusieurs opéra- tions, fonçcage de puits, percement de galeries de recoupe, traçage et abatage proprement dit. Pour tous ces travaux sont utilisées les perforatrices par percus- sion ou par rotation et les haveuses, tous appareils dont la mise en action électrique commence à devenir pratique. Le tirage des mines avec allumage par étin- celle ou par incandescence s'y rattache naturellement. Vient ensuite le travail de roulage, qui consiste à faire évacuer toutes les matières abattues et à amener aux chantiers tous les matériaux nécessaires. Les procédés électriques s'adaptent parfaitement soit aux treuils, soit aux locomotives, qui, suivant les cas, sont employés pour transmettre le mouvement aux wagonnets. Si l’on considère maintenant les machines d’'extrac- tion qui remontent des recettes de la mine jusqu’au jour les matières produites, ou descendent à ces recettes les matériaux nécessaires, on sait combien est considérable la consommation des cylindres à vapeur qui les actionnent, en raison des démarrages et ralen- tissements répétés continuellement et du poids mort important à mettre en mouvement. L'exposition de Dusseldorf a donné le signal de l'emploi de l'électricité dans un tel cas pour améliorer notablement les condi- tions de rendement. Il peut y avoir évidemment sur- croît de dépenses d'installation et de frais de surveil- lance, mais l'économie par cheval utile en poids élevé est très appréciable. De plus, pour la commande des appareils de manœuvre et de sécurité, les transmis- sions électriques sont tout indiquées. L'auteur expose au sujet des machines d'extraction une étude méca- nique et dynamique très détaillée, qui lui permet d’ar- river à l'évaluation de la puissance nécessaire à chaque instant aux bornes du moteur et à la détermination du meilleur système électrique à employer. Les ventilateurs qui servent pour l'aérage, les pompes à piston ou centrifuges pour l'exhaure trouvent dans l'électricité un auxiliaire précieux, et la question y est longuement traitée. Quelques pages sont, en outre, consacrées à son utilité pour la transmission des ordres et la manœuvre des signaux. M. Lapostolet mentionne enfin l'emploi de lélectri- cité dans les industries annexes des mines, et son adaptation à la marche des machines qui se rapportent au broyage, criblage et lavage des minerais ou char- bons, à la fabrication du coke, pour laquelle on fait usage de défourneuses et aujourd'hui de pilonneuses enfourneuses, à celle des agglomérés, à la production des remblais et, en un mot, aux multiples engins acces- soires, chariots, transbordeurs, cabestans, ponts rou- lants, machines-outils, etc., qui accompagnent toute installation industrielle importante. Un dernier chapitre donne le texte des lois, arrêtés ou règlements édictés en France et en Belgique, et auxquels sont soumises les installations électriques dans les mines. Ces renseignements officiels seront d'une grande utilité pratique pour les ingénieurs. 618 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Tel est, brièvement résumé, le canevas de cet excel- lent ouvrage : ses deux grandes qualités sont la con- cision et la clarté. On peut en augurer facilement que le lecteur, si peu habitué qu'il soit aux questions élec- triques, ne se rebutera pas devant des diflicultés que l'auteur a su si habilement aplanir et presque dissi- muler. Emile DEMENGE, Ingénieur civil. 2° Sciences physiques Ostwald (Prof. D. W.). — Eléments de Chimie inorganique, éraduit de l'allemand par M. L. Lazarp. —1re partie: Métalloïdes, 1 vol. gr. 1n-8° de 542 pages ; 2° partie : Métaux, { vol. gr. in-8° de #46 pages. Gau- thier- Villars, éditeurs. Paris, 1905. Voici un traité de Chimie qui se trouve au courant des théories les plus modernes, et que pourtant l’au- teur a droit de présenter comme le fruit lentement müri d'une longue expérience didactique et de ré- flexions prolongées. Physiciens et chimistes, tant étudiants que professeurs, seront heureux de trouver en ce livre une Chimie rationnelle, exposée par un Maître dont la compétence est indiscutable en Chimie pure aussi bien qu'en Physique, et qui a su garder dans son exposition la juste mesure et la perspec- tive exacte dont un théoricien moins familier avec les faits se fût aisément écarté. Les physiciens reprochent volontiers à de nombreux Traités de Chimie un silence mal explicable, en ce qui regarde des théories que l'on nomme récentes depuis si longtemps qu'elles sont en passe de devenir vénérables. Is ne pourront plus faire la même critique à cet ouvrage. Les chimistes, d'autre part, y trouveront une connaissance approfondie de la Chimie propre- ment dite, un souci évident de mettre au premier plan ce qui les intéresse le plus, et l’ordre habituel d’expo- sition, par éléments et combinaisons. A ce propos, une remarque s'impose : on sait qu'on rassemble ordinairement, au début d'un Traité de Chimie, les énoncés des lois générales. Ici rien de sem- blable; c’est en cours de route, et lorsque pour la pre- mière fois le besoin s'en fait sentir, que l’on trouve énoncée chaque loi, toujours amenée par un exemple. Moins commode pour celui qui sait à peu près, ce plan est mieux approprié à celui qui apprend, et cela est bien conforme à la volonté de l’auteur, qui déclare « avoir toujours fait passer en première ligne l'intérêt de l'étudiant ». On rencontrera par exemple, à propos de l'oxygène, les lois de conservation de la matière et la loi des pro- portions définies (et l’on regrettera, je pense, que n1 La- voisier ni Proust ne soient cités); encore à propos de l'oxygène, on apprendra les lois de Boyle et Gay-Lussac; passant à l'hydrogène et à l’eau, on verra s’introduire la notion de poids moléculaires et atomiques; la règle des phases sera énoncée au sujet de l'équilibre entre cristaux d'hydrate de chlore, solution de chlore et chlore gazeux; l'hypothèse des ions et les propriétés des électrolytes seront exposées quand on étudiera la solution d'acide chlorhydrique, et ainsi de suite. Cette notion des ions prend une grande importance dans le langage adopté par l'auteur, qui insiste Justement sur l’exacte adaptation de ce langage aux plus vieilles traditions de la Chimie : « On ne réfléchit peut-être pas assez, dit-il, qu'il est possible et même nécessaire d'introduire la notion des ions comme une notion pure- ment chimique et non électrique... et que son impor- tance tient avant tout à ce qu'elle exprime le fait chi- mique que les parties constitutives des sels ont des réactions indépendantes. » Grâce à cette notion, les propriétés des métaux sont exposées de facon très claire et particulièrement vivante. À ce sujet, il n'est peut-être pas inutile d'ob- server qu'en beaucoup de laboratoires d'Allemagne, on enseigne la Chimie analytique avec ce langage, préci- sément sous l'influence du Professeur Ostwald, On verra une marque du grand intérêt de l'ouvrage en ce fait qu'il a été traduit déjà en anglais, en japo= nais et en russe. L'auteur a lui-même signalé la précis sion et la justesse de la présente traduction, qui rendra un très grand service au public francais. JEAN PERRIN, Chargé du Cours de Chimie physique. à la Sorbonne. | Berthelot (M.), Membre de l'Institut et de l Académie de Médecine, Professeur au Collège de France, eb Jungfleisch !L.), Membre de l Académie de Méde cine, Professeur à l'Ecole de Pharmacie. — Traité élémentaire de Chimie organique. — 4e édition, revue et augmentée. Tome Il. 4 vol. gr. in-8 da 1445 pages avec figures. (Prix : 30 fr.) Ve Dunod, éditeur. Paris, 1904. Ce volume, récemment mis en vente, termine la pu blication de cet important ouvrage. Il comprend les acides, les alcalis artificiels ou naturels, les amides, enfin les composés organométalliques. Le nombre considérable de combinaisons connues. actuellement dans ces diverses classes a obligé les au- teurs à donner à ce second tome plus de développe- ment qu'au premier. Ces combinaisons sont classées: dans l’ordre méthodique correspondant à leur struc- ture moléculaire, conformément aux doctrines, univer- sellement admises, de la Chimie atomique. Si de pareilles divisions sont générales, et communes en beaucoup de points à tous les traités modernes, chacun de ces traités conserve la physionomie propre que les auteurs ont voulu lui donner. De bons ouvrages de Chimie organique n’ont souvent pu faire place à la multitude des faits nouveaux qu'à la condition de condenser la rédaction dans une très large mesure, et les sacrifices ont porté d'ordinaire sur la partie expérimentale des questions. L'étude de ces traités donne au lecteur des notions sur la structure des molécules, énonçant en grand nombre les transforma- tions etles méthodes de synthèse : mais il arrive souvent que des réactions purement théoriques soient à peu près confondues avec celles que la pratique a consacrées; la Chimie apparaît alors comme une sorte d’algèbre mo- léculaire, sans que le lecteur reconnaisse ce qu'elle an d’essentiellement expérimental et de concret. Les au- teurs du Traité élémentaire de Chimie organique, dans cette nouvelle édition comme dans les précédentes, ont réagi contre cette tendance. A des faits devenus plus nombreux, ils ont fait place en étendant largement les limites de l'ouvrage. Les modesde formation théoriques, dont certains donneront peut-être les préparations de l'avenir, étant d'abord exposés, les méthodes usuelles de préparation viennent ensuite, et sont décrites de lan facon la plus précise. Chaque notion ou fait important est accompagné du nom de l'auteur, ce qui permet au lecteur de se référer aux mémoires originaux. Des plus, pour chaque corps important, on trouve, avant son étude, un historique ferme et concis, faisant con= naître, avec les dates, les principales phases de la question. Conçu de cette manière, un traité est beau= coup plus qu'un répertoire méthodique de réactions possibles : c’est un tableau de l’état actuel de la sciences utile à la fois à ceux qui veulent en connaître la pratique et à ceux qui se proposent d'étudier cette science dans son esprit, dans ses méthodes, dans som évolution progressive. CRT RES + L. PIGEON, Professeur à la Faculté des Sciences de bin Llord y Gamboa (D' Ramon). — Détermination quantitative du Fluor par perte de poids. = 1 broch. in-8°, Ricardo Rojas, éditeur. Madrid, 1904 Le procédé du dosage du fluor étudié dans le travail du docteur Ramon Llord y Gamboa transforme le fluor en fluorure de silicium SiF*, par l'attaque des composés fluorés à étudier au moyen d'acide sulfurique con= BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX + centré et de silice pure. L'eau formée par cette réaction chimique étant retenue dans l'appareil par l’acide sul- furique en excès, le fluorure de silicium est éliminé à l'état gazeux, et finalement balayé par un courant d'air sec. — La perte de poids de l'appareil est ainsi propor- tionnelle au poids du fluor contenu dans l'échantillon. — Sur ce principe, l’auteur a établi un appareil très simple, réalisable avec les moyens les plus usuels d'un laboratoire de Chimie. — La méthode est applicable aux dosages de fluor dans les eaux minérales. — Cette méthode, comme toutes les méthodes par perte de poids, doit être appliquée avec discernement. Elle - suppose éliminés tous les corps susceptibles de donner des composés volatils dans les conditions de l'expé- rience : telles sont les matières organiques, les chlo- rures, bromures, iodures, ainsi que les carbonates. L'auteur donne plusieurs exemples d'analyses de con- trôle faites sur des eaux minérales. — Pour ce qui concerne les minéraux ou les produits métallurgi- ques, la méthode peut être encore appliquée; mais il - convient, en ce cas, d'amener le fluor, par un trai- » tement préliminaire, à être attaquable par l'acide sul- furique. L'amblygonite de Caceres, analysée par l'auteur, a fourni un exemple intéressant de ce mode de dosage. L. PiGEox, Professeur à la Faculté des Sciences de Dijon. ET PO OT 3° Sciences naturelles Morat (J.-P.), Professeur à l'Université de Lyon et Doyon (Maurice), Professeur-adjoint à la Faculté de Médecine de Lyon. — Traité de Physiologie I. Fonctions d'innervation, par J.-P. Morart.i{vol. de 717 pages avec 263 fiqures noires et en couleurs. — II. Fonctions élémentaires : Prolégomènes, Con- traction, par J.-P. Morar; Sécrétion, Milieu intérieur, par M. Doxox. 4 vol. de 865 pages avec 194 figures noires et en couleurs. — Masson et Cie, éditeurs, Paris, 1905. I. — Le premier de ces deux volumes a été écrit tout entier par M. Morat. C'est, sans doute, avec quelque pré- dilection que l’auteur a rédigé cette partie de son … œuvre. Son esprit crilique s’est, en effet, de longue date et dans diverses publications, exercé sur les pro- blèmes complexes que posent au physiologiste les fonc- tions d'un système qui confère à l'organisme son individualité et son unité et dont l'étude « occupe un - point nodal dans l'exposition de la science physiolo- gique ». L'on se rend facilement compte que les pages de pénétrante analyse qui servent d'introduction ou de commentaires aux principaux chapitres de l'ouvrage sont le fruit de mûres méditations : aussi donnent-elles à tout l'ensemble un caractère bien personnel. Telles sont, par exemple, les considérations sur les rapports entre la sensibilité et le mouvement, sur l'inhibition, sur la signification et le plan de structure du système du grand sympathique, sur la sensation, etc. Ces aperçus n'ont pas pour seul mérite leur originalité ; ils nous instruisent encore en nous rappelant ce que nos définitions et nos distinctions ont souvent de schématique et de conventionnel. Le plan du livre est fortement tracé. La première partie est consacrée à l'élément nerveux, ses propriétés et ses fonctions, et les pages qui traitent des excitants du nerf et de ses énergies sont un excellent résumé d'Electro-physiologie. La seconde partie, de beaucoup la plus étendue, com- prend les fonctions systématiques « qui naissent d'asso- œiations et de rapports définis entre les fonctions cellu- aires »; c'est celle où se marque le plus manifestement l'empreinte des conceptions que l’auteur s'est faites sur Vorganisation nerveuse et l’évolution du processus nerveux. On ne peut ici qu'indiquer les grandes lignes “suivies dans la répartition des matières. C’est d'abord un chapitre sur la physiologie des con- ducteurs périphériques, racines rachidiennes et nerfs 619 craniens. Viennent ensuite les systématisations pri- maires, à savoir l'acte réflexe qui nous présente dans sa plus grande simplicité la transformation de lexcita- tion sensitive en excitation motrice, et l’action inhibi- toire ou d'arrèt, dont le caractère de généralité n’est peut-être pas moindre. Sous ce titre : « Le conscient et l'inconscient; leur partage », l'auteur englobe l'étude de la moelle épinière, agent de dispérsion et de réflexion des excitations, celle du sympathique, « sorte de moelle disséminée dans les appareils de nutrition », celle du bulbe rachi- dien. Nous passons enfin aux systématisations supé- rieures : ce sont les fonctions d'équilibre auxquelles préside le cervelet, l'élaboration des émotions que M. Morat localise avec Bechterew dans la couche optique, les fonctions psychiques dont l'étude analy- tique comporte naturellement celle des localisations corticales. Une deuxième section de l'ouvrage est réservée à une autre catégorie de fonctions systématiques, aux inner- vations spécifiques (tactile, visuelle, auditive, olfactive, gustative). Elle traite spécialement non des appareils de réception périphériques, mais des voies conduc- trices des impressions et des sphères sensorielles de l'écorce, ainsi que de certains phénomènes sensori- moteurs qui sont le plus directement associés aux diverses sensations. Aux innervations spécifiques est encore rattachée la faculté du langage, analysée, d’une part, d'après la méthode subjective, d'autre part, d'après la méthode objective, c'est-à-dire d’après les perturba- tions apportées à la fonction par les différentes formes d’'aphasie. Dans cet exposé des multiples manifestations de l'activité nerveuse, M. Morat s'applique sans cesse à mettre en évidence les liens qui les unissent les unes aux autres, leurs rapports de dépendance, leurs ana- logies comme aussi leurs dissemblances, et en même temps à poser les principes qui doivent nous guider dans leur interprétation. Malgré la part, légitime d’ailleurs en un pareil sujet, faite à la discussion doc- trinale, ce sont néanmoins, est-il besoin de le dire, les données positives qui forment la trame solide de l'œuvre à laquelle les acquisitionsles plus récentes ont apporté leur contribution; toujours présentés dans l'ordre logique, les résultats de l’expérimentation trouvent la place qui leur revient d’après leur impor- tance, et, à travers tout le livre, la précision du détail va de pair avec la largeur de vues dans l'ensemble. Signalons encore que les notions anatomiques, indis- pensables à l'intelligence des faits physiologiques, sont brièvement rappelées et illustrées par de nombreuses figures heureusement choisies. II. — Le volume sur les fonctions élémentaires, le quatrième dans l’ordre de publication, est en réalité le premier dans le plan d'ensemble du Traité. On ne s'étonnera donc pas qu'il s'ouvre par des généralités sur les êtres vivants et sur les lois de l’organisation animale, sur l'irritabilité du protoplasma, le mode d'action des irrilants et les tropismes. M. Morat y a condensé les principes de la physiologie cellulaire en même temps qu'il y comprend les fermentations en tant que « manifestations élémentaires du processus de la vie, dans ce qu'ila de plus général ». A la suite de ces prolégomènes, l'étude des fonctions élémentaires débute par un aperçu sur l’évolution de la matière et de l'énergie à travers les organismes. On y passe donc en revue les cycles de transforma- tion que parcourent les principaux éléments consli- tutifs de l'être vivant, cycles de l'azote et du carbone, auxquels sont joints aussi ceux du phosphore, du soufre, du fer. Quant à l’évolution énergétique, elle se résume, pour M. Morat, dans la glycogénie : «Vers elle convergent toutes les évolutions nutritives particulières depuis la nutrition; d'elle dépendent, d'une façon directe ou indirecte, tous les phénomènes énergétiques de l'organisme. » On lira avec intérèt et profit les argu- ments sur lesquels se fonde cette conception, et parti- 620 culièrement tout ce qui a trait à l'origine et à la des- tination de la matière sucrée, à la régulation de la glycogenèse par le système nerveux. Par contre, l'adi- pogénie n'est que mentionnée dans un paragraphe un seu sommaire. On peut regretter aussi que la loi de l'équilibre azoté ait été passée sous silence. La seconde partie du volume est consacrée à deux des principaux types des fonctions cellulaires, la con- traction et la sécrétion, et la troisième au milieu inté- rieur (sang et lymphe). L'irritabilité du muscle, son élasticité, les phénomènes mécaniques de la contrac- lion et leur expression graphique, les phénomènes électriques et thermiques qui l'accompagnent, la rigi- dité cadavérique et la fatigue sont l'objet d'une étude serrée que termine une vue d'ensemble sur les trans- formations de l'énergie à travers l'organe musculaire. Aux réactions motrices viennent se rattacher naturel- lement d'autres manifestations équivalentes : mouve- ment vibratile, production d'électricité (poissons élec- triques) et photogénèse. On retrouve dans tous ces chapitres les qualités d'exposition et d'enseignement auxquelles nous à habitués M. Morat, entre autrès une méthode sùre, le souci de pousser aussi avant que possible l’explication des phénomènes physiologiques el la rigueur de raison- nement qui permet d'y réussir. Le reste du livre est l’œuvre de M. Doyon, qui expose d’abord le mécanisme général des sécrétions et l'état actuel de nos connaissances sur les sécrétions internes dans des chapitres des plus instructifs et des plus substantiels. On appréciera particulièrement ceux où se trouvent groupés les faits relatifs à l'adaptation du travail glandulaire, au rôle des glandes envisagées comme organes d'élimination et comme instruments de protection de l'organisme. Toutes ces pages, non moins que celles qui sont consacrées aux principales sécrétions internes, méritent d'attirer l'attention. On sera frappé dela richesse et de la variété des matériaux que l’auteur y a accumulés, en même temps qu'on lui sera reconnaissant du travail qu'il s’est imposé pour consulter, classer, résumer non seulement les mé- moires originaux les plus récents, mais jusqu'aux notes de quelque intérêt. C’est encore le mème sentiment que l’on éprouvera à la lecture de l'étude du sang, qui n'occupe pas moins de trois cent trente pages du livre. Toutes les parties de cet important sujet (caractères physiques du sang, globules rouges et hématolyse, hémoglobine et ses dérivés, globules blancs et phagocytose; matières albu- minoïdes, anticorps, gaz du sang, coagulation) toutes ces parties, dis-je, sont traitées avec le même soin. M. Doyon à utilisé dans son travail tous les renseigne- ments fournis par les nouvelles méthodes d’investiga- tion, telles que la cryoscopie, la mesure de la conduc- tibilité électrique, celle de la résistance des globules rouges, etc. À des questions encore nouvelles en physiologie, mais d'un grand intérêt, comme celles des anticorps et des propriétés défensives du sang, il à donné les mèmes développements, la même ampleur qu'à des questions depuis longtemps classiques. Il n'est donc que juste de dire que celte description du sang et de ses propriétés est une mise au point aussi exacte que complète du sujet. En raison mème de l'abondance des documents expérimentaux [qu'elle comporte, le groupement et l'exposition avaient be- soin d'être des plus méthodiques; et c’est ce qu'ils sont, en effet, l'un et l'autre. En ce qui concerne la lymphe, je n'ai qu'une critique de détail à formuler : c'est que l’auteur n'ait pas insisté sur le mode d'action des lymphagogues de la deuxième classe (sels, glucose), question intéressante dans ses rapports avec les varia- tions de la tension osmotique du sang et avec la diu- rèse produites par ces mèmes substances. E. WERTHEUMER, Professeur de Physiologie à la Facullé de Médecine de Lille. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 4 Sciences médicales Marion (Georges), Professeur agrégé à la Faculté da Médecine de Paris, Chirurgien des hôpitaux. — Chi rurgie du Système nerveux (Crâne et Encéphale Rachis et Moelle, Nerfs). — 1 vol. grand 1n-S°de 531 pages avec 320 figures. (Prix : 18 fr.) G. Stein heil, éditeur. Paris, 1905. A Ja librairie G. Steinheil est en cours de publications sous la direction de MM. P. Berger et H. Hartmann, une« importante série de monographies qui conslitueron un véritable traité de Médecine opératoire et de Thés rapeutique chirurgicale. L'œuvre est matériellement très soignée; dans tous les volumes — et en particu= lier dans celui qui nous occupe aujourd'hui — les figures sont très nombreuses et très claires, comme) cela est indispensable dans tout livre de technique opé= ratoire ; et l'idée est bonne d'établir des volumes ven= dus séparément, où chacun de nous puisse prendre, par conséquent, ceux qui se rapportent à ses travaux, de prédilection. Féliciter les directeurs d'avoir bien choisi leu auteur, faire l'éloge de M: Marion serait chose super= Îlue, et je n'ai pas besoin de dire que nous avons ici sous les yeux un livre exposé et documenté avec soins Mais je crois intéressant d'en prendre texte pour mon trer quelles questions y sont traitées, où elles en sonb scientifiquement et pratiquement. Plusieurs d’entre elles, en effet, ont subi dans ces dernières années une véritable rénovation, grâce aux progrès de la Physio= logie et de l’antisepsie. De la chirurgie des nerfs, pas grand'chose à dires sauf que notre innocuité chirurgicale actuelle nous an permis de régler des opérations complexes et complètes, d'où, pour les névralgies faciales rebelles, une frés quence plus grande qu'autrefois — mais encore bien: insuflisante — des cures délinitives de cette terribles infirmité. Mais la bénignité de nos interventions mo dernes a fait naître, il y a quinze à vingt ans, une chÈ rurgie dont nos devanciers avaient à peine conçu la possibilité : celle des centres nerveux. Pour la moelle épinière, les faits sont rares, et destinés sans doute à le rester, en raison de la rareté des indications cliniques; mais ils se sont vite multipliés pour le crâne et le ce veau. Et l’on verra par exemple, dans le livre de M. Ma rion, combien se sont précisées l’ensemble de donnée cliniques, anatomo-pathologiques et opératoires sub lesquelles nous avons établi, avec succès, le traitements opératoire de certaines lésions traumaliques, inflam matoires ou néoplasiques de l'encéphale, comment, e particulier, nous avons pu trouver de nombreuses ap= plications pratiques aux recherches, inaugurées pal P. Broca, sur les localisations cérébrales. Il convient, toutefois, d'ajouter qu'au début de leur tentatives, certains chirurgiens onf entonné un pe vite le péan. Ce devait presque être la fin des ménin= gites, — y compris la tuberculeuse, — des épilepsies, des microcéphalies et idioties, de l’hydrocéphalie; e lorsque, il y à dix ans, j'ai cherché à établir, sur ces points, le bilan de nos connaissances, j'ai dit qu'il e faudrait déchanter. Le clinicien de grand bon sens qu'est M. Marion fait, dix ans plus tard, les mèmes réserves : et ce qui reste acquis est important, Ca c'est beaucoup que d'avoir rendu curables certaines! compressions cérébrales d'origine traumatique, cer taines méningites aiguës, certaines tumeurs ; qu d'avoir, pour beaucoup d'autres de ces dernières, ré- gularisé un traitement opératoire qui supprime, qui tout au moinsatténue considérablement les souffrancess : Je n'ai insisté, dans cette analyse, que sur la chi= rurgie cranio-cérébrale. Mais on trouvera bien d'autr renseignements dans le livre de M. Marion, en parti eulier sur le traitement du mal de Pott, et ces parties relativement ingrates, de la besogne ne sont pas le moins utiles au praticien, pour lequel, avant tout, Son faits les ouvrages de ce genre. AuG. Broca, + Professeur agrégé à la Facullé de Médecine ä ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 13 Juin 1905. 19 SGiENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Bottasso pré- sente ses recherches sur une solution du problème de Monge relatif à l'équation /(/x,, dx,..…, dxy) = 0 à coef- ficients variables. — M. G. Rayet rappelle le phéno- mène des ombres mouvantes observé par M. de Joly “lors de l'éclipse totale de Soleil du 12 mai 1706, et montre l'intérêt qu'il y aurait à observer si ce phéno- mène se répétera pendant l’éclipse du 29.30 août pro- chain. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Davaux-Charbonnel : Mesure de la capacité des longs câbles sous-marins y. Revue, p. 292). — M. A Ponsot montre que le clas- “sement des métaux d’après la valeur décroissante du coefficient de l'effet Thomson est celui dans lequel le pouvoir thermoélectrique d’un métal par rapport au suivant est positif. — M. P. Weiss à constaté que la susceptibilité atomique du fer dans Ja pyrrhotine, me- Surée perpendiculairement au plan magnétique, est “très voisine de la susceptibilité atomique du fer dans les corps paramagnétiques. — M. G. D. Hinrichs estime que, dans le calcul des poids atomiques, le pro- cédé de réduction niathématique des valeurs expéri- mentales à une grande importance, el qu'en particulier la méthode appliquée par Stas à l'azote est fautive. — MM. H. Moi san et P. Lebeau ont étudié l'action du fluor sur les composés oxygénés de l'azote : à la tem- érature ordinaire, il n'y a pas d'action sur Je peroxyde ‘azote, ni sur l’oxyde azoteux; avec l’'oxyde azotique n excès, il se forme de l'azote, de l'oxygène et du peroxyde d'azote, mais pas de composé fluoré:; le fluor en excès réagit, par contre, sur l'oxyde azolique en don- nant un composé gazeux qui se liquélie à — S0° et ren- ferme Az, F el 0. — M. Pastureau, par oxydalion de acétone au moyen de l'eau oxygénée à 2 °/,, a obtenu, outre le superoxyde (C*H60?}, de l'acétol et de l'acide pyruvique. — MM. L. Bouveault el R. Locquin ont onstaté que le sodium réagit sur les éthers des acides monobasiques à fonction simple de la série grasse en donnant des glycols x-bisecondaires et des 4-dicétones symétriques. — MM. Fourneau et Tiffeneau ont pré- paré quelques oxydes d'éthylène 1:2-monosubstitués au moyen des dérivés éthyléniques correspondants en les soumettant, en présence d’éther aqueux, à l’action de l'iode et de l’oxyde jaune de mercure. — M.F. Bo- droux, en faisant réagir les éthers chloracétiques sur des dérivés halogénomagnésiens de l’aniline, a obtenu des acétanilides halogénés. — M. A. Bouchonnet a préparé l'éther diphénylique de l'acide azélaïque CH. CO*(CH°)}CO*.C'H5, F. 4809-49, par action du chlorure dazélayle sur le phénol; le sulfhydrate de soude réagit Sur cet éther en donnant l'acide thioazélaique COSH {CH2):COSH, F. 72°-74°. — MM. Ch. Moureu et A. Va- leur, en faisant réagir l'iodure de méthyle sur la spar- fine, ont toujours obtenu, outre l'iodométhylate déjà connu, un isomère qui en diffère nettement par son pouvoir rotatoire beaucoup plus élevé et son extrème Solubilité dans l’eau. — MM. À. Etard et E. Vallée, en umettant la gomme laque à la décomposition pyro- née, ont obtenu d'une part de l'acide oléique, de autre une série d'hydrocarbures (C‘H*)}", Ce serait donc un oléate de sesquiterpènes. — MM. Curtis et . Lemoult montrent que, pour développer l’électivité du tissu conjonctif pour certaines matières colorantes, L faut opérer en présence d'acide picrique ou d'un autre dérivé trinitré et s'adresser à des colorants ayant - _. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER au moins trois groupements sulfo fixés dans le chro- mogène. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. Leclerc du Sablon à reconnu que le maximum des réserves, qui, chez les arbres à feuilles caduques, à lieu en aulomne au mo- ment de la chute des feuilles, est atteint chez les arbres à feuilles persistantes au commencement du prin- temps, lorsque les bourgeons vont s'ouvrir. — M. P. Claverie décrit un bananier de Madagascar, nommé tsirohoroka par les Sakalaves, qu'il considère comme nouveau et désigne par le terme de Musa Perrierr. — M. P. Mazé considère, contrairement à M. Arthaud- Berthet, que l'Oïdium lactis n'est pas la cause de la « graisse » et de la « frisure » des fromages. — M. de Lamothe poursuit ses recherches sur les anciennes lignes de rivage du Sahel d'Alger. Les mouvements néga- tifs qui ont abaissé la ligne de rivage à la cote 17, puis à la cote actuelle, ont été interrompus par des mouvements positifs. — MM. L. Duparc et F. Pearce ont trouvé, dans la dunite de l'Oural du Nord, une nouvelle roche filonienne, grisätre, à grain fin, qu'ils nomment glad- kaïte, Elle renferme de la magnétite, de l’apatite, du mica noir, du mica blanc, de la hornblende, de l'épi- dote, des plagioclases et du quartz. — MM. F. Launay et E. Maillet concluent de leurs observations que, pendant le 2° semestre de 1905, le débit minimum annuel des sources profondes aura plutôt tendance à diminuer sensiblement ou à atteindr: à nouveau des chiffres assez bas dans la majeure partie du bassin de la Seine. Séauce cu 19 Jui: 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Es :langon com- munique ses observations de la comète Giacobint (1905 à), faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bordeaux. 20 SciexcEes PHYSIQUES. — MM. W. de Fonvielle et P. Bordé rappellent que M. J. Elliot à mesuré aux Indes, pendant l'éclipse de Soleil de 189$, la décrois- sance de chaleur au moyen d'un actinomètre exposé aux rayons solaires. Il y aurait lieu de reprendre cette mesure à une altitude élevée pendant la prochaine éclipse. — M. P. Vaillant a étudié l'influence de la concentration sur les propriétés magnétiques des solu- tions de cobalt. Le coeflicient K caractéristique du sel varie peu avec la concentration et la nature du radical acide. Pour chacun des sels étudiés, K diminue lorsque la concentration augmente. — MM. H. Moissan et P. Lebeau, par action du fluor en excès sur l’oxyde azotique, ont obtenu un nouveau composé gazeux, le fluorure d'azotyle, AzO?F, de densité 2,24, fondant à — 1399 et bouillant à — 639,5. Il réagit à la température ordinaire sur B, Si, P, As, Sb et I. Il décompose l'eau froide avec production d'HF et d'HAzO*. — M. A. Re- coura à préparé un sulfate ferrique basique en agitant avec de l’acétone une solution aqueuse concentrée de sulfate ferrique; il se précipite au bout de deux jours une matière blane jaunâtre de composition 6 [Fe*{0H)°. 3H4:S0:]. Fe*(OH)5. — M. C. Matignon, en conduisant de l'air sec sur le chlorure anhydre de néodyme fondu, à obtenu un oxychlorure cristallisé NdOCI. H£ et HBr transformant lentement le chlorure en iodure et en bromure. — M. J. Herbette a reconnu quil’existe, entre le tartrate de TI et celui de K, qui appartiennent à deux systèmes cristallins différents, un véritable iso- morphisme. Les propriétés des cristaux mixtes que fournissent ces deux sels ne varient pas proportion- nellement à la composition chimique. — M. Larguier des Bancels a observé que le mélange de deux col- 13°° 622 loïdes de signe opposé donne lieu à une précipitation qui, pour une proportion convenable, est totale; l'addi- üon d’un électrolyte capable de précipiter l'un des deux colloïdes fait obstacle à la précipitation mutuelle de ceux-ci. Le précipité résultant du mélange de deux colloïdes de signe opposé peut être dissocié par l'addi- tion d'un électrolyte capable deprécipiter l'un des élé- ments du couple. — MM. P. Th. Muller et C. Fuchs ont observé que la chaleur moléculaire de solution des bons électrolytes diminue avec la dilution d'une facon continue. — M. R. Varet a déterminé les chaleurs de formation des formiates mercureux et mercurique; elles sont respectivement de 175,1 et de 161,5 cal. — M. A. Haller à préparé diverses thuyones alcoylées par l’action de l'amidure de sodium, puis des iodures alcooliques. Les aldéhydes aromatiques se condensent d'autre part avec la thuyone sodée pour donner des corps dont le pouvoir rotatoire est fortement exalté; les dérivés correspondants de l'isothuyone sont com- plèfement inactifs. — M. A. Robyn, en faisant réagir le bromure de pyryle sur diverses amines aromatiques, a obtenu des substances mono ou dipyrylées qui déri- vent, par élimination d'hydracide, soit de molécules égales des corps réagissants, soit de 1 molécule de base pour 2 molécules de bromure de pyryle. — MM. Ch. Moureu et A. Valeur ont reconnu que les deux iodhydrates d'iodométhylate de spartéine isomères se décomposent quantitativement, sous lPaction de la cha- leur, en CH'I et un même iodhydrate de spartéine. Leur isomérie ne peut être que d'ordre stéréochi- mique. 3% SCIENCES NATURELLES. — M. P. Becquerel à cons- laté que la résistance des graines aux basses tempéra- tures dépend uniquement de la quantité d’eau et de gaz que renferment leurs tissus; si le protoplasma a atteint son maximum de concentration, il ne gèle pas. — M. L. Boutan à éludié un ennemi redoutable des plantations de caféiers au Tonkin : c'est le Xylotre- chus des bambous secs. On doit éloigner ces derniers des plantations, ou ne les utiliser qu'après avoir été immergés dans une solution de sulfate de fer. — M. L. Lapicque «à reconnu que les Dravidiens actuels ont eu des ancètres plus noirs qu'eux-mêmes, mais distincts des Negritos andamanais, dont l'indice cépha- lique moyen est 83. — M. L. Gentil signale l'existence de schistes à graptolithes dans le Haut-Atlas marocain. — M. E.-A. Martel montre que le creusement de la grotte de Rochefort a marché de concert avec celui des vallées voisines, et que les abimes qui y donnent accès ne sont pas dus à un effondrement postérieur du plateau. — M. M. Boule défend la méthode évolution- niste employée en Paléontologie, notamment par M. Gaudry, contre les critiques de M. Dépéret. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 13 Juin 1905. M. le Président annonce le décès de M. Duché, cor- respondant national. M. P. Berger présente un Rapport sur une observa- tion, faite par le D' EF. Villar, de prolapsus de la mu- queuse de la vessie à travers l’urèthre chez une femme. La formation de ce prolapsus parait attribuable à une laxité spéciale de la muqueuse vésicale, qui se laisserait entraîner par glissement vers l'orifice uréthral, et à un élat particulier de relâchement du sphincter vésical. La maladie fut guérie par extirpation du lambeau mu- queux. — M. Chauvel analyse un liavail du Dr Miro- vitch relatif à l'influence nocive de Ja vélocipédie et de l'automobilisme sur la vision et les moyens d'y remé- dier. L'auteur propose un modèle spécial de lunettes. — M. Ch. Richet communique une longue série d'ex- périences, faites sur des chiens, sur l'alimentation dans la tuberculose. La conclusion formelle qui s'en dégage, c'est que la viande cuite, aliment unique, est incontes- tablement la plus mauvaise de toutes les alimentations ; ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES la viande crue, aliment unique, est incontestablement la meilleure. — L'Académie poursuit la discussion de là question de la déclaration obligatoire des maladies. contagieuses au point de vue de la prophylaxie de ces maladies dans l'armée. Séance du 20 Juin 1905. M. Pouchet présente un Rapport sur un Mémoire de: M. Laufer concernant l'utilisation des matières grasses. chez les tuberculeux. L'auteur montre que les tenta- tives de suralimentation grasse peuvent aboutir à une perturbation des phénomènes digestifs normaux, se tra duisant par la diarrhée etune désassimilation exagérée. — M. H. Huchard montre qu'on a fortement exagéré l'action thérapeutique des formiates, qu'il a mise récem- ment en lumière, et prémunit les médecins contre le rôle de panacée qu'on veut faire Jouer à l'acide formi- que. — M. H. Benjamin signale deux observations de: mort rapide d'une jument sans cause visible ; l'autopsie montra que l'estomac était bourré d'aliments tassés. — L'Académie émet à l'unanimité les vœux suivants : 1° Que la loi sur la déclaration obligatoire des maladies: contagieuses soit strictement appliquée ; 2° que le règle- ment d'administration publique préparé pour détermi- ner les conditions de l’organisation et du fonctionne- ment du service de la désinfection soit tel que la désinfection soit réellement obligatoire, effective et contrôlée. — M. Durante lit un travail sur les micro— mélies congénitales, SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Ssance du 10 Juin 1905. M. Ch. Richet à constaté que les injections d'apo= morphine sont capables de provoquer l’anaphylaxie chez les animaux. — Le même auteur montre que l'influence de l'étendue de la surface libre du lait qui fermeale sur la marche de la fermentation est très appréciable. — M. Ch. Richet : L'alimentation par Ja viande cuite dans la tuberculose expérimentale (voir ci-dessus). — MM. A. Laveran et Nègre ont {rouvé, dans le tube digestif d'Ixodes recueillis sur des Tortues venant d'Algérie, des éléments parasitaires représen- tant probablement une phase de l’évolution des Hémo- grégarines de la Tortue. — MM. F. Curtis et Gellé montrent l'importance des formes de transition acino= insulaires ou insulo-aciniques dans l'interprétation des lésions du pancréas diabélique. — M. Lafforgue à constaté que le chlorure de sodium, injecté au cobaye en solution hypertonique, favorise le développement pathogène d’un vulgaire saprophyte, le B. Wesentericus. -— M. J. Rouget conclut de ses recherches.que, dans certains cas, le virus vaccinal peut traverser les bougies Berkefeld V et W, mais que ce n'est point là une règle constante. — MM. A. Gilbert et P. Lereboullet ont. reconnu que, dans la cholémie familiale avec lithiase biliaire, la proportion de bilirubine contenue dans le sang correspond à 68 milligrammes par litre de sérum. — M. P. Remlinger moulre que, chez les animaux, et très probablement chez lhomme,en cas de morsure par un animal enragé, les centres nerveux sont virus lents beaucoup plus tôt qu'il n’était admis jusqu ici. —= M. S. Colombino a pratiqué l'examen cytologique des sédiments urinaires dans diverses affections; €e pro= cédé permet le diagnostic rapide de la tuberculose uri= naire. — MM. P. Emile-Weil et Tanon ont constaté qu'il ne paraît point y avoir de modifications du liquide céphalo-rachidien dans la lèpre. — M. P. Emile-Weil a observé que le bacille de Hansen peut, au cours de: son parisitisme, perdre ses caractères tinctoriaux, en particulier son acidorésistance. — M. Ch. Féré montre que l'accumulation des excitations provoque une dé= pression progressive du travail, non seulement dans l'effort qui suit immédiatement les excitations, mais encore dans l'effort après un repos suffisant à la res= tauration de l'effort normal. — Le même auteur & ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Be que plusieurs agents calmants ont, à faibles “«loses, une action excitante quand la substance à été administrée après un travail. Séen:e du 17 Juin 1905. MM. Remlinger et O. Nouri ont observé de nouveau le passage du virus vaccinal à travers la bougie Berke- è feld V. — M. J. Larguier des Bancels : Influence des électrolytes sur la précipitation mutuelle des colloides (le signe opposé (voir p. 621). — M. L. Meunier montre De les malades dont le suc gastrique à une teneur “faible en HCI, et tient néanmoins en dissolution “une faible quantité d'amidon digéré, sont des hyper- » chlorhyariques rapides. — M. G. Billard a constaté que les phénols sont par eux-mêmes de médiocres facteurs d'abaissement de la tension superficielle des « urines. — M. E. L. Backmann à reconnu que l'alcool éthylique ne peut servir de moyen de nutrition pour le cœur isolé et survivant des Mammifères. — M. E. Mau- rel résume ses observations sur le zéro physiologique de température du corps. — M. L. Guarrigue présente une revendication de priorité à propos de l'action thé- rapeutique des formiates. — M. E. Brumpt montre que le mycétome à grains noirs est dû à une Mucédinée d'un genre nouveau, dont il a suivi toute l'évolution et qu'il nomme Aadurella mycetomi. — M. C. Foa à étudié la réaction de quelques liquides de l'orga- misme par la méthode électrométrique; les résultats sont très différents de ceux de la méthode titrimé- trique. Les liquides de l'organisme sont, en général, sensiblement près de la neutralité. — M. J. G. Lache a examiné la structure de la neuro-fibrille au moyen de la nouvelle méthode de Cajal. Il ne pense pas que “les grosses neuro-fibrilles aient une structure sensi- “ blement différente de celle de leurs similaires plus «.sréles. Les neurosomes de Held paraissent identiques in éléments granulaires de l'auteur, — M. P. Lesne ER She à ts er _h altribue aux rapports des Tettigomètres avec les Fourmis la signification de phénomènes de domesti- cation analogues à ceux qu'a produits l'industrie hu- maine. — MM. A. Gilbert et P. Lereboullet ont trouvé dans les ictères chroniques simples une proportion “moyenne de 15 centigrammes de bilirubine par litre de sérum sanguin. — M. A. Chassevant indique un pro- cédé de recherche et de dosage des vapeurs de benzine dans l'atmosphère par barbotage dans deux flacons contenant l’un HAzO* fumant, l’autre H*SO* concentre. — M. Pinoy montre que les bactéries introduites avec “le Plasmodiophora brassicæ, myxomycète parasite produisant la hernie du chou, contribuent au dévelop- pement de la pourriture. — M. M. Lœper a observé que la plupart des purgatifs produisent une excitation de la fonction glycogénique du foie, qui est en rapport avec une leucocytose polynucléaire de l'organe. — M. J.-J. Vassal a rencontré, chez un faisan de l'Annam (Polyplectrum germani), un nouveau Trypanosome, différant des espèces aviaires actuellement connues, el qu'il nomme Tr. polyplectri. — M. R. Montel a égale- ment trouvé, dans le sang d’un poisson de Cochinchine du genre Clarias, un Trypanosome voisin de celui de Panguille et qu'il nomme Tr. clariæ. — MM. J. Nicolas t Bancel ont constaté que les vaccinations antira- iques engendrent une hyperleucocytose constante, Souvent très marquée, et atteignant son maximum à la fin du traitement. —M. L. Lapicque : Recherches sur lethnogénie des Dravidiens (voir p. 622). — MM. Nobé- urt, Levaditi et Darré ont observé la présence du Spirochæte pallida dans les lésions pemphigoides un nourrisson hérédosyphilitique et l'absence du nème micro-organisme dans les organes de ce nour- Hisson. — M. P. Wintrebert a reconnu que le déve- oppement des larves d'Anoures, après ablation des centres nerveux, n'est que légèrement retardé. — M: Alb. Frouin a constaté qu'il n'y a pas d'adaptation du suc pancréatique, au sens de Pawloff, dans les di- ers régimes; il n'y a pas non plus adaptation du suc intestinal. 023 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Séance du 6 Juin 1905. M. Ch. Pérez a observé que le Blastulidium pædopli- thorum possède des formes de résistance prolongée à des conditions défavorables de milieu. — MM. J. Ber- gonié et Tribondeau ont étudié la pathogénie des altérations testiculaires produites par les rayons X. Ils croient à une action surtout directe, c'est-à-dire sur les cellules. — MM. Tribondeau el Récamier ont examiné les altérations produites par rœæntgénisation sur la tète d'un chat nouveau-né. Les rayons X ont entravé sans l'arrêter le développement de l'œil et ont provoqué la cécité par cataracte; ils ont, de plus, ralenti, sans l’ar- rêter, l’évolution des os de la face, en particulier des dents. — MM. Coyne et Cavalier ont observé, à la périphérie des lobules hépatiques, chez le pore, que les cellules hépatiques se disposent sous forme d’une couche de cellules aplaties. — MM. J. Gautrelet et J. Monteli ont constaté une diminution de l'acide carbonique respiratoire sous l'influence des injections d'eau de mer. La suppression du traitement marin ramène à son taux normal l’exerétion de CO®. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS Séance du 26 Mai 1905. M. O. Boudouard expose les résultats de ses recher- ches sur la fusibilité des silicates d'alumine, des silicates de chaux, des aluminates de chaux et des silicates alu- mino-calciques. — M. A. Kling montre que les solutions aqueuses d'acétol contiennent les deux formes tauto- mériques : CH3.CO.CH°OH et CH.C(OH).CH? NA (0) en état d'équilibre. Le passage de la forme cétonique à la forme oxydique se produirait à la faveur d'hydrates peu stables, dont M. Kling a prouvé l'existence à l’aide du chronostélescope de Varenne et Godefroy. — M. G. Urbain expose à la Société la méthode qui lui paraît actuellement la meilleure pour la séparation des différentes terres yttriques. Les grandes lignes de cette méthode sont les suivantes : Les terres du groupe cérique : lanthane, cérium, praséodyme, néodyme et samarium, sont complètement éliminées à l’état de nitrates doubles magnésiens au moyen du nitrate magnésien de bismuth. A partir du bismuth pur, on obtient successivement l’europium d'abord, puis le gadolinium. Les terres suivantes sont transformées en éthylsulfates. On obtient ainsi successivement la ter- bine à sels incolores et à oxyde noir, le dysprosium à sels verts, le holmium à sels jaune rosé, puis l'yttrium à sels incolores et à oxyde blanc. Les dernières frac- tions, très solubles, sont transformées en oxydes à mesure qu'elles ne présentent plus les bandes de l’hol- mium. Les oxydes ainsi obtenus constituent l'yttria rose. Ils renferment la majorité de l'yttrium, tout l’erbium, tout le thulium et tout l'ytterbium. La masse rose est transformée en nitrate. Soumis à la pyrogé- nation fractionnée, ces nitrates laissent le nitrate d'yttrium inaltéré, les autres nitrates étant transformés en sous-nitrates insolubles. La majorité de l'yttrium est ainsi aisément éliminée. Les sous-nitrates sont transformés en nitrates qui.sont soumis à la cristalli- sation fractionnée. Dans ces conditions, on obtient rapidement en queue et très pur-l'ytterbium à oxyde blanc, puis le thulium qui est extrèmement rare et très mal défini, enfin l’erbine à sels roses. La cristalli- sation des nitrates ne permet pas de séparer l’erbine de l'yttria, et, pour séparer ces deux substances, il faut avoir de nouveau recours aux fusions. L'auteur insiste sur cette loi générale que les divers termes de la série des terres rares se séparent dans un ordre constant, quelle que soit la nature des sels que l’on soumet à la cristallisation fractionnée. — MM. L. Maquenne et E. Roux exposent les résultats de leurs recherches sur lamidon : d'après ces auteurs, la fécule serait un mélange d'amylocellulose (environ 80 °/;) et d'une substance gélatineuse qu'ils proposent d'appeler amy- lopectine. Le premier de ces corps est le seul qui, dans l’amidon, se colore en bleu par l'iode et donne du maltose à la saccharification diastasique. — M. E. Roux dépose un Mémoire dont les conclusions sont que les solutions d'amidon artificiel rétrogradent comme les empois de fécule, quoique beaucoup plus rapidement, et qu'elles sont également saccharifiables par les acides ou par le malt. Elles donnent les mêmes produits de saccharification, c'est-à-dire, dans le cas du malt, des dextrines et du mallose, en proportions relatives qui dépendent de la température à laquelle on a fait agir le malt, ainsi que cela se produit avec la fécule. Cepen- dant, les amidons artificiels présentent cette particula- rité importante de fournir toujours, toutes conditions étant égales d’ailleurs, plus de maltose que n'en donne la fécule. Les résultats des recherches exposées dans ce mémoire montrent que les amidons artificiels ne ressemblent pas seulement par leur aspect et leurs caractères microscopiques aux amidons naturels, mais qu'ils possèdent les mèmes propriétés chimiques. — MM. Fourneau et Tiffeneau ont étudié la préparation et les propriétés de quelques oxydes d'éthylène. Ceux- ci sont obtenus en faisant agir la potasse aqueuse sur les chlorhydrines provenant de l’action des dérivés organo-magnésiens sur la chloracétone (oxyde d'éthy- lène 1:2 à fonction alcoolique tertiaire). Les oxydes d'éthylène 1:2 s’hydratent facilement en donnant des glycols. Avec les termes inférieurs de la série grasse, cette hydratalion se fait avec un grand dégagement de chaleur, IIS se transforment par la chaleur ou par catalyse en présence de cuivre ou de nickel réduits en aldéhyde R.CH(CH*)CHO, par hydrogénation dans le tube de Sabatier en alcools R.CH(CH#)CH?OH. Avec les dérivés magnésiens, ils donnent des alcools: secon- daires R.CH(CH°).CHOH.R. Cette dernière réaction explique la présence de l'alcool CH*.CH?.C1(CHS) CHOH. CA?.CH*, comme produit accessoire de la préparation de la chlorhydrine CH*(CH*)C(CH?CI)CHO. MM. Titfe- neau et Fourneau ont fait l'étude de cet alcool et de quelques-uns de ses homologues. — M. Fourneau communique ensuite les recherches personnelles de M. Tiffeneau sur l'oxyde de méthoéthénylbenzène. Cet oxyde s'oblient soit par action à chaud de la potasse aqueuse sur la chlorhydrine correspondante, soit par agitation à froid de l'iodhydrine en solution éthérée avec de la potasse sèche pulvérisée, soit encore, à côté de quelques produits secondaires, par action du sodium sur la solution éthérée de la chlorhydrine du méthoc- thénylbenzène. Cet oxyde bout à 84-86° sous 45 milli- mètres; D—1,035. Par distillation à la pression ordi- naire, cet oxyde se transforme en aldéhyde isatropique, fait déjà communiqué au nom de M. Tilfeneau par M. Bouveault. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 30 Mars 1905. Sir Norman Lockyer présente quelques considéra- tions préliminaires sur /es observations d'étoiles faites dans quelques cercles de pierres anglais. On sait que les prètres druidiques avaient l'habitude d'observer une étoile se levant environ une heure avant le Soleil, dans le but de déterminer le moment où il était néces- saire de commencer les préparatifs du sacrifice qui avait lieu au lever du Soleil. L'auteur arrive à la con- clusion que pour le cercle de pierres des Hurlers, près de Liskeard (Cornouailles), l'étoile en question était très probablement Avrcturus, ce qui ferait remonter la cons- truction de ce cercle à environ seize cents ans avant J.-C. — M. J. Morrow a étudié /a distribution de la vitesse sur la section d'un tuyau parcouru par uu fluide ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES visqueux. Les expériences apportent une confirmation partielle de la loi théorique de la distribution de la vilesse, mais montrent que cette distribution ne peut être obtenue que dans des conditions très spéciales, entre autres l'absence complète d'obstructions et d'effets aux extrémités. Quand le courant est direct et qu'il existe des lignes de courant, la vitesse de distribution n'est pas nécessairement la même que pour le flux normal caractéristique A la vitesse critique, le mouve- ment irrotalionnel en ligne droite cesse pour l'aire place à un mouvement dans lequel les trajectoires des parti= cules de liquide sont tourbillonnaires et turbulentes } la loi de la distribution de la vitesse linéaire moyenne parallèlement à l'axe change alors simultanément de la forme (approximalivement) parabolique à la forme Lypique du mouvement tourbillonnaire. — M. J. B. Burke: Note sur la [luorescence ct l'absorption. Dans un Mémoire sur le « changement d'absorption produit par la fluorescence », l'auteur à donné un compte rendu des expériences par lesquelles il a trouvé l'existence d'une différence très marquée dans l'absorption de la lumière fluorescente du verre d'uranium à l'état lumi= neux et à l'état non lumineux. Il a attribué cette diffé rence à un changement temporaire dans la structure ou là composition chimique du corps exposé à l'in- fluence de la lumière excitante, et il a été amené à le considérer comme dû à de nouveaux rapports atô- niques donnant naissance à de nouvelles fréquences pendant la période de luminosité, par la formation de composés instables qui rayonnent d'une facon intense, lorsqu'ils se désagrègent, l'énergie aceumulée par leur formation, la luminosité étant ainsi la manifestation visible d’un processus de formation et de destruction de molécules. MM. Nichols et Merritt ont découvert récem= ment que le changement d'absorption dépend de Pin= tensité de la fluorescence, et qu'un effet de saturation se produit dans l'absorption quand l'intensité de la luminosité augmente, atteignant un maximum avec une certaine intensité de la lumière fluorescente, IS n'ont pas employé la lumière fluorescente d'un autre corps excité d'une facon analogue, mais une flamme d'acétylène comme source de rayons transmis. M. Cas michel à eu quelque peine à percevoir le changement avec la lumière d'une flamme, et il semble que ce fait soit dù à l'emploi d'un écran de verre d'urane, de 7 centimètres d'épaisseur, pour retrancher les rayons les plus réfrangibles de la flamme, précaution qui n'est nullement nécessaire, puisque l'effet a été observé sans cel écran. La fluorescence produite par la flamme dibn minue Simplement Fabsorption apparente, D'un autre côté, lécran doit, lui-même, devenir fluorescent c+ ainsi, si l'effet recherché se produit, absorber d'une facon considérable les rayons dont on se propose den mesurer labsorplion, d'après Fhypothèse qu'ils sont transmis par l'écran. Pour une Îluorescence de très faible intensité, l'effet peut ne pas ètre perceptible dans quelques circonstances. De plus, le spectre (lu0= rescent du verre d'urane est composé de plusieurs bandes; l'auteur les considère comme discontinues et composées de plusieurs lignes finement divisées. De sorte que Femploi de l'écran filtre les rayons, el seuls ceux qui ne sont pas absorbés par le verre d'urane sont transmis, Ces derniers ne subissent aucun chaugement d'absorption. Le changement d'absorption ne peut pas ètre dù à l'accroissement d'amplitude si les vibrations sont linéaires ; mais, à où de nouvelles périodes libres sont produites par les rayons excitants, l'intensité @ l'absorption de la lumière fluorescente dépendraien du nombre et de la durée des périodes ainsi produites? el c'est ce que le changement d'absorption dans I fluorescence prouve de la facon la plus évidente. M. A. H. Peake présente le résultat de ses rechers ches sur la détermination de la chaleur spécifique d la vapeur surchauffee. Deux méthodes ont été em ployées : 4° l’étranglement ou l’étirage en filets de l vapeur, pour obtenir Ja loi qui relie la variation di température avec la pression pour une chaleur total onstante; 2° le chauffage direct d'un courant de vapeur par une méthode électrique. La chaleur spéci- ique, calculée d'après les résultats de la première méthode, augmente rapidement de 0,#3 à 230° F. jus- qu'à 1,0 à 350° F. Cet accroissement surprenant amène Pauteur à suspecter l'exactitude des tables de Regnault pour la vapeur saturée, qui ont servi au cacul, et à S'en rapporter uniquement à la méthode de chauffage direct. Malheureusement, les difficultés rencontrées, dans cette dernière, pour maintenir toutes les condi- ons constantes pendant la longue durée des expé- riences, n'ont pas permis d'obtenir des résultats très concordants, d'où l’on puisse tirer des conclusions fermes. Toutefois, l'auteur estime que la variation de Ja chaleur spécilique de la vapeur avec la température ét la pression doit être faible. La valeur moyenne, tirée des meilleures expériences, de la chaleur spéci- fique de la vapeur surchauffée à pression constante est 0,46. — MM. E. P. Perman et J. H. Davies : La déter- minalion de la pression de vapeur par barbotage d'air. es auteurs ont montré antérieurement que la tension de vapeur de l’eau peut être déterminée très exacte- ment en faisant barboter un courant d'air à travers d'eau dans un thermostat et en déterminant la quantité d'eau évaporée par absorption dans l'acide sulfurique ‘oncentré. On à mis en doute l'exactitude de cette méthode et signalé la sursaturation de l'air comme cause d'erreur. Les auteurs ont examiné toutes les objections et montrent que ni la sursaturation, ni la “présence de poussières, ni l’électrisation de l'air n'ont d'effet appréciable sur les résultats obtenus. — MM. S. . Sheppard et C. E. K. Mees : La théorie des pro- cessus photographiques. N. Dynamique chimique du développement. Les auteurs ont étudié, par des mé- thodes microscopiques, l'augmentation d'épaisseur de la couche réduite de particules d’argent, leur dimen- sion et leur nombre, dans des conditions variables d'exposition et de développement. Pour un développe- ment constant pendant un temps court, l'épaisseur de l'image est indépendante de l'exposition. Lorsque le emps augmente, l'épaisseur s'accroit très rapidement d'abord, atteignant un maximum pour chaque exposi- ion, après quoi elle reste constante, tandis que la densité de l'argent réduit augmente toujours. Avec un long développement, l'épaisseur s'accroît quelque peu avec l'exposition, une limite naturelle étant fixée par épaisseur de la pellicule. — M. George Senter : Le rôle de la diffusion dans la catalyse du peroxyde d'hy- drogène par le platine colloïdal. Les écarts avec la for- mule logarithmique simple, dans la décomposition atalytique du peroxyde d'hydrogène par le platine colloïdal, sont probablement dus à des troubles causés ‘par des courants de convection. Lorsque la constante de vitesse, calculée d'après l'hypothèse de diffusion de Nernst, est grande comparée à la constante de vitesse chimique, une augmentation de convection ne peut produire aucun effet appréciable sur la vitesse de réac- tion observée. Dans le cas considéré, puisqu'un accrois- ement de convection modifie la vitesse de réaction observée, il doit y avoir quelque erreur dans l'hypo- thèse qui amène à la conclusion que la constante de la vitesse de diffusion est grande en comparaison avec la onstante de vitesse chimique. Cette erreur s'explique probablement par l'hypothèse que toute la surface du platine est, dans les conditions ordinaires, active vis-à- is du peroxyde d'hydrogène. On ne peut pas établir, d'après les considérations précédentes, que l'hypothèse de Nernst soit exacte pour la catalyse du platine, mais seulement que la vitesse de diffusion n'est pas grande en comparaison avec la vitesse chimique. D'autres con- Sidérations, cependant, telles que la faible valeur du efficient de température, rendent probable que l'hy- pothèse ci-dessus s'applique à cette action particulière. Une autre preuve en faveur de cette idée peut être trouvée dans le fait que les écarts de la loi logarith- mique simple dans la catalyse par le platine ont leur analogie exacte dans la catalyse par l'hémase. D’après ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 623 l'hypothèse de la vitesse « chimique », il paraitrait remarquable que deux catalyseurs d'origine si diffé rente se comportent exactement de même manière; mais, avec l'hypothèse de Nerpst, cela devient de suite compréhensible, l'action chimique jouant un rôle tout à fait secondaire dans les vitesses de réaction en ques- tion. — M. E. P. Perman : La synthèse directe lammontac : {° Pour autant qu'on peut le constater par une des réäclions chimiques les plus délicates, l'ammoniac ne peut pas être synthétisé par la ch2- leur (sauf dans des condilions spéciales indiquées ci-dessous). La décomposilion de l'ammoniac par la chaleur peut donc être considérée comme étant une réaction irréversible; 2° L'aminoniac peut êlre syn- thétisé en petites quantités au moyen de ses éléments constituants : 4) par chauffage avec beaucoup de mé- taux; D) par explosion avec de l'oxygène: «) en étant soumis à l’étincelle. Ce sont des réactions reversibles ; 3° Il semble que la synthèse de l'ammoniac ne s'effectue que lorsque les gaz sont ionisés, l'ionisation étant produite par l'étincelle ou par la haute tempéra- ture d'une explosion d'hydrogène et d'oxygène. On empèche la décomposition immédiate de l'ammoniac formé en le relroidissant subitement. Les métaux en présence de l'humidité produisent aussi de l'hydrogène à l'état naissant ionisé; 4° Il ne semble pas que les azolures métalliques forment un élat intermédiaire dans la formation de Fammoniac, car on à trouvé que les métaux qui forment rapidement des azotures (par exemple le magnésium) ne produisent pas plus d'ammoniac que les autres; 5° Il y à une étroite analogie entre l'ozone et l’ammoniae en ce qui regarde leur synthèse et leur décomposition : tous les deux sont formés par l'étincelle et tous les deux sont complétement décomposés par la chaleur. Scance du 6 Avril 1905. M. A. B. Macallum présente ses recherches sur /a nalure de la réaction de l'argent dans les tissus animaux el végétaux. Il en résulte que la réaction que les tissus animaux et végétaux donnent avec le nitrate d'argent dissous dans l'acide nitrique dilué doit être attribuée aux halogènes sous forme haloïde, puis à la taurine et à la créatine, mais que les protéides et la gélatine, dé- barrassés des traces d'haloïdes, ne donnent pas la moindre réaction colorée avec celle substance. Des deux composés organiques qui donnent la réaction colorée, la taurine peut être négligée, car elle ne se trouve qu'en quantité infinitésimale dans les Lissus ani- maux; la créatine, quoique présente dans la propor- tion de 0,21 à 0,39 ©, dans le muscle de grenouille, et de 0,4 °/, dans le musele de lapin, n'apparait qu'en quantité inappréciable dans les autres organes, el est absente de tous les tissus d'Invertébrés. On peut done, en choisissant d'une facon appropriée les tissus des formes animales et végétales pour le traitement avec le réactif, déterminer avec une grande certitude et une grande exactitude la distribution des chlorures et peut-être aussi d'autres haloïdes dans les divers élé- ments cytologiques. Les résultats de cette détermina- tion formeront le sujet d'un prochain mémoire; mais, dès maintenant, on peut affirmer que les matières et structures intercellulaires, y compris la substance- ciment de von Recklinghausen, sont riches en chlo- rures, et que les noyaux normaux des cellules animales et végétales en sont absolument dépourvus. — M. J. A. Craw : Sur la chimie physique de la réaction toxine- antiloxine. Noici sommairement les conclusions de l'auteur : 4° La lysine de Mégathérium passe à travers un filtre de gélatine et est diffusible à travers la géla- tine; 2 L'antilysine de Mégathérium ne passe pas à travers un filtre de gélatine et n'est pas diffusible d'une facon appréciable à travers la gélatine; 3° La filtration et la diffusion des mélanges indiquent que la lysine libre est présente dans des mélanges neutres et dans des mélanges contenant de lantilysine en excès; 4° L'antilysine libre existe dans des mélanges neutres 626 et dans des mélanges contenant de la lysine en excès: 50 La réaction est au moins partiellement reversible quand il y a un excès d'antilysine; 6° De faux équi- libres sont produits avee une plus grande facilité lorsque la lysine est en excès: 7 L'équation de neutralisation d'Arrhenius et Madsen ne peut s'appliquer pour des mélanges multiples; 8° L'enlèvement de la lysine d'une solution par lantilvsine ne peut pas être compris comme un changement purement chimique, mais est plus analogue à certains phénomènes d'absorption. — M. J. Scott : /u/luence du venin du cobra sur le méta- bolisme des protéides. Voici les conclusions de ce mémoire : 4° Pratiquement, aucun changement dans le cours du métabolisme des protéides n'est produit par l'administration du venin de cobra, malgré une réac- tion locale bien marquée; 2° On observe une légère diminution dans la proportion de l'azote uréique, tout à fait insiguifiante comparée avec celles que produisent la toxine de la diphtérie et divers médicaments; 3° Il se produit une faible augmentation dans la proportion de l'azote ammoniacal; 4° On remarque une légère élévation dans la proportion de l'azote des corps puriques; 5° L'azote dans d'autres composés ne pré- sente aucun changement constant; 6° Le P?0° excrété n'offre pas de changement constant; mais, dans deux expériences, il y à eu une légère augmentation. Le changement produit dans le métabolisme des protéides est cependant faible, et, tel qu'il est (diminution de l'élaboration de l'urée, et augmentation de proportion de l'azote excrété à l'état d'ammoniaque), il semble indiquer une faible action toxique sur le métabolisme hépatique plutôt qu'une action générale sur les chan- gements des protéides, ce qui tend à confirmer l'idée que le poison agit principalement sur le système ner- veux. — M. C. Sherrington poursuil ses recherches sur l'innervation réciproque des muscles antagonistes. — Mit E. Dale : Nouvelles expériences et recherches histologiques sur les inlumescences, avec quelques observations Sur la division nucléaire dans les tissus pathologiques. C'est le troisième mémoire traitant des intumescences,; l'auteur S'y occupe principalement de deux plantes, le Solanum tuberosum et le Populus tremula. Sur les plants de pommes de terre, on à obtenu expérimentalement des intumescences en vingt- quatre heures environ, soit sur des plantes entières et non lésées, soit sur des feuilles simples, soit sur de petites parties de feuilles. L'auteur à recherché l'effet des solutions nutritives sur la formation des intumes- cences. De plus, des observations anatomiques ont été faites, et l'on a dressé une classification des divers types d'intumescences. Les contenus de cellules ont été examinés et comparés dans le but de découvrir la substance osmotique qui produit l'accumulation d’eau initiale. Les expériences montrent que les causes internes des intumescences sont extrèmement locales et tout à fait indépendantes de la pression de la racine, La substance active osmotique est probablement l'acide oxalique. Les expériences présentes indiquent l'impor- tance de l'irritabilité et des pouvoirs actifs d'assimila- tion, ainsi que de l'air humide, de la chaleur, de la lumière et généralement de l'oxygène. Finalement, l’auteur a étudié et comparé les phénomènes nucléaires et il les a trouvés identiques en tous points dans les diverses intumescences et dans les cicatrices. Il a aussi comparé les tissus pathologiques de certaines plantes et de divers animaux, et a remarqué une forte ressem- blance entre certaines excroissances des plantes et des animaux rapidement formées, produites non par un organisme parasite, mais simplement par l'influence d'un stimulus probablement toujours externe, agissant sur une plante où un animal qui se trouve dans une condition d'irritabilité telle qu'il est capable de réagir. Une ressemblance identique s'observe entre les tissus lésés régénérés de certaines plantes et de certains ani- maux, dont la formation est, dans tous les cas, accom- pagnée exclusivement par la forme la plus rapide de la division nucléaire, c'est-à-dire la forme amitotique ou ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES directe. — M. E.-S. Salmon : Sur une adaptatio cndophytique présentée par l'Erysiphe Graminis D. Os daus certaines conditions de culture. Dans de récents mémoires, l'auteur a indiqué que certaines espèce d'Erysiphaceæ sont capables, dans certaines condi tions de culture, d'infecter sérieusement leur plantes hôtes, lorsqu'on sème leurs conidies ou ascopores suk les cellules des tissus internes découverts par suite d'une lésion, quoique les champignons en question» soient normalement confinés à la surface externe des cellules épidermiques. L'auteur déduit des présente recherches que l£. Graminis n'est pas, comme on à pu le supposer, assez fortement spécialisé comme ecto parasite pour ètre nécessairement restreint pour Sän nourriture aux cellules de l'épiderme, mais qu'il s@ montre capable d'une adaptation immédiate à des con= ditions ressemblant étroitement à celles de l'endophy= tisme. Ce fait suggère la possibilité que, dans certaines circonstances, les hyphes mycéliens des espèce d'Erysiphaceæ, qui sont normalement ectoparasitess pénètrent dans les tissus internes de leurs plantess hôtes découverts par des lésions causées par les attaques d'animaux ou par un agent physique. L'aus teur fait remarquer; cependant, que l'entrée de l'hyphes peut ètre empèchée, soit en desséchant les couches superficielles des cellules, soit par les procédés de. défense que présentent beaucoup de feuilles poussant, d'une façon active. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 17 Maj 4905. MM. J. W. Brühl et H. Schrœder établissent, par des mesures physico-chimiques, que les acétoacétates d'éthyle primaires et leurs dérivés de substitution alky= liques secondaires et tertiaires, ainsi que les étherss camphocarboxyliques et leurs dérivés alkylés, quoiqtl liquides, possèdent une structure cétonique uniforme pure et ne contiennent aucune trace de tautomèr énolique. — M. W,. J. Sell, en chlorant le chloriyes drate de 2-méthylpyridine saturé de HCI, a obtenu un corps C‘HCI°Az, qui est transformé par chauffage avec. H?S0: à S0°/, en un acide trichloropicolique, lequel chauffé avec le glycérol, donne une trichloropyridinem symétrique, F. 720-730. — M. W. N. Hartley à examinés le spectre d'absorption de l'acide urique, de la murexide et des uréides; ces corps se divisent en deux groupes, suivant qu'ils présentent une bande d'absorp= Lion ou non. L'existence de cette bande parait liée à l'oceupation de la 8° position dans l'anneau purique pan O ou OR. — Le mème auteur montre que l'existence d’une substance colorée est liée à la présence, dan deux parties de la molécule, de groupements éthylé niques ou benzénoïdes et de groupements cétoniquesf les premiers sont endothermiques, les seconds exo thermiques. — M. H. J. H. Fenton résume ses rechers ches sur l'acide dihydroxymaléique. — MM. K. J. P: Orton, J. E. Coates et F. Burdett ont constaté de nouveau que les solutions aqueuses des sels de s-tri bromobenzène-diazonium, exposées au soleil, sont dé= composées rapidement en s-tribromophénol et azotes En solutions alcooliques, la décomposition est égales ment accélérée par la lumière. — MM. Al. Findlay el F. C. Short ont répété les expériences de Pickerin sur la facon dont se comportent les solutions d’alcook propylique vis-à-vis des membranes semi-perméables Dans un vase poreux plongé dans l'eau pure ou l'alcool propylique pur, le niveau s'abaisse toujours; avec un@ membrane de ferrocyanure de cuivre, il y a élévation quand le pot est plongé dans l'eau et abaissemenb quand il est plongé dans l'alcool pur. — MM. W. A# Bone et H. L. Smith ont constaté qu'entre 4009 et 11250 la formaldéhyde se décompose rapidement em CO et H?; à 400°, l'acétaldéhyde se décompose en CH® et CO, mais à 6000 il y a séparation de carbone. MM. D. L. Chapman et A. Holt jun. ont fait la syn “hèse de la formaldéhyde en maintenant un fil de pla- tine à haute température dans les mélanges ane CO et H ; CO,H et vapeur; CO et vapeur ; CO? et H. M. M. Chikashigé a préparé trois nouveaux perchlo- tes oxymercuriques Ollg*(CI0*)#.12H°0, le même sel mhydre et O*Hg*(CI0#). — M. H. A. D. Jowett étudie des rapports de la pilocarpine à l'isopilocarpine et “montre que ces deux aicaloiïdes sont certainement sté- éoisomères ; ils sont représentés par la formule : CH5.CH.CH.CIP.C.Az (CH) | Dee Il >CH 4 CO CH CH — A7” ! NÉ 0 où deux atomes de C sont asymétriques. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CIHMIQUES DE LONDRES Séance du 1% Mar 1905. M. C. Otsuki à étudié l'action du peroxyde d'hydro- gène sur une plaque photographique à l'obscurité. Si on admet comme caractéristique d'une radiation la propagation en ligne droite et la pénétration à travers ës métaux, l'action de H°0? sur une plaque photogra- “phique ne peut pas être considérée comme due à une pidiation de cette substance. L'action de H£0? se fait entr à travers la gélatine, le celluloïd, le papier, les léommes douces, le baume de Canada; l'ébonite, le verre, les métaux, la parafline l'arrêtent. La réaction te H20? et le gélatino-bromure d'argent dépend de température. Cette grande sensibilité à la ERA re produit le phénomène appelé « effet au bord » Quand les températures de la solution de peroxyde ei de la couche de gélatino-bromure sont constantes et vales, cet effet ne se produit pas. L'effet photogra- phique augmente avec la durée d'exposition. L'effet de L po" sur la plaque est dù à une transformation du bro- pmure d'argent de la couche sensible, probablement en puni sous-bromure, qui est facilement réduit par le déve- Moppateur. — Le même auteur à déterminé l'influence de la durée du développement sur le degré de noircis- ment de la plaque photographique. Dans l'intervalle s expositions normales, le rapport des densités de la aque pour deux durées du dév HARemens est cons- nt et indépendant de l'exposition. la densité, pour une exposition constante, est proportionnelle à une rlaine puissance de la durée du développement. — M. Ph. Schidrowitz el F. Kaye poursuivent leurs cherches sur la composition chimique des whiskys. AIS ont trouvé une grande variation dans les consti- tuants, non seulement entre différentes classes, mais ncore dans une même classe. La maturation, en tout as pour les eaux-de-vie de grains, produit une aug- nation des acides volatils et non volatils, et de ibles différences pour les éthers, les alcools supérieurs le furfural; les aldéhydes ne varient pas. SECTION DE MANCHESTER Séance du 5 Mai 1905. M. R. S. Hutton résume les récents progrès de électro-métallurgie du fer et de l'acier (procédés Kel- x, Stassano, Héroult et Kjellin). La Zevue reviendra ochainement avec détails sur cette importante ques- , SECTION SECTION DE NEW-YORK Seance du 24 Mars 1905. M. W. L. Case éludie le gaz comme source de force Motrice et en particulier la production du gaz de gazo- ène, du gaz Mond et du gaz de haut-fourneau. D'une çon générale, une machine bien construite con- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 627 sommera environ 80 pieds cubes de gaz de gazogène par cheval-heure; les pertes sont très faibles avec un bon gazogène, Pour des installations ordinaires, le gaz Mond donne des résultats à peu près analogues ; mais, pour de grandes stations centrales, il est plus ! avantageux, les dépenses étant réduites de la valeur du ! sulfate d'ammonium récupéré. La production de gaz combustible d'un haut-fourneau moderne correspond à environ 600 chevaux-heure par tonne de fer pro- | duite. — M. ©. Nagel‘décrit la production et lutili- | sation du gaz de gazogène à succion. L'anthracite, le | charbon de bois et le coke peuvent être également uti- lisés pour la production de ce gaz, qui peut être employé dans les moteurs. à gaz d'éclairage ordinaire avec quelques légères modifications seulement : augmen- | tation de la compression et du rapport du gaz à l'air. | — M. C. G. Atwater étudie le gaz des fours à coke, produit de la distillation du charbon bitumineux en l'absence d'air. Il est riche en méthane et en hydro- gène. De bonnes machines produisent le cheval-heure avec une consommation de 27 pieds cubes de ce gaz. — M. J. D. Pennock communique ses observations sur des gazogènes Mond,en fonctionnement aux Etats- Unis, sur la composilion et la valeur calorifique du gaz produit. | SECTION DE SYDNEY Séance du 12 Avril 1905. M. T. Steel décrit un appareil pour le chauffage des solutions par la vapeur. Pour les solutions non saturées, la température atteinte est légèrement inférieure à celle qu'on obtient par ébullition sur une flamme; la diffé- rence dépend, d'ailleurs, de la concentration; il en est généralement de mème pour les solutions saturées. L'’explication de ce fait doit être cherchée dans la dilu- tion de la solution par condensation d'un peu de ya- peur, dilution qui abaisse le point d'ébullition. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Avril 1905. M.E. Warburg présente un Mémoire sur la réflexion Séance du 27 des DAS cathodiques par les lames métalliques minces, Mémoire basé sur les expériences de | M. F. Williams. La réflexion des rayons cathodiques, ces expériences permettent de l'affirmer, se produit sur une feuille métallique mince aussi bien que sur une plaque épaisse du même métal, tant que la vitesse ou le potentiel des rayons qui la frappent reste au-dessous d'une certaine valeur, que l’auteur appelle « valeur critique » du potentiel. Lorsque le potentiel de ces rayons dépasse la valeur critique, la réflexion diminue, dans le spectre des rayons réfléchis, d'abord pour les rayons plus fortement déviés, progressant pour des potentiels croissants vers les rayons moins fortement réfractés. La valeur critique dépend de l'épaisseur et | de la nature de la feuille mince, étant, dans le cas de | l'aluminium, de 11.000, 16.500 et de 21.800 volts res- Bee tivement, pour des épaisseurs de 0,53 y, 1,09 gel 2,44 y. Ces résultats concordent, en général, avec les notions que M. Warburg s'était formées du mouvement des électrons dans les corps pondérables. — M. Schotiky communique une notice de M. H. Jung, à Marbourg, sur les fonctions theta générales à 4 variables. Le pro- blème est résolu en considérant une classe spéciale de fonctions d'Abel à 7 variables, fonctions représentées d'une facon rationnelle par des fonctions theta à 4 el à 3 variables. L'auteur établit les expressions algé- briques des valeurs par lesquelles passent les quo- tients tLeta lorsqu'on substitue pour chaque argument une intégrale à limites supérieure et inférieure définies. Séance du # Mai 1905. M. Warburg présente un Mémoire sur l’ozonisation de l'oxygène due aux décharges par pointes. L'auteur . fait remarquer que le rendement en grammes d'ozone 628 par coulomb se trouve en rapports intimes avec l'état de l’aigrette émanant de la pointe, tant il est vrai que les modifications, même microscopiques, de cette der- nière suftisent à porter le rendement par des pointes négatives à des valeurs deux fois et demi plus grandes. Ce rendement, qu'on augmente en accroissant la pres- sion, n'est que peu modifié par des accroissements de la température allant jusqu'à 80°, si la densité est maintenue constante par un accroissement simultané de la pression. Dans le cas de l’ozonisation par une décharge émanant d'une pointe métallique, le rende- ment technique maximum est réalisé au moyen de courants continus; il est de 20 grammes d'ozone par cheval-heure pour une pointe positive à aigrette posi- tive. — M. O. Kalischer a étudié le cerveau des per- roquets au double point de vue anatomique et physio- logique. Il expose d’abord en détail l'anatomie de ce cerveau, y compris l'allure des fibres et les détails de structure, en rectiliant surtout la description de l'hé- misphère encéphalique. Ses recherches physiologiques font voir l'influence de l'encéphale sur la vision, le langage, le mouvement, la sensation, la nutrition et l'orientation. L'auteur essaie enfin de localiser ces dif- férentes fonctions. ALFRED (1RADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 11 Mai 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Al. Wilkens pré- sente ses recherches sur une nouvelle classe de solutions périodiques du problème des trois corps. Cette nouvelle classe de trajectoires fermées est une généralisation de la classe spéciale de solutions symétriques bien connue depuis la découverte de Poincaré en 1889. 20 SciENCES PHYSIQUES. — M. J. M. Pernter fait la théorie de l'arc-en-ciel produit par une source lumi- neuse en forme de cercle. Il montre qu'en conservant l'intégrale d'Airy pour représenter l'intensité de larc- en-ciel, on ne peut étendre la sommation qu'à un - diamètre du Soleil et non pas au disque entier, — M. R. Nimführ décrit une nouvelle méthode pour fixer les indications des météorographes des ballons enre- gistreurs et un dispositif pour l'arrêt automatique des styles enregistreurs à l'atterrissage. La première mé- thode consiste à employer un papier sensible recouvert de noir de fumée; à l'endroit où le style enlève le noir, 1: papier est impressionné. Après la fin de l'enregistre- ment, on enlève soigneusement tout le noir de fumée, en vire et fixe le papier sensible et on obtient la courbe du phénomène en lignes hrun-noir sur fond blanc. — M. J. Hann a étudié la variation diurne de la tempé- rature dans la zone interne des tropiques, d’après un grand nombre d'observations faites en divers pays. Il y à une remarquable concordance des temps de phase des ondes diurnes et semi-diurnes, dont les amplitudes sont dans un rapport presque constant, la seconde étant à peu près les 3/10 de la première. — M. F. Age- rer à déterminé la rotation magnétique du plan de polarisation de la lumière dans les solutions sulines aqueuses. Dans les solutions de NaCl, Nal et KI, une diminution de la teneur en sel produit une augmentation de la rotation magnétique spécitique; pour Cdi®, c'est le contraire; pour KCI et Na*S0', on n'a constaté aucun changement. La constante magnéto- optique absolue de l’eau à 18° est de 0,01309. — M. H. Graziadei a constaté que l'enlèvement de la couche d'oxyde influe sur les propriétés magnétiques des feuilles de fer, de nickel et de cobalt : la perte par hystérèse diminue pour les forces de champ maximal inférieures; l'intensité de magnétisation subit aussi une diminution, ainsi que le magnétisme rémanent; enfin, la force cocrcitive diminue dans les champs infé- rieurs et augmente dans les champs supérieurs. — M. J. Dinkhauser a déterminé le pouvoir de rifrac- tion moléculaire des sels en solution aqueuse et l’a comparé aux valeurs calculées par la formule de Glad- stone en » et la formule de Lorentz en n°. En général, ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES a étudié l'influence d'une haute température et de lex les différences sont plus faibles pour la formule en »® que pour la formule en », les iodures et le sucre faisant. | toutefois exception. — M. J. Radakovits a étudié l'ionisation produite dans l'air rarélié ou à la pression | atmosphérique par des fils fins de Pt, Ir, Os, Ta et OM portés électriquement à l'incandescence. Si 1 est l'in tensité du courant qui produit l'incandescence, Ja vitesse de décharge est représentée par la formulé AcBi, où A et B sont des constantes. — M. V. Juch, en! oxydant à froid l'acide oxysalicylique en solution dans H?S0: concentré, a obtenu un produit cristallisé C'H°0s donnant un sel de potasse et un produit diacétylé. Pa distillation avec la poudre de zinc, il se forme un hydrocarbure qui a la composition et les propriétés du phénanthrène. — M. S. Weisl, par action de l'acide phénylacétique sur le phénol en présence de ZnCEË, & obtenu la p-oxydésoxybenzoïne, F. 142°, Elle donne par dédoublement avec KOH, du toluène et de l'acide p-oxybenzoïque ; paroxydation, du p-oxybenzile, F. 17505 par réduction, un corps C*H°70%, F. 1659, Par conden sation de l'acide phénylacétique avec le phénol en pré sence de P°05, on obtient du phénylacétate de phényle F. 35°, isomère avec la p-désoxybenzoïne, — M. Edm- Blau, par action de l'acide phénylacétique sur l’o-crésol en présence de ZuCP, a obtenu la m-méthyl-p-oxydé= soxybenzoïne, F. 1529, Elle donne : par dédoublement: avec KOH, du toluène et de l'acide p-oxy-m-toluylique; par oxydation, du m-méthyl-p-oxybenzile, F. 1829. Dé la mème facon, on prépare un produit de conden- sation avec le m-crésol. — M. F. Finzi, par action de l'acide phénylacétique sur la résorcine en pré sence de ZnCP, a obtenu la 1-métadioxydésoxyben zoine, F.11%°, donnant par oxydation le {-méta-dioxy= benzile, F.239°. De la même facon, la pyrocatéchine conduit à la 1-p-dioxydésoxybenzoïne, F. 173, & l'hydroquinone à l’o-m-dioxydésoxybenzoïne, EF. 170% — MM. P. Gelmo et W. Suida montrent que, dans l@ traitement par les acides et le mordançage par les sels, la laine de mouton subit des modifications essentielles, consistant dans un processus d'hydralation continu une libération des groupes chimiques actifs de la fibres Les produits de dédoublement qui en résultent sont nuisibles à la solidité de la teinture, car ils sont ca. pables de fixer les colorants en formant des précipités. peu solubles qui souillent mécaniquement les fibres Le traitement préparatoire de la laine de mouton par l'alcool et un peu d'acide sulfurique permet une (ein: ture solide des fibres ainsi traitées par les colorants acides. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. P. Th. Muller (de Graz) position aux rayons Rüntgen sur la production des anti corps. Elle’est à peu près nulle; à peine les rayons dè Rôntgen produisent-ils une légère augmentation des agglutinines. — M. F. Siebenrock présente ses rechet= ches sur les caïmans à lunettes du Brésil: C. latiros= tris, CG. sclerops et C. Niger. Ce genre est caractérisé par une paupière supérieure ossiliée seulement en paë tie, la présence de fosses supratemporales et l'existence de 17 à 20 dents sur le maxillaire inférieur des deux côtés. — M. G. Kraskovits : Etude des phénomènes de division de la cellule chez l'Oedogonium.— M. C. Diener a étudié la faune triasique supérieure, riche en Ame monites, du Calcaire à Tropites de Byans (Himalaya) Cet horizon paraît un équivalent homotaxique de l'étage inférieur supracarnien et infranorien du Trias supé rieur. — M. F. Becke poursuit ses recherches sed giques sur le côté nord du tunnel de Tauern. — M. von John à délerminé la composition chimique de quelques eaux ayant jailli dans le tunnel de Karawane ken. Trois d'entre elles, provenant du Carbonifère sus périeur, contenaient CO*. La plupart renfermaient du sel de Glauber. Louis BRUNET. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, {, rue Cassette. 46° ANNÉE N° 44 30 JUILLET 1905 Revue générale L 4 - DIRECTEUR : $ 1. — Distinctions scientifiques — Election à l’Académie des Sciences de Paris. — Dans sa séance du 3 juillet, l'Académie a “procédé à l'élection d'un membre dans sa Section de “Physique, en remplacement du regretté Alfred Potier. Elle a élu, au premier tour de scrutin, M. Curie, par 29 voix sur 51 votants, rendant ainsi l'hommage le plus utorisé aux splendides travaux de ce savant. — L'œuvre de M. Curie est trop connue pour qu'il soit utile de la rappeler. Sa gloire est aujourd'hui univer- F selle et ne laisse plus de place à l'éloge. HO: $ 2. — Nécrologie Le docteur Henri Parinaud. — Henri Pari- naud naquit le 1° mai 1844, à Bellac (Haute-Vienne), de parents occupant une situation des plus modestes. ar un labeur incessant et grâce à des qualités de sement de premier ordre, il dota l'Optique physiolo- “cique et l'Ophtalmologie de conceptions nouvelles et originales et de constatations importantes. — Après une instruction préparatoire presque exclusi- vement autodidactique, Parinaud étudia la Médecine à Limoges et à Paris. Attaché en 1870 à la première ambulance de la Croix-Rouge, il rend des services qui ui valent d'être décoré sur le champ de bataille à l'âge le vingt-six ans. , D'une constitution délicate et maladive, mais doué dune énergie tenace et d’un stoicisme à toute épreuve, arinaud fournit un travail capital dans sa thèse de octorat intitulée : Ætude sur la névrite optique dans “la méningite aiguë de l'enfance (1877). Les vues nou- elles et personnelles exposées dans ce travail sont aujourd'hui généralement acceptées en Ophtalmologie t en Neuropathologie et les faits d'observation les “confirment de jour en jour davantage. Elles ont été omplétées par deux travaux ultérieurs, parus vingt ns plus tard [Contributions à l'étude de la névrite démateuse d'origine intra-cranienne (4895); La névrite optique rétrobulbaire et les voies d'infection du sys- tème nerveux (1896,]. , La production de Parinaud, depuis 1877 jusqu'à sa ort, est vraiment extraordinaire. Ses recherches ont REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Aérien ces pures el appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et ia Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE pour objet presque tous les domaines de l'Ophtalmo- logie. Parmi ses nombreux travaux, il convient de signaler tout d’abord l'ensemble de ses recherches sur les troubles oculaires dans les affections nerveuses. Sa monographie intitulée : Les troubles oculaires de la selé- rose en plaques contribue beaucoup à délimiter cette entité morbide et à la séparer de syndromes simi- laires d'aspect, différents d'essence. Elle est suivie de près de sa publication sur La paralysie des mouvements associés des yeux. Les observations réunies dans ces deux travaux lui fournissent les bases de sa conception des mouvements associés et de l’innervation motrice particulière de la vision binoculaire. Rejetant de pro- pos délibéré les conceptions et fictions géométriques concernant la vision binoculaire, portées à leur apo- gée par Helmholtz, il replace cet acte sur son vrai terrain, le terrain physiologique. Il montre que la con- vergence-divergence constitue la partie fondamentale des fonctions motrices de la vision binoculaire; cette fonction est un réflexe, dont la partie sensorielle est représentée par les rétines et leurs points correspon- dants. Le strabisme est constitué par un trouble de la fonction convergence-divergence, associé primitivement ou secondairement à un désordre sensoriel. Parinaud a développé ces conceptions dans un cer- tain nombre de Mémoires. Elles sont exposées dans leurensemble dans son livre intitulé Le strabisme (1899), ainsi que dans son apport sur le traitement du stra- bisme (1893). Les idées exprimées dans ces deux tra- vaux rencontrèrent une résistance assez vive au mo- ment où elles furent émises pour la première fois. Elles sont aujourd'hui classiques. Après avoir publié en 1880 un travail intitulé : De l'héméralopie dans les affections du foie et de la nature de la cécité nocturne, il établit, par des expériences physiologiques patiemment poursuivies, « qu'ily a deux espèces de sensibilité oculaire pour la lumière. La première nous donne une sensation lumineuse diffuse, indépendante de toute perception de couleur et de forme : c'est la sensation de clarté. Elle est l’attribut des bâtonnets et du pourpre visuel. La seconde, qui est l'attribut des cônes, nous donne des sensations lumi- neuses définies, qui concourent à la perception des | objets, laquelle repose eSsentiellement sur la propriété 14 630 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE se ces éléments de recevoir les impressions lumineuses géométriquement distinctes et de transmettre au sen- dorium des différences très délicates d'intensité lumi- neuse et chromatique » (Académie des Sciences, 1° avril 1881). A la suite de ses travaux, Parinaud établit les diffé- rences que présente l'adaptation rétinienne pour les différentes parties du spectre visible. Il attribue aux bâtonnets et au pourpre le rôle d'éléments adapteurs. Nous ne suivrons pas ici Parinaud dans son œuvre clinique. Son nom reste attaché à plus d’une affection découverte et décrite par lui. Cet homme apporta la clarté aussi bien dans les phénomènes déconcertants de l'œil hystérique que dans la complexité apparente des conjonctivites. Il fut de plus un homme de grand cœur. Tombé malade en pleine activité scientifique et professionnelle au commencement de l’année 1905, il ne devait plus se relever. $ 3. — Génie civil L’exploitation des mines aux grandes pro- fondeurs. — Dans une récente séance de la Société d'Encouragement pour l'Industrie nationale, M. G. Ri- chard a mis en lumière les difficultés de plus en plus graves que présente l'exploitation des mines aux grandes profondeurs; l'attention des intéressés est actuellement attirée d’une facon toute spéciale sur ces difficultés par les projets d'exploitation des couches de houille de la Campine et du bassin de Limbourg, qu'il faudra rejoindre, au travers de morts terrains aqueux et difficiles, à des profondeurs voisines du kilomètre. Il faudra, pour ces exploitations, dont les travaux seront très importants, creuser des puits très coûteux et ins- taller un aérage très puissant, non seulement en raison de l'étendue des travaux, mais aussi de la température élevée de ces grandes profondeurs, température pro- venant non seulement du degré géothermique ordinaire de 20 à 30 mètres, qui amène aux environs de 45° la température à la profondeur de 1.000 mètres, mais aussi de la présence probable de sources d’eau chaude. On estime qu'il faudra, dans ces conditions, compter sur un débit d'air d'au moins 100 mètres cubes par seconde. Le prix très élevé de ces puits à grandes profondeurs fait que l’on doit s’efforcer d'en diminuer le plus pos- sible le nombre et notamment chercher à utiliser pour l'extraction les puits d'entrée d'air de l’aérage. Cette utilisation n’est pas nouvelle, mais il s’agit ici de conditions exceptionnelles, pour lesquelles il faudra employer des solutions radicales, ne compromettant en rien le fonctionnement de l'aérage, tout en laissant à l'activité de l'extraction toute son intensité, comme s'il ne se faisait aucun aérage par le puits même de sortie des matières. Parmi les solutions envisagées dans ce but, celle de M. Bentrop, directeur des charbonnages de Neumühl, consiste à enfermer toute l'installation de l'extraction proprement dite (celle de la recette et celle du triage du charbon) dans un grand bâtiment étanche à l'air et construit au-dessus du puits d'entrée de l'air dans la: mine. Les opérations de l'extraction se passent alors, dans ce bâtiment, comme en plein air libre; les bennes et leur charbon y arrivent et s'y recueillent sans dif- ficulté, et il ne s’agit plus que de faire sortir le charbon de cet immense sas à air sans y provoquer des rentrées d’air notables. A Neumühl, le bâtiment ainsi maintenu sous la dépression de l'aspiration d’aérage-occupe une surface d'environ 750 mètres carrés; il est construit, jusqu’à l'arrivée ou recette supérieure des bennes de la mine, en maconnerie de 0,50 d'épaisseur, et, au-dessus, en une charpente métallique avec remplissage en macon- nerie de 0,25 d'épaisseur ; les parois sont recouvertes, à l’intérieur, d'un enduit au ciment de 40 millimètres; la toiture est en béton armé de 120 millimètres d'épais- seur. La partie du chevalet d'extraction qui traverse le toit, ou l’avant-carré, est enveloppée, jusqu'au-dessous" des molettes, d’une gaine de tôles étanches, se termi nant par une cloison percée de quatre petites fentes, pour le passage des câbles; et, pour ne pas transmettre ses vibrations au reste du bâtiment, cet avant-carré er est isolé, et son passage au travers du toit rend étanche par une tôle rivée à l'enveloppe de l'avant carré, l'entourant et plongeant dans une rigole rempliem de sable fixée au toit du bâtiment. Les fenêtres sont en verre armé. La surface soumise ainsi à la dépression est d'environ 3.250 mètres carrés, et, néanmoins, au essais, avec un ventilateur aspirant 100 mètres cuess par seconde, sous une dépression de 120 millimètres d'eau, la perte par entrées d’air n’a été que 2,25 °/,, ce qui correspond à un orifice équivalent de rentrée d'air de 0%?,077, c'est-à-dire très petit. C'est qu'en effet, en outre des dispositions prises pour assurer l'étanchéité même du bâtiment, M. Ben trop a eu recours à des artifices très ingénieux pour assurer celle, plus difficile, des sorties du charbon de ce bâtiment. Les moyens imaginés par M. Bentrop à cet effet sont nombreux, mais peuvent se ramener à quelques {ypes« connus sans doute en principe, mais dont l'application: nouvelle est des plus remarquables. C’est ainsi que l’on peut faire basculer les wagonnets sur un plan incliné« disposé dans le bâtiment, et qui débouche à l'extérieur dans l’eau d'un grand joint hydraulique, au fond duquel le charbon est repris par un élévateur à godets: ou encore faire basculer ces wagonnets dans un sas à double fermeture, une porte supérieure l'isolant du bâtiment, pendant que la porte inférieure s'ouvre Lo laisser le sas se vider à l'extérieur; et ce sas peut êtres pour les très grands débits, remplacé par un tambour tournant à l’intérieur d'un autre tambour fixe, à deux orifices communiquant l’un avec le bâtiment et l'autre« avec l'extérieur. Le tambour tournant porte des cloi= sons radiales à frottement étanche sur le tambour exté-n rieur, qui constituent ainsi une série de trémies triangulaires, que leur rotation amène successivement au-dessous du plan incliné qui leur apporte le charbon du bâtiment, puis au-dessus de l’orifice de sortie du tambour fixe par où le charbon se déverse à l'extérieur sur une chaine à godets. Bien d’autres dispositifs ont été proposés par M. Bentrop; on pourra, pour les étudier, se reporter à un Mémoire de M. Schneider, auquel nous empruntons ces renseignements ainsi que les conclusions suivantes : « Les avantages sont assez considérables : 4° Le puits est absolument dégagé et aussi accessible que n'importe quel puits d'extraction; l’espace et l& lumière ne manquent pas ; 20 L'usure du càble est bien moindre qu'avec les clapets Briart: le câble traverse, en effet, la cloison: séparatrice très près des molettes, à un endroit où les ballottement est presque nul; | 3° La manœuvre des portes est complètement sup= primée ; d'où économie de main-d'œuvre etnombreuse pertes d'air évitées ; 4 4° Les appareils sont tous très simples, et leur fonez tionnement est ou bien indépendant des ouvriers, ou bien le même que ceux des appareils (culbuteursÿ balances, ete.) qu'on emploie dans le cas de l'extraction par les puits d'entrée d’air; 5° La recette est à l'abri des gelées et autres intem= péries dont les puits d'entrée d'air ont à souffrir; 6° Les pertes par rentrée d'air sont très faibles, comme on l’a vu précédemment (2,25 °/,). Cette faible perte s'explique par l'absence de portes; il n'y a, em effet, que deux petits sas à portes, l’un pour le passage du personnel, l’autre pour l'introduction des matériaux tels que bois, etc.; or, le passage n’y est pas fréquent Pendant l'extraction, on ne se sert pas de ces sas, ef les seules pertes proviennent des appareils. Or, ceux-ei 1 Revue universelle des Mines ct de la Métallurgie. avril 1905. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 631 :sont disposés de facon que l’obturation soit continue; Jeur étanchéité est très satisfaisante et, dans le cas où “elle laisserait à désirer dans un appareil quelconque, il “st toujours facile d'y remédier en renouvelant les bandes de cuir obturatrices ou les bourrages. Les inconvénients sont, d'autre part, les suivants : 1° Un très grand inconvénient, c'est que, le contenu “de tous les wagonnets étant déversé dans un local abso- Jument clos, l'air de ce local se charge très fortement “de poussières, ce qui y rend le séjour nuisible et désa- gréable. Les poussières qui se déposent partout en quantités énormes augmenteront sérieusement le dan- &er, en cas d'incendie, et même pourraient être la cause “d'une explosion de poussières à l'intérieur du local; — 2° Le nombre de personnes se trouvant dans l'at- mosphère déprimée, et obligées par conséquent de res- pirer un air vicié, est exagéré inutilement; 3° Les pertes constatées jusqu'ici sont très faibles, “mais il faut remarquer que l'installation est toute récente. Il conviendra de voir ce qu'elles seront dans uelques années ; il est probable qu'à la longue, il sera ès difficile de maintenir étanches d'aussi énormes urfaces, surtout quand le bâtiment commencera à se “ressentir des mouvements du sol. » Il On voit que, malgré son ingéniosité et son succès actuel, le système de M. Bentrop ne réalise pas la per- “ection ; aussi en cherche-t-on déjà d’autres, parmi les- quels il faut signaler tout particulièrement celui de Lusine de Humboldt, également décrit dans le Mémoire Mde M. Schneider, et dont le principe consiste à ne ren- fermer, dans le bâtiment étanche de M. Bentrop, que recette du charbon, en passant de la recette au iage par un grand sas, pourvu d'appareils mécaniques ès ingénieux, mais assez compliqués. Ce système Monctionne depuis un an, avec succès, au charbonnage de Deutscher Kaiser, près de Neumühl, où il permet "“décluser, par dix heures, 9.600 wagonnets de 600 kilo- ammes, Soit 5.760 tonnes, avec une perte de 2,6 °/,, ais en dépression de 350 millimètres au lieu de 20 millimètres d'eau à Neumühl, ce qui réduit l’orifice “équivalent des rentrées d'air à 0?,0432, soit presque à moitié de celui de Neumühl. — Bien que le problème ne soit complètement résolu “par aucune de ces deux solutions, elles méritaient, à 4 tous égards, d'être signalées. $ 4. — Physique - Le corps humain comme source d'électri- “@ité. — M. Sommer, professeur à l’Université de k iessen, vient de faire d'intéressantes observations sur un phénomène lumineux produit par le frottement de peau humaine sur les ampoules des lampes à incan- descence électrique. En saisissant l'ampoule d'une petite lampe électrique, il observa une nuit que, toutes les fois que sa main ouchait l’ampoule, cette dernière présentait une lumi- losité comparable à un brouillard lumineux et qui Blairait certaines parties de l'ampoule aussi bien que 3 doigts, même avant que le courant électrique ne it fermé. Ce remarquable phénomène pouvait être produit plusieurs fois en frottant l'ampoule sur la Main. Hätons-nous de dire, toutefois, que l'expérience ne réussit point avec toutes les ampoules et que celles qui ont servi pendant quelque temps et qui présen- tent les dépôts sombres de particules de charbon bien connus risquent fort d'être en défaut. Lorsqu'au contraire c'est une lampe à incandescence nouvelle ou peu usée, ne contenant aucun conducteur métallique, quon frotte fortement sur la peau, par exemple du ‘front ou du bras inférieur, et qu'on vienne à l’éloigner subitement de la peau, cette dernière présente la lumi- mosité précitée. Si, après avoir retiré la lampe, on arrête tout d'un coup, on voit ses contours distincte- ment illuminés et, au milieu, on observe une tache billante. Lorsqu'après avoir frotté la lampe sur quelque artie du corps (le bras inférieur par exemple), on en touche une autre, par exemple la joue, cette mêm luminosité se produit, mème sans frottement, en vert du simple contact, éclairant une partie de la figure. Si l'haleine frappe une lampe ayant été frottée sur quelque partie du corps, il se produit encore une luminosité bien marquée. Les phénomènes en question seraient, suivant le Pro- fesseur Sommer, d'un caractère partiellement physio- logique, c’est-à-dire propre à l'organisme humain ou animal. Mais, comme, d'autre part, une partie de ces phénomènes peuvent être produits aussi par frottement sur d'autres substances, une loi physique générale doit les régir en partie, loi qui, dans le corps humain, se présente sous des conditions spécales, Cette luminosité est, d'ailleurs, susceptible de produire des effets pho- tographiques. $ 5. — Agronomie L'Institut international agricole. — A l’oc- casion de la fondation, par le roi d'Italie, d’un Institut international agricole, que ce souverain a doté d'une rente annuelle de 300.000 francs, un Congrès vient de se réunir à Rome. Trent-huit Puissances y étaient re- présentées, et leurs délégués viennent de recevoir le protocole régissant cette Institution, dont les disposi- tions sont là reproduction des propositions faites par la Mission francaise. D'après ce document, l'Institut international d'Agri- culture a son siège à Rome et il fonctionnera dès qu'aura eu lieu, l'an prochain, la Conférence en vue d'arrêter les détails de son fonctionnement. Le but de l’Institut est ainsi défini : 11 devra concentrer, étudier et publier dans le plus bref délai possible les renseignements statistiques, techniques ou économiques concernant la culture, les productions tant animales que végétales, le commerce des produits agricoles et les prix pratiqués sur les différents marchés ; Communiquer aux intéressés, dans lesmêmes condi- tions de rapidité, tous les renseignements dont il vient d'être parlé; Indiquer les salaires de la main-d'œuvre rurale ; Faire connaitre les nouvelles maladies des végétaux qui viendraient à paraître sur un point quelconque du globe, avec l'indication des territoires atteints, la mar- che de la maladie, et, s’il est possible, les remèdes effi- caces pour les combattre ; l Etudier les questions concernant la coopération, l'assurance et le crédit agricoles, sous toutes leurs for- mes ; rassembler et publier les informations qui pour- raient être utiles dans les différents pays à l'organisa- tion d'œuvres de éoopération, d'assurance et de crédit agricoles ; Présenter, s’il y à lieu, à l'approbation des Gouver- nements des mesures pour la protection des intérêts communs aux agriculteurs et pour l'amélioration de leur condition, après s'être préalablement entouré de tous les moyens d'information nécessaires, tels que vœux exprimés par les Congrès internationaux ou au- tres Congrès agricoles et de sciences appliquées à l'Agriculture, Sociétés agricoles, Académies, Corps sa- vants, etc. Toutes les questions qui touchent les intérêts écono- miques, la législation et l'administration d’un Etat par- ticulier devront être exclues de la compétence de l'Ins- titut. À L $ 6. — Biologie A propos des expériences de M. Burke.— On à beaucoup parlé, ces jours-ci, des expériences de M. John Butler Burke. Des informateurs un peu pressés prétendaient que le bouillon le mieux stérilisé ne résistait pas à l’action du Radium, créateur de vie, et que M. Burke, physicien du Cavendish Labo- ratory de Cambridge, était arrivé ainsi à obtenir des corps organisés. Il est inutile de dire que l'auteur 632 n'a jamais communiqué le résultat de ses expériences sous une semblable forme; mais on conçoit l'accueil que pouvait recevoir une telle nouvelle, de la part du grand public, toujours crédule. Les savants, eux, se réservent. Ils savent, par les immortelles expériences de Pasteur, incessamment renouvelées, que toutes les prétendues démonstrations que l'on a pu faire de la génération spontanée avaient pour point de départ une erreur de technique. Dès lors, la sagesse conseille d'attendre : il serait imprudent de se prononcer, dès aujourd’hui, sur la portée des expé- riences de M. Burke. Toutefois, le résultat de l'enquête effectuée auprès de quelques naturalistes anglais des plus éminents pour avoir leur sentiment a priori sur les faits obser- vés par M. Burke, — enquête que publient les revues scientifiques d'Angleterre, — intéressera sans doute nos lecteurs. Lord Avebury, biologiste distingué, formule son opi- nion comme suit : «Il est vrai de dire que les propriétés du radium sont merveilleuses, mais Je n’en dois pas moins avouer que j'aurais présumé qu'un processus donnant naissance à la Vie demandät comme con- dition primordiale un intervalle de temps considérable. Aussi, Je crois prématuré dénoncer un jugement quel- conque au sujet des observations de Burke. » M. Oliver Lodge, le célèbre physicien, adresse la réponse suivante : « Il semble qu'il s'agisse de quelque agglomérat molé- culaire compliqué, qui, comme je l'ai fait remarquer dans un article antérieur sur la Vie, se trouve proba- blement sur le chemin du développement organique. Si Jamais on trouvait le moyen de produire au laboratoire du protoplasma vivant, cela ne pourrait se faire que grâce à la formation d'agglomérats pareils, d'une incon- stance telle qu'ils se trouvent dans un état permanent d'évolution et qui, tant dans leur formation et leur mul- tiplication que dans leur décomposition, manifestent quelques rares fonctions de la matière vivante. Il s'agi- rait d'approfondir leur susceptibilité au stimulus et leur pouvoir d’assimiler d'autres matières, et l'on ne devra pas présumer que cette fonction ait été décou- verte sans la présence préalable d'un germe de vie. Tout ce qu'on peut dire, jusqu'ici, c’est que l’investigalion scientifique semble s'être aventurée dans la bonne voie, sans que toutefois l’on doive s'attendre à des résultats sensationnels dans un avenir prochain. On ne devra pas, cependant, s'étonner qu'il se produise par la suite dans les laboratoires quelque chose qu'on puisse con- sidérer comme génération spontanée de la Vie, bien que toutes les tentatives antérieures aient échoué. » M. Edward Clodd dit : « On ne saurait douter plus longtemps de l'identité fondamentale des matières inor- ganiques et organisées; aussi la Vie doit devoir son origine à la matière dite « morte». Quant aux condi- tions sous lesquelles s’est produit ce phénomène, rien ne saurait être dit ; mais le résultat d'un processus d'une longueur incalculable à été l’évolution de l'Homme, depuis les aspects de Vie les plus inférieurs et à travers une série infinie de modifications. Le fait que de tels aspects, élant nécessairement d’une structure aussi sim- ple que possible, puissent être engendrés maintenant, implique la satisfaction des conditions sous lesquelles la matière vivante peut ètre créée, à partir de la matière non-vivante. 1! y a dix ans, le Professeur Bütschli pro- duisait une matière semblable au protoplasma; les recherches ultérieures devront décider si M. Burke, dans ses expériences, à trouvé cette même substance. Le compte rendu de Burke n'a rien qui doive étonner, et, comme l'a dit Huxley, ce serait la témérité la plus grande de l'Homme que de dire que les conditions inèmes sous lesquelles la matière se revètit des qua- liés que nous disons Vie ne puissent pas être pro- duites par voie artificielle. La liaison intime et évidente entre les phénomènes de Vie et les phénomènes électriques milite bien en faveur des conclusions de M. Burke. » CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 7. — Sciences médicales La Croix-Rouge japonaise. — On sait aujour- d'hui combien le Service de santé de l’armée japonaise est admirablement organisé et avec quel succès” s'acquitte de sa mission. Ce qui est peut-être mois connu, c'est le rôle considérable joué par les noms breuses sociétés de secours qui doivent leur existence à la philanthropie et au patriotisme nippons. La plus importante de ces sociétés est celle de la Croix Rouge. Elle fut fondée en 1877 sous le nom de Ha kouaicha et rendit immédiatement d'excellents services dans la guerre civile de Kagoshima. En 1886, le Japon ayant adhéré à la Convention de Genève, elle prit 1 nom de Société japonaise de la Croix-Rouge et ne tarda pas à rivaliser avec les associations similaires existant en Europe. En 1894, lors de la guerre sino japonaise, elle soigna plus de 100.000 blessés et mas lades; et, en 1900, pendant l'insurrection des Boxers£ ses hôpitaux et ambulances reçurent 11.348 patients" dont 245 Français. (L'Angleterre, les Etats-Unis et l’Alle= magne ont leurs propres hôpitaux navals à Yokohama} Son champ d'action s'étend à toutes les calamitéss nationales dont elle peut soulager les victimes : trems blements de terre, inondations, typhons, famines; épidémies, etc. Son grand hôpital de Tokyo reçoit des! malades civils en temps de paix, et les élèves de l’école des infirmières qui y est attachée y font un apprentis= sage de deux à trois ans. En temps de guerre, il est mis à la disposition exclusive des autorités militaires” Actuellement, la Croix-Rouge japonaise dispose d’umk personnel d'environ 3.000 médecins, pharmaciens brancardiers et infirmières, presque tous utilisés sun le théâtre de la guerre et à bord de ses navires-hôp taux. Elle en possède deux, le Hakouaï-Marou et Kosaï-Marou, admirablement aménagés pour recevoi environ 300 malades chacun. Deux autres, du même type, sont en construction, et le Saïkyo-Marou et Kobé-Marou ont été affrétés pour la durée de la guerren Ces bateaux font la navette entre la Corée et le Japon où ils transportent tous les malades et blessés évas cuables et assez gravement atteints pour exiger un& hospitalisation prolongée. En outre, la Croix-Rouge japonaise dispose d'u matériel imposant de voitures, tentes, pharmacies d campagne, instruments, etc. Elle compte aujourd'hu 1 près d’un million de membres — environ 2 °/, de la. population totale du Japon — et la popularité dont: elle jouit fait honte à plus d'un de nos pays occiden taux, si fiers de leurs sentiments humanitaires et di leur civilisation. Après la Croix-Rouge, il convient de citer la Sociétés des infirmières volontaires, d'environ 5.000 membre l'Union patriotique des dames, l'Association de secour aux soldats et marins, les Elèves de l'école des pa resses, les Femmes des officiers de la marine, et& Toutes ces sociétés féminines font preuve d’un dévouë ment admirable et nous révèlent les charmantes qu lités de la femme japonaise : sa douceur infinie, bonne humeur inaltérable, son abnégation, sa patience sa modestie, qualités qui font de ces vaillantes & gracieuses créatures, femmes jusqu'au bout des ongles! des compagnes dignes de ces héros qui se prodiguentb sans compter et sacrifient joyeusement leur existenct à l'avenir du Daï Nippon. D' F. Weisgerber. $ 8. — Géographie et Colonisation Le rôle économique du chemin de f transandin. — La République Argentine et le Ch viennent de concéder une voie ferrée qui travers® les Andes, au pas de la Cumbre (3.950 mètres), un p au Sud de l'Aconcagua, la plus haute sommité de l'A rique du Sud. Ce troncon, qui réunira Puente del In@ terminus argentin, à Salto del Soldado, terminus © lien, aura une longueur de 45 kilomètres; il supprime la solution de continuité qui existait sur la grande lig + Buenos-Ayres-Valparaiso et nécessitait l’utilisation d'une route de voiture et d’un chemin muletier des lus pénibles. La dépense est évaluée à 37 millions de.francs et le contrat prévoit que la ligne sera ter- minée en 1907. Le projet comporte de nombreux ouvrages d'art, plusieurs tunnels, dont l’un, celui de Ji Cumbre, aura 2 kilomètres et demi, et se trouvera âl'altitude d'environ 3.200 mètres. La ligne, à voie “étroite depuis los Andes, sera à crémaillère sur la plus #rande partie de sa longueur; des travaux de pro- ction suffisants - i permettront CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 633 les pluies. Le mouton s'élève encore moins dans cette direction, mais rayonne davantage au Sud et à l'Ouest, rejeté cependant sur des pâturages de plus en plus maigres, par suite de la mise en valeur toujours crois- sante des terrains propres à la culture. La similitude des productions du Chili et de la Ré- ublique Argentine et le prix élevé des transports par chemin de fer — surtout dans les lignes de montagne — n’amèneront jamais un gros trafic dé marchandises | sur le Transandin. La ligne s’imposait au point de vue des relations de voisinage, mais il “de rester ouverte üu trafic l'hiver ier., On pourra os parcourir 48 heures — lieu de 72 au- jourd'hui — les 4430 kilomètres qui séparent Bue- Yos-Ayres de Val- araisO. est à supposer que le Chili trou- vera des facilités d'exportation et des avantages au- trement précieux dans le perce- ment prochain du canal de Pana- ma. Le transit ac- el n’est pas très tif, étant don- Fig. 1. — Ligne joignant és les transbor- ments multiples exigés par les changements de ompagnies, les transports à dos de mules, et sur- ut par le fait que la ligne argentine, le Ferro Car- 1 Buenos-Ayres al Pacilico, ne coïncide que trois fois par semaine, à Mendoza, avec les correspondances e la ligne chilienne. Enfin, la traversée des Andes nest possible de cette manière que pendant cinq mois e l'année. Pour ces différentes raisons, on comprendra que cette voie soit surtout utilisée par les voyageurs désireux d'éviter une traversée d’une quinzaine de jours, souvent contrariée par les mauvais temps, si mmuns à la sortie du détroit de Magellan. Le temps est passé où le Chili était un des principaux ys producteurs de céréales. Ses richesses minières ont bien détourné une partie de son activité; l° accroissement de pluviosité du climat l’a rendu moins apte à ces mêmes cultures ; sa posilion excentrique sur le Paci- P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. F BopfEMEps el Buenos-Ayres à Valparaiso. 9.— Enseignement et Sociétés A Muséum d'Histoire naturelle de Paris. M. Edmond Perrier, membre de l’Académie desSciences, professeur d’Anatomie comparée au Muséum d° Histoire naturelle, est nommé directeur de cet Etablissement pour une nouvelle période de cinq ans. Congrès géologique international. — Sur la demande du Gouvernement mexicain, de l'Institut géo- logique du Mexique et des géologues mexicains, le Con- grès géologique international, dans sa IX® session réu- nie à Vienne, a décidé, dans la séance du 28 août 1903, de tenir à Mexico sa X° session. Pour faciliter les travaux de préparation du Con- grès, il s'est formé, à Mexico, uu Comité exécutif dont la composition est la suivante “favorables; mais toutes ces causes gé une influence aussi faächeuse que la concur- ence de la Répu- lique Argentine. Favorisé par une Hamigration im- ortante, ayant nfin trouvé le me politique, dernier pays a ris, depuis dix ans surtout, un développement économique important. L'extension ra- pide des voies ferrées a provoqué la diffusion des cul- tures. Tandis que la vigne est presque une spécialité des deux provinces de Mendoza et de San Juan, que la lture de la canne à sucre est concentrée dans la ovince de Tucuwan, que les quebrachos colorados ne anchissent guère les territoires du Chaco et de For- hosa, les vastes champs de blé et de maïs s'étendent ans toutes les provinces de l'Est, qui possèdent aussi es plusriches troupeaux: Mais, là encore, les divers cli- mats ont tracé des limites. Le gros bétail, redoutant le froid, ne descend guère au Sud de la province de Bue- _nos- Ayres, etremonte jusque dans la zone subtropicale. Bi en est de même des chevaux, avec cette différence Fig. 2. — Détails de .…... Projet du chemin de fer transandin Président : M. José G. Aguilera, Directeur de l'Ins- titut géologique ! République Argentine Paanale gé- VA aAconcagua (69007) néral : M. Eze- quiel Ordonez, sous-directeur de l'Institut géolo- gique national ; Secrétaires MM. Emilio Bü: et Carlos Burck- Puente del /nca Punta deles Vacss Jos Banos FÉCFREMANS del hardt, géologues 5 ; en chef de ['Ins- a traversée des Andes. la traversée des Andes titut géologique national; Trésorier : M. Juan D. Villarello, géologue en chef de l'Institut géologique national. L'ouverture du Congrès aura lieu 6& septembre 1906 et la séance de clôture se huit jours après. Dans le but de faire connaître aux membres du Congrès les traits généraux des formations géolo- giques dominantes au Mexique, le Comité exécutif a commencé à organiser deux grandes excursions géné- rales, qui auront lieu l’une avant et l’autre après la session. Des renseignements détaillés sur les itinéraires, frais d’excursion, etc., seront d’ailleurs fournis pro- chainement par la circulaire que le Comité d'organi- sation doit adresser à tous les géologues. à Mexico vers le tiendra 634 LA VILLE DE FEZ Fez est, de loutes les villes du Maroc, la plus importante, tant par son industrie et son commerce que par le chiffre de sa population. Cité noble et sainte entre toutes, foyer de l’érudition musulmane en Occident, Fez est encore la principale des quatre résidences des sultans du Maghrib. Je connaissais les trois autres : Marrakech-la- Rouge, l'antique capitale des Almoravides, la mé- tropole d’aspect soudanien du Maroc méridional; Rabat, la blanche cité de Yäkoub El-Mansour, baïgnée par les eaux du Bou- Regreg et de l'Océan; enfin Méquinez, celte Versailles des premiers sul- tans de la dy- nastie actuelle des Alides, dont lesruines somp- tueuses témoi- gnent de la splendeur pas- sée. Je venais de quitter cette dernière, el, après une chau- - Vieux, nous de élape à tra- trouverions fa- vers la vaste cilementà nous plaine qui s’é- Fig. 1. — Bab-es-Sbäa (Porte du Lion). y caser. tend entre les Enroute donc deux villes impériales du Nord, je campai, le 20 septembre 1898, dans un douar des bords de l'Oued En-Nedja, à quatre lieues de Fez. Le lendemain, je devais atteindre le but de mon voyage, la sainte cité de Mouley Idris. I. — PREMIÈRES IMPRESSIONS. 21 septembre. — Un violent orage a éclaté pen- dant la nuit, et la pluie, la première de la saison, s’est abattue en torrents sur notre petit campe- ment, perçant nos tentes, les inondant et ne nous laissant pas un fil sec sur le corps. Au petit jour, nous nous mettons en route sous l’averse. Rien d'abord ne nous annonce le voisinage d’une grande ville. À notre droite s'étend la plaine de Saïs, vide et nue en cette saison; à gauche, les hauteurs arides de Mouley Yâkoub et du Djebel D' F. WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ Tarrat. Enfin, les silhouettes de quelques minarets ! et la longue ligne grise des murs de Fez surgissent à l'horizon et, après trois heures de marche, nous» atteignons la capitale du Maghrib. Nous y pénétrons par Bab Sagma et allons nous“ mettre à l'abri un peu plus loin, sous la voûte mo-" numentale de Bab-es-Sbäa, la porte du lion (fig. 1), où, sans mettre pied à terre, nous altendons mon cavalier d’escorte qui nous à devancés pour in- former le gouverneur de Fez-le-Nouveau de mon arrivée et luis demander de“ nous assigner un logement ou unendroit pour y dresser nos tentes. Cen’estqu'au. bout d’uneheu-- re qu'il revient nous dire que. les Européens ne logent pas à Fez-le-Nou- Veau, Mais qu'en nous a- dressant au a-- cha de Fez-le-" pour Fez-le-Vieux! L'averse continue et nous sommes trempés jusqu'aux os. Nous parcourons un quartier désert entre de hautes murailles crou= lantes, puis, franchissant une porte, — la cin quième depuis notre entrée en ville, — pénétrons dans la medina. La rue dans laquelle nous nous engageons dévales en pente roide vers le bas de la ville, et les pluies l'ont transformée en un véritable torrent roulan de gros galets arrachés au pavé. C’est l’artère prin cipale de Fez-le-Vieux. Des deux côtés se dressent des murailles grises et crevassées, du haut desquelles le trop-plein de terrasses se déverse en cascades dans la rue et Su nos têtes. Nos bêtes pataugent péniblement, glis= sant, trébuchant, s'enfonçant à chaque pas dans des trous profonds remplis d’une boue gluante el fétide. Après un bon moment de ce steeple-chase d'um D' F. WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ 635 nouveau genre, nous pénétrons dans une ruelle latérale, large de 2 mètres à peine, véritable cloaque bordé de murs noirs et suintants qu'aucun balcon, qu'aucune fenêtre n'égaie et dont la lugubre mono- tonie n’est interrompue, cà et là, que par les portes cintrées des maisons, bardées de fer et toujours fermées, ou par quelque soupirail noir solidement grillé. Les hautes murailles ne laissent paraitre entre leurs crêtes qu'une bande très étroite de ciel gris, d'où tombe, avec lapluie, une lueur pâle etsinis- tre, à peine suffisante pour éclairer notre chemin. Les rares passants qui se sont risqués dehors par ce temps, hommes encapuchonnés et femmes voilées de blanc, paraissent et disparaissent dans trouverons bien à nous loger sans son intervention. Nous nous remettons donc à errer au hasard à travers le sombre dédale des ruelles à la recher- che d'un gite. Les /ondaks, ces caravansérails du Maroc, il ne faut pas y songer : ce ne sont que de grandes cours boueuses encombrées de bêtes et bordées de cellules noires et sales pleines de ver- mine, véritables chenils où gitent les chameliers et les muletiers. Il doit d’ailleurs y avoir de nom- breuses maisons inoccupées à Fez en ce moment; car le Sultan et le makhzen sont à Marrakech. Mais personne ne veut héberger un « nazaréen », et l'hospitalité, si large dans les campagnes maro- caines, semble inconnue à ces citadins, d'autant Fig. 2. — Vue de Fez, prise du fortin au sud de la ville. - l'ombre avec des allures inquiétantes de fantômes. Nous parcourons d’autres ruelles, plus étroites et plus sordides encore, escarpées, tortueuses, enchevêtrées : un labyrinthe inextricable de pas- sages, d'impasses, de couloirs voûtés et obscurs, où nous sommes obligés de nous tenir courbés sur - l’encolure de nos bêtes, tandis que nos genoux et nos étriers raclent les murs crasseux. Enfin, mon mokhazni s'arrête devant une porte où se tiennent quelques-uns de ses collègues. C’est l'entrée de la maison du gouverneur de Fez-le- Vieux. Nous descendons de cheval et pénétrons dans le vestibule, où nous trouvons ce haut fonctionnaire entouré de ses scribes. Il s'empare d'un geste brusque de la lettre chérifienne que je lui présente, y jette un coup d'œil, puis me la rend en déclarant qu'elle ne s'adresse qu'aux caïds de province, qu'il n'a pas le temps de s'occuper de nous et que nous plus intolérants et plus hostiles aux Européens qu'ils sont plus cultivés. Enfin, un vieux marchand, compatissant à nos tribulations, nous donne l'adresse de Si Omar Bar- rada et, un nègre ayant consenti à nous servir de guide, nous frappons peu après à la porte du digne agent consulaire d’Espagne. Si Omar est la provi- dence des rares voyageurs européens qui viennent à Fez; il a séjourné au «pays des chrétiens » et s'y est dépouillé du fanatisme qui distingue une bonne partie de ses concitoyens. Heureusement, il à ce qu'il nous faut, une maison vide de trois pièces avec cour et écurie, où nous ne lardons pas à nous installer à l'abri de la pluie et du vent. II. — LA VILLE ET SES ENVIRONS. 1* octobre. — J'ai eu mon accès de ce malaise moral auquel peu d'Européens échappent à leur 636 D' F. WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ arrivée dans cette ville sombre, où l'on se sent | où jaillit l’eau pour les ablutions, le grand portail captif comme dans une prison et entouré d'une po- Fig. 3. — Intérieur d'un dignitaire du makhzen. pulation indifférente, sinon hostile. Le « mal de Fez » s'était emparé de moi avec d'autant plus de force que je venais de passer des mois dans lis plaines aux vastes horizons, à l'air libre sous la tente, et que le mauvais temps avait accentué l'air morne el triste de cette ville où j'étais venu sans compagnon européen et sans y connaitre âme qui vive. Mais, le soleil aidant, cette première impression n'a pas tardé à se dissiper. Les sombres ruelles ont maintenant pour moi un charme mystérieux qui excite ma curiosité et éveille en moi un intérêt sans cesse croissant. J'y fais journellement de nouvelles et charmantes découvertes : élégants minarets ornés de sculptures et de faïences noires, vertes et jaunes, qui en émer- gent dans la lumière et s’élancent vers le ciel bleu; portes ogivales couronnées d'arabesques et feston- nées de stalactiles richement fouillées; fontaines pübliques encadrées de délicieuses mosaïques : ves- tiges innombrables, mais souvent bien délabrés, — hélas! — de l’époque lointaine où Fez était un des grands centres des sciences et des arts. Tout près de ma maison, il y a une merveille : la sainte mosquée de Karaouïn, fondée en 840, la fameuse Université de Fez dont l’enseigne- ment brilla un moment d’un si vif éclat au Moyen- Age. Je ne me lasse pas de passer et de repasser dans l'étroite ruelle qui en fait le tour et où s'ouvrent les portes du sanctuaire, dont l’accès m'est interdit, mais dont je puis voir, du dehors, la vaste cour lumineuse pavée de mosaïques, le bassin de marbre somptueux et les gracieuses colonnades blanches éclairées par d'innombrables lumignons et peu plées d'étudiants accroupis autour de leurs maîtres et de croyants prosternés. Tout près encore se trouve la mosquée de Moule Idris, le plus vénéré des sanctuaires du Maroc, qui renferme le mausolée du fondateur de Fez. Le quartier où elle est siluée est un asile sacré, clos dem barrières que les infidèles ne peuvent franchir. Puis il y a la Xessaria, le bazar, centre toujours pittoresque et intéressant de l’activité industrielle et commerciale, dont les rues très animées sont bordées d'ateliers et de boutiques où se fabriquent et se vendent les produits de l'industrie locale : tissus de soie et de laine, broderies, tapis, armes, selles, babouches, poterie, joaillerie : un chaos de marchandises coloriées et chaloyantes. Quelques-unes de ces portes farouches que je croyais si hermétiquement fermées aux Européens se sont ouvertes pour me laisser passer et, derrière les murs sinistres, j'ai trouvé des intérieurs de palais des Mille et une Nuits (fig. 3), des jardins aux frondaisons luxuriantes et aux délicieux om- brages (fig. 4), où l'atmosphère est saturée du parfum des fleurs et remplie du murmure des Ah en ES Fig. 4. — Jardin dun gros commerçant. fontaines et du chant des oiseaux, et des hôtes aimables et accueillants pour m'en faire les hon- neurs. RS er sad eme M Aa D Shan om > 11 octobre. — Les environs aussi sont char- | -mants et j'y fais de longues courses à cheval, le- “vant mes itinéraires à l’aide de la boussole, de l'anéroïde, de la visant, déterminant des situations, mesu- “rant des angles, deshauteurs,des “distances. Le “soir, rentré chez rédige “ mes notes el je “dresse la carte Le la région par- 1 courue. Les con- “tours de la ville 1 se précisent peu À peu, les reliefs 1 du terrain se des- “sinent et bientôt … je suis en mesure de tracer une “ imageassezexac- te de cette ville “encore si peu connue et de ses environs immédiats -montre; “moi, je (fig. 5 et 7). —_ Fez se compose de deux parties distinctes, Fäs “el-bäli (Fez-le- Vieux) et Fäs ej-jdid (Fez-le- : Nouveau), dis- antes l'une de l'autre de plus d'un demi-kilo- mètre, mais re- liées entre elles ‘parleurencein- Le commune. L'ensemble figure grossiè- .rement un &8, “dontl'axe, long de plus de trois … kilomètres, _est orienté de _l'Ouest-Sud- Ouest à l'Est- Nord-Est. Fàs …j-jdid en re- _ présente la bou- 22 cle occidentale, Fäs el-bäli, la boucle orientale, tandis que l’étranglement entre les deux est formé par Bou-Jeloud, quartier de jardins clôturés de hautes murailles, qui peut être considéré comme D: F. WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ 637 {| il {| PLAN DE LA VILLE DE FEZ levé et dressé par le D' F. WEISGERBER 1 Kilomerre «2 so Mouley Dris S * uk EMfhahis 226 Maérouk LV Que 3 ESA li Ben-Harazem, LEGENDE Contours exaccs Porte 8261 Pont /Xantra} Cours d'eau /Oued! Chemin, route. Mosquée. Marabout. | | We Fig. 6. — Fort au nord de la ville. un faubourg de Fäs el-bäli. ST Fig. 5. — Plan de l'ez. ÆBORFEMANS del Fàs ej-did occupe une surface plane d'environ 80 heclares, formant l'angle Nord-Est d'une vaste plaine qui s'étend vers Méquinez, entre le Djebel Zerhoun et les montagnes des Beni Mtir. Fàs el-bâli est bälie sur les deux versants d’un vallon étroit, au fond duquel l'oued Fàs, ve- nant de la plaine de Saïs, descend rapidement vers le Sebou. Au Nord-Est de la ville se dresse le Djebel Zalagh ; au Sud, les mon- tagnes s'élèvent graduellement vers Sefrou. Fez est proté- gée par une di- zaine de kilomètres de hautes murailles crénelées flanquées de bastions et percées de huit portes. Deux forts couronnent les collines au Nord (fig. 6) et au Sud. Elle possède une distribu- tion d’eau mer- veilleuse. L'oued Fâs et ses tributaires, canalisés de la facon la plus ingénieuse, la parcourent d’un bout àl'au- tre, alimentant les fontaines publiques, les mosquées, les bains et même lasmaisons par- ticulières et les jardins. Les eaux ayant ain- si servi sont réunies au moyen d’un système de canaux indépendants et ramenées dans le lit de l’oued Fàs, qui prend le nom d'oued Bou-Khararb à sa sortie de la ville. Fàs ej-jdid, fondée en 1276, est le siège du dar el makhzen, la résidence du sultan, dont les palais 638 Fan e WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ ECC NL et les jardins en occupent la majeure partie. mechouar, préloire où se rend la justice et où se traitent les affaires d'État, fait communiquer la résidence impériale avec le monde extérieur. C'est encore à Fâs ej-jdid que se trouve le mellah, la ville juive, dont la population, très à l’étroit, est évaluée à une dizaine de mille âmes. Un mur percé | d'une porte unique l’entoure complètement et le sépare d’un quartier musulman habité par des sol- dats et des journaliers. La Kasba Cherarda, au Nord de Fàs ej-jdid et de Bou-Jeloud, forme une sorte de faubourg détaché, habité par une fraction de la tribu militaire des Cherarda. Fàs el-bâli, fondée en 808 par Mouley Idris ben Idris, est la partie de beaucoup la plus intéressante Le | è les palmiers dressent leurs gracieux panaches au=« dessus de la végétation semi-tropicale des oran" gers, des figuiers, des grenadiers, des nopals et. des agaves. À Je suis allé aux sources de l’oued Fàs, à 42 kilo mètres vers l'Ouest de Fàs ej-jdid, large bassin où se réunissent plusieurs cours d'eau souterrains jail" lissant avec force de dessous le banc de calcaire qui les recouvre. Puis j'ai visité Sidi Harazem, au Sud-Est et à 3 lieues de Fez, où des sources chaudes ont créé une délicieuse oasis dont la végétation exubérante de palmiers, de figuiers, de roseaux énormes enguir« landés de plantes grimpantes forme un contraste saisissant avec la nudité des roches escarpées quin l’encadrent. Kilometres ° 3 de Vakoub/250) A .sulfurbuses / lorufe sSod/ques) ER KOU à . VAN \ fa, El-Ma 57 È - \ à) KEcarer S I HE Akbat EX PE \ de Fez sajen à DarEd-Dbibigh & 1360) Æ BOfREMANS del. Fig. 7. — Carte des environs de Fez. de Fez. C’est la medina, la ville à population ur- baine, composée surtout de Maures, dont un grand nombre sont les descendants des anciens maîtres de Cordoue et de Grenade. Elle se divise en trois parties, El-Lemtiin, El-Adoua et El-Andalous, dont chacune se subdivise en six quartiers séparés par des portes qui se ferment après la prière du soir. Les quartiers d'El-Lemtiin se composent de 600 à 700 maisons chacun. Ceux d’El-Andalous et d'El- Adoua n’en ont que de 250 à 300. On peut donc évaluer à environ 7.000 le nombre des maisons de Fäs el-bali. 21 octobre. — Captivé par le charme si particu- lier de Fez, jem'y suis arrêté beaucoup plus long- temps que je n’en avais d’abord l'intention, et voici un mois déjà que j'habite la capitale de Maghrib. Je l’ai parcourue dans tous les sens, et mes courses aux environs se sont étendues bien au delà des collines couvertes de plantations d'oliviers et semées de tombes et de marabouts qui l’encadrent et des superbes jardins des bords de la rivière, où Au retour, nous avons suivi le Sebou jusqu'à son fameux pont, un peu en amont de l'embouchure du Bou-Khararb : belle construction de huit arche où passe la route de Taza. Les Hiaïna, qui habitent la rive droite du fleuve, se sont insurgés contre l'autorité chérifienne et viennent narguer les troupes du makhzen jusque: sous les murs de Fez, pillant les caravanes e assassinant les voyageurs. Aussi les habitants de la capitale n'en sortent-ils qu'en nombre et armés jusqu'aux dents. Enfin, j'ai poussé jusqu'aux fameux thermes de Mouley Yàkoub. J'avais souvent entendu parler des ces sources miraculeuses, rendez-vous de tous les lépreux, scrofuleux, perclus, de tous les avariés de l'empire chérifien, et j'avais été à même, en plus d'une occasion, de me convaincre de leurs vertus curatives. Naturellement, l'accès en est interdit au infidèles et jl ai dû me travestir soigneusement pour. | pouvoir m'y rendre. Elles sont situées à trois heures de cheval de D' F. WEISGERBER — LA VILLE DE FEZ 639 Fez, à l’ouest-nord-ouest, dans une région acci- dentée et déserte dont les plis sont saupoudrés de couches blanches de sel. Un misérable hameau, accroché au versant d'un ravin, entoure les deux sources principales dont l’eau, sulfureuse et très salée, a une température de 53°. Elle est canalisée de façon à tomber, une cinquantaine de mètres plus loin, dans un bassin d'environ 5 mètres sur 8. C’est la piscine des hommes. Le trop-plein en tombe dans un second bassin, plus petit, où se baignent les femmes. Tout autour, c'est une scène indescriptible. Des … centaines de malheureux étalent leurs corps nus couverts d’ulcères, leurs membres paralysés et tordus, leurs figures rongées, en attendant leur « tour de se plonger dans l'onde miraculeuse. A : n l'odeur d'œufs pourris des eaux se mêlent les éma- nations nauséeuses de cette cohue dantesque, d’où s'élève une tempête de lamentations, de grands cris invoquant Allah et Mouley Yäkoub. Quand je m'approche, beaucoup de ces malheu- “ reux, me prenant pour un chérif, se précipitent aux … pieds de mon cheval, saisissent mes élriers et baisent les pans de mon burnous, croyant ainsi “ participer à ma baraka, l'élat de grâce qu'ils me E « supposent. Et je leur accorde ma bénédiction sans - lésiner, me félicitant de ne pas être reconnu comme … nsrani par cette foule fanatisée et de pouvoir ache- “ ver mon exploration de ce Lourdes marocain. see. — III. — DERNIÈRES IMPRESSIONS. 25 octobre. — Je suis à la veille de mon départ, car la saison des pluies approche et je me propose de visiter encore Ouezzan, El-Ksar, Larache, Té- touan et Tanger. — Mais, avant de quitter la reine du Maghrib, je yeux la contempler encore une fois et m'emplir les yeux de sa beauté. Et, bravant les convenances - locales qui s'y opposent, je monte à la terrasse de la maison amie où je passe cette dernière soirée. Fez est tout autour de moi : un amoncellement chaotique de cubes gris, de coupoles blanches, de pyramides de tuiles vertes et de sveltes minarets que dorent les derniers rayons du soleil. Les belles fasialles se promènent sur leurs terrasses, les égayant des teintes multicolores de leurs cafetans. Les jardins font à la ville une ceinture de sombre verdure, derrière laquelle le Djebel Zalagh aux flancs abrupts se détache en rose du fond d'azur du ciel. Lentement, le soleil disparait derrière le Djebel Tarrat et, du haut des minarets, les moudden an- noncent l'heure du moghreb. La ville s'enveloppe d'un voile gris, les cafetans multicolores s’éclipsent et les étoiles s’allument dans les profondeurs infi- nies du firmament. 0 . . . . Longtemps avant le jour, je suis réveillé par une voix forte et belle psalmodiant un chant religieux dans une mosquée voisine : chant étrange, dont les phrases lentes et séparées par de longs intervalles sont si souvent répétées qu'elles se gravent dans ma mémoire d’une façon indélébile : Farm a 1 à F Longtemps le chant continue, puis, brusquement, se termine par un grand cri proclamant la gran- deur d'Allah : — Allah akbar! D'autres cris pareils lui répondent de tous côtés et se confondent en une immense clameur saluant l'aube nouvelle. Et une tristesse subite, toute dit- férente de celle des premiers jours, me serre le cœur à la pensée que tout à l'heure je vais quitter Fez... peut-être pour toujours. D’ F. Weisgerber. 540 VICTOR HENRI — LE ROLE DES COLLOÏDES EN BIOLOGIE LE ROLE DES COLLOIDES EN BIOLOGIE DÉCOUVERTE DE KINASES ARTIFICIELLES L'étude des colloïdes vient d'entrer dans une nouvelle phase qui va, certainement, être très féconde en applications pour les problèmes les plus généraux de la Biologie. Dès le début des études sur les colloïdes, tous les auteurs ont insisté sur leur importance pour la Biologie; de tous les côtés, on disait que la connais- sance des propriétés générales des solutions colloïdales est indispensable pour l'intelligence des processus de défense, de nutrition et de développe- ment des organismes vivants. Aussi a-t-on fait une étude très minulieuse des colloïdes; en particulier, on à étudié l'influence exercée par différents col- loïdes sur les liquides de l'organisme, sur les glo- bules rouges et sur les microbes. C'est ainsi que nous possédons maintenant tout un ensemble de recherches qui nous font entrevoir que les phéno- mènes d'agglutination et d'hémolyse, que l’action des toxines, des antitoxines et des venins doivent se ramener à des actions des colloïdes organiques. Mais tout cet ensemble de recherches restait théo- rique; on se demandait toujours si, dans l'orga- nisme, le mécanisme est vraiment celui qui résulte de l'étude des colloïdes ; on demandait toujours l'expérience décisive qui permettrait, avec des col- loïdes artificiels, de reproduire l’une de ces actions qui n'avaient pu être produites jusqu'ici que par les corps élaborés par les organismes vivants. On disait toujours : montrez-nous une action diastasique ou toxique produite par un corps artificiel; ainsi, montrez-nous, par exemple, que, par-un corps non retiré d'un organisme vivant, vous pourrez réac- tiver un sérum chauffé à 56°, ou encore rendez donc actif un suc pancréatique pur, sans y ajouter une kinase élaborée par un organisme vivant! Cette question se posait à chaque instant, et l'on était obligé de donner une réponse vague, fondée surtout sur des analogies avec l'action des col- loïdes. Aujourd'hui, cette question est résolue: une expé- rience décisive vient d'être faite au Laboratoire de Physiologie de la Sorbonue par M. Larguier des Bancels, qui a réussi à rendre actif le suc pancréa- tique pur par l'addition de colloïdes et d'électro- lytes convenablement choisis. Il est important de noter que, pour trouver ce résultat, M. Larguier des Bancels n’a eu qu'à appliquer directement au suc pancréalique et à l’albumine les résultats de ses recherches sur l'influence produite par les électro- lytes sur l’action réciproque de différents colloïdes. I L'importance de cette découverte nous oblige d'insister un peu sur quelques détails. I. — ACTION RÉCIPROQUE DES COLLOÏDES. Lorsqu'on mélange les solulions de deux col- loïdes différents, on trouve que les propriétés de chacun de ces colloïdes sont modifiées: les deux colloïdes exercent une certaine action l’un sur l’autre. Cette action est plus ou moins forte, sui- vant les cas; elle consiste toujours dans la forma- tion de ce que nous appelons des « complexes ». Tout se passe comme si la nouvelle solution con- tenait un seul colloïde complexe. Les propriétés de ce complexe peuvent ètre très différentes de celles de l’un ou des deux colloïdes mélangés. Donnons deux exemples : a) Si on mélange un colloïde instable (tel que l’ar- gent colloïdal) avec un colloïde stable de même signe électrique (tel que l’amidon), on trouve que le complexe ne précipite pas par les électrolytes en solution diluée, tandis que l'argent colloïdal seul est très sensible aux moindres traces d’un électro- lyte; tout se passe comme si le colloïde stable avait englobé le colloïde instable, de sorte que les pro- priétés du nouveau complexe formé se rapprochent de celles du colloïde stable. D) Lorsqu'on mélange deux colloïdes de signes électriques opposés (par exemple Ag colloïdal, négatif, avec l'hydrate de fer, positif), si les solu- tions sont suffisamment concentrées, il se forme un précipité pour certaines proportions des deux col- loïdes; ce précipité complexe contient les deux colloïdes. Ce précipité est soluble dans un excès soit du colloïde positif, soit du colloïde négatif. Si le colloïde positif est en excès, on a un complexe posilif; si c’est le colloïde négalif qui est en excès, on aura un complexe négatif. Lorsque les deux solutions sont diluées, il n'y a pas de précipitation mutuelle des deux colloïdes de signe opposé, mais on trouve que les propriétés den chacun des colloïdes se trouvent modifiées, de sorte que, dans ce cas également, on doit admettre la formation d'un complexe. II. — INFLUENCE DES ÉLECTROLYTES SUR L'ACTION RÉCIPROQUE DES COLLOÏDES. On sait que les colloïdes sont précipités par l'addition d'un électrolyte; cette précipilabilité CES dite bd am taste MR TS IL ns LS VICTOR HENRI — LE ROLE DES COLLOÏDES EN BIOLOGIE GAt varie d’un colloïde à un autre : c'est ainsi que l’on est amené à distinguer des colloides instables, qui précipitent par des doses très faibles d'électrolyte, et des colloides stables, qui ne précipitent que si la quantité d'électrolyte est forte. De plus, les différents électrolytes ont des pouvoirs précipitants différents ; en étudiant les conditions de précipitation des col- loïdes par les électrolytes, on trouve que le pouvoir précipilant dépend soit de la basicilé du radical acide, soit de la valence du métal de l’électrolyte. Ainsi, pour les colloïdes positifs, c'est le radical acide qui commande la précipitation, tandis que, pour les colloïdes négalifs, c’est le métal qui déter- mine la précipitation. Nous voyons donc ainsi qu'un colloïde négatif pourra être précipité soit par un colloïde positif, soit par un sel de métal bi ou trivalent; de même, un colloïde positif pourra être précipité par un colloïde négatif et par un sel d'acide bi ou triba- sique. On se demande donc naturellement comment se produira la précipitation si l’on ajoute à un colloïde négatif un mélange d'électrolyte et de colloïde posilif : y aura-t-il partage, ou bien l’un seulement des deux éléments prédominera-t-il? Cette question n’est pas une simple curiosité théorique, elle a une importance pratique; en effet, la plupart des matières colorantes sont des col- loïdes, les tissus sur lesquels on cherche à les fixer sont également des colloïdes; par conséquent, le processus de teinture n’est qu'un cas particulier de la formation de complexes colloïdaux. On sait depuis longtemps que certains corps, désignés sous le nom de mordants, permettent de fixer une teinture sur un tissu; on sait, de plus, que le mordancage peut êlre effectué soit en imbibant d'abord Je lissu avec un mordant et en le plongeant ensuite dans la solution de teinture, soit en plongeant le lissu dans un mélange con- tenant la couleur et le mordant. Les mordants employés sont, en général, des sels de métaux bi ou trivalents et d'acides bibasiques. On voit donc qu'il existe un rapport direct entre les procédés de teinture et la solution de la question générale qui nous occupe, à savoir : COm- ment les électrolyles peuvent-ils modifier l'action réciproque des colloïdes? L'étude de celte question a été entreprise par M. Larguier des Bancels et moi, et elle a déjà donné des résultats d'ordre général suivants ‘. Deux cas différents doivent être distingués : a) Les deux colloïdes sont de signes électriques opposés ; 4 C. R. Acad. des Sciences, juin 1905. Voir également sur les propriétés des colloïdes l'article de MM. V. Henri et A. Mayer dans la Revue des 15 nov., 15 et 30 déc. 1904. b) Les deux colloïdes sont de même signe, mais l'un est stable, tandis que l’autre est instable. Examinons chacun de ces deux cas séparément : ä) Prenons deux colloïdes de signes opposés et mélangeons-les en proportions telles qu'il se pro- duise une précipitation mutuelle des deux colloïdes ; ajoutons ensuite un se] de métal bivalent et d'acide monobasique (par exemple de l’azoltate de magné- sium, précipitant pour le colloïde négatif) : nous verrons alors qu'une partie du colloïde positif sera mise en liberté; ajoutons, au contraire, un sel de. métal monovalent et d'acide bibasique (par exemple du sulfate de sodium, précipitant pour le colloïde- positif) : c’est le colloïde négalif qui sera mis en liberté. Voilà donc un moyen général qui nous. permet d’arracher à un complexe de deux colloïdes de signes opposés l’un ou l’autre de ces deux col- loïdes. C’est là une solution générale de la question des décolorants. D) Soient deux colloïdes de stabilité très diffé- rente, par exemple une feuille de gélatine plongée dans une solution de bleu d'aniline; la gélatine et le bleu d’aniline sont tous les deux des colloïdes négatifs : le premier est stable, tandis que le deuxième précipite facilement par des sels de métaux bivalents. La feuille de gélatine absorbe après quelques jours une petite quantité de bleu, mais cette absorption est faible. Ajoulons, au con- traire, à la même solution de bleu un sel de métal bivalent, par exemple de l’azotate de baryum ou de zine : nous verrons que le liquide deviendra absolu- ment incolore, la gélatine sera très fortement teintée en bleu, et, au fond du tube, il y aura un léger précipité de bleu. Par conséquent, par l'addi- tion d’un électrolyte convenable, nous avons fixé la couleur sur la gélatine. L'explication est très simple : l’azotate de zinc se partage entre la gélatine et la solution; le bleu d’aniline, colloïde négatif, se trouve déchargé par les ions positifs bivalents du zine; une partie précipite, mais une autre partie peut se lier plus facilement à la gélatine qu'elle ne pouvait le faire lorsque les granules étaient chargés négativement. Dans la gélatine, le bleu se trouve bien en présence des ions de zinc, mais ils n'ont plus d'action pré- cipitante, puisque la gélatine, comme tout colloïde stable, préserve le bleu contre la précipitation. En somme, le mécanisme résulte directement de tout ce que nous connaissons des colloïdes. III. — KINASES ARTIFICIELLES. On sait que le suc pancréalique pur ne digère pas l’albumine d'œuf; il faut, comme on -dit,tle rendre actif. Pour cela, on lui ajoute un produit appelé kinase, qui se trouve dans la muqueuse D' F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE intestinale, dans les globules blancs, dans la levure de bière, dans les venins de serpents et dans beau- coup de bactéries. Ce produit peut être retiré par macération dans l'eau chloroformée et précipita- tion par l'alcool; ilse détruit, ou, plus exactement, s’affaiblit fortement, lorsqu'on le chauffe au delà de 80°. Tous ces caractères ont amené différents auteurs à considérer la kinase comme un ferment soluble. Plusieurs physiologistes, qui ont étudié longue- ment l’action de la kinase, considèrent que le suc pancréatique pur ne contient pas le ferment pro- téolytique actif, mais seulement un stade inférieur, un proferment, une protrypsine ; pour ces auteurs, la kinase serait le complément nécessaire, de sorte qu'ils écrivent : protrypsine + kinase = trypsine. Relativement à la nature de la kinase, on ne sait encore rien; mais, dans tous les cas, tous les auteurs qui se sont occupés dela question s'accordent à dire que ce n'est que par un extrait organique que l'on peut arriver à rendre actif un suc pancréatique pur. En appliquant directement au suc pancréalique les résultats de ses expériences sur les colloïdes, M. Larguier des Bancels vient de montrer que, par toute une série de moyens différents, on peut rendre actif un suc pancréatique pur. Ainsi, pre- nons des cubes d’albumine et immergeons-les pen- dant plusieurs heures dans une solution d'un col- loïde positif, tel que le bleu de toluidine, le violet de méthyle, le rouge de magdala, le bleu de méthyle, etc. Retirons ensuite ce cube : il a absorbé une petite quantité du colloïde positif; lavons-le et plongeons-le dans du suc pancréatique pur. Ajoutons à ce suc une faible quantité d’un électrolyte con= venable : un sel de métal bivalent et d'acide mono- valent (par exemple azotate de baryum, de calcium, de magnésium, etc.), et nous verrons qu’au bout de douze heures le cube d’albumine sera digéré aux trois quarts. Le suc pancréatique pur est doncM ainsi rendu actif. Les expériences de contrôle montrent que ni le colloïde positif seul, ni l’électrolyte seul ne suf- fisent pour cela; il faut leur action simultanée. Nous pouvons donc dire que le colloïde positif fixé sur l'albumine joue le rôle de kinase et l’élec- trolyte le rôle de mordant. (Rappelons que la tryp- sine est un colloïde négatif.) Un point important doit encore être mentionné : c'est la quantité de colloïde positif qui se fixe sur l’albumine. On trouve que cette quantité est extrêmement faible : ainsi, pour le bleu de toluidine, un cube d'albumine de un quart de gramme a fixé un centième de milligramme de bleu de toluidine ; cette quantité suffit pour permettre au cube de se digérer dans le suc pancréatique « pur additionné d’électrolyse. Tels sont les faits que nous rapportons sans en donner maintenant d'explication. Il s'en présente, du reste, plusieurs. Il est évident que le même mode d'expérimentation doit être appliqué à l'étude des toxines, des antitoxines et des hémolysines. Victor Henri, Docteur ès sciences, Préparateur au Laboratoire de Physiologie de la Sorbonne. LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE « Sous le nom de sérothérapie », nous dit Lan- douzy‘ dans son magistral ouvrage, « on entend la méthode qui emprunte ses agents et ses moyens thérapeuliques aux sérums. » Ces derniers se distinguent entre eux par l'emploi qu'on en fait, par les résultats qu'on en attend, par les sources auxquelles la matière médicale les puise, et aussi par la manière dont cette dernière les obtient et les prépare. Tantôt on prend le sérum par saignée?, directe- ment dans le sang physiologique de l’homme ou de l’animal. Tantôt on fabrique de toutes pièces un sérum en calquant sa composition sur celle du sérum EE 1 Lanpouzx : Les Sérothérapies. Paris, 1898. 2 Modifications chimiques des sérums sanguins. Voir BauuGarten : Berlin, Klin. Wochenschrift, 1902, Nr. 34. L. More : Beitræge z. chem, Phys. u. Path., t. IV. sanguin normal : on le dénomme sérum artificiel, par opposition au sérum sanguin normal, naturel: Tantôt enfin — c’est le procédé employé ordinai- rement — on emprunte le sérum soit à l'homme malade ou convalescent, soil à un animal sponta- nément ou expérimentalement malade, sachant que, dans les deux cas, le sérum sanguin se trouve doué de qualités nouvelles, que la Médecine expé- rimentale a montré pouvoir être transportées de l'organisme sérumifère à un autre organisme. Cet autre organisme subit, au contact du sérum, des modifications telles qu'il va jouir de propriétés semblables à celles dont là maladie spontanée ou provoquée avait doté le terrain sérumifère. En d’autres termes, le terrain neuf recevant ce sérum est mis, du fait de l’imprégnation et par cetle imprégnation même, en élat d’immunisation, d’atté- nuation, de prévention, de défense ou de guérison nn AE 7 SAN Tnt uen! me D EP RE à 0 PS A me PTE 2 dE 5 ad y contre la maladie spontanée, ou expérimentalement provoquée, dont étaitatteint l'organisme qui fournit le sérum sanguin. Parmi ces trois variélés de sérums, la dernière, le sérum immunisateur, est celle qui, à l'heure présente, tient légitimement la plus grande place … dans les préoccupations de la Thérapeutique théo- “rique et appliquée. C'est iustement parce que le - sérum immunisateur ! atlire à soi toute l'atlention …— médicale et représente la plus forte part des appli- … cations sérothérapiques, qu'il a été l’objet de plus - de travaux et de découvertes que ne l'avaient …_ jamais élé le sérum normal et le sérum artificiel. LE me I. — SÉRUM ANTITÉTANIQUE. - Des nombreux sérums que nous possédons à l'heure présente, le sérum de Vaillard et Roux contre le télanos est, sans contredit, l'un des plus efficaces. Le tétanos est considéré aujourd'hui comme une “intoxication générale associée à une infection locale. La preuve de sa transmissibilité, de sa nature infectieuse, de sa nature vivante, comme disait Pasteur, fut donnée pour la première fois, en 1884, par Carle et Raltone; Rosenbach, Hoch- singer, Bonome étudièrent les caractères morpho- logiques de son microbe, sans pouvoir toutefois obtenir de cultures pures. C'est à Kilasato que revient l'honneur d'être “parvenu à isoler le bacille dit de Nicolaïer. Depuis, “ce microbe a élé l'objet de nombreuses études, armi lesquelles* celles de Verhoogen et Baert’, e Sanchez Toledo et Veillon ‘. et surtout celles de Vaillard et Vincent”, sont les plus importantes. Après avoir isolé l'élément pathogène, après avoir extrait sa Loxine, on est arrivé expérimenta- lement, avec le bacille ou avec la toxine, à repro- duire toute la symptomatologie du tétanos. C'est dans la plaie, et là seulement, que se trouve l'agent pathogène; le tétanos est, comme la diph- “érie, bien plus une intoxication qu'une maladie infectieuse, à proprement parler. Les cas de survies dans le tétanos, selon Bebring “(voy. Rose et Richter), seraient de 40 à 20 cpseanil parait pourtant être resté très au-dessous de la vérité, car Albertoni donne le chiffre de 24 °/,, —. 2 Fuxc : Manuel de Sérothérapie. — Société médicale de Paris, p. 83. — Société médicale “les Hôpitaux de Paris, 1902, 1903, p. 421; 1021: 1033; 1075; 4505. — Mever et Raxsom : Rech. s. le tétanos. Rev. gén. des “Sciences, 1903, p. 1014. — Dr V.-S. Honsox : Rev. gén. des Sciences, 1905, p. 6. # VER&OOGEN et BAErT : Prem. recherches s. le tétanos. Bruxelles, 1888. # Saxomez-ToLeno : Rech. s. le tétanos. Arch. de Méd. expérimentale, 1890. Varzcano et Vincent : Annales de l'Institut Pasteur, 1891. À D: F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE 643 Sormanni celui de 56 °/,; Roux et Vaillard ont adopté le chiffre de 50 °/,. À Paris, la mortalité annuelle par le tétanos est de 10 à 12 cas. Le bacille du tétanos se caractérise non seule- ment par la grande vitalité", par la résistance de ses spores, mais aussi par l'extrême virulence de sa toxine* (dont la composition chimique est encore inconnue): cette dernière laisse loin der- rière elle, non seulement les alcaloïdes les plus énergiques, mais encore les venins les plus redou- tables que nous connaissions. Pour tuer une souris, il faut 1/1.000° de centi- mètre cube de culture et 1/100.000° de centimètre cube de toxine; pour tuer un cobaye en cinquante heures, au maximum 4/50(° de centimètre cubz de culture suffit; Nocard a démontré qu'avec deux gouttes de toxine (—1/10° de centimètre cube), on tue infailliblement un cheval robuste en pleine santé. Brieger, Kitasato et Wassermann”, Vaillard#, Tizzoni et Catani*, Roux ° et beaucoup d’autres ont étudié de nombreux et intéressants procédés d'immunisation. Le sérum antitétanique se conserve environ une année et se prépare — comme presque tous les sérums — de la façon suivante : Des cultures de bacilles télaniques dans du bouillon de bœuf peptonisé, additionné de 0,5 °/, de gélatine, sont placées à l’étuve à 37° C. pendant deux à trois semaines. Ces cultures, filtrées sur la bougie de porcelaine, donnent des toxines très actives, comme nous l'avons déjà dit. Le cheval ayant un sérum sanguin normal à peu près inoffensif pour l'homme et pouvant fournir, sans inconvénients, des quantités de sang assez considérables, on le choisit généralement pour obténir l'immunisation et le sérum thérapeutique. On commence par lui injecter un demi-centimètre cube d’un mélange à parties égales de toxine el de solution de Gram ou de Lugol; on continue en augmentant lentement et progressivement la dose; au 17° jour, on injecte 10 centimètres cubes d'un mélange de 2/3 de toxine pour 1/3 seulement de { BrieGer : Untersuchungen über Ptomaïne. Berlin, 1886. Kuxo Farer : Pathogenese des Tetanus. Berl. Kli». Wochenschrift, 1890. — Dr River : Gazette médicale de Nantes, 1903. 2 Tizzonr et CarTTanr : Sul venerio di tetano. Riforma medica, 1890. KirasaTo : Experimentelie Untersuchungen ü. das Teta- nusgift. Z. f. Hygiene, t. X. 3 BrieGer, Kirasaro und WassEermaxx : Ueber Immunität. Z. f. Hygiene, t. XII. # VaiLLARD : Immunité contre le tétanos. Ann. de lIns- titut Pasteur, 1892. 5 Trizzonr und Caranr: : Thier-Immunität gegen Tetanus. Centralbl. f. Bactcriologie, t. LIX. 5 Roux : Sur les sérums antitoxiques. Ann. de l'Institut Pasteur, 1894. 644 D' F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE solution iodée; on diminue la proportion de celte solution iodée jusqu'au 35° jour, où l'on injecte 10 centimètres cubes de toxine pure; on injecte ensuite cette dose tous les deux ou trois jours, suivant l'intensité de la réaction de j'animal, jusqu'au 72° jour, où l'on injecte enfin d'un seul coup 150 centimètres cubes de toxine pure. Au bout de quelques jours, l'immunité est à son maximum et le sérum peut être employé thérapeu- tiquement.: Le sang du cheval ainsi immunisé est puisé dans la veine jugulaire, avec toutes les précautions nécessaires, et recueilli dans un bocal où on le laisse au repos pendant un jour ou deux; puis on transvase le sérum qui s'est séparé dans une allonge, qui le distribue enfin dans des flacons de 10 centimètres cubes destinés à la vente. Tous ces flacons, scellés ou bouchés, sont placés pendant quelques jours dans une étuve à 37° GC. et ceux qui se troublent sont rejetés. En Allemagne, on ajoute à ce sérum 0,5 °/, de formol ou d'acide phénique; à l'Institut Pasteur, on se contente de la tyndallisation à 56° C. Le sérum antitétanique est dù à Behring et Kitasato (1890). Il est très actif au point de vue prévenlif; son action curative, par contre, est peu sûre. D'après ce que nous apprennent les expériences de Metch- nikoff, Marie, Roux et Borrel, cela semble pro- venir de ce fait « que la toxine télanique se fixe très énergiquement sur le système nerveux et que l’antitoxine est impuissante à neutraliser la loxine ainsi fixée ». Roux et Borrel ont aussi préconisé des injeclions intra-cérébrales de sérum, mais leur méthode semble lrop inconstante chez l'homme pour pouvoir être généralisée. Le traitement par le sérum antilétanique n'étant qu'un moyen préventif, il faut, en présence d'une plaie susceptible de devenir létanigène, employer le plus Lôt possible ce sérum, en injectant ! 10 cen- timètres cubes; si la plaie est étendue, on doit procéder à une seconde injection de même valeur huit jours après la première. Dans le télanos à marche rapide, 50-100 centimèlres cubes de sérum, en une ou deux injections, sont nécessaires. Ces injections ne dispensent pas du traitement vigou- reux de la plaie par les méthodes ordinaires. L'immunité conférée par le sérum est de quinze jours à un mois au plus. De légers accidents post-sérothérapiques, sans gravité et passagers, se présentent de temps en 4 Nocanp : Sur la sérothérapie du tétanos. Académie de Médecine, 1895. A. Descosr et H. BarraéLeuy : Soc. de Biologie, 26 juillet 1902. temps ; on les attribue au sérum du cheval M. Calmette a introduit l'usage du sérum sec en: poudre, obtenu par la dessiccation du sérum liquide dans le vide. Son emploi ne nécessite aucune ins=M trumentation, el il peut être mis entre les mains les plus inexpérimentées; on comprendra facile ment les grands avantages qu'il présente, se con- ; servant pour ainsi dire indéfiniment (pansement des plaies ombilicales chez les nouveau-nés). Il en est du tétanos comme de la rage : la théra= peutique nouvelle empêche la maladie, mais ne la guérit pas. L'inefficacilé du traitement curatif du tétanos a été étudiée et confirmée par de nombreux savants’. D'après ce que nous venons de voir, le résultat n’en est pas moins tout à l'honneur de cette thérapeulique nouvelle. Grâce aux travaux de Nocard, on est également parvenu à empêcher l'infeclion tétanique chez less animaux par la simple absorption du sérum. La courte durée de l'immunité nous explique pourquoi les expérimentateurs ont renoncé à vac-M ciner les animaux contre le tétanos, comme on vaccine les troupeaux de moutons contre le charbon Les médecins et les vélérinaires ont donc entre les mains les moyens de diminuer les foyers d’infee- lion tétanique; en en empêchant la dissémination, ils contribueront à faire disparaître finalement le létanos des annales de la Pathologie. + fn Il. — SÉRUM ANTIVENIMEUX. La question des venins, envisagée au point de vue thérapeutique, a été l'objet de nombreux travaux, parmi lesquels ceux de Calmette*, Phisalix e Bertrand en France, de Fraser en Angleterre, sont les plus importants. Les réactions chimiques de la substance préparée par Calmetle, et qui parait être le principe actif dum venin de serpent, semblent indiquer que les venins« présentent des affinités étroites avec les diastases et les toxines, soit microbiennes, soit végétales c'est-à-dire avec les enzymes. En dépit de toutes les études chimiques? faites! sur le venin des serpents, nous ne savons, en! somme, rien de posilif sur sa conslitution; son principe actif nous est inconnu; on suppose qu'il est de nature albuminoïde, que c'est une nucléine: Non seulement la toxicité des venins des serpents varie suivant une foule de condilions, mais EnCOTEM existe-t-il des hommes et des animaux absolument ‘ Krrasaro und Bauwski : Deut. med. Wochenschrift, 489 Tizzonr et Carranr, Finormi, GaGzrannt, etc., ete. En Itali on préconise aussi beaucoup les injections d'acide phéniqu sous la peau contre le tétanos. : 4 ? CaLMErTE : Le venin des serpents. à 2 $, ARRÉNIUS : La physico-chimie des toxines et ant toxines. /iev. gén. des Sciences, 1904. | réfractaires à la morsure des serpents; les serpents eux-mêmes ne réagissent pas à la morsure de leurs congénères‘, puisqu'il est impossible d'envenimer “expérimentalement un serpent. Cette immunité parait lenir à la présence, dans le sang, non seulement des serpents venimeux, “mais encore des serpents non venimeux, et même “des anguilles, d'une substance toxique, que certains auteurs considèrent comme le venin lui-même en “dilution dans la masse sanguine, mais qui serait, “d'après Calmette, un principe diastasique spécial, “différent du venin, à la constitution définitive “duquel il prend peut-être part*. La gravité et la rapidité de l'envenimation “arieront chez le même individu suivant le siège “de la morsure, exactement comme pour le tétanos et surtout pour la rage; en matière d’envenima- tion, il faut donc tenir compte et du siège de la morsure, et de la voie d'introduelion du venin. Parmi les différentes voies par lesquelles le venin peut être introduit dans l'organisme des animaux, Ja plus dangereuse est l’intraveineuse; une mor- sure chez l'homme, faite dans l'hypoderme, sera “donc plus redoutable, vu que le tissu cellulaire 1 Sous-cutané est très vasculaire. | Quelques auteurs”, Lacerda et Fayrer entre autres, ont déclaré que le sang d'un animal tué par le venin est lui-même venimeux, et que, si on “l'injecte à un animal neuf, il détermine rapidement les mêmes effets que le venin lui-même. Calmette et Viaud Grand-Marais ne sont pas de cet avis, car, d'après eux, l'inoculation du sang d'un animal ort d'envenimation vipérienne donne toujours des résultats négatifs. —_ Une des propriétés les plus remarquables du enin de serpents, c'est son extrême diffusibilité*. Cette rapide diffusion explique l'inefficacité presque “absolue des traitements locaux les plus énergiques, 4 que les incisions, les cautérisations au fer rouge, les injections de certains liquides, la liga- “ture du membre mordu; pour s'opposer à l'enveni- mation, il faut recourir à d'autres moyens plus efficaces. 4 M. A. LosrniG (La Clinica moderna, 17, II, 1904) se rat- tache à l'idée de Weissmann, qui n'admet pas la transmis- Sion de l'immunité acquise contre les poisons: O. Hertwig, ‘au contraire, affirme la possibilité de cette transmission. “M. C. Pnisaux (Soc. de Biologie, séance du 3 déc. 1904) étend avoir reconnu que les venins de vipère et de cobra diffèrent l'un et l'autre par tous leurs caractères physiolo- £&iques, et que leurs principes actifs appartiennent à des æspèces chimiques différentes. ? Grimperr : Les sérums thérapeutiques. Paris, 1899. 8 M. Viraz Brazi : Sur deux nouveaux sérums antiveni- meux. Rev. gén. des Sciences, 1904. er VON Bassevirz : Münch. med. Wochenschrift, 10 mai 04. # G. Laws : Sur la sérothérapie dans les morsures de ser- pent. The Lancet, Londres, 1904, 5 nov. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. D' F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE 645 On savait pourtant qu’en suçant la plaie, qu'en plaçant une ligature au-dessus d'elle, qu'en y appliquant certaines substances presque toutes de réaction alcaline, on avait des chances d'empêcher la pénétration du venin et de rendre la morsure inoffensive, et cela dans 95 °/, des cas environ. Bien plus, les relations des voyageurs prouvaient que l’idée de l’immunisation n’est pas une nolion nouvelle et que les habitants de certains pays ont su faire, de tous temps et couramment, de la thé- rapeutique préventive contre les morsures de serpents. Pour pratiquer l'immunisation, on peut recourir à plusieurs procédés : tantôt se servir de toxines atténuées ; tantôt introduire dans l'organisme, par une voie déterminée, des doses d'abord infinitési- males, mais progressivement croissantes de venin pur, non modifié, autrement dit mithridatiser l'individu, de manière à lui permettre de supporter des doses considérables de poison. Pour atténuer la toxine du venin reptilien, nous avons des moyens physiques et chimiques très divers. On eut aussi l'idée d'emprunter le sérum sanguin de divers animaux réfractaires à l'envenimation et de le transporter dans le corps d’autres animaux non réfractaires, de manière à modifier l'humo- risme de ceux-ci et à leur transmettre l'immunité de ceux-là. Les résultats fournis par ces tentatives ont tous été négatifs. Le sérum antivenimeux a été simultanément découvert par Phisalix et Bertrand (2 février 1894) et Calmetle (27 mars 1894). Pour le préparer, il y a trois procédés principaux, qui tous utilisent de préférence le cheval. Le premier, dû à Phisalix et Bertrand, consiste à injecter du venin modifié par le chauffage: il est très rapide, puisqu'il ne demande que quarante- huit heures, mais insuffisant. Le second est l'accoutumance à des doses faibles et répétées de venin. Enfin le troisième, le plus pratique jusqu'ici, consiste à inoculer un mélange de venin et d'hypo- chlorite de soude ou de chaux, conformément à la méthode employée par Roux et Vaillard, qui mélangent également les toxines tétaniques et diphtériques avec la solution de Lugol. Calmette emploie le venin desséché, à la dose de 1 gramme dissous dans 100 centimètres cubes d’eau distillée, chauffé pendant une demi-heure à 78° C. pour le débarrasser des phlogogènes, et mélangé à des quantités décroissantes d’hypochlorite de chaux à 1/60. On fait à l'animal une injection tous les quatre ou cinq jours; au bout de deux mois, il supporte. des doses de venin capables de tuer 100 kilogs de lapin et ne donne plus de réaction; 14* 646 D' F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE au bout de six mois, le sérum est suffisamment actif pour qu'on puisse l'employer en thérapeutique. L'immunité conférée par des inoculations ré- pétées de doses non mortelles de venin est longue; elle peut atteindre huit mois; par le sérum, elle est, au contraire, fugace et ne dépasse pas deux à quatre jours; même avec des injections répétées quotidiennement, tout en étant très énergique, l'état réfractaire ne dépasse pas vingt à trente Jours. Le sérum antivenimeux est efficace contre le venin de tous les serpents et des scorpions. 10 centimètres cubes suffisent dans la plupart des cas; toutefois, quand le serpent est très dangereux et que l'intervention est tardive, il faut injecter simultanément deux ou trois doses de 10 centi- mètres cubes chacune *. Malgré ces injections, il faut naturellement pra- tiquer la ligature ou la compression de retour du membre, et laver soigneusement les morsures avec de l'acide chromique à 1 °/,, du chlorure d'or à 1°/, et surtout de l'hypochlorite de chaux à 1/60, récemment préparé *. On peut aussi s’efforcer de réveiller la sensibilité du malade par des frictions modérées, mais il faut éviter de recourir, dans ce but, à l'alcool, au café, à l'ammoniaque. Le sérum antivenimeux, d’ailleurs, est absolu- ment inoffensif; il n'y a aucune complication à craindre, et, sous son influence, on voit l’état des malades s'améliorer rapidement, en quelques heures. On en fait aussi usage, et exactement comme pour l'homme, pour le traitement des mor- sures venimeuses chez les animaux domestiques. Quand on pense au’aux Indes on voit par an mourir une moyenne de 25.000 personnes des suites d'envenimation par des morsures de serpents, on ne niera pas que, par la découverte du sérum antivenimeux, la thérapeutique est dorénavant dotée d’une médication des plus précieuses parmi les meilleures conquêtes de la Médecine moderne. [ET SÉRUM ANTISTREPTOCOCCIQUE. Le streptocoque pyogène, occasionnant des maladies infectieuses et toxiques, présente la pro- priété de pousser sur presque tous les milieux de * Calmette mesure la valeur de son sérum par unité anti- venimeuse. 10 centimètres eubes — 20.000 unités antiveni- Iieuses. ? Pasarix : Rapports des venins avec la hiologie Rev. gén. des Sciences, 1903, p. 1250. 3 Les Établissements Poulene frères, à Paris, recom- mandent l'emploi du sérum sec à cause de sa conservation facile et illimitée. * A défaut de ceux-ci, tout simplement avec de l'eau, en comprimant fortement les tissus tout autour pour faire saigner la plaie. gén. culture artificiels ou naturels : c'est ce qui explique pourquoi son domaine dans la Pathologie est si vaste. Vivant facilement partout, sa diffusion est rapide. : Charrin et Roger, le 23 février 1895, communi- quèrent à la Société de Biologie les deux premiers cas d'application d'un sérum antistreptococcique au traitement de la fièvre puerpérale. Le mois: suivant, dans une seconde communication, ils rap portèrent deux nouveaux cas; c’est dans cette mêmes séance que Marmorek! fit connaître la technique de sa méthode et annonça qu'il venait de l'employer avec succès chez 46 malades atteints d'érysipèle. Dans la méthode de Marmorek, on commencait par exalter la virulence d’un streptocoque pris chez l'homme; le streptocoque hypervirulent était ensuite inoculé au cheval à doses progressivement croissantes, jusqu'à immunisalion ; enfin, le sérum de ce cheval, doué à son tour de propriétés préven- tives et curatives, était l'arme employée par Mar- morek contre la streptococcie, pour la guérir autant. que pour la prévenir. Roger et Gharrin, usant d'un procédé inverse,. ont cherché par la chaleur à diminuer la virulence du streptocoque emprunté à l'homme. Pour cela, une culture de streptocoque sur: bouillon de huit à dix jours est évaporée au baïin- marie, réduite au sixième du volume primitif, puis chauffée à l’autoclave à 115°; dans ces conditions, le liquide perd la plus grande partie de sa toxicité. On l'inocule alors à un mulet, à la dose de. 50 centimètres cubes par injeclion, ce qui repré. sente 300 centimètres cubes du bouillon de culture: primitif. Quand l'animal à reçu huit à dix injec- tions, on veut considérer la vaccination comme achevée, et, huit à quinze jours plus tard, on pra- tique une saignée. Pour empêcher les propriétés thérapeutiques de s'affaiblir, on continue à faire à l'animal, une fois par semaine, une nouvelle injee- tion de cultures stérilisées. Le sérum ainsi obtenu, tout en ayant les mêmes propriétés thérapeutiques que celui de Marmorek,: a cependant une énergie moins grande; aussi faut-il l’'employer à des doses plus élevées : 30 cen= timètres cubes pour la première injection. Dans les cas très graves, on peut introduire jusqu'à 50 els 60 centimètres cubes à la fois, au moins pendan les premiers jours. À côté des procédés de Marmorek et de Charrin 1 Manmorek : Le streptocoque et le sérum antistreptocoe cique. Ann. de l'Institut Pasteur, 1895. Maumorer : Traitement de la scarlatine par le séru antistrep. Ann. de l’Institut Pasteur, 1898. Hormanx: Sérum antistrep. Deutsche med. Wochensehrilt} 1904, XXX, n° 44. Méry : Sur une variété de streplocoque réfractaire aus sérum de Marmorek. Soc. de Biologie, 1896. D' F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE 647 Roger, il est, entre autres’, un procédé de sérothé- rapie antistreptocorcique employé par Denys et Leclef?. Par des injections répétées et à dose crois- sante de toxine de streplocoques faites à deux “chevaux, et de cultures vivantes du même orga- …nisme à deux autres chevaux, ces auteurs sont … parvenus à obtenir un sérum dont l'injection, à la dose de 0 cc. 25 à 1 centimètre cube, prévenait … chez le lapin l'apparition d'un érysipèle de l'oreille. ….I1s se servirent d'un streptocoque très virulent. Tous ces sérums* n'ont pas déterminé d'accidents “spéciaux, en dehors de quelques manifestations communes à l'emploi de tous les sérums antito- “ viques connus : hyperthermie momentanée, exan- Ë * thèmes, arthralgies, myalgies. Il est nécessaire, “indispensable, quand on commence l'étude théra- hpeutiaue d'un agent de matière médicale, d’avoir au préalable établi l'immunité et la sécurité de “rarme nouvelle qu'on met entre les mains des médecins. Cependant, on peut dire, d'une manière générale, -que les propriétés thérapeutiques de ce sérum sont moins prononcées que son pouvoir préventif. Aussi But l'utiliser au début, dès qu'on soupçonne une infection à sitreptocoques. On donne 20 centimètres cubes à tous les âges, mème les plus jeunes; quand le danger est imminent, il faut injecter 50 centi- … mètres cubes d'un coup et répéter l'injection toutes L. douze et vingt-quatre heures, jusqu'à dispari- “ion complète des symptômes morbides. On cons- pe après l'injection, un érythème passager, qui ne s'accompagne, d'ailleurs, d'aucun malaise sé- ieux. L'Institut Pasteur délivre, en tubes scellés, du érum desséché dans le He dont la valeur cor- respond à celle de 10 centimètres cubes de sérum liquide. Le sérum est surtout efficace dans les infections causées par le streptocoque pur; son ction est moins énergique et DOTE constante “quand le streptocoque est associé à d'autres bac- _& pathogènes. Aussi, pour obtenir des résultats très satisfaisants - dans la diphtérie, le croup et l’angine scarlalineuse, où il est associé au bacille de Léæffler, faut-il “injecter simultanément le sérum de Marmorek et a sérum de Behring-Roux. Dans l'érysipèle, le sérum de Marmorek donne, d'après Chantemesse, des résultats très heureux (mortalité tombant de 3,8 à 1,5 °/.). Dans la scarlatine, que l'infection Streptococcique complique souvent, Josias et Bar- -ginsky ont observé que l'emploi de ce sérum, sans M 4) ne ! Sérum de Chaix et Remy pour septicémie puerpérale. ? Denys el Leccer : Académie de Médecine de Belgique, 1895. * H. vox Sucuruaz : Fortschrilte der Medizin (Berlin), t. XXII: p. 23. 40 août 1904, à. influencer notablement la marche de la maladie, agit cependant très favorablement sur les compli- cations. Les tentatives pour guérir la septicémie puerpé- rale * doivent être continuées et encouragées, parce qu'on ne possède actuellement aucun autre moyen sérieux pour lulter contre les formes sévères de cette infection. Le traitement local au moyen d'injections utérines, d'écouvillonnage et de cure- tage est doué d’une grande valeur, surtout dans les cas de rétention, mais son efficacité n’est cer- taine qu'à la condition d'être hâtif. Lorsqu'on s'adresse à la sérothérapie, dit Mar- morek, dans un cas de septicémie puerpérale par exemple, on doit supprimer tout autre traitement. D'après Landouzy, nul n'aurait le droit, pour la septicémie puerpérale, de partager l'exclusivisme de Marmorek. On continuera, tout en faisant d'emblée la sérothérapie, de recourir, avec calme, douceur, aux médications commandées par l'état ulérin et l'état général, sans sacrifier surtout les longues irrigations utérines. D'après Landouzy et Claisse, ce sérum est aussi très efficace dans la broncho-pneumonie d'origine Streptococcique; la température s’abaisse rapide- ment et la guérison survient. Enfin, dans la variole et dans la méningite cérébro-spinale épidémique, Lindsay, Wallach, Einsler ont obtenu des guérisons inespérées par les injections du sérum de Mar- morek. IV. — SÉRUM ANTIDIPHTÉRIQUE. Un seul sérum triomphe à peu près entièrement du mal; c'est celui de la diphtérie ou du croup, le sérum Roux, pour lui donner son vrai nom. La méthode employée par Roux et Martin pour immuniser les animaux a été celle des toxines iodées, déjà mises en usage par Roux et Vaillard dans leurs recherches sur le tétanos. Pour obtenir l’immunisation, la toxine employée, qui doit tuer, à la dose de 1/10 de centimètre cube et en quarante-huit heures, 500 grammes de cobaye, est injectée à des chevaux de la façon suivante : Premier jour, 1/4 de centimètre cube de toxine mélangé à 1/10 de solution de Lugol; Deuxième jour, 1/2ce. du même mélange; mème 1 M. Visa : Le sérum de Marmorek dans le traitement de la septicémie puerpérale. Société des Sciences médicales de Lyon, 1897, 31. Coceuan et WakELING : À case of acute septicæmia. Brit. med. Journal, 1896. 4 , A. Prvano et V. Wazuicn : Traitement de l'infection puer- pérale, 1896. GauLanp : La sérothérapie dans la fièvre puerpérale, 1895. Deger (sérum de R. Petit) : Société de Biologie, 28 mai 1904. 648 répétition jusqu'au huitième; on diminue ensuite la quantité de la solution iodée; Au dix-seplième jour, on administre 1/4 de cen- timètre cube de toxine pure; À partir du vingt-deuxième jour, injection tous les deux ou trois jours de doses croissantes de toxine pure, de manière à atteindre 30 centimètres cubes le cinquantième jour; 60 centimètres cubes du cinquante-cinquième au soixante-septième jour; 90 centimètres cubes le soixante-douzième jour; Etenfin 250 centimètres cubes le quatre-vingtième jour. Après cette immunisation lente de quatre mois, on laisse l'animal se reposer une vingtaine de jours avant de pratiquer la saignée. L'autre méthode que signale Landouzy, due à Parodlovsky et Maksutoff, aussi efficace que la première, permet l'immunisation du cheval en une quarantaine de jours, en injectant d'abord du sérum anliloxique, puis la toxine diphtérique à doses croissantes et jusqu'à 1.200 centimètres cubes. L'activité du sérum antidiphtérique se mesure à peu près comme celle du sérum antitétanique. Une quantité de sérum antidiphtérique égale au 1/50.000 du poids du corps d’un cobaye suffit pour le protéger contre l'infection. Behring et Ehrlich, en Allemagne, emploient la méthode des mélanges, qui mesure, au contraire, le pouvoir antiloxique; on admet que le sérum à 1/100.000 de l’Institut Pasteur équivaut à environ 250 unités d'Ehrlich. Le sérum antidiphtérique est surtout antitoxique ; il donne des résultats très remarquables, constatés par un grand nombre d'observateurs ‘, puisque la mortalité globale par diphtérie, qui élait jadis de 60 °/, environ, est tombée à 15 °/,, et même à 5 °/, si l'on défalque les cas où le sérum a été injecté trop tardivement. En effet, le sérum est à peu près impuissant quand la toxine bactérienne a diffusé, qu'il y a paralysie, irrégularité du pouls et de la respiralion. L'administration précoce du sérum, quand les signes cliniques sont affirmatifs ou même douteux, est absolument indiquée. On observe rapidement 4 Roux et MARTIN : Annales de l'Institut Pasteur, 1894. — STRASES : Académie de Médecine, 1894. — EuLEeNBurG : Soc. de médecine interne, Berlin, 1895. — Biccs : Académie de Médecine de New-York. 1895. — Raw : Brilish medical Journal, 1896. — Perint : Académie de Médecine de Turin, 1896. — CHaNTEMESSE : Soc. méd. des hôpitaux, 1896. — Gisrer : Académie des Sciences, 1896. D° F. BLUMSTEIN — LES RÉSULTATS ACQUIS DE LA SÉROTHÉRAPIE alors une amélioration sensible de l'état général et le décollement plus ou moins rapide des fausses membranes. Toutefois, quand il y a association du streptocoque ou du staphylocoque avec le bacille de Lœæffler, l'effet est moins constant. Enfin, ce sérum est également préventif, comme Landouzy l'a montré, puisque, sur 12.426 personnes injectées préventivement, 53 seulement ont con- tracté la diphtérie, soit 4 sur 235. L'immunité con- férée par le sérum est de trois semaines environ. « Dans la diphtérie bénigne », dit le D' Lau- monier!, « au début 5 à 10 centimètres cubes de sérum suffisent; quand la maladie date de plusieurs jours, ou présente un pronostic sévère, il faut injecter 10 ou 20 centimètres cubes, quel que soit l’âge ; enfin, dans les cas très graves et spécialement quand la diphtérie s'élend au larynx et aux bronches, on peut aller depuis 30 jusqu'à 50 centi- mètres cubes. D'ailleurs, il est préférable d'injecter, dès le début, une dose forte que de recourir à des injections répétées de doses faibles. » Les injections de sérum anlidiphtérique pré- sentent certains inconvénients dont on parait avoir exagéré l'importance. Quelques jours après l’injec- tion, on observe souvent une éruption d'urlicaire avec une légère hyperthermie, de courte durée; plus rarement, on constate de l'érythème poly- morphe et de la fièvre, et tout à fait exceptionel- lement des gonflements articulaires douloureux, qui compliquent l’éruplion, notamment chez les adultes et quand le streptocoque est associé au bacille de Lœæffler; l’état fébrile peut alors durer quelques jours, mais ces accidents ne présentent jamais de réelle gravité. Des essais de sérothérapie ont élé entrepris pour un grand nombre d’autres maladies infectieuses : les uns ont échoué; les autres sont encourageants par leurs promesses, mais ne sont pas encore entrés définitivement dans la Thérapeutique. Mais il n'est pas permis de douter que l'ère de recherches nouvelle inaugurée par Pasteur ne nous conduise bientôt à de plus importants succès dans cette voie. D' F. Blumstein . (de Strasbourg). # Dr Laumonrer : Les nouveaux traitements. Paris, 1903: DZIERGO WSKY : Préparation du sérum antidiphtérique. Revuex générale des Sciences, 1902, p. 281. Josras et TozLemEr : Action du sérum antidiphtérique. Académie de Médecine, 7 octobre 1902, 148 mars 1902. Dr Rouwe: L'eau polable et la diphtérie. Presse médicale, Paris, 190%, n° 27. 1 4 P. CLERGET — L'ESPRIT SCIENTIFIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT COMMERCIAL 649 L'ESPRIT SCIENTIFIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT COMMERCIAL Les derniers examens d'admission aux Écoles supérieures de Commerce ont montré un fléchis- sement appréciable du nombre habituel de candi- dats. Il est légitime de supposer que la crainte de voir supprimer la dispense militaire, conférée par le diplôme de ces écoles, n’a pas laissé d'exercer une influence sur ces résullats. Après tout, ces « jeunes gens, entrés sans enthousiasme et sans vo- - cation dans une carrière qu'ils ignoraient, ne fai- de, ERE LT saient peut-être pas de moins bonscommerçants que les autres; beaucoup ont dû s'étonner de l'intérêt qu'excilait en eux un programme auquel ils ne s'altendaient pas. Ce fléchissement numérique que nous venons de signaler s'explique donc très bien par l'ignorance et les préjugés du grand public vis-à-vis de tout ce qui concerne le commerce. Mais il vient aussi du fait que l’on ne se rend pas compte des transformations profondes subies par - le mouvement des échanges au cours des dernières années. La concurrence toujours plus redoutable + de l'étranger, les diflicultés que rencontre l'exlen- sion des débouchés, l'obligation de créer non seu- lement des maisons de vente, mais même des « fabriques dans les pays qui prélèvent des droils de douane trop élevés, tout cela montre combien développées doivent êlre les connaissances géné- rales de ceux qui veulent se vouer au commerce d'exportation. Le lemps n’est plus où lhabileté routinière pouvait suflire : de même que l’indus- trie et l'agricullure, le commerce sera scientifique ou il ne sera pas. Il n'y a qu'à voir le rôle de pre- nier ordre que joue l'enseignement commercial daus le développement économique de pays comme la Belgique, l'Allemagne, les États-Unis, et les efforts que fait l'Angleterre dans ce domaine pour rattraper l'avance que ses rivaux ont prise sur elle. Dans un discours prononcé en novembre 1900, à l’occasion de sa nomination de recteur de l'Université de Glasgow, lord Roseberry prit pour sujet l'Empire anglais et rechercha quelles étaient - les conditions auxquelles son pays conserverait la suprématie du monde. Rappelant la boutade de H. Heine : « Combien les Romains ont été heureux de n'avoir pas à apprendre le latin, car sans cela ils n'auraient pas eu le lemps de conquérir le monde ! », l’ancien premier Ministre demandait aux Universités de prendre une orientation plus pra- tique ; il souhaitait qu'à chacune d'entre elles fût adjointe une Faculté de Commerce qui aurait le double avantage de stimuler l'enseignement com- mercial dans les écoles secondaires et de donner le bénéfice d’une éducation universitaire aux hommes qui sont destinés à occuper les positions princi- pales dans les affaires. L'éducation, concluait lord Roseberry, doit devenir commerciale’, Ajoutons qu’à son utilité indispensable, l'enseignement com- mercial joint encore le mérite d’une réelle valeur éducative, en même temps que, par sa portée géné- rale et son actualité, il excite facilement l'intérêt de ceux qui le reçoivent. Le programme de l'enseignement commercial forme un tout complet, en ce sens qu'il comprend des disciplines scientifiques, littéraires, juridiques et philosophiques. Le développement donné à chaque branche varie avec les différentes écoles et aussi avec le degré. d'enseignement. Nous revien- drons plus loin sur ces différences, que nous tenions à signaler avant d'esquisser les grandes lignes du programme suivi: Les sciences mathémaliques sont habituellement représentées par l’arithmétique appliquée au com- merce et la théorie des opérations financières à long terme; les écoles allemandes y ajoutent l’al- gèbre, la géométrie, la mécanique et la trigonomé- trie, mais cette addition, qui n'a qu'une utilité très lointaine, est simplement une obligalion de l'État. La comptabilité a une importance fort va- riable : tantôt, on se borne à l'étude des principes et des divers systèmes de tenue des livres ; tantôt, au contraire, on eu fait le centre de l’enseignement en lui consacrant de nombreuses heures. Ces va- riations proviennent de deux conceptions oppo- sées : les partisans du premier système estiment que l'Ecole prépare la maison de commerce, mais ne la remplace pas, et que, lorsque l'élève possède les grandes lignes de la science du comptable, c'est à la pratique des affaires qu'il doit demander le complément de son instruction?. Tel est le point de vue allemand. Les partisans du second système prétendent dispenser l'élève de l'apprentissage commercial et cherchent à se rapprocher d'aussi près que possible de celui-ci, en créant, par exem- 1 Notons qu'aux États-Unis, les Universités de Pennsyl- vanie, de Wisconsin, de Californie, de Louisiane, de Michi- gan, de New-York et de Chicago possèdent des Facultés de Commerce. Cf. sur leurs intéressants programmes : X. TorAU- Baye : L'Enseignement commercial aux Etats-Unis. Rap- port de mission, 1 br. Paris, Nony, s. d. 2 E. Jourpan et G. Duuonr : Les Ecoles de commerce en Allemagne et en France, 1 br. Paris, 1899. 650 ple, à l'école, une maison de commerce fictive avec tous ses différents services de caisse, de corres- pondance, d'expédition, de réception, elc., ou bien encore en établissant des relations commerciales entre tous les élèves, pourvus chacun d’une spé- cialité différente et dans des pays variés. C'est la méthode employée en Belgique, à l'Institut supé- rieur de Commerce d'Anvers, en particulier, et dans la plupart des écoles françaises. Elle a le grand avantage d'intéresser vivement l'élève à une science aussi aride que la comptabilité; mais, étant données l’infinité des systèmes particuliers, qui va- rient d’une maison de commerce à une autre, et, d'autre part, la difficulté ou l’impossibililé de re- produire à l’école les opérations commerciales telles qu'elles se pratiquent dans la réalité, on risque ainsi de perdre en grande partie un temps précieux. A l’enseignement de la comptabilité sont jointes ordinairement des notions sur le commerce en général et les différentes catégories de commer- çants, ainsi que l’étude des documents relatifs aux échanges : factures, pièces douanières, lettre de voiture, connaissement, ete. Un cours sur l’élude des transports et l'outillage commercial vient com- pléter cette première catégorie de branches, à laquelle s’ajouteront encore la sténographie et la dactylographie, nécessitées par le service de cor- respondance. L'étude des marchandises ou produits commer- ciaux donne lieu à un cours extrêmement étendu et varié, qui comprend, en particulier, la plupart des applications des sciences chimiques et natu- relles, et qui doit reposer sur la théorie de chacune de ces disciplines. Chaque produit est étudié au point de vue de son origine, de sa fabrication ou de sa récolte, de ses propriétés, de ses usages, de ses variétés commerciales, de ses marchés, de sa manière d’être coté et vendu. Si l’on peut passer rapidement sur les détails de fabrication ou de culture, il nous paraît nécessaire d'insister sur l’essai de la marchandise, la recherche de ses falsifications et l'étude de ses succédanés. Ces connaissances, restreintes à l'emploi de méthodes faciles, d'ordre chimique et d'ordre microscopique, — qui n’exigent point la présence d’un laboratoire coûteusement outillé, — sont de plus en plus indis- pensables au commercant; elles constituent, en outre, un moyen éducatif de haute valeur. Nous tenons d'autant plus à souligner la chose que l’on tâche aujourd'hui de développer à juste titre les exercices de laboratoire, essayant, comme on l’a fort bien dit, de mettre l'étudiant en rapport direct avec les matériaux élémentaires de la science, de le guider et de le stimuler, afin qu'il convertisse ces éléments grossiers en savoir réel pour lui- P. CLERGET — L'ESPRIT SCIENTIFIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT COMMERCIAL même’. Cetle part importante faite aux travaux pratiques et aux recherches personnelles est un des caractères originaux des écoles américaines, celui qui frappe le plus un visiteur venant d'Europe; nous l’avons retrouvée à tous les degrés de l’ensei- gnement et avons pu en constater les heureuses conséquences. C'est pourquoi nous déclarons que la pralique des essais doit être rendue obligatoire, comme un complément nécessaire du cours de marchandises, ayant constaté par ailleurs que, si cet exercice est simplement facultatif, le plus grand nombre des étudiants n'y participent pas. Au laboratoire doit être joint un musée d'échantillons, aussi complet que possible, gràce auquel l'élève est placé préalablement en présence de chaque produit à étudier, afin d'être exercé plus tard à sa détermination. Un tel Musée, bien classé, où chaque échantillon est accompagné d'une notice détaillée, peut étendre son ucililé aux commercants de la région et même aux visiteurs étrangers. On sait le rôle important que jouent ces institutions en Bel- gique (musée de Bruxelles), Allemagne, Autriche et jusqu'aux États-Unis (musée de Philadelphie). Un autre complément utile de ce cours, ce sont les visites de fabriques, usines, manufactures, grandes maisons de commerce même, effectuées par les élèves sous la conduite de leurs maîtres et donnant lieu à des rapports subséquents. Ces excursions présentent aussi un grand intérêt au point de vue géographique : elles serviront à montrer le lien qui unit une industrie au milieu où elle vit. La Géographie économique est certai- nement une des branches de l'enseignement com- mercial susceptibles d'être le mieux imprégnées de l'esprit scientifique ?. On peut, en effet, la con- cevoir sous forme d’une série de problèmes de ce genre : causes géographiques de la distribution de la population et des marchés; répartition des grandes cultures, étant données leurs exigences aux points de vue du sol, du climat, du travail humain et des débouchés; localisation des indus- tries envisagées aux points de vue de la présence de la force motrice, de la matière première, des traditions historiques, des agglomérations urbaines, des facilités d'exportation; rapports existant entre 1 Cf. également les judicieuses observations de M. H. Le CuaATELIER : L’Industrie et les progrès de la Science pure, dans la Æevue du 30 décembre 1901. ? Cf. les Rapports et comptes rendus du Congrès interna tional de Géographie économique et commerciale (Paris, 27-31 août 1900), et particulièrement le Rapport de M. J. Brunhes : Différences psychologiques et pédagogiques entre la conception statistique et la conception géographique de la Géographie économique. Tirage à part, Fribourg, 1900. — A un point de vue plus général, voir les Conférences sur l'en= seignement de la Géographie, faites, en février-mars 1905; au Musée pédagogique, par MM. Vidal de la Blache, L. Gal- lois et P. Dupuy, et reproduites dans les Annales de (Gréo= graphie, 15 mai 1905. F > P. CLERGET — L'ESPRIT SCIENTIFIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT COMMERCIAL 651 Mes voies de communication et le milieu géogra- “phique; tout cela avec accompagnement de nom- - breuses cartes de répartition, de graphiques sta- Mistiques, que les élèves apprendront à dresser ux-mêmes, avec clarté et précision, en limitant … exactement le phénomène localisé. Nous soulignons ‘du même coup l'intérêt d’une étude ainsi comprise, au cours de laquelle le souci continuel du maitre st de susciter des pourquoi, de montrer des rela- ions de cause à effet et d'établir des comparaisons. Rien n'empêche d'ajouter à ce cours des notes d'un caractère pratique, portant sur les goûts et les … besoins des populations, notes que l'on pourra «— puiser, par exemple, dans les rapports de nos “ consuls, si peu utilisés, en attirant l'attention sur De fait que c'est précisément l'ignorance ou le dédain —… de ces goûts et de ces besoins qui sont souvent LL de l’insuccès de notre propagande commer- ciale, au grand avantage de nos concurrents alle- . .mands en particulier. — Rien n'aide plus le voyageur dans le placement -des produits que la connaissance des langues étrangères, devenue aujourd'hui, pour un grand nombre, une véritable nécessité sociale, à mesure -que se multiplient les relations internationales -de toute sorte. Ces disciplines auront donc une place importante dans l’enseignement commercial, avec ce caractère spécial — qui tend à devenir général, même dans les autres ordres d’enseigne- ment — que l'étude de la langue parlée doit pré- céder celle de la langue écrite. C'est ce qu'on a appelé la méthode inductive ou méthode naturelle, l'éducation de l'oreille et de l'œil, telle que l’a devi- née d’instinct la mère ou la nourrice. C'est d'ail- —… leurs ainsi que la classe de langues vivantes devient, comme on l’a dit, une classe de choses vivantes — qui peut se prêter indifféremment aux différents … buts de l'instruction, être à volonté commerciale -ou littéraire, pratique ou théorique. Les exercices de langue étrangère écrite sont formés en bonne partie de lettres et de rap- ports commerciaux, qui feront également l'objet d’un cours de composition francaise, varié avec des … dissertalions juridiques ou économiques, ou bien “encore avec les comptes rendus des visites indus- PE ! « On a beaucoup trop tendance, écrit le D' Decorse, à vouloir imposer nos goûts au nègre, Chez eux comme chez nous cependant, les modes, abstraction faite de leurs exa- gérations, répondent à des nécessités que la vie ou les cir- constances imposent à tous. La couleur, par exemple, est capable de faire varier du simple au double la valeur d'échantillons d'une même qualité. Le blanc, le vert, le - jaune, couleurs du prophète, font prime en pays musul- mans; chez les fétichistes, le bleu conquiert tous les suf- frages, car on peut le porter sale plus longtemps. » Rapport économique et zoologique sur la région du Tchad. Rensei- -gnements coloniaux et documents publiés par le Comité de l'Afrique francaise, n° 5, 1905. | trielles dont nous avons parlé. Beaucoup d'écoles ajoutent, à juste titre, des exercices de diction, de courtes causeries sur les sujets les plus variés, que l'on peut animer encore en les faisant suivre de discussions. Nous savons par expérience le réel plaisir avec lequel ces exercices sont préparés et le grand profit que les élèves en retirent pour l'intelligence de leurs cours. Les sciences juridiques, et tout particulièrement l'étude des législations commerciale, maritime et douanière, précédée d’une vue générale du droit civil, élargiront l'horizon du futur commercant. Enfin l’histoire du commerce, et l'économie politi- que, conçue principalement comme une philoso- phie des échanges, viendront compléter un pro- gramme dans lequel la variété et l'intérêt des branches ne le cèdenten rien à ce que peuvent offrir les différentes ramifications de l'enseignement secondaire. L'Économie politique mérite de retenir un instant l'attention au point de vue de l'esprit dans lequel elle peut être comprise. Il nous semble que cette science, encore en formation et si contro- versée, ne fait pas assez appel aux disciplines pro- prement scientifiques et s’enferme trop dans un dogmatisme étroit que les faits font souvent écla- ter. Le commerce, et aussi l’agriculture et l'indus- trie, — puisque aussi bien il y a une économie industrielle et une économie rurale, comme il y a une économie commerciale, — ne connaissent que des réalités et s’accommodent mal de principes abstraits que cerlains économistes veulent faire triompher à tout prix’. C'est ainsi, par exemple, que la Géographie, entendue comme l’étudedes relations entre l’homme et le milieu terrestre, apporte à l'Économie politique une précieuse contribution, dont nous avons déjà fourni des preuves aux lec- teurs de cette Revue. Il n'est pas jusqu'à la légis- lation même qui ne doive s'imprégner de cet esprit scientifique, et tel est bien le sens de l’évo- lution qui se poursuit aujourd'hui. 4 Un travail de M. A. E. Sayous sur l'Enseignement de l'Economie politique dans les écoles de commerce (Bulletin de la Fédération des Industriels et des Commerçants français, mai 1905) parait au moment où nous corrigeons les épreuves de uotre article. Nos idées concordent de tout point avec celles de l’auteur. M. Sayous estime que le professeur doit posséder « des notions approfondies moins sur Malthus, Riccardo... que sur l'histoire et la géographie écono- mique »,et que son enseignement doit avoir un triple carac- tère: a) ètre essentiellement pratique ; b) étre vraiment scren- tilique. Qu'on se garde de généralisations aventureuses : seule exacte est la méthode historique, qui relate les faits, les classe et recherche l'influence toujours énorme du milieu ; c) être précis. » — Et c'est M. L. Gallois qui, dans les con- férences précitées sur l'enseignement de la Géographie, écrit encore : « La géographie humaine est le support des faits économiques qui sont la règle de la vie moderne. Elle ajoute le témoisnage des conditions naturelles et du milieu à celui que les langues et l'histoire fournissent pour la con- naissance des sociétés humaines. » 652 II L'enseignement commercial a, lui aussi, ses degrés. On peut distinguer en tous pays un ensei- gnement moyen et un enseignement supérieur. Le premier est donné chez nous dans une cinquan- taine d'écoles pratiques de commerce, où l’on peut le suivre avec profit à la sortie de l’enseignement primaire; le second appartient aux quinze écoles supérieures, qui recrutent leurs élèves à la fin des études secondaires. L'enseignement moyen s’a- dresse au grand nombre; il n'a pas pris en France le meme développement qu'en Allemagne et aux États-Unis, où des enquêteurs sérieux considèrent sa diffusion comme étant une des causes qui ont le plus contribué à la formation d'un esprit d'ini- liative hardie et au recrutement d’une classe ayant une instruction plus forte que la moyenne des employés et des petits commerçants français. Nous aurions intérêt, en conséquence, à le répan- dre davantage, en le rendant gratuit, comme c’est le cas dans les deux pays précilés. Un certain nom- bre d'établissements d'enseignement secondaire, collèges ou lycées, pourraient aussi créer une sec- tion commerciale, dont les élèves suivraient en commun, avec leurs camarades d’une seclion scientifique, des branches d'instruction générale, et recevraient à part l'instruction technique. Ce système, financièrement économique, facile à réa- liser, donne, aux États-Unis et dans quelques écoles suisses, d'excellents résultats". Notre enseignement supérieur, plus ancien, esl ? L'Ecole de Commerce du Locle, où nous professons, est ainsi organisée, comme section de l'École normale d'insti- tuteurs et d'institutrices. Elle compte trois années d'études et de 30 à 40 élèves qui suivent en commun, avec eurs camarades, des cours de grammaire et de littérature d'al- gèbre, de physique et de chimie. En vue des besoins ndus- P. CLERGET — L'ESPRIT SCIENTIFIQUE DANS L'ENSEIGNEMENT COMMERCIAL plus solidement organisé. Nous avons essayé d'em tracer un programme rationnel et général, enn insistant principalement sur l'esprit qui doil l’animer et que nous considérons comme escale Il doit être spécialisé en raison de son étendue M beaucoup d'Écoles supérieures ont une section dela Banque, une section du Commerce général; 0 commence à créer des sections coloniales : c'est là une idée fort juste, que nous aurions dû mettre en pratique depuis longtemps déjà. Si nos colonie manquent d'agriculteurs, les commerçants leur fonb encore plus défaut, et, cependant, ceux-ci sont des stimulants, des créateurs de débouchés, le grand desideratum d'aujourd'hui. Dans le même ordre d'idées, nos Écoles de province doivent êtres résolument et nettement régionales, et suivre l'exemple de celles de Lyon et de Marseille, qui ont ouvert respectivement des sections de lissage, des produits chimiques et de navigation. Cest ainsi qu'elles serviront le mieux les intérêts de l’'in= dustrie nationale. Enfin, avec quelques modifi- cations dans les programmes, nous pouvons faire de nos écoles supérieures, à l’imilation des Amé=— ricains, des écoles de journalistes et de consuls, si nous estimons que la presse doit placer au pre- mier rang de ses préoccupations les questions économiques, et que le devoir essentiel de nosrepré= sentants à l'Étranger est de veiller à la sauvegardes et au développement de nos intérêts commerciaux: P. Clerget, Professeur à l'École de Commerce du Locle (Suisse.) triels locaux, l'école a ouvert un cours d'horlogerie commer=« ciale. L'âge d'entrée est de quatorze ou quinze ans. Les: jeunes garçons sont préparés, en outre, aux examens fédé= raux des postes et des douanes. Enfin, l'école est mixte, et nous n'avons jamais eu qu'à nous louer de celte expérience de coéducation. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Oo: BIBLIOGRAPHIE ÿ ANALYSES |A 4° Sciences mathématiques “Borel (Emile), Maitre de Conférences à l'Ecole Nor- male supérieure. — Leçons sur les Fonctions de variables réelles et les développements en séries de polynomes, professées à l'Ecole Normale supé- rieure, rédigées par M. M. FrécHer, avec notes par MM. P. PainLevé et H. LEBE gène, esl à peine sensible au champ électrique el ne montre pas les raies du bore; si l'on introduit un peu de lithium, | de potassium ou de sodium, réducteurs de l'anhydride bo- : rique, la flamme devient beaucoup plus sensible au champ | électrique, etce sont les vapeurs vertes qui S inelinent; cette | | | CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 667 atomes qui ont perdu des électrons) est due à l'ébran- lement produit dans ces atomes au moment de leurs chocs mutuels, conséquences du mouvement calorifique, en vertu d’une action de voisinage résultant de la péné- “ration réciproque des champs électriques de deux atomes près d'entrer en collision. Les halos des raies principales et le fond continu formé par l’élargisse- ment et l’'estompage des raies des séries secondaires sont dus à une hétérogénéité primaire, causée par influence des molécules voisines des centres d'émis- sion, et augmentée secondairement par la propagation du mouvement à travers des couches absorbantes - troublées elles-mêmes. M Ces conclusions doivent être rapprochées de celles de MM. Starck’, qui attribue également à des ions de valence ulifférente les deux spectres du mercure, spectre d'arc et spectre de lueurs. F 4 $ 5. — Chimie biologique { Les cafés sans caféine. — C'est à la présence “le la caféine qu'on attribue généralement l’action excitante de l'infusion de café. Les graines des diffé- rentes sortes (espèces ou variétés du genre Coflea) ren- “ferment une assez forte proportion de cet alcaloïde, “environ 10 à 15 grammes par kilog, quelquefois même davantage. Il y a cependant des exceptions à cette règle. M. Ga- _ briel Bertrand a montré, en 1901, que le café origi- naire de l’île de la Grande Comore ne contient pas la Mhlus petite trace de caféine. Cette exception a paru d'autant plus curieuse que le café en question res- Semble beaucoup à l'espèce ordinaire, ou Coffea ara- Mbica; Frœhner à mème prétendu qu'il en était une simple variété. … M. Gabriel Bertrand s'est demandé ce qu'il fallait penser de cette absence de caféine, quelle importance “pouvait avoir ce caractère, et voici ce qu'il a trouvé: “out d'abord, l'absence de caféine ne peut être attri- “buée à l'influence ni du sol, ni du climat de l'ile afri- aine, car l'analyse du Coffea arabica, cultivé dans la “mème île, indique une teneur normale de 13 gr. 4 par -kilog de graines. … Ce n’est pas non plus un cas accidentel, par exemple “origine pathologique ; M. Gabriel Bertrand a constaté, en effet, l'absence de caféine dans trois nouvelles espèces de café, provenant de Madagascar et étudiées récemment par M. Dubard. Or, ces espèces sont très ifférentes les unes des autres et différentes aussi du Goflea arabica. I faut donc considérer désormais l'ab- “sence de caféine dans certains cafés plutôt comme un “caractère physiologique normal, de valeur au moins “spécifique, et dont on pourra tenir compte, avec avan- “age, dans l'étude systématique du genre Coffea. E Ces résultats permettent déjà de trancher le cas dou- teux du café de la Grande Comore et de caractériser cette espèce comme réellement distincte du Coflea ara- Dica; mais il faut surtout les envisager comme l'exemple d'un nouveau genre de services que la Chimie biolo- hgique est appelée à rendre aux Sciences naturelles, “quand les classifications tiendront un plus grand compte de l’ensemble des caractères particuliers aux êtres vivants. —… Ces résultats suggèrent encore une remarque. Tous les cafés sans caféine connus maintenant proviennent de Madagascar ou d'iles extrémement voisines. Etant donnée l'allure spéciale de la faune et de la flore de la grande ile africaine, il est au moins curieux de voir les cafés originaires de cette région présenter, mais cette fois au point de vue physiologique, un caractère qui na pu être retrouvé encore dans aucune espèce des régions continentales environnantes. Enfin, il est permis d'entrevoir un intérêt pratique SU EN NT A ART IQ expérience montre en même temps que les atomes peuvent être, dans la flamme, liés ou libres. 4 Ann. der Physik, t. XVI, p. 490-515. de la découverte des cafés sans caféine. Il suff.t, pour cela, de se rappeler le nombre des consommateurs aux- quels l'usage du café ordinaire est interdit à cause de son action physiologique et qui seraient certainement très heureux de pouvoir satisfaire leur goût ou tromper leur habitude sans aucun inconvénient pour leur santé. S 6. — Agronomie La production cotonnière mondiale. Son extension nouvelle. — Les Etats-Unis d'Amérique ont toujours été et sont encore les plus grands produc- teurs de coton du monde. Actuellement, leur produc- tion représente 70 °/, du total mondial; celle des Indes anglaises est de 15 °/,, celle de l'Egypte de 8 0/4, et celle du reste du monde de 7°}, seulement. Cette situation inquiète vivement l'industrie euro- péenne depuis quelques années, et cela pour deux raisons : La première réside dans le développement de la con- sommation de la matière première aux Etals-Unis même. Ce pays exportait autrefois la totalité de sa production; mais il a, depuis peu, installé chez lui des filatures et des tissages, dont les besoins sont de- venus rapidement importants, puisqu'ils employaient 2.500.000 balles en 1891 et # millions en 1902. Ce dernier chiffre représente 40 /, de la récolte américaine, et il n’est pas douteux qu'il suivra le mouvement ascendant. de la population du pays. La deuxième consiste dans l'élévation du prix de la matière première disponible, monopolisée par les trusts. Raréfaction de la marchandise et élévation de son prix d'achat constituent donc une double menace pour la sécurité de l'industrie européenne. D'ailleurs, des filatures anglaises ont déjà dû chômer faute de matière à travailler, au commencement de 1904. Elle s’en est rendu compte et elle cherche à s'y sous- traire par le déplacement de l’axe de la production. L'industrie anglaise et l'industrie française font appel aux facultés productives des colonies de leur pays res- pectif. La première a, en 1902, formé une société, la «British Cotton Growing Association »,au capital de 50.000 livres sterling, dans le but de développer la culture du textile dans les colonies et protectorats britanniques. En 1904, le capital fut porté à 500.000 livres sterling et le roi Edouard VII accorda à la société une charte royale, donnant ainsi un caractère national à son œuvre. Elle a déjà obtenu des résultats; la seule colonie du Lagos a expédié, en 1904, pour 150.000 livres sterling de coton. L'industrie française n’est pas restée en retard. En 4901, la plupart de ses syndicats régionaux se sont fédérés en une société, «l'Association cotonnière colo- niale », qui, avec des moyens plus modestes, à engagé une campagne de propagande active pour la reprise de la culture au Sénégal et son introduction dans les colonies de l'Afrique occidentale (Guinée francaise, Fouta-Djalon, Soudan, Dahomey), et mème à Mada- gascar et en Indo-Chine. L'année dernière, elle a étendu son action à l'Algérie, dans le département d'Oran, qui, à l'époque de la guerre de sécession d'Amérique et du blocus qui en a été la conséquence, s’est fructueusement livré à cette culture, bénéficiant de prix exceplionnel- lement élevés, joints à une prime à la production allouée par l'Etat. ; Frappé par le mouvement économique que je viens d’esquisser, j'ai, de mon côté, songé à renouveler, à l'Ecole de Philippeville, des essais culturaux pratiqués il a une dizaine d'années dans le département d'Oran, et qui avaient eu pour conelusion l'impossibilité de Ja culture par suite de l'insuffisance des prix de vente de l'époque. Mon essai de 1904 a porté sur sept variétés de cotonnier : deux à courtes soies, trois à moyennes soies ou égyptiens, et deux à longues soies. Je passe sur les détails culluraux. Les fibres récoltées ont été jugées etévaluéespar des spécialistes du Havre. Les prix qui leur ont été attribués représentent une production 668 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE brute à l’hectare de : 770 francs pour un courtes-soies; 900 francs à 1.125 francs pour un égyptien; et1.350 francs pour un longues-soies. Il n'est pas douteux que cette production est avantageuse; et, si elle est confirmée par des essais ultérieurs, déjà engagés, on pourra préco- niser la culture du cotonnier en Algérie, dans les sta- tions à sa convenance. F. Godard, Directeur de l'Ecole d'Agriculture de Philippeville. $ 7. — Biologie Les Problèmes de la Biologie. — Dans une Conférence faite à l'Institut général psychologique, M. le Professeur Yves Delage a entretenu le publie des « Problèmes de la Biologie ». Son but n’était pas d’ex- poser toutes les questions biologiques dont on poursuit actuellement la solution, mais plus simplement de marquer nettement l’évolution qu'a subie la Biologie, d'indiquer ses méthodes actuelles et les résultats qu’elles fournissent. Entre Aristote, dont l'étendue du savoir et la finesse de pénétration sont étonnantes, et le xvme siècle, la Biologie n'existe pas. C’est Linné et Buffon qui lui donnent sa première impulsion sérieuse; puis ce sont les Cuvier, les Lamarck, les Geoffroy Saint-Hilaire qui contribuent au développement de cette science. La transformation de la Biologie fut rapide. Après avoir étudié l'extérieur des organismes, on en étudia à fond la structure à l’aide du microscope et du mi- crotome, et, maintenant, la Zoologie est devenue une science expérimentale. Le biologiste s'efforce de con- naître le pourquoi aussi bien que le comment de la structure, et, pour cela, l'observation ayant donné à peu près tout ce qu'elle pouvait fournir, 1l a recours aux expériences. Par quelques exemples typiques, M. Delage a montré les résultats obtenus par l'expérimentation. Comment expliquer, par exemple, le mouvement de certains organismes rudimentaires comme les Amibes? On n’a pu répondre à cette question jusqu'au jour où Bütschli fabriqua du protoplasma artificiel avec des cristaux de soude, de l’eau et de l'huile, et constata que, dans ce protoplasma aussi, il se trouvait des vacuoles, en vertu des lois physico-chimiques, et qu'en vertu des mêmes lois, de celle de la tension superti- cielle en particulier, des vacuoles se déplacaient, se fusionnaient avec d’autres, disparaissaient, se refor- maient, tout comme chez l'amibe, et, de la même facon, engendraient du mouvement. Ainsi la mobilité des Amibes s'explique par la Physique et la Chimie. Seule, l'expérimentation pouvait fournir ce résultat; l’obser- vation serait restée impuissante. C’est encore l'expérience qui explique les phénomènes compliqués de distribution de matière et de cloisonne- ment qu'on voit dans la cellule qui se divise. La matière se place dans la cellule comme les parcelles de quinine dans un vase rempli de térébenthine et traversé par un courant électrique. Dans la cellule aussi, il peut y avoir des courants. Les lecteurs de la Revue connaissent les curieux résultats obtenus dans l'étude des phénomènes de la fécondation par les expériences de Loeb. Ce savant a montré, en effet, que toute la transformation qui s'opère dans l'œuf fécondé peut être produite aussi par des produits chimiques, le plus actif paraissant être, comme l'a découvert M. Delage, l'acide carbonique. L'action du gamète mâle n'a donc plus rien de spécifique, ni de mystérieux : il agit chimiquement. Loeb a, d’ailleurs, réussi à féconder un œuf par le gamète mâle d'une espèce éloignée, simplement en traitant l'œuf par une solution saline qui a rendu l'œuf excitable par ce ga- mète. C'est encore l'expérimentation qui a montré que la théorie de l'œuf mosaïque, c'est-à-dire de l'œuf renfer- mant le germe de chaque organe, ne peut guère être soutenue. Un biologiste à coupé en deux, au hasard, deux œufs doursin déjà segmentés, et, par pression, il a accolé deux moitiés des deux œufs. Dans ces condi=M tions, il faudrait un hasard vraiment étonnant pour que chaque moitié renfermät exactement ce qui manque à l'autre, pour que l'on eùt coupé les deux œufs exacte- ment selon le même plan. Aussi, du fait que ces deux moiliés donnent un être complet, à qui rien ne manque et qui n’a rien en excès, peut-on conclure que 1es premières divisions de l'œufne sont pas aussispécialisées qu'on l'a cru. ‘ La tératogenèse expérimentale permet de fabriquer à volonté des monstruosités. Le simple jeu de la tem pérature a permis d'obtenir les formes tropicale et arctique d’une même espèce de papillon. En somme, le biologiste moderne, tel que le décrit M. Yves Delage, ne ressemble en rien au disciple qu commentait Aristote, ou aux naturalistes d'une époque encore récente, qui raisonnaient sans observer, ou bien qui observaient l'extérieur des bêtes sans raisonner, ou qui encore prenaient la description d'une bête morte pour la Biologie, qui est la science du vivant. Et ce biologiste n’est pas simplement un amateur qui fait dess expériences curieuses : ses expériences sont toutes suggérées par un problème à résoudre; elles apporten des conclusions qui permettent d'établir ou de détruire des hypothèses; elles nous font entrevoir des horizons dont l’idée même n'existait pas il y a trente ans. Notons, enfin, que les Biologistes ne s'intéressent pas seulement aux faits de la Zoologie et de l'Anatomie; ils envahissent le domaine de la Psychologie. C'est ainsi qu'au Laboratoire de Roscoff, que dirige M. Yves De= lage, existe une annexe de l'Institut général psycho= logique, où l'on peut étudier la psychologie desk animaux inférieurs. Malheureusement, les laboratoires nécessaires aux biologistes, si richement pourvus aux Etats-Unis, sont trop pauvres en France. Ils manquent: d'argent, car l'Etat ne peut faire assez pour eux, et la générosité des particuliers est chose rare en notre pays? Pourtant, la Biologie française à d’admirables états de service; il serait urgent de lui permettre de conserve son rang, en dotant ses services des instruments et des ressources qui leur permissent de poursuivre leu tâche et de travailler aux progrès de la Biologie. $ 8. — Sciences médicales L’Assistance médicale indigène en Afrique occidentale française. — M. Roume, gouverneum général de l'Afrique occidentale française, vient d’orgas niser un Service d'Assistance médicale indigène, dont le but est de procurer gratuitement aux populations indis gènes des soins médicaux et des conseils d'hygiène générale. Ce service sera assuré par des médecins des troupes] coloniales hors cadres ou des médecins civils recrutés en France par engagement individuel. Les médecins civils de l'Assistance médicale indigène sont engagés pour une durée de cinq années, divisée er deux périodes de deux ans suivies chacune d’un congé. de six mois. Ils reçoivent une solde annuelle de 10.000 francs; ils ont droit, en outre, mais seulemenb pendant le temps de leur présence en service en Afrique occidentale française, à une allocation annuelle d8 2.000 francs, leur tenant lieu de toute indemnité de déplacement, de cherté de vivres ou autre. La protection de l’enfance en Indo-Chines: — M. Lucien Graux vient de publier sur ce sujet um article très intéressant dans le Progrès médical". Wa mortalité infantile est très considérable en Indo-Chines Elle a atteint 65 °/, jusqu'en 1900, dont 42 °/, des suites du tétanos et cela pendant les premiers mois de la vien En effet, les sages-femmes (ba-mu) sectionnaient Je cordon ombilical en le broyant avec un tesson de bou= teille ou un morceau de porcelaine trouvé dans un coin 4 4 ! Progrès médical, 1905, 29 avril. FRE CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE de jardin ou dans un tas d'ordures. Le pansement con- sistait dans l'application de quelque chiffon sale trouvé dans un coin de la case. On le trempait dans de l'huile qui restait exposée d’une façon permanente à la pous- sière. De plus, les maladies intestinales étaient très fré- quentes, car, dès la naissance, on gavait l'enfant de riz cuit écrasé en purée; enfin, l'abus de thé provoquait des convulsions. Toutes ces erreurs n'ont pas encore été abandonnées, et, sur bien des points de notre colonie, on observe encore ces pratiques nocives. Cependant, grâce à des initiatives individuelles comme celle du maire de Cholon, M. Drouhet, la mortalité infantile a beaucoup diminué. Des brochures (conseils aux mères) … sont distribuées par l'Association maternelle. Un asile “ pour enfants malades et abandonnés fonctionne parfai- tement. Enfin une école pratique de sages-femmes va doter toute la région d'un.corps de sages-femmes expé- rimentées. La mortalité infantile est ainsi tombée à Cholon de 65 °/, (1900) à 37 ©/, (1904), et les décès par tétanos de 42 °/, à 22 0/4. Ce sont là des résultats très “remarquables, qu'il serait bon de voir encourager par … les Pouvoirs publics. Neurasthénie de l’'ouvrier et du pauvre. — …I1 était admis, au moins jusqu'à ces derniers temps, que la neurasthénie était une maladie de la classe riche. Mais voici que, simultanément, viennent de paraître, en «— France et en Allemagne, deux études très documentées, qui semblent prouver que les ouvriers et les pauvres sont exposés, aussi bien que les riches, à cette névrose rebelle. — Le travail de MM. Leubuscher et Bibrowicz! porte “sur 1.564 ouvriers neurasthéniques soignés au Sana- “ torium populaire de Beelitz, appartenant à la Caisse «d'assurances ouvrières de Berlin. Il était intéressant de “donner tout de suite ce détail, parce que, tout en indi- quant la grande fréquence de la neurasthénie parmi les ouvriers allemands, il établit en même temps que … ces malades sont bien des ouvriers et que leur neu- “rasthénie était assez grave pour amener une incapacité absolue de travail. Il semble résulter de cette étude que la grande cause de la neurasthénie chez l'ouvrier alle- mand, comme probablement aussi chez l'ouvrier fran- çais, — mais, chez nous, des recherches n’ont pas encore été faites à ce point de vue spécial, — est le désaccord . profond qui existe aujourd'hui entre le travail propre- ment dit de l’ouvrier, d'un côté, sa vie et ses aspirations, “de l’autre. Ce travail ne l'intéresse pas, ne lui donne aucune satisfaction, et il n’en retient que la fatigue … physique qu'il lui impose. D'autre part, le soir, au lieu de prendre un repos bien gagné, il va aux réunions, aux conférences et aux bibliothèques, d’où un surme- nage intellectuel considérable qui, joint à la fatigue physique, engendre la neurasthénie classique avec ses - symptômes bien définis. … Tout autre est la neurasthénie du pauvre, que vient de décrire en France M. Iscoyesco®?. Toute l’étiologie de - cette neurasthénie, l’auteur la fait tenir dans le mot misèreet, c’est pourquoi, sans doute. le tableau sympto- matique en est profondément modifié; en effet, d'après lui, ce qui caractérise cette forme c’est, d'une part, l'absence de céphalalgie en casque et de rachialgie, l'absence d'insomnie et de fatigue au réveil, et, d'autre part, l'asthénie musculaire tenant à un affaiblissement réel de la force musculaire, l'apathie et l'indifférence remplaçant l'émotivité et l'hypochondrie, enfin l’atro- phie glandulaire généralisée. Et, en effet, les symptômes de cette neurasthénie sont tellement modifiés que l'on peut se demander si l’on n'a pas affaire, non pas à une forme spéciale d'asthénie nerveuse, mais bien à quelque atrophie dégénérative généralisée. Quoi qu'il en soit, ! Deutsche med. Wochensch., 1905, n° 21, p. 820. ? Bulletin médical, Paris, 1905, p. 359. 669 nous devons constater que la neurasthénie n'est pas un privilège de la classe riche en général, et des savants en particulier. Génio-spasmes et génio-ties. — Les tics peu- vent siéger sur tous les muscles du visage; ils peuvent se localiser aux seuls muscles du menton. M. Henri Meige signale l'existence des tics du menton (génio- ties), qu'il importe de distinguer des génio-spasmes, mouvements convulsifs participant aux caractères des spasmes proprement dits et liés à une irritation d'une branche du nerf facial (Société de Neurologie, 6 avril 1905). Massaro a décrit des mouvements convulsifs des muscles du menton se reproduisant tous les mêmes chez vingt-six membres d'une même famille pendant cinq générations. Il s'agissait vraisemblablement de ties familiaux. Les muscles du menton jouent, en effet, un rôle dans la mimique du pleurer et de la frayeur. Chez l'enfant, les pleurs sont souvent annoncés par un plissement de la peau de la région mentonnière, auquel succède l'abaissement des commissures labiales don- nant à la physionomie un aspect caractéristique. $ 9. — Sciences diverses A propos de la Représentation proportion- nelle. — Nous recevons de M. A. Meyer la lettre sui- vante : « Je me vois forcé, à mon très grand regret, après avoir pris connaissance dela nouvellelettre deM.Rouyer, d'ajouter quelques mots pour relever — très brièvement — certaines assertions inadmissibles. « M. Rouyer veut bien reconnaitre que la constatation que j'avais faite d’une suppression de mots, dans une phrase dont il prétendait citer les propres termes, était exacte. Mais, en même temps, il travestit grossièrement ma pensée en s'efforçant de m'attribuer une argumen- tation de haute fantaisie. «Il est incontestable, dit-il plaisamment, que la suppression incriminée bouleverse totalement le sens de la phrase ». Cela est tellement loin de ma pensée que je ne m'étais même pas aperçu, tout d'abord, en lisant sa lettre du mois d'avril, de la modification du texte. Cependant j'eus l'impression très nette que, si j'avais eu la phrase citée par M. Rouyer sous les yeux, j'aurais légèrement modifié la forme de ma rédaction. En vérifiant, je m'apercus que M. Rouyer avait imperceptiblement modifié son texte par une sup- pression de mots qui, certes, ne bouleverse pas « tota- lement» le sens de la phrase, mais qui constitue une modification sensible et tendancieuse’. J'avais le droit de le constater dans ma réponse. s « C'est ce que j'ai fait, sans vouloir en tirer aucun argument?, contrairement à ce quaflirme M. Rouyer à deux reprises dans sa lettre. Où donc M. Rouyer a-t-il pris l'argumentation que je me serais eflorcé d'en tirer? Pour ne pas prolonger cette étrange et inutile discussion, il me sera permis de renvoyer M. Rouyer à la lecture de ma réponse du mois de mai et à celle de mon article de février. « Il me serait facile de montrer à quel point les autres assertions de M. Rouyer sont mal fondées. Je me borne à cette simple et essentielle rectification. « Alf. Meyer. » Il y a un point sur lequel la Revue est de l'avis de M. Meyer : c’est que de telles discussions sont, comme il le dit, inutiles. L. Olivier. 1 Il est possible, je me plais à l'admettre, que M. Rouyer ne se soit pas bien rendu compte du caractère tendancieux de cette suppression. Le fait n'en est pas moins regrettabel dans une citation d'un texte qu'il me reprochait d'avoir interprété inexactement. k s 2 J'aic tiré argument», non pas de cette suppression, mals de l'erreur évidente qu'il commet dans sa juslification de la principale des règles du système d'Hondt. 670 L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE ET LA CONSTRUCTION DES BALLONS SPHÉRIQUES Qu'est-ce qu'un aéroslat? La réponse est facile, sans doute, et chacun'dira : un aéroslat est un appareil qui permet de se main- tenir dans l’espace; mais on peut concevoir de deux facons les appareils susceptibles de jouer ce rôle, suivant qu'ils sont plus lourds ou plus légers que l'air. Des premiers, toutefois, on ne saurait parler qu'au latur, — car on n'a pas jusquà présent réussi à en établir un seul bon exemplaire, — et même au conditionnel, car bien des obstacles s'op- posent encore à leur complète réussite *. Les appareils de la seconde catégorie ont seuls recu la consécration de l'expérience et permis d'explorer tant bien que mal l'Océan aérien : ce sont les ballons. L'ensemble des organes d’un ballon doit donc, par définition, peser moins que l'air déplacé; et, comme ces organes comprennent nécessairement des matériaux solides plus lourds que Fair, il est indispensable, par compensalion, d'aménager une capacité assez vaste que l'on remplira d'un gaz beaucoup plus léger. L'idéal serait évidemment d'y pratiquer le vide; mais l'enveloppe serait alors écrasée par la pression atmosphérique agissant du dehors sans trouver de contre-partie intérieure; et, si l’on voulait donner à cette enveloppe la force de résister, en la munissant d'une carcasse métal- lique, cet organe nouveau pèserait Lellement qu'on perdrait tout le bénéfice de la légèreté obtenue en faisant le vide. Il faut donc se résigner à remplir la capacilé du ballon avec un gaz dont la tension soulienne l'enveloppe, tout en pesant moins que l'air dont il tient la place. Ce g1z léger, les Montgolfier s'étaient contentés de l'obtenir en dilatant l'air intérieur par échauffe- ment. Le physicien Charles, au contraire, adopta l’hydrozène. C'est encore le gaz par excellence des aéronaules; et, si on lui substitue très souvent du gaz d'éclairage, malgré l'augmentation de poids qui en résulle, c'est uniquement parce que ce der- nier gaz est économique et qu'on le trouve par- toul. Les ballons à air chaud s'appellent des montyol- ! I] n’est que juste, cependant, de dire que l'aviation est entrée dans une ère nouvelle et qu'il n'est plus téméraire d'espérer une prompte et favorable solution du problème, depuis les expériences américaines de M. 0. Chanute et des frères Wright, qui ont déjà rencontré des émules en France. ballons aux appareils gonflés au gaz d'éclairage ou à l'hydrogène : nous nous occuperons uniquement de ceux-ci. I. —— THÉORIE DU BALLON. CALCUL DES RÉSISTANCES. $ 1. — Force ascensionnelle. Archimède a dit, ou à peu près : « Tout corps plongé dans un fluide en reçoit une poussée verti= cale, dirigée de bas en haut el égale au poids du fluide déplacé ». L'anlique philosophe syracusain serait sans doute un peu surpris, s'il revenait parmi nous, de voir à quel usage nous avons appliqué le principe par lui découvert et à quel résultat sa généralisation nous à conduits. L'Aéros- talique, en effet, n’a point d'autre base, ce qu'un court résumé va justifier. Si un ballon, isolé dans l’espace, se trouve avoÿ à un moment donné le même poids que l'air dé- placé, il est clair que ce ballon est en équilibre, el ne tend ni à monter ni à descendre. Toute diffé- rence survenant entre les deux poids constitue une rupture d'équilibre, qui détermine le mouvement vertical de l’aérostat, dans un sens ou dans l’autre; il monte si la poussée de l'air l'emporte, et l'on nomme souvent force ascensionnelle du ballon la force résultante sous l'impulsion de laquelle il se meut alors. IL vaudrait mieux, semble-t-il, laisser le nom de rupture d'équilibre à cette force essen= tiellement variable et que modifient les influences les plus diverses, en réservant le mot de force ascénsionnelle à la différence des poids spéci= fiques de l'air et du gaz, ce qui conslitue la ca= ractéristique aérostatique du gaz employé. Si l'on considère une bulle de gaz de 1 mètre cubes sous une enveloppe impondérable, la force ascen= sionnelle du gaz ainsi définie représente précisés ment la poussée qui tend à faire monter cette bulle verticalement. On voit que l'étude du ballon exige que l'on connaisse la force ascensionnelle parlieus lière à chacun des gaz que l'on peut employer à les gonfler, En prenant, comme point de départ, Ie poids spécifique moyen de l'air et des différents gaz usités en Aérostatique, voici la force ascen-- | sionnelle moyenne de chacun de ces gaz : Î | Air chaud (montgolfières) . 200 grammes. GaziléC IN CR RENE ES 650 — Hydrogène commun . . 1.100 — Hydrogène très pur (obtenu par électrolyse) . 1.180 à 1.200 gr. $ 2. — Forme de l'enveloppe. Le plus souvent, la forme générale du ballon dérive de la sphère, soit qu'elle se raccorde vers la base par une large inflexion avec un appendice allongé servant au gonflement, soit que cet appen- dice se trouve réduit à une manche cylindrique rattachéeau pôle inférieur sans courbe sensible de raccordement. Le premier système en forme de poire a été usité dans les débuts de l'aérostation ; le second est beaucoup plus em- ployé aujourd'hui (fig. 1). — D'une manière géné- rale, on peut donner au ballon une forme quel- conque, à la condilion que le volume ne soit pas sus- ceptible de s'accroitre par suite des déformations que la pression du gaz peut faire subir à l’enve- loppe. Il serait imprudent de lore hermétiquement cette enveloppe. Le volume du gaz,en effet, subit des variations considérables, “non seulement par suite des variations incessantes Mes conditions de température où il se trouve placé, “mais surtout par le simple jeu de l'ascension, qui Bora le ballon à travers des zones où la pres- | | | | | | | | “ic. 1. — Comparaison de —…._ la orme en poire (A) et de la forme sphérique avec manche (B). ion de l'air va en décroissant progressivement. Si Vexcès du gaz dilaté ne trouvait pas une issue, la nsion intérieure de plus en plus grande finirait par faire éclater le ballon, comme il arriva, en 1784, “au premier ballon librement lancé dans l’espace, po on avait ligaturé l'appendice. Ce ballon, fort heureusement, n'emmenait aucun voyageur. Il faut “done que la manche puisse s'ouvrir au gré d'un déger excès de pression. Examinons ce qui se passe dans ces conditions. LA LL. un fl 3. — Pression apparente. Lorsque le ballon est plein de gaz, jusqu'à l'ori- fice de la manche d'appendice, il est évident que la pression du gaz sur la tranche de cet orilice est la même que la pression de l'air dans le même plan horizontal (fig. 2). Nous appellerons p, celte pres- sion commune. Il n'en sera plus de même dans tout autre plan horizontal; et, si nous désignons par p et p'les pressions respectives de l'air et du gaz dans le L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE 671 suffisamment approchée, les variations de pression en passant d'un niveau à l’autre, sous la forme : Po —p—= az, Po — p'—#Dz, où a et b sont respectivement les poids spécifiques de l’air et du gaz. Et l’on en déduit la différence de tension du gaz et de l’air sur la même horizontale MM': pl —p=(a—b)z7; (a — b) représente précisément la force ascen- sionnelle du gaz considéré; désignons-la par A et nous aurons : P—pi— Az. Telle est Ja valeur de la {ension apparente; c'est celle qui tend l’étoffe vers l'extérieur. Elle croît depuis l’orifice libre de l’appendice jusqu'au zénith, où elle est maximum. C’est pourquoi un trou percé dans la région supérieure du ballon est plus dan- gereux que partout ailleurs, puisque le gaz s’en échappe avec la Lension maximum ; et il est naturel, par suite aussi, de placer au pôle supérieur la sou- pape destinée à l'évacuation rapide du gaz pour la manœuvre ou l'atterrissage. On voit également qu'il suffit d’allonger la man- che pour augmenter les tensions intérieures autant qu'on le veut‘. On a intérêt à le faire dans certains cas, par exemple pour les ballons captifs, afin de leur permeltre de résister plus efficacement, sans poches ni déformations, à la pression du vent et aux rafales. La seule limite d’allongement de la man- che et d'accroissement de la tension apparente est donnée par la résistance de l'étofre. $ 4. — Appendice et clapet de süreté. Nous venons d'envisager le cas où le ballon est strictement gonflé jusqu’à l'orifice libre, pour que le gaz s'en échappe lorsqu'il se dilate; mais si, au plan MM’, par z la hauteur de ce plan au-dessus de l'orifice de l’appendice, on aura, d'une facon très 1 C'est l'analogue du paradoxe hydrostatique. 672 contraire, le gaz se contracte, par exemple à la des- cente, la manche s’aplatit automatiquement et se ferme sous la pression de l'air qui prédomine alors, empêchant ainsi toute rentrée d'air dans le bal- lon. On a là le clapet le plus simple et le plus sûr. Les ballons militaires français n'en ont point d’autres et s'en sont toujours bien trouvés; on se contente de changer la longueur de la manche sui- vant les cas. C'est ainsi que le ballon normal de 540 mètres cubes est muni d'une manche de 3 mè- tres pour l'emploi à l'état captif, etde 1,50 pour les ascensions libres. Au contraire, dans la pratique civile de l'aérostation, on a coutume d'employer une manche assez courte et de la fermer au moyen d'un vérilable clapet de sûreté, dont le volet très léger est maintenu sur son siège par des ressorts. Ces ressorts ne cèdent et le volet ne s'ouvre que lorsque la pression intérieure atteint la limite qu'on ne veut pas dépasser; c’est ordinairement la pression d’une colonne d’eau de 2 centimètres. Dans le cas où le gaz contracté remplit insuffi- samment l'enveloppe, toute la masse gazeuse se porlant vers le zénith, la partie inférieure du bal- lon est flasque. Le plan HH’, où la pression est la même à l'intérieur et à l'extérieur, n’est plus à l'ori- fice de la manche, el, pour toute la région située en dessous de ce plan, la pression du gaz étant plus Fig. 3. faible que celle de l'air, celle-ci refoule l’étoffe qui, elle, se soulève d'une facon caractéristique (fig. 3). $ 5. — Résistance de l’étoffe. La connaissance de la pression apparente qui s'exerce normalement en un point de l'enveloppe, et que nous venons d'apprendre à déterminer, per- met également de calculer l'effort auquel l’éloffe doit résister. Supposons, pour un calcul approché, que la tension du gaz soit partout égale à sa valeur L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE maximum p— AH (qu'elle n'atteint,en réalité, qu'aw zénith), et considérons l'effort qui tend à séparer less deux hémisphères suivant le grand cercle horim zontal MM" (fig. 4). 1 L'effort tolal est le même sur la calotte hémisphé- rique que sur le grand cercle ; il est donné par l'ex- pression zkR’p, si R est le rayon de la sphère: l’étoffe résiste sur une longueur égale au pourtour 2rR du grand cercle; et l'on voit que l’6- toffe supportera en définitive, par mètre courant, un effort de traction ({) : - mp Ro. t— = 2rR ane et, en donnant à la pression p sa valeur maximu AH : 1 t=SRAN. Si l'on désigne par + la charge de rupture d l'étoffe que l'on veut employer et par o« un coeffi= cient de sécurité, ii convient que l'effort demandé à l'éloffe ne dépasse pas la valeur = et l’on aura : G — t . Dans le cas d’un ballon (fig. 4) dont le diamètre est 2R —10 mètres, muni d'une manche d’appen dice de 3 mètres, ce qui donne une hauteur totale H — 13 mètres, en adoptant d'autre part pour 1 force ascensionnelle en kilogs : Pour le gaz d'éclairage. . . . . A, —0 kg 650 Pour ihyArooene EE A — KM on déduit les valeurs de la tension de l’étoffe : avec le gaz d'éclairage. . . 28 kgs avec l'hydrogène . . . … : : . «7. 36"kgs Pour une éloffe de ponghé de force moyenne, læ charge de rupture n’est pas inférieure à 760 kilogs par mètre courant, ce qui donne pour le coefficien de sécurilé dans ce cas : Fe 160 ; gaz d'éclairage . . = 35 > z 25 Le} CA 160 hydrogène .. —— 2 ù ë 30 On remarque que le taux auquel travaille l'étoffes est d'autant plus élevé que le gaz ést plus léger, ce qui était à prévoir. En outre, même pour l'hydros bei Bed‘ : CLAË" ,. » à L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATERIEL AÉROSTATIQUE 6173 gène, l'effort que l’on exige de l'étoffe est plus de vingt fois plus faible que la charge de rupture : on voit quelle sécurité présente un lel ballon. ]1 est vrai que la résistance de l’étoffe diminue avec le temps, par suite de l’action du gaz ei du vernis qui la brûlent peu à peu; mais il reste une marge large- ment suffisante pour tranquilliser les plus craintifs. II. — CONSTRUCTION DE L'ENVELOPPE. $ 1. — Des diverses étoffes employées en aérostation. Les étoffes usilées pour la confectiôn des ballons “sont : des cotonnades, des soies et des tissus spé- “ciaux caoutchoutés, ces derniers n’exigeant “point de vernis; les colonnades genre calicot D les étoffes les plus lourdes et les moins résis- lantes ; on ne les emploie que par mesure d'écono- “nie ; les phonghés de Chine, suffisamment résis- “lants et à bon marché, les soies du Japon, et enfin Mes soies françaises sont les meilleures étoffes à “choisir; elles n'ont que le tort de coûter un peu cher. —…._ 1 convient aussi de mentionner la baudruche - parmi les matières susceplibles de donner d’excel- lentes enveloppes de ballon, malière sur laquelle “nous n'aurons pas à nous étendre pour le moment. —. Les étoffes à ballon doivent être légères, souples, “résistantes et faciles à imperméabiliser. La légè- “relé va de soi, comme pour tous les organes d'un “aérostat. La souplesse permettra de manier l’enve- “loppe, de la chiffonner même, sans risquer de l'en- -dommager. Quant à la résistance, nous venons de “voir à quel genre d'efforts une enveloppe est sou- _mise après gonflement. Dans les ballons sphériques, Miout au moins, la résislance dans les deux sens doit être la même, ce qui est le propre des tissus “Simples du genre /oile, où les fils de la trame et de la chaîne sont identiques. On doit examiner avec soin les pièces d’éloffes destinées à la confection “d'un ballon, et vérifier que le tissu est parfaile- ment régulier et à grains serrés. Pour l'essai à la traction, on prélève une bande de 0,05 de large que l'on tend jusqu'à la rupture entre les mà- “hoires d'un dynamomètre spécial. La résistance d'une bonne soie alleint facilement 1.000 kilogs Sur 4 mètre de largeur. On pourrait craindre que les coutures qui sont nécessaires pour réunir les diverses parties de lenveloppe ne constituent des lignes de moindre résistance. [Il est facile de constater qu'il n'en est rien, surtout si l'on a soin d'’interposer de la colle de caoutchouc entre les deux lisières qui se recouvrent. L'étoffe sera d'autant plus facile à imperméa- biliser que les grains seront plus serrés et plus réguliers. Il importe de la débarrasser de tout apprèt qui s'opposerait à l’adhérence du vernis. Les vernis employés sont à base d'huile de lin. Le choix d'un bon vernis est aussi d'une impor- tance capitale; il faut qu'il soit léger, qu'il laisse à l’étoffe Loute sa souplesse, qu'il ne poisse pas TAaBceau |. — Poids de diverses étofes pour une égale résistance. ÉTOFFES RAPPORT de la résistance au poids Pi présentant une résis- tance de 1.000 kgs avant vernissage Pi après vernissage Pa au mètre couranl grammes kgs 400 6.000 300 8.000 200 12.500 gramines 167 125 su Toile de coton . de lin. . Soie ponghé . Soie francaise, tatfetas. 125 20.000 lorsqu'il est see, et qu'il n’attaque pas l'étoffe à la longue. Or, il n'est point de vernis qui remplisse toutes ces conditions d'une manière absolue. En particulier, l'oxydation lente de l'huile sous l’action de l'air ne se fait pas sans produire en même temps une désagrégation de l’étoffe, qui se brûle et perd peu à peu une partie de sa résistance. Le tableau I permet de comparer les diverses éloffes au point de vue du poids, pour une résis- lance uniforme de 4.000 kilogs. Le vernis peut s'appliquer extérieurement ou intérieurement. C'est le vernissage intérieur qui est usité pour les ballons de l'Établissement mili- taire de Chalais; ce procédé offre tout d'abord cet Tagceau II. — Poids de l'enveloppe avant et après vernissage. ACCROISSE- POIDS TOTAL MENT ACCROISSE- successif du poids MENT É à chaque par m° couclie total gramiies grammes grammes Avant vernissage. . 96 Vernie à 4 couche . 235 39 2 couches 281 16 - à! —— 309 2N > 297 — 4 — 325 16 Vernie et enduite d'huile d'olive. 333 8 avantage que la surface extérieure n'est pas pois- sante et que les herbes ou la poussière s'y collent moins aisément au moment de l'atterrissage; en outre, la pression du gaz tend à appuyer le vernis sur les pores de l'étoffe, et contribue à boucher les fissures qui pourraient s'y produire. L'enveloppe de ces ballons militaires est confec- tionnée en ponghé de Chine pesant 80 grammes au mètre carré. À cause des recouvrements et des L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE coutures, le poids est porté à 96 grammes par mètre carré d’enveloppe finie et non vernie. On vernil à quatre couches, auxquelles s'ajoute un enduit final à l'huile d'olive. Ce vernissage — sur- tout les premières couches — accroît nécessaire- ment le poids de l'enveloppe, comme le montre le tableau IT. L'enveloppe en ponghé d'un ballon de 540 mètres cubes (10 mètres de diamèlre environ) pèse 31 kilogs non vernie, et 105 kilogs après vernis- sage. L'oxydation lente que subissent les vernis a aussi pour résultat une légère augmentation de poids (environ 0 gr. 07 par jour et par mètre carré au début). $ 2. — Htoffes doubles et triples. Lorsqu'il s'agit de conslruire un ballon de très grand diamètre, la tension de l'enveloppe, qui va en croissant de la base au sommet comme nous l'avons vu, peut dépasser ce qu'il est permis d'exi- ger en toule sécurité de l'éloffe choisie; et l’on est conduit à employer, au moins dans la région où se produit la plus grande faligue, une éloffe double ou triple, avec inlerposilion d'une mince lamelle de caoutchouc, qui rend les différents feuillets soli- daires et dispense d'un vernissage ultérieur. On est arrivé à fabriquer ces étoffes avec une grande perfection, et leur emploi permet d'obtenir des en- veloppes d'une solidité à toute épreuve. Pour faire les coutures, on décolle les feuillets sur les bords, et en rapprochant les deux étoffes à réunir, on fait chevaucher les feuillets en les intercalant les uns dans les autres. M. Surcouf a employé une étofe de ce genre pour la construction du dirigeable « Le Lebaudy ». Elle se compose de deux épaisseurs de colon léger, avec interposilion d’une lame de caoutchouc qui n'a pas plus de 1/10 de millimètre d'épaisseur. Pour éviter l'action de l'oxygène de l'air, qui dureit le caoutchouc et le rend cassant, ce genre d'étoffe reçoit sur chaque face 7 à 8 couches d'un produit spécial appelé ballonnine ; c'est une dissolution de caoutchouc dans un mélange convenable de benzine et de sulfure de carbone. On en emploie par mètre carré 608 grammes, dont la majeure partie s’éva- pore, ne laissant sur l'enveloppe que 8 grammes de matières solides. L'effet produit par la rapide éva- poration de ce produit est un phénomène analogue à la vulcanisalion, dont il offre les avantages. L’éloffe ainsi préparée ne pèse pas plus de 300 à 330 grammes par mètre carré, y compris les cou- tures. Il est bon de la protéger contre le rayon- nement solaire, qui allaque également le caout- choue, au moyen d'une teinture inactinique à base de chrome ; celte teinture communique à l'enveloppe une couleur jaune caractérislique. $ 3. — Mode de construction. Le mode de construction le plus simple, pour obtenir une sphère avec des éléments de dimen-« sions rectangulaires comme une étoffe, consiste à | décomposer sa surface en fuseaux méridiens, ayant pour plus grande largeur celle de l'éloffe en pièce“ (0°,40 pour le ponghé), en tenant compte du recou« vrement de 0",02 nécessaire aux coutures. On peul« découper les fuseaux à la main, sur un patron de papier fort; mais, dans les grands ateliers de CONS-M truction, on opère ce découpage mécaniquement au moyen d'une scie sans dents, coupant à la fois un empilage d'étoffes pressées; c'est le même pro= cédé qui est usité dans les aleliers de coupe pour vêtements confectionnés. Il importe, d’ailleurs, de disposer le patron sur l'étoffe, de manière à en perdre le moins possible ;« et, à ce point de vue, il semble avantageux d'adop= EN B Soupape Fig. 5. — Modes de construction de l'enveloppe. — A, Tracé par fuseaux ordinaires; B, Tracé par panneaux. ter la coupe par panneaux, en décomposant chaque fuseau par des coutures transversales équidis= tantes. La hauteur de chacun de ces panneaux est prise dans la largeur de l’étoffe, le long de laquelle les différents panneaux se disposent sans grande perte; mais on est ainsi forcé de découper um: grand nombre de morceaux tous différents, ce qui est une complicalion, et la confection de l’en= veloppe exige aussi des coutures très nombreusess Dans l'enveloppe achevée par ce procédé, les: seules coutures continues sont celles des méris diens (fig. 5); les panneaux de deux fuseaux suc= cessifs, au contraire, se chevauchent à joints con= trariés, comme les pierres de deux assises d maçonnerie‘. Cependant, l’emploi des éloffes doubles caout= choutées et la facon dont se font les joints, condui= sent à disposer les panneaux en damier. Les joints dessinent alors des méridiens et des parallèles continus. { Dans le procédé primitif, les seules coutures transvers sales proviennent des rajoutures, les pièces étant cousues bout à bout, avant le découpage. dre rie 4 ; 4 L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE 675 $ 4. — L'étoile et la collerette. Si l'on prolongeait les fuseaux jusqu'à leur ex- trême pointe, il arriverait un moment où leur lar- -geur serait à peine suffisante pour loger les cou- tures. On forme alors la calotte zénithale au moyen d'une collerette en étoffe double, prolongée par des . amorces de fuseaux en étoile. La collerette laisse, en son centre, une ouverture circulaire destinée à recevoir la soupape, sur le pourtour de laquelle on fait une sertissure au moyen d'une cordelette “fortement serrée sur plusieurs tours. III. — La SOUPAPE ET LES APPENDICES. $S 1. — Divers systèmes de soupapes. La soupape (fig. 6 à 9), qui doit être placée, comme nous l'avons dit, au zénith du ballon, est un organe des plus délicats, puisqu'une fuite “intempestive à cet endroit peut provoquer la chute de l'aérostat. Autrefois, on se contentait AZ 0 Ua 7 SSSSS A Q A | S ni SS 11 11 11 11 Fig. 6. — Soupape en bois. d'organiser sur un cadre circulaire deux volets en bois qui s'ouvraient en tournant sur des char- nières, de part et d'autre d'une traverse diamétrale (fig. 6). De simples ressorts en caoulchouc mainte- naient les volets sur leur siège; mais le bois jouait, se gauchissait, et, pour obtenir une fermeture her- métique, on n'avait trouvé rien de mieux que de luter le joint avec un vérilable eataplasme de graine de lin. Au cours de l'ascen- È L— = — sion du grand aérostat l’Uni- vers, où Godard, en 1875, enlevait notamment le colonel Lausse- dat et le capi- taine Charles Re- nard, l’aéronaute voulut donner un coup de sou- pape pour arrê- ter la montée; malheureuse- ment, le lut, qui s'était durci, se brisairrégulière- ment, etles mor- ceaux empêchè- rent les volets de se refermer, ce qui détermina une chute rapide où la plupart des aéronaules furent blessés. La soupape a fort heureusement recu, depuis lors. des améliorations qui lui enlèvent tout danger. Giffard, le premier, disposa sur le bord des volets un vérilable couteau circulaire s'appuyant sur un anneau d'obturation en caoutchouc. Des ressorts mételliques à boudin ont également remplacé les écheveaux de fils de caoutchouc pour maintenir les volels fermés. Le principe, néanmoins, est resté le même, ef la soupape classique, telle qu'on peut la voir encore dans la plupart des aérostats, comporte ur ou deux volels retenus par des ressorts, et s'ouvrant vers l'intérieur du ballon lorsque l’on tire sur une cordelette traversant toute la masse gazeuse, pas- sant par un trou ménagé dans l'hémisphère infé- rieur de l'enveloppe à travers un bouchon, pour aboulir enfin au-dessus de la nacelle, à portée de la main du pilote. On peut améliorerle système en substituant, aux volets tournant aulour de charnières, un clapet circulaire glissant le long d'une tige normale à son plan. C'est le procédé appliqué en France par le cons- trucleur Yon et, en Allemagne, par le capitaine von Sigsfeld, aux ballons militaires (fig. 7). Néanmoins, les soupapes de ce genre participent toutes des mêmes inconvénients généraux, savoir : 1° L'impossibilité d'apprécier le degré d'ouver- Fig. 7. — Soupape allemande Sigsfeld. 676 L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE ture et, par suile, le débit dans un lemps donné, ce qui expose à lâcher trop ou trop peu de gaz; 2° La nécessité de maintenir la traction sur la cordelette de commande pendant tout le temps qu'on juge à propos de laisser la soupape ouverte. C'est ainsi qu'au moment de l'atterrissage, lorsqu'il s’agit de vider complètement le ballon, l'aéronaute est obligé de se suspendre, pour ainsi dire, à la corde de soupa- pe, alors qu'il au- rait besoin de ses deux mains pour les soins mulli- ples que réclame la situalion, tan- dis que les ra!a- les donnent à l'enveloppe, en partie dégonflée, un mouvement de soufflet qui allonge et rac- courcitirréguliè- rement la dis- lance de la sou- pape àlanacelle, sans que le pilote puisse se rendre un compte exact de son action sur la soupape. Un bon appa- reil devrait donc être conçu d’au- tre_sonte“eit comporter deux modes d'action distincts : le pre- mier, MOomenta- né, pour les ma- compose essentiellement (fig.8 et 9) d'un cylindre en carton comprimé, que l’on introduit verticalement dans le vide ménagé au pôle supérieur de l’'enve- loppe, en ligaturant la collerette de cette enveloppe par plusieurs tours fortement serrés d'une cor- delette de coton. Tel quel et ainsi tout ouvert, ce cylindre laisserait échapper le gaz à flot : on à pour premier soin de coiffer son orifice infé« rieur d'un bon-« neten toile caout= choulée ou ver- nie, serré sur le [bord par un caoutchouc. Mais le gaz trouverait, encore de nom- breuses issues 2 ce sont des fe nêlres ovalisées pourtour du cy- lindre. Pour le obturer, on en toure ce cylindre d'un manchon à double paroi em caoutchouc, qui aveugle les fenê tres en s'appli= quant exacte- ment sur la pa roi. Un tubesouples en caoutchouc, terminé par un@ poire vers l'ex témilé qui se trouve dans la nacelle, grimpe au flanc du bal nœuvres de rou- te, permetlant de graduer exacle- Fig. ment le débit ; le second, définitif, pour l'atterris- sage, permettant l'échappement rapide et complet du gaz, en rendant toute liberté à l'aéronaute pour s'occuper des autres manœuvres. Il existe des sou- papes satisfaisant à ces desiderata. Nous en cite- rons deux : celle du colonel Renard, exclusivement appliquée à nos aérostals mililaires, et celle de M. Henri Hervé, l'inventeur bien connu des divers engins expérimentés sur la Méditerranée pour les ascensions aéro-marilimes. $. — Soupape Renard fermée. La soupape à double effet du colonel Renard se lon, s’altache lasoupape etperz met d'envoyer d& l'air comprimé entre les deux parois du manchon Ces parois s’écartent alors, et le manchon tend de plus en plus à prendre la forme d’un tore, décous vrant ainsi peu à peu les fenêtres par où le gaz du ballon peut s'échapper. ; | La manœuvre est simple. Un manomètre indique, 4 à l’aéronaute la pression dans le manchon et une expérience préliminaire permet de dire quel est 1e 4 débit correspondant. Il suffit, d’ailleurs, d’ouvrif un robinet pointeau pour que l'air comprimé s'échappe et que le manchon s'aplatisse de nous | | L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE 67 veau sur le cylindre. Voilà donc la manœuvre de route, momentanée el graduée, dont l'aéronaute à besoin. Mais veut-on, au contraire, ouvrir une issue définitive au gaz, pour l'atterrissage et le dégonflement? On saisit une cordelette qui, à tra- vers le ballon, va s'attacher au bonnet vernis obtu- rant le gros orifice du cylindre; on tire, etle bonnet arraché ouvre au gaz l'issue de- mandée. = - La soupape de M. Hervé est éga- lement à deux effets ; elle est très ingénieuse- ment combinée pour satisfaire au même pro- “gramme. 5 2. — Dimen- sions des sou- papesetdesap- pendices. On ne saurait donner des rè- gles absolues pour déterminer d’une manière précise les di- -mensions qu'il convient de don- ner à la soupape et à l'appendice d'un ballon. La soupape n'est qu'un instru- ment de manœu- xre ; elledoitêtre assez grande pour que l'effet s'en fasse senlir rapidement. On peut admettre comme un fait d'expérience qu'une soupape à deux effets sera bien proportionnée si elle permet d'évacuer, pour une manœuvre momenlanée de la capacité il * 1.000 totale du ballon par seconde, et, dans le déclen- chement définilif pour vider le ballon, une quan- : os tité quadruple, soit 350 du volume total. On démontrerait aisément que la vitesse de sorlie du gaz est d'autant plus faible que le gaz est plus lourd. C'est ainsi qu'en comparant l'hydrogène Fig. 9. — Soupape Renard ouverte. et le gaz d'éclairage, on trouve, pour le rapport des vitesses : Va — 1,56. V 1,5 Ce rapport est bien près de 2, et, par conséquent, la surface d'écoulement qu'offre la soupape à la sortie devra être double pour le gaz d'éclairage. En appliquant | le calcul à un | ballon de540mè- | Lres cubes (dia- mètre — 10 mè- | tres), gonflé à l'hydrogène, on trouverait que les orifices de sortie pour la manœuvre mo- mentanée de- vraient présen- ter une surface totale de 166 cen- timètres carrés, el, pour le dé- clenchewment dé- finitif,de66%cen- limèlres carrés. Un ballon de cette grandeurse vide en une de- mi-heure envi- ron. On peut, sans trop d'inconvé- pas cetle règle pour les di- mensions de la soupape: il y en aurait, au con- traire, de graves à ne pas donner une va- leur suffisante à celles de l'ap- pendice. Il est essentiel, en effet, pour que celui- ci joue son rôle de clapet de sûreté, qu'il éva- cue le gaz en excès assez vile pour éviter une surpression intérieure capable de faire éclater l’en- veloppe. Or, la principale cause de la dilatation du gaz se produit dans les mouvements ascensionnels du ballon. Pour chaque mètre d'élévation, la dilatation nients, ne observer très est de du volume. Si l'on représente par C le l 5.000 volume du ballon et par 2 la vilesse de son ascen- , 678 L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE sion, la dilatation par seconde sera la relation : C2 Ce sera aussi le volume qu'il faudra évacuer par l’appendice dans une seconde, afin que la tension apparente de l'étoffe reste la même; et, si l’on désigne par w la surface de l’ori- fice et par u la vitesse d'écoulement, on de- vra avoir : C D sta: La vitesse d’ascen- sion dépend de la rup- ture d'équilibre R qui provoque la montée, du diamètre D du ballon, et de la pression atmo- sphérique + (en fraction d'atmosphère) sur la couche d'air où se trouve l’aérostat, et l'on a, en défini- tive, sans entrer ici dans le détail du caleul : ee 1 RE ESS NQ D Vox Ne N et, d'autre part : Fig. 10. — Ætoile du filet. È= : xD. 6 D'où l'expres- sion de la vitesse : AA U— 0,0008124/" : DT Si l’orifice de l’appendice est circulaire, on peut expri- mer w en fonction de son dia- mètre, et, en représentant par D e le rapport 7 des diamètres du ballon et de l'appendice, on aura la relalion : m u — 0,000526 AUS 1 Il suffit alors de délerminer e de telle sorte que les valeurs possibles de la vitesse ne soient pas exagérées. Par exemple, s'il s’agit d’un ballon de 10 mètres de diamètre plein d'hydrogène, la pression ordi- naire y —1 ;pouruneruplured'équilibre R = 200 ki- logrammes qui peut très bien se produire, voici les Fig. 11. — Tracé des pattes d'oie. chiffres qui correspondent à deux diamètres déter= minés de l’appendice : d;, —0%,20 da—=0w,25 u, — 182,40 u, — 112,178 pa = 90 Ps — 40 Les trop grandes vitesses ne sont redoulables que par suite des surpressions qu'entraine l'écou=M lement insuffisant dû au frottement. On admet que, pour conserver une sécurité suffisante,» cet accroissement momentané de pression ne doit ; 1 2 . 4 pas dépasser le 5 de la lension apparente admise au repos, dans la région de la soupape où elle est la plus forte. D’après le colonel Renard, en désignant par D: le diamètre du ballon, on donne à l'appendice d’un ballon libre les dimensions suivantes, qui sont des minima : HYDROGÈNE GAZ D'ÉCLAIRAGE 4 d mètres 0,01 Da? 0,00008 D* mq. & d mètres 0,008 Ds? 0,00005 D° mq. Longueur 1. . . Diamètre d. . . SUCCESS En pratique, pour un ballon de 540 mètres cubes, ayant un diamètre D—10", le diamètre de l'ap- pendice doit être d—\0";45: =. $ 3. — Panneaux de déchirure. Pour lerminer ce qui concerne les moyens d'éva- ‘cuation du gaz, di- sons que l’on dis- posesouvent, dans la région supé-M. rieure du ballon, un panneau d'é- toffe de forme triangulaire, simplement collé au caoul- chouc et qu’on peut arracher en tirant violemment sur une cordelette logée dans la cou= ture. C’est un moyen qui ne convient que dans les cas ex- trèmes, où il faut arrêter le ballon à tout prix. On ne doit l’'employer qu'à terre ou tou près du sol, lorsque le ballons est déjà assez affaibli pou qu'on n'ait plus à redouter dem bonds dans l’espace. Un aéro= naute expérimenté peut seul faire usage du panneau de déchirure. 4 L'arrachement du panneau de déchirure cons= tilue une blessure de l'enveloppe, qu'il faut réparer ensuite. Pour éviter cet inconvénient, M. Besançon, Li , | L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE 6179 a combiné une soupape comportant, dans le même cercle, à la fois le clapel de manœuvre à charnières et le panneau de déchirure. Une simple traverse en Sans cosse A 2 cosses c. A 3 Cet organe se compose le plus généralement d'un filet et d'une série de cordages constituant la suspension pro- D prementdite; mais on pourrait rem- bois sépare ces À ee placer le filet par deux organes, qui \ ri une housse ou che- couvrent des seg- \ mise en étoffe; ments inégaux. Le \ | celle pratique à plus grand est oc- \ | lé adoptée dans cupé par un mor- cerlains ballons ceau d'étofle ver- e dirigeables, parce nie, tendu et serré que la surface lisse entre deux cer- ( qu'offre une che- ceaux ; c'est ce S mise oppose moins morceau d'élofle, Fig. 12. — Différents types de pattes d'oie. de résistance au facile à rempla- cer, que l'on déchire, sans toucher à l'enveloppe mème du ballon. IV. — LE FILET, LA SUSPENSION ET LA NACELLE. $ 1. — Le filet et la suspension. Nous nous sommes étendu sur les multiples précaulions prises dans la construction de l'enve- « loppe du ballon lui-même pour assurer sa solidité, \ ats 41 Fig. 13. — Type de nacelle et d'arrimage. — a cerele de filet; b, suspentes; ce, nacelle: d, sacs de lest. (Concours de Vincennes, 1900; ballon de M. Nicolleau.) précautions indispensables puisque, si le flotteur venait à manquer lout à coup, ce serait la chute ir- rémédiable; mais les autres parties de l’aérostat n'exigent pas une attention moins minutieuse, et, en particulier, l'organe intermédiaire chargé de rattacher la nacelle au ballon. dans l'air. [Ilestmême possible de supprimer chemise ou filet en adoplant un mode d'attache direct des suspentes sur l’étoffe même du ballon, comme M. Sanlos-Dumont l’a fait pour son dirigeable, imitant le procédé d’atlache que Pilàtre de Rozier etle marquis d'Arlandes avaient appliqué à la mont- golfière qui servit à leur première ascension. Le filet — comme la chemise d'ailleurs — n'a pas uniquement pour but de donner des points mouvement Fig. 14. — Autre type de nacelle et d'arrimage. — à, cercle de filet; b, suspentes; e, nacelle; m, ancre; n, corde de l'ancre. {Concours de Vincennes, 1900 ; ballon de M. J. Faure.) d'attache commodes pour la nacelle; il sert égale- ment à répartir les efforts sur une surface plus grande de l'enveloppe. Les filets sont composés de mailles en losange, dont la grande diagonale est dirigée suivant le mé- ridien; ces mailles, étant déformables, s'adaptent d'elles-mêmes à la surface qu'il s’agit de recouvrir; on leur donne néanmoins des dimensions propor- 680 L'-COLOXEL (tr. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE tionnelles au parallèle qu'elles occupent sur Ja sphère, et elles vont ainsi en augmentant du pôle à l'équateur (fig. 10). Pour obtenir une égale réparlition, il est bon qu'il y ait, dans chaque rang, le même nombre de mailles et que le rapport des deux diagonales soit constant. Ce sont des précautions que prennent tous les cons- tructeurs gneux. Le filet s’ap- plique exacte- ment sur la sphère jusqu'à une certaine dis- tance en des- sous de l'équa- teur. À partir de là, id forme un tronc de cône tangent à la sphère et abou- | tissant au cercle | de suspension; mais celte par- lie conique n'est pas exactement construite com- me le filet pro- prement dit. Il s’agit, en effet, de passer d'un nombre très grand de mail- les à un nombre restreintde sus- SOI = PARC de BALLONSCAPTIS R EU > pentes, cordes qui terminent le filet suivant des toujours un peu rugueux; pour celte raison, le co= lonel Renard a adopté des cordages en coton pour toutes les parties frottant sur l'enveloppe. Le cercle interposé entre le ballon et la nacelle a pour diamètre environ le 5 de celui du ballon. Il est en bois courbé ou en métal creux. C’est à ce cercle que s’at- tachent les cor- dages de la sus- pension propre- ment dite (fig. 13 ét 14). aéronautes se contentent de tendre ces sus- pentes directe- ment entre le cercleetle cadre rectangulaire de la nacelle. Ce genre de sus- pension à ré- seaux trapézoï- daux est défor- mable, ce qui n'est pas sans inconvénients lorsque le bal- lon s'incline. En outre, les moin- dres] mouve- ments des aéro- nautes dans la sent des dépla- cements de tout le système et re- génératrices du portentleschar- cône et se ral- ges sur les uns tachent directe- oulesautres des en eu fees Fig. 15. — Nacelles el suspensions croisées à balancines. — À, B, suspen- cordages, 1 Le passage se sions pour ballons captifs; C, suspension pour ballon libre; m,ancre-herse. Supportentainsi fait au moyen (Exposition de 1900.) É des efforts va- de pattes d'oie (fig. 11 et 12), réduisant peu à peu le nombre des mailles. Il est évident que, le nombre des brins de corde sur lesquels se répartissent les efforts de suspen- sion pouvant varier, il convient de leur donner des grosseurs variables et correspondantes. Les filets sont communément confectionnés en cordages de chanvre, et souvent, pour rendre ces cordages moins hygrométriques, on les trempe dans une préparation de cachou. Le chanvre est riables et anor- maux. Les aéronautes soucieux d'assurer à leur nacelle une grande stabilité, en même temps qu'une égale répartilion des efforts, doivent, en s’inspi- rant des principes posés par Dupuy de Lôme et le colonel Renard, croisillonner la suspension au moyen de balancines obliques (fig. 15). $ 2. — La nacelle. La nacelle est en osier, aussi légère que possible. Elle affecte un plan rectangulaire, avec des parois La plupartdes | nacelle produi- verticales. Souvent on arrondit les angles à la base, de telle sorte qu'elle repose sur le sol par un rec- tangle plus petit que son cadre supérieur. C'est une disposition défectueuse; il est préférable de lui donner une assiette aussi grande que possible, qui contribue à l'empêcher de rouler et de se renver- ser à l'atterris- C) sage. Pour les gran- des nacelles, on L renforce le bord | 4 supérieur au moyen d'un ca- p | dre en tube mé- Æ tallique. M. Sur- couf, dans le L même cas,aima- Fig. 16. — Grappin ordinaire. giné de disposer à une certaine hauteur, entre la nacelle et le cercle de filet, un adre rectangulaire en fer creux, soigneusement < étrésillonné pour éviter les déformations. Cet or- ane intermédiaire a sensiblement les mêmes Ê imensions que le cadre supérieur de la nacelle; les suspentes descendent donc dans des plans ver- licaux, ne gênant aucunement les aéronautes; leurs ractions ne tendent pas à déformer la nacelle, dont a construction peut être ainsi beaucoup plus légère. La nacelle est pourvue de bancs formant coffre èt de diverses soutes pour les instruments, les ap- provisionnements et le lest, que l'on emporte sous orme de sable fin en sacs de 10 kilogrammes. Disons enfin que, pour assurer la solidarité de la æacelle et de la suspension, les suspentes d'angle se prolongent dans l’épais- seur de la paroi d'osier et pas- sent diagonale- ment sous le plancher qu'el- les soutien- nent. g P F | f ‘ $3.— Choix des Es. 17. — Grappin Yon à 6 pattes. FUIT EE Comme on le woit, toute la sécurité des voyageurs repose sur la solidité des cordages. Lorsqu'il s'agit du filet, les mailles sont si nombreuses que chaque brin n'a à Supporter que des efforts très minimes, pourvu que la répartition soit bien assurée. Les sus- pentes, au contraire, sont en nombre limité et il importe de ne leur faire supporter que des trac- tions bien inférieures à leur limite de rupture. Les cordages employés en aérostation doivent REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE 681 être choisis avec un soin tout particulier et éprou- vés à la rupture au moyen d'une machine spéciale. Le dynamomètre Perreaux suffit pour les petits cordages ; le colonel Renard a imaginé et construit, pour l'essai des une machine dynamo- métrique d’une grande précision. Cette machine est basée sur l'emploi du vide pra- tiqué en dessous d'un piston sans frottement, dit à Joint annulaire. Un clapet après la rupture de l'éprouvelte, la colonne mano- métrique qui, sans cette précaution, serait ramenée brusquement dans l'appareil. Gräce à cette immo- bilisation, la tension exacte au moment de la rup- ture se trouve enregistrée loisir'. D'après les expériences de Chalais, les divers textiles employés pour la corderie aéroslalique ont respectivement les résistances ci-après, rapportées à celle du coton prise comme unité : cordages, à mercure immobilise, et peut être lue à Résistance du coton : l — dufchanyre’..: … ... 1,3 — de la ramie . DE l — deldisoies . 241: :. 18 ,0 5 FH (Fe | V. — ORGANES ACCESSOIRES D'UNE ASCENSION. Les manœuvres essentielles d'un ballon consis- tent à jeter du lest pour monter, à donner un coup de soupape et à lächer du gaz pour descendre mais il est d'autres organes essentiels qui font partie de l’arrimage d’un ballon, — sans parler du baromètre qui sert à déterminer son alluilude ; — ce sont le guide-rope et l'ancre. Le guide-rope, inventé par Green, est un cor- dagede 140 mètres delongueur environ, qu'on laisse pendre du cercle du filet au moment voulu. A l'en- Ancre Henri Hervé. Fig. 18. — contre des autres organes aérostatiques, que l’on fait aussi légers que possible, celui-ci doit avoir un certain poids pour remplir son office de délesteur. Lorsque le ballon descend — quelquefois plus rapi- dement qu’on ne voudrait — le guide-rope se pose à terre successivement et déleste d’autant l’aérostat dont il amortit la chute. Il arrive même que ce 1 Cette machine rend aujourd'hui les plus grands services dans la marine pour l'essai des câbles, de quelque grosseur qu'ils soient. 15* 682 L'-COLONEL G. ESPITALLIER — LE MATÉRIEL AÉROSTATIQUE délestage est suffisant pour que le ballon s'arrête en équilibre à une certaine hauteur et continue sa course, en trainant après lui cette sorte de serpent dont la queue court à travers les cultures, franchit les haies, les murs, les maisons, les lignes télégra- phiques elles-mêmes. L'équilibre du ballon est alors des plus stables, car ses moindres tendances à l’ascension-ou àladescentesont automatique - ment enrayées par le guide-rope qui, en se rele- vant ou se po- sant davantage, fait varier le dé- lestage dans le sens convenable. Pour les bal- lons de taille moyenne, le gui- de-rope est un cäble de même diamètre sur toulesalongueur el pesant 40 à 50 kilogs au to- tal. On a essayé, pour les grands ballons qui né- cessitent un dé- lestage considé- rable, de repor- terla plusgrande partie du poids versleboutlibre, en employant, soit des sections de câble de dia- inètre différents, mises bout à boul, soit un seul càblelégèrement conique. Au déparl, le guide-rope est lové en une pelote susceptible d'un dé- roulement rapide el attachée au flane de la nacelle. Le cordage d’ancre est également lové. On ne laisse tomber l'ancre qu'au moment d’alterrir. L'ancre est un organe indispensable en aéronau- tique comme en navigation aquatique. On a tenté tout d'abord d'employer pour le premier usage l'appareil qui réussit si bien pour le second; mais on s'est aperçu que ce qui convenait parfaitement à l’un convenait médiocrement à l’autre. Ce qui caractérise la navigalion aqualique, c'est que le Fig. 19. — Ancre-herse Lienard, pliée et dépliée. bateau est à un niveau constant. Aussilôt ques l'ancre a mordu, la chaine de longueur déterminée, reste constamment inclinéeisous le même angle, tandis qu'un ballon, tout-à-coup délesté du Do de son ancre, monte aussitôt, ramenant sur la ver= ticale le câble qui, lui-même, redresse l'ancre. c'est précisément la manœuvre du navire qui se met à pic pour déraper. Le modèle du grappin imité de l'ancre marine (fig. 16) étant in= suffisant, on & cherché à le mo Yon (fig. 17), et du modèle des" ancres partlicu lièrement comprises de M: H. Hervé (fig.18)n Dans le même Renard a doté le matériel mili taire d'aérostas lion d'une ancre herse basée s un principe toul différent(fig. 19} C'est une chain articulée, por=. tant, de part et d'autre de cha= que traverse d'articulation, des pattes dans cre. De quelque | facon qu'ellt tombe à terre elle y mord par un grand nombre de points. Le déles: tage qu'elle provoque en se posant est graduel et pe | crée pas de brusque rupture d'équilibre; et, dans cas où le ballon remonte, il relève progressiveme la chaîne, maillon par maillon, etsereleste d'autanbs 2 1 En pratique, on donne aux appareils d'ancrage les poids | suivants, d'après le cubage du ballon : 4 POIDS DE L'ANCRE "0 W Ballon de 300 mètres cubes. . . . 8 à 10 kgs ‘ — de 500 = 19 à 15 = — de S00 — 18 à 20m — de1.200 = 251à 30— d'A { e bu. ce | : + NI. — L'INDUSTRIE DÜ BALLON EN FRANCE. La construction du matériel aéroslatique a pris, depuis quelque temps et surtout en France, un assez grand développement; néanmoins, le nombre est très limité des ateliers de construction dignes de ce nom, en dehors bien entendu de l'Établisse- ment militaire de Chalais. En voici la liste par ordre alphabétique, et nous croyons bien n’en pas oublier : Eugène Godard et Louis Godard, dignes héritiers “d'un nom illustre en aérostalion ; Lachambre, le constructeur des Santos-Dumont “et du Severo, industriel décédé, mais dont l’ate- ET be subsiste ; Mallet, le constructeur du Wéditerranéen; —. Surcouf, enfin, l'éminent secrétaire de la Classe spéciale d'Aéroslation à l'Exposilion de 1900, et l'un des apôtres les plus convaincus de la science D on lui doit la construction du BU J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CA VII. — ConNcLUSION. Quelque rapide qu’ait été forcément notre examen du matériel usité dans les ascensions, nous espérons tout au moins avoir démontré que la construction de cet engin n'est point abandonnée à un empi- risme rudimentaire et que toutes les précautions sont prises, au contraire, pour assurer la com- plète sécurité aux voyageurs, aéronaules habituels ou passagers occasionnels, qui se confient à la nacelle d’un ballon. Ces conditions de sécurilé statiques, en quelque sorte, nous les retrouverions si nous examinions maintenant comment peut être et doit être conduile une ascension, et nos lecteurs seraient assurément convaincus alors qu'il n'est pas plus léméraire de monter en ballon qu’en voiture, et peut-être moins qu'en automobile, lorsque l’on se confie à un guide prudent et expérimenté. L'-Colonel G. Espitallier. _ Lorsque nous voulons produire de la lumière, . nous ne disposons que d'un moyen pratique : nous portons un corps à l'incandescence en le chauffant wers 1.000 à 1.500°. Ce mode de production de la Jumière est aussi théoriquement le plus simple, parce que la tempéralure, homogène en tous les points du corps incandescent, est un facteur bien “déterminé : les principes de Thermodynamique sont applicables. Si le corps incandescent est un Corps zoir absorbant indistinctement et complète- ment toutes les radiations, le rayonnement devient -une fonction déterminée de la température seule : c'est la loi de KirchhofT. Malheureusement, le corps noir est une simple “conception de l'esprit, tout comme un corps parfai- tement élastique ou un gaz parfait. Tous les corps, -même le noir de fumée ou le noir de platine, ont une sorte de prédilection pour certaines radia- tions ; leur pouvoir absorbant et leur pouvoir émis- sif dépendent de la longueur d'onde. Nous utilisons cette propriété sélective des corps dans les procé- dés récents d'éclairage par le bec Auer ou la lampe Nernst; les terres rares qui constituent le corps incandescent émettent, dans certaines régiens du Spectre, plus de lumière qu'un corps noir à la même température : c’est cette propriété ‘rès générale qui constitue la /uminescence. Toutes les propriétés de la lumière montrent qu'elle est due aux vibrations d'un milieu différent de la matière, l'éther. Et, cependant, la matière a LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES une influence considérable sur les propriétés de ces vibrations : elle change leur intensité (absorp- tion), leur vitesse de propagation (dispersion), leur forme et leur direction (double réfraclion, polarisa- tion rotatoire). Ainsi nous devons bien admettre qu'entre l’éther et la matière, il existe des actions mutuelles. Y a-t-il entrainement total ou partiel de l'éther par la matière, réaction de la matière aux ébranlements de l’éther, frottement et amortisse- ment des vibralions de l'éther par la matière? Toutes ces hypothèses, et d’autres encore, ont servi de point de départ à des théories des phénomènes optiques, sans qu'aueune d'elles ait pu recevoir une confirmation entière de l'expérience. La production de la lumière constitue exacte- ment le même problème; ce sont vraisemblable- ment les mêmes actions mutuelles entre l'éther et la matière qui entrent en jeu, mais en sens inverse. Tout ébranlement communiqué aux particules matérielles à l'intérieur d'un corps doit entrainer un mouvement de l’élher; ce mouvement pourra dépendre à la fois de la nature de l'ébranlement inilial, du mouvement pris par la particule etenfin des actions qui s’exercent entre la matière et l'éther. Les propriétés des radiations émises dépen- dront, en général, de toutes ces conditions. Nous pouvons concevoir que l'ébranlement initial soit tout différent des mouvements vibratoires simples, constituant les radiations finales : la balle, la fronde, animées de mouvements uniformes, le choc 68% sur un Corps élastique déterminent des mouve- ments vibratoires qui se traduisent par la produc- tion de sons, Ces remarques nous font prévoir combien seront multiples les causes de production de la lumière, combien les qualités de la lumière seront variables avec les causes déterminantes. L’élévation de la température ne sera que l’une des causes capables de déterminer un changement dans les mouvements intramoléculaires ; les oscil- lations lumineuses, les vibrations ou les chocs électriques, les transpositions dans le groupe- ment ou dans l'orientation des atomes pourront déterminer de semblables mouvements intramolé- culaires et la production de lumière. E. Wiedemann”' catalogue les phénomènes de luminescence d'après la cause qui les produit; il en distingue quatorze espèces et en omet encore quelques-unes (refroidissement, électrolyse...). Il n'est pas possible de donner aujourd'hui une clas- sification rationnelle de ces phénomènes ; les obser- vations se sont multipliées depuis cinquante ans sains modifier beaucoup les interprétations hypo- théliques de ces phénomènes que E. Becquerel donnait dans son Trailé sur Za Lumière, en 1868. Si nous connaissions le mécanisme des phéno- mènes de luminescence, nous devrions les classer «d’après les transformations d'énergie dont ils dépendent. Nous pouvons dès maintenant les divi- ser en deux catégories : I. La luminescence est due à une transformation réversible; elle peut être produite indéfiniment sur un même échantillon en le soumettant aux mêmes effets. Dans ce cas, l'équilibre intra-moléculaire, détruit par une action extérieure, se rélablit spon- tanément quand l’action cesse. IT. La luminescence est liée à un phénomène irréversible ; elle est due à la destruclion, par une cause extérieure, d'un état d'équilibre instable physique ou chimique. D’après la loi générale d'Ostwald*, les corps qui prennent naissance les premiers dans une transformalion sont non pas les plus stables, maisles plus instables parmi ceux qui sont possibles dans les conditions de l'expérience. Cette forme instable peut se maintenir en faux équilibre pendant longtemps et faire explosion avec production de lumière sous des influences diverses. I. — PnÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE RÉVERSIBLES. À la première catégorie se rattachent les cas de luminescence suivants : { E. WienemaAnN : Wien. Ann., t. XXXIV, p. 448 (1888); voir Sonderabdruck : Ueber Lumineszenz. Erlangen, 1901. ? OsrwaLp : Zeit. f. Phys. Chem., t. XXII, p. 289 (1897), t. XXXIV. p. 248, 1900, J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES 1° La Photoluminescence, produite par une excilation lumineuse. La fluorescéine, le sulfure de calcium sont lumineux après avoir été expos sés à la lumière; les radiations les plus rapides eb surtout l'ultra-violet ont le plus d'action pour excis ter la photoluminescence ; * 2 L'Ælectroluminescence, produite par le pas=« sage d’un courant continu ou alternatif à travers les gaz, par exemple dans des tubes contenant un gaz sous pression réduite; È 3° La Cathodoluminescence, observée d’abord par Crookes en plaçant un corps solide au foyer d'une cathode dans une ampoule où la pression du gaz est très réduile: l'émission de chaleur et de lumière est due au bombardement par les corpus cules chargés négativement que lance la cathodeë 4° La Luminescence par les rayons-canaux; due au choc du corps matériel avec les particules positives qu'attire la cathode ; 5° La Luminescence par les rayons de Rontgen: La luminescence des écrans au platinocyanure de baryum est utilisée en radioscopie; 6° La /adioluminescence, produite par les corps radio-actifs sur un grand nombre de corps qui possèdent déjà les autres variétés de lumines cence ; 1° La Zuminescence des corps solides par le rayons de décharge au voisinage d'une élincelle | électrique. $ 1. — Photoluminescence. Dans le cas de la photoluminescence, la source de perturbations est une vibration lumineuse dem l'éther; elle est amortie et absorbée par les parti=« cules matérielles; celles-ci transmettent inverse ment à l'éther une partie de l'énergie qu'elles en ont recue et déterminent une nouvelle émission lumineuse. L'énergie fournie aux particules matérielles par la radialion incidente peut être restituée plus © moins rapidement à l'éther, suivant que les pertur bations intermoléculaires déterminées par la ra diation excitatrice disparaissent plus ou moins vite. La photoluminescence prendra le nom de flucrescenvce si le corps cesse très vite d’être lumis neux ; elle s'appellera phosphorescence si elle dure le temps nécessaire pour transporter le corps l'obscurité, c'est-à-dire au moins quelques se= condes. En passant de l'état gazeux à l'état liquide, @ entre les particules matérielles deviennent plus actives et l'équilibre se rétablit plus difficilement aussi la phosphorescence s’observe plus souvent, dans les solides, la fluorescence dans les liquides. J. GUINCHANT — LES PIHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES 685 mann' montre bien que la fluorescence et la phos- phorescence ne diffèrent que par la rapidité avec laquelle s'effectue le relour à l’état initial. Les so- lutions d'éosine ou de fluorescéine dans l'eau sont simplement fluorescentes; si l’on ajoute de la géla- tine à la solution, elle prend en séchant une consis- tance progressivement croissante et, en même “temps, la durée de la luminescence augmente; “quand la masse est arrivée à un état à peu près “Solide, elle possède une véritable phosphores- cence. Le dissolvant joue, d'ailleurs, un rôle très com- “plexe dans la majorité des cas; il peut rendre plus “difficile le retour des particules dissoutes à l'état “initial, mais il peut aussi déterminer des change- ments dans les groupements atomiques du corps dissous; la cryoscopie, la conductibilité mettent souvent en évidence des influences de cette nature. “Cette action mutuelle du dissolvant et des corps dissous est parliculiérement remarquable dans les “dissolutions solides des composés minéraux. Les sulfures de calcium, de baryum, de strontium ne sont pas luminescents par eux-mêmes. Si l'on y ajoute cerlains autres sulfures également non “luminescents (bismuth, manganèse, cuivre), on obtient des dissolulions solides remarquablement phosphorescentes; par contre, l’addilion d'un troi- sième sulfure contenant un métal magnétique (fer, “cobalt, nickel) empêche toute phosphorescence*. Le rôle de l’impureté que constitue le corps dis- sous dans ces dissolutions solides serait peut-être, “d'après E. Wiedemann, de mettre l'énergie inci- dente sous une forme où elle puisse être absorbée par le dissolvant. L'étude des composés orga- niques a conduit, comme nous le verrons, à une conclusion analogue. Comme tous les corps absorb:nt la lumière, on “conçoit que la propriété de restituer sous forme lu- -mineuse une partie de l'énergie absorbée doit être très générale. La phosphorescence de longue durée ne s'observe guère que dans quelques diamants, quelques fluorines et surtout dans les dissolutions solides dont le dissolvant est un sulfure de calcium, de baryum, de strontium ou de zine. La phospho- rescence pendant quelques secondes seulement devient un phénomène beaucoup plus général; lousles sels des métaux alcalino-terreux, un grand nombre de sels alcalins, l'acide arsénieux, le pa- pier, le sucre, etc., sont lumineux quand on les transporte rapidement à l'obscurité après exposi- lion à la lumière. En réduisant à quelques dix-mil- lièmes de seconde, au moyen du phosphoroscope, le temps qui s'écoule entre l'observation et l'action 2 E. WiepEyanx : oc. cit. > P. Waexr6 : Zum Chemismus phosphoreszierender Erdkalisulfide. Zeit. f. phys. Chem., t. LI, p. 435, 4905. lumineuse, Becquerel' a trouvé une fluorescence dans un très grand nombre de composés minéraux et dans tous les composés organiques. Ges méthodes d'observation sont encore insuffi- santes pour cerlains corps, tels que les plalino-cya- aures, les dissolutions liquides; ils ne sont pas lumi- nescents dans le phosphoroscope el sont cependant très fluorescents, car ils s'illuminent d'un vif éclat dans le spectre ultra-violet. On peut admettre, sans dépasser beaucoup les limites de l'expérience, que les corps non photo-luminescents, s’il en existe, sont de rares exceptions. Le quartz serait l’une d'elles. La présence de certains atomes ou gronpements d'atomes dans la molécule augmente, parfois consi- dérablement, la duréede l'éclat de la luminescence. En Chimie minérale, les métaux alcalino-lerreux, l’'aluminium®, l'uranium, le radical acide des pla- tino-cyanures communiquent à leurs dérivés une vive fluorescence. Dans les composés organique*, les groupements les plus actifs sont le carbéthoxyle, le cyanogène, les liaisons éthyléniques, les chaines hexagonales à deux liaisons parallèles". Ces com- plexes atomiques, appelés lucigènes où fluoro- phores, ne suffisent pas à donner à la molécule une vive fluorescence; ils devraient encore se trouver dans le voisinage d'autres groupements, assez mal définis jusqu'ici, et auxquels appartiendrait la propriété d'émettre la lumière; le rôle des groupes fluorophores serait d'absorber les radiations lumi- neuses et de fournir l'énergie aux groupes émissifs. Kauffmann remarque, à l'appui de cette hypothèse, que la plupart des complexes fluorophores sont aussi des chromophores dans la chimie des couleurs. Les fluorophores joueraient, dans les molécules orga- niques, le même rôle que les impuretés, d’après Wiedemann, dans les sulfures phosphorescents. 1 E. Becouerez : La Lumière, t. 1, livre VI. 2 Cette propriété de l'alumine se retrouve dans les verres; l'absorption du spectre ultra-violet par le verre est un fait connexe. 3 Hewrrr : Fluorescence as related to the constitution of organic substances. Rep. Brit. Assoc. Southport, 1903, p. 628. Kaurrmanx et BeisswENGER : Ueber Fluoreszenz-Untersu- chungen über das Ringsystem des Benzols. Berichte, t. XXXVI, p. 2494, 1903; t. XXXVII, p. 2612, 1904. Hexricuet OPrERMANN : Zusammenhang zwischen Fluores- zenz und chemische Constitution bei Derivaten des Ben- zoxazols. Ber., t. XXXVII, p. 3108, 1904. H. Kaurrmanx : Ueber Fluoreszenz. Jahrh. der Rad. und Llek., 1, p. 339, 1904. J Hewirr : Ueber die Beziehung zwischen der Konstitution und der Fluoreszenz einiger Substanzen. Zeit. Phys. Chem., t-XXXIV, p. 1, 1900: KenrManx : Arch. Se. Ph. et Nat. de Genève, 1900, p. 84 et 291; Ueber Fluorenszenz. Berichte, 190%, p. 3581. ArusrronG et Lowry : The Phenomena of Luminosity. The chem. News, t. LXXXVIIL, p. 89, 1903; Proceedings of the Roy. Soc., t. LXXII, p 258, 1904. R. Meyer : Fluoreszenz und chemische Constitution. Zrit. f. Phys. Chem.,.t. XXIV, p. 468, 1897; Berichte, t. XXXVI, p. 2967, 1905. 686 J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES Suivant une autre interprélation adoptée sous des formes différentes par Hewitt, par Armstrong et Lowry, la fluorescence serait due à une transfor- mation tautomérique de la molécule, transforma- tion occasionnée ou facilitée par la présence de certains groupements atomiques. L'existence simultanée d'un groupe fluorophore et d’une tautomérie sont peut-être nécessaires pour produire la fluorescence, d’après R. Meyer; quoi qu'il en soit, ces hypothèses sont encore très loin d'être élablies sur des bases solides. L'étude des spectres de luminescence n’a pas conduit à des résultats plus précis. $ 2. — Luminescence d'origine électrique. Les autres cas de luminescence, dans cette pre- mière classe des phénomènes réversibles, sont dus à des excitations d'ordre électrique. Ils occupent une place d'honneur dans l'histoire des théories modernes, car nos conceptions actuelles de la ma- tière sont nées des obvervations de Crookes sur la cathodoluminescence, de son hypothèse d’un qua- trième état de la matière, la matière radiante. Les propriétés chimiques des corps s'expliquent en admettant simplement l'existence d'un petitnombre d'atomes distincts, unis par des forces mystérieuses d'affinilé chimique en groupements molécuiaires innombrables, Ces atomes ne sont, en définitive, que les termes limites de l'analyse chimique. Le perfectionnement des méthodes analytiques, en particulier l'électrolyse, a permis bien des fois de sceinder ce qui avait été longtemps considéré comme un atome chimique. L'étude de la décharge élec- trique dans les gaz a obligé les physiciens à admettre que les atomes chimiques peuvent encore être scin- dés en constituants distincts, possédant des charges électriques, des masses, des vitesses différentes. Nous nous représentons aujourd'hui l'atome neutre non pas comme une masse insécable, mais comme un système planétaire : au centre se trouve un énorme noyau central, portant une charge positive; c'est de lui que dépendent essentiellement les affi- nités chimiques, les propriétés de l'atome. Il est entouré de corpuscules infiniment petits par rap- port à l'atome, chargés négativement, et décrivant leur orbite autour du noyau central avec des vitesses colossales, de l’ordre de la vitesse de la lumière. Tandis que les noyaux centraux sont dis- tincts pour les différents corps, les corpuscules négatifs sont, au contraire, identiques; ils cons- liluent peut-être l'atome d'électricité, d’après Crookes'. Si une cause extérieure vient à intro- duire une perturbation, même minime, dans le 1 W. Cnookes : The stralilication of Hydrogen. The Che- mical News, t. LXXXV, p. 97, 1902. mouvement d'un corpuscule, cette masse extrês mement petite, animée d’une très grande vitesse, pourra se détacher du système planétaire; le cor= puseule négalif et le résidu positif s’entoureront ensuite de molécules neutres en donnant des ious complexes. Cette conception de la matière nous fournit une explication simple de la lumière constituée par des oscillations électromagnétiques : les expériences de Rowland, de Pender ont établi qu'une chargem électrique en mouvement crée un champ électro magnétique ; la lumière ne sera alors que la consé= quence d'un mouvement oscillatoire des corpus cules, des groupes positifs et négatifs qui cons= tituent l'atome, ou même des groupements plus complexes formés par les ions. Sous l'influence d'une élévation de température, d'une vibration électromagnétique de la lumière, d'un choc avec des corpuscules étrangers, un corps matériel pourra s'ioniser; un nouvel état d'équilibre s’établiras mais en donnant naissance à un mouvement Oscil= latoire des charges électriques, par conséquent à la production d'une onde électromagnétique, c'ests à-dire à de la lumière‘. L'ion joue le même rôle que le résonnateur de Herz, avec des périodes d'oscillation beaucoup plus courtes. II. — PuHÉNOMÈNES DE, LUMINESCENCE IRRÉVERSIBLES Pour les phénomènes de luminescence qui appar— tiennent à la seconde catégorie, le mécanisme de« l'ébranlement atomique est beaucoup moins bien” connu; en tous les cas, l'équilibre dans la molécule ou dans l'atome doit être différent avant et après la luminescence, puisque celle-ci ne se produit qu'une seule fois pour un échantillon de matière déter= miné. A cette catégorie appartiennent les phénomènes de luminescence suivants : 1° La Chimie-luminescence, ou dégagement dem lumière dans certaines réactions chimiques, indé pendamment de l'élévation de température; : 2% La Luminescence autour des électrodes pens dant l'électrolyse d’une dissolution”; elle est pro bablement due, comme la luminescence dans les flammes, à la présence de vapeurs salines dans E. gaz chaud qui entoure les électrodes; 3° La Triboluminescence, produite par une action ————.. 1 Pour les propriétés spectroscopiques des différents groupes électrisés, voir: 4 J. Srark : Ueber die Entstehung der elektrischen Gasspeks tra. Ann. d. Physik, t. XIV, p. 506, 1904. P. Dnupe : Optische Eigenschaften und Electronentheorië Ann. d. Physik, L. XIV, p. 677 et 936, 1904. 2 WErRNER von Bozron : Ueber das Leuchten der Ionens Zeit. f. Elektroch., &. NU, p. 767, 1903; Ueber elektrisches Leuchten. Zd., L. IX, p.913, 1903. - J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES 687 mécanique sur un grand nombre de corps ceris- #allisés; 4 La Cristalloluminescence, observée pendant lle refroidissement de quelques solutions saturées ; 5° La Luminescence par précipitation, phéno- mène jusqu'ici assez rarement observé en préci- “pitant un sel par un réactif approprié"; 6° La Lysiluminescence*, qui ne se produit qu’en dissolvant dans l’eau les chlorures alcalins colorés par les rayons cathodiques ; … 1° La Thermoluminescence, émission subite de “lumière quand on élève rapidement la température de certains corps solides; R 8° La Cryoluminescence, un phénomène ana- ogue observé par Dewar en refroidissant quelques Le dans l'air et surlout dans l'hydrogène liquides. —. Nous devrions ajouter enfin la Zioluminescence es êtres vivants, due vraisemblablement à une L éaction chimie-luminescenle. $ 1. — Chimie-luminescence. … Les changements dans les groupements des “atomes el des valences doivent donner lieu à des | considérables dans les mouvements “intra-moléculaires et dans les positions relatives des charges atomiques. Toutes les réactions chi- … miques devraient être luminescentes. — À température élevée, elles le sont à peu près “toutes : certaines radiations sont émises par les ds réagissants avec plus d'intensité que par un corps z0ir à la même température. En particulier, r coloration des flammes par les gaz ou vapeurs est un phénomène de chimie-luminescence. Hittorf, Siemens ont moniré qu'un corps gazeux n'émet aucune radiation lumineuse par le seul fait de ‘son élévation de température. La flamme non éclai- ante de l'hydrogène ou de l'oxyde de carbone, celle du gaz d'éclairage‘ dans un brüleur Bunsen me donnent ni lignes ni bandes dans le spectre “isible; on y distingue seulement un fond à peine lumineux. Si l’on introduit dans ces flammes certains gaz et surlout des vapeurs de sels métal- liques, elles prennent une coloration spéciale; le Spectroscope montre l'apparition de raies on de — |! E. Baxprowsxi : Ueber Lichterscheinungen während der “krystallisation. Zeit. phys. Chem., t. XV, p. 323, 1894; Æ XVII, p. 234, 1895. ? Lysiluminescence est plus correct que Lyoluminescence, ferme adopté par Wiedemann. }6w donne vo: en compo- ‘sition. , WxEeDEMANN et Scaminr : Ueber Lumineszenz. Ann. d. Ph., ÆLIV, p. 619, 1895. # Le cône central bleu d'un brüleur Bunsen donne un beau spectre de bandes attribuées généralement au car- bone (spectre de Swan). Les nouveaux brüleurs Meker fournissent ce spectre avec un éelat remarquable; la bande rouge de Smith est très visible: la bande indigo, signalée æomme large, est dédoublée en deux groupes très distincts. bandes caractéristiques des éléments introduits dans la flamme. On a admis longtemps que la flamme n'intervient que par sa température élevée pour dissocier les vapeurs et permettre aux atomes métalliques de donner leur spectre de lumines- cence. Les recherches de Pringsheim® ont montré que l'émission de lumière est la conséquence d’une réduction produite par les gaz de la flamme : un sel de sodium volatilisé dans un gaz inerte ne donne ni absorption ni émission de lumière: mais les raies caractéristiques apparaissent immédiate- ment si l'on introduit un gaz réducteur (H,C0) ou même du charbon. Je rapprocherai de ces observa- tions un fait depuis longtemps connu. Le soufre, l'hydrogène sulfuré, brûlant à l'air, ne donnent aucune discontinuité dans le spectre ; au contraire, des traces d'un composé sulfuré, même de gaz sul- fureux ou d'un sulfate, font apparaitre des bandes dans la flamme de l'hydrogène, en même temps que du soufre se dépose sur les corps froids placés dans la zone lumineuse. Les réactions chimiques luminescentes à basse température sont jusqu'ici peu nombreuses; cela tient vraisemblablement à ce que l’élévalion de température, comme la diminution de pression dans les gaz, augmente la liberté des mouvements intra-moléculaires et diminue l'amortissement des oscillations atomiques. Le phosphore a fourni le premier exemple connu de chimie-luminescence; il a donné lieu à un très grand nombre de travaux, sans que les causes de celle luminescence et les phénomènes qui l’accom- pagnent aient été complètement élucidés. Les faits suivants semblent définitivement établis par l'expé- rience : 4° La luminescence ne se produit qu’en présence d'oxygène sous une pression inférieure à la pression atmosphérique; l'addition de gaz étrangers tantôt favorise, tantôt empêche la luminescence *; 2% L'oxyde phosphoreux joue un rôle capital dans la luminescence *; 3° La luminescence est accompagnée de la pro- duetion d'ions de très faible mobilité”. 1 Privcsaelm : Emission des gaz. Congrès international de Physique de Paris, 1900, t. 11, p. 100. 2 Sazer : Traité élémentaire de Spectroscopie. Paris, 188$, p.174: p. 178. 3 Voir CEenTNenszwer : Ueber den katalytischen Einfluss verschiedener Gase und Dämpfe auf die Oxydation des Phos phors. Zeit. Phys. Chem., L. XXNT,/p- 1. 4 Torre et Trurtox : Chem. News, t. LXI, p.212: t. LXIV, p-. 304. E. Juxcrceiscn : Sur la phosphorescence du Phosphore. C.R., t. CXL, p. 444, 1905. 5 Hans : Die elecktrischen Erscheinungen bei der Phos- phoroxydation. Jahrbuch der Radioakt. und Electr., t. 1, p. 294, 1904. BLocu : L'ionisation par le phosphore et par les actions chimiques. Journal de Phys., S. #, L. I, p. 913, 190%. 688 J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES Quelques autres corps solides donnent également un phénomène de luminescence pendant leur oxyda- tion; le sodium et le potassium ont une lumines- cence assez vive au moment où on les coupe à l'air; en les filant à travers un orifice étroit, on obtient un ruban très lumineux. On connait, enfin, de nombreuses réactions chi- miques qui s’accompagnent d’une émission de lumière au sein d'un liquide, par conséquent à une température moyenne inférieure à 100°. Citons, par exemple, l’action de l'acide perchlorique sur la chaux, du bromure de soufre sur les alcalis con- centrés, les réactions du chlore ou du brome sur l'ammoniaque à chaud !. La réduction d’un hypo- chlorite ou d'un hypobromite par l'amalgame de sodium donne également lieu à un dégagement de lumière * : la luminescence se produit nettement autour des bulles d'hydrogène même éloignées de l’amalgame, et, cependant, elle n’a pas lieu avec l'hydrogène amené d'un gazomètre. Comme dans toutes les réactions chimiques où il se forme un gaz ou une vapeur, l'hydrogène que dégage l'amal- game est électrisé; il est très possible que la lumi- nescence soit corrélative des charges électriques entrainées par le gaz; les ions portant ces charges peuvent réagir sur l’hypochlorite, alors que les molécules d'hydrogène restent inactives. L'action des hypochlorites et hypobromites sur l’ammoniaque, sur les composés amidés, surtout sur l'oxamide et sur l’urée, donne encore lieu à un dégagement de lumière”, toujours accompagné d'une effervescence d'azote. La formalion d'azote n'entraine pas la luminescence; le chlorhydrale d'hydroxylamine, par exemple, donne une vive effer- vescence et pas de lumière. Au contraire, je n’ai jamais observé de luminescence sans effervescence ; avec quelques corps, tels que la pipéridine, il y a production d’un trouble, mais ni luminescence, ni effervescence : il suffit de verser le mélange liquide sur une surface imprégnée d'essence de térében- thine pour déterminer simullanément Îe dégage- ment de lumière et de gaz. L'action du chlore sur la pipéridine* donne une huile un peu explosive C'H'9.AZCI ; les hypochlorites doivent donner un produit analogue. Le même phénomène s'ob- serve avec l'urée el la dissolution d'acide hypo- chloreux. Dans ce dernier cas, le trouble se rassemble après quelques minutes en gouttelettes huileuses, qui font explosion avec dégagement de lumière au contact de l'essence de térébenthine. Chestakov ‘a montré que, dans la réaction de l’urée 1 Voir Taaurz : Ueber neue Lumineszenz-Erscheinungen. Zeit. f. Electrochemie, À. X, p. 593, 1904. ? J. Guixcuanr : Luminescence de l'acide arsénieux. C.R., 1905, t. OXL, p. 1234. * Bazcy : Ber. d. d. ch. G., &. XXI, p. 1772, 4888. * Cagstakoy : Action des hypochlorites sur l’urée; nou- huiles grasses et leurs acides isolés; beaucouy sur les hypochlorites, il se forme un corps inte médiaire contenant un groupement — AzCI. Il faut done admettre que les seuls corps capables d donner une luminescence sont ceux qui forme avec les hypochlorites ou hypobromites un compos très instable, analogue au chlorure d'azote, 8 décomposant spontanément avec dégagement de lumière. , attribuer la luminescence dans une classe nom breuse de réactions étudiées par Radziewski, par Perkin, par Dubois'. Beaucoup de composés orga niques légèrement chauffés deviennent lumineu quand on y projette de la soude ou de la potasse La réaction se produit très facilement en ajoutan un fragment de soude à une dissolution de ces corps dans le toluène, la ligroïne, le chloroforme. Les composés qui fournissent cette réaction sont : 1° Un grand nombre de carbures aromatiques, à chaines latérales, surtout le xylène, le cymène. 2° Les alcools contenant plus de quatre atomes de carbone ; 3° Les aldéhydes et leurs combinaisons ammc niacales; 4 Les corps gras, plus particulièrement les d'acides constituant les résines ; 5° Les éthers-oxydes, en particulier l’éther; 6° Un grand nombre d’essences à fonctions chik miques diverses, telles que l’essence de térében thine, de géranium, de lavande. La luminescence ne se produit avec lous ces corps que s'ils ont élé partiellement oxydés, par exemple s'ils ont absorbé de l'oxygène par exposition à l'ai et à la lumière. L'essence de térébenthine fraiches ment distillée ne luit pas; mais l'essence grasse dé térébenthine, obtenue en abandonnant l'essence à l'airet au soleil, donne une belle lumière. L'aldéhyde benzylique, même à l’ébullition, n’est pas lum neuse ; elle émet une très vive luminescence si, après l'avoir abandonnée quelque temps en flacon ouverk on la chauffe vers 60° avec un peu de magnésie où de baryte. j Tous ces corps susceptibles de donner des réat tions luminescentes après oxydalion sont, au moins dans leur ensemble, ceux auxquels Schünbein attri Russe, 1905, p. 1. ! Rapzieweki: Ueber die Phosphorescenz der organisChem und organisierten Kôrper. Lieb. Ann. de Chem., t. CCIMSM p. 305, 1880. | PEnkin : Journal of the Chem. Soc., t. XLI, p. 365. Dusois : C. R.,t. CXXXII, p.431, 1900. © | à in | 1 % - la formation de peroxydes instables dans l'oxyda- | même temps que la possibilité d'une fluorescence. - fonctions très diverses : aldéhydes, phénols, alcools, permettre une affirmation plus précise et plus gé- J. GUINCHANT -— LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES 689 susceptibles de donner avec les alcalis des sels plus instables encore. M. Berthelot‘ isola de l’éther un peroxyde d'éthyle C°H°.0.0.C*H°, A. Baeyer et Vil- liger? ont préparé ce composé par l’action de l’eau oxygénée sur le sulfate neutre d’éthyle et montré qu'il subit une aulocombuslion spontanée quand | on en approche un fil de cuivre chauflé; la polasse le décompose en donnant un produit détonant | C?H°.0.0K. Le dérivé mélhylé correspondant fournit un sel de baryum qui explose par simple contact. Ces auteurs ont obtenu de même un peroxyde de benzoyle (C'H°.C0}*.0*, qui, avec les alcalis, forme des sels C'H°.CO.0.0M déflagrant facilement par la chaleur. Dans l'oxydation de l’aldéhyde benzoïque à | l'air, il se forme l'acide correspondant C'H°.CO.0.0H. | De même, Engler et ses élèves” ont démontré | tion de l'essence de térébenthine, de l’amylène, de l'hexylène. Trautz et Shorigin ‘ ont signalé toute une série de réactions luminescentes obtenues en ajoutant du peroxyde de sodium ou de l’eau oxygénée en solution alcaline à des composés organiques à carbures, amines....: la luminescence est souvent accompagnée d’une explosion avec le peroxyde de sodium solide. Les conditions réalisées dans ces expériences sont simplement celles qui rendent plus facile et plus rapide la formation de sels de per- oxydes dans les réactions de Radziewski. Trautz et Schorigin concluent de leurs propres observa- tions et de celles d'Engler que la formation et la décomposition d'aldéhydes peroxydées, laugmen- tation qu'elles produisent dans la vitesse d'oxyda- tion, mériteront d'être prises en considération en Les expériences de Baeyer et Villiger semblent nérale : le sel de peroxyde doit jouer le rôle | principal dans toutes ces réactions chimie-lumi- nescentes. Le dégagement de lumière est-il dû à la décomposition spontanée du peroxyde ou à l'oxydation du produit primitif par ce per- oxyde, l'expérience pourra facilement le montrer; pour le moment, il résulte des observations de 1 BerTHEeLOt : Ann. Ch. et Ph.s. 5, t. XVII, p. 229 (1882). | 2 A. Bayer et Vicuicer : Ber. d. Deut. Chem. Gesel., | t: XXXIII, p. 3 387, 1900. A. Baever et Vicuicer : Per. d. D. chem. Ges.,t. XXXIII, | p. 1519, 1900. | # Exczer : Partiellement en collaboration avec Wild et avec Weissberg. Ber. d. Deut. chem. Ges., t. XXX, p. 1669, 1897; t. XXXI, p. 3045 et 3055, 1898; t. XXXIII, p. 1090. 4 Traurz et SuoxiGix : Ueber Chemielumineszenz. Zeit. moire m'a été signalé et communiqué par M. le Professeur | Trautz en même temps que le Mémoire de M. Bandrowsky pendant que je corrigeais les épreuves de cette conférence. Baever et Villiger que la première hypothèse est la plus vraisemblable. C'est certainement encore à des phénomènes du même genre qu'est due la réaction luminescente de Lenard et Wolf‘ : quand on verse une solution d’alun dans le révélateur d'Eder {carbonate de po- tasse ou bicarbonate de soude, sulfite de soude et pyrogallol), il arrive souvent que le liquide s'illu- mine, surtout si l’on a fait absorber de l'oxygène par le révélateur. Lenard et Wolf attribuent la luminescence à la combustion du pyrogallol par | l'oxygène qu'entrainerait l’alumine en se précipi- tant. Trautz signale une réaction tout à fait sem- blable trouvée à son laboratoire : on verse de l'eau | oxygénée dans une solution contenant du bicarbo- nate de soude, du pyrogallol et du formol. Il n'y a plus ici précipitation d'alumine, mais on relrouve les mêmes conditions : action de l'oxygène ou d'un peroxyde sur l'acide pyrogallique en présence d'un alcali et d’un réducteur. Dans les deux cas. il y à probablement formation d'un composé peroxydé du phénol, qui se détruit spontanément au moment où commence l’effervescence de gaz carbonique. Traulz signale enfin qu'il y a luminescence dans l'oxydation ou la chloruration d'un grand nombre de composés aromatiques, tels que l’acétanilide, la diphénylamine, le tanin, l'acide pyrogallique, etc. 11 semble rationnel d'admettre encore le même mé- canisme de luminescence que dans la chloruralion des amides, dans l'oxydation de l’élher, de l'al- déhyde benzylique ou de la térébenthine : il se forme un composé instable qui se détruit avec pro- duction de lumière, soit par élévalion de tempéra- ture, soit en présence de l'un des constituants du mélange. La luminescence est le résultat d'une explosion et non pas d'une transformalion oscilla- toire des atomes entre deux groupements molécu- | laires réversibles. $ 2. — Triboluminescence. C'est encore à une transformation brusque et non réversible que doivent être atlribués les phéno- imènes de triboluminescence. On connait depuis fort longtemps un certain nombre de corps qui émettent de faibles lueurs quand on les casse, quand on les broie, quand on les frotte. Cette pro- priété constitue la triboluminescence. Les exemples de corps triboluminescents les plus anciennementconnus sont?: le diamant, la fluorine, beaucoup de minéraux, lenitrale d'urane,lechlorure de calcium, l’acide arsénieux, le sulfate de polasse, le chlorure et le phosphate de mercure, enfin quel- | ques composés organiques Lels que le sucre candi 1. wiss. Photographie, t. 1, page 121, mars 1905. Ce Mé- | 1 Lexarvet Wocr : Ann.d. Phys.,t. XXXIV, p. 918, 1888. 2 E, BecquereL : La Lumière, t. 1, Livre II, p. 35 à 42. 690 J. GUINCHANT — LES PHÉNOMÈNES DE LUMINESCENCE ET LEURS CAUSES et l'acide tartrique. Andreocci' et Tchugaev*, ont élendu considérablement le nombre des composés organiques triboluminescents. Sur 400 composés organiques étudiés par Tchugaev, il en a trouvé 191, soit 30 °/;,, qui possédaient la triboluminescence ; citons, parmi les corps les plus usuels, l'acide oxa- lique, le formiate et l’oxalate d'ammoniaque, beau- coup de sucres, et, parmi les composés benzéniques, le chlorhydrate d’aniline, la résorcine et l'hydro- quinone, l'acide salicylique, l’anhydride phtalique, l'acétanilide, la saccharine, l'anthraquinone, un très grand nombre d’alcaloïdes et leurs sels. M. Trautz &t M. Gernez” ont ajouté à cette liste plusieurs sels minéraux et organiques. M. Muthmann signale encore comme tribolumi- nescents les hydrures métalliques, surtout les hydrures de cérium et de lanthane ; dans le même ordre d'idées, on peut rappeler que l'uranium et la fonte d'uranium donnent de très belles élincelies quand on les agite dans un flacon de verre. Quelle peut être la cause de celte émission lumi- neuse. Tout d’abord on peut attribuer les vibrations lumineuses à des oscillations extrêmement rapides des particules matérielles revenant à leur posilion d'équilibre, après une déformation mécanique. Le calcul permet de trouver facilement les dimensions ‘que l'on devrait attribuer à une tige pour qu'elle donnàt lieu à des vibrations longiludinales ayant l’ordre de fréquence des oscillations lumineuses: on trouve que cette lige devrait avoir des dimen- sions voisines de 55 y, c'est-à-dire l'ordre de di- 0 mension des molécules. Ainsi les molécules repre- nant leur état d'équilibre après une rupture peuvent effectuer des vibrations dont la fréquence serait de l'ordre de celle de la lumière; elles délermineraient une émission lumineuse par entrainement de l'éther. Il peut paraïlre superflu de chercher une autre origine aux faibles lueurs des corps tribolumines- cents si l'on songe combien est petite la quantité d'énergie mise en jeu dans ces phénomènes : le ; sn di ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES de 150-220, suivant les cas, les oximes se transforment régulièrement, en présence d'hydrogène, en un mélange d'amines primaire et secondaire, sans formation appréciable d'amine tertiaire correspondante. L'acétal- doxime fournit, vers 1509, l'amine primaire CH*CH?AzH°, une quantité notable d'amine secondaire (CH*CH?)*AZII et un peu de l'amine tertiaire (CH*CH°)*Az. L œnan- thaldoxime C'HA70H, qui fond à 50° et bout à 197, se transforme par hydrogénation en présence du nickel à 200-2209 en un mélange de l amine primaire C'H'*A7H° bouillant à 152°, de l'amine secondaire (C'H'*)*A7H cris- tallisée fondant à 30°, et que l'auteur à isolée pour la première fois, et un peu de l'amine tertiaire (C'H")"Az bouillant vers 330°. Les cétoximes subissent aussi régu- lièrement l'action hydrogénante. L'acétoxime fournit à 1800 : lamine (CH*)}CHAZH?, l'amine . secondaire {(CH)2CH PAZH, qui bout à 84, et un liquide distillant Jusque vers 4059, contenant vraisemblablement un peu d'amine tertiaire. De même, la méthyléthylcétoxime fournit un mélange des amines primaire et secondaire CH*(C*:HS)CHAZzH® et (CH*(C°H5)CH}AzH, bouillant à 4320 ; la méthylpropylcétoxime se transforme en un mélange de (CH*(C*H7)CH)AzE® et de (CHS(C'I)CH PAZH, bouillant à 1759. Ces deux amines secondaires ont été ainsi obtenues pour la première fois. L'auteur a cherché à obtenir les amines tertiaires correspondantes par diverses voies. Le nickel porté à haute température dédouble totalement loxime en ammoniac, eau et carbure d'hydrogène. Le cuivre à 300° ne fournit aussi que l'amine primaire et l’amine secondaire. Cette méthode de réduction des oximes présente un certain intérêt pour les cétoximes, puisque leur hydrogénation permet d'obtenir les amines secondaires des alcools secondaires, qui, à l'exception de Ja diisopropylamine, sont toutes inconnues. — M. Taboury, comme géné- ralisation de l'introduction du soufre dans certaines molécules organiques par l’action de ce métalloïde sur les organomagnésiens de M. Grignard, expose les ré- sultats qu'il a obtenus avec les dérivés organomagné- siens de l’anisol et du phénélol parabromés. Il à pré- paré de cette manière les thiophénols correspondants par action de l'eau sur le composé Br.MgS.CSH#.0.R. Les chlorures d'acides réagissent sur ces composés ainsi que les éthers halogénés des alcools. — M. E. E. Blaise expose les premiers résultats de ses recherches sur les synthèses au moyen des dérivés organomé- talliques mixtes du zinc. Comme il sera indiqué dans la suite, ces dérivés peuvent être obtenus très rapide- ment, en quantité quelconque, et leur manipulation ne présente aucune difliculté. Par action des chlorures des acides f-acétoxylés sur ces dérivés organomé- talliques mixtes, on oblient les cétones acétoxylées correspondantes, d'où l'on peut passer avec facilité aux cétones acycliques a2-non saturées. La réaction s'effectue dans d'excellentes conditions lorsque la foncüion alcoolique d'où dérive le chlorure acétoxylé est primaire ou secondaire. Dans le cas où elle est tertiaire, on ne peut obtenir le dérivé acétoxylé ; mais il suffit alors de partir du chlorure de l'acide non saturé correspondant. Cette méthode, d'un caractère général, a été étudiée en collaboration avec M. Maire. Elles conduit aux cétones a«$-non saturées de consli- tution quelconque, à l'exception des cétones vinylées à radical vinylique simple. Ces dernières peuvent être préparées facilement en partant des cétones £-chlorées correspondantes, comme il sera indiqué ci-dessous. Les cétones halogénées, jusqu'ici peu connues et dif- ticiles à obtenir à l'état de pureté, se préparent aisé- ment par action des dérivés organométalliques mixtes du zinc sur le chlorure de di- et de trichloracétyle. On obtient ainsi les cétones répondant aux types généraux CHCP.CO.R, CCF.CO.R, et dont les premières permet- tront peut-être de passer aux acides-aldéhydes. Quant aux cétones monohalogénées du type chlorométhylé, elles se forment à partir du chlorure de chloracétyle avec un rendement beaucoup moins satisfaisant. Il Sera sans doute possible de les obtenir dans de 103 meilleures conditions par une voie indirecte. Par contre, les célones £-chlorées se préparent avec la plus grande facilité à partir du chlorure de $-chloro- propionyle. Traitées par la diéthylaniline, dans des conditions convenables, elles donnent les cétones vinylées CH? : CH.CO.R inconnues jusqu'ici Les cé- tones vinylées constituent des liquides mobiles, à odeurs très fortes et très pénétrantes. Elles ne peuvent être distillées à la pression atmosphérique sans polymé- risation partielle, mais distillent sans altération sous pression réduite. Elles se polymérisent aussi sous l'in- fluence du temps. Les chlorures des acides bibasiques réagissent également avec une grande facilité sur les dérivés organométalliques mixtes du zinc. Avec Îles chlorures des acides de la série succinique, on obtient avec un bon rendement des lactones, fait en accord avec la constitution dissymétrique de ces chlorures d'acides. Avec les chlorures des éthers de la même série, on peut préparer sans difficulté les éthers des acides y-cétoniques à radical acidylé quelconque. Quant au chlorure de glutaryle, il se comporte également comme dissymétrique etil ya formation de lactones 3. Mais la lactone est toujours accompagnée d'un acide à-céto- nique, et, en se placant dans de bonnes conditions, ce dernier peut être obtenu avec un rendement satis- faisant. Cette réaction constituera une méthode de préparation commode des acides à-cétoniques peu connus jusqu'ici. — M. Guntz à pu obtenir du baryum pur et cristallisé (analyse 99,6 °/, de Ba) en dissociant dans le vide l'hydrure de baryum exempt de mercure. Le métal, condensé sur un tube en acier refroidi par un courant d'eau, se détache facilement. Le baryum au rouge réagit sur BaO pour donner un sous-oxyde Ba?0, qu'on obtient aussi, mais impur, dans l'action de Mg sur BaO vers 1100°. A basse température, il semble se produire un peu de métal libre ; l'auteur poursuit l'étude des réactions analogues, c'est-à-dire formation de sous-oxydes, qui se passent dans l'action du magnésium sur Ca0 et SrO. Scance cu 23 Juin 1905. M. Nicolardot communique les résultats de ses re- cherches sur la modification y du sesquioxyde ferrique. — M.P. Freundler communique ses recherches sur le dibromacétal. — MM. Ch. Moureu et Am. Valeur démontrent l'existence de deux mono-iodométhylates de spartéine. Ces composés se forment simultanément quand on fait réagir la spartéine et l'iodure de mé- thyle, soit en l'absence de solvant, soit en présence d'alcool méthylique au bain-marie. En chauffant, au contraire, en tube scellé à 1009 le mélange de spartéine, d'iodure de méthyle et d'alcool méthylique, on obtient les iodhydrates de ces deux iodométhylates, qui, par dé- composition au moyen des alcalis ou des carbonates alcalins, fournissent les iodométhylates correspondants. L'iodométhylate &« C!SH#A7?CH°T est moins soluble dans H°0 que son isomère ; [ln = — 22975. L'iodomé- thylate « le plus soluble à un pouvoir rotatoire d'au moins |)» — — #6°. Lesiodhydrates de ces iodométhy- lates perdent à 230 ou 240° de l’iodure de méthyle en donnant quantitativement un même mono-iodhydrate de spartéine: C'#H?547-CH°I.HI = CHI C'H*AZHL D'autre part, le mono-iodhydrate de spartéine, traité par ICH* en tube scellé à 130°, fournit un mélange des deux iodhydrates d'iodométhylate & et a’; des faits qui précèdent, les auteurs tirent les conclusions suivantes : 1° Dans les deux iodo-méthylates, l'iodure de méthyle est fixé au mème atome d’Az; leur isomérie done d'ordre stéréo-chimique ; 2 L'identité des produits obtenus en faisant agir successivement, sur la spartéine, l'iodure de méthyle, puis IH, ou inversement HI, puis CH°T, démontre l'équivalence des deux atomes d’Az et, par suite, établit la symétrie de la formule de la spar- téine. — M. Quennessen expose à la Société un pro- cédé rapide de dosage d'un alliage de platine et d'iri- dium. Il propose de précipiter par le magnésium de est 710 leur solution froide le platine et l'iridium, et de les fraiter ensuite au petit rouge par l'hydrogène ; puis d'enlever l'excès de magnésie par l’acide sulfurique dilué à 10 ? pour reprendre ensuite par de l’eau régale faible, qui dissout seule le platine. Il à constaté, en effet, que l'iridium, précipité par Mg, et encore humide, est soluble dans l'acide sulfurique dilué, ainsi que dans l'acide acétique; qu'il conserve encore cette propriété si on le sèche à 100° et mème au petit rouge ; c'est donc vraisemblablement un oxyde, qui prend, d'ailleurs, une teinte bleue après dessiccation à 1009, et dont les solutions ont des colorations différentes suivant la température de dessiccation. Hlumide ou séché à 1009, il communique à lacide sulfurique dilué une coloration jaune qui vire au violet à la longue; la coloration est violette si on l'a porté à l'air à 4409, et enfin bleue si on l’a chauffé à 800°. — M. P. Lebeau, poursuivant ses recherches sur l'emploi des métaux ammoniums en Chimie organique, fait connaître ses résultats concernant la préparation et les propriétés du-propane pur. Ce carbure est encore liquide à — 1950; il bout à 44,5. La température critique est 979,5. Ces constantes physiques sont différentes de celles qui avaient été attribuées à ce carbure par M. Hamlein, en 4895 ; elles se rapprochent beaucoup des détermi- nations antérieures de M. Olszewski. Le butane normal pur s'obtient très facilement en faisant réagir l'iodure de butyle secondaire sur le sodammonium. La réacüon donne naissance en même temps à l’amine correspon- dante. 11 n'en est plus de mème avec le chlorure de butyle tertiaire, qui fournit à côté de l'isohutane de l'amidure de sodium sans production d'amine. M. L. Bouveault, au nom de M. R. Locquin et sien, décrit la pivaloine, obtenue dans l'action du sodium sur le pivalate d'éthyle. Quoique possédant un groupe acétonique, elle est sans action sur l'hydroxy- lamine et la semicarbazide ; oxydée, elle fournit le dipivaloyle, a-dicétone qui ne donne avec l'hydroxy- lamine qu'une monoxime ; hydrogénée par le sodiuin et l'alcool, elle fournit exclusivement un alcool secon- daire C#H°.CH2.CHOH.C'H? fusible à 53°, oxydable en une acétone liquide bouillant à 163° et qui, malgré la présence du groupe CO.CH? —., est sans action sur l'hydroxylamine etla semicarbazide. — M. A. Granger décrit les résultats de ses tentatives pour obtenir des colorants céramiques à l’aide de l'anhydride tungstique. Avec des fondants convenables, en n’exagérant pas la température, ce corps conserve sa couleur jaune. Dans certaines glaçures, il détermine, par contre,une opaci- fication, qui empéchera de l'employer dans ces condi- lions. au SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 48 Mai 1905. MM. H.-B. Dixon et E.-C. Edgar : Le poids ato- mique du chlore; essai pour déterminer l'équivalent du chlore par tombustion directe avec l'hydrogène. Dans les neuf expériences décrites par les auteurs, 9,1786 grammes d'hydrogène se sont combinés avec 323,0403 grammes de chlore; par conséquent, le poids équivalent du chlore calculé en masse est de 35,195. Le chiffre obtenu pour le poids atomique du chlore est sensiblement plus élevé que celui calculé par F.-W. Clarke d'après des déterminations antérieures et légè- rement supérieur à la valeur de Stas : CALÇGUL DE CLARKE STAS DIXON ET EDGAR 35,179 35,189 35,195 H—1 35,447 35,457 35,463 O— 16 G.-P. Baxter indique la valeur 35,467 comme obtenue par Richards et Wells pour le poids atomique du chlore, valeur légèrement supérieure à celle des au- teurs. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES 1905. M. J. Fleming a déterminé théoriquement le rapport entre les pouvoirs éclairants sphérique moyen et hori- zontal moyen d'une lampe à incandescence. Il trouve 7/4 = 0,785, valeur qui concorde avec celle (0,78) qu'a obtenue expérimentalement M. Dyke. Le facteur de correction pour réduire le pouvoir éclairant horizontal actuel d’un filament linéaire de longueur finie au pou- voir éclairant dans la même direction qu'on trouverait si les éléments du filament étaient concentrés et nor- maux sur l'axe du photomètre est donné par l'expression Séance du 16 Juin 1 : : = (cos* b + ® cot Pb), où D est l’angle soutendu par le lilament linéaire sur le disque photométrique. — M. H. A. Wilson à étudié la conductivité d'une flamme de gaz d'éclairage pour l'électricité entre des électrodes de platine plongées dans la flamme. Le brù- leur est d’un type spécial en quartz fondu, bon isolant; il permet d'introduire des sels dans la flamme. Le courant à travers la flamme était mesuré avec un gal- vanomètre à bobine mobile. et la différence de potentiel entre les électrodes par un vollmètre électro-statique. — M. R. Appleyard communique quelques résultats de ses recherches sur les diélectriques. Excepté pour les diélectriques homogenes, il est erroné de déduire les valeurs spéciliques par rapport à l'unité de volume de la substance d'essais faits sur des feuilles. Avec des électrodes en feuilles d'étain pressées, la résistance apparente diminue lorsque la charge augmente; elle atteint une valeur constante pour une charge de #00 gr. par cm°. — M. F. Lanchester : L'accéléro- mèle à pendule, instrument pour la mesure directe et l'enregistrement de l'accélération. — M. N. V.Stan- ford : Nouvelle forme de picnomètre. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 1°%* Juin 1905 (fn). M. J. A. Newton confirme l'exactitude du titrage du peroxyde d'hydrogène par le permanganate en pré- sence de persulfate de potassium, — MM. A. G. Perkin et M. Nierenstein, en oxydant par le persulfate de K l'acide gallique dissous dans H?S0', ont obtenu l'acide ellagique de Graebe CHSO$ (form. 1). L'acide protoca- téchique, traité de la même facon, donne un acide C#H6O6, F.=>360°. L'acide p-hydroxybenzoïque conduit à l'acide catellagique C:*H$O® (form. Il). Enfin, l'acide m-hydroxybenzoique donne par la même méthode un —0.C0— —0.C00—, y =0.C0— CT) TA OS HO GO.0X 0H KGO:0X N C0: OH 4 OH OH (1) (I) (III) acide métellagique C'#H5OS (form. II), F. 2730-2760. MM. W. L. Goodwin et W. H. Perkin jun. ont séparé les deux modilications de l'acide hexahydroisophtalique par cristallisation fractionnée des sels de chaux; l'acide cis fond à 1629-1639, l'acide trans à 1489. — M. R. M. Caven à préparé de nouveaux halogépures doubles d'ammonium et d’'antimoine : 7AzH*Br.3SbBr*; 3AzH°Br. 2SbBr* ; 3AZH'L.2SDF. La méthode de préparation con- siste à ajouter un excès d'acide acétique glacial à une solution aqueuse concentrée des deux halogénures et de l'acide halohydrique. — MM. W. H. Perkin jun. et J. L. Simonsen ont constaté qu'on peut remplacer facilement l'hydroxyle par le brome en faisant chauffer les acétates d'alcools à 150° avec une solution d'HBr dans lPacide acétique. — MM. P. F. Frankland et N. L. Gebhard, par méthylation directe, suivant la méthode de Purdie, des sels-éthers de l'acide d-glycé- rique, ont obtenu les dinéthoxypropionales corres- ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 111 pondants. — MM. A. Harden et W. J. Young ont — constaté que l'addition de suc de levure bouilli à du suc frais agissant sur du glucose produit une forte — évolution initiale de CO*, qui diminue bientôt jusqu'à ce que le dégagement reste constant pendant plusieurs heures. Ce dégagement permanent est généralement le mème que celui que produit un égal volume du même suc de levure et de sucre sans addition; mais ül diminue plus lentement que ce dernier, de sorte que la fermentation se poursuit plus longtemps. — MM. J.C. Irvine et A. Cameron, en alkylant le 5-méthylgluco- side par Ag°O et CHI, ont obtenu le tétraméthyl-5-mé- thylglucoside, identique au glucose pentaméthylé. On obtient de la même façon le tétraméthyl-5-méthylga- lactoside. ACADÉMIE DES SCIENCES DE BERLIN Séance du 25 Mai 1905. M. Helmert présente un Mémoire sur l'exactitude des critères du hasard dans les séries d'observations. Pour compenser les séries d'observations, on aime à examiner les erreurs restantes pour vérifier si elles sont d'une origine suflisamment accidentelle, surtout dans le cas des formules d'interpolation où l'influence des termes négligés pourrait se faire sentir. L'auteur ait voir que, pour définir le degré d'exactitude dans l'examen des signes et des erreurs moyennes, on peut se servir des divergences moyennes, formulées dans l'hypothèse d'une loi « rectiligne » des erreurs d'ob- servation, d'une facon analogue aux erreurs probables moyennes de Gauss. Séance du 22 Juin 1905. M. Brankow présente les résultats de ses recherches faites en collaboration avec le Professeur E. Frass, à Stuttgart, sur le bassin cryptovolcanique de Steinheim dans l'AIb wurtembergeois. Les couches jurassiques constituant le centre de ce bassin sont amassées en direction verticale sur une hauteur d'environ 150 mè- tres, ce que l'auteur attribue à l'effet d'un laccolithe e trouvant dans les profondeurs. Les phénomènes volcaniques de ce bassin sont rattachés à ceux de ertains bassins voisins et attribués à l'effet d'une même roche profonde étendue. — M. R. Brauns, professeur à Kiel, à fait des recherches sur les roches diabasiques des montagnes argileuses rhénanes. L'au- eur y distingue trois espèces de roches diabasiques, uivant les minéraux qu'elles renferment et leur situation géologique. ALFRED GRADENWITZ. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 19 Mai 1905. M. E. Warburg rend compte, suivant les expériences de M. F. R. Corton, des effets de radiation et de l’in- fluence de la température sur les phénomènes que présentent les halogènes dansles décharges par pointes. es expériences en question étaient destinées d'abord à établir le potentiel minimum dans la décharge par pointe pour le cas des halogènes : chlore, brome et ode. En raison, cependant, des grandes divergences que présentaient les valeurs obtenues par les méthodes ordinaires, l’'expérimentateur a dû considérer plus en détail les conditions générales sous lesquelles le poten- iel minimum est de grandeur constante. Le potentiel inimum s'est trouvé dépendre du traitement subi par a pointe métallique, aussi bien que des effets de rayon- ement. L'influence de ces derniers est temporaire, disparaissant en même temps que le rayonnement. Le potentiel minimum s'accroît encore par l'incandescence dans une flamme. Les pointes récemment trailées à la lime sont en général insensibles, donnant les valeurs normales du potentiel minimum; on leur rend cepen- dant leur sensibilité sous l'influence de la décharge elle-même, aussi bien que de l'incandescence à l'air u à l'oxygène humides; les valeurs anomales ainsi obtenues se réduisent temporairement aux valeurs normales sous l’action d'un rayonnement. Séance du 2 Juin 1905. MM. Marckwald et K. Herrmann présentent un mémoire sur la fluorescence de l'air dans les rayons du radiotellure. Lorsqu'on dispose à côté d'une plaque de radiotellure une plaque photographique soustraite à l'action de la lumière, celle-ci se trouve être noircie après développement; son noircissement décroit du côté des portions détournées du radiotellure. En plaçant sur la plaque des fiches de métal, de papier, de verre ou de quartz, on obtient des silhouettes bien marquées des deux premières, alors que la plaque est faiblement noircie à l'endroit où se trouvait le verre et plus fortement là où était la fiche de quartz. L'hypo- thèse que ces phénomènes seraient dus à une émanation du radiotellure, émanation qui jusqu'ici n'a pu être démontrée par voie électrique, est infirmée par l'oh- servation suivante : Si les rayons Becquerel étaient cause du phénomène, leur effet devrait être affaibli par le verre et le quartz dans une mesure plus grande que par le papier; or, on vient de le voir, c'est le contraire qui se produit. D'autre part, lorsque la plaque de radio- tellure et la plaque photographique se trouvent dans une enceinte raréfiée où l’on a fait le vide {à environ 20 millimètres de pression), les effets sont affaiblis énormément, alors qu'ils devraient être renforcés si vraiment ils étaient dus à une émanation. Un courant d'air énergique, soufflant sur deux plaques disposées des deux côtés du radiotellure et contenant des fiches métalliques pareilles, à produit un noircissement intense et uniforme après une action de 1 1/# h. C’est done bien, semble-t-il, l'air qui devient fluores- cent au-dessus du radiotellure sous l’action des rayons. La transparence du verre à cette lumière fluorescente peut n'être qu'apparente, le verre étant rendu fluores- cent par les rayons ultraviolets et produisant nne lumière à plus grandes longueurs d'onde qui agit sur la plaque. L'auteur met en évidence la réflexion que subit cette lumière. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 22 Avril 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries pré- sente : Sur des systèmes linéaires de courbes planes algébriques. Le lieu des points où une courbe e*, d'ordre n, faisant partie d'un système linéaire (c*); de l'ordre de multiplicité 4, admet un contact de l’ordre Æ avec une droite passant par un point donné O, est une courbe de l'ordre à ÆA) (22—X), dont O est un point 1 5 k(k+ 1e, Les tangentes doubles des courbes « d'un faisceau {c), enveloppent une courbe de la classe 2n(n—2){(n— 3),admettant un point (a +4)(n—3)rte en chaque point de base du faisceau. Le faisceau (ce), contient à (n—4) {n—3$ (107235 n° — 21 7» —S0 » —- 10) courbes admettant une tangente d'inflexion tou- chant la courbe en un second point. Le faisceau (ec), 9 ss contient > (7—3) (2 + n° —8n+#4) courbesadmettant un point d'ondulation. Une droite quelconque est tan- gente double de &n—7 courbes ç* faisant partie d'un réseau (ce). Le lieu des points de rebroussement des courbes €* d'un réseau (c*), est une courbe de l’ordre 4 (2n—3). — Ensuite M. de Vries présente : Quelques nombres caractéristiques d'une surface algébrique. A l’aide de considérations élémentaires, l'auteur démontre les théorèmes suivants, se rapportant à la surface géné- rale z° de l’ordre 2. Le lieu des points, où &° admet une tangente à quatre points d'intersection coïncidés (tan- gente flecnodale), est une courbe gauche de l'ordre n(1i n —24). Le lieu des points d'intersection de gavec ses tangentes flecnodales est de l'ordre 21 (n—4) (3n° + n — 12). Le lieu des tangentes flecnodales estune surface réglée de l'ordre 2n.(n —3)(3n — 2). Le lieu des points d'osculation A des tangentes principales tou- chant # en un autre point B est de l’ordre n (n —4) (3n°—5n —24), celui des points de contact B est de l'ordre n (n—2) (n—#%4) (n° + 2n 4142). Le lieu de ces tangentes 2 est une surface réglée de l’ordre n (n—3) (n — 4) (a+ 6n—%). Le lieu des points de contact des tangentes {2° touchant +" en trois points est de l’ordre n (n—2) (n—%) (n — 5) (2 5 n+12);le lieu de 191 = , 1 ces tangentes #2 est de l'ordre 3 1 (2 —3) (n — 4) (u— 5) (n+ 3 n —2). La ligne spinodale est de l'ordre 4kn(n —?). — Enfin, M. de Vries présente la thèse de Mie A. À. Dalhuizen : « Over eenige aantallen van kegelsneden, die aan acht voorwaarden voldoen» (Sur quelques nombres de coniques satisfaisant à huit con- ditions). — M. J. Cardinaal présente au nom de M. K. Bes : L'équation du neuvième ordre représentant le lieu des axes principaux d'un faisceau de quadriques. Ici l'équation de l’ordre douze déduite par M. Cardinaal (Rev. gén. des Se., t. XIV, p. 239) est débarrassée de ses facteurs étrangers. — MM. H. G. et E. F. van de Sande Bakhuyzen présentent aunom de M. J. Weeder : Formules exactes d'approximation pour le rapport des triangles dans la détermination d'une orbite elliptique par trois observations. L'auteur représente le Soleil par Set les trois positions de la planète par Pr, P2 P3 ; avec Gibbs, il pose A PSP, —7,4P,SP;tet AP,SP, n, A P,SP,. Le but de sa communication est le dévelop- pement d'expressions pour », et », comprenant les termes du quatrième ordre ; chemin faisant, il démontre d'une manière nouvelle les expressions données par Gibbs. — M. K. Martin présente la thèse de M. À. L. Zaalberg : « Differentiaal-meetkundige eigenschappen van stralenstelsels » (Propriétés de géométrie infinité - simale des systèmes de rayons). 20 ScrENCES PHYSIQUES. — M. J. D. van der Waals présente au nom de M.Ph.Kohnstamum les troiscommunications suivantes : 1° Une formule pour la pression osmotique dans les solutions concentrées dont la vapeur suit les lois des gaz. Déduction de l'équation P =}, — p, — MR RD nee EVE L ie log (1 — x), qui mène à la formule connue de g van’t Hoff, si l'on développe le logarithme et que l'on fasse abstraction des puissances supérieures ; 2° Déduc- tions cinétiques de la loi de van't Hoff par rapport à la pression oSmotique dune solution diluée. À côté des théories plus compliquées (celle de Poynting, cherchant à expliquer la pression osmotique par l'association du milieu dissolvant et dela substance dissoute, et celle de Backlund, qui semble avoir besoin d'ondes de l'éther), on à développé principalement deux théories assez sim- ples : la théorie statique et la théorie cinétique. La première (théorie trouva récemment des défenseurs zélés en Pupin et Barmwater. Cependant, la seconde théorie semble la plus importante; le grand nombre de ses adhérents se réclament de l'égalité de la pression osmotique et de la pression gazeuse, prouvée par l'ex- périence et par des considérations thermodynamiques, menant à la conclusion que la substance dissoute se présente dans les deux cas sous la même forme ou bien que le milieu dissolvant transforme la substance dis- soute dans l'état gazeux dilué. Cette explication popu- laire, dont on déduit sans peine une démonstration très intuitive de la loi frappante de van’t Hoff, n’est qu'une explication verbale, laissant inexpliquée la cause pour laquelle le milieu dissolvant exerce cette action sur la substance dissoute; de plus, elle est in- compatible avec tout ce que nous savons des fluides et des gaz. Les tentatives de Lorentz et de Boltzmann pour expliquer la loi de van’t Hoff d'une tout autre manière n'ayant pas mené au but final, l'auteur développe ses propres idées; 3° La pression osmotique ou le potentiel È ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES thermodynamique. L'auteur termine cette troisième communication par les conclusions suivantes : « Dans sa | condition actuelle, la Chimie physique nous rappelle, quant à sa partie quantitative, la navigation d’un peuple ignorant l'usage de la boussole. La navigation côtière est pratiquée avec ardeur; la même région limitée est traversée sans cesse; mais on ne se hasarde pas en pleine mer à des distances considérables de la côte, et avec raison, car le danger de naufrager sur les ondes turbulentes des hypothèses téméraires est consi- dérable. Seule, la possession d'une boussole exacte peut apporter un remède. La Chimie physique l'ob- tiendra si elle remplace la théorie de la pression os- motique par celle du potentiel thermodynamique, basée sur une équation d'état bien fondée. » — M. H. Kamerlingh Onnes présente au nom de M. M. Rein- ganum (Strasbourg): Ueber electro-optisehe Konstanten der Metalle (Sur les constantes électro-optiques des métaux). Les considérations de l'auteur se basent sur lesrecherches récentes de MM. E. Hagen et H. Rubens.— Ensuite, M. Onnes présente au nom de M. A. W.Gray : Application du baroscope à la détermination de la den- sité des qaz et des vapeurs. Description d'un nouvel appareil. — M. W. Einthoven: Aualyse des courbes obtenues à l'aide du galvanomètre à corde. Masse et tension du fil de quartz et résistance du mouvement du fil. Pour l'instrument employé par l’auteur et les courbes décrites, on peutcomparer les communications précédentes (Rev. gén. des Se., t. XIV, p. 967, t. XV, p.#72 et 1055). 1. Introduction; 2. Hypothèse fonda- mentale de la méthode; la résistance de l'air qu'éprouve le fil de quartz en mouvement est proportionnelle à la vitesse. Les équations du mouvement d'un corps oscil- lant à amortissement électro-magnétique ; 3. La masse de la corde. La détermination directe de la masse de la corde étant impossible, l’auteur y substitue ce qu'il déduit de la formule connue reliant l'accélération à cette masse et à la force motrice, après avoir trouvé l’accélé- ration et la force par l'expérience ; #. La résistance du mouvement de la corde est déterminée à l'aide du point d'inflexion de la courbe où le rayon de courbure est infini; 5. L'accélération ; 6. Analyse de quelques courbes ; 7. Valeurs absoiues de la masse de la corde et de la résistance de son mouvement; 8. La tension du fil de quartz; 9. L'utilité du galvanomètre à corde par rapport à plusieurs buts différents. — M. H. J. Ham- burger présente au nom de M. A. W. Visser : liemar- ques sur lautocatlalyse et la transformation des Y oxyacides, avec et Sans addition d'acides, envisagées comme réactions d'ions.— M. À. K. Holleman présente la thèse de M. Ch. Sluyter : » Het mechanisme van eenige organische reacties » (Le mécanisme de quel- ques réactions organiques). — M. C. H. Wind présente au nom du directeur de | Institut météorologique des Pays-Bas : « Observations néerlandaises pour les études internationales des nuages en 1896-1897 ». 39 SciENGES NATURELLES. — M. T. Place présente aw nom de M. E. de Vries: Le ganglion voméronasäl: d'une longueur de 55 millimètres. Le travail est illustré par une planche montrant six coupes du ganglion. —= d'une communication de M. J. W.Langelaan (/tev. gén: des Se., t. XEV, p. 795). —M. G. C. J. Vosmaer présente aussi au nom de M. H. P.Wysman : Sur la structure des « spieula » siliceux des éponges. I. Les « stylim de Tethya lyneurium. — M. K. Martin présente au nom de M. H. G. Jonker : sance des pierres erraliques sédimentaires des Payss Bas.1. Le « Hondsrug » de la province de Groningue, pierres erratiques du Silurien supérieur. Deuxième baltiques orientales H et L. P. H. ScHoure. Le inrecteur-Gerant : LOUIS OLIVIER. Paris. — L. MaRETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. Les expériences se rapportent à un embryon humain Ensuite M. Place présente au nom de M. J. W. van, Bisselick : L'innervation du myotome du torse. Suites Contributions à la CORNAIS communication ; Pierres erratiques de l’âge des zones s | 1 Î 16° ANNÉE de DIRECTEUR : S 1. — Art de l’Ingénieur L’extraction et l'utilisation de la tourbe, — La tourbe est un combustible très répandu dans cer- aines régions de la France et, en général, mal exploité; cette exploitation a fait, au contraire, en Allemagne, de grands progrès, parmi lesquels il y a lieu de signa- ler tout particulièrement la méthode proposée par . Gerke pour l'exploitation des tourbes liquides, ren- fermant jusqu'à 95 °/, d’eau, et habituellement négli- gées comme improductives. Cette tourbe, prise par des dragues spéciales, est envoyée par des fossés dans des bassins près de l'usine à briquettes de tourbe, où elle est passée dans des filtres-presses continus, qui la ramènent à ne tenir plus que 65 °/, d'eau, après quoi on la sèche par de la vapeur d'échappement des machines à briquettes, et on la presse en briquettes. Le côté intéressant de ce système est que la vapeur nécessaire à la force motrice est produite dans une haudière spéciale, ou chaudière à tourbe, non par des briquettes de tourbe, mais par de la tourbe humide. La apeur de cette chaudière provient de tourbe humide dont on vaporise l’eau dans la chaudière même, et c'est Ja tourbe ainsi séchée, dans la chaudière, en y produi- Sant de la vapeur motrice, que l'on brûle ensuite au loyer de la chaudière. On économise ainsi, et recueille Men vapeur motrice, l'énergie ordinairement employée à vaporiser à l'air libre l’eau de cette tourbe. Et l'on : conçoit fort bien que l’on puisse réaliser d'importants «bénélices en utilisant, sur la tourbière même, ces chaudières à produire de la force motrice, non seule- ment pour la fabrication des briquettes de tourbe, mais aussi pour tout autre usage, la commande d’une tation électrique par exemple. C'est ainsi que l’on pourrait, d’après M. Gerke, dans une station électrique de 3.000 chevaux d’une fabrique “de briquettes en produisant environ 200 tonnes par Jour, utiliser environ 47 °/, de l'énergie de la tourbe brute à produire de l'électricité et des briquettes, “dont la fabrication ne serait pas sensiblement influen- cée par celle de l'électricité®, #2 Engineering, 12 mars, p. 605. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. N° 16 30 AOÛT 1905 Revue générale SCiences pures et appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 2. — Météorologie Intéressante installation météorologique. — L'installation dont il s’agit a été faite, il y a peu de temps, en Laponie, par un professeur de l'Université de Stockholm, M. Axel Hamberg, qui, depuis deux ans, s'efforce d'obtenir dans les Alpes de la Laponie suédoise des observations météorologiques automatiques. Jusqu'à présent, M. Hamberg a établi deux stations : l’une sur le mont Sähkok, à 1064 mètres au-dessus du niveau de la mer, l’autre sur le Portitjokko, à une altitude de 1995 mètres environ. Tous les appareils doivent fonctionner une année sans interruption. L'enregistrement se fait trois fois par heure au moyen d'un barreau qui retombe sur une série d'’aiguilles perforantes, correspondant chacune à un appareil diffé- rent. Les perforations du papier permettent d'établir les courbes. Le remontage du mouvement d'horlogerie et le rem- placement des feuilles d'enregistrement ne doivent se faire qu'une fois par an. L'enregistrement nécessite, pour toute une année, une bande de 20 mètres de longueur à peu près. Le poids du mouvement d’'horlo- gerie ne descend que de 2,50 mètres par an. Le mouve- ment d'horlogerie a été construit par M. G.-W. Linde- roth, horloger suédois. Le pluviomètre est d’un modèle nouveau, imaginé par M. Hamberg. L'appareil consiste en une balance à ressort, qui pèse l’eau recueillie dans un réservoir et enregistre les pesées. Une station complète comporte deux abris en fer et bois, l'un renfermant le mouvement d'horlogerie, les enregistreurs et le papier, l’autre le pluviomètre enre- gistreur; ce dernier renseigne également sur la quantité de neige tombée. d Des précautions ontété prises pour maintenir cons- tante la sécheresse de l'air qui environne les appareils dans les abris. Sans ces précautions, en effet, l'humi- dité se condenserait à l'état aqueux ou à l’état de givre sur les appareils, arrêterait le mouvement d'horlogerie, déformerait la bande d'enregistrement, etc. Ces pré- cautions sont, d'ailleurs, peu compliquées; elles con- sistent simplement à entourer le mouvement d'horlo- gerie de cylindres de papier et à enfermer les enregis- 16 714 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE treurs dans des caisses en tôle garnies intérieurement de godets remplis de chlorure de chaux. Aussi, n'est-ce pas là que l'on à rencontré la plus grande difficulté : c'est dans les dépôts de givre à l’exté- rieur des abris. Ces dépôts sont tels que le poste du Portitjokko fut, une fois, enseveli sous une couche de givre de plus d’un mètre d'épaisseur. Les appareils étaient naturellement arrêtés. Il fallut même placer la station à un niveau moins élevé. Encore, les dépôts de givre sont-ils si importants en automne que M. Ham- berg a dù charger un Lapon d'en débarrasser de temps en temps les abris. L'automne passé, le poste marche alors sans surveillance jusqu'à l'automne suivant. L'effet est surtout sensible sur les appareils destinés à indiquer la direction et la vitesse du vent. Il est presque impos- sible d'éviter complètement les interruptions dans ces appareils. Le fonctionnement est toutefois satisfaisant. D'ailleurs, ce résultat n’a pas été atteint d'emblée; le premier appareil installé dut même être ramené après quelques mois à Stockholm pour recevoir des remaniements. Mais, à présent, les résultats sont des plus encourageants. Les courbes déjà obtenues four- nissent des renseignements si intéressants qu'il est probable que des observatoires du même genre ne tarderont pas à être installés dans d’autres pays. $ 3. — Physique Stéréoscope dièdre à grand champ, à mi- roir bissecteur. — M. Pigeon, professeur à la Fa- culté des Sciences de Dijon, a présenté, le 24 juillet, à l'Académie des Sciences, un appareil qui donne au problème de la stéréoscopie une solwtion simple et nouvelle. Il diffère essentiellement des stéréoscopes usuels employés jusqu'ici. Dans ces derniers, en effet, la vue droite et la vue gauche, placées côte à côte, et toutes deux dans leur sens naturel, sont situées de telle manière que, pour les superposer le mieux pos- sible, il faudrait faire glisser chacune d'elles vers sa voi- sine. Au contraire, les couples stéréoscopiques établis par M. Pigeon se composent de deux vues: l’une; la vue droite, de sens habituel (sens recto), et l’autre, la vue gauche, retournée (sens verso); les deux vues de ce couple se superposeraient donc le mieux possible l’une à l’autre si l’une d'elles était amenée sur l’autre par rabattement autour d'un pli formé entre elles deux. Pour observer de pareils couples, on dispose les deux vues sur deux panneaux rigides qui forment entre eux un angle voisin de 140 degrés. Dans le plan bissecteur de ce dièdre, un miroir de petites dimensions, et qui forme à lui seul toute la partie optique de l'appareil, se trouve établi; ce miroir est fixé sur un cadre, qui sera dit cadre bissecteur. Pour regarder dans l'appareil ouvert, l'observateur, approchant l'œil gauche tout contre le miroir bissecteur, voit librement avec l'œil droit la vue droite; en même temps, la vue gauche, rétablie dans son sens naturel par la réflexion dans le miroir, apparaît à son œil gauche, comme si elle existait sur le même panneau que l’autre vue. La condition essentielle de la vision stéréoscopique se trouve ainsi réalisée. Lorsque l'appareil est fermé, il a l'aspect d’un simple album. Cette méthode, outre la rigueur géométrique des résultats qu'elle donne, présente tout d'abord l’avan- lage de comporter un champ d’une très vaste étendue, puisqu'on peut examiner les épreuves à l'œil nu, sans faire usage de loupes, ni d’oculaires; elle se prête, en outre, à l'emploi de vues groupées en fascicules ou en albums. Tous les formats peuvent convenir, surtout les formats moyens, tels que l'in-8° ou l’in-4°. Grâce à cette méthode nouvelle, la stéréoscopie, affranchie des conditions de champ, de format et de prix qui en restreignaient l'emploi, va pouvoir être employée facilement dans les publications illustrées. On voit quel utile secours la méthode vient apporter aux sciences et aux arts en général. Le publie est habitué depuis longtemps à voir des photogravures, accompagnant le texte, lui mettre sous les yeux les objets dont on lui parle; le photographe et l’imprimeur, avec le nouvel appareil, les lui feront, en quelque sorte, toucher du doigt. Une méthode pour rendre visiblesles vibra- tions électriques stationnaires. — M. E. Grim- sehl décrit, dans un récent numéro de la Physikalische Zeitschrift (n° 12), la modification suivante de da méthode d'Aron pour mettre en évidence les vibrations électriques stationnaires. Alors que, dans les tubes d’Aron, les fils le long desquels les ondes électriques se propagent sont tendus en ligne droite au dedans d’un tube raréfié de grand diamètre, l’auteur applique à la surface externe du tube deux bandes étroites de feuille d’étain en positions diamétralement opposées. Ces bandes étant reliées par un de leurs bouts à l’exci- tateur d'ondes électriques, le tube présente une lumi- nescence vive aux endroits à différence de potentiel élevée, tandis que l’intérieur du tube reste obseur aux nœuds de potentiel. Le pont nécessaire pour l’ajuste- ment des ondes consiste en un petit fil de cuivre recourbé en ressort et posé sur les bandes de feuilles d'étain de façon à relier deux points placés en regard. Ce pont est appliqué facilement à des endroits quel- conques des bandes d’étain. La longueur de ces der- nières est facilement réglée en vue d'obtenir des ondes parfaitement syntonisées. Il est également possible de disposer en série plusieurs tubes analogues et de relier les armatures de feuille d'étain correspondantes au moyen d'étroites bandes d’étain ou de fils minces; on réalise de cette manière des systèmes d'ondes d’une longueur quelconque. On confine dans un espace réduit un système à fil long en se servant d'un tube en serpentin de plusieurs mètres de longueur. $ 4. — Électricité industrielle Service radiotélégraphique entre lOcéan Pacifique et l’Atlantique.— Le Gouvernement du Pérou vient de décider d'établir des stations de télé- graphie sans fil dans les forêts vierges du pays. Il s’agit de relier par un service télégraphique Lima, la capitale, à Iquitos, le port fluvial le plus important sur les bords de l’Amazone. Ce projet est d'autant plus intéressant qu'il n'y avait aucune possibilité d'établir d’autres moyens de communication, par suite de l'accès difficile des forêts vierges et de la peur superstitieuse que les Indiens, vivant dans les conditions les plus primitives, manifestent vis-à-vis des fils électriques, qui leur paraissent quelque chose de monstrueux, d’incompré= hensible. 11 était, par conséquent, impossible de poser des fils aériens; d'autre part, les courants rapides des fleuves s'opposaient à la pose de câbles dans leurs lits: Aussi le Gouvernement chargea-t-il l'année dernière un ingénieur de la Compagnie de Télégraphie sans Fil, à Berlin, de partir pour l'intérieur, accompagné de qua= rante ouvriers et de nombreux Indiens pour transporten les vivres et les outils les plus indispensables. Cettem expédition, destinée à rechercher l'emplacement 16m plus approprié de cinq stations radio-télégraphiquess eut à vaincre des difficultés énormes, étant hors de toute communication avec le monde civilisé dans ces déserts où aucun Européen n'avait encore pénétré. L'expédition, menée ‘avec une rare énergie, a eu u succès parfait. La Compagnie de Télégraphie vien d'obtenir le monopole de l'exploitation de la radio télégraphie au Pérou. Deux ingénieurs et un montew sont partis pour l'intérieur du pays, afin d'y procéde à l'établissement des stations. Puerto-Bermudez, & delà des Cordillères, point terminus des télégraphe actuels, sera choisi comme point de départ du nouvea service. La distance entre cet endroit et Iquitos est di 1.000 kilomètres; elle sera franchie à laide de tro stations intermédiaires de télégraphie sans fil. On: même l'intention d'étendre ce service d'Iquitos jusqu'à, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 715 Manaos, sur les bords de l'Amazone, et, de là, à Para, sur l'Océan Atlantique, de façon à assurer une commu- - nication sans fil entre le Pacifique et l'Atlantique. + à : | $S 5. — Agronomie | Le problème viticole français'.— Sur les 160 à 1470 millions d'hectolitres qui représentent la production du vin dans le monde entier, la France a produit, en 1904, 66 millions, soit environ le 40°/,. Nos vignobles s'étendent sur une superficie de 1.700.000 hectares, qui forme le 1/16 des terres cultivables du pays, et la valeur du rendement s'élève à près de un - milliard et demi de francs, sur un revenu agricole total de 10 milliards. Enfin, l'exportation des vins dé- passe 260 millions de francs. Ces chiffres, que nous empruntons à M. Maurice Lair, disent assez l'impor- tance qu'a chez nous la culture de la vigne. Cette importance date de longtemps, puisque Vauban estimait déjà la récolte annuelle de la France à 30 millions d'hectolitres, et Arthur Young, un siècle plus tard, à 40 millions. Dès 1829, la superficie plantée ‘dépassait celle d'aujourd'hui; mais la terrible crise du phylloxéra, qui détruisit plus d'un million d'hectares ‘entre 1880 et 1895, vint la réduire de 2.446.000 hec- tares, en 1874, au chiffre actuel, à peu près station- maire depuis quinze ans. La culture de la vigne s'étend en France sur 56 dé- partements. Qualité et quantité varient dans une très large mesure. C’est la région du Midi (28 millions d'hl. ‘en 1904) et la région de Bordeaux (4 millions et demi d'hl.) qui fournissent le plus. L'Algérie produit déjà près de 6 millions d’h]. Cette grosse production a de la peine à s'écouler; le prix des vins du Midi, par exemple, est tombé jusqu'à 9, 6 et 5 francs l'hectolitre, alors que l’on estime de 42 à 15 francs le prix minimum nécessaire au pro- ducteur pour couvrir ses dépenses. Et, cependant, la “consommation s'accroit, favorisée par la loi de 1901 sur les boissons hygiéniques et les taxes d'octroi, mais limitée, d'un autre côté, par le chiffre stationnaire de la population française. Si l’on recherche les causes de la crise, caractérisée la fois par une production exagérée et par des prix insuffisamment rémunérateurs, 1l faut s'adresser de divers côtés. C'est d'abord, en dépit de l'action du législateur, la fraude du vin, fabrication de toutes pièces ou mouillage, qui, née au moment de la crise phylloxérique, n'a point encore disparu aujourd'hui. Cest le sucrage, malencontreusement favorisé par la oi du 28 juillet 1903, relative au régime des sucres. Le parasilisme d'intermédiaires trop nombreux, les frais énéraux énormes du commerce moderne, notam- vision de la propriété viticole, l'établissement du prix est faussé en ce sens que ce dernier est fixé par le négociant, acheteur de raisins frais, et non plus par le petit produsteur. Enfin, il faut bien reconnaitre que, dans le Midi principalement, on s'est trop préoccupé “de la quantité au détriment de la qualité, en plantant a vigne jusque dans les plaines sablonneuses, dont les produits ne se conservent pas. L'exportation pourrait constituer un premier remède bla crise. Nous avons vendu à l'Etranger en 1900 pour 20 millions de francs de vins: il faudrait donc déve- per ce courant en perfectionnant l'outillage et en duisant les tarifs des Compagnies de chemins de fer, prenant des précautions contre la contrefacon de nos produits de choix, en particulier au moyen d'un ntrôle et d'un certificat d'authenticité, organisés par des associations de propriétaires viticulteurs. Cepen- ant, si l'on jette un coup d'œil sur le marché mon- al du vin, on constate que nos vins ordinaires se k à Revue économique internationale, 15-20 avril 1905; art. -de M. Maurice Lair. 2 $ heurtent à la concurrence des produits similaires d'Italie et d'Espagne, ou à celle des produits locaux, et que l'usage de nos vins fins ne semble pas devoir se répandre beaucoup, par suite de leurs prix élevés. Et il faut bien revenir au marché intérieur, que l’on pourrait améliorer par différentes mesures, dont les bienfaits s'étendraient également au commerce exté- rieur. Groupement des producteurs et vente directe, répression nationale et internationale de la fraude, avec l'appui de l'Etat et aussi des intéressés eux- mêmes, rétablissement de l'exercice chez les débi- tants, suppression plus complète des barrières d’oc- trois, enfin, abandon de la recherche excessive des grands rendements au détriment de la qualité néces- saire. Ici, d’ailleurs, l’âge est un correctif naturel M. Maurice Lair estime que, dans une ou deux décades, un juste équilibre se rétablira sur notre marché viti- cole. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. $ 6. — Sciences médicales Le Purpura. — On donne ce nom à une éruption ecchymotique, accompagnée en général d'une éruption de petites taches rouge-pourpre, hémorragies sous- cutanées de siège et d’étendue variables. M. H. Grenet a consacré une thèse fort documentée à l'étude de la pathogénie du purpura. Selon lui, les altérations du foie jouent un rôle important dans la production des phénomènes purpuriques. Mais la localisation cutanée des hémorragies est surtout sous la dépendance de troubles nerveux. En effet, l'éruption est presque tou- jours symétrique, à disposition tantôt métamérique, tantôt radiculaire ; on note des troubles de la sensibi- lité. Il existe fréquemment des crises gastro-intesti- nales, qui sont, soit sous la dépendance d’une altération primitive du sympathique, soit le résultat d'une réac- tion sympathique consécutive à une altération médul- laire. D'ailleurs, on sait la fréquence du purpura au cours des maladies nerveuses, dans les méningites, dans le zona. Parfois, il existe des troubles de la réflectivité. Grâce à la ponction lombaire, l'auteur à pu mettre en évidence l'existence d’une réaction méningée, La lymphocytose paraît en relation directe avec l’éruption. Si le trouble nerveux est nécessaire pour expliquer la répartition du purpura, il faut encore invoquer l'in- tervention d’un agent toxique. Des expériences faites par H. Grenet sur les animaux viennent confirmer cette manière de voir. Le purpura apparaît done comme le résultat d’une intoxication nerveuse, souvent médullaire, quelquefois périphérique, et se développe de préférence sur un terrain préparé par une altération hépatique. Les Aphasies musicales ou amusies. — Le D' José Ingéniéros (de Buenos-Ayres) à proposé une classification des aphasies musicales, dont un assez grand nombre d'exemples ont déjà été analysés par les neurologistes. Il propose de désigner tous les troubles du langage musical sous le nom de dysmusies et de les diviser de la facon suivante les amusies, comprenant elles-mêmes des variétés comparables à celles qu'on a décrites dans l'aphasie : surdité musicale, alexie musicale, aphémie musicale, aphémie instru- mentale, agraphie musicale; les 2ypermusies, com- prenant, les exagérations et les impulsions de la faculté musicale, et les paramusies les troubles divers dans cette même faculté : phonophobie, paraphasie musicale, audition colorée, etc. Le même auteur à étudié les troubles du langage musical chez les hystériques et a retrouvé, selon les cas, les différentes variétés de dysmusies précédemment signalées, tantôt isolément, tantôt associées. CC» La Tuberculose au Tonkin. — M. le médecin- major Gaide, des troupes coloniales, vient de publier 716 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE quelques documents sur la tuberculose au Tonkin’. Cette maladie est rare chez les Européens : elle n'entre que pour une proportion de 0,8 °/, dans les chiffres de la mortalité générale. Elle attaque surtout les jeunes soldats de l'infanterie coloniale, qui sont généralement engagés trop Jeunes et qui, presque aussitôt, sont em- barqués pour le Tonkin. En effet, d’après l’auteur, ils ne sont pas capables avant vingt-cinq ans de résister aux fatigues du climat où d’une marche un peu pénible. Ceux d’entre eux qui portent le germe de la maladie, ou qui, par hérédité, sont naturellement prédisposés à l'infection bacillaire, sont terrassés et enlevés en peu de temps. En outre, le recrutement spécial de l'armée coloniale et des hommes de la légion étrangère, leurs habitudes de libertinage et d'alcoolisme font qu'il se trouve fréquemment parmi eux des sujets usés avant l’âge, qui offrent un terrain particulièrement favorable à l'évolution de la tuberculose. Il faudrait donc que l'attention des Pouvoirs publics fût attirée sur ce point, car un double enseignement semble découler de cette étude : c'est que, d'abord, il ne faudrait envoyer aux colonies que des hommes faits et non suspects de bacil- lose ; c'est, ensuite, qu'il faudrait prendre telles mesures qu'il serait nécessaire pour restreindre le libertinage et surtout l'alcoolisme, plus funeste encore, s'il est possible, dans les pays coloniaux. $ 7. — Géographie et Colonisation Les travaux scientifiques de la Mission de délimitation du Niger au Tehad (Mission Moll). — Une Commission franco-anglaise de délimi- tation vient de déterminer sur le terrain la frontière du Niger au Tchad, telle qu'elle avait été établie par la Convention du 1% juin 1898; on sait que la Mission française, partie à la fin de 1902, avait à sa tête le capi- taine — aujourd'hui commandant — Henry Moll, dont les principaux collaborateurs ont été les capitaines Tilho, Carpinetty et Jacques. La Mission s’est livrée à de très importants travaux pour la détermination de cette frontière, dont le développement n’est pas moindre de 1.600 kilomètres, et pour la reconnaissance des pays avoisinants. Elle a apporté ainsi à la Géographie une notable contribution, en même temps qu'elle a recueilli des observations et des documents du plus haut intérêt _sur la géologie et la minéralogie des pays traversés, sur * la météorologie, sur les populations, sur la linguistique?. Les levers de terrain furent effectués par l'emploi des méthodes astronomiques, de la géodésie terrestre et de la topographie; ces travaux étaient le but essentiel de la Mission. Comme point de départ des opérations, on prit la position de Cotonou, déterminée en 1895 par Serrès et Malo-Lefèvre, et qui est considérée comme exacte lat. 602149 N. : long. 026! 43! E. Paris. Utilisant le télégraphe de Cotonou au Niger, la Mis- sion transporta sa base de longitudes de Cotonou à Parakou, puis de Parakou à Carimama, sur le Niger, au moyen d'échanges de signaux télégraphiques. Cari- mama devint une llente base, qui permit d'arriver à déterminer la position rigoureuse du point du Niger d'où part la frontière vers l'Est. Ce point est, d'après le texte de la Convention de 1898, la ligne médiane du Dallol Maouri; il se trouve un peu en amont d'Io, au petit village de Dolé. La partie la plus délicate des opérations astrono- miques et géodésiques consistait à déterminer le tracé sur le terrain de l'arc de cerele de 100 milles de rayon prévu par la Convention de 1898 et décrit autour de la ville de Sokoto comme centre. La frontière suit, en effet, cet arc depuis sa rencontre occidentale avec la vallée médiane du Dallol Maouri, laquelle futrelevée facilement sur une longueur d'environ 100 kilomètres. Cette ren- ‘ Ann. d'Hyq. et de Méd. col., Paris, 1, 1905. * Une étude spéciale de la langue Haoussa est faite par le capitaine Tilho et l'interprète de 1re classe Landeroin. contre à lieu dans la région de Dioundiou; c’est en ce: dernier point que la Mission anglaise, commandée par le lieutenant-colonel Elliot, vint se joindre à la Mission française, au début de mars 1903. Immédiatement, une série d’occultations, observées. à la fois par le colonel Elliot et le commandant Moll, permirent de déterminer les positions de Dioundiou et des localités avoisinantes dans un rayon d'environ 50 kilomètres. Les opérations précédemment menées par la Mission française à l'aide du télégraphe, et qui | É | avaient abouti jusque dans la région immédiatement voisine, permirent de contrôler l'exactitude des ré- sultats obtenus, La Mission avait ainsi une deuxième base excellente, sur laquelle elle s'appuya pour procéder incontinent au relevé du tracé de l'arc‘. Pour le relevé de la frontière jusqu'au lac Tchad. on procéda de la manière suivante : On eut recours à la méthode astronomique des occultations pour déter- miner des points éloignés les uns des autres de 100 à 200 kilomètres, en choisissant les localités les plus importantes; autant que possible, on élablissait ces po- sitions par la moyenne de trois occultations au moins. A défaut, on opérait soit par la méthode des circuits chronométriques fermés, soit parfois par de simples. interpolations entre deux points de longitudes précé- demment déterminées. Le canevas lui-même fut obtenu, soit par triangula- tion, soit par la méthode des latitudes et des azimuts, soit par des polygones astronomiques relevés à l’aide: des chronomètres et se recoupant plusieurs fois les uns les autres; à l'intérieur du canevas ainsi obtenu, les. ilinéraires topographiques furent multipliés. La Mission française ne se contenta pas de relever, à l'aide de ces méthodes, le tracé de la frontière; mais elle releva aussi toute une zone s'étendant, le long de M cette frontière, sur une largeur moyenne de 100 kilo mètres et souvent plus. C’est ainsi que tout l’intérieur. de l'arc, jusqu'à Argoungou et Sabon-Birni, fut reconnu séodésiquement et lopographiquement. La Mission française opérait généralement de con= cert avec la Mission anglaise. Les deux missions se: réunissaient en certains points importants pour com- parer et fixer les travaux déjà faits. Le commandant Mol! arriva à Kouka en janvier 1904, avec le capitaine Tilho, pour déterminer la position de: cette ville. M. Foureau, lors de son passage, avait trouvé une longitude très différente de celle qu'on adopte généralement sur la foi des observations de Vogel. Les: observations du capitaine Tilho et celles du lieutenant, anglais Evans confirmèrent les résultats obtenus par M. Foureau. La Mission se concentra en février 1904 à N'Guigmi, et, tandis que le commandant Moll etles autres membres: de la Mission revenaient par la route la plus courte, le capitaine Tilho fut chargé d'étudier les rives orientales: du Tchad, le Kanem et de faire la jonction géodésique entre N'Guigmi et le territoire du Chari*. ; Embarqué sur le Benoit-Garnier, que commandai l'enseigne de vaisseau Audoin, le capitaine Tilho navigu de son mieux vers l’est, pour trouver l’intersection du quatorzième parallèle et du méridien trente-cinq mi nutes Est Kouka. 1] comptait ensuite chercher à jalonnem ce méridien frontière à travers le dédale des lagune qui forment la côte est du Tchad, mais les fièvres inters rompirent ce travail. Il sé rendit au Kanem et déten mina la position de Mao, la capitale de ce pays, et de Fort-Pradié (Bir-Alali). Il fit la topographie de toute l& partie orientale et septentrionale du lac Tchad avec M8 ‘ Les deux Gouvernements s'étaient mis d'accord po adopter comme exacte la position de Sokoto, telle qu'elle résulte des opérations astronomiques des voyageurs ant rieurs, et la Mission francaise avait, à l'avance, dressé lableau des coordonnées des points du cerele distants entré eux de deux degrés, tant en longitude qu'en latitude (Bulletin du Comité de l'Afrique française, juillet 1904, p. 231), 1 ® La Géographie, 15 mars 1905, p. 226, note du capitaine Tilho. | Sd dé ins dd SO 1 FA CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE ES | ‘sergent Cosson, en passant par les nouveaux postes de Bol et de Kouloua, et il revint à N'Guigmi par terre. Le 414 mai, il reprit la direction de Zinder, et, ayant appris en chemin les nouvelles stipulations de l'accord franco- anglais du 8 avril 1904, il fit une reconnaissance rapide de la frontière nouvelle Niger-Tchad. Le capitaine Tilho revint par le Niger, et il putobserver en d'excellentes conditions à Niamey, à Garou, près de Gao, de Bamba, et de Sompi, des occultations dont les résultats démontrent que le Niger a été placé jusqu'ici sur les cartes à une vingtaine de kilomètres trop à l’est. J1 termina ses observations astronomiques à Bamako. Il arriva en France à la fin de janvier 1905 La Mission Moll a rapporté sur toutes les régions parcourues une ample moisson de documents géogra- phiques, comme en témoigneront les cartes aujourd'hui en préparation, entre autres une carte de la région du Tchad au 250.000, que dresse en ce moment le capi- taine Tilho. Leur constitution géologique a été étudiée en détail et de nombreux échantillons de roches ont été rapportés au Muséum. Une remarque qui a été faite est que le Dallol Fogha, que les cartes portent comme l’affluent du Dallol Maouri, est en réalité la véritable vallée; le Maouri remonte plus haut, c'est vrai, mais il a moins d'eau d'une façon permanente et pas de salines, tandis que le Fogha en à A’activement exploitées, tant au-dessous qu'au-dessus «de son confluent avec le Dallol Maouri. Dans ces vallées, on trouve une eau souterraine en creusant des puits à des profondeurs variables. Le Dallol Maouri peut être regardé comme l’ancien collecteur des eaux venues de la région ouest de l’Adar. Son sol est sablonneux. Sa berge orientale est comme une falaise. Les dallols sont découpés dans une sorte de bastion de calcaire lutétien, terminé en haut par une table sensiblement horizon- tale; leur profondeur atteint souvent une soixantaine de mètres’. On a trouvé, dans ce calcaire, de nombreux fossiles (Lamellibranches et Gastropodes) et des Oursins ‘en abondance. Cette faune trahit des affinités égyp- tiennes el indiennes, ce qui confirme l'hypothèse d'une jonction par l'Egypte entre la mer lutétienne de l'Inde et celle du Soudan*. Depuis Illela jusqu'à l'intersection de l'arc de Sokoto avec le quatorzième parallèle, on rencontre des terrains qui ont une composition identique : grès fer- rugineux, calcaire, gypses. Il semblerait qu'au début du Trias la région était émergée; puis les mers du Lias, de l'Oolithique, du Crétacé l’auraient successi- vement r couverte*. C’est le système orographique le plus développé de la frontière : 600 à 650 mètres d’alti- tude ; 150 à 200 mètres de relief au-dessus de la plaine. De Bouza à Zinder s'étend une région de plaines. La digne de partage des eaux entre les bassins du Niger et du Tchad est marquée par des ondulations assez mal définies, qui prolongent au sud le plateau de Zinder et se relient à des mouvements de terrain d’une orienta- tion générale est-ouest au nord de Kano et de Machéna. .Katsena et Tessaoua appartiennent au bassin du Niger, Kano et Machéna au bassin de la Komadougou (bassin du Tchad). Le second système orographique est constitué par le pays de Zinder. De cette localité à Gouré, où un poste a été créé en octobre 1903, s'étend une région de collines granitiques très confusément enchevêtrées. C'est une pouce pétrographique à roches alcalines, qui s'étend, après M. Foureau, jusque dans l'Air, à lferouane et, d'après MM. Foureau et Lacoin, jusque dans l'Hadjer- æl-Hamis, près de l'embouchure du Chari. La caractéristique de toutes les roches actuellement RE ot nt SE LL ne J. VOYER — LES VOYAGES AU LONG COURS EN BALLON le sol, que des positions « continuellement varia- bles et chancelantes », suivant l'heureuse expres- -sion du général Meusnier ‘. D'autre part, lorsqu'on ‘exécute un long voyage en ballon, on dépense une grande quantité de lest, et il en résulle que, dans la dernière partie de l'ascension, les altitudes de- wiennent très élevées. Si nous prenons comme ‘exemple les traversées de France en Russie, exé- ‘cutées en 1900, nous voyons que les hauteurs atteintes ont dépassé 5 et 6.006 mètres ?. Or, dans «ces régions, la respiration devient pénible : il faut, pour éviler les dangers d'asphyxie, être muni ‘d'oxygène pur; la température y est souvent très basse; bref, le séjour y est peu agréable. De plus, pour descendre de ces hautes altitudes sans ‘craindre des vitesses exagérées pouvant entrainer un choc contre le sol, il faut se réserver une quan- tité notable de lest : c’est autant de perdu pour l'ascension. Enfin, cette obligation de naviguer à -chaque instant dans une zone déterminée et indé- pendante de la volonté de l’aéronaute interdit à celui-ci de choisir le courant le plus favorable au but qu'il poursuil. On voit done combien lui serait utile un organe lui permettant de choisir sa zone de navigalion. Or cet organe existe: il a été imaginé, il y a cent vingl ans, par le général Meusnier : c'est le hallonnet à air. Pourquoi, en effet, le ballon monte-t-il de plus en plus haut? C’est parce qu'après chaque descente, enrayée par des projections de lest, il remonte jusqu'à ce qu'il soit plein et qu'il ait évacué la quantité de gaz correspondant à son excès de force ascensionnelle, Mais le ballonnet permet de remplir le ballon artificiellement au moyen d'air atmos- phérique, et de lui faire ainsi évacuer son gaz à une altitude moins élevée, où il retrouvera, par conséquent, son équilibre. Et celle altitude est à la volonté de l’aéronaute, qui règle la quantité d'air introduite dans le ballonnet. Celui ei peut done choisir sa zone de navigalion à la hauteur qui lui parait la plus convenable : l’élendue de ce choix est limilée à chaque instant aux deux points anx- - quels le ballonnet est entièrement vide ou entiè- rement plein, points que Meusnier désignait sous les noms caractéristiques de « limite supérieure et limite inférieure d'équilibre » . Ces deux limites sont d'autant plus éloignées l’une de l’autre que la capacité du ballonnet est plus grande. 1 Mémoire sur l'équilibre des machines aérostatiques, présenté à l'Académie le 3 décembre 1783, par M. Meusnier, Jieutenant en 1°" au corps royal du génie. (Journal de Phy- sique de l'abbé Rozier, t. XXV, juillet 1784. ? Dans les ascensions du 9 octobre, M. de la Vaulx.a atteint l'altitude de 5.180 mètres; M. Balsan, celle de 6.650 mètres. * Addition au Mémoire déjà cité 4ome). Méme journal, même 735 Il est étrange de constater dans quel oubli est restée si longtemps cette belle invention de Meus- nier. Elle a été reprise par Dupuy-de-Lôme dans son ballon dirigeable, mais surtout dans le but d'assurer la permanence de la forme. Le « Méditer- ranéen » est pourvu d'un ballonnet:; mais cet aéros- tat est reslé Jusqu'ici presque constamment en équilibre sur son stabilisateur à une faible hau- teur au-dessus de la mer. C'est seulement en 1903 que les ballons libres à ballonnet ont été enfin expérimentés dans le sens que nous venons d'indi- quer. Les résultats de cette heureuse innovation ne se sont pas fait attendre. Dès la première ascension avec ballonnet, le 28 janvier 1903, M. Balsan, dans son ballon «le Saint-Louis », exécutait un vovage de 279", de Saint-Cloud à Madocsa (Hongrie), sans dépasser l'altitude de 3.200 mètres. Au point de vue de la distance parcourue et de la durée, cette ascen- sion élait presque identique à celle que le même aéronaute avait accomplie le 9 octobre 1900, de Vincennes à Opoczno; mais l'altitude maxima était réduite de moitié. Après lui, M. de la Vaulx exécutait, dans le cou- rant de l'année 1903, quatre ascensions avec le ballon «le Djinn » pourvu d'un ballonnet. Dans la première (14 mars), il séjournait en l'air pendant 2745 sans dépasser l’allitude de 1.600 mètres. La seconde ascension donna des résultats analogues. La troisième (26 septembre) fut particulièrement: intéressante parce qu'elle montra tout le parti qu'on peut tirer du ballonnet pour choisir le cou- rant le plus favorable. Parti de Saint-Cloud à 7 heures du soir, l'aérostat, entraîné par un vent S. S. E., gagnait l'embouchure de la Somme, tra- versait la Manche et, à à heures du matin, planait au-dessus de l'estuaire de la Tamise. Des nuages plus élevés que le ballon accusaient un vent de S. O. qui eût immédiatement rejeté les aéronautes vers la mer du Nord : l'emploi du ballonnet leur permit d'éviter ce courant supérieur en se mainte- nant constamment au-dessous de 1.000 mètres d'altitude et de poursuivre ainsi leur voyage jusqu'au delà de la rivière Humber, à hauteur de Hull. Quant à la quatrième ascension du « Djinn», elle fut malheureusement interrompue par une abondante chute de neige, qui alourdit l'aérostat d'un poids considérable et le força à atterrir dans le Doubs après un voyage de quinze heures. On peut donc conclure, avec M. de la Vaulx”, que «l'utilité du ballonnet est pratiquement démontrée; grâce à lui, l'aéronaute se rend maitre de la zone de navigation, et il peut choisir à tout moment le ! Comptes rendus des séances de l'Académie des Sciences, 9 novembre 19035. 736 J. VOYER — LES VOYAGES AU LONG COURS EN BALLON courant qui lui convient le mieux. Dans les ascen- sions de longue durée, il évitera les altitudes trop élevées, et le séjour dans l'atmosphère sera moins fatigant et plus agréable ». III. — PRÉCAUTIONS CONTRE LA PLUIE. Que d'autres améliorations très simples, et pour- tant très importantes, peuvent encore subir nos aéroslats! On sait combien la pluie les surcharge, et combien aussi elle est désagréable pour les aéro- nautes, qui n'en sont pas à l'abri : car elle descend à la fois par les cordages et par la manche d’'appen- dice. Il convient donc de prendre des précautions spéciales pour diminuer le poids de pluie qui se dépose sur le ballon et pour en protéger les aéro- nautes. En 1886, M. Hervé, pour sa traversée de la mer du Nord, avait construit un ballon dont la par- tie supérieure était un cône d'une pente moyenne de 40°, très favorable, par conséquent, à l’écoulement de la pluie; de plus, il avait, dans cette même région, remplacé le filet par une chemise lisse. C’étaient là d'excellentes dispositions, qui seraient à imiter dans un ballon destiné à des ascensions au long cours. Dans le même ordre d'idées, le ballon « le Djinn », qui, lui, est sphérique, a été surmonté d’un cône d'écoulement. Pour abriter complètement de la pluie les aéronautes et toute la partie inférieure de l'aérostat, il suffirait de prolonger la chemise ou l'enveloppe du cône jusqu'à l'équateur et d'en laisser pendre verticalement le bord inférieur de façon à former gouttière. Il faut bien remarquer, en effet, que, le ballon étant entrainé dans le même sens et avec la même vitesse que l'air ambiant, la pluie tombe toujours parallèlement à son axe. Certains aéronautes ont une tendance à simplifier l'aérostat et à supprimer tout filet ou chemise, en suspendant directement la nacelle à l'enveloppe qui renferme le gaz : cette disposition a été surtout appliquée aux ballons dirigeables; elle pourrait l'être aux ballons libres. Dans ce cas, l’étoffe vernie formerait, elle aussi, une surface lisse favorable à l'écoulement de la pluie, et il serait facile de cons- tituer une goultière au moyen d’une bande cireu- laire rapportée le long de l'équateur ou un peu au- dessous. IV. — PROTECTION CONTRE LE RAYONNEMENT SOLAIRE. La pluie n'est pas le seul agent extérieur contre lequel on ait à prémunir le ballon : l'influence du Soleil n’est pas moins néfaste. Celui-ci chauffe le gaz et le porte à une température bien supérieure à celle l'air ambiant : les expériences de MM. Hermite et Besancon ont montré que la dif- férence des deux températures pouvait, dans nos de climats, dépasser 30°. Cetle différence serait sans inconvénient, si elle se maintenait constante; mais. il n'en est rien : par suite des inégalités du rayon- nement solaire sur le ballon, elle varie à chaque instant. Or tout refroidissement se traduit par une rupture d'équilibre ‘, qui provoque la descente du ballon et, par suite, une dépense de lest, Ces varia- tions de l’'échauffement du gaz sont, en définitive, la. cause principale de la brièveté des ascensions. En particulier, lorsqu'on passe du jour à la nuit, le gaz : tend à reprendre la même température que l'air ambiant, et il en résulte un alourdissement pro- gressif considérable. Il importe donc, au plus haut point, de combattre le rayonnement solaire, et c’est dans ce but que le capitaine suédois Unge a expérimenté en 1902 un. ballon entièrement revêtu d’une chemise*. Cette idée de la chemise protectrice n’est pas nouvelle; déjà Tissandier, en 1873, écrivait : « En envelop- pant l'hémisphère supérieur d'un ballon d’une mousseline blanche légère, qui, n'adhérant pas à l'étoffe, en serait séparée par une couche d'air, om protégerait ainsi le gaz intérieur des influences de: réchauffement et de refroidissement”. » Mais le capitaine Unge est, sans doute, le premier qui ait mis ce système en pralique ; son ballon présente, d'ailleurs, plusieurs particularités intéressantes, se rapportant à ce que nous avons exposé plus haut. C'est un cylindre vertical terminé à sa partie supé- rieure par un cône aplali; à la base du cône est une gouttière. La forme cylindrique, allongée dans le sens vertical, diminue la surface exposée à la pluie. Il n y a pas de filet, et les suspentes qui soutiennent. la nacelle sont fixées au bord inférieur du cylindre. Enfin, le ballon entier est recouvert d’une chemise de même forme, mais plus grande, et les deux enveloppes sont séparées par des boudins en étoffe gonflés d'air. L'intervalle entre la chemise et le ballon est rempli par de l'air atmosphérique, qui peut être renouvelé dans le cours de l'ascension. Un accident assez grave a interrompu prématu- rément les expériences du capitaine Unge“; il se 1 Pour un degré de refroidissement, le gaz se contracte des 0,00367 de son volume ; si l'on appelle a le poids spé- cifique de l'air et V le volume du ballon, le poids de l'air déplacé diminue de 0,00367aV. Avec un ballon de 1.000 mè- tres cubes, la rupture d'équilibre est de 4 kilogs environ par degré de refroidissement; avec un ballon de 2.000 mè- tres cubes, elle est de S kilogs. ? Nous voulons parler ici du ballon le «Swenske I ». expérimenté en Suède ; le « Swenske Il», construit à Paris en 1903, n'avait pas de chemise. 5 Journal La Nature, du 23 Août 1873. 4 Lors de sa deuxième ascension, le ballon a éclaté em l'air sous un excès de pression intérieure : heureusement, le fond du cylindre a formé parachute et les aéronautes en ont été quittes pour des blessures très légères. Cek accident semble dû à un vice de construction de l’aéros= tat : la sortie automatique du gaz sous l'effet de la dilata= tion n'est pas suffisamment assurée. Postérieurement, le nt PS J. VOYER — LES VOYAGES AU LONG COURS EN BALLON 137 rail à souhaiter que l'efficacité de la chemise contre le rayonnement solaire fût de nouveau expéri- -mentée. 4 V. — CoNLUSsIONs. . En résumé, pour rendre possibles et pratiques “les ascensions au long cours, il faut d'abord amé- “nager convenablement la nacelle, puis se donner la facullé précieuse de choisir sa zone de navigalion au moyen d'un ballonnet à air. Il faut ensuite ga- rantir l'aéroslal de la pluie et le protéger contre le rayonnement solaire, cause principale des ruptures ‘d'équilibre. Tels sont les points sur lesquels se porte effecli- vement aujourd'hui l'attention des aéronautes. Grâce à l'impulsion donnée par un cerlain nombre d’entre eux, entreprenants et actifs, grâce aussi à la science consommée et à l'expérience d'ingénieurs lancés à la recherche de ces intéressants pro- blèmes, la question des voyages au long cours en ballon libre fait des progrès incessants. Déjà les ascensions de trente-six à quarante heures! _n'étonnent plus personne, et l'on peut prédire que l’époque n’est pas éloignée où il paraïitra tout na- + turel de s'embarquer dans une nacelle pour trois - ou quatre jours. Ce sera là une nouvelle étape : ce ne sera pas la « dernière. Plus tard, des méthodes perfectionnées - permettront d'équilibrer le ballon el de parer aux … variations passagères de sa force ascensionnelle - sans perte de lest ni de gaz. Les ascensions sur » stabilisateur (guide-rope à terre, flotteur en mer) nous en fournissent déjà un exemple. On peut ima- giner d’autres procédés qui conservent à l’aérostat - son indépendance complète du sol (hélices susten- tatrices, réchauffement du gaz, emploi de l'air chaud, etc.). Nous n’entrerons pas ici dans l'exa- même ballon a exécuté une troisième ascension; les détails nous manquent sur les résultats obtenus. 1 L'ascension déjà citée de M. de la Vaulx du 9 octobre 4900 a duré 35 h. 45 m.; le voyage du « Méditerranéen », en 4901 (sur stabilisateur), a duré 41 heures. dc 2 1 * men de ces systèmes’, dont aucun n'a été encore expérimenté?; mais nous sommes convaincu qu ils permettront d'augmenter dans de notables propor- tions la durée des voyages en ballon. Certaines personnes trouveront, sans doute, que le problème de la navigation aérienne au long cours ne sera pas résolu d’une facon satisfaisante tant que l'aéronaule ne conduira pas son ballon où il voudra, tant qu'il ne pourra pas exécuter des traversées régulières entre deux points déterminés. A cet égard, il ne faut pas se bercer d'illusions : de longtemps les ballons dirigeables ne seront pas capables de fournir une longue carrière. La force ascensionnelle disponible, qui, dans les ballons libres, est utilisée sous forme de lest et qui permet précisément une sustentation de longue durée, sera, dans les ballons dirigeables, employée à sou- lever le moteur, le propulseur, la provision de combustible, et celle-ci sera épuisée d'autant plus rapidement que le moteur sera plus puissant et qu’on obtiendra une vitesse plus grande. Bref, s’il est permis d’espérer que, dans quelques années, cerlains navires aériens lutteront avec succès con- tre les vents modérés, on peut affirmer que cette lutte ne se prolongera pas au delà de quelques heures, au moins d'une seule traite‘. Ce n’est donc pas sur eux qu'il faut compter pour exécuter des voyages de plusieurs jours. Les vrais aéronautes s’en consoleront facilement. Ce qui rend les ascensions libres si attrayantes, n'est-ce pas précisément le charme de l'imprévu, allié à une impression profonde de calme et de sécurité ? J. Voyer, Capitaine du Génie. 1 Voir à ce sujet : « L'équilibre de l'aérostat et les ascen- sions au long cours ». (Hevue de l'Aéronautique, t. VII, 2e livr.) ? Nous croyons savoir, cependant, que l'emploi de l'air chaud sera essayé prochainement. “ La plus longue étape d'un ballon dirigeable a été jus- qu'ici de 2 h. 46 (évolutions du ballon Lebaudy autour de Moisson). BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Fouêt (Ed.-A.), Professeur à l’Institut catholique de Paris. — Leçons élémentaires sur la Théorie des Fonctions analytiques. Deuxième partie. 4 vol. gr. in-8° de 299 pages. (Prix : 10 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1904. En rendant compte de la première partie de cet ouvrage, nous avons déjà insisté sur les services qu'est appelé à rendre ce traité, qui est destiné à initier les étudiants aux propriétés fondamentales de la Théorie des Fonctions analytiques. Ces Leçons constituent pour eux un excellent guide à travers cet important domaine de l'Analyse; ils y trouveront tout ce qui est indispen- sable à acquérir dans une première étude et seront ensuite en élat d'entreprendre, sans trop de peine, la lecture des traités et des mémoires, même les plus récents, signalés dans les nombreuses notes bibliogra- phiques et historiques. L'ouvrage complet est divisé en deux Livres. Le pre- mier a pour objet l'étude des méthodes générales de définition et de représentation des fonctions. Les cinq premiers chapitres forment la Première partie, qui a élé analysée dans la /evue du 30 janvier 1904. La Seconde partie débute par deux chapitres se rattachant encore au Livre I. Le premier est consacré à la défini- tion des fonctions par des équations différentielles. L'auteur examine d'abord le cas des fonctions impli- ciles, en supposant que les dérivées des fonctions inconnues n'entrent pas dans les équations qui défi- nissent ces fonctions; 1l étudie ensuite les théorèmes d'existence relatifs aux intégrales des équations diffé- rentielles ordinaires et des équations linéaires aux dérivées partielles; puis il expose les principales pro- priétés des problèmes de Dirichlet. Vient ensuite un court chapitre où l’on voit, à l’aide des exemples clas- siques, comment des fonctions peuvent être définies par des propriétés fonctionnelles. Le Livre 11 forme la plus grande partie de ce second et dernier fascicule ; il contient la théorie des fonctions analytiques aux points de vue de Cauchy, de Weierstrass et de iiemann, présentée dans son état actuel, en tenant compte des récents travaux de MM. Picard, Poincaré, Mittag-Leffler, Hilbert, Painlevé, Hadamard, Borel, et d'autres. L'auteur examine successivement ces trois conceptions en groupant, autour de chacune d'elles, les théorèmes dont la démonstration repose sur les mêmes principes. Se plaçant d'abord au point de vue de Cauchy, M. Fouët considère les fonctions qui sont en général uniformes, continues, et ont une dérivée continue, et il montre comment, à l’aide de la notion d’intégrale prise le long d'un contour, on peut établir les propriétés fon- damentales de la théorie des fonctions. L'auteur passe ensuileaux procédésde Weierstrass. On sait que ceux-ci permettent d'édifier systématiquement la théorie des fonctions analytiques en ayant unique- ment recours à des considérations arithmétiques. Sont étudiées successivement les fonctions entières, leurs propriétés, leur décomposition en facteurs primaires, les fonctions méromorphes, les fonctions analytiques uniformes dont les singularités sont dénombrables, les fonctions analytiques à plusieurs variables. Les méthodes de Riemann sont caractérisées par le fait qu'elles font intervenir l'intuition en ayant recours à la Géométrie. Elles sont présentées en partant de la notion importante de fonction harmonique. L'auteur passe ensuite aux propriétés des fonctions analytiques BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX ET INDEX et à leurs applications à la représentation conforme, aux surfaces minima et à des problèmes empruntés à la Mécanique et à la Physique. H. Feu, Protesseur à l'Université de Genève: où edit Têtedoux (Paul) et Franche (Georges). — Le Graig-M sage industriel. — 1 vol. in-8° de 216 pages avec 134 figures. E. Bernard, éditeur. Paris, 1905. à Le graissage, surtout avec les machines actuelles. dont beaucoup tournent fort vite, est délicat et coû=M teux. Les principes et les données expérimentales en« sont exposés dans des ouvrages fort divers, parfois trop anciens et surtout rédigés pour des ingénieurs. MM. Tête- doux et Franche se sont appliqués à mettre la question à jour et à la traiter de façon intelligible pour les. petits industriels et mécaniciens. | Après avoir donné, d'ailleurs sans formules, uné idée de la théorie du frottement, ils font l'historique du graissage, qui a débuté par les procédés à lair libre, aujourd'hui souvent remplacés par le prose sous pression, et ils étudient les diverses variétés de lubrifiants : solides, semi-fluides, liquides, avec leurs modes d'essai par l'ixomètre Barbey et l'appareil Lu- chaire. Æ Ils arrivent ensuite à la description des principaux graisseurs : petits appareils, graisseurs à charge d’eau, graisseurs par poids mort, graisseurs mécaniques, de beaucoup les plus importants et sur lesquels les auteurs s'étendent longuement, Cette partie de l'ouvrage se termine par l'étude des filtres à huile, et par deux cha- pitres consacrés au graissage particulier des locomo= lives et à celui des automobhiles, tout spécialement actuel. j Dans une cinquième partie sont décrits les paliers des arbres de transmission (à garnilure de métal anti- friction, à rouleaux, à graissage par rotins), les paliers de butées d'hélice et les paliers d'abres moteurs. Dans une sixième et dermère partie, on trouvera les précautions qu'il convient de prendre contre les acci- dents qui peuvent se produire à propos du graissage ou du contact avec les transmissions. Ces précautions sont extraites d'une instruction, publiée par l'Associa= tion des industriels de France, contre ces accidents du travail, qui sont tant à l’ordre du jour. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. 2° Sciences physiques Berget (A.), Docteur ès sciences. — Physique du Globe et Météorologie. — 1 vol. in-8° de 365 pages avec 128 figures et 14 cartes. (Prix : 15 fr.) Masson et Cie, éditeurs. Paris, 1905. Quand mon éminent collègue M. de Lapparentprésenta cet ouvrage à l’Académie des Sciences, il fit remarquer, d’abord, que ce livre comblait une lacune dans le pro- gramme de notre enseignement, el, en second lieu, qu'il la comblait de la façon la plus heureuse, étant donnée la remarquable clarté qui en est la caractéris- tique. A la lecture du livre, cette appréciation se confirme au delà de toute attente. Il est, en effet, impossible, à mon sens, de présenter avec plus de clarté, plus de précision, plus d'élégance en même temps, cette his- toire de la Terre, que M. Berget enseigne depuis cinq ans aux élèves de la Faculté des Sciences, dans le Labo- ratoire du Professeur Vélain, et qu'il a réunie en volume, à la demande de ses anciens auditeurs. L'ouvrage expose la Physique du Globe dans ses trois DERLE 2 CR parties, c'est-à-dire Physique de la Terre prise dans Son ensemble, Physique de l'Océan, Physique de PAtmosphère La Physique de la Terre est présentée d'une façon qui men fait ressortir tout l'intérèt et qui en précise les points essentiels : loi de l'attraction immuable, mesure “de la masse de la Terre, de sa forme par la double héthode de la Géodésie et du Pendule; courants élec- “iriques qui la parcourent, et, enfin, mouvements lents ét rapides qui en agitent l'écorce. La Physique de l'Océan comprend les constantes de ä mer, l'étude de ses mouvements rythmiques : houles { marées, et enfin celle des mouvements de transla- on dont ses eaux sont animées, c'est-à-dire des cou- ants marins, dont le Gulf Stream est le plus remar- uable exemple. Quant à la Météorologie, on peut dire, sans crainte Métre taxé d'exagération, que cette partie du livre est ibsolument remarquable: remarquable par les idées nérales qui y sont émises, remarquable par la mé- thode d'exposition, remarquable par l'unité avec la- elle les différents phénomènes de l'atmosphère sont reliés les uns aux autres. Dans son exposé de la Météorologie, l'auteur ne s’est as perdu dans les détails : il a su, au contraire, ce dont il faut le louer sans réserve, faire ressortir des andes lignes dans une science que l'on considérait comine inextricable, et il l'a fait avec une merveilleuse arté. Prenant pour point de départ les lois de la écanique et le théorème des accélérations, il a montré que, «le la connaissance de ces lois, de l'étude des con- itions géographiques, on pouvait prévoir les lois qui égissent les mouvements des masses aériennes, ce qui St infiniment plus rationnel que de se borner à les pprendre. 11 a, de plus, montré le lien indissoluble ui unit la Physique de l’Atmosphère à la Géogra- hie, et ce n'est pas un de ses moindres mérites. Aussi ce livre a-t-il valu à son auteur les apprécia- ons les plus flatteuses. Au premier rang de celles-ci, convient de placer celle de l'illustre géographe vien- mois, le « Professeur Suess, l’auteur de ce livre admi- able, traduit dans toutes les langues, qui s’appeile : Ja re de la Terre ». Le Professeur Suess, dans une ngue lettre, a félicité M. Berget de son travail et de clarté merveilleuse avec laquelle il avait exposé ces ifliciles questions. Des géographes, des marins en rand nombre (et des plus illustres) ont également dit à valeur de ce livre, qui ne saurait manquer d'être Maduit dans toutes les langues, tant il est clair et précis. J'ajouterai que l'exécution matérielle en est arfaite et que des cartes, habilement gravées et nette- nent tirées, ajoutent leurs qualités démonstratives à celle du texte, dont elles précisent les explications. Il est à désirer que les matières contenues dans Nouvrage de M. Berget soient enseignées officiellement bnotre Université de Paris, la seule du monde où nulle haire n'y est affectée, et, pour cela, que les confé- rences de M. Berget soient, par une consécration ofli- elle qui ne saurait tarder, affirmées comme faisant rlie intégrante de notre enseignement supérieur ancais. D'ailleurs, l'Académie des Sciences, qui vient : ion de ce désir, en donnant à son auteur la E.-H. AMaAGaT, Membre de l'Institut. Texpr s haute des approbations. aduzzi (Lavoro). — I1 Selenio. — 1 vol. in-$° de x? pages avec 19 figures. (Prix : 3 lire.) N. Zani- chelli, éditeur. Bologne, 1905. A mesure qu'on y regarde de plus près, on s'aperçoit un corps quelconque est susceptible d'aspects mul- ls, ce qui contrarie certaines idées anciennes sur constitution de la matière, et diminue singulièrement portée des systèmes actuellement à la mode pour résenter la constitution intime des molécules. Nous vons qu'il existe au moins deux états du fer et de ses oxydes, de manière presque aussi certaine qu'on connais- BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX couronner l'ouvrage, a, pour ainsi dire, matérialisé. 139 sait depuis longtemps les aspects multiples du carbone. Le sélénium est un des éléments dont les formes sont le plus anciennement connues, et, grâce à une cir- constance particulière, il n'a rien perdu de sa singula- rité à se trouver depuis en nombreuse compagnie. Il occupe toujours une place à part, qu'il doit à cette double circonstance : d'abord, qu'il est susceptible d'être instantanément modifié sous l'influence de la forme d'énergie que nous considérons habituellement comme la plus faible, la lumière, et surtout, ensuite, que la modification disparait avec le rayon lumineux qui l'avait fait naître. Cette propriété, qui a immédiatement trouvé son application dans le photophone, à été l'objet d'un nombre considérable de travaux : ce sont ceux qui sont résumés dans ce petit volume, bien à sa place parmi les « Actualités scientifiques ». Le sélénium est en effet d'aujourd'hui... et de demain, car, si l'expli- cation de ce qu'on sait est encore à trouver, ce qu'on sait appelle une suite : après avoir obtenu la reproduc- tion du son, on vise à transmettre les images. C’est sur l’état de réalisation de ce rêve, auquel les récentes expériences de Korn paraissent donner une réalité, que se ferme le livre de M. Amaduzzi. L'ouvrage, qui ne traite que des propriétés physiques du sélénium, se divise en six chapitres, d'intérêt très inégal. Le premier (#1 pages) résume ce qu'on sait sur les modifications allotropiques stables : forme cristal- line, densité, fusion, ébullition, dilatation, conducti- bilité, dispersion, pouvoir thermoélectrique, pouvoir rotaloire, magnétisme. Le chapitre IL (31 pages) traite de la variation de résistance électrique avec l'illumination, la tempéra- ture, elc. Le chapitre HI (14 pages) renferme ce qui a trait à l'influence de la lumière sur la force électromotrice de contact. Le chapitre IV (10 pages) concerne les piles au sélé- nium. Le chapitre V (7 pages) serait bien court, si on oubliait qu'il s’agit d’un livre de vulgarisation. En si peu de pages, l'auteur ne peut étudier de manière suffisante les causes des phénomènes exposés sous les titres IL et III. Le dernier chapitre (22 pages) est un résumé des principales applications du sélénium. Ce petit livre est capable d'intéresser, par sa clarté, tous ceux qui veulent connaître où en est la question du sélénium et de la phototéléphonie. L'auteur n'a néanmoins pas voulu que son labeur fût perdu pour les savants que tenterait l'étude de cette capricieuse sensitive qu'est le sélénium; il a placé, à la fin de son livre, une bibliographie, à laquelle renvoie d’ailleurs le texte pas à pas : elle comporte 99 numéros, et s'étend jusqu'à mai 190#. R. METZNER, \ Professeur adjoint à la Faculté des Sciences de Dijon. 3° Sciences naturelles Gervais-Courtellemont. — Voyage au Yunnan. — 1 vol. in-16, de XI11-295 pages, avec 23 gravures et 2 cartes. (Prix: 3 fr. 50.) Plon-Nourrit et Cr, éditeurs, Paris, 1904. Cet ouvrage est le journal de route résumé de la double tournée accomplie au Yunnan, en 1902 et 1903, par M. et Mme Gervais-Courtellemont. Les résultats géographiques et économiques en étaient déjà connus par plusieurs conférences, communications ou articles de l'explorateur, et ils avaient été mis en pleine valeur par la belle exposition de produits, d'objets et de pho- tographies faite à l'Office Colonial. Le volume publié l'an dernier par la librairie Plon n'en a pas été moins bien accueilli; car l’on y trouve, à côté de l'exposé vivant de très nombreux faits, en grande partie nou- veaux, cet accent de foi en notre avenir colonial, cet esprit d'activité hardie et simple, que connaissent à l'auteur tous ceux qui l'ont entendu. Les deux itinéraires parcourus par M. et M=° Gervais- 740 | IBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Courtellemont les ont d'abord conduits de Lao-Kaiï, à ! Il a réuni un grand nombre d'observations nouvelles sur travers tout le Yunnan oriental, par Mong-Tseu et Yunnan-Sen, jusque dans le Sétchouen, puis de la frontière sino-birmane (Momeïn) à Tali-Fou, et de nouveau à Yunnan-Sen et à Lao-Kaï. C'est pendant ce second trajet que les explorateurs se sont courageu- sement détournés vers le Nord, pour aller reconnaitre, dans le pays de haut relief du Yunpan thibétain, la boucle allongée et étroite que décritle Yang-Tseu, entre Likiang-Fou et Yunlin-Fou. Ils y ont découvert un énorme pli montagneux (avec des sommets de plus de 4.000 mètres), contourné par le fleuve Bleu, et dont M. Gervais-Courtellemont a le premier dressé l’esquisse cartographique. Bien que ce voyage ait eu surtout un but commercial etethnographique, la relation en abonde en intéressants aperçus de Géographie physique. Elle confirme d’abord, une fois de plus, l'allure du relief entre Bhamo et Tali-Fou, succession de plis parallèles dirigés du Nord au Sud, tellement pressés les uns contre les autres, et si aigus, que les communications transversales {par des cols de 4.600 à 2.000 mètres) y sont d’une désespérante lenteur, et que les Anglais ont dû provisoirement renoncer à tracer jusqu'à la Salouen le prolongement de leur chemin de fer birman. Cest le lac de Tali-Fou et le cours du Mékong au sud de ce point qui marquent la limite occidentale des grandes rides méri- diennes issues du Thibet; mais la même direction, différente de celle ‘du Song-Koï, se remarque encore dans la forme allongée des bassins lacustres de Yun- nan-Sen et dans le relief qui les entoure. — A un autre point de vue, M. Gervais-Courtellemont a noté de la facon la plus heureuse les oppositions de climat et, par conséquent, de végétation et de cultures qui existent partout, au Yunnan, entre les vallées, aussi pro- fondes que régulièrement dessinées, et les chaines ou bassins élevés. On se rend ainsi compte de la péné- tration du climat tropical de mousson jusqu'à l’intérieur même du relief thibétain, et lon s'explique en mème temps le fait géographique essentiel de la variété des produits de celte province, qui est, avec la grande quan- tité des ressources minérales, une promesse d'avenir. Vers le Song-Koï yunnannais, situé directement sous le tropique, c’est seulement à 2.000 mètres, dans la montée de Man-hao à Mong-Tseu, que disparait peu à peu la flore des terres chaudes et humides, dont les derniers représentants sont les lataniers et les indigotiers. Du côté de la Birmanie, les vallées sont encore occupées à 750 mètres par la flore et, exceptionnelle- ment, par les cultures de l'Océan Indien ; à cette altitude, lesynclinal encaissé de la Salouen, «vallée de Mort», per- pétuellement plongée dans une buée chaude, a encore les Jjungles de rhododendrons et de bambous des couloirs birmans et himalayens. Enfin, dans la vallée du haut Yang-Tseu, si les orangers se montrent à 750 mètres, il faut descendre jusqu'à 450 mètres environ pour retrouver les champs de cannes et de cotonniers. L'aspect du Yunnan en dehors des vallées diffère, d’ailleurs, sensiblement d'un endroit à l’autre : dans « quelques parties sèches » des plateaux, les orangers, les cactus, abritant des maisons en pisé, font penser aux hautes plaines de l'Atlas méditerranéen (Tlemcen, par exemple), tandis que, sur les bassins lacustres voi- sins de 2.000 mètres, comme celui de Yunnan-Sen, on observe, non seulement le mélange des végétaux méditerranéens et tempérés d'Europe |les lentisques et les orangers, à côté des châtaigniers, des pêchers et des pruniers ; le tabac, le pavot et la pomme de terre, à côté du riz), mais encore une précocité des récoltes qui permet de faire une première moisson en mai. Dans le Yunnan thibétain, les pâturages de montagne et les belles futaies de sapins et de cèdres montent jusqu'à plus de 4.000 mètres, richesse malheureuse- ment sans emploi, faute de moyens de communication. Au point de vue économique, M. Gervais-Courtelle- mont à étudié en détail les marchés et les principaux eentres de production agricole etindustrielle du Yunnan. Tong-haï, Yunnan-Sen, Thao-Ting-Fou, Tali-Fou. Ce qui frappe le lecteur, c’est la très grande variété dansk ce pays des ressources naturelles (minières surtout), en même temps que des modes de l’activité humaine. Eb pourtant on a presque à chaque page l'impression nette qu'au milieu de leurs richesses, et malgré leur travail, les habitants demeurent pauvres. Ils le sont évidem= ment à cause des lenteurs et des difficultés du com» merce, qui leur interdisent la plupart des échanges indispensables, par des sentiers souvent dangereux où ne circulent que des mulets, des bœufs porteursf certains de ces chemins ne sont même praticables qu'au hommes. Bien qu'il se soit établi par la force de choses des courants de trafic, convergeant vers Talis Fou et Yunnan-Sen, on ne peut guère transporter qué des produits légers, précieux et faciles à conserver Les minerais n’accomplissent pas en général de long voyages; ce qui circule le plus et le plus loin, ce son les médecines, le musc, les pelleteries, le jade, Di thé de Pou-eul, et principalement l'opium du pays renommé dans toute la Chine. Les Thibétains © cinquante jours de marche à faire dans la montagnes pour arriver à Tali-Fou. Il ne paraît pas discutable, dans ces conditions, que l'établissement de voies de communications au Yunnan ne soit destiné à inau gurer le véritable développement du pays, et à y bou= leverser d'abord les conditions de l'existence. | L'auteur a raison de répéter que ce sera tout bénéfice pour le Tonkin et pour la Birmanie, — lieux obligatoires! de transit, — et il s'attache à déterminer les domaines# futurs du commerce birman et tonkinois, au Yunnan: Le premier sera évidemment le moins considérable; car l'achèvement du chemin de fer français de Laokaï à Yunnan-Sen nous ouvrira le centre même du pays: Mais la route de Talifou à Bhamo gardera de l'impors tance, et la vice-royauté des Indes y fait aménager less ponts etles passages difficiles, en attendant de reprendre: les projets de voie ferrée; les consuls anglais# paraissent même, d'après l'ouvrage de M. Gervais-Cour tellemont, plus actifs, plus adroits et mieux vus au» Yunnan que certains des nôtres. Il ne faut pas se dissimuler, d’ailleurs, que le pays sera longtemps avant de se relever des ruines accus mulées par la répression de la révolte musulmane de 1870. Ceux des travailleurs musulmans qui n'ont pas disparu ne figurent plus que par groupes de familles éparpillées dans les villes ou leur voisinage, et, si la population rurale des Lolos soutient encore la produc= tion agricole, beaucoup de centres urbains, marchés ef foyers d'industrie à la fois, ont perdu presque toute leur ancienne activité. On lit dans ce volume de lamens tables descriptions des ruines de Kouan-y (tombée di 40.000 habitants à quelques centaines), de Tali-Fou et d'une facon générale, de presque toutes les villes, at moins dans certains quartiers. L'air de labeur et dé prospérité du Sé-Tchoucn, épargné par la guerre, cons titue une opposition frappante entre les deux provinces C'est un changement à vue, quand on traverse la frontière. Malheureusement, M. Gervais-Courtellemont semble exagérer en écrivant que le Sé-Tchouen es appelé à entrer dans la zone d'attraction du Tonkin par le Yunnan. ‘4 Le problème de la colonisation francaise en Indo Chine est, d’ailleurs, lié à la géographie du Yunnan autrement que par des considérations d'échanges com merciaux. Cette province, riche en bétail, peut être notre base de ravitaillement, et elle peut offrir à nos colons des sanatoria. Mais notre force de résistancë s’en trouvera-t-elle beaucoup augmentée, en cas d’ats taque? À ce point de vue, un grand inconnu subsiste quoi qu'en espère l’auteur ce sont les dispo: sitions envers nous des Annamites, qui sont certaine ment travaillés, malgré tous les services que la France“ leur a déjà rendus, par les événements d'Orient et paï l'immigration jaune. J. MAcHar, Agrégé de l'Université, L BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 7 ES = 4° Sciences médicales Calmette (A.), Membre correspondant de l'Institut et de l'Académie de Médecine, Directeur de l'Institut Pasteur de Lilie, et Breton (M.), Chef de clinique médicale à la Faculté de Médecine, Assistant à l’Ins- titut Pasteur de Lille.— L'Ankylostomiase : mala- die sociale (Anémie des mineurs). Biologie, cli- nique, traitement, prophylaxie. — { vol. in-8° de 240 pages avec figures. (Prix : 5 fr.) Masson et C', éditeurs. Paris, 1905. À ; 1 Ce livre s'adresse à la fois aux médecins et aux ingé- ieurs de charbonnages. … Les médecins trouveront dans la première partie, Plus spécialement médicale, tout ce qui concerne l’his- Moire classique de l'ankylostomiase : l'histoire et la dis- iribution géographique de l’ankylostomiase, la biologie de l’'ankylostome et l'étude de son développement, les odes de contagion et d’infestation, l'évolution de la aladie, avec ses symptômes, ses formes cliniques, ses odes de terminaison, le diagnostic par l'examen icroscopique des matières fécales, les lésions anato- iques produites par le parasite, et le traitement de nfection. Les ingénieurs liront surtout avec intérètles deuxième t troisième parties, où les auteurs ont exposé les me- res prophylactiques à prendre pour la protection des mineurs, les procédés d'assainissement des mines infes- tées, l'éducation prophylactique de l’ouvrier, le fonc- HET du service médical des mines, des caisses e secours et des dispensaires d'hygiène sociale. On trouvera les documents relatifs à la lutte contre lankylostomiase en Allemagne, en Belgique et en France. « Ce livre est d'une actualité pleine d'intérêt; il est, en outre, très consolant pour nous, car il montre que, si Mankylostomiase existe en France, le mal est loin d'y atteindre la même gravité qu’en Belgique et en Alle- magne. M. LaBré, ; Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris- 5° Sciences diverses Masson (Paul), Professeur à l'Université d'Aix- Marseille. — Ports francs d'autrefois et d’aujour- d’hui. —1 vol. in-8° de 463 pages, avec une série de plans. (Prix : 7 fr. 50.) Hachette et Cie, éditeurs. É Paris, 1904. C'est en 1896 que la question des ports francs a “ommencé à préoccuper sérieusement l'opinion. Les Bhambres syndicales, commerciales et industrielles de rance, et les Chambres de commerce françaises de MEtranger, réunies en Congrès, à Paris, émettaient le “œu : « Que les ports ou partie des ports de Dunkerque, le Havre, Bordeaux, Marseille et un emplacement à déterminer dans Paris, ou sa banlieue, soient constitués ports francs, à l'exemple de ce qui existe en Alle- magne, en Autriche, en Italie et en Danemark ». Depuis, l’idée a été reprise, notamment par la Com- “mission extra-parlementaire instituée au Ministère du Commerce pour étudier les moyens de venir en aide à notre marine marchande, et, dès lors, elle a fait l'objet e nombreux rapports, vœux et discussions, au sein des institutions intéressées. Enfin, un projet est actuel- lement soumis aux Chambres. Cette question a, d’ail- leurs, une portée très étendue. L'Algérie et la Tunisie en occupent également, et à l'Etranger, en Italie, en orvège, en Espagne, en Belgique, ce problème n'est pas étudié avec moins d'ardeur. Ce qui montre encore importance des ports francs, c’est que, dans le passé, ils ont été longuement et assez souvent expérimentés, mais seulement à l'époque relativement récente où les organisations politiques et économiques étaient suffi- “Samment perfectionnées. L'institution est donc mo- derne. Le port franc a fait son apparition en même temps que les grandes monarchies, lorsque les sys- tèmes douaniers se sont établis. Par ses travaux antérieurs sur le Commerce fran- çais dans le Levant au xvut siècle et dans l'Afrique barbaresque, M. P. Masson était bien préparé pour écrire la partie historique de cet ouvrage, surtout en ce qui concerne Marseille, Il nous semble que c’est bien là le genre d'une partie des recherches auxquelles peuvent se livrer les professeurs de nos Universités, et en particulier de nos Universités provinciales : la science pure ne perd pas ses droits, et la pratique retrouve les siens. C’est un principe général, applicable dans tous les domaines et dont l’inobservation nous a nui beaucoup au point de vue industriel. Le commerce ne saurait pas plus s’en passer; les méthodes scientifiques l'ont dédai- gné bien à tort et tout à son détriment. Les ouvrages de M. Masson marquent un pas en avant dans cette voie; nous souhaitons vivement que cet auteur soit suivi et les recherches commerciales de ce genre con- tinuées. 3 La partie historique du livre s'étend à Marseille, Bayonne, Dunkerque, Lorient, Saint-Malo, Cette, ainsi qu'aux ports italiens de Nice, Gênes, Civita-Vecchia, Ancône, Messine, Livourne, et à quelques ports colo- niaux. La plupart de ces franchises disparurent au cours du xIx° siècle; la centralisation des Etats de l'Europe ne s'accommodait pas de cet état d'exception, et l’ap- parition du libre-échange en rendait l'utilité moins immédiate. À aucun moment, cependant, il n’y eut dis- parition complète, car les nouveaux ports francs appa- raissent avant que les anciens aient été supprimés. Mais c'est une ère nouvelle qui commence : « Ou bien ce sont d’autres ports qui ont obtenu ces franchises, ou bien les ports d'autrefois qui les ont conservées ont vu leur régime profondément modifié. Les ports francs de lancien régime, étendus au territoire entier d'une ville, ont fait place aux zones franches limitées à une partie des bassins d’un port. Ce n’est pas seulement l'espace qui à été mesuré, mais aussi les libertés. Au protectionnisme atténué et mitigé d'aujourd'hui corres- pondent des franchises plus restreintes qu'autrefois. » Tandis que cétait la Méditerranée qui possédait autrefois le plus grand nombre de ports francs, ce sont actuellement les pays du Nord qui en offrent le plus d'exemples. L'Allemagne. principalement, en est deve- nue la terre classique. L'auteur étudie ceux de Ham- bourg, Brême, Geestemünde, Brake, Stettin, Neufahr- wasser, Emden, puis ceux de Copenhague et de Kola. Et c'est ensuite le tour de Gênes, Trieste, Fiume et de quelques ports francs coloniaux, tels que Gibraltar, Malte, Singapoor, Hong-Kong, Saint-Thomas (Antilles), et ceux plus récents d'East-London, Zanzibar et Batoum. Un tel ouvrage comportait évidemment une conclusion importante. M. Masson a dégagé très justement, à notre sens, les lecons du passé et. du présent: il expose d’abord les avantages des franchises pour les ports, les place en regard des intérêts nationaux et en décrit l'organisation. Ce sont les idées que nous avons déjà exposées aux lecteurs de cette Revue et qu'ils retrou- veront dans la conclusion très mürie et parfaitement scientifique du livre : « Les ports francs ne sont pas la panacée rèvée par des gens d'imagination pour nous tirer de notre torpeur économique; il n'existe pas de panacée de ce genre. Ceux qui préconisent l'efficacité plus grande de l'amélioration de nos voies de commu nication, de l’abaissement de nos tarifs de transports, du perfectionnement de l'outillage de nos ports, n'ont pas tort. Mais ces progrès ne s’excluent pas; nos hommes d'Etat seraient des politiques à bien courte vue et le pays bien à bout de ressources, si nous ne pouvions pas les poursuivre en même temps. L'insti- tution des zones franches est facile à réaliser; elle peut l’ètre rapidement et sans grandes dépenses. Elle peut être féconde, si on en fait l'essai avec prudence. La question a été mürement étudiée, il est temps de la résoudre. » PIERRE CLERGET, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle. 742 ACADÈMIES ET SUCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 24 Juillet 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Padé commu- nique ses recherches sur la convergence de la table des réduites d'une fraction rationnelle. — M. J. Bous- sinesq calcule l'action mutuelle des anneaux juxta- posés constituant un tuyau et l'influence de cette action mutuelle sur la propagation des ondes liquides dans le tuyau. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. P. Garrigou-Lagrange a mis en évidence les mouvements généraux de l'atmo- sphère par projection de bandes cinématographiques obtenues par la superposition des situations baromé- triques successives sur l'Europe et sur l'Amérique du Nord. — M. M. Chanoz montre que la force électro- motrice des chaines liquides séparées par des mem- branes dépend, entre autres, de l’action prépondérante de certaines substances contenues en faible quantité dans la dissolution ou ayant agi antérieurement sur la membrane. — M. P. Weiss étudie l’hystérèse d'aiman- tation de la pyrrhotine. Lorsque le champ est assez intense pour que l’aimantation décrive le cercle de saturation tout entier, l'hystérèse devient nulle. — M. L. Pigeon : Sur un stéréoscope dièdre à grand champ, à miroir bissecteur (Voir p. 714). — M. C. Ca- michel à vérifié par de nouvelles expériences que l'intensité de la lumière émise par fluorescence est proportionnelle à l'intensité de la lumière excitante et que le coefficient d'absorption d'un corps fluorescent ne varie pas au moment de la fluorescence. — M. O. Boudouard a constaté que la présence de vapeur d’eau n'a aucune influence sur la réduction de l’'anhydride carbonique par le charbon à haute température. — M. A. Duboin, en faisant réagir l’oxyde de zinc sur la silice dissoute dans KF fondu, a obtenu des silicates doubles K°0.6Zn0.4Si0? et 8K°0.9Zn0.178i0°. — M. R. Boulouch, en faisant agir la lumière solaire sur un mélange d’I et de P dissous dans CS*?, a obtenu un sous-iodure de phosphore P*T. L'action catalytique de l'iode dans la transformation allotropique du phosphore s'explique parla formation intermédiaire de ce composé. — M. L. Quennessen, en traitant àchaud l'azotite double d'iridium et potassium par HCI dilué, a obtenu par refroi- dissement un iridochloronitrite de potassium Ir3Cl'° (AzO®)8K'2.4H°0. — MM. A. Seyewetz et Bardin, en faisant réagir le sulfite de soude sur léthanal à l'état concentré, ont obtenu divers produits, en particulier l’aldéhyde crotonique. — M. F. Bidet a étudié l’équi- libre chimique du système gaz ammoniac- chlorhy- drate d'amylamine primaire. — MM. P. Sabatier et A. Mailhe ont constaté que les chlorures anhydres des métaux divalents agissent catalytiquement, à partir de 260°, facilement vers 300°, pour dédoubler les dé- rivés monochlorés forméniques primaires en HCI et carbure éthylénique correspondant — MM. L. Gui- gnard et J. Houdas estiment que le glucoside cyanhy- drique qu'ils ont trouvé dans les feuilles de sureau noir est de l’amygdaline. — M. G. Tanret a isolé la gen- tine, glucoside peu soluble qui accompagne la gentio- picrine; elle fond à 274° et se dédouble, par hydrolyse, en glucose, xylose et gentiénine C'#H#05, KF.2259. — MM. Ch. Moureu et A. Valeur, en appliquant à la spartéine la méthode d'Hofmann, ont obtenu les hy- drates de méthyl-, diméthyl- et triméthylspartéinium, bases tertiaires non saturées, réduisant énergiquement le permanganate. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. H. Guilleminot a étudié le diaphragme par l’orthodiascopie ; les variations dans: les chiffres de l’incursion à droite et àgauche ont géné" ralement une signification pathologique. — M. G. Kuss a constaté que les combustions intra-organiques mesurées par les échanges respiratoires, ne sont p sensiblement modifiées par un séjour prolongé à une altitude de 4.350 mètres. — M. Ch. Répin a fait des expériences de lavage mécanique du sang au moyen d’un appareil qui permet d'extraire le plasma d'u animal vivant sans le priver de ses globules sanguins: — Ml: M. Stefanowska a éludié la croissance en po du poulet; elle est sensiblement la même dans les deux sexes; mais, chez la poule, elle devient irrégulièr lorsque la ponte apparait. — M. C.Phisalix a constat que les œufs d'abeille renferment environ 0,001 milliem gramme de venin semblable à celui de l’insecte; toute fois, le poison convulsivant est moins abondant que lan substance phlogogène et le poison paralysant. M. F. Marceau a constaté que les muscles adducteurs des Acéphales sont formés de deux parties : l'unëésM vitreuse, destinée à produire principalement du travailm des muscles du manteau des Céphalopodes en rappo avec leur mode de contraction. — M. H. Coutière reconnu que les Euphocytes abyssaux possèdent un mode de développement insoupçonné, comparable, pat sa durée à l’état de larves pélagiques, à celui des Pénéides. — M. S. Leduc a réalisé une cellule artif cielle en laissant tomber, dans une Solution étendue sulfate de cuivre, une goutte de solution de saccharos contenant des traces de ferrocyanure de potassium Cette cellule bourgeonne comme une cellule en germ nation. — M. P. Ledoux a reconnu que les racines latérales nées par suite de lésions pratiquées avant semis sur la radicule se distinguent par une structur différente de celle des racines témoins et par le retan ou l'absence des formations secondaires. Séance du 31 Juillet 1905. M. le Secrétaire perpétuel annonce le décès de M. E. Bichat, correspondant de l’Académie. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin applique à la théorie des surfaces et des enveloppes de sphères les méthodes de la Géométrie anallagmatiques — M. P. Boutroux étudie les propriétés d’une fonction: holomorphe dans un cercle où elle ne prend pas les valeurs 0 et1.— M. A. Bublsignale une série nouvel de polynomes, présentant des propriétés dignes dat tention. — M. de Sparre étudie les exemples où le lois du frottement de glissement, appliquées sa transition à partir d’un instant initial, conduisen d'après M. Painlevé, à une impossibilité ou à um indétermination, et montre que l'impossibilité peu ètre levée et que l'indétermination n’est qu'apparente — M. Lœwy développe les divers systèmes de formule permettant de déduire les positions de deux couplé d'étoiles destinés à l'évaluation de la réfraction. à diverses hauteurs d’après la nouvelle méthode quil récemment exposée. — M. Ch. Frémont montre qu le poinconnage et le brochage n'ont pas d'effet nuisib sur l'acier non fragile, mais qu'ils sont toujours dans gereux sur un métal fragile. — M. G. Charpy montré que le rivetage n’améliore la qualité du métal des rive que si celle-ci était initialement défectueuse; maisil peut aussi se produire une détérioration. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Bouty a constaté que la différence de potentiel totale entre les de extrémités d'une colonne gazeuse traversée par l’effluve ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES x ne dépend que du produit de la pression par l'épais- seur, ou encore elle ne dépend que de la masse gazeuse intéressée par la décharge. — M. G. Ferrié décrit un détecteur d'ondes hertziennes constilué par le contact imparfait d'une pointe métallique et d'un électrolyte. — MM. A. Cotton et H. Mouton ont vérilié l'existence du phénomène de Majorana sur le vieux fer Bravais. La biréfringence magnétique parait liée à la présence des granules colloïdaux. — MM. G. Laudet et L. Gaumont présentent un mégaphone, appareil amplificateur des sons, où les vibrations destinées à être ampliliées sont transmises à une flamme convena- blement agencée. — MM. G. Bertrand et J. Lecarme “montrent qu'au voisinage du point critique les solides “sont solubles dans les gaz et les vapeurs. Ils ont pu “constater le fait sur une solution aqueuse de bichro- mate de potasse et une solution alcoolique d’alizarine. EE M. Kohn-Abrest, en chauffant l'aluminium en “poudre dans un tube ouvert à ses deux extrémités, a “constaté une augmentation de poids allant jusqu'à 50 °/,, et qui correspond sensiblement à un sous-oxyde Pom — M. Alb. Colson à étudié les variations de la fonction basique dans les sels de chrome. MM. Ch. Moureu et A. Valeur concluent, de l’ensemble de “leurs recherches sur la spartéine, que cet alcaloïde «possède la constitution : | cH CH # K AN N' 2 CHE . CH” Qye CH ” dus CH Li | | ; GRR CH lc = He — HC CSC N 7”. Qf es AZ AZ — M. G. Baudran à constaté que le chlore, le brome, Viode et leurs composés peuvent agir à la facon d'oxy- “dases végétales et animales en transportant l'oxygène “de l'air sur le gaïcol avec formation de tétragaïaco- quinone. — MM. P. Sabatier et A. Maïlhe ont cons- “taté que la cyclohexanone et les dérivés analogues, réagissant sur les composés halogénés organo-magné- “siens, fournissent les hexanols correspondants et le carbure éthylénique correspondant à l'organo-magné- Een, — M. C. Spiess a observé que les cellules périto- néales de la sangsue accumulent, à la facon des cellules “hépatiques, un pigment analogue, sinon identique, aux pigments biliaires des Vertébrés. —…._ 3° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Laveran a trouvé, “chez les Gerboises du Soudan et de Tunisie, un héma- “iozoaire endoglobulaire qu'il décrit sous le nom d'Hæ- Mmogregarina Ballouri. — M. P. Choffat signale l’exis- tence d'un pli-faille et de chevauchements horizontaux dans le Mésozoïque du Portugal. — M. G. M. Murgoci montre l’existence d'une grande nappe de recouvre- ment dans les Carpathes méridionales. — M. A. Lodin montre que certain amas blendeux doivent leur origine à la circulation descendante des eaux atmosphériques “qui dissoudraient les éléments métalliques contenus dans des roches préexistantes et les laisseraient ensuite ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 25 Jaillet 1905. s M. A. Pinard présente un Rapport sur une Note du DF Variot relative aux causes de la faible mortalité “infantile dans la ville industrielle du Creusot. De 1893 à 1902, le taux de la mortalité infantile a été en moyenne e 11,0% °/,, chiffre bien inférieur à la moyenne de la France (16 °/.) et surtout à celle des grands centres manufacturiers (20,8 °/,). La raison de ce fait doit être Attribuée : 1° à l'amélioration incessante du milieu où vivent les ouvriers, par l'hygiène des logements et la Salubrité de la ville; 2 à l'élévation des salaires aux Ouvriers, permettant aux femmes de se consacrer libre- ç ment à leur mission maternelle; 3° à l'assurance d'une assistance médicale et pharmaceutique large et gra- tuite. Le rapporteur considère le deuxième facteur comme prépondérant. — MM. A. Poncet et X. Delore présentent douze observations de cancer de l'estomac traitées par la pylorectomie ou la gastrectomie. Ils concluent ainsi : Tout cancer présumé de l'estomac exige, à une date aussi rapprochée que possible, une laparotomie qui aura d'autant moins de chances d’être uniquement exploratrice qu'elle aura été pratiquée à une époque plus rapprochée de la maladie. À moins de contre-indications locales, qui alors pourront être considérées comme exceptionnelles, cette laparotomie sera suivie d'une résection plus ou moins étendue de l'estomac cancéreux. — M. Lancereaux montre que l’albuminurie observée chez les diabétiques est Join d’avoir toujours la même signilication pathologique ; si, dans quelques cas, elle peut conduire rapidement à la mort, dans d’autres cas elle n'a pas plus de gravité que la glycosurie, avec laquelle il arrive parfois de la voir alterner. L'auteur propose, pour cette forme, la dénomination de diabète albumineux.— MM.Calmette, François et Breton confirment, par des expériences, la toxicité du chlorure de sodium pour les larves d’an- kylostomes ; mais ils montrent que l'influence du sel ne s'exerce d'une manière réellement efficace et rapide qu'à une concentration élevée. — MM. Moutier et Louïse : Contribution à l'étude thérapeutique du mer- cure-phényle. — M. Cautru : Le massage précordial dans les affections du cœur. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 22 Juillet 1905. MM. R. Lépine et Boulud ont constaté que l'injec- tion d'une macération de pancréas au chien produit, mais au bout de vingt-quatre heures seulement, de l'hypoglycémie et une forte exagération du pouvoir glycolytique du sang. — MM. E. Laguesse et A. De beyre montrent que le grain de CI. Bernard n'est pas formé de trypsine achevée, ni de préferment, mais d’une substance albuminoïde spéciale, capable de donner lentement, par une sorte de fermentation, du ferment trypsique. — M. A. Cligny a trouvé sur un jeune sprat un copépode parasite du genre Lernæe- nicus, fixé à { millimètre en arrière de l'angle supé- rieur de la fente operculaire gauche. — MM. L. Gar- relon et J. P. Langlois ont observé sur un chien chloralisé une polypnée thermique à type périodique, la fréquence des respirations passant alternativement par un minimum de 360 et un maximum de 540 par minute. — M. P. Wintrebert a reconnu que, dans la queue des Urodèles, tous les métamères nerveux com- mencent par être terminaux; à ce moment, ils four- nissent à la pointe sa sensibilité. — Le même auteur a constaté que, chez les larves d'Anoures dont le développement est transitoire, le développement des métamères nerveux et de la moelle caudale s'ar- rête avant le milieu de la queue; plus de la moitié de celle-ci est donc privée de centres réflexes. — M. A. Laveran a trouvé dans des grenouilles du Transvaal de grandes hémogrégarines, qu'il décrit sous les noms de A. Therleri et H. Neïireti. Il à trouvé, d'autre part, dans le sang du Varanus nilotieus, une autre hémogrégarine, qu'il nomme A. varani. — Enfin, il a découvert, dans le sang de Testudo pardalis, une hémamibe, qu'il décrit sous le nom d’Haemamcæba testudis. — MM. A. Gilbert et M. Herscher ont déter- miné la teneur en bilirubine du sérum sanguin dans la néphrite interstitielle; elle est, en moyenne, de 0,05 grammes par litre de sérum. — M. P. Abric dis- tingue chez les êtres unicellulaires quatre sortes de mouvements : automatiques, réflexes, incohérents et volontaires. — M. E. Maurel montre que les couveuses doivent assurer aux débiles et aux prématurés une température sous-vestiale comprise entre 33 et 36° sans les condamner à respirer un air dépassant en ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES moyenne 209, — M. et M®° Bourguignon présentent de nouvelles expériences qui prouvent que, dans le muguet, la forme coccus est intermédiaire entre le bâtonnet et la forme levure. — MM. J. Renaut et G. Dubreuil montrent que la strie ou cloison sarco- plasmique est une différenciation de premier ordre, avant tout ordonnatrice de la striation transversale des différents éléments fibrillaires. — MM. H. Lamy et A. Mayer ont constaté que les cellules rénales exercent une sélection négative sur le chlorure de sodium, et positive vis-à-vis du glucose. — M. N. Gréhant a reconnu qu'au bout d'une minute d'immersion dans l'eau, la proportion d'oxygène dans le sang artériel est réduite au tiers ou au quart de la proportion normale. — MM. G. Malfitano et EF. Strada ont constaté que les variations du pouvoir protéolytique des liquides ayant été en contact avec les bactéridies ne doivent pas être exclusivement attribuées à des variations quantitatives d'une matière sp'cifique active, mais bien plus à des changements dans les conditions d'équilibre, au sein des liquides diastasifères. Chez les bactéridies dévelop- pées dans des conditions d'anaérobiose assez complètes, la fonction protéolytique devient nulle. — M. P. Rem- linger a mis en évidence l'absorption du virus rabique par la peau fraîchement rasée. — M. Lafforgue a isolé deux microbes différents du liquide rachidien dans la méningite cérébro-spinale. — MM. C. Nicolle et C. Comte ont observé en Tunisie, chez la chauve- souris, une spirillose due à un Spirochaete. — MM. M. Doyon, A. Morel et N. Kareff ont constaté que l'in- jection d’adrénaline diminue le glycogène du foie et augmente le sucre du sang, même après l’ablation du pancréas. — M. Ed. Retterer à observé que la sub- stance fondamentale du tissu osseux est comparable, au point de vue de sa structure, au béton armé : la charpente est composée d'un réseau hématoxylinophile, et les mailles sont remplies par une masse amorphe safranophile. — MM. J. Jolly et J. Stini ont observé, après la saignée, une augmentation rapide de la pro- portion des leucocytes à noyau polymorphe dans le sang, disparaissant au bout de vingt-quatre heures, et une apparition de globules rouges nucléés. — M.H. Is- covesco a reconnu que l’eau oxygénée est capable de transformer certains colloïdes instables en formation, qui sont réversibles pendant un certain temps et finissent par de véritables précipitations. L'oxygène naissant provoque aussi, dans les colloïdes stables, des formations plus ou moins analogues à des membranes ou des agglomérations protoplasmatiques. — MM. J. Nicolas et S. Bonnamour ont constaté une abondance de karyokinèses dans la capsule surrénale du lapin rabique. — MM. Capitan et Papillault ont identifié le cadavre de l'amiral américain Paul Jones. RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY Séance du 41 Juillet 1905. MM. A. Prenant et A. Antoniou ont étudié les mo- difications produites dans les cellules épithéliales du rein par les néphrotoxines et par d'autres liquides actifs. Les premières sont plus accentuées. — MM. P. Bouin et P. Ancel considèrent les canalicules du suc comme produits par la transformation substantielle des prolongements anastomosés dans le corps cytoplas- mique et issus de certaines cellules multipolaires interstitielles. — MM. P. Haushalter et R. Collin, dans un cas de paraplégie spasmodique, n’ont pu dé- celer au microscope que des modifications de la struc- ture fine des cellules pyramidales. — M. A. Weber à observé qu'au point de vue de l’orientation des apo- physes ptérygoïdes les crânes de fœtus humain et d'enfant ont conservé les mêmes caractères que ceux des singes anthropoides. — MM. P. Simon et L. Spill- mann ont constaté une hyperleucocytose modérée dans la tuberculose pulmonaire; à une période assez avancée, on trouve de la polynucléose avec diminution des lymphocytes; mais il n’y a pas de formule nette- ment établie. — M. L. Bruntz a observé chez les Phyl- lopodes branchipodes des cellules phagocytaires. SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS SECTION DE NANCY Séance du 20 Juillet 1905. MM. A.Guntz et G. Roederer ont déterminé la chaz leur d’oxydation du strontium métallique. Ils ont trouvé : Sr + 0 —Sr0 + 142,2 cal., nombre de 11 cal, plus élevé que celui indiqué par M. Thomsen. On voit que la chaleur d'oxydation du strontium est intermé- diaire entre celles du calcium et du baryum, comme Ie faisaient prévoir les propriétés chimiques. — M. T. Klobb donne un nouveau procédé de préparation de l'arnistérine, substance analogue aux phytostérines eb retirée de l’arnica. Il a obtenu un éther benzoïque et un éther acétique qui lui permettent d'assigner à ce dérivé l’une des deux formules : OH 0H CASA ou CH 3 OH OH c'est le premier alcool bivalent signalé dans la famille des diolestérines végétales ; l'auteur propose de donner à cette substance le nom d'arnidiol. — MM. A. Guyot et J. Catel communiquent les résultats de leurs recherches sur l’action de la lumière et de l'air sur le diphényl-aa/-benzo-68!-furfuranet. Sous l'action de la lumière à l'abri de l'air, la solution benzénique jaune et fluorescente du produit se décolore et se remplit de petits cristaux blancs peu solubles, qui sont un poly- mère du premier, car ils le redonnent par simple fusion; sous l’action combinée de l'air et de la lumière, le diphényl-benzo-furfurane s'oxyde et donne de l’o-diben- zoyl-benzène. Si l’on fait cette oxydation en solution alcoolique, il y a, parréaction d'entrainement, oxydation de lalcool en aldéhyde. — MM. E. E. Blaise et M. Maire communiquent les premiers résultats obtenus dans l'étude des cétones acycliques $-chlorées et viny= lées. Les cétones $-chlorées s'obtiennent par action du chlorure de 8-chloropropionylesur les dérivés organo- métalliques mixtes du zinc. L'éthyl-B-chloréthylcétone bout à 68° sous 20 millimètres. Traitée par la diéthyl- aniline dans des conditions convenables, elle donne l'éthylvinylcétone, qui distille à 100-102, avec polymé= risation partielle, sous la pression atmosphérique, mais distille sans altération à 31° sous 47 millimètres. Les cétones 8-chlorées réagissent avec facilité sur les réac= tifs de la fonction cétone, mais en donnant des com posés à chaîne fermée. L'hydroxylamine fournit avec l'éthyl-G-chloréthylcétone une éthylisoxazoline qui bout à 78° sous 21 millimètres. Base très faible, ne donnant pas de sels cristallisés, mais fournissant un chloropla- tinate qui se décompose vers 2509. La phénylhydrazines donne avec la même cétone une phényl-éthyl-pyrazo= line qui bout à 170° sous 21 millimètres. Cette base four- nit avec une trace d'acide azotique une coloration rouge très intense, mais peu stable. La chlorocétone réagit également sur l'hydrate d'hydrazine, avec formation d'une éthylpyrazoline qui bout à 76» sous 20 millimètres: Cette base est plus énergique que les précédentes; elle donne un chlorhydrate, un picrate, et avec l'isocyanate de phényle l’urée correspondante. Enfin, la semicars bazide fournit une semicarbazone normale, mais qui se décompose à chaud avec formation de produits qui seront étudiés dans la suite. Les cétones vinylées jouissent par leur liaison éthylénique de propriétés. additives remarquables. La semicarbazide ne donne pass de semicarbazone normale, mais une semicarbazo= semicarbazone. De même, l’hydroxylamine donne une hydroxylamino-oxime, fournissant un dérivé dibenzoylés Les auteurs se réservent de poursuivre l'étude des ———_——_—_—_ ———]—— 1 Bull. Soc. Chim., t. XXXIIT, p. 629. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 745 cétones £-halogénées, des cétones vinylées et, en général, des cétones non saturées acycliques. —MM.E.E. Blaise … et A. Courtot indiquent les résultats obtenus dans la déshydratation de certains acides-alcools. La déshydra- tation au moyen de l’anhydride phosphorique des éthers - des acides-alcools 8, «:-dialcoylés fournit, lorsque cette … déshydratation est possible, des acides-alcools non saturés By. C'est ainsi qu'ont été obtenus les acides dimé- thylvinylacétique |[Eb. : 99° sous 23 millimètres ; F : — 6°), diméthylpropénylacétique [Eb : 119° sous 24 mil- limètres; F : — 17), diméthylisopropénylacétique [Eb : 108° sous 16 millimètres ; F : 35°], et diméthyl- « phénylvinylacétique [Eb : 107 sous 10 millimètres]. Ces … acides jouissent de propriétés spéciales qui les classent à part dans la série des acides non saturés y. C'est … ainsi, par exemple, qu'ils ne sont pas tous transfor- “ mables en lactones par la méthode de Fittig. Dans le cas où les éthers des acides-alcools ne peuvent pas donner de produits normaux de déshydratation, il se produit des transpositions moléculaires. L'oxipiva- late d'éthyle, par exemple, fournit un mélange d'acides angélique et tiglique. Mais le cas le plus intéressant est celui de l’acide a-diméthyl-6-phénylhydracrylique ; on obtient, en effet, dans ce cas de l'acide diméthylatro- pique [F : 151°|, qui a été reproduit, d'autre part, par synthèse : COR — C(CH*}? — CHOH — C°H5 — (CH*} C— C — CH. Lo C'est là le premier exemple connu de la migration d'un carboxyle dans une molécule synthétique et qui trouve une analogie dans la transformation de l'acide cam- phorique en acide isolauronolique. — MM. E. E. Blaise et P. Bagard ont poursuivi l'étude de l’action de la chaleur sur les acides-alcools &. Cette réaction constitue, quand la fonction alcoolique est secondaire, une mé- thode de préparation des aldéhydes. L'aldéhyde résulte à la fois de la décomposition du lactide d'abord formé et de la décomposition d'hémilactides à poids élevé, de la forme : COOH — CH — 0 — CO —CH—0O ..... CO — CH — ON. l | R R R D'autre part, les éthers des acides-alcools bouillent sans décomposition, mais les éthers dérivés de leur fonction alcoolique se décomposent normalement. Il est donc nécessaire que la fonction acide de l’acide-alcool soit libre; mais la formation d'un lactide intermédiaire n'est pas indispensable, puisqu'il y a production d'al- déhyde lorsque la fonction alcoolique est transformée en éther. L'acide a-oxyheptylique donne un éther éthy- - lique qui bout à 106° sous 44,5. Son lactide fond à 88°, son anilide à 70°, son p-toluide à 103° et son phé- nylhydrazide à 98°. Il fournit par action de la chaleur: l'hexanal (58 °/,); oxime, F: 51°; semicarbazone; - F: 106° ; ac. naphtocinchoninique, F : 255-260° (déc) ; azine, Eb : 132° sous 13 millimètres; acétal diéthylique, - Eb : 90° sous 30 millimètres. L'acide a-bromocaprique - fond vers 4°, et, traité par la potasse, il donne l'acide - oxycaprique, F : 70°5. Son éther méthylique, son anilide, «son p-toluide et son phénylhydrazide ont été préparés. - Par action de la chaleur, il donne le nonanal avec un “rendement de 71 °/,. Cette alhéhyde bout à 93° sous «23 millimètres. Son oxime, sa semicarbazone et l'acide naphtocinchoninique correspondant ont été préparés. L'azine qui en dérive se solidifie dans le chlorure de méthyle, et l'acétal diéthylique bout à 130-131° sous 20 millimètres. L'action d'une trace d'acide sulfurique détermine la formation d'un polymère, liquide à la “température ordinaire, mais se solidifiant dans le chlo- mrure de méthyle liquide. L'acide undécylique donne de même un oxyacide qui fond à 69 et dont l'éther méthylique fond à 33°. L'anilide correspondant fond à 0°, le p-toluide à 92° et le phénylhydrazide à 95°. 11 REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. conduit, par action de la chaleur, au décanal qui bout à 92° sous 10 millimètres. Son polymère, qui est solide, fond à 430. On a préparé la semicarbazone, l'oxime, l'acide naphtocinchoninique correspondants. L’azine est solide et fond à 34°, l’acétal diéthylique bout à 136° sous 14 millimètres. La méthode précédente est éga- lement applicable à la préparation des aldéhydes à chaîne ramifiée. C’est ainsi que l'acide «-oxy-6-méthyl- nonylique a donné avec un bon rendement l’aldéhyde correspondante. Le dédoublement est très net et ne donne qu'un peu de carbure à côté de l’aldéhyde. Enfin, par action de la chaleur sur les acides-alcools à fonction alcoolique tertiaire, on devrait obtenir des cétones. L'expérience montre que le dédoublement dépend es- sentiellement, dans ce cas, du poids des radicaux fixés sur l’atome de carbone qui porte la fonction alcoolique. L'acide diméthoxalique donne presque exclusivement de l’acétone, l'acide diéthoxalique 40 °/, de diéthylcé- tone, et l'acide dipropoxalique des.traces seulement de dipropyleétone. Dans ces deux derniers cas, il y a for- mation d’un acide non saturé. Le point le plus inté- ressant est que ces acides non saturés diffèrent de ceux qu'on obtient en déshydratant les éthers-alcools au moyen du trichlorure de phosphore ou de l’anhydride phosphorique. Ce sont vraisemblablement leurs iso- mères stéréochimiques et ce serait là une méthode intéressante pour les obtenir. Les auteurs se réservent de développer l'étude de ce dernier point. — MM. E. E. Blaise et H. Gault, poursuivant l'étude des produits de condensation des aldéhydes avec l’éther oxalacétique, ont étudié l’action des acides sulfurique et azoteux sur les éthers obtenus directement dans la condensation. L'acide sulfurique dissout facilement les éthers alcoyli- dène-bis-oxalacétiques; mais, sous l'influence du temps, les solutions laissent déposer un abondant précipité. Le corps ainsi formé résulte de la saponification de l'éther, mais il est constitué, non pas par l’acide corres- pondant, mais par son dianhydride. Ces dianhydrides, dont l’un des carboxyles, dans chaque fonction anhy- dride, est en position $-cétonique, sont stables dans l'air sec. Traités par les amines et les alcools, ils fournissent, par perte d'acide carbonique, les diamides et les diéthers des acides dicétopiméliques. Ils répondent donc à la constitution suivante : CO, CO—CO — CH / | 04 R — CH 0. \ | / Nco CH—CO—C0/ Ce point est intéressant, car il permet d'obtenir avec facilité des dérivés qu'on ne pourrait pas préparer à partir des acides dicétopiméliques eux-mêmes. L'action de l'eau sur les dianhydrides est curieuse et semble s'effectuer en plusieurs phases : les fonctions cétone semblent passer d'abord à l’état d'hydrate de cétone avant que la chaîne anhydridique ne soit rompue. Fina- lement, il y a élimination de CO*et formation des acides dicétopiméliques. Cette réaction a permis de préparer les acides méthyl, éthyl et hexyldicétopiméliques. Touscesacides, par action de l'acide sulfurique, donnent les acides pyranedicarboniques correspondants. L'ac- tion de l'acide azoteux sur les éthers alcoylidène-bisoxa- lacétiques est très spéciale. Il y a élimination d'un grou- pement oxalique, avec formation d’une fonction oxime ; mais la réaction ne s'arrête pas là, et le composé obtenu résulte de l'élimination d'une molécule d'eau dans & molécule qui a pris naissance. Le produit formé peu être isolé facilement à l’état de sel acide de potassium. Par saponification alcaline, il donne, par précipitation au moyen des acides minéraux, non pas un acide, mais un sel de potassium, dans lequel le métal ne peut être éliminé que par action de l'acide sulfurique concentré. Les propriétés très spéciales que possèdent les com- posés obtenus par action de l'acide azoteux semblent indiquer la présence, dans leur molécule, d’une chaîne particulière et peut-être nouvelle. Les auteurs se ré- 16** 746 servent l'étude de ce point, ainsi que celle de l'action de l'acide azoteux sur les combinaisons analogues. — MM. E. E. Blaïse et L. Houillon, dans le but de re- chercher les relations qui peuvent exister entre les groupements fonctionnels en position éloignée, ont essayé de lactoniser l'acide undécylénique au moyen de l'acide sulfurique. La réaction donne, en effet, une lactone qui bout à 169-1700 sous 17 millimètres. Ce corps ne crislallise pas, mais donne avec facilité une hydrazino- lactone fondant à 96°. La lactone ainsi obtenue ne con- stitue pas, ainsi qu'on aurait pu le croire, une lactone 1-11, mais une y ou une 2-lactone. En effet, l'oxydation permanganique donne de l'acide suecinique, de l'acide oxalique et un mélange d'acides caproïque et heply- lique. De mème, l'oxydation nitrique donne très netle- ment les acides succinique et heptylique. On à donc affaire probablement à une +-lactone, ce qui sera vérilié synthétiquement. Ce fait met en évidence une migration de la liäison éthylénique sous l'influence de l'acide sulfurique. Cette migration complète celle observée par lun des auteurs en collaboration avec M. Luttringer. On peut donc dire que, par action de l'acide sulfurique sur un äcide non saturé, il se produit, quand la con- centration est suffisanté, une migration de la liaison éthylénique avec formation de lactone, quelle que soit d’ailleurs là position de la liaison éthylénique dans la molécule. Ces recherches seront étendues aux acides non saturés à poids moléculaire élevé. D'autre part, les auteurs ont préparé, comme il a été indiqué anté- rieurement, les acides undécane et tridécanedioïques. Des recherches ont été effectuées sur l’anhydrisation de ces acides. L'anhydrisation s'effectue, mais avec dif- ficulté, et ilne semble pas, jusqu'ici, que les réactions entre groupements fonctionnels puissent ètre consi- dérées comme une fonction périodique de l'éloignement de ces groupements. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 25 Mai 1905. M. J.-S. Macdonald : La structure et la fonction des libres nerveuses. En contradiction avec certaines con- clusions auxquelles l’auteur était arrivé à la suite de ses observations expérimentales sur le « courant lésant » du nerf, il a été récemment nié que les sels organiques soient présents en quantité appréciable dans la struc- ture interne de la fibre nerveuse. Gette conclusion à été établie à la suite d'observations faites avec l'emploi d'un réactif — le nitrite de cobalt — qui précipite les sels de potassium d’une facon visible au microscope. Il a été prouvé que le réactif ne donne pas naissance à des précipités en tous les points de la fibre nerveuse, mais seulement en cerlains points peu nombreux. L'auteur a contrôlé ces faits, employant: aussi les méthodes microscopiques, et il les à confirmés. Cependant, il à tiré des conclusions entièrement diffé- retites de Ses observations, depuis qu'il a remarqué que ces points peu nornbreux sont des points auxquels le eylindre-axe à été délérioré au cours de la préparä- tion. Il conclut que les sels de potassium sont réelle- ment présents en quantité très considérable et unifor- mément distribués le long du cylindre-axe, mais qu'ils apparaissent à l’élat de simple solution seulement aux endroits lésés. L'auteur dirige l'attention sur l’'impor- tance générale possible de cette observation, lorsqu'on tient compte du parallélisme entre la lésion et « l’exci- tation ». La présence soudaine de sels inorganiques (électrolytes) à l’état de simple solution aqueuse en un poitit excité signifie une augmentation transitoire daäñs la pression locale osmotique, de nouveaux processus de diffusion et des troubles dans le potentiel élec- trique. En ceci, il voit une explication suflisante de la conduction tierveuse. Dans le cas dé muscle, l'auteur considère l'influence d'un phénomène simi- laire et la relation possible entre une telle augmenñta- tion dans la pression locale osmotique et la « contrac- tion », II suggère aussi la possibilité de linflüence de ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ce facteur dans les conditions déterminant la circula- tion de l’eau dans les tissus des plantes. — M. F. Hu Thiele conclut de ses recherches que les cellules dem la corne antérieure sont sous le contrôle du thalarus 4 optique et du noyau de Deiters, le premier exerçant une action inhibitrice, le second une action adjuvante. Î L'influence du noyau de Deiters est aussi contrôlée par les cellules corticales cérébelleuses; le contrôle thala- mique est croisé; l'influence cérébelleuse est homolaté- rale. Le thalamus etle cerebellum exercent un contrôle moteur sur les muscles du corps. Dans le thalämus, il y à un centre qui contrôle les mouvements coordonnés de locomotion; la voie par laquelle ce contrôle s'exerce est probablement le trajet rubro-spinal. — M. C. S. Sherrington : Sur l’innervation réciproque des muscles antagonistes (VII). — MM. J. R. Adie et A. Alcock” signalent la présence de l'Anopheles (Myzomyia) Listoni à Calcutta, ce qui étend la distribution géographique de cette espèce. Séance du 8 Juin 4905. M. W. Downing : Perturbations des Biélides. D'après le résultat des calculs décrits dans ce Mémoire, il apparaît que la date la plus probable pour le centre d'une pluie de météores des Biélides cette année est le 18 novembre à 10 heures. S'il se produit une pluie à cette date, cela indiquera que le courant météorique est dans celte partie d’une longueur suffisante pour prendre au moins trente-trois jours (16 octobre au 18 novembre) pour traverser un point défini de son orbite, ou qu'il y a un autre groupe qui suit le groupe principal à cet intervalle et qui est aussi d’une étendue suffisante dans la direction Soleil-Terre pour permettre M à quelques météores de rencontrer la Terre, quoique IeM centre du courant soit à plus de 1.000.000 de milles en dehors de l'orbite terrestre à cette époque. — M. R.-J: } Strutt présente une note additionnelle à son Mémoire sur les minéraux radio-actifs. Dans un Mémoire lu devant la Société le 28 février, l’auteur dirigeait l'atten= tion sur le fait que tous les minéraux ioriques, M autant que cela peut ètre établi, paraissent contenir dem l'uranium et du radium. Depuis lors, il a examiné un certain nombre d'autres minéraux afin de vérifier la déduction précédente. Les résultats ont tout à fait con- firmé les conclusions originales. L'auteur, dans ces nouvelles recherches, s'est contenté de déterminer 1e thorium et le radiumi, car on peut maintenant consi= dérer comme prouvé que le radium est un produit dem l'uranium, et il est beaucoup plus facile d'établir la présence du radium par son émanation que de découvrir l'uranium pär des analyses chimiques. — MM. J.-A Fleming et R.-A. Hadñfeld : Sur les qualités magné= tiques de quelques alliages ne contenant pas de fer. En vue d'obtenir des mesures magnétiques exactes, on an fabriqué deux anneaux homogènes de forme régulière, avec des alliages ne contenant pas de fer. Le premiers anneau avait la composition suivante : manganèse, 22,42 0/,; cuivre, 60,49 °/,; aluminium, 41,65 0/6. IlLy a une cerlaine quantité de scories intermélangées, pro= bablement 2 ou 3 °/,, qui consistaient principalement en Mn0 et SiO* et en traces légères d’autres métaux: L'analyse à montré que l’on y trouvait aussi 1,5 0}, de carbone, 0,37 °/, de silice et 0,21 °X de fer. Il est donc à noter qu'une simple trace de fer se présentait dans cetalliage. L'autre anneau avait comme composition äpproximative: mangañèse 18 °/,; cuivre 68 °/,; alu minium 10 °/,; plomb 4 °/,. Ces alliäges ont inalheus reusement de pauvres propriélés mécaniques ; ils sonb cassants et ne peuvent être forgés. Les anneaux ont été faits au moyen de cette substance fondue et tournés au tour à la forme désirée. Voici les conclusions äux= quelles les auteurs sont parvenus : 4° Le premier alliäge, composé de cuivre, d'alurniniuin et de mangä= nèse datis les proportions indiquées ci-dessus, présente des propriétés magnétiques qui sont ideïtiques à celles d'une substance faiblemetl ferro-magnélique; 20 Lam courbe de iMmagnétisation (B.H.) est de mème forme ue celle d’un métal ferro-magnétique, tel que la fonte e fer, et indique qu'avec une force suffisante on peut presque sûrement atteindre un état de saturation magnétique; 3° L’alliage présente le phénomène d'hys- térésis magnétique. Il faut beaucoup de travail pour arriver à renverser la magnétlisation de la substance et pour lui faire parcourir un cycle magnétique; 4° La substance à une perméabilité maximum de 28 à 30, qui n'est pas de beaucoup inférieure à celle qu'on a obtenue pour le cobalt; elle occupe une position intermédiaire entre la perméabilité des corps ferro-magnétiques el celle de la plupart des corps para-magnétiques, tels que l'oxygène liquide et le chlorure ferrique; 5° Cet alliage présente, cependant, le phénomène de rétention magné- tique et de coercivité. 11 n'est pas seulement magné- tique, mais il peut être magnélisé d’une facon perma- nente. Par ces résultats les auteurs sont amenés à conclure que les propriétés magnétiques de cet alliage doivent être basées sur une certaine ressemblance de structure moléculaire avec les métaux familiers ferro- magnétiques. Les expériences sur les qualités magné- tiques du deuxième alliage donnent des résultats semblables. Pour les deux alliages, les exposants hysté- réliques ne sont pas très différents, étant respectivement 2,238 et 2,288, tandis que les constantes hystérétiques sont très différentes, étant respectivement 0,0005495 et 0,000776. Il est clair, par conséquent, que ces deux alliages, quoique magnétiques, ont une beaucoup plus grande hystérésis que le fer pur, le nickel ou le cobalt pour des cycles de magnétisation correspondants. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Séance du 5 Juin 1905. MM.G.T. Morgan et F. E. Richards présentent leurs recherches sur les matières colorantes azoïques dérivées de lar-tétrahydro-a-naphtylamine. Celle-ci conserve son caractère naphtalénoïde et ressemble à Pz-naphtylamine en ce qu'elle donne directement des amino-azoiques, qui, diazotés et copulés avec des amines où des phénols sulfonés, forment des matières colo- rantes polyazoïques. Celles-ci possèdent des propriétés tinctoriales semblables à celles de leurs analogues de la série, benzénique. — M. P.E. Spielmann cominu- nique Îles änalyses d'un échantillon de silicium (Si 939106/0: Fe 2,57 °/,5 Al 0,#1 0/0: Si022,65 07; Al?05 0,46 °/,) et d'un échantillon de siloxicon (Si 50,31 °,,; C 34,39 0/,: Fe 1,07 °/,: H?0 0,19 0/,: O 17,04 °/,) pro- | FtERR des usines de carborundum Acheson à Niagara Falls. nt Lee Sn ne ed RS dé ST SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Mai 1905. M. M. Schwitter à analysé un tiinerai d'élain pro- venant de l'Alaska, Les concentrés renferment environ 70 °/, d’élain et donnent par réduction de l'étain prati- - quemeñt pur. — M. J.-M. Mathews a constaté que le nelloyage des sortes ordinaires de fils de laine est le mieux réalisé par l'emploi de solutions de savon; l'em- ploi de carbonates alcalins est une mauvaise pratique. D'autre part, toute huile qui est aisément émulsiliée par des solutions de savon à des températures non supé- rieures à 140° K. peut être considérée comme une bonne huile à laine, qu'elle contienne ou non de la matière insäponifiable. — MM. D. Wesson el N.-J. Laïe mon- trent qu'il n'existe actuellement aucune méthode pour étant très analogues à ceux du lard; elle ne peut être déterminée que qualitativement par le microscope. — - M. W. C. Ferguson donne la description des méthodes employées par l'Association des Chimistes de manu- facture des Etats-Unis pour la préparation des tables de poids spécifiques de l'acide sulfurique, de l'acide nitrique, de l'acide chlorhydrique et de l'ammoniaque. la détermination de la graisse de bœuf, ses constituants. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 747 ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du S Juin 1905. 1° SGIENGES MATHÉMATIQUES. — M. E. Waelsch : Sur les résultantes de formes binaires. 20 Screxcks physiques. — M. F. Emich a étudié la pul- vérisation de feuilles d'iridium portées au rouge hanie dans l'acide carbonique ou dans des mélanges d'azote et d'oxygène ; il en déduit qu'à 19709 la dissociation de CO: est de 4,5 °/,, à 21509 de 10 °/,. — M. S. Zimmer- mann à saturé une solution de sulfate ferreux en l'absence de l'air par de l'oxyde d'azote dans une atmosphère d'Az et a constaté que la conductibilité de la solution diminue. Il attribue le fait à la formation d'un ion complexe. — M. M. Simon, en chauffant lé sélénocyanure de K ou Na avec l’a-chloropropionate de K, a obtenu le sélénocyanopropionate de K ou Na, d’où l'on retire facilement l'acide libre. — M. M. Kohn a obtenu, par condensation interne de léther carba- mique qui se forme dans l’action de l'éther chlorocar- bonique sur la diacétonalkamine, une lactone de l'acide carbamique : (CHS)C — AzR — CO [ | CH?.CH(CH*).0 Par l’action de l'oxyde d'éthylène sur la diacétonalka- mine ou ses dérivés alkylés, on obtient des glycols basiquesdu type(CH*)C(CH*,CHOH.CA*)AzH.CH°.CH°.0H. — M. M. Kohn, en oxydant par l'acide chromique l'oxy-B-isohexylamine, a obtenu de l’acétone, de l'ala- nine et de l'acide acétique. L'oxy-B-isohexylamine réagit avec les aldéhydes en perdant de l’eau pour donner des dérivés de la tétrahydrométaoxazine. — MM. F. Goldberger et R. Tandier, en faisant agir l'acide sulfurique dilué sur la pinacone dérivée de l’éthylpropylcétone, ont obtenu un hydrocarbure C2H°?, Eb. 195°, et un oxyde CH°0, Eb. 2240. Le pre- mier donne par oxydation de l'acide butyrique, le second de l'acide butyrique et un äcide C'HO*, — M. B. Ehrenfreund à condensé l’aldéhyde isopropyl- acétique avec laldéhyde acétique en présence de K2CO en un aldol CTH‘0*, Eb. 85° sous 15 millimètres. Par oxydation avec le permanganate, il se forme de l'acide isopropylacétique et un acide C'H0*. — M. R. Ofner inontre que la formation de méthylphénylo- sazone n'est pas exclusivement une réaction de cétoses et que le procédé de Neuberg et Strauss pour la re- cherche du fructose dans les sacs organiques n’est pas utilisable: — M. H. Lang a préparé, par nitration de l'acide o-benzoylbenzoïque, l'äcide o-benzoyl-p-nitro- benzoïque. La nitration directe des éthers de l'acide donne, au contraire, un produit dinitré. — M. R. Her- manñ, par action de HAz0* fumant sur une solution sulfurique de phénylbiguanide, a obtenu à 30°-40° exclu- sivemeht du sulfate de mononitrophénylbiguanide, au moyen duquel on préparé les dérivés bi- et trinitrés. Toutes ces combinaisons sont des colorants, spécia- lemerit la dernière. Par hydrolyse, elles fournissent la p-nitraniline, la 2 : 4-dinitraniline et la picramide. — M. P. Artmann, par action de l’iode, à l’état nais- sant où en présence de HgO, sûr l'o- ou la m-tolylurée, a oblenuü des iodophénylurées substituées en para par rapport au groupe amidé; par ébullition avec l'anhy- dride acétique, elles se transforment en jodacétoto- luides. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. F. Katzer : bution à la géologie du Geara (Brésil). ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance du 27 Mai 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. de Vries : Sur des faisceaux de surfaces algébriques. L'auteur consi- dère un faisceau général de surfaces d'ordre n; soit 5 la courbe de base. 1° Les tangentes principales forment un complexe de l’ordre 3n(n—2); celles qui corres- Contri- 748 pondent aux points de s forment une congruence de l'ordre n*(2n — 3) et de la classe 3°. 2° Les tangentes .t, à contact de quatre points qui ont leur point de contact sursforment une surface de l’ordre 2n° (61-11), dont s est une courbe de multiplicité onze; les points de contact des tangentes {, se trouvent sur une surface de l'ordre 2 (117 — 12). 3° Les tangentes £, forment une congruence de l'ordre 2(n—3) (2n°—3n +2) et de la classe Pa) (n9+ n°— Sn 4). 4 Les tangentes fe 3 de contact et d’osculation forment une congruence de l'ordre (n—3)(n—#4)(5n—6n+4) et de la classe = (n— 3} (n—4) (10nt + 35n° —21n° —80n+20). 5° Le lieu des points d’osculation des tangentes #,3 est une surface de l’ordre 6(n—1){(n°— 16). 6 Le lieu des points de contact des tangentes 4,3 est une surface de l'ordre 2(n—%)(n°+2n®+10n—12). 7 Le lieu des points paraboliques est une surface de l’ordre 8 (n—1), dont s est une courbe quadruple. — M. P.-H. Schoute présente au nom de M. W.-A. Versluys : Sur le rang ae la courbe d'intersection de deux surfaces algé- briques. L'auteur démontre la relation r = m,n, + m,n, — 95 — 3%, où r est le rang cherché, tandis que »,, n, représentent les ordres, m,, m, les classes des deux surfaces et à, x les nombres des points de contact ordi- naireet stationnaire de ces surfaces. Ensuite, il applique la relation trouvée à plusieurs cas particuliers. — M. H.-E. de Bruyn présente : « Rapport in zake de watervoorziening van Amsterdam « (Rapport sur la fourniture d'eau à Amsterdam). 20 SGIENCES PHYSIQUES. — Rapport de MM. H. Kamer- lingh Onnes et P. Zeeman sur une lettre de M. H. van Meerten, de Buitenzorg (Ile de Java), sur une formule empirique pour la chaleur spécifique de l’eau sous une pression constante à des températures différentes. D'abord M. van Meerten donne la relation @—1 RO) An PUS la remplace par &@=—1+-0,0375 pour { <<100°; ensuite, il AUS) ER nu TER, s’accordant aussi avec les résultats des expériences de MM. Barnes et Cooke. Comme le remarquent les rapporteurs, ces deux formules ne s'accordent pas avec les expériences de M. Dieterici pour 6> 100°. — Ensuite M. Kamer- lingh Onnes présente ; 1° Correction au manomètre à mercure, raccourci, ouvert, à transport de pression à l'aide de gaz comprimé; 2 Méthodes et ressources en usage au Laboratoire cryogène de Leyde : VII. Un cryostat modifié. — M. H.-A. Lorentz présente, au nom de M. J.-J. van Laar, les deux communications sui- vantes : 4° Sur l'allure des lignes de plissement pour des mélanges de substances normales. Seconde partie (voir Rev. génér. des Se., t. XVI, p. 664); 2° Quelques remarques concernant les dernières communications de M. Ph. Kohnstamm (voir Rev. genér. des Se.,t. XVI, p. 712). — M. A.-KF. Holleman présente, au nom de M. J.-J. Blanksma : Mitration du nitrométaxylol symétrique. — M. S. Hoogewerff présente au nom de M. H. ter Meulen : « Onderzok naareden aard van de suiker van eenige plantaardige glucosiden » (Examen des espèces de sucres de quelques glucosides végétaux). Solution couronnée d’une question de concours, pro- posée par la Société batave des Sciences de Rotterdam. — M. H.-W. Bakhuis Roozeboom présente, aussi au nom de M.J. Olie Jr. : La solubilité des chlorures de chrome isomères. À la température ordinaire, le chlo- rure de chrome forme deux combinaisons à 6H,0, représentées, d'après Werner, par les formules de structure : (C 20)\6 3 pe Cl 20): { Cr(H20) } CI et À Cr (pop, C12H°0: la première substance est violette, la seconde verte. Le résultat des expériences, faites à 25°, se rapportant à la vitesse de transformation des solutions à teneur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES variable de chlorure de chrome, est représenté par la courbe AGH dans le diagramme ci-dessous, où A, B, Q réprésentent la matière résolvante (l’eau) et les chlo- rures de chrome (vert et violet). D'abord cette courbe ne dévie que très peu de l'axe AC, ce qui veut dire qu'en des solutions très diluées l’état final est celui où le chlorure de chrome se présente presque exclusive- ment dans l’état violet. Si la teneur en chlorure de chrome s'élève à 20 °/,, la courbe AGH s'éloigne de AC. Fig Au point I, les deux chlorures de chrome.se font équi-. libre. Et l'on ne peut pas dépasser le point G, la solu- tion ayant atteint en G le point de saturation. Après s'être occupé de l’état final, les auteurs ont examiné la solubilité, mdiquée par les courbes DE et EF pour les modifications verte et violette. Une addition de HCI à 25° diminue la solubilité de deux chlorures. — Ensuite M. Roozeboom présente au nom de M. C. Hoit- sema : « Liquatie in binaire metaallegeeringen (Liqua- tion en des alliages métalliques binaires). Sont nommés rapporteurs MM. Roozeboom et J.-M. van Bemmelen.. 39 SCIENCES NATURELLES. — Rapport de MM. C. Winkler et L. Bolk sur la question de la fondation d'établisse- ments pour les recherches sur le cerveau. — M. H. Zwaardemaker Czn. : Sur la pression du son dans l'organe de Corti. D'après l'explication de Helmholtz, les fibres transversales de la membrane basilaire peuvent « résonner sur les sons assez bas de la voix humaine : 1° Par la résistance dans le fluide et les masses molles cellulaires; 2° Par le chargement avec les arcs de Corti, portant à leur tour tout un système de cellules. D'abord on s'imaginait que ces fibres vibrent dans toute leur longueur, comme une corde tendue. Plus tard, on a cru que le pars arcuata, qui porte les ares de Corti, reste en repos, tantôt que ce n'est que le pars pecti- nala qui fait de part et d'autre des mouvements d'une amplitude considérable. Toutefois, dans ce dernier cas, … la différence en longueur des fibres ne suffit plus pour l'explication de la différence des sons en hauteur, de manière qu'on doit recourir à une différence de tension et de chargement. L'auteur a essayé de représenter les circonstances dans lesquelles agit l'organe de Corti par un modèle. Une corde horizontale d'acier, d'un demi-millimètre d'épaisseur et d’un mètre de longueur, lient lieu de fibre, etc. Dans ce modèle, il constate les oscillations considérables du pars pectinata et Vimmo- bilité du pars arcuata, des arcs de Corti et des masses de charge. La théorie de Helmholtz-Hensen. Les anneaux … de Lord Rayleigh. — M. F.-C.-F. Went présente : « Onderzoekingen en beschonwingen over de mozaïek- ziekte der tabaksplant » (Recherches et considérations sur la maladie mosaïque du tabac). Sont nommés rap- porteurs MM. Went et M.-J. Beyerinck. | P.-H. ScuourE. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE N° 17 15 SEPTEMBRE 1905 Revue générale des SoenCces pures el appliquées DIRECTEUR : $ 1. — Astronomie La polarisation de la couronne solaire. — M. Meslin, professeur de Physique à l'Université de Montpellier, assisté de M. Chaudier, préparateur à la Faculté des Sciences, et de M. Aroles, professeur au Lycée de Montauban, a profité de l’éclipse de Soleil du 30 août dernier pour faire des observations dans le jär- din de l’Institut de Burgos, où il avait installé les appa- reils nécessaires pour étudier la polarisation de la cou- ronne solaire; les astronomes placés en ce point ont eu la chance de pouvoir observer le phénomène pen- dant toute la phase de totalité, grâce à une éclaircie qui, pour eux, s'est justement produite au moment oppor- un ; aussi, ils ont pu exécuter en entier le programme arrèté. £ Pendant la première minute, M. Meslin a mesuré la proportion de lumière polarisée en deux régions de la “couronne ; cette proportion a été trouvée la même au “oisinage de l'axe et dans la région équatoriale; elle est voisine de 50 °/.. Les deux minutes suivantes ont été utilisées pour rechercher s’il y avait des traces de polarisation ellip- tique dans la lumière coronale : la polarisation s’est montrée rectiligne en tous les points. La Revue reviendra prochainement sur les résultats des observations faites pendant l'éclipse. $ 2. — Génie civil Les progrès dela surchauffe dans les ma- chines à vapeur. — On sait que la machine à va- Peur réalise d'incessants progrès, spécialement au point de vue de l'économie de la dépense, par l'emploi “de pressions et de surchauffes de plus en plus élevées. “Voici, pour fixer les idées sur l'étendue actuelle de ce dernier progrès, quelques chiffres d'essais exécutés técemment sur une machine compound à vapeur sur- chauffée d'environ 450 chevaux, marchant à 100 tours par minute, et qui sont des plus remarquables. . Cette machine est verticale, à deux cylindres de 530 et 915X910 millimètres de course, sans enveloppes, avec distribution, à chaque cylindre, par quatre tiroirs cylindriques, à déclics pour ceux de l'admission, les REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne !a rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tiroirs d'admission du petit cylindre étant soumis au régulateur et ceux du grand réglables à la main. La surchauffe est donnée par un surchauffeur indépen- dant de Schmidt, de 96 mètres carrés, avec grille de 122,05. La vapeur arrive du surchauffeur à la machine par une tuyauterie de 73 mètres de longueur, soigneu- sement isolée, en partie en plein air, et présentant une surface intérieure de 25 mètres carrés et une surface extérieure de 53 mètres. Le condenseur est à injection avec pompe à air sans elapets de pied du type Edwards. La pression de la vapeur à l'admission est de 8 kilogs. La machine a sa distribution établie de manière à pouvoir supporter de la vapeur surchauffée à la tem- pérature de 3709, ce qui peut se faire avec les tiroirs cylindriques, alors que les robinets Corliss et leurs dé- rivés ne peuvent guère supporter plus de 260°; ces tiroirs-pistons sont presque aussi légers que les sou- papes, et très faciles à équilibrer pendant toute leur course. Pendant les essais, la pression, aux chaudières, a varié de 8 kilogs à 8 kil. 9; la surchauffe à la sortie de la chaudière a varié de 225 à 2100 et celle à l’ad- mission du petit cylindre de 140 à 120° ; la puissance indiquée a varié de 145 à 481 chevaux. Le rendement thermique a varié de 21 à 222/, ; la dépense de vapeur surchauffée a varié de 3 kil. 9 à 4 kil. 2, équivalant à 4 kil. 5 et 4 kil.9 de vapeur saturée, d’après les poids d'eau recueillis aux essais dans un condenseur à sur- face approprié. Ce sont des chiffres extrèmement bas et remarquablement constants, dans des circonstances de marche très variées; notamment, la dépense de 3 kil. 9 seulement de vapeur surchauffée de 110° à l'entrée des cylindres, avec une puissance indiquée de 146 chevaux, n’a jamais été atteinte, même par des machines à triple expansion, bien plus puissantes et plus compliquées que cette machine compound à deux cylindres. La chute de température de la vapeur, dans la longue tuyauterie de 73 mètres, a varié de 40 à 559, suivant les circonstances atmosphériques, et, si l’on ajoute à cette petite perte celle, au moins double, par le rayonne- ment des maconneries du surchauffeur, on voit qu'il conviendrait, pour se rendre compte de l’économie thermique totale du système, de majorer d'environ 17 750 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 10 °/, les dépenses de vapeur ramenée à la saturation, | machine ne dépenserait guère, avec une bonne chau-« Fig. 1. — Ensemble des appareils pour la photographie animale automatique. — 42, 13. cordons tendus par le mouvemenk de l'animal; 11, cordon tendu par la chute du sac de sable 7. ce qui les ramènerait à une moyenne de 5 kilogs, | dière et des réchauffeurs à alimentation appropriés, encore extrèmement remarquable, de sorte que cette | plus de 450 grammes de charbon par cheval indiqués CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 751 Cette machine, construite par MM. Cole, Marchent æt Morley, de Bradford, marche depuis un an sans apparence d'usure des tubes du surchauffeur; elle a été essayée par M. Longridge dans des conditions d'im- partialité et de compétence qui rendent les résultats de ces essais des plus certains. $ 3. — Physique La photographie animale. — Ne pouvant pas toujours observer dans la Nature les animaux qui font lobjet de leurs études, les zoologistes trouvent dans la "photographie une aide des plus précieuses. C'est surtout dans le cas des bêtes sauvages, où des raisons évidentes viennent s'opposer à l'observation immédiate, que cet art est appelé à rendre des ser- 2 vices impor- -tants. Aussi l’on lapprendra avec intérêt que M. C.-G. Schillings. l'explorateur distingué de l'A- frique orientale, vient de réaliser un progrès très sérieux dans le domaine de la photographie animale par l'in- vention de dis- positifs automa- tiques, permet- tant aux ani- maux de se pho- tographier eux- mêmes, malgré “eux, et à l'état de liberté par- faite. La série très étendue de photographies “que publie ce savant dans un livre récemment “paru fournit des “documents per- … mettant de pé- “nétrerlessecrets les plus intimes des forêts de l’A- frique. gné recouvert de cuir, pour résister à toutes les in- luences climatériques pendant une pose qui pourrait durer des heures, des jours et même des semaines. L'objectif est un anastigmat Celor-Goerz d'une grande puissance lumineuse; un obturateur à volet, disposé en regard de la plaque photographique, sert pour opé- rer la fermeture. La caisse de l'appareil est, du reste, munie d'un autre obturateur destiné à être employé dans le cas où le premier devrait être laissé ouvert pen- dant quelque temps. Pepe Une goupille à ressort (1) s'engage dans un levier relié à l’obturateur (fig. 2). Après que le rideau a été remonté, un autre cliquet (2) vient s'engager dans le bouton remontoir (3, après quoi le second obturateur peut ètre fixé. L'ensemble du système de leviers est placé dans une cloison fermée au dehors par une porte (4). Lesupport, pour- vu de la ramure à poudre fulmi- nante, se com- pose de tiges de bambou et est aussi léger que possible. La tête du support et la rainure sont en nickel-alumi- nium ; la rainure (fig. 3) porte à sa base deux leviers (5 et 6) suppor- tant d'un côté le sac à sable (7) et de l’autre une pe- tite tige (8) sus- ceptible d'être retirée rapide- ment. Le sac à sable estrelié par une corde (9) à la fusée (10). En dessous du sac à sable, on a placé un cadre muni d'un cordon transversal qui conduit à l'appa- reil photographi- que, où il se ter- mine par une pe- tite tige (11). Nous pensons Fig. 2. — Détails de l'appareil photographique. — 1, goupille à ressort dont Voici, mainte- intéresser nos le déclanchement produit la chute de l'obturateur et l'ouverture de l'objectif; nant, le mode de lecteurs en leur 2, cliquet s'engageant dans le bouton remontoir 3, qui déclanche lobtu- fonctionnement donnant une IH Je De de l'appareil : brève descrip- La bête à pho- “tion des appareils, construits dans les Ateliers d'Optique de C. P. Goerz, à Berlin, et que les constructeurs, par Suite des brillants résultats obtenus par M. Schillings, ont voulu rendre accessibles à un cercle plus grand d'amateurs. 5 Le fauve, alléché le plus souvent par un appât et tâchant de saisir sa proie, vient toucher un cordon, qui dégage d'abord un obturateur protecteur attaché à Vobjectif; immédiatement après, une poudre fulminante #æt l'obturateur de fente sont actionnés, et, aussitôt que la pose a eu lieu, l'objectif se recouvre automatiquement d'un autre obturateur de protection. L'allumage de la poudre fulminante se fait, soit élec- triquement, soit au moyen d’une fusée d'amorces. En dehors de la chambre photographique et du méca- nisme spécial dont elle est pourvue, l'appareil comprend le support sur lequel sont montés la poudre fulminante, le réflecteur et le dispositif de déclanchement. La £aisse de l'appareil photographique est en bois impré- tographier arrive au contact du cordon (12) et, par là, produit la chute du premier obturateur métallique et l'ouverture de l'objectif; presque aussitôt elle tire un autre cordon (13), dont la goupille, étant retirée du levier, produit la chute du sac à sable, qui touche la corde (11) et déclanche l'obturateur de fente. En continuant sa chute, le sac arrache la fusée, et la vue photographique est prise. Lorsque l’obturateur de fente s’est ouvert parfaitement, il amène l'autre obtu- rateur métallique automatiquement en regard de l'ob- jectif, de facon que la plaque sensible, bien que le chässis soit ouvert, cesse d'être exposée. L'appareil peut évidemment être déclanché aussi au moment voulu par le photographe lui-même caché aux alentours. On comprend que l'appareil décrit ci-dessus donne le moyen de conserver un portrait fidèle des attitudes des animaux pour les générations à venir, quand ces espèces auront disparu ; aussi l'impulsion qu'il donnera aux recherches scientifiques sera des plus heureuses. LED) 192 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 4. — Géologie ” membre de la Mission de Segonzac au Maroc, a exposé | La géologie du Maroc. — M. Louis Gentil, | récemment à la Société géologique de France les obser- | Mig s: — Détails du dispositif d'éclairage. — 5, 6, leviers disposés de telle facon que orsque la tige 8 est tirée par le cordon 13 (fig. 4). le sac à sable tombe et fait partir la fusée 10 au moyen de la corde 9. valions qu'il à pu faire au cours de la quatrième étape de son voyage. Parti de Marrakech, il s'est dirigé tout d’abord sur Demnat, avec M. de Flotte; puis, déguisé enrekkas (cour- rier à pied), il a franchi le Haut-Atlas, en se dirigeant vers le Sud. Il a pu ainsi observer la structure du sol de la montagne et y découvrir un gisement de grap- tolithes et une faune carbonifère assez importante. Il a ensuite longé le flanc méridional de la chaîne dans une région essentiellement désertique; enfin, il a pu visiter une région volcanique superbe, le Djebel-Sirouà, vu déjà, de loin, par de Foucauld. Ge massif montre une grande analogie avec le Massif central de la France par son soubassement granitique et ses volcans vrai- semblablement récents, dont l'aspect rappelle cer- tains paysages d'Auvergne. Du Djebel-Sirouà, M. Gentil a regagné Marra- kech, en traversant de nouveau la crête de l'Atlas, par un col de 3.500 mètres d'altitude. Après avoir résumé les résultats scientifiques de son voyage, M. Gentil à esquissé les conclusions pratiques à tirer, non seu- lement au point de vue agricole et forestier, mais aussi relativement aux mi- nes des zones primaires de la chaîne. La Revue re- viendra prochainement, d'une façon détaillée, sur les conclusions qui se dé- gagent des récentes explo- rations sur la géologie du Maroc. $ 5. — Agronomie L°Œuvre agricole de M. P.-P. Dehérain. — M. L. Maquenne a ré- cemment retracé, devant ses élèves du Muséum, la vie et l'œuvre de son re- gretté prédécesseur, M. P.- P. Dehérain. Nos lecteurs nous sauront gré de re- produire ici quelques pas= sages du discours de M.Ma- quenne : « La Science a fait en M. Dehérain une perte dont elle sent encore tout le prix. « Dès le début de sa carrière, M. Dehérain prit un vif intérèt aux problè- mes scientifiques, surtout à ceux qui touchaient à l'Agriculture. 1 « Sa première Note, pré sentée à l'Académie 1e 6 juillet 1857, a pour sujet M la solubilité des phospha- tes de chaux fossiles dans les acides du sol; cette question devait, d’ailleurs, ' le préoccuper toute Sa VIE une de ses thèses de doc= torat y fut consacrée, et, dans la suite, il revint sun ce sujet à plusieurs re= prises, précisantles condi= tions d'emploi des phosphates et donnant, àcetelfet, des règles pouvant guider les praticiens. Dès le début, il avait compris nettement que, si l'on arrivait à connaître les conditions d'action des phosphates, on aurait une base certaine pour l'emploi rationnel des engrais. Cette d base n’est pas encore bien fixée à l'heure actuelle; mais ; les progrès qui ont été faits dans cette voie sont attri=, buables aux premières recherches de Dehérain, quis avait préconisé l'emploi des acides faibles pour établir ge, une distinction entre l'acide phosphorique total d'une terre et la fraction qui peut être assimilée directement par les plantes. Ce sont ces recherches qui ont inspiré le nombre considérable de travaux qui, de tous côtés, ont été effectués sur ce point. … « En 1866, l'Académie des Sciences accorda le prix Bordin au célèbre Mémoire sur l'assimilation des subs- tances minérales par les plantes. Lorsque de Saussure publia ses observations sur l'absorption des substances salines par les végétaux, il en était réduit à de vagues hypothèses sur les causes de cette absorption, variable “suivant la nature de la substance dissoute. Dehérain sut mettre à profit les enseignéments de la Physique, en particulier ceux, bien abstraits en apparence, que four- missaient les travaux de Graham sur la diffusion. » « Dèssanomination à l'Ecole de Grignon, il s'adonna fout entier à l'étude de la production végétale. Nous voyons alors ses recherches porter successivement sur outes les fonctions fondamentales des plantes. - « C’est en 1875 qu'il établit, dans le domaine de l'Ecole de Grignon, un champ d'expérience qui est aujourd'hui connu dans le monde entier. Il put alors aborder tout ce qui touche à la pratique agricole; il continua ses recherches sur la maturation, commencées en 1869, et publia de nombreux Mémoires sur le développement du seigle, de l’avoine, du blé. En 1880, il publia, sur la maturation des plantes herbacées, un travail qui peut ervir de modèle dans ce genre de recherches; le choix udicieux qu'il fit des espèces à mettre en observation lui permit de montrer avec quelle énergie l’ovule fécondé fait appel aux réserves accumulées par la plante, à tel point qu'il peut arriver que celle-ci meurt brusquement, ayant fourni toute sa substance vivante à la graine. Il y a là un exemple frappant, et, à notre sens, d’une haute portée philosophique, des moyens que la Nature met en œuvre pour assurer la continuité de l'espèce. « Les résultats des cultures faites au champ d’expé- ences de Grignon furent, dès le début, publiés réguliè- ement dans les Annales agronomiques, qu'il avait fon- dées en 1875. « L'importance considérable que prenait graduelle- ment la culture de la betterave en France devait naturel- “lement conduire l’agronome qu'était Dehérain à étudier les conditions favorables à la production du sucre. Dès 4875, il s’attaqua à ce problème, d'abord au Muséum avec son maitre et ami Frémy, ensuite au champ de rignon, et enfin sur les domaines de M. Porion, à War- ecques et à Blaringhem. Il démontra le grand avan- age qu'il ya, pour la richesse saccharine des racines, à les maintenir en lignes serrées. Depuis quelques années, le prix du sucre est devenu tel que la culture des bet- leraves sucrières n’est rémunératrice que dans des terres et des régions bien appropriées; si les conditions clima- ériques et les qualités du sol ne sont pas nettement orables, le cultivateur ne peut plus produire de bet- eraves de sucrerie, et il a alors intérêt à faire des bet- éraves pour la nourriture de ses animaux. Si, dans es conditions, il n'est plus astreint à produire des acines {très riches en sucre, il doit néanmoins donner ses bêtes une plante qui soit alimentaire. Dehérain montra l'erreur grossière dans laquelle tombaient les sriculteurs, et qui consiste à produire des betteraves énormes, géantes, mais ne contenant que de l’eau. Il Sefforça de prouver que l’on produit plus de sucre, plus de matière azotée, plus de nourriture, en un mot, ur une surface donnée, en cultivant de petites racines, ce, qui peut s'obtenir en choisissant des variétés appro- priées et en les cultivant en lignes serrées. Il préconisa e mode de culture dans divers ouvrages et périodiques opulaires ; et, ici encore, il avait réussi à faire partager Sa manière de voir par un grand nombre de cultivateurs, qui lui soumettaient volontiers les résultats de leurs essais. …« Le choix judicieux de la variété et le mode de culture ne sont pas les seuls moyens dont dispose l'agriculteur pour accroître ses récoltes; la nutrition de la plante est aussi de première importance. L'étude des engrais de- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 753 vait donc trouver sa place au champ d'expériences de Grignon. Dehérain reconnut bientôt que, sur ce sol, les phosphates et les sels de potasse présentent peu d’efti- cacité, fait qui s'accorde bien avec les renseignements que fournit l'action des acides faibles sur la terre de Grignon. De sorte qu'il fut naturellement porté à étu- dier cet engrais toujours efficace, le fumier de ferme. Sa composition, sa fabrication, sa conservation, son emploi ont fait l'objet d’un grand nombre de ses Mé- moires. Persuadé que le fumier agit non seulement par l’azote et les éléments minéraux qu'il renferme, mais aussi par sa malière organique, il insistait vivement, dans ses leçons, sur la préparation de cette substance par les fermentations qui ont leur siège dans le tas de fumier. Et, chaque année, il conduisait ses auditeurs du Muséum à Grignon, dans la cour de la ferme de l'Ecole, pour leur montrer comment on fabriquait un bon fumier. « La dénitrification avait déjà fait l'objet de ses re- cherches en 1882, époque à laquelle il montra l'existence dans le sol d'organismes réducteurs des nitrates, avec dégagement d'azote ou de protoxyde d'azote. Il revint sur ce sujet en 1897 pour répondre à des expériences faites en Allemagne et qui étaient de nature à jeter le discrédit sur des pratiques agricoles séculaires. Il avait coutume de dire que, lorsque la science est en désaccord avec les habitudes des cultivateurs, c’est la science qui a tort. Des agronomes allemands prétendaient qu'il est souvent dangereux d'employer du fumier de ferme, que celui-ci apporte au sol des ferments dénitrificateurs et, par suite, pourra causer des pertes d'azote, qu'en par- ticulier il faut absolument éviter de mettre sur la même terre du fumier et du nitrate de soude. Il y avait donc désaccord absolu entre les faits observés au laboratoire et la pratique agricole. Dehérain fit voir que celle-ci avait raison, que les organismes de la dénitrification existent dans le sol, et qu'à ce point de vue leur apport par le fumier est négligeable, que, dans les conditions ordinaires, la dénitrilication n’est pas à craindre, et que, si certains auteurs l'ont observée, c'est qu'ils em- ployaient des doses de fumier dix ou vingt fois supé- rieures à celles qui correspondent à nos plus fortes fumures. « Tous ces travaux et bien d’autres ont été publiés en détail dans les Annales agronomiques. Is ont été condensés dans le Traité de Chimie agricole, dont Dehérain a fait paraître une deuxième édition à la fin de 1901. Dans la préface de ce livre magistral, dont la publication lui coûta un travail considérable, il syn- thétise, pour ainsi dire, le labeur de sa vie entière. Rappelant les grandes découvertes du xIx°,siècle, la nitrification, la fixation de l'azote gazeux, qui découlent . de l’œuvre de Pasteur, il montre comment il est amené à considérer l’eau comme l’agent de fertilité par excel- lence pour le sol. Si l'on arrive à fournir à la terre assez d'eau pour subvenir à la transpiration des végétaux et au bon fonctionnement des ferments du sol, on est assuré de produire des récoltes rémunératrices. De là à voir dans l'irrigation l’avenir de l’agriculture, il n'y a qu'un pas : « Arroser le sol de la France est la grande entreprise qui fera la gloire du xx° siècle et assurera sa prospérité agricole, car l’eau est la première condi- tion de fertilité. » « En même temps que physiologiste et savant agro- nome, Pierre-Paul Dehérain fut un écrivain remarquable et un brillant professeur. Ses ouvrages, d’une clarté in- comparable, témoignent de la lucidité de son esprit et de la justesse de ses vues; tous ceux qui l'ont entendu, au Collège Chaptal, à l'Ecole de Grignon ou au Muséum, ont gardé de ses leçons un souvenir extrêmement vif. «D'ailleurs, ilaimaitla vulgarisation autant que l’ensei- gnement, et c’est ce penchant naturel qui l'a conduit à publier, à partir de 1862, l'Annuaire scientifique, dans lequel, avec le concours de MM. Brouardel, Duméril, Gariel, Marey, Mascart, Potier, Rayet, G. Tissandier, Trélat, etc., il rendait compte annuellement des progrès de la science; cette publication intéressante, inter CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE rompue par la guerre, cessa de paraître en 1870. Dehérain prit, quelques années plus tard, la direction des Annales agronomiques, dont les vingt-huit volumes forment aujourd'hui une collection rare, renfermant, outre un grand nombre de mémoires originaux, un résumé complet de tous les travaux intéressant la Chimie agricole, Agriculture et la Physiologie végétale qui ont été publiés depuis trente ans en France et à l'Etranger. « De bonne heure chef de laboratoire, Dehérain vit passer auprès de lui un grand nombre d'élèves; il les aimait, les encourageait de toutes ses forces, en faisait ses collaborateurs et, lorsqu'il les en jugeait dignes, les soutenait de toute son influence. L'amour du travail, qu'il savait inspirer à tous, était à ses yeux la plus haute qualité d'un savant; il fut pour lui-même une ressource précieuse dans les cruelles épreuves qu'il eut à subir. Grande fut sa joie lorsque certains de ses élèves vinrent prendre place à côté de lui à l'Académie des Sciences; aussi grandes sont la reconnaissance et l'affection que tous lui ont voués. « Il y a quelques annés, Dehérain fut atteint de la cataracte; opéré avec succès, il revint bientôt à ses amphithéâtres et à ses laboratoires du Muséum et de Grignon. Au cours de son immense labeur, poursuivi sans interruption pendant quarante-cinq ans, il n’a pas songé à prendre un seul instant de repos. « Il mourut après trois semaines de maladie, le di- manche 7 décembre 1902. Six semaines auparavant, le 27 octobre, il présentait encore à l'Académie des Sciences une Note, relative aux récoltes extraordinaires du fro- ment obtenues en 1902 au champ d'expériences de Grignon. « Sa perte a été vivement ressentie par les agronomes du monde entier; elle est plus particulièrement cruelle pour ceux auxquels il a été donné, comme à nous, de l'approcher quotidiennement et d'apprécier l’homme en mème temps que le savant. « Il avait su s’entourer d'affections filiales autant que de respectueuses sympathies; sa vie, faite tout entière de labeur incessant, de nobles ambitions, de dévoue- ment à la science et au pays, restera un bel exemple pour les jeunes qui aspirent à devenir des maîtres à leur tour. « L. Maquenne, « Membre de l'Institut. » $ 6. — Sciences médicales Tremblement congénitalchez des faisans. — On à signalé chez l'homme l'existence d’un tremble- ment congénital, sorte de névrose qui est souvent héréditaire. MM. Raymond et Thaon ont présenté à la Société de Neurologie de Paris des faisans atteints d’un tremble- ment congénital tout à fait comparable à celui qu'on observe chez l'homme. Ce tremblement agite le corps tout entier en oscillations dans le sens vertical; il donne l'aspect d’un frisson. Au repos, il est peu accen- tué ; il s’'exagère dans les mouvements rapides. Cepen- dant; les animaux vont, viennent, mangent, comme leurs congénères, sans manquer de précision dans leurs mouvements. Il est à remarquer que ces faisans sont nés de parents consanguins, que le tremblement existait dès leur sortie de l'œuf, que les animaux ont toujours été débiles et inféconds, aussi bien dans leurs accouple- ments entre eux qu'en accouplant chacun d'eux avec un sujet sain. On peut voir dans ce tremblement un stigmate mor- bide de dégénérescence, qui vient confirmer l'existence, chez l'animal, de stigmates dégénératifs tout à fait com- parables à ceux qu'on observe dans l'espèce humaine. Crise de faux accouchement chez une ta- bétique. — On sait que, dans le tabes, il existe des douleurs dites « douleurs en ceinture », dans lesquelles la malade a la sensation d'une constriction doulou- reuse du thorax ou de l'abdomen. M. Jean Abadie (de Bordeaux) a rapporté à la Société de Neurologie un cas de crises douloureuses chez une femme tabétique simu-« lant à s'y méprendre le syndrome douloureux de l’en- fantement. Cette femme, qui a eu quatre enfants, éta-n blit elle-même la comparaison : ses crises de faux accouchement se caractérisent par des douleurs pa- roxystiques qui peuvent durer des heures et même des. journées et qui suivent le cycle habituel des douleurs de la parturition : douleurs préparantes, expulsives, concassantes. Ces douleurs sont à rapprocher égale- ment des crises urétrales et rectales des tabétiques. $ 7. — Enseignement Les docteurs en médecine candidats au“ doctorat ès sciences. — Par un arrêté en datem du 5 juillet 4905, le Ministre de l'Instruction publique vient d'autoriser les docteurs en médecine, aspirant au | doctorat ès sciences (sciences physiques ou sciences naturelles), à subir les épreuves sans produire le diplôme de licencié ès sciences. 3 Ils devront toutefois justifier : 4° Pour les sciences physiques, du certificat d'études supérieures de Physique générale et du certificat d’études supérieures de Chimie générale ; L 20 Pour les sciences naturelles, de deux des certi-« ficats d'études supérieures de sciences ci-après, à leur choix : Zoologie ou Physiologie, Botanique, Géologie ou Minéralogie. \ g L] | Bourses de voyage autour du monde. —« Le généreux anonyme fondateur des Bourses de voyages autour du monde, qui étaient réservées jusqu'à ce Jour aux agrégés de l'Université ayant subi le concours d’agrégation depuis moins de dix ans, vient de créer deux nouvelles bourses destinées à des femmes agré- gées. Le jury, présidé par M. Liard, vice-recteur de l'Uni=m versité de Paris, assisté de M. Casimir-Périer, avaith recu 26 demandes. Il a choisi comme titulaires des nouvelles bourses : Mile Amieux, professeur aux Lycées Lamartine et Victor-Hugo, agrégée des Sciences, el Mie Sapy, maitresse adjointe à l'Ecole Normale supé-m rieure de Sèvres, agrégée des Lettres. Les titulaires ont été avisées en même temps que le montant des bourses mises à leur dispositian avait été porté par le fondateur de 7.500 à 8.500 francs. md Personnel universitaire. — M. Parmentier, docteur ès sciences, chargé d'un cours complémentairem de Botanique agricole à la Faculté des Sciences de Besançon, est nommé professeur de Botanique agricole à la dite Faculté (fondation de l Université de Besançon) M. Grignard, docteur ès sciences, chargé des fonc= tions de maitre de conférences de Chimie à la Faculté des Sciences de Lyon, est nommé maître de confé=s rences de Chimie appliquée à la Faculté des Science de Besancon. M. Swyngedauw, docteur ès sciences, maître de con férences de Physique à la Faculté des Sciences d Lille, est nommé professeur de Physique et d'Electricitém industrielles à ladite Faculté. M. Bourget, docteur ès sciences, maitre de confé, rences de Mathématiques à la Faculté des Sciences d@ Toulouse, est nommé professeur à ladite Faculté. M. Dubard, docteur ès sciences, est nommé mañtr® de conférences de Botanique coloniale à la Faculté des Sciences de Paris. M. Giraud, agrégé des Sciences naturelles, docteux ès sciences, chef de la Mission scientifique de la Marti nique, est nommé maître de conférences de Minéras logie à lasFaculté des Sciences de Clermont (fondation de l'Université de Clermont). 4 M. Levavasseur, docteur ès sciences, est nomm maitre de conférences de Mathématiques à la Faculté des Sciences de Lyon, . PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE 7 Qc (SE NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L’AZOTE 4 CONFÉRENCE —…. C'est un très grand honneur que me fait le Con- seil de la Société chimique en m'appelant à vous es des travaux récents sur le poids atomique de l'azote et des conclusions que je crois pouvoir en tirer; j'y vois une preuve de confiance et un “encouragement. Je prie donc son Président d’ac- …cepter l'hommage de ma vive reconnaissance. Par des voies différentes, mais concordantes dans leurs résultats, on arrive aujourd'hui à la conclusion que le poids atomique de l'azote, tel qu’il résulte des travaux de Stas, est inexact. L'er- reur est de 1/467, si l’on se reporte à la valeur Az — 14,04 de la Table internationale pour 1905 ; elle est de 1/311 si l'on admet le nombre donné en dernier lieu (1882) par l'illustre chimiste belge, … Az — 14,055. En d'autres termes, la valeur probable — du poids atomique de l'azote est Az — 14,01. Au premier abord, on peut se demander com- “ment, depuis les célèbres travaux de Stas, publiés en 1860 et 1865, les chimistes ont pu se contenter - d'une valeur COMPONIENT une erreur aussi Consi- dérable, sans qu'aucun fait ne soit venu la révéler; il semble, en particulier, étrange que les innom- Mbrables dosages d'azote effectués chaque année _ dans les divers domaines où cet élément joue un «rôle important, — qu'il s'agisse de la Chimie “— minérale ou organique, de l'Économie rurale, de “l'industrie des explosifs, etc., — n'aient pas fait “apparaitre cette erreur. Je ne vois qu'une explica- “tion plausible : c'est que les chimistes, en très grande majorilé, ont continué à faire leur calcul avec la valeur arrondie Az — 14,00, adoptée vers 1843, à la suite des travaux de Marignac, valeur ‘qui ne diffère du nombre exact que de 1/1.400. Quoi qu'ilen soit, on ne peut évidemment aban- donner les résultats d’un expérimentateur aussi “consommé que Stas, sans être absolument sûr que ceux-ci sont entachés d'erreur. C’est ce qui explique et justifie la prudence de la Commission interna- «tionale des Poids atomiques; on ne peut, certes, lui faire un reproche d'avoir conservé jusqu'à présent Ja valeur Az — 14,04. Mais aujourd'hui, malgré la grande et légitime admiration qu'inspirent partout etqu'inspireront longtemps encore les travaux de tas, — et je suis du nombre de ses admirateurs, “de ceux, en particulier, qui gardent un souvenir vivant de l'accueil bienveillant du Maître, en son laboratoire de Bruxelles, — le moment est venu où l’on doit avoir le courage de rompre avec le t 4 es. A LA SOCIÉTÉ CHIMIQUE DE PARIS passé et de reconnaitre l'erreur commise. L'examen attentif de la question, la critique serrée des tra- vaux sur le sujet démontrent en effet 1° Que les méthodes gravimétriques classiques suivies par Slas, ses devanciers ou ses continua- teurs ne comportent pas une précision suflisante pour permettre de garantir la seconde décimale du poids atomique de l'azote; 29 Que des méthodes nouvelles, d'ordre physico- chimique, permettent, au contraire, d'atteindre cette précision et conduisent à la valeur Az = 14,01; 3° Que les méthodes gravimétriques nouvelles, plus rationnelles et plus précises que celles qui ont été suivies antérieurement, conduisent déjà à des résultats qui confirment la valeur du poids atomique de l'azote obtenue par les méthodes physico-chi- miques. Ce sont ces trois ordres de considérations que je désire développer devant vous. Mais, au préalable, il convient de préciser en quelques mots l'historique de la question : C'est en 1895 qu'un doute sérieux a été émis pour la pre- mière fois par lord Rayleigh et sir William Ram- say ‘ sur le poids atomique de l'azote. Ayant déter- miné, avec une grande exactitude, la densité de l'azote chimique, ces savants constalèrent que, rapportée à celle de l'oxygène (0 — 16), cette den- sité était égale à 14,003 ; pour l'azote atmosphé- rique, mélangé d'argon, ce rapport est égal à 14,07; il coïncide donc à peu près avec le nombre de Stas, 14,055 ou 14,06, fait singulier, mais non unique dans l'histoire de la Science, qui a certainement contribué à donner une fausse sécurité sur l'exac- titude de ce nombre. Peu après, M. Leduc, à la suite de ses belles recherches sur les gaz, a été amené de son côté, en 1897, à substituer à la valeur Az —14,075, qu'il avait proposée en 1894 pour le poids atomique de l'azote, le nombre Az — 14,005. C'est aussi à cette même valeur Az — 14,005 que M. D. Berthelot* s'est arrêté, dans son Mémoire 1 RavLeiGu et Rawsay : Phil. Trans. A., 1895, t. CLXXXVI, p. 187. ? A. LEnuc 229. : GR, 4897, 4. CXXNW,: p. Recherches sur les gaz (Ann. Chim. Phys., 189$, mémoire édité à part, Gauthier-Villars, Paris, 1898). Sur la loi des volumes molé- culaires (Conférences du laboratoire de M. Friedel. Carré, Paris, 1894) 3 D. BerraeLor : C. R., AS98, t. CXXVI, p. 954, 1030, 1415 et 1501 (mémoire détaillé inséré au Journal de Physique, Paris, 1898). 756 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L’AZOTE remarquable sur la méthode des densités-limites (1898), mémoire basé principalement sur les me- sures de MM. Leduc et Sacerdote. Enfin, en 1900, au cours d’études sur les cons- tantes de l'équation de M. Van der Waals, études qui nous ont obligés à choisir une valeur aussi exacte que possible du poids atomique de l'azote, nous avons adopté, M. Friderich et moi!, le nombre Az = 14,005, en nous appuyant principa- lement sur le rapport des densités de l'azote et de l'hydrogène, corrigé au moyen des expériences de compressibilité de Regnault. Tandis que se poursuivaient ces travaux d'ordre physico-chimique, quelques revisions, par des néthodes gravimétriques, étaient entreprises, mais sans conduire, cependant, à des résultats con- cluants. C’est, du moins, l'impression quise dégage à la lecture des critiques dont elles ont été l’objet récemment encore de la part de M. Richards ?, savant particulièrement compétent en ces matières, auquel j’emprunte le résumé sommaire qui suit : TABLeaAu [. — Valeurs du poids atomique de l'azote trouvées par divers savants. Méthodes Az Rapport HCI : AzH* (Phomsen, 1894). . . . . 14,021 — Ag : AgAzO* (Hardin, 1896) . . . . . 14,01 KAz05 : KCI es É — | À NaAzO®: NaCl (Hibbs, 1896). . . 14,01 — AgCAz : Ag (Dean, 1900) . . . . . 14,031 Analyse : sels de l'acide azothydrique (Ram- SAVE LEA SION AUS) PERRET CCE 13,903 Rapport COSNa? : 2AzO%Na? (Richards). . . . 14,02 à É CsAzO® : CsO!} Al 4 Rapports KAz05 : KO1}, (Richards et Ar- GCHDATMIIT EE EE ET 14,037 à 14,040 Les dernières expériences de MM. Richards et Archibald, en particulier, n'étaient pas de nature à dissiper la discordance entre les résultats phy- sico-chimiques, d’une part, et les résultats gravimé- triques, d'autre part; c'était, en effet, la confirma- tion du poids atomique international, Az — 14,04. En présence de ces désaccords, l'étude plus approfondie de la question s'imposait à nouveau : ou les méthodes classiques ou les méthodes phy- sico-chimiques sont en défaut; l’un des résultats contradictoires doit être abandonné. Dans le but de chercher à élucider ce problème, divers travaux d'ordre expérimental ou théorique furent entrepris dans mon laboratoire, à partir des années 1901 et 1902, les uns ayant pour objet de préciser divers points relatifs aux méthodes phy- sico-chimiques, les autres destinés à jeter les bases de nouvelles méthodes gravimétriques plus ration- * Guye et FrineriCu : Arch. Sc. ph. nat. Genève (4), 1900, t. IX; p.505. * Tu. W. Ricnaros : Proc. Am. Phil. Society, 1904, t. XLUT, v0 176, p. 116. nelles que celles qui ont élé employées jusqu'à présent. Le travail que comportait l'exécution du pro- gramme tracé au début était considérable ; il n’au- rait pu être mené à bien, en si peu de temps, sans la collaboralion précieuse et éclairée d'amis ou d'anciens élèves. Mon assistant, M. le D' A. Jaque- rod, ainsi que MM. les D'° S. Bogdan, Ch. Dawila, L. Demolis, Ed. Mallet, L. Perrot, A. Pintza et 0. Scheuer, ont bien voulu coopérer à des titres divers à ces recherches. C'est donc de l’ensemble de ces travaux que je me permettrai surtout de vous entretenir, et c’est de la: discussion de leurs résultats, discussion souvent faite en commun, que sont sorties les trois conclu- sions fondamentales que je formulais tout à l'heure. Me voici donc ramené à mon sujet; il ne me reste plus qu'à solliciter votre indulgence pour l'emploi fréquent de tableaux numériques que je ne puis me dispenser de mettre sous vos yeux, si je veux cher- cher à vous faire partager la conviction acquise à la suite d’un effort personnel de plusieurs années. I Les méthodes gravimétriques classiques ne com- portent pas une précision suflisante pour déter- miner exactement la seconde décimale du poids atomique de l'azote. Pour démontrer cette première thèse, il est né- cessaire de rappeler d'abord, en quelques mots, les principes sur lesquels reposent ces méthodes ;, suivies, d’ailleurs, presque exclusivement par tous les savants qui se sont occupés dela dé du poids atomique de l'azote : 1° Du rapport du chlorure d’'ammonium à l’'ar- gent, on déduit le poids moléculaire du chlorure d'ammonium, et, par soustraction des poids ato- niques C1 + 4H, on obtient le poids atomique de l'azote ; même méthode par le rapport AzH*Br : Ag; 2° En transformant un poids donné de chlorure de potassium en nitrale de potassium, ou vice versa, on calcule le poids moléculaire de KAzO’, connaissant KCI; par soustraction des éléments K +30, on obtient le poids atomique de l'azote; même méthode appliquée aux rapports NaAzO* : NaCl; LiAzO*: LiCl; à 3° La transformation des chlorates alcalins en nitrates, soit la détermination des rapports KAzO°: KCIO*, — NaAzO!' : NaCIO®, — fournit, d'une façon: analogue, une nouvelle valeur du poids atomique de l’azote ; 4° La transformation de l'argent en nitrate d’ar- gent, soit le rapport AgAzO* : Ag, de même que le 1 Voir F. W. CLarke : Recalculations of the atomic weights. Washington, 1897. PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE rapport AgCAz:Ag, conduisent à de nouvelles va- leurs du poids atomique de l'azote. Toutes ces méthodes sont indirectes ; elles ren- trent dans la catégorie des méthodes dites « du second groupe » ; le poids atomique cherché est donné par une expression de la forme : X—Ar—B, où r est le rapport atomique déterminé expérimen- talement (par exemple, le rapport pondéral du - chlorure d'ammonium à l’argent pour la première | méthode rappelée plus haut), A est un poids molé- | culaire ou atomique supposé connu {Ag dans - l'exemple considéré) et B une somme de poids - atomiques supposés aussi connus (Cl+ 4H dans + le même exemple). - Pour juger de la précision que ces méthodes . sont susceptibles de donner, il est nécessaire d'être - exactement renseigné : 1° sur la précision réali- sable dans la détermination du rapport r; 2°sur l'exactitude avec laquelle les quantités A et B sont connues. Reprenons ces deux points séparément. Les rapports atomiques r, utilisés par les métho- des classiques, sont certainement parmi ceux qu'on a obtenus avec le plus haut degré de concordance dans ce genre de travaux, soit que l'on envisage les diverses déterminations d'un même expéri- mentateur, soit que l'on compare les moyennes d'un même rapport déterminé par des observateurs différents. Dans le premier cas, les écarts extrêmes d’une même série de mesures sont souvent compris entre 1/8.000 et 1/15.000 ; dans le second cas, les écarts extrêmes entre les moyennes de plusieurs expérimentateurs sont généralement compris entre 1/5.000 et 1 /10.000. Pour ne pas être trop pessimiste, j'admettrai que ces rapports atomiques r sont — généralement déterminés avec une précision de + 1/10.000. Il n’en est pas de même des poids atomiques entrant dans les quantités À et B de la relation précédente X — Ar — B. Ces poids atomiques sont, en effet, ceux des éléments Ag, CI, Br, Li, Na,K, C. Presque tous sont reliés plus ou moins directe- ment au poids atomique de l'argent. Il importe donc de voir en premier lieu avec quelle exac- … titude ce dernier est déterminé. —._ Les auteurs qui ont cherché à fixer la valeur la … plus probable de ce poids alomique, en utilisant, . presque tous, les mêmes déterminations, mais en «combinant différemment les données des expé- riences, ont été conduits aux valeurs moyennes suivantes : sé ABLEAU II. — Valeurs du poids atomique de l'argent trouvées par divers savants. Auteurs Ag pour O—=16 MEvENEL SeUDerE 2: 107,93 ROSES TEE 107,94 L'AZOTE 5 Auteurs Ag pour O —16 THOMSENEME EE PEER 107,93 Clarke 11891) RER 107,92 Clarke (1902 ; ANS 107,95 Van der Plaats . . .….. 107,92 La Table internationale pour 1905 indique Ag=— 107,93. L'écart extrème entre ces diverses valeurs est de 1/3.000 environ. La précision avec laquelle le poids atomique de l'argent est connu ne peut donc guère dépasser + 1/5.000. C'est, d'ailleurs, celle que l’on peut attendre lorsqu'on remarque que toutes les méthodes qui donnent le poids atomique de l’ar- gent le relient à celui de l'oxygène, non pas direc- tement, mais toujours au moyen de deux rapports atomiques. En admettant que l'erreur sur chacun d'eux soit de 1/10.000 (limite de la précision des rapports atomiques gravimétriques), et que les erreurs s'ajoutent, l'incertitude est de nouveau exprimée par la fraction 1/5.000. Ce premier point étant admis, il est évident que les poids atomiques des éléments CI, Br, Li, Na, K, qui ne sont reliés qu'à l'argent, ne peuvent être connus avec une plus grande précision. Dépendant tous de trois rapports atomiques, il semblerait même logique de fixer à + 1/3.300 environ la pré- cision avec laquelle ils sont déterminés. Et, de fait, les corrections apportées récemment à trois des poids atomiques de Stas, relatées au tableau HE, justifient pleinement cette conclusion. TagLeau III. — Nouvelles valeurs des poids atomiques de I, Cl et Na. Valeurs modernes Valeurs calculées Éléments pour Ag—107,93 par M. Clarke (1897) lode 126,970 126,847 Chlore 35,473 35,447 Sodium . . . 23,008 23,048 Les écarts sont 1/1.000 pour I,1/1.360 pour CI, et 1/566 pour Na!!! Néanmoins, pour ne pas foncer le tableau trop au noir, et simplifier en même temps le calcul des erreurs possibles, admettons que tous les poids atomiques auxquels on relie celui de l'azote sont connus avec une exactitude de 1/5.000. Si l’on trou- vait ce jugement un peu sévère pour l'argent, on reconnaîtra qu'il est très indulgent pour les autres éléments qui en dépendent : CI, Br, Li, Na, K. Avec ces données fondamentales, il est aisé de calculer l'erreur AAz à laquelle on s'expose en déterminant le poids atomique de l'azote par l’une des méthodes du second groupe. Dans cette esti- mation, on peut envisager d’abord deux cas ex- trêmes : 1° les erreurs sont toutes de même signe et s'ajoutent : Z les erreurs sont de signes alternés, de facon à se compenser le mieux possible. Si l'on admet, pour une première approximation, que 758 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE l'erreur moyenne imputable à une méthode est égale à la moyenne de ces deux valeurs extrêmes prises toutes deux avec le même signe, on arrive ainsi à une notion de AAz moyen dont il est inté- ressant de fixer la grandeur numérique. Voici les résultats auxquels conduit ce genre de caleul” avec les limites de précision ci-dessus indiquées, soit + 1/10.000 pour le rapport » et+1/5.000 pour les poids atomiques Ag, CI, Br, Li, Na, K. TagLeau IV. — Limite de la précision certaine sur le poids atomique de l'azote déterminé par les diverses méthodes classiques. Méthodes ou rapports atomiques AAz moyen 1FPAZHICIE TASER"... —+ 0,013 2. AzH‘Br : Ag. 0.027 3..KAzO3=KCL. . 0,020 4. NaAzO3: NaCI. 0,017 5 DiAz0%:-LiCl.- 0,014 GAATAZON MAT MENU 0,039 TARA ZOK CIO SN 0,020 8. NaAzO® : NaCI. . 0,017 OMABCAZETA TA CNET 0,037 LORAZ EEE CIRE RENC 0,003 Il résulte de l'examen de ces chiffres qu'aucune des méthodes classiques (1 à 9) n’est susceptible, vu la précision actuelle des éléments dont elles dépendent, de conduire à une valeur du poids atomique de l'azote dont on puisse garantir la seconde décimale; l'incertitude que comportent ces méthodes est comprise entre 1 et 4 unités de la seconde décimale; elle serait encore plus élevée si l’on n'avait pas admis une compensation par- tielle des erreurs ou si l’on tenait compte de la grandeur réelle des erreurs récemment trouvées sur plusieurs poids atomiques supposés connus (voir lableau INT). Ce n’est pas qu'il faille en conclure que tous les résultats de tant de travaux soient à rejeter en bloc, ni qu'aucune méthode du second groupe ne soit susceptible de conduire à des résultats préeis. La valeur de AAz moyen pour la méthode de M. Thomsen (rapport AzH”° : HCI), inscrite à des- sein à la fin du tableau, démontre, au contraire, que des méthodes du second groupe convenablement choisies peuvent parfaitement conduire à des résultats précis. Ce qui est certain, par contre, c'est que les méthodes classiques sont actuellement fort mal choisies. Je dis « actuellement », et cela simple- ment en raison du fait qu'il y a une grande dispro- portion entre la précision des rapports atomiques qu'elles utilisent et l'exactitude avec laquelle les poids atomiques supposés connus le sont réelle- ment. Le jour où ces poids atomiques seront déterminés d'une facon plus rigoureuse, les résul- 1 Sur le mode de calcul de AAz, voir mémoire détaillé de Guye et BoGpan, sous presse au Jourral de Chimie physique. tats expérimentaux des méthodes que nous venons de discuter seront très probablement de nouveau utilisables. La valeur du poids atomique de l'azote que l’on en déduit aujourd’hui est comparable à la détermination topographique d'une longueur résultant d’une triangulation dont les angles au- raient été mesurés avec une précision notablement plus élevée que celle avec laquelle aurait été déter- minée la base ; le jour où la base sera connue avec une plus grande exactitude, les mesures d’angles reprendront toute leur importance. Quoi qu'il en soit, je crois ainsi avoir démontré ma première thèse : Les méthodes gravimétriques classiques ne com- portent pas une précision suffisante pour détermi- ner exactement la seconde décimale du poids atomique de l'azote. Nous sommes, dès lors, fondés à en faire abstrac- tion, momentanément du moins, pour fixer la valeur la plus probable de ce poids atomique, puisque le débat actuel se résume à savoir si celte valeur est 14,01 ou 14,04. Il ; Les méthodes physico-chimiques modernes com- portent une précision suffisante pour déterminer exactement la seconde décimale du poids atomique de l'azote. L'importance de ces méthodes ne parait pas avoir été bien comprise jusqu'à présent de tous les chi- mistes. La faute en est peut-être aux physico- chimistes, qui ne se sont pas suffisamment efforcés d'en faire saisir l'origine et la portée. On me permettra done d’en exposer d’abord les principes fondamentaux, en cherchant surtout à établir leur coordination et à mettre en évidence leur parfaite concordance; pour les détails, le temps trop court dont je dispose m'oblige à renvoyer aux Mémoires originaux. La clarté du sujet me force aussi à renoncer à l'exposé historique de la question pour ne la présenter que sous sa forme la plus simple, telle qu'elle peut se dégager aujourd'hui des Mémoires sur ce sujet. C'est ur fait bien établi actuellement que la règle d'Avogadro-Ampère n'est que l'expression d'une loi approchée; les gaz ou les vapeurs ont des coefi- cients de dilatation, assez voisins il est vrai, mais cependant assez différents aussi pour qu’on ne puisse, en toute rigueur, les confondre en une valeur unique. De là résulte qu'en appliquant la règle d'Avogadro-Ampère à la détermination des poids moléculaires des gaz, en prenant l'un d'eux, — l'oxygène, par exemple, — comme base, on obtiendra pour un même gaz des valeurs un peu différentes suivant les conditions de températures mme dé ns Le in À 7, PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE 159 et de pression dans lesquelles on aura opéré; dans certains cas, l'écart sur la valeur théorique dépasse 2 °/,. Exemple : anhydride sulfureux à 0°. En d’autres termes, pour utiliser les densités des gaz en vue de la détermination exacte et rigou- reuse de leurs poids moléculaires, et par suite des poids atomiques des éléments qui les constituent, il est indispensable de faire subir à ces densités une correction dépendant des conditions de tempéra- ture et de pression dans lesquelles on aura opéré. Nous sommes actuellement à même de fixer la valeur de cette correction par quatre méthodes différentes, utilisant des données expérimentales différentes, et — fait réellement digne d'attirer notre attention — ces méthodes de correction peuvent toutes être reliées à l'équation caractéris- tique de M. Van der Waals, relation fructueuse s'il en fut dans la science. L'équation de M. Van der Waals, rapportée au volume-unité : (1) (p+4) (F—D)={1+2) A—b) (4 Lot), fournit l'énoncé rigoureux de la règle d'Avogadro- Ampère. On en déduit, en effet”, qu'à la température : de et sous la pression de À atm. norm.”, les volu- D A mes de divers gaz contenant rigoureusement le même nombre de molécules sont entre eux comme les nombres l 1 Me + a) (—Db) A+) A—2)" (1+a" A" etc., les constantes a, b, a’, ', a", D", ete., se rapportant aux divers gaz considérés. Ces constantes étant beaucoup plus petites que l'unité (pour les corps gazeux à 0°, elles sont infé- rieures à 0,01), les nombres ci-dessus seront done assez voisins de l'unité. Si l’on désigne par L le poids d'un litre normal de gaz (c'est-à-dire considéré à 0°, sous 1 atm., h=0,1=—45°), on aura nécessairement entre le poids moléculaire M et le poids L la relation * : (2) M— Re (L+a) (1— 5)" Dans le système de litre-gr.-atm., eten rapportant les poids moléculaires à O°—32, la valeur la plus probable de R esl*: R— 22,412 litres. Pour fixer la valeur exacte du poids moléculaire 4 Vax Der Waars : Continulät, etc. (2e édit.), 4re partie, p: S5. — Guye : Journ. Ch. ph., 1905, €. IN, p. 321. ? C'est-à-dire 1 atm., au niveau de la mer (4 —0) et sous la latitude de 459 (, — 45e). 8 Guye et Frinerica : Loc. cit. # D. BERTHELOT : Zeils. f. Electro-Chem., 1904, t. X p. 621. d'un gaz dont on a déterminé la densité à 0", il faut donc encore connaître la valeur numérique du produit (1+a) (1—b). Plusieurs voies conduisent à ce résultat. 1. Méthode par réduction des éléments critiques à 0° el 1 atm. — Celle qui se présente la première à l'esprit consisterait à fixer les valeurs numéri- ques de a et de b au moyen de l'équation de M. Van der Waals. On sail que, d'après ce savant, les valeurs des coefficients à et » peuvent être déterminées numériquement lorsqu'on connaît les valeurs des constantes critiques du gaz : tempéra- ture critique T. et pression critique p.. Mais l'équation de M. Van der Waals n'est elle- même qu'une formule approchée, et l'expérience a démontré que les coefficients 4 et » d'un gaz, au lieu de rester constants, varient d'une façon appréciable avec la température et la pression. Ce n'est que tout récemment que l'on est parvenu à représenter ces varialions avec une exactitude suf- fisante pour satisfaire rigoureusement à la rela- tion (2) ci-dessus’. Si l'on désigne par & et } les valeurs que prennent les coefficients a et b à 0° et sous 4 atm. norm., la formule donnant le poids moléculaire exact devient : 3) M— D'où le nom de méthode par réduction des éle- ments critiques à 0° et 1 atm. donné à ce procédé de calcul. Le calcul s'effectue le plus simplement en subdi- visant les gaz en deux groupes, suivant que leur température critique est inférieure (gaz perma- nents) ou supérieure (gaz liquéfiables) à 0°. Pour les gaz permanents, on remplace la relation (3) par la suivante : (22,419 + mTe) L En m = 0,000.062.3. a) (1— = où Cela revient à poser (1+a,)(1—,)—=(1+a)(1—b) —0,900.002.10 T, en conservant l'expression géné- rale : 22,412 L DOTE. | Pour les gaz liquéliables, on se sert de la rela- tion (3) en caleulant 3, et b, par les formules : "\ 3/2 e—T\, : 2=a(r) FD; —b 1 —) (1 — Bpe), où 8—0.003.222.9. Dans toutes ces formules, a et b représentent les constantes de l'équation d'état, rapportées au vo- 1 Ps. A. Guxe : C. R., t. CXXXVIII, p. 1213, et t. CXL, p. 4221. Pour le mémoire détaillé, voir Journ, Chim. phys., 1905, t. III, p. 321. 760 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L’AZOTE lume-unité; ces constantes sont calculées au moyen des éléments T. et p. fournis par l'expérience. Sans insister davantage sur les détails, il est intéressant de noter (tableau V) les résultats obtenus avec les gaz dont les densités sont le mieux con- nues, en faisant, pour le moment, abstraction de l'azote et des gaz azotés, puisque le poids atomi- que de cet élément est précisément en discussion. TaBceau V. — Poids moléculaires par réduction des éléments critiques. O° (base) H2 Ar co CO NC NECIRRS 0: 32 2,0153 39,866 28,001 44,003 26,018 6,484 64,065 On déduit facilement de ces nombres un système de poids atomiques, qui se trouvent ainsi déter- minés par des observations exclusivement physico- chimiques, et chacun d’une facon indépendante. TagLeau VI. — Poids atomiques. Hydrogène Carbone Chlore de He... 40071 | de CO". A42,0011de HCI "135476 de CO? . . 12,003 Soufre de C°H?. . 12,002 Aryon de SO? . . 32,065 | Moyenne . 12,002] de Ar. . . 39,866 Les valeurs de ces mêmes poids atomiques, déterminées par les méthodes purement gravimé- iriques réputées les meilleures, sont : H CG S CL 1,0076 12,002 32,058 à 32,074 35,473 La concordance est certainement excellente ; on remarquera, en particulier, les nombres presque identiques trouvés pour le poids atomique du car- bone, au moyen des densités des trois gaz CO, CO* et C'H° (tableau VI). 2. Méthode des densités-limites.— Sil'on désigne par A; le coefficient moyen d'écart à la loi de Mariotte entre la pression p, = 1 atm. et la pression infiniment petite p, —0 atm., et par V, et V, les volumes de gaz correspondant à ces pressions, on démontre sans difficulté !, à partir de l'équa- ? En effet, la relation expérimentale qui exprime les écarts de la loi de Mariotte est : Pi Vi Pa 4) —11— (a == ® P:Vo A (Ps Po) L'équation d'état rapportée au volume-unité peut s'écrire : @) pr=(i+a) (2) (+ a) —p+ 2 +, qui devient, pour p,—=0 et t—=00: [Povo] = (1 + a) (1—2). D'autre part, dans la notation de M. P.=1et v,—1, et l'équation (1) devient: Van der Waals [PoVol =: —=(1+ a) (1—b). e. q. f. d. tion de M. Van der Waals, la relation suivante : 1 (4) TE) A5): On pourra donc substituer à la relation fonda- mentale (2) ci-dessus la suivante : (5) M—922,412L (1 — A4), et utiliser cette dernière pour le calcul exact des poids moléculaires. Nous venons de la déduire de l'équation d'état, dans laquelle elle est implicitement comprise; elle a été énoncée pour la première fois * sous forme d’une hypothèse que l’on peut formuler ainsi : La règle d'Avogadro-Ampère est une loi limites elle est rigoureusement exacte sous la pression zéro. Cette hypothèse nous apparaît donc aujourd'hui comme une conséquence de la formule de M. Van der Waals, à laquelle il m'a semblé préférable de la relier. Il est toujours utile, en effet, de réduire le nombre des hypothèses ulilisées en science. Ce mode de faire présente, d’ailleurs, un autre avantage sur lequel nous aurons l’occasion de revenir. L'application de la relalion (5) nécessite la con- naissance du coefficient Af. M. D. Berthelot à montré qu'en ce qui concerne les gaz permanents ce coefficient peut être considéré comme égal à celui qu'on mesure entre À et 2 atm.— Pour les gaz liquéfiables, le cofficient AŸ varie à mesure que la pression baisse; la valeur mesurée entre 1 et 2 atm. ne peut donc être employée directement; elle doit subir une correction, dont le mode de calcul a été aussi indiqué par M. D. Berthelot. Il semble, cependant, que cette correction n’est pas encore tout à fait suffisante; elle sera certaine- ment améliorée dans la suite; d'autre part, la détermination directe de la compressibilité sous des pressions voisines de zéro présente expéri- mentalement de très grandes difficultés; on peut se demander si ces difficultés ont toutes été sur- montées par les belles recherches de MM. Ramsay et Steele? sur les densités-limites de composés organiques à l'état de vapeur‘. En attendant, pour éviter loute discussion, je n'appliquerai la méthode ! Cette relation a été indiquée d'abord par Lord Rayleigh (Roy. Soc. Proc., 1892, t. LVI, p. 448) à propos du rapport des densités de l'oxygène et de l'hydrogène. Mais elle n'a réellement été appliquée d'une manière générale, et déve- loppée avec toutes ses conséquences, que par M. D. Ber- thelot (/oc. eit.) dans son Mémoire remarquable sur les gaz. 2 Ramsay et STeELE : Proc. Phil. Soc., 1903, t. XVDI, p. 492, et Zeit. phys. Ch., 1903, t. XLIV, p. 348. 3 Divers faits semblent indiquer que, pour les gaz dont la température critique est supérieure à 00, l'application pure et simple de la méthode des densités-limites conduit à des poids moléculaires un peu trop faibles. Voir Jaquerop et Pinrza : C. R., 1908, t. CXXXIX, p. 139; Guye et Pinrza : Ce R., 190%, t. GXXXIX, p. 677; Jaqueron et Scueuer : C. R., 4905, t. CXL, p. 1384. OL 2201 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE des densités-limites qu'aux gaz permanents, et m'eflorcerai de faire ressortir la parfaite concor- dance de ses résultats avec ceux de la méthode précédente. En effet, si les deux méthodes concordent, on a l'identité : 1 Ai = ——— (LH a) (1— 5) ” qui, vu la petitesse des termes différents de l'unité, se ramène à A4 — 26 — bo — a — b — 0,00000210 Tr, dans le cas de gaz permanents. Les données consignées au tableau VIT justifient l'exactitude de cette conclusion. TaBLEaAu VII. — Résultats de la méthode des densités-limites. (aÿ— b5) par les constantes AG (Jacquerod critiques # AË Ag Gaz (Chappuis){ (Rayleigh)? et Scheuer)% 052: » 0,0009% 0,00097 0,00095 H° — 0,00058 —0,00053 —0,00052 —0,00052 CO . » 0,00081 » 0,00084 Az0O. » » 0,00117 0,0010% A 0,000%3 0,00056 » 0,00074 Ar . » » » 0,00090 Il résulte de ces données que le facteur de cor- 1 tar) deux méthodes, concorde à quelques cent mil- lièmes près; c'est pour le bioxyde d’azote et l'azote que l'écart est le plus grand; même dans ce cas, l'écart n’est que de l'ordre du dix millième. Cela revient à dire qu'avec les mêmes densités que celles ulilisées pour établir le tableau V, la méthode des densilés-limites (formule 5) conduira pratiquement aux mêmes valeurs de poids molé- culaires et, par suite, aux mêmes poids atomiques que ceux qui sont consignés au tableau VI. rection 4 — A‘ ou » calculé par les 3. Méthode des densités gazeuses correspon- dantes. — Cette méthode se relie aussi à un théo- rème formulé par M. Van der Waals, à propos de la célèbre théorie des états correspondants. L'il- lustre physicien a démontré, en effet, qu'entre les densités d, et d, de deux gaz, déterminées dans des conditions correspondantes” de température T, et 4 Caarruis : Travaux el Mémoires du Bureau. int. des Poids et Mesures, 1903, t. VI. ? Loro RayceiGu : Phil. Trans. Roy. Soc. A., 1905, t, CCIV, p. 351. * Jaqueron et Scneuer : C. R., 1905, t. CXL, p. 1384. * Ces valeurs sont calculées avec les données critiques consignées au mémoire GUYE : Journ. de Chim. phys., 1905, t. I, p. 321. 5 On rappelle que les températures T, et T, sont corres- EL 2 : : T =T; de même, deux pressions sont ci C2 correspondantes si l'on pondantes si Papa: ad —— la Pe 761 T,, et de pression 7, et p., on a la relation (6 d _M Pa Tai “Al CRE EU M, et M, étant les poids moléculaires des deux gaz, Ta, Pa et T+, p leurs constantes critiques. En raison des conditions de correspondance, celte relation peut s’écrire : M, di _M Pi Te M, ° d,T 7) — 22 jen ——! (1) dd M pl ou bien F LEE ° Pa À un facteur constant près, 2 a 2 repré- ï D, sentent les densités gazeuses déterminées à T, et ?, pour le premier gaz et à T, et p, pour le second gaz, puis ramenées à (et à À atm. par les formules des gaz parfaits (lois de Mariotte et de Gay-Lus- sac). De là le théorème fondamental : Les densités des qaz, déterminées dans des con- ditions de température et de pression correspon- dantes, ramenées à 0° et à 1 alm. par les formules des gaz parfaits, sont rigoureusement proportion- nelles aux poids moléculaires de ces gaz. Ce théorème, dont la démonstralion n'a été indi- quée que récemment !, a été formulé il y a quel- ques années déjà par M. Leduc comme une consé- quence de ses recherches expérimentales sur les gaz”. Sa vérification directe constilue à proprement parler la méthode des densités gazeuses correspon- dantes. Malheureusement, les éléments de vérification sont peu nombreux ; à défaut de déterminations directes dans des conditions correspondantes, on peut utiliser les densités à 0° et sous 1 atm. lorsque l’on connaît exactement les coefficients de dilatation et de compressibilité des gaz considérés, pour les ramener à des conditions de température et de pression correspondantes. J'aurai l’occasion de mentionner plus loin quel- ques vérifications de ce genre; pour le moment, je me bornerai à signaler d’abord quelques cas parti- culiers intéressants. Le premier concerne le poids moléculaire de l'argon. Ses constantes critiques coïncident presque exactement avec celles de l’oxy- gène : Te pe L Oxygène 154,2 50,8 1,4290 ATEOD PEN 152,0 50,6 1,1802 De là résulle qu'à 0° el sous 1 atm. norm. les deux gaz sont dans des conditions correspondantes, de même qu'à toutes températures et pressions égales; on peut donc déduire le poids moléculaire 1 Pa. A. GUYE : C. R., 1905, t. CXL, p. 1386. 2 A. Leouc : Conférences du Laboratoire de M. Friedel, Paris, 1894. Recherches sur les qaz, Paris, 1898. 762 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE exact de l’argon du simple rapport des densités, ce qui donne : 1.7802 ATE=——927 T,1290 — 39,865. Par la méthode de réduction des éléments cri- tiques, nous avons trouvé (tableaux V et VI) : Ar = 39,866. La concordance ne laisse donc rien à désirer. Un second cas particulier est celui où les deux gaz comparés sont considérés aux températures auxquelles ils suivent rigoureusement la loi de Mariotte et la loi d'Avogadro-Ampère. M. D. Ber- thelot’ a démontré que cette température est égale à 2,45 T.; je la désignerai, pour abréger, sous le nom de température d'Avogadro. Dans ce cas, l’ap- plication du théorème relatif aux densités corres- pondantes se réduit à une formule très simple lors- qu'on connait les densités à 0°. Soient alors £ el les températures (centigrades) d’Avogadro pour les deux gaz, « et x! leurs coefficients moyens de dila- tation entre 0° et /'et entre 0° et /' sous la pression de 1 atm., Let L'Ile poids du litre normal des deux gaz, M et M' leurs poids moléculaires. On a alors évidemment la relation : Lin ue MÉR NEaTen 20 ee ei L A+ (ol — y) ll —(œ— 7) t]; + est le coefficient des gaz parfaits, pour lequel on peut adopter la valeur proposée par M. D. Berthelot: y —= 0,003.661.95 ou 0,003.662. Un troisième cas particulier est celui où ces gaz sont considérés à des températures très élevées, par exemple au-dessus de 1000°, pour des gaz comme l'oxygène et l'azote. Le calcul démontre que les écarts aux lois de Mariotte et d'Avogadro-Am- père ne représentent plus que quelques unités de l’ordre du cent millième; ils sont donc négligeables. Si les gaz ne sont pas dissociés à ces températures, le rapport direct des densités donnera, sans correc- tion, le rapport des poids moléculaires exacts. MM. Jaquerod et Perrot?, à partir des éléments expérimentaux relatifs à la détermination du point de fusion de l'or, ont trouvé pour densité de l'azote à 1067, rapportée à celle de l'oxygène prise égale à 16, le nombre 14,008. Nous reviendrons plus loin sur ce résultat. A. Méthode des volumes moléculaires. — Le principe des densités correspondantes a été vérifié par M. Leduc, au cours de ses travaux remarqua- bles sur les gaz. Les mesures de densités à toutes 1 D. Berraecor : Sur les thermomètres à gaz, Paris, Gauthier-Villars, 1903. Extrait des Mémoires du Bureau int. des Poids et Mesures, t. XIII. ? Jaquerop et Pernor : C. R., 1905, t, CXL, p. 1942. températures qu'exigerait la vérification directe de ce principe étant lrès compliquées, M. Leduc a pensé que la comparaison serait faite plus faci- lement en considérant tous les gaz à 0° et en tenant comple du volume occupé dans ces condi- tions par une molécule-gramme du gaz consi- déré. Ce volume ® doit, d’après la théorie des états correspondants, être pour tous les gaz une même fonction de T/T. et de p/p.; les études de M. Leduc sur les coefficients de compressibilité et de dilatation des gaz l'ont conduit à déterminer numériquement les constantes des formules qui permettent de calculer # lorsqu'on connait T. et p.. L'exposé de ces méthodes de calcul étant sans doute connu! par les études détaillées dont elles ont été l’objet, je me borne à signaler le fait que le système de poids atomiques adopté par cet | observateur pour satisfaire aux relations indiquées correspond presque exactement à celui qui se déduit des poids moléculaires obtenus par réduc- tion des éléments critiques à 0° ou par les densités- limites. Je les reproduis ci-après : H—14,0016; C—12,004; Cl— 35,410; 832,056. 5. Précision réalisable dans la mesure des densi- tés.— Les considérations qui précèdent démontrent que les facteurs de correction, résultant de l’appli- cation rigoureuse de la loi d’Avogadro-Ampère, peuvent être déterminés de plusieurs manières indépendantes les unes des autres, et que les valeurs ainsi obtenues concordent parfaitement entre elles aux erreurs d'expérience près. Pour juger dela précision réalisable par les métho- des physico-chimiques, il convient, enfin, d'être ren- seigné sur le degré d’exactitude avec lequel les den- sités des gaz peuvent être déterminées. La technique de ces manipulations s'étant considérablement per- fectionnée en ces dernières années, je me borneraï à mettre en regard les valeurs trouvées pour quel- ques gaz étudiés récemment par des observateurs différents : Tasceau VIII. — Poids du litre normal de quelques gaz déterminé par des observateurs différents. Gaz Leduc Rayleigh Morley Lab. Guye O2: M 2288 1,42905 1,4290 1,4292 (J et P) H?. . O0,08982 (0,08998)? 0,089873 » Az? 1,2503 1,2507 » » CO. 1,2501 1,2504 » » CO? . 1,9763 1,9769 ï 1,9768 (G et P) AZÆO. 1,9780 4,9777 » 1,9774 (G et P) SO? 2,9266 » Ramsay 2,9266 (J et P) AT... » 1,7802 1,7801 ) ‘ Lepuc: Loc. cit. Pour les comparaisons de valeurs numé- riques, ne pas oublier que cet auteur rapporte les valeurs de # à celle de l'oxygène prise comme unité. ? Lonp RayLeiGu (Loc. cit.) a reconnu que celle valeur est trop élevée. — Ê . d | LÉ COPIES » Si l’on lient compte du fait que les détermina- tions ont été exécutées dans des lieux différents, souvent par des méthodes différentes, presque toujours sur des gaz de provenance différente, on reconnaitra que la concordance est très salisfai- sante. Les écarts extrèmes sont de 1/4.800 pour 0°, 1/4.200 pour Az° et CO, 1/3.300 pour CO et Az°0. Dans ces conditions, on peut admettre, sans être laxé d’optimiste, que les valeurs moyennes doivent êlre exactes à 1/5.000 au moins, souvent même à 1/10.000. D'autre part, les facteurs de correction employés pour le calcul des poids moléculaires exacts des gaz concordent souvent à 4/10.000 près, lorsqu'on en fixe la valeur par diverses méthodes. La précision obtenue pour les trois déterminations physico-chimiques du poids ‘atomique du carbone à partir des densités de CO, C?H? et CO*, avec un écart extrème de 1/6.000, est la confirmation de ces déductions (tableau VI). Revenant à l'azote, la détermination exacte de la seconde décimale de son poids atomique, à une unité près, comporle seulement une précision de 4/1.400; si l’on concède aux méthodes physico- chimiques une précision de 1/5.000, l'incertitude sur le poids atomique de l'azote ne sera que de 0,003. On peut donc logiquement conclure que les méthodes physico-chimiques modernes, pour la détermination des poids moléculaires des qaz et des poids atomiques de leurs constituants, com- portent une précision suffisante pour fixer la valeur exacte de la seconde décimale du poids atomique de l'azote. III Notre seconde thèse étant démontrée, nous ävons à exposer les résultats relatifs au poids ato- mique de l'azote, auxquels conduisent les diverses méthodes que nous venons d'analyser. Rappelons d'abord les chiffres auxquels se sont arrêtés suc- cessivement les divers auteurs : M. Leduc (volumes moléculaires, 4897) . . 14,005 M. D. Berthelot (densités-limites, 1898) : PÉDAT TMC AE M re ee. 14,007 — NC Po EE TOR 14,000 MM. Guye et Friderich (densités-limites, 1900) : ASDAEGEE AE AZ M REA EE à LL 14,005 Lord Rayleigh (densités-limites, 1905) : 1 REMAMAES VON ES ORAN 14,008 = APAORSES e : en CAS ITS M. Guye (réduct. des éléments critiques, 1905) : OA EUA TOR AZ NE EL. DENON . 14,007 — ÉCAUR LEP RO RR LEERE 14,006 a ACER Net ee 14,009 M. Gray (densité-limite, 1905) : SALUT A7 OEM Lt 14,006 ! La densité du protoxyde d'azote admise par M. D. Ber- thelot est trop élevée: la valeur 14,000 doit être corrigée en 13,998 (voir Guye et Psnrza : C. R., 1904, t. CXXXIX, p. 671). PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE 763 La moyenne des déterminalions de 1905, qui sont les plus précises, — en excluant la valeur fournie par la densité limite de Az°0, évidemment trop basse, est de Az — 14,007. Les écarts entre ces diverses déterminations sont dus, en partie du moins, aux choix différents qui on! élé faits des diverses mesures de densités, en partie également au fait que l’on ne s’est pas toujours placé dans les conditions réduisant au minimum la correction à apporter à la densité des gaz, telle qu'elle résulte de l'expérience. Voici comment ces conditions sont le réalisées : Lorsqu'on compare les densités L et L' de deux gaz quelconques, le poids moléculaire cherché M sera relié au poids moléculaire connu M' par une relation de la forme : mieux en ES) D nU+e) dans laquelle (1 +2) et (1%) représentent les facteurs de correction calculés par l'une ou l’autre des quatre méthodes que nous venons de décrire; on pose, en outre, pour abréger : Re Vian LE x Ï Si, au lieu de comparer tous les gaz à l’un d'eux pris comme type (l'oxygène), on limite les compa- raisons à des gaz pris deux à deux, de telle façon que, pour chaque paire de gaz, les conslantes cri- tiques T, et p. soient voisines ou tout au moins du même ordre de grandeur, il est évident que le facteur (14e) sera très voisin de l'unité. C'est donc dans ces conditions que l’on obtiendra certainement le maximum de précision, et il y a d'autant plus d'intérêt à chercher à les réaliser que la théorie des états correspondants, sur laquelle s'appuient en définitive toutes les méthodes physico-chimiques, n'est pas l'expression absolument rigoureuse d’une loi physique‘; cela revient à dire que le calcul physico-chimique du poids moléculaire d’un gaz représente encore un calcul approché: il y a donc grand intérêt à se placer dansles conditions donnant le maximum de précision. On est d'autant plus fondé à considérer comme exactes les corrections déduites de cette théorie que celles-ci seront elles- mêmes plus faibles. Ce mode de faire présente un aulre avantage : il permet de mettre en évidence la valeur numérique du facteur de correction (1 €) obtenue par chacune des méthodes physico-chimiques, et de bien appré- cier le degré de concordance avec lequel il est déterminé. “ Ke. Meyer Byerum : Zeils. f. phys. Chem., 1900, t. XXXIL pa 764 Voici les résultats auxquels on arrive ainsi avec les gaz azotés : 1. Rapport corrigé des densités de lazote et de l'oxygène. — Le rapport des densités de ces deux gaz, tel qu'il résulte des données directes de l’expé- rience à 0° et sous 1 atm. norm., est : ao See : Jo 16 Er 14,003 (Rayleigh); 165 — 14,001 (Leduc). On peut donc adopter une valeur unique moyenne : ! 6É— 14,002. D'autre part, le facteur de correction, déterminé par les diverses méthodes physico-chimiques, a les valeurs suivantes, en regard desquelles sont inserits les poids atomiques de l'azote obtenus en corri- geant le chiffre brut 14,002 : TABLEAU IX. Valeurs du facteur de correction et poids atomiques de l'azote qui s’en déduisent'. Méthodes Facteur de correction Az 1. Densités-limites à 00 (D. Ber- THelGt) CRE ET 1,00038 14,008 Densités-limites à 0° (Ray- ME 5 n°0 5 6 sat 1,00038 14,008 2, Réduction à 0° des éléments critiques (Guye). . . . . .< 41,0004% 14,008 0 3. Densités correspond. Az? ee 000 O8 (CUVE) MCE 1,00085 14,014 Densités corresp. températ. Avogadro (Guye) . . . . . 1,00061 14,014 Densités corresp. vol. molé- culaires à 0° (Leduc) - 41,000% 14,008 4. Densités à 10670 (Jaquerod et PERTOUIERR- Te 1,00043 14,008 MONENNE MER ET 1,00050 X 14,002 — 14,009 2. Rapport corrigé des densités des gaz A et CO. — Le rapport direct des densités, calculé à partir des données d'expérience en. posant CO — 28,002, est : ! 98 28,006 (Leduc). 24,002 2 — 98,008 (Rayleigh), 28.002 1 Guye : C. R., 1905, t. CXL, p. 1386. J'ai jugé utile de mettre en regard des valeurs du facteur de correction (1 + e), tel qu'il résulte des méthodes que j'ai développées, celles déduites des Mémoires déjà cités de M. Leduc, de M. D. Berthelot et de Lord Rayleigh; toutes ces valeurs sont obtenues à partir d'éléments expérimentaux différents. Pour les densités des gaz, signés au tableau VIT. on a utilisé les nombres con- 31° 1000 50% PT indi- quent que les conditions correspondantes de. température et de pression, pour les deux gaz considérés, ont été choisies : pour l'azote, 370 et 503 millimètres; pour l'oxy- gène, 1000 et 760 millimètres. Je rappelle enfin que les symboles Az = PH.-A. GUYE —- NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE Vu la concordance des résultats, on peut adopter “4 une valeur moyenne unique : 28 00 — 9, 007. Les valeurs du facteur de correction, déterminées par les diverses méthodes, sont consignées au tableau suivant, avec indication : 4° du poids molé- culaire M de l'azote en résultant; 2° du poids ato- mique Az correspondant : TABcEau X. — Valeurs du facteur de correction et poids atomiques de l'azote qui s’en déduisent. . Facteur Méthodes de correction M AZ Densilés-limites (D. Berthelot) 1,00008 28,009 14,005 $ — (Rayleigh) . . . . 1,00025 28,014 14,007 M Red. à 0o élém. crit. (Guye) . . . . 1,00017 28,012 14,006 ; Dens. cor. A, CO + (Guye). 1,00014 928,011 14.006 — temp. Avogadro (Guye). 1,0001% 28,011 14,006 — vol. mol. 0° (Leduc) 1,0001 28,010 14,005 Moyenne "7 1,00015 28,011 14,006 L'incertitude de + 0,002 sur le poids atomique du carbone (tableau VI) se réduit à + 0,001 sur le poids atomique de l'azote. 3. Rapport corrigé des densités des gaz AO et CO. — Le rapport direct des densités, rapporté à L CO*— 4,002, soit R = 44,002 —; pe mentalement les valeurs suivantes : a donné expéri- 44,040 (Leduc); 20 (Rayleigh); 44,017 (Guye et Pintza). La valeur moyenne est R — 44,093. Avec les gaz liquéfiables, j'ai déjà indiqué que la méthode des densités-limites ne donne pas la même exactilude qu'avec les gaz permanents; on peut donc en faire abstraction et se borner à calculer la valeur du facteur de correction par la méthode des « densités correspondantes et par celle de réduction à 0° des éléments critiques, d’où le tableau ci-après (M= poids moléculaire corrigé de Az°0) : TABLeAu XI. — Valeurs du facteur de correction et poids atomiques de l'azote qui s’en déduisent. È Facteur È Méthodes de correction M Az : F Dens. corr. Az? 0 GO? un 1—0,00033 44,011 14,006 M Red. des 6lém..crit. 1—0,00023 44,015 414,008 ÿ MOYenne TC CR 14,007 i L'incertitude + 0,002 sur le poids atomique du carbone se réduit encore, dans ce cas, à + 0,001 M sur le poids atomique de l'azote. j 4. Rapport corrigé des densités des qaz AzO et À. — M. Gray‘ vient d'indiquer une valeur préliminaire de la densité du bioxyde d’azote. On -en déduit pour poids du litre normal L —1,3402, valeur confirmée par des expériences exécutées actuellement dans mon laboratoire avec la collabo- ralion de M. Davila. Ea prenant pour l'oxygène L —1,4290 (moyenne de toutes les mesures), le rapport direct est Celle valeur n'étant pas définitive, le facteur de - correction a été calculé seulement par deux métho- des; il est indiqué au tableau suivant, avec les … poids moléculaires M de AzO et les poids atomiques | Az qui s'en déduisent : Faisceau XII. — Valeurs du facteur de correction et poids atomiques de l'azote qui s'en déduisent. Facleur Méthode de correction M AZ Densités-limites (Jaquerod et FÉNOIEERREAENENERRSE 1—0,00020 30,006 14, Red. à 0° des élém. crit. (Guye). 1—0,00008 30,010 14 MONEUDE Eee 14. >. liésumé des valeurs physico-chimiques du « poids atomique de lazote*. — Les tableaux précé- dents donnent lieu à la récapitulation suivante des . moyennes: Az RapportAz="O2!{(6/valeurs)--: .- - . .…. 14,009 & — A2: CO (6 valeurs) [C—12,002]. . 14.006 — Az°0 : CO® (2 valeurs) [C—12,002]. 14,007 — AD ON valeurs er. 14,008 Moyenne générale. . . . . 14,008 La moyenne générale de ces quatre rapports de . densités gazeuses, corrigées par les méthodes . physico-chimiques, est donc ) Az — 14,008, … l'écart extrême étant seulement de 0,003. En consignant cetle valeur finale, que l'on peut - arrondir provisoirement à 14,01, je tiens à rappeler — encore que la méthode des densités-limites n'a élé — appliquée qu'aux gaz permanents. — ! Gray: Proc. Chem. Soc. Londres, mai 1905, t. XXI, p. 156. —…. * Pour être complet, il faudrait faire encore intervenir les résultats obtenus avec le gaz ammoniac. D'après les … données de M. Leduc, on déduirait un poids atomique de “lazote voisin de Az — 14,04. Il m'a done semblé nécessaire de reviser toutes les constantes de ce gaz : densité, com- pressibilité, constantes critiques. Pour la densité, M. Pintza “et moi avons trouvé une différence considérable avec le nombre donné par M. Leduc (1/700 environ). MM. Jaquerod et Scheuer viennent de refaire la compressibilité (C. Æ., “+. CXL, p. 1384). Il reste donc à déterminer à nouveau les constantes critiques avant de se prononcer définitivement … Sur la valeur du poids atomique de l'azote dérivée de la den- _ sité du gaz ammoniac. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. à PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE 765 Cette réserve faite, on ne peut qu’'êlre frappé de la concordance des résultats, d'autant plus remar- quable que les éléments expérimentaux servant à calculer le facteur de correction n'ont générale- ment pas été déterminés par les mêmes observa- teurs que ceux auxquels on doit les valeurs des densités. IV De nouvelles méthodes gravimétriques pour le contrôle du poids atomique de l'azote peuvent être substituées aux méthodes classiques. Elles per- mettent déjà de garantir une unité de la seconde décimale du poids atomique de l'azote et confirment les résultats des valeurs physico-chimiques. Après avoir établi que les méthodes gravimé- triques classiques ne comportent pas actuellement une précision suffisante pour délerminer le poids atomique de l’azote à une unité près de la seconde décimale, après avoir mis, d’autre part, en lumière la remarquable concordance des méthodes physico- chimiques appliquées à l'azote, j'ai pensé que la conviction des chimistes ne serait complète, au sujet du résultat de ces dernières, que lorsqu'on aurait retrouvé la valeur Az — 14,01 par des mé- thodes purement gravimétriques. Les méthodes classiques de Stas ne présentant pas le degré de précision voulu, il était indiqué de reprendre l'étude de celte question par des pro- cédés absolument nouveaux, permettant de relier le poids atomique de l'azote aussi directement que possible à celui de l’oxygène. En d’autres termes, il fallait revenir à des méthodes simples et ration- nelles, en écartant systématiquement toutes les méthodes indirectes. L'histoire de la détermination des poids atomiques est, d'ailleurs, précieuse en enseignements de ce genre ; il suffira de rappeler ici la découverte, par Dumas et Stas, (1841, d'une erreur de 2°/, sur le poids atomique du carbone, tel qu'il avait été fixé par Berzelius. La mesure exacte de deux rapports simples, — C : CO* et CO: CO*, — par la méthode de de Saussure, a été plus concluante que les très nombreuses analyses de composés organiques, exécutées antérieurement par les chimistes les plus réputés de leur Lemps. Ainsi posé, le problème revenait à tenter l'ana- lyse exacte des composés oxygénés de l'azote, que les meilleurs auteurs ont généralement regardée comme inexéculable en lant qu'expérience de pré- cision. Les difficultés que l’on rencontre à préparer ces gaz à l’état de pureté sont, sans doule, la prin- cipale cause pour laquelle aucune tentative de ce genre n'a élé effectuée jusqu'à présent. Les recher- ches entreprises dans mon laboratoire depuis 1902 pour essayer de combler cette lacune ont démontré que ces difficultés sont sérieuses, mais non insur- 114 lo 766 montables, surtout avec les progrès réalisés dans la technique relative au maniement des gaz. Les résultats déjà obtenus, il est vrai à la suite de nombreuses expériences infructueuses, conduisent à des nombres absolument concluants, qui con- firment les valeurs physico-chimiques. Dans ces conditions, il ne peut faire l'objet d'aucun doute, aussi bien dans lesprit de mes collaborateurs que dans le mien, que les perfec- tionnements qui pourront être apportés dans la suite aux méthodes nouvelles que je vais décrire ne feront que resserrer davantage la concordance Fig. Le) PH.-A. GUYE -— NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L’AZOTE teneur de cet oxyde en azole est plus élevée. La troisième s'appuie sur ce fait digne de re- marque que la discussion des causes d'erreurs des dispositifs expérimentaux adoptés lend à prouver que la valeur du poids atomique de l'azote ainsi obtenu doit être plutôt plus forte que trop faible. Vu la nature de la question controversée, ce point avait son importance. Le choix du protoxyde d’azole élant arrêté, son analyse a été exécutée de deux façons : a) par' pesée, b) en volumes. Les premières expériences ont été faites en collaboration avec M. Bogdan'; MM. Ja- 1. — Appareil pour l'analyse gravimétrique du protoxyde d'azote. — A, tube contenant du protoxyde d'azote condensé dans le charbon; B, tube de verre renfermant une spirale de fer; C, raccord en verre rodé: R, robinet; D, tube à mercure. des valeurs physico-chimiques et gravimétriques du poids atomique de l'azote. Après divers tätonnements, nous avons abordé en premier lieu le problème de l'analyse exacte du protoxyde d'azote Az?0. Ce choix a été motivé principalement par trois ordres de considérations : La première est inspirée du fait que la détermi- nation de la densité exacte de ce gaz par des obser- vateurs différents a donné des résultats concor- dants ; c'était une présomption favorable sur la possibilité d'obtenir ce corps à l’élat de pureté. La seconde est tirée de la haute teneur en azote du protoxyde d’azote, la plus élevée parmi les composés oxygénés azolés ; à précision égale, le poids atomique de l’azote déduit de l'analyse d'un oxyde d'azote est d'autant plus certain que la querod et Bogdan ont exécuté, d'autre part, l'ana- lyse en volume ?. 1. Analyse par pesée du protoxyde d'azote. — Cette analyse a été effectuée en décomposant par le fer incandescent un poids donné d'oxyde d'azote; l'augmentation de poids du fer donnait le poids d'oxygène contenu. Il serait trop long d'entrer ici dans tous les détails de l'expérience; je me bor- nerai à en signaler quelques traits caractéristiques. Pour éviter les causes d'erreur dues à la pesée ! Guye et Bocpan : C. R., 1904, t. CXXX VIII, p. 1494. ? JaqueroD et BoGpan : C. H., 190%, t. CXXXIX, p 49. L'exposé complet des expériences relatées dans ces notes fera l'objet de Mémoires détaillés qui paraitront prochaine- ment dans le Journal de Chimie physique. PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L’AZOTE de grands ballons, le »rotoxyde d'azote a été pesé à l'état condensé dans le charbon; on peut ainsi opérer avec des appareils de petit volume (lube A de la figure 1). La décomposition du proltoxyde d'azote a été effectuée dans un appareil (B), formé essentielle- ment d'un tube de verre à l’intérieur duquel se trouve une spirale de fer soudée, par ses deux ‘extrémités, à deux bornes de platine traversant le verre; ce tube est muni de deux tubulures laté- rales, à robinets tenant parfaitement le vide. Avant l'expérience, le tube à spirale de fer avait été complètement purgé d'air et pesé vide. L'analyse du protoxyde d’azote consistait à faire passer très lentement sur la spirale de fer, portée à l’incandescence (rouge vif) par le courant électrique, le gaz Az°0 dégagé 167 Le poids moyen d'oxygène pesé étant O gr. 4 environ, ce qui correspond à 4 gr. 1 de protoxyde, | les erreurs de pesée sont, si elles s'ajoutent, | 4/4.000 1/11.000 —3,4/10.000 et si elles se com- pensent 1,6/10.000, soit en moyenne 2,5/10.000. L'erreur possible AAz en résultant sur le poids atomique de l'azote sera donc très ap- prôximativement : La conduite de ces expériences esl très délicate. Nous avons eu de nom- breux insuccès; aussi avons-nous cher- ché, M. Bogdan et moi, à donner à ce procédé d'analyse une forme plus pré- cise. À la suite de divers essais, nous du tube à charbon. croyons avoir trou- Au début de l’ex- périence, le raccord C en verre rodé avail été complète- . ment purgé d'air. À la fin de l'expé- rience, après avoir fermé le robinet R, on faisait le vide dans l'appareil B, en reliant la tubu- lure inférieure à la pompe à mercure et en continuant à chauffer la spirale de fer, pour éviter la fixation de l’azote à l'état d'azoture de fer. Toutes les pesées ont été effectuées avec des contre- poids de même verre et très sensiblement de même volume. Pour les détails, je renvoie au Mémoire complet, me bornant à transcrire ici nos résultats : Fig. 2. — AA!, ampoule de verre contenant une spirale de fer; EBM, appa- reil manométrique à mercure: R, R', robinets. Tasceau XIII. — Poids atomique de l'azote déduit de l'analyse gravimeétrique du protoxyde d'azote. Protoxyde d'azote Oxygène Poids atomique Az 1,1670 0,4242 14,009 0,9498 0,3453 14,005 0,8652 0,3145 14,008 1,2247 0,4455 13,992 1,202 0,5159 14,023 Moyenne 0-7 14,007 — Appareil pour l'analyse volumétrique du protoxyde d'azote. vé un mode opéra- toire plus parfait que le précédent. Il consiste à disposer une spirale de fer, chauffable quement, dans un récipient de verre muni d'un seul ro- binet rodé; on pèse d'abord cet appareil vide d’air, puis rem- plide protoxyded'a- zote; on porte en- suite la spirale à l’incandescence, laisse refroidir, fait de nouveau le vide et pèse une troi- sième fois. On a électri- ainsi tous les élé- ments pour le cal- cul du poids atomique de l'azote. Avec un appareil d'essai, de pelites dimensions, contenant seulement 0 gr. 4 de pretoxyde d'azote, on a obtenu les nombres suivants : Az 14,00 14,03 13,98 Moyenne. . . 14,004 L'erreur possible sur le poids atomique de l'azote, résultant de l'incertitude sur la pesée de l'oxygène (0 gr. 1450 environ) et du protoxyde correspondant, est : AAZ — + 0,015. 768 PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE Bien que nous soyons presque à la limite de la précision recherchée (une unité de la seconde déci- male du poids atomique de l’azote), il n'y a pas de conclusion à tirer pour le moment de ce résultat préliminaire. Ces expériences devront être reprises avec un appareil définitif de plus grandes dimensions; la construction a présenté jusqu'à présent d'assez grandes difficultés. 2. Analyse en volume. — Le dispositif employé par MM. Jaquerod et Bogdan est représenté par la figure 2. Une ampoule de verre AA’, contenant une spirale de fer analogue à celle qu'on utilise pour l'analyse par pesée, est en relation avec un appareil manomé- trique à mercure EBM, portant en E un repère, au niveau duquel on peut amener le mercure, de facon à opérer à volume constant. L'’ampoule, étant remplie de protoxyde d'azote, est entourée de glace ; la pression initiale est alors mesurée. On enlève ensuile la glace, décompose le protoxyde par le courant électrique en porlant la spirale au rouge blanc. Après refroidissement, on relève la pression de l'azote à 0°, pression qui est un peu plus élevée que la pression initiale. Toutes corrections faites pour la compressibilité des gaz et les différences de température de l’espace nui- sible, l'excès de pression, ramené à une pression initiale de 768 millimètres de mercure, a été trouvé égal aux valeurs suivantes : TaBLEeAUu XIV. — Résultats de l'analyse du protoxyde d'azote en volume. Pressions ramenées à 0° - a Augmentation Az?0 Az? pour 760mm 145,93 151,37 5,60 164,90 770,29 5,30 767,172 113,26 5,43 362,97 168,49 5,45 Moyenne terre re nas Il à été reconnu ultérieurement que la moyenne 3,44 devait subir une petite correction du fait de la diminution de capacité de l'’ampoule due à la transformation d'une partie du fer de la spirale en oxyde de fer. Celle correclion ramène le nombre 5,44 à 5,21 millimètres. Le rapport de volume des deux gaz Az? :A70 est donc A7? 765.21 100686. AZÆ0 — 160, EL Les valeurs extrèmes sont 1,00707 et 4,00667 ! Par suite d'une erreur typographique, le nombre inséré dans la note aux C. À, a été imprimé 5 au lieu de 5,#4. comportant un écart maximum de 4/10.000 seule- ment, auquel correspond probablement sur la moyenne une incertitude inférieure à 1/5.000. Adoptant pour densilés des gaz azote et pro- toxyde d'azote la moyenne de loutes les valeurs trouvées, on en déduit que : ATEN AZ 0 PESTE EE SR ETES Contient: 1,0068 L. Az?, pesant 1,25045 X 1,00686. 4,25903 Et, par différence, un poids d'oxygène. . 0571869 PE CT | 0. RD D'où : 161,25903 ÉD SES AN ES 2 U, 1869 — 1015 BE En admettant, avec MM. Jaquerod et Bogdan, une incertitude de 1/10.000 sur les densités de A7? et Az°O, et de 2/10.000 sur le rapport en volume, l'erreur sur le poids atomique de l’azote serait de 1/10.000 si ces causes d'erreur agissent loutes dans le même sens, et de 1,7/10.000 si elles se compensent le mieux possible, soit, en moyenne, 4,4/10.000. L'erreur possible AAZ en résultant sur le poids atomique de l'azote sera Sanaa PS halles dt Mn ae Et, MX AA TT 600 = + 0,0067. Fibre Les deux méthodes — analyse bar pesée et ana- lyse en volume — présentent done, dans les condi- | tions où elles ont été exécutées, une précision suflisante pour déterminer la seconde décimale du poids atomique de l'azote. 4 Le résultat auquel nous avons été conduits vient, M d’ailleurs, d'être confirmé par l'analyse complète M d'un second oxyde d'azote, le bioxyde, exécutée par M. Gray. Dans sa communication préliminaire ?, cet auteur annonce qu'il a effectué l'analyse com- plète de ce gaz en fixant l'oxygène sur le nickel et condensant l'azote sur le charbon refroidi à la température de l'air liquide ; ce procédé présente donc une grande analogie avec ceux qui ont été employés dans mon laboratoire pour l'analyse du protoxyde d’azote. La moyenne de six expériences conduit M. Gray à la valeur : Fa é 2 Az — 14,006, qu'il déclare « probablement un peu trop faible ». Rapprochant enfin les moyennes physico-chi- miques et gravimétriques, on est conduit à la réca- pilulation qui suit (Lableau XV) : 1 Dans leur note aux C. 2, MM. Jaquerod el Bogdan indiquent 14,019; ce nombre ne tient pas compte de la variation de volume de l'ampoule par la formation d'oxyde de fer. * W. Gray: Loc. cit: Vds 1 | TD AT Tagceau XV. — Récapitulation générale. A. Méthodes physico-chimiques. AZ Rapport Az : O?(6 valeurs). . . . 14,009 — Az® : CO (6 valeurs). . . . 14,006 -- Az?0 : CO® (2 valeurs 14,007 — . AzU: 0° (2 valeurs). + . . 44,008 Moyenne physico-chimique (4 rap- POLES TRE RE nr ados 14,00$ B. Méthodes gravimétriques. Analyse par pesée de Az?0 (5 exp.). 14,007 (G et B) — en volume de AZ?0 (4 exp.). 14,015 (J et B) — par pesée de AzO (6 exp.). 14,006 (Gray) Moyenne gravimétrique (3rapports). 14,009 — DONÉLAIE AE UE 14,0085 Ou très vraisemblablement . . . . 14,009 En présence d’un accord aussi complet entre les moyennes des deux groupes de méthodes, qui n'utilisent que des rapports directs à l'oxygène ou à des composés relativement riches en oxygène, il est certainement logique de renoncer à l'an- cienne valeur Az — 14,04 ou 14,055 des expériences de Stas, pour adopter, ou la moyenne ou, à défaut, le nombre arrondi : Az—14,01, ment. On peut même employer la valeur Az — 14,00 que de nombreux chimistes ont continué à utiliser ; l'erreur ainsi commise est inférieure à celle trouvée récemment par M. Richards sur le poids atomique du sodium. \} Les travaux récents conduisent indiscutablement à reviser le poids atomique de l'azote, el — fait digne de remarque — dans un sens qui le ramène presque à la valeur que Marignac, dès 1843, avait - considérée comme la plus probable *. Cette revision entraîne avec elle une conséquence importante sur laquelle je crois nécessaire d'attirer volre altenlion. Si les méthodes employées par Stas, ses devan- … ! MakiGNaAG : (Œuvres complètes, L. 1, p. 89. Les résultats calculés dans le système O0 —16 étaient les suivants : Rapports Az DONNE A ZONE Lee 13,006 RONA AZ OR EC 14,030 AE CINVA OENRR RER TEE T TE 14,025 «que les deux autres et propose d'adopter la valeur -arrondie _ Az—14,00. 5 qui ne diffère du précédent que de 1/14.000 seule- | La moyenne est Az—14,02. Marignac ajoute que la pre- | …mière détermination mérite, selon lui, plus de confiance | PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE 769 ciers ou ses continuateurs ne comporlent pas aujourd'hui une précision suffisante pour per- meltre de garantir la seconde décimale du poids atomique de l'azote, il n'en est pas moins vrai que. sur l’ensemble, la moyenne de ces très nombreuses expériences est voisine de Az — 14,04: les valeurs extrêmes de toutes les moyennes sont, d'après M. Clarke (1897) : Az — 14,017 et Az — 14,053. | D'après les lois des grands nombres, ce résultat n’est compatible avec une valeur exacte Az — 14,009 | ou Az — 14,01 que si les poids atomiques consi- dérés comme connus, par les méthodes anciennes, sont en moyenne un peu trop élevés: je dis « un peu », car le calcul démontre que des erreurs très faibles sur ces poids atomiques se multiplient par des facteurs assez considérables lorsqu'on passe à l'azote. Une erreur de ce genre vient, dans tous les cas, d'être constatée pour le sodium, dont le poids atomique, tel que Slas l'a déterminé, Na — 23,043, est ramené, par les lravaux de M. Richards, à Na — 23,008 (pour Ag — 107,93) ou Na — 23,006 (pour Ag— 107,92). Il est donc du plus haut intérêt que ce travail de revision générale soit poursuivi d'une façon absolument complète. On peut, d’ailleurs, prévoir que, si l’on est amené, au cours de ces recherches, à relever un peu les valeurs de quelques poids atomiques, ainsi qu'on l'a trouvé récemment pour le chlore et l'iode, d'autres poids atomiques devront être abaissés à peu près d'autant. ; Quoi qu'il en soit, on peut entrevoir dès aujour- d'hui l'abaissement du poids atomique de l'argent par un nouveau cycle de calculs dont il est utile d'indiquer le principe et les premières applications. Lorsqu'on veut fixer la valeur d’un poids ato- mique, on se sert d’un rapport gravimétrique entre | le poids atomique cherché et un poids atomique | supposé connu. Pour ce dernier, on s'adresse géné- ralement à l'un des poids atomiques du cycle de Stas ct l'on ne se donne même pas la peine d'en discuter la précision. Ces derniers étant reliés à l'oxygène par trois rapports atomiques (sauf l'argent, qui l'est par deux), on oublie que leur exactitude ne peut dépasser +3/10.000 de leur valeur (2/10.000 pour l'argent) et que le poids atomique cherché, qui résulte d’un quatrième rapport gravimétrique, n'est exact qu'à + 4/10.000, soit à 1/2.500 ; néanmoins, la plupart des auteurs calculent, par exemple, des poids atomiques Lels que ceux de l'or (206,960), du mercure (200,045), du platine (194,917, ele.. avec trois décimales, soit avec une précision de —1/20.0000! Grâce aux méthodes physico-chimiques, on peut concevoir aujourd'hui un procédé de calcul beau- coup plus logique et beaucoup plus rigoureux. pro- 170 cédé qui consiste à ne considérer comme exacte- ment connus que les poids atomiques déterminés d'une facon concordante par des méthodes physico- chimiques, d'une part, et par des rapports gravi- métriques directs à l'oxygène, d'autre part. Actuellement, trois poids atomiques satisfont à cette double condition : ce sont ceux de l'hydro- gène, du carbone et de l'azote, dont les valeurs C—12,002; Az — 14,009; H = 1,0076 ; ainsi déterminées concordent à 1/10.000 près. Il est à espérer que des travaux complémentaires en augmenteront rapidement le nombre et qu'on pourra bientôt joindre à cette liste ceux des éléments S, Cl, P. Quoi qu'il en soit, restons-en aux trois éléments ci-dessus; nous pouvons, dès lors, reprendre les rapports gravimétriques déterminés autrefois pour relier les éléments C, Az, H à l'argent et les utiliser pour résoudre le problème inverse, c’est-à-dire pour fixer le poids atomique de l'argent. Les valeurs numériques de ces rapports gravi- métriques ont été calculées avec beaucoup de soin par M. Clarke’, en traitant par la méthode des moindres carrés les données expérimentales des | divers observateurs. Pour une première application, nous pouvons nous contenter de ces valeurs. Avec ces données, on établit alors les rapports suivants : 1° Z'apport Ag: AgAzO*. D'après les expériences de Penny, Marignac, Stas et de M. Hardin (30 déterminations) : 100 p. Ag — 157,419 p. AgAzO®. En posant Az0'— 62,009, on a : 62,009 7.882 51.419 AUB8S- 2° apport Ag:CH'CO’Ag (acétate d'argent). D'après les expériences de Liebig et Redten- bacher, Mariguac et Hardin (20 déterminations) : 100 p. CHCO?Ag = 64,636 p. Ag. En posant CH°.C0*— 59,027, on a : 64,636 Ag — 59,027 - È X 35,364 — 107,886. 3° P'apport Ag : C'H°O?Ag (benzoate d'argent). D’après les dix déterminalions de M. Hardin : 100 p. C'HSO*Ag = 41,125 p. Ag. ‘ Recalculations of the atomic weights, 1897, Washington. PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE En posant C'H°0?—121,052, on a : 125 Ag — 121,052 X 83 ST — 107,888. Récapitulant, on a : Tapceau XVI. — Poids atomique de l'argent déduit des dernières recherches. Poids atomique Ag RepporthATEPASAZO 107,882 SATA ICHECO AE CCE 107,886 = MURS NCTHSOrA STONE 107.888 MOVERDE UFR 107,885 Ce résultat appelle quelques remarques. Tout d'abord, on reconnaitra que trois méthodes indépendantes pour fixer un même poids atomique ont rarement — pour ne pas dire jamais — donné un tel degré de concordance, mème en faisant la part de ce que ce résultat peut avoir de fortuit. L'écart extrême est, en effet, de 6/100.000 à peine, alors qu'entre les diverses méthodes de Stas, cet écart est de l’ordre du 1/5.000. En outre, il aurait suffi de prendre C—12,001 au lieu de C—12,002 pour ramener les trois nombres ci-dessus à 107,882. 107,883, 107,882. En second lieu, il est à remarquer que le premier rapport est presque un rapport direct à l'oxygène, le groupement Az0O', supposé connu, contenant environ 76 °/, de cet élément. Bien plus, l'écart extrème des diverses valeurs obtenues pour le poids atomique de l'azote est de 0,005 par rapport à la moyenne 14,009, soit moins de 1/10.000, si on le rapporte au poids du groupe AzO'— 62,009. De ce fait, le poids atomique Ag — 107,882 est exact à + 1/10.000. En attribuant enfin, comme précédem- ment, une exactitude de + 1/10.000 au rapport gra- vimétrique Ag : AgAzO”, on en conclut que le poids atomique Ag — 107,882 est exact à + 2/10.000 dans le cas où les erreurs s’ajouteraient. En d’autres termes, le poids atomique de l'argent ne peut, en aucun cas, dépasser 107,90, ni être inférieur à 107,86. Si l’on compare enfin la moyenne 107,885 avec la valeur généralement admise 107,93, l'écart est de 0,055, soit 1/2.000 environ. C'est là un résultat gros de conséquences, car un très grand nombre de poids atomiques sont déterminés par rapport à l'argent; s'il se confirme, on sera amené à reviser presque complètement la tabelle actuelle des poids atomiques. J'avoue que ce n’est pas sans quelque hésitation que j'en viens à formuler cette conclu- sion. Elle est si inattendue qu'il convient de l'accom- pagner de réserves formelles, jusqu'à ce qu'une étude plus approfondie de la question ait été faite. En attendant, et pour donner une idée plus com- plète du nouveau cycle de calcul à appliquer au PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE poids atomique de l'argent, il est utile d'indiquer encore, mais avec beaucoup plus de réserves, les valeurs auxquelles conduisent les poids atomiques - physico chimiques incomplètement contrôlés des éléments CI, S, P. Leurs valeurs, telles qu'elles ont été calculées par diverses méthodes physico-chimiques, sont CI S P Pedor er 35,470 32,056 30,975 D. Berthelot 35,419 32,058 30,978 COVER EC ET 35,476 32,065 » Moyenne . 35,475 32,060 30,977 Je rappelle que ces nombres sont loin de pré- senter la même valeur scientifique que ceux oblenus pour GC, H et Az. Chacun d'eux n’a été obtenu qu’à partir d'observations relatives à un seul gaz, soit . les densités des composés SO*, HCI, PH°; une seule de ces densités (SO*) a été contrôlée par deux observateurs; enfin, pour aucun des éléments CI, P, S, nous ne possédons le contrôle gravimétrique d'un bon rapport avec l'oxygène. Il y a donc là des lacunes importantes à combler par des recherches ultérieures qui pourront modifier plus ou moins les moyennes ci-dessus. Ces réserves failes, voici les valeurs du poids atomique de l'argent auxquelles on arrive à l’aide de ces moyennes, en utilisant, comme précédem- ment, les valeurs des rapports gravimétiriques . recalculés par M. Clarke. FD OCR PT PUS D A RL, A rl rs GE Lima ete dde. di nt 2 4 Japport Ag: AzH*Cl. D'après les expériences de Pelouze, Marignac et Slas (26 déterminations) : 100 p. Ag—49,598 p. AzH“CI. En posant AzH‘C1= 53,514, on a : 53,514 e Ag—100 Xe — 107,895. 5° Rapport du chlore à l'argent Ag:Cl. D'après les dernières déterminations de M. Ri- chards, déjà citées (10 déterminations) : 100 p. Ag = 32,867 p. CI. En posant Cl—35,475, on a : AR OT 7,932. 32,867 JE 6° Japport Ag° : Ag. D'après les expériences de Dumas, Stas et de M. Cooke (17 délerminations) : 100 p. Ag= 114,858 p. AgS. 171 En posant S— 32,060, on a: 100. 32,060 2 14,858 Ag — — 107,884. 1° Rapport Ag? : Ag*SO*. D'après les expériences de Struve et de Slas (12 déterminations) : 100 p. Ag*SO'=— 69,205 p. Ag. En posant SO'— 96,060, on a : 96.060 ., 69,205 de CRE 30,795 A — 107,928 8 Rapport Ag’: PO'Ag. D'après deux déterminations de M. Van der Plaats, sur 1 gramme de phosphate d'argent : 100 p. PO*Ag% — 71,313 p. Ag. Posant PO*— 94,977, on a Récapitulant les valeurs données par les rapports IV à VIII, on a : Tagceau XVII. — Poids atomique de l'argent déduit de l'analyse de ses composés avec C1,S, P. Ag Rapport Ag: AzHCL. . - . - . . 107,895 AG ACIER CL EE 107,932 RAC ENT SD ele de 107,884 =. He NÉ OM ne 107,928 HO ASE OPA CE 107,888 MOYENNE RER 107,905 Cette moyenne ne diffère de la précédente que de 2/10.000. Bien que les valeurs de cette seconde série soient moins concordantes que celles de la première, | pour les motifs développés plus haut, les valeurs extrêmes 107,932 et 107,888 ne diffèrent entre elles que de 0,041; elles sont encore plus concordantes entre elles que les valeurs moyennes extrèmes calculées par M. Clarke, 107,907 et 108,194 (sur un ensemble de sept moyennes dont la moyenne est 107,924), présentant ainsi un écart de 0,287, qui est six fois plus grand que le précédent. En combinant les deux moyennes 107,885 et 107,903, avec un poids double pour la première, on arrive ainsi à la valeur finale : Ag— 191,892. ou, en nombres arrondis : Ag— 101,9, Ag — 101,89 ou qui représente le poids atomique probable de l'ar- gent déduit du système de poids atomique C, Az, H, CL S, P auquel nous avons été conduits. Je me réserve de revenir ultérieurement sur cette question. L’exposé qui précède suffira pour faire comprendre l'intérêt qui s'attache dès lors à la revision des poids atomiques suivant un principe nouveau consistant à combiner entre eux, sans parti pris et sans exclusivisme, les résultats phy- sico-chimiques et gravimétriques. La première application de ce principe, dont je viens de vous soumeltre les résullats, démontre certainement qu'une voie nouvelle et fructueuse s'ouvre ainsi devant nous. Elle permettra d'utiliser d'une facon beaucoup plus rationnelle les matériaux de grande valeur accumulés pendant près d’un siècle par tous les savants qui se sont occupés de la détermination des rapports atomiques gravimé- triques. Je ne puis me défendre d'un secret espoir que cette œuvre, celle de Stas en particulier, ne nous apparaisse alors comme beaucoup plus précise encore qu'aujourd'hui. P.-S. — Depuis la rédaction de cette conférence, quelques observations nouvelles permettent de préciser encore les conclusions précédentes. Il est utile de les résumer en quelques mots. I. — Les expériences exécutées dans mon labo- raloire, en collaboration avec M. Davila, confirment à quelques dix millièmes près la valeur de la den- sité du bioxyde d'azote ohtenue par M. Gray; ces expériences, en voie d'achèvement, seront publiées prochainement. II. — Les constantes critiques du gaz ammoniac ont élé revisées dans mon laboratoire par M. A. Jaquerod. : En appliquant la méthode par réduction des éléments critiques au poids du lilre normal de ce gaz, tel que nous l'avons déterminé, M. Pintza et moi’, on trouve pour poids moléculaire de AzH° : M=—117,035 d'où Az—17,035 — 3,023—14,012, valeur qui rentre dans les limites précédemment trouvées par les méthodes physico-chimiques. HT. — MM. Dixon et Edgar” viennent de déter- miner le poids atomique du chlore par le rapport CI:H et ont trouvé {pour H:1,0076 ou O —16) Cl= 35,463, résultal d'où l’on peut conclure que la densité du gaz HCI, déterminée par M. Leduc, est probablement un peu élevée et devra, par consé- quent, êlre revisée. En calculant provisoirement avec cette valeur Cl= 35,463 les rapports atomiques IV et V qui MONRA90b CRI pe AE * Proc. Roy. Soc, 1905,'A, t. LXXVI, p. 250. PH.-A. GUYE — NOUVELLES RECHERCHES SUR LE POIDS ATOMIQUE DE L'AZOTE donnent le poids atomique de l'argent, le bleau XVII doit être revisé comme suit : ta- Méthodes Ag Rapport Ant: AZHICI 107,871 RAT ICE SANTA 107,895 NA TE CAD SAR TRE Le 107,884 NA ES TAC DIE TR 107,928 —, MAS LMATPOMEPERST Er 107,888 La moyenne est 107,892. Si l'on exclut la valeur fournie par le rapport Ag°:Ag*s0", qui s'écarte nettement de toutes les autres, la moyenne est : Ag— 107,856, qui se confond avec celle fournie par les rapports plus exacts du tableau X VI, soit : Le poids atomique de l'argent, tel qu’on l'obtient à partir des éléments C, H, Az, CI, S, P, au moyen de sept rapports alomiques indépendants, est donc compris entre 107,871 et 107,895. Sa valeur exacte ne parait pas devoir dépasser : Ag— 107,89. On voit par là combien il est désirable d'établir les valeurs définitives et concordantes des poids atomiques Cl, S, P, par des méthodes physico- chimiques et gravimétriques. IV. — L'abaissement du poids atomique de Pargent entrainera l’abaissement d'un grand nombre de poids atomiques. Il serait prématuré de se livrer à ce calcul; mais l’on peut déjà prévoir qu'il aura pour résultat d'augmenter beaucoup la concordance des rapports gravimétriques. J'en cite- rai comme exemple le rapport Na]: NaAzO*. Avec Ag—107,885, C1=35,463, Az—14,009 et Na=—22,998 (valeur récente de M. Richards Na — 23,008 pour Ag—107,93, réduite à Ag—107,885), on calcule : 100 NaCI= 145,408 NaAzOS, tandis que la moyenne déduite par M. Clarke ‘ des vingt-trois déterminations de Penny, Slas et de M. Hibbs donne : 100 NaCl= 145,418 NaAzOS. A 1/15.000 près, soit à la limite de la précision des expériences, les deux valeurs concordent. C'est certainement une confirmation de la nou- velle valeur du poids atomique de l'argent qui fait l'objet des considérations précédentes. Ph.-A. Guye, Professeur de Chimie physique à l'Université de Genève. ‘ Recalculations of atomic weights. ÿ Led Le AC SE de son efficace intervention dans l'Industrie. autorisée des vues qu'ils exposent aujourd'hui. Depuis une vingtaine d'années, des transfor- “nations profondes se sont produites dans le régime -de la production. La constitution rapide des grands centres sous l'incessant appel de l'industrie a permis à celle-ci de mettre immédiatement en valeur, par une con- centration de plus en plus considérable, les capi- taux multipliés et rendus disponibles par le succès des divers organismes de la production. + Il était à prévoir qu'en se perfectionnant ces organismes allaient non seulement demander aux sciences leurs résultats utilisables et leurs mé- thodes, mais qu’en outre ils attendraient d'elles une direction générale, définie par les lois de leur vie propre. Ils devaient tirer de cette collaboration …féconde les moyens d'assurer leur développement normal et prolonger ainsi leur succès. On a montré - souvent combien la science est aujourd’hui indis- …pensable à l'industrie, et nous ne reviendrons ni “sur les arguments décisifs qu'on a fait valoir, ni “sur les exemples précis destinés à en mettre en lumière tout le bien fondé. Mais on a tiré, de cette - donnée fondamentale indiscutable, une conclusion — dont les limites doivent être, à notre avis, expres- “ément définies. Que les procédés de plus en plus scientifiques de production obligent le personnel de l'industrie à donner un fondement tout à fait rationnel à sa formation, pour ne laisser à l’empirisme qu'une place aussi réduite que possible, c'est parfaitement exact. Mais affirmer ensuite que, dans l’ensemble, il faut développer la formation scientifique générale de tous les ingénieurs, c'est aller beaucoup trop loin. En effet, la spécialisation de tout le personnel employé à la production industrielle est un fait. Dès lors, les industries les plus puissamment orga- nisées ne demandent plus aux ingénieurs une ulture technique très variée, mais elles exigent d'eux des connaissances spéciales très développées t voudraient qu'ils y eussent acquis déjà une expérience personnelle. Et nous prions simple- ment ceux qui douteraient de ce fait d'aller visiter quelque grande fabrique de constructions élec- triques, et de nous dire combien ils rencontre- « k J. DE KOWALSKI rer J. DALEMONT — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES 113 L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES A L'INSTITUT DE PHYSIQUE DE L'UNIVERSITÉ DE FRIBOURG La Revue a souvent appelé l'attention de ses lecteurs sur le rôle de la Science et les conditions în publiant l'article suivant de MM. de Kowalski et Dalemont, dont elle ne partage pas toutes les idées, elle serait heureuse de provoquer une discussion L. O. ront d'ingénieurs dont les occupations s'éten- dent à toutes les applications de l'Électrotech- nique. Chaque groupe d'ingénieurs a sa sphère d'action nettement délimitée : celui-ci la construction, celui- là le calcul, un autre les installations, et l’on trou- vera même dans ces groupes des subdivisions plus restreintes. Le personnel technique spécialisé compose donc en quelque sorte une première catégorie d’ingé- nieurs, et sa formation doit être essentiellement pralique. Sans doute, il est indispensable que les recher- ches et les données de la science soient mises à profit dans cette formation; mais un trop grand développement des éludes générales ou variées, loin d'être toujours un bénéfice pour l'industrie, pourra lui être souvent préjudiciable. De fait, chaque individu cherche à utiliser dans son effort toutes les ressources dont il dispose, tandis que, d’autre part, l'industrie veut restreindre la portée de cet effort pour le perfectionner en le répétant. Le travail d'ensemble résulte alors de la coordinalion des efforts individuels, et ce travail sera d’aulant plus parfait que les efforts individuels auront alteint plus d’exaclitude et de précision. La formation de chaque élément doit donc être inspirée par la considération du rôle simple qui lui sera réservé dans la masse et aussi par la né- cessité de donner à l’ensemble la plus grande stabilité possible. Et ne peut-on craindre que la variété des con- naissances soil un obstacle à cette stabilité, parce qu'elle disposera moins le sujet à accepter le joug asservissant d’un travail réduit et sans change- ment ? Pour tous ceux qui ont passé dans l’industrie allemande, cette idée explique dans une grande mesure son rapide succès. Elle possède des cadres secondaires admirablement remplis par un per- sonnel qui a dû se former vite, poussé par les nécessités de la vie, et dont la formation a été, par conséquent, limitée en étendue. Mais cette limi- tation même a permis de rendre plus parfait l'ins- 774 trument dont on armait l'individu, et de l'adapter mieux aux besoins nouveaux de l'industrie. Nous avons fréquemment entendu dire, à propos du système allemand, que les écoles supérieures techniques d'Outre-Rhin ne produisaient pas des ingénieurs, mais surtout des techniciens. On con- viendra que c'est là une discussion de mot. Pour l'industrie, l'ingénieur n'est pas celui qui possède un titre et des connaissances techniques, dont la partie immédiatement utilisable exige un complé- ment d'expérience plus ou moins étendu. C'est plutôt celui qui, ayant même des connaissances générales plus réduites, possède ce précieux com- plément d'expérience si nécessaire et peut rendre les services qu'elle attend de lui. Le défaut qu'il s'agit de corriger consiste peut- être en ce que les écoles supérieures techniques préparent chaque année des jeunes gens, par une culture trop générale, à une direction d'autant plus problématique que leur nombre est hors de proporlion avec celui des directions industrielles. En résumé, nous croyons que le nombre d'ingé- nieurs sortant des écoles supérieures techniques avec la formation qu'on y donne est trop grand, ou, plus exactement, que l’on pourrait réduire utile- ment leur formation sans les charger d'un bagage scientifique qui risque d’être inulilisé. Si l'on veut donc adapter l’enseignement supé- rieur technique aux nécessités acluelles de la pro- duction, et faciliter aux élèves l'accès des situations qu'offre l'industrie, il faudra nécessairement res- treindre la variété pour développer la spécialité’. L'orientation des efforts vers l'étude approfondie des spécialités n'exclut pas évidemment la con- naissance des généralités indispensables à la com- préhension parfaite des applications particulières. Mais il nous semble nécessaire de proscrire de plus en plus du programme ordinaire des ingé- nieurs les généralités ou les variétés superflues, qui fatiguent les esprits en les astreignant à une excessive et inutile assimilation. Nous ne contestons pas, sans doute, que les études générales et variées ne concourent utilement à la mise en valeur de la puissance intellectuelle. Mais nous croyons que le travail personnel et pratique, limité même à un domaine restreint, est capable de fournir à l'esprit des éléments de vie et d’acti- vité au moins aussi puissants que l'étude de matières trop nombreuses et trop variées, consi- dérées souvent comme un inutile et pesant fardeau. Toutes ces considérations ne s'appliquent évi- 1 L'an de nous a publié récemment, dans la Revue Econo- mique Internationale, un travail de comparaison sur l'orga- nisation de l'enseignement supérieur teshnique en Europe et en Amérique (Revue Internationale, vol. IT, n° 4, avril 1905, p. 11-104). J. DE KOWALSKI Er J. DALEMONT — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES demment qu'au personnel technique ordinaire, à celui dont la tâche est tout à fait spécialisée dans l'atelier ou les bureaux d’études. Mais il est nécessaire que les cadres se com- plètent par des hommes dont la personnalité soit M plus développée, parce que leur rôle exige une plus grande initiative. Ce sont d'abord ce que les Allemands appellent les Wissenschaftliche Hilfsarbeiter, savants asso- ciés à l'œuvre industrielle pour lui frayer la route, lui tracer des sentiers nouveaux et lui fournir ses plus sûrs instruments de vie et de succès. L'Allemagne leur devait déjà l’indiscutable pré- pondérance de son industrie chimique, et voici que, dans le domaine de l'Électrotechnique, — et pour les mêmes raisons, pensons-nous, — elle s'affirme plus encore comme devant tenir la première place. : Ainsi placé au milieu d'un organisme industriel en pleine activité, le savant n'apparaît plus comme un être hors cadre, cherchant des lois sans utilité ou sans utilisation. Son effort est orienté sans cesse par des besoins précis et ses découvertes ne risquent pas de rester enfermées dans les dossiers de quelque grande Académie; elles sont immédiatement mises en valeur par la collaboration pratique dont il est entouré. On conçoit, dès lors, l'importance de son travail et l'on entrevoit facilement les nécessités de sa formation. Car, si sa tâche doit être en accord avec l'effort collectif, elle s'en distingue très nettement et n’y rentre pas comme la partie dans le tout. Il en résulte que les qualités d'initiative, l'esprit de recherche paliente et minutieuse joint à la con- naissance la plus étendue des principes de la science, lui sont absolument indispensables. Il ne lui suffira donc pas de connaître les méthodes . pratiques d’essai, de les avoir répétées et contrôlées : il faudra qu'il soit capable d'en imaginer même de nouvelles, pour se créer les instruments de re- cherche dont il aura besoin. C'est donc avant tout par le travail du labora- toire, effectué sous une direction, sans doute, mais avec une indépendance grandissante, que l'étudiant se préparera le mieux au rôle de savant auquel il aspire dans l’organisalion industrielle. ï IL dl 1 Un facteur nouveau entre en jeu aujourd'hui. û De plus en plus, les nations industrielles se dis ; à L 4 de J. DE KOWALSKI er J. DALEMONT — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES 1 putent la suprémalie sur les marchés du monde. Grâce au développement extrême des voies de transport ferrées et marilimes, il s'établit de plus en plus des liens de dépendance mutuelle entre les “pays producteurs, tandis que les débouchés se multiplient chez les peuples dont notre civilisation fait éclore les besoins. —. Or, dans cette lutte industrielle, il ne suffit pas d'être armé de produits excellents pour s'assurer “le succès; il faut, en multipliant les comptoirs à * l'étranger, y placer en même temps des hommes capables de résoudre des problèmes que les dilré- - rences de race, de climat, de pays, peuvent trans- | former radicalement. —._ On peut dire, d'ailleurs, que, pour certaines in- ….dustries, — l'industrie électrique en particulier, — «la représentation est un problème très important et «d'où dépend, dans une grande mesure, la réussite “d'une affaire. Les industriels allemands l'ont compris depuis “longtemps, el les sacrifices qu'ils ont su s'imposer - pour le bien résoudre ont été largement compensés par leurs succès commerciaux. En résumé, nous croyons donc que la spéciali- sation industrielle justifie pleinement la limitation “expresse des études de la masse des ingénieurs aux nécessités spéciales de leur cercle plus ou moins restreint d'activité. Nous pensons, d'autre part, qu'il faut imposer une préparation beaucoup plus longue et donner une culture plus étendue à ceux que leur valeur ou -leur situation peut conduire aux rôles importants de la collaboration scientifique. Dans ce système, sans faire aucun tort aux écoles Supérieures techniques, les Facultés des Sciences ont une place tout indiquée, puisqu'elles peuvent offrir le couronnement des études générales et le moyen de poursuivre les recherches personnelles - au laboratoire. — On réalisera ainsi l’étroite union de la Science et de l'Industrie d’une facon moins cahotique, puisqu'on pourra, dans le cadre même de l’ensei- “éneneut élaborer l'organisation future, au lieu de faire passer tous les ingénieurs par un moule à peu Rires uniforme, laissant aux circonstances le soin “aopérert inévitable classement, au grand préjudice À $ s de ceux qui auront fait inutilement effort. III C’est en vue de la formation spéciale de ces Wis- senschaftliche Hilfsarbeiter que l'enseignement _des Sciences appliquées a été introduit à l'Institut de Physique de l'Université de Fribourg (Suisse). . L'enseignement de la Physique appliquée y est donné conformément à deux buts bien distincts : + 1° La formation des électriciens, où cette malière intervient comme branche principale ; 2° La formation des chimistes et des électrochi- mistes, où elle intervient comme branche acces- soire !. L'expérience que nous avons pu acquérir dans ces questions uous à donné la conviction que le (travail du laboratoire doit constituer l’armature solide de l’enseignement des sciences expérimen- tales ou appliquées. Les lecons de l'auditoire doivent servir surtout au développement et à l'explication des expériences. C'est une regrettable méthode de formation que celle qui consiste à ‘faire absorber à l'esprit sans qu'il soulienne cette assimilation par la constata- tion des faits. D'une façon générale, on peut dire que les phénomènes seront mieux compris et retenus s'ils se présentent à l'élève non sous la forme d’une loi réduite à une expression plus ou moins abstraite, mais comme un fail précis et vérifié. Et, si l'Allemagne est arrivée à de si merveilleux résultats dans les sciences chimiques, c'est encore parce que celte idée a dominé depuis trente ans tout l'enseignement de cette science. Pour donner aux études une suite rationnelle, nous les avons divisées en qualre périodes dis- tinctes. Dans la première, on veut surtout amener l'élève à travailler avec méthode et à se procurer déjà lui-même certains instruments de travail. On lui indique les problèmes pratiques: à résoudre, les méthodes à suivre, les appareils à employer. Le travail d'ensemble doit être fait au point de vue bibliographique et historique; l'exposé théorique vient ensuite avec les indications spéciales sur l'expérience et ses résultats. Des cours pratiques complètent cette première partie de l’enseignement; ils ont pour but d'initier l'élève à la construction de certains petits appareils simples, au soufflage de verre, etc. Dans la seconde partie, l'élève doit surtout per- fectionner ses méthodes de travail en s'orientant vers des mesures plus importantes. Il ne devra plus se contenter de vérifier certains essais; il devra les répéter jusqu’à ce qu'il obtienne les résultats les plus précis en recherchant lui-même ses erreurs et leur importance relative. Dans la troisième partie, le but et les moyens: restent les mêmes, mais les travaux sont davantage: spécialisés et développés. L'élève, en étudiant iciles mesures d'ordre scien- —————————————————————————————— 1 Nous mentionnons, ici pour mémoire, l'enseignement de Physique générale donné aux élèves qui se destinent à la pharmacie” ou à la médecine, ainsi qu'à l'enseignement. 776 3. DE KOWALSKI er J. DALEMONT — L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES APPLIQUÉES lifique ou technique, n'aura plus seulement une recherche précise à faire sur une questivn déter- minée. [l devra grouper lui-même les questions pour les étudier dans l’ordre et arriver à un résultat général. 11 devra, dans un essai, faire varier les différentes grandeurs qu'il rencontre pour fixer leur influence et les lois de leur variation. Dans tous ces travaux, le professeur et ses assistants indiqueront la voie ou laisseront à l'ini- tiative de l'élève le soin de la découvrir; mais ils devront le suivre d'une facon constante pour qu'il trouve non seulement dans leurs lecons, mais dans leurs fréquents entreliens, l’encouragement et la direction nécessaires. Enfin, le doctorat constitue le couronnement de ces études. Il comprend chez nous, comme dans toutes les Universités germa- niques, une épreuve orale sur des matières choisies librement dans un programme fixé par la Faculté, et une thèse originale. Les matières choisies comprennent toujours une branche principale et deux branches accessoires, la thèse rentrant dans le domaine de la branche principale. On a discuté souvent les avantages et les incon- vénients de la liberté relative laissée en Allemagne à l'étudiant, dans le choix de son programme d'études ; nous ne reviendrons pas ici sur cette question, nous bornant à renvoyer à l'étude de la Revue Économique Internationale mentionnée plus haut (page 85). La Lhèse constilue un moyen pédagogique de formation d'une inappréciable valeur. Le pro- fesseur en choisit le sujet d'autant plus aisément qu'il a pu voir plus longtemps l'élève au travail et distinguer avec précision ses aplitudes particu- lières. Souvent aussi le professeur trouve dans des élèves de précieux auxiliaires pour des études d'ensemble qu'il organise et dirige, et c'est par cette œuvre collective si féconde que les grandes Universités de Gôttingen, Leipzig et tant d’autres ont acquis une réputation scienlifique universelle. Les avantages de ces travaux personnels sont trop manifestes pour qu’il soit nécessaire d’insister sur leur utilité pour l'étudiant. Mais, en fin de compte, la science elle-même y gagne par le précieux appoint d'énergies que la coordination a seule permis de mettre en valeur. Il nous semble qu'à l'heure présente l’auréole de quelques grands savants, fussent-ils uniques en leur puissance, ne suffit plus à la gloire et surtout aux nécessités impérieuses d'une nation. La science actuelle veut autre chose. Elle n'avance plus sous la poussée de quelques individualités brillantes: elle réclame toute la puis- sance de l'effort collectif, et, de plus en plus, c’est par le travail du grand nombre, habilement utilisé, que les voies nouvelles se révèleront. Peut-être l'Allemagne n'a-t-elle pas plus de grands savants que la France; mais, si elle donne au monde l'impression d'une production scienti- fique plus intense et plus étendue, c'est que, préci- sément, elle a formé depuis longtemps un plus grand nombre aux recherches scientifiques. Les N Universités on! élargi leurs cadres et n'ont rien perdu en mettant en valeur des esprits qui eussent été peut-être, sous d’autres régimes, inévitablement écartés du travail scientifique. De plus, à l'Université de Fribourg, nous cher- chons à intéresser davantage les élèves en leur choi- sissant des sujets de thèses qui, tout en présentant un caractère scientifique, rentrent cependant dans le domaine technique. Parmi les travaux entrepris par les élèves de l'Institut de Physique, il s’en trouve quelques-uns dont les résultats ont été utilisés industriellement. Nous avons communiqué à la Société internationale des Electriciens ! une mé- thode de production de l'acide nitrique au moyen de décharges dans l'air. Elle est actuellement en voie d'exploitation. D'autre parl, comme elle nécessitait l'emploi de condensateurs à haute tension, et que ceux du commerce ne résistaient pas, nous en avons étudié de nouveaux, qui sont également construits aujour- d’hui industriellement”. Enfin, nous menlionnerons encore, parmi les travaux de doctorat effectués dans nos laboratoires, des recherches nouvelles sur la mesure des résis- tances liquides, la charge des condensateurs, la décharge disruptive, la résistance des diélec- triques, etc. L'organisation de cours spéciaux d'Électrotech- nique et l'installation de salles d'essais appropriées permettent aux élèves de se spécialiser dans cette malière et d'y choisir leurs sujets de thèse. Sans faire donc aucune concurrence à nos grandes écoles techniques suisses de Zurich et de Lausanne, nous donnons aux étudiants une culture moins technique, sans doute, mais qui estnéanmoins d'une grande utilité dans les industries dont le dévelop- pement dépend en grande partie de celui de Ja science physique. J. de Kowalski, Professeur de Physique, Agrégé d'Electiotethnique Directeur de l'Institut de Physique à l'Institut de Physique! de l'Université de Fribourg. J. Dalemont, 1 De Kowazski : Nouveaux procédés pour la production de l'acide nitrique (Bulletin de la Société Internationale des Electriciens, juin 1903) ? Voir Eclairage Ælectrique, octobre et novembre 1904. Les condensateurs électriques à haute tension, système Niosuski. mers ht AA: Ps à. à puis BP EE T H. CAVAILLÈS — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES 1 L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES La mise en valeur des régions montagneuses est un des chapitres les plus curieux à la fois et les plus nouveaux de la Géographie humaine. Un peu partout, dans notre vieille Europe, où la place libre se fait chaque jour plus rare, où des popula- tions toujours plus serrées s'enlassent sur d'étroits espaces, on cherche à tirer un meilleur parti des régions hautes. On abandonne les cultures pour créer des prairies, on restaure tes forêts, on régle- mente et l'on améliore les pàturages. En même temps que le sol, le travail se transforme. Depuis cent ans, l'association a bouleversé les conditions anciennes de la vie pastorale. Dansles Alpes suisses, dans le Jura francais, dans la Savoie et même une partie du Dauphiné, les fruilières, partout multi- pliées, ont donné de surprenants résultats. En aug- mentant la production, en perfectionnant les pro- duits, en facilitant la vente, elles ont décuplé les ressources du sol et répandu l’aisance là où régnait la pauvreté. Ainsi aménagées, les montagnes ne se contentent plus de suffire aux besoins de leurs habitants. Déjà elles donnent généreusement aux plaines. Elles leur fournissent les produits de laiterie, le lait, les beurres et les fromages, les laines et les viandes. Maintenant, grâce à leurs chutes d'eau, voilà qu'elles font commerce de la force, valeur toute moderne et chaque jour plus précieuse. Qu'on l'utilise sur place, qu'on la transporte au loin dans la plaine, c'est la machine mise en mouvement: c'est la lumière à bon marché, les moyens de trans- port multipliés. Aux habitants des villes, elles offrent autre chose encore : la fraicheur aux jours chauds de l'été, de l'air pur, de la santé, de la beauté. Ainsi les sommets, jadis « terreur des plaines », deviennent leurs alliés bienfaisants. La solidarité qui les unit apparait clairement et s'affirme. Dans cet échange mutuel de bons offices, qui sait quel rôle l'avenir réserve à la montagne? Les Pyrénées sont jusqu'ici restées étrangères à cette transformalion, presque générale, des mon- tagnes. Elles sont encore une région de médiocres ressources économiques. Elles produisent des laines dont la renommée est très ancienne et qui alimentent la plus vieille et la plus importante de leurs industries. Leur valeur « totale pour les cinq départements pyrénéens! s'est ! Basses-Pyrénées, Hautes-Pyrénées, Haute-Garonne, Ariège, Pyrénées-Orientales. élevée, en 1901, à 3.111.645 francs’. Mais les pro- duits de laiterie représentent une valeur insigni- fiante. Ils sont à peu près limilés aux besoins locaux, qui sont faibles. En 1892, les mêmes dépar- tements ont à peine fourni 1.200.000 francs de beurre, tandis que celui du Jura en donnait à lui seul pour près de 2 millions”. Les débouchés, cepen- dant, ne manquent pas. [1 y a, à la lisière de la montagne et dans les vallées mêmes, des villes hivernales et des stations balnéaires : Pau, Biarritz, Luchon, Cauterets, Bagnères, où la consomma- tion est considérable. Plus loin, Toulouse et Bor- deaux sont de grands marchés. Le beurre est cher cependant, et le plus souvent de qualité médiocre, parce qu’on le fait sans soin. Trop souvent, le con- sommateur trouve son intérêt à s’approvisionner en Bretagne, en Normandie ou ailleurs. La pro- duction des fromages n'est guère plus abondante : 1.454.595 francs en 1892, dont 1.044.721 pour le seul département des Basses-Pyrénées. C'est peu de chose en comparaison des 6.717.856 francs que fournit le Jura*. Encore ces fromages, fails presque exclusivement de lait de brebis et d’un goût piquant, ne sont-ils guère appréciés en dehors de la région, et ne peuvent-ils être un produit d’ex- portation. La valeur économique des Pyrénées est donc très inférieure à celle des autres montagnes francaises, Jura et Alpes, tout au moins en ce qui concerne les ressources pastorales. Il y a trente ans, on calcu- lait que le rendement des hauts pâturages atlei- gnait dans les Alpes le chiffre de cent francs par hectare pour la période d'été ; dans les Pyrénées, il ne dépassait jamais dix /ranes pour la même étendue de terrain, el le rendement moyen restait même inférieur à cinq francs'. Les choses n'ont guère changé depuis que ces lignes ont été écrites. Un pays qui ne progresse pas est un pays qui s'appauvrit, parce que la richesse s'accroit autour de lui et qu'il ne peut lutter contre la concurrence. Ainsi les Pyrénées vont en s’appauvrissant. Leurs habitants, ne trouvant plus sur place un travail suffisant, attirés au dehors par l’activité toujours “ MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE : Sfatistique agricole an- nuclle de 1901. Paris, Imp. Nationale, 1902, p. 608-610. La production totale française a atteint, la même année, 53.286.922 francs. 3 MINISTÈRE DE L'AGRICULTURS : Enquête décennale de 1892. Paris, Imp. Nationale, 1897, p. 200-201. 3 Enquête décennale, p. 200-201. 4 À. Cazver : Observations sommaires sur le progrès rural; leur application à la région des Pyrénées. Mémoire présenté au Congrès scientifique de France, 39° session. Pau, 1873, t. I, p. 580. 1178 plus grande des régions voisines, émigrent vers les plaines, vers les villes, ou vont plus loin encore, à l'étranger. En cinquantle-cinq ans, de 1846 à 1901, la région montagneuse des Pyrénées a perdu 161.479 habitants, passant de 689.384, chiffre le plus élevé qu'elle ait atteint au siècle précédent, à 527.905, population actuelle. Pendant ce temps, les parties en plaines des cinq départements pyré- néens restaient, dans l’ensemble, stalionnaires:; les parties les plus voisines de la mer s’accroissaient dans de fortes proportions. Aujourd'hui, nos mon- tagnes ont peine à nourrir une population pour- tant peu exigeante et chaque jour moins nombreuse. II Quelle est la cause de cet appauvrissement de nos montagnes? Est-ce leur constitution géolo- gique? Tout au contraire : les Pyrénées ont un sous-sol plus résistant que celui des Alpes. Plus anciennes, plus longtemps modifiées par l'érosion, elles sont aussi plus stables, plus voisines de l’état d'équilibre. Leurs énormes dépôts glaciaires sont, il est vrai, très affouillables; mais ce sont des for- malions superficielles, facilement défendables avec un bon couvert forestier ou seulement herbeux. — Est-ce leur climat? Mais ce climat, à la fois méri- dional et océanique, est éminemment favorable à la croissance des arbres et des herbages. « Quelle différence entre les Alpes et les Pyrénées sous le rapport de l'engazonnement, qui se fait dans ces dernières avec une rapidité et une intensité extra- ordinaires‘! » Nos montagnes pourraient être — devraient être — un centre de production de bois (elles l'ont été au temps de la marine à voiles), de laines, de viandes et de lait pour les plaines voi- sines. Cependant leur valeur économique est presque négligeable. La faute en est, non à la Nature, mais à l'homme. Les Pyrénées sont pauvres, parce que leurs habi- tants ont gaspillé leurs richesses ou qu'ils n’ont pas su en tirer parli. C'est un fait bien connu que la végétation fores- tière a partout reculé et partout recule encore. Tous les ans, à l'herbe nouvelle, des incendies s’allument d'un bout de la chaîne à l’autre, qu'on voit briller au loin dans la nuit. Et l'on peut lire dans les journaux de la région des notes comme celle-ci : « De nombreux incendies de landes ont éclaté ces jours derniers, un peu sur tous les points de la contrée. Dans la nuit de samedi, le feu a ravagé les landes avoisinant la Rhuneet les pentes de la montagne elle-même; dans la journée de 1 H. pe Lapparenr : Voyage d'études dans les hauts pàtu- rages de la chaine des Pyrénées en 1889. Bulletin du Minis- tère de l'Agriculture, 11° année, 1892, n° 1, p. 32. H. CAVAILLES — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES dimanche, celles de Saint-Pée. Activé par un vent très violent, il a dévoré avec une rapidité fou- droyante ajoncs, herbes sèches, taillis, vieux chênes creux parsemés dans la lande... L'incendiem a encore dévasté 200 hectares à Monein, 150 à Capvern.…..» Ainsi, des milliers d'hectares de landes, de fouyas', de jeunes bois deviennent la proie des flammes. Pour le montagnard nomade en quête d'herbages toujours plus vastes, l'arbre est l'ennemi que, partout, il faut traquer sans merci. La forêt est partoul atteinte ou menacée, pas partout, il est vrai, dans la même mesure. Le dé- partement le mieux boisé est actuellement celui des Basses-Pyrénées. Il possède encore de hautes futaies, notamment les magnifiques sapinières de Gabas, dans la vallée d’Ossau, et beaucoup de landes plus ou moins boisées”. Dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales, la forêt est déjà plus atteinte; toutefois, les dégâts sont encore modérés et il suf- firait de quelques plantations ou semis pour les réparer. Au contraire, dans les Hautes-Pyrénées, la Haute-Garonne, l'Ariège, le mal est très avancé. Ce n’est pas seulement l'arbre qui disparait; le sol foreslier lui-même est en ruine sur plus d'un point. Les travaux de reboisement n’ont de chances de réussir que s'ils sont précédés de grands ouvrages de correction et de consolidation. C'est dans l'Ariège qu'il y a le plus à faire, parce que c'est là qu'il y à eu le plus d’excès, d'usages abusifs et de dégâts. Pour l’ensemble des six: départements pyrénéens, sur une superficie de 1.276.000 hectares de terrains montagneux, la surface globale boisée occupe 411.000 hectares, l'aire effectivement boisée est de 310.000 hectares, soit 24 °/,. La forêt couvre donc à peine le quart de la masse pyrénéenne*. Le pâturage lui-même, que le pâtre croit étendre et améliorer aux dépens de la forêt, le pälurage n'est, en réalité, pas mieux traité. D'abord, il est menacé par la disparition des arbres, exposé à de longues sécheresses, aux éboulis et aux chutes de pierres venues des sommets voisins. De plus, il ne reçoit aucun aménagement sérieux. Peu ou point de travaux d'entretien, pas d'améliorations, pas d'irri- gations. Des abreuvoirs faits d'un tronc d'arbre, quelques abris rudimentaires pour les troupeaux, quelques mauvais chemins que chaque printemps creuse et défonce un peu plus, c’est lout ou presque tout. Les bergers éprouvent une défiance instinc- live pour tout ce qui ressemble à une contrainte ou à uue intervention du dehors, et cette défiance devient de la haine s'il y a seulement apparence ‘ Champs de fougères el d'ajoncs épineux. 3 J. Dusreuie : Les forêts des Basses-Pyrénées. Pau, Garet, 1892. * Y compris l'Aude. * E. ne Gonsse : Les forêts des Pyrénées. Extrait de la Revue des Eaux et Forêts. Paris, Rothschild, 1894. * H. CAVAILLÈS — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES 719 “ue l'herbe est menacée par l'arbre. Un abreuvoir “établi il y a quelques années sur les vacants doma- niaux du Consulat de Foix avait été entouré d'une plantation d'arbres à hautes tiges, qui offrait aux troupeaux un excellent abri contre le vent : les pâtres n'ont rien eu de plus pressé que de la dé- truire ‘. Ailleurs, on a fait des travaux d'irrigation. Ils ont bien réussi, transformé des pätures presque “improductives en prairies fauchables. Mais les popu- “lations ont négligé de réparer les rigoles, malgré “les gralifications de l'Administralion. Elles ont été bientôt comblées par les éboulis, provenant des “parties supérieures des versants, et par le piétine- ment des animaux : les pâturages ont aussitôt -repris leur aspect accoutumé?. Quant aux fumures, -l'épandage du fumier accumulé dans les Jasses “où les animaux passent la nuit ne se fait pas. L'idée que la terre a besoin de se reposer et de se refaire, qu'il faut lui restituer les éléments que chaque été lui enlève, cette idée, familière aux gens - de la plaine, est élrangère à ceux de la montagne. Mais la véritable cause de la décadence pastorale n'est pas encore dans ces pratiques, si fâcheuses qu'elles soient. Elle réside dans la transhumance, qui est le fond de presque toute l'économie paslo- rale pyrénéenne. Tous les ans, les pâturages sont envahis par les troupeaux de la vallée et par ceux venus des plaines françaises ou espagnoles, affaiblis et affamés par une longue route. Quelle que soit la provenance de ces troupeaux, le moindre souci de l'éleveur est de proportionner le nombre d'animaux à la « possibilité » de la montagne. Il en résulte la surcharge, et de la surcharge la dégradation du pàturage. Le mouton, qui mange toutes les espèces d'herbes, les dévore jusqu'à la racine quand il ne trouve rien de mieux, si bien que le pâturage se . trouve bientôt dénudé sur certains points. Il se . forme ainsi, à la surface de la pelouse, des vides, élargis encore par le ruissellement des eaux et le piélinement du bétail. A la saison suivante, le pâtu- “rage aura une possibilité inférieure à celle de l'année précédente. ELsi, comme il arrive toujours, “on y mène le même nombre de bêles que l'année d'avant,les dégâts iront en s'aggravant. Le mouton, qui n'est pas plus dangereux que la vache sur un pèlurage en bon état, l'est beaucoup plus sur un “pâturage dégradé, car il le ruine avant de dépérir, “au contraire de la vache, qui dépérit sans l'avoir “ruiné. Alors l'herbe esl arrachée sur de grandes étendues, et une pelouse naguère fournie se trouve bientôt transformée en une surface dénudée*. a À CamparnoN : Les Améliorations pastorales dans l'Ariège t la Haute-Garonne. Paris, Imp. Nationale, 1900, p. 12. D DDid., p. 15. —” P. Descomses : Etude sur l'aménagement des montagnes “ans la chaine des Pyrénées. Extrait de la Revue Philoma- L'indifférence du montagnard pyrénéen, en ma- tière d'amélioration ou seulement d'entretien du pâturage, s'explique par de très vieilles habitudes, mais surtout par la constitution de la propriété dans les nfontagnes et dans les landes de la plaine. Les päturages des régions hautes el beaucoup de landes du plat pays sont biens communaux ou syn- dicaux, en sorte que l'intérêt particulier n’est pas en jeu pour en tirer, comme on le fait en Suisse, tout le parti dont ils sont susceptibles et atlacher le montagnard à la rude vie de la montagne. Au con- traire, dès qu'il s’agit de propriélé particulière, le Pyrénéen sait très bien faire ce qui est nécessaire. « En peu de temps une pâture médiocre devient une prairie fauchable, bien enclose, bien nivelée, utili- sant le moindre filet d’eau‘ ». L’indivision du pâtu- rage est ainsi, dans les Pyrénées, une cause d’indif- férence, de gaspillage et d'inertie, parce qu'elle empêche l'initiative individuelle d'entrer en jeu. C'est, d’ailleurs, un petit nombre de privilégiés qui en accapare les profits : il ressort de toutes les dépo- silions recues par la Commission des améliorations pastorales et forestières que le défaut de réglemen- tation et les abus qui en découlent tournent au profit presque exclusif d'une minorilé aisée, qui opprime la classe pauvre, la plus nombreuse et la plus intéressante. C'est cette dernière qui, n'ayant pas de quoi vivre, émigre vers les plaines ou au delà des mers*. C'est donc l’état social des populations qui est la véritable cause de la torpeur où se trouve aujour- d'hui le pastorat pyrénéen. Ce qu'il y a de plus fächeux, c'est qu'en exploitant si mal les ressources présentes, on compromet et l’on diminue celles de l'avenir. La montagne va en s'appauvrissant. Une fois dépouillé de sa forêt et de ses gazons, le sol devient la proie des torrents. L'eau emporte les particules ténues de la surface, entraine les élé- ments affouillables, les débris morainiques peu consistants qui, sur d'énormes épaisseurs dans les Pyrénées, forment comme la chair de la montagne. Elle creuse un sillon qui bientôt deviendra un ravin. Des terrains jadis stables s'écroulent sur les prai- ries inférieures, les plus riches, el envahissent la vallée. Depuis un siècle, la dégradation des Pyrénées s'est manifestement aggravée. Dans certaines ré- gions, la vallée d’Aspe, la vallée supérieure du Gave de Pau, certaines parties des bassins de la Garonne et de l'Ariège, elle commence à devenir inquiélante. Les cours d’eau, pour la même raison, deviennent des torrents irréguliers. Qu'une averse survienne thique de Bordeaux et du Sud-Ouest, 7e année, n° 5 et 6, Ler mai et 1er juin 1904. Bordeaux, Féret, 1904, p. 14-16. * H. DE LAPPARENT, ouv. cité, p. 38. ? Camparpow, ouv. cité, p. 16. 180 il yen a d’interminables sur le versant français des Pyrénées), et le ruisseau le plus paisible se transformera en torrent déchainé, agent de des- truction formidable. En juillet 1897, le Bastan, subitement grossi, enleva une partie des maisons de Barèges, emporta 5 kilomètres de route et mit en question l’existence mème de Luz. Il suffit de quelques heures pour tout saccager : routes, ponts, cultures, voies ferrées. Le désastre s'étendit à la plaine : toute la haute Gascogne fut dévastée. Des localités situées à la surface des plateaux, comme Msle-en-Dodon, furent ravagées par l'inondation. Les mêmes faits se répètent, avec plus ou moins d'intensité, chaque année. Les inondations du mois de mai dernier ont causé des dégâts considérables et fait de nombreuses victimes dans tout le Sud- Ouest. Une fois le terrible flot écoulé, l'eau manque, bien souvent. Chaque été les usines de Bagnères chô- meraient, si, en fin de saison, on ne recourait aux réserves du lac Bleu. C’est là un sérieux sujet de préoccupations pour ceux qui voient, dans les cours d'eau dispensateurs de force, une des plus abon- dantes ressources des Pyrénées. Les glaciers y sont rares el peu étendus; les vrais réservoirs des eaux courantes, ce sont les forêts et les pâturages. Ceux- ci détruits, où prendra-t-on la houiile blanche* ? Telle est actuellement la situation des Pyrénées. Disparition des forêts, usure du pâturage, dégra- dation des versants, appauvrissement des cours d'eau, tout se tient, et partout la cause est la même : un état social désastreux; des abus que le pâtre : croit nécessaires et qu'il défend depuis des siècles avec la même âprelé sauvage, le même mépris de l'intérêt général et la même ignorance de son propre intérêt; en un mot, un mode d'exploitation des ressources du sol qui remonte aux âges les plus lointains de l'humanité. III On s'efforce aujourd'hui d'introduire dans les mœurs pastorales des Pyrénéens des pratiques plus modernes. L'État, des particuliers ont pris l’initia- tive de cette œuvre d'éducation. a La force motrice des torrents pyrénéens est encore presque inutilisée, sauf dans les bassins supérieurs du Gave de Pau et de l'Aude, où ils ont fourni quelques applications intéressantes. Elle est cependant considérable, M. Marchand, directeur de l'Observatoire du Pie du Midi, estime à 8 mil- lions de chevaux-vapeur l'énergie totale des eaux qui des- cendent sur le versant français des Pyrénées. M. H. Ader, ingénieur des Ponts et Chaussées, évalue la force d'ensemble des cours d'eau pyrénéens francais à 2 millions de chevaux- vapeur. Il reconnait que l'on n'a pas encore les él: ments d'une évaluation exacte des chutes d'eau pyrénéennes sus- ceplibles d'être pratiquement aménagées (Compte rendu des travaux du second Congrès du Sud-Ouest navigable, p. 293 et 303). x H. CAVAILLES — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES L'Administration des Eaux et Forêts surveille les bois domaniaux et communaux soumis au régime forestier, et les défend le plus qu'elle peut contre l'envahissement du pâtre. Elle a exécuté des ou vrages partiels de reboisement et de correction des torrents. Les plus remarquables, ceux du Péguère de Cauterets, du Rieulet et du Midaou de Barèges, du Laou d’Esbas, près de Luchon, passent pour être des modèles du genre, et font grand honneur à ceux qui les ont dirigés. Mais les ressources financières dont l'État dispose, pas plus que la législation en vigueur à l'heure actuelle, n'ont permis de faire davantage. Jusqu'ici, on n'a pas cherché à reconstituer les massifs forestiers, à refaire les pâturages ou seulement à régulariser les cours d'eau. On s'est contenté de corriger des tor- rents déjà formés, de s'attaquer aux «berges vives » et de combattre l'érosion commencée. On se défend contre le mal, on ne s'efforce pas de le prévenir. En somme, tout se borne actuellement à quelques travaux de détail destinés à préserver des villes : d'eaux, des routes ou des lieux habités menacés, de destruction. suffirait, cependant, de ressources très modérées pour faire beaucoup mieux. Le mal n’est pas encore aussi avancé dans les Pyrénées qu'il l'est dans les. Alpes provençales ou dauphinoises; pourvu qu'on la défende contre le mouton ou contre l’homme, la végétation forestière, très vivace, finit toujours par triompher. « Dans les Pyrénées, spécialement dans les parties granitiques et schisteuses, le bois | (surtout le hêtre) gagne naturellement du terrain avec une très grande facilité *. » On a pu dire qu'en cinquante ans, les Pyrénées se reboiseraient tout entières et spontanément si on les préservait seulement du troupeau. Il faudrait moins de temps 5 encore, si l'homme y venait directement en aide à 1 la Nature. Il n’est pas à souhaiter que la végétation fores- lière s’étende partout où les arbres peuvent pousser, comme le voudraient quelques forestiers inlransi= geants. Une telle conceplion irait directement à l'encontre de l'intérêt bien entendu du pastorat. Mais on est d'accord pour réclamer le reboisement en grand des versants les plus inclinés, des centres de dispersion et d'alimentation des cours d'eau, enfin des régions qui, par leur nature, sont im= propres à l'aménagement de pâlurages véritable= ment productifs ?. Du reste, l'Administration des Eaux et Forêts ne limite pas son effort à l'entretien des bois : elle s'efforce en même lemps de mieux aménager les E ! H. ne LAPPARENT, ouv. cilé, p. 35. * V. notre exposé : Le Déboisement dans les Pyrénées françaises (Revue de Paris, 10° année, t. VI, 15 nov. 1903; p. 281-314). y LI » ; H. CAVAILLÈS — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES 781 pâturages. C'estici, peut-être, que sa tächerencontre le plus de difficultés. S'il y a un régime forestier, il n'y a pas encore de véritable régime pastoral, et, ainsi, elle se trouve le plus souvent désarmée. Cependant, et malgré toutes les résistances, elle a réussi à rendre de réels services. Un peu partout elle a tracé des chemins, construit des abris pour … les troupeaux et les pâtres, établi des abreuvoirs *. Par ses soins, nombre de pelouses ont été débar- rassées des végélalions envahissantes et nuisibles, broussailles, genévriers ou bruyères, dont la pré- sence est la marque distinctive du pâturage en mauvais état. Les pierrailles, tombées des sommets ou arrachées au sous-sol, ont disparu. Les irriga- tions, les drainages ont assuré une meilleure répar- tition des eaux. Enfin, l'Administration s'efforce aujourd’hui d'in- troduire et de faire vivre dans les Pyrénées la pratique de l'association, en créant et en subven- tionnant des fruitières. Ce sera là, si elle réussit, le plus grand service qu'elle puisse rendre à la région, car la coopération n'accroit pas seulement la production; elle perfectionne les produits, elle améliore le troupeau et transforme les mœurs pas- torales. Elle est un groupement et un organe de “propagande et d'éducation. Il y a trente ans, le garde général Calvet essayait déjà d’acclimater dans les Pyrénéesles fruitières du Jura et des Alpes. Il écrivait alors une Nofe sur le rôle économique des Associations pastorales dans les hautes vallées “des Pyrénées”, et présentait, sur le même sujet, n Mémoire au 39° Congrès scientifique de France, “tenu à Pau en 1873°. Sous son impulsion, des entreprises à forme coopérative s'organisèrent aux Quatre-Véziaux (vallée d’Aure), à Aulon, à Juncalas (Lavedan), à Cauterets et à Ger. Elles furent sub- ventionnées par le département des Hautes-Pyré- nées. Vers 1880, le Conseil général des Basses- Pyrénées créa deux fruitières, l’une à Bedous, l’autre à Bielle, et les subventionna largement. Elles fonc- tionnèrent d'une manière intermittente pendant “quelques années. Le jour où les subventions furent etirées, elles tombèrent d'elles-mêmes. Tout n'a pas été cependant inutile dans ces ten- tatives. Au cours de ces vingt-cinq dernières années ‘se sont organisées dans la Haute-Garonne des entre- prises portant toutes le nom plus ou moins justifié de fruitières. Elles sont au nombre de 23, sur les- “quelles 14 sont subventionnées par le département Ou par l'État. La fruitière-école de Marignac, dirigée par un jurassien des plus experts, leur fournit des praticiens expérimentés. Ces établisse- 2 CAMPARDON, ouv. cité, Passim, mu: Tarbes, Lescaméla, 18172. > Observations sommaires sur le progrès rural; leur ap- lication à la région des Pyrénées. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. ments vivent et se développent. En 1900, ils ont fabriqué ensemble pour 586.190 francs de beurre et 199.290 francs de fromage. L’Ariège, où le progrès est assez marqué depuis quelques années, possède seize fruitières, dont une seule est coopérative; elles ont produit361.386 francs de beurreet270.364 francs de fromage. Dans les Basses-P yrénées, il n'y a pas de fruitières, mais seulement des laiteries appar- tenant à des propiétaires, et généralement situées en plaine. L'industrie beurrière s'y développe assez rapidement depuis deux ou trois ans. Dans les Hautes-Pyrénées, elle occupe une place insigni- fiante. Il n'y à qu'un seul établissement laitier industriel, la fruitière d'Estansan, subventionnée, qui produitannuellement pour 7.500 et 6.800 francs de beurre et de fromage. Il n'existe d'industrie laitière ni dans le département des P yrénées-Orien- tales, ni dans celui de l’'Aude‘- En somme, les fruitières n'ont pas réussi dans les Pyrénées, du moins jusqu'ici. La plupart de celles que l'on établit perdent très vite leur caractère d'associations pour prendre celui d'indus- tries particulières. Le montagnard pyrénéen, pro- fondément indépendant, est individualiste à l'excès. De plus, il éprouve une naturelle méfiance pour tout ce qui ressemble à une intervention étrangère, qu'elle vienne d'un particulier ou qu'elle procède de l'État. En revanche, nous pensons qu'il n'est peut-être pas aussi rebelle qu'on l'a souvent dit à l'esprit d'association. On observe dans les Pyré- nées de très anciennes formes d'association, restées vivantes et utiles, appropriées aux besoins et aux habitudes. Peut-être l'Administration n’a-t-elle pas su en tirer tout le parti qu'elle pouvait. M. H. de Lapparent en a fait la remarque en ce qui concerne précisément les associations fruitières”, et il reproche au Service forestier d'avoir voulu innover complètement au lieu de prendre pour point de départ des organisations existantes et de chercher à les améliorer progressivement. Il repro- che encore à ces fruitières, ainsi créées de toutes pièces, de n'avoir en vue qu'une seule branche de l'industrie laitière, la fabrication du fromage façon gruyère. C’est, de toutes, celle qui a le moins d'avenir, puisque les débouchés sont accaparés par les producteurs jurassiens et suisses, tandis que la production beurrière aurait un écoulement certain dans les villes du Sud-Ouest et pourrait, ainsi assurée de vivre, travailler à étendre plus loin sa clientèle. Ce double reproche nous parait des plus justifiés. L'erreur, dans les deux cas, est © 4 MINISTÈRE DE L'AGRICULTURE : Enquête sur l'industrie lai- tière. Paris, Imp. Nationale, 1903. 2 H. pe LapparenrT, ouv. cité, p. 39. L'esprit d'association présente bien d’autres manifestations dans les Pyrénées, que nous n'avons pas à indiquer ici. 17 182 H. CAVAILLES — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES la même, et procède de cet esprit d'uniformité qui anime toutes nos administrations. On peut croire qu'avec un peu plus d’habileté, et surtout avec une plus exacte connaissance du milieu, les agents si dévoués du Service forestier finiront par propager dans les Pyrénées la pratique de la coopération. A l'initiative de l'Administration s'ajoute heureu- sement, en diverses malières, celle des municipa- lités et des individus. lei et là, trop rarement, il est vrai, des communes prennent des mesures de conservation ou d'aménagement des pâturages. Elles ne peuvent pas faire grand’chose, étant pour la (plupart très pauvres, comme toutes les com- munes de montagnes. Certains syndicats de com- munes (c'est là une organisation toule pyré- néenne) administrent avec prévoyance les biens indivis dont ils ont la gestion et rendent de réels services. Les propriélaires et les éleveurs, de leur côté, tendent à améliorer le troupeau ou, mieux, à le transformer. Un peu partout, on constate que l’éle- vage de la vache est en progrès, landis que le nombre des moutons diminue. En 1866, il y avait dans les cinq départements pyrénéens 1.979.000 moutons et 549.000 vaches. En 1901 les chiffres sont respectivement1.369.000 moutonset653.000 vaches. Les Pyrénées possèdent de bonnes races de vaches. Celles de Saint-Girons et de Lourdes fournissent d'excellentes laitières; la race gasconne (ou caro- lise) et la race béarnaise produisent des animaux de travail très vigoureux. On a pu dire de ces der- niers qu'ils sont les chevaux arabes de l'espèce bovine. On cherche, par une sélection habile, à développer les qualités naturelles tout en conser- vant la pureté du troupeau pyrénéen. C'est dans ce but qu'ont été créés des livres généalogiques ou Herd-books, l'un pour la variété de Saint-Girons, un autre pour la variété béarnaise (celui-ci en 1902). IV Enfin, l'initiative privée vient de se manifester d'une manière lrès particulière, mais qui nous parait répondre parfaitement aux besoins de la région. Il s'est organisé, il y a bientôt quatre ans, une Associalion régionale, dite du Sud-Ouest navigable, dont le but est d'étudier la décadence de la batel- lerie, d'en observer les causes et d'en chercher les remèdes. Le Sud-Ouest navigable a tenu trois Congrès, à Bordeaux en 1902, à Toulouse en 1903 et à Narbonne l’année dernière. De cette sorte de consultation régionale, il est sorti bien des ensei- gnements, un surtout très clair et très impérieux : la décadence et l'appauvrissement physiologique des Pyrénées. Si bien que l’un des premiers résul- tals pratiques d’une Associalion créée pour amélio- rer des fleuves aura été de provoquer un meilleur aménagement des montagnes. L'idée de grouper en une association désintéressée lous ceux que: préoccupe l'avenir des montagnes en général, et celui des Pyrénées en particulier, a pris naissance en plaine à 200 kilomètres de la chaine. On ne peut donner une démonstration plus éclatante de: cette solidarité d'intérêts qui, de plus en plus, unit toutes les parties d'une même région natu-- relle. Il y a un an et quelques mois, se fondait à Bor- deaux l'Association pour l'aménagement des mou- tagnes. Son but était : 4° de combattre, sur les points les plus menacés, la dégradation et l'appau- vrissement des régions hautes ; 2° de mettre, du même coup, sous les yeux des populations intéres- sées de véritables champs d'expériences où l'ont appliquerait les bonnes méthodes. L'Association réunit dès le début la plupart de ceux qui, par leur- situation ou leur compétence, étaient en mesure de comprendre la portée de l’entreprise et d'en assurer le succès : des ingénieurs, des forestiers, des indus-. triels, des négociants, des professeurs de Facultés, des notabilités politiques de la région pyrénéenne. Elle comple aujourd'hui parmi les siens un mem- bre de l’Institut, et non des moindres, M. A. de Lapparent, dont l'adhésion est des plus significa- lives. L'Association résumait ainsi son programme : « Affermer par des baux à long terme des ter-- rains communaux dans les hautes vallées et les: plateaux que les troupeaux de la plaine, affamés par une longue route, dévastent dès leur arrivée, améliorer les conditions de la vaine pâture pour les usagers, créer des chemins, des abris pour les. bergers, des prairies dont les fourrages faciliteront la stabulation, reboiser les pentes abruptes, em- broussailler les rochers, aménager des päturages boisés où le bétail sera protégé el le sol consolidé, M favoriser la substitulion des vaches aux brebis par À l'organisation d'Associations fruitières, faire cesser m les indivisions désastreuses de la propriété entre communes françaises et étrangères, remettre enfin aux communes un domaine pastoral amélioré, avec” des forêts en plein rapport dont le revenu sera plus que suffisant pour son entretien, afin dem montrer aux populations, par une action directe, lan solidarité des industries forestière et pastorale; « Propager par des publications, des Conférences el des Congrès les moyens les plus efficaces pour régulariser le régime des eaux et pour résoudre 1 double problème, identique comme solution, de. conserver aux montagnes leur terre et leur popu=M lation ; : . 0 . 4 « Aider de ses subventions les entreprises partis ns di ss CS 0 CR H. CAVAILLÈS — L'ÉCONOMIE PASTORALE DANS LES PYRÉNÉES 183 culières, collectives ou communales concourant au même but. » Fondée le 21 avril 1904, déclarée le 6 mai, l'Asso- ciation affermait le 29 mai, par voie d'adjudication et pour une période de cinq ans, les pàlurages des vallées de la Géla et de Saux. Propriété indivise des communes de Guchan et de Bazus-Aure, ces pâlu- rages occupent, dans la haute vallée de la Neste d'Aure*,une superficie d'environ 2.000 hectares. Dès la première semaine de la location, l'Association faisait reconnaitre le territoire, organisait les ser- vices de garde, exécutait les réparations de chemins les plus urgentes, négociait des conventions avec les communes propriétaires et recueillait les élé- ments d'un plan d'aménagement et de devis pour les travaux d'amélioration forestière et pastorale. Ce territoire n° 1, qui recevait les années précé- dentes, en dehors du gros bétail des communes propriétaires, 3.000 bêtes à laine espagnoles et 800 des communes, se trouvail, du fait de sa location, libéré des 3.000 moutons espagnols, ce qui suppri- mait la surcharge du päturage. C'était un heureux début. En refusant l'entrée des herbages à l'entrepreneur espagnol qui les occupait jusqu'alors, on évitait d’avoir à évincer des compatriotes, des montagnards peut-être, qui fussent devenus des rivaux dangereux. Les trou- peaux de la vallée se trouvaient dans l'abondance, en même temps qu'une partie considérable du pâtu- rage restait disponible, ce qui permettait de laisser reposer les portions les plus dégradées. On put aussitôt entreprendre des travaux de restauration . sur les flancs du pic Poc (2.439 mètres), qui domine au centre les vallées de la Géla et de Saux. Ces premières mesures ont donné des résultats immédiats qui surprendront peut-être ceux qui ne savent pas combien esl grande leur efficacité. A la suite de la sécheresse exceptionnelle de l'été der- nier, qui avait transformé toutes les pelouses en paillassons, les pâturages voisins, surchargés de bétail, ont été profondément ravinés par un violent orage survenu le 6 août, tandis que ceux où l’Asso- - ciation avait réduit le nombre des moutons n'ont pas été dégradés. La démonstration a déjà paru convaincante. Et, comme l'exemple est contagieux, que les avantages offerts sont considérables et purement gratuits, il ! ASSOCIATION POUR L'AMÉNAGEMENT DES MONTAGNES. But de Association, son programme, début de ses opérations. L Bordeaux, 1904. ? Hautes-Pyrénées. se produit autour du terrain d'expérience un pre- mier mouvement d'attention parmi les populations montagnardes. A l'heure actuelle, une commune limitrophe, celle de Tramezaïgues, a demandé l'extension des opéralions à son domaine; elle l'obtiendra sans aucun doute. Dans une vallée voi- sine, l'importante commune de Campan a supprimé la transhumance sur son territoire et réglementé l'achat du bétail pour éviter la fraude. Ce sont là des résultats encourageants. Aujourd'hui, l'Association pour l'aménagement des montagnes esten pleine prospérité. De précieux concours s'offrent à elle. Le Conseil général des Hautes-Pyrénées, dans sa session d'avril 4904, lui a promis son appui moral, La Chambre de Com- merce de Bordeaux, le Conseil général de la Gironde et le Ministère de l'Agriculture lui ont accordé des subventions. Mais cela ne suffit déjà plus. Aussi prépare-t-elle, dans un but d'étude et de propa- gande, une importante manifestation de l'idée pastorale et foreslière. Son premier Congrès vient de se tenir à Bordeaux, et a été suivi d'une visite collective de son terriloire n° 4. Les Compagnies des chemins de fer du Midi et de l’Orléans ont montré l'intérêt qu'elles lui portent en accordant à ses sociétaires la réduction individuelle de demi- place. V Par des moyens divers et sous des formes variées, c'est donc la mise en valeur des Pyrénées qui se prépare. La tâche sera rude, car les résis- tances seront longues et obstinées. Mais l'œuvre vaut la peine qu'on l'entreprenne, puisqu'il s'agit de transformer toute une région, l’une des plus belles et des plus vastes de notre pays. Ceux quis'y appliqueront trouveront, d’ailleurs, des auxiliaires puissants : d’abord une nature généreuse, un sol robuste, un chaud soleil, des pluies abondantes; ensuite une population qui, avec bien des défauts, a d’incontestables qualités de ressort et d'initiative. Il y a plus de deux siècles, Froïdour, le premier en date des grands forestiers français, rendait justice à la finesse et à l'énergie de la race : le Gascon, remarquait-il, « fail plus qu'il ne dit ». Le Pyré- néen est un insoumis et un nomade, parce que son éducation sociale et économique n’est pas faite. Le jour où il sera mieux informé, iln'est pas démontré qu'il ne deviendra pas aussi avisé et aussi labo- rieux que le Jurassien ou le Savoyard. H. Cavaillés. 184 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Czuber (E.), professeur ordinaire à la Technische Hochschule de Vienne. — Wahrscheinlichkeits- rechnung und ihre Anwendung auf Fehleraus- gleichung, Statistik und Lebensversicherung. — 4 vol. in-8° de xv-594 p. (Prix : 24 mx). Leipzig, T'eubner, 1905. « Il n’est pas de branche de la Science — de la Science mathématique, du moins — plus intéressante, et il n’en est pas de plus importante que le Calcul des probabi- lités. Il n’en est pas, cependant, que les mathématiciens aient moins cultivée et à laquelle ils fassent faire moins de progrès. C’est sans doute, il faut bien le dire, parce qu'il n’en est pas de plus déconcertante, et en face de laquelle nous nous sentions plus désarmés. Pour se rendre compte combien les difficultés sont grandes, et combien, cependant, leur résolution im- porte à toutes nos connaissances, il suffit de se reporter à l’article publié par M. Poincaré dans la ÆRevue du 15 avril 4899. Notons seulement que, depuis le moment où cet article a été écrit, la Physique manifeste une tendance de plus en plus accentuée à faire appel aux théories moléculaires, c'est-à-dire à la loi des grands nombres et au Calcul des probabilités, dont les prin- cipes mêmes se trouvent mis en jeu, de sorte qu'on prévoit le moment où toute étude du monde physique devra reposer sur une étude approfondie de ces prin- cipes. Et qui eût soupçonné, hier encore, que les résultats du Calcul des probabilités allaient devenir indispensables à la Biologie? On comprend donc l'intérêt qui doit forcément s'attacher à une exposition un peu complète du Calcul des probabilités : et, par complète, il va sans dire que je n'entends point une exposition où rien ne soit passé sous silence, mais une exposition qui n'esquive pas les difficultés, qui, au lieu de développer un simple chapitre d'Analyse combinatoire ou de Calcul intégral, donne au côté expérimental, pratique, du problème la place à laquelle il à droit, la principale. C’est un ouvrage de cette espèce que nous apporte M. Czuber. Il est évident, d’après ce que nous venons de dire, que les mathématiciens seront, pour la plupart, disposés à tourner un peu vite les pages relatives à la probabilité sous sa forme classique. Elles représentent des notions qui leur sont familières ; mais elles sont une préparation nécessaire à tout ce qui va suivre. Notons seulement les quelques paragraphes consacrés au côté philoso- phique de la question, qui s'imposaient dans un pareil sujet; et aussi l'étude si intéressante des déviations moyennes (différences entre la probabilité et le pourcen- tage des épreuves favorables). Le problème commence à s’élargir avec les probabi- lités géométriques. C'est un sujet que l'auteur à traité d'une manière plus développée dans son ouvrage inti- tulé Probabilités et moyennes géométriques. Comme dans l'ouvrage en question, il nous semble que, dans celui qui nous oceupe actuellement, les «cas également possibles » ne sont pas toujours assez rigoureusement définis. Cette définition est bien donnée pour les pro- babilités d'événements dépendant d'un point mobile. Mais ce n’est pas, par exemple, ce qui a lieu pour le problème de l'aiguille de Buffon. Je sais bien que, dans ce cas, il ne peut y avoir d’hésitation. Ce n’est pas une raison pour ne pas remarquer qu'il y a là une conven- lion, et une convention nouvelle. Le choix n’a même pas ce caractère d’évidence dans l'exemple précédent (n° 47, p. 71) : est-il parfaitement clair que la probabilité d'une division de la longueur donnée a en trois parties ET INDEX x, ÿ, Z, Soit proportionnelle à la surface décrite par le point x, y, z, dans le plan xÆy+z=a? Une erreur plus surprenante est le théorème du n° 58, relatif à la valeur moyenne d'une quantité S dans une aire A : la proposition est exacte si cette aire est dilatée d’une quantité constante sur tout son con- tour, ou si S conserve une valeur constante lorsqu'on fait varier l'un des points considérés par ce contour; c’est précisément ce qui se produit dans les exemples traités par l'auteur; en dehors de ces cas, la conclu- sion énoncée n’est pas vériliée en général. Mais c'est avec la probabilité expérimentale que nous entrons dans la partie véritablement vitale du sujet. La première notion qui se pose à ce point de vue est connue sous le nom de probabilité des causes : dénomination qui est, il est vrai, assez imparfaite, et à laquelle M. Czuber préférerait voir substituer celle de probabilité des hypothèses. Il est à noter qu'une question de cette espèce, et relative aux inclinai- sons des orbites des planètes sur le plan de l’éclip- tique, s’est incidemment posée dès le premier chapitre (n° 41) : il aurait peut-être été utile de remarquer qu'elle relevait, en réalité, des considérations déve- loppées actuellement. Une partie véritablement critique, cruciale de la théorie se présente ici dans le passage du cas où divers: événements sont également possibles, parce que tous se trouvent également en puissance dans les données, à celui où cette possibilité n’est que subjective et résulte de notre ignorance. L'auteur a soin de présenter ce passage dans deux questions aussi comparables entre elles que possible sous tous les autres points de vue : plusieurs urnes de compositions différentes, d’une part; une urne de composition inconnue, de l’autre. Peut-être aurait-il pu insister encore davantage sur les relations qui existent entre le second de ces deux pro- blèmes et ceux qui sont à présenter dans la suite. Mais on lit avec intérêt la discussion qu'il consacre à cette délicate notion et aux erreurs que l’on peut commettre à cet égard. Vient ensuite la notion de l'espérance mathématique, à propos de laquelle sont énoncés et démontrés les beaux théorèmes de Tchebycheff sur la probabilité des moyennes. On se serait sans doute tenu à cette notion si la question était restée entre les mains des mathémati- ciens. Mais, ici, le théoricien pur, trop souvent sem- blable « à un peintre qui saurait harmonieusement combiner les couleurs et les formes, mais à qui les modèles feraient défaut‘ », n'a pas été livré à lui- mème. La théorie des probabilités a eu cette heureuse fortune d'être en rapport direct avec les applications, et avec les plus tangibles de toutes, puisqu'il s’agit d'applications financières ; ce sont elles qui lui ont tracé sa voie. On leur doit, en l'espèce, la conception importante et féconde de risque. Le lecteur de l'ou- vrage de M. Czuber verra combien celle-ci, et les notions connexes de risque moyen et de risque relatif, éclairent la question. C’est, par contre, aux mathématiciens — à Bernoulli et à Laplace — que l’on doit la notion d'espérance morale. C’est, nous semble-t-il, un exemple typique des erreurs commises en matière sociale que celui-ci : les théoriciens des questions financières laissant aux savants le soin de découvrir, et même refusant de voir après eux, qu'une même somme d'argent n'a pas la même importance pour tout le monde. 1 Poincaré : Congrès des Mathématiciens (Zürich, 1897). | i BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 18 Les économistes, dans ces derniers temps, songent à adopter ce point de vue, et le chapitre dont nous venons de nous occuper aboutit aux relations entre . cette théorie et les travaux des Walras et des Paréto. Malgré leur importance pratique, ces notions n'ont été exposées qu'au point de vue général et théorique. Nous ne pénétrons sur le terrain des applications que dans une deuxième partie, et par un tout autre côté : l'étude des erreurs d'observation. La loi de Gauss est examinée avec toute l'attention qu'elle mérite et déduite successivement des diverses considérations qui y conduisent. La marche suivie pour la faire découler de l'existence d'un grand nombre de causes d'erreur indépendantes, marche empruntée à Crofton, me paraît un peu artificielle, un peu synthé- tique : je préférerais une démonstration qui mit mieux en évidence le mécanisme par lequel le phéno- mène se régularise. Il est particulièrement intéressant de constater comment cette notion de risque, que nous avons vue naître de questions financières, joue un rôle essentiel dans un sujet de science pure comme la théorie des erreurs. C'est un risque d'erreurs tout analogue au risque commercial qui est en jeu dans cette théorie. C'est ce point de vue qui, en particulier, fournit à M. Czuber le fondement de la méthode des moindres carrés. Celle-ci est, bien entendu, appliquée à une série d'exemples empruntés à la Géodésie et à la Physique. J'aurais aimé que l’un de ces exemples füt rappelé au moment même où la question est posée : leur absence donne, à mon avis, un peu d’obscurité à son énoncé. On passe ensuite (troisième partie) aux applications statistiques. Sur un point, M. Czuber cesse de mériter entièrement l'éloge que nous lui décernions en com- mençant. Nous n'irons certes pas lui reprocher de n'avoir pu traiter les questions de Mécanique Statis- tique : il lui aurait fallu écrire un nouveau volume aussi important que le premier; mais il est étonnant qu'on ne trouve aucune allusion à ce côté de la question. Statistique est donc pris exclusivement dans le sens démographique. On est ainsi conduit à l’attachante théorie de la dispersion et aux beaux résultats que Lexis a obtenus sur ce sujet. Les exemples donnés par M. Czuber mettent en évidence les lois si précises et si remarquables qui gouvernent les phénomènes étudiés. Tout au plus pourrait-on lui reprocher de n'avoir «jamais indiqué que des valeurs « normales » du coeffi- cient de dispersion et de n'avoir pas donné l’ordre de randeur des valeurs « surnormales », par exemple ans le cas de la mortalité par sexes entre trente et soixante-quinze ans. Est abordée, en second lieu, l'étude des quantités sta- tistiques ex{ensives, c'est-à-dire qui se mesurent au lieu d'être le résultat d'une numération (telle que la durée de la vie humaine) : étude qui est, avec la première, dans un rapport analogue à celui qui lie les moyennes aux probabilités. La méthode employée consiste, d'ailleurs, à ramener cette seconde question à la première, en comptant le nombre de valeurs de la grandeur considérée qui sont comprises entre deux limites données. La mesure de la mortalité offre l'application de ces - données générales, mais avec des difficultés et des “ causes d'erreurs nouvelles qu'il faut éliminer, et qui … résultent, pour la plupart, de l'impossibilité d'observer une génération, c'est-à-dire une collection bien déter- . minée d'hommes nés à la même époque. Mathémati- - quement, d’ailleurs, cette partie du problème est assez simple, non qu'elle ne présente bien des points obscurs et non encore élucidés à l'heure actuelle, mais ces k on re , - obscurités ne sont pas généralement de nature mathé- * . matique : - nées pour apprécier exactement tel ou tel élément du elles résultent de ce qu'on manque de don- - problème, et que la solution est alors subordonnée aux hypothèses qu'on peut faire à cet égard. L'étude des formules propres à représenter les résul- tats obtenus conduit aux intéressantes hypothèses de <, Gompertz et Makeham et, d'autre part, aux méthodes graphiques d'interpolation. La concordance des unes et des autres avec la réalité est étudiée d’une manière approfondie. Les questions d'invalidité et la dernière partie de l'ouvrage, consacrée aux calculs d'assurances, nous font entrer dans un domaine quelque peu technique, et qui, s'il nous offre l'application directe des con- sidérations scientifiques développées jusque-là, s'écarte notablement de leur esprit. Il n'est certes pas indif- férent de voir ces considérations revêtir une expression concrète el intervenir dans des exemples précis. Mais, parmi les nombreuses combinaisons usitées dans la pratique d'assurances, deux ou trois suffiront à donner au lecteur une idée des problèmes qui se posent et de la marche suivie pour les résoudre. Certains points attireront cependant l'attention, même au point de vue purement scientifique : la facon dontles hypothèses de Gompertz et Makeham permettent de simplifier les cal- culs, la théorie des réserves, celle du risque, pour laquelle M. Czuber semble fondé à réclamer des mé- thodes moins empiriques, etc. Nous espérons avoir fait sentir la richesse et l'impor- tance des matières traitées par l’auteur. Si l’on réflé- chit à la rareté et à la timidité des essais tentés dans le même sens, on ne peut s'empêcher de trouver qu'il a rendu un véritable service au monde savant. Jacques HabamaARD, Professeur adjoint à la Sorbonne, Professeur suppléant au Collège de France. 2° Sciences physiques Randau (Paul). — La Fabrication des Émaux et l'Emaillage, traduit et annoté sur la troisième édi- tion allemande par M. Ex. CAMPAGNE, 2ngénieur-chi- miste. — 1 vol. in-8° de 250 pages avec 3 figures. (Prix : 7 fr. 50.) Veuve Dunod, éditeur. Paris, 1905. Il y a dans l’industrie de l’'émaillage, considérée dans ses grandes lignes, deux séries d'opérations : la pré- paration des émaux et leur application sur les corps qui doivent les recevoir. L'auteur a suivi une marche méthodique, qui ne s’écarle pas sensiblement de la direction rationnelle; il divise son sujet en deux par- ties : les matières premières et la fabrication. Les matériaux destinés à composer les émaux sont les éléments de borates et silicates vitrescibles, c'est-à- dire ceux de verres alcalins, alcalino-terreux et plom- beux. Nous trouvons donc au début une description des diverses variétés commerciales de produits utili- sables à bon compte pour fournir la silice, l'acide borique, la potasse, la soude, l'alumine, la chaux, la magnésie. Les émaux ne sont pas employés constam- ment à l'état incolore ; au contraire, la palette dont dis- pose l'émailleur est suffisamment variée. Une fois les matières premières décrites, nous avons donc à faire connaissance avec les substances destinées à l’établis- sement des colorants. L'essai des matières premières, le broyage et le mélangeage font suite à la description des oxydes aptes à former les couleurs et à leur pré- paration, et terminent la première division. Dans la partie intitulée « Fabrication », l'auteur nous décrit les appareils de fusion et nous donne la manière de composer les controxydes et les glaçures, ainsi que la manière de les appliquer. Puis viennent la cuisson des émaux et une série de petites monographies ayant trait aux spécialités (émaillage de la tôle, émaux déco- ratifs, émaux des cadrans de montre, émaux cloi- sonnés, etc.). Il est certain que les traductions ont leur utilité, quand il s’agit d'ouvrages que la notoriété de l’auteur, l'originalité du sujet ou les particularités traitées rendent intéressants. Je connaissais déjà l'édition alle- mande du traité de M. Randau ; elle ne m'a jamais paru supérieure au Manuel-Roret de l’'émailleur. Rappelons à ce propos que, si l'ouvrage a eu trois éditions en Allemagne, c'est uniquement parce que les publications 186 sur ce sujet sont rares et que le lecteur doit se con- tenter de ce qu'il trouve. Pour celui qui n'a aucune idée de l’'émaillerie, l’ou- vrage que nous présentons semblera plein de rensei- gnements; il est certain qu'il lui donnera une notion des manœuvres que nécessite l’'émaillage. Le spécialiste, malheureusement, sera déçu. Il ne trouvera que des généralités et des recettes quelconques non raisonnées qui ne lui apprendront rien. j Les éditeurs oublient presque toujours que la tra- duction d’un ouvrage industriel exige, à côté de la con- naissance de la langue, celle de la technique. M. Cam- pagne, jeune chimiste diplômé de l'Ecole de Nancy, a fait tous ses efforts pour donner une traduction très satisfaisante, trop satisfaisante même, car il a respecté certaines données de l’auteur qui auraient semblé des hérésies à un technicien. Je regrette qu'il ait cédé à la tentation d'écrire un appendice. D'abord, un appendice détruit l'unité d’un ouvrage ; ensuite, l'addition de con- sidérations théoriques est hors de propos dans un livre aussi dégagé d'esprit critique dans toutes ses pages. L'idée d'introduire l'émaillage des bicyclettes n’est pas heureuse non plus; ce n’est pas un émail que l’on applique dans ce cas, mais bien un vernis au four. Il y a là de quoi amener la confusion dans les idées du lecteur. En se bornant à la reproduction pure et simple de l’ouvrage de l’auteur, M. Campagne n'aurait encouru aucune responsabilité et eût fait mentir le vieux pro- verbe : {raduttore, traditore. A. GRANGER, Docteur ès sciences, Professeur de Technologie céramique à l'Ecole d'application de la Manufacture de Sèvres. Semichon (Lucien), Directeur de la Stalion œnolo- gique de l'Aude. — Traité des Maladies des Vins. — 1 vol. in-8 de 625 pages avec 13 planches et 116 figures. (Prix : 10 fr.) Coulet et fils, Montpellier ; Masson et Ci, éditeurs, Paris, 1905. Les vins sont sujets à de nombreuses maladies : la classification qu'en a adoptée M. Semichon est très rationnelle et pratique; elle consiste à les réunir sui- vant leurs causes : les unes proviennent des altérations des raisins eux-mêmes (mildiou, oïdium, blackrot, etc.); d’autres proviennent d'un défaut de maturation; d’autres proviennent de la fermentation qui s’est accom- plie dans des conditions défectueuses; d’autres, enfin, prennent naissance aux cours des manipulations que le vin subit postérieurement à la fermentation. M. Semichon étudie donc successivement toutes ces causes d’altération : il montre la facon dont chacune de ces causes agit, la façon dans les maladies dont elles sont l’origine se développent et les résultats qu'elles engendrent. Dans cette connaissance des ma- ladies des vins, la science a fait depuis quelques années, et surtout depuis que les études microbiologiques se sont développées, d'importantes acquisitions. Si cer- taines maladies des vins ont des causes physiques ou chimiques, un plus grand nombre ont des causes bio- logiques. L'étude des ferments figurés et celle des dia- stases a donc pu jeter une vive lumière sur les ques- tions que M. Semichon étudie. L'auteur à traité cette partie de la question avec tous les développements qu'elle comportait : il est néces- saire que les viticulteurs, auxquels ce livre peut rendre de très grands services, connaissant les causes des mala- dies contre lesquelles ils ont à se défendre, car de la connaissances de ces causes découle nécessairement la connaissance des moyens propres à entraver le déve loppement des maladies. Il en est, en effet, de la méde- cine des vins comme de la médecine humaine; c’est la médecine préventive, l'hygiène des vins, qui est la meilleure. Les remèdes que l’on peut appliquer aux vins consistent soit en traitements physiques, soit en traitements chimiques. Les premiers ont l'avantage de n'introduire dans le vin aucune substance étrangère ; la pasteurisation par la chaleur, la filtration, la réfri- géralion, etc., agissent efficacement dans certains cas; BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX mais ils ne suffisent pas toujours et il faut avoir quel- quefois recours aux traitements chimiques. Il faut alors agir avec circonspection, car l'addition au vin d’un produit chimique quelconque peut avoir des inconvé- nients, soit qu'elle ait pour résultat de favoriser les fraudes, soit qu'elle puisse être répréhensible au point de vue de l'hygiène en introduisant dans le vin des éléments étrangers. Il ne faut, cependant, pas pousser la circonspeetion trop loin et interdire, comme le vou- draient certains intransigeants, l'addition de quoi que ce soit au vin. A ce point de vue, il y a une distinction à faire entre les substances ajoutées, suivant que celles-ci font déjà partie de la constitution des vins normaux ou suivant qu'elles sont étrangères à cette composition. L'emploi de l'acide tartrique et du sucre, par exemple, a été conseillé par tous les œnologues pour corriger la composition des moûts de vendange, l'addition du pre- mier étant utile dans les régions trop chaudes, telles que l'Algérie et la Tunisie, et l'addition du second étant ulile dans les régions où le raisin mürit insuffisam- ment. Le tannin est d'un emploi courant et recomman- dable surtout pour aider à la clarification des vins blancs. Pour les produits étrangers aux vins, il faut évi- demment être bien plus circonspect. Certains d’entre eux sont cependant d'un usage si ancien que la preuve de leur innocuité est établie. Tel est l'acide sulfureux, dont on tend cependant à abuser actuellement. Le traitement des maladies des vins a donné lieu à un commerce important de produits œnologiques. Il en est, parmi ceux-ci, de fortrecommandables, maisilen est aussi de détestables et dont le but le plus clair est de favoriser la fraude. 11 serait très désirable que ce commerce fût soumis à une réglementation. Mais ce qui est plus désirable encore, c’est que les viticulteurs el les négociants apprennent à connaître les maladies des vins et les moyens d'y porter remède : ils n'auront plus alors recours aux procédés empiriques. L'ouvrage de M. Semichon nous paraît propre à faire de bonne besogne dans celte voie, et il est à désirer qu'il soit consulté par les intéressés. X. ROGQUESs, Chimiste expert des tribunaux de la Seine, Membre du Comité technique d'Œnologie. 3° Sciences naturelles Loeb (Jacques), Professeur de Physiologie à Univer- sité de Californie. — Studies in general Physio- logy. — © vol. in-8°, of The decennial publications of the University of Chicago. Chicago : the University of Chicago Press; London: T. Fisher Unwin, Pater- noster square, 1905. Loeb, sollicité de fournir sa contribution aux publi- cations commémoratives de l'achèvement de la pre- mière décade d'existence de l’Université californienne, a réuni en deux volumes ses travaux les plus impor- tants de Physiologie générale, épars jusqu'ici dans divers recueils ou édités à part. Assurément, presque tous sont bien connus des biologistes, mais il estnéan- moins très intéressant de les (trouver rassemblés, d'au- tant plus que ces travaux, si variés qu'ils soient, pré- sentent une remarquable unité, au point de vue des idées théoriques dirigeant la recherche. Loeb a étudié la morphologie des formes fixées, et un certain nombre de phénomènes vitaux, tels que la locomotion, la régé- nération, la fécondation, en cherchant à établir leur déterminisme physico-chimique, ou plus exactement en spécifiant les modifications morphologiques ou phy= siologiques qui se produisent lorsqu'on change expéri= mentalement l'une des conditions ambiantes: Loeb à été aussi lun des premiers à comprendre qu'il était indispensable de faire pénétrer en Biologie les acquisis tions récentes de la Chimie physique, et toute une série de recherches traite de l'effet des ions sur les tissus: C'est ainsi qu'il a été amené à sa découverte mémo= rable de la parthénogénèse artificielle, découverte qui est encore loin d'avoir porté tous ses fruits, mais qui a déjà modilié considérablement nos idées sur le rôle LL PRE NUE à RC n ue RSS BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 187 du gamète mâle et la signification de la fécondation. | est contrebalancé dans la nature (soit dans l’eau de Bien qu'il soit très difficile de résumer une œuvre telle que celle de Loeb, j'essaierai néanmoins d'indiquer les résultats principaux auxquels il est arrivé, ou tout au moins l'orientation de ses recherches. Tropismes. — Loeb montre l'identité de l'héliotro- pisme chez les animaux et les végétaux; de même que pour les plantes, ce sont les rayons les plus réfrangibles ‘lu spectre qui ont l'effet maximum. Les animaux fixés présentent des courbures héliotropiques tout à fait typiques. Non seulement l'héliotropisme varie d'inten- sité suivant le sexe (Fourmis, Papillons) et l'époque de la vie, mais on peut en changer le signe en élevant ou abaissant la température, ou en concentrant ou diluant l'eau de mer (déterminisme des migrations verticales d'animaux pélagiques, etc.). Il est des animaux photo- kinétiques (Serpules) qui ne réagissent qu'à des chan- gements dans l'intensité de la lumière. Le géotropisme négatif amène beaucoup d'animaux à vivre à la surface de la mer (Asterina gibhosa). La combinaison des stéréotropismes et du géotropisme détermine la structure de l’Antennularia, au point de vue de la différenciation en tige, racines et polypes, tandis que le puissant stéréotropisme négatif des tiges de Campanularia détermine leur orientation. [1 s'ensuit de l'étude des tropismes que tout ce qui a été pris pour l'effet de la volonté et de l'instinct est, en réalité, l'effet de la lumière, de la gravité, de la friction, de l’action des corps chimiques, etc., c'est-à-dire que ces phéno- mènes sont indépendants du système nerveux. Morphogénèse. — Les processus morphogéniques sont déterminés par des substances chimiques qui se forment dans l'animal au cours de son évolution; tout n'est donc pas déterminé dans l'œuf, et le développe- ment est, en somme, une épigénèse. Ainsi, la distribu- tion des chromatophores sur le sac vitellin de Fun- dulus est l'effet d’une attraction que le sang des vaisseaux bien développés exerce sur les chromato- phores complètement formés. Le nombre de ces chro- matophores est influencé par la quantité de lumière ; il s'en forme beaucoup moins sur les embryons tenus à l'obscurité. — Chez un embryon de Fundulus, dont le cœur est immobilisé par un poison cardiaque, il se développe cependant un appareil circulatoire complet, sans qu'il y ait de pression sanguine. — Chez la larve d'Amblystome, les processus morphogénétiques sont indépendants du système nerveux central, qui peut être partiellement supprimé sans altérer la métamorphose. Régénération et hétéromorphoses. — Chez certains animaux, il est possible de déterminer des régénéra- tions hétéromorphiques en soumettant les tissus à des æxcitations spéciales (apparition d’une tête aux deux bouts d’une tige chezle T'ubularia; formation de siphons supplémentaires chez le Ciona, etc.), tandis que d’autres espèces ont des tissus à polarité définie, interdisant toute hétéromorphose (Cerranthus, Hydra, Astérie, etc.). — Les tropismes dirigent la régénération; chez le Cam- panularia, par exemple, sous l'influence d'un contact, les polypes régressent et se transforment en stolons.— ‘Chez la Tubularia, la croissance et la régénération dé- pendent, comme chez les plantes, de la quantité d’eau absorbée ; si la concentration de l'eau de mer décroit, la croissance devient plus rapide; dans l'eau sursalée, la régénération est impossible; enfin celle-ci dépend “également de la teneur de l’eau en oxygène et en sels. Par une exception unique chez les Arthropodes, les Pycnogonides sont capables de régénérer des parties considérables de leur corps. . Etudes sur les ions. — Loeb vérifie la théorie de Van’t Hoff sur la pression osmotique, appliquée à l'action des sels ionisés sur un muscle détaché du Corps; il y a des ions (Na, CI, etc.) qui excitent la production de contractions rythmiques, d’autres (Ca, K, etc.) qui les inhibent, tandis que les non-électrolytes n'ont pas d'action. Une solution pure de NaCI, isosmo- tique avec l’eau de mer, est un fort poison pour la plu- part des animaux marins; l'effet toxique des ions Na mer, soit dans le plasma sanguin) par l'addition d’une petite quantité d'ions Ca et K. L'irritabilité des tissus dépend des ions variés, spécialement des métalliques (Ca, Na, K, Mg) qui y existent en proportions définies, variables pour chaque tissu; l'effet antitoxique de cer- tains ions est fonction de la grandeur et du signe de leur charge électrique; il en résulte que de faibles variations dans la proportion ou la valence de certains ions de la peau, des muscles ou du système nerveux peuvent amener des modifications fonctionnelles con- sidérables. Parthénogénèse expérimentale. — On sait que cer- tains ions inhibent les phénomènes causés par d’autres ions; ainsi des muscles striés de Grenouille battent rythmiquement dans une certaine solution de NaCl ou NaBr, tandis que, dans le corps de l'animal, cette action est inhibée par la présence dans le sang des ions K et Ca. D'autre part, des œufs d’Oursin fécondés se seg- mentent très bien dans des solutions à un certain titre de MgCP, bien dans KCI, mal dans CaCl et Na; ïl semble donc que les ions Mg et K sont favorables à la division, tandis queles ions Ca et Na sont défavorables. Partant de ces données, Loeb a traité des œufs non fécondés par des solutions salines présentant soit une réduction d'ions Na et Ca, soit un accroissement en ions Mg ou K, et effectivement il a obtenu des déve- loppements parthénogénétiques allant jusqu'à la for- mation de larves. Bien que sa théorie l'ait conduit à un résultat escompté, il ne s'ensuit pas qu'elle soit exacte; en effet, Loeb a dû l’abandonner; la parthénogénèse peut être provoquée par des agents tellement variés, qui agissent sur telle espèce et non pas sur une autre, qu'il est impossible jusqu'à présent d’édilier une théorie générale. Très souvent (Oursins), la parthénogénèse est provoquée par un accroissement de la pression osmotique du liquide ambiant, en somme par une cer- taine déshydratation de l'œuf; l'augmentation de pres- sion peut être obtenue aussi bien par des électrolytes que par des corps non conducteurs (sucre de canne, urée). Les ions K ont une action spécifique sur les œufs de Chetopterus; l'agitation mécanique, le refroidisse- ment, une trace de HCI amènent le développement des œufs mûrs d'Asterias; un sel de calcium est actif pour l'Amphitrite, ete. Cet exposé rapide de l'œuvre d’un des premiers biolo- gistes de notre époque montre, une fois de plus, la fécondité des recherches conçues et dirigées par un esprit résolument moniste. Loeb, qui doit être servi par une éducation physico-chimique assez rare chez les biologistes, traite la matière vivante comme une substance chimique quelconque ; il ne se laisse pas abuser par les mots commodes de volonté, instinct, force vitale, et il leur substitue les tropismes. S'il exis- tait une anthologie moniste, il faudrait y placer en par- ticulier ce petit mémoire de 8 pages : « On Instinet and Will in Animals » (1890), qui montre avec une netteté incomparable comment on doit poser les problèmes biologiques. L. CuéNor, Protesseur de Zoologie à l'Université de Nancy, Pacottet (Paul), chef du Laboratoire des recherches viticoles à l'Institut national Agronomique, maitre de Conférences à l'Ecole nationale d'Agriculture de Grignon. — Viticulture. — 1 vol. de l'Encyclopédie agricole. (Prix : 5 fr.) Baillière, éditeur. Paris, 1905. M. Pacottet vient d'exposer l'état actuel de la viticul- ture dans un livre qui est une mine de renseignements intéressants, d'observations judicieuses et originales. L'auteur débute par une étude méthodique de l’ana- tomie des rameaux, des racines, des feuilles, des grappes et des grains. La clarté des descriptions est complétée par des figures très nettes. Un chapitre, très documenté, est consacré aux fac- teurs de la qualité des vins, cépage, sol, climat; un 188 autre, à la géographie viticole française et étrangère. Des cartes, des coupes de terrains facilitent la lecture ; cependant certaines vues photographiques de clos, à trop petite échelle, manquent un peu de netteté. Les procédés de multiplication de la vigne, semis, bouturage, marcottage, greffage, sont étudiés en détail, ainsi que les opérations nécessaires pour la création d'un vignoble : défoncement, plantation, tuteurage, etc. Les opérations culturales, tailles, labours, fumure, sont l'objet de petites monographies très instructives. L'auteur donne, en particulier, une étude très claire sur les différents systèmes de taille. Il n'existe pas, à notre connaissance, de classification méthodique des tailles de la vigne : que le lecteur et l’auteur nous excusent d'en proposer une ici. Dans une souche, on distingue la charpente et les branches fruitières. La charpente est constituée par un bras; deux bras; plusieurs bras ou gobelet; un cordon horizontal simple ; un cordon horizontal double ou espalier ; un cerele ; une tête de saule ; une palmette, etc. La branche fruitière se présente sous trois aspects : 1° La taille courte : sarments de 1, 2 ou 3 yeux; 20 La taille longue : sarments de plus de 3 yeux; 3° La taille mixte: comportant, sur le même cep, des sarments courts et des sarments longs. Ces notions simples nous permettent d'établir le tableau suivant, dont les cases vides peuvent facile- ment être multipliées et remplies: TaBceau |. — Classification des Taïlles de la Vigne. CHARPENTES TAILLE COURTE | TAILLE LONGUE TAILLE MIXTE T. ancienne du Pinot en Bour- gogne. T. en archet. (Côte-Rôtie). T. Guyot Un bras. : simple. : T. Guyot T. ancienne. double. du Médoc. T. de Qua- rante. T.Cazenave. T. Sylvoz. | T. mixte de Royat. Deux bras. Cordon hori- zontal T. de Royal. simple. T. de Tho- Inery. T.Mesrouze. Espalier. Gobelet, Cer- || cle, Pal- Etc. mette, etc. Avant d'indiquer la pratique de l'emploi des engrais dans la culture de la vigne, M. Pacottet rappelle les principes qui aident à la détermination d’une fumure rationnelle. Il n'attache qu'une importance secondaire à la loi de restitution. Nous sommes heureux de le constater, et nous allons plus loin en disant que la loi de restitution est une erreur enseignée dans des milliers d'écoles francaises. Il est vrai que les agriculteurs n’en tiennent aucun compte, mais leur confiance dans les données dites scientifiques est grandement diminuée par ces hypothèses érigées en articles de foi. Une revue ampélographique documentée sur les cé- pages américains purs et hybrides conduit M. Pacottet à l'examen d'une question d'avant-garde : celle de la possibilité de la création d'hybrides asexuels dus à la greffe. D'après M. Daniel, ces hybrides se produisent BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX assez fréquemment et peuvent acquérir des caractères spécifiques transmissibles par hérédité; M. Pacottet admet parfaitement qu'un cépage greffé peut varier plus qu'un cépage franc de pied, mais que ces variations dues au greffage sont légères et passagères et ne peu- vent être rendues responsables des désastres viticoles derniers: abondance de vin inférieur et diminution de résistance aux agents extérieurs. L'ouvrage est terminé par une étude très complète des maladies de la vigne. M. Pacottet, qui a entrepris avec M. Viala de si belles recherches sur ce sujet, sou- vent analysées dans cette Revue, était particulièrement qualifié pour écrire ce chapitre, qu'il a rédigé pour les vignerons autant que pour les savants. Cette analyse, imparfaite, atteindrait cependant son but, si elle pouvait décider les agriculteurs à entre- prendre avec un guide très sûr l'étude de la plus scien- tifique de nos technologies culturales. E. RABATÉ, Ingénieur-agronome, Professeur spécial d'Agriculture. 4 Sciences médicales Halluin (D' Maurice d’), Chef des Travaux pratiques de Physiologie à la Faculté libre de Médecine de Lille. — Résurrection du cœur. La vie du cœur isolé. Le massage du cœur. — 1 vol. in-8° de 483 pages avec schémas. Vigot frères, éditeurs. Paris, 1905. La première partie de cet ouvrage est consacrée à une revue générale sur la question de la survie du cœur isolé, soit des animaux à sang froid, soit des mammifères, €ét sur la composition des différents sérums artificiels qui permettent de maintenir les contractions pendant un temps prolongé. La reviviscence du cœur après arrêt complet des contractions avait été obtenue sur le chien dans des conditions particulières par Arnaud, Hédon et Gilis; mais ce sont surtout les expériences troublantes de Kuliabko qui ont attiré l'attention. Après avoir vu des cœurs recommencer à battre sous l'influence du liquide de Locke cinq jours après la mort, le médecin russe avait observé le retour des pulsations cardiaques, trente heures après le décès constaté, chez des enfants morts de pneumonie. Les expériences de M. d'Halluin ont porté sur des cœurs de chiens ou d'enfants morts dès les premières heures ou les premiers jours après la naissance. En utilisant un sérum renfermant du chlorure de calcium, M. d'Halluin à pu obtenir des contractions rythmiques des ventricules vingt-quatre heures après la mort. Toutefois, l'utilité des sels de potassium est incontestable : ce sont eux qui empêchent les contrac- tions fibrillaires; or, le succès des tentatives de mas- sage du cœur, par exemple après une syncope Car- diaque, ne peut être assuré que si ces contractions ne se sont pas produites. L'auteur insiste sur le danger d'électriser directement le cœur avec les courants à faible tension dont on dispose généralement en cli- nique; ces courants proyoqueraient facilement les contractions fibrillaires, alors que, d’après Prévost et Battelli, les courants à haute tension seraient plutôt favorables. Comme conclusion, M. d'Halluin préconise, dans le cas de syncope cardiaque, surtout au cours d'une laparotomie, de profiter de l'ouverture de la cavité abdominale pour pratiquer le massage sous- diaphragmatique du cœur, associé aux injections intra- veineuses du sérum riche en chlorure de potassium : 3 D 0/ 6e D: J.-P. LanNGLois, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Pa s. ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES :89 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES À DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 7 Août 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Auric présente ses echerches sur les fractions continues algébriques. — M. Jouguet, à la suite de ses recherches sur la simili- tude dans le mouvement des fluides, arrive au résultat uivant : Dans les mouvements se faisant avec de très grandes vitesses, la compressibilité du fluide joue un grand rôle ; au contraire, sa viscosité et sa conducti- bilité sont négligeables. — M. E. Esclangon commu- nique ses observations de la planète Y. R. (Goertz), faites au grand équatorial de l'Observatoire de Bor- deaux. — M. A. Pansiot calcule la composante que la manière de voir des Anciens, au sujet du mouvement de la Lune, introduit dans la rotation de la Terre, 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. C. Raveau discute l'hy- “pothèse de MM. Bertrand et Lecarme sur l’état de la matière au voisinage du point critique. — MM. A. Cot- ton et H. Mouton ont constaté que la biréfringence magnétique d'une solution colloïdale d'hydroxyde de fer s’accroit par le chauffage prolongé à 400°. On peut obtenir des liquides ne renfermant pas de fer et pré- sentant la biréfringence magnétique (carbonate de calcium). — M. P. Lambert a observé que le chlorure manganeux présente un spectre d'absorption caractérisé par trois bandes À — 557,50 à 513, 442,50 à 420 et 412,25 à 394,50. — MM. F. Osmond et Ch. Frémont ont re- connu que les propriétés mécaniques du fer en cris- taux sont fonction de l'orientation cristallographique par rapport à la direction de l'effort. La fragilité, très grande suivant les plans de clivage, est associée à une plasticité très grande suivant les autres directions. — . Ph. Landrieu a constaté que la quantité.de chaleur dégagée dans l’action des acétones et aldéhydes sur la phénylhydrazine est sensiblement constante ; elle varie de 12 à 16 calories. — M. L. Ouvrard, en fondant ensemble l’'anhydride borique et le chlorure de calcium en proportions diverses, a obtenu plusieurs chlorobo- rates de calcium 5B°0*.3Ca0.CaCl, 3B205.3Ca0.CaCl?, B*0°.3Ca0.CaCF. — M. J. Lavaux a reconnu que le carbure fondant à 244,5 qu'il a obtenu dans l’action du toluène et de AICF sur CH°CF est le 2 : 7-diméthyl- anthracène. — M. H. Lagatu poursuit ses recherches Sur la classification et la nomenclature des terres arables d’après leur constitution minéralogique. — M. P.-G. Charpentier a observé que le Sterigmato- eystis nigra, en se développant sur du liquide Raulin ou en consommant du sucre, peut produire de l'acide oxalique. Cultivé en présence d'acide tartrique comme Seule source de carbone, il n'excrète pas d'acide oxa- ique. 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. V. Cornil et P. Cou- dray ont constaté que la réparation des plaies des car- lilages chez le jeune chien comporte une cicatrisation fibrineuse d'abord, puis cellulaire, et enfin cartilagi- meuse. — M. L. Pigeon montre qu'il est possible d'amener les yeux à accommoder pour une distance déterminée tout en convergeant pour une autre dis- ance. — MM. L. Ravaz el L. Roos ont soumis à analyse divers organes de vignes du même àge et du mème cépage, atteints ou non de rougeot non parasi- taire. Les résultats confirment les théories de Bœhm sur la dissolution et la migration des hydrates de car- “bone. — M. E. Haug arrive à la conclusion que le Sahara septentrional et central comprend deux ré- sions essentiellement distinctes : une région de plisse- “ments post-carbonifères et une région tabulaire, où les plissements sont antérieurs au Dévonien et où les terrains dévoniens et carbonifères n’ont été que peu dérangés de leur horizontalité primitive. Séance du 1% Août 1905. 1° SCIENCES PHYSIQUES. — M. H. Deslandres à observé que les vapeurs des raies brillantes K? et K° du calcium. donnent une raie plus large lorsque leur épaisseur ausmente; cette propriété permet d'interpréter plus facilement les phénomènes complexes offerts par l’at- mosphère solaire au-dessus des taches et des facules et dans leur voisinage. — M. A. Debierne à vérifié que les solutions de sels de radium dégagent une petite quantité d'hélium; il a reconnu, en outre, que les solutions de sels d’actinium possèdent la même pro- priété. — M. Duboin à préparé de nouvelles liqueurs lourdes à base d'iodomercurates alcalins ; la plus inté- ressante est la solution d'iodomercurate de soude, de densité 3,46 ; elle se dissout sans décomposition dans un grand nombre de liquides organiques. 2° SCIENCES NATURELLES. —- MM. A. Charrin et Goupil ont constaté que le placenta exerce une action de fixa- tion sur les principes utiles et sur les corps toxiques ; il régularise les échanges; il agit soit mécaniquement, soit à l’aide de ferments propres ou empruntés. — M. A. Marie à extrait des émulsions de substance cé- rébrale un produit très toxique, soluble dans les alealis faibles. Il produit la mort du cobaye et du lapin après des crises convulsives. Ilse détruit par la chaleur et se conserve peu de temps. — MM. H. Carré et H. Vallée poursuivent leurs recherches sur l’anémie infectieuse du cheval. Les déjections des malades cons- tituent les véhicules ordinaires du contage et les voies digestives la porte d'entrée accoutumée de celui-ci, — MM. Brau et Denier ont obtenu des cultures de vi- brions cholériques très toxiques sur bouillon Martin gélatiné additionné de sérum normal de cheval et de sang défibriné. — M. M. Molliard a cultivé des plantes vertes dans une atmosphère confinée en présence de matières organiques, et a observé une utilisation des sucres extérieurs en l'absence de gaz carbonique. Séance du 21 Août 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. J. Hadamard dé- montre que deux solides qui, dans des conditions don- nées, n'exerceraient aucune pression l’un sur l'autre s'ils étaient parfaitement lisses, ne réagissent pas da- vantage l’un sur l’autre s'ils sont rugueux. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Warcollier à observé que la présence de tanin est la cause plus ou moins directe de la persistance de l’amidon dans les parties blessées des pommes; le tanin, par son aclion sur l’'amylase, empêche cette diastase de transformer l'ami- don en sucres fermentescibles. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 29 Juillet 1905. M. F. Ramond a étudié le bacille-fourmi ou cocco- bacille de l’urètre de l'homme; il est saprophyte et inoffensif. Il s'oppose sur les divers milieux au déve- loppement du gonocoque. — M. Ch. Féré à reconnu que l’action stimulante du bouillon sur le travail est due principalement, sinon exclusivement, à l’excita- tion sensorielle qu'il provoque. — Le mème auteur signale une mutation croisée de la mentalité et du caractère chez deux sœurs jumelles à la suite de la puberté. — M. F. J. Bosc considère la syphilis comme une maladie bryocytique, qui doit être placée dans le ee 790 groupe des maladies éruptives, au voisinage immédiat des maladies varioliques. — M. G. Carrière a observé une élévation notable du taux de l'urée dans le liquide céphalo-rachidien au cours de l'urémie nerveuse. — M. C. Nicolle décrit la méthode qu'il emploie pour faire le séro-diagnostic de la fièvre méditerranéenne. Lorsque la réaction agglutinante est très nette à la dilution de 1/10, il y a lieu de conclure à l'existence de cette affection chez le malade. — MM. C. Nicolle et Hayat signalent que, dans ÿ Cas reconnus ultérieurement comme n’appartenant pas à la fièvre de Malte, le séro- diagnostic s’est montré négatif, tandis que, dans 13 cas où il s'agissait cliniquement de fièvre méditerranéenne, le séro-diagnostic à été constamment positif. — M. E. Retterer a constaté que le tissu osseux de l’Alose à la même structure que celui des Mammifères, si ce n’est que les travées et les ramifications capsulaires y sont plus rectilignes et moins abondantes. Le tissu osseux du Merlan contient des noyaux plus nombreux et plus serrés que celui de l’Alose. — MM. G. Billard et Mallet ont entrepris des essais de sérothérapie contre l’asthme des foins (bronchite rhino-spasmodique) par injection au canard de toxalbumine pollinique.' Le sérum obtenu était doué de propriétés antitoxiques appréciables. — M. A. Laveran à reconnu que les ger- boises sont excessivement sensibles aux trypanoso- miases. — MM. Edm. et Et. Sergent ont retrouvé les corps en anneaux el en demi-lune chez les paludéens et ne pensent pas qu'ils soient dus à des accidents de préparation. — M. H. Iscovesco montre que la déco- loration du bleu de méthylène et de l’indigo par les macérations de tissus ne peut être due à des ferments réducteurs contenus dans les organes; elle doit être mise sur le compte de substances qui naissent posté- rieurement dans les liquides étudiés. — Le même auteur à étudié l’action de l’eau oxygénée sur l’ovalbu- mine. — M. H. Bierry a constaté que la digestion de l'inuline se fait dans l'estomac, sous l’action du suc gastrique. — MM. H. Bierry et T. F. Terroine ont observé que de faibles quantités de suc pancréatique très légèrement acidifié transforment très rapidement le glycogène, l’amidon et le maltose en glucose. — MM. E. Marchoux et P. L. Simond ont constaté la possibilité de la transmission du virus de la fièvre jaune de moustique à moustique par voie héréditaire; mais c'est plutôt un fait d'exception. — Me Ch. Philoche à étudié l'hydrolyse du glycogène par l'amylase du malt; la courbe de la vitesse d'hydrolyse monte très rapide- ment au début et présente ensuite un plateau à peine ascendant. La différence entre les vitesses d'hydrolyse de l’amidon et du glycogène est très forte avec l'amy- lase du malt, tandis qu'elle est faible avec le suc pan- créatique. — MM. M. Caullery et A. Lavallée décrivent les larves ciliées produites par la femelle d'un Ortho- nectide, le Æhopalura ophiocomæ. — MM. A. Rodet et Lagriffoul ont constaté que le sérum antityphique peut présenter au moins trois propriétés distinctes : une propriété préventive à l'égard de la péritonite typhique expérimentale, une propriété préventive à l'égard de la seplicémie lyphique, et une propriété contraire ou favorisante à l'égard de ce dernier mode de l'infection expérimentale. On peut arriver à faire disparaitre ou à neutraliser cette dernière propriété. Les auteurs concluent à l'indépendance de la propriété bactéricide et des propriétés anti-infectieuses dans ce sérum. — M. A. Pi Suner à reconnu que le rein produit des substances solubles dans la solution de NaCl à 7 2/4 et dans la glycérine, qui neutralisent l'action locale toxique du sang urémique; le rein à donc une fonction spé- ciale anti-toxique. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 143 Avril (suite). M. G. J. Burch présente ses recherches sur Ja vision colorée avee une lumière très faible. La théorie de Hering repose en partie sur l'hypothèse que, sous ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES une très faible illumination, toutes les couleurs parais=« sent grises et qu'il y a un intervalle entre le seuil chromatique et le seuil absolu de sensation lumineuse: Les expériences de l'auteur l'amènent à conclure que, pour l'œil parfaitement reposé, le rouge, le vert, le bleu et. le violet sont instantanément reconnus comme couleurs et distingués l’un de l’autre, et qu'il n’y a aucun inter= valle entre les seuils chromatique et absolu; c'est seule- ment lorsque l'œil est imparfaitement reposé que toutes les couleurs paraissent grises à une faible lumière. — M. F. F. Blackmann et M'° G. L. C. Matthaei Recherches expérimentales sur lassimilation et la respiration végétales. IV. Etude quantitative sur l'as=M similation de l'acide carbonique et la température de la feuille en illumination normale. Les auteurs arrivent à la conclusion qu'il y a trois facteurs qui contrôlent la quantité d’assimilation de l'acide carbonique par une feuille : 4° l'intensité de l'illumination; 29 la tempéra= ture de la feuille; 3° la pression de CO? dans l'air envi ronnant., Si l'illumination est faible, quoique les autres facteurs soient favorables, la quantité de photosynthèse reste basse; la lumière est alors le « facteur limitant » du processus. Pour chaque température, il y à une quantité définie d’assimilation que la feuille ne peut dépasser ; pour une plante donnée, ces quantités sont très constantes ; aux hautes températures, la forte assi- milation ne peut se maintenir longtemps, et un facteur de temps vient compliquer la relation. Les auteurs ont reconnu que : 1° Des intensités égales de lumière, tom= bant sur des aires égales de feuilles différentes, quand la lumière est le facteur limitant, produisent des quan= tités égales d’assimilation; cette loi se vérifie à ÿ 0/9 près sur des feuilles comme celles du laurier-cerise, de l'Helianthus, du Tropaeolum, du Bomarea et dem l'Aponogeton ; 2 Toutes les feuilles ont le même coeffi=n cient économique de photosynthèse, en réduisant cem terme aux radiations spécifiques du processus; 3° AUX basses températures, des feuilles différentes, commen celles de l'Æelianthus et du laurier-cerise, ont le même maxima d’assimilation; mais, aux hautes températures; le maxima diffère. À 290,5 l'Helianthus peut assimilerm deux fois plus que le laurier-cerise ; 4° Ce dernier fait s'harmonise avec la première loi en ce que l'Helianthus a besoin de deux fois autant de lumière pour atteindre cette assimilation double; 5° La différence essentielle entre ces deux feuilles réside en ce qu'elles possèdent des coefficients différents d'accélération de leur acti=s vité d'assimilation avec l'augmentation de températures 6° Il en résulte que les deux feuilles utilisent différentes fractions de la lumière solaire à chaque températures, cette fraction se trouve, pour chaque température, C0 divisant le maximum d’assimilation de la feuille parti culière à cette température par la valeur photosynthé= tique de la lumière solaire; 7° Il n’y a pas d'optimun d'intensité lumineuse pour l'assimilation. | # # 2 : a Séance du 11 Mai (suite). MM. J. B. Farmer, J. E. S. Moore et C.E. Wal ker : Sur les ressemblances qui existent entre les corps de Plimmer des tumeurs malignes et certains constituants normaux des cellules reproductrices des auimaux. Les auteurs, poursuivant leurs recherches sur les tumeurs malignes, ont examiné les « corps d@ Plimmer » des cellules cancéreuses en rapport avec les modilications cytologiques qui se présentent respectis\ vement dans le cancer et les cellules reproductrices s corps de Plimmer se trouvent dans la plupart des jissances cancéreuses et se rencontrent surtout dans les régions les plus jeunes de la tumeur. Ils se présen! tent sous forme de vésicules et consistent essentielles ment en une membrane bien définie entourant un espace clair dans lequel est suspendu un petit granul@ se colorant en noir. On les trouve plus particulièrement dans les tumeurs d’origine glandulaire ou glandulaires épithéliale. Ils sont situés dans le cytoplasme de Ja cellule cancéreuse, généralement très près du noyau L'intérêt spécial qui s'attache à ces corps dépend dt fait qu'ils sont communément regardés comme parti- £uliers aux cellules cancéreuses, quoique Honda pré- “tende les avoir rencontrés occasionnellement dans les tissus inflammatoires. Les recherches des auteurs et une comparaison avec les processus des derniers Stades du développement des éléments reproducteurs Chez l'homme etles Mammifères lesamènent à conclure “à un parallélisme entre les corps de Plimmer et cer- mjaines structures vésiculaires qui se produisent régu- “lièrement dans les cellules gamétogéniques. On a montré, en 1895, que, pendant la prophase de la mitose “hétérotypique des cellules spermatogéniques, les “centrosomes se séparent de l'archoplasme, qui devient lui-même vésiculé et, à la fin de cette génération cellu- “laire, se perd dans le cytoplasme général des cellules- “hilles. Dans la prophase de la seconde division (homo- typique), le même phénomène se reproduit. Quand la itose homotypique est terminée, les constituants de Ja sphère, ou au moins quelques-uns d’entre eux, entrent en relation directe avec des parties du sper- “matozoide provenant d'une différenciation plus avancée de la cellule. Quant à l'archoplasme, il contient de mouveau un certain nombre de petites vésicules qui continuent à augmenter, chacune contenant un seul ranule réfractif et colorable. Ensuite, plusieurs de ces “ésicules se fusionnent, de sorte qu'à un degré plus avancé de la métamorphose de la cellule en spermato- oide, il reste seulement un seul gros corps clair, bordé “par une membrane distincte et contenant en son centre “in ou plusieurs granules se teignant en couleur sombre. “Ce corps, décrit en 1895 comme vésicule archoplas- mique, est un caractère très net, et apparemment cons- tant, particulier aux cellules spermatogéniques des Vertébrés. Cette vésicule et son contenu forment fina- ement la « tête céphalique » du spermatozoïde. L'analogie remarquable entre cette structure et les “corps de Plimmer saute aux yeux. Les deux classes “ie cellules sont autonomes à un haut degré et possi “dent chacune la faculté de multiplication continue ou “intermittente, indépendamment des exigences des tissus de l’organisme. Finalement, toutes deux présen- “tent des métamorphoses cellulaires et nucléaires qui, non seulement se ressemblent, mais encore différent matériellement de celles des cellules somatiques nor- ales. Il est possible que les éléments cancéreux soient le produit d'une réversion phylogénétique. Séance du 18 Mar 1905. MM. W. R. Dunstan et G.S. Blake présentent leurs “recherches sur la thorianite, nouveau minéral récem- ent découvert à Ceylan et caractérisé par la grande quantité d'oxyde de thorium qu'il contient. La thoria- “hite se présente ‘en petits cristaux cubiques, ayant jusqu'à 1 centimètre de côté; la couleur du minéral “non altéré est d'un noir de jais. Elle est opaque en “lumière transmise, excepté en sections minces; l'indice de réfraction doit dépasser 1,8. Les faces sont généra- “lement indéfinies. On rencontre parfois des cristaux “maclés, la face de l'octaèdre servant de plan de macle. de fait et d’autres caractères permettent de considérer “le minéral plutôt comme rhomboédrique que comme “cubique; la substance est, d’ailleurs, pratiquement dans l'acide nitrique fort ou l'acide sulfurique dilué, avec dégagement d'un gaz constitué en majeure partie par de l'hélium. La thorianite est fortement radio- “active. L'analyse de divers échantillons a donné les valeurs suivantes : ThO® 72,24 à 78,86 °/,; UO® et UOÿ, “11,19 à 15,10; Ce*0° et terres rares 1,02 à 8,04 ; PhO, > W2,87; Fe°0%, 0,35 à 1,92; CaO, 1,13: He, 0,39; r0® et SiO*, 0,20 à 5,04. C'est le minéral le plus riche en thorite aujourd'hui connu. La thorianite paraît appartenir à la classe des mélanges isomorphes, dont Ja formule simple serait XO*: elle est très voisine de là pechblende. Elle est un peu moins radio-active ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES L 791 qu'elle et, d'après la vitesse de diminution de son éma- nation, elle doit contenir du radium. La thorianite sera une excellente matière première pour la prépa- ration des composés thoriques ; on en a déjà vendu au prix de 37.500 francs la tonne. — MM. F. H. A. Mar- shall et W. A. Jolly poursuivent leurs recherches sur la physiologie de la reproduction chez les Mammifères. Leurs expériences conduisent à la conclusion que l'ovaire est un organe fournissant une sécrétion interne qui est élaborée par les cellules épithéliales folliculaires ou par les cellules interstitielles du stroma. Cette sécrétion, circulant dans le sang, produit la menstrua- tion et le rut. Après l'ovulation, qui a lieu durant l'oestrus, le corpus luteum est formé, et cet organe fournit une nouvelle sécrétion dont la fonction est essentielle pour les changements qui ont lieu pendant l'attachement et le développement de l'embryon dans 15 premiers stades de la grossesse. Séance du 8 Juin 1905. M. E. W. Barnes: L'extension asymptotique des fonctions intégrales définies par des séries de Taylor. — M. J. H. Jeans: Sur l'application de la Mécanique statistique à la dynamique générale de la matière et de l’éther. — Sir Andrew Noble poursuit ses recher- ches sur les explosifs. Il étudie, en particulier, les différences dans les transformations que les explosifs modernes subissent au moment de l'allumage sous des pressions graduellement croissantes. Les expériences ont porté sur la cordite ordinaire, la cordite M. D. et une nitro-cellulose tubulaire, L'auteur a constaté que, pour ces trois explosifs, la transformation à l'allumage paraît suivre les mêmes lois générales. Ainsi, pour les trois, il y a, avec une augmentation de pression, d'abord une légère augmentation, puis une diminution continue du volume des gaz permanents produits. Chez ces trois explosifs, on observe, avec une augmen- tation de pression, une forte augmentation du volume de CO: et une forte diminution du volume de CO et de H, tandis que le méthane, dont le pourcentage est presque insignifiant aux basses pressions, augmente très rapidement. Il y a quelques variations dans le pourcentage de l'azote et de la vapeur d’eau; mais, d'une facon générale, ces constituants peuvent être considérés comme presque constants. Les unités de cha- leur développées montrent, avec une augmentation de pression, d’abord un faible déclin, puis elles augmen- tent très rapidement aux hautes pressions. Les tempé- ratures d’explosion provisoires ont été obtenues en divisant les unités de chaleur par les chaleurs spéci- fiques; les énergies potentielles comparées sont obte- nues en multipliant le volume de gaz produit par la température d'explosion. Les moyennes pour les trois explosifs sont: cordite, 0,9762; M. D., 0,8387; nitro- cellulose, 0,7464. La plus haute énergie potentielle a été obtenue avec la cordite à une densité de charge de 0,5. L'érosion absolue produite par les trois explosifs dépend pratiquement entièrement de la chaleur déve- loppée par l’explosion, SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 30 Juin 1905. M. D. Owen montre comment une « aiguille élec- trique » peut être employée pour mesurer des champs électriques, de la même façon qu'un champ magnétique est mesuré par une aiguille magnétique oscillante. Les aiguilles employées sont de forme cylindrique, en aluminium ou en cuivre, et sont suspendues à des fibres de quartz de 3 à 4 pouces de longueur. Le couple qui agit sur l'aiguille, quand elle est déplacée de la direction du champ, est proportionnel au carré de la tension du champ. Pour de petit déplacements, l'aiguille vibre d'une facon isochrone, la fréquence étant pro- portionnelle à la force électrique. Cette aiguille peut ètre employée pour les champs alternatifs et continus et sert à illustrer la plupart des lois de l'Electrostatique. 192 — M. R.-W. Wood à étudié la magnéto-optique de la vapeur de sodium pour une lumière traversant le long des lignes de force du champ magnétique. Dans le cas de vapeurs très denses, la rotation à été mesurée pour une série considérable de longueurs d'onde, comprises entre À— 5840 et À— 5022. La constante de rotation de D, est environ le double de celle de D,. Drude a donné deux formules pour la dispersion rotatoire magnétique, la première se basant sur l'hypothèse des courants moléculaires, la seconde sur l'hypothèse de l'effet de Hall. La dernière représente bien les rotations au delà des lignes D; entre les lignes, elle donne une courbe plus élevée que la courbe expérimentale. — Le même auteur à étudié la fluorescence de la vapeur de sodium en illuminant la vapeur avec de la lumière de diverses longueurs d'onde et en observant la lumière émise au moyen d’un spectroscope. La manière dont se comporte le spectre indique qu'on se trouve en présence d'un certain nombre de groupes d'électrons, chaque groupe contenant un grand nombre de vibrateurs; l'excitation de l’un de ces vibrateurs met en branle le. groupe entier, mais non les groupes voisins. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Séance du 14 Juin 1905. M. J.-Ch. Philip a constaté que la solubilité des acides faiblement solubles augmente en présence des sels de sodium des acides faibles; cela tient à ce que, la dissociation des sels étant faible, il y a peu d'ions hydroxyles en solution, ce qui permet à une plus grande quantité d'ions hydroxyles provenant de l'acide de se dissoudre. — MM. J.-Ch. Philip et D. Haynes ont observé que la constante diélectrique des phénols, calculée d'après la constante diélectrique de leurs solu- tions benzéniques, décroit quand la concentration du phénol décroit; il en est de même pour les éthers phénoliques. — M. J.-N. Collie a soumis l'éthylène pur à l'action de la décharge électrique silencieuse dans un vase refroidi à —20°; une polymérisation se produit, accompagnée d'un dégagement d'hydrogène. Par distillation fractionnée, on obtient une série d'hydrocarbures oléfiniques, dont le principal, bouillant vers 1500-1609, a à peu près la composition C!°H°°. Par oxydation, ces hydrocarbures donnent des composés contenant six atomes de carbone dans la molécule. — MM. E.-C.-C. Baly el J.-N. Collie ont étudié le spectre d'absorption ultra-violet du benzène et de quelques-uns de ses dérivés. Le benzène présente sept bandes d'absorption séparées, dont chacune peut être attribuée à un processus distinct d'isomérie dynamique relié avec les changements de liaison dans la molécule ben- zénique. Les spectres d'absorption des dérivés mono- substitués peuvent être arrangés en types, chacun correspondant soit à la saturalion complète, soit à la nature et à la position des atomes non saturés dans le groupe substituant. — MM. E.-C.-C. Baly et E.-K. Ewbankontétudié lesspectres d'absorption ultra-violets, de l’anisol et du phénétol; ils diffèrent de celui du phénol en ce que la bande d'absorption simple est subdivisée près de sa tête en deux bandes. Les résultats obtenus prouvent l'existence d'une isomérie dyna- mique, provenant de la présence d’un atome d'H labile chez les phénols. — M. G. Barger a étudié divers cas où la concentration d'un solvant dissociant est réduite par le mélange avec un solvant associant. Les résultats obtenus sont conformes à la loi de l’action de masse. — MM. G. Barger et H.-B.-D. Jowett ont essayé de faire la synthèse d'une base ayant la formule qu'ils ont proposée pour l'adrénaline : on PA CH.OH on | CHE. AZHCH? ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Bien qu'ils aient obtenu les éthers méthyléniques (picrate, F.178°) et diméthylique, ils n'ont pu isoler lan base dihydroxylée. La constitution des éthers à été prouvée par leur oxydation respective en acide pipéro= nylique ou vératrique. — M. L.-F. Guttmann à déter=s miné les points de fusion à basse température au moyen d'un couple constantan-cuivre relié à un galva= nomètre délicat. 11 a obtenu les valeurs suivantes à CHSOH, — 98°; C*H°OH, — 11703; CH°I, — 6%; C?H5CX — 1420; CH5Br, — 1180; CH5I, — 1090; CSHS.CH*, — 92% m-xylène, —55°; éthylbenzène, — 93°, — MM. J.-C: Cane et G.-M. Norman ont étudié l’action de l'eau sur les sels diazoïques. Avec le diazoïque de la s-tribromo= aniline, ils ont obtenu un peu de s-tribromophénok (par ébullition avec l'acide sulfurique dilué et le sulfates de sodium); avec le diazoïque de la s-trichloraniline, on obtient aussi un peu de s-trichlorophénol. Avec celui de l’anisidine, ilse forme du gaïacol, et avec ceux des bromo- et chloro-p-toluidines, on obtient les bromo= et chloro-p-crésols. — M. J.-C. Brown décrit une méthode précise pour déterminer l'azote organique dans les eaux potables; elle consiste à distiller à sic cité et à traiter 200 centimètres cubes jusqu'à ignition par KOH et le permanganate; on dose l’ammoniaque qui se dégage par la solution de Nessler. — MM. A.-Wn Crossley et N. Renouf, en chauffant le 3-bromo-1 : 1= diméthyl-hexahydrobenzène avec KOH alcoolique, ont obtenu le 4 :1-diméthyl-4$-tétrahydrobenzène, Eb. 1170 117,5. — M. F.-P. Worley à étudié la solubilité du brome dans les solutions aqueuses de bromure de potassium. Les résultats indiquent la formation d'un perbromure KBr° et peut-être d'un bromure plus élevé: — MM. J. Walker et J. Johnston ont préparé l'hydrate de tétraméthylammonium par action de KOH sur le chlorure; la base peut être isolée à l’état de penta= hydrate par addition d'eau et concentration dans le vide. — MM. J. et A.-P. Walker ont reconnu que lem produit C'*H#05, isolé dans l’électrolyse du diéthylma È lonate de sodium-éthyle, est l’anhydride de l'acide tétréthylsuccinique. — MM. E.-C.-C. Baly et E.-K Ewbank ont observé le spectre d'absorption ultra= violet des dérivés bisubstitués du benzène. Dans chaque cas, le composé para montre soit plus de bandes d'absorption que les isomères ortho et méta, soit le même nombre de bandes avec une plus grande persis= tance. — MM. J.-B. Cohen, H.-M. Dawson et P.-F: Crosland ont constaté que le chlore électrolytique, dégagé en présence de toluène bouillant, entre dans le noyau seulement et que la vitesse de chloruration esb plus rapide qu'avec le chlore ordinaire provenant de l'action de HCI sur la pyrolusite. — M. A.-G. Perkin, en méthylant la purpurogalline au moyen du sulfate de diméthyle, a obtenu, outre le composé triméthylé déjà décrit, un composé tétraméthylé, C!'H(OCH°)h F. 93-94, L'isopurpurogallone C!H80°, par digestion avec l'acide sulfurique en présence d'acide acétique;m donne un anhydride C#H60*, F.> 3100. — MM. A.-Cr et F.-M. Perkin, par oxydation électrolytique de l'acide gallique, ont obtenu une matière colorante analogue l'acide ellagique; l'acide protocatéchique, dans les mèmes conditions, donne l'acide catellagique. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE LONDRES Séance du 5 Juin 1905. M. R. W. Sindall étudie la fabrication et l'emploi des papiers artistiques; sous ce nom, on entend un papier ayant une surface lisse propre à l'impression! des clichés en similigravure. On obtient un papier d& ce genre par l'application d’une couche minérale suk un papier ordinaire. Cette couche varie suivant Ja qualité du produit à obtenir; elle consiste en argile de Chine, blanc fixe ou émail, mélangé avec la quantité nécessaire de colle ou de caséine qui assurera l'adhé= ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 193 rence. L'opération se divise en trois parties : l’applica- tion de la couche, le séchage et le glacage du papier. — MM. CI. Beddle et H. P. Stevens ont constaté que le collage à la gélatine modifie profondément les qualités physiques du papier ; en particulier, il augmente con- Sidérablement la force du papier. SECTION DE NEW-YORK Séance du 19 Mari 1905. M. W. S. Williams décrit les procédés d'évaluation “de l'acide tannique dans les produits commerciaux au point de vue du teinturier et de l'imprimeur sur calico. L. SECTION DE NOTTINGHAM 2% Mai 1905. M. T. F. Harvey donne une table de corrections de empérature pour l'emploi du réfractomètre Abbe et es table des indices de réfraction pour la plupart des huiles fixes et essentielles. — MM. T. F. Harvey et 4 M. Wilkie ont extrait de la noix vomique environ … % d'une graisse jaune-brun, à odeur caractéristique, “1—0,8638, contenant de 6,9 à 56,7 °/, d'acide libre, 12 °/, de matière insaponiliable ressemblant au choles- “iérol ou au phytostérol, 9 °/, de glycérol et le reste “d'acides gras. SOCIÉTÉ ALLEMANDE DE PHYSIQUE Séance du 23 Juin 1905. M. E. Regener présente une nouvelle pompe à mer- heure automatique et raccourcie d’après le système mSprengel. On a construit déjà plusieurs pompes de ce genre, mais le type préconisé par l'auteur se prête “particulièrement aux usages du laboratoire. Avec l’aide “de cet appareil, on est en mesure de produire, dans une “enceinte de 700 centimètres cubes, en 30 minutes, un vide à rayons cathodiques, et en 40 minutes un vide que les décharges d'une petite bobine d'induction fonc- “Hionnant à huit volts sont incapables de traverser. — M. E. Gehrcke présente un Mémoire sur les points “l'interférence. Les spectroscopes à pouvoir résolvant élevé qu'on a construits dans ces derniers temps, et “dont l’auteur a lui-même étudié un modèle, sont basés Sur le principe commun de produire des interférences à grande différence de marche, ou, en d’autres termes, des spectres à grands numéros d'ordre. C'est ainsi qu’on Lohtient des valeurs du pouvoir résolvant excédant de beaucoup ce que réalisent les appareils à prismes ou à réseaux. Ces dispositifs sont, cependant, affectés de l'in- “convénient de ne posséder qu'une région de dispersion réduite. Or, l'auteur a réussi à obvier à ce désavantage, “en partie au moins, en produisant des points d'inter- férence au moyen de deux appareils à interférence “déplacés de 90° l’un relativement à l’autre. L'emploi de “ces points, engendrés par l'entre-croisement de deux “systèmes de bandes d'interférence, augmente encore Ja visibilité, c'est-à-dire le nombre de longueurs d'onde homogènes et discrètes qu'on peut observer simultané- «ment dans l'image interférencielle comme lignes spec- trales séparées ou plutôt comme points spectraux ; eur nombre dépend exclusivement de celui des rayons multiples. Les points d'interférence semblent encore se prêter à manifester l'existence des « lignes fausses » qu'on observe sur les plaques planes d'une facon ana- logue aux réseaux de Rowland. Par le croisement de deux plaques de verre d'épaisseur égale, on ne saurait, en effet, observer de satellites possibles des lignes que le long des diagonales du système de points, corres- pondant à l'ombre principale. — M. W. Biegon von ÆCzudnochowski rend compte de ses expériences faites en vue de produire des oscillations électriques dans des fils au moyen de différents dispositifs. Dans un circuit linéaire ininterrompu, un éclateur produit, par le seul accouplement électrostatique et au moyen de déplacements diélectriques, des oscillations qui, après Séance du s'être propagées à travers l'espace, sont captées par un conducteur linéaire analogue et amenées à un détecteur d'ondes. Ces expériences étaient destinées à l'étude comparative de diverses méthodes pour engendrer des oscillations primaires dans des conditions données. — M. E. Aschkinass présente une étude sur le rayonne- ment calorifique des métaux. Les lois énoncées par l'auteur, aussi bien que les conclusions qu'il en déduit, concordent parfaitement avec les résultats expérimen- taux, même au point de vue quantitatif. ALFRED GRADENWITZ. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances de Mai, Juin et Juillet 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Volterra trans- met la continuation de son étude de la distorsion des solides élastiques, et présente les photographies des curieuses déformations qu'il à obtenues à l’aide de cylindres en caoutchouc. — M. L. Bianchi : Sur les surfaces déformées par flexion de l'hyperboloïde rond à deux nappes. — M. G. Castelnuovo : Sur les inté- graux simples appartenant à une surface irrégulière. — M. A. Capelli : Sur les formules générales d'addi- tion des fonctions théta de plusieurs arguments. — M. A. Tagliaferri : Sur les surfaces W applicables à des surfaces de rotation. — M. G. Fubini : Sur les couples de variétés géodétiquement applicables. — M. G. Lauricella démontre quelques théorèmes géné- raux sur les équations de la déformation des plaques élastiques de grosseur quelconque. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — MM. A. Battelli et A. Ste- fanini ont fait des recherches pour établir la nature de la fonction osmotique, qui conduisent à considérer comme improbable que cette pression soit de nature cinétique. — M. A. Stefanini à imaginé un nouvel appareil pour la mesure de l'acuité auditive, où il uti- lise les courants qu'un solénoïce neutre induit dans un circuit qui lui est relié. — M. $S. Chella présente un dispositif pour déterminer le coefficient de frotte- ment intérieur des gaz à des températures très basses. — M. A. Righi décrit ses expériences exécutées pour étudier les charges engendrées en plusieurs corps par les rayons & du radium. — M. A. Pochettino envoie la continuation de ses recherches sur la luminescence des cristaux artificiels et naturels, et sur le verre déformé par une action mécanique. — M. A. Occhia- lini établit, à l’aide d'expériences dont il donne la description, la relation qui existe entre la constante diélectrique et la densité de l'air. — M. M. La Rosa à exécuté de nombreuses mesures de petits coefficients d’auto-induction. — M. A. Arno s'occupe des effets des courants continus, intermittents et alternatifs, et des ondes hertziennes, sur le retard de magnétisation des corps magnétiques placés dans un champ Ferraris. — M. C. Chistoni présente les résultats pyrhéliométriques obtenus dans les observations faites à l'Observatoire géophysique de Modène. — MM. R. Nasini, T. Ander- lini et M. G. Levi s'occupent de la radio-activité des « soffioni » de borax de la Toscane, et de la quantité d'émanation qu'ils contiennent. — M. M. Padoa expose ses recherches qui le conduisent à nier la radio-activité de l’eau oxygénée. — MM. A. Angeli et V. Castel- lana s'occupent de quelques dérivés du camphre. — M. F. Angelico a suivi les transformations qui s'ac- complissent par l'action de l'hydroxylamine sur les nitrosopyrrols. — MM. G. Plancher et C. Ravenna ont réussi à préparer l'indoline, substance qui donne naissance aux alcaloïdes indoliques, et dont on ne connaissait que les nombreux dérivés. — MM. G. Plan- cher et G. Piccinini étudient les combinaisons de la 8-phénylhydroxylamine avec les aldéhydes aroma- tiques. — M. A. Mazzucchelli a entrepris la prépara- tion des composés du carbone avec deux doubles liaisons consécutives, et il donne le résultat de ses expériences. — M. F. Ramfaldi présente une étude cristallographique de quelques composés organiques. ACADÈMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. B. Grassi et L. Mu- naron, en résumant leurs précédentes recherches sur le goitre et sur le crétinisme endémique, arrivent à la conclusion que la cause du goitre doit être recherchée dans la quantité d'iode qui se trouve surtout dans la poussière atmosphérique; dans cet ordre d'idées seront poursuivies les observations. — M. L. Munaron signale les bons effets qu'il a obtenus en administrant la thyroïdine à des individus pourvus de goitre et en état de faiblesse et d'accroissement retardé. — M.C. De Stefani a reconnu la présence de la leucotéphrite dans des masses d'origine volcanique et dans du gra- vier des Campi Flegrei. — M. E. Clerici transmet ses observations sur les sédiments du Monte-Mario, près de Rome, antérieurs à la formation du tuf granulaire. — M. D. Lovisato déerit la centrolite qu'il a décou- verte dans les minéraux cuprifères de Bena de Padru à Ozieri, près de Sassari, en Sardaigne. — M. C. Rima- tori à fait l'analyse pondérale et spectroscopique de quelques blendes de la Sardaigne. — M. L. Peruzzi présente une note sur le calcaire à brucite de Zeu- lada, et sur la composition minéralogique de la pedraz- zite. — M. E. Tacconi parle de ses observations sur les minéraux du granit de Montorfano (parinite, octaédrite, zircone, etc.). — M. P. Mingazzini décrit un animal très rare, pêché à grande profondeur dans la mer, par l'Expédition du Prince des Abruzes, en naviguant de la Nouvelle-Calédonie vers Auckland; c’est un géphyrien auquel on a donné le nom de Pegalos- phaera aloysii. — M. P. Dorello appelle l'attention des anatomistes sur une facon particulière de se com- porter de la portion exophagéenne inférieure et gas- trique du vague. — M. G. Noë envoie la description d'un nouveau genre appartenant à la famille des Chy- ronomidiens; c'est un petit diptère hématophage, dont on trouve deux formes dans la Campagne romaine. — M. G. Brunelli transmet ses observations sur la struc- ture de l'ovaire des Termitides. — M. V. Peglion étudie les causes qui produisent le dépérissement des champs de trèfle, et dans une autre note s'occupe des altérations présentées par les châtaignes envahies par le Penicillium glaucum. — M. G. Cuboni, ayant eu l'oc- casion d'examiner des oliviers malades en Sardaigne, a reconnu qu'ils étaient attaqués par la brusea, maladie parasitaire due à un petit champignon, et que l'on croyait limitée à la province de Lecce. — M. L. Petri ajoute une note sur les essais de culture de ce cham- pignon, dont il a obtenu la reproduction. — M. U. Brizi a étudié la maladie du riz dite hrusone, dont la cause ne serait pas d'origine parasitaire; on devrait l’attri- buer à une asphyxie des racines par le manque d'oxy- gène. — M. E. Pantanelli décrit les méthodes qui lui ont permis de mesurer la pression et la tension des cellules du levain. — M. A. Agazzotti donne la des- cription des expériences faites par lui en soumettant un orang-outang à la raréfaction de l'air à l’aide d’une grande cloche pneumatique, et en observant l'action de l'oxygène sur le malaise qui s'ensuit. ERxesro Mancini. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 23 Juin 1905. 19 SotENGES PHYSIQUES. — M. P. K. Puschl recherche la source de la chaleur dégagée par le radium. Il sup- pose, d'une part, que l'éther cosmique n’est pas en repos complet, mais possède une énergie, d'intensité partout égale, provenant de vibrations de ses parties les plus fines, et, d'autre part, que les atomes du radium possèdent, pour ce mouvement vibratoire de l’éther, un fort pouvoir d'absorption, correspondant à leur vibra- tion interne, tandis que celui des atomes d’air est insi- gnifiant. C'est cette énergie que les atomes de radium restituent à l'état de chaleur. Dans cette hypothèse, tous les éléments doivent dégager spontanément de la chaleur; mais il est permis de supposer que ce déga- gement doit être très faible. On a, d'ailleurs, constaté des différences de température appréciables au contact de deux corps. — MM. S. Meyer el E. von Schweidler” ont étudié les préparations d'actinium pur de Haitinger« et Ulrich. La constante de diminution de moitié dem l’activité induite est en moyenne de 36 minutes. Pan chauffage au rouge clair, on peut séparer cette activité induite d'une autre, qui diminue de moitié en 1,5 mi- nute. L'induction se concentre aux cathodes, comme pour le thorium et le radium.— MM. R. Wegscheider, et E. Bondi ont préparé les éthers acides des acides phtaliques 4-substitués. L'anhydride 4-mitrophtalique donne avec C*HSOH principalement l'éther acide connu F. 127 et un peu d’un éther acide F. 137° ; ce dernie est l’éther acide 2. — MM. M. Bamberger el A. Land siedl montrent que le liquide qui, à maturité, s'écoule du Lycoperdon bovista contient de l'urée, et que l& jeune champignon renferme deux corps ergostériquess de la tyrosine et une substance cristallisée, riche & azote, paraissant appartenir au groupe des cérébro= sides. 2° SCIENCES NATURELLES. — M. A. Nalepa poursuit ses: recherches sur les champignons des galles par l'étude du Phyllocoptes vitis. — M. R. Hoernes adresse uik Rapport préliminaire sur son exploration des forma= tions tertiaires de la Méditerranée occidentale. - Séance du 6 Juillet 4905. ( 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. E. Hellebrand com munique l'orbite définitive de la comète 1883 I (Brooks): — MM. E. Haschek et K. Kostersitz ont étudié le spectre d'e-Pégase d’après des photographies des Obser= vatoires de Lick et d'Yerkes. 29 Sciences PHYSIQUES. — M. A. Wagner décrit un@ nouvelle méthode pour la mesure de l'intensité horis zontale du magnétisme en voyage. Elle consiste à équi librer le champ de l'intensité horizontale à l'intérieur d'un solénoïde par le champ magnétique du courant qui traverse le solénoïde et à mesurer la première pa le second. L'exactitude est à peu près la même qu'avee les appareils portatifs basés sur la méthode de Gauss” — M. E. Lecher à mesuré l'effet Thomson pour quatre métaux : Ag,Cu,Te et constantan, à des températures allant jusqu'à 5000. D'après Tait, l'effet Thomson est proportionnel à TAT ; la seconde partie de cette hypos thèse se vérifie assez bien, mais l'effet Thomson ne paraît guère être proportionnel à la températur® absolue. — MM. S. Meyer et E. von Schweidler onb constaté qu'il existe dans le plomb radio-actif une sub stance non rayonnante, mais qui se transforme conti nuellement en une substance émettant des rayons 8 dont l'émanation diminue de moitié en 6 à 7 jours; de celle-ci nait une substance émettant des rayons «, dont l'émanation diminue de moitié en 135 jours. D'autrè part, l’activité restante qui suit l'activité induite Ra@ diminue aussi d'après une loi logarithmique qui cor respond à une constante de 135,5 jours, c'est-à-dire la même que pour le radio-plomb et le radio-tellures — M. G. Tschermak montre que l'acide silicique pro: venant de la décomposition du chlorure de siiciu par l’eau, ainsi que celui qui résulte de la décoms position des silicates naturels : dioptase, natrolithe scolézite, etc., par HCI, répondent tous à la composi tion de l'acide orthosilicique, ce qui fixe la constitution de ces derniers silicates. — M. C. Doelter à déterminé expérimentalement la viscosité des fusions de silicates et reconnu que beaucoup de silicates passent, par élés vation de température, de la forme cristallisée à forme amorphe isotrope sans devenir liquides d'une facon marquée. Ce n’est que par une forte élévatio de température qu'il y a une diminution marquée d la viscosité. — M. O. Flaschner, en faisant réagi le chlorure de benzyle et ses dérivés substitués sul la phénylhydrazine, a obtenu principalement des hydrazines asymétriques secondaires; comme produits secondaires, on a trouvé deux hydrazones. — MM°.R Andreasch et A. Zipser ont préparé les acides 0= p-tolyl-, m-xylyl et o-oxyphényl-rhodaniques et leu ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 195 produits de condensation avec la benzaldéhyde, lal- déhyde salicylique et la diméthyl-p-aminobenzaldéhyde. — M. J. Stuchetz décrit les produits de condensation des acides 0- et p-tolylrhodaniques avec la nitrobenzal- déhyde, le pipéronal, la vanilline et les aldéhydes anisique et cinnamique. 30 SCIENCES NATURELLES. — MM. A. Schattenfroh et R. Grassberger présentent leurs recherches sur l'im- munité antitoxique et anti-infectieuse. Le bacille du “rauschbrand produit, dans certaines conditions, un poison soluble, une toxine. On le trouve dans le corps “iles animaux atteints de cette infection ; mais la patho- msénité des cultures ne dépend pas de leur teneur en . toxine, car on peut obtenir des cultures très patho- uvènes dépourvues de toxines. Par traitement avec des solutions de toxine, les animaux peuvent être immuni- “sés contre celle-ci; leur sang renferme alors de grandes quantités d'antitoxine. Si l’on infecte des cobayes immunisés contre la toxine avec une culture virulente, les résultats sont différents suivant l'origine de la culture. Si celle-ci se rapproche beaucoup de la ecul- “ture originale où provient du liquide tissulaire d'un “animal infecté, les animaux immunisés meurent aussi rapidement, si ce n'est plus vite, que les animaux témoins. Par contre, le sérum antitoxique protège contre l'infection par les cultures qui ont la faculté " de produire de la toxine. La toxine n'a donc pas un rôle —lécisif dans la pathogenèse du rauschbrand. On par- vient, dans certaines conditions, à immuniser les ani- “maux contre les cultures originales; leur sérum est “alors anti-infectieux. — M. R. Kraus présente ses recherches sur l'immunité et la thérapeutique étiolo- …cique contre la syphilis. Il conclut de ses essais qu'une “immunisation active sous-cutanée n'est pas en état de préserver contre une infection cutanée consécutive, “ mais elle pourrait empêcher une infection généralisée. - Par contre, une immunité cutanée peut être produite par une infection cutanée; aussi bien chez l’homme que chez le singe, un effet primaire protège contre une “nouvelle infection cutanée. — MM. S. Exner et H. Ja- nuschke étudient l'influence de la lumière et de l’obs- “curité sur les corpuscules de guanine du tapetum d'Abramis brama. — M. J. Wiesner a constaté, sur des branches coupées de marronnier d'Inde, que les feuilles, encore en voie de développement, exposées “au soleil transpirent si fortement qu'elles soutirent de l'eau aux feuilles opposées placées à l'ombre. Ces “dernières s'arrêtent de croître, flétrissent et finissent “par sécher et tomber. Sur des marronniers entiers recevant du sol une quantité d'eau insuffisante, il peut se produire des phénomènes analogues. Cette trans- “ piration inégale influe sur le phénomène de la photo- …tropie. — M. B. Kubart communique ses recherches sur les fleurs femelles du Juniperus communis. — “M. F. Berwerth poursuit ses observations géologiques sur la galerie sud du tunnel du Tauern.— M. V. Uhlig : Quelques remarques sur le genre d'’ammonite Hoplites …_ Neumayer. Louis BRUNET, ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 2% Juin 1905. 4° SciENCES MATHÉMATIQUES. — M. D.-J. Korteweg pré- - sente au nom de M. W.-A. Versluys : Sur le nombre les tangentes communes d'une courbe et d'une surface. En général, le nombre cherché est rm, où m repré- … sente la classe de la surface, tandis que r représente la classe ou le rang de la courbe, suivant que cette courbe est plane ou gauche. Etude de plusieurs cas particuliers. — M. P.-H. Schoute présente la thèse de “M. H. Offerhaus Ezn : « Lineaire kegelsneestelsels en-weefsels » (Systèmes de coniques linéaires, ponctuels . Et tangentiels). — M. J.-A.-C. Oudemans : Contribu- tion à la détermination de la longitude de Saint-Denis - (Zle de la Réunion) en 4874. Seconde partie. — M. H.-G. van de Sande Bakhuyzen présente au nom de M. J. Weeder : Formules exactes d'approximation pour le | JR. rapport des triangles dans la détermination d'une orbite elliptique par trois observations. Seconde partie (pour la première, voir Rev. gén. des Se., t. XVI, p. 712). Ici l'auteur déduit des trois temps d'observation et des distances héliocentriques correspondantes des for- mules simples d'approximation, embrassant les termes du cinquième ordre dans les intervalles de temps et qui permettent d'être complétées jusqu'aux termes du sixième ordre. Ce problème a été résolu par l’astronome de Kiel, M. P. Harzer, d'une autre manière. — M. C.-H. Wind présente au nom de M. C. Easton : Périodicité de l'activité solaire et du climat. Dans sa seconde communication sur ce sujet (comparez Rev. gén., t. XVI, p. #4), l’auteur montre d'abord qu'une accélération dans les époques du minimum et du maximum de l'oscillation undécennale solaire, par rapport à la nor- male calculée de onze à treize ans, ne correspond pas à un nombre anormal de taches, mais à un nombre excessif d'hivers rigoureux, au moins dans l'Europe centrale et occidentale; si, au contraire, les phases de l'oscillation solaire sont en retard, on a peu de taches et peu d'hivers rigoureux. Du reste, la valeur M-m, représentant le temps qui s'écoule entre le minimum et le maximum suivant, est plus petite dans le premier cas; il parait que le contraire arrive pour la durée L de la période, mais la variation est moins sûre ici. Cette corrélation entre les éléments de l’activité solaire et l'élément météorologique se manifeste dans le petit tableau suivant, où les six périodes undécennales, pour lesquelles l'exactitude des observations parait le mieux garantie, ont été groupées selon les déviations de l'époque des phases (+étant un retard, —une accélération du minimum et du maximum) ; RZ repré- sente la moyenne des « nombres relatifs » de R. Wolf pour les taches solaires, F donne une valeur moyenne pour le nombre des hivers froids. TaBLeAuU. — Rapports entre l’activité solaire et le climat. DÉVIATION M—m de phase L'auteur montre ensuite que la mème période, d'environ quatre-vingt-neuf ans, qu'il a trouvée dans les « grands hivers » se manifeste aussi dans les irrégularités de l'activité solaire, depuis le commencement des obser- vations. Il y à mème des indices d'une périodicité multi-séculaire, peut-être de trois cent cinquante-six ans. Nous nous trouvons à présent dans une époque caractérisée par une activité solaire au-dessous de la normale et par la rareté d’hivers rigoureux; cette époque finira à peu près en 1916. Il va sans dire qu'une étude plus complète de ce parallélisme curieux sera du plus haut intérêt, au point de vue astronomique et climatérique, et encore pour l'établissement d’une prognose météorologique en traits généraux. — M. W.-H. Julius : « Reports on the Dutch expedition to Karang Sago (Sumatra), total eclipse of the sun, may 18, 4901 ». N° 3. Etude polarimétrique de la Cou- ronne. N° 4, Radiation de chaleur du Soleil pendant l’éclipse. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-D. van der Waals : La forme des sections du plan de saturation perpendi- culaires à l'axe des x, dans le cas de pression à tros phases entre deux températures. Dans la séance de mars (Atev. gén. des Se., t. XVI, p. 663), l'auteur a fait connaitre quelques sections perpendiculaires à l’axe des T pour trois températures admettant des pressions à trois phases. Si l'on connaît ces sections pour toutes 96 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES Da : les températures, on connait la surface de saturation tout entière et donc aussi les autres sections, par exemple celles perpendiculaires à l'axe des x. Seule- ment, les courbes trouvées font voir que, bien que la partie réalisable de cette surface soit de forme assez simple, la partie non réalisable montre une forme assez compliquée, et qu'il est nécessaire de connaître cette dernière partie si l'on veut étudier la connexion de la première. Le caractère compliqué de la partie occulte s'oppose tellement à la déduction des sections perpen- diculaires à l’axe des x de celles perpendiculaires à l'axe des T qu'ordinairement on n'y réussit pas. Pour cette raison, l’auteur explique ce qu'il a trouvé lui- mème par rapport à ces sections (p, T). à l’aide de plusieurs planches, indiquant la variation de la forme de la section avec x. — Ensuite M. van der Waals présente : Les équilibres (T, x) de phases solides et fluides pour des valeurs variables de la pression. En 1903 (Rev. gén. des Se., t. XV, p. 51 et 108), l’au- teur a étudié les figures (p, x)r et (p, Th3 ici, il y ajoute les cas principaux des sections (T, x). — Enfin M. van der Waals présente deux communications de M. A. Smits : 1° Sur les équilibres occultes dans les sections (p, x) d'un système binaire en rapport avec la présence de matières solides. Etude des sections (p, x) au delà du point triple vers le côté des hautes températures. Les sections (v, x) de la représentation (v, x, t) dans l’espace. La projection de la représenta- tion (p, {, x) dans l'espace sur le plan (p, t) pour le cas éther et anthraquinone, où la courbe des points de plissement rencontre la courbe de solubilité; 2 Con- tribution à la connaissance des courbes (p, x) et (p, t) pour le cas où deux substances entrent en composi- tion dissociée en phases fluide et gazeuse. Dans cette communication, l’auteur se propose de faire connaître une représentation cohérente des particularités les plus importantes des équilibres entre les phases gazeuse, fluide et solide, se joignant d’une manière naturelle à la représentation (p, x, t) inventée récem- ment par M. H.-W. Bakhuis Roozeboom, où les compo- santes se présentent seulement dans la phase solide. — M. H. Kamerlingh Onnes : Méthodes et ressources, en usage au Laboratoire cryogène de Leyde. IX. La purification des gaz à l’aide du refroidissement et de la compression, en particulierla préparation de l'hydrogène pur. — M. H.-A. Lorentz présente au nom de M. J.-J. van Laar : L'élévation moléculaire de la température critique la plus basse d'un mélange binaire à compo- santes normales. L'auteur se base sur la formule : ï (7) —(1+ 4), : JA L où 0 représente le rapport T des deux températures 1 a DER DER : Se critiques et re formule déduite dans l’hypothèse 1 , , . 5 . que la température critique d’un système binaire se trouve à l’aide de la relation : NT dx 1RTx — D ° Cette relation est d'accord avec les résultats expéri- mentaux de M. Centnerszwer, pourvu qu'on dédouble le poids moléculaire de la substance résolvante SO*. Ici l’auteur fait voir que les valeurs trouvées à l’aide de la formule d’approximation indiquée doivent être multipliées par un facteur surpassant deux dans plusieurs cas. — M. P. van Romburgh présente les deux com- munications suivantes : {4° Sur la réaction de l'ammo- niaque et des amines sur le formiate d'allyle; 2 Sur le lupéol des espèces de Getah pertja. — Ensuite, M. van Romburgh présente au nom de M. A.-J. Ultee : Sur la réaction de l'acide prussique sur les cétones. L'auteur fait connaître les propriétés principales de trois isoni- triles. — Enfin, M. van Romburgh présente au nom de M. F.-M. Jaeger : Sur quelques substances dérivées de l'acide phénylearbamique. Propriétés cristallogra- phiques des substances suivantes : 1o CSH°.AzH.C0.0(CH°): 2 C‘H*.Az(CH}.CO.0 (CH): 3e CH‘(Az0?),. Az, (CH°).CO. O0 (CH:); 40 CI (A70?),. (AzO®),. Az, (CH*).CO0.0 (CHF); 50 CeH?(A702),. (Az02),. (AzO®),. Az, (CH*).CO.O (CI); Go CsH'(Az02),. (Az0®)..A7, (CUS). CO. 0 (CH); To CeH?(4z0%). (Az0®),. (AZ0%1,. Az, (CHS) CO.O (C#H); Se C'H(AzO® ,. (Az0®),. (AzO®).. Az, (AzO®) (CH). M. A.-F. Holleman présente au nom de MM. F.-M. Jaeger et J.-J. Blanksma : Sur les six tribromoxy- lènes isomériques. En 1880, les six tribromotoluènes isomériques ont été préparés par MM. Nevile et Winther; en 1903, M. Jaeger en publiait dans sa thèse une autre préparation, dans le but d'étudier la con- nexion entre les symétries cristallographique etmolécu- laire; pour pouvoir étendre cette étude à une autre série de caractère analogue, les auteurs ont préparé les tribromoxylènes isomériques. Ici ils donnent un aperçu sommaire de la manière de formation de ces corps. — M. S. Hoogewerf présente au nom de M. F.-H. Eydman Jr :La colorimétrie et la méthode colorimétrique pour déterminer la constante de dissociation des acides. Le théorème principal de la colorimétrie : Des solutions de matières colorantes de la mème substance présentent la même intensité de couleur des couches de même épaisseur, si elles possèdent la mème concentration. Colorimètre de Salleron, modifié par Koppeschaar. Colorimètre de C.-H. Wolff, modifié par l’auteur. Prin- cipe de la méthode pour déterminer la constante de dis- sociation. Description des expériences. Résultats: Acide benzoïque 0,000.063; acide anthranilique 0,000.008.9; acide propionique 0,000.012.8 ; les résultats obtenus à: l’aide de l’électrolyse par MM. Nernst et Ostwald sont res- pectivement 0,000.06 ; 0,000.009.6 ; 0,000.134. — M. H.-W. Bakhuis Roozeboom présente la thèse de M. E.-H. Büchner : « Gedeeltelyke mengbaarheid van vloei- stoffen by stelsels van koolznur en een tweede stof » (Miscibilité partielle de fluides dans le cas de systèmes d'acide carbonique et d'une autre substance). — Rapport de MM. Roozeboom et J.-M. van Bemmelen sur le Mémoire de M. C. Hoitsema : « Liquatie in binaire metaallegeeringen (liquation dans des alliagee métalliques binaires). 3° SGiENCES NATURELLES. — M. H.-G. van de Sande Bakhuyzen : Notice sur J. L. C. Schroeder van der Kolk, n6 à Zutphen en 1865, professeur de Minéralogie à l'Ecole polytechnique de Delft depuis 1898, décédé en 1905. — M. L. Bolk : Le dévelonpement du cere- bellum chez l'homme. Seconde communication (Rev. gén. des Se., t. XVI, p. 664). — Ensuite M. Bolk pré- sente au nom de M. A.-J.-P. van den Broek : Le système nerveux sympathique des Monotremata. Les expériences se rapportent à Zchidna aculeata et Orni= thorhynchus paradoxus. — M. K. Martin présente au nom de M. H.-G. Jonker : Quelques remarques sur Ja composition géologique et sur l'origine du Hondsrug. Depuis quelques années, l’auteur s'occupe de la struc= ture géologique du Hondsrug; l'étude minutieuse de toutes les données qu'il vient de collectionner prendra encore plusieurs années. Mais la présente communica= tion a un but actuel, celui de combattre l'opinion de M. Eug. Dubois, de Haarlem, sur l’origine du Hondsrug: — Rapport de MM. T. Place et J.-W. Moll sur la lettre du Ministre de l'intérieur relative à l'octroi d'un subside à M. M.-C. Dekhuyzen pour des recherches dans le Zuiderzee. M. Dekhuyzen se pro=. pose d'examiner la faune et la flore du Zuiderzee. Tous les naturalistes de l'Académie conseillent d'accorder le subside. P.-H. Scuoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUXx, imprimeur, 1, rue Cassette. 16 ANNÉE N°46 30 SEPTEMBRE 1905 i Revue générale | DIRECTEUR !: N@encos pures et appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. | Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux $ 1. — Nécrologie = T. R. Thalën. — En la personne du Professeur Phalén, la Suède vient de perdre l’un de ses plus émi- hents physiciens. Ses recherches sur le spectre des métaux et des métalloïides lui avaient acquis une renommée universelle et sont aujourd'hui classiques. Soit seul, soit en collaboration avec Angstrôm, il cons- truisit des tables exactes et détaillées donnant la lon- eur d'onde des lignes du spectre de plusieurs élé- ments. Il fit aussi un examen minutieux des bandes d'absorption de la vapeur d’iode et s'attela au diflicile problème de la détermination et de l'attribution des nes dans le spectre des corps des groupes de l'yttrium du cérium. A l’époque où ses recherches parurent, es mesures précises pour solutionner plusieurs ques- ions fondamentales dans l'Analyse spectrale faisaient défaut et les travaux de Thalén furent d'un grand secours. La liste revisée des lignes du spectre d'arc du Mer, qu'il publia en 1885, est toujours une œuvre de réfé- rence dans les travaux d'Analyse spectrale. Né en 1827, à Küping, Thalén fut reçu docteur n 14854; après avoir occupé divers postes, il professa Physique pendant vingt-deux ans à Upsal, de 1874 1896. C'est dans cette ville qu'il est mort le 27 juillet lernier. " $ 2. — Mécanique Matière et mouvement. Bases d’une Méca- mique objective opposée à la Mécanique classique. — M. Hartmann a repris et développé emment, devant la Société de Philosophie, les con- lusions d’un Mémoire qu'il avait présenté au Congrès e Genève (septembre 1904) sous le titre : Définition physique de la force. Tout en déclarant que les équa- tions de la Mécanique classique sont rigoureusement Kactes, M. Hartmann reproche aux savants de manier ec elles des notions qui ne répondent à aucune méalité naturelle, et même de se payer de mots et de formes substantielles à la manière des scolastiques, | Bulletin de la Société française de Philosophie, avril REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. | publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE tandis qu'il lui paraît fort simple de fonder la Dyna- mique sur une conception normale de la cause phy- sique des mouvements. La Mécanique classique énonce qu'un point matériel, quand il se meut sans être soumis à aucune force, conservera indéfiniment la mème direction et la mème vitesse. C’est donc qu'elle conçoit comme une propriété permanente de mouve- ment, une sorte d’entité comparable à toutes les vertus dormitives ou autres du Moyen-Age? Est-ce que le mouvement rectiligne et uniforme serait aujourd'hui le mouvement naturel, comme le circulaire l'était autrefois pour Aristote? Certes, quand ils cherchaient à faire correspondre les forces aux mouvements, les fondateurs de la Méca- nique avaient le choix, au point de vue du langage mathématique qu'ils voulaient créer, entre un grand nombre de solutions. Ils pouvaient lier la force à la vitesse; ou bien, comme ils l'ont fait, à la variation de la vitesse, c'est-à-dire à l'accélération; ou bien à la variation de l'accélération, c'est-à-dire à la dérivée seconde de la vitesse, ou à la dérivée troisième, etc. Ils pouvaient encore considérer les dérivées de la vitesse par rapport à l'espace, au lieu de les prendre par rapport aux temps. Et, pour chacun de ces systèmes, ils auraient eu un énoncé différent du principe d'inertie. Le problème de la chute des corps, d’où est sortie la Dynamique, nous a valu sans doute qu'on liât la force à la variation de la vitesse, et c’est ce qu'on a fait, sans remarquer qu'on laissait sans cause la vitesse elle- même. N'était-il pas plus naturel d'associer l’idée de force au mouvement le plus simple, c’est-à-dire au mouvement uniforme, plutôt qu'à un mouvement plus complexe? Pourquoi ne pas étudier un corps en mou- vement comme on étudie un corps chaud, ou lumineux, ou électrisé? Renonçant à un état permanent de la matière qui se retrouverait le même dans le mouve- ment et au repos, concevons « que le mouvement des corps est dû à l’état physique relatif de leurs éléments par rapport au milieu ambiant, à leur état dynamique dans ce milieu, à la quantité d'action qu'ils ren- ferment ». Nous serons {tout naturellement amenés par l'expérience à exprimer celte quantité d'action par le produit de la masse et de la vitesse. Que l'on ne dise pas, d’ailleurs, que c’est ainsi renouveler l'erreur de 18 198 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Descartes, jadis corrigée par Leibniz. Bien au contraire, te : ;. : 1 ; en faisant intervenir la force vive, = m v®, et la notion du travail de, on substitue sans discernement l’espace au temps dans l'évaluation de la vitesse de variation de l'action, et l’on construit des abstractions n'ayant aucune signilication réelle. Quelques savants ont répondu à M. Hartmann en essayant d'invoquer des cas précis où l'expérience se prononcerait en faveur de la Mécanique traditionnelle. observation montre que la vitesse initiale, et non pas seulement la position initiale, doivent faire partie des données qui servent à définir un mouvement, ce qui justifie le vieux principe d'inertie (M. Painlevé). — Un corps éloigné autant que possible de tout autre et soustrait autant que possible à toute action extérieure suit-il, oui ou non, la ligne droite? (M. Hadamard.) — Si l’on recoit un projectile dans un calorimètre à glace où il s'arrête, la quantité de glace fondue serait-elle proportionnelle à la vitesse ou à son carré? (M. Perrin.) Il semble bien ressortir des explications de M. Hart- mann qu'aucune de ces objections n'apporte un expe- rimentum crucis contre sa conception, qui reste, en somme, l’une des innombrables mécaniques possibles logiquement, mathémaliquement et physiquement. Müis est-on fondé à voir en elle la seule conforme à la Nature, la seule vraie? Sur ce point, les arguments de M. Hartmann ne m'ont pas convaincu. L'analogie de la quantité d'action avec la quantité de chaleur est inté- ressante par les rapprochements qu'elle autorise, mais non point par la réalité qu'elle révèle au fond des choses. De celui qui énonce le principe d'inertie à la manière classique, et de M. Hartmann qui veut atteindre dans la quantité d'action la cause de la vitesse elle- méme, le plus métaphysicien des deux n'est peut-être pas celui qu'il pense. Toute la question est, d'ailleurs, de Savoir si la conception classique n'a pas été la plus simple, la plus commode, et la plus féconde. En fait, M. Hartmann reconnait que des travaux de Galilée devait naturellement sortir la notion de la force lice à la variation de la vitesse. Ne convient-il pas d’en dire autant et plus des travaux de Newton? En dépit de la traduction évidemment toujours possible dans le lan- gage de M. Hartmann des propriétés des forces centrales, la mécanique du système solaire renoncerait-elle aisé- ment à sa vieille gravitation ? N'importe! N'est-il pas curieux et intéressant, pour l'histoire de la pensée scientifique, d'assister de nos Jours à une tentalive de réhabilitation des idées de Descartes sur la Mécanique ? G. Milhaud, Professeur à l'Université de Montpellier. $ 3. — Physique L'accumulation de la chaleur solaire dans les liquides. — Dans un Mémoire présenté il y a plusieurs années à l'Académie des Sciences hongroise, M. Kalecsinksy# appelait l'attention sur le phénomène d’accumulation de là chaleur solaire qu'il a observé dans plusieurs des petits lacs salins de Hongrie. C'est une couche chaude d’une épaisseur de plusieurs mètres qu'on trouve à une certaine profondeur au-dessous de la surface, entre deux couches plus froides, et qui doit nécessairement avoir emprunté sa chaleur directement au Soleil. D’après les expériences du savant hongrois, ce phénomène ne se présenterait que dans le cas où la surface du lac est recouverte d'une couche d’eau douce ou faiblement saline. Ces lacs, qui conservent la chaleur du Soleil pendant un temps prolongé à des tempé- ratures allant jusqu'à 70°, doivent être considérés comme de véritables accumulateurs de chaleur. Or, M. Kalecsinksy, ayant continué ses intéressantes recherches, vient d'en présenter les résultats nouveaux à celte même Académie hongroise. Il fait remarquer que le phénomène en question se retrouve dans les lacs ! Voyez la Revue du 15 décembre 1904, €. XV, p. 1060. salins de Roumanie, de Norvège, de Sibérie et d'autres pays, et peut même être reproduit dans l’eau saline arti= licielle. Les solutions concentrées de sel de Glauber, de« sel ammoniac, de soude, etc., étant exposées aux rayons du Soleil, s'échauffent de la même manière qu'un lac« salin, pourvu que leur surface soit recouverte d'une couche d’eau douce ou d’eau saline diluée. L'eau douce« elle-mème peut, cependant, être échauffée d’une façon analogue, si on la recouvre d’une couche de pétrole ou, d'huile. Ces phénomènes, qui s'expliquent par les propriétés physiques des liquides, dépendent essentiellement de leur disposition relative. Dans le cas de l’eau saline recouverte d’eau douce, la chaleur maxima s’accumule aux points de contact des deux couches. Si la couche d’eau douce est vaporisée sans être chauffée, la tempé= rature s'égalise. L'huile et l'eau ne se diffusant pas l'une dans l’autre, comme c’est le cas de l’eau douce et de l’eau saline, la température maxima dans l’eau recouverte d'huile se place le plus souvent immédia= tement au-dessous de la couche d'huile. L’échauffement que subit cette eau peut être poussé. jusqu'à tuer toute vie animale ou végétale au-dessous de cette couche, à moins que l’eau inférieure ne soit: renouvelée. Dans le lac d'Ostravik, en Norvège, les huitres mouraient en 1885, avant que l’eau saline eût été mise en communication avec la mer. Dès que cette communication eut été établie, les huîtres se portèrent parfaitement bien. Bien des phénomènes de température qu’on observe dans les grandes mers continentales, telles que la Baltique et la Méditerranée, s'expliquent de cette facon. De forts courants froids d’eau douce se portent, par exemple, dans la Méditer- ranée septentrionale, d'Italie vers le bassin chaud des eaux salines. Loin de produire un refroidissement, l’eau douce, étant plus légère, maintient la chaleur dem l'eau saline, de facon qu'à une certaine profondeurs l'eau de la Méditerranée septentrionale est plus chaudé que dans la partie méridionale, où cette alimentation! en eau douce protectrice fait défaut. Li L'auteur formule des conclusions fort intéressantes relativement aux conditions qui ont dû exister dans less âges primitifs. Il est probable que, alors aussi, les lacss salins existaient. En effet, les dépôts de sels tels que ceux de Stassfurt leur doivent sans doute leur origine. Or, ces dépôts salins consistent le plus souvent en des couches alternatives de différents sels. Les recherches de Van tn Hoff et d'autres savants ont fait voir que les élément que renferme l'eau se combinent pour former des sels différents suivant la température. Or, comme, dans la vaporisation des lacs primitifs, ce sont les sels corres= pondant à la température de la couche qui ont dù se précipiter, il doit yavoir eu une accumulation analoguë de la chaleur solaire; les différents sels dus aux varia= tions de température constituent pour ainsi dire un thermomètre géologique. L'Orthodiagraphe. — L'appareil appelé ainsi été récemment créé par la Société générale d'Electri= cité (A. E. G.), de Berlin, pour remédier aux défauts observés dans les images organologiques obtenues au moyen des rayons X. L'image produite par une ampoule stationnaire ne donne pas, en effet, les dimensions réelles de l’objet, mais, abstraction faite de déformations plus ou moins importantes, le présentes avee un agrandissement notable. Les rayons catho diques, comme on sait, partent d'un point de l'ampoule et se propagent en ligne droite dans toutes les diree tions. L'image qu'ils forment sur l'écran phosphoress cent ou la plaque photographique est une silhouette dont les contours correspondent aux points où les rayons tangents à la surface du corps rencontrent l'écran. L'objet étant, dans tous les cas, placé entre l’ampoule et l'écran, on comprend aisément que la silhouetté qu'il projette sur ce dernier est un agrandissemen Cet agrandissement est d'autant plus fort que Je CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 7199 rapport entre les distances qui séparent l'objet projeté du disque et de l’ampoule est plus grand. Il n'y à qu'un moyen d'éviter ce défaut et d'obtenir l'image exacte, en grandeur et en forme, de l'objet projeté : c'est de disposer les choses de facon que les rayons qui effleurent le corps et produisent l'image soient parallèles entre eux et perpendiculaires à l'écran. C'est ce qui est obtenu dans l’orthodiagraphe en ren- dant l'ampoule mobile et solidaire dans son mouvement du crayon au moyen duquel on dessine le contour projeté. L'orthodiagraphe permet aussi de constater la profon- deur à laquelle un corps étran- ger est logé dans l'organisme. Il suffit de mesurer le diamètre appa- rent de l'objet - Jorsque l'am- . poule est station- maire, et de cons- tater ses vraies dimensionsau moyen de l’am- poule mobile.Soit A la longueur ap- parente, B la lon- gueur réelle, C la distance entre le point cathodique de lampoule et l'écran, D la dis- tance entre ce point et l'objet; l'équation : BC donne la distance exacte à laquelle le corps étranger se trouve de l’é- cran. L'appareil se construit en deux modèles l'un vertical (fig. 1), “l'autre horizon- tal. L'écran lumi- peux, qui porte k le style à dessi- ! È ner, est rigide- ment relié à l'am- poule par un ca- dre en U. Ce der- nier est formé d'un certain nombre de sections artli- culées, qui permettent de placer l'écran dans toutes les positions par rapport au bulbe. Une tige partant de Pécran peut s'ajuster longitudinalement dans un man- chon fendu placé à l'extrémité d’un tube parallèle à Maxe du style. Le tube est pourvu d'une partie télesco- pique, à l'extrémité avancée de laquelle peut coulisser un second manchon fendu. Ce manchon forme l’extré- mité d'un bras qui se trouve, par là, perpendiculaire à la partie télescopique. La pince qui tient l'ampoule est reliée par une articulation à boule avec une partie qui n°: se placer dans toutes les positions le long du ras mentionné plus haut. ‘ Lorsque les parties sont convenablement ajustées, le point de propagation des rayons X doit se trouver dans le prolongement de l'axe du style. Pour permettre d'obtenir un ajustement tel que les rayons soient exactement perpendiculaires à l'écran, ce dernier se déplace dans un plan lorsqu'on fait mouvoir sa tige de Fig. 14 — Mode de fonctionnement de l’orthodiagraphe. support longitudinalement dans le manchon fendu, et dans un plan perpendiculaire à celui-ci, en l’ajustant dans le porte-écran. En examinant l'ombre projetée sur l'écran par l'extrémité du style, l'opérateur se rend facilement compte de l'exactitude de l’ajustement. Le déplacement parallèle de lampoule et de l'écran s'obtient par deux leviers pivotant l’un sur l’autre. Un levier supportant à l'une de ses extrémités le cadre en U est fixé à charnière à un second levier qui, à son tour, pivote sur une console disposée au sommet de la colonne portant l'appareil. Chaque levier est pourvu d'un contre-poids qui se meut sur son bras extérieur et sert à maintenir l’é- quilibre des par- ties. La console porte, en outre, une tige à la- quelle est atta- ché, par joint universel,le châs- sis à dessin. Ce dernier est dis- posé pour rece- voir une feuille de bristol sur la surface de la- quelle le stylet appuie légère- ment sous l'effet d'un ressort. Si le dessin doit se faire directement sur la peau du patient, on en- lève le bristol et on remplace le crayon du stylet par un dermato- graphe. Le chàs- sis à dessin est pourvu de trois porte-crayons mobiles dans le plan de l'écran, ou dans celui du chässis à dessin, et pourvu d’é- chelles pour les deux coordon- nées. Cette disposi- tion permet de constater la po- sition exacte du sujet par rapport au rayon cen- tral et de rétablir exactement cette position lors d'un nouvel examen. Un quatrième porte-crayon coulisse sur une échelle qui s'avance de l'axe étendu du levier de support inférieur. Le système tout entier est mobile autour d'un pivot au sommet de la colonne de support et peut se caler dans toutes les positions grâce à un écrou fileté. Un levier de fixage peut, en outre, être saisi pour empêcher le système de descendre brusquement quand on desserre la vis de pression. La verticalité ou l'horizon- talité exacte du système est indiquée par un cliquet à ressort. La longueur de la colonne est telle qu'en faisant pivoter le systènre horizontalement autour de son axe, le châssis à dessiner vient se placer à une distance convenable au-dessus d’une personne étendue sur une table ordinaire de 75 centimètres de hauteur. Cet appareil fonctionne avec succès dans plusieurs services radiographiques allemands. 800 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 4. — Chimie La préparation du fer colloïdal. — D'après le procédé préconisé par M. G. Bredig, on produit des solutions colloïdales durables de certains métaux par leur pulvérisation cathodique au sein de l'eau. Les solutions de fer colloïdal ne sont, toutefois, durables que si la pulvérisation est faite au sein d'une solution gélatineuse. La gélaline, comme le fait remarquer M. H. Schmauss, qui décrit ce procédé dans un récent numéro de la Physikalische Zeitschrift (n° 16), agit comme colloïde protecteur. Or on peut obtenir deux solutions de fer colloidal différentes : Celle qui provient de la pulvérisation des fils de fer dans une cuve plate et ouverte n'est autre que la solution bien connue, d'un jaune-rouge, qu'on produit autrement par la dialyse; lorsque, par contre, la pulvérisation est opérée dans un tube haut et étroit, on obtient une solution d'un vert intense. Tandis que la solution jaune-rouge semble être durable indéfiniment, la solution verte, surtout dans le cas d’une grande concentration du colloide, se précipite facilement par l'agitation, etc. Lorsqu'on lance un courant électrique à travers la solution jaune rouge, le colloïide se sépare à l’anode, en raison de la convection anodique qui a lieu dans la gélatine, à l'inverse de la convection cathodique caractérisant les solutions aqueuses. D'autre part, la solution verte, où le colloïde se sépare à la cathode, se transforme progressivement dans la solution jaune lorsqu'on l’abandonne à elle-même à l’air libre. La couleur respective des deux solutions suggérait l'hypothèse que la solution verte renferme Fe(OH} et la solution jaune-rouge Fe?{OH)5, Or, les réactions chi- miques sont venues vérifier ces hypothèses, en montrant l'accroissement de la molécule qui a lieu en même temps que l'absorption passe aux grandes longueurs d'onde. Comme le colloïde vert porte une charge négative par rapport au dissolvant et le colloïde jaune une posi- tive, la charge doit passer par zéro dans l'oxydation de FeO à Fe’0*. Or, les colloïdes se coagulent avec une facilité toute spéciale à proximité du point « isoélec- trique», ce qui concorde parfaitement avec la facilité de précipitation mécanique qu'on observe sur la solution verte. L.Q : LA C3 $ 5. — Sciences médicales Le Congrès international de la Tuberculose (Paris, 2-7 octobre 1905). — Le 2 octobre s'ouvriront à Paris, au Grand-Palais, les « Assises internationales » de la tuberculose. Le Congrès s'annonce comme devant avoir un grand succès. La séance solennelle d'ouverture se tiendra, à 2 heures, sous la présidence effective de M. le Prési- dent de la République, en présence de nombreux délé- gués francais et étrangers, choisis parmi les plus hautes notabilités du monde scientifique, et des repré- sentants de la philanthropie, de la bienfaisance, de la mutualité, de l’économie sociale et de l'hygiène. Trente-trois pays ont répondu à l'appel de la France en organisant autant de « Comités nationaux », chargés d'élaborer les « Cahiers généraux » de leur patrie. Le territoire français a été divisé en « Gomités régio- naux », qui, de même, apporteront au Congrès les « doléances antituberculeuses » de leurs populations, ravagées par le bacille de Koch. Le Congrès se divise en quatre seclions : Pathologie médicale (sous la présidence du Professeur Bouchard) ; Pathologie chirurgicale (président : Professeur Lanne- longue); Préservation el assistance de l'enfant (prési- dent : Professeur Grancher); Préservation etassistance de l'adulte (sous la présidence double du Professeur Landouzy et du sénateur Paul Strauss). Le jeudi 5 octobre est réservé, en entier, aux excur- sions hors de Paris, dans les établissements d’assis- tance, de bienfaisance, d'hygiène, d'art vétérinaire, etc., qui demanderont au Congrès de figurer sur son pro- Bligny, | 1 gramme. Villepinte, Ormesson, Angicourt, l'Ecole d’Alfort, Montigny-en-Ostrevent, le Prévento- rium Emile-Roux de Lille, Berck-sur-Mer, le Sanato= rium pour enfants de Saint-Pol-sur-Mer, Zuydcoote (Nord) sont, dès à présent, désignés aux excursionnistes. À Paris, les visites dans les dispensaires, hôpitaux, établissements d'hygiène sociale, Institut Pasteur, œuvres de bienfaisance, stations de désinfection de la | . Ville, jardins ouvriers, jardins d'enfants, etc., seront” / | réglées d’un commun accord entre les quatre sections et auront lieu les jours intermédiaires. Le samedi 7 après-midi, séanee de clôture, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne : discussion et vote des vœux proposés par les sections; discours des pré" sidents de section ; désignation, par l'assemblée géné= rale, de l’unnée et du pays choisis pour le prochain Congrès international de la Tuberculose. L La cotisation de membre titulaire est de 25 francs: Alimentation des campagnes en eau po- table. — Dans un article paru tout récemment, M. Le Couppey de la Forest fait ressortir l'intérêt qu'il y a, en tout état de choses et principalement quand il n'existe pas d'adduction d’eau publique dans les com- munes rurales, à mettre l'habitant des campagnes en garde contre la pollution des nappes souterraines ef de lui enseigner comment il doit disposer ses fumiers afin de ne contaminer ni les puits, ni les sources. IL importe également d'engager toutes les communes rurales, qui n'ont point d'adduction d'eau acceptable au point de vue hygiénique, à faire de nouvelles adduc- tions, en leur montrant tous les avantages, aussi bien: hygiéniques que financiers, que leur accordent les dernières lois et circulaires. Enfin, et surtout, il importe, au moment de l'établissement d'un projet de double adduction pour une commune rurale, de créer autour de cette prise d’eau une zone de protection suffisante et de capter les eaux par des travaux les prenant réelle= ment dans leur gite géologique. Il serait superflu d'insister sur l'importance de ces propositions qui, prises en considération, feraient diminuer, d’une façon considérable, la mortalité par maladies infectieuses dans les campagnes. $ 6. À — Enseignement Ecole Polytechnique. — Les nominations sui vantes viennent d'être faites dans le personnel ensel gnant de l'Ecole Polytechnique : 4 _ M. Kænigs, docteur ès sciences, professeur à la Sors bonne, répétiteur auxiliaire, est nommé répétite adjoint d'Analyse, en remplacement de M. Panlevé, nommé professeur de Mécanique et de Machines. M. Bricard, ingénieur des Manufactures de l'Etat, ré pétiteur adjoint, est nommé répétiteur titulaire de Géométrie et de Stéréotomie, en remplacement de M. Piquet, nommé examinateur des élèves. M. Fouché, agrégé de. l'Université, professeur am Lycée Voltaire, est nommé répéliteur adjoint de Géos métrie et de Stéréotomie. Les candidats aux Écoles militaires. = Il est intéressant de signaler la diminution constatée celte année dans le nombre des. candidats aux éco militaires. Cette diminution s'est surtout fait sentir Paris, qui est le centre de préparation à ces écoles. L'an dernier, on comptait à Paris 518 candidats Saint-Cyr; ce chiffre est tombé, cette année, à453, soil une diminution de 65. Pour l'Ecole Polytechnique, le nombre des candid a également fléchi: il a été cette année de 606, at lieu de 647 l'an passé, en diminution de #f, j Par contre, on constate une légère augmentation dans le nombre des candidats à l'Ecole navale, qui, de‘ en 1904, est passé à 106 en 1905. | 1 Revue d'Hyg. et de Pol. Sanit., 1905, n° 5, p. #18. Les récentes lettres adressées à Nature par M. John Burke, sur ses expériences du Labora- toire Cavendish de Cambridge, ont remis à l'ordre ‘du jour le problème de l'origine de la vie. On peut dire que ce problème était resté en sommeil de- puis que Pasteur avait découvert l’ubiquité des spores microbiennes, et que Tyndall avait ensuite prouvé que, si, étant donné un milieu favorable, omme cetle infusion de foin ou cette sorte de « thé de bœuf » que les biochimistes qualifient de bouillon de culture, on prend toutes les mesures voulues pour y tuer à la fois les microbes présents et, dans les spores de ceux-ci, les microbes futurs, ne se produit plus aucun phénomène organique. Il est vrai que le D' Bastian a prétendu et pré- tend encore que les mêmes spores ne produisent pas toujours les mêmes organismes. Mais je doute quil soit disposé à en inférer que la vie peut sur- 4 Le 20 juin dernier, une information sensationnelle fut ancée, qui émut fort le monde scientifique. On annonçait un savant anglais venait de faire une découverte gràce à laquelle on allait peut-être connaître l'origine de la vie. e savant était M. John Butler Burke, un tout jeune homme i, en plusieurs occasions déjà, s'était révélé comme “oué à une carrière très brillante. Des expériences pour- Suivies par lui à Cambridge, dans le fameux Laboratoire Gavendish, lui avaient permis de produire des cultures offrant toutes les apparences de la vie. Il lui avait suffi de mettre en présence, dans une éprouvette, du bouillon sté- rilisé et du radium. M. Burke, en rendant public le résultat de ses recherches, maffirmait pas avoir fait œuvre positive de création. I déclarait simplement avoir obtenu une substance douée des propriétés essentielles de la vie, et dont il était, par con- a matière animée. Et il ajoutait que, si l'on arrivait un jour à reconnaitre pour exactes les conclusions qu'il avait ant de ses observations, on devrait alors constater aussi ue ces conclusions cadraient à souhait avec la définition que Herbert Spencer a donnée de la vie. On demanda immédiatement aux savants les plus émi- nents de la Grande-Bretagne ce qu'ils pensaient de l'espèce & prodige que M. Burke semblait avoir réalisé. Aucun jugement devrait être ajourné jusqu'à plus ample informé. Sir Olivier Lodge fut à peine moins réservé : « Il n'y aurait s lieu de s'émerveiller, dit-il, si l'on réussissait tôt ou d à provoquer en laboratoire un phénomène que l'on ne isse éviter de considérer comme une génération spon- née ». Sir William Ramsay, pris de court par un inter- iewer, répondit : « 11 se peut qu'il y ait là quelque chose, ëtil se peut qu'il n'y ait rien ». Mais M. Burke a été amené depuis à décrire tout au long, dans la revue anglaise Nature, puis dans le Daïly Chro- nicle, ses expériences et leurs résultats. Sir William Ramsay a estimé alors qu'il se trouvait fondé à émettre, au sujet ‘des phénomènes constatés par M. Burke, les considérations _qu'expose le présent article. L L F4 WILLIAM RAMSAY — LE RADIUM PEUT-IL DONNER LA VIE? 801 LE RADIUM PEUT-IL DONNER LA VIE ? gir spontanément de liquides stérilisés avec soin. Il a été accumulé contre une pareille hypothèse trop de preuves et de trop accablantes. Personne ne conteste plus que les liquides préparés pour le développement et le pullulement des organismes infimes désignés sous le nom de microbes peuvent être purifiés totalement de ceux-ci. Il suffit de les porter, pendant un temps plus ou moins prolongé, à une tempéralure relativement élevée. Et, si, à l’aide d’un tampon de coton ou d'un tube long et étroit, on les prolège contre l'invasion de nouveaux microbes, il ne s'y manifeste plus aucun signe de vie, quelle que soit la durée de leur conservation. Ce fut donc avec une forte tendance à l'incré- dulité que le monde scientifique accueillit la com- municalion de M. Burke. Il faut, d'ailleurs, s'em- presser de reconnaître que celle-ci était faite avec modestie, et seulement après consultation de divers hommes de science, nous apprend la deuxième leltre à Nature, et après démonstration du phénomène à un grand nombre de personnes dans le Laboraloire Cavendish, ainsi que dans le Laboratoire de Pathologie générale de l'Université de Cambridge. Nous devons, par conséquent, sup- poser que ce fut à l’instigalion même de ces auto- rités que M. Burke se décida à publier les résnl- tats de ses travaux. « Certains critiques, déclare-t-il d'autre part, ont avancé que les formes par moi observées pou- vaient êlre identifiées avec les curieux corps obtenus par Quincke, Lehmann, Schenck, Ledue, et d’autres de nos contemporains immédials, ainsi que par Rainey et Crosse il y a plus d'un demi- siècle. Mais je ne pense pas — autant que j'en puis juger pour l'instant — qu'il existe des rai- sons suffisantes pour imposer celte classification. » Il est bon d'expliquer que les corpuscules dont il est parlé ici se produisent, dans certains cas, par cristallisation dans des solutions de gommes, et doivent, dans d’autres cas, leur origine à des phénomènes associés à la tension superticielle. On peut se faire une idée un peu grossière d'un spéci- men de la seconde catégorie en observant des bulles de savon. Le milieu employé par M. Burke était un bouil- lon stérilisé, à demi solidifié par l'addition de gélatine. Il le saupoudra d'infimes traces de radium. Quelque temps après, des corps microsco- piques se montrèrent, dont les dimensions allèrent s’amplifiant, et qui semblèrent bourgeonner, mais qui, détail remarquable, étaient solubles dans l’eau. WILLIAM RAMSAY — LE RADIUM PEUT-IL DONNER LA VIE? Je voudrais indiquer ici comment je erois pos- sible de comprendre la production de ces corpus- cules. Je tiens, cependant, à ce que l’on ne considère pas mes explications comme affirmatives, car je n'ai pas vu les «organismes » de M. Burke. Le Professeur Rutherford et M. Soddy ont décou- vert, il y a peu d'années, que le pouvoir possédé par des composés de radium et de thorium de décharger l’électroscope est attribuable à l’émis- sion d’un gaz auquel élait appliqué le terme d'«éma- nation ». Il y a lieu de signaler, en passant, que, selon toute probabilité, la source de ce gaz ne doit pas être cherchée dans les composés du thorium, mais dans une substance beaucoup plus aclive, que contiennent peut-être lous ou presque tous les spécimens de lhorium de commerce, substance à laquelle on a donné le rom de /?adiothorium, et dont le D° Hahn, attaché au Laboraloire d'Univer- sity College, a récemment démontré qu'elle est plusieurs centaines de milliers de fois plus active — c'est-à-dire plus capable de décharger l'électro- scope — que le thorium pur. MM. Rutherford et Soddy ont trouvé que ces gaz ou émanations sont condensables à une tem- pérature très basse et sans doute solidifiables, et que leur durée, leur vie si l'on veut, estrelalive- ment courte. C'est à peine si l’émanation du radium persiste au delà de quatre jours et demi, et l’'émanation du thorium à presque totalement disparu en moins d’une minute. M. Rutherford a éludié ensuite, aux mêmes points de vue, les allé- ralions de l’'émanation du radium. Mais, si inté- ressanle que soit cetle catégorie de ses expériences, je ne saurais m'en occuper ici, car elle n'a aucun rapport avec mon sujet. Il y a environ deux ans, M. Soddy et moi, nous avons isolé l’émanation du radium, nous l'avons séparée de tous aulres gaz; nous avons mesuré le volume d'une quantité d'émanation produite dans un temps donné par un poids connu de bromure de radium, et nous avons constaté que ce gaz obéit, comme n'importe lequel des autres gaz, à la loi de Boyle, c’est-à-dire que son volume décroît propor- tionnellement à l'augmentation de la pression. Nous avons aussi réussi à démortrer que, lors- que l’émanation est abandonnée à elle-même dans un tube barométrique, son volume décroit, au point qu'après cinq semaines environ, elle a presque totalement disparu. Si l’on chauffe alors le tube en question, un nouveau gaz se révèle; donc il faut bien admettre qu'il avait été absorbé, au cours de ces cinq semaines, par les parois de verre qui contenaient l'émanation. L'analyse spectrale a per- - leurs, déjà établi que le radium émet continuelle- mis d'identifier ce nouveau gaz : c'est l'hélium, un des gaz rares de l'atmosphère. Durant la décomposition de l'émanation en hélium et autres gaz, il s'est produit un dégagement de chaleur considérable, ainsi que l'a démontré le Professeur Rutherford. M.et M®°Curie avaient, d’ail= ment de la chaleur, et M. Rutherford a prouvé encore que celle-ci élait due, pour sa presque tota= lité, à l’altération spontanée de l'« émanation ». Mais l'énergie en cause ne se manifeste pas exclusivement par des phénomènes thermiques. Il est, Lout au moins, des cas où elle se lraduit par une action chimique. L'émanation, dissoute dans l'eau, la décompose en ses gaz constituants, l'oxy-M gène et l'hydrogène. Etil y a proportionnalité entre le degré de décomposition de l’eau et le degrés d'altération de l'émanation. Au début, alors que celle-ci est récente, et, par conséquent, relative- ment abondante, la quantité des gaz libérés est comparativement considérable; puis, à mesure que l'émanalion se raréfie, la décomposition se ralentit, une moindre quantité de gaz étant produile du- rant la même unité de temps. La solution de l'émanation dans l’eau possède la curieuse propriété de coaguler l’albumine — le blanc d'œuf. On ignore la nature précise de la transformation ainsi déterminée. Toujours est-il que, l’émanalion une fois mise en présence d'un liquide qui contient de l'albumine, —- le sang, par exemple, — il se conslitue dans ce liquide des ‘cellules ” ultramicroscopiques. Le gaz en ques- tion se dégage, en effet, en molécules, peut-être même en atomes. Lorsque l’on injecte un peu de la solution sous la peau d'un être vivant, elle s'enve” loppe d’une poche dont la paroi peut êlre qualifiée d'épaisse et dure, et se résorbe lentement dans l'organisme en observation. Ces phénomènes exi- gent, du reste, de plus amples études. Je regrette de n'avoir pas encore été en mesure de les appro: fondir davantage, mais je compte bien m'en oceu- per à nouveau. IT Revenons maintenant expériences de M. Burke. Il me semble que certains des fails ct dessus rappelés suggèrent une explication satisfai= sante de la prétendue découverte. M. Burke emploie du bromure de radium, solide; en fine poudre. Il en éparpille quelques minuscule grains sur son bouillon gélaliné. Celui-ci n'étant qu'à demi solidifié, il est à peu près certain que les grains de bromure de radium s'enfoncent quelque peu au-dessous de la surface. Ils se trouvent à | ainsi dans les conditions voulues pour, en se dis aux * WILLIAM RAMSAY — LE RADIUM PEUT-IL DONNER LA VIE ? 803 solvant, décomposer l’eau, c’est-à-dire pour libérer de l'oxygène et de l'hydrogène en même temps que de l'émanation, laquelle reste mélangée à ces gaz. . Jise forme de la sorte des bulles minuscules ou, plutôt, de dimensions microscopiques. Et l’action coagulatrice exercée par l’émanation sur l'albumine du milieu étudié fournit à chacune de ces bulles la “membrane voulue pour qu'elles affectent l'aspect “d'autant de cellules, si toutefois on peut comparer à une cellule un globule qui ne renferme que du ga, ou, pour mieux dire, un mélange d'oxygène et d'hydrogène. …— L'émanation qui se trouve également enclose _ dans cette espèce de poche continue à décomposer l'eau, puisqu'elle se diffuse à travers la paroi, et “avec d'autant plus de facilité que celle-ci est natu- rellement humide. Cette diffusion n’est, cependant, à assez rapide pour empêcher l'accumulation des gaz, et, par suite, l'éclatement de la bulle, — écla- “tement qui peut se produire sur plus d'un point. “Les gaz qui s'échappent par ces crevasses entrai- ment avec eux un peu de l’émanation, qui les dote immédiatement d'une poche nouvelle, greffée “sur la première. Il en résulte que celle-ci res- semble à une cellule de levure, et la seconde à nun bourgeon, — étant bien entendu que le nombre “des prétendus bourgeons est variable en raison de la manière dont s’est produit l'éclatement initial. Et ce processus se réitérera nécessairement tant “que le radium continuera à engendrer de l’'émana- tion, c'est-à-dire ni plus ni moins que pendant des - milliers d'années. Les « organismes » de M. Burke ont donc devant eux une belle perspective de lon- gévité, el leur « bourgeonnement » presque perpé- tuel pourrait donner à bien des générations d'ob- servateurs l'impression d’une merveilleuse activité des fonctions de reproduction. … Je n'ai pas élé peu étonné d'apprendre de M. Burke, dans sa première leltre, que ses « orga- nismes » élaient solubles dans l'eau. L'émanation ne coagule pas la gélatine; elle ne l'attaque d’au- cune facon sensible. J'en ai fait l'expérience et je m'y attendais d’ailleurs. Il est possible qu'un peu de gélatine soit enclose avec les gaz dans la poche à paroi d'albumine coagulée. Lorsque l’utrécule est immergée dans l’eau, la gélatine qu'elle contient se dissout, et la prétendue cellule semble disparaitre, sa paroi élant excessivement mince. Il serait intéressant de savoir si M. Burke a essayé sur ses « organismes » les colorations usuelles en micrographie. Il est possible que l’al- bumine coagulée prenne mieux la teinture que la substance non coagulée, et que se révèle ainsi la véritable structure de ladite « cellule ». IT Comme je l'ai dit en commencant, je ne prétends rien affirmer. Et, certes, je suis sensible autant que qui que ce soit à la séduction de l'hypothèse selon laquelle il serait possible de provoquer les phéno- mènes essentiels de la vie, en appliquant une forme quelconque de l'énergie à une substance semblable à celle qui constitue les organismes vivants et les éléments indispensables à leur déve- loppement. Mais l’on est bien obligé de rester sceptique, et l'explication que je viens de proposer me semble suflisante pour le cas en discussion. Il va, d’ailleurs, de soi que personne ne se réjouirait plus vivement que moi si l'on arrivait à me prouver que je me trompe‘ William Ramsay, Membre de la Société Royale de Londres, Correspondant de l'Académie des Sciences de Paris. 1 Droits de reproduction réservés par l'Organisation Po- tentia. 80% BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE LES TRAVAUX RÉCENTS DE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE LE PRÉSENT ET LE PASSÉ MAGNÉTIQUES DES VOLCANS D'AUVERGNE : L'honneur que m'a fait le Ministère français de l'Instruction publique, en me chargeant d'une des conférences organisées à l'Exposition de Liége, se double pour moi d'un plaisir particulier. Sans in- voquer les raisons personnelles qui m'ont amené, à diverses reprises, dans une ville que j'admire el que j'aime, je rappellerai seulement que, durant six semaines, au cours de l'été 1894, j'ai travaillé ici, dans les laboraloires de M. Eric Gérard et de M. Dwelshauwers-Déry. À cette époque, où nos Universités francaises se préoccupaient à juste titre de l’organisation de l’enseignement supérieur technique, je m'honore d'être un de ceux qui, dans des conférences et dans des écrits, ont signalé l'in- térêt qu'il y avait, pour nous, à nous inspirer de l'exemple de la Belgique. Si nous avons en France, sur ce point, fait des progrès tels que ce que nous écrivions il y à dix ou quinze ans nous parait aujourd'hui singulièrement injuste, il est une chose que je ne regrette point, pour ma part, d'avoir dit publiquement : c'est le bien qu'il faut penser des Universités belges, et tout spécialement de l'asso- ciation el de la pénétralion qui existe ici entre l’enseignement supérieur de la science pure et l'enseignement supérieur des sciences appliquées. Et je me plais à invoquer, à Liége, mon litre de professeur français, ancien élève de l'Université de Liége. J'ai entrepris depuis quatre ans, dans le Massif central de la France, avec le concours de mes élèves et, avant lout, de M. Pierre David, un en- semble d’études de magnétisme terrestre, qui sont à peine ébauchées; telles qu'elles sont, elles nous ont donné déjà quelques résultats intéressants, dont les premiers ont été signalés par nous en de courtes Notes, dont d'autres, tout récents, sont encore inédits, et je me suis réservé le soin de vous les indiquer aujourd’hui. ‘Les méthodes d’élude des régions qui ne pré- sentent pas ce que j'appelle d'énormes anomalies magnétiques sont aujourd'hui bien établies. Avec 1 Conférence faite à l'Exposition internationale de Liége, le 28 août 1905, sous les auspices du Ministère français de l'Instruction publique, el sous la présidence de M. Eric Gérard, directeur de l'Institut électrotechnique Montefiore. | les appareils de voyage Mascart-d’Abbadie, M. Mou- reaux à exécuté cette œuvre admirable qu'est la carte magnétique de la France, — œuvre complétée, pour le Sud-Ouest, par les travaux d'un savant qui compte ici de légitimes sympathies, mon COI= lègue et ami M. Mathias. Et le grand travail de Moureaux se coordonne de la facon la plus heu= reuse à ceux qu'ont accomplis MM. Rücker eb Thorpe pour les Iles Britanniques, et M. Niesten pour la Belgique. Les anomalies rencontrées par ces savants sont de deux espèces : D'abord les anomalies qui portent sur toute une région étendue, et y amènent une véritable torsion des lignes isomagnétiques : telles l'anomalie du bassin de Paris, qu'a révélée M. Moureaux, et lanon moins curieuse anomalie du bassin de Bruxelles; qui apparait sur les belles cartes de M. Niesten; mais, enfin, quand ces anomalies — à certains égards les plus intéressantes — comportent des écarts de déclinaison d’un demi-degré ou d'un degré, elles sont considérées comme extraordi- paires; et, d'autre part, ce que j'appellerai les anomalies énormes, comme celles qu'ont signalées M. Moureaux en Corse, MM. Rücker et Thorpe sur les côtes occidentales de l'Écosse, dans l'ile de Canna notamment, ou encore M. Meyer dans Je Kaiserstuhl. Quelques-unes d’entre elles sont ap parues si compliquées qu'elles comportent u examen beaucoup plus minutieux; telle est celle: du Massif central de la France; ct, à l'exemple des ce qu'avaient fait M. Palazzo et le Service météorolo= gique et géodynamique d'Italie pour la Campagne romaine, on a pris le parti de les représenter sur les cartes magnétiques par des lacunes, — comme sur les cartes politiques de l'Afrique, du temps où j'étais écolier, on laissait en blanc les limites des territoires qui, alors, n'élaient à personne. L'étude détaillée de pareilles régions exige l'emploi d'appareils de mesure à la fois moins précis et plus rapides. Nous avons fait, sur Je sommet du Puy-de-Dôme seul, 159 mesures de déclinaison, presque autant de composante hori zontale, enfin un certain nombre de mesures dé composante verticale. Le résullat qui nous a frappés» dès nos premières mesures, est la rapidité de la variation des éléments magnétiques avec la dis lance : à l'est de la montagne, au haut de la pente BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE 805 qui regarde Clermont, la déclinaison magnélique atteint l'énorme valeur de 19°42'. À l'ouest, elle — s'abaisse un peu au-dessous de 10°; et l'on à ainsi une différence de 9° sur 250 mètres de distance. “Si l'on se reporte aux nombres que donne M. Moureaux pour la grosse anomalie qu'il a trou- vée en Corse, près de Bastia, on ne peut s'empèé- cher de reconnaitre qu'il s'agit, ici, d'une action perturbatrice autrement énergique, {out en élant “une action régulièrement distribuée; car nous ne sommes pas en présence d'un de ces points isolés où il semble que la boussole devienne folle, de ces punti distinti des géophysiciens italiens, et qu'on rencontre sur les roches magnétiques aux points qu'a frappé la foudre : il s’agit bien de l'action d'ensemble d'une montagne entière, action dont il y a intérêt à se faire une idée syathétique pour essayer de l'expliquer. Les mesures de déclinaison sont faites à la bous- sole d'arpenteur. On vise un point défini, le pic de Sancy au Sud-Ouest, ou la cathédrale de Clermont - à l'Est. Quand on se déplace, on fait la correction …— nécessaire de parallaxe. Pour transformer l'instru- “ ment en appareil de mesure rapide de composante “ horizontale, on y adapte un petit support qui … permet de faire agir sur l'aiguille mobile un … barreau déviant. La boussole est employée comme — boussole de sinus. On met le barreau sur son … support et l'on tourne tout l'appareil jusqu'à ce que …— l'aiguille mobile reprenne une position normale au … barreau fixe : ce barreau étant dirigé, par construc- 5 tion, suivant la ligne 0°-180° du cercle divisé, on amène, par rotation de la boussole, l'aiguille sur la ligne 90°-270°; on retire alors le barreau; l'aiguille, désormais soumise à l'action de la Terre seule, prend une position intermédiaire. On a réglé la bauteur du support de telle manière que l'aiguille vienne toujours au voisinage de 45°. Il est facile de reconnaître, par un calcul aisé, qu'un champ per- turbateur Nord-Sud de 1 centième de gauss, par exemple, produit, à partir de 45°, une déviation d'environ 3°, de même qu'un champ perturbateur Est-Ouest de même intensité produirait un écart de déclinaison de 3°. L'appareil d'étude de la composante horizontale, ainsi réglé, mesure, en définitive, le champ pertur- bateur Nord-Sud avec exactement le même degré de précision que la boussole de déclinaison mesure le champ perturbateur Est-Ouest. _…. Nous avois reconnu que la composante horizon- £ tale au Puy-de-Dôme, au haut des pentes, est plus … forte au Sud, et plus faible au Nord, d'environ 45 millièmes de gauss sur la valeur moyenne, soit un écart de 7,5 °/, en plus ou en moins de la valeur normale. Cette valeur normale est une valeur moyenne : elle n'est pas prise au point culminant lui-même, occupé par une tour d'observation qui contient des pièces de fer; au voisinage immédiat se trouvent des câbles de paratonnerres, qui vont, non loin du pied de la tour, s’enfoncer en terre. Les courants intenses qui ont conduit dans le sol l'électricité apportée par de trop fréquents coups de foudre ont aimanté fortement et irrégulièrement les roches avoisinantes, au point que, dans un rayon d'environ 20 mètres autour de la tour, on n'a rien de constant ni de net. Mais l’ensemble de ces pôles purement locaux n’'exerce pas d'action au dehors d'un cercle central de 20 à 25 mètres, et au delà, dans l’espace compris entre ce cercle et un autre de 100 à 150 mètres de rayon, on peut dire que l’on a un vecteur perturbateur centripète, d'intensité pro- porlionnelle à la distance au centre commun. On a donc en haut de la montagne un pôle Sud, mais non un pôle Sud étroitement localisé; c'est un pôle Sud résullant d’une action d'ensemble. Une étude minutieuse, point par point, nous permet d'être sur ce point très affirmalifs. M. Meyer a signalé dans le Kaiserstuhl un sommet qui est un pôle Nord; pour metlre hors de doute ce résultat, et bien établir qu'on n’a pas à faire ici à un point frappé de la foudre, il nous paraitrait indispensable de mulliplier les mesures, et c'est ce que nos méthodes nous ont permis sans grandes difficultés. Un pôle Sud est celui qui se développerait natu- rellement au sommet d'une colonne verlicale de matière susceptible d’aimantation. Est-il dù, en l'espèce, à une aimanlation actuellement induite par la Terre, comme celle que présenterait une pièce de fer doux? Est-il dû à une aimantation per- manente comme celle de l'acier? Nous ne eroyons pas que la question ait été, jusqu'ici, posée à l'occa- sion du magnétisme d'une montagne qui ait fait l'objet d'une étude aussi détaillée. Mais le pro- blème, en général, n'a pas laissé de préoccuper les physiciens, bien que trop souvent, à vrai dire, on admette implicitement que des bancs ou des couches de roches contenant des oxydes de fer devront avoir une aimantation de corps doux, et qu'on calcule leur influence perturbatrice, con- naissant leur coefficient de susceptibilité, comme si elles subissaient uniquement l’action induetrice acluelle du champ terrestre. Parmi les travaux des physiciens allemands qui ont étudié les roches magnétiques, je signalerai, à côté des recherches classiques de Abt, un inté- ressant travail de Pockels. Ce savant a soumis à divers champs magnétiques plusieurs échantillons de basalte, notant, pour chacun d'eux, leur teneur en magnétile: il a reconnu que la susceptibilité, variable pour chaque échantillon avec l'intensité 806 BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE du champ, croit en général d'un échantillon à l’autre, avec la teneur en oxyde de fer, sans lui êlre cependant proportionnelle. Mais l’une de ses ‘conclusions est que l’aimantation prise par ces roches, sous l’action du champ terrestre actuel, ou conservée par elles sans altération, après avoir été produite par un champ antérieur de même inten- silé, ne saurait suffire à rendre compte des actions perturbatrices exercées par la présence de ces roches sur le champ terrestre à leur voisinage. Quoi qu'il faille penser de cette conclusion en général, nous pouvons dire que le Puy-de-Dôme nous offre, au contraire, un bon exemple d’explica- tion d'anomalies magnéliques par le magnétisme des roches de la montagne. La domite est une roche acide, friable, qui con- tient environ 4°}, d'oxyde de fer, dosé comme sesquioxyde. Si on entaille, dans la monlagne, des fragments cubiques, suivant les méthodes géné- rales que nous avons adoptées et sur lesquelles je reviendrai, on trouve que ces fragments sont aimantés. Ils agissent sur le barreau mobile du déclinomètre. La composante verticale de leur aimantation est toujours dirigée de haut en bas. Et l'intensité de cette aimantation, légèrement variable d’un échantillon à l’autre, est de l’ordre Er de celle de l'acier forte- ment aimanté. Cela impliquerait, si l’aimantation à été due à l’action d'un champ de 4 dixièmes de gauss, une susceptibilité de 0,007, nombre tout à fait comparable avec ceux qu'a obtenus Pockels pour des teneurs analogues en fer. Or, nous allons voir que cetle susceptibilité suffirait, pour une roche douce, à produire, sous l’action inductrice actuelle de la Terre, l'énorme perturbation du Puy- de-Dôme ; ou bien encore qu'une aimantlation per- manente verticale, égale dans toute la montagne à celle que nous avons directement constatée sur des fragments, suffirait également à justifier l'ano- malie qui résulte des mesures de déclinaison et de composante horizontale. A coup sûr, il serait désirable du pouvoir faire le caleul complet de la distribution de l’aimantation induite sur une montagne ayant la forme réelle du Puy-de-Dôme. Mais, dans une première et grossière approximation, nous pouvons l’assimiler à un cône à axe vertical et arête inclinée à 45°, terminé par une calotte sphérique qui lui est tangente suivant un parallèle de 45°. Dans un champ vertical, la sphère prendra une aimantation avec pôle Sud sur sa surface supérieure. Et l'on voit sans peine que la composante horizontale du nouveau champ magné- tique, dû à cette aimantation, est constamment centripète, et présente sa valeur maximum préci- sément sur le parallèle de 45°, suivant lequel la de grandeur de sphère se raccorde au cône langent. Et c’est bien, en effel, auprès du bord même de la pente, qu'on trouve à l'Est le maximum de déclinaison, et au Nord et au Sud le minimum et le maximum de composante horizontale ; à l'Ouest, la forme est .plus irrégulière et le résultat plus compliqué. Et la valeur maximum du vecteur perturbateur centri- pète, que les mesures de déclinaison et de compo- sante horizontale concordent à fixer à environ 15 millièmes de gauss, est celle qui correspond au pôle donné par une aimantation de 0,0024, alors que la mesure de l'intensité sur les fragments de domite examinés nous a donné pour l’aimantation verticale 0,0027. On ne peut guère souhaiter un accord plus rigoureux. Si l'explication est exacte, elle comporte une contre-épreuve. On doit trouver sur tout le sommet un excès de la composante verticale de l’ordre de 2 centièmes de gauss. Quel- ques mesures faites avec un appareil spécial que nous avons employé, mais qui est encore à l'étude, nous donnent bien, en effet, pour la valeur de la composante verticale au sommet, un excès d'en- viron 5 °/, sur la valeur au pied de la montagne. Tout nous permet donc de conclure que la per- turbation énorme, et nous nous permeltons de dire insoupçonnée avant nous, — une mesure isolée avait même donné un nombre peu différent de la valeur normale, — que présente une montagne de domite, s'explique suffisamment par l'aiman- {ation verlisale induite dans la roche, soit actuel- lement, soit autrefois, par le champ vertical ter- restre. La forme de la montagne donne, sans qu'il soit besoin d'entrer dans plus de détails, une prépon- dérance presque exclusive à la composante verti- cale du champ sur les composantes horizontales : et, dans une première approximation, ilest légitime de s’en tenir à l’effet de la première. Il est bien clair qu'un examen minutieux de tous les détails de la distribution du champ sur les flancs de la mon- tagne devra comporter l’étude des effets secon- daires dus à l’aimantation horizontale. Une exploralion sommaire de montagnes voi- sines nous à donné des résultats qui paraissent analogues ; mais il est certain que des légions de travailleurs et de longues années seront nécessaires avant qu'on ait pu mener à bonne fin l'élude ma- gnétique de notre Auvergne. II J'aborde l'exposé de la seconde série de nos tra- vaux, à savoir: nos essais pour reconstituer la direction du champ magnétique terrestre aux époques géologiques. Avant d'aborder la très belle série de recherches BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE 807 quil a poursuivies sur les vases anliques de terre cuite, le savant italien Giuseppe Folgheraiter avait consacré plusieurs Mémoires à l'étude de l’orien- tation, de l'intensité et de l’origine du magnétisme permanent dans les roches magnétiques du Latium. Selon Folgheraiter, Melloni est le premier à avoir émis l'opinion que les laves du Vésuve doivent leur aimantation à l'action inductrice du champ terrestre pendant leur refroidissement. Folghe- raiter s'est atlaché surtout à se rendre comple du … signe de l'aimantalion de diverses roches volca- — niques (basalles, tufs) dans le sens vertical. Il ‘découpe des.bagueltes prismatiques très allongées ans le sens vertical, ou bien encore dans la direc- L tion de l'aiguille d'inelinaison actuelle, Il a trouvé, dans une centaine d'échantillons examinés, inva- riablement un pôle Sud en haut et un pôle Nord “en bas, sans aucune exception. Mais la méthode “même qu'il adopte ne lui a pas fourni l'occasion d'étudier la direction de la composante horizon- tale de l’aimantation : laissant ce problème de côté, il s'est attaqué à cet autre. bien intéressant aussi, qui consiste à chercher le rôle des trans- formations chimiques dans l'acquisition de l'ai- mantalion permanente. C'est ainsi qu'il a trouvé que certaines roches formées de poussières ou de -cendres agglomérées, les pépérines, ne présentent à l'élat naturel qu'une très faible aimantation ré- manente, tandis qu'elles acquièrent une aimanla- tion rémanente stable, comparable à celle du tuf et du basalte, si l’on vient à les cuire. Et il en est de même de l'argile ferrugineuse, que la cuisson transforme en brique. La cuisson à pour consé- quence, semble-t-il, une réaction chimique qui modifie les sels de fer de la roche, et transforme des sels non magnétiques en sels magnétiques. Ce rapprochement de l'argile et des roches vol- caniques formées de poussières agglomérées a conduit Folgheraiter à reprendre l'étude des pro- priélés magnétiques de la brique, propriélés déjà … signalées par Melloni, et qui avaient encore fait » l'objet, de la part de plusieurs physiciens, de diverses observations isolées. Le résultat capital est que l'argile cuite est un corps doué d'une force coercitive pour ainsi dire absolue. L'argile qu'on a cuite dans un champ de quelques dixièmes de gauss doit être chauffée ensuile à des centaines de degrés, ou soumise à des champs magnétiques lrès intenses, pour que son aimanlalion permanente éprouve une variation sensible. Si aucune de ces deux condilions n'est remplie, elle garde indéfiniment l’aimantalion induite durant la cuisson, et celle-ci a pour direc- tion la direction même du champ magnétique dans lequel la cuisson a été faite. À ce résultat d’expérimentation contemporaine, on peut trouver ce qu'il est permis d'appeler une vérificalion historique. Dans la Campagne romuine ou dans la Toscane, nombreux sont les points où les fouilles archéologiques ont mis au jour un puils rempli de fragments de poterie; ces morceaux bri- sés, gisant pêle-mêle, sont ainsi restés orientés en tous sens, durant plusieurs siècles. Si on les exa- nine un à un et qu'on arrive à reconstituer les vases que formait leur ensemble, on reconnait que la direction de l’'aimantation est bien la même pour lous les débris remis en place. Elle varie, au con- traire, de la plus irrégulière facon dans les mor- ceaux tels qu'ils gisaient dans la fouille. C'est done que le champ terrestre, bien qu'ayant agi durant de longs siècles, dans le même sens, sur ces débris enfouis en las, n'a pas réussi à orienter uniformé- ment leur aimantalion, et n'a pas changé cette aimantation depuis l'époque de la fabrication des poteries. Un mur de brique ancien donne un résullat iden- tique. Les briques successives ont des aimanlations variables de l’une à l’autre et tout à fait indépen- dantes. Folgheraiter indiquait, dans une nole inei- dente, que des murs de tuf ou de basalte pourraient donner lieu à la même remarque. Mon collabora- teur David avait eu l’occasion, sans connaitre celte note, de donner du même fait une preuve bril- lante : Lorsque les fouilles reprises, il y a trois ans, au sommet du Puy-de-Dôme, sous la direction de M. Ruprich-Robert et de notre collègue M. Audol- lent, eurent mis au jour, sur le flanc Est de la mon- tagne, un mur gallo-romain en petit appareil, par- faitement conservé, et formé d'une série de blocs de scories et de tufs, M. David a vérifié que les diverses pierres juxtaposées étaient aimantées, et que la direction variait de l’une à l'autre, sans aucune régularité. Mais il à fait mieux : portant alors son atlention sur les magnifiques dalles rectangulaires de domite qui forment le dallage du temple de Mercure Du- mias, M. David a étudié avec soin leur direction d'aimantation. Découpant, dans une série de quatre dalles, juxtaposées des échantillons cubiques, comme nous l’avions fait dans recherches antérieures sur la brique naturelle, il a mesuré au déclinomètre les composantes du moment magné- tique suivant les (rois directions rectangulaires Nord-Sud, Est-Ouest et verticale. La connaissance de ces trois composantes permet de déduire la direction de l’aimantation la dalle, telle qu'elle est, et d’avoir ce qu'on pourrait appeler la déclinaison et l'inelinaison magnétique de la dalle nos dans en place. Les résultats sont les suivants : Deux échantillons cubiques pris aux deux coins opposés d’une même dalle ont exactement la même 808 BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE direction d'aimantation : chaque dalle est aimantée uniformément. Si l'on compare les quatre dalles, les déclinaisons magnétiques varient de l'une à l’autre d’une ma- nière quelconque. Les inclinaisons, au contraire, sont identiques. C'est évidemment que les ouvriers qui ont taillé ces dalles dans le rocher les ont débitées dans un même banc horizontal préalablement dressé. Dans ce banc, ils ont, ensuite, découpé des rectangles dont les arêtes, loin d’être parallèles, élaient choi- sies chaque fois de matière à utiliser au mieux les parties du banc qui n'avaient ni cassure, ni éclat. L'inclinaison magnétique, ai-je dit, est la même dans ces quatre dalles en place. Je me trompe : pour l’une d'elles, l'angle avec la verticale a bien la même valeur absolue que pour les autres, 54° envi- ron, mais il est changé de signe. C’est le pôle Nord qui est en haut et le pôle Sud en bas. L’explication est simple : les ouvriers qui ont amené la pierre l'ont retournée avant de la mettre en place. Notre déclinomètre nous renseigne aujourd'hui sur la facon dont les ouvriers gallo-romains taillaient et placaient les dalles d'un temple, il y a plus de deux mille ans. Le magnétisme terrestre essaie ainsi de rendre à l’Archéologie les services que l’Archéologie lui a rendus. C'est, en effet, l’Archéologie, en la personne des possesseurs de collections ou des directeurs de musées, qui a mis à la disposition de Folgheraiter des poteries étrusques ou pompéiennes bien dalées, et lui a permis de suivre les varialions de l'incli- naison magnélique depuis le vu° siècle avant Jésus- Christ jusqu à l'empire romain. Si les vases de terre cuite ont gardé la direction d'aimantation du champ magnélique où ils ont été cuits, si, par ailleurs, la forme de ces vases, et surtout de l'orifice supérieur, impose, sans que le doute soit permis, la cuisson en position verticale, il devient possible de déduire, de l’aimantalion du vase et de sa forme, l'angle que faisait avec la verticale, à l'instant de la cuis- son, la direction du champ terrestre. î Telestle principe de la méthode de Folgheraiter. On se rendra de la difficulté de ces recherches si l'on veut bien songer, d'abord, que Faimanlation de la brique est toujours faible (elle compte atteint rarement et peut descendre au- 1 200.000 dessous de 1 millionième de l’aimantation d'un bon acier), et ensuile que le calcul qui permet de conclure de l’aimautation dans un vase orné et de forme dissymétrique à l'aimantation du champ ne peut être qu'approché et peut toujours laisser subsister quelques doutes dans l'esprit. Häâtons-nous de dire que l'un des résultats aux- quels Folgheraiter attache, avec raison, le plus de t ments d'une amphore ou d'une urne, si elle a été prix, à savoir le changement de signe de l’incli- naison entre l'époque primitive de l’art étrusque et la fin de l'empire romain, pourrait être l'objet d'une vérification plus directe, n’impliquant aucun calcul délicat. Quels que puissent être les orne- cuite dans un champ terrestre ayant le pôle Nord en haut, elle doit présenter du côté de l'ouverture une aimantation Nord et une aimantation Sud du côté du pied; c'est le contraire de ce que présentent, sans ambiguïté, les vases des époques postérieures; c'est aussi le contraire de ce que nous ont montré ceux des vases lrouvés au Puy-de-Dôme que nous avons eu l'occasion d'examiner, et qui portent quelques-unes des marques de fabrique, jadis célèbres dans la Gaule entière, des poliers de Lezoux. Par malheur, si l'aiguille aimantée, à l’époque où florissait en Etrurie la céramique, était inclinée à l'inverse de l'aiguille actuelle, elle était certaine- ment très peu inclinée. Plusieurs des vases étudiés par Folgheraiter donnent à peine quelques degrés d'inclinaison; un seul, du Musée de Florence, atteint 14°. Et l’on conçoit que ces nombres laissent quelques hésilations dans l'esprit, sil'on songe que les essais de Folgheraiter sur les aiguilles verticales de roches volcaniques semblaient impliquer la persistance d’une inclinaison positive, si l'on songe encore que des spécialistes en magnétisme terreslre, comme le physicien suédois Carlheim-Gyllenskiüld, qui a si heureusement appliqué la boussole à l'ex- ploration des mines de fer de Laponie, sont con- duits, par l’ensemble de leurs travaux, à conclure que, dans la région du globe qui est devenue notre Europe, l’inclinaison à aucune époque n’a dû changer de signe. Au cours de son travail, dont on peut bien dire: qu'il a élé l’un des plus originaux de la fin du XIX° siècle, et qui a suscité des études ullérieures parmi lesquelles je dois une mention spéciale à celles de Paul Mercanton sur les poteries lacustres trouvées dans la région de Lausanne, — au cours de son travail, Giuseppe Folgheraiter formule un souhait : c'est que la découverte d'un effet acciden- tel, incendie de carrières d'argile, mise au jour d'un four de poterie avec pièces en place, fournisse un jour les renseignements qu'il n'a pu avoir sur la déclinaison magnélique dans l'Antiquité, eb permette, pour l'inclinaison, de conférer à ses conclusions la certitude que donne la prise même sur le fait. C'est ce souhait que nous pensons avoir réalisé par l'étude magnétique de la brique naturelle qu'ont produite des coulées de lave en venant s'épandre sur des couches d'argile. La comparaison de la direction d'aimantation To NUE Var lle Mrs dans celte argile métamorphique et dans la roche qu'a donnée la lave par solidification, comparaison faite en déclinaison et inclinaison, nous a permis de conclure, de la stabililé d'aimantalion de l'ar- gile cuite, à celle de la lave soliditiée elle-même, et . nous a autorisés à penser que l'étude générale et systématique de la direction d’aimantalion des roches éruptives en place, sans constituer à elle seule une méthode toujours sûre, pourrait apporter aux géologues un précieux moyen de vérification et de contrôle. : Au cours d’une excursion faite en 1901 en com: pagnie de notre coliègue et ami M. Glangeaud, l'éminent géologue nous montra un phénomène sur lequel il avait déjà appelé l’attention : l'exis- tence d'une couche horizontale d'argile métamor- _phique, sous une coulée de lave basaltique : une tranchée de route avait mis au jour la superposi- tion des banes de basalte et de brique; à partir du basalle, en allant vers le bas, on passe, par transi- tions insensibles, de l'argile bien cuite el bien rouge à l'argile crue, molle et d’un blanc sale. Dans cette première coulée examinée, c’est jusqu'à 80 cenli- mètres environ au-dessous de la lave qu'on à vrai- ment de la brique; mais la brique prélevée là, tout près du village de Boisséjour, élail trop mélée de - fragments de pierre charriés par le fleuve de lave, et surtout trop friable et trop difficile à tailler, sans doute à cause de la proportion trop forte de craie, pour pouvoir donner des résultats bien nets. IInous fut seulement possible d'en détacher des morceaux et de reconnaitre, par un examen effectué avec M. David à la Faculté de Clermont, entre une heure - etcinq heures du malin, — à l'heure où les tram- ways électriques ne marchent pas, — que les - fragments examinés avaient bien. les caractères … d'aimants permanents. Depuis lors, nous avons installé nos appareils au sommet du Puy-de-Dôme, à l'Observatoire. Nous n'y sommes pas encore lroublés par les tramways électriques, et probablement nous ne le serons jamais, si, comme la chose parail aujourd'hui déci- dée, on fait grimper jusqu'au sommet un chemin de fer à vapeur, — procédé que déclarerait volon- tiers barbare le philosophe scientilique affligé de voir l’homme imprévoyant accélérer, dans notre pauvre monde, la dégradation de l'énergie, — mais procédé qui réjouit le géophysicien occupé de magnétisme terrestre et que hantait le spectre du «courant vagabond ». Nous nous servons d’un déclinomètre Mascart, observé par la méthode subjective: nous plaçons à côté et tout contre l'appareil le caillou cubique à examiner, disposé, par rapport au déclinomètre, dans ceile des deux positions de Gauss qui don- ne une déviation double de l’autre. Laissant le cube occuper le même volume dans l’espace, on le tourne de manière à lui faire pren- dre successivement les 24 posilions possibles. Par exemple, on placera d’abord l'axe Nord-Sud per- pendiculaire au barreau mobile, le cube reposant sur la face qui était la face inférieure quand il était en place dans le roc. Puis, l'axe Nord-Sud gardant la même direction, et la face Nord restant tournée vers le déclinomètre, on fait tourner le cube autour de cet axe Nord-Sud, quatre fois de suite, de 90°; ces rotations ne doivent pas faire varier la dévia- tion du barreau mobile, car l’axe Nord-Sud reste seul en jeu. Et c’esthien ce que l'on constate, mais à la condilion expresse que le cube soit bien homo- gène, et qu'il soit bien symétriquement placé. Il y à là une vérification indispensable. S'il advient qu'il n’y ait pas égalité rigoureuse entre les dévia- tions obtenues dans les quatre cas, on fera la moyenne des quatre lectures. On opérera de même pour les six faces du cube. Après l'essai complet, on reprend toujours la première face examinée, pour éliminer toute cause extérieure de perturba- tion. La différence des lectures faites avec la face Nord et avec la face Sud mises contre l'instrument donne la composante Nord-Sud du moment magné- lique. On prend de même les composantes Est- Ouest, et verticale du haut en bas. Les rapports de ces rois nombres donnent la déclinaison et l'ineli- naison de l’aimantlalion permanente de la pierre. Si l’on veut, en outre, l'intensité d’aimantation, on met successivement à la même distance la pierre cubique à examiner et un barreau aimanté connu, — par exemple un barreau servant couramment à la mesure de la composante horizontale du champ terrestre. Comment taillons-nous nos pierres? Il nous arrive souvent d’y briser nos burins et nos mar- teaux, et de ne pouvoir entamer certaines laves très basiques d’une dureté désespérante, ou encore de nous heurter à des bancs de brique qui s'effri- tent et tombent en poudre dès que l'outil veut les attaquer. Mais là n’est pas la question. Nous commencons par dresser, au niveau, dans la roche, une face bien horizontale. On y trace ausitôt, à l’aide d'une boussole de poche, la direc- tion actuelle de l’aiguille aimantée, et l’on indique, par une flèche, le Nord magnétique. On prend la précaulion complémentaire de dresser, au fil à plomb, toujours avant d'avoir détaché le bloc du rocher, une face verticale, qui sera, par exemple, perpendiculaire à la direction du méridien magné- tique actuel : ce sera, suivant la disposition du bloc, la face Nord ou la face Sud. Cela fait, on détache un bloc plus gros que celui qu'on veut garder, mais qui peut être informe, el qu'on achève de lailler en cube à l'atelier, mais sans faire aucune 810 BERNARD BRUNHES -— LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE retouche aux deux faces dressées sur place. La seule marque qu'il porte est une flèche tracée sur la face horizontale supérieure, et dirigée vers le Nord magnétique actuel. Pourquoi, nous a demandé M. Folgheraiter, choisir la forme cubique, au lieu de la forme de : baguelte allongée? C'est précisément que, pour avoir la déclinaison et l'inclinaison, nous voulons avoir les trois composantes de l’aimantalion, et qu'il ne faut pas songer à faire les mesures de ces trois composantes en trois échantillons différents, sur trois bagueltes diversement orientées; car, en des points voisins, on peut avoir des intensités très différentes : avec la brique, il suffit de quelques centimètres de distance en profondeur pour faire varier, parfois du simple au quintuple, l'intensité lotale d’aimantalion, sans que toutefois la direc- lion soit modifiée sensiblement. Nous avons une vérification a posteriori de la correction de notre méthode. Il nous arrive, ayant dressé la face horizontale supérieure, de dresser des faces verticales NE, NW, SW et SE, par exemple; et, les mesures une fois effectuées, ainsi que le calcul élémentaire qui permet de passer des composantes aux angles, de retrouver exactement la même direction de l'aimantalion par rapport au méridien que dans un cube voisin à faces verti- cales taillées N, $, E et W. Remarquons qu'au degré de précision que com- portent les mesures, et vu la faiblesse de l'intensité d'aimantalion dans les échantillons les plus magné- tiques, il est toujours permis de négliger la force démagnétlisante. Rendons-nous compte, sur un exemple, de ce degré de précision. Il augmente naturellement avec l'intensité d’aimantlation du eube étudié. Dans le cas d'une brique de Royat, notée R.B.3, voici les lrois composantes de l’aimantation : NS — "0,4 EW— — 0,65 HB = — 2} L'unité choisie est ici la grande division de l'échelle divisée. La petite division de l'échelle, qui est dix fois plus petite, se lil encore très bien; mais la demi-petite division, et à plus forte raison le quart, se lisent plus malaisément. Et s'il arrive, comme c’est le cas pour certains échantillons, que la composante Nord-Sud soil + 0,05 et la compo- sante Est-Ouest —0,05, chacun de ces deux nombres, dont le rapport définit la déclinaison, ne peut être regardé comme délerminé qu'avec une erreur possible de près de 50 °/,. Il ne faudra donc pas s'attendre à voir des échantillons aussi faible- ment aimantés nous donner tous la même valeur de la déclinaison, à 1 ou 2° près. Mais, si nous trouvons, mulgré Loul, que, dans les échantillons d'une même carrière, comme c’est le cas pour Royat, exisle une composante horizontale dirigée vers l'Ouest magné- tique du même ordre de grandeur que la compo- sante dirigée vers le Nord magnétique; si, dans des briques de la carrière laillées à 45° du méridien, nous trouvons que la composante Nord-Est-Sud- Ouest est praliquement nulle, la composante per- pendieulaire élant notable : nous serons en droit de conclure que la déclinaison occidentale révélée par la brique est supérieure d'environ 45° à la déeli- naison actuelle, sans toutefois que nous soyons scandalisés s'il arrive de trouver pour cet angle des valeurs variant de 40 à 60°. Cela posé, les échantillons de briques venant de Royat, étudiés par M. David il y a déjà quatre ans, aussi bien que les échantillons nouveaux que j'ai taillés il y a quelques semaines, et éludiés en dernier lieu, nous donnent tous des déclinaisons occidentales supérieures à la déclinaison actuelle d'un angle compris entre 40° et 56°, et des incli- naisons voisines de 70°. Et les échantillons de lave découpés dans la coulée supérieure qui a cuit l'argile donnent bien des déclinaisons et des inclinaisons comprises entre: les mêmes limites. Il arrive loutefois, pour la lave, qu'on trouve, sur tel ou tel échantillon, une valeur s'écartant un peu de la limite : nous avons oblenu une inclinaison de 82°, comme s’il y avait une len- dance à une stabilité d'aimantation un peu moindre dans la lave que dans la brique. Le résultat d'ensemble, aussi bien pour la carrière de Royat que pour une autre carrière, choisie au bord de la route de Beaumont, n’en est pas moins net : l'aimantation de la brique et celle de la lave supérieure ont même direction. À Beaumont, la déclinaison varie entre 7° et 139 à l'Est du méridien magnétique actuel, et l'ineli- naison entre 51° et 60°. A Royat, nous avons eu l’occasion de faire une » contre-épreuve intéressante. L'argile, qui a été cuite sur sa face supérieure, repose, à sa partie inférieure, sur une autre couche de basalle, dont la direction, elle, est tout à fait différente : déclinaison ne dif- férant que de 4° de la déclinaison actuelle, et incli= naison de 59°40', Ce seul fait, semble-t-il, suffirait pour affirmer que la première coulée n’est pas con: temporaine de l’autre, et que cette autre, la coulée supérieure, est contemporaine de la cuisson de l'argile. Une autre carrière d'argile métamorphique, récemment examinée, ma confirmé le résultat fondamental. Elle m'a été signalée par M. Vinay, ingénieur des Ponts et Chaussées à Saint-Flour : elle se trouve près du pont de Pontfarein, commune de Cezens, BERNARD BRUNHES — LE MAGNÉTISME TERRESTRE DANS LA FRANCE CENTRALE 811 dans celle région de la Planèze que recouvre une nappe presque horizontale, très étendue, de basalle des plateaux, et à une altitude de 1.020 mètres. Cette argile cuite m'a donné, par contre, un résultat inattendu. Ici, la base supérieure des cubes, cube de brique ou cube de basalte, agit comme un pôle N. De même, la face S. des cubes agit comme un pôle N. En sorte que, si la direction d'aimantalion nous donne fidèlement la direction du champ terrestrs à l'époque de la coulée, nous pouvons dire qu’à cette époque, c'était bien encore le pôle, alors dirigé vers le Nord, qui élait en mème temps dirigé vers le bas, mais ce pôle était le pôle opposé à celui qui prend aujourd'hui la direction Nord. Je ne vois pas ici quelle objection pourrait être faile. Les couches de basalte et de brique ont pu + glisser. Elles n'ont pas été, à coup sûr, retournées sens dessus dessous, sans quoi la brique eût été trouvée au-dessus du basalte et non au-dessous. Et je ne vois pas qu'il soit possible de conclure autre- ment qu'en déclarant qu'à l'époque miocène, il ya eu certainement un moment où notre pôle Nord de maintenant élait dirigé vers le haut. III Lors de la publication de nos premières Notes, il est arrivé qu’on nous ait demandé si nous pour- . rions parvenir ainsi à daler des phénomènes volca- niques dans le passé. Je ne le pense pas, et voici pourquoi : À supposer même, ce qui nest pas le cas, ou du moins n'a pas toujours élé le cas, que les variations séculaires de la boussole affectent “une périodicité régulière, nous aurions l'instant de la période où l'éruption s'est produite : le nombre de périodes écoulées ne nous serait pas donné. On se souvient encore de ce curieux acci- dent de chemin de fer qui se produisit à Paris, à la gare Montparnasse : Un train qui ne put s'ar- rêter à lemps vint enfoncer la facade de la gare terminus, el, comme il y avait une différence de … niveau, on vit la locomotive tomber d'un premier étage sur la place publique, en percant la facade. “Le train coupa les fils conducteurs qui distri- “buaient électriquement l'heure aux horloges de la gare, et, le lendemain, on pouvait lire sur ces hor- sr} loges, arrètées à li même minute, l'heure exacle de l'accident. Si l'on eût relrouvé lout en l'état au bout d'un an, au bout d’un siècle, la vue de ce cadran et des aiguilles arrêtées nous eût bien donaé la minute et l'heure, mais non la date de l'accident. De même, depuis les dernières érup- tions volcaniques, au moins en Auvergne, les aiguilles des deux boussoles de déclinaison et d'in- clinaison auraient eu le lemps de tourner sur leur cadran plusieurs fois : savoir à quelle division de leur cadran l’éruption les a saisies ne nous apprend pas combien de tours elles ont fail depuis. Est-ce à dire que le renseignement fourni soit à dédaigner? Non certes, et, pour continuer ma comparaison, le fait, pour un événement du passé, d'en avoir l'heure sans en avoir la date, pourra permettre à un historien avisé de tirer d’impor- tantes conséquences. Il pourra dire, par exemple, de deux événements donnés, qu'ils ne sont pas, comme on l’a cru, simultanés; le géologue qui saura manier le déclinomètre pourra dire de même : deux coulées volcaniques ne sont pas con- temporaines. Il pourra se produire, enfin, cette circonstance que l'horloge présente une disposition relative des deux aiguilles des heures et des minutes qui ne nous apparaisse pas comme possible aujourd’hui. C’est, alors, qu'à l'époque de l'événement, la marche de l'horloge était autre que ce qu'elle est mainte- nant. C’est justement ce que nous donnent, selon moi, le basalle et la brique de Pontfarein; et le changement de signe de l’inclinaison magnétique en certains points de l'Europe et de la France, — changement que pouvaient faire pressentir cer- taines observations isolées d'anomalies magné- tiques, que rendaient très probable les beaux tra- vaux de Folgheraiter, — serait par là, à moins d'objections que je ne prévois point, établi avec certitude. S'il en est ainsi, ce sera là un fait essentiel dont on devra tenir compte dans tous les essais qu'on pourra faire pour rattacher à la genèse et à l'évo- lution de notre système solaire l’origine et l’his- toire du magnétisme terreslre. Bernard Brunhes, Directeur de l'Observatoire du Fuy-ie-Dôme, 812 L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE À LA MÉTALLOGÉNIE DE LA RÉGION ITALIENNE Le travail suivant, où je vais essayer de grouper rationnellement les gîtes métallifères italiens et ten- ter d'interpréter leur distribution par la tectonique, a pour objet l'application de la méthode nouvelle, que j'ai préconisée ailleurs', dans une région rela- livement homogène et, en tout cas, bien localisée. Cette méthode, dont je rappelle seulement le principe essentiel, consiste surtout à expliquer les uns par les autres tous ceux des gisements métalli- fères voisins que l’on peut supposer formés simul- tanément, en les considérant, quels que soient les métaux cristallisés, comme faisant partie d'un même ensemble et en cherchant leur lien avec les mouvements mécaniques du sol ainsi qu'avec les intrusions ignées. On est amené ainsi à invoquer la profondeur de cristallisation originelle, ou du moins les condi- tions diverses de pression, de fumerolles, ete., qui ont pu équivaloir à cette profondeur de crislallisa- tion, et à faire intervenir la distance entre le minerai considéré et la roche ignée dont on suppose celui-ci plus ou moins directement émané. Les lois auxquelles on se trouve conduit par là pren- nent done un caractère de généralité, qui peut en faire le point de départ d’hypothèses intéressantes sur la constitution profonde du Globe. La région italienne m'a paru présenter un champ d'étude favorable, parce que les minerais semblent y appartenir tous à un même système tertiaire, amené, suivant les points, à différents niveaux plusieurs voyages successifs m'ont permis d'en examiner moi-même les principaux gites. En même temps que je développerai cette théorie principale, j'insisterai sur deux autres notions importantes, auxquelles la zone métallifère toscane, dont il va être spécialement question, fournit une illustration remarquable : à savoir le rôle en mélallogénie des contacts, et spécialement des contacts par failles, entre terrains d’inégale perméabilité, et les caractères du mélamorphisme superficiel sur les minerais sulfureux. d’érosion :; L'Italie, à laquelle je vais rattacher, pour l'unité du sujet, les régions contiguës de l'Autriche, de la Suisse et de la France, offre un assez grand nombre 4 La Science géologique. Paris, Armand ch. 1x et xxx. Colin, 1905, de gites métallifères, mais eu présente peu de bien importants industriellement, surtout si l’on est amené à laisser de côté la Sardaigne, qui fait partie d'un système leclonique tout différent et plus ancien. Minerais de fer de l'ile d'Elbe, cuivre du district de (Gênes ou de Monte Catini, pyrites cuivreuses des environs de Massa Marittima ou d'Agordo en Vénétie, calamines du Bergamasque, mercure du Monte Amiata, voilà les principales richesses minérales-du pays. Et, sans doute, cette. pauvrelé est un peu l'effet d’un épuisement tenant à une très ancienne civilisalion ; car on retrouve, en. certaines régions, comme le Campigliese, le Mas- setan, le Frioul ou les Alpes, les traces d'impor- lantes exploitations anciennes. Néanmoins, on peut remarquer aussi que les zones tecloniques où notre théorie nous fait prévoir l'existence de grandes métallisations, — par exemple les bords de massifs anciens tordus ou redisloqués et les parties un peu profondes des zones éruptives récentes, — sont rares en Italie. Nous savons, au contraire, que l’on trouve toujours peu de minerais dans la hauteur des grandes chaïnes plissées comme les Apennins, où se manifeste un mouvement de compression et souvent un déversement laléral de l'écorce, ainsi que dans les régions trop superficielles à volcans actifs ou à cratères subsistants, comme la Campagne romaine et le pays de Naples, dans lesquelles le mercure est habituellement le seul métal arrivant au jour. Les Alpes, qui rentrent dans le cas des chaines récemment plissées, sont, de leur côté, fort peu minéralisées, si ce n’est dans les zones axiales où l'érosion a déjà eu le temps de mettre au jour des facies cristallophylliens dus à un métamor- phisme de profondeur, et les minerais que l’on observe là rentrent dans le cas des imprégnalions sulfurées, particulièrement développées ailleurs. dans des pays géologiquement beaucoup plus: anciens, comme la Scandinavie ou le Canada, l'Afrique centrale ou le Brésil. 1 Quand on prend une carte géologique d'Italie et qu'après en avoir souligné, par un moyen graphique quelconque, les caractères principaux, on essaie d'y placer les gites métallifères, distingués eux= mêmes par groupes théoriques, on voit aussitôt apparaîlre, indépendamment de toute hypothèse, une certaine loi de répartition, qui ne saurait être purement accidentelle (fig. 4). « Cette carte, que j'appellerai métallogéniques montre d’abord l'absence complète de minerais L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE 813 ZXVIENNE Bale alzbourg | L deConstance É Schwaez _£Kitzbuche a : KR L deWeuchät £ é < BERNE È NAS Pro) De BRRKUE - - LS RES : J RER > N | L de Gene. RQ RQ NS = ; | ù n anèee fe NŸ R N ur ; naiyLe N N R e D Re NA rioul fl [ é u los NN g. PG Le ; NP QUES de 602 Bergalme > Ilevar, SEE Fe à F DIR Urree Milan A Fe À CDS : PA eVenise «| Mon +: SS Pelvou ornëro # Csmpiglia Lo ) = Dessine par F Borremans. 5. Aue Hautefeuille - Pris Roches eruptives recentes._ ZONE du petro/e = ARS ES € I ini CR OR ET Zone des roches vertes avee facres métamorphiques. HAL VMRXY e 1mpregnations sulfureuses et gites de ségrégation Zône des filons sulfures plombo-zincrfères CTAN IC ESS CORALIE ES CC (EF Mopeltes roches (vertes- 2 2." __V| PRES Massifs so NE IE EURE C7 Les parties non metallisées ont ete larssees en blanc. Fig. 1. — Carte métallogénique de la région italienne. s les zones éruptives, que l'on peut considérer | montre à la surface une portion particulièrement nme des zones déprimées, où subsiste et se | élevée de ce qui était l'écorce superficielle à la fin . REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 18* À 814 L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE À LA MÉTALLOGÉNIE de l'époque pliocène ou au début du Pléistocène. Je crois que, d'une facon générale, les cristallisa- tions de minerais sont une émanation des magmas ignés, qui provoquent pas leurs déplacements pro- fonds les manifeslalions volcaniques; mais il me parait également bien démontré que, manifestations volcaniques elles-mêmes, il ne se forme pas au jour de vérilables minerais (sauf le peu de fer, de cuivre ou de mercure que l’on à souvent cité) ; les liqueurs métallisantes n’ont dû pouvoir garder leurs métaux dissous que sous une certaine pression, etla décompression produite par l'approche de la superficie avait dû être précédée par le dépôt successif des divers minerais en ordre inverse de leur solubilité. L'Italie témoigne bien de cette règle générale. Cependant, il a pu s'effectuer parfois, en d’autres régions du monde, des cristalli- sations métallifères très riches, provoquées par l'abondance des fumerolles dans des conditions de voleanisme presque superficielles, et l'on trouve, dès lors, ailleurs de grands champs métallifères en certaines régions volcaniques dont l'érosion à enlevé la première écorce stérile. Tel est le cas pour ces pays de l'Ouest américain ou du Mexique, dont larichesse en métaux précieux est proverbiale. En Italie, on ne constate rien de pareil; mais on peut y vérilier la localisation du mercure sur le pourtour de ces zones éruptives récentes : localisa- tion qui se mauifeste un peu partout dans le monde avec une rigueur presque théorique, parce que la combinaison sulfurée du mercure et des alcalis est particulièrement soluble, soluble au point de per- sister même dans certaines de nos sources ther- males actuelles. Il suffit, en effet, d’un coup d'œil sur la carte ci- jointe pour voir combien les gisements de mercure (avec association fréquente d'antimoine) forment une auréole bien nette aux zones éruptives récentes, dont elles ne s'écartent jamais beaucoup. La rela- tion apparaît encore plus évidente si l’on remarque la rareté extrême du mercure dans les pays situés plus au Nord ou à l'Ouest, en Allemagne, en France, etc.. On peut la vérifier depuis la Serbie jusqu’à l'Algérie. C’est une lrainée de gisements, parfois (très imporlants, qui comprend Prozor en Serbie, Idria, Litlai et Neumarktl en Carniole et Carinthie, les minerais du Frioul et de Vallalta ; puis la trainée toscane de Serravezza, de Jano, du Monte Amiata et de Capalbio, le mercure actuel de la solfatare du Vésuve et tous les affleurements de la province de Constantine ou de la Tunisie”. Les gisements mercuriels ne s'écartent jamais beau- coup, sur la carte, des massifs éruptifs, à l'intérieur 1 L. De Lauvay : Les Richésses minérales de l'Afrique. Paris, Béranger, 1903, p. 157. dans ces: desquels on notera, en oulre, qu’ils ne pénètrent pas. La relalion, comme toutes celles que nous allons essayer de metlre en évidence, semble cor- respondre à un départ périphérique, à un dégage- ment extérieur par fumerolles. \ Remarquons, à propos de ces gisements mer- curiels, que partout ils sont accompagnés de dé- pôts hydrocarburés ou de dégagements carburés actuels, sous la forme, tantôt de grisou, tantôt d'acide carbonique, aussi bien à Idria qu'à Jano ou au Monte Amiata. Il est difficile, dans ces condi- tions, d'expliquer uniquement de tels dégagements par de simples accidents superficiels, ainsi qu'on à pu le tenter après une étude localisée au Monte Amiata : d'autant plus que cette connexion entre le cinabre et les carbures, grâce à laquelle le cinabre a dû être en partie précipité, se retrouve dans toutes les parties du monde, et que, d'autre part, les mêmes conditions superficielles sont sans cesse réalisées ailleurs sur les giles pyriteux sans amener des phénomènes semblables. Les gaz hydrocarburés peuvent être done supposés avoir la même origine interne que les fumerolles mercurielles. L'examen de notre carte mélallogénique peut alors conduire à remettre en question le problème toujours controversé de l’origine des pétroles ita- liens, tout au moins à empêcher d'affirmer sans réserve la théorie généralement admise de leur for- malion organique. Si l'on raccorde, en effet, par continuité la zone cinabrifère de Toscane avec celle de la Haute Italie en traversant toute la chaîne plis- sée de l'Apennin, trop peu érodée encore pour lais- ser apparaitre un soubassement métallisé, on ren- contre précisément toute la série des manifestations hydrocarburées les plus caractéristiques : coups de grisou absolument insolites du tunnel de Borgallor sur la ligne de Parme à la Spezzia en plein terrain éocène, et surtout giles pétrolifères exploités des val- lées du Chero et du Taro. Les autres manifestations hydrocarburées el salses de l'Apennin sont toutes à l'intérieur de la même limite, du côté des roches: tertiaires, Je me garderais d'en conclure pour ce pétrole une origine éruptive, contrairement à la théorie très vraisemblable qui le fait provenir de dépôts organiques avec matières salines à la base du Miocène. Cependant, on sait que, pour Fouqué e Silvestri, les gaz des salses étaient l'équivalent des hydrocarbures dégagés par les volcans. Une observalion du même genre peul être faite pour les sources chaudes à acide borique qui cons stituent les soffioni de la Toscane. Les borates sont un produit salin connu des bassins d’évaporation, el l'on a pu, dès lors, être tenté d'attribuer les soffioni toscans au simple lessivage par les eaux thermales de gisements salifères profonds. Mais, là encore, il | faut remarquer la position de ces soffioni à la pér L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE 815 … presque dans lamême zone où se trouve le mercure. En dehors des softioni, on retrouve des traces d'acide borique dans une série de sources thermales siluées sur la même trainée mercurielle, à Boccheg- giano, etc., et ce rapprochement, qui pourrait appa- raitre purementaccidentel, prend le caractère d'une observation théorique quand on constate qu'il se renouvelle pour les gisements de borax et de mer- cure en Californie. La plupart des dépôts salins boratés dans le monde, dépôts produits par une évaporation, par une concentration de matières salines, se trouvent, eux aussi, dans des régions de roches éruptives récentes, où l’on peut admettre que l'acide borique s'était déjà trouvé, par un effet de fumerolles, en abondance spéciale. Enfin l’exa- men des massifs graniliques récents, tels que ceux de l'ile d'Elbe, du Campigliese ou de Gavorrano, que l'on peut étudier en Toscane même, montre le rôle important de l'acide borique fixé à l’état de tourmaline, dans les fumerolles dégagées à la périphérie des magmas granitiques. Tout cet en- semble de faits nous conduit donc à imaginer qu'il a dû se produire, autour des zones éruptives ré- cenles encore peu érodées de l'Italie, c'est-à-dire à une faible profondeur dans les parties de l'écorce accidentées par le volcanisme, une série de fume- -rolles contenant du mercure, de l’antimoine, du carbone, du soufre et du bore : fumerolles suscep- tibles de monter jusqu'à la superficie etayant donné, par suite, des catégories de dépôts que nous lrou- xons toujours de préférence dans les parties ré- cemment disloquées et peu érodées de l'écorce lerrestre. Ces produits, faciles à remettre en mou- vement puisqu'ils donnent des sels solubles, peuvent d’ailleurs, lorsque nous les voyons arriver actuellement au jour dans des sources thermales, salses, etc., n être là que par suite d'un emprunt à un premier dépôt intérieur ; leur concentration peut se trouver à une phase plus ou moins avancée des cycles qu'elle est susceptible de parcourir, et le champ reste ouvert, par exemple, à toutes les inter- prélations superficielles, par lesquelles on a tenté d'expliquer le dépôt des gites cinabrifères, tels que nous les rencontrons aujourd'hui dans nos exploi- IT Après cette zone du mercure, de l’antimoine, du bore et peut-être des hydrocarbures, les caractères métallogéniques de l'Italie changent complètement, MOn rencontre, en effet, plus à l'Ouest ou plus au B ord, une portion de l'écorce, où apparaissent, à \ TJ état de tronçons disloqués, de horsts ayant subi des déplacements relatifs dans le sens vertical, des : beaux de terrains anciens, avec inlercalation : phérie immédiale des roches éruptives récentes, | de noyaux ignés cristalline à type granitique, ayant pu être amenés par l'érosion jusqu'au jour. Ce n’est pas là, à proprement parler, | « Avant- pays » de la chaine plissée tertiaire; les plissements ont poussé juqu ici; notre zone métallifère, qui part de la Toscane et comprend la région de Lucques et de Seravezza, semble, plus au Nord, obliquer sur la chaine des Apennins pour s'accoler intérieurement à la courbe présumée des plis alpins. Tout au moins, après avoir perdu cette catégorie de gisements vers Seravezza, faut-il aller du côlé de Côme et de Ber- game pour les retrouver, en même temps que les massifs de Permo-trias et de Carbonifère, dont les fractures se sont prêlées à ce genre de minéralisa- tion. Puis, à l'Est de Côme, la zone en question se poursuit, le long des Dinarides, dans les Alpes du Bergamasque et de la Carinthie. Elle semblerait donc, sur la traversée de la Lombardie, indépen- dante des plis tertiaires; néanmoins, on a l'impres- sion très pelte, en l'abordant, de pénétrer dans une zone plus profonde de l'écorce, d'aborder une par- lie latérale du géosynclinal plissé qui a formé les Apennins et les Alpes : zone où le soubassement ancien, soumis à la pression de ces plissements, a été disloqué par compartiments et où l’allure de ces accidents a pu être influencée par les directions antérieures de ce soubassement. Au Sud, quelques rares minerais du mème genre reparaissent à la pointe sud de l'Italie, avec le massif ancien de l'Aspromonte et de Messine ; mais la vé- rilable continuation de notre zone métallifère est, de l’autre côté de la mer tyrrhénienne effondrée, en Tunisie et Algérie, où l'on retrouve, à partir d'une semblable trainée éruptive (qui ici est siluée au Nord), des minerais analogues, accompagnés, comme je l’ai dit déjà, d’antimoine et de mercure. Dans la zone métallisée que nous envisageons en ce moment, le {type est un type filonien, les mine- rais sont des dépôts d’incrustation thermale et, pour définir ces gisements, il y a lieu d’examiner d’abord les fractures remplies, puis leurs remplissages. En ce qui concerne les fractures remplies, on peut remarquer, dans toute la Toscane, le rôle prépon- dérant des filons-failles, des filons de contact; les incrustations ont, pour la plupart, minéralisé les plans de rupture à peu près Nord-Sud (légèrement N. W-S. E.), suivant lesquels s’est opéré le jeu relatif des voussoirs juxtaposés pendant leurs exhausse- ments et leurs effondrements. On peut donc attri- buer un rôle prépondérant aux déplacements ver- ticaux dans cette série de phénomènes connexes, qui comprend, avec l'enfoncement d'un ou plusieurs voussoirs, l'injection des éléments liquides (ou liquéfiés) dans les voussoirs voisins et le dégage- ment simultané de fumerolles métallisantes. Les contacts entre terrains d'inégale perméabilité, réa- , 816 lisés par de semblables failles, ont naturellement facilité la circulation des eaux soulerraines suivant les plans de contact. Dans le district de Lucques et Seravezza, les conditions sont analogues. Si l’on passe, au contraire, aux Alpes du Berga-. masque et de Carinthie, on voit s'accentuer, à côté du rôle des failles, celui des contacts normaux entre schistes et calcaires superposés, qui correspond à un phénomène identique, c'est-à-dire à un plan de pénétration facile pour les eaux souterraines entre un schiste imperméable et un calcaire per- méable, mais parfois avec une sorte d’interstratifi- cation horizontale un peu déroutante au premier abord. C’est ainsi que, dans la région de Bergame (Ponte di Nossa), les minerais sont surtout entre schistes et calcaires du Trias. Vers le val Trompia et le val Sabbia, à l'Ouest du lac de Garde, les minerais très nombreux incrustent, soit les failles entre le Permien el les schistes cristallins, soit les fractures parallèles à la Giudicaria. A Auronzo et Raibl, au Suddes alpes Carniques, comme à Bleiberg et Greifenburg au Nord du Gailthal (d'un côté, dans les Dinarides, couchées vers le Sud ; de l’autre, dans les Alpes à plis verticaux), on retrouve des impré- gnations dans les calcaires du Trias, avec localisa- tion au Bleiberg sous un toit de schistes. Dans tous ces cas, pour (ous ces gisements ordi- nairement encaissés dans les calcaires du Trias, il est impossible de passer sous silence le rôle des altérations superficielles récentes, qui ont profondé- ment transformé les minerais de profondeur, qui les ont remis en mouvement, qui en ont changé la nature et qui, finalement, ont donné à la plupart de ces gites leur apparence extérieure, par-dessus laquelle il est nécessaire de passer pour reconsli- tuer par la pensée leur aspect primitif, si l’on veut arriver à des conclusions de quelque valeur. Quantà lamétallisation de tousces gisements, elle comprend, en principe, les mêmes éléments carac- téristiques des filons sulfurés complexes, que j'ai appelés ailleurs B. P. G. (blende, pyrite et galène, avec chalcopyrite accessoire). Ainsi qu'il arrive toujours dans de semblables champs de filons complexes, on voit, dans la longueur d’un même filon, dans la profondeur d’une même exploita- tion, la minéralisation se modifier plusieurs fois sans aucune loi et souvent alternativement en sens inverse. Ici domine le plomb, plus loin le zine, ailleurs le fer ou le cuivre. Il serait donc dange- reux de vouloir établir des lois trop théoriques pour un phénomène qui ne semble pas en com- porter. Cependant, les champs mélallifères de ce groupe ont chacun une physionomie spéciale, et cetle physionomie paraît bien correspondre avec la position des minerais considérés par rapport aux roches éruptives de la période correspondante. L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE J'ai déjà signalé le plus caractéristique de ces M faits en montrant le mercure localisé sur le pour- tour des roches éruptives à épanchements superfi- ciels. Il semble que, lorsqu'on approche, au con- traire, des roches cristallines grenues à type grani- tique, très vraisemblablement formées en profon- deur et sous pression, on voie se développer un autre groupe, principalement composé de pyrite de fer, avec chalcopyrite accessoire et quelquefois un peu d’élain ou de bismuth. Et, dans une zone inler- médiaire, quand aucune roche éruptive n'apparaîl au jour, où du moins lorsqu'il n'apparaît que des roches à l’état de filons (microgranuliles, porphy- rites, etc.), les minerais dominants, dont la rela- lion avec une roche ignée devient très probléma- tique, sont surtout le plomb et le zine. On formerait ainsi — en laissant pour le moment de côté les roches basiques et leurs dérivés, dont nous allons chercher le rôle tout à l'heure — trois groupes principaux, que l'on supposerait correspondre à des profondeurs de cristallisation de plus en plus. grandes, où du moins à une modification simulta= née des types pétrographiques : 1° Mercure et antimoine, jusqu'à la surface, avec les roches d'épanchement; 2° plomb ct zinc, avec les roches filoniennes el intrusives; 3° fer, cuivre, élain, bismuth, etc., avec les roches grenues de profon- aeur. Ces divers groupes chevauchent, bien entendu, les uns sur les autres, comme on doit l’attendre pour un phénomène où n'ont pu manquer d'inter= venir des circonstances aussi complexes; mais il est cerlain, par exemple, que tous les minerais des Alpes carinthiennes et de la région de Bergame, où les roches éruptives font à peu près défaut, sont des minerais de plomb et de zinc; de même à Lucques el Seravezza; au contraire, à Massa Marit= tima, Campiglia Marittima ou à l'ile d'Elbe, près des massifs granitiques, c'est évidemment, malgré la présence du plomb et du zine, la pyrite de fer plus ou moins cuivreuse qui domine (Boccheggiano la Fenice, Serrabottini, ile d'Elbe, etc.), avec appa rition de l’étain dans l'ile d'Elbe et le Campigliese Pour l'Algérie et la Tunisie, j'ai fait autrefois uné observation du même genre”. La relation d’origine entre les minerais sulfuré et les magmas ignés dont le type profond est ] type granitique a été bien posée en principe, pou la Toscane, par M. B. Lotti, dont on connait le savants travaux sur l'Italie. Suivant lui, elle serai poussée au point que certains amas pyriteux Gavorrano représenteraientun départ sulfuré immé diat au contact même du granite. Peut-être nM 1 Richesses minérales de l'Afrique, p. 171 à 173 et 3214 340. Rev. gén. des Sciences, 30 nov. 1902. L 3 | L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE 817 -a-til, dans ce cas parliculier, qu'un simple filon- faille de contact ; mais l'observation me paraît vraie -en général et, particulièrement, dans le cas de l'ile d'Elbe, dont les minerais de fer fameux représentent une venue hydrothermale filonienne, localisée sur des accidents Nord-Sud, avec action de substitution dans les calcaires, à l'Ouest du grand amas de granite lertiaire du mont Capanne. Dans ces gisements de l’Elbe, les dépôts sulfu- reux ont dû jouer un rôle primitif très important, bien que la transformation superficielle postérieure de la pyrite en oxyde par les altérations ait fait longtemps méconnaitre ces manifestations sulfu- rées. On trouve, dans la profondeur des gites de l’île d'Elbe, comme dans tant de minerais de fer al- gériens pour lesquels j'aiautrefoissignaléle faitavec insistance, non seulement de la pyrite de fer de plus en plus abondante, mais d'autres sulfures complexes - de cuivre, plomb, etc. Dans ces gites de l'ile d’Elbe, les sulfures de fer ont, d’ailleurs, pu êlre accompagnés de suite par des chlorures, ainsi qu'il est logique de le prévoir au contact de semblables magmas acides, et il est parfaitement possible que ces chlorures aient pro- voqué, tantôt un dépôt direct d'oligiste, tantôt la substitulion d'oxydes et de silicates de fer aux ter- rains calcaires encaissants. Mais la production de ces minéraux, qui ont ici un si grand développe- ment, pourrait également s'expliquer par le simple mélamorphisme. Quoi qu'il en soit, on trouve, à l'ile d'Elbe, des minerais, dont le Lype actuel comprend, avec la pyrite de fer, de l'oligiste (parfois réduit très loca- lement en magnétite par des hydrocarbures) el une gangue de silicates, comprenant des silicates pro- toxydés à haute Leneur en fer, qui sont aujourd'hui exploités industriellement par grandes masses. Ce gisement apparait ainsi très analogue à tous ceux qui se développent, dans les mêmes conditions, au contact de roches grenues intrusives et, par exemple, à Brosso ou Traverselle, en Piémont, sur - le bord des roches dioritiques, ou dans le Banat, » près des banatites. La grande cicatrice tonalitique du Gailthal, qui joue un rôle si analogue à celui des banatites du Banat, pourrait être supposée de même le point de départ profond des fumerolles sulfurées plus lointaines, qui, en Carinthie ou vers Auronzo, ont donné des minerais plombo-zinci- fères. Enfin, l’on peut faire une dernière remarque à propos de l'étain. Nous avons vu que ce métal apparaissait ici à sa place prévue, avec les pyrites de fer cuivreuses (comme en Cornwall), non loin des culots granitiques, à dégagements de fume- rolles acides prouvés par les cristallisalions de tourmaline sur toute leur périphérie. Malgré ces pegmatites à tourmaline, qui entourent d'une auréole les graniles du Campigliese ou de l'ile d'Elbe en pénétrant dans les sédiments encaissants, peut, d'une considérer ces massifs graniliques toscans comme pauvres en fumerolles acides par rapport à nos grands massifs hercyniens de granile à mica blanc, si déve- loppés dans le Plateau Central, en Bretagne, en Cornwall ou en Saxe. C'est là surtout que l’étain arrive à jouer un rôle essentiel et nous ne sau- rions nous étonner qu'en Toscane, ce rôle soit, au on facon absolue, contraire, très subordonné. III Nous arrivons mainlenant à une zone loul à fait: différente de la métallogénie italienne, celle où apparaissent les roches basiques, les « roches vertes », et où, du même coup, se montrent toute une série de gites que nous pouvons supposer directement reliés à ces roches basiques : gîtes de ségrégation ignée ou de départ sulfuré immédiat, ayant pris la forme d’amas, de noyaux métalliques, de « fahlbandes », d’imprégnations ramifiées et disséminées dans les schistes (souvent eux-mêmes recristallisés par un métamorphisme de profon- deur). Il est difficile de dire si cette zone nouvelle cor- respond, en principe, à une partie de l'écorce plus où moins profonde que les culots graniliques, bien qu'on ait parfois considéré, un peu à priori, ce genre de roches basiques comme des fonds de creuset; il semble surtout qu'elles correspondent à des conditions d'élaboration et de cristallisation différentes de celles des roches acides, et l’on doit même remarquer que, d'après les résultats des synthèses pélrographiques, ces conditions semblent pouvoir se réaliser à de faibles pressions et dans nos laboratoires mêmes, landis que la synthèse des roches acides n'a jamais encore été effectuée. La zone métallifère que nous envisageons ainsi, el dont la trainée continue des roches vertes laisse fortement supposer l'unité, offre, dans deux régions parfailement tranchées, deux facies totalement différents et qui ont été longtemps considérés sans hésitalion comme marquant un äge géologique tout à fait distinct. D'une part, il y a, dans les Alpes ou en Corse, le facies schistes lustrés et terrains cristallophylliens: de l'autre, on rencontre, dans les Apennins ou en Illyrie et en Serbie, c'est-à-dire dans les Dinarides, le facies strates éocènes à peine mélamorphiques. A cette différence de facies pélrographique cor- respond une certaine différence métallogénique; dans les terrains non métamorphisés de la Toscane ou de la Bosnie, les minerais affectent, à peu près 818 L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE exclusivement, le tvpe des départs cuivreux immé- diatement reliés aux roches basiques; dans les terrains métamorphiques, on trouve, en outre, le type des imprégnalions sulfureuses interstratifiées au milieu des terrains schisteux, en forme d’amas, de stockwerks ou de fahlbandes, à plus grande distance des roches ignées. Ces différences tendent à s'expliquer si l'on admet qu'un même phénomène, d'âge probable- ment miocène, à fait, à la faveur des plissements alpins, pénétrer des magmas basiques intrusifs dans une série de terrains antérieurs, ramenés à une profondeur plus ou moins grande et, par suite, plus ou moins métamorphisés, en développant, au contact de ces magmas ou dans leur masse même, des ségrégations de minerais oxydés ou sulfurés. Dans celte hypothèse, — qui concorde, je erois, avec celle de M. Termier sur la tectonique des Alpes, —les terrains cristallins des Alpes seraient le facies mélamorphique d’une « série compré- hensive », englobant des terrains d'âges divers iusqu'à l'Éocène, et leur aspect métamorphique viendrait de l'action exercée sur eux en profondeur par ces intrusions mêmes de magmas basiques. Toute la chaine des Alpes proprement dite est envisagée comme une partie profonde, reportée ensuite par les plissements à une grande hauteur, donc très métlamorphique: les Dinarides repré- sentenl, par contre, une partie plus haute, plus superficielle, de la chaîne, qui s’est trouvée des- cendue vers le niveau de la mer et dans laquelle subsistent des terrains non affectés par le méta- morphisme. Une telle hypothèse, que je vais essayer tout à l'heure de préciser, correspond à cette idée générale que les types de terrains appelés jusqu'ici archéens ou cristallophylliens représentent, non pas à pro- prement parler un àge déterminé, mais un facies de métamorphisme. Si leur assimilalion à un unique terrain primordial a pu trouver crédit, c’est que, tout naturellement, les terrains les plus anciens ont le plus de chances d’avoir été métamor- phisés et qu'en outre le premier effet de ce méla- morphisme est d'éliminer les restes organiques, par lesquels les sédiments pourraient être datés. Mais, en ce qui concerne la métlallogénie, nous pouvons supposer que, parloul où l’érosion a mis à jour des portions de chaines plissées ayant pris ces types archéens, quel que soit d’ailleurs l’âge réel de ces gneiss et micaschisles entre l'Éocène et le Lauren- tien, l'érosion doit avoir atteint, dans la profondeur de ces chaînes, une zone assimilable et sembla- blement placée par rapport aux intrusions de magmas ignés internes; par conséquent, les gîtes mélallifères doivent y êlre comparables et nous ne devons, dès lors, pas nous étonner de rencontrer, dans les Alpes, au milieu de terrains cristallo-n phylliens qui peuvent englober de l'Éocène, des minerais analogues à ceux des régions ancien- nement consolidées et profondément érodées du Globe, des minerais de type scandinave, en Même « temps que nous y observons des amas de gabbros, euphotides, péridotites, etc., pareils à ceux qui se montrent si développés en Scandinavie. On peut encore remarquer, à l'appui de cette thèse, que, d'après les coupes de M. Termier, les principales zones métallisées des Alpes Orientales, auxquelles je fais iei allusion, se trouvent dans une partie des Alpes sur laquelle aurait passé le poids des charriages et qui, au moment de ces char- riages, n'aurait pu manquer d'êlre reportée en profondeur et métamorphisée. Dans les Alpes orientales, les minerais en question forment une première zone Est-Ouest très importante, entre la région d'Innsbruck, Schlad- ming, Vordernberg et le Semmering. On y trouve des imprégnations de sulfures métallifères, où do- mine le cuivre (Schwaz, Brixlegg, Kilzbüchel, etc.), ou, plus rarement, le nickel (Schladming). Je rap- pelle que les minerais d'Eisenerz et de Vordernberg, intercalés par substitution dans un banc calcaire entre la grauwacke dévonienne et les schistes. permiens, paraissent dériver de pyrites de fer cuivreuses el se trouvent donc à leur place nor- male au milieu de toutes ces imprégnalions sulfu- reuses, la différence d’allure étant due à la nature calcaire des terrains encaissants. Plus loin, en Styrie, près de Leoben, on trouve les amas de fer chromé de Kraubat dans des dunites, c’est-à-dire un type classique de ségrégation. Plus au Sud, la zone cristalline des Tauern, à mélamorphisme beaucoup plus intense, renferme des imprégnations sulfurées du même genre, parfois un peu cuprifères, parfois légèrement auri- fères, ailleurs chargées de zinc, à Zell sur la Züll, Rauris, Slerzing, Waschgang, (Gross Fragant, Gmünd, ete., et le contraste est absolu avec les minerais plombo-zincilères que nous avons déjà signalés dans une zone plus méridionale (Bleiberg, Auronzo, Raibl, ete.). Les Alpes occidentales, et spécialement les Alpes” pennines, offrent des caractères identiques. Iei encore nous avons des imprégnalions de pyrite et mispickel aurilfères (Pestarena, le mont Rose, Gondo), des fahlbandes nickélifères et coballifèress comme celles du Val d'Annivier en Valais, si ana logues à celles de Schladming. Mais, à côté de ces. imprégnations sulfurées, dont la relation avec les roches basiques reste, en somme, problématique, nous voyonss'accentuer le type des ségrégations pro= prement dites et des départs sulfurés tout à fait im= médiats, aboutissant à des amas de magnétile, de Lens à, re vr] L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALLOGÉNIE 819 chalcopyrite, de pyrite et pyrrhotine nickélifère: par exemple, à Scopello et Varallo le long de la grande traînée Nord-Est des roches d'Ivrée, à Traverselle le long des diorites situées à l'Est du Grand Para- dis, à Cogne sur le flanc Nord du même massif, à « Usseglio. Balma, sur le flanc Sud, ou à Cruvin, près de Suse. Dans le Sud des Alpes occidentales, les minerais » sont peu développés; mais, quand on arrive à Gênes, on trouve, en rapport avec les roches inter- calées dans l'Éocène non métamorphique, tout un groupe important de gites cuprifères, qui se con- ; ünue en Toscane jusqu'à Monte Catini et Rocca Tederighi, et passe, d'autre part, en Corse, où l’on a, avec pareilles roches vertes et semblables mine- rais associés, les deux facies de terrains distingués plus haut : éocène non mélamorphique et schistes lustrés. Les mines du district de Gênes, Libiola, Monte Loreto, Gallinaria, etc., renferment toutes des masses irrégulières de chalcopyrite en relation di- recte avec des roches vertes, diabase, euphotide (ou serpentine produite par l’altération d'une des roches précédentes), et, de même, les gites de Ponte Leccia, de Castifao, de Moltifao en Corse se relient à des diabases associées à de l'Éocène bou- leversé, mais non métamorphique, tandis qu'à Lin- guizetta et Vezzani, dans la même ile, le facies est celui des schistes lustrés. Le cas du gisement de Monte Catini est particu- lièrement intéressant, parce qu'il semble d'abord très énigmatique‘. Je crois qu’on peut le considérer | comme un-gîle de ségrégation, assimilable aux pré- cédents, mais ayant été ultérieurement soumis à un déplacement mécanique ou charriage, suivi d'une altération superficielle. Par le déplacement méca- nique, la roche verte a été transformée en une brèche passant àune salbande argileuse, etles mine- rais ont été tronconnés en fragments plus ou moins gros, plus ou moins arrondis; par l’altération, les pyrites de fer plus ou moins cuivreuses sont deve- nues, d'abord des chalcopyrites, puis des phillipsites et des chalcosines. Le gite se présente donc sous la forme de grains, nodules ou boules cuivreuses disséminées dans une masse argileuse : boules qui, lorsqu'elles sont un peu volumineuses, rénferment un noyau de chalcopyrite entouré par la phillipsite et, lorsqu'elles sont plus pelites, ont élé entièrement transformées en phillipsite. Cette salbande argi- - leuse est siluée au-dessus de l'Éocène et au-dessous de la diabase disloquée, qui forme, à la surface, des lambeaux sans aucune racine. Monte Catini et Rocca Tederighi sont à peu près ® Lauay : Sur le rôle possible des charriages en métal- logénie (Comptes rendus, 3 avril 1905). . les spécimens les plus méridionaux de ce genre de gites en Italie. Plus au Sud, les roches vertes dis- paraissent, à peu près exactement au moment où se montrent les roches éruptives terliaires d'épanche- ment, et ne reparaissent guère qu'en Calabre ou en Basilicate, lorsque celles-ci ont cessé, comme s’il y avait incompatibilité entre ces deux manifestations pétrographiques. Il est naturel d'envisager toute la zone intermédiaire à volcanisme superficiel comme une zone déprimée, où s’est conservée la trace de phénomènes montés plus haut dans l'écorce et où manquent, au contraire, par suite, les phénomènes relativement profonds, tels que les intrusions de roches vertes. L'observation se trouve confirmée de l’autre côté de l'Adrialique, où l’on remarque quelque chose de semblable. Là aussi les roches vertes, dont la trainée est ailleurs si continue, s'interrompent sur la zone affaissée et éruptive située à l'Est du Bacher Gebirge en Styrie, alors qu'apparaissent, avec ces roches éruptives superficielles, tous les minerais de mercure déjà signalés en Carniole et en Carin- thie. Puis ces roches vertes reprennent toute leur extension en Bosnie après le massifancien d'Agram, et s'accompagnent là encore de semblables mine- rais cuprifères. IV Enfin, pour terminer ce qui est relatif à la métal- logénie des Alpes, nous devons signaler encore, à l'Ouest de la Chaïne, une zone métallifère qui fait à peu près le pendant de la zone loscane à filons sulfurés complexes et qui apparait dans la Savoie, la Maurienne, le Dauphiné, lorsqu'on dépasse vers l'Ouest les amygdales granitiques du Mont Blane, du Pelvoux, ete. Là, les interstralifieations, les fahl- bandes pyriteuses font place de nouveau aux véri- tables filons, aux fractures, aux décrochements, et, dans le remplissage, on voit, à côté des pyrites de fer, avec cuivre, or ou nickel, reparaître les sulfures complexes plombo-zincifères, comprenant même ! parfois des traces de mercure. La connexion est la même qu'en Toscane. On a là, presque côte à côte, des pyrites plus ou moins cuivreuses, donnant par altération superficielle le groupe des sidéroses et des cuivres gris d’Allevard, ou de la pyrite auri- fère produisant les minerais d’or de la Gardette, des sulfures de nickel et cobalt aux Chalanches, des galènes argentifères à Macot, à Pesey, etc. Les filons, qui recoupent des terrains allant jusqu'à la base du Jurassique, sont manifestement reliés aux accidents tertiaires, et, tandis que l'on pouvait hésiter sur l’âge des imprégnalions sulfureuses profondes dans la zone axiale, le caractère tertiaire de cette zone latérale à l'Ouest est aussi bien 820 L. DE LAUNAY — APPLICATION DE LA MÉTHODE TECTONIQUE A LA MÉTALTOGÉNIE 4 marqué que celui de la zone latérale à l'Est, près de Lucques ou vers Massa Marittima. Cette zone plombo-zincifère, qui se conlinue peut- être en Corse et va ainsi converger vers la zone toscane du Mont Argentario, esL bornée à l'Ouest par une autre zone, qui me parait lotalement diffé- rente et qui marque, sans doute, une métallisation effectuée pendant une période géologique anté- rieure, pendant la période hercynienne. Nous avons déjà remarqué, à propos de la Tos- cane, de l’île d'Elbe, de la région de Lucques ou de Seravezza. que l’on retrouvait là des tronçons d'un ancien massif tyrrhénien, disloqués et métallisés à l'époque tertiaire. Le massif reparait plus à l'Ouest, dans les Maures, l'Ouest de la Corse ou la Sar- daigne, à l'état de débris épars, où l'empreinte des plis tertiaires s'efface, tandis que celle des accidents hercyniens tend à dominer ; nous en- trons ici, à proprement parler, dans l « Avant-pays » des Alpes. Ù Cet Avant-pays est très mélallisé; le petit massif des Maures et la Sardaigne sont deux régions remarquablement riches en minerais. Sur l’âge de ces minerais on peut discuter, et, comme nos déler- minations d'âge pour les filons se bornent généra- lement à une limite minima, on ne saurait affirmer que, là encore, l'influence des mélallisations ter- tiaires ne se soit pas fait sentir. Cependant, la con- clusion bien probable des études de détail sur la Sardaigne est que les minerais y sont hercyniens, et, dans la région des Maures, de l'Esterel ou des Alpes-Maritimes, la présence de nombreux sédi- ments permo-lriasiques, où des minerais cupri- fères ou plombifères paraissent avoir une origine détritique, prouve tout au moins qu'il existait déjà des minerais de ce genre avant le Permien. On peut rattacher à celle mélallisation her- -eynienne les filons des Bormettes, de la Moure,de Reille, etce., dans les Maures et l'Esterel, ceux d'Argentella à l'Ouest de la Corse, et surtout ceux de la Sardaigne, où se manifeste, à un degré remar- quable, un phénomène déjà signalé plus haut dans le Bergamasque ou les Alpes Orientales : l'influence .des contacts entre calcaires et schistes sur la loca- lisation des minerais, avec action superposée des altérations superficielles, qui, en terrains calcaires, ont amené l'allure habituelle des subestitutions calaminaires. Dans toute la Sardaigne, les minerais dominants sont les B. P. G., industriellement les minerais plombo-zineifères, avec manganèse accessoire con- centré à la surface comme toujours. Le cuivre et les métaux de ségrégation basique font à peu près défaut, de même que les roches vertes, auxquelles nous les avons vus reliés. Au contraire, les mas- sifs granitiques et les filons laléraux de microgra- ces gisements, qui, dans leur forme primitive, sont des filons de galène et de blende. L'allure filonienne est, par endroits, très nette, comme autour du massif granitique d'Arbus, que contournent, au Nord, à l'Ouest et au Sud, des filons de plomb (Montevecchio, etc.), mais dans lequel certains de ces filons pénètrent, montrant qu'il ne s'agit pas d'une émanation dérivée de ces’ graniles. Ces filons sont, en principe, bien carac- térisés lorsque les fractures ont traversé des terrains inaltaquables aux eaux métallisantes ou altérantes, comme des schistes ou du granite. Ail- leurs, quand il y à alternance de calcaires ou de schistes, les minerais suivent souvent des contacts et prennent une sorte d’allure interstralifiée. La présence de ces calcaires et la pénétration des eaux qui en est résullée ont toujours déterminé la trans- formation des sulfures en calamines, où souventon reconnait encore la disposition des calcaires aux- quels elles se sont substituées.- V Si nous essayons de résumer en quelques mots cetle étude, nous aurons donc l'impression que les minerais italiens (sauf ceux de Sardaigne) éma- nent de roches éruplives mises en mouvement el montées vers la superficie par suite des accidents tertiaires. Les principaux cas où de semblables cristallisations métallifères se sont produites sem- blent être les suivants : Tout d'abord, dans une zone de rupture longitu- dinale, qui parait s'êlre réalisée entre les plisse- ments nouveaux et leur Avant-pays, il a dù s’effec- tuer un tronconnement du massif ancien, par suite duquel ses compartiments juxtaposés ont subi des déplacements relatifs dans un sens ou dans un autre. À la faveur de ces déplacements, les magmas acides ont dû pénétrer dans cerlaines zones et en refondre progressivement les éléments, se les assi- miler de manière à se substituer à eux : d'où est résultée la consolidalion profonde de magmas grenus à type granilique, apparus au jour en quel- | ques points où, par suite de mouvements ulté= rieurs, l'érosion s'est trouvée très avancée. Sur la périphérie de ces granites, ou du moins de ceux qui paraissent les plus élevés d'entre eux, — qui, tout au moins, étaient les plus chargés de principes volatils et se rapprochaient le plus de nos pegmatites ou granites à mica blane, — on trouve la trace de fumerolles chlorurées ayant pu donner directement de l'oligiste et des silicates dem fer, ayant, en tout cas, donné de l'étain avec du cuivre, des pyrites de fer, etc. (Ile d’Elbe, Cam- pigliese, Gavorrano). L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 821 Plus loin des mêmes granites, là où, à ces granites profonds, se substituent, sur les affleurements, les …microgranulites et les porphyriles, ont cristallisé “les minerais sulfurés complexes de plomb, zine, “er, etc., principalement dans les cassures pro- “duites par les failles ou les décollements entre ter- rains superposés d'inégale compacilé physique, tels que schistes et calcaires (Toscane, région de Lucques, Bergamasque, Carinthie, ou, à l'Ouest des Alpes, Savoie, Maurienne et Dauphiné). Ailleurs, des pénétrations de roches basiques ont formé des amas et lentilles de diabase, eupho- tide, ete., dans des terrains d’âges divers, amenés à ‘des degrés inégaux de mélamorphisme. Quand ce mélamorphisme est le plus avancé, ce qui parait comporter une profondeur de cristallisation plus grande, les schistes crislallisés renferment souvent des imprégnations sulfureuses à caractère de fahl- bandes, formées de pyrile de fer et mispickel, par- fois cuprifères, nickélifères ou aurifères (Tauern, zone d’Innsbruck, Alpes Pennines, etc.). En même temps, les roches basiques elles-mêmes peuvent | renfermer des ségrégations et amas de magnétite ou de fer chromé (Slyrie et Val d'Aoste). Les régions à pareilles roches vertes, formées au con- traire de terrains non métamorphisés, — par consé- quent, selon toule apparence, plus hautes dans la chaîne, — ne renferment guère que des amas de sulfures cuivreux au contact des diabases (district de Gênes et Toscane). En approchant des zones déprimées à manifes- | lations éruptives superficielles, tous les métaux disparaissent progressivement à l'exception du mercure, qui domine, avec l'anltimoine, dans la zone immédiatement contiguë aux roches d'épanchement (Carniole, enfin, les parties où le volcanisme est encore actif et celles où son activité, toute récente, se traduit par des cralères conservés, semblent trop peu érodées pour montrer encore au jour aucun gite mélallifère (Campagne romaine, province de Naples et Sicile). éruptives Frioul, Toscane). Et, L. De Launay, Professeur à l'École Supérieure des Mines. i1 REVUE ANNUELLE DE - Cette revue fait suile à celle qui a paru en 1903 “et s'inspire des mêmes principes. Pour ne pas être “entrainé trop loin, je me restreindrai à quelques “parties de l'immense domaine, de la Mécanique “appliquée. Je laisserai nolamment de côté, pour celte fois, les questions concernant les moteurs hydrauliques et les moteurs à explosion. s [. — CHAUDIÈRES ET APPAREILS A VAPEUR. $ 1. — Production de la vapeur. MM. Marcel Deprez et Verney se sont proposé ‘établir un foyer évitant les inconvénients dus à emploi des grilles etpermettant, en outre, d'arrèter ou de reprendre à volonté la combustion propor- ionnée, à chaque instant, au travail produit. Ce foyer est essentiellement constitué par un azogène en forme de cuve verticale rectangu- aire, à la partie inférieure duquel est accolée une uve plus petite, appelée la chambre de combus- tion. Cette chambre sert de foyer à une chaudière uelconque. Le gazogène et la chambre de com- mbustion forment un espace clos, sauf du côté de la “cheminée. Le chargement du combustible s'opère à la partie supérieure du gazogène au moyen d'une trémie disposée comme celle du gueulard d'un haut-fourneau. Le gazogène, en briques réfrac- taires, est armé exlérieurement de plaques de MÉCANIQUE APPLIQUÉE | fonte, séparées des briques par un garnissage d'amiante, en vue de réduire autant que possible les pertes de chaleur. Une deuxième enveloppe de fonte entoure la première. Entre les deux enve- loppes se trouve un espace annulaire dans lequel un ventilateur insuffle l'air nécessaire à la combus- tion. Cel air, après s'être légèrement échauffé au contact de la fonte, pénètre dans le gazogène à sa | jonction avec la chambre de combustion. Le venti- lateur est mü automatiquement : quand la pres- sion tend à baisser dans la chaudière, une soupape à pointeau envoie de la vapeur derrière un piston dont le déplacement permet l’arrivée de l'air in- sufflé par un ventilateur. Si la pression tend à monter, un déplacement inverse du piston sup- prime la communication du ventilateur avec Île | foyer : c'est ce que M. Marcel Deprez appelle le principe du tout ou rien. En fait, grâce à cette | ingénieuse disposition, la pression se maintient remarquablement constante. L'alimentalion de la chaudière est rendue également automatique par un procédé analogue. Il est aisé de comprendre que, dès qu'on arrête l'insufflation d'air, la vaporisation s'arrèle; car, le tirage naturel du foyer s'opérant de bas en haut, le sens du courant est instantanément renversé et les gaz chauds cessent de traverser la chaudière. Au repos, le combustible reste incandescent sans . LECORNU —- REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE E APPLIQUÉE se consumer sensiblement, parce qu'on ne permet que le très faible tirage naturel nécessaire pour éviter l’exlinction. Le chargement de combustible ne se fait qu'à de longs intervalles. Il en est de même pour le nettoyage; aucune obstruction ne peut être produite par les scories etles cendres, qui, par suite de l'absence de grille, s'accumulent à la partie basse, directement sur la sole du foyer, où elles ne gènent en rien la circulation du gaz. J'ai eu l’occasion d’assister à une suite d'essais faits sur un appareil de ce genre. Le gazogène avait environ 2°,50 de hauteur. La chaudière était tubulaire, à he verticaux. On à brûlé successi- vement du coke, de l’anthracite, de la briquette, du charbon de Charleroi. C'est avec le coke et l’an- thracite que l’on a obtenu les meilleurs résultats. La moyenne de tous ces essais (y compris la marche avec des briquettes assez défectueuses) a correspondu à une vaporisation de 7 kil. 42 par kilog de combustible, celui-ci ayant un pouvoir caloritique moyen de 7.890 calories. Il convient d'ajouter que la vapeur, produite à la pression de 7 kilogs, était surchauffée à 225°. Pour que la marche soit régulière, il faut que la descente du combustible s'opère sans accrochage. Du charbon collant ne pourrait convenir, à moins d’avoir re- cours à des précautions parliculières. D'ailleurs, la forme parallélipipédique donnée au gazogène n’est évidemment pas la meilleure : il faudrait, en pra- lique, préférer un tronc de cône écrasé vers le bas comme pour les cuves de hauts-fourneaux. Au cours de ces essais, on à mesuré avec soin la température des gaz dans la chambre de com- bustion et à la sortie de la chaudière. La première était d'environ 1.600°, et la seconde de 300, Il est remarquable que le parcours d'un faisceau tubu- laire de 1 mètre seulement de longueur, avec tirage forcé, suffise pour abaisser, dans une pareïlle pro- portion, la lempérature des gaz, dont on connaît la faible conductibilité. M. Marcel Deprez a exposé ses idées à cet égard dans une conférence faite, en 1903, à la Société des Ingénieurs civils. D’après lui, la variation de la température des gaz, dans le parcours d'un tube donné, est très peu influencée par la vitesse. En envoyant, par exemple, un courant d'air froid dans un tube enlouré d’eau bouillante, il a trouvé qu’à la pression de 5 centi- mètres d’eau, l'air présentait à sa sortie une lem- pérature de 84°; qu'à la pression de 50 centimètres, correspondant à la vilesse de 100 mètres à la seconde, la température était de 76°,5; et qu'à la pression de 4 mètre, donnant une vitesse de 125 mètres, la tempéralure atteignait encore 73°. Pour expliquer ces faits et les traduire en équa- tions, M. Marcel Deprez a imaginé une théorie dans le délail de laquelle nous ne pouvons entrer ici, théorie basée sur l'idée que chaque molécule gazeuse, en arrivant au contact des parois, prend instantanément la température de celles-ci, puis retourne se mélanger à la masse. La rencontre des molécules avec la paroi serait due à une suite de permulalions produites par le tourbillonnement que développent les froltements contre les parois: De même que, dans l’engrenage d’un pignon avec une crémaillère, il y a un rapport déterminé entre la rotation du pignon et la translation de la cré= maillère, de même, d’après M. Marcel Deprez, il y à un rapport déterminé entre la translation de la masse gazeuse el le nombre de chocs molécu laires, rapport à peu près indépendant de la vitesse et, de cette simple hypothèse, on déduit des for mules qui concordent avec les données de l'expé= rience. Li Il est intéressant de rapprocher du foyer Marcel Deprez et Verney un gazogène à flamme renversée; qui a élé construit et expérimenté, il y a deux ans; par M. Jules Deschamps. Ici, la combustion re versée a été adoptée afin de lransformer la plus grande partie des produits volatils et d’avoir, em outre, une température peu élevée au bas du gazon gène, d'où les mächefers et les cendres peuvent sex retirer facilement par un joint hydraulique. L'ap pareil se compose essentiellement d'une cuve réfractaire cylindrique, remplie de combustibles L'entrée d'air se fait par une tuyère verticale sus pendue au centre du couvercle qui ferme la partié supérieure : de celle façon, l'air est obligé de tra= verser toule la colonne. L'air est aspiré au bas d la cuve par un ventilateur. Deux ou trois orifices pratiqués dans le couvercle, à côté de la tuyère permettent le chargement du combustible, cette opéralion s'effectue sans difficulté, puisque le gaz, étant aspiré, ne refoule pas. A la parlie inférieure, le combustible repose sur une grille fortement inclinée, placée sous le socle, eb destinée uniquement à secouer le combustible pour en faciliter la descente dans le cas où il serait formé un vide dans l'intérieur de la cuve. be socle est terminé inférieurement par un bassir plein d'eau, où s'accumulent les cendres et les mächefers. Les gaz aspirés traversent, au sortir de la cuve, un récupérateur où ils échauffent Pair appelé vers la tuyère; puis, après avoir parcouru les appareils d'épuration, ils arrivent au ventilas teur, qui les refoule dans un gazomètre. Ce gazogène est spécialement étudié en vue l'application aux moteurs à gaz. Les essais on montré que l’on pouvait utiliser sans inconvénient les charbons les plus pulvérulents, comme auss les plus menus et les plus collants, sans qu'il St présentàt de difficultés au passage de l'air dans combustible, et que les charbons, même les plus L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 823 Cendreux, ne donnaient aucun dépôt de màchefers le long des parois. En outre, le gaz produit s’est “montré toujours assez propre pour ne pas encrasser “les soupapes du moteur. Avec cerlains combus- tibles, comme les déchets de coke ou d’anthracite, on peut supprimer le ventilateur, et se contenter de l'appel fait directement par ie moteur. M. Jouguet a développé lout récemment, à Saint- tienne, devant la Société de l'Industrie minérale, “des considér ations PMIÉRESRAnIeS sur la fee d'ana- ! us SPAS En Pete un combustible, ilfaut tenircomptenonseulement de la haleur cédée à la vapeur, mais encore de la tempé- rature et, par conséquent, de la pression de cette travail disponible augmente, pour une même quan- tité de chaleur, avec cette température. En d’autres termes, le 2ilan thermique, suivant l'expression de 'auleur, doit être établi en s'occupant à la fois de “la qualité et de la quantité de la chaleur. En repre- nant à ce point de vue l'analyse d'expériences exé- “ulées jadis par la compagnie P.-L.-M. sur une “chaudière de locomotive et relatée dans les Annales des Mines de 1894, M. Jouguet arrive aux conclu- sions suivantes : le mode ordinaire de calcul évalue “beaucoup trop haut la perte par les fumées et le produit donné par la chaudière ; il ne met pas en “relief le défaut essentiel des chaudières, c’est-à- “dire la différence de température qui exisle entre les gaz brûlés et l’eau du générateur. Pour dimi- “nuer ce défaut, le seul moyen est d'augmenter la température de la chaudière, mais on est très limité de ce côté à cause de l'accroissement rapide ‘de la tension de la vapeur avec la température. Les =moleurs à combustion interne évitent la perle au chauffage ; mais, par contre, ils ont une perte très notable par les fumées, celles-ci quittant le moteur à une température élevée, $ 2. — Chaudières de locomotives. Les règlements en vigueur exigent que les loco- otives évitent la production des fumées incom- modes pour les voyageurs ou pour les voisins ; mais est de notoriété publique que cette prescription d'est pas toujours observée. En fait, le problème . la fumivorité rigoureuse a toujours passé, jus- qu'ici, pour à peu près insoluble. Cependant, M. Bernheim vient de signaler, dans Les Annales des Mines, l'existence d'un appareil, dû à l'ingénieur autrichien Lang, qui fonctionne avec succès en Au- triche, en Allemagne, en Suisse, et même dans la principauté de Monaco. Cet appareil est disposé de manière à introduire automatiquement, dans le foyer de la locomotive, la quantité d’air nécessaire etsuftisante, à tout moment, pour parfaire la com- bustion avec le concours d'une nappe de vapeur qui produit le brassage de l'air et de la flamme. L'organe essentielest une soupape de distribution dE règle le courant de vapeur servant à entrainer l'air desliné au soufflage. Cette soupape est dis- posée de manière à s'ouvrir en grand chaque fois que le chauffeur ouvre la porte du foyer pour le chargement de combustible, et à ne se fermer en- suile que plus ou moins lentement, après le char- gement, en suivant le mouvement d'un piston dans un cylindre à huile. La /'evue” a récemment entretenu ses lecteurs d'une locomotive d'un lype nouveau, dernière en service en Algérie: je crois devoir revenir un instant sur ce sujet. La locomotive dont il s’agit, due à M. Robert, ingénieur en chef du matériel et de la traclion du Réseau algérien P.-L.-M., est pourvue d’une chaudière à tubes d'eau, c’est-à-dire que l’eau, au lieu d'environner les tubes parcourus par la flamme, suivant l'usage universellement adopté depuis Marc Séguin, cir- cule à l’intérieur de tubes plongés dans la flamme. M. Robert a été conduit à essayer cette disposition par les difficultés qu’occasionne, en Algérie, la mauvaise qualilé des eaux servant à l'alimentation des locomolives. C'est surtout l'entartrement dû au sulfate de- chaux qui produit des effets désastreux : le métal recouvert d’incrustations s’échauffe au- dessus de la température de l’eau ambiante, et de là des dilatations inégales qui fatiguent énormé- ment les diverses parties de la chaudière. Lamarine emploie depuis longtemps, pour les torpilleurs, des chaudières à tubes d’eau qui permettent, grâce au tirage forcé, une produclion intensive de vapeur ; mais, pour appliquer le même procédé aux loco- molives, il fallait créer un modèle approprié aux conditions spéciales du problème. La locomotive Robert présente la boîte à feu, le faisceau tubulaire et la boite à fumée disposés dans l'ordre habiluel. Le chàässis et le mécanisme ne sont pas modifiés. Les tubes d’eau sont dans des plans perpendiculaires à l'axe longitudinal de la locomotive, et, dans chacun de ces plans, ils sont disposés d’après le principe suivant. Soit une série de circonférences ayant en commun deux points À, B, situés sur une même verlicale. On sait qu'elles admetlent comme lrajecloires orthogo- nales d’autres circonférences ayant pour axe radical la perpendiculaire au milieu de AB. Prenons, parmi ces lrajectoires orthogonales, deux circonférences entourant respectivement À et B. Ces deux circon- férences représentent, en projection sur le plan considéré, deux cylindres dont on fait deux coffres pleins d’eau, et les axes des tubes d’eau sont cons- mise l’année 1 Rev. gén. des Sc., 1903, p. 445. 82% L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE tilués par des circonférences orthogonales aux bases des deux coffres. Les tubes ont donc une forme circulaire, favorable à la dilatation. D'autres tubes à eau, accolés les uns aux aulres, constituent les parois de la chaudière et du foyer. M. jacob, ingénieur en chef du contrôle à Alger, qui a publié, dans les Annales des Mines, une Note à laquelle j'emprunte les détails précédents, fait observer que le nombre des tubes est, loutes choses égales d’ailleuis, trois fois plus élevé qu'avec la disposi- tion usuelle, mais qu'en revanche les joints sont moins exposés aux coups de feu, et que le nouveau générateur, ne comportant pas de faces planes, se prête très bien à l'emploi des hautes pressions auxquelles conduisent les machines compound. L'expérience a, d'ailleurs, établi l'avantage du sys- tème quand on a de mauvaises eaux. $ 3. — Explosions. L'explosion de locomotive survenue le 4 juillet 190% à la gare Saint-Lazare, sans occasionner d'accidents de personnes, à fortement ému l'opi- pion publique. Malgré de longues enquêtes, les ingénieurs n'ont pas réussi à se mettre d'accord sur les causes probables de cet accident. L’entente ne s’est même pas établie sur la désignation de la région qui a cédé la première, et les trois thèses suivantes sont demeurées en présence : 1° Effondrement du ciel du foyer, qui est tombé verticalement en se retournant sens dessus dessous. C'est l'hypothèse de la Compagnie de l'Ouest, hypo- thèse que M. Dubois, ingénieur de la Compagnie, a développée devant la Société d'Encouragement; 2 Tension excessive de la tôle de l'enveloppe cylindrique à sa partie inférieure, par suite de la traction des tirants-agrafes reliant cette tôle au foyer. C'est la théorie de M. Périssé, ingénieur expert, qui en a fait l'objet d'un article publié dans le Génie Civil. Les calculs sont effectués en négli- geant tolalement la résistance des entretoises; 3° Fragililté du métal au milieu de la hanche de la boîte à feu, vers le côté gauche. Un panneau de métal, détaché de l'enveloppe par suite de celte fragilité, a été projelé vers la rue de Rome, landis que le reste de la chaudière se dirigeait en sens inverse. M. Frémont, auteur de cette interprétation, a exposé ses arguments dans le Aullelin de la Société d'Encouragement. Il appartient à la Commission centrale des Appareils à vapeur de donner des conclusions offi- cielles sur ce difficile sujet. Sans vouloir prendre ici parli, je rappelle que, dans une Note commu- uiquée le 7 novembre 1904 à l'Académie des Sciences, j'ai cherché, à cetle occasion, de quelle manière s'effeclue l’abaissement de pression dans une chaudière, à la suile d'un commencement de déchirure. Cet abaissement n’est pas instantané; il ne se produit qu'au bout d'un temps, à la vérit très court, qu'il est possible de calculer approximan tivement en s'appuyant sur les propriétés physiques de l'eau bouillante et de la vapeur. Il en résult& que les parois se comportent à peu près comm e une éloffe sur laquelle on continue à tirer aprt l'avoir divisée en un point, ce qui explique la frag mentation excessive constatée, notamment, däns l'explosion de Saint-Lazare. Les explosions de locomolives sont moins rares! qu'on ue le croit généralement. D'après la slatis= tique des chemins de fer et des tramways francais; il y a eu, dans la période 1888-1903, 41 accidents pour une moyenne de 11.200 locomotives en ser vice, soit, en moyenne, 2,88 accidents par 10.000 lo: comotives et par an. Dans la même période l'ensemble des appareils à vapeur employés paë toute l’industrie française a occasionné 594 accë dents pour un nombre moyen d'appareils égal à 126.000, soit en moyenne 2,9 accidents par 10.000 ap pareils et par an. La moyenne est à peu près la même dans les deux cas; mais les explosions d locomotives n'ont occasionné, par 10.000 appareils et par an, que 0,28 mort, tandis que, pour less autres appcreils, la moyenne correspondante s'es élevée à 1,8, soit six fois plus. M. Compère, dans une statistique portant sur la période 1892-1904, a cherché à établir, au point de vue de la sécurité, une comparaison entre les chau dières à bouilleurs et les chaudières à foyers intérieurs. [la trouvé qu'en France, par 10.000 chaué dières et par an, il y a eu 2,3 accidents mortels ave@ les chaudières à bouilleurs et 1,4 avec les chau dières à foyers intérieurs. Il semble en résulter que les foyers intérieurs donnent plus de sécurité IL est vrai qu'en France les foyers intérieurs sont relalivement peu nombreux (1/4 du total environ: Mais, en Allemagne, le type à deux foyers intérieurs avec corps supérieur tubulaire tend de plus en plus à se répandre. Or, la statistique prussienne indique, pour la période décennale 1891-1900, pa 10.000 chaudières et par an, 1,31 tués avec les chaudières à foyers extérieurs, contre 0,79 avec les chaudières à foyers intérieurs, et, ici encore, balance penche en faveur de ce dernier type. On remarque, en outre, que les accidents graves son! relativement moins fréquents en Prusse qu'en France. Si l’on preud l'ensemble de l'Allemagne on trouve 1,5 tués, contre 2,2 en France, On est porté à conclure de ces chiffres que les chaudières allemandes sont mieux construites ou mieux entres tenues que les chaudières francaises. Toutefois une remarque imporlante doit être formulée à eel égard. M. Walther-Meunier a trouvé expérimentæ lement que les tôles ayant fait un long usage sonl “dangereuses parce qu'elles perdent leur élasticité; dans ces conditions, une avarie qui, dans une tôle homogène el élastique, se bornerait à une défor- mation, occasionne une rupture et une “pouvant entrainer l'explosion. Aussi M. Walther- Meunier recommande-t-il de supprimer les chau- dières ayant fonctionné pendant plus de trente- inq ans. Or, le grand développement industriel de Allemagne ne date pas de si loin : l'âge relative- ent récent des chaudières allemandes peut donc ontribuer en partie à la réduction du nombre des ccidents. Ceci m'amène à dire un mot du défaut appelé ragilité. M. Henri Le Châtelier à fait sur ce ujet une importante communicalion en 1901, à Budapest, au Congrès de l'Association interna- ionale pour l'essai des matériaux, et je lui emprunte ce qui va suivre. La notion de la fragi- Jité des fers et aciers fondus a été formulée d’une con précise et étudiée expérimentalement, à peu “près en même temps, par M. André Le Châtelier et M. Considère ; leurs résultats ont été confirmés par de nombreux observateurs. La nécessité d'essais elalifs à la fragilité est aujourd'hui hors de discus- “sion. Ces essais consistent à frapper avec un mou- ton une éprouvette ayant recu au préalable une légère entaille, de forme et de profondeur délermi- “nées. M. Frémont a mesuré directement la force vive absorbée dans la rupture en employant un mouton qui tombe d’une hauteur constante, suffisante pour rompre l'éprouvetle au premier choc, et en déter- “minant la vitesse conservée par le mouton après la rupture. M. Charpy remplace le mouton à chute verticale par un pendule et mesure la hauteur à “laquelle remonte ce pendule. La fragilité des aciers à grain est fort variable; pour expliquer ce fait, M. H. Le Châtelier suppose qu ‘ils se trouvent souvent dans une situation limite “pour laquellela matière interne des grains et leurs menveloppes opposent une résistance égale à la “déformation. Les circonstances les plus insigni- | fiantes en apparence sufliront alors pour faire pro- “pager la déformation dans l'enveloppe, c'est-à- kdire donner la cassure à grain et la fragilité, ou pour la faire passer par l'intérieur des grains en “donnant la cassure à nerf et la malléabilité. Cet état limite est fréquemment réalisé en pratique, TEE “que, en raison de l'élaboration coûteuse qu'exige lobtention d’un acier non fragile, le producteur “ arrête aussitôt que le résultat voulu parait at- teint. Pour les métaux tout à fait fragiles ou pas du tout fragiles, il ne semble pas y avoir de différence lentre les essais statiques et les essais au choc; mais celte différence peut être considérable pour Certaines catégories de métaux limites. L'abaisse- déchirure g L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 825 ment de tempéralure la de certains aciers. augmente fragilité D'autre part, M. Frémont a cité le cas d'un acier qui n'élail pas fragile pour une hauteur de chute d'un mètre elle devenait pour une hauteur de deux mètres. Les entailles, les surfaces anguleuses ont une grande influence sur l'apparition de la fragi- lité : de fragilité, mais cette influence n'existe que pour les métaux limites. c'est la base même de l'essai En dehors des explosions proprement dites, les chaudières à vapeur donnent lieu à des accidents de moindre importance, parmi lesquels on peut citer les ruptures de tubes à niveau. Ces ruptures sont particulièrement à craindresurleslocomotives, parce qu'elles se produisent nécessairement sous les yeux du mécanicien et du chauffeur. L’augmen- tation progressive du timbre des chaudières tend à accroiltre la fréquence de ce genre d'accidents. Ainsi M. Bochet a trouvé que, sur les réseaux des grandes Compagnies, pour l’ensemble des années 1900-1901-1902, le nombre moyen annuel de rup- lures ayant occasionné des blessures, rapporté à 1.000 locomotives en service, est de 2,76 pour les chaudières à timbre inférieur à 14 kilogs et de 10,96 pour les autres. On conçoit sans peine que le jet fluide, sortant avec d'autant plus de violence que sa pression est plus élevée, atteigne plus facilement les agents; en outre, ilest probable que, par l'effet de la haute pression, le verre se brise en fragments plus petits, qui traversent plus aisément les ouver- tures des enveloppes protectrices (fenêtres des protecteurs en tôle ou mailles des treilles métal- liques). Pour atténuer l'effet des éclats de verre, le mieux est, comme l’a fait, entre autres, la Compagnie P. L. M., de remplacer les protecteurs métalli- ques par d'épaisses glaces transparentes. Afin d'éviter les brülures, on a proposé de réaliser la commande à distance des robinels des indica- teurs, de facon que le mécanicien puisse, en cas de rupture, isoler l'appareil sans s’exposer au jet de vapeur. On a proposé aussi l'emploi de billes d'obturation automatiques; mais celles-ci doivent être soigneusement entretenues pour ne pas deve- nir une cause d'obstruction intempestive. $ 4. — Chaudières marines. Les progrès réalisés en France dans les machines et chaudières marines, de 1889 à 1904, ont fait l'objet d'un intéressant Rapport présenté par MM. Daymard et Lelong au Congrès international du Génie civil, militaire et maritime de l'Exposi- tion de Saint-Louis. J'extrais de ce Rapport les indications qu'on va lire. Pour les torpilleurs, on essaya d'abord les chau- 826 L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE dières à tubes de fumée avec tirage forcé, ana- logues aux chaudières de locomotives. On arriva ainsi à des combustions de 300 kilogs par heure et par mètre de grille. Mais les difficultés d'entretien firent bientôt abandonner ce système, etaujourd'hui les chaudières aquitubulaires sont universellement préférées. Elles sont plus légères que les chaudières de locomotives et leur surface de grille est relati- vement plus développée. Pour obtenir une bonne circulation, tubes une direction voisine de la verticale, et l’on ne garde que la cour- bure nécessaire pour les dilatations. Des écrans de tubes jointifs obligent les flammes à parcourir des trajets sinueux. On a imaginé récemment de former ces écrans avec des tubes à facettes, qui donnent, par leur réunion, des parois plus imperméables aux gaz que les tubes circulaires. En ce qui con- cerne les grands bâtiments, c'est surtout la ques- tion d'encombrement qui a fait abandonner l’an- cienne chaudière cylindrique à retour de flammes : avec l'augmentation de puissance, le diamètre devenait tel que les chaudières se logeaient diffici- lement sous le pont blindé. Après de nombreux tälonnements, on est arrivé à on donne aux à obtenir des chau- dières aquitubulaires donnant toute satisfaction. Parmi elles, les chaudières Belleville, les plus anciennes en date, mais chaque jour perfeetionnées, continuent à tenir, en France et en Angleterre, un rang des plus honorables, Il faut citer aussi les chaudières Niclausse qui, en 190%, étaient ins- tallées sur trente-deux bâtiments de guerre fran- cais. On à également essayé des chaudières à petits tubes, dont la souplesse d’allure est un grand avantage sur un navire de combat. $ 5. — Condenseurs. CE) Dans la /evue de 1904 {page 560), j'ai ana- lysé l'important « Traité de la condensation » de Weiss. On peut en rapprocher une étude, due à M. Lelong, sur les appareils de condensation des machines marines (1903). L'auteur examine d'abord les phénomènes qui se produisent pendant l’échap- pement, dans le tuyau réunissant le cylindre de basse pression au condenseur. Sa conclusion pra- tique est que la section du tuyau d'échappement doit être proportionnelle au débit de vapeur, ou, ce qui revient à peu près au même, à la puissance de la machine. Cette règle est à la fois plus simple et plus exacte que celle qui est habituellement suivie et qui consiste à prendre comme base le volume décrit par seconde par le cylindre de basse pression, sans tenir comple de la pression initiale et du degré de détente : on a ainsi provoqué dans les machines modernes des contre-pressions plus grandes que dans les anciennes machines, pour lesquelles le rapport entre le volume décrit dans une seconde par le piston de basse pression et æ puissance indiquée était sensiblement plus élevé qu'actuellement. Les condenseurs de la marine mili= taire française sont constilués par un faisceau den tubes droits parallèles, à l'intérieur desquels passe s l’eau de circulation. Ces tubes sont en quinconce el« leur écartement d'axe en axe est d'environ un diamètre et demi. Dans ces conditions, la surfaces réfrigérente qu'on peut loger par mètre cube d'encombrement est inversement proportionnelle au diamètre des tubes, ce qui conduit à réduire @ diamèlre autant que le permettent le danger d'en“ crassement el la nécessilé de conserver une rigidité suffisante, Les tubes longs foueltent sous l’action de la vapeur. Il y a donc lieu de préférer les con= denseurs gros et courts. La pompe à air est verti= cale, à simple effet, avec trois rangées de clapets; la conduite des pompes à air se fait par des ma= chines indépendantes pour tous lès bâtiments de læ marine militaire française autres que les torpik leurs. Il existe plusieurs manières de relier les appa= reils de condensation aux machines principales. La solution la plus répandue consiste à établir, pour chaque machine, un appareil de condensation com= plet et isolé du voisin. Cette solution a l'avantage d'assurer l'indépendance des groupes constituant chaque machine principale. Mais, en revanche; chaque machine principale se trouve immobilisée« à la moindre avarie du condenseur. Sur la plupart des croiseurs récents de la marine francaise, on & établi deux appareils de condensation pour troi machines. On voit que la marine est conduite à appliquer; dans une certaine mesure, le principe de la condens sation centrale, dont les calculs de M. Weiss ont nettement établi l'utilité dans l'hypothèse d'un groupe important de chaudières. Sans revenir ICk sur cette question de la condensation centrale, jen rappelle aux lecteurs de la /?evue que M. Chaleïh a montré (1904, p. 1041) le grand avantage écono: mique de compléter la condensalion centrale par le dispositif Rateau, comportant un accumulateu de vapeur et une turbine à basse pression. . II. — DYNAMIQUE APPLIQUÉE. Je réunis sous ce titre toutes les questions cons cernant le fonctionnement des machines, abstrae tion faile des phénomènes thermiques. + Dans la précédente revue, j'ai parlé des réacs tions et des chocs dus aux forces d'inertie des L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 827 du mouvement de rotation des machines marines. Comme il ne saurait être question d'installer un volant sur ces machines, on se borne à rendre le moment moteur aussi régulier que possible, en agissant sur la régulation etsur le calage des mani- velles. Mais d'autres facteurs importants intervien- pent dans la loi du mouvement. En particulier, la orsion élastique de l'arbre creux exerce, aux #randes allures, une influence considérable, de elle sorte qu'il suffit d’un changement de diamètre de l'arbre, même peu important, pour modifier d'une facon très appréciable les écarts de vitesse. es effets de l'irrégularité de rotation sont mul- liples. Ils doivent être envisagés au triple point de jue : 1° de la faligue supportée par les organes de à machine; 2 du rendement de l'hélice; 3° des vibrations de la coque. En ce qui concerne nolamment le rendement de Phélice, M. Lelong faitremarquer que, par suite des Variations de vitesse, l'angle d'attaque du propul- seur change à chaque instant ; les résullats les plus défavorables doivent correspondre au cas où Pangle d'attaque tombe sensiblement au-dessous de sa valeur optimum 2,30, en raison de la rapidité avec laquelie s'abaisse alors la courbe de rende- ment. L'auteur pense qu'il convient peut-être attribuer à un fait de ce genre les chutes d’utili- salion qu'on observe à grande allure sur certains bâtiments, et qui ne paraissent pas dues aux formes de la carène. : Dans un second travail, M. Lelong est revenu Spécialement sur la question de la vibration des bavires. Les causes de vibration sont : d’une part es forces d'inertie des machines, d'autre part les Variations d'effort des hélices. Pour atténuer les orces d'inertie, on cherche à obtenir un équilibrage ussi parfait que possible des pièces oscillantes. Le problème a été résolu jadis, sur le vaisseau ÆZylau, ën employant une machine à deux cylindres égaux, ans laquelle les bielles et les manivelles étaient ntrebalancées par un altelage symétriquement disposé par rapport à l'arbre et conduisant un “Contrepoids de manière à donner à celui-ci un mouvement rectiligne symétrique de celui des pis- ons. Cette disposition est inapplicable sur les grandes machines de la marine moderne. On peut détruire la résultante horizontale dés orces d'inertie et le moment de cette résultante l'aide de contrepoids de manivelles. La résul- te verticale des forces d'inertie peut également be annulée en donnant aux attelages des poids gaux et des calages symétriques. Ce procédé, mis en évidence par M. Normand, est employé actuelle- ent par plusieurs constructeurs. Le moment de tangage est beaucoup plus difficile à équilibrer. es procédés qui agissent sur les calages risquent [l d'augmenter les vibrations de grande fréquence (harmoniques supérieures de la série de Fourier). On peut avoir recours aux contrepoids lournants, ce qui se fait pour les moteurs de dynamos par exemple. D'ailleurs, il suffit de placer les machines au centre du navire pour combattre d’une facon efficace l'action de ce moment de tangage ; l'équi- librage complet exigerait au moins six cylindres. En ce qui concerne les hélices, les variations d'effort sur la coque proviennent: de la poussée sur le palier de butée, influencée par l'irrégularité. du mouvement de rotation ; de la pression exercée sur les supports par suite des poussées transver- sales que l'eau exerce sur les ailes; enfin des chocs exercés sur la carène par l’eau que rejette l'hélice. M. Lelong conseille de donner quatre ailes aux hélices centrales et d'incurver ces ailes de ma- nière à régulariser l'action de l’eau. Le remplace- ment d’une hélice à trois ailes droites par une hélice à quatre ailes incurvées en lame de sabre à permis d’atténuer les vibrations de la coque du Chäleau-Renault. Avant de quitter ce qui se ratlache au génie ma- ritime, je signalerai encore une étude de M. Lelong sur l’état actuel de la question des hélices, envi- sagée au point de vue du rendement. On s'est longtemps contenté de règles empiriques. L'aug- mentation de la vitesse, des navires a conduit à serrer la question de plus près, théoriquement et expérimentalement. On a mis ainsi en évidence trois points dont l'importance échappait il y a quinze ans, savoir : la nécessité d’une arrivée d’eau régulière et parallèle à l'axe, l'importance de la surface propulsive et le phénomène de la cavitation. La question ainsi localisée parait mûre pour des expériences méthodiques. L'influence perturbatrice des forces d'inertie, dont nous venons de voir les effets à bord des nayires, est connue et étudiée depuis longtemps en ce qui concerne les locomotives. Le Châtelier a montré, il y a cinquante ans, comment on peul réduire cette influence au moyen de contrepoids; il a analysé aussi les perturbations dues aux varia- tions de pression de la vapeur sur les pistons. Yvon Villarceau et M. Nadal ont traité analytiquement le problème général de la stabilité des locomotives. Un fait remarquable, sur lequel Vicaire a appelé spécialement l'attention, est celui de l'existence de certaines vitesses dangereuses, correspondant au synchronisme entre les périodes de deux ou plu- sieurs causes de perturbation. On contoit, par exemple, que l'allure puisse être particulièrement instable, si la durée d’oscillation des ressorts (durée indépendante de la vitesse de marche) coïncide avec la durée d'’oscillation des bielles ou avec un mulliple de cette durée. M. Georges Marié vient de 828 L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE DU reprendre la question en tenant compte des résis- tances passives. Il recherche les conditionsles plus défavorables du synchronisme entre la durée d'une révolution des roues motrices et la durée d'une oscillation complète de la machine. Le synchro- nisme simple ne se présente que pour les vitesses faibles. Pour les très grandes vitesses, il peut exister trois révolulions des roues motrices pen- dant une oscillation complète; en général, les cas de synchronisme avec multiples impairs sont les plus défavorables. L'amplitude des oscillations aug- mente, d'après M. Marié, jusqu'à ce que le travail du frottement dû au déplacement latéral du bogie, des lames de ressorts, etc., pendant l’oscillation simple soit au moins égal à la demi-force vive due à l'impulsion des forces perturbatrices. On s’est demandé si les roues, par leur action gyroscopique, peuvent opposer une résistance efficace à leur sou- lèvement; M. Marié trouve qu'il n'en est rien. Les locomotives actuelles de trains rapides, à quatre cylindres, munies de bogies à déplacement latéral avec frottement, ne sont généralement pas sujettes à des oscillations assez fortes pour entrainer par elles-mêmes des déraillements, même aux plus grandes vilesses; mais il faut éviter de trop dimi- nuer les frottements. Les conclusions auxquelles l’auteur aboutit sont les suivantes : 1° il faut dimi- nuer le plus possible les oscillations en agissant sur les causes qui les produisent; 2° il faut donner au matériel de la souplesse dans tous les sens, avec frottements partout suffisants pour amortir rapide- ment les oscillations que l'on ne peutéviter. Certains construcleurs d'automobiles ont déjà imaginé d'installer des amortisseurs qui absorbent par un frottement considérable la force vive d’oscil- lation des ressorts : cette pratique est excellente et la sécurité demanderait qu’elle fût généralisée. Pour les véhicules de chemins de fer, la question de stabilité est plus simple que pour les locomo- lives. Les influences dominantes sont alors la durée d'oscillation des ressorts et la durée du balance- ment du véhicule autour de son axe longitudinal : cette dernière dépend de la forme du véhicule et de la conicité des bandages. M. Sabouret, ingé- nieur en chef du matériel et de la traction de la Compagnie de l'Ouest, a entrepris l'étude expéri- mentale des mouvements secondaires des véhi- cules en marche; il emploie, à cet effet, des enregistreurs appropriés. [l a pu ainsi reconnaître que, dans certaines voitures, à allure médiocre, les oscillations transversales de la caisse ont une fré- quence double de celle des oscillations verticales des ressorts de suspension : on a donc là un exemple bien net d’instabilité due au synchro- nisme de deux actions périodiques. Un moyen radical d'éviter ces effets de synchronisme consis- lerail à établir les divers ressorts de façon qu'il n'exislât aucun rapport simple entre leur durée d'oscillation : procédé analogue à celui qui consislen à faire rompre le pas d’une troupe de soldals au passage d’un pont suspendu. æ IT. — QUESTIONS DIVERSES. $ 1. — Frottement de glissement. Parmi les causes qui influencent le rendement d'une machine quelconque, l’une des plus générales est le frottement de glissement. Ce frottement am toujours lieu, en pratique, par l'intermédiaire de surfaces lubréfiées : c'est un frottement médiat, auquel ne conviennent pas les lois du frottement immédiat, c'est-à-dire du frottement à see, établies par Coulomb et le général Morin. Dans la précés dente revue, j'ai indiqué les études de M. Petrofl sur ce sujet. Quoi qu'il en soit, on a souvent recours; dans les applications, à l'emploi des lois de Coulomb, et c’est ainsi que l’on calcule, par exemple, le frot tement des engrenages. Les lois de Coulomb ont un caractère puremnenb empirique, et personne n'a jamais soutenu que, même dans le cas du frottement immédiat, elles eussent la valeur de lois mathématiques. Mais M. Painlevé est allé plus loin, etila montré qu’elles conduisent à des conséquences incompatibles avec les principes de la Mécanique rationnelle: L'incompatibilité consiste en ceci que, dans certaines circonstances, ces lois donneraient pour la pression mutuelle de deux corps en contact une valeur négative. Soit, par exemple” un disque circulaire non homogène, lancé, sans rotation iniliale, dans un plan vertical, au con= tact d'une planche horizontale. Si l’on admet, avec Coulomb, que, pendant le glissement, les rapport entre l'action tangentielle et la pression normale est égal à une constante / (coefficient de: frottement) dépendant uniquement de la nature des surfaces en contact, on trouve que, quand les surfaces sont suffisamment rugueuses, la pressions normale se trouve remplacée par une attraction de ces surfaces, résultat inadmissible si lon suppose que rien ne s'oppose à la séparation des deux corps. Les calculs de M. Painlevé sont faits en cons dérantles corps comme doués d’une rigidité absolue Mais on sait déjà, par l'exemple du choc, qu'il est souvent indispensable de tenir compte de l'élas= ticité des solides naturels, ceux-ci n'étant jamais mathématiquement rigides, et j'ai lâché d'établir que celte propriété suffit pour faire disparailre, en! réalité, la difficulté théorique dont il s'agit. Lélas ticité, dans le cas du frottement, intervient de deux manières : d'abord en permettant aux COrps CN ss A RES 5 L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE 829 contact de s'aplalir légèrement l’un contre l'autre, ensuite en obligeant les deux corps, à l'instant où ils commencent à se frôler, à s’entrainer mutuel- lement par l'engrènement de leurs aspérilés, de facon que la couche extérieure de chaque corps éprouve tout d'abord, par rapport aux couches profondes, un déplacement progressif proportionnel à la force tangentielle. M. Beilby en Aagleterre, MM. Osmond et Cartaud en France, ont trouvé expérimentalement que, même dans le cas de métaux polis avec le plus grand soin, les surfaces manifestent ce genre d'entraînement. Il y a done une période préparatoire pendant laquelle le coef- ficient de frottement, d’abord nul, croit jusqu'à sa limite supérieure. Ceci posé, on démontre que la déformation normale el la déformation tangen- tielle s'opposent, chacune de leur côté, à l'appari- lion de pressions négatives. Les difficultés théo- riques que semblent entrainer les lois de Coulomb tiennent donc uniquement à ce qu’on fait abstrac- tion de l'élasticité des solides naturels el elles sont du même ordre que celles qu'on rencontre en étudiant le choc de corps parfaitement polis. En admellant l'exactitude pratique des lois de Coulomb, je me suis proposé de calculer le rende- ment du joint universel, ou joint de Cardan, dont on connait les applications récentes dans l’automo- bilisme et dans le train Renard. Si l'on appelle A l'angle des deux axes réunis par: un pareil joint, o l'angle de frottement, À le rapport entre le rayon des tourillons et la longueur des bras du croisillon, ce rendement est égal à l'unité diminuée de la quantité : ' Dee) r À = À sin [tea + log tg (F + 5): - Quand A est assez petit pour qu'on puisse négliger ê les puissances de cet angle supérieures à la seconde, l'excès de l'unité sur le rendement prend la forme disposition classique du joint universel. On ren- contre fréquemment dans l'induslrie la disposition 4 i À k - = : 4 plus simple : = Aù sin o. Ces résultals concernent la : F # plus simple que voici : l'un des arbres est terminé . & . ” : par un boisseau cylindrique pourvu de fentes lon- gitudinales, et ces fentes servent à guider des cou- - lisseaux portés par l'extrémité de l’autre arbre. Au % point de vue cinématique, le fonctionnement est le même qu'avec le croisillon ordinaire; mais le frot- tement s'exerce d'une autre façon. Ce rendement diffère alors de l'unité d’une quantité : 2 Tr À Ste Xlogte (5 +5), TS 4 2 5 qui, pour les pelites valeurs de A, se “réduit sensiblement à 2A/7 X tgo. Dès lors, il est aisé de voir que, si le rapport À est inférieur à REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 1/2 cos ©, ainsi que cela à toujours lieu en réalité, l'ancienne disposition est préférable au point de vue de la perte de travail due au frottement. S 9 S 4 . — Pivotement. D'après les recherches publiées en 1876 par M. Léaulé, le couple résistant qui, par l'effet du frottement de glissement, prend naissance dans le pivotement relatif de deux corps est proportionnel à la longueur de l’ellipse limitant la petite aire de contact.Ce remarquable résultat a été obtenu en partant d’une hypothèse simple sur la déformation des deux corps due à leur pression mutuelle : on admet qu'en prenant pour position initiale celle où les deux corps se touchent en un seul point P, avec pression nulle, le déplacement éprouvé (avant pivotement) par chaque point de l'un des corps, pour venir en coïncidence avec un point de l’autre corps, est parallèle à la normale commune en P et que la pression finale est proportionnelle à l'écart primitif des points amenés ainsi en coïncidence. En 1882, Hertz a appliqué la théorie mathéma- tique de l'élasticilé à l'étude du contact de deux corps pressés normalement l'un contre l'autre. Comme il fallait s'y attendre,.les conclusions aux- quelles il est parvenu ne concordent qu'imparfai- tement-avec celles qu'on déduit de l'hypothèse précédente. Les déplacements, au lieu d'être nor- maux au plan tangent commun, sont inclinés sur ce plan, ét la répartition des pressions, à l'intérieur de l'aire de contact, n’obéit pas à la loi prévue. En reprenant, dans ces conditions, les calculs de M. Léaulé, j'ai élabli que la loi formulée par l'émi- nent ingénieur conserve son exactitude, mais qu'il y a lieu de moditier un coefficient numérique. Dési- gnant par / le coeflicient de froltement, par P la pression lotale, par E la longueur de l'ellipse de contact, la théorie de Herlz conduit, pour le mo- ment de pivotement, à l'expression 0,093 /EP, tandis qu'avec l’ancienne lhéorie, on avait 0,085 fEP. Il y a done un écart de 10°/, environ. La théorie de Hertz permet de calculer, en fonc- lion des courbures des deux surfaces, pour une pression lotale donnée, les deux axes de l’ellipse de contact et, par conséquent, le contour E. Les for- mules sont fort compliquées; mais elles se simpli- fient quand on se borne à considérer le contact d'une bille sphérique avec un cône, et elles ont été, pour ce cas particulier, traduites en lables numé- riques par M. Heerwagen. J'ai ulilisé ces tables pour examiner ce qui arrive lorsqu'une bille roule et pivote entre deux cônes parallèles, comme dans le cas des roulements à billes. On trouve que la résistance au pivolement est plus grande au con- Lact du cône extérieur (la cuvelte) qu'au conlaet du cône intérieur. Il faut en conclure que le pivote- 18°” 830 L. LECORNU — REVUE ANNUELLE DE MÉCANIQUE APPLIQUÉE ment tend à se produire exclusivement entre la bille et le cône intérieur, et l'observation montre, en effet, que le cône s'use plus vite que la cuvette. La théorie de Hertz suppose essentiellement qu'au contact des deux corps la limite d’élasticité n'est pas dépassée, circonstance qui, vu la peli- tesse de l'aire de contact, peut survenir assez vite. Herlz, qui a prévu cette objection, a vérifié expéri- mentalement, pour des variations de pression assez étendues, l'exactitude de ses calculs. D'autres vérificalions ont élé faites en 1900 par le Profes- seur Stribeck. D'ailleurs, la résistance au pivote- ment ne saurait être sensiblement altérée par un léger dépassement de la limite d’élasticilé, cet effet devant se produire surtout vers le centre du con- lact, c'est-à-dire dans la région où le glissement est négligeable. On pourrait encore objecter à l'emploi de la théorie de Hertz pour l'étude du pi- votement que Hertz regarde les surfaces en con- tact comme parfaitement polies, ce qui exelut, l'existence du frottement de glissement. Mais, pourvu que celui-ci ne soit pas trop grand, il ne saurait modifier beaucoup les pressions normales. $ 3. — Transmission par courroies. Ce genre de transmission, si simple et si univer- sellement employé, a recu, il y a quelque temps, du capitaine Leneveu, un perfectionnement dont l'importance pratique s'affirme chaque jour davan- tage. Avec ce dispositif, la section des courroies peut être réduite à la moilié ou au tiers de celle qui élait jusqu'ici reconnue indispensable. En outre, on n'est plus astreint, comme précédem- ment, à laisser un intervalle assez grand entre les deux arbres sur lesquels porte la courroie : l’inter- valle peut être rendu à peine supérieur à la somme des rayons des poulies, et cela quel que soit le rapport de ces rayons. Pour oblenir des résultats aussi avantageux, il suffit d’adjoindre un galet enrouleur déterminant un enveloppement plus grand de la courroie sur les poulies. Le galet est porté par un bras oscillant autour de l’un des arbres, et il exerce sur la courroie la légère pres- sion destinée à assurer l'enroulement. M. Rozé, qui a éludié avec grand soin, au point de vue théorique, la transmission Leneveu, explique de la façon suivante les résultats constatés. Les courroies sont élastiques et reprennent leur état initial, même après avoir subi une traction consi- dérable. Mais le travail interne par lequel s’accom- plit ce retour à l’état initial exige un temps qui peut être très long quand la déformation a dépassé certaines limiles. Or, dans la transmission par lien flexible, chaque partie du lien passe incessam- ment de l'état de tension maximum (brin moteur) à l'état de tension minimum (brin conduit), et cela dans un temps d'autant plus court que la trans- mission marche plus vite. La longueur totale de la courroie est donc plus grande à l’état dynamique qu'à l'état d'équilibre statique, ce qui diminue la tension moyenne. On est, par suite, obligé, pour conserver en marche le minimum de tension propre à empêcher le glissement, d’exagérer la tension au repos. De là une fatigue permanente, à l’état statique, pour les arbres et pour le lien, et par conséquent un allongement indéfini de celui-ci. Il faut employer des liens plus forts que ne l’exige- rait la grandeur de l'effort transmis, et les retendre fréquemment. Avec le système Leneveu, au con- lraire, la tension initiale est insignifiante. Le rôle du galet est de maintenir constante, au repos ou pendant le mouvement, cette faible tension initiale, qui devient suffisante, eu égard à l’enroulement, parce qu'elle est indépendante des variations de l'effort transmis. En un mot, le galet a pour véri- table rôle celui de réducteur de tension; il sert en même temps à augmenter l'angle d’enroulement, et ceteffet contribue, lui aussi, à réduire la tension, M. Rozé fait observer, d'autre part, que la valeur 0,2, généralement adoptée pour le coeflicient de frottement d'une courroie sur une poulie, est déduite d'expériences statiques qui ne renseignent pas sur la valeur réelle de ce coefficient pendant la marche. Déjà, M. Richard a été conduit à consi- dérer la valeur 0,4 comme n'ayant rien d'exagéré pour des courroies très souples. M. Rozé pense que, dans la transmission Leneveu, le coefficient doit pratiquement dépasser 0,5, ce qui grandit beau- coup l'influence de l'angle d’enroulement. Le galet enrouleur a un autre effet utile, consis- tant à combattre l’inertie de la courroie. A l’in- slant où le brin conduit doit s'infléchir pour prendre la courbure de la poulie conduite, il Lend, par son inertie, à continuer son mouvement rectiligne. A l'instant où le même brin quitte la poulie motrice, la force centrifuge tend également à diminuer l'angle d'enroulement. Ces effets, qui se manifestent surtout dans les transmissions ra- pides, s'ajoutent à ceux de la raideur statique. Le galet enrouleur, à cause de l'opposition des cour- bures du galet el de la poulie, précipite en quelque sorte le lien sur la poulie, et atténue par suite le défaut dont il s’agit. On voit que, même dans une question aussi vieille et aussi rebattue, en apparence, que celle des transmissions par courroie, l'alliance de la théorie et de la pratique peut conduire à d'impors lantes conséquences. Le champ du progrès n'est jamais épuisé, et de nouvelles fouilles laissent tous jours espérer des découvertes utiles. L. Lecornu. Professeur à l'Ecole Polytechnique 1 ae gd CD En pd on Sc 0! et à l'Ecole Supérieure des Mines: £ Ê BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 831 BIBLIOGRAPHIE ANALYSES 1° Sciences mathématiques Krazer (Ad.), Professeur de Mathématiques à l'Ecole 4 [A » technique de Carisruhe. — Lehrbuch der Theta- funktionen.—1 vol. gr.1n-8° de509 pages avecfiqures. (Prix : 30 fr.) B. G. Teubner, éditeur. Leipzig, 1905, Le fondateur de la théorie des fonctions thêta est le savant géomètre allemand Jacobi, dont on a célébré le centième anniversaire de la naissance à l’occasion du * IIS Congrès international des Mathématiciens, tenu à Heidelberg en août 1904. Suivant l'opinion de Dirichlet, l'idée d'étudier pour eux-mêmes les produits infinis dont s’est servi Abel pour exprimer les fonctions ellip- tiques sous forme de quotient doit même être placée au premier rang des conceptions de Jacobi. C'est donc à juste titre que les fonctions thêta sont souvent dési- gnées sous le nom de fonctions de Jacobi. Aujourd'hui, ces fonctions jouent un rôle important, non seulement dans la théorie des fonctions elliptiques et en Analyse, mais encore dans divers domaines de l'Algèbre, de la Théorie des nombres et de la Géométrie. Leur étude est généralement présentée sous une forme très restreinte dans les traités de fonctions elliptiques; aussi un traité consacré uniquement aux fonctions thêta répond-il à un véritable besoin. 1] faut donc savoir gré à M. Krazer d'avoir écrit ce traité, qui fait partie de la Collection Teubner, et pour la publication duquel il était tout particulièrement désigné, en raison des beaux travaux qu'il consacre à ce domaine de l’Analyse depuis une vingtaine d'années. L'ouvrage est divisé en trois parties. L'auteur prend — comme point de départ la série : + pl \ E Zn, m—o OÙ Zm—eam+bm te, et il étudie, dans la Première partie, les fonctions thêta générales à caractéristiques quelconques. Cette : étude a principalement pour objet les séries thèta, la - transformation des fonctions thèta et la multiplication complexe. La Seconde partie est consacrée à un exa- men très approfondi du cas des caractéristiques ration- - nelles, d'après les travaux de Riemann, Prym, Nœther, Jordan, Weber et d'autres. Enfin, dans la Troisième partie sont étudiées des catégories spéciales de fonc- tions thêta. On y trouve notamment les fonctions thêta d'Abel, de Riemann, les fonctions thêta hyperellip- tiques et le problème de la réduction d'intégrales abé- liennes et des fonctions thêta qui s’y rattachent. Chaque chapitre est accompagné d'aperçus histo- riques et de notes bibliographiques qui permettent au lecteur d'avoir recours aux Mémoires originaux. Le soin avec lequel ces documents ont été groupés, joint à la clarté de l'exposé, fait de cette étude systématique des fonctions thêta un traité d'un grand intérêt pour tous ceux qui suivent les progrès a théorie des fonctions. Mais, de plus, ce sera un guide précieux pour les étu- diants qui possèdent les principes fondamentaux de “cette théorie et qui désirent entreprendre une étude approfondie des fonctions de Jacobi, 11 leur fournira d'utiles indications sur les divers points de vue aux- quels se sont placés les auteurs et sur les notations dont ils ont fait usage. H. Feu. Professeur à l'Université de Genève. Hart (G.). — Les Turbines à vapeur. — {À vol. jn-80 de 140 pages, avec 53 figures. (Prix :4 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1905. C’est en 1884 que M. Parsons construisit la première ET INDEX turbine à vapeur qui ait été utilisée industriellement. Au commencement de 190%, on pouvait évaluer à près de 1.100.000 chevaux la puissance développée par les turbines de ce genre alors existantes. Et il faut s'at- tendre à les voir s’accroitre suivant une progression toujours plus rapide. La turbine à vapeur se trouve, en effet, dans des conditions thermiques et mécaniques plus avantageuses que la machine alternative. Ses principaux avantages sont : la continuité de son mouvement de rotation, son poids et son encombre- ment relativement faibles, ses. frottements réduits, l'absence de toute action de paroi, de toutes conden- sations et revaporisations successives. Dans le cas particulier de la propulsion des navires, l'emploi d'une turbine à vapeur permet de réduire le pas, le diamètre et le poids des hélices, leurs chances d'émersion et d’'emballement, le poids de leurs arbres. Pour la conduite d'une dynamo, la marche de la tur- bine est très facile à régler suivant sa charge. Et les inconvénients de ce moteur (manque d'élas- ticité de son fonctionnement économique, grande vitesse de rotation, non-réversibilité de marche) sont, du moins pour les deux premiers, d'ores et déjà atté- nués. Après une classification des diverses turbines à vapeur et leur théorie sommaire, l'ouvrage décrit les princi- paux types, leurs installations principales, les résultats qu'ils obtiennent. Le type Parsons, à roues multiples, n'entre pas pour moins de 600.000 chevaux dans la puissance totale que nous avons dite. Cette puissance est répartie entre unités variant de 30 à 10.000 chevaux. La vitesse, qui était primitivement de 18.000 tours, a pu être abaissée à 1.000 et même parfois 500 tours, tout en conservant un bon rendement. Un quart de leur puissance totale sert à la propulsion des navires : Turbinia, bateau d'expériences, Viper, Cobra, Velon, contre-torpilleurs de la marine anglaise, qui ont atteint la vitesse de 36,6 nœuds, et plusieurs yachts ou paquebots, parmi lesquels la Queen Alexandra, de 82%35 de longueur, qui a réalisé la vitesse de 21,68 nœuds pour une puissance approximative de 4.500 chevaux. La turbine de Laval, dont la première utilisation date de 1892, est à roue simple : la vapeur, détendue dans le distributeur, pénètre dans les aubes d’un côté et en ressort par l'autre. Elle entre dans le total déjà donné pour 135.000 chevaux, tous affectés à des services de terre. Elle est réservée aux puissances moyennes, pour la conduite des pompes, dynamos, ventilateurs. La turbine Rateau (14.800 chevaux au commence- ment de 1904) est née, en 1896, sous la forme d'une ou deux roues genre Pelton, recevant la vapeur à l’aide de tuyères divergentes placées à la périphérie et dans le plan médian des roues. Un peu plus tard, elle a pris la forme d’une turbine à roues multiples dite multicel- lulaire.M. Rateau s’estsurtout efforcé d'obtenir un ren- dement mécanique élevé, malgré une vitesse angulaire très faible. Ses turbines sont propres aux services de terre et à la propulsion des navires. Indépendamment de ces types, qui sont à peu près les seuls employés en France, M. Hart étudie les types : Curtis (290.000 chevaux) à axe vertical, qui n’a guère été utilisé jusqu'ici qu'en Amérique et en Angleterre pour la conduite des machines électriques, Riedler- Stumpf, Zælly, Lindwark, Westinghouse, Veichelt, Schulz et Bréguet à disques de Laval. Cet ouvrage, méthodique et clair, arrive bien à son heure. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. 832 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 2° Sciences physiques Von Czudnochowski (Walther Biegon), 1ngénicur. — Das elektrische Bogenlicht, seine Entwicklung und seine physikalischen Grundlagen. Zrste Liele- rung (Prix : 3 marks). S. Hirzel, éditeur, Leipzig. Ce fascicule de 100 pages si remplies, d’une sl copieuse documentation, n'est qu'une introduction à une monographie de l'arc électrique. Après les étapes de la découverte de l'arc, due sans conteste à Davy, datant, non pas de 1801, mais de 1808 (recherches de Silv. Thompson et Mme Ayrton), vient un exposé Roanne du rôle de la lumière arti- ficielle depuis l'antiquité la plus reculée, qui lui attri- buait un caractère vénérable et sacré. Le développe- ment du commerce a déterminé les progrès successifs et a conduit, des pots de graisse usités pour l'éclairage public par les As yriens, les Egyptiens et les Perses, à l'éclairage électrique moderne, dont les formes les plus récentes sont les | lampes à incandescence de Nernst et d'Auer (filament d’osmium), les arcs de Bremer, de Rasch et de Cooper-Hewitt. Ensuite, l'auteur reprend tous les éléments physiques de la lumière et, en toute question, il applique invaria- blement sa méthode « historique et critique », qui, d’ail- leurs, ne justilie pas suffisamment sa seconde dénomi- nation. Nous passons en revue nombre de questions qui auraient pu, à bon droit, être supposées connues du lecteur. C'est ainsi que se présentent successivement la vitesse de la lumière, son mode de propagation, sa nature électromagnétique, et aussi la densité de l'éther, puis les spectres continus, de lignes ou de bandes, les formules spectrales, entin les genres de sources lumi- neuses, par élévation de température ou par lumines- cence. Alors se place un cours très complet de photométrie, renfermant, d’ailleurs, certains renseignements intéres- sants, mais dans lequel l’auteur s’est bien gardé d'omettre mème les tout premiers éléments. Certains tableaux de valeurs numériques exigeraient d’être revus : il est difficile, par exemple, de concilier la valeur donnée page 23 pour la bougie Hefner (0,885 de la bougie décimale) avec sa valeur page 25 rapportée à l’étalon Violle (1 violle — 19,5 bougies Hefner). D'autre part, quand il s’agit de l’affaiblissement, dans une pro- portion bien déterminée, d’un faisceau lumineux qu'on fait réfléchir, est-il bien nécessaire de faire figurer dans des tableaux numériques des surfaces aussi vague- ment déterminées que du papier de Journal ou des boi- series : 4° propres; 2° malpropres? Le principe de tous les photomètres possibles, même photochimiques, se trouve indiqué. Il est juste de reconnaître que la ques- lion de la photométrie des lumières différemment colorées est exposée avec soin, tanten ce qui concerne la méthode spec trophotométrique que l'emploi de milieux absorbants, c'est-à-dire les méthodes à une ou deux couleurs de Crova, d’Abney, de Macé de Lépinay, d’Ayrton et Perry. La haute puissance lumineuse de l'arc rend souvent nécessaire de le reporter à une dis- tance telle du photomètre qu'il devient nécessaire de tenir compte du coefficient de transmission de latmo- sphère ; on se sert alors des nombres déterminés par Allard (Service des Phares français). Le secteur tournant de Brodhun peut éviter l'ennui d'opérer à de si grandes distances. Après une étude consciencieuse du rayonnement non uniforme de l’are électrique, et des courbes d'inten- sités lumineuses, l’auteur aborde le problème de la répartition artificielle de la lumière suivant les genres d'applications, et dans cette revue on trouvera mème l'historique des effets lumineux au théâtre et des fon- taines lumineuses. La diversité des moyens en usage (réflecteurs, écrans, globes diffuseurs ou réfractants) permet de modifier à volonté la répartition de manière à atteindre le but désiré. ment, de fournir la base de nouveaux procédés de Dans les cas des phares et projecteurs, il insiste lon- guement sur les origines, et développe à ce propos des considérations qui lui sont peut-être trop personnelles. Par contre, les dispositions actuelles, les plus intéres- santes à approfondir, auraient mérité mieux qu'une simple étude extérieure, formée de renseignements rassemblés bout à bout. On peut s'étonner que l’auteur assigne comme but de ces appareils la production de faisceaux exclusivement parallèles, qu'il ne soupconne pas l'importance de l'ouverture des faisceaux, qu'il ignore les feux-éclairs de Bourdelles, et enfin que nulle part il ne soit question du rôle de l'éclat intrinsèque de la source. Ce n’est pas assez de l'unique affirmation, au début et à la fin de la photométrie, que, de deux sources lumineuses, la meilleure est « la plus claire ». Puis l’auteur développe à juste titre tousles éléments qui doivent intervenir pour déterminer le choix de la source Jde lumière, dans chaque cas particulier. Il con- vient de se préoccuper, non seulement de la consom- mation spécifique, mais encore de la chaleur produite, de la nature plus ou moins nocive des produits de la combustion, de la couleur de la lumière, des dépenses et des difficultés d'entretien, des frais d'installation, des pertes d'exploitation. C’est ainsi que chacune des sources de lumière connues peut se trouver la plus avantageuse dans un cas déterminé. Naturellement, au point de vue du rendement, la lumière électrique est bien supérieure à toutes les autres, et la forme par arc très supérieure à l’incandescence. Actuellement, l'arc le plus économique est l'arc à flamme de Bremer (0",43 seulement par bougie); malheureusement, il a comme inconvénients non seulement la formation ordinaire de produits nitreux, mais encore sa couleur et surtout un abondant dégagement de fumée. En abordant l'étude théorique du rendement des sources lumineuses, l'auteur ne peut se dispenser den dire d’abord que la source idéale de lumière devrait posséder toutes les qualités, et en même temps ne rien coûter; ensuite, il reprend des généralités superflues sur la conservation de l'énergie et sur ses transforma= tions, sur tous les équivalents numériques mutuels: Alors il entre dans le véritable sujet et expose la ques- tion de l'équivalent mécanique de la lumière, gran- deur dont il serait très commode de pouvoir faire usage, mais dont la détermination, tentée successive- ment par Thomsen, Tumlirz, Angstrôm et Wiedemann, « n'a conduit jusqu'ici à aucun résultat pratique. Les recherches relatives aux forces Maxwell-Bartoli dues à la pression de la lumière ont peu de chances, égale- mesure dans la technique de l'éclairage. Enfin, l’auteur arrive aux lois du rayonnement du corps noir : il expose la loi de Stefan et Boltzmann, celles de Wien, de Lummer-Pringsheim-Jahnke, puis il montre comment elles s'étendent aux corps dont la loi de rayonnement n’est plus la mème, et il met en évi-=M dence les conclusions pratiques auxquelles elles condui- sent. C’est que les mesures purement photométriques ne fournissent que des données incomplètes; il con- vient de déterminer l'énergie rayonnée et non pas seu- lement l'intensité lumineuse; et c’est à ce point de vue que la connaissance de l'équivalent mécanique de là lumière serait précieuse pour dispenser, dans la pra=" tique courante, de recourir aux mesures bolomé= triques. Enfin, les lois du rayonnement démontrent que le but idéal, avec nos sources lumineuses actuelles, serait de pouvoir amener leur maximum de rayonne= ment dans la partie la plus claire du spectre visible, comme cela a lieu pour le rayonnement du Soleil. I faudrait done trouver un corps éelairant capable d’être maintenu à une température de 6000. L'ouvrage de M. de Czudnochowski, qui témoigne d'un labeur considérable, aurait pu avec avantage ètre réduit de moitié; il aurait gagné à ètre écrit dans un langage moins diffus et plus scientifique. E. Haunté, Professeur à l'Ecole navale. BIBLIOGRAPHIE — ANALYS ET INDEX 833 £.- . Bæœrnstein (R.) et Meyerhoffer (W.). — Landolt- Bœrnstein physikaliseh-chemische Tabellen (TA- — B2ES PHYSICO-CHIMIQUES DE LANDoLr-BÔRNSTEIN), — 3° édition, revue et augmentée, publiée avec l'appui (le l'Académie des sciences de Berlin. — 1 vol. in-o — de 860 pages. J. Springer, éditeur. Berlin, 1905. “— loici un ouvrage qui sera bien accueilli dans tous les laboratoires et particulièrement dansles laboratoires “de Chimie physique et de Physique, où les deux édi- tions précédentes, publiées chacune à onze ans d'inter- Valle, ont rendu de nombreux services. La nouvelle édition, que nous venons de parcourir, est considéra- lement augmentée ; elle forme un volume de 860 pages, lors que la première édition, publiée en 1884, attei- gnait à peine 250 pages. On juge par là du chemin parcouru. Les auteurs ont, avec raison, conservé telle quelle la isposition générale de l'ouvrage, ce qui facilitera beaucoup les recherches pour les lecteurs déjà habitués consulter les éditions précédentes. Mais de nom- breuses tables nouvelles ont été incorporées aux anciennes, en vue de tenir compte des travaux relatifs aux domaines les plus récemment explorés de la Chimie hoinruse Toutes ces innovations nous ont paru très eureuses et destinées à rendre de grands services. | Quant au choix des données, ce n'est évidemment qu l'usage qu'on peut se rendre compte de l'esprit critique qui y à été apporté. Il semble, cependant, que le mode de publication adopté, consistant à répartir le travail entre plusieurs collaborateurs spécialistes, est de nature à donner le maximum de garanties que l'on puisse désirer en pareille matière. … En ce qui concerne la disposition typographique, les envois bibliographiques, etc., on peut acresser à la troi- ième édition les mêmes éloges que ceux qu'on à juste- «ment reconnus aux éditions précédentes. Il y aurait eu “néanmoins intérêt, croyons-nous, à mentionner, en “iète de chaque table, la date jusqu'à laquelle elle est à jour, mode de faire si apprécié de ceux qui consultent souvent le Dictionnaire de Chimie organique de Beils- lein. Peut-être serait-il encore temps pour l'éditeur de publier une feuille supplémentaire donnant ce rensei- put d'autant plus précieux pour le chercheur que à préface nous informe que le travail de révision Sarrête pour certaines tables avant la fin de 1902, et pour d’autres aux premiers mois de 1905. On peut, il est vrai, s'orienter approximativement en parcourant les index bibliographiques qui accompagnent chaque “table. C’est dire que l'observation que nous formulons ei n'enlève rien à la valeur même de l'ouvrage. Tel qu'il est, nous le répétons, il sera le bienvenu artout où l’on s'occupe de mesures physico-chimiques. ous ne doutons pas qu'il ne trouve rapidement sa ace dans toutes les bibliothèques des laboratoires. PH. A. GUYE, Professeur à l'Université de Genève. 3° Sciences naturelles Rinne (F.). — Etude pratique des Roches, à l'usage — des ingénieurs et des étudiants ès sciences natu- -relles, {raduit et adapté par M. L. PERVINQUIÈRE, Docteur ès Sciences, Chef des travaux pratiques de Géologie à la Sorbonne, avec une préface de M. À. Lacroix, Membre de l'Institut, — 1 vol. in-8° de 674 pages et 257 figures. (Prix : 12 fr.) De Rudeval, «… éditeur. Paris, 1905. … Depuis que le physicien anglais Sorby a eu l’idée de aller les roches en plaques minces, pour les examiner microscope, la Pétrographie a fait de rapides rogrès, grâce aux nombreuses recherches de Vogel- ang, de Zirkel, de Rosenbusch, de Fouqué et de Michel-Lévy, pour ne citer que les savants ayant employé les premiers cette nouvelle méthode d'inves- igation. Mais, si l'étude des roches à ainsi acquis une grande précision, elle est devenue plus difficile pour le débutant et, jusqu'ici, aucun livre élémentaire vraiment pratique n'a été publié pour la faciliter à ceux qui veulent s'initier à cette branche des sciences nalurelles, telle qu'on la comprend aujourd’hui. Aussi, le livre de M. Rinne, traduit, augmenté et adapté à l'usage des étudiants français, comble une véritable lacune de notre littérature didactique. La première partie de l'ouvrage est surtout con- sacrée à l'étude des facies géologiques, à la dislocation, à la disjonction, à la divisibilité, ete., des roches. Ensuite viennent la description des diverses méthodes d'observation employées actuellement et l'étude parti- culière des principaux minéraux. Les propriétés optiques indispensables, permettant de reconnaître ceux-Ci au microscope, sont mentionnées, et, naturel- lement, le lecteur devra être familiarisé avec les méthodes indiquées dans le guide pratique des mêmes auteurs, intitulé le Microscope polarisant. Enfin, la plus grande partie de l'ouvrage est consacrée à la description Systématique des roches éruptives, sédimentaires et métamorphiques. Les types importants, bien choisis, sont seuls décrits avec tous les détails nécessaires et à l'âide de nom- breuses photographies: les unes, montrant les roches dans la Nature, indiquent bien les rapports étroits de la constitution minéralogique du sol avec la nature des paysages; les autres, reproduisant la plaque vue au microscope, permettent immédiatement de voir la structure et la composition minéralogique de la roche. Mais, naturellement, M. Rinne, bien qu'il ait à sa dispo- sition une riche collection de clichés, qu'il a bien voulu me montrer, contenant des vues de tous les pays du monde, et dont beaucoup ont été prises par lui, s’est limité surtout aux types allemands: M. Pervin- quière a ajouté un grand nombre de photographies de roches françaises. M. Rinne, professeur dans une école technique supé- rieure, dont le programme des études correspond, à peu près, à celui de notre Ecole centrale, a rédigé son ouvrage surtout pour les ingénieurs ; aussi la descrip- tion de chaque roche importante est-elle suivie de paragraphes intéressants, relatifs à son emploi, à ses conditions d'exploitation, à sa résistance aux agents atmosphériques, à l'écrasement, à l'usure, etc. Mais, à très juste titre, l'auteur à pensé que l'enseignement technique doit être basé sur l'enseignement scienti- fique; aussi toutes les questions générales, sur les- quelles repose l’étude des roches, ont-elles été exa- minées. Des chapitres ont été consacrés à la diffé- renciation des magmas, au mode de formation des roches éruptives, à leur structure, à leur reproduction, à la formation de leurs éléments, à leur constitution chimique et représentation graphique des résultats des analyses, à leur classification, et surtout à leur rôle géologique, de telle sorte que les étudiants ès sciences naturelles de nos Facultés trouveront dans cet ouvrage toutes les questions qu'ils ont à connaître, d'autant plus que M. Pervinquière à complété, à leur intention, le développement de certaines questions théoriques. PAUL GAUBERT, Docteur ès sciences, Assistant de Minéralogie au Muséum d'Histoire naturelle. Travaux de la Station de recherches relatives à la Pêche maritime à Ostende. Xase. 11. — G. Bots, édileur. Ostende, 1905. La Station d'Ostende, dont nous avons signalé les derniers travaux l'an passé, continue ses recherches sur les questions connexes susceptibles d’intéresser l'industrie des pêches maritimes. Le deuxième fasci- cule, qui vient de paraître, renferme trois études de M. Huwart. La première concerne le tannage des filets. M. Huwart recommande le tannage par deux bains successifs : l’un, chaud, est un extrait de quercitron étendu d'eau; l’autre, une solution de bichromate de 834 potasse et de sulfate de cuivre. La résistance et l'exten- sibilité des filets sont augmentées. Le fil se putrélie moins aisément. Ce traitement revient au prix de 15 à 17 centimes par kilog de filet, Mais l'augmentation de durée à l'usage compensera-t-elle ces frais, c'est-ce que le travail de M. Huwart ne nous dit pas. Dans un deuxième article, M. Huwartétudie les bonnes conditions d'établissement d'une glacière à bord d'un bateau de pêche, ou à terre, et aussi des wagons réfri- gérants. Un troisième article est consacré à l'étude des désin- crustants pour les chaudières à vapeur. La conclusion qu'en tire l'auteur est le rejet de ces divers produits et leur remplacement par une épuration préalable de l'eau d'alimentation des chaudières, A. BRIOT, Chef des travaux de Zoologie à la Faculté des Sciences de Marseilles 4 Sciences médicales Boinet(E.), Agrégé des Facultés de Médecine, Pro- fesseur de Clinique médicale. — Les Doctrines médicales. Leur évolution. — 1 vol. in-18. (Prix : 3 fr. 50.) Z, Flammarion, éditeur, Paris, 1905, Ce livre fait partie de la Bibliothèque de Philosophie scientifique, qui comple déjà plusieurs volumes du plus puissant intérêt. Ce sont, pour la plupart, des ouvrages de haute vulgarisation. Leurs savants auteurs me pardonneront ce terme, parce que c'est une tâche très belle el généreuse que de vulgariser ce qu'on sait, ce qu'on à péniblement appris ou trouvé. Continé, d'ailleurs, dans un champ d’études infiniment petit et démesuré à la fois, le travailleur ne peut guère en sortir pour connaître les sciences voisines qu'en lisant des ouvrages élémentaires. Il n’est réservé qu'à de très rares esprits d'arriver d'emblée à la vulgarisation, tant ils sont simples, limpides et clairs. Et cela nous paraît ainsi à cause de leur puissance de généralisation, qui leur permet de négliger la langue technique spéciale à chaque science, langue si utile dans la pratique, mais qui, au fond, est un obstacle à la compréhension pour le profane. M. Boinet expose dans ce volume les doctrines médi- cales. Une doctrine, c'est ce que l’on tient pour vrai aujourd'hui, tout en sachant que ce sera faux demain. Cette acception s'applique mieux, peut-être, à la Méde- cine qu'à toute autre science. Elle implique une muta- bilité extrème. Elle fait que certains philosophes sourient quelquefois de cette sorte de science, qui change si souvent. Comme s'il pouvait en être autre- ment! N'étudie-t-elle pas la nature si changeante, variable et diverse, où les choses les plus similaires diffèrent tant entre elles? Un de nos maîtres très estimés aimait, en expliquant à ses élèves un cas de pathologie en apparence banal, à leur dire : « Regardez bien ce cas; vous ne l'avez jamais vu et vous ne le reverrez plus jamais ». C'est un bel adage de clinique médicale. Comme toute vérité, il déconcerte au début, il soutient dans l’action, il charme au déelin. Il ne faut donc pas s'étonner de trouver dans le livre de M. Boinet une succession de doctrines opposées et contradictoires, à la fois exclusives et indécises. De temps en temps s'en détachent des notions sûres, fixes et définitives. C'est ce cheminement lent, curieux par ses reculs et ses progrès alternatifs, ses écroulements et ses recommencements perpétuels, que le savant médecin à exposé avant d'arriver aux conceptions thérapeutiques actuelles. C’est là le but terminal de la Médecine. On verra dans cet excellent livre combien le chemin a été ardu, avec quelle peine on a obtenu les résultats dont nous bénéficions, quelle attention sou- tenue nécessitent les prescriptions de cette hygiène qui est l'idéal thérapeutique, puisqu'elle empêche ces maladies que nous sommes si souvent impuissants à guérir. Détail à signaler : le texte de M. Boinet est émaillé de citations nombreuses, expressions des meilleurs BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX esprits, judicieusement choisies et qui, loin d’alourdüm le discours, lui donnent, au contraire, un caractères élevé et font apprécier l'érudition souple et variée de l'auteur. Dr A. LÉTIENNE, ; 5° Sciences diverses lue (Louis), Docteur en droit. — La Falsification des. Boissons. (HISTOIRE, LÉGISLATION, JURISPRUDENCE EN FRANCE ET A L'ÉTRANGER.) — 1 vol. 1n-8° de 324 pages (Prix : 6 fr.) Chevalier et Rivière, éditeurs, Paris, 1905. À La question des falsifications est une de celles qui sont toujours d'actualité, et l'on s’est occupé de tout temps de réprimer les fraudes. Seulement, la sévérité de la répression a beaucoup varié avec les époques Antérieurement à 1789, on ne faisait aucune distinc… tion entre la falsification des marchandises et celle des monnaies, et l’on appliquait, ou l’on pouvait applis quer, les peines sévères qui frappaient les faux mon nayeurs à ceux qui fraudaient les boissons ou les ali ments. À cette rigueur extrème succéda une liberté presque absolue, La loi du 19-22 juillet 1791 rangea less falsifications dans la catégorie des délits contre la pro priété, et l’on put, dès lors, constater une recrudess cence de la falsification. On dut, pour l'arrêter, voter lan loi du 27 mars 4851, qui nous régit encore actuelle” ment. Un certain nombre de lois spéciales, concernant principalement les vins et les beurres, sont venues coms pléter la loi de 1851. Depuis 1895, un projet de loi sur la répression des fraudes est en discussion au Parle» ment. Dans ce projet, les législateurs ont visé le double but : 4° de codifier en une seule loi les prescriptions et les pénalités relatives aux diverses lois sur la falsifis cation; 2° d'accentuer la sévérité de la législation ans térieure, 1 Le but de l’auteur a été surtout de présenter unë étude d'ensemble sur la législation et la jurisprudence. actuelle. On peut en dégager les défauts de cette légis® lation, et quelques-uns ne manquent pas de gravités c'est ainsi que l'emploi des substances antiseptiquess condamné, d'une manière générale, par les hygiénistes, n'est pas prévu par les lois actuelles. De même, la lois qui atteint celui qui commet la fraude et celui qui vend le produit fraudé, est désarmée quand il s’agit de ceux qui vendent les produits divers destinés à frauders Ceux-là sont parmi les plus dangereux et les plus cous pables, parce qu'ils facilitent et répandent la fraude. La plupart des produits conservateurs, bonificateurs, etc# présentés aux négociants et industriels sous des noms de fantaisie, ne sont autres que les antiseptiques mis à l'index par les hygiénistes, et certains négociants hon= nêtes sont eux-mêmes les victimes de ces peu serupus leux industriels qui n’ont rien à redouter de la loi. Le livre de M. Hue, qui est surtout écrit pour les professionnels, peut donc intéresser les consommas teurs, c'est-à-dire tout le monde. X. RocQues, Chimiste expert des Tribunaux de la 4 Ancien chimiste principal du Laboratoire municipal de Paris. Léger (Louis), Membre de l'Institut. — Moscou (Les Villes d’Art célèbres). — 1 vol. petit in-4° illustr de 86 gravures. (Prix : 3 fr. 60.) H. Laurens, éditeurs Paris, 1905. Moscou est certainement une des villes les plus curieuses de l'Europe. Nul n'était plus qualifié pour] décrire que l’auteur de tant d'ouvrages remarquables sur le monde slave. M. Léger, qui a été chargé d missions à divers reprises, et qui dirigeait la Croisièr organisée en Russie, en 1897, par la /tevue générale des Sciences, à visité la cité sainte à diverses reprises! ses impressions de voyage, ses souvenirs personne ajoutent un piquant attrait à ce volume, édité avet beaucoup de goût par la maison Laurens, et qui com tient une véritable histoire de l’art russe. L. R: 1 | ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES one gs | Séance du 28 Août 1905. “0 SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. Darboux pré- Sente ses recherches sur une équation différentielle du quatrième ordre, que l’on peut ramener à une autre { du premier ordre, qui s'intègre à l'aide d'une méthode “qu'il a fait connaître autrefois. — M. Ed. Maillet com- nunique de nouveaux résullats qu'il a obtenus dans théorie des nombres trauscendants. — M. H. Des- dres a étudié les spectres ultra-violets de la couche enversante photographiés pendant l’éclipse totale du 28 mai 1900. Il a observé un spectre nouveau continu, létendant jusqu'à À— 3.000, et qui paraît semblable au spectre du titane dans l’étincelle électrique; il con- tient aussi les raies du vanadium. 20 SGIENCES PHYSIQUES. — M. A. Guébhard a constaté ‘que l'irradiation constitue une propriété de la matière ussi générale que la sensibilité photographique. — A. Turpain décrit une méthode propre à l'étude un phénomène lumineux d'intensité variable avec le temps, et l'applique à la détermination de la vitesse instantanée d'un miroir tournant et à l'étude de » Nétincelle de Hertz. — 3° SCIENCES NATURELLES. — MM. L. Léger et ©. Du- “bosceg ont observé de nouveaux végétaux parasites du tube digestif des Diplopodes, en particulier lArundi- nella capitata n. g. n. sp. Ils rangent cette forme avec “es Ecerina et les Enterobryus dans un nouveau groupe e Protophytes, les Eccrinides. — M. A. Guïlliermond fait l'étude cytologique des Cyanophycées ; il n'y a rencontré de véritable noyau, mais un organe écial, un réticulum chromatique, ressemblant au seau chromatique du noyau. — M. P. G. Charpen- er a constaté que le Slerigmatocystis nigra, cultivé r liquide Raulin, ne sécrète jamais d'acide oxalique ant de sporuler ; mais la sporulation n'agit qu'indi- mrectement sur cette sécrétion : c’est l'épuisement du milieu qui la produit. ; Séance du 4 Septembre 1905. —…._ 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. A. Demoulin pour- it ses recherches sur Les enveloppes de sphères dont les deux nappes se correspondent avec conservation des angles. — M. Loewy communique les observations e l’éclipse de Soleil du 30 août faites à l'Observatoire Paris. — M. J. Violle signale que les mesures acti- Mmométriques préparées en vue de l’éclipse du 30 août nont pas été favorisées par les circonstances atmo- MSphériques. — M. le Secrélaire perpétuel donne lecture le diverses dépêches et lettres relatives à l'observation l'éclipse de Soleil du 30 août. m2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. E. Mascart signale de louvelles études des alizés à diverses hauteurs, au oyen des cerfs-volants et ballons-sondes, faites sur lantique par MM. Clayton et Maurice. Le contre- izé a été retrouvé dans différentes régions. — M. Th. oureaux a observé, du 29 au 31 août, des troubles ez accusés du magnétisme terrestre, qui ont eu pour et de masquer en partie l'influence de l'éclipse Solaire du 30 sur les composantes du champ terrestre. = M. Piltschikoff a constaté que la polarisation du el est tombée à O pendant la phase de totalité de lipse du 30 août. — M. A. Guébhard estime que, ème en dehors de toute complication de halo, par seul fait de l'irradiation cuticulaire, l'image directe une ligne blanche présente, en spectroscopie, de imbreuses variations d'aspect, qui ont été attribuées autres causes et donné lieu aux hypothèses lès plus | 835 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER À ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS (| variées.— M.L. Guillet a trouvé, dans les alliages cuivre- aluminium, sept constituants différents : 1° solution ren- fermant de 0 à 8°/, d'Al; 2° CuAl ou solution solide ; 3°solution solide quine prend naissance que par trempe ; 4 solution solide contenant de 1% à 30 c°/, d'A; 5° AlCu; 6° AlCu; 7 aluminium presque pur. M. L. Guignard a constaté que les feuilles du Groseillier rouge commun contiennent, pendant toute leur vie, un composé fournissant de l'acide cyanhydrique. Les feuilles du Aibes aureum en renferment aussi. Les feuilles contiennent en même temps de l'émulsine. — M. M. Berthelot montre que la potasse des composés solubles contenus dans les eaux d'irrigation ou d'infil- tration ou provenant de la dissolution des engrais peut être fixée et rendue insoluble par les matières humiques du sol, dont les sels de potasse sont insolubles. Elle est ainsi emmagasinée temporairement. — MM. R. Lépine et Boulud ont constaté que l'acide glycuronique est en moindre proportion dans le sang de la jugulaire que dans le sang artériel. Les globules sont nécessaires à sa formation. — M. Ch. Porcher montre que toute hyperglycémie chez une femelle laitière aboutit non à de la glucosurie, mais à de la lactosurie. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. G. M. Murgoci conclut de ses recherches géologiques que la grande nappe de charriage des Carpathes méridionales s’est produite entre le Barrémien et le Cénomanien. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 13 Avril 4905 (fin). M. P. E. Shaw a amélioré le micromètre électrique qu'il a inventé précédemment et il décrit l'instrument sous sa forme définitive. Cet appareil peut être employé à la mesure des mouvements des diaphragmes télépho- niques, de la dilatation des divers métaux soumis à des variations de champ magnétique, de la distance de décharge de deux surfaces maintenues à deux poten- tiels différents, et enfin il peut servir comme cohéreur. — Le même auteur a mesuré l'amplitude du son impul- sif minimum perceptible à oreille dans un récepteur téléphonique ; il s’est servi pour cela de son micromètre électrique. I a trouvé une valeur de 0,7 uy avec un téléphone ordinaire dont la note fondamentale du diaphragme à une fréquence d'environ 580. Séance du 11 Mai (suite). Mie H. Chick : Etude d'un procédé de nitrification en rapport avec la purification des eaux d'égouts. Le procédé de nitrification pendant la purification des eaux d'égouts à été étudié au moyen de petits filtres expérimentaux établis dans les Instituts d'Hygiène de Vienne et de Munich. L'oxydation des eaux d’égouts passant à travers les filtres a été étudiée pendant la période de maturation et aussi lorsque les filtres étaient murs; l’auteur à fait une étude spéciale chimique de l'oxydation de Fazote, de la forme ammoniacale à celle de nitrites et nitrates, et de la distribution de ces pro- cessus à la fois dans le temps et dans l’espace. La nitri- fication a été attribuée à l'activité de deux séries d'organismes, dont là première oxyde l'ammoniaque en acide nitreux et la seconde complète l'oxydation jusqu'à l'acide nitrique. On a trouvé que ces bactéries différent seulement très légèrement de celles isolées du sol par Winogradsky, ce qui confirme les résultats récents de Schultz-Schultzenstein. L'activité de ces organismes dans les filtres d'eaux d’égouts, qui sont très sensibles à la présence d'une substance organique, demande une explication, et plusieurs ont été indiquées 836 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES en se basant sur les résultats expérimentaux. La théorie d'une absorption physique préalable de l’'ammoniaque sur la surface de la substance filtrante et d'une nitriti- cation subséquente ne se soutient pas à l'expérience ; on doit plutôt considérer la nitrification comme un procédé biologique très rapide, demandant seulement le temps pris par les eaux d’égouts pour s'écouler à travers le filtre. k Séance du 18 Mai 1905 (suite). M. G. H. Darwin montre l'analogie qui existe entre la théorie de la gravitation de Lesage et la répulsion de la lumière. En effet, le cas de l'absorption totale d'énergie par le choc est strictement analogue à la répulsion de la lumière, car l'émission de lumière peut être regardée comme l'inverse exact du mécanisme de Lesage. Les recherches de l’auteur montrent que deux sphères radiantes et complètement absorbantes à la même température se repoussent rigoureusement en raison inverse du carré de la distance de leurs centres. — Sir W. de W. Abney décrit un nouvel appareil pour la mesure de la coloration, dans lequel deux spectres sont produits par le même faisceau pas- sant au travers d'un collimateur et de deux prismes. Au moyen de cet appareil, deux taches distinctes de cou- leurs pures ou mélangées peuvent être placées côte à côte sur un écran blanc; et, en plaçant une série de QE fentes dans chaque spectre, on peut comparer des mélanges dans un spectre avec des mélanges dans l'autre, ou avec des couleurs pures et du blanc combi- nés. La quatrième sensation que Burch suppose exister dans le violet n'a pu être définie; dans l'opinion de l'auteur, elle n’est pas nécessaire. — M. J.-S. Edkins : Sur le mécanisme chimique de la sécrétion gastrique. Il est connu de longue date que l'introduction de cer- taines substances dans l'estomac provoque une sécrétion du suc gastrique. Cette sécrétion n’est nullement consi- dérée comme dépendant simplement de la stimulation mécanique de la membrane muqueuse. et on a pensé que le mécanisme nerveux des glandes gastriques peut être sensible à certain stimulant chimique local. Par analogie avec ce que Bayliss et Starling considèrent comme le mé- canisme de la sécrétion du sue pancréatique, il est pro- bable que, dans le processus d'absorption de la nourri- ture digérée dans l'estomac, une substance peut être séparée des cellules de la membrane muqueuse, laquelle, passant dans le sang ou la lymphe, stimule plus tard les cellules secrétoires de l'estomac à l’activité fonction- nelle. Les observations suivantes soutiennent cette idée : Si on injecte un extrait dans 5 °/, de dextrine de la membrane muqueuse fondique dans la veine jugulaire, on n'observe aucune secrétion du suc gastrique. Si l'extrait est fait avec la membrane muqueuse pylorique, une faible sécrétion se produit. Avec la dextrine seule, il n'y à pas de sécrétion. Des extraits de membrane muqueuse fondique dans le dextrose ou le maltose ne donnent pas de sécrétion; des extraits de membrane muqueuse pylorique produisent une sécrétion bien marquée; le dextrose ou le maltose seuls ne donnent aucune sécrétion. Si les extraits sont faits avec de la peptone commerciale, on trouve qu'aucune sécrétion ne se produit avec la membrane muqueuse fondique, tandis qu'on observe une sécrétion marquée avec la membrane muqueuse pylorique; la peptone seule donne une faible sécrétion. Si on prépare des extraits en faisant bouillir la membrane muqueuse dans les différents milieux, l'effet est exactement le même, c'est-à-dire, que le principe actif, qui peut être appelé « gastrine », n'est pas détruit par l’ébullition. Finale- ment, on peut faire remarquer qu'une absorption telle qu'elle se produit dans l'estomac a lieu apparem- ment dans l'extrémité pylorique. Avec l'estomac du porc, dans lequel la région cardiaque vraie diffère de la région fondique type en ayant seulement des glandes simples comme dans la pylorique, des extraits de la région cardiaque ont en général la même efficacité, favo- risant la sécrétion comme ceux de la région pylorique. Séance du 8 Juin 1905 (suite). M. J. Milne : Sur les observations [aites avec un pendule horizontal dans les régions antarcliques au cours de l'expédition de la Discovery. L'instrument été installé du 14 mars 1902 au 31 décembre 1903, d’abord sur un pilier en grès, puis sur une colonne en briques, par 16504443" de longitude E. et 77°50/50/! dem latitude Sud, à environ 24 kilomètres des monts Erebus et Terror. On a surtout enregistré les tremblements de terre au moyen de pellie ules séismographiques : 136 ont été notés pendant la période indiquée, dont aucun n'ayant son origine à moins de 80 kilomètres: Sur ce nombre, 73 ont pris naissance dans la région sous-océanique s'étendant entre la Nouvelle-Zélande e& la Discovery; quelques-uns ont été enregistrés à Cbristchurch et à Wellington, d’autres ont atteint Perth et même sont allés beaucoup plus loin. La plus grandé fréquence des tremblements de terre a eu lieu en avril, mai et juin, au commencement de l'hiver; c'esls la distribution déjà observée dans la plupart des con= trées. On a constaté que les tremblements de terres provenant de la région où était la Discovery se propa= ent plus rapidement dans la direction Nord-Ouest que dans toute autre. — Sir J. Dewar: Sur une Jonction therimo-électrique pour la détermination des basses températures. Etant donnés les inconvénients de l'emploi des thermomètres à gaz aux basses tempéra=« tures et l'impossibilité d'utiliser les (hermomètres à résistance de platine ou autre à 30° ou 40° du zéro absolu, l’auteur à essayé d'appliquer les jonctions ther mo- électriques à la mesure des très basses tempéra= tures. Un couple maillechort-platiné a été employés dans ce but. Des expériences préliminaires ont montré qu'un tel couple, avant d'être calibré, doit être soudai= nement refroidi dans l’air liquide, puis ramené rapide ment à la température ordinaire, et subir une opéras tion analogue dans l'hydrogène liquide; ensuite, Il n'éprouve plus d’altérations aux basses températures et donne des indications concordantes. Les observations" ont montré que ce thermo-couple peut être avantageu sement employé à la mesure des basses températures entre 15° au-dessus et au-dessous du point d ébullitio de l'hydrogène, en se servant des équations : | 1 | | = IT +85,8) et 9081 +oaur, 3 É où E est la force électro-motrice, € la rc absolue et T l'écart avec le point d'ébullition de l'hy= drogène (2095 abs.).—Sir J. Dewar : Z’xpériences avee des calorimètres à hydrogène et à air liquides. L'au= feur a employé l'hydrogène et l'air liquides comm liquides calorimétriques et en a profité pour détermi ner les chaleurs spécifiques du diamant, du graphit et de la glace aux basses températures. Voici le résumé de ses résultats : Chaleur spécifique. — 1880 à — 252%, 18e à —78 —78o À — {1880 Diamant. 0.079% 0,0190 0,0043 Graphite. . 0,134 0,0599 0,0133 Glace . . . . 0,463 0,285 0,146 On voit que, de la température ordinaire au poi d'ébullition de l'hydrogène, la chaleur spécifique d diamant est réduite au 1/19 et celle du graphite au 1/4 D'autre part, l’auteur a mesuré les chaleurs latentes di l'hydrogène, de l'azote et de l'oxygène à leurs point d'ébullition respectifs et il a obtenu les valeurs Su vantes : O, 51,15; Az, 50,4; H, 123,1. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. DIRECTEUR : $ 1. — Astronomie —… Les canaux de Mars. — Par suite des doutes émis dans ces derniers temps relativement à l'existence “réelle des canaux de Mars‘, on a cherché dans la pho- E ographie un aide pour résoudre les problèmes qui se rattachent à ce sujet. Les astronomes de l'Observatoire Lowell, à Flagstaff (Etats-Unis), se sont, depuis plusieurs “années, imposé la tâche de photographier ces canaux ; “inais les premières tentatives n’ont guère été heureuses. L: omme, toutefois, l'on croyait distinguer sur ces pho- miographies des traces confuses susceptibles d’être inter- mprétées comme représentant des canaux, ils ont pour- Suivi sans relâche ces intéressantes recherches. —…. Deux difficultés s’opposaient principalement à la muéussite de ces expériences : c'était, d'une part, la pré- -sence d'ondes atmosphériques variables, exerçant une | influence tantôt favorable, tantôt défavorable sur la Mbonne définition de détails aussi fins que le sont les | canaux ; d'autre part, la vitesse insuffisante des plaques “photographiques. Pour l'enregistrement de détails aussi | igus, l'œil l'emporte, en effet, de beaucoup sur la whambre photographique, en raison de sa plus grande Ls nsibilité de perception et de sa faculté de retenir des Phénomènes ne durant que la vingtième partie d'une Seconde. Tandis que, par conséqnent, l'œil peut saisir un moment d'apparition favorable, la chambre photo- aphique n’y parvient point, mais, en superposant les nnes impressions sur les mauvaises, ne donne qu'une image mixte et confuse des deux. M. Lowell à donc eu l'idée de faire construire une ambre photographique sur le modèle des appareils nématographiques ou bioscopiques, où, derrière un cran Wallace, on puisse prendre une série de vues “Successives avec une certaine chance d'obtenir, dans “le nombre, quelques-unes permettant vraiment de _ reconnaitre les canaux. — Un autre dispositif dont dépend le succès final de cette expérience consiste à munir l'objectif d'un diaphragme adapté aux courants atmosphériques régnant au moment de l'observation. Le surcroit de netteté de EE —————— Nr la Revue des 30 mars 1903, p. 529, et 30 août 1903, ! A REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 15 OCTOBRE 1905 Revue générale Sciences pures el appliquées LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE l'image compense de beaucoup le désavantage d’une pose prolongée. En se servant d’un dispositif pareil, M. Lowell a tout récemment réussi à obtenir des photographies bien nettes des canaux de Mars, photographies confirmant définitivement l’existence objective de ces derniers, en même temps qu'elles font voir l'efficacité de ces méthodes nouvelles, qui ne manqueront pas de rendre de grands services à l'Astronomie. Le détail de ces photographies concorde parfaitement avec les données des cartes astronomiques. $ 2. — Génie civil Les locomotives à gazoline. — En matière de chemins de fer, l'attention se tourne aujourd’hui sur un genre particulier de locomotives de très faible puissance, mais, néanmoins, susceptibles de rendre, dans certains cas, de très utiles services : les /ocomo- tives à gazoline où à pétrole, qui commencent à se répandre en Angleterre et en Allemagne. x Elles ont leur place tout indiquée dans les cas où il s’agit de remorquer occasionnellement de faibles charges, dontla manutention ne justifierait pas l'emploi d'une locomotive à vapeur constammentsous pression, avec un mécanicien spécialement attaché tout le temps à son service; rentrent dans ce cas nombre d’exploi- tations de carrières et de forêts. Ces locomotives peuvent aussi rendre service dans les manœuvres de gare de chemins de fer à voie étroite. Tel est le cas de la loco- motive construite par la Compagnie des automobiles Wolseley, pour le service des gares à voie de 0m,85, et dont la puissance est de 20 chevaux. Son moteur à gazoline, à deux cylindres de 150><180 mm. de course, marche à 600 tours et commande, par des transmis sions appropriées, deux essieux accouplés à roues de 460 millimètres. Ce mécanisme de commande, par deux chaînes avec embrayages à friction et changement de marche, permet de marcher à 5 et 13 kilomètres dans les deux sens. Le refroidissement des cylindres est effectué par une circulation d'eau prise par une pompe à un grand réservoir disposé de manière à donner à cette petite machine l'aspect d'une loco- motive à vapeur. La cheminée reçoit, ici, échappement 19 838 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE des gaz brûlés, et cet échappement maintient autour de la machine un courant d'air de refroidissement. L'approvisionnement de gazoline est de 45 litres, suffisant pour une marche de dix heures. Le poids total, èn charge, est de 2 tonnes 5. 3 Une autre locomotive à gazoline anglaise est plus puissante : 80 chevaux, à 450 tours de son moteur à 3 cylindres de 230 X 230 mm.; elle présente l'aspect bien connu des locomotives électriques qui circulent sur le chemin de fer d'Orléans. La mise en train de la machine principale est faite par un petit moteur auxiliaire de 8 chevaux. Cette locomotive à été cons- truite par la Maudsley Motor C°, de Coventry, pour desservir un petit embranchement reliant la ligne du London Brighton au marché à viandes de Depfort. Elle peut remorquer des trains de 50 tonnes en rampes modérées. Le refroidissement se fait par de l’eau refroidie dans un radiateur tubulaire à ventilateur, comme on en rencontre souvent sur les automobiles. Le poids en charge est de 11 tonnes. Cette locomotive circule avec la plus grande sécurité dans les rues de la ville, et a donné des résultats économiques très satisfaisants. On en construit, de ce type, jusqu'à 200 chevaux. En Allemagne, ces locomotives à gazoline commencent aussi à se répandre; l’une des principales usines de construction d'Allemagne, la Gasmotoren-Fabrik de Deutz, en a déjà livré près de deux cents, mais de faible puissance, ne dépassant guère une douzaine de chevaux, pour des exploitations de carrières et de forêts. L'idée de ces locomotives n'est pas nouvelle; elle est mème bien antérieure aux développements de l’automo- bilisme actuel, dont elle semblerait, a priori, la con- séquence, et les mécanismes qu’on y rencontré n'ont rien qui puisse étonner les ingénieurs au courant de l'automobilisme ; il y a lieu, néanmoins, de les signaler en raison de l'intérêt qu'elles pourraient présenter, en elles-mêmes, et pour les constructeurs à la recherche de débouchés nouveaux. Il est certain que ces locomo- tives répondent à des besoins déjà nombreux, et qui ne feront que se multiplier à mesure que le progrès de leur construction rendra leur marche plus économique encore, et plus simple, à la portée de tout homme intelligent. $ 3. — Météorologie Le Concours international de prévision du temps. — Le Concours international de prévision du temps!, organisé, à l'occasion de l'Exposition de Liége, par la Société belge d’Astronomie, de Météorologie et de Physique du Globe, s’est terminé le jeudi soir 28 sep- tembre. Le Jury a siégé trois jours, à l’Université de Liége, les 26, 27 et 28 septembre 1905, de 8 heures du matin à 7 ou 8 heures du soir. Etaient présents MM. Flamache, ingénieur en chef des Chemins de l'Etat Belge, vice-président de la Société belge d’Astronomie, qui a été choisi comme président du Jury ; Jacob, pré- sident de la Société; B. Brunhes, directeur de l’'Obser- vatoire du Puy-de-Dôme; Polis, directeur de l’Ob- servatoire d’Aix-la-Chapelle; Rotch, directeur de l'Observatoire de Blue Hill, près de Boston; Teisserenc de Bort, directeur de l'Observatoire de Trappes; Vin- cent, météorologiste à l'Observatoire Royal de Belgique, à Uccle. Le Jury a d'abord examiné l'épreuve préliminaire qui portait sur la période du 1‘ au 15 septembre 1905. Après cette épreuve, éliminatoire, 9 des concurrents, sur les 24 inscrits, avaient été convoqués à Liége; 7 ont répondu à la convocation. Il leur a été demandé d'établir la prévision de la carte des isobares du lendemain, sur sept journées prises au hasard dans des volumes de Bulletins météo- rologiques allant de 1880 à 1905. Le 28 septembre, ils ont dû établir la prévision pour le lendemain sur trois 4 Voir la Revue du 30 août 1905. prises dans des volumes tirés au sort, mais choisies dans ces volumes par le Jury de manière à présenter des situations exceptionnellement difficiles: A la suite de cette épreuve, trois des concurrents, jugés supérieurs, ont été invités à fournir verbalement, puis par écrit, des explications sur les méthodes em- ployées par eux, avec application aux cas particuliers qu'ils ont eus à traiter. A l'unanimité, le Jury à décerné le prix à M. Gabriel Guilbert, secrétaire de la Commission météorologique du Calvados, à Caen, à cause de la méthode qui lui permet de prévoir avec précision les déplacements et les variations des centres de haute et de basse pres- sion sur l'Europe : bien que cette méthode ne puisse encore donner une certitude absolue, elle a permis d'indiquer d'avance des changements complets de situa- tion qu'aucune autre méthode, jusqu'ici, n’a pu prévoir. Le Jury a tenu à marquer sa haute estime pour les travaux remarquables de M. Durand-Gréville sur les grains et l'heureuse application qu'il en a faite, en certains cas, à la prévision du temps du lendemain. Les mémoires et les explications fournis par tous les concurrents présentent, d’ailleurs, des remarques inté- ressantes, mais se rattachant,en général, aux méthodes déjà connues. Le Jury a décidé qu'il publierait un Rapport détaillé sur ses travaux eten a confié la rédaction à M. Brunhes. Ce rapport sera inséré dans le Bulletin de la Société belge d'Astronomie, de Météorologie et de Physique du Globe. $ 4. — Physique Nouveau procédé pour amorcer les forces au moyen de sons. — On sait que les réson- nateurs, ou corps avant des sons propres (à savoir les membränes, les cordes, etc.), se mettent à exécuter les vibrations correspondant au son en question aussitôt que ce dernier est rendu par quelque corps étranger placé à proximité. Même dans le cas où il y a une différence de hauteur entre les deux sons, l’on constate des vibrations, bien que d'amplitude moindre. Or, M. Michel, dans un récent travail‘, appelle l'at-\ tention sur un intéressant phénomène, caractéristique des seuls sons propres d'un résonnateur et qui ne peut ètre produit par aucun son différent. -Un disque léger, disposé à l'intérieur d'un réson- nateur acoustique, où il tourne à faible frottement autour d’un axe formant un angle oblique par rapport à l'axe longitudinal, se met à tourner aussitôt qu'on fait retentir le son susceptible d’exciter le résonnateur Cette rotation persiste aussi longtemps que dure ce son, à moins que la surface du disque ne vienne se placer à angle droit par rapport à l'axe longitudinal du réson=h nateur. : Or, ce phénomène pourra être utilisé dans bien desa cas où il s’agit d'amorcer des forces par des sons d'une» hauteur donnée. C'est ainsi qu'on peut se servir de lan rotation du disque pour fermer des courants électri= ques, aussi bien que pour les renforcer ou les affaiblir,s ou enfin pour les interrompre, le tout pour actionnen un moteur donné. Cette idée est illustrée par un dispositif imaginé pam M. Michel et qui comprend un disque léger portant un bras de levier relié à une pile galvanique. La rotation du disque est limitée par une fourchette fixée au fond du résonnateur et contre laquelle le disque est appuy par un ressort faible ou un aimant. Or, lorsqu'on jou d'un instrument quelconque, d’un piano, par exempl au voisinage de ce dispositif, le disque demeurera à repos jusqu'à ce que le son propre du résonnateu vienne à retentir. Il se mettra alors à tourner, tendan à placer sa surface verticalement à l'axe longitudinal du résonnateur. Dans ce mouvement, il viendra aps puyer contre une tige métallique reliée à l’autre bornes de la pile, pour rester dans cette position jusqu'à ces 1 Prometheus, n° 827, 1905. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 839 que le son caractéristique cesse d’être produit. Pendant ce temps, le courant étant fermé, l'on pourra effectuer un travail quelconque. L'effet acoustique en question peut ètre renforcé de beaucoup au moyen d'un tube “acoustique disposé devant la membrane du réson- nateur. $ 5. — Électricité industrielle Détermination des qualités magnétiques du fer. — M. Th. Bruger vient de construire un appa- | Fix. 4. — Vue en coupe de l'appareil pour la détermination des qualités magnétiques du fer. —F, barre de fer; R, bo- + bine magnétisante; L, spirale de bismuth; H, H, loquets * à ressort; J, cadre de fer doux. « “reil très intéressant pour l'examen des qualités magné- tiques du fer, appareil qu'exploite en ce moment la “maison Hartmann et Braun, de Francfort. Il consiste essentiellement (fig. 1) en un cadre de fer —douxJ dont les petits côtés sont perforés, afin de recevoir la tige de fer à essayer. Cette barre de fer F, de forme “cylindrique, est entourée d’une bobine magnétisante R résistance de la spirale de bismuth sous l'influence de différents courants magnétisants, c'est-à-dire qu'on Wie À a W; désignant la résistance du bismuth dans le champ florsque le circuit magné- tisant est fermé, W, cette résistance dans le champ à cireuit ouvert et sans les moitiés de la barre de fer. Sur la courbe ou graduation accompagnant l’appa- reil, on lit alors directement l'intensité du champ cor- WW, : : : ay el l’on peut établir une courbe 0 montrant la relation entre l'induction ainsi déterminée et la force magnéto-motrice pour le système entier. détermine la valeur respondant à Batt Al M ar “ si B . Gal AC œ Z ze / Chm @) 30 20 10 0 KS, REA Cr B S2 c ÿ | Gal Fig. 2.— Pont de Wheatstone pour la mesure de la variation de la résistance de la spirale de bismuth. La largeur de l'entrefer connue, on peut déduire sans peine une seconde courbe ayant seulement trait au fer du barreau qu'on examine. Pour des mesures exigeant une certaine précision, il faut tenir compte de la tem- pérature, qui influence les valeurs obtenues à l’aide de la spirale de bismuth. Il est donc bon de veiller à ce que le courant de mesure dans le pont soit aussi faible que possible, à ce qu'on ne le ferme que juste le temps nécessaire, et à ce qu'on ne ferme pas plus longtemps qu'il n’est besoin le circuit magnétisant, pour éviter Fig. 3. — Vue d'ensemble de l'appareil pour la détermination des qualités magnétiques du fer. etest interrompue en son milieu par une spirale plate de bismuth L, permettant de mesurer le flux magnétique existant en cet endroit. Les deux sections de la barre de fer sont serrées doucement contre les plaques pro- tectrices de la spirale de bismuth à l’aide de deux lôquets à ressort H, de sorte que l’entrefer ait toujours la mème largeur. On doit prendre soin que les barreaux d essayer passent à frottement doux à travers les deux trous percés au corps, et qu'ils offrent des bases bien planes. L'examen du fer se fait alors simplement en mesurant, à l'aide d’un pont de Wheatstone (fig. 2), la variation de l'échauffement de la spirale de bismuth pendant la mesure. Si la température, lors de la mesure, diffère quelque peu de celle qu'on obtient lors de l’étalonnement de la spirale, on peut recourir à la formule : WA =W a ( Ws ju [: : att—0], t —t désignant la différence entre les températures de mesure et d'étalonnement; «= 0,01#. L'appareilcomplet (fig. 3)combiné pour l'examen du fer Wr— W, Wo 840 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE etde ses qualités magnétiques contient, outre la spirale de bismuth, le cadre et la bobine magnétisante, un ampèremètre pour la détermination du courant.d’ai- mantalion, un pont et un galvanomètre. Le pont est arrangé pour permettre de lire directement, sur une graduation, les valeurs cherchées, et pour qu'une cor- rection éventuelle de température puisse tout de suite être mise en compte en faisant la mesure de résistance. Eu dehors de cela, on peut encore déterminer exacte- ment, par une mesure préalable, la température de la spirale de bismuth, et lire ce résultat sur une gradua- tion spéciale rouge. j Les constantes de l'appareil sont les suivantes nombre de tours de la bobine d'aimantation : 600; lar- geur de l’entrefer : Oum,5. $ 6. — Chimie physique Un nouveau corps radio-actif, le Radio-tho- rium.— Nos lecteurs n’ont point manqué de noter la brève allusion faite par Sir W. Ramsay, au cours de son récent article, à un nouveau corps radio-actif, le radio- thorium, dont on lui doit la découverte. En attendant l'exposé définitif de cette fructueuse recherche de l'illustre chimiste, nous sommes heureux de pouvoir donner déjà quelques indications provisoires sur cette découverte pleine de promesses, annoncée pour la pre- mière fois au monde savant lors du {dernier Congrès international de Radiologie. Au commencement de l’année 1904, un échantillon d'un minerai de Ceylan fut soumis à Sir W. Ramsay. La forme de ce minerai était apparemment cubique, sa densité était supérieure à 9; une expérience immédiate montra qu'il donnait 9 centimètres cubes d'hélium par gramme, alors que la clévéite n'en fournit que 2,5. Ce minéral était fortement radio-actif, et une analyse, faite par M. Dunstan, révéla un mélange de terres rares, dont l’oxyde de thorium formait les sept dixièmes, d'où le nom de thorranite qui lui fut donné. La forte radio-activité et la présence abondante de l'hélium devaient nécessairement inciter à traiter la tho- rianite en vue de l'extraction du radium, qui fut re- cherché par les procédés ordinaires. Mais alors apparut, dans des expériences conduites par M. Hahn, ce fait curieux et nouveau que, dans les cristallisations frac- tionnées qui furent entreprises, la radio-activité se massait dans les fractions extrèmes, alors que les parties moyennes étaient moins radio-actives. Les parties les moins solubles furent reconnues contenir du radium, tandis que les plus solubles renfermaient un autre corps radio-aclif, qui fut désigné sous le nom de radio-thorium. L'étude de ce corps conduisit à trouver que la radio- activité de son émanation diminue de moitié en cin- quante-cinq secondes, exactement comme pour celle du thorium ; la même égalité se retrouve pour les radio- activités induites, : Si l’on enveloppe de papier quelques milligrammes d'une forte préparation de radio-thorium, l'écran de sulfure de zinc placé dans son voisinage donne une seintillation comme celle du spintariscope. L'émanation qui s’en échappe s'élève dans l'air, et actionne un écran placé au-dessus, tandis qu'elle est sans effet sur un écran situé-plus bas. Cette émanation se comporte donc, à ce point de vue, comme celle de l’actinium de M. Debierne ou de l'émanium de M. Giesel, dont l’iden- tité avec l'actinium a été déjà mise en évidence par des expériences dont il a été rendu compte dans la Revue. Le pouvoir radio-actif du radio-thorium est environ un demi-million de fois plus élevé que celui du thorium. A l'électroscope, il parait deux fois moins actif que le radium; mais cette comparaison se rapporte aux rayons 6, dont Je radio-thorium est relativement moins riche que le radium. Sir W. Ramsay considère comme très probable la pro- duction de l'hélium de la thorianite par la décomposition du radio-thorium. L'hélium apparaîtrait ainsi comme le terme final de toutes les radio-activités. $ 7. — Sciences médicales La prophylaxie de la tuberculose à bord des navires de commerce. — M. J. Dupuy con-. seille‘ de ne pas accepter de tuberculeux sur les navires de commerce et, si on les accepte, de les isoler pendant la traversée, de munir tous les locaux de crachoirs, dem défendre de cracher par terre, bref, de prendre toutes les mesures de prophylaxie et de désinfection conve- nables. 11 en profite aussi pour demander, en ce qui concerne le personnel naviguant, une visite médicale très sérieuse pour les hommes et pour les officiers, des changements fréquents de linge, des lavages à grande eau, au lieu du balayage à sec, et enfin la désinfection totale des cabines, soit par l'acide sulfureux, soit par des vapeurs de formol, au moins à chaque changement d'occupant. | Ces idées sont excellentes et devraient être mises en pratique : elles ont, d'ailleurs, déjà été émises par M. J. Rochard, dans un Mémoire récent couronné par l’Académie de Médecine : les deux auteurs sont d'accord pour croire que de telles mesures feraient 4 À | | 1 | | | | il ane lan UE "2 disparaître pour ainsi dire totalement Ja tuberculose à bord des navires de commerce, qui paient certes, à ce fléau, un tribut plus grand qu'on ne pense. l’action bactéricide des peintures mu-,. rales. — Cette question à été très étudiée -en. Alle magne et’en Italie. Elle vient d'ètre mise au point, en France, par M. le D" Beaulils?. La technique des recherches (Peycke, Vito lo Bosco, Heimes, Jacobetz, Lydia Rabinowitch, etc.) est assez simple : sur des planchettes de bois ou sur des plaques de verre; on étend une couche de peinture et, sur celle-ci, une fois sèche, une culture de microbes. La plaque ainsi pré= parée est laissée au laboratoire, à l'abri de la poussière 3 puis, à des intervalles réguliers, on détache quelques colonies microbiennes qu'on ensemence sur un milieu approprié, ou qu'on inocule à des animaux. Une plaque témoin, c’est-à-dire non colorée, permet d'étudier l'action que la peinture exerce sur la vitalité et la virulence des microbes : cette action ést, en général nettement bactéricide, mais varie avec la nature de I couleur. C'est ainsi que les couleurs de porcelaine émaillée sont beaucoup plus actives que les couleurs à l'huile, notamment à l'égard du bacille de Koch; c'est ainsi également que le bleu d'outremer est plus actif que le gris et le marron, par exemple à l'égard du bacille pyocyanique. Mais, de toutes ces expériences, i faut retenir surtout, comme conclusion pratique, que les peintures émaiilées exercent une action bactéricidem très nette à l'égard du bacille de la tuberculose. | Mal perforant buccal dans le tabes. — Les tabétiques ne sont pas seulement exposés au mal per= forant plantaire ; ilexiste aussi un mal perforant buccal: Il s'agit toujours d’ulcérations profondes, intéressant non seulement les parties molles, mais les os voisin Ces accidents ont été considérés comme des {roubles trophiques consécutifs aux lésions nerveuses du tabes Mais, pour qu'ils se produisent, il paraît nécessaire que les régions où ils siègent soient exposées à des pressio longuement répétées. C'est ainsi que, pour le mal pe forant plantaire, le poids du corps et la pression dei chaussure semblent être la condition nécessaire deMk production de cet accident. M. Brissaud assure qu suffit de prescrire le repos au lit pour voir disparait les maux perforants plantaires. M. Pierre Marie a signalé comme cause capable de favoriser la production du perforant buccal le port d'un dentier, et tout spécial mentdes dentiers adhérents par succion. D'où la néces sité de défendre l'emploi de ces appareils aux tabés tiques. 1 Revue d'Hyg. et de Po!, sanit., 1905, n° 5, p. 309, ? Thèse de Paris, 1905. $ 8. — Géographie et Colonisation — La Situation économique de Madagascar. —— Le Journal ofliciel vient de publier le Rapport adressé par le général Galliéni au Ministre des Colonies sur l’état présent de notre grande île africaine. Ce document fait honneur à l'homme qui à su pacilier Madagascar, comme il l'avait fait auparavant du Tonkin. Nous laisserons de côté tout ce qui touche à l’organi- sation politique et administrative, aux questions si intéressantes d'instruction publique et d'assistance médicale, pour nous en tenir aux perspectives écono- miques du pays. Malgré ses 600.000 kilomètres carrés, l'ile ne compte que 2.600.000 habitants, d'après l’éva- uation officielle du 1° janvier 1905, et son caractère tropical ne se prête guère à la colonisation européenne, d'autant plus que les plateaux du centre, de climat plus clément, sont les régions les plus peuplées d'indigènes et les moins fertiles. Seuls les deltas et les terres basses bénéticient du limon que les pluies violentes arrachent aux régions élevées, partout où la forêt n'empêche pas l'érosion. C’est là que la culture du riz pourrait s'étendre. Si les débouchés limités des denrées coloniales et les droits de douane dont ces marchan- dises sont frappées à leur entrée en France n’encoura- gent pas beaucoup les planteurs à la culture de la canne à sucre, du caféier, des épices, il n’en serait pas de même du coton, si recherché aujourd'hui par les pays “industriels d'Europe, et auquel convient bien le climat alternatif des moussons. Le même avenir attend les exploitations de caoutchouc, ce précieux produit étant commun dans la bordure des forêts qui enserre le plateau intérieur sur une largeur de 40 à 100 kilo- mètres. Le sol médiocre de la plus grande partie de no se prête à l'élevage; jusqu'ici, ce sont les bèles à -cornes qui sont les plus nombreuses, particulièrement le zébu ou bœuf à bosse, que ‘l’on exporte dans les îles avoisinantes et jusque dans l'Afrique du Sud. D'autre _ part, la réussite d'essais de croisement du mouton in- digène avec diverses races européennes, ainsi que l'installation récente d'éleveurs australiens, permettent d'espérer un développement du bétail ovin, peu exigeant en fait de sol. Les nombreuses écoles professionnelles, très appré- ciées des indigènes, ne manqueront pas de contribuer à la création d'industries agricoles et textiles qui sont encore dans l'enfance. Quant aux richesses minières, elles sont encore mal connues: les métaux usuels, le er et le cuivre spécialement, paraissent être abondants, tandis que la houille serait peu commune. On croit “avoir trouvé ces temps derniers des terrains aurifères d'une grande valeur, mais voilà qu'au lieu de pouvoir “exploiter et continuer de nouvelles recherches, le Gou- vernement arrête tout, sous prétexte qu'il faut reviser Je régime minier. L'heure nous parait pour cela bien tardive; il importe donc de se hâter pour ne point dé- courager les chercheurs. La mème hâte dans l'établissement des voies de communication serait également désirable pour loules les entreprises, qu'elles soient minières ou agricoles. e n'est pas le cas malheureusement. La voie ferrée, commencée en 1900, qui doit aller de Aniverano, à 100 kilomètres au sud de Tamatave, vers Tananarive, ne sera pas achevée avant 1907 ou 1908 ; elle coûtera au moins 63 millions de francs, pour une longueur de “271 kilomètres, alors que les Anglais, dans des con- “ditions aussi défavorables, ont construit en moins de dix ans, avec 135 millions de francs, une ligne de 940 kilo- ètres, reliant le port de Mombase au lac Victoria- Nyanza. Voulant faire trop bien, en matière de travaux publics, nous n’avancons pas assez rapidement. 11 en est de même pour les quelques routes existantes, sauf cependant pour celle de Tananarive à Majunga, où le “général Galliéni a appliqué le principe des économies. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 841 Toutes ces voies restent bien insuffisantes, mais il ne faut pas oublier que nous sommes partis de rien; à notre arrivée, nous n'avions trouvé que des sentiers pour le transport à dos d'homme. Puis, l'œuvre poli- üque et administrative ayant pris des années, le dé- veloppement économique devait nécessairement s'en ressentir. Avant de terminer, nousvoulons encore attirer l'attention sur les droits quasi prohibitifs qui frappent les marchandises étrangères à leur entrée dans l'ile. Les sacrilices budgétaires consentis par la métropole méritent évidemment un privilège particulier, une cer- taine protection en faveur de ses marchandises; mais, si ce privilège est excessif, les droits de douane ne rapportent plus rien, et c'est la métropole qui doit combler les déficits du budget. D'autre part, les in- digènes paient les objets fort cher et en achètent moins; ils progressent moins vite dans la vie civilisée; le développement économique de la colonie s’en ressent, en même temps que l'industrie métropolitaine elle- même. Tout cela prouve que nous manquons d'ampleur dans nos vues, et c'est pourquoi quelques-uns de nos rivaux étrangers ont si peur de nous voir étendre nos possessions coloniales. L'intervention allemande au Maroc en est un exemple topique. P. Clerget, Professeur à l'Ecole de Commerce du Locle (Suisse). $ 9. — Enseignement L'organisation des études médicales. — Dans une circulaire adressée aux Recteurs, le Ministre de l'instruction publique soumet à l'examen des Facul- tés de Médecine la question de l’organisation des études médicales. Au cours de ces dernières années, cette organisation a été l’objet de vives critiques. La préparation scientifique des étudiants en méde- cine, qui, à la Faculté de Paris, a donné lieu cette année à de bruyantes manifestations, est assurée par des dispositions dont le Ministre estime le maintien néces- saire. Pourtant, dit la circulaire ministérielle, «il semble que la formation professionnelle des futurs médecins ne soit pas encore aussi complète et aussi pra- tique qu'on serait en droit de l’exiger ». Il faut reconnaître que le domaine des sciences médicales s’est tellement étendu et transformé, qu'il est difficile aux étudiants d'en explorer toutes les parties .dans l’espace de quelques années. Mais il est nécessaire, au moins, que les étudiants, avant d'exercer, aient acquis, avec un ensemble de connaissances solides et précises, le goût et l'habitude de l'observation. De cette facon, lorsqu'ils seront livrés à eux-mêmes et qu'ils seront obligés de prendre de graves responsabilités, ils sauront le faire avec décision et prudence. C'est donc dans l'application des enseignements à la pratique médicale, dans l’organisation des travaux pratiques et du stage hospitalier, que l’on devra rechercher les amé- liorations à introduire. Aussi c'est sur les points suivants que le Ministre attire l'attention des Facultés : 4° Répartition des enseignements entre les diverses années d’études médicales de facon à en mieux établir la coordination et à assurer l'instruction progressive des étudiants ; 2° Organisation plus complète, plus méthodique et plus efficace des travaux pratiques et du stage, de façon qu'il soit possible de tenir compte aux étudiants de la participation active qu ils y auront prise; 3° Régime des examens: y aurait-il lieu de conserver le régime actuel, ou bien de rétablir les examens de fin d'année, ou de les grouper à la fin de la seconde et de la quatrième année? Les résultats de cette enquête devront être transmis au Ministre avant le 1° janvier 1906. PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS . LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS Diverses réactions chimiques ne peuvent se produire qu'en présence de certaines substances qui se retrouvent inaltérées après la réaction. On a donné le nom de catalyse à ce mécanisme parti- culier, qui parut tout d'abord échapper aux condi- tions habituelles des phénomènes, et l'on désigne sous le nom de catalyseurs les substances spéciales dont le contact est utile ou indispensable pour provoquer les transformations chimiques, et qui n'y subissent, au moins en apparence, aucune modificalion. Les mélaux précieux, surtout le platine et les mélaux voisins, rhodium, osmium, palladium, ruthénium, iridium, employés sous forme divisée, à l'état spongieux ou pulvérulent, sont des agents classiques de catalyse. Ils sont particulièrement efficaces pour déterminer par leur présence beau- coup d'oxydations directes par l'air ou l'oxygène gazeux. Un fragment de mousse de platine, intro- duit à la température ordinaire dans un mélange d'hydrogène et d'oxygène, en provoque immédia- tement la combinaison brusque avec explosion. L'emploi de la mousse ou du noir de platine, portés à une tempéralure peu élevée, permet de réaliser l'oxydation directe de l'ammoniaque en acide azotique, celle de l’anhydride sulfureux en anhydride sulfurique, et cette dernière réaction est, depuis quelques années, l'objet d'une application industrielle assez étendue. Il permet aussi d'oxyder directement les alcooïs primaires en aldéhydes et acides correspondants. À côté de ces nombreuses réactions d'oxydalion, les métaux du platine peuvent également fournir certaines réactions importantes d'hydrogénation. Ainsi, la mousse de platine provoque, dès la tem- pérature ordinaire, l’action de l'hydrogène sur oxyde azoteux, donnant de l'eau et de l'azote: celle de l'hydrogène sur l'oxyde azotique ou sur le peroxyde d'azote, qui fournit de l’ammoniaque et de l’eau. La présence de platine divisé permet de réaliser très vite à 350° la production ‘d'acide iodhydrique à partir des éléments, réaction limitée qui, effectuée sans son secours, exige plusieurs Jours pour s'accomplir. Il y a une trentaine d'années, de Wilde avait cons- talé que, si l’on introduit à froid un peu de noir de platine dans une éprouvette contenant des volumes égaux d'acélylène CH? et d'hydrogène, ces deux gaz se combinent intégralement en donnant de l'éthylène C?H*; de la même façon, des volumes égaux d’éthylène et d'hydrogène se combinent en éthane CH. Nous pouvons citer aussi à l’aclif de ces mêmes métaux diverses réactions de dédoublement mole= culaïre. Ainsi le noir de rhodium décompose à froid l'acide formique en acide carbonique et hy=« drogène (Sainte-Claire-Deville ct Debray); il détruitm leshypochloritesalcalinsavec séparation d'oxygène. En dehors des catalyses d'oxydation, qui ont recu, depuis assez longtemps, des applications plus, ou moins importantes, ces diverses actions étaient demeurées des faits isolés, et, par suile, peu féconds, Pourtant, danslestravaux que j'ai poursuivis depuis plus de sept ans avec la collaboration de M. Sen-m derens, nous avons reconnu que les réactions d'hydrogénalion effectuées par la mousse ou le noir de platine sont bien plus nombreuses qu'on ne le pensait, et leur rôle comme calalyseurs aurait ainsi acquis beaucoup d'importance si nous n'avions découvert que divers mélaux communs, nickel, cobalt, fer, cuivre, employés à l’état divisé, sont d'ur emploi bien plus avantageux. Parmi ces métaux. deux sont particulièrement intéres- sants : ce sont le nickel et le cuivre, dont l'emploi nous a permis d'édifier des méthodes générales et très fécondes d'hydrogénation et de dédouble- ment moléculaire, applicables à une infinité des malières volatiles. | Dans ses grandes lignes, le principe de ces mé thodes est déjà connu. H Pour hydrogéner une matière organique volatile il suffit d'en diriger les vapeurs, entrainées par un excès d'hydrogène, sur une colonne de nickel, divisé, maintenue à une température convenable . la réuction a lieu sans que le métal soit modifié et elle se poursuit indéfiniment, tant qu'on con= tinue à envoyer sur le nickel le mélange d'hydro= gène et de substance. De même, si l’on dirige sur le nickel ou sur le. cuivre, à température définie, les vapeurs dé certains composés, ceux-ci subissent, au contact des métaux divisés, des dédoublements réguliers et, dans un grand nombre de cas, ceux-ci se pros duisent très longtemps, sans modification apparent des métaux catalyseurs. Tel est, dans sa simplicité, le schéma général des réactions; mais il importe d'appeler l'attention su un certain nombre de points importants. Ï. — CONDITIONS D'EMPLOI DES MÉTAUX CATALYSEURS S 1. — État des métaux. les mélaux catalyseurs interviennent dans le réactions par leurs surfaces; leur activité chi PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS 843 mique est donc proportionnelle à l'étendue de ces surfaces. Leur action utile ne pourra s'exercer avec avantages que si ces surfaces sont très étendues par rapport à leur masse. On savait déjà qu'une lame de platine agit fai- blement comme catalyseur, tandis que la mousse et surlout le noir de platine sont très efficaces. Il en est de même pour le nickel ou pour le cuivre. La limaille de ces métaux n'est qu'une poudre grossière, dont les fragments sont relativement volumineux : aussi ne montre-t-elle qu'une acti- vité médiocre. La poudre impalpable de cuivre qui sert pour la dorure en faux au vernis peut, au - contraire, donner d'excellents résultats. Mais les meilleurs sont obtenus en prenant les métaux sous la forme très divisée que fournit la réduc- - tion des oxydes, à température peu élevée, par l'hydrogène ou par l’oxyde de carbone. Plus basse à été la température de réduction, plus les grains du métal sont ténus, et, par suite, plus grande est l’activité du catalyseur obtenu. 5 Pratiquée au rouge, la réduction de l’oxyde fournit “ un métal très aggloméré el, par conséquent, très F paresseux. Dans l'usage ordinaire, nous effectuons vers 300° - la réduction du cuivre, en évitant que, par une rapidité excessive de l'hydrogène, le mélal formé — ne soit porté à l'incandescence. La réduction du - nickel est habituellement accomplie vers 350°. 1.4 $ 2. — Durée des catalyseurs. L'activité du métal catalyseur se maintiendra intégralement tant que la nature et l'étendue des surfaces utiles ne seront pas modifiées. Tout ce — qui altèrera dans une cerlaine mesure les surfaces … actives du métal en diminuera ou en supprimera —… la fonction utile, et ces altérations pourront être produites soit par des aclions chimiques, modi- —….fiant d'une facon permanente et définitive le métal superficiel, soit par des dépôts physiques de ma- tière, dont l'accumulation en couche un peu épaisse empêche le contact du catalyseur avec les vapeurs de la malière transformable. “ La présence detraces d'oxygène dansles réactions d'hydrogénation effectuées par le nickel ou le Le. agissant comme calalyseurs au-dessus de “150°, n'a aucun inconvénient parce que, dans ces ùÙ conditions de température, les oxydes de nickel ou de cuivre sont ramenés à l'état de métal ; il n'en Serait plus de même avec le cobalt ou le fer, mé- 3 taux dont les oxydes sont plus difficiles à réduire, et cette difficulté de réduction suffirait à elle seule ê pour écarter dans la pratique ces métaux, dont - l'emploi ne présente, d'ailleurs, aucun avantage. Au contraire, des traces de chlore, de brome, - d'iode, de soufre, d’arsenic, suffisent pour détruire | 1% En très rapidement l’activité catalytique du nickel ré- duit, parce qu'il se produit sur la surface de chaque grain mélallique une couche stable infiniment mince du composé métallique correspondant. Il est donc absolument nécessaire d'éviter la présence de ces matières, véritables poisons.pour le calalyseur. Il faut qu'elles n'arrivent au nickel, ni pendant la préparation de l'oxyde, ni pendant sa réduction, ni pendant l’action elle-même. L'oxyde de nickel sera produit de préférence à partir de l’azotale, et non pas à partir du sulfale ou du chlorure, qui pourraient y laisser une certaine dose de principe toxique, atténuant beaucoup son activité. L'hydrogène employé soit à réduire l’oxyde, soit à réaliser les hydrogénations doit nécessairement être purifié avec soin, et débarrassé de loutes traces d'acide chlorhydrique, d'hydrogène sulfuré ou arsénié. Enfin, les matières soumises à la cata- lyse doivent êlre employées suffisamment pures et ne pas contenir, même en très petite quantité, les impurelés dangereuses que nous avons énu- mérées. Le benzène du commerce, chargé de pro- duits thiophéniques, ne tarde pas à tuer le nickel catalyseur, et ne peut être pratiquement changé par hydrogénalion en cyclohexane. Du phénol, souillé de traces infinitésimales de brome, a refusé de s'hydrogéner sur le nickel, parce que ce dernier avait, à son contact, très rapidement perdu toute son activité hydrogé- nante. Cette sensibilité des métaux catalyseurs vis-à-vis de certaines substances fait nécessairement songer à celle que les ferments vivants manifestent vis-à- vis de quelques matières toxiques. Raulin a montré : 1 5 que, dans une liqueur contenant T.GU0-UU0 de ni- trate d'argent, l'Aspergillus niger ne peut vivre, et que la culture de cette moisissure est impossible à réaliser dans un vase d'argent, bien que les mé- thodes de l'analyse chimique ne puissent déceler, dans le liquide, la présence d'argent provenant du vase. L'assimilation du nickel catalyseur à un fer- ment vivant s'impose nécessairement à la pensée, non seulement par l'analogie du mécanisme des réactions accomplies, par l'influence pernicieuse de traces de matières toxiques, mais aussi par l'allure même du phénomène. Comme dans la vie des ferments figurés, on peut, dans l'activité des mélaux catalyseurs, distinguer trois périodes : une période initiale, une période normale, une période de déclin. Pendant la période initiale, généralement de courte durée, le ferment s’habitue à sa fonction : souvent, le nickel, trop fougueux, dépasse le but qu'on désire atteindre, et, au lieu de réaliser régu- lièrement l'hydrogénatiou des molécules, il peut 844 en disloquer quelques-unes en débris plus ou moins importants. La période normale est celle du fonctionnement régulier : elle peut durer très longtemps, et devrait être indéfiniment longue, si rien ne venait affaiblir l’activité du métal. Nous avons pu, au moyen du même nickel, réaliser pendant plus d'un mois l'hydrogénation du benzène ou celle du phénol, l'opération étant interrompue chaque soir, reprise le lendemain matin. Mais, quelque soin qu'on puisse apporter à la purification des substances ou de l'hydrogène em- ployé à les transformer, des traces infinilésimales de matières toxiques finissent par s'introduire et viennent peu à peu altérer les surfaces actives du métal. Souvent aussi de la réaction elle-même pourront provenir en petite quantité des matières peu ou point volatiles, solides charbonneux ou liquides goudronneux, qui demeurent sur le métal, diminuant le contact avec les matières transfor- mables et finissant même par le supprimer presque complètement. C'est à cet effet que correspond la période de déclin, où l’activité du catalyseur va toujours en s'affaissant, et qui aboutit, après un temps plus ou moins long, à la mort du ferment. La fonclion du métal catalyseur peut être, dans une certaine mesure, modifiée pendant celte période de déclin : l’intoxicalion partielle du ferment mi- néral peut supprimer certaines fonctions, tandis qu'elle permet l’accomplissement d'autres travaux plus faciles. Il y a, pour le ferment-mélal, certaines tâches plus particulièrement délicates, et qui ne peuvent être accomplies que par un ferment tout à fait sain. Notons, d'ailleurs, que le cuivre est beaucoup moins allérable que le nickel : son aclivilé régu- lière peut généralement être maintenue pendant un temps très long. den SO. — Température de la réaction. Lesactions provoquées par les métaux catalyseurs n'ont lieu qu'entre des limites définies de tempé- ralure et, par suite, elles réclament un réglage de cette dernière, sous peine de supprimer la réaction qu'on veut produire ou de la voir se modifier pro- fondément. Les hautes températures favorisent générale- ment les dédoublements moléculaires; aussi, dans les réactions d'hydrogénalion par addition, on a in- térêt à opérer à des températures aussi basses que possible. Ainsi, la naphtaline hydrogénée sur le nickel à 200° fournit seulement le tétrahydrure, tandis qu'à 175° on peut atteindre l'octohydrure (Leroux). À 300°, on aurait surtout produetion de méthane, issu de l'émietiement de la molécule. De PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉITAUX COMMUNS même, l’anthracène à 250° fournit seulement le tétrahydrure ; à températures plus basses, il donne l'octohydrure et même le duodécahydrure (God- chot). Nous donnerons plus loin d'autres exemples des: changements que la variation de température peut introduire dans le phénomène. IT. — MÉCANISME DE L'ACTION CATALYTIQUE DES MÉTAUX DIVISÉS. $ 1. — Théorie de la combinaison instable du métal avec un des constituants du système. On sait que le charbon de bois joue, dans diverses réactions chimiques, un rôle catalytique. Un fragment de charbon de bois, introduit dans un mélange d'oxygène et d’acide sulfhydrique, pro- voque la combinaison des deux gaz avec produc- tion d'eau et d’anhydride sulfureux. On a voulu en chercher la raison dans une condensation purement physique des gaz, l'absorption donnant lieu à une élévation de température capable de déterminer la combustion de l'hydrogène sulfuré. La même explication physique a été donnée pour l’action de la mousse de platine sur le mélange d'hydrogène et d'oxygène. Mais il resterait alors à expliquer pourquoi les gaz vont se comprimer dans les pores du charbon ou de la mousse de platine. Cette théorie physique à eu surtout comme effet facheux d'empêcher à peu près complètement la prévision rationnelle des réactions de catalyse. Pour ma part, je n'y ai jamais cru, et j'attribue en partie à la conception que je me faisais du phènomène le succès de mes recherches sur ce sujet. J'ai toujours pensé que le principe de l’activité catalytique des métaux divisés réside dans la for- mation d’une combinaison temporaire et superfi= cielle du métal avec l’un des constituants du sys= tème, soit que ce constiluant y existe à l'état libre, soit qu'il soit enlevé par le mélal à un corps dans lequel il se trouve engagé. Dans une multitude de cas, le nickel divisé est un agent efficace d'hydrogénation, parce que, placé dans une atmosphère d'hydrogène, il fixe ce gaz sur sa surface, et l’hydrure ainsi formé en couche mince réagil à température convenable sur les vapeurs arrivant à son contact : le mélal se lrouve régénéré, et engendre de nouveau l'hydrure. La réaction se continue indéfiniment de la même manière, lant qu'on envoie à la fois sur le métal de l'hydrogène et les vapeurs de la matière qui doit être hydrogénée. Le fer, le cobalt, le cuivre, le platine donnent lieu à des phénomènes de même nature. L'aptitude spécial du nickel à ce genre de réac= 1 PAUL SABATIER -— LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS 845 tions tient, sans doute, à ce que la combinaison temporaire de ce mélal avec l'hydrogène se fait et se défait très vite aux tempéralures utiles. . Ainsi donc, j'admets, comme cause de l’activité atalytique du nickel, sa combinaison temporaire, non seulement avec l'hydrogène, mais encore avec l'oxyde de carbone, avec l’ammoniac AzH*, voire même avec les éléments de l’eau H°0 : l'hydrure, le nickel-ammonium, l'hydrate, ainsi produits sont instables à toutes températures, et l'on ne peut les isoler à l'état visible; au contraire, la combinaison “avec l'oxyde de carbone, le nickel-carbonyle -Ni(CO)', également instable pour la plupart des températures, peut exceptionnellement subsister et êlre isolée au-dessous de 100° (Mond, Langer et Quincke). C'est à la combinaison instable du métal avec l'ammoniace qu'il faut attribuer les formalions d'amines secondaires ou tertiaires, qui accompa- gnent habituellement les amines primaires engen- drées normalement par action régulière. Au contact du nickel, on a: 2 AZH°R = AzIl* + AzHR° Amine primaire. Amine secondaire. 3 AZUR = 2 AzH° + Az. Amine primaire. Amine tertiaire. C'est ainsi que, dans l'hydrogénation de l’aniline, _ nous avons oblenu, à côté de la cyclohexylamine, terme régulier de la réaction, une quanlité lrès importante de dicyelohexylamine. C’est ainsi que, dans l'hydrogénation des nitriles sur le nickel ou sur le cuivre, nous avons recueilli non seulement l'amine primaire correspondante, _ mais encore les amines secondaire et lerliaire; et “il en est de même dans l'hydrogénation des oximes … (Mailhe). Cette théorie des phénomènes de catalyse n'est peut-être pas vraie : mais C'est guidé par elle que nous avons pu arriver à une multilude de consé- uences fécondes. Comme l’a fort bien dit M. Poin- caré, une théorie est bonne tant qu'elle est utile. J'ai jugé qu'il en était ainsi pour l'idée que je me | faisais de ce genre de réactions. + 2. —_ Diversité du rôle des métaux catalyseurs. L- La théorie que nous venons de développer con- duit immédiatement à prévoir la mulliplicité du rôle que les métaux catalyseurs peuvent jouer selon les conditions où ils se trouvent placés. … Par exemple, les métaux divisés devront, sui- want les conditions de milieu ou de température, réaliser soit des fixations, soit, au contraire, des enlèvements d'hydrogène. Si l'on fait passer de l’acétylène seul sur du nickel réduit, légèrement chauffé, le métal tend à fournir É ya. un hydrure instable aux dépens de l'hydrocarbure, et l’on a effectivement, avec incandescence, la réaction prépondérante (Moissan et Moureu) : CH? — 2C + H°. Il y a dépôt d’une grande quantité de charbon, l'hydrogène ainsi libéré pouvant, d’ailleurs, réagir sur une portion de l’acétylène pour l'hydrogéner. Une réaction analogue est fournie par l’éthylène à 300? : CH#—20C + 2H. Inversement, si l’on dirige à froid sur du nickel réduit un mélange d'acétylène et d'hydrogène en excès, on oblient lacombinaison régulière des deux gaz, et, selon leurs proportions, la production inté- grale soit d'éthylène, soit d'éthane, selon les for- mules : CH? + H?— CH, CHE 2H°— CH", et ces réaclions se produisent totalement sans aucune complicalion, sans aucun dépôt appréciable de charbon, dû à la destruction de l’acétylène ou de l'éthylène. Dans ce cas, l’hydrure temporaire de nickel:s'est formé exclusivement aux dépens de l'hydrogène libre, et nullement aux dépens de l'hydrogène engagé dans la molécule d’acétylène. Nous pouvons citer de nombreux exemples ana- logues. Quand on envoie sur du nickel réduit, maintenu entre 80° et 200°, des vapeurs de ben- zène, entrainées par un excès d'hydrogène, le benzèue se trouve totalement hydrogéné et changé en cyclohexane, selon la formule : CS EH CRE; C'est une préparation extrêmement aisée à accomplir. Mais il suffit de modifier la température pour que l’hydrure temporaire de nickel puisse se produire aisément à partir du cyclohexane. Des vapeurs de ce dernier corps, dirigées sur du nickel au-dessus de 260°, fournissent la réaction : CH = 3 H° + CONS. Il y a régénération de benzène ; mais l'hydrogène ainsi libéré réagit à son tour sur le benzène, pour donner du méthane, et c'est ce dernier gaz qui sera l'unique produit de la réaction d'hydrogénation du benzène par le nickel à 350. Voici un cas d'inversion, qui est parliculièrement fécond. Lorsqu'on dirige sur du nickel, au-dessous de 180°, des vapeurs d'aldéhyde ou d’acétone entrai- nées par un excès d'hydrogène, on oblient, sans aucune complication et avec un rendement excel- lent, la production de l'alcool correspondant : R.CO.R'+ 1°— R.CHOH.R'. 846 PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS Au contraire, si l'on fait passer sur du cuivre réduit, chauffé au-dessous de 300°, les vapeurs d’un alcool primaire ou secondaire, on a un dédouble- ment très net en hydrogène et aldéhyde ou acé- tone : R.CHOH.R!—H° +R.CO.R'": C'est la réalisation expérimentale très saisissante de la définition élémentaire des aldéhydes et des acétones : les aldéhydes sont des alcools déshy- drogénés. Le nickel, agissant seul sur les alcools primaires ou secondaires, tend à produire un dédoublement de même nature; mais il vient s'y joindre l’action spéciale que ce métal exerce sur les aldéhydes ou sur les acétones qui prennent naissance dans la réaction. Cetle action spéciale, peu importante avec les acétones, est, au contraire, aisée avec les aldé- hydes : le nickel leur enlève l'oxyde de carbone, selon la formule : R.CO.H — CO + RH. Dans ce dernier cas, la réaction se trouve réglée par la double tendance à la production des combi- naisons temporaires du métal avec l'hydrogène et avec l'oxyde de carbone. Cette inversion du phénomène, selon les condi- tions expérimentales où l'on se place, est certaine- ment l’une des principales causes de la fécondité merveilleuse des nouvelles méthodes. Un autre point non moins important est la pos- sibilité d'accomplir successivement des travaux variés, et de sérier pour ainsi dire les réaclions effecluées dans un même syslème ; on dispose pour cela de deux facteurs fondamentaux : la tempéra- ture et le choix du métal catalyseur. Nous avons déjà signalé l'influence énorme de la température, La nature du métal n’a pas moins d'importance. Les résultats changent beaucoup quand on subs- titue le cuivre au nickel, et, pour un même métal catalyseur, quand on modifie les conditions de sa préparalion. Le nickel, réduit lentement de son oxyde à tem- péralure basse au-dessous de 250°, possède une activité extrême, qui est favorable dans quelques cas, excessive dans un grand nombre. Il convient fort bien pour salurer d'hydrogène les hydrocar- bures, par exemple pour changer en carbures forméniques les carbures éthyléniques ou acétylé- niques, pour transformer le benzène en cyclohexane. I convient mal pour hydrogéner les phénols, l'ani- line, les dérivés nitrés, les nitriles, ete., parce que son action dépasse le but que l’on veut atteindre: Avec le phénol, il y a, à côté d’une production médiocre de cyclohexanol, formation abondante d’eau et de cyclohexane. L’aniline donne surtout, au lieu de la cyclohexylamine, du cyclohexane et de l’'ammoniaque. Le nitrobenzène fournit non pas l’aniline, mais la cyclohexylamine, et même du cyclohexane. Pour ces derniers travaux, il convient de se servir de nickel réduit vers 350°. L'expérience indique, dans chaque cas particulier, quel nickel doit être préféré. Il convient, d'ailleurs, de faire remarquer que les nickels trop actifs calment peu à peu leur ardeur excessive : ils ne tardent pas à vieillir et peuvent alors accomplir normalement leur fonction utile. Le cuivre est, dans tous les cas, moins actif que le nickel, et, je l’ai déjà signalé, beaucoup moins sujet aux influences nocives. Il est aussi moins influencé par la température de réduction. Toute fois, il y a une assez grande différence, au point de vue de l'activité catalytique, entre le mélal rouge orangé, préparé par une réduction rapide avec incandescence, et le métal brun violacé, que fournit la réduction effectuée à température peu élevée. Ce dernier, quand il est jeune, agit parfois trop vio-. lemment; par exemple, à 300°, il donne avec le métaméthyleyclohexanol, non pas seulement Île dédoublement régulier en métaméthyleyelohexa- none et hydrogène, mais aussi, dans une proportion plus ou moins imporlante, la scission de l'alcool en eau et méthyleyclohexène. Toutefois, ici encore, le vieillissement du métal ramène la régularité de fonction. Le cuivre est, d’ailleurs, incapable d'effectuer cer= tains travaux, qui sont facilement accomplis par les nickel : ainsi il ne peut changer les oxydes du car- bone en méthane, il ne peut non plus hydrogéner le noyau aromatique. Il est à peu près inapte à pros voquer l'élimination d'oxyde de carbone, qui est sim facilement réalisée par le nickel; et c’est là une« circonslance éminemment favorable, qui désigne le cuivre pour effectuer le dédoublement cataly= tique des alcools primaires en aldéhyde et hydro= gène. ï On conçoit, dès lors, que l'application des deux métaux à un même système conduise à des résuls tats fort dissemblables, et nous avons pu, avec M. Senderens, donner des exemples bien caracté= ristiques de ces différences. Le styrolène ou cinna mène doit être regardé comme étant du phényl éthylène : CHÉCH=ICRE L'hydrogénation, praliquéesurle nickel, s'adresse | à la fois à la branche éthylénique et au noyau aro matique, et l’on arrive intégralement à l'éthyley clohexane : CHHÉICHE CHE: Au contraire, l'hydrogénation, réalisée sur cuivre, ne produit aucun effet sur le noyau aroma- tique, mais a lieu sur la branche éthylénique : elle — fournit seulement l'éthylbenzène : G°H°.CH°. CH. De même, on sait que le limonène peut être représenté par la formule : Il possède deux doubles liaisons, l'une dans la branche latérale éthylénique, l’autre dans le noyau cyclique. L'hydrogénation sur le nickel les modifie l’une et l’autre, et donne le carbure cyclique saturé : 3 CH 3 610 4 CH®.C°H - CH É- CH$ identique à celui que fournit l'hydrogénation du paracymène. Au contraire, l'hydrogénation sur le cuivre n’atteint pas le noyau cyclique, et conduit seulement au carbure, isomère du menthène : 3 CI CH3.CSH°.CH£. NcH: x III. — RÉSULTATS OBTENUS. fl La catalyse par le nickel ou par le cuivre a déjà 4 permis d'obtenir un très grand nombre de ré- -sultats et je ne saurais songer à en donner l'énuméralion, et surtout le détail. Je devrai me borner à en faire une classification rapide. On peut diviser les réactions en deux grandes classes : réactions d'hydrogénalion et réactions de dédou- blement! { $ 1. — Réactions ordinaires d'hydrogénation. Les hydrogénalions eïñfectuées par la méthode directe de contact peuvent se séparer en deux groupes : les unes, que nous pourrions appeler les Aydrogénations banales, pouvaient déjà être accomplies par les méthodes anciennes, telles que zinc et acide chlorhydrique, amalgame de sodium el eau, sodium et alcool, acide iodhydrique con- cenlré employé en tube scellé à températures plus Ou moins hautes. Le nickel et le cuivre conviennent habituellement tous les deux pour ce genre de réactions. La subs- itution de la nouvelle méthode aux anciens pro- “cédés ne présente ici d'intérêt que si elle fournit à résultats plus avantageux, ou si elle conduit à des résultats différents. 1 4 PAUL SABATIER €t SENDERENS : Ann. de Ch. et de Phys. (S), “LIN, p. 319 à 488, 1905. — Pau Sasarier : Conférence faite “à la Soc. chimique de Paris, 48 février 1905. É PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS 847 En réalité, dans l’immense majorité des cas, elle devra être préférée, parce que sa mise en œuvre est très aisée, et qu’elle conduit généralement à des rendements utiles extrêmement élevés. Avec un outillage très simple, quelques grammes de nickel ou de cuivre, qui peuvent servir long- temps, suffisent pour lransformer une grande quan- tité de substance, pourvu que l’on ait soin de bien purifier l'hydrogène employé pour la réaction. L'opération est très facile à conduire; elle est con- tinue, et n'exige presque aucune surveillance. Je crois qu’en appliquant la nouvelle méthode d'hydrogénation directe sur le nickel, aucun chi- misle ne regrettera les tubes scellés à acide iodhy- drique, cel outil ingénieux qui a rendu bien des services, mais dont le maniement était si pénible et même si dangereux, donnant lieu trop fréquem- ment à de terribles accidents. D'ailleurs, dans l’hydrogénalion par les mélaux, les rendements sont d'ordinaire très importants, parce que les réactions sont simples, et ne fournis- sent habituellement aucun produit accessoire, à côté de la matière principale que l’on veut former. Celle-ci est généralement alteinte très vite à l'état de pureté. L'hydrogénation direcle des carbures éthylé- niques ou acélyléniques sur le nickel est extrême- ment aisée à réaliser; elle a lieu totalement sans aucune complication accessoire, et elle constitue un moyen facile de produire les carbures forméniques correspondants. La suppression des liaisons éthy- léniques ou acélyléniques est l’un des travaux qui sont le plus facilement accomplis par le nickel : la réaction a lieu plus vite que d’autres travaux, tels que la fixalion d'hydrogène sur une aldéhyde ou une acétone, et il en résulte qu'en hydrogénant rapidement une aldéhyde ou une acélone possédant des liaisons éthyléniques, on arrive à supprimer ces dernières sans altérer la fonction de la molécule. C'est ainsi que nous avons pu changer l'aldéhyde acrylique CH° : CH.COH, en aldéhyde propionique CH°.CH°.CCH, et ce n’est que par une hydrogéna- tion plus prolongée que celle-ci conduit à l'alcool propylique. M. Darzens, plus récemment MM. Haller et Mar- line ont lrouvé des résullats analogues dans l’hy- drogénalion ménagée d’acétones incomplètes. Le nickel ou le cuivre permetlent de réaliser commodément la réduction des dérivés nitrés, qui, avec un réglage convenable de la réaction, sont changés régulièrement en dérivés aminés corres- pondants : une préparation industrielle de l’aniline peut être basée sur l'hydrogénalion du nitrobenzène en présence du cuivre à 300°, et le procédé, qui pré- sente, sur les méthodes actuelles par voie humide, l'avantage d'être continu, est très peu coùleux si l’on 848 PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS remplace l'hydrogène par le gaz à l'eau, mélange d'hydrogène et d'oxyde de carbone, qui convient tout aussi bien pour effectuer la réaction. La transformation des aldéhydes ou des acétones en alcools correspondants peut être effectuée faci- lement par l'hydrogénation direcle sur le nickel, et, contrairement à la méthode habituellement suivie avecl’amalgame de sodium et l'eau, ilne se produit aucune réaction secondaire appréciable : le rende- ment est extraordinairement élevé. Tous les chi- mistes savent combien il est pénible d'arriver à l'alcool isopropylique à partir de l’acétone ordi- naire, parce que, dans le mode ancien de prépara- tion, les produits accessoires, matières condensées, pinacone, sont très abondants, et l'alcool isopropy- lique, obtenu en solution aqueuse, n'en est séparé qu'avec une certaine difficulté. Sur le nickel, l'hy- drogénation de l’acétone a lieu avec une facilité merveilleuse : nous avons eu du premier coup un liquide commençant à bouillir à 79°, et où la pro- portion d'alcool dépassait 90 °/,, facile à séparer par une seule rectification de l'acétone non trans- formée. L'alcool isopropylique et, par suite, ies pro- duits isopropyliques sont ainsi préparés facilement et à un prix peu élevé. Parfois, l'un des avantages de l'hydrogénation par catalyse est, au contraire, la formation de produits secondaires intéressants, dont l'accès direct serait difficile. Ainsi l'hydrogénation directe du phénylacétylène C'H°.C = CH sur le cuivre donne, à côté d'une certaine proportion d'éthylbenzène, près de 50 °/, de diphénylbutane symétrique, carbure assez mal- aisé à produire par les méthodes habituelles. L'hydrogénation directe des nitriles R.CAz en présence du nickel ou du cuivre a lieu avec beau- coup de facilité; mais, à côté de l’amine primaire RCH°.AzH*, que fournissent seules les anciennes méthodes d'hydrogénation par voie humide, on obtient des quantités encore plus importantes d'amine secondaire (RCH°)AzH, et même d'amine tertiaire (RCI?)"Az, corps habituellement très diffi- ciles à préparer, et dont la formation, très aisée par cette voie, présente, pour celte raison, un intérêt tout spécial. De même, dans l'hydrogénation des oximes (Mailhe), les amines primaires sont toujours accom- pagnées de fortes proportions d'amines secon- daires. $ 2. — Réactions spéciales d’hydrogénation. A côlé des hydrogénations que peuvent accomplir tous les procédés, il y a, au contraire, celles qui ne peuvent être pratiquement réalisées que par la nou- velle méthode, et qui sont l'apanage exclusif des métaux catalyseurs. Tous les métaux cessent d'être efficaces; le cuivre, le platine divisés, qui pouvaient suffire à accomplir les travaux que nous venons de décrire, ne peuvent plus être employés. Il faut s'adresser au nickel ou, à son défaut, au cobalt, qui présente, avec une certaine alténuation, des apti= tudes analogues. Ce champ réservé de l’hydrogénation comprend deux cas principaux : 1° La transformation des oxydes du carbone en méthane : 2° L'hydrogénation du noyau aromatique. En présence du nickel au-dessus de 180°, l’oxyde de carbone subit une hydrogénation directe avec formalion exclusive d’eau et de méthane selon la formule : CO + 3 H° = H°0 + CH*. L'anhydride carbonique subit la même réaction au-dessus de 250° : CO? + 4H° = 2 H°?0 + CH, et cette transformation peut se poursuivre indéfini- ment à l’aide du même nickel, pourvu que l’anhy- dride carbonique et l'hydrogène arrivent à son contact suffisamment purs. - L'hydrogénation directe du noyau aromatique est l'œuvre capitale du nickel divisé. On sait avee quelle difficulté était jusqu'à présent réalisée celte hydrogénation. L'action de l'acide iodhydrique concentré sur le benzène, en tube scellé à 250, fournit non pas le cyclohexane, mais un isomère dû à une transposition moléculaire, le méthylpenta- méthylène, bouillant à 69°. Le même agent a pu toutefois fixer péniblement 6 H sur le loluène et sur quelques autres carbures homologues du benzène, en donnant les dérivés cyclohexaniques correspon- dants. Mais il échoue complètement sur les phénols, sur l’aniline, et ce n’est guère que dans le cas des acides aromatiques, acides benzoïque, toluiques, phtaliques, que l'addition de 6H sur le noyau à pu être pratiquement obtenue, soit par le tube scellé à acide iodhydrique, soil par l’amalgame de sodium et l’eau. L'emploi du nickel réduit, entre 80 et 200°, permet, de transformer très facilement le benzène C°HS en cyclohexane C'H® bouillant à 81°, et une réaction non moins aisée s'applique à tous les carbures homologues du benzène, toluène, xylènes, mési= tylène, cumène, eymène, ele., et les transforme en homologues du cyclohexane. Ces carbures, qui ne pouvaient être préparés que par voie de synthèses compliquées, ou devaient être relirés par des fracs tionnements très pénibles des pétroles de Bakou; sont done devenus d’un accès très facile. | Le phénol ordinaire se laisse également hydro géner sur le nickel sans difficulté, et fournit 1e AAA need FER CPU à he 6 En Me PARA RTS LT Mes A Me PDA ee ds PAUL SABATIER — LA CATALYSE PAR LES MÉTAUX COMMUNS 849 cyclohexanol C'H".0H. Nous avons pu de la même facon hydrogéner régulièrement les trois crésols et les xylénols (Sabatier et Mailhe), et la réaction a pu être appliquée avec le même succès au thymol et au carvacrol (Brunel). Nous avons également constaté que les diphénols subissent sur le nickel une hydrogénation normale du noyau; mais la réaction est ici fort pénible à poursuivre : elle doit être conduite avec une lenteur excessive, car il ne faut pas, sous peine d'atteindre le carbure avec départ d'eau, que la température s'élève notable- ment au-dessus de 200°, et, dans ces conäitions, la volatilité du diphénol est extrêmement réduite. Les éthers de phénols, anisol, méthyloxycrésols, etc., peuvent, comme les phénols, fixer 6H dans des con- ditions analogues. -L'hydrogénation sur le nickel a pu être fructueu- sement appliquée à l’aniline, qui a fourni la cyclo- hexylamine C'H"AzH*, accompagnée de dicyclo- hexylamine (C'H")AzH et de cyclohexylaniline C'H".AzH.C‘H°, qui proviennent du dédoublement partiel de l’amine primaire et n'avaient jamais été obtenues. Les homologues de l’aniline, loluidines, « mélhyl ou éthylanilines, se prêtent à la même fixation, et l'on arrive ainsi à obtenir, sans diffi- … culté, des substances encore inconnues, ou à peine entrevues à la suite de réactions très délicates. C'est précisément dans le cas où l'hydrogénation du noyau était réalisée par les anciens procédés que la nouvelle méthode échoue: je veux parler des acides aromatiques, et cet échec tient à ce que ces - acides altèrent le nickel, et suppriment ainsi très rapidement le facteur fondamental de la réaction. “ Mais, quand la matière hydrogénable n'exerce aucune action nocive sur le calalyseur, celui-ci exerce sûrement son action, et tend à fixer 6H sur chaque noyau aromatique : c’est ce qui a lieu dans les carbures polyphényliques, diphényle, diphényl- méthane (Eykmann). AR ts 6 te 7 ES ST “h À dar & + Cds à 4 F $ 3. — Réactions de dédoublement. j Nous avons dit antérieurement que les métaux 1 calalyseurs peuvent fréquemment réaliser des dé- A] doublements dans les molécules volatiles qui 4 arrivent à leur contact, parce qu'ils tendent à fixer “ iemporairement, en composés instables, de l’hy- … drogène, de l'ammoniaque, de l'oxyde de carbone, voire même de l’eau, arrachés à ces molécules. De … très nombreuses réactions se rattachent à ce méca- nisme, et je ne saurais les indiquer toutes ici. - L'une des plus importantes et des plus fécondes nest le dédoublement que le cuivre réduit exerce sur les alcools. Les vapeurs d’un alcool primaire dirigées sur du cuivre, maintenu entre 200 et 300°, se scindent régulièrement en hydrogène et aldéhyde : ce dernier corps se trouve ainsi produit sans aucune formation accessoire autre que des traces d'acétal. Le ren- dement est excellent et atteint du premier coup 15 °/,, le reste étant de l'alcool non transformé, facile à séparer par rectification, et pouvant de nouveau, rentrer dans la préparation. La méthode est extrèmement avanlageuse pour obtenir les aldéhydes propylique, isobutyrique, isoamylique. La même action du cuivre, appliquée vers 300° aux vapeurs d'unalcool secondaire, donne un dédou- blement non moins net en acétone et hydrogène : le cyclohexanol, les méthyleyclohexanols sont ainsi changés très facilement en cyclohexanone, méthyl- cyclohexanones, matières désormais faciles à atteindre, et qui peuvent être le point de départ d'une multitude de travaux. Dans les mêmes conditions, le cuivre agit sur les alcools tertiaires, pour les scinder en eau et carbure éthyiénique, et nous avons pu baser sur cette action comparée du cuivre à 300° un mode simple de dia- gnose des alcools primaires, secondaires et ter- tiaires. L'enlèvement d'hydrogène aux molécules sous l'influence des métaux coïncide fréquemment avec un émiettement plus ou moins avancé de ces molé- cules. Ainsi l'acètylène C?H°, agissant à chaud sur le nickel, se scinde en H, Cet CH—, et, si cette scission est effectuée en présence d'hydrogène abondant, les groupes CH donneront lieu à des groupes CH°, CH° et même à du méthane CH, et les résidus ainsi engendrés C, CH, CH°, CH*, pourront s'unir entre eux pour donner des carbures plus ou moins com- plexes, forméniques, cycloforméniques. Nous avons pu de la sorte obtenir, à partir de l’acétylène et de l'hydrogène, des carbures liquides qui, par leur aspect fluorescent, par leur odeur, par leur densité, par leur composition chimique, sont tout à fait semblables, selon les conditions de la réac- tion, soit aux pétroles de Pensylvanie, soit aux pétroles du Caucase, soit aux pétroles de Galicie ou de Roumanie, et ce résultat nous a permis d'édifier une théorie générale de la formation des pétroles naturels, qui présente, sur les théories antérieures, l'avantage de rendre compte des différences capi- tales qu'on y rencontre : aucune d'elles ne pouvait expliquer les pétroles russes ou cycloforméniques, puisque, avant nos expériences, la synthèse directe des carbures qui les constituent n'avait jamais été réalisée dans sa généralité. Le cobalt, le fer donnent lieu à des formations du même genre, mais le phé- nomène est différent dans le cas du cuivre. Quand ce métal divisé est chauffé dans un courant d'acéty- lène, on voit celui-ci s'arrêter à peu près complète- ment : le métal gonfle de plus en plus et finit par donner un hydrocarbure très léger, d'aspect anaio- gue à l'amadou, dans lequel le métal se trouve dif- 890 J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON fusé : nous l'avons nommé le cuprène, et nous pen- sons que sa conslitution est analogue à celle du carbure de même formule que produit la conden- sation du chlorure de benzyle, et dont la formule serait (C°H°CH)". Ces exemples suffisent pour montrer l’activité extraordinaire et si variée de ces agents nouveaux, si faciles à produire et si peu coûteux. On peut leur demander tour à tour de faire et de défaire une même substance, leur fonction se modifiant en ap- parence selon les conditions de température et de milieu. Le nickel et le cuivre se complètent heureu- sement: le nickel, incomparablement plus actif, seul capable d'effectuer certains travaux, tels que l’hy- drogénation du noyau aromatique, compense cette ardeur par une vulnérabilité excessive. Le cuivre, plus lent, plus paresseux, se fait pardonner sa LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN ÎJ. — CONSIDÉKATIONS GÉNÉRALES. Il n’est guère d'aéronaute, aujourd'hui, qui n'ait rapporté de ses voyages aériens quelques, clichés photographiques. Il existe, dans le commerce, une infinie variété d'appareils portatifs susceptibles d'être utilisés dans une nacelle, et la photographie en ballon libre ne présente pas de grandes difficul- tés. Le temps de pose est réduit le plus possible, en raison du mouvement de translation de, l’aéro- stat. IL convient aussi de se prémunir contre les effets de la rotation du ballon autour de son axe vertical ; cette rotation n'étant pas continue, l'opé- rateur choisit le moment où elle cesse ou change de sens. Somme toute, avec un peu d’habileté, on obtient des clichés très nets, et différentes publica- tions ont déjà reproduit de fort belles photogra- phies prises dans ces conditions”. Mais, au point de vue militaire, la photographie en ballon libre ne présente qu'un intérêt secon- daire. Sans doute, il arrivera que, dans une armée assiégeante par exemple, un aéronaute, profitant d'un vent favorable, tentera une ascension au- dessus de la place investie et rapportera des vues intéressantes des travaux et des armements de l'ennemi. Inversement, un ballon partant d’une ville assiégée pourra prendre au passage des pho- tographies des lignes d'investissement et en réex- ! De remarquables spécimens, dus à M. Boulade, de Lyon, ont été, en particulier, exposés en 1900 et ont valu à ‘auteur une médaille d'or. | M. Haller, à la Sorbonne, le 15 juin 1905. paresse par une résistance très grande aux in- fluences nocives. Grâce aux méthodes nouvelles basées sur l'em- ploi combiné de ces deux métaux, la préparation d’une multitude de substances est rendue facile : tout un chapitre important de la Chimie organique, celui des composés hydroaromatiques, dont l'abord était jusqu'à présent hérissé de difficultés, devient désormais aussi accessible que ceux des composés forméniques ou aromatiques. Le nickel et le cuivre catalyseurs ont pénétré dans plusieurs laboratoires français : ils y ont déjà fait œuvre ulile. J'ai l'espoir que l'exposé qui précède pourra contribuer, dans une certaine mesure, à en généraliser l'emploi. Paul Sabatier, Correspondant de l'Institut, Professeur à l'Université de Toulouse. D nc me mener mnt de à ITS un LE BALLON pédier les épreuves aux défenseurs par pigeons- voyageurs. Mais ce seront là des cas relativement rares, et, comme la photographie en ballon libre n’exige ni appareils ni procédés spéciaux, nous ne nous étendrons pas sur ce sujet. Dans les opérations militaires, le ballon est em- ployé normalement à l'éfal captif, comme un ob- servatoire élevé permettant de découvrir ce qu'on ne saurait voir au niveau du sol, de photographier les troupes ou les ouvrages que l'adversaire dissi- mule soigneusement derrière les bois ou les plis de terrain : c'est de cet emploi que nous nous oc= cuperons spécialement. Dans la guerre de campagne, les reconnaissances en ballon captif ont pour but de renseigner le commandement sur les positions de l'ennemi, sur ses mouvements, et plus particulièrement, une fois l’action engagée, sur les points de rassemblement" et l'importance des réserves. Dans la guerre de siège, on demandera au ballon de déterminer aussi exactement que possible l'emplacement des ou= vrages adverses, l’état d'avancement des travaux, l'armement des batteries. Dans les deux cas, si l’on fait usage de la photographie, on devra done chercher à oblenir non pas seulement des vues d'ensemble, mais des images détaillées. Or, le bal= lon, sous peine de courir des dangers immédiats; ne peut s’avancer trop près de l'ennemi; il doit s'en. ! Conférence faite au Laboratoire de Chimie organique dë VOYER — LES APPLICATIONS ru à je MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON 851 tenir d'autant plus éloigné que l'artillerie adverse est plus puissante : en général, on aura à photo- graphier des objets situés à 6, 7 et 8 kilomètres “du ballon. Si l'on réfléchit aux dimensions des dé- is que doit enregistrer la plaque sensible à de * pareilles distances‘, on conclut à la nécessité d'em- “ployer de puissants appareils téléphotographiques. - D'autre part, le ballon captif remue constam- ment sous l’action du vent, et la nacelle est sou- mise à des mouvements complexes. D'abord, elle articipe aux rabattements ou relèvements subis ar l’aérostat ; ensuite, elle peut prendre des mou- ements pendulaires, soit autour de la barre du “trapèze, soil même autour: d’un axe perpendicu- laire à cette barre. Elle décrit donc dans l’espace “une trajectoire fort compliquée à des vitesses très “variables. Pour que la netteté du cliché ne soit pas altérée par le déplacement relatif de l'image, il faut choisir l'instant où le mouvement de la nacelle “est aussi faible que possible, ce qui nécessite une Lhabitude très grande de l'observation en ballon, et, “en outre, opérer pendant un temps excessivement court. + En résumé, le problème qu'on est appelé à ré- soudre en ballon captif, pour les applications mili- taires, est celui de la téléphotographie instantanée. IE. — MÉTHODES ET INSTRUMENTS. . Pour obtenir l'image détaillée d'objets lointains, on peut songer à trois procédés : » 1° Agrandissement d'un cliché pris au moyen d’un appareil photographique ordinaire de 0",20 à 0=,30 de foyer; … 2% Emploi d'un télé-objectif; … 3° Emploi d'un appareil à long foyer. … La première de ces méthodes ne saurait, en géné- ral, conduire au but cherché. En effet, l'agrandis- sement d'une photographie peut bien révéler à œil des détails qui lui échappaient sur le cliché primitif; mais ce n'en est pas moins celui-ci qui a “dû les enregistrer, et un examen attentif au mi- Leroscope les eût fait découvrir aussi bien que épreuve agrandie. Or, les détails fournis par un _ ordinaire seront généralement insufti- nts. Un objectif déterminé ne peut donner l’image dislincte d'un objet qu'autant que cette image a . + " Un terrassement de 0,80 de hauteur, à la distance de S kilomètres, est vu sous un angle dont la tangente est de 1 e 10:000 Une tache plane formée par les terres remuées pour la construction d'une batterie, sur 20 mètres de profondeur par exemple, qu'on observe d'un ballon situé à 400 mètres dé hauteur et à $ kilomètres de distance, est vue sous un : 4l angle dont la tangente est de 5.000? °!C- des dimensions supérieures à une quantité donnée. On dit que l'objectif a une netteté de = de milli- mètre, par exemple, lorsque deux images ayant celte dimension sur le cliché, et distantes de la : des CE ss même quantité (5 de millim. peuvent être per- çues dislinctement et séparées l'une de l'autre (à la loupe ou au moyen d'un agrandissement). ; 1 Se Or, cette netteté de 30 de millimètre est à peu près celle qu'on oblient d'un bon appareil, et elle: reste sensiblement constante pour des objectifs dont la distance focale est comprise entre 0",20 et L mètre’. Donc un objectif de 1 mètre de foyer, qui donne une image cinq fois plus grande qu'un objectif de 0",20, enregistrera sur le cliché des dé- tails cinq fois plus petits. Considérons, par exemple, une ligne d'hommes occupant chacun une largeur de 0%,60 environ et séparés par des intervalles de 0,60. Si ces hommes sont à une distance de 8 kilomètres de l'appareil, chacun d’eux donnera, avec un Pa np 1 mètre de: foyer, une image d'une largeur de — de milli- = mètre; avec un GHjeenL de 0,20 de foyer, une image d’une largeur de & s de millimètre seulement. Donc, avec le premier te les hommes pourront être distingués les uns des autres sur le cliché; avec le second, ils ne le pourront pas, et les agran- dissements ne donneront jamais qu'une ligne con— tinue indistincte”. Si donc un appareil portatif ordinaire, léger et peu encombrant, peut rendre quelques services lorsqu'il s’agit d'obtenir des vues d’ensemble, il devient absolument insuffisant dès qu'on veut enregistrer des détails à longue distance. On peut alors songer à employer un {é/é-objectif. Ce genre d'appareil, tout en donnant une image agrandie, sera de dimensions relativement res- treintes et d'un maniement commode dans la nacelle. Malheureusement, le télé-objectif exige, pour produire des images suffisamment intenses, l'ad- mission d'une quantité de lumière beaucoup plus grande qu'un objectif simple et, par conséquent, une pose beaucoup plus longue : ce qui est un { Notice sur les résultats du concours d'objectifs à long foyer destinés au Service de l'Aérostation militaire, par le Chef de bataillon du génie Houdaille (Revue du Génie mili- taire, avril 1902). 3 La loi n'est pas aussi simple que nous l'avons supposé pour la facilité du raisonnement. En réalité, lorsqu'on com- pare des objectifs de distances focales différentes, on trouve | que la netteté n'est pas tout à fait constante, mais qu'elle diminue à mesure que la distance focale augmente, et le 852 J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON défaut capital en ballon. « On sait, en. effet", que, dans des instruments de ce genre, la quantité de lumière transmise est inversement proportionnelle au carré du grossissement. Ainsi, un télé-objectif constitué par un objectif de 200 millimètres, accouplé avec un système divergent grossissant cinq fois, donnera bien, avec un tirage de chambre très réduit, la même image qu'un objectif de 1 mètre de foyer; mais cette image sera vingt-cinq fois moins éclairée. Si nous l’oblenons en de 1 1.000 seconde, elle correspondra comme intensité à la même image obtenue en —=—— de seconde avec # 25.000 : un objectif ordinaire. Ce simple chiffre montre que, si l'emploi du télé-objectif est séduisant par la diminution des dimensions du bagage photogra- phique, il ne permet pas d'obtenir des images suf- fisamment intenses pour être perceptibles ». D'ailleurs, au point de vue même de l’enregis- trement des détails, le télé-objectif ne donnerait pas un résultat sensiblement meilleur que l'agran- dissement du cliché d'un appareil ordinaire. En effet, c’est bien là encore l’image fournie par l'ob- iectif qui se forme agrandie sur la plaque sensible; le système divergent n'y ajoute rien : or, cet objectif est à court foyer, si, comme on le suppose, l'ap- pareil est de dimensions restreintes. Ainsi, rejetant les télé-objectifs *, on a été conduit Commandant Houdaille représente la loi par la courbe ci- dessous fig. 1). L'avantage des gros objectifs est donc 80.000 & 70.000 = + D È s 1 SUR mu — À À | 1 À SE ë È À 49.009 | + L à DS 40 È x , 8 TER Sen : . 5 À È [2 1 À -$ 20.000 +— 4 à pes | à 10.000 & 2 100 200 300 400 500 600 700 800 SJ00 10007 Distance focale prineipale Fig. 1. — Représentation de la netteté d'un objeclif en fonction de la distance focale. diminué de ce fait, mais subsiste quand même, ainsi que le montre la courbe donnant la « puissance de définition », c'est-à-dire le quotient de la distance focale par la netteté, quotient qui représente la cotangente de l'angle sous-tendu par le plus petit objet perceptible. 1 Notice déjà citée du Commandant Houdaille (Revue du Génie, avril 1902). 2 Nous ne parlons pas de la longue-vue photographique {objectif associé à un système convergent), qui présenterait tous les inconvénients du télé-objectif, sans en avoir les avantages. à adopter les appareils à long foyer, malgré leur encombrement et leur défaut de commodité dans la nacelle du ballon. Les premiers essais qui, à notre connaissance, aient été tentés dans cette voie remontent à l’année 1887 et ont été exécutés à Grenoble par le Colonel du génie Allotte de la Füye. Cet officier a expéri-=M menté un appareil de 1 mètre de foyer, non seu- lement en ballon, mais aussi à terre, la région des Alpes se prêtant admirablement aux expériences de téléphotographie. C’est ainsi qu'il a obtenu, du sommet du Moucherotte, plusieurs vues de la ville de Grenoble remarquables par leur netteté et par la finesse des détails : la distance horizontale moyenne de l'appareil aux points visés était de 8 kilom. 500, et la différence de niveau de 1.700 mètres. Il a, de même, exécuté avec succès une reconnaissance de la frontière en avant de Briançon, en se plaçant sur des positions domi- nantes capables de donner des vues plongeantes sur les ouvrages italiens‘. En 1895, le Capitaine Bouttieaux (aujourd'hui commandant) reprit ces expériences en ballon et fit des essais comparatifs des télé-objectifs el des appa- reils à long foyer : il conclut à la supériorité de ces derniers et construisit le premier matériel télépho- tographique qui ait été employé d’une façon suivie dans le Service de l'Aérostation militaire. En 1899 et 1900, le Commandant Hirschauer et le Capitaine Pezet oblenaient avec ce matériel des résultats déjà très satisfaisants. Cependant, les objectifs employés ne répondaient pas encore parfaitement à toutes les conditions de la téléphotographie en ballon, et, suivant la conelu- sion du Capitaine Bouttieaux, « il n'existait pas d'appareil pouvant donner à la fois le grossissement convenable, le champ et l'instantanéité ». Aussi,» en 1900, sur la proposition du Commandant Hir= schauer, un concours d'objectifs à long foyer fut-il institué par le Ministère de la Guerre entre les, constructeurs français et étrangers. 4 Au point de vue militaire, le problème était ainsi posé : Enregistrer à la distance de 8 kilomètres un terrassement de 0",80 de hauteur; ce qui revenails à distinguer l'image d'un voyant de 0",5 placé à > mètres. Partant de cet énoncé, la Commission spécial chargée de l'étude de la question * précisa les cons ditions du concours. Les objectifs devaient avoin une distance focale comprise entre 0",60 et { mètre; être capables de séparer des détails d’une dimen sion inférieure à de la distance focale: 1 15.000 1 La téléphotographie en ballon, par M. V. BourmEaAux capitaine du génie (Revue de l'Aéronautique, 189%). 1 2 Cette Commission, présidée par le Chef de bataillon du J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON L'image obtenue sur le cliché, même par la lumière diffuse en hiver, devait être assez vigoureuse pour 1 10.000 de la distance focale fussent encore visibles à l'œil nu : cette condilion imposait, en fait, aux objectifs d'avoir une ouverture supérieure à F/10 et d’être très bien corrigés au point de vue de l’aplanétisme. Enfin, les objectifs devaient couvrir nettement le format 18 X 24. Seize objectifs furent présentés au concours; | huit répondirent aux conditions générales imposées que les détails dont la dimension atteignait Hé Lit. ÉD aux concurrents, et un classement définitif donna les résultats suivants : « Médaille d’or : M. Fleury-Hermagis, pour un objectifaplanétique de 4 mètre de foyer ouvert à F/9; « Médaille de vermeil : M. Voigtländer (M. Gau- mont, dépositaire), pour un objectif Cooktaylor de - 0",60 de foyer ouvert à F/9; > « Médaille d'argent : M. Krauss, pour un objectif « Zeiss-planar de 0",60 de foyer ouvert à F/8. « Les deux premiers objectifs furent achetés par l'Éablissement de Chalais et mis en service pendant les manœuvres d'aérostation du camp de Chälons en octobre 1901. Malgré le mauvais Lemps, ils ont fourni des résultats absolument remarquables et ont démontré que le problème posé de relever les détails d'une batterie située à 8 kilomètres éfait pratiquement résolu * ». Ainsi les appareils à long foyer sont ceux aux- quels on donne aujourd’hui la préférence pour la téléphotographie en ballon. Leur seul inconvénient — réside dans leur grande longueur: on l'éviterait - peutêtre en adoptant le système imaginé récem- ment par MM. Vautier-Dufour et Schaer”. Ce sys- tème consiste à réfléchir au moyen de deux miroirs le faisceau lumineux venant de l'objeclif et à le briser ainsi en trois troncons : la longueur de la chambre se trouve réduite au tiers de la distance focale. L'instrument construit par MM. Vautier- Dufour et Schaer a donné de bons résultats dans les Alpes; mais il n'a pas encore été expérimenté en ballon. Dans les appareils actuellement en service, l'objectif est fixé à une chambre noire d'une con- struction à la fois légère et solide. Cette chambre n'a pas de tirage : la mise au point serait, en effet, difficile à exécuter dans la nacelle, et, comme on RCE net F2 lent ET à nr TP génie Hirschauer, comprenait les Capitaines du génie Jar- dinet, Houdaille, Bouttieaux et Pezet. ! Notice déjà citée du Commandant Houdaille (Revue du Génie, avril 1902). Cette intéressante notice contient, en outre, les détails des essais effectués, l'exposé des méthodes de mesure employées et les résultats obtenus avec les différents objectifs. . * Bulletin de la Société Vaudoise des Sciences naturelles, n° 143, mars 1902, et Rev. gén. des Sc. du 15 mai 1903, p. 476. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, 899 n’a jamais à photographier que des objets très éloignés, elle peut sans inconvénient ètre faite une fois pour toutes et de facon que la plaque sensible soit située dans le plan focal principal de l'objectif. Cette opération a donc été effectuée au préalable, à terre, avec toute la précision possible, au moyen d'essais photographiques répétés jusqu'à ce qu'on ait obtenu le maximum de netteté!, La chambre est pourvue d’un viseur. Pour les plaques, on à choisi le format 18 X 24. On se sert, suivant l’éclairement et la nature du sol, soit de plaques ordinaires, soit de plaques orthochromatiques, avec ou sans écran jaune. Enfin, l'obturateur est un obturateur de plaque, c'est-à-dire un rideau à fente très étroile qui se déplace devant la plaque sensible : e’est le système qui a paru le plus commode pour obtenir les temps de pose excessivement réduits auxquels on est conduit en ballon. Une fois la photographie prise, il faut pouvoir la développer sur place et en tirer immédiatement une ou plusieurs épreuves : or, On n'aura pas toujours à sa portée un atelier de photographe. Une voiture-laboratoire est donc le complément in- dispensable d'une installation téléphotographique en campagne. Cette voiture renfermera tous les ingrédients nécessaires au développement, au fixage, au lavage des clichés, ainsi qu'au tirage des épreuves; elle servira en même temps au transport des appareils. III. — UTILISATION DES PHOTOGRAPIUES. Le mode d'utilisation des photographies prises en ballon captif diffère suivant le genre d'opéra- tions militaires auquel elles se rapportent. Dans la guerre de campagne, où il s’agit de dé- voiler les positions momentanées de troupes en mouvement, les renseignements fournis par la pho- tographie n'auront de valeur que s'ils sont transmis presque immédiatement au général en chef : il faut done pouvoir livrer une épreuve dans un temps très court. Or, les manipulations sont multiples et générale- ment longues : développement, lavage et séchage du cliché; tirage, virage, lavage et séchage de l'épreuve. Cependant, à la suite d'essais méthodi- ques effectués à l’Établissement de Chalais, on est arrivé à livrer une épreuve posilive sèche vingt minutes après que le ballon a été amené à terre. L'opération la plus longue, le séchage, a été rendue très rapide, grâce à l'emploi successif de l'alcool et de l’éther. 1 On arrive ainsi à mettre la plaque sensible, non pas au foyer lumineux, maïs au foyer chimique de l'objectif : cette méthode est donc préférable à celle de la glace dépolie. 195 854 J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON Il s'écoulera donc environ une demi-heure entre le moment où la photographie aura été prise dans la nacelle et celui où le général en chef pourra con- sulter l'épreuve. Dans ces conditions, les rensei- gnements qu'elle lui apportera n'auront rien perdu de leur actualité. Dans la guerre‘de siège, la rapidité des manipu- lations photographiques a moins d'importance : les détails fournis par les épreuves n’ont plus un ca- ractère momentané. Ce qu'elles montrent le plus souvent, ce ne sont plus des mouvements de troupes importants, qui sont rares dans ce genre d'opérations ; ce sont les batteries et les ouvrages construits par l'adversaire, ce sont les buts sur les- quels l'artillerie devra diriger son feu. Mais on a le plus grand intérêt à repérer ces buts aussi exacte- ment que possible, et ce n’est plus seulement à un examen attentif des épreuves qu'il faut se livrer : c'est à un véritable lever topographique. La photo- graphie donne une perspective du terrain et de ce qui s'y Lrouve : il s'agit donc de restituer cette per- spective de facon à reporter et à meltre en place sur le plan directeur tous les délails intéressants. Depuis les remarquables travaux du Colonel du génie Laussedat, c'est un problème bien connu que celui de la restitution des perspectives. Nous n'avons pas l'intention de trailer ici ce problème d’une facon complète : nous nous bornerons à in- diquer la méthode qui est actuellement usitée dans le Service de l’Aérostlation militaire. Tout d'abord, la position du ballon en plan doit être déterminée avec précision. Cette opéralion se fait très simplement au moyen de recoupements effectués par des observateurs placés à terre, et elle se fait au moment même où la photographie est prise, grâce à un signal convenu parti de la nacelle. C'est encore par des recoupements qu'on déter- mine la position des buts, el pour cela on se sert de deux photographies au moins, prises de deux stations différentes et suffisamment éloignées. Le problème se réduit dès lors à ceci : Au moyen de chacune des deux épreuves, tracer sur le plan di- recteur les azimuts des points intéressants qui y sont contenus. Tous les points qui se retrouveront sur les deux épreuves seront ainsi déterminés par l'intersection de deux droites issues des deux points de stationnement du ballon. La méthode, exposée dès 1864 par le Colonel Laussedat', exige que chaque épreuve contienne au moins un point de repère connu. De plus, elle suppose qu'au moment où l'appareil photographique fonclionne, son axe optique Oe ! Mémoire sur l'application de la photographie au lever des plans, par M. Laussedat, chef de: bataillon du génie (Mémorial de l'officier, du Génie, n° 17, année 186%). est horizontal (fix. 2) et qu’un des côtés AB du chàässis sur lequel est fixée la plaque sensible est. vertical. Dans ce cas, si l'on mène par le centre c de: l'épreuve une parallèle à AB, on obtient la trace: du plan vertical Ode qui passe par l'axe de l'ob- jectif et auquel on pourra rapporter les azimuts des différents points R, M... dont l’image se fait em D 15e En effet, le plan vertical qui passe par le centre O de l’objectif et par le point R, coupe la plaque suivant une verticale rget fait avec le plan Ode ur angle & qu'on peut évaluer. Cet angle dièdre est donné par la relation : dy _rs BAD Or, on peut mesurer rs sur l'épreuve, et d'autre part on connaît Oc, qui est la distance focale F de l'appareil. 7’ Reportons maintenant en d sur la carte (fig. 3) la projec- tion du centre de l'objectif (c'est-à-dire pratiquement la position de la nacelle du bal- lon). Il suffira que l'un des points R, dont l'image est re- trouvée sur l'épreuve, ait été relevé en z' par des opérations topographiques, pour qu'on puisse immédiatement tracer la direction 'X quireprésente sur le plan horizontal la trace du plan vertical passant par l'axe pr | | | | | | | b' Fig. 3. de l'objectif. Cela fait, on pourra tracer l'azimut" D'm! d’un point quelconque dont l'image est en m: En réalité, l'axe optique n'est jamais horizontal, PTE LR | puisque l'appareil, placé dans la nacelle du ballon, - est dirigé vers un point du sol. On peut, d'ailleurs, au prix d'une légère complication dans les opéra- tions géométriques, lenir compte de l'inclinaison de l'appareil *. Mais la construction très simple que nous venons d'exposer sera suffisante dans la plu- part des cas. Comme l’a fait remarquer le Comman- dant Hirschauer, « avec une altitude moyenne de J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON 855 400 mètres, une distance de 6.000 mètres, la ligne de visée fait avec l'horizontale un angle dont la {I tangente est à peine —; tous les points considérés, 15 repères el objectifs, sont forcément dans le voisi- nage l'un de l’autre et n’occupent sur la photogra- phie qu'une bande horizontale extrêmement étroite; l'erreur commise en supposant, pour la restitution, 1 Soient (fig. 4) : h l'altitude de la nacelle rapportée au plan horizontal passant par le point P sur lequel l'appareil est pointé; D la distance de ce point à la verticale menée par le centre O de l'objectif; A'B' la nouvelle position que prend la plaque photogra- phique AB lorsque l'axe optique quitte la position horizon- tale OG et prend la position OC! qui fait un angle I avec l'horizontale. On vient de voir que les plans azimutaux, pivotant autour de la verticale Op, coupent tous le plan AB suivant des N —r x SRE er EM lignes parallèles entre elles (verticales); ces mêmes plans verticaux coupent le plan A'B' suivant des lignes qui con- vergent au point L où la verticale Oh rencontre le plan A'B'. distance de ce point L au centre C' de l'épreuve est —-=tIgl ou CL=FX?. 1 D'autre part, sur l'épreuve, la trace du plan vertical qui ontient l'axe optique OC! passera Ne par le CEE C! é A!'B' du châssis, à la ut condition que ce “eôté reste même parallèle au plan vertical passant par l'axe optique, est-à-dire que l'appareil ne soit pas déversé. “On à donc tous les éléments nécessaires pour construire lépreuve A'B! la trace Lm! d'un plan azimutal passant un point quelconque dont l'image est reproduite en m! este à savoir comment on pourra mesurer, sur cette mème épreuve, l'angle & que fait le plan azimutal bLm! avec le plan LLC, D'après ce qui a élé dit plus haut, pq Pq. valeur Oc OUT ; mesurer pq et, par suite, déterminer x, si nous avons le moyen de tracer, sur l'épreuve A'B/, l'horizontale JK suivant laquelle se coupent les deux plans AB, A'B'. Or, la distance la tangente de cet angle & à pour nous pouvons donc S ES S s 2 -r de cette horizontale au centre de l'épreuve est donnée par la relation : I C'p=Cp=E te" L'angle I étant toujours assez petit, on pourra admettre ue : ; CF tel—1F? sels E 5: La hauteur h n'a pas besoin d'être connue avec une grande précision : elle peut être déterminée, soit au moyen du baromètre, soit par des mesures d'angles effectuées{par les observateurs terrestres qui recoupent le ballon. Il y a lieu d'observer que À n’est pas la hauteur de la nacelle/au- dessus du point de stationnement, mais la différence de niveau entre la nacelle et le point du terrain P qui forme son image au centre de la plaque. 856 J. VOYER — LES APPLICATIONS MILITAIRES DE LA PHOTOGRAPHIE EN BALLON la photographie prise horizontalement, est insigni- fiante et d'un ordre moindre que celui des autres erreurs inhérentes au procédé ». Ë On a supposé aussi qu'au moment où la photo- graphie était prise, deux des côtés de Ja plaque étaient horizontaux. Or, cette condition est souvent difficile à réaliser en ballon, en raison des mouve- ments de la nacelle, et le plus souvent l'appareil est plus ou moins déversé. On remédie à ce déver- sement et l’on élimine la cause d'erreur qui en se- rait la conséquence, grâce à un niveau à mercure placé à l’intérieur de la chambre noire devant la plaque. Ce niveau, dû au Commandant Jardinet*, est une sorte de cadre rectangulaire en tubes de verre à moitié rempli de mercure. Lorsque l’appa- reil n’est pas déversé, le niveau du mercure est à mi-hauteur des deux côtés de la plaque; si l’on fait tourner l'appareil autour de son axe optique, le mercure monte d’un côlé, descend de l’autre, et la ligne qui joint les deux ménisques marque toujours l'horizontale. Or, le mercure forme son image sur la plaque sensible en mème temps que les objets extérieurs; on retrouve donc après coup cette image sur les épreuves, et l'on peut ainsi tracer la direclion des lignes de la plaque qui se trouvaient horizontales au moment où la photographie a été prise. C'est cette direction qu'on substitue à celle des côtés de l'épreuve dans les constructions géo- métriques. Enfin, il est facile de concevoir qu'un pareil tra- vail de topographie manquerail de précision, s’il était exécuté sur des épreuves ordinaires en papier; on sait, en effet, que les dimensions d'un papier varient de quantilés notables suivant son état hygrométrique. D'autre part, se servir du cliché lui-même serait imprudent, car l'épreuve négative est précieuse : elle n'existe qu'à un seul exemplaire, elle est fragile et ne peut être rem- placée; d’ailleurs, des traits, si fins qu'ils soient, tracés sur le cliché, pourraient masquer des détails intéressants. Aussi le Commandant Hirschauer préconise-t-il l'emploi de positifs sur verre, qui supprime tous ces inconvénients et qui possède, en outre, plu- sieurs avantages : d’abord, le grain de la gélatine des plaques sensibles est beaucoup plus fin que celui du papier; ensuite, on distingue mieux les détails par transparence que sur une image opaque. Grâce à tous ces perfectionnements, la télépho- tographie en ballon, appliquée au repérage des 1 Le Commandant Jardinet à imaginé ce niveau à l’occa- sion d'opérations topographiques effectuées au moyen de la photographie à Madagascar. buts, donne aujourd'hui d'excellents résultats, et l’on arrive à déterminer les positions des batteries adverses dans des limites d'erreur notablement inférieures aux écarls probables des pièces d'ar- tillerie; une plus grande précision serait donc superflue. IV. — ConcLusIoN. En résumé, c'est surtout en ballon captif que les aérostiers militaires seront appelés à utiliser la photographie. Or, si l’on considère que la nacelle est soumise à des mouvements continuels et que, d’ailleurs, le ballon ne doit pas s'approcher à moins de plusieurs kilomètres de l'ennemi, on en conclut que les temps de pose devront être très réduits et que, pourtant, les clichés devront fournir des images nettes et détaillées d'objets lointains. Pour atteindre ce but, les appareils ordinaires de 0,20 à 0%,30 de foyer seraient insuffisants; les images qu'ils fourniraient, même agrandies après! coup, pécheraient par le manque de détails. D'autre part, les télé-objectifs exigeraient des temps de pose trop longs et ne donneraient pas, eux non. plus, des images suffisamment détaillées. Seuls appareils pourvus d'objectifs dont la dis- tance focale est comprise entre 0",60 et 1 mètre permettent d'obtenir le résultat cherché (au delà de 4 mètre, ils seraient trop lourds et trop diffi- ciles à manier dans une nacelle). Ces appareils peuvent êlre utilisés dans la guerre de campagne, à la condition que les ren- seignements fournis par la photographie soient livrés au commandement dans un temps très court; on a dû imaginer, à ceteffet, des procédés extra-rapides pour l'obtention des épreuves. Mais c'est surtout dans la gnerre de siège que les appareils à long foyer trouveront des applications fécondes; là, les perspectives obtenues par la pho= tographie serviront de base à un véritable lever topographique des ouvrages de l'adversaire, e permettront à l'artillerie d'ouvrir son feu sur des buts qui, le plus souvent invisibles de terre, n'en auront pas moins été repérés à l'avance avet sûreté et exactitude. - En somme, le problème de la {é/éphotographié instantanée, qui s'imposait en aérostalion militaire a élé complètement résolu grâce aux efforts éclairés des officiers du génie qui se sont successivement occupés de la question, et aux perfectionnements méthodiques qu'ils ont introduits dans le maté= riel et dans son mode d'emploi. des J. Voyer, Capitaine du génie. D' A. TROUSSEAU -—— LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD 857 LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD Le 7 février 1900, le baron Adolphe de Rothschild succombait, laissant un testament aux termes du- quel serait construit à Paris un édifice destiné au traitement des maladies des yeux. Cet établisse- ment, largement doté, devait prendre le nom de Fondation Adolphe de Rothschild. M": la baronne de Rothschild accepta la mission nous étaient alloués, de remplir largement les intentions du testataire, qui voulait que les dispo- sitions qu'ilavait prises ne profitassent qu'aux seuls malades. La construction de l'hôpital fut donnée à deux architectes dont je ne saurais trop faire l'éloge, puisqu'ils ont admirablement compris le but à que lui confiait son mari, désireuse avant tout de fonder une œuvre modèle. Le testament me désignait comme devant pren- dre la direction de l'établissement; je n'hésilai pas à accepter la täche que le défunt me faisait l’hon- neur de me confier, laquelle eût incombé à l'illus- tre Desmarres si celui-ci avait survécu au dona- taire. Selon les idées souvent exprimées par le généreux fondateur, son œuvre devait rester absolument privée, pouvant, par cela même, rendre de plus grands services publics. De longues formalités retardèrent le commence- ment des travaux jusqu'en juillet 1902; mais nous étions seul maitre d'agir pratiquement et écono- miquement, de ne pas gaspiller les deniers qui remplir, qu'ils ont sacrifié toutes tendances acadé- miques, ont su se renfermer dans le programme tracé qui subordonnait les plans aux nécessités hospitalières lelles que pouvait les suggérer une longue pratique médicale. Ils ont accepté toutes les indicalions, toutes les idées du médecin-direc- teur, qu'ils ont mises au point avec une précision et une netteté remarquables. J'estime que MM. Chatenay et Rouyre retireront de leur œuvre autaut de gloire qu'ils en avaient, par avance, théoriquement abandonné en ne cé- dant pas aux habituelles tentations. Est-ce à dire que le monument soit dénué de tout intérêt architectural. On jugera par la photo- graphie ci-annexée (fig. 1) qu'il est loin d'en être ainsi. J'ai entendu qu'on lui reprochait de ne pas 858 D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD ressembler à un hôpital : mais M. le baron de Rothschild tenait essentiellement à ce qu’il n'eût pas l’a-pect rébarbatif, à ce qu'il se rapprochàt plus de la maison de campagne anglo-normande que de la prison ou de la gare de chemin de fer. Ses inten- tions ont donc été exactement remplies. Nous vou- lions tous de larges pièces, claires et aérées, de vastes dégagements, une utilisation pratique des intérieurs, tous les perfeclionnements du confort et de l'hygiène modernes : nous avons été servis à souhait. Pour ma part, je n'ai jamais compris que des ophtalmiques dussent être maintenus dans l’obscu- rilé; j'ai supprimé des services la classique cham- bre noire, si effrayante, si déprimante. Si l'œil a besoin d’obscurité, qu'on le protège seul contre les rayons lumineux, mais que le palient vive dans l'air, dans la lumière. Le côté lumineux de l'hôpi- tal ne sera pas sans surprendre quelques esprits imbus de classicisme. Les malades, les opérés vivront dans des pièces claires le jour; ils seront le soir éclairés par la lumière électrique et ne s’en porteront que mieux. I. — SITUATION DE LA FONDATION. Le fondateur désirait que la maison fût située autant que possible dans un quartier aéré, très campagne ; il fallait, d'autre part, qu'elle ne füt pas trop éloignée des centres populeux qu'elle devait assister. Un terrain fut donc acheté dont la façade se déploie sur ie parc même des Buttes-Chaumont. Il fait l'angle de la rue Manin et de la rue Priestley; de nombreux tramways, entre autres Saint-Augus- in — Cours de Vincennes, Pantin — Opéra, les nombreuses lignes qui passent par la Villette, y accèdent; le Métropolitain, par sa station de la rue d'Allemagne, le met en communication avec le cœur de Paris. Il est à une allitude de 80 mètres au-dessus du niveau de la mer. Sa surface est de 6.640 mètres. La surface de la construction élant de 2.082 mètres, il reste done, derrière le bâtiment, un jardin de 4.558 mètres, dans lequel les malades auront toute facilité pour se promener, s’abriter, se reposer. Les bâtiments sont orientés au nord-est sur le pare des Buttes-Chaumont, les parties sur le jardin regardant le sud-ouest. La salle d'opéralions est tournée directement au nord. II. — CONSTRUCTION. Le terrain sur lequel ont été édifiées les cons- tructions a nécessité de grands déblais: la nature du sol a obligé à la création de cent-quinze puits, reliés les uns aux autres au moyen de rigoles en béton et de chainages en fer. Au-dessus de ces puits etrigoles, la construction s'élève : pour les caves et le rez-de-chaussée en meulière apparente, pour le 1* et le 2° étage en pierre, moellon et brique, pour le 3° étage en pierre et brique; la couverture a été faile en tuiles de Bourgogne; des faïences ont été placées pour égayer l'aspect extérieur du mo- nument. Tous les planchers sont en fer hourdés au moyen du système Mantel. L’écoulement des eaux est assuré par le « tout à l'égout ». Il n'existe pas d'égouts dans le monu- ment; toutes les eaux se déversent par des bran- chements spéciaux dans une canalisation centrale, qui se déverse elle-même dans les égouts de la ville. Toutes les canalisations, tous les appareils sont siphonés de façon à éviter les émanations. La ventilation est assurée pour chaque pièce au moyen de gaines ménagées dans l'épaisseur des murs entrainant l'air vicié à la partie haute des pièces; dans chaque pièce, l'air est renouvelé deux fois par heure. Toutes les gaines débouchant sous le comble viennent aboutir à des chambres d'appel surmontées d’un lanterneau expulsant à l'extérieur l'air vicié. L'évacuation de l'air usé étant assurée, l'introduction de l'air pur se fait par des grilles de prises d'air placées sur les murs extérieurs. Cet air pénètre dans les pièces par une ouverture, au droit des radiateurs, munie d'un registre permettant le réglage et le débit; l'air pur s'échauffe en hiver au contact des radiateurs et entre, en été, au degré de la température du dehors. Le système de chaufage employé est celui de la vapeur à très basse pression, système Pommier et, Delaporle. La vapeur est fournie par deux chau= dières placées dans des fosses facilement acces- sibles. Suivant la température extérieure, le service est assuré par un ou deux chargements journaliers: Toutes les pièces sont chauffées au moyen de radia= teurs en fonte lisse permettant un nettoyage facile,. munis d’un volant réglant l'admission ou la sup= pression de la vapeur: l'indépendance de chaque radiateur et de chaque pièce esl absolue. Avec — 6°, la température des salles de malades doit atteindre + 18", celle de la salle d'opération + 25%: L'établissement est entièrement éclairé à l'élec tricilé, laquelle est fournie par une usine construite en ciment armé, placée sous le jardin; elle peu alimenter 750 lampes.Une canalisalion spéciale élé établie pour donner le courant aux Services d'électrothérapie et de chirurgie électrique. j L'usine génératrice est composee de deux groupes électrogènes, comprenant chacun un moteur à gaz de ville, construction Crossley, de 25 chevaux, eb une dynamo Labour, capable de débiter 145 am pères sous 115 volts et de donner une force électro” D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD 839 motrice de 160 volts pour la charge des accumula- teurs. La batterie d’accumulateurs est de 66 éléments et d'une capacité de 600 ampère-heures, du type de la Société pour le travail électrique des métaux. Ælle assure les services spéciaux et de nuit; elle vient en aide aux machines à certains moments plus particulièrement chargés. Le moteur à gaz de ville a été choisi de préfé- rence, en raison de l’ensemble des qualités qu'il présente actuellement sur les systèmes qui peuvent lui être opposés : la sécurité de fonctionnement, la simplicité de mise en route et d'entretien, l’écono- mie, le peu d'encombrement, la propreté. Les moleurs sont munis d'un appareil de mise en marche automatique; ils sont à 3 paliers et avec fort volant équilibré. La commande des machines dynamos généra- trices se fait directement par courroie. Ces machines sont à excilation dérivée, avec rhéostat de champ, et montées sur rails permettant la tension facile de la courroie. L'ensemble des manœuvres électriques se fait au moyen d'un tableau général de permutation et de distribution. Ce tableau, en marbre blanc, comporte trois panneaux : 1° Celui des génératrices; 2° Celui de la batterie d’accumulaleurs ; 3° Celui des cireuits d'utilisation. Sur ce lableau sont groupés les appareils de manœuvre, de sécurité et de mesure nécessaires. L'ensemble de ces appareils permet l'usage de - l'une ou de l’autre des deux dynamos, soit séparé- ment, soit en quantilé, ainsi que la charge ou la décharge de la batterie. Derrière le tableau est réservé un espace libre pour la visite et l'entretien des connexions et permettant facilement d'exécu- ter des adjonctions d'appareils s'il y a lieu. De ce tableau partent les circuits principaux : pour l'éclairage et le transport de force, pour les - services d'électricité médicale. Ces circuits pénètrent dans les bâtiments après avoir traversé souterrainement la cour de service; ils se divisent ensuite en plusieurs colonnes mon- ‘tantes, alimentant divers circuits secondaires sui- . vant les besoins. Les canalisations sont formées de cäbles à isole- ment très forls et munies des appareils de sécurité, fusibles, etc., les plus perfectionnés. L'éclairage comprend 750 lampes réparties dans les divers locaux; de plus, divers appareils sont aclionnés électriquement : ventilateurs, allumeurs de poële, fourneaux et réchauds spéciaux à gaz, appareils de projeclion, etc. = Les services médicaux sont alimentés par du cou- rant continu et par du courant alternatif. Le cou- rant continu à 110 volts est pris sur le réseau général ou sur une canalisation spéciale allant directement du tableau au bâtiment de la salle d’opéralions. Le courant alternatif est produit au moyen d'un alternateur placé dans la salle des machines et ac- tionné par le courant continu pris sur un cireuit particulier du tableau. Dans les salles d'opérations, de visite, de panse- ments, laboratoires, chambres noires, etc., sont établis divers appareils pour : Traitement faradique, statique, voltaïque et par les courants de haute fréquence ; Electro-diagnostic, radioscopie, radiographie; Galvano-cautères, massages vibraloires, excila- teurs, pholophores, lampes exploratrices ; Tableaux lumineux et échelles de mesure d'acuité visuelle, etc. Des prises de courant spéciales sont préparées nou seulement pour le traitement, mais encore pour les recherches et les laboratoires. L'ensemble des services électriques, usine géné- ratrice, moteurs, dynamos, accumulateurs, tableau el installation intérieure (sauf les appareils d’élec- tricité médicale fournis par la maison Gaiffe), a été exécuté par la maison Cance et fils et Ci. Les ascenseurs et monte-charge sont actionnés au moyen de l’eauet de l'air comprimé; l'avantage de ce système consiste dans la régularité de mar- che et l'économie de consommation d'eau, l’eau étant récupérée dans des cuves placées au sommet des trémies de ces appareils. Les ascenseurs prin- cipaux peuvent recevoir un lit et un infirmier. Ces appareils ont été construils par MM. Domain et C*. Toutes les pièces de la fondation sont carrelées en carreaux de grès cérame de leignies et le pour- tour des pièces est revêtu de gorges de même ma- tière afin d'éviter les angles. Au-dessus des gorges, les murs, sans angles ni saillies, sont revêtus soit en faïence, soit en zine poli, soit en peinture vernissée; toutes les parties de l'hôpital sont lavables à grande eau. Le système employé pour le service des cuisines est celui du chauffage par le gaz, qui évite les pous- sières, la manutention du charbon et permet une proprelé parfaite des locaux. Le service du hlanchissage, entièrement méca- nique, comprend une salle dallée en ciment con- tenant la machine à laver, le cuvier à lessive, l'es- soreuse, et, dans une pièce adjacente, le séchoir à air chaud, dans une autre la repasseuse avec une machine à repasser à main et un fourneau à fers. Ce service est en contact avec celui de la désin- fection, qui se compose de deux pièces, la première 860 D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION GPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD recevant le linge et les objets contaminés, lesquels, après avoir élé désinfectés dans une étuve horizon- tale chauffée par circulation de vapeur sans pres- sion système Vuillard à 112°, sont recueillis dans la dernière pièce attenante à la buanderie. Un four à brûler les pansements ayant servi et tous les objets contaminés est situé dans le sous-s01. IT. — Disposi- TION GÉNÉRALE DE L'ÉDIFICE. L'édifice se compose d’un sous-sol, d'un rez-de-chaus- sée. d'un1‘"éta- ge, d'un 2‘élage et d’un 3‘étage. Je n'insisle- rai que peu sur les parties de la fondation qui n’ont pas de rapport direct avec le service médical que Je déeriraispécia- lement. Le sous-sol contient des caves à vin, à charbon, des réserves de marchandises , la boucherie, la glacière, le gar- de-manger, la pie, les laboratoires de bactériologie, de microgra- phie, de photographie et les autopsies ; huit pièces sont donc spécialisées pour les recherches scien- tifiques. Le Laboratoire bactériologique, installé surtout comme laboratoire de diagnostic, peut servir, em cas de besoin, de laboratoire de recherches. Une première: pièce sert aux stérilisations et àla préparation des milieux. En dehors des au- toclaves et des fours, elle con- tient la verro- terie, les ma- tières premiè- res, une lave- rie. Des étuves: sont disposées à part, donnant sur le passage qui mène de la pièce décrite au laboratoire bactériologique de travail mo- biles sont pla- cées chacune glace unique. Une table de milieu à gaz et eau sert aux salle d’autop- manipulations sie, etc. UE - | qui se font de- Le rez-de- © = 3-4) bout. Des wars chaussée abri- _—# @: NE # moires contien- te la lingerie, nent les instru la buanderie, Eig. 2. — Pjan du premier étage (moïns le Pavillon septique). ments scienti- la désinfection, les loges des concierges, les magasins de l'écono- mat, la salle de préparation des pansements, les cuisines, leurs annexes, l'office du personnel, un cabinet pour un opticien avec l'outillage nécessaire pour monter les verres de lunettes, réparer les montures, ele. Une parlie de ce rez-de-chaussée a été réservée pour le Service d'électrothérapie et de radiothéra- fiques.Une troi- sième pièce est deslinée aux animaux en Cours d'expériences. La glacière est placée dans celte pièce. Une chambre noire permet de faire de la mis crophotographie. A côté des laboratoires se trouve le Service très complet d'électrothérapie, sur lequel j'insisterai plus tard. Le 1% étage renferme le Service de la consul=, dans une pièce : elhistologique. … Ici, deux tables . devant une fe- nêtre double à | | tation externe, le cabinet du médecin en chef, le “cabinet des médecins-adjoints, la pharmacie, située exactement au-dessus de la salle de préparation charge, le Ser- vice d’ophtal- ométrie,la ibliothèque. Le 2° étage brite les salles t chambres d'hospitalisés t la salle d'o- ération. Le 3° étage D le ré- ectoire des ma- ades du Service septique, relié “à l'étage infé- “rieur par un as- “censeur. les ap- partements du directeur, du “personnel mé- “dical résidant, les chambres des surveillan- tes, des em- ployés, des in- -firmiers el in- lirmières : ces ‘chambres, ex- . trèmementcon- ortables, assu- reront un gite “agréable au personnel,dont le bien-être nous a particu- Drement pré- occupé. Chaque éta- ge se trouve ainsi avoir une destination précise et con- Lenir un ser- MP vice spécial et ses annexes : il a sa propre indivi- + + - dualité, son autonomie. “IV. — CONCEPTION GÉNÉRALE DE L'ÉTABLISSEMENT. D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD 861 Fig. 3. — Plan du deuxième étage (moins le Pavillon septique). nus infectés. Q traitement ne pouvait être actif et complet qu'à condition d'ouvrir une large consultation externe aux malades dont l'état ne nécessite pas l’hospita- lisation, et d'admettre à l'intérieur de l’établisse- ment les sujets opérables gra- vementatleints ou assez peu fortunés pour ne pouvoir re- cevoir chez eux les soins néces- saires. Deux grandes divisions du bâtiment s'im- posaient donc : 1° le dispensai- re; 2° l'hôpital. Si les mala- des aseptiques ou septiques ne pouvaient être suffisamment triés avant leur venue à la con- sultation, il fal- lait se hàter de les séparer et, par suite, créer pour chaque di- vision une sub- division, d'où l'installation de deux pavillons spéciaux : le principal con- sacré aux ma- lades asepti- ques, et l’autre aux malades septiques, ce dernier com- prenant, en ou- tre des salles d'hospitalisa- tion, un local spécial destiné aux consulla- tions, soins et pansements, pour les sujets recon- La salle d'opérations aseptiques et ses annexes est séparée des autres services, tout en commu- niquant de plain-pied avec les salles d'hospitalisés Dans l'esprit du donataire, la fondation doit être | aseptiques. consacrée au traitement des maladies des yeux. Ce Si l'on divise l'établissement en trois tranches 862 verlicales, on remarque que la partie centrale, la plus importante (fig. 4), comprend au 1# étage le dispensaire ; au 2° les salles aseptiques ; la parlie droite (en regardant la facade), au premier la bibliothèque, au deuxième la salle d'opérations; la partie gauche (fig. 5), le pavillon des septiques, avec, au premier, une salle de pansements et des salles de malades, au deuxième une salle divisée en boxes pour les nouveau-nés et leurs mères. Chacune de ces tranches jouit d’une autonomie complète; la salle d'opérations communique bien avec le Service asep- tique, de plain-pied, par une galerie in- dispensable pour fa- ciliter le transport desopérés, mais elle en est séparée par cette galerie, qui peut se fermer et empêcher toute al- lée et venue de ce côté. Le pavillon septique est absolu- ment indépendant du reste de l'hôpi- tal ; il a son cierge spécial, sa salle de consulla- tions,sonréfectoire; son personnel sur- veillant et servant y réside sans con- con- tact avec le person- nel aseptique. Un malade venant de la consultation ex- terne el reconnu in- fecté devra repas- ser par le jardin Fig. 4. — Tranche centrale des bâtiments, aïle droite (Pavillon £ aseptique). — L'aile gauche comprend un corps de bâtiment iden- SR : pour se rendre au ee 7 tique. Service ascplique : : : 90 lits. pavillon septique, auquel il sera lié dorénavant. Les malades sep- | Hommes. . 8 lits en dortoir, 4 en chambres, c à AE Re , : ES CORRE Femmes. . . 8 lits — 4 — tiques ont la jouissance d'une portion de jardin Enfants, 4 Garcons. 6 lits en dortoir. bien enclose. SD ibilES Cie Certes, le rôle d'opérateur est le plus brillant, le RE ; ; FT , Ê Service septique : 26 lits. plus agréable pour l’ophtalmologiste, et la tenta- tion était grande de bâtir la fondation dans le seul | Hommes. . 8 lits en dortoir, 2 chambres d'isoléss ; : : : : : Femmes. . 8 lits — 2 — but de recevoir les malades à opérer. Mais rem- | Bxes. . . . 10. L plissait-on ainsi les intentions du Fondateur, qui voulait un établissement destiné au traitement des maladies des yeux, de toutes les maladies des yeux, et utilisait-on pour le plus grand bien de l'humanité souffrante les belles ressources si géné- reusement fournies? Je ne l'ai pas pensé; j'ai songé aux malades qui encombrent les cliniques, D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD courent les hôpitaux sans recevoir asile nulle part, parce qu'ils sont des chroniques encombrants comme les granuleux, ou parce qu'ils sont des infectés dont il y a à tirer peu de résullalts flat teurs, ou dont on redoute la présence auprès des opérés, comme les sujets alteints de vieilles affec-" tions lacrymales, d’ulcères à hypopion, ete.; j'ais songé à ces nouveau-nés atteints d'ophtalmie puru=« lente que leur jeune mère, à peine relevée de couches et le plus souvent si misérable, ne peut soigner efficacement; je n'ai pas craint de donner au Pavillon septique un grand dévelop= pement relatif, plus du liers de l'hôpi= tal. Il m'a paru aussi que beaucoup d’en= fants, atteints Spé- cialement de kéra- tites, d'’affections serofuleuses, ne pouvaient trouver à la consultations externe de secours” efficace, que les enfants à opérer ga- gnaient à ètre sépa= rés desadultes;aus- si ai-je créé, dans lo Service : aseptique, un Service réservé aux enfants et ado-" lescents jusqu'à seize ans. La fondation Roth- schild dispose, au Lotal, de 62 lits ain= si réparlis : Je vais maintenant donner une idée générale des quatre parties principales de l'établissement : 1° Le Dispensaire; 2 Le Service aseplique; 3° La Salle d'opérations; %° Le Pavillon septique. | D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD L'hôpital a été conçu de telle manière qu’il garde des pièces en réserve et est prêt à recevoir un plus “grand nombre de malades, si besoin est, sans nou- “velles constructions. % V. — DISPENSAIRE. Les malades sont reçus au rez-de-chaussée, à Jeur entrée à la grande porte, par un concierge qui “leur indique les quelques marches à monter pour se rendre au 1°’ élage ; on place les invalides dans un ascenseur. En face de la loge du concierge se trouve une salle d'attente où pourront séjourner, “jusqu'au retour du patient, les trop nombreux pa- rents où amis qui accompa- “gnent parfois “le consultant. “Celui-ci ne de- “vra avoir de guide que si N'état de sa vue, ‘son invalidité “ou son âge le “nécessitent. Arrivé au 1°° étage, lemalade rencontre im- médiatement un bureau d'in- “scriplion, d’où il sort muni d'un numéro “maison, sur lequel on inscrira plus lard le dia- “gnostic et l'observation de la maladie. … Directement devant lui s'ouvre une sa/le d'attente “fig. 6), garnie de bancs, gaie et spacieuse (12 mè- “tres sur 10), ornée de frises de Galland, d’où il sera k ppelé pour pénétrer dans le cabinet du médeciu, où il subira un premier examen; si le malade n’a ‘pas besoin de subir un examen ophtalmoscopique “ou ophtalmométrologique, ou une petite opération “ou un pansement aseplique quelconque, il ressort “immédiatement sur le corridor central qui le ra- kmène au vestibule de sortie. S'il doit êlre examiné l'ophtalmoscope, il se rend dans la chambre noire à gauche du médecin qui a le dos tourné à la fenêtre, et il ne repassera plus par le cabinet de Consultation, la chambre noire se dégageant sur le corridor central; s'il a à subir un pansement, une opération de petile chirurgie, un cathétérisme, il L er Il 863 se rend dans la salle de pansements à droite du médecin, d'où il pourra ressortir directement sur le couloir ou entrer dans une petile salle de repos située à droite de la salle des pansements. Gràce à cette salle de repos, la salle de pansements ne sera jamais encombrée, les malades n'assisteront pas aux manœuvres faites sur les autres, et ces deux conditions seront obtenues sans qu'on soit obligé de rejeter trop vile à la rue un sujet ému ou éprouvé par la douleur. La salle de consultation a 5 mètres sur 6; son mobilier est sommaire, puisqu'on n'y donnera que des conseils. Il se d'usage et d'une compose d'un lavabo, des sièges table en lave, dont une pelite forme bureau avec pu- portion pilre garni de moleskine ; elle est munie d'un distributeur d'ordonnances. La chambre noire à 4 mè- tres sur ». Des tablettes sup- portent des lampes à gaz pour l'examen aphtalmoscopi- que. Près de l'entrée est une table sur la- quellese trouve d'ordre qu’il la boite de ver- conservera et res; au fond d'un carton qui sont les échel- “restera la pro- Fig. 5. — Vue des deux tranches centrales, côté cour. les métriques priété de la - éclairées par transparence ou par réflexion, à volonté.Je n'ai cru devoir donner à cette chambre, ni des dimensions plus grandes, ni un outillage plus compliqué, puis- que j'ai fait installer, attenant à la consultation ex- terne, un service très complet d'examen fonctionnel et d'ophtalmométrie. La chambre noire d'urgence suffira aux examens simples et faciles; tout malade dont le cas sera compliqué et nécessitera une étude approfondie sera dirigé vers le service spécial. Dans la salle (6 mètres sur 4",50) de pansements et de petite chirurgie. on ne pratiquera jamais d'opération importante; réanmoins, celle salle est installée pour répondre à tous les besoins. Elle est absolument réservée aux pansements aseptiques. Tous les sujets septiques ne pourront être soignés ou pansés que dans le Pavillon des septiques. Le médecin aura à les diriger immédiatement vers ce Pavillon, et ils ne reparaitront plus jamais au dis- 864 D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD * pensaire; nous les retrouverons tout à l'heure à | l'endroit voulu. Cette salle est utilisée pour permettre au médecin consultant de pratiquer toutes les opérations de petite chirurgie oculaire. Elle est alimentée d'eau stérilisée, de courant électrique pour le galvano- cautère, munie d'une vitrine à instruments, de tablettes à bocaux et capsules, d'un bocal à irriga- tions, de tablettes en verre pour divers usages, de sièges en fer et d'un fauteuil à opération du même modèle que celui qui se trouve dans la grande salle d'opérations. Comme on le verra sur le plan annexé à cette étude, le service de consultation externe est double, c'est-à-dire qu'il existe, tracé sur le même modèle, de chaque côté de la grande salle d'attente. Cette dualité m'aparu indispensable, le but de la Fon- dalion étant de donner des con- sultations pres- que à toute heu- re, le matin, l'a- près-midi et le soir. Iln'est pos- sible de net- toyer et de pré- parer les locaux entre les diver- ses consulta- tions que si ceux- ci ont quelques heures de va- cuité! Cette dis- posilion permet encore de faire fonctionner deux simultanément et d'éviter ainsi aux longue attente. La charilé bien comprise doit considérer que, si le malade est obligé de quitter son travail à des heures incommodes ou de perdre une journée ou une demi-journée de salaire, elle n'a pas rempli son but, qui est de soulager ceux qui le méritent, sans que ceux-ci aient à subir le moindre préjudice pécuniaire. Sur la gauche du veslibule se trouve la pharmacie, à portée des consultants, qui pourront, sur avis spécial du médecin, y recevoir des médicaments, pansements ou lunettes. Sur la droite du vestibule, un couloir mène les patients au Service spécial d'ophtalmométrologie et d'examen fonctionnel, précédé d’une petite salle d'attente d'où les malades pénètrent directement dans la pièce où se trouve l’ophtalmomètre. Ils sont ensuite dirigés sur une grande pièce destinée consultations malades une Fig. 6. — Salle d'attente. : Le + à la mesure subjective de la réfraction. La périmé= | trie, la détermination du champ visuel selon Ie anomalies musculaires. En outre d’une boîte de verres d'essai, de l’optomètre de Javal, on trouve prisme double, un chromatophotoptomètre de Chibret, les laines colorées de Holmgren, l'appa reil de Nagel pour la détermination du sens co loré, un spectroscope double, des stéréoscopes; un opthalmocinégraphe, ete., etc. \ Les exame ophtalmoscopi ques se fomt dans une salle contiguë. L'installation d'ophtalmomé trologie séparée, et par un laboratoire rophone sont disposés dans la pièce d’électro-dias gnoslic. situé au rez-de-chaussée; mais il communique ave le Dispensaire par un escalier au’on rencontre quel ques mètres après le Service d'ophtalmométrie. I comprend tous les appareils nécessaires à la pro duction des couranis et effluves de haute fréquencé tous les appareils de radiographie et de radiothé rapie, d'électrolyse, d'électricité statique, etc. Le courant alternatif servant à la production de courants de haute fréquence et des rayons cath diques est produit par une transformatrice, dis sée dans la salle des machines voisine du Servic d'électricité. | Le Service d'ophtalmométrie a été exclusivement organisé par le D' Sulzer, à la compétence si conn | duquel j'avais tout intérêt à me fier. Il a bien voul À EL à = D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD 86 quant avec le Dispensaire et terminant le bâtiment sur la droite, se trouve une vaste bibliothèque de 42,50 sur 8, précédée d'un vestiaire. Cette biblio- _Hhèque recoit le jour de trois côtés et est garnie au milieu de tables de travail analogues à celles de la Bibliothèque Nationale. Elle contient les principaux louvrages et journaux d'Ophtalmologie etune collec- tion de pièces en cire, reproduisant d’après nature “des affections oculaires graves. Ces pièces sont dues “au talent de M. Jumelin. EX eo AE SERVICE ASEPTIQUE. En se plaçant au 2° étage dans la galerie cen- Atrale où aboulit l'ascenseur, le visiteur a en face de “lui le Service en fer; dans le bow-window se lrouve une table garnie de lave. Il n’y a donc aucun encombrement dans les dortoirs:les malades n'y séjournent qu'ali- tés; ils n y font pas leur toilette; ils n'y prennent pas leurs repas à moins d’être retenus au lit. Les valides ont à leur disposition, derrière le Service des enfants, de grandes salles de repos ou de ré- créalion avec écritoires, jeux, etc., ce qui permet d'éviter aux alités qui ont besoin de calme le bruit des conversations et d'assurer une propreté par- faite des dortoirs. Les soins corporels sont pris dans une salle de lavage adjacente aux dortoirs, où chaque malade a un lavabo individuel, sui- vie elle-même d’une salle de bains et d'hydro- thérapie, qu'on rencontre à droite en continuant l'inspection. Si des enfants, à “sa droitele Ser- vice des fem- “mes, à sa gau- che celui des hommes. Ces “deux services sont exacte- ment sembla- bles et ne pré- tent quà une seule descrip- ion. Le Service des enfants est “divisé en deux dortoirs de six lits chacun : ce- le visiteur re- vient sur ses pas, il trouve, à sa droite, des water-closets, la pharmacie, puis successi- vement3 cham- bres particu- lières, 2 à un lit, une à 2 lits. Chacune de ces chambres est meublée com- me le dortoir; elle a en plus un lavabo. Au moment de ter- lui des filles at- tenant au Ser- “ice des fem- mes, celui des garcons à celui des hommes. Entre Jes deux dortoirs se trouve une chambre de sur- “eillante, qui a vue en même temps sur les filles et les garcons. n Aux deux dortoirs sont annexés deux lavabos et bains avec les plus récents perfectionnements. … Si l’on suit la galerie qui mène au Service des hommes en ne regardant qu'à droite, on rencontre d'abord une lingerie, puis l'escalier, une chambre d'infirmier, le dortoir contenant 8 lits. Les fenêtres, larges ethautes, sont garnies en bas de verres cathé- “drale, qui empêchent la vue du dehors, et n’ont au- “cun rideau à l'intérieur. Elles sont, à l'extérieur, garnies de stores qui se manœuvrent de l’intérieur. Le mobilier du dortoir se compose, pour chaque malade, d’un lit en fer d’un modèle spécial, que j'ai fait construire (la tête du lit se rabat pour faciliter les pansements), avec sommier métallique, d'une table de nuit en fer système Fauchon et d’une chaise Fig. T. — Pavillon aseptique et salle d'opérations. on miner la visite, trouve, à droite, l'entrée des salles de récréation et des offices. Le réfectoire des malades est à l'étage supé- rieur; ce petit inconvénient est racheté par la pré- sence d'un ascenseur et par l'immense avantage tiré de l'absence de bruit, d’odeurs, de contami- nation à proximité des opérés. La surveillance nocturne des services est parfai- tement assurée, puisqu'un surveillant couche au centre des services, un infirmier dans le Service des hommes.une infirmière dans le Service des femmes. Les malades ne sont reçus dans le Service asep- tique qu'après avoir déposé leurs vêtements dans un vesliaire spécial, sis au rez-de-chaussée, et les avoir échangés contre des vêtements hospitaliers passés à l'étuve. Geci seulement après un lavage, une douche ou un bain complel. Une salle de bains et de douches se trouvant annexée au vestiaire, les mêmes formalités sont exigées pour les septiques, qui trouvent les éléments 866 D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD nécessaires pour les remplir dans leur pavillon | rations de la Fondation. Le sol de la salle est, spécial. revêtu de grès cérame, les murs de stuc poli; tout” Les vêtements de ville sont rendus à la sortie | est aisément lavable. Il n'existe pas de jour d'en. après avoir élé haut, qui me semble inutile pour les opéra- désinfectes. Les vêtements hospitaliers, la literie, le linge, les couvertures sont désinfeclés après avoir ser- vi, ne fut-ce qu'une fois. quand le jour latéral est suffi- orientation. Au fond de la salle d'opéra- VII. — SALLE tions est une D'OPÉRATIONS. Cettesalle forme un cul-de-sac et sions, 9 mètres ne communique sur 8,etparfai- ss res Mine: 4 qu'avec la salle tement éclairée e 3 d'opérations, ce par un jour du ; Fig. 8. — Dortoir. qui lui assure Nord; un éclai- un parfait iso- rage électrique intense permet d'opérer la nuit | lement : elle ne sera fréquentée que par l'infirmier avec autant de facilité qu'en plein jour. Très peu | chargé des opérations. Elle est séparée de la salle encombrée, elle contient deux lavabos à eau stéri- | d'opérations par une vilrine hermétique en fer lisée chaude et froide manœuvrant par les genoux, | nickelé, comprise dans l'épaisseur du mur, garnie deux consoles en verre avec bocaux et capsules, deux prises de courant pour les galvano-cautères, | côté de la salle d’opéralions et du côté de la la lumière et l'électro-aimant à main, un grand | salle annexe. Ainsi, la stérilisalion des outils ter- électro-aimant, minée dans la deux fauteuils ; salle annexe, à opération de ceux-ci seront mon modèle très replacés dans læ simple, sans ap- vitrine et pour- pareil pour ront être repris maintenir la directement tête, sinon par dans la salle d'o- une pelile cap- pérations, leur sule. Ces fau- présence dans teuilssontnicke- l'armoire assu- lés, ainsi qu'un rant qu'ils ont lil à opération, passé par les qu'une tablette épreuves régle- à instruments, mentaires. Cette qu'une table en disposition est verre avec por- imitée de celle te-capsules, qui qui se trouve complète l’ou- dans la salle tillage de cette Fig. 9. — Salle d'opérations. d'opérations si salle, dans la- bien installée quelle est encore placé le grand éleclro-aimant de | par le D' Picqué à l'Asile Sainte-Anne, dont nous Volkmann. | nous sommes inspiré pour la construction de la La salle est alimentée d’eau stérilisée, ainsi que | nôtre. toutes les autres salles de pansements et d'opéra ut La stérilisalion des instruments est assurée par Celle-ci est de grandes dimen- tions oculaires” sant et parvient. d'une bonne salle annexe de. stérilisation. de glaces sur toutes ses faces et avec porte du, D' A. TROUSSEAU — LA FONDATION OPHTALMOLOGIQUE ADOLPHE DE ROTHSCHILD 867 dant vingt minutes à la température de 160°. Les instruments non tranchants peuvent être ilisés par l'ébullition ou à l’autoclave à 120°. autoclave spécial et un four à flamber servent à la stérilisation des objets de pansement. Un appareil eau stérilisée chaude et froide complète l'instal- tion de la salle annexe. En arrivant par la galerie qui fait communiquer trouve à droite une salle d'attente pour les malades à opérer et une pelite chambre noire,afin que, s’il bclaircir ce doute par un examen ophtal- moscopique. Les cautérisa- ions elles exa- ens des sinus ranio-faciaux peuvent être faits dans cette hambre noire. a salle d'at- lente pour les opérés me sem- ble indispensa- ble : il est in- humain et in- commode de faire attendre des patients dans la salle d'opérations, où ils assistent, émus et encombrants, à la répétilion des manœu- res qu'ils vont subir. La salle d'opérations doit être réservée au malade qu'on opère. En face de la salle d'attente se trouve, garnie de avabos, tablettes à bocaux, porte-capsules, appa- reils de lavages, etc., la salle de préparation des malades et d’anesthésie. Le malade est lavé, dé- sinfecté à fond (il l'a déjà élé grossièrement dans e Service aseplique); il pénètre donc dans la salle d'opérations n'ayant plus à subir de la part de Popérateur qu'un lavage de précaution. Les sujets à anesthésier sont er dormis dans cette salle sur un it à roulettes; leur sommeil est plus rapide et plus calme dans le silence; s'ils s'agitent, ils n’ef- fraient pas leurs voisins. L'anesthésie à part réalise aussi une économie de temps pour l'opération. - Les salles d'opérations, de slérilisation (ainsi, Dailleurs, que toutes les salles de pansements, de lvabos, de bains, etc.), ont été installées par la Fig. 10. — Pavillon septique. maison Flicolteaux, quia bien voulu, sur mes indi- calions, construire quelques modèles spéciaux. Certains opérés ophtalmiques {peuveut sans in- couvénient regagner leur lit à pied ; d’autres doivent éviter tout mouvement. Pour le transport facile de ceux-ei, j'ai fait construire un fauteuil roulant à quatre roues caoutchoutées. On peut considérer comme une annexe de la salle d'opérations le local réservé à la confection et à la stérilisation des pansements (qui ‘peuvent être tous préparés dans la maison), situé au rez-de- chaussée sous la pharmacie, avec laquelle il com- munique par un monte-charge; il a été installé el muni des étuves et appareils nécessaires d'après les indications de M. Leclerc, dont on la compétence. con- nait haule Celui-ciaéga- lement bien voulu nousdon- ner sOn avis sur l'aménagement très pralique de la pharmacie. VII. —SERvICE SEPTIQUE. Il se trouve dans un pavil- lon spécial (fig. 10), muni de son entrée et de son concier- ge particuliers, qui ne communique avec le Pavillon central que par une galerie herméliquement fermée à l'aide d'une porte qui ne sera ouverte qu'en cas d'ur- gence. Ce Pavillon comprend : au 1° étage, une salle d'attente et de pansements pour les malades reconnus infectés à la consultation externe et qui, restant au dehors, ont besoin de soins journaliers, puis des salles de malades; au 2° élage, le réfec- toire des sepliques et une salle contenant des boxes pour les nouveau-nés (fig. 11). Au 1", lorsque, après avoir monté l'escalier ou pris l'ascenseur, on s’arrêle dans la galerie, on a en facc de soi la salle des pansements, aménagée comme les salles analogues des autres parties de la Fondation ; si l’on tourne à droite, on rencontre successivement, en marchant devant soi : l'office à droite; la salle d'attente à gauche, une lingerie, des bains et deux chambres d'isolement pour les maladies contagieuses, puis la pharmacie. On arrive ainsi à une autre galerie, qui coupe celle qui vient d'être parcourue. Cette galerie contient : à droite un dortoir avec six lits d'hommes, en face duquel se trouve une chambre d'infirmier et une chambre d'isolé; à gauche, la même disposition pour les femmes. Aux deux extrémités de cette galerie sont des salles de repos, des lavabos, des water-closets. Au 2° étage donnent, sur la galerie où aboutit l'es- calier, le réfec- toire, les bains, la pharmacie, l'office, la lin- gerie et une chambre de surveillante. Cette galerie conduit à une grande salle contenant dix boxes pour les nouveau-nés atteints d'oph- talmie puru- lente, accom- pagnés deleurs mÈTES CES boxes, en verre dépoli, contien- nentun lit pour lamère,un ber- ceau, un lavabo particulier. La création de ces boxes m'a paru indispensable pour assurer le repos des nouveau-nés, les soins spéciaux des nouvelles accouchées et pour éviter les conta- gions et recontagions qui se reproduisent si sou- vent. À l'extrémité droite de cette salle se trouve une salle de repos, des lavabos avec bains de siège, bidets et appareils à injection pour les femmes, des water-closets, des vidoirs; à l’extré- milé gauche, une salle de pansements, de cautéri- Fig. 11. — Boxe de nouveau-nés. sations, de lavages, réservée aux nouveau-nés Inutile de dire que ces boxes peuvent être utilisés pour tout individu porteur d'une affection conta= gieuse, l'isolement d'un tel sujet pouvant, d'ail= leurs, être réalisé par les quatre chambres partis culières dont nous disposons. IX. — FonNCTIONNEMENT DE LA FONDATION. La Fondation est ouverte à tous les individus pourvu qu justifient de leur qualité d'indigents où de nécessileux Les consul: tations ont lier ‘de9à11heuress l'après-midi de 1 à 3 heure le soir, pour les ouvriers, de 1 à 8 heures Elles sont quon tidiennes, ex cepté la der nière, qui n’a lieu que les mardis, jeudis et samedis Toutes les demandes d'hospiialisation doiven être adressées directement au médecin en chef. Tous les soins donnés à ia consultation exter et à l'intérieur de l'hôpital sont gratuits; il nes réclamé aucune indemnité aux hospitalisés. Be malades payants ne peuvent être reçus à la Fon dation. D' A. Trousseau. trois fois pal BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 869 ANALYSES 1° Sciences mathématiques de Montessus de Ballore (R.).— Sur les Fractions continues algébriques. (Thèse pour le Doctorat de la Faculté des Sciences de Paris). — 1 vol in-8°. A. Hermann, éditeur. Paris, 1905. M. H. Poincaré disait, il y a une quinzaine d'années, en parlant de la représentation des fonctions par des ractions continues algébriques (fractions dont les léments sont des fonctions rationnelles d’une variable), ue c'était « une sorte de terra incognita dont la carte élait presque blanche »; Laguerre, Halphen, Stieltjes, norts prématurément tous trois, et M. Padé y ont euls pénétré. L'Académie des Sciences a voulu, par lattrait du Grand prix des Sciences mathématiques, ncourager les explorateurs à pousser quelques incur- ions dans ce vaste domaine, qu'elle présume n'être pas stérile ; mais aucun des levers partiels qui lui ont été soumis, en dépit de résultats intéressants, n'a été estimé digne d'une récompense, et la difficile étude de a convergence des suites de réduites des fractions continues algébriques a°été de nouveau mise au concours. Le sujet de la thèse de M. de Montessus n’est donc pas une question aisée, ni rebattue; il n’y a pas un mince mérite à l'avoir choisi et à avoir réussi à exécuter un lever de grand détail, suivant des itiné- raires tracés par Laguerre, Stieltjes et M. Padé. La représentation approchée d’une fonction déve- loppée en série entière, au moyen d'une fraction ration- nelle, a conduit M. Padé à associer à une série de puissances trois classes principales de suites de fractions rationnelles : les fractions (A), dont les dénominateurs sont fous d’un même degré et dont les numérateurs sont de degrés 1,2,3,4...; (B), dont les numérateurs sont tous d’un même degré et dont es dénominateurs sont de degrés 1,2,3,4#...; (C), dont les umérateurs et dénominateurs sont simultanément de degrés 1,2,3,4... Ces fractions rationnelles se trouvent éterminées par la seule condition que leurs dévelop- pements en séries de puissances aient le plus possible de termes communs avec la série entière initiale. ne quelconque de ces suites de fractions ration- nelles est la suite des réduites d’une fraction continue. … Dans la première partie de sa thèse, M. de Montessus démontre que les suites (A) et (B) convergent dans des cercles concentriques au cercle de convergence de la série entière iniliale et pouvant, d'ailleurs, contenir ce cercle de convergence, les rayons de ces cercles dépen- dant d'une facon simple des singularités de la fonction ont la série entière est un développement de Taylor. La seconde partie est consacrée à l'étude de types très généraux de suites (C), dont la convergence est établie pour tout le plan complexe, sauf peut-être pour certaines coupures, et à la généralisation d'indications de Laguerre relatives au développement en fraction continue des fonctions (L) qui vérifient une équation différentielle linéaire du premier ordre d’un type parti ulier. . Une dernière partie comprend quelques générali- ations élégantes concernant des fractions continues étudiées par Gauss et par Lagrange. . On pourrait regretter que M. de Montessus n'ait ndiqué que des régions de convergence certaine et des égions de convergence douteuse, sans arriver à pré- iser si celles-ci sont des régions de divergence. Mais tte lacune à déjà été comblée partiellement par auteur dans une Note récente des Comptes rendus, ù il a établi, en utilisant certaines vues de Stieltjes : REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. BIBLIOGRAPHIE ET INDEX 1° que, pour les fonctions (L) de Laguerre, les coupures obtenues comme lieu de divergence possible sont effectivement des lignes de divergence; 2° que la diffé- rence entre une fonction (L) et la ne réduite de ; ; 1 son développement tend vers zéro avec =: n Cetie thèse, d’une exposition attrayante, es{ une contribution pleine d'intérêt à une théorie difficile; et l'on voit qu'elle n'est que le prélude de recherches pour lesquelles il faut souhaiter à M. de Montessus per- sévérance et succès.” A. BOULANGER, Maitre de-Conférences de Mécanique à la Faculté des Sciences de Lille. de Mas (E. B.), Znspectceur général des Ponts et Chaussées, Professeur à l'Ecole nationale des Ponts et Chaussées. — Canaux. — 1 vol. de 519 pages de l'Encyclopédie des Travaux publies. (Prix : 17 fr. 50.) Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1905. Cet ouvrage est la troisième et dernière partie du Cours de Navigation intérieure professé par M. de Mas à l'École des Ponts et Chaussées. C’est dire qu'il traite de façon complète la question des canaux : il le fait avec la compétence et la clarté qui caractérisent son auteur. Nous ne pouvons, dans un compte rendu aussi court, essayer du livre une analyse même sommaire. Nous préférons en donner simplement la conclusion, l'avis de l’auteur sur cette question toujours ouverte de la coexistence et du régime respectif des voies navigables et des voies ferrées. Cette coexistence est-elle justifiée ? Convient-il de poursuivre la transformation ou la créa- tion de nouvelles voies navigables? Convient-il même de conserver celles qui existent et n’aurait-il pas mieux valu, comme certains l'ont demandé, combler les canaux pour poser des rails sur leur emplacement? En ce qui touche les frais d'établissement, si l'on pou- vait dire, avec M. Graeff, avant la loi du 5 août 1879, que « la dépense d’un chemin de fer était à la dépense d'un canal construit dans les mèmes conditions dans le rapport de 3 à 2», on peut affirmer que les deux dépenses s'équivalent, depuis que cette loi a porté de 150 à 300 tonnes le chargement des bateaux auxquels les nouveaux canaux doivent livrer passage. Pour ces canaux, M. de Mas estime que les prix de fret oscillent autour de 0 fr. 40 par tonne kilométrique. Ces prix sont inférieurs à ceux des voies ferrées; mais, pour les comparer à ces derniers, il faut tenir compte de l'allongement de parcours que la voie d’eau impose le plus souvent aux marchandises qui l'emprunteut. La voie ferrée a pour elle le triple avantage de la rapidité (tout au moins quand l'application des tarifs spéciaux ne prolonge pas anormalement les délais de transport), de la régularité, et de la facilité d’expédier les marchandises par petites fractions. Le canal offre les inconvénients correspondants, dont le plus grave devient, pour le destinataire, l’obligation de recevoir de grandes quantités à la fois, quand cette obligation se traduit par la nécessité d'immobiliser dans ses approvisionnements un capital plas important, Par contre, le bateau a l'avantage de pouvoir accoster au plus près du point où la marchandise est produite ou consommée; dans certains cas, il constitue un magasin commode et économique ; dans d'autres, iloffre des facilités exceptionnelles pour le logement et l'arri- mage de la marchandise. Il peut surtout ètre avanta- geux pour les longs parcours et les matières de peu de valeur : houille, engrais, minerais, matériaux de construction. 19% 870 Tout compte fait, M. de Mas estime que les voies navigables rendent les plus grands services, mème à côlé des chemins de fer, partout où le mouvement com- mercial et industriel est suffisamment important. Mais il ajoute que, pour rester, dans ce cas, un élé- ment exceptionnel de prospérité, il faudra que la voie navigable S’approprie aux besoins, sans cesse chan- geants, du commerce et de l’industrie : il faudra notam- ment, toutes les fois que l'importance du trafic l'indi- quera, ne construire que des canaux à grande section. GÉRARD LAVERGNE, Ingénieur civil des Mines. Marchis (L.), Professeur-adjoint de Physique à la Faculté des Sciences de Bordeaux. — Leçons sur la Navigation aérienne (Ballons sphériques, aérosta- tion militaire, aérostation scientifique, aéronautique maritime, ballons dirigeables). — 1 vol. in-8° de 824 pages et 170 figures. (Prix : 20 fr.) Vve Dunod, éditeur, Paris, 1905. Depuis que les principes d'une science rigoureuse ont pu être appliqués au plus noble des sports, le pro- gramme des Facultés, devenu large et hospitalier, ne pouvait que lui faire un bon accueil. La tentative était séduisante d'en faire l'objet d’un cours, puisqu'il n’est personne qui ne s'intéresse aux progrès de l'Aéronau- tique, et puisqu'aussi il est peu d'hommes, même parmi ses adeptes, qui en aient approfondi les prin- cipes, dont l'exposé était resté ou dispersé, ou peu accessible au public. C'est, en effet, pour son enseignement à l'Ecole de Chalais que le très regretté Colonel Renard avait mis sous une forme rigoureuse la théorie du ballon; mais ses lecons, qui ont formé tous les aérostiers mili- taires: français, sont restées jusqu'ici en grande partie inédites. L'enseignement que le Colonel Renard inau- gura à Meudon est sorti cependant, par fractions, de l'enceinte où les règlements militaires l'avaient en- fermé, et ce, grâce aux Mémoires publiés un peu par lui, et beaucoup par ses élèves, qui, prenant ses lecons comme point de départ, en ont développé quel- ques points particuliers. Ces principes scientifiques s'appliquent à la construction du ballon, à son équi- libre et à sa conduite; ils s'appliquent aussi à la con- naissance des éléments atmosphériques dont dépend sa marche, à l'application qui peut lui être faite d’un mo- teur pour le rendre automobile, à la préparation des gaz pour le gonfler et à une foule de problèmes dont chacun a dû être résolu à son tour pour amener l’aéro- station à être autre chose qu’un empirisme, pour donner à la construction et à la conduite toute la sécu- rité qu'elles exigent en face des dangers auxquels exposeraient les moindres erreurs. C'est l'ensemble de ces questions qu'expose M. Mar- chis en un ouvrage à chaque page duquel nous retrou- vons le nom du chef incontesté que l’Aéronautique vient de perdre, et qui, par la puissance de son génie inventif, par la sûreté de sa logique, par la coordi- nalion qu'il a donnée à une science dont les bribes étaient éparses, à fait franchir à l'Aéronautique le grand pas qui sépare un empirisme d’une science parfaite. Mais M. Marchis ne se borne pas à exposer les prin- cipes scientitiques de l'Aéronautique. Il en donne l'histoire, intéressante et souvent palpitante comme un roman, cette histoire vraiment héroïque des tenta- tives souvent suivies de catastrophes, qui n'ont pas découragé les essais nouveaux, tant l'attrait est grand de s'élever dans l'air sans que rien nous rattache au sol. Cette histoire forme le début du cours; elle re- prend, au quatrième chapitre, pour laérostation mili- taire, qui a vu aussi de grands dévouements, et qui a connu de grands succès. Cependant, le morceau de résistance du cours de M. Marchis n'est pas l'histoire; c'est l'exposé dogma- tique et très clair de tous les détails qu'ilfaut connaître pour construire un ballon, le gréer, le mettre en BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX est consacrée à la préparation et à l'examen du gaz ordre de marche, et finalement le conduire, depuis son départ jusqu’à l'atterrissage. En fait, la théorie de l'équilibre de l’aérostat relève du principe d'Archimède, mais sous une forme que complique la variation de densité du milieu. Ce principe, correctement appliqué, montre nette ment les effets des variations de volume du ballon, des pertes de gaz ou des jets de lest. Il montre, en particu- lier, que l'équilibre est souvent instable et que, surtout vers la fin d’une ascension, lorsqu'on a perdu beaucoup de gaz et jeté beaucoup de lest, en d'autres termes, lorsque le ballon est devenu flasque, il n'existe plus que deux zones d'équilibre que l’on puisse atteindre l'une qui est le sol, l'autre qui est très élevée. Cela explique les bonds que font les aérostats au bout d'un très long trajet. Et c’est aussi la raison pour laquelle on cherche de plus en plus à employer des ballons munis d'un ballonnet à air, en forme de tore, qui per met de choisir mieux la zone d'équilibre et de navi= gation. Les conditions d'équilibre, indiquant le poids quem doit soutenir l’étoffe, en prescrivent aussi la tension ef, par conséquent, la résistance. Ce sont, en dernier res: sort, ces conditions qui imposent les essais des étoffes ainsi que de tout le gréement. Il convenait donc, ainsi que l'a fait M. Marchis, de commencer par étudier les ballon en l'air, pour revenir ensuite à la construction, ce qu'il fait au deuxième chapitre, sous le titre : Lan Technique des ballons, chapitre dontla première parlies pour le gonflement. Le troisième chapitre traite des ballons avec ballon=« net, cette géniale invention de Meusnier, dont le Colonel Renard a montré toute l'efficacité par les théorèmes d'équilibre qu'il a établis, et que M. Balsan et M. de la Vaulx ont essayé depuis deux ans avec un plein succès Comme nous le disions tout à l'heure, ces ballons, qui se délestent automatiquement par le refoulement de l'air du ballonnet, se tiennent bien plus facilement que les ballons ordinaires dans les ultitudes moyennes, et ne font pas, comme ces derniers, des bonds de 4 ou 5 kilomètres lorsqu'ils sont près d’avoir épuisé leurs ressources. On prévoit ainsi, pour un avenir très pro= chain, grâce au ballonnet, des ascensions plus longues et surtout moins pénibles que les ascensions de longue durée de ces dernières années. L'aérostation militaire forme l'objet du quatrième chapitre. L'histoire des débuts de cette branche de l'Aéronautique pendant les guerres de la Révolution, les: ascensions du siège de Paris en 1870, les installation du parc de Chalais, et les succès aéronautiques qui er ont été la conséquence non seulement dans des ascen= sions de manœuvre, mais aussi dans les expéditions du Tonkin, de Madagascar et dans la campagne de Chine; représentent l'énorme apportde la France à la conquête de l'air. Ces paragraphes, d'un intérêt soutenu dans l'ouvrage de M. Marchis, sont suivis de la description du matériel de quelques autres pays. Les expériences scientifiques d'exploration de lab mosphère par des ballons montés, des ballons-sondes, ou des cerfs-volants sont minutieusement décrites dan le cinquième chapitre, tandis que l'emploi des stabili sateurs et des déviateurs de M. Hervé forme l'objet du sixième chapitre, sous le titre d'Aéronautique maris time. On sait, en effet, qu'en faisant trainer par le ballon poussé par le vent des appareils immergés dans lamer, on peut les maintenir, sans perte de lest, à une distance à peu près constante du niveau de la mer, eb leur assigner uue route formant un angle assez grand avec la direction du vent. C’est un véritable gouvernal qu'on donne au ballon, dont le vent est le moteur. La partie didactique de l'ouvrage de M. Marchis s'achève par l'étude des ballons dirigeables. Les projets de Meusnier, les dirigeables bien connus de Giffard, de Dupuy de Lôme, des frères Tissandier, le ballon moi connu de Haenlein, très bien étudié, mais qui ne. pas d’ascensions libres, avaient montré les difficultés du roblème, qui fit d’un seul bond un tel progrès à Meu- don qu'on put, dès 1884, le considérer comme résolu. Les mémorables ascensions du ballon La France, effectuées par les Capitaines Renard et Krebs, puis par es frères Renard, montrèrent, en effet, pour la pre- ière fois, un retour constant au point de départ avec une vitesse qui permettait de manœuvrer par une brise fraiche. Les principes de la construction des bal- Jons dirigeables n'ont guère été modifiés, depuis cette poque, par tous ceux qui ont tenté des ascensions couronnées de succès. Et la plupart des insuccès de quelques expérimentateurs malheureux proviennent de se que les principes posés par le Colonel Renard avaient été ignorés ou méconnus. Dès 1883, le Colonel Renard avait réalisé le généra- teur d'électricité le plus puissant que l’on connaisse encore aujourd'hui. Mais c'était une solution provisoire du moteur, que l’on allège bien plus aujourd'hui par es engins à explosion. Le dirigeable devait donc pro- gresser de lui-même, par la simple application des ma- chines industrielles. Aussi quelques aéronautes ont-ils u, dans ces dernières années, atteindre des vitesses n peu supérieures à celles qu'avait réalisées le ballon La France. Tel M. Santos-Dumont avec son sixième ballon, pour la construction duquel il avait su revenir aux principes posés par le Colonel Renard; tel encore “Le Lebaudy, celui, de tous les dirigeables, qui a accom- li jusqu'ici les plus longs parcours (plus de 60 kilo- ètres d’une traite), ‘en restant gonflé pendant plu- sieurs mois, grâce à l'imperméabilité parfaite de 'éloffe. Le Lebaudy semble maintenant avoir atteintla limite de ce que peuvent donner les dirigeables du type ordinaire. A des vitesses supérieures, la composante atérale de l'effort de l'air sur la carène deviendrait répondérante, et le ballon perdrait sa stabilité. Pour la lui rendre, il est nécessaire d'empenner le ballon, ainsi que l'a proposé le Colonel Renard peu de mois “avant sa fin prématurée, donnant ainsi la possibilité ne résoudre complètement un problème auquel il s'était adonné avec passion, et que, jusque-là, il consi- “dérait comme limité à une vitesse infranchissable et encore trop faible pour permettre de marcher par tous les vents. » Cette rapide esquisse de l'ouvrage de M. Marchis montrera, nous l’espérons, combien son initiative est heureuse, et combien un cours d'Aéronautique a sa place marquée dans l’enseignement libre des Facultés. Passionnante par ses résultats, l'Aéronautique n'est pas moins intéressante par ses méthodes, qui méritent d'être connues de tous les physiciens. F CH.-En. GUILLAUME, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. 2° Sciences physiques Igué (Rev. José), Directeur du Bureau météorolo- . gique des Philippines à l'Observatoire de Manille. — The Cyclones of the Far East. — 1 vol. in-4° de 283 pages avec 54 planches. Bureau of Publie Prin- ting, Manille, 1904. Cet ouvrage est la seconde édition, en anglais, d’un volume dont la première édition parut en espagnol il y a sept ans. L'œuvre de M. Algué est le fruit des obser- Yations sur les typhons qui ont été faites à l'Observa- toire de Manille, depuis sa fondation, en 1865, jusqu'à nos jours. Une étude minutieuse et prolongée de ces perturbations atmosphériques que les naturels des Phi- lippines appellent baguios, — et qui sont de la même nature que les Aurricanes des Antilles, les cyclones de Atlantique et les typhons de la mer de Chine, — a permis à M. Algué d'en discerner les causes et d’en P rédire, dans une certaine mesure, les effets, rendant ainsi d'immenses services aux habitants et aux navi- gateurs d'Extrème-Orient. Dans la première partie de l'ouvrage, d’un caractère BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 871 surtout théorique, il étudie la nature des typhons, leur origine, leur structure, leurs mouvements internes et externes, qui constituent les lois de la circulation cyclo- nique et du mouvement progressif. La seconde partie traite des phénomènes qui pré- cèdent généralement ces terribles tempêtes et qui permettent à l'observateur d'en prévoir jusqu'à un certain point les conséquenes. Puis, la troisième partie vient donner la preuve des deux premières par des exemples des différents types et classes de typhons et l'analyse de leurs caractères réels. Enfin, une quatrième partie renferme quelques règles pratiques à l'usage des navigateurs qui ren- contrent un typhon, puis la liste et la description des ports de refuge pendant les tempêtes d'Extrème-Orient. Cet ouvrage fait grand honneur à l’auteur, dont la haute compétence en ces questions n'est, d’ailleurs, plus à signaler, LB, Kayser (H.), Professeur de Physique à l'Université de Bonn. — Handbuch der Spectroscopie. Dritter Band. — À vol. in-8° de 604 pages, avec 94 figures et trois planches.(Prix : 52 fr. 50.) S. Hirzel, éditeur. Leipzig, 1905. Nous avons donné ici les comptes rendus des deux premiers volumes de cette œuvre admirable, qui est la seule encyclopédie de l'Analyse spectrale et de toutes les questions qui s'y rattachent. Ce tome troisième est consacré aux spectres d'absorption. M. Kayser com- mence par décrire les appareils et les méthodes de production de ceux-ci et par exposer leurs lois. Il donne la définition et l'expression analytique des prin- cipaux termes employés dans l’ouvrage,.et qui parfois ont été pris dans des sens différents : transparence, facteur de transparence, coefficient et constante d'ab- sorption, indice, module et coefficient d'extinction. Il parait avantageux d'employer désormais ces termes dans le sens arrêté par M. Kayser. Celui-ci expose ensuite les méthodes de représentation graphique des bandes, observées sous des épaisseurs ou à des concen- trations croissantes. Le second chapitre aborde les transformations d'un même spectre d'absorption ; rien de plus variable que celui-ci pour une même substance ; que, pour un sel solide ou dissous, la nature du dissol- vant, sa concentration, sa température viennent à subir un changement, et aussitôt la nature de son spectre d'absorption pourra être altérée profondément. L'action de chacun de ces facteurs est l'objet d’une étude. À propos de «la couleur des ions » et de la dis- sociation électrolytique des solutions, l’auteur résume les nombreux travaux qui n'ont pas réussi à élucider définitivement la question, et il conclut que, dans les cas les plus nombreux (par exemple pour les composés organiques), l'absorption est due à la molécule tout entière ; dans d'autres, au contraire, une portion seu- lement de celle-ci, et souvent les ions ou l'atome lui-même agissent. Le véritable siège de l'absorption nous est encore inconnu; peut-être, comme pour l'émission, le placera-t-on un jour dans les électrons. Une partie importante de ce volume traite des rela- tions entre l'absorption et laconstitution des composés organiques ; elle occupe 165 pages, avec de nombreux tableaux, diagrammes et courbes d'absorption. M. Kay- ser en a confié la rédaction au Professeur W. N. Hartley, de Dublin, dont les’ admirables travaux sur ces déli- cates questions ont ouvert des horizons nouveaux, et apporté à la Chimie organique une méthode précieuse pour résoudre les problèmes de structure moléculaire des composés. Les spectres ultra-violets sont étudiés d'abord, avec tous les développements que comportent les résultats si intéressants obtenus dans la série cyclique et avec les alcaloïdes. La parlie visible vient ensuite, avec les spectres des matières colorantes ; ce chapitre offre des applications aux recherches industrielles sur lesquelles il est inutile d'insister. L'ultra-rouge et les conclusions à en tirer 812 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX sont le sujet de quelques pages. Ce véritable mémoire d'ensemble sur ce que nous pourrions appeler la «Chimie de l'absorption » se termine par des consi- dérations générales de M. Hartley sur les variations des spectres dans les différentes séries. M. Kayser reprend sa tâche par l'exposition détaillée de l'absorption chez certaines substances typiques, choisies d’ailleurs en grand nombre : les corps simples, les gaz, l'atmosphère terrestre, les matières transpa- rentes employées en Optique, certains sels à propriétés caractéristiques, et enfin les composés des différentes terres rares. Les spectres de celles-ci sont présentés en de nombreux {tableaux confrontant les observations de bandes faites par les observateurs successifs ; dans le dernier, les bandes caractéristiques de toutes les terres sont rangées par longueurs d'ondes et accom- pagnées de leur attribution, dispositif facilitant beau- coup les recherches. Viennent ensuite quelques pages sur les laques colorées. d Le livre se termine par un réperloire particulière- ment précieux : c'est un indicateur alphabétique de tous les corps simples ou composés dont les spectres d'absorption ont été publiés. On y trouve, avec des indications sommaires sur les conditions d’'observa- tion, les renseignements bibliographiques complets, et l'énumération en longueurs d'ondes des bandes ou raies obscures dans le spectre tout entier, sans en excepter l'infra-rouge auquel se rapportent trois planches lithographiques hors texte, représentant les bandes d'absorption des composés organiques entre 02,700 et 15,200. Ce remarquable volume, plus spécialisé et plus pure- ment documentaire que les précédents, ne leur est pas inférieur en intérêt. Il sera utile aussi bien à ceux qui s'occupent de Chimie générale, de Chimie orga- nique, de terres rares, de matières colorantes, qu'aux spectroscopistes et aux physiciens. Le tome prochain sera relatif à l'absorption par les matières colorantes organiques naturelles provenant des animaux ou des végétaux; il comprendra aussi l'étude des phénomènes qui peuvent se rattacher à l'absorption, tels que la dispersion, la fluorescence et la phosphorescence. A. DE GRAMONT, Docteur ès sciences, Le Verrier (U.), Zngénieur en chef des Mines, Pro- fesseur au Conservatoire des Arts et Métiers. — Pro- cédés métallurgiques et étude des Métaux. — 1 vol. grand in-8& de 403 pages, avec 194 figures. (Prix :12 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1905. La plupart des ouvrages de Métallurgie générale de langue francaise nous viennent d'Allemagne et sont de véritables encyclopédies, où l'abondance des détails et des figures nuit à la clarté de l’ensemble. Aussi chacun n'y cherche-t-il que la partie qui l'intéresse. L'ouvrage de M. Le Verrier a le mérite de présenter, sous un volume relativement petit, les opérations mé- tallurgiques courantes dans ce qu’elles ont d’essentiel. Sans s'embarrasser dans des descriptions interminables de fours et de procédés de traitement, il en donne le principe. En suivant un ordre logique et facile à comprendre, il fait passer en revue tout ce qui inté- resse la Métallurgie, au point de vue pratique ainsi qu'au point de vue théorique et scientifique : les pro- priétés des minerais, leur échantillonnage, leur prépa- ration mécanique; le séchage, la calcination et le grillage de ces minerais, avec la description des prin- cipaux fours ; les scories, les traitements par réduction, distillation et électrolyse; les divers procédés de fusion, au creuset, au four ordinaire et électrique, etc... Sous le titre d'installations accessoires sont décrites les souffleries, les condensateurs de poussières, ete. Voilà pour la Métallurgie proprement dite, qui constitue la première partie du volume. La deuxième partie, l'étude des métaux, comprend les divers essais mécaniques et calorifiques auxquels doivent être soumis les métaux pour satisfaire à des conditions déterminées. Un chapitre est consacré à lan métallographie. Enfin, l'ouvrage se termine par une étude très claire et complète sur les alliages : leurs propriétés physiques et mécaniques, leurs structures microscopiques, et l'influence de certains corps intro- duits dans la composition de ces alliages sur leurs pro- priétés. Il est regrettable que les figures de ce livre ne soient pas toujours en harmonie avec le texte. Un appareil ou un four qui est décrit sommairement devrait être représenté par un schéma, tout au plus par un dessin très simple ; au lieu de cela, on trouve un peu trop sou- vent une figure chargée de détails, où les parties essen- tielles sont noyées dans les accessoires. Malgré cette réserve, plutôt secondaire, nous ne sau- rions trop recommander la lecture de cet excellent traité didactique à ceux qui commencent à s'occuper de Métallurgie et même à ceux qui, déjà lancés dans cette branche, n'auraient que des idées incomplètes" sur les études récentes relatives aux métaux et à leurs alliages. AUGUSTE HOLLARD, Chef du Laboratoire central des Usines de la Cie française des Métaux. 3° Sciences naturelles Révil (J.), Président de la Société d'Histoire naturelle de Savoie. — Notions de Géologie appliquées au département de la Savoie. —— { brochure gr. in-8°, de 70 p. Imprimerie Nouvelle, Chambéry. t Les lecteurs de la Ze vue n’ont pas oublié le bel article, sur «la Formation des Vallées des Alpes de Savoie », publié, ici même, par M. Révil‘. Dans ces Notions de Géologie, qui ont pour but de montrer, une fois de plus, les points de contact de la Géologie et de la Géographie physique, ils retrouveront les qualités de clarté et de précision qui distinguent les travaux de l’auteur, Eleventh Annual Report of the Department of Agriculture of New Zealand (1903). 1 vol. in-8° de 620 pages avec figures. — Twelfth Annual Report (1904). 4 vol. in-8 de 400 pages avec figures. J. Mackay, Government Printer. Wellington, 1904, La Nouvelle-Zélande est un pays essentiellement agricole et,comme le montrent les deux derniers Rap- ports du Département de l'Agriculture, rien n’y est négligé pour le développement de cette source de richesses. En 1903-1904, l'Archipel néo-zélandais nourrissait 299.182 chevaux, 1.593.547 tètes de gros bétail, 226.591 pores et 48.954.553 moutons. La récolte en 1903-1904 a été de 7.891.654 boisseaux de blé, 15.107.237 boisseaux d'avoine, 4.160.504 boisseaux d'orge. Une grande partie de ces grains sont exportés en Europe; mais c'est surtout l'exportation de viande refroidie qui prend une grande extension : elle atteint près de 65 millions de francs pour la viande de mouton, et près de 6 millions pour celle de bœuf, en 1903-190%. Enfin, le beurre et le fromage entrent également, le premier pour 35 millions, le second pour 5 millions dans le chiffre de l'exportation. Enfin, il a été exporté 24.761 tonnes de chanvre (Phormium tenax), pour une valeur de 16.500.000 francs. La destruction des lapins à été poursuivie avee vigueur, et ce redoutable fléau ne sera bientôt plus qu'à l’état de souvenir. On voit par ces chiffres que la Nouvelle-Zélande tient un rang des plus honorables au point de vue de la production agricole, qui va en augmentant chaque année; il n’est que juste de rappeler la part qui revient dans ce développement aux Slations agronomiques de la colonie, au nombre de six actuellement : Waerenga, Ruakura, Bickerstaffe, Te Mata, Momohaki et Weraroa, et au personnel expérimenté et dévoué du Départemen de l'Agriculture. L. B: 1 Jiev, gén. des Sciences, 30 mai 1905. V4 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 813 Guéguen (F.), Professeur agrégé à l'Ecole de Phar- macie de Paris. — Les Champignons parasites de l’homme et des animaux, — { vol. iu-8° de 229 pages avec 12 pl. A. Joanin et Cie, éditeurs. Paris, 1905. La connaissance des Champignons parasites de l'homme et des animaux ne préoccupe pas seulement le médecin et le vétérinaire; l'agronome s'intéresse aux espèces capables de détruire les insectes nuisibles; le sériciculteur s'inquiète des maladies cryptogamiques des vers à soie. Sans avoir pour objectif immédiat les conséquences économiques qui se mesurent en profits et pertes, le botaniste, le zoologiste, le biologiste en général trouvent un sujet d'étude particulièrement captivant dans la végétation des Champignons sur le terrain vivant de l'organisme animal. Ces recherches exigent la détermination préalable “des espèces, problème singulièrement ingrat quand il s'agit de Champignons, et surtout de Champignons simplifiés par le parasitisme. Le biologiste, comme le praticien, saura gré à M. Gué- guen de lui avoir fourni un ouvrage comparable à une Flore de Phanérogames, dans la mesure compatible avec la diversité des sujets. En dehors des Entomoph- k thoracées et des Laboulbéniacées, qui fructifient sur le corps des insectes, nous ne connaissons la plupart des parasites de l’homme et des animaux que sous des formes rudimentaires, souvent même d'après des des- criptions incomplètes, difficilement comparables entre elles parce qu'elles ne sont pas l'expression d’une “observation méthodique. —…._ On ne demandera donc pas aux diagnoses de M. Gué- “guen la concision et la symétrie des ouvrages systéma- “tiques, dans lesquels une commune mesure est appli- cable à toutes les espèces. Les hésitations, les discus- sions, les références ne sont point ici un hors-d'œuvre. “Si elles pouvaient paraître encombrantes dans un “exposé didactique définitif, elles ne font qu'augmenter la valeur documentaire d'un ouvrage destiné à guider - les recherches futures. … Les chapitres sont rangés dans l'ordre des traités classiques de Mycologie. Deux index alphabétiques, l’un des hôtes, l’autre des parasites, facilitent le manie- «ment du livre. Nous pensons donc que, malgré les com- “plications inhérentes à l'étude des Champignons para- “sites des animaux, l'ouvrage de M. Guéguen rendra le “même genre de services que les Flores des plantes . supérieures. PauL VUILLEMIN, H Professeur à la Faculté de Médecine de Nancy. » 4 Sciences médicales agès (C.), Docteur ès sciences et en médecine, Vété- rinaire sanilaire de la Seine. — 1'Hygiène pour tous (3° édition). — 1 vol. de 638 pages, avec figures. (Prix : 5 fr.) Masson et Ci, éditeurs. Paris, 1905. L'Hygiène pour tous, comme son nom l'indique, n'est pas un traité d'hygiène savante à l’usage des méde- ins, mais un livre qui s'adresse à l'adulte moyenne- …ment instruit el correspond à ce que A. Comte appe- “lait : l'enseignement populaire supérieur. —._ L'auteur y traite, en quatre grands chapitres : du milieu, de l'alimentation, de l'activité et de la repro- duction. Le milieu est fait du climat, de l’aération, de l'habitation, du chauffage, de l'habillement. —… L'alimentation, parce qu'elle représente l'agent le plus puissant d'éducation et de modification pour Thomme, méritait une longue étude; M. Pagès a passé en revue tous les aliments avec leurs indications spé- ciales, leurs avantages et leurs désavantages au point de vue de la santé de chacun comme de l’économie lomestique. Il en a déduit les régimes économiques ; on verra comment une famille de quatre personnes peut vivre, à Paris, en consacrant cent francs par mois -à Sa nourriture. . L'activité comprend l'éducation et l'entrainement “physique, et l'étude des principaux exercices, comme à marche, la nage, les jeux, la gymnastique; là, comme pour l'alimentation, il y a des régimes conve- nant aux divers âges et aux diverses conditions sociales, Dans le chapitre consacré à la reproduction, fonction qu'on abandonne entièrement au hasard dans l'espèce humaine, l’auteur montre l'influence de l’âge des reproducteurs, de leur parenté ou de leur éloigne- ment, et du moment de l’accouplement. Dans une deuxième partie, M. Pagès étudie l'hygiène spéciale qui convient aux individus suivant les climats, les saisons, les races, l'âge, le sexe, la profession. On y lrouvera un aperçu de l'hygiène des intellectuels, de l'hygiène scolaire et de l'hygiène militaire, enfin de l'hygiène publique de police sanitaire. Dans ce Traité, on trouvera d'excellents préceptes d'hygiène mis à la portée de tous, exposés dans une langue qu'on peut appeler populaire dans le bon sens du mot. L'auteur a simplifié et schématisé les choses dans des aphorismes frappants pour le lecteur et aux- quels on ne peut reprocher parfois qu'un peu trop d'absolutisme. M. Lanpé, Prof. agrégé à la Faculté de Médecine de Paris, 5° Sciences diverses Paulhan (Fr.). — Les Mensonges du Caractère. — 4 vol. in-8° de 276 pages (Prix : 5 francs). F. Alcan, éditeur. Paris, 1905. « Rien n’est sincère en nous. Du moins, rien n'y est tout à fait sincère » (p. 1). « La simulation est partout et toujours, et jamais elle n’est absolue » (p. JACAL certains égards, la simulation elle-même est simulée » (p. 276). Telle est la thèse générale du nouveau livre de M. Paulhan. Et il décrit quelques-unes des formes de cette simulation incomplète, mais universelle; il montre comment les uns dissimulent leur véritable caractère sous une apparence d’impassibilité, les autres sous une sensibilité feinte, comment nous montrons à autrui et à nous-mèmes le caractère que nous voudrions posséder plutôt que celui que nous possédons réellement. Cer- tains de ces « mensonges du caractère » sont destinés à nous protéger contre un milieu social auquel nous sommes mal adaptés, soit en nous isolant (fausse im- passibilité), soit en nous rendant sympathiques (fausse sensibilité). Mais la cause générale qui explique pour M. Paulhan ces simulations, c’est la complexité de tout caractère. Les éléments qui le constituent sont souvent contradictoires. Tout désir est, par suite, accompagné d'une aversion. Toute volonté est une nolonté, car vouloir avec réflexion, c'est triompher des désirs hostiles à la résolution définitive. « Tout acte volon- taire estune hypocrisie en tant qu'il n’est pas en har- monie avec l’ensemble complet du moi » (p. 115). Et cette complexité des éléments du caractère explique pourquoi la simulation n’est jamais complète : c’est en vertu d’une tendance de notre caractère, secondaire, mais réelle, que nous en dissimulons les tendances principales. Ë Ces idées sont développées avec beaucoup de finesse, et nul ne refusera à M. Paulhan de précieuses qualités d'observateur. Nous nous demandons pourtant si ses observations etses analyses ne pourraient pas être plus méthodiques. En somme, rien ne nous garantit leur exactitude, sinon la confiance que nous pouvons avoir dans l’auteur. Les caractères qu'il décrit sont peints d'après des modèles que nous ne connaissons pas, que M. Paulhan a observés du dehors, et dont il donne une interprétation que nous ne pouvons pas contrôler. Nous nous demandons, en outre, s'il est légitime de confondre dualité et duplicité, et de dire que nous simulons un caractère qui n’est pas le nôtre toutes les fois que nous ne révélons qu'un aspect de notre person- palité. Se montrer tel qu'on voudrait ètre, ce n’est pas dissimuler sa véritable nature, c’est faire connaitre l'idéal qu'on poursuit réellement. Bref, le sujet traité par M. Paulhan, c’est moins les « mensonges » que les contradictions du caractère. Pauz LaPie. Chargé de Cours à l'Université de Bordeaux, 874 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 1 Septembre 1905 *. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Gr. Darboux com- munique quelques observations sur une équation diffé- rentielle du quatrième ordre. — M. A. Demoulin pré- sente ses recherches sur deux systèmes cycliques particuliers engendrés par des intersections de sphères orthogonales. — M. Auric généralise diverses propo- sitions relatives aux fractions continues algébriques. — M. Zervos communique ses recherches sur le pro- blème de Monge. — M. H. Deslandres présente quelques remarques sur l’état actuel des recherches solaires et sur les moyens de les améliorer. — M. G. Rayet a observé l'éclipse de Soleil du 30 août à Burgos dans des conditions assez défavorables. — M. G.Meslin : Sur l'éclipse du 30 août et la polarisation de la cou- ronne solaire (voir p. 749). 20 Scrences PHYsiQues. — Le Prince de Monaco a fait, à bord de la Princesse-Alice, 26 lancements de ballons-sondes au-dessus des océans, dont 8 dans la Méditerranée et 18 dans la région des alizés et au nord des alizés. La hauteur maxima atteinte a été de 14.000 mètres au-dessus de l'Atlantique. — M. Th. Mou- reaux a observé la trombe qui s’est abattue le 28 août à Saint-Maur et à Champigny (Seine). Le mouvement de rotation était en sens inverse de celui des aiguilles d’une montre. —MM.H.dela VaulxetJ.Jaubert décri- vent les observations météorologiques qu'ils ont faites à Constantine pendant l'éclipse du 30 août, à terre, en ballon et au moyen d'un ballon-sonde. La température a baissé de 5° à terre et de 3 à 4° seulement dans les couches supérieures. — M. L. Libert a observé à Tripoli le phénomène des ombres volantes pendant Rate totale du 30 août. Le phénomène est sem- blable à celui qui est produit sur le mur d’une chambre opposé à une fenêtre dont les persiennes sont closes et donnent sur la mer. — M. H. Becquerel a reconnu que le rayon de courbure de la trajectoire des rayons a du radium dans un champ magnétique, dans l'air, va en augmentantle long de cette trajectoire ; il montre que ce fait ne s'explique pas par la présence de rayons animés d'inégales vitesses, comme le voudrait M. Ru- therford. — M. G. Malfitano montre que les unités physiques des abuminoïdes ont une composition et des propriétés qui varient d'une façon continue : ce sont des micelles, ou agrégalts de molécules peu ou pas solubles, associées avec des électrolytes. Il est probable que le mécanisme de la peptonisation consiste dans un changement de la nature des sels qui font partie des micelles. — M. L. Cayeux estime que les expériences de Daubrée, invoquées par MM. Delage et Lagatu, loin d'appuyer leur hypothèse de la dissolution directe des silicates de la terre arable, montrent simplement la décomposition des feldspaths par leau. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. G. Ullmann a reconnu que le clignement vibratoire des paupières est toujours l'indice d'une affection rénale, plus particulièrement à son début. — M. C. Spiess montre que la présence de pigments biliaires chez la sangsue médicinale est une conséquence de son régime alimentaire (nutrition exclusive de sang: c'est une nouvelle preuve de l'origine hématique des pigments biliaires des animaux supérieurs. — M. Ed. Bureau a observé diverses : Dans la séance du 21 août, une communication sur les lois du frottement a été attribuée, par erreur, à M. J. Hada- mard ; elle est due, en réalité, à M. P, Painlevé. plantes dans la Loire-Inférieure au cours de l’éclipse solaire du 30 août. L'Acacia dealbata replia complè- tement ses feuilles, comme pendant la nuit; les autres plantes ne montrèrent aucune sensibilité. Séances du 18 Septembre 1905. 4° SGrENCES MATHÉMATIQUES, — MM. H. Deslandres, H. Andoyer et D. Eginitis donnent quelques détails sur les observations de l’éclipse de Soleil du 30 août qu'ils ont faites respectivement à Burgos, à El-Arrouch (près de Philippeville) et à Athènes. 20 Sciences PHYSIQUES. — M. G. Urbain est parvenu à isoler, après des fractionnements incessants qui ont duré près d'une année, 7 grammes de terbium pur, à spectre d'absorption caractérisé. Son poids atomique, déterminé par dosage d’eau dans le sulfate hydraté, est de 159,2. Séance du 25 Septembre 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. P. Duhem montre que le principe des déplacements virtuels, sur lequel Descartes a proposé de fonder toute la Statique, a été employé pour la première fois par Jordanus de Nemore, au début du x siècle. — MM. Salet et Ch. Trépied communiquent leurs observations de l’éclipse de Soleil du 30 août, faites respectivement à Robertville et à Guelma (Algérie). 20 SCIENCES NATURELLES. — M. J. Dauphin a observé que l'alcool ordinaire, quoique très nuisible en général au développement du Mortierella polycephala, peut à m faible dose permettre la formation de chlamydospores M et d'œufs. — M. W. Lubimenko a reconnu que l'énergie assimilatrice des feuilles est sous la dépen- M dance de la concentration du pigment dans les grains de chlorophylle. La courbe qui représente cette énergie peut, suivant la concentration du pigment, s'élever jusqu'à la limite supérieure de la radiation naturelle (plantes ombrophobes) ou s’abaisser avant (plantes ombrophiles). — M. L. A. Fabre montre que l'asepsie des eaux sauvages (issues des sols incultes) est le résultat d'un phénomène essentiellement biologique. L’oxygènen de l'air pénètre lentement avec les eaux d'infiltration, détruitles matières organiques du sol, exalte la vitalité des microbes aérobies fertilisateurs et élimine les anaérobies pathogènes. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Séance du 13 Avril 1905 (fin). MM. V. H. Veley et J. J. Manley présentent leurs recherches sur les indices de réfraction de l'acide sul lurique à différentes concentrations. Les indices de réfraction des mélanges d'acide sulfurique et d’eau de concentrations variant de moins de 1 °/, à plus de 99 °/, ont été déterminés pour les quatres lignes H>, D, H et Hy, et les résultats comparés avec les déter= minations antérieures de Van der Willigen. Les coeffi= cients de température ont été mesurés el l’on s'en est. servi pour réduire tous les indices de réfraction à une température commune de 15°. La valeur maximum des indices de réfraction et de la première constante de la formule de Cauchy correspond approximativement à Jar composition de l'hydrate HESO‘H?0; mais toute indicas tion de l'existence d’autres hydrates est douteuse. Le facteur de Lorentz, (u®— 1) (a? +2) d, est une fonction linéaire du pourcentage jusqu'à 90 °/,, ou, en d'autre termes, l'élasticité éthérale est compensée par la den= sité. Il y a, toutefois, une légère altération à environ 30 0/, de concentration. Les indices de réfraction, 1 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 875 constantes de Cauchy et le facteur de Lorentz présen- | expressions donnant l'indice de réfraction et le coef- … tent tous des irrégularités pour les concentrations allant de 92 à 100 °/,; elles sont, cependant, concordantes entre elles et indiquent une densité maximum à environ 97 °/, etun point minimum entre 99 et 100 °/,. La question subsiste donc de savoir si une substance … représentée par la formule simple H?SO* existe comme — entité distincte. Séance du 8 Juin 1905 (suite). M. W.-E. Wilson : Zvolution du spectre d'une étoile pendant sa croissance d'une nébuleuse. Voici les résultats de cette étude : 4° Si la température d’une étoile est suffisamment élevée pour permettre aux gaz, s'ils sont assez denses, d'émettre toutes leurs lignes jusqu'à l'extrême ultra-violet, alors une augmentation de la température altère peu leur spectre; 2° Des diffé- -rences dans la pression partielle d'un gaz quelconque dans deux étoiles de même température peuvent avoir un grand effet sur la détermination des lignes visibles dans leur spectre; 3° Des étoiles dont les températures — s'élèvent et s’abaissent légèrement à partir du point … critique auquel les nuages photosphériques se forment diffèrent sensiblement dans leur spectre; 4° D’après ce qui précède, il semble impossible de classer les étoiles d’après une échelle de température seulement. — — MM.B. Hopkinson et F. Rogers ont étudié les pro- -priétés élastiques de l'acier à haute température. Les températures ont atteint 800° et les tensions sont tou- jours restées très inférieures à celle qui provoque la rupture de la substance. Lorsque la température s'élève, les relations entre la tension et la déformation subissent un changement remarquable, qu'on peut exprimer en disant que l'effet de temps (post-action élastique) aug- mente fortement avec la température. L'acier, aux hautes températures, se comporte comme le caoutchouc … ou le verre; s’il est soumis à une tension pendant un … certain temps, puis qu'on supprime la charge, il ne revient pas aussitôt à son état primitif; mais, après la rétraction élastique, il y a une faible contraction, per- ceptible pendant plusieurs minutes. Cet effet peut être décelé à la température ordinaire; mais, au rouge, il atteint un ordre de grandeur élevé et forme une notable fraction de la déformation totale. — M. C. Me Leod à enregistré les différences de température entre l'Obser- — vatoire du Collège Me Gill et le sommet du Mont Royal, … à Montreal. Cet enregistrement présente ce caractère particulier que,.le sommet de la montagne étant inac- cessible pendant la plus grande partie de l'hiver, les indications des instruments qui s'y trouvent placés sont — obtenues à la ville mème par une transmission élec- … trique couverle. Les thermomètres sont du type Cal- lendar à résistance de platine. Le système a fonctionné - parfaitement pendant plus d’une année. On a observé que tout changement marqué de température à la - station inférieure est invariablement précédé par un “ changement analogue à la station supérieure dans un … intervalle de vingt-quatre à quarante-huit heures. — Sir W. Crookes a étudié e spectre de phosphorescence « de l'europium pur d'Urbain, sous forme de sulfate igné — soumis aux radiations cathodiques dans un tube à vide, - Le spectre visible consiste presque exclusivement en - deux lignes rouges, dont la plus réfrangible (16.153) est nébuleuse et faible, tandis que l’autre (1— 6.128) est définie et très brillante, et en une faible luminosité dans “la position de.la ligne du sodium. La forte ligne, que … Demarçay pensait être identique avec celle de Sô, ne | - l'est pas en réalité, la longueur d'onde de la ligne de Si étant 6.094. Toutefois, lorsqu'à un mélange de Ytet - de Sm on ajoute un peu d'Eu, on voit se former une ligne brillante, à À — 6.094, identique avec la ligne de «Sè. D'autre part, l'addition de chaux à l’europium pro- duit un déplacement de la ligne forte de ce dernier “vers À— 6.153, (tandis que la ligne faible devient presque aussi intense que son compagnon. — M. J. C. M. Gar- _nett poursuit ses recherches sur les verres, les pelli- cules et les solutions métalliques. I calcule d'abord des & : ficient d'absorption d'un milieu complexe consistant en métal à l'état de petites sphères (granulaire) et de molé- cules discrètes (amorphe), diffusées dans un milieu transparent non dispersif, isotrope, en fonction des constantes optiques correspondantes du métal normal. On en déduit immédiatement les formules particulières qui s'appliquent quand la proportion en volume y du métal dans le milieu complexe est faible. Au moyen de ces formules et des valeurs numériques des constantes optiques de l'or, de l'argent et du cuivre pour la lumière monochromatique de diverses longueurs d'ondes, l’au- teur calcule les valeurs des constantes optiques corres- pondantes des diffusions de sphères et de molécules de ces métaux dans le verre, l’eau et le vide. L'auteur mesure alors l'absorption de lumière monochromatique par des verres rubis d'or et de cuivre et des verres d'argent. La comparaison des absorptions mesurées du verre rubis d'or avec les absorptions calculées de sphères d’or et de molécules d’or diffusées dans le verre montre que la couleur du verre rubis d’or est due en premier lieu à la présence de sphères (et non de molécules) dans le métal. La présence de cristallites, formées par la coagulation de sphères d’or, et réfléchissant la iu- mière rouge, rend compte des colorations pourpre et bleue irrégulières transmises quelquefois par les verres d'or. Ensuite, quand on compare les absorptions d'une solution colloïdale d’or dans l’eau avec les absorptions calculées de sphères et de molécules d’or diffusées dans l’eau, il en résulte que l'or colloïdal consiste en petites sphères en suspension. On arrive à des conclusions identiques pour le verre teinté à l'argent et pour les solutions colloïdales d'argent, ainsi que pour le verre rubis de cuivre, quoique, dans ce dernier, quelques molécules de cuivre soient probablement présentes. Le calcul montre que des sphères diffusées de cobalt don- neraient au verre une coloration rougeûtre; le verre de cobalt n’est donc pas coloré par le métal sous forme métallique. Les couleurs produites dans les verres d'or, d'argent et de sodium par la radiation de l’'émanation du radium semblent montrer que ces verres contiennent des ions métalliques libres, et que c'est par la décharge de ces ions et la réduction subséquente du métal que les rayons cathodiques et de Becquerel sont susceptibles de colorer les verres. Enfin, l’auteur arrive à la conclu- sion que l'argent de Carey Lea n'est pas allotropique, mais consiste en argent normal à l’état finement divisé, mais pas nécessairement granulaire. — MM. C. Cuth- bertson et E. B. R. Prideaux ont déterminé l'indice de réfraction du fluor gazeux pour la lumière jaune au moyen du réfractomètre de Jamin. La valeur moyenne de quatre expériences pour la réfractivité (u-1)105 est de 195. Elle est à celle du chlore dans le rapport de 1 à 4, comme celles de Ne, O et Az à celles de Ar, S et P. — MM. J. Th. Cash et W. R. Dunstan communiquent leurs recherches sur la pharmacologie de l'indaconitine et de la bikhaconitine. Ces deux nouvelles aconitines ontété isolées de deux variétés de l’aconit indien. L'une, l'indaconitine, a été trouvée dans les racines de l'Aco- nitum napellus, var. hians, de Brubl, considéré aujour- d’hui par Stapf comme une espèce nouvelle, qu'il nomme À. chasmanthum. L'autre, la bikhaconitine, dérive de l’une des formes les plus vénéneuses de l’aconit, connue aux Indes sous le nom vernaculaire de «bikh»; c’est l'A. ferox, var. spicatum, de Bruhl, dont Stapf a fait une espèce distincte sous le nom d'A. spicatum. Les deux aconitines ont des effets qua- litatifs identiques à ceux des autres alcaloïdes de cette série : aconitine, japaconitine et pseudaconitine. La toxicité de l’indaconitine est moindre que celle de la bikhaconitine vis-à-vis des animaux à sang froid ; à cet égard, la première se rapproche de l'aconitine, tandis que la seconde, plus forte que la japaconitine, prend une position intermédiaire entre cet alcaloïde et la pseudaconitine, la plus active de la série. La dépres- sion de la fonction respiratoire par l’indaconitine est moindre que celle que produit la bikhaconitine. Des 876 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES doses répétées d’alcaloïdes, administrées à des inter- valles réguliers et dans les mêmes proportions fraction- naires des doses mortelles, sont suivies par un effet toxique plus marqué pour la bikhaconitine que pour l'indaconitine. L'effet local des deux aconitines, appli- quées à la peau par onction, est le même et semblable à celui des autres aconitines. L’indaconitine et la bikha- conitine peuvent donc être substituées à l’aconitine et à la pseudaconitine pour l'usage interne, l’indaconitine étant administrée aux mêmes doses que l’aconitine, et la bikhaconitine dans la proportion de 75 °/, de la dose unité de la première, tandis que, pour l'application lo- cale, elles peuvent être employées comme constituants des pomades dans la même proportion que l’aconitine. —M. W.-S. Perrin : Historique de la vie du Try pano- soma Balbiauïi. Le Trypanosoma Balbianii, certes estun membre primitif de la famille des Trypanosomidés; on le trouve en grand nombre à l’état de parasite dans l'intestin de l'huître, où il peut être présent, soit nageant librement dans le contenu liquide, soit enclos dans le style cristallin quand cette structure est présente. En résumant les points principaux dans l'historique de la vie du Trypanosoma Balbianti, on voit que tout le cycle de développement, à l'exception de la croissance d’indi- vidus frais des kystes, a lieu dans l'intestin d’un seul hôte. Dans le style, les trypanosomes subissent une division longitudinale comme méthode normale de multiplication, et, lorsque leur nombre est devenu con- sidérable, dans beaucoup de cas ils s'enkystent à la périphérie du style. Dans le style aussi, beaucoup d'indi- vidus subissent une dégénération, les coquilles vides du périplaste et la membrane ondulante déchirée se présentant parfois en quantités considérables. Lorsque le style disparaît, la production des gamètes a lieu, suivie par la conjugaison. Lorsque, pour une raison quelconque, l'huître est soumise à la faim et que le style disparait, les formes indifférentes ou s'enkystent ou se multiplient rapidement, s'atténuant dans le pro- cessus. Les formes femelles sont cependant plus résis- tantes, et dans ces mêmes conditions ne se multiplient pas, mais après un certain tempss’enkystent.llne parait pas exister de stades intra-épithéliaux dans l'intestin. La transmission du parasite semble se produire par les kystes seulement. Les points les plus intéressants mis en lumière par l'étude du Trypanosoma Balbranii sont peut-être les suivants : 4° Le caractère primitif des relations nucléaires dans l'individu normal; 2° La variabilité extraordinaire de la membrane ondulante, variabilité dont la corrélation avec une condition déter- minée de vie quelconque n'a pas été trouvée; 3° La méthode du changement nucléaire, comprenant la con- densation de la bande nucléaire spiralée en une baguette qui se segmente en chromosomes; 4° La méthode d'enkystement et la condition du noyau rappelant les bactéries; 5° L'existence d’apparences, dans l’enkys- tement de formes femelles, suggestives de la parthéno- génèse ; 6° La méthode de formation des gamètes mâles, comprenant une division longitudinale et l'expulsion de la substance nucléaire; 7% La nature résistante des formes femelles et la grande susceptibilité des ga- mètes mâles aux conditions défavorables; 8° La cor- rélation de la production des gamètes et de la pré- sence de la conjugaison avec la disparition du style. — M. E. Ray Lankester décrit une nouvelle espèce de Cephalodiseus draguée par la Discovery, le 13 janvier 1902, à 100 pieds de profondeur au large de l’île Coulman, près de la Terre Victoria, dans l'Océan antarctique. Cette espèce se distingue nettement du C. dodecalophus par le caractère massif de lacolonie, lacouleurnoireetlagrande taille des polypides, et la restriction des polypides et de leurs bourgeons en tubes séparés. C'est done une espèce nouvelle, pour laquelle l'auteur propose le nom de C. nigrescens. — M. E. Drabble et M'e H. Lake ont étudié l'effet de l'anhydride carbonique sur lincur- vation géotropique des racines de Pisum sativum. On sait que des racines placées horizontalement dans l'eau bouillie ne répondent pas au stimulus géotropique, par suite de l'absence d'oxygène. 11 en est de même quand les racines sont placées dans l'hydrogène ou d’autres gaz indifférents. Le stimulus, cependant, est perçu, car si la plante est enlevée de l’eau boüillie ou du gaz, puis placée verticalement dans l'air, la tige de la racine exécute un mouvement en dehors de la verti- cale dans la direction du stimulus primitif. L'annydride carbonique étant considéré comme un poison proto- plasmique, mais agissant cependant à petites doses comme un stimulant, il était intéressant d'observer son action sur les incurvations géotropiques. Quand le stimulus agit pendant 15 minutes sur des racines placées horizontalement, les unes dans l’air, les autres dans un courant de CO®, il n'y a pas de différence appréciable de courbure entre les deux séries quand elles ont été re- placées dans l'air après la fin de l’action du stimulus. Mais, quand le stimulus agit pendant 20 minutes, la courbure commence toujours à se manifester plus tôt chez les plantes traitées par CO?; cette différence doit ètre attribuée à la lente pénétration des cellules par le gaz. Puis, quand la stimulation a duré ?%5 minutes, l'excès de courbure des plantes traitées par GO? diminue de façon appréciable, CO? ayant probablement pénétré en trop grande quantité dans les cellules et ayant dé- passé la concentration optimum pour l'excitation. — M. O. Rosenheim a examiné des fragments de cara= paces de Pteryqotus osiliensis trouvés dans des roches siluriennes de l’île d'Oesel, au point de vue de la pré-= sence de chitine. Il conclut que la facon générale dont se comporte la substance vis-à-vis des acides et des solvants est telle que c’est probablement de la chitine; en effet, après ce traitement, cette substance donne par hydrolyse avec HCI concentré, une substancen fortement réductrice qui est vraisemblablement den la glucosamine. — M. R. Kidston : Note préliminaire sur l'existence de Microsporanges en connexion orga= nique avec le feuillage des Lyginodendrun". vd és V6 OS PRES PET RP NRA PRE A SRE AT er TÉL me hs |, Communications reçues pendant les vacances. M. T. Zammit a reconnu que les chèvres sont sus- ceptibles de prendre la fièvre de Malte et que cette affection peut ètre propagée chez l'homme par le moyen de la chèvre. — M. W. H. Horrocks a étudié la propa= gation de la fièvre méditerranéenne par les chèvres. I a constaté que plusieurs chèvres, dans divers troupeaux examinés à Malte, souffraient de la fièvre méditerra« néenne. Le Micrococcus melitensis est exsudé dans IE lait en quantités énormes quand la maladie s’est déve loppée pendant un temps assez long pour produire un changement dansles caractères physiques de ce liquide: Il est aussi excrété en grand nombre, même quand les animaux sont en «plein lait» et qu'aucune modification n'a été notée dans les propriétés physiques ou chi miques du lait. Le M. melitensis est aussi excrété dans, l'urine des chèvres souffrant de la fièvre méditerra= néenne; mais, jusqu'à présent, il n’a été trouvé que lorsque la maladie existait depuis quelque temps et que le lait était déjà modifié. ERRATUM Dans le numéro du 30 août dernier, page 728, 2° co lonne, note 1, lire : M. Jean Becquegel, au lieu de M. Jean Buquerol. 1 Voir, à ce sujet, le récent article de M. R. Zeïller sur « une nouvelle classe de Fougères fossiles, les Ptéridospers nées », dans la Revue du 30 août 1905. ; EE ————]—_]——] ———— Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE N° 20 30 OCTOBRE 1905 Revue générale Des SCien pures el appliquées Direcreur : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aûresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Météorologie La Conférence des Directeurs de Services météorologiques à Innsbrück.— À Innsbrück, s’est réunie, du 9 au 15 septembre 1905, la Conférence internationale des Directeurs de Services et d'Observa- toires météorologiques. Cette réunion, à laquelle assis- taient une cinquantaine de météorologistes, avait à discuter un cerlain nombre de questions portées à son ordre du jour (exactement 40), et surtout elle avait à élire les membres du Comité international Météorolo- gique; ce Comité de 15 membres tient ses pouvoirs de la Conférence des Directeurs, et le mandat du Comité élu en 1896 expirait en 1905. La précédente Conférence des Directeurs s'était réunie en 1896 à Munich. En 1904, le Bureau du Comité inter- national avait arrèté la liste des personnes à inviter à la Conférence d’Innsbrück : outre les chefs de services ou directeurs d'observatoires, étaient invités quelques météorologistes spécialement qualifiés: c'est à ce titre que M. Durand-Gréville, par exemple, était invité à la réunion d’'Innsbrück, qui avait, entre autres questions, à discuter l'étude des lignes et des rubans de grains. M. Mascart, président du Comité international, ayant dû renoncer, pour raison de santé, à faire le voyage de d'Innsbrück, MM. Violle et Moureaux s'étant également excusés, les membres français de la Conférence étaient au nombre de cinq: MM. Angot, Teisserenc de Bort, Marchand, Brunhes et Durand-Gréville. Les chefs de services appartenant à l'Allemagne ou à l'Empire d'Au- triche-Hongrie étaient naturellement plus nombreux. La Conférence, après avoir exprimé ses regrets pour l'absence de M. Mascart, nomma président d'honneur M. Hann, et président M. Pernter, directeur du Service météorologique d'Autriche. Parmi les météorologistes présents, on peut citer M. von Bezold, de Berlin; le général Rykatcheff, de Saint-Pétersbourg; M. Shaw, de . Londres; M. Hépites, de Bucarest; M. Hildebrandsson, d'Upsal; M. Mohn, de Christiania; M. Paulsen, de Copenhague; M. Hergesell, de Strasbourg ; M. de Kon- koly, de Budapest; M. Polis, directeur de l'Observatoire d’Aix-la-Chapelle ; M. Rizzo, directeur de l'Observatoire de Messine; M. Stupart, de Toronto (Canada); M. Sil- vado, chef du Service météorologique du Brésil; le R. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. P. Froc, directeur de l'Observatoire de Zi-ka-wei; le R. P. Algué, directeur de l'Observatoire de Manille; M. Lawrence Rotch, Directeur de Blue Hill Observa- tory, etc. Enfin, Sir Norman Lockyer à pris part aux travaux de la Conférence et présidé la « Commission solaire ». Les membres sortants du Comité international ont été réélus; et, à la place laissée vacante par le décës, tout récent, du Directeur du Service météorologique suisse, la Conférence a nommé M. Nakamura, Directeur du Service météorologique du Japon. Le Comité inter- national, à son tour, a réélu son bureau, composé de M. Mascart, président, et de M. Hildebrandsson, secré- taire. s Le Comité international, qui tient ses pouvoirs de la Conférence des Directeurs, nomme à son tour, au sein de la Conférence, des Commissions qu'il charge d’é- tudier certaines questions spéciales, d'entreprendre certaines recherches ou de préparer des projets de déci- sions à soumettre à une Conférence ultérieure. Quel- ques-unes des Commissions ainsi constituées ont joué, daos ces dernières années, un rôle essentiel dans l'or- ganisation des travaux communs en Météorologie. L'une d'entre elle, qui a été particulièrement active, a été la Commission des nuages. Sous la direction de M. Hildebrandsson, elle s'était donné pour mission de promouvoir et de centraliser des observations continues, effectuées durant une année, sur la marche des nuages supérieurs, dans tous les observatoires du globe. C’est cette grande enquête qui a conduit aux résultats, désormais bien établis, qu'ont exposés MM. Hilde- brandsson et Teisserenc de Bort dans leur ouvrage sur les Bases de la Météorologie dynamique, et qui jettent une vive lumière sur le problème si difficile de la circulation générale de l'atmosphère. C'est une délé- gation de trois membres de cette Commission des nuages qui a rédigé et publié l'Af/as international des nuages. La Commission des nuages, ayant accompli la mission qui lui avait été confiée, a été déclarée dissoute. La Commission d'Aérostation scientifique, chargée de coordonner les résultats obtenus dans l'exploration de la haute atmosphère, et de promouvoir des lancers de ballons-sondes et de cerfs-volants à des jours fixes, .en 20 878 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE divers points du globe, a vu ses pouvoirs renouvelés : elle a toujours pour président M. Hergesell. x La Commission solaire, que préside Sir Norman Lockyer, a pour but tout spécial d'établir une collabo- ration entre astronomes et météorologistes et d'indiquer aux uns et aux autres les travaux dont la poursuite, dans une des deux sciences, serait particulièrement utiles aux progrès de l’autre. La Commission de la radialion solaire, qui avait jusqu'ici pour président M. Violle, s'était attachée à une étude comparée des divers instruments émployés pour la mesure de la chaleur solaire. Elle à proposé à la Conférence, par un Rapport de son président dont les conclusions ont été adoptées, de recommander l'usage général du pyrhéliomètre électrique d'Angstrôm. M. Violle ayant absolument décliné le renouvellement de ses pouvoirs, la nouvelle Commission sera présidée par M. Angstrom: elle aura surtout pour mission d'établir un programme de travail en indiquant dans quelle série de stations il y-aurait intérêt à poursuivre des mesures simultanées. La Commission du magnétisme terrestre, renou- velée et complétée, a décidé de constituer un Bureau permanent, chargé de se tenir en relations constantes avec les directeurs d’observatoires magnétiques et les personnes qui s'occupent de magnétisme terrestre, et de centraliser les résultats des observations. Ce bureau a pour président le général Rykatcheff, qui remplace M. Rücker, et pour secrétaire M. Schmidt, de Potsdam. Enfin, la Conférence a chargé une Commission spé- ciale de trois membres: MM. Durand-Gréville, Hilde- brandsson et Shaw, de recueillir auprès des directeurs d’observatoires tous les renseignements possibles sur le passage des grains d'orage ou des grains de vent, et elle a appelé l'attention des météorologistes sur ces phé- nomènes. La Conférence à enfin pris des décisions fermes sur des dénominations à employer, des méthodes de réduc- tion ou de calcul à prescrire, des appareils à recom- mander, dont l'énumération ne saurait trouver place ici. Ajoutons que les membres étrangers ont reçu de leurs collègues d'Autriche, et avant tout de M. le Pro- fesseur Pernter et de Mwe Pernter, l'accueil le plus empressé et le plus cordial. $ 2. — Physique Nouvel essai infructueux de liquéfaction de lhélium. — Peu après la découverte de l'hélium, sir James Dewar annonça qu'il avait obtenu un point de rosée en comprimant de l’hélium de Bath dans un tube refroidi à l’aide d’un bain d'hydrogène liquide ; puis, la liquéfaction s’arrêtant en chemin, il reconnut que les gouttelettes observées étaient dues à une petite quantité de néon, dont l’hélium n'avait pas été entiè- rement débarrassé. Le Professeur Olszewski, dont les premiers essais de liquéfaction de l'hélium sont contemporains de ceux de sir James Dewar, vient de faire, dans des conditions plus parfaites, une nouvelle tentative de liquéfaction, restée également infructueuse, malgré le refroidisse- ment réalisé, qui dépasse tout ce qu'on avait obtenu jusqu'ici. L'hélium, préparé en partant de la thorianite de Ceylan, le nouveau minéral très riche en hélium étudié par sir W. Ramsay‘, était d’abord soumis à un refroidissement intense par compression dans un bain d'hydrogène solide, de manière à réaliser la séparation complète des gaz étrangers. Après cette opération, sa densité, égale à 3,99 (0—16), indiquait qu’effective- ment le gaz était pratiquement pur. Pour les essais de liquéfaction, le Professeur Ols- zewski a pu disposer de 300 centimètres cubes d'hélium, qu'il comprimait jusqu’à 180 atmosphères, et refroidis- sait à —259° (14° absolus), dans un bain d'hydrogène RE CE AE PE RE PE PR RE AC PU ER RSR RE ? Voir la Revue du 15 octobre, commençant à se solidifier sous la pression de 50 millimètres de mercure. La solidification complète de l'hydrogène était évitée, afin de permettre de voir ce qui se passait dans l’éprouvette. Les détentes ont été faites jusqu'à une série de pressions décroissantes, qui, suivant la loi de Laplace et Poisson, devaient amener le gaz aux températures indiquées dans le tableau suivant : PRESSIONS DE LA DÉTENTE TEMPÉRATURES 40 atmosphères. . 26504 20 — — 261,2 10 — — 268,6 5 — — 269,17 1 — — 211,3 Dans aucune des expériences il n'a été possible de voir la moindre trace d’un nuage ou d'une conden- sation. La température d’ébullition de l’hélium, sous la pression atmosphérique, est donc à moins de 2 degrés du zéro absolu. Le Professeur Olszewski fait suivre l'indication du résultat de son expérience, très belle quoique négative, de quelques réflexions qu'il paraît utile de reproduire textuellement : « Nous ne pouvons pas être certains que l’on arrive jamais à liquéfier l’hélium à l’état statique, car la pro- babilité de cette liquéfaction diminue à mesure que la limite de sa température d’ébullition est reculée vers le zéro absolu. S'il restait impossible à l'avenir de liquéfier l'hélium, on pourrait peut-être alors démon- trer, par une autre voie, qu'il est, ou qu'il n’est pas un gaz permanent. La preuve que l'hélium est un gaz per- manent serait, pour la science, aussi importante que sa liquéfaction éventuelle. » L'influence de l’ionisation sur la conduc- tivité des cohéreurs. — L'effet des cohéreurs, comme on le sait, réside essentiellement dans la con- ductivité temporaire qu'acquiertune poudre métallique sous l'influence des rayons électriques qui la frappent. Cet effet ne persiste que jusqu'au moment où il est compensé par des influences étrangères. Le mécanisme de ce processus n'étant pas encore bien élucidé, on lira avec intérêt la contribution à l'étude des cohéreurs que présente M. R. Thôldte dans le numéro 9 des Annalen der Physik. L'auteur se propose de rechercher si, au-dessous de la différence de potentiel critique (c’est-à-dire au-dessous du potentiel minimum nécessaire à la production des effets du cohéreur), la résistance électrique de ces dispositifs peut être réduite par quelque autre moyen, et notam- ment par une ionisation exaltée. Ses expériences font voir que la résistance des cohé- reurs diminue, en effet, de quantités appréciables sous l'influence des rayons du radium, mème au-dessous du point critique. D'autre part, les oscillations élec- triques se manifestent dans les bobines pour des inten- sités bien: plus faibles qu’en général, si l'ionisation a été augmentée. : La conductivité des cohéreurs produite par leur mise en court-circuit s'accroît de facon notable sous l'in= fluence du radium. On voit par là que la conductivité des cohéreurs dépend de deux facteurs, à savoir les vibrations élec- triques et l’ionisation. $ 3. — Électricité industrielle L'utilisation locale des chutes du Niagara. — L'utilisation des chutes du Niagara, qui a fait faire à tant de personnes, même éminentes, de si déraison= nables prophéties, vient de faire l’objet d’un très inté= ressant Mémoire de M. H. W. Buck à l'Association Oh Engineering Societies. Nous croyons qu'on ne saurait trop en faire ressortir l'intérêt, autant en ce qui con CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE cerne les conditions générales applicables à tous les cas que les données particulières inspirées par la situation spéciale du Niagara, que l’auteur connaît mieux que tout autre, en sa qualité de Directeur des nouvelles usines électriques. Il exprime l'opinion que, malgré les remarquables progrès faits par la trans- mission à grande distance, la plus grande partie de l'énergie développée est appelée à être utilisée dans un rayon de quelques kilomètres seulement autour du centre de production. « 11 ne faut pas se dissimuler que la transmission du courant électrique à grande distance est coûteuse. Considérons, par exemple, la transmission entre le Niagara et Buffalo. Le courant, à la sortie des dynamos génératrices, est amené à la tension de 22.000 volts par des transformateurs, qui, non seulement absor- bent une partie de l'énergie, mais exigent une dépense non négligeable pour leur fonctionnement, leur entretien et l'intérêt du prix de construction. En en sortant, le courant suit une ligne qui subit des droits de parcours et donne lieu à des dépenses d'in- térêt et d'entretien, sans compter la perte d'énergie qu'elle entraine. Arrivé à Buffalo, le courant est de nouveau transformé pour sa distribution dans la ville. Cette distribution s'effectue par un réseau très déve- loppé de conducteurs souterrains. Cette installation donne lieu à des dépenses d'intérêt et d'entretien, et exige un personnel important pour la surveillance. « On a constaté que la perte par transmission, entre Niagara et Buffalo, ne dépasse pas 10 °/,; mais il ne faut pas en conclure que l'énergie transmise ne coûte à cette dernière localité que 10 °/, de plus qu'au lieu de production ; la différence est considérablement plus grande. « Toutefois, même dans ces conditions, l'énergie fournie par les chutes du Niagara est amenée à Buffalo et livrée aux consommateurs à un prix moindre que celui auquel ils l’obtiendraient d'installations particu- lières. Mais l’économie n'est pas le seul point à consi- dérer. La suppression des machines et des chaudières dans les fabriques touche à diverses questions qui créent des conditions commerciales nouvelles. Lorsque l’entreprise du Niagara débuta, on prévoyait déjà le fonctionnement des usines de New-York par l'énergie développée par les chutes. Dans l’état actuel de l'in- dustrie électrique, cette possibilité n'est guère que théorique, car le travail transmis à une pareille dis- - tance par nos moyensactuels ne pourrait lutter comme prix avec le travail fourni par la vapeur. En théorie, on peut envoyer l'énergie du Niagara à San Francisco, mais le prix serait prohibitif. « Les industries ont intérêt à se grouper près des chutes pour avoir l'énergie à bon marché; autrement dit, il est préférable d'aller à l'énergie que de la faire pyenir. + «Il y a toutefois une exception à cette manière de considérer les choses, exception qui se présente dans le cas des tramways et des chemins de fer. On peut admettre que le rayon où la force peut être utilement transmise pour cette application peut atteindre 160 à 200 kilomètres. Les conditions sont particulièrement favorables à la transmission à grande distance ; en effet, ces entreprises emploient l'énergie sur une grande échelle, et, pouvant poser les conducteurs sur leur propre domaine, n'ont pas de droit de passage à payer. D'ailleurs, l'électricité peut lutter plus facilement avec la vapeur utilisée dans les locomotives qu'avec les machines fixes. « Actuellement, l'énergie distribuée par la Niagara « Falls Power Company peut se diviser en trois caté- —_gories : « 1° Le service local, comprenant les industries élec- - trochimiques et autres, comprises dans les limites de la ville de Niagara Falls. Cette partie représente, peur le moment, un total d'environ 45.000 chevaux, répartis entre trente fabriques, ce qui fait une moyenne de 1.500 chevaux pour chacune. Les plus gros consom- mateurs sont les usines électrochimiques, qui em- ploient le courant soit à l’électrolyse, soit à la pro- duction de hautes températures par le four électrique ; « 2° Le service canadien, auquel le courant arrive par les conducteurs qui suivent le pont métallique en are, et qui comprend diverses industries et chemins de fer électriques au Canada jusqu'à Sainte-Catherine. La consommation de courant est faible actuellement ; on ne peut guère l’évaluer qu'à 2.000 chevaux, mais on peut la considérer comme le début d’un important développement industriel de la rive canadienne du fleuve, développement qui ne peut manquer de se produire d'ici à quelques années ; « 3° Le service à longue distance, vers Buffalo, Tona- wanda, Lockport et Olcott, qui absorbe actuellement un fotal de 30.000 chevaux. A Buffalo, on emploie environ 24.000 chevaux, répartis entre un nombre considérable de consommateurs qui emploient l'énergie électrique pour toutes sortes d’usages. Dans ce chiffre estcomprise la partie qui correspond à la traction sur le réseau de tramways de Buffalo et à l'éclairage de la ville. « À Tonawanda, on emploie 4.000 chevaux pour les tramways, l'éclairage et diverses applications comme force motrice. A Lockport, là consommation s'élève à environ 6.000 chevaux, employés pour les tramways et divers autres usages. A Olcott, 500 chevaux servent au fonctionnement d’une des sous-stations de l’/nter- nationai Railway Company. Gette sous-station est située à 63 kilomètres des chutes; c’est actuellement la plus grande distance à laquelle l'énergie du Niagara est transmise. Tout le service des marchandises de l'International Railway, entre Olcott et Tonawanda, se fait par des locomotives électriques recevant le courant du Niagara. « Ces quelques détails sufliront pour donner une idée de l’état actuel des applications de l’énergie des chutes. On doit le considérer comme un début. En Amérique, on à vu, dans certains endroits, de grandes villes sortir pour ainsi dire du sol pour des raisons bien moins importantes que les conditions que crée le voisinage du Niagara. La contrée dont il s’agit est un point de rencontre de lignes de chemins de fer de premier ordre, un centre considérable de population et un champ illimité pour l'établissement économique d'in- dustries diverses ; c'est, de plus, le terminus oriental du trafic des Grands Lacs. Si l'on arrive à creuser le lit du Niagara, le trafic s'étendra jusqu'au pied mème des chutes, profitant d'une ligne de docks et d’entre- pôts de 30 kilomètres de longueur. Un jour viendra où s’étendra, de Buffalo aux chutes, une ville manu- facturière ininterrompue, sans cheminées ni fumées, triomphe de la puissance du Niagara. » $ 4. — Zootechnie La production du bétail français et la con- sommation de la viande. — La richesse de la France en bétail continue de s’accroitre : c'est un phé- nomène réjouissant pour l'avenir de l'agriculture, en même temps qu'il laisse prévoir un développement du bien-être par suite de la baisse possible du prix de la viande. La dernière statistique agricole publiée par le Minis- tère de l'Agriculture, et qui se rapporte à l'année 1903, renferme d'intéressants tableaux décennaux. C’est ainsi que, de 1894 à 1903, l’effectif des bêtes à cornes a pro- gressé d’une facon continue, passant de 12.879.240 à 14.105.090. Et encore faut-il noter un fléchissement assez considérable par rapport à l’année 1902, qui avait enregistré un maximum de 14.928.550. La progression de l'espèce porcine est plus forte encore, surtout dans les dernières années : pendant la même période, le nombre de ces animaux s'est élevé de 6.038.372 à 7.560.650. Le nombre des moutons témoigne, au con- 1 Economiste français des 5 novembre et3 décembre 1904, 12 août 1905. : 880 CHRONIQUEET CORRESPONDANCE traire, d'une diminution constante, s'abaissant, au cours de la décade, de 20.721.850 à 17.954.230. Le sens de ces mouvements se poursuit, d’ailleurs, depuis le com- mencement du xix° siècle, comme en témoigne le ta- bleau complémentaire suivant, dressé par M. de Foville : ANNÉES ES ÈCE BOVINE ESPÈCE OVINE ESPÈCE PORCINE (millions de têtes) 1512. 8 27 4, 1840. 412 32 A) 1562 . 13 29 6 1882. 43 2% a 1892. 12,5 21 6 1902. 14, 18 7.5 Ces fluctuations ont des causes générales; elles agis- sent dans le même sens par touté l'Europe. Devant la concurrence des pays neufs, tels que l'Australie, la Nou- velle-Zélande, la République Argentine, ainsi que devant la généralisation des cultures de plantes alimen- taires et industrielles, nécessitée par l'accroissement de la population, les troupeaux ovins ont partout diminué en Europe, les agriculteurs leur préférant les espèces bovine et porcine, plus rémunératives, et, en ce qui concerne le mouton, s'attachant aux races à viande, de préférence aux races à laine, tombées en défaveur devant la dépréciation profonde et continue de ce textile, La récente hausse du prix de la laine n'est imputable qu'à la diminution de la production australienne C'est qu'en effet, à la suite de sécheresses terribles, l'Australie a vu le chifire de ses troupeaux de moutons tomber de 106 millions de têtes, en 1892, à 5% millions en 1903. Cette période de sécheresse est maintenant terminée, les pâturages se reconstituent, et tout porte à croire que cette colonie reprendra sur le marché lainier sa prépondérance d'il y a quelques années. La chose est d'autant plus nécessaire que les deux pays qui viennent au second rang pour les expor- tations de laine, la République Argentine et l'Uruguay, imitent l'Europe et tendent à restreindre leurs envois de ce textile, attirés par les larges débouchés que les villes anglaises offrent à la viande de mouton, expédiée par bateaux frigorifiques. L'espèce bovine à non seulement gagné en nombre, mais encore elle s'est améliorée en qualité : le poids moyen des animaux à notablement augmenté, surtout le poids utile, et la sélection a produit des types magnifiques, adaptés aux usages que l’on veut en tirer et même aux goûts nationaux : tandis que le bœuf français présente à son verso — suivant l'expression de M. de Foville — d’opulentes rotondités, destinées à la confection de notre pot-au-feu, le bœuf anglais développe surtout ses aloyaux. Les porcs étant nourris principalement avec les déchets de la ferme, leur effectif a suivi le développe- ment de la vie agricole, d'autant plus que leur viande forme un appoint important dans la consommation des grandes villes; mais la concurrence américaine a pro- duit, à certains moments, des fluctuations. Aujourd'hui, grâce à l'élévation considérable des droits de douane sur le bétail, inscrits dans les tarifs de 1892 et plus que doublés en 1903, la concurrence étran- gère est impossible ; seules, l'Algérie et la Tunisie nous fournissent des contingents d’une certaine importance. Le lableau ci-dessous montre que notre consomma- tion en viande n'a pas suivi la même progression que l'effectif du bétail : Consommation moyenne par tête, en kilogrammes. POPULATION POPULATION l'OPULATION ANNÉES urbaine rurale totale LADA » » A7 LSAON- M ENS » » 20 1862 53,6 18,6 26 1882 6%,6 2180) 33 ASP EE 58,2 26,2 35 1902 CRE » » 35,5 Les habitants des villes ont donc réduit leur consom- mation de viande!, et, si celle-ci a augmenté dans les campagnes, la moyenne totale ne nous place qu'au 6° rang après l'Australie (119 kilogs), la Nouvelle- Zélande (96), les Etats-Unis (68), l'Angleterre (55), l'AI- lemagne (45). Dans un pays comme le nôtre, où l’aisance: s’est certainement développée depuis un demi-sièele et qui compte d'excellentes régions d'élevage, un pareil chiffre de consommation est faible; la raison prinei- pale doit en être cherchée dans le maintien des hauts, prix, entretenus par des droits d'entrée qui n'ont cessé de s'élever et auxquels viennent encore s'ajouter de lourdes taxes d'octroi. Tandis que nous importons 15 à 20.000 têtes de gros bétail, un million et demi de moutons, 5 à 6.000 porcs et quelques millions de kilogs de viande fraiche ou salée, l'Angleterre, qui n’a pas de droits d'entrée sur ces matières, fait venir un million de tonnes de viande, morte en grande partie, qu'elle reçoit d'Australie et d'Amérique. Et, grâce à cet apport, le mouton argentin peut se vendre à Londres de 1 fr. à 1 fr. 20 le kilog. et la consommation moyenne de viande s'élève à 24 kilogs 6 par tête d’habitant. P. Clerget. $ 5. — Physiologie La question des localisations cérébrales. — Au dernier Congrès de Psychologie, qui s'est tenu à Rome, on a beaucoup discuté sur la « physiologie des localisations cérébrales », question fort importante puisqu'elle est le pivot de toute une doctrine. Les phy- siologistes et les cliniciens enseignent que des lésions des îlots de la surface cérébrale doivent provoquer des troubles ou des paralysies bien délimitées et qu'il existe des zones motrices et des zones sensorielles bien définies. Pourtant, depuis quelques années, la Physiologie cérébrale, ne fut-ce qu'en ce qui concerne les lésions. des aphasiques, nous montre que le problème n’est pas aussi simple. Aussi bien la doctrine des localisations. cérébrales fut-elle ardemment discutée au Congrès de Rome. C'est le Dr Sciamanna, de Rome, mort récemment, qui attaqua expérimentalement cette question dans sa communication sur «les fonctions psychiques de l'écorce cérébrale ». Selon les idées courantes, om admet une relation étroite entre telle donnée intel- lectuelle, tel phénomène psycho-physiologique et l’in- tégrité d'une région bien délimitée de la topographie cra- nienne. D’après le Professeur Flechsig, de Leipzig, qui parla au Congrès sur «la physiologie du cerveau et les théories de la volonté », il existerait sur la surface céré- brale des zones qui seraient des centres d'idéation ; en d’autres termes, les fonctions psychiques seraient ratta- chées d'une façon particulière à une région déterminée du cerveau. De plus, on admet que chaque lobe cérébral a une fonction prédominante particulière. Ainsi, les lobes antérieurs frontaux et préfrontaux seraient le siège de toute l'intelligence. Cette tendance phréno- logique cérébrale a fait pousser cette exclamation au D Mæbius : « Gall redivivus! ». Le front olympien indiquerait donc encore une belle qualité cérébrale. Selon Flechsig, le cerveau frontal aurait des rapports très étroits avec la formation du sentiment du moi, donc de la conscience, de même qu'avec la formation des: notions abstraites. A cette opinion, le savantitalien répli- que que les zones d'association de l'écorce cérébrale de Flechsig ne doivent pas être considérées comme des centres intellectuels supérieurs, mais plutôt comme des centres d'enregistrement, des impressions. On peut les 1.On explique celte diminution par l'accroissement de la consommation des boissons alcooliques. Il nous semble, à l'inverse, plus juste de croire qu'avec la viande à plus bas prix et, d'une facon générale, l'alimentation moins chère, l'ouvrier, mieux nourri, subirait moins l'attrait des boissons alcooliques. r vf 2 ur 4 À CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE envisager comme des points nodaux destinés à dévier les courants intracérébraux, qui renseignent et qui ont comme point de départ l'activité des centres sensoriels. Selon M. Sciamanna, le lobe frontal n'aurait pas plus d'importance que les autres zones d'association. En 1894, un psychologue italien, M. Bianchi, avait fait des expériences sur des Singes, et il avait admis que les lobes frontaux participent aux plus hautes fonctions cérébrales; en 1900, il conclut que ces mêmes lobes servent à la fusion consciente de deux formes de l’activité intellectuelle : l'émotivité corpo- relle et la critique intellectuelle. Les lobes frontaux seraient, en somme, le siège de la direction de l'indi- vidu dans le milieu social. Les expériences récentes de M. Sciamanna, faites sur des Singes, n'ont pas donné les mêmes résultats. Deux animaux, chez lesquels les lobes frontaux ont été extir- pés, continuent à vivre, ayant les mêmes habitudes qu'auparavant; ils ont les mêmes tendances indivi- duelles instinctives et ils conservent les mêmes apti- tudes à l'éducation. Les lésions expérimentales n’ont pas changé leurs fonctions intellectuelles, ni leur per- sonnälité. Les lobes frontaux, d’après cet expérimenta- teur, ne doivent donc pas être considérés comme le siège des fonctions intellectuelles supérieures. Pour lui, l'intelligence est le résultat du travail du cerveau entier, fonctionnant harmonieusement et d'une manière régulière. Les troubles produits par des lésions par- tielles sont dus aux troubles provoqués dans cette harmonie, et nullement à ce que telle région de l’encé- phale serait le siège de l'intelligence. Il est difficile de se prononcer sur ces conclusions, car l’expérimentation est bien difficile dans ce domaine. Et, comme le fait remarquer judicieusement M. Vas- chide, les lésions expérimentales sont faites souvent d'une manière grossière ; puis, la délimitation des zégions opérées n'est qu'une convention d'anatomie descriptive. D'autre part, les rapports sont bien obscurs entre la race des animaux et les conséquences des traumatismes. Enfin, les chirurgiens racontent qu’en opérant des abcès cérébraux, on peut extirper sans danger un peu de la substance cérébrale. Dans l'état de nos connaissances actuelles, il nous semble donc difficile de parler des localisations définitives de l'intelligence. Et, lorsqu'on demande à M. Sciamanna son avis sur le. siège de la «conscience », il répond qu'il ne sait pas comment étudier la «conscience » chez les singes. Là est la difficulté. | $ 6. — Sciences médicales La tuberculose et habitation urbaine. — M. Lucien Graux vient de publier une étude sur les rapports de la tuberculose et de l'habitation insalubre à Paris, dont les conclusions devraient bien empêcher la construction de ces casernes, de ces « boîtes à loyer », si fréquentes à Paris, où les gens sont entassés les uns sur les autres, où l’air manque, où le soleil ne pénètre pas. D’après l’auteur, sur 80.000 maisons à Paris, 32.000 sont insalubres. Les habitants des premiers étages (1°", 2°, 3°) paient à la tuberculose un tributtrès considérable, plus considérable certainement que les habitants, cependant plus pauvres, des 4°, 5°, et6° étages. M. Graux insiste, chiffres en mains, sur l'importance de la lumière, de l'air, et il demande la limitation à deux ou trois étages de la hauteur des maisons; ainsi, ces étages bien aérés et bien ensoleillés redeviendraient salubres. Et puis, il faudrait aussi envoyer à la cam- pagne la plupart des petits Parisiens, pour les retremper et les revivifier, pour les purger, en tout cas, de l'air méphitique qu'ils respirent : les chiffres ne démon- trent-ils pas qu’alors que la tuberculose provoque, par an, à Paris, 51 décès par 10.000 habitants, les 18.000 en- fants assistés envoyés en province n'ont présenté que F 4 L. Graux : Progrès médical, 1905, et brochure, 1905. Paris, Rousset, éditeur. SSI 15 tuberculeux? Ces chiffres disent éloquemment com- bien il reste encore à faire aux pouvoirs publics dans la lutte contre la tuberculose. Dysostose cléido-cranienne héréditaire. — Sous ce nom, M. Pierre Marie a décrit, il y a quelques années, une dystrophie singulière, caractérisée par l'absence partielle des clavicules, un retard dans les soudures des fontanelles, le développement exagéré du diamètre {transversal du crâne, enfin par la transmis- sion héréditaire de cette mallormation congénitale. Les observations de ce genre sont encore assez peu nombreuses dans la science médicale. Cependant, les exemples qui en ont été publiés sont très caractéris- tiques. MM. Maurice Villaret et Louis Francoz ont présenté récemment à la Société de Neurologie une famille composée de quatre membres, la mère et trois enfants, atteints tous les quatre de dysostose cléido-cranienne. Dans ces cas, la clavicule présentait deux fragments, un externe et un interne, réunis par du tissu fibreux ou par une pseudarthrose. Chez la mère, la malfor- mation claviculaire est unilatérale, fait très rare. Chez le dernier né de la famille, on n'apercoit pas d'ano- malie claviculaire. M. Pierre Marie avait déjà noté que l'affection était moins caractérisée chez les derniers nés. Cette disposition singulière des elavicules n’est guère apparente à l’état de repos; mais, lorsqu'on rapproche les épaules du malade en avant, on peut arriver à mettre les moignons des deux épaules presque en contact. On ne peut faire que des hypothèses sur l’origine de cette malformation, qui, d’ailleurs, n’est pas incompa- tible avec un bon état de santé. MM. Maurice Villaret et Louis Francoz ont consacré une étude d'ensemble riche en bibliographie et en illustrations à tousles cas de dysostose cléido-cranienne connus jusqu'à ce jour. (Nouvelle Iconographie de la Salpétrière, n° 3, 1905.) $ 7. — Géographie et Colonisation L’Indo-Chine française et ses chemins de fer’. — La sécurité dont bénéficie, à l'heure présente, notre grande colonie d'Asie nous permet de songer désormais à l’œuvre économique. Malgré la fâcheuse répercussion de la baisse du mélal-argent sur le taux de change de la piastre et la mauvaise récolte de riz de 1903, le budget de cette mème année s’est encore soldé par un excédent de plus d’un million de piastres. Deux grandes améliorations sontindispensables..C'estd'abord le développementdes travaux d'irrigation, si importants dans un pays surpeuplé, comme les régions deltaïques, qu'un climat extrèmement variable expose à la disette et même à la famine. Or, ce qui a été fait jusqu'ici est peu de chose, et la raison en est que, faute de res- sources et de personnel, un Service indispensable d'Hydraulique agricole n’a pu encore être constitué. Cependant, des enquêtes préliminaires ont été faites, desquelles il résulte que le système du barrage des cours d’eau et de l'irrigation par simple gravité ne peut ètre employé qu'exceptionnellement; de plus, l'indi- gène préférant se passer d’eau plutôt que de la payer, il ne reste comme possible que l'irrigation entreprise par l'Etat, au moyen de canaux alimentés par des usines élévatoires C'est seulement lorsque ces projets seronten voie de réalisation que l’on pourra se tourner vers les cultures industrielles, qui attireront non seu- lement le colon européen, mais encore le cultivateur indigène. Sans oublier l'importance des autres Services agri- coles, et aussi celle du Service des Mines, qui vient à peine d'être organisé et de commencer ses explorations, nous ne retiendrons, parmi les nombreux projets du Ser- { Bulletin du Comité de l'Asie française, octobre 1904. 882 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE vice des Travaux publics, que ce quiconcerneleschemins de fer, la seconde grande amélioration, indispensable à l'essor économique de notre colonie. On sait qu'en vue de l'exécution d'un réseau ferré indo-chinois, une loi du 25 décembre 1898 a autorisé un emprunt de 200 millions de francs, dont 80, qui restaient encore à réaliser, viennent de l'être ces jours-ci. Les lignes pro- jetées étaient: Haïphong à Hanoï et à Laokay; Hanoï à Vinh; Saïgon au Langbian; Tourane à Hué et à Quangtri; Mytho à Cantho. La difficulté des études préliminaires et celle, plus grande encore, du recru- tement de la main-d'œuvre ont amené des retards qui ne sauraient surprendre. A l'heure actuelle, tous les chantiers témoignent d’une grande activité, et l’on pourra se rendre compte, par no- d'une ligne Saïgon-Ha-Tinh par le col de Dam-Phka, Oubôn, Savannaket etle col de Mengia: ce tracé aurait, en outre, l'avantage de se souder facilement aux lignes siamoises dont le développement remarquable doit être pour nous un stimulant. Il nous resterait encore à parler de nos projets de pénétration en Chine, si nous ne nous réservions d'y revenir prochai- nement dans une note consacrée au réseau ferré de ce dernier pays. P. Clerget. $ 8. — Enseignement L’'Éducation en Chine. — Le règlement de l’Ins- truction publique, dont la revision avait été confiée, le 29 juin 1903, à Tchang-Tchi- tre croquis (lig. 1), que les voies en exploitation forment déjà un réseau impor- tant. Le tracé prévu par la loi de 1898 s'inspirait natu- rellement de la routemandarime, qui suit le litto- ral de la mer; deux raisons im- portantes vien- nent de diriger de nouvelles étu- des d’un autre côté. C'est d'a- bord qu’en cas de guerre, la ligne côtière ne pré- senterait aucune sécurité pour la défense de notre colonie, et qu'en second lieu il est de toute néces- sité d'assurer no- tre pénétration dans la vallée du Mékong, soumise depuis plus de dix ans à notre influence politi- Phyntsns /Noun-Loung frraouady 2 M. L&khon / M.Long és LEGENDE Chemndeferenexploit". — En CONSÉPUCE mm —__ aletude en projet = eL Nieng-Khong Toung et aux deux Chanceliers de l’Université de Pékin, vient d'ê- tre mis à jour. Il forme cinq vo- lumes, dont on peut extraire quelques détails intéressants. L'instruction du Chinois, com- mencée à l’école primaire à l’âge de sept ans, dure vingt-six années, soit cinq ans à l'école primaire N \ simple, quatre à ù l'école primaire supérieure, Cinq à l'école moyen- ne, trois à l’école = supérieure, qua- He tre à l'Université etcinq au Collège des hautes étu- des. Il en résulte que le Chinois lettré, qui a suivi Ÿ Pnom-Penh Cambodge) assidüment tou- tes ses classes, Sr Te — _. : Ë QE termine ses étu- n luang-Prabang Hoi < Wem-Dinh = ol de, \ Mengis(250 \ — Quang-Tri Ÿ YSavannaket: ge Ouboi ÿ x" Pursat à = : des à l’âge de : trente-trois ans. que ef soustraite en fait à notre ac- tion, elcela d’au- tant plus que le dernier traité franco-siamois, entré en application au 4e janvier dernier, nous autorise à faire passer notre voie ferrée sur la rive droite de ce fleuve. A la suite du traité de 1893, les Siamois, refoulés vers l'Ouest, ont drainé vers la vallée de la Ménam la population et le bétail, dont les vastes terrains de culture abandonnés réstent les lamentables vestiges de leur départ, de sorte que la vallée du Mékong est äctuellement pauvre et dépeuplée; toutes les entreprises que peut y tenter actuellement la colonisation se heurtent, d’une part, à l'impossibilité de trouver de la main-d'œuvre, et, d'autre part, à l'absence de moyens de communication. Un bief navigable de 400 kilomètres, desservant des régions très fertiles ef des marchés importants, est inu- tilisable pour le commerce à cause des rapides qui barrent le Mékong entre ce bief et la mer. Il est donc indispensable de lui donner un débouché. De récentes études viennent justement de montrer la possibilité Fig. 1. — Chemins de fer de l'Indo-Chine. ‘étude deslan- gues étrangères ne commence qu'à l’école moyenne, quand l'élève entre dans sa seizième année. L'anglais et le japonais sont obligatoires; le français, l'allemand, le russe facultatifs. L'école primaire est gratuite et non obligatoire. Les autres écoles sont également facultatives. Les frais généraux sont à la charge des autorités, les élèves ne payant de rétribution qu'à partir de l’école moyenne. à Dans toutes les écoles, l'instruction est confucianiste et la fidélité envers l'empereur et la dynastie fait partie du programme. Le règlement ne dit rien des écoles de filles, ou plutôt il dit que les mœurs chinoises ne permettent pas pour le moment d'ouvrir des écoles de filles, et il émet la crainte que des jeunes filles trop instruites ne veuillent prendre la liberté de se choisir un mari et de se soustraire à l'autorité de leurs supérieurs: mari, père, mère, beau-père et belle-mère, F Borremans-del. ET : a E ere CPR C ÉD a Phoe E À due ee OÙ eu A RS TS eu CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OU LE PRÉJUGÉ DES RACES 883 LE PROBLÈME OU LE Si l'on veut aborder la comparaison entre les races humaines, il faut que ce soit sans parti pris, sans idée préconçue, à la manière des vrais savants, qui, lorsqu'ils étudient un problème, le considèrent en soi, tàchant d'oublier leur nationalité, leur époque, leurs sentiments personnels. C’est ce qu'on appelle être objectif. A se laisser entraîner par la passion du moment, ou par des tendances inté- ressées, on est conduit aux plus fatales erreurs. Il est impossible, cependant, de ne pas se rendre compte de l’acuité, toute actuelle, de cette grave question. Aussi peut-on prendre sans peine le rôle de prophète en annoncant que les conflits de races seront parmi les plus difficiles problèmes mondiaux que le xx° siècle aura à résoudre. Mais, plus il est redoutable, ce problème, plus on doit l’analyser avec sang-froid et impartialité. Tout d'abord, il faut s'entendre sur ce que signifient exactement le mot espèce et le mot race. À première vue, cela est tout simple; mais, comme il arrive toujours, on a beaucoup de peine à pré- ciser les mots, quand on en scrute un peu profon- dément le sens. Il existe des espèces franchement isolées de toutes les autres, de telle sorte que les transitions, les chainons intermédiaires apparaissent mal, Ainsi l'éléphant, par exemple; ainsi la girafe ; ainsi l'homme. L'espèce humaine constitue une unité tellement forte qu'il n'y a pas d'incertitude ni d’hésitation sur ses limites. Quelque convaincu qu'on puisse être de l’origine animale de l'homme, on est forcé de reconnaitre qu'il y a un fossé profond entre le premier des singes et le dernier des hommes, etce ne sont pas les chétives reliques du Pithecanthropus erectus qui pourront changer l'opinion unanime. Ce qui est vrai pour l'espèce humaine n'est pas vrai pour d'autres espèces vivantes, dont les limites sont fuyantes, incertaines. On cite de nom- breux exemples de passages graduels d’une espèce animale (ou végétale surtout) à une autre, sans que se puisse, par l'examen des individus divers, Saisir le moment précis où commence telle espèce et où finit telle autre. L'infécondité des croise- ments ne.peut même pas être considérée comme un caractère distinctif absolu. Pour n'en men- tionner qu'un cas, classique, on sait que le lièvre et la lapine peuvent s'accoupler, et que les produits de cette union (léporides) sont féconds. PRÉJUGÉ DES RACES Ce que nous disons des espèces voisines s'ap- plique avec beaucoup plus de force encore aux races voisines. Faces, ou variélés, où sous-variélés d'une même espèce ne sont que des classements assez incertains, et souvent toutes les transitions s’observent, presque insaisissables. Comme on l’a dit il y a longtemps, il n’y a pas d'espèces; il n'y a que des individus. Cet axiome est plus vrai encore pour les races, qui sont des groupements, plus ou moins homogènes, parfois lellement voi- sins que toute délimitation est arbitraire. Tantôt il y a entre deux variétés de telles différences qu'on est, tenté de les appeler deux espèces distinctes ; tantôt il est de telles similitudes que les botanistes (ou les zoologistes) hésitent à créer une variété nouvelle pour quelques caractères peut-être acci- dentels, en tout cas accessoires. À vrai dire, cela n'a pas grande importance, si les mots d'espèce et de race, qu'il faut conserver à cause de la facilité qu'ils donnent à une classifi- cation méthodique, ne nous induisent pas en féti- chieme. Groupements assez homogènes; très sé- parés des groupements plus homogènes encore, qui sont moins séparés des autres; nous appelons les premiers des espèces, et les autres des races; de sorte que, parfois, on hésitera à savoir si les deux êtres qu'on a devant soi appartiennent à deux races (ou deux variétés) différentes d'une même espèce, ou conslituent deux espèces différentes. C'est affaire de classification. Les zoologistes et les botanistes d'aujourd'hui soumettent à revision les délimitations d'espèces faites par leurs devanciers, et il est bien probable que les nouvelles démarca- tions qu'ils donnent seront revisées aussi par leurs successeurs. Mais, par le fait même qu'il y a des transitions, des passages, cela n'implique pas la négation de l'espèce ou de la race : cela signifie seulement que nos classements n’ont rien d’absolu. Quoi qu'il en soit, pour l'espèce humaine, il n'est pas de doute. Elle est une, et aucune confusion ne peut être établie entre‘un individu de l'espèce humaine, et tout autre être vivant. Sur ce point, nulle contestation n'est possible. Mais, une fois la question de l'espèce humaine résolue, il reste la question des races humaines. IT On ne parlera pas ici de l’origine unique ou mul- tiple de l'homme (polygénisme ou monogénisme). Car, de fait, les questions d’origine sont insolubles. 884 CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OÙ LE PRÉJUGÉ DES RACES Mieux vaut étudier les races humaines, telles qu'elles sont, et voir s’il y a des diflérences assez caractéristiques pour constituer des variétés hu- maines (ou des races) distinctes. Deux méthodes peuvent être employées, ou deux points de vue considérés : la méthode anatomique, ou la méthode physiologique. Or, quand il s'agit de classification, la Physiologie (ou la Psychologie) ne donne que des renseignements insuffisants, menant à l'erreur. Le classement des êtres se fait par la structure et non par la fonction de leurs organes. Il s’agit donc de savoir si la structure des divers êtres humains peut se ramener à un certain nombre de types. Il paraîtra, sans doute, assez étonnant qu'on sou- lève cette question, qui paraît d'emblée tout à fait résolue, dès qu’on regarde à côté l’un de l'autre un Nègre, un Chinois et un Européen; mais, récem- ment, un livre remarquable ‘ à paru, qui conteste précisément cette diversité des races humaines. Il me semble donc opportun d'examiner jusqu'à quel point est fondée l'opinion de M. J. Finot, qui combat l’idée classique des races humaines diffé- rentes. Son principal argument, ou, pour mieux dire, son unique argument, est qu'entre les divers indi- vidus humains on trouve des formes de transition telles que toute démarcation est impossible. Quelle que soit la mesure qu'on adopte, couleur de la peau, forme des cheveux, prognathisme, angle facial, volume du cerveau, il existe une chaîne, qui n’est pas interrompue, entre les divers individus de toutes races, de sorte que la limitation d’une race humaine caractérisée n'existe pas. Mais il semble bien que ce raisonnement, si vaillamment soutenu par M. Finot, ne soit en somme qu'un sophisme renouvelé des Grecs. Épis- trate n’est pas chauve; si je lui arrache un cheveu, il ne le sera pas davantage ; et ce n’est pas pour un cheveu de moins que je le rendrai chauve. Donc, si j'enlève un à un tous les cheveux d'Épistrate, Épislrate ne sera jamais chauve; car il sera impos- sible de dire à quel moment, en lui arrachant un cheveu, je l'aurai rendu chauve. Le défaut de transitions sensibles entre les choses ne fait pas que les choses ne sont pas différentes. Si je mets une goutte d'encre dans 10 litres d'eau, je ne pourrai distinguer cette eau d'une eau absolument limpide. Mais si, dans un autre vase de 10 litres, je verse deux gouttes d'encre, peut-être verrai-je quelque nuance. En tout cas, il n’y aura pas de différence appréciable entre le vase À, qui a une goutte d'encre, le vase B, qui en a deux, et le vase GC, qui en a rois; ! Le Préjugé des Races, par Jean Finot. Paris, Alcan, 1905. et ainsi de suite. Finalement, au millième vase, qui aura reçu mille gouttes d'encre, il y aura une teinte tellement foncée que je serai forcé de le séparer nettement du vase À, qui est incolore : et cependant, à aucun moment, le vase qui a une goutte d'encre de plus ne sera différent du vase précédent. Il en est de même pour la couleur de la peau humaine. Entre le plus blond des Scandinaves et le plus noir des Éthiopiens, on pourrait, en cher- chant bien, trouver neuf cent quatre-vingt-aix-huit individus dont la peau, par transitions insensibles, passe du blanc rose au noir d'ébène : cela ne prouvera en aucune manire que le noir et le blanc, aux deux limites de l'échelle, ne seront pas de très différente couleur. Qu'il me soit permis de prendre, en tout irres- pect, une comparaison avec des êtres qui me sont très familiers, et qui, eux aussi, quoique apparte- nant à une espèce unique, sont divisés en très nombreuses races : je veux parler des chiens. Le nombre des races, variétés ou sous-variétés de chiens est considérable : lévriers, griffons, caniches, loulous, dogues, terre-neuves, épagneuls, boule-dogues, terriers, braques, bassets, carlins, dingos, levrettes, chiens de berger, chiens de montagne, etc. Or, jamais, s'il s'agit de races pures, un individu, même incompétent, n'hésitera à ranger tel ou tel chien parmi l’une ou l’autre de ces races; car il n’est vraiment pas possible de con- fondre un basset et un épagneul, plus qu'une levrette et un caniche. Mais, de fait, il en est tout autrement ; les chiens errants que l’on rencontre dans les rues sont telle- ment mâtinés, par la confusion de leurs vagabondes amours, que souvent il est impossible de dire à quelle variété de chiens on a affaire. Assurément il est des caractères bien tranchés qui permettent de dire à peu près caniche, ou basset, ou épagneul, ou lévrier, ou boule-dogue, etc. Mais souvent on est forcé de dire chien mâtiné, sans pouvoir indiquer avec précision à quelle variété il appartient. Malgré tous ces mélanges, les caractères distinc- tifs des races canines sont assez marqués pour qu'on puisse toujours trouver pour un chien quel- conque une désignation suffisante. Il semble que le hasard des naissances chez les chiens tende à les ramener toujours à un certain nombre de types : type dogue, type caniche, type loulou, type épagneul, type terre-neuve, etc. Les multiples et fortuils croisements entre les races les plus diverses, au lieu de ramener les chiens à un type unique, tendent plutôt, à ce qu'il m'a semblé, à les faire revenir aux types bien définis des grandes races caractéristiques. Même entre les principales races ou variétés é CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OÙ LE PRÉJUGÉ DES RACES k exemple, les griffons, quiont au moins lrois sous- “variétés bien distinctes : le petit griffon écossais à poil soyeux; le grand griffon, chien de berger, à “poils rudes, et le griffon, de taille moyenne, à poils “frisés, ou barbet, bien différent du caniche, dont le “museau est allongé. » Chaque variété de chien comporte des sous-va- “riétés muitiples, et assez bien tranchées chez les individus qu'on prend pour lypes. Comme les _griflons, les lévriers, les boule-dogues, les braques peuvent être subdivisés les uns et les autres en ombreuses sous-variétés, etc. - En somme, si l'espèce chien est bien délimitée, “les variétés le sont moins; les sous-variétés moins “encore ; et l’on arrive, en fin de compte, de groupe- “ment en groupement, de l'espèce à la variété, de la variété à la sous-variété, jusque à l'individu ui, par certains caractères, diffère certainement de ses congénères. Ô & | 2 III —…._ Voici où je veux en venir. Le fait que les races de chiens sont très mélangées ne prouve aucune- “ment qu'il n'existe pas de races de chiens bien istincies. Je puis montrer quelque hésitation à déclarer si le chien qu’on me présente est un épa- gneul ou un caniche, parce qu'il a quelques carac- “ières du caniche et quelques caractères de l'épa- gneul, mais cela ne prouve nullement qu'il n'y a ni “une race d'épagneuls, ni une race de caniches. —_ De même pour les races humaines. Parce qu'il “existe des mulâtres, des quarterons, et des croise- “ments à lous degrés entre nègres et blancs, avec tous les groupements intermédiaires qu'on pourra imaginer, cela ne doit pas nous faire émettre cette conclusion, vraiment un peu étrange, qu'il n'y a pas de race noire, ni de race blanche. Tous les “arguments des philosophes ne valent pas le simple bon sens, qui distingue à première vue le nègre et Je blanc. — Iln'y a pas seulement le bon sens, il y a aussi _Janatomie. En fait de classification, on avouera que l’analomie a voix au chapitre. Or l'anatomie N'a pas d'hésilalion à séparer les nègres des blancs. La forme du crâne, la dimension du crâne, et par “conséquent le volume du cerveau, la disposition des circonvolutions cérébrales, l'angle facial, le prognathisme, le pigment de la peau, la structure des cheveux, la forme des muscles, la configuration “du nez, des. lèvres, des oreilles, des organes géni- Laux, de la main, du pied, tout est dissemblable. Bien entendu, il n'est pas question ici de savoir comment ces caractères différenciels ont pris nais- sance. L’anatomiste classificateur ne se préoccupe il existe de grandes dissemblances. Voici, par ! guère de l'origine des faits anatomiques qu'il étudie. Quand il sépare les Ammonites en différentes espèces ou variétés, d'après les ornements de leurs volutes, le paléontologisie ne se demande pas quelle a été la cause de ces ornements; il les cons- tate, et cela lui suffit pour ét&blir des caractères spécifiques. De même, nous n'avons pas, pour différencier les blancs, les jaunes et les noirs, à chercher la cause des variations de leur crâne et de leur pigment cutané; nous constatons ces distinctions : elles sont profondes, héréditaires; c'est assez pour établir l’existence des races hu- maines déterminées. On objecte aussi que, si l’on prend un à un les divers caractères, on trouve toules les transitions; par exemple, pour prendre un des caractères les plus nets de la race noire, on trouve, quoique fort rare- ment, chez certains nègres, des crânes aussi volu- mineux que chez certains blancs; et les capacités maximales des crànes de nègres sont identiques aux capacités minimales des crànes de blancs. Mais vraiment on n’est guère fondé à nier pour cela qu'il y ait une race blanche et une race noire; car, depuis Linné, on sait que les classifications ne peuvent se fonder sur un seul caractère, mais sur un ensemble de caractères. Ce n’est pas d'après la capacité du crâne qu'on va classer tel individu parmi les nègres et tel autre parmi les blancs; c’est d’après un ensemble de caractères : couleur de la peau, forme des lèvres et du nez, angle facial, etc. Chacun de ces caractères, isolé, est insuffisant pour la classification absolue; la convergence seule de toutes ces diverses formes fournira une classifica- tion naturelle. Nous devons donc reconnaitre qu'il existe des races humaines nettement séparées les unes des autres. Ce n'est pas par le sentiment que nous devons nous guider, mais par les faits anatomiques, qui sont irrécusables”. Même ces métis, ces races mixtes, sont une preuve de plus en faveur de la pluralité des races humaines : car,du moment que l'on parle de métis, on indique par cela même qu'il y a croisement entre deux types différents; et prononcer le mot de race intermédiaire mixte, c’est indiquer qu'il y à deux races typiques bien différentes. 4 M. Finot, qui n'accepte guère cette différence entre les races humaines, dit quelque part dans son livre : « On pourrait diviser les humains en deux {ypes principaux : l'homme civilisé et l'homme primitif, » Il est probable que sa parole a dépassé sa pensée, quand il a émis cette hérésie : car, un nègre, même très civilisé, restera bel et bien un nègre, et, s’il se marie à une négresse, ses enfants, fussent ils soumis à une culture raffinée, seront des nègres tout comme lui. D'autre part, un blanc, abandonné avec sa femme blanche dans une ile sauvage, s'il a des enfants, aura des enfants de mème race, qui seront des blancs non civilisés. 886 CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OU LE PRÉJUGÉ DES RACES IV La classification, voire même l’énumération, des principales races humaines que les anthropologistes ont décrites nous mènerait dans des détails plus abondants que ne le comporte cette élude. Nous dirons seulement, nous conformant à l'opinion clas- sique, qu'il y a trois groupements humains princi- paux : les noirs, les jaunes et les blancs. Évidemment, cette classitication n’est pas irré- prochable; elle a, cependant, l'avantage d'être simple. En outre, elle permet de faire rentrer, sans trop de difficultés, loutes les variétés ethniques dans l’un ou l'autre de ces trois types. Je n'ai pas à détailler ici les caractéristiques anatomiques qui séparent les trois races. D'une ma- nière générale, trop schématique pour être abso- lument vraie, on peut dire que le jaune est inter- médiaire entre le blanc et le nègre, par la capacité du crâne, la forme du nez, l'angle facial, le progna- thisme, la forme des cheveux, etc. IL faut reconnaitre aussi, sans que cela implique la moindre parcelle de dédain, que, par son sque- lette et par ses muscles, le nègre est moins loin des grands singes anthropoïdes que n’est le blanc. Dans tous les musées anthropologiques, où sont rangées en des vitrines des crànes de singes, de nègres, de jaunes et de blancs, on verra très bien que les crâänes humains qui sont les moins éloignés des crânes simiesques, ce sont les crànes des nègres. Peu importe que cela concorde ou non avec des théories philesophiques, cela est ainsi. Et ce serait faire preuve d'une pusillanimité un peu ridicule que de ne pas vouloir admettre un- fait aussi éclalant. Voilà donc trois grands groupes humains con- stitués. Quels sont les groupes de transition entre eux ? Évidemment, il faut éliminer les mulâtres ou les métis, qui ne forment pas une race, ou même une variété homogène, attendu que, s'ils se croisent entre eux, ils reviennent aux types de l’un ou l’autre de leurs ascendants, comme si la Nature faisait effort pour maintenir la stabilité de la race, ou comme si nous ne disposions pas d’un temps suff- fisant pour voir se constituer définitivement une race stable. Mais, même en dehors des métis et des mulàtres, il y a des peuplades intermédiaires, comme les Américains (Rouges, Péruviens, Mexicains), les Hottentots, les Esquimaux. Les Mongols sont telle- ment voisins de la race jaune qu'on peut les con- fondre avec eux. Quant aux peuples de l'Amérique, leur origine mongoloïde est probable, ou tout au moins possible. Mais ni les uns ni les autres ne forment la chaine entre les blancs, les noirs et les jaunes. Le Hottentot ressemble bien plus à un nègre qu'à un blanc; et l'Esquimau ressemble plus à un Chinois qu'à un Européen. Quoiqu'on parle beaucoup de croisements et de mélanges de races, il semble qu'il y ait exagération à prétendre que ces races se sont confondues. Dans les États-Unis d'Amérique, il n'y à aucune fusion entre les nègres et les blancs. Même dans l’Amé= rique du Sud, les métis entre les anciens indigènes et les conquérants blancs, Espagnols et Portugais, forment comme une sorte de population mixte, qui ne se mélange que rarement avec les blancs. En Afrique, les nègres et les Arabes sont en général distincts les uns des autres, et les unions sont rela- tivement rares. Quant aux mariages entre les jaunes et les blancs, ils sont vraiment tout à fait excep- tionnels : — je parle bien entendu des mariages véritables et non des unions temporaires ou acci- dentelles. — De fait, par préjugé peut-être, ou pour tout autre motif, il n’y a guère de fusion entre les groupes humains des diverses races. C'est un fait que nous constatons sans avoir à l’approuver ou le blämer. Nous croyons donc, en définitive, qu'il y a lieu de maintenir très fermement et très résolüment ce groupement des êtres humains en trois principales races caractéristiques : les noirs, les jaunes et les blancs. . REV à v M Faut-il aller plus loin, et, parmi les individus de race blanche, établir de nouvelles subdivisions ethniques? C'est encore à l'Analomie comparée qu'il faut avoir recours : or elle semble bien prouver que toute classification est impossible. | Non pas, certes, qu'il n’y ait des différences no= tables entre quelques types blancs; les uns, dev grande taille, aux yeux bleus, blonds; les autres bruns, de petite taille, aux cheveux noirs; mais less unions, les infiltrations de peuple à peuple, par lan guerre ou le commerce, ont été en vingt siècles si confusément multiples, qu'il est, à l'heure actuelle, tout à fait impossible de retrouver, parmi Iles hommes de race blanche, des populalions homo= gènes. i D'autant plus que le mot nationalité n'a rien à faire avec le mot race. La France est une nations par sa langue, ses mœurs, son histoire, ses tradis« tions, son gouvernement, la volonté d'être la. France ; mais c'est un mélange hétéroclite de toutes les populations de couleur blanche : Celles, Gaulois Ibères, Romains, Normands, Germains, et la cons fusion est telle que les plus laborieuses recherches. ont apporté l'obscurité plutôt que la lumière. Mêmes la France, depuis qu'elle est la France, reçoit, des invasions pacifiques multiples, à ses frons, CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OU LE PRÉJUGÉ DES RACES lières, et dans ses grandes villes. Telle ville “de Flandre est colonisée par les Belges; le littoral méditerranéen est colonisé par les Ita- liens; les Espagnols ont envahi toutes les régions mpyrénéennes; les Suisses, la Franche-Comté; les “Allemands, hélas! l'Alsace et la Lorraine. Et, quant à Paris, Lyon, Marseille, Bordeaux, les Italiens, “Belges, Espagnols, Américains, Anglais, Russes, eut être une, mais il n’y a pas de race francaise. De même, tout aussi bien, pour l'Angleterre, et E l'E 1! sion COnHEBIE étrangement avec La volonté for- Souvent je me suis demandé, en visitant New- York, Bruxelles, Turin, Londres, Berlin, Bâle, tels ou tels individus. Mais, si l’on donnait à ces puvidus des xétements uniformes, toute distine- ationalité. Il n'y a pas plus de type français que “de type allemand, ou italien, ou anglais. — Donc nous pouvons nettement affirmer l'unilé de la race blanche européenne, créée par le mélange intime des trois ou quatre types prin- Cipaux, très peu tranchés d'ailleurs. La difficulté devient un peu plus grande quand, au lieu de considérer les races blanches euro- péennes, on étudie les races blanches asiatiques, 887 les Arabes, les Égyptiens, les Hindous, qui sont placés à la limite des jaunes et des noirs. Mais, mème là, il n’y a pas eu de mélange avec les races voisines ; l'Égyptien et l'Éthiopien sont aussi divers l’un de l’autre qu'un Anglais et un Zoulou; qu'un Hindou et un Chinois; et il n'y a pas lieu d'admettre la fusion des races humaines même aux régions où elles sont voisines. Quant à la distinction entre les races blanches asiatiques et les races blanches européennes, au- trement dit entre les Sémites et les Aryens, il semble qu'elle soit assez factice. Puisque c’est à l'anatomie et aux caractères somatiques extérieurs que nous avons eu recours pour distinguer les noirs, les blancs et les jaunes, il faut reconnaître que la distinction entre les Aryens, les Sémiles et les Indiens n’est pas justifiée par l'anatomie. Tout au moins, les caractères différenciels sont-ils moin- dres que ceux des divers individus d'un même pays. On a depuis longtemps fait remarquer que l'état de prospérité ou de misère, les conditions d’alimen- tation et de travail, créent des diversités considé- rables entre les divers hommes, el permettent presque d'établir, non, comme le disait M. Finot, un type d'homme civilisé et un type d'homme sauvage, mais un type de populations prospères et un type de populations misérables, M. Alfredo Niceforo a réuni récemment des documents précieux sur ce point‘. La taille, le poids, la circonférence cranienne, la force musculaire, la résislance à la fatigue sont chez les enfants aisés en excès sur ce qu'elles sont chez les enfants pauvres. Les diffé- rences sont plus grandes que ne sontles différences ethniques entre ces soi-disant variétés différentes de la race blanche : Aryens, Sémites, Indiens. Aussi bien, comme cette classification a pour base une différenciation linguistique, ne faut-il pas lui reconnaitre une bien grande importance. IL n’est pas de plus grande erreur anthropologique que de vouloir distinguer les races par les distinctions lin- guistiques (à ce compte, les nègres de Haïti seraient des « Latins »). Que nos langues euro- péennes dérivent du sanscrit, cela est fort pos- sible; mais qu'on déduise de là quelque considé- ration sur notre origine ethnique, ce serait aussi imprudent que de parler de races /a/ines, où scan- dinaves, ou slaves, ou anglo-saxonnes. La similitude des langues crée certainement une mentalité voisine; elle facilite les unions, réunit lés nations. Mais, en soi, elle n’a aucun rapport avec la race même. M. Finot cile à ce propos la piquante remarque de Max Müller : « L’ethnolo- giste qui parle de la race aryenne, du sang aryen, 1 Les Classes pauvres. Paris, Giard et Brière, 1905. 888 CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OU LE PRÉJUGÉ DES RACES des yeux ou cheveux aryens,commet une hérésie égale à celle dont se rendrait coupable un linguiste qui parlerait d’un dictionnaire dolichocéphale ou d'une grammaire brachycéphale. » Nous avons abrégé toute cette discussion, et nous aurions pu sans peine accumuler des docu- ments et des citations; mais il nous a paru préfé- rable de mettre en pleine lumière les faits essen- tiels, à savoir : 1° L'irrémédiable confusion de toutes les nationalités européennes (au point de vue ethnique) ; 2° la séparation très profonde entre les races blanches et les autres races (race jaune et race noire). Il C'est l'Analomie qui nous a servi de guide pour élablir ces deux principes. Il s’agit de savoir si la Physiologie concorde avec l'Anatomie. Mais, nous le répétons, la Physiologie, pour établir une classi- fication, n’a qu'une valeur tout à fait secondaire. Car il est bien évident que les diverses races humaines sont trop proches l'une de l'autre pour “que leur physiologie soit bien diverse. Il n'y a déjà-que des nuances entre l’homme et l’animal, au-point de vue des fonctions organiques; comment alors entre les divers hommes peut-on espérer trouver quelques caractères distinclifs ? Il est vrai que, dans la physiologie de l'homme, il y a la psychologie. Ce qui, au point de vue zoolo- gique, caractérise l'espèce humaine, c’est la pré- pondérance du cerveau commandant des actes intellectuels réfléchis, voulus, raïsonnés, conscients. Mais même la Psychologie ne peut servir de bäse rationnelle à une classification. Si nous prenions l'intelligence des animaux pour ranger les espèces vivantes en des groupements systématiques, il faudrait, après l’homme, mettre le singe et l'élé- phant, puis le chien, puis l'ours et le chat. Ce serait tout à fait grotesque. Nous devons donc renier la Psychologie comme principe de classi- fication. Mais, si elle concorde avec la classification anatomique, elle ne sera pas sans lui prêter quelque appui. Or tel est le cas, en réalilé, pour la psychologie des races : et nous allons retrouver, de par les phénomènes de mentalité humaine et les évolu- tions des civilisalions mondiales, ce double prin- cipe : le mélange des races blanches entre elles, et la séparation des races blanches et des autres. Si, en effet, nous prenons l’état actuel de notre civilisation européenne, telle qu’elle existe en 1905, nous verrons tout de suite qu'elle est le résultat de la collaboration active, incessante, prolongée, de presque tous les peuples. Les Grecs, qui ont élé les maîtres et les directeurs de la pensée humaine, pour la philosophie et l’histoire, comme pour les sciences et les arts, les Grecs ont reçu fortement l'influence égyptienne, de sorte que notre civilisation, d’origine grecque, est en réalité d'origine gréco-égyptienne. Puis, dans les temps: modernes, chaque peuple y a largement contribué” l'Italie d'abord, puis la France et l'Allemagne; puis. l'Espagne, l'Angleterre, et maintenant les peupless scandinaves, les Slaves, les Américains du Nord Tous ont apporté leur concours à la constructio de l'édifice commun. Par la pensée supprimez un de ces nations de l'humanité, vous aurez du mêmes coup supprimé quelques progrès, quelques belles œuvres. À Prenons pour exemple l'électricité : n’est-ellé pas due pour ses origines à deux Italiens, Volta et Galvani? Plus tard, le Français Ampère, les Danois Oersled, les Anglais Faraday et Maxwellss l'Allemand Hertz, les Américains Graham Bell eb Edison, n'ont-ils pas tous apporté quelque grand fait nouveau ? Aussi bien pour la théorie que pour les appareils, depuis le vieil instrument de l’Alle= mand Otto de Guericke et le paratonnerre de l'Américain B. Franklin, jusqu'à la machine du Français Gramme, et la télégraphie sans fil de l'Italien Marconi. Nous pouvons donc dire que la science de l’élec= tricité est une science due à {ous les blancsÿ ajoutons qu'elle est due à eux seuls. Car il esb impossible de trouver qu'un nègre ou un jaune quelconque ait réalisé quelque invention dans le domaine de l'électricité. On voit bien, dans tous! les livres consacrés aux enfants, que les Chinois! avaient inventé la boussole avant le xiv° siècle: L'authenticité de ce fait me paraît pourtant dou teuse; car ce n'est pas une preuve que d'être signalé dans tous les livres. Mais, même si cela est vrai, les Chinois n'en ont pas, à ce qu'il semble; tiré grand profit, et ce ne sont pas eux qui nous! ont révélé les propriélés de l'aimant. Ce que nous venons de dire de l’électricité, nous pouvons l'appliquer à toutes nos sciences, sans exception, depuis les Mathématiques jusqu'à la Médecine. À supposer qu'on écrive un grand ous vrage sur l'histoire des sciences, il y aura peut-êtn trois mille noms à citer, recommandables à diver titres; mais, sur ces trois mille noms, il ne se trous vera pas un seul nom de jaune et pas un seul nom de nègre. { Ce qui est vrai pour les sciences est vrai aussi pour l'organisalion de nos sociétés. Les puissantes institutions juridiques et sociales que nous onb léguées les Romains sont encore les bases de notre vie sociale. Le christianisme, la féodalité, la Révos lution française, ont modifié, transformé le droil romain, sans qu'il y ait eu, à aucun moment donné, interférence des Chinois et des Ethiopiens, dans cette longue et laborieuse évolution des races » blanches vers un élat meilleur des sociétés hu- maines. Dans la littérature, c'est l'évidence même que les Grecs ont été nos initiateurs, et que nous déri- vons d'eux. Dans l’histoire littéraire universelle, il est clair que chaque nalion européenne, à la suite de la Grèce sa mère, a une part glorieuse, “avec le Dante, Cervantès, Shakespeare, Molière, “Goëthe. Mais je ne vois pas la contribution des races noires et des races jaunes. Les Arabes et les “Persans, qui sont des blancs, ont des fables et des poésies exquises. Mais les nègres n'ont que des “contes enfantins. Ces petits récits, racontés et tra- duits par des blancs, ne manquent pas de quelque attrait; pourtant c'est peu de chose. Et, quant aux f hinois, ils ont Confucius. Soit. Mais l'influence de “Confucius sur les destinées de notre monde euro- péen et sur nos idées morales n'a pas été, à ce qu'il parait, bien profonde; et je m'imagine que beau- coup des prôneurs de la race jaune parlent de Con- fucius sans l'avoir lu. Or je me permets de leur “conseiller de lire, à côté de Confucius, l'Evangile, “ou Marc Aurèle, ou Epictèle, voire même Sénèque, met je doute fort qu'après cette comparaison ils osent encore parler de Confucius. Ainsi, ni dans les sciences, ni dans l’industrie, ni “dans la philosophie, ni dans les lettres, ni dans | l'organisation sociale, nos civilisationseuropéennes, confondues en une seule culture très homogène, n'ont rien eu à faire avec la pensée des jaunes et des noirs. Restent les beaux-arts, qu'on invoque souvent à l'appui du rôle des Chinois et des Japonais dans le progrès humain. …. Mais — je ne crains pas de me répéter; car c'est J'évidence des choses qui m'y force — nos arts sont essentiellement grecs par leur origine. Laissons de ôté la musique, puisque aussi bien Mozart, Bee- hoven et Wagner ne sont pas d’une autre race que ous, et nous ne commeltrons pas le sacrilège de es mettre en parallèle avec les musiciens nègres. Considérons l’architecture, la sculpture et la pein- Lure. Là, les Grecs sont nos éducateurs, et, tout en idmirant comme il convient les pagodes chinoises, e préfère le Parthénon. J'aime mieux le Gladiateur ourant et la Vénus de Milo que les ventres à “eplis de Boudha, et je crains fort de mourir dans V'impénitence finale. I! se peut que mon goût ait lé faussé dès l'enfance par une déplorable édu- cation classique. Mais l’art chinois et l’art japonais ne me semblent pas de qualité supérieure. — Peu importe, d’ailleurs; car la question est de Savoir quelle a été l'influence de ces peuples dans notre univers. Or il n’est pas douteux que, jusqu'à CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OU LE PRÉJUGÉ DES RACES 88% ces derniers temps, l'influence de la peinture chi- noise et de la peinture japonaise a été nulle. Velas- quez, Raphaël et Rembrandt n'ont connu ni les émaux, ni les paravents, ni les éventails, ni les potiches de l'Extrême-Orient. Même il ne parail pas que ces divins artisles en aient beaucoup souffert. En dernière analyse, le monde européen a évolué tout entier en lui-même; il n’a reçu aucune empreinte du monde asiatique, encore moins, si possible, du monde des noirs. Par conséquent, la Psychologie confirme ce que l’'Anatomie nous avait appris : à savoir que la men- talité des blancs, jugée par la production intellec- tuelle, est la même, quels que soient les peuples: mais qu'elle diffère profondément de la mentalité des jaunes et des noirs. VII Onremarquera peut-être que je n'ai pas prononcé le mot de supériorité ou d'infériorité de telles ou telles races humaines. J'ai dit seulement qu'il y avait une différence ; et j'ajoute qu'iln’en peut être autre- ment. Puisque les traits du visage, la conformation du crâne et la disposition des circonvolutions ne sont pas identiques, peut-on supposer des aptiludes intellectuelles identiques? Donc il va des diflérences. Mais ces différences peuvent-elles se traduire par le mot de supériorité ou d'infériorité? Reprenant l'exemple, donné plus haut, des diverses races de chiens, je dirais qu'elles sont différemment intelligentes ; mais je serais fort embarrassé pour établir entre elles une hié- rarchie. Les caniches, par exemple, sont remar- quables par leur docilité. On peut leur apprendre ce qu'on veut; mais ils n'ont pas l'esprit inventif des terriers, ni la perspicacité des chiens de ber- ger. Donc, si l’on voulait faire choix d’un chien très intelligent, il faudrait d’abord préciser le genre d'intelligence qu'on désire. Est-ce la mémoire? ou l'invention? ou l'aptitude à reconnaitre son che- min? ou l'habileté à la chasse? ou la vigilance domestique? De même pour les êtres humains, enfants ou adultes. Dans une classe de jeunes gens, tel à une mémoire remarquable et peu de jugement. Tel autre a de l'invention poétique. Un autre est apte aux mathématiques, et rebelle à la poésie. Un qua- trième est excellent musicien, mais ne peut pas apprendre le latin. Un cinquième est mécanicien adroit, mais n'entend rien ni à la musique ni au latin. Tot capita, quot intellectus. Osera-t-on dresser une liste des plus et des moins intelligents ? et, si oui, quel critérium va-t-on prendre? En tout cas, sans parler de la supériorité des 890 CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OÙ LE PRÉJUGÉ DES RACES races blanches sur les autres races humaines, je dois dire qu'il serait par trop absurde de parler de leur infériorité. Elles ne sont peul-être pas supérieures aux autres; elles ne sont ertaine- ment pas inférieures. Je ne sache pas qu'il ait existé de plus puissantes el lumineuses intelli- gences humaines qu'Aristote, Lavoisier, Leibniz et Shakespeare. Qu'on leur trouve des égaux un jour parmi les Japonais et les nègres, je le veux bien, encore que je sois un peu sceptique à cet égard. Mais cette production de génies futurs est dans les limbes de l'avenir; et nous n'avons le droit de parler que du passé. Il ne faut pas que les éclatants succès militaires remportés par les Japonais troublent notre juge- ment. L'écrasement d'une flotte, la prise d’une ville, la destruction d'une armée sont des faits considérables et qui éblouissent. Encore ne doivent- ils être regardés que comme le triomphe de la force, qui a tant de prestige. Si les Russes, moins misé- rablement conduits aux désastres par des chefs incapables, avaient été victorieux, aurions-nous eu le droit de conclure à l’infériorité mentale des Japonais? De fait, les Japonais ont donné des preuves d'un courage héroïque, d'une habileté organisatrice remarquable, d’une science mili- taire très sûre. Mais il ne faut pas oublier qu'ils ont appris tout cela des Européens et que la part d'invention qui leur revient est très faible. C’est intentionnellement que j'ai prononcé le mot d'invention, car il me semble vraiment caractériser la différence qui sépare les blancs des autres races. Celles-ci sont assimilatrices, adaptant leur souple intelligence aux industries que les blancs ont imaginées. Mais jusqu'à présent ni les Chinois, ni surtout les nègres n’ont fourni la preuve qu'ils étaient capables d’instituer un progrès, de décou- vrir une vérité nouvelle. Pourtant, sans inventions, sans découvertes, sans progrès, sans évolution vers le mieux, l'humanité, piétinant éternellement dans la même ornière, n'aurait plus aucune raison d'existence. Il est presque inutile de dire que cette opinion sur le défaut d'invention des races autres que la race blanche ne doit être regardée que comme provisoire. Il se peut que l’avenir ouvre des voies imprévues à ces nouveaux venus dans la civilisation générale. Mais ils sont restés si longtemps, pendant des siècles et des siècles, figés dans la même immo- bilité stérile, qu’on a le droit de douter un peu qu'ils se précipitent dans le progrès. Ils se sont précipités sur l'imitation : ce qui n’est pas tout à fait la même chose. Reste enfin l'argument tiré de la similitude du cerveau et du crâne-avec le cerveau et le crâne des singes. Mais je n’y attache pas grande importance. Assurément, en thèse générale, malgré tous les, ingénieux paradoxes qu'on a émis à ce sujet, l'intel= ligence, chez des êtres homologues et comparables est, toutes choses égales d’ailleurs, proportion= nelle au développement du cerveau. Mais les diffé rences entre le volume cérébral des races humaines ne sont pas assez grandes pour autoriser une conclu sion ferme. L'intelligence doit se juger par le degrés de l'intelligence, et non par les dimensions céré brales. 11 ne faut pas tomber dans l'erreur de cel éminent anthropologiste, qui, constatantl'étonnante petitesse du cerveau de Gambetta, avait conclu que Gambetla n'était pas intelligent. Bref, pour terminer cette discussion, comme le lecteur a presque le droit de me demander des con: clusions fermes, je dirai que, certainement, sans contestalion possible, il y a des différences entre la mentalité des blancs et celle des jaunes e noirs ; que l’on est assez mal venu à parler de supé riorité ou d'infériorité, mais que, cependant, si j'étais forcé de me décider, je dirais que les blancs ont donné des preuves innombrables (que n’on pas pu fournir à pareil degré les autres races) de leur esprit d'invention et de généralisalion. \LHI En sera-t-il toujours ainsi? La constitution men tale des races jaunes, noires et blanches est-elle destinée à l’immobilité ? Nous ne le pensons nullement; et il semble, bienm au contraire, qu'elles sont, les unes et les autres destinées à évoluer. | On dit queles nègres des États-Unis font de grands progrès intellectuels; que, citoyens libre de la plus grande et de la plus civilisatrice nation: du monde, ils font de réels efforts pour dévelop= per leur instruction; et assurément on citerai parmi eux quelques personnalités intelligentes”. 4 M. Louis Olivier me fait ici remarquer avec beaucoup de raison que notre avance actuelle sur les jaunes et les noirs ne nous garantit pas d'une avance perpétuelle. Em effet, dit-il, après avoir atteint un certain idéal de civilisæ tion, les peuples ont été incapables d'aller plus loin, et ce sont d'autres populations, nouvelles venues au progrès’ qui ont repris le flambeau, pour le transmettre à d'autres. « Qui nous dit que cette loi d'évolution, que trahit la grandeun et la décadence, pour ainsi dire rythmées, des peuples, n6) régit pas aussi l'évolution du groupe plus compréheusif des. blanes? Ne se peut-il qu'après avoir inventé, nous nous trouvions quelque jour incapables d'engendrer un tal social différent de celui que nous aurons concu comme lé meilleur et le plus sage, et réalisé? Qui nous dit que les | jaunes et les noirs, avec les ressources de notre héritage intellectuel et de leur génie propre, n'édifieront pas une | humanité très supérieure à l'humanité actuelle, une humas nité que le blanc sera toujours impuissant à CONCEVOIr? D Ces réflexions de M. Louis Olivier me paraissent fort | judicieuses, et j'y adhère complètement. Je ferai cependant une réserve. Cette civilisation nouvelle, supérieure à JW CHARLES RICHET — LE PROBLÈME OÙ LE PRÉJUGÉ DES RACES = —— Les Japonais, eux aussi, se sont rapidement ini- tiés à la civilisation des blancs, avec une énergie et une perspicacité singulières. Commerce, armée, marine, sciences, organisation politique, ils se sont assimilé en quelques années une culture qui à coûté à l'Europe plusieurs siècles de douloureux “enfantement. On peut espérer qu'ils feront plus “encore, et qu'ils apporteront, eux aussi, leur con- “cours à l'œuvre humaine générale. —. Cet espoir dans le progrès des races humaines, “et de toutes les races humaines, est d'autant plus “justifié que la différenciation qui les caractérise aujourd'hui est probablement, sinon certainement, “un fait d'évolution. L'ardeur du soleil tropical tend “à colorer les téguments. Inversement, par les “brouillards et les frimas, les pigmentations s’atté- knuent, de sorte qu'on peut regarder comme assez “vraisemblable qu'au bout de quelques milliers, et _“%e quelques centaines de générations, des “hommes à peau noire, ayant émigré dans les pays “du Nord, soient devenus des blancs. De même, la force croît par le développement du travail muscu- Maire; de même encore, la taille s'élève par le fait d'une alimentation plus abondante. Le cer- veau devient plus volumineux, et le cràne plus vaste, de par un travail intellectuel intense, et cela non seulement au bout de quelques générations, mais dès la première génération, comme déjà -P. Broca l'avait, il y a longtemps, constaté. Aussi “est-il tout à fait légitime d'admettre que l'avenir -nous montrera des transformations étonnantes dans la mentalité des divers peuples. “ Mais —que ceci soit dit sans l'ombre d’un dédain — il semble bien que les races blanches aient d'ores et déjà pris quelque avance; de sorte que, si elles ne rétrogradent pas, comme c’est vraisem- blable, si elles continuent à progresser vers un état L 4 môtre, pourra être l'œuvre des noirs et des jaunes; oui, es jun est possible; mais, pour admettre que les noirs et les jaunes feront cette œuvre de régénération, nous evrons les supposer très différents de ce qu'ils sont ctuellement; ce seront leurs descendants modifiés, de- enus supérieurs à nous. En réalité, ce sera une race nou- “velle, quelque chose comme le surhomme de Nietzsche. Mais à cette race nouvelle il faudra sans doute un sub- tratum anatomique nouveau; or, il est difficile d'aborder utes les possibilités qui se présentent sans tomber dans domaine des dangereuses fantaisies. 11 faut donc, en tout état de cause, être très prudent pour prévisions de l'avenir humain. Et nous ne devons pas Médaigner les forces latentes — peut-être considérables — des races qui ont tout récemment pris part à la civilisation blanche. t 891 humain supérieur, les autres races, malgré la rapi- dité de leurs progrès, resteront toujours à un plan un peu différent. On peut faire maintes hypothèses à cet égard, et donner à ses fantaisies libre carrière. L'avenir est mystérieux; le passé est obscur; la science ne connait guère que le présent. Or, dans l'état pré- sent des choses, le progrès et la civilisation sont l’œuvre de la race blanche, et de la race blanche seule. Je laisserais parfaitement mes fils se marier avec une Italienne, ou une Espagnole, ou une Alle- mande, ou une Anglaise, ou une Israélite; mais je supporterais fort difficilement leur union en justes noces avec une Chinoise ou une Négresse. Préjugé peut-être, d’après M. Finot. Mais je croirais volon- tiers qu'en fait ce préjugé serait parlagé par tous les blancs, même par ceux-là qui me critiqueront le plus fort. En somme, la fusion des trois grandes races humaines ne me paraît pas chose désirable. L'état intellectuel, assez médiocre, des mulâtres et des métis de l'Amérique et de l’Australasie, n’est pas très encourageant. Je supplie, en terminant, qu'on ne me fasse pas conclure à la guerre des races. Ce serait une mons- truosilé telle que même la mauvaise foi, ordinaire dans les discussions, n’expliquerait pas cette calomnie. Pour quelques différences fragiles, et après tout contestables, l’'égorgement et l’extermi- nation sont-ils nécessaires ? N'y a-t-il pas sur le globe terrestre assez d’eau, d'azote, de carbone et de soleil pour suffire à l'expansion de tous les êtres humains, quelle que soit la couleur de leur peau et la direction de leur mentalité? Voici le dilemme que je propose alors à ceux qui me prôteraient ce blasphème contre l'humanité, à savoir la guerre des races : De deux choses l’une : ou nous sommes les égaux des noirs et des jaunes ; ou nous leur sommes supérieurs. Si nous sommes leurs égaux, nous devons leur demander et leur prêter appui; collaborer avec nos frères humains au perfectionnement de l'espèce humaine ; Si nous sommes leurs supérieurs, notre devoir strict est de les élever à nous, de les protéger, de les défendre, et de leur donner l'exemple de la justice et de la fraternité. Charles Richet, Professeur de Physiologie à la Faculté de Médecine de Paris, 892 A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE LES DÉRIVÉS Y-ARYLES DE L'ANTHRACENE ET DE SON DIHYDRURE Depuis l'admirable synthèse de l'alizarine, | quels nous trouvons des composés de la forme réalisée par Graebe et Liebermann en 1869, l’at- 2 tention des chimistes et des industriels s'est fixée LR | | sur l’anthracène, et l'importance actuelle de ce ecar- | AC bure n'est guère comparable qu'à celle prise par NES 2211 son congénère, le naphtalène, à la suite de l'appa- 4 et NAN rition des colorants azoïques; la remarquable ZNANES | | solidité des colorants anthracéniques justifie bien NANTA TE cette prédilection des chercheurs. NN 1/1 Pourtant, jusqu'à aujourd'hui, l'effort s'est pres- PANO que uniquement porté vers l'obtention de dérivés anthracéniques & ou 6-substitués; malgré leur ap- parente complexité, la presque totalité des colo- rants de ce groupe ne sont que des anthraqui- nones polysubstituées en « ou 8 par des auxo- chromes hydroxylés, amidés ou sulfonés, ne différant que par le nombre, la nature ou la position des groupes substituants, et ce n'est que très exceptionnellement qu'il est fait mention, dans la littérature chimique, des dérivés anthracéni- ques +-substitués. Si, pour circonscrire davantage cette étude, on n'envisage que les dérivés 7-arylés de l'anthracène ou de son hydrure, on constate que le nombre en est extrêmement limité. A part le phénylanthra- cène : aus 611 Nosps GHKCAQCIHE, CH son hydrure et ses produits d'oxydation ou de substitution tels que les phénylanthranols, les phé- nyloxanthranols, les phtalidines et les phtalidéines décrites autrefois par von Baeyer‘, O. Fischer’, Hémiliam *, von Pechmann * et Friedel et Crafts *, on ne peut guère signaler que la céruléine’, dont la constitution est d'ailleurs fort douteuse, un certain dihydrure d’anthracène y-diphénylé symétrique”, de constitution encore plus dou- teuse, et quelques colorants décrits dans les bre- vets allemands n° 117894 et 126444, parmi les- 1 Von BAEyER : Annalen, t. CCII, p. 36 (1880). ? O. Fiscuer : Annalen, L. CCVI, p. 83 (1880). 3 W. HÉmicrau Berichte, t. XVI, p. 2360, et Berichte, t. XIX, p. 3061 (1886). L # Vox PECumanNx : Berichle, t. XIII, p.1608 (1880),et Berichte, &. XIV, p. 1859 (1801). 5 FatEDEL et Crarrs : Ann. de Ch. et de Phys., t. I. p. #49 (1884). 5 V. Buckna : Annalen, {. CCIX, p. 249 (1881). 7 LiNEBARGER : Am. Chem. Journal, t. XII, p. 556. qui ont fait l'objet d'un travail récent de MM. K4 Damman et L. Gattermann”'. Mentionnons, enfin avec des phénols, et que ces savants considèrent, comme des diphénylanthrones hydroxylées du type : HO — C‘H* CSHS— OH ' CYHE CSI: : ANA ie K< 4 CO Tel était, en résumé, l’état de nos connaissances sur les dérivés anthracéniques y-arylés lorsque nous en avons repris l'étude et préparé, par des | voies complètement nouvelles, un assez grand nombre de représentants, appartenant aux dif férents types théoriquement concevables; nous! avions été amenés à ces recherches à la suite de nous avions reconnu la présence d’un noyau am thracénique y-diphénylé. L'ensemble des Mémoires publiés sur ces produitss forme aujourd'hui un chapitre nouveau de la chimi® de l’anthracène; nous nous proposons de retracer ici les grandes lignes de cet ensemble, en suivant autant que possible l’ordre chronologique, et nous commencerons celte exposition par l'étude du | vert phlalique. . | I. — HISTORIQUE DU VERT PHTALIQUE. L'expression de « vert phtalique » (Phtalgrün)an été introduite dans la science par O. Fischer po ! DAMMANN ef GATTERMANN : Texil-Chemie, t. 1, p. 325 (1902). > ScnarwiN et Kusxezor : Berichte, t. XXXVI, p. (1903), et PBerichte, t. XXXVII, p. 3616 (1904). is A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE 893 diméthylaniline, le produit principal de la réaction étant la diméthylaniline-phtaléine : CSH' — Az(CH°)° ) CG C'HI— Az(CHP C6” > CSH € No F Co Le savant allemand lui assigne la formule “C"H°"'Az"0", qui en fait un isomère de cette phta- léine, et le considère comme une diméthylaniline- “phtalidéine ou tétraméthyldiamidophényloxan- “thranol : HO À CA — Az (CH)? É 174 IN, ETS / \e CH YctH* — Az(CHe}. CO * Il explique sa formation en admettant la présence d'une petite quantité de chlorure de phtalyle symé- “rique (form. 1) dans le chlorure de phtalyle employé, chlorure qui est généralement considéré comme dissymétrique (form. Il) : C = Co — ci c' D So cer Nco— « No (D) (1) et il représente cette formation par l'équation sui- wante : LAN — CI + 2 HS — Az(CH® Nco— i He CH — —2HCI + ce Due ne Az(CHP Az(CH5}. * Un produit possédant une semblable formule de constitution est en tous points remarquabie, car il “semble devoir allier à la solidité des colorants anthracéniques la vivacité des colorants du triphé- nylméthane. Ces qualités précieuses, reconnues ar Fischer lui-même ‘, devaient nécessairement attirer l'attention à une époque où les colorants verts solides et brillants n'étaient pas encore “trouvés. Bien des tentatives ont sans doute été faites dans les laboratoires industriels pour repro- duire le colorant de Fischer, et, sirien n'a été publié ? ce sujet, il faut en chercher la raison dans le ren- Mement dérisoire en colorant, rendement qui rend l'étude de ce produit presque inabordable. : Leg IL. — PREMIÈRE SYNTHÈSE DU VERT PHTALIQUE. Dans nos essais de reproduction du vert phta- lique, il nous a semblé lout d’abord nécessaire de — Die Lüsungen desselben färben Seide prachtvoll grün an und die damit gefärbten Muster sind von grosser Licht- echtheit (Fischer Ann., t. CCVI, p. 107). REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, vérifier l'hypothèse de Fischer, c’est-à-dire de nous assurer que le dichlorure de phtalyle renferme nor- malement une certaine quantité de chlorure symé- trique. C'est dans ce but que nous avons repris l'étude des produits résultant de la condensation du benzène avec le dichlorure en présence du chlorure d'aluminium. Si l'hypothèse de Fischer estexacte, on doit trouver, à côté de diphénylphta- lide résultant de la condensation du chlorure dis- symétrique avec le benzène : Le C‘H5 7 A C— C5 Cox coms” XV So +26 HS 6 0 +280! Ÿ eu co une certaine quantité de son isomère, l’o-dibenzoyl- benzène, dont la formation serait imputable à la présence de chlorure symétrique : CO — CSH* (1) CH 20H = CH —+ 2HCI. CO — CI N CO — CSH® @) Si faible que soit cette quanlité de dibenzoyl- benzène, elle devrait être facile à isoler, mème en présence de grandes quantités de diphénylphtalide, cette dernière, par suite de sa fonction y-lactonique, étant facilement éliminable par saponification. Nous avons fait, dans ce but, un assez grand nombre de condensations avee des chlorures de provenances différentes, mais rectifiés avec soin; nous n'avons jamais observé la formation de diben- zoylbenzène ortho, mais nous avons toujours constaté la formation d'une très petite quantité d'un produit non saponifiable, totalement différent du dibenzoylbenzène par son point de fusion 491°, sa composition C*H"O et ses propriétés‘. Il était vraisemblable que le composé C*H“O et le vert phtalique ont une origine commune et prennent tous deux naissance grâce à la présence d’une même impureté dans le chlorure de phtalyle mis en œuvre, impureté qui ne pouvait être, comme nous venons de le voir, du chlorure symétrique, ainsi que l'admettait Fischer. D'autre part, en raison même du mode de préparation du dichlorure de phtalyle, par ébullition prolongée d'un mélange de pentachlorure de phosphore et d'anhydride phta- lique, et de la grande pureté de l’anhydride du commerce, ce produit secondaire ne pouvait être qu'un composé résultant d'une action plus profonde de PCF sur le dichlorure déjà formé, c’est-à-dire un {éfrachlorure de phtalyle que von Gerichten? avait préparé quelques années auparavant, préci- sément en chauffant sous pression du dichlorure de phtalyle avec un large excès de PCF. L'hypothèse t. XVIL, p. 873 (1897). p. 417 (1880). 20* 1 Hazzer et Guyot: Bull. Soc. ch., 2 Von GERICHTEN : Berichte, t, XIII, 894 A. GUYOT — LES DÉRIVÉS +-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE élait d'autant plus acceptable que les deux tétra- chlorures obtenus dans ces conditions par von Gerichten (F. 88° et 47°) bouillent sensiblement à la même température que le dichlorure et ne peuvent en être complètement séparés par distilla- tion fractionnée. Elle était, du reste, facile à vérifier en reproduisant les deux tétrachlorures de von Gerichten et les faisant respectivement agir sur le benzène et sur la diméthylaniline. L'expérience confirma pleinement ces prévisions. Le tétrachlorure de phtalyle (modification fondant à 88°) nous donna avec le benzène des quantités con- sidérables du composé C*H"O, formé d'après l'équa- tion : CAHSOCE + 3 CSHS — 4 HCI + HO, et avec la diméthylaniline du vert phtalique, formé avec un rendement atteignant 90 °/, du poids de tétrachlorure mis en œuvre”. Nous disposions ainsi d’une quantilé suffisante de colorant pour en faire une étude complète, étude qui nous a été bien facilitée par la grande tendance avec laquelle cristallisent tous ses sels et la plupart de ses dérivés. Cette étude s’imposait, nos analyses élant en désaccord complet avec la formule de Fischer” ; elle semblait d'autant plus désirable que les pro- priétés du vert phtalique le elassent daus un groupe nouveau de colorants, dont il y avait lieu d'établir la constitution. L'analyse du vert phtalique, de sa base et de sa leucobase, assignant à ces trois corps les formules centésimales suivantes : Sel (vert) C*H%#Az*OCI (dans laquelle CI peut être remplacé par Br, AzO *, etc.); Base (incolore) C**H*A7Z%0?; Leucobase (incolore) C**H*Az7°0, il apparaît tout d'abord que ce co'orant présente vis-à-vis de sa base et de sa leucobase les mêmes relations que les colorants du triphényimélhane vis-à-vis de leurs bases et de leurs leucodérivés. Dans les deux cas, le colorant résulte de l'union d’une molécule d'acide avec une molécule de base et élimination d’une molécule d’eau; dans les deux cas également, la leucobase dérive de la base pro- prement dite par soustraction d'un atome d'oxy- gène. Le vert phlalique donne aussi, vis-à-vis des réducteurs, ainsi que l’a observé M. Prud' homme, 1 Hazzer et Guyor: Æevue gén. de Mat. colorintes, &. H, p. À (1898). 2 Le chlorhydrate du vert phtalique cristallise avec une molécule d'eau qu'il ne perd que très difficilement; cette particularité aura échappé à Fischer et explique son erreur; la leucobase, au contraire, cristallise sans molécule de dissolvant, et les analyses de ce produit, citées par Fischer, concordent parfaitement avec les nôtres. 3 PROD'HOMME :; evue yen, de Mat. colorantes, €. VII, p. 1 (1903). ' permet d'établir la constitution du composé C*H"O et du tétrachlorure employé dans sa préparation. la réaction particulière découverte par ce savant et caractéristique des colorants du triphénylméthane: Enfin, l’analogie se poursuit jusque dans les propriétés tinctoriales du produit, et l'on devra tenir compte de cette parenté évidente dans la recherche de la constitution du colorant. Il résulte, d'autre part, de la composition centé- simale du vert phtalique que ce colorant prend naissance par fixation de trois molécules de dimé= thylaniline sur une molécule de tétrachlorure; or dans la préparation du composé C#H'#O trois molécules de benzène entrent égalementen réaction avec une molécule de tétrachlorure. Il semble done que les deux produits s’ btiennent par un: même processus et que la constitution du vert phtalique doit trouver son explication dans la constitution du composé C"H"O. Telles sont les considérations qui nous ont amené à poursuivre l'étude du composé C*H"0. s » 4 III. — ConsriTurIoN pu composé C*H“O. Le composé C*H®O s'obtient, comme on l’a vu, par la condensation du tétrachlorure de phtalyle (modification fondant à 88°) avec le benzène en: présence de chlorure d'aluminium ; mais cette con= densalion s'effectue en plusieurs phases, et l'étude des produits formés dans ces phases successives Si l’on arrête l'opération longtemps avant d'avoir épuisé l'action du chlorure d'aluminium sur le mélange de tétrachlorure et de benzène, le produit principal de la réaction, après trailement par l'eau est de l’anthraquinone ; — une condensation plus avancée détermine la formation de phényloxan= thranol, et le composé CH*O n apparaît qu'en dernière phase, lorsque la quantité de chlorure d'aluminium est sutfisante pour produire une réac tion complète. La formation successive d’authraquinone et de phényloxanthranol nous autorise, tout d’abord, conclure à la di-symétrie du tétrachlorure dem phtalyle fondant à 88°, car, des deux formules des constilution proposées pour ce chlorure : | 7e Cl cel CC C'EC ÿ0 et CHE Na C—Cl CO=CI Neal ‘4 1 de entre lesquelles aucune réaelion n'avaitjusqu'alors permis de décider, la formule dissymétrique est seule capable de rendre compte de la formation de ces dérivés anthracéniques : A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE 895 CCI CCE con + C'HS { sp CSH# + 2HCI Nco-Ci N co / F. | y CO\ C6 L 6 4 2 —— 6 5/ [OL s 3 Te CH“ + H°0 ( HQE) 6H$ + 2HCI CI, C'H5 CCF ? a CSH1/ + 2CH°— CH: SCSH3 + 3HCI “CO-Cl N co / # Il I H CSHS ël 5 } Gi NOR ARE 6H4/ N hega 2 — C'H': Hs CI CSH ee CSHs + H°0 H Ge 7€ Hi + H —. On voit ensuite, à la seule inspection de ces “ équations, que les vrais intermédiaires dans la « préparation du composé C*H"O sont les chlo- “rures d'anthraquinone et de phényloxanthranol, * l'anthraquinone et le phényloxanthranol isolés n'étant que les produits de décomposition par l’eau “ de ces chlorures. On devait donc pouvoir repro- duire le composé C*H°0 par condensalion directe « de ces chlorures avec le benzène en présence du chlorure d'aluminium. L'expérience a justifié ces + prévisions, et cette vérification de notre hypothèse permet, en outre, de fixer définitivement la consti- « tution du composé C*H"O et de le considérer comme de la diphénylanthrone (form. 1), l'anthrone étant un composé (form. il) dont l'existence est encore très hypothétique, toutes les tentatives failes pour l'isoler ayant conduit à son isomère, l'anthranol (form. IT) : 6pI5 6H5 % > ce & : PATES PAENeE CeH* CHE CH‘ CH CH ÿ 20 5H* FI Nco” Nco / COH/ () (11) (INT) … Remarquons, en passant, que le chlorure de phé- “ nyloxanthranol n’était pas encore connu à l'épo- — que où nous avons réalisé cette synthèse; on aurait “évidemment pu l'obtenir, soit par chloruration du phényloxanthranol® au moyen de PC}, soit par éthérification directe de ce quinol au moyen d'HCI sec et gazeux, ainsi que l'ont montré récemment MM. Liebermann, Glawe et Lindenbaum ?. Une j réaction nouvelle et totalement imprévue nous “permit de l'obtenir beaucoup plus facilement, en chauffant vers 140° des molécules égales de diphé- “nyÿlphtalide et de PCI SET .…. 6H5 f pou G CH L C‘H: < Do + PCF — POCE + HCI Le co 4 eH5 | : . H $ + CH CSH4. Nco/” 2 Liepermanx et Lanpsnorr: Berichte, t. XIV, p. 455 (1884). ? LIEBERMANN, GLAWE et LINDENBAUM : Berichte, t. XXXVII, pp. 3337 (1904). | Il est intéressant de faire remarquer l'influence du radical — CO — sur la mobilité de l’atome de CI du chlorure de phényioxanthranol ; landis que le chlorure de triphénylméthyle : GE y CH” CSH® au 16H ne réagit pas sur le benzène en présence du chlo- rure d'aluminium, et que toutes les lentatives faites dans ce sens en vue de l'obtention du tétraphényl- méthane ont échoué‘, un chlorure semblable, dans lequel deux noyaux benzéniques sont réunis en ortho vis-à-vis du carbone méthanique par un radical carbonyle, c'est-à-dire le chlorure de phé- nyloxanthranol, se condense facilement avec le benzène, en donnant, comme nous venons de le voir, de la diphénylanthrone. Le phényloxanthranol lui-même réagit aussi par son groupe hydroxyle avec le benzène, conformément à l'équation : C°H° HO, CHEN CEE C4 con: < “ PH* + C'H° = CH ( SH + HPO. D co \ co” Ce nouveau mode de formation de la diphényl- anthrone, déjà entrevu par von Bacyer, et que nous avons généralisé et étendu à la préparation d'un certain nombre d’anthrones homologues?, met bien en évidence l'influence du radical carbonyle, puisqu'il est impossible de condenser de la même facon le triphénylcarbinol avec les carbures benzé- niques *. IV. — PREMIÈRES HYPOTHÈSES SUR LA CONSTITUTION DU VERT PHTALIQUE. Le tétrachlorure de phtalyle donnant de la diphénylanthrone par condensation avec le ben- zène, et du vert phtalique par condensation avec la diméthylaniline, il semblait logique d'expliquer la formation des deux corps par un même pro- cessus, et d’assigner au colorant la constitution d’une hexaméthyltriamidodiphénylanthrone : CCF CHR HA CH —Az(CH°)° (CH*)* Az— CHA. /C'H°— Az(CH°) Ne = 3HCI+ CHE SCeHS — Az (CH°}. HCI. / co La forle coloration jaune des tétraalcoyldiamido- ! GomrerG : Berichte, t. XXX, p. 2043 (1897). 2 Guxor : Bull. Soc. ch.,t. XVII, p. 982 (1897), 3 Dans un Mémoire qui vient de paraitre tout récemment (B., t. XXXVIIT, p. 1799, 1905), LiEBERMaANN et LINDENBAUM, ayant eu connaissance trop tard de nos recherches sur la diphénylanthrone, reproduisent, en les confirmant, la plupart de nos résultats. Ils ont été frappés comme nous de l'extrême mobilité de l'atome de chlore dans le chlorure de phényloxanthranol, et de la facilité avec laquelle la diphényl- 896 diphénylanthrones, que, dans le but de jeter quelque lumière sur la question, nous avions pré- parées par condensation du chlorure d’anthraqui- none avec la diméthylaniline et la diéthylaniline’, semblait justifier cette formule, puisqu'elle fait bien ressortir le caractère chromogène du com- plexe anthronique. Pourtant, ces amidodiphényl- anthrones, jaunes à l’état libre, forment des sels incolores, alors que les sels du vert phtalique sont colorés et la base incolore. D'autre part, cette for- mule, qui conduit bien à des sels C*H*'Az'OCI et à un leucodérivé C*H*Az°O, n'’explique pas l'existence d'une base C*H**Az'O* à deux atomes d'oxygène, ne fait pas ressortir la parenté évidente existant entre le vert phtalique et les colorants du triphénylméthane, et cadre mal avec nos connais- sances actuelles sur la constitution des matières colorantes. M. Rosenstiehl, qui a bien voulu faire quelques . essais de teinture avec notre colorant, frappé de la grande analogie qu'il présente avec le vert mala- chite, nous proposa de l’envisager comme un vert malachite ortho-subslilué par le radical p-diméthyl- amidobenzoylé — CO — C'H'— Az(CH')", et de lui attribuer en conséquence la formule de constitution : GH4 __ A7 $\2 EN e/° H — Az (CH) 5 cer *H3,2 CH NC'H4— Az (CH?) . CO — C'H'— Az (CH)? anthrone échange son atome d'oxygène contre deux atomes d'hydrogène par simple ébullition avec la poudre de zinc en solution acétique. Le dihydrure d'anthracène y-diphénylé dissymétrique (form. 1), qu'ils obtiennent ainsi, présente sensiblement le même point de fusion (2160) que son isomère le dihydrure d'anthracène y-diphénylé symétrique (form. Il), dont nous donnons plus loin la préparation. Traité par le brome, il fournit un dérivé monobromé {form. I) : 6H5 LE 6H5 ‘6H N6HS ce CE qu C CH CR cm Jon cm CH CeHf ÿœHs N cr” Nc” Nc” cH CH CH CH . Br (1) (11) (ut) qui perd facilement à chaud deux molécules d'acide brom- hydrique, et donne le carbure aromatique à poids molécu- laire le plus élevé actuellement connu, le tétraphénylhepta- cyclène de constitution : _Hazcer et Guyor : Bull. Soc. ch., t. XXIX, p. 459 (1903). A. GUYOT — LES DÉRIVÉS J-ARYLÉS DE L'ANTHRACEÈNE La formule de M. Rosenstiehl conduit bien à des sels en C*H**AZ'OR (R —CI, Br, Az'O, etc.), à une base C°H*A7°0° et à une leucobase C*H*®Az°0, toutes formules justifiées par l'analyse; elle fait rentrer le vert phtalique dans la classe des colorants du triphénylméthane et explique par là l’analogieM évidente qu'il présente avec ces colorants et sur laquelle nous avons insisté au début de cette étude; enfin, elle présente l'avantage de rendre compte de la formation du colorant par un processus entiè- rement calqué sur celui de la formation du vert malachite, par condensation du phénylchloroforme avec la diméthylaniline; il suffit, en effet, de se rap- peler que la formule de constitution assignée plus haut au tétrachlorure de phtalyle (modification fondant à 88°) en fait un phénylebloroforme ortho- substitué par le radical — CO — CI. La comparaison des deux équations ci-dessous fait ressortir ce parallélisme dans les modes de formation : S6H4 3\2 CIS CH*— Az (CH*) C CN NCH:— Az (CH) + 20SH5— Az (CH5)° —2HC1 + | | VA Ne CK ,CH'— Az(CH'} M EVA AK 4 C‘H'— Az(CH°)° | | + 3CH°— Az (CH%)—3HC1 + | N/Nco—a NN C0 — CH Az(CHS "M Pourtant, une semblable formule de constitution serait difficilement acceptable aujourd'hui, car elle exigerait du vert phtalique, en sa qualité de dérivé ortho- substitué du vert malachite, une solidité aux alcalis qu'il ne possède pas en réalité. Le colorant de constitution très voisine ! : MéF4 __ À 3\2 CN CH —Az(CH°) G NA N GE: — A7 (CH°} NGH: — CH: — Az (CH: obtenu récemment par condensation de la diméthyl-, aniline avec la cétone ? : N° co — ceH#— Az (CH) L Lonscr —aeterry, est, en effet, remarquablement solide. Ce dernier colorant jouit, en outre, d’une propriété qu'on devrait également retrouver dans le vert phtalique, car elle est commune à tous les dérivés, aminés ow non, renfermant le complexe : NL 6 SoH Ce CR DK suyor et PriGner : Inédil. 4 1 { h 2 Guvor et Proxer : Bull. Soc. ch., t. XXXIII, p.678 (1905) “(OH peut être remplacé par Cl, Br, etc.) : je veux parler de la grande facilité avec laquelle tous ces composés se transforment en dérivés anthracé- niques sous l'influence des déshydratants. Or l'acide sulfurique est sans action, même à chaud, sur le vert phlalique, alors qu'il transforme rapidement, à froid, les composés suivants en » dérivés anthracéniques correspondants : 1 /C'HeAz CI Az(CH*}— C°H° CH — Az(CH°F 4 Kcetiaz cr? = PSE Az {CH} 21e OS A CH°— C‘H*A7(CH?# th, 474 } CH: SETS { ze CH — Az (CH? AN INC fe (CH: >? \ és Re D) , A CH°— CH — Az (CH? CH° C‘H° CHOH — C‘H° > D | CHOH — C5H HCOH— C‘H'—Az{CH°)* PSN RU R MASSE ] H CH CSH> Ÿ en . Mais, à l'époque où M. Rosenstiehl proposait la formule de constitution précédente, on n'avait pas encore précisé le rôle de la nature des radicaux rants du triphénylméthane, et il semblait que, seul, le groupe sulfoné placé en ortho dans le noyau non amidé du vert malachite et de ses homologues était capable de conférer cette solidité au colorant ultant. « D'autre part, la faculté dont jouissent les com- posés renfermant le complexe :. Harrer et Guyot : Bull. Soc. ch., t. XXXI, p- 979 ‘: FOR 2 Guror et Carez : C. R. (1905). A. GUYOT — LES DÉRIVÉS -ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE 897 NEA LR RES, | RS de se transformer en dérivés anthracéniques sous l'influence des déshydratants ne pouvait être con- sidérée comme générale, les exemples cités plus haut ayant été observés à une date toute récente. Nous nous étions donc complètement rallié à la formule de M. Rosenstiehl, et c'est dans cet esprit que nous avons publié notre premier Mémoire sur le vert phtalique, lorsqu'une nouvelle synthèse vint nous obliger à abandonner cetle maniere de formuler. V. — NOUVELLES SYNTBÈSES DU VERT PHTALIQUE. Dans le cours de nos recherches sur les acides dialcoylamidobenzoyi-benzoïques ‘, nous avons obtenu un tétraméthyldiamidophényloxanthranol de constitulion : HO CSH*— 47(CH°)° Nc (Y Ü Jar ne), et constaté que ce composé se condense avec faci- lité avec la plupart des phénols, des amines et même des carbures aromatiques pour donner des colorants*. Or, le colorant obtenu de cette façon avec la diméthylaniline fut reconnu identique au vert phtalique. Les rendements sont excellents, et à moins d'admettre une rupture du noyau anthra- cénique sous l'influence de l’agent deshydratant et une condensation simultanée de diméthylaniline, conformément au schéma : HO C‘H‘— Az(CH°}° Ncé | | + CH°— Az (CH? A7 Az(CH*} CU, RE HO. CH — Az (CHF) Es ces — Az(cH NN C0 — CH: — 4z{CH°}, bypothèse bien invraisemblable étant donnée la sta- bilité du noyau anthracénique, il n’était plus pos- sible de conserver notre manière de formuler. D'autre part, cette synthèse établit un nouveau parallélisme entre les modes de formation du colo- rant et ceux dé la diphénylanthrone, cette dernière pouvant s'oblenir, comme nous l'avons vu, par : Hazcer et Guxot : Bull. Soc. ch., t. XXV, p. 315 (1904). ? Hazcer et Guyot : C. R., t. CXXXVII, p. 606 (1903). 898 A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE condensation du phényloxanthranolaveclebenzène, et rappelle l'attention sur la formule anthronique que nous avions déjà envisagée un instant pour notre produit. Mais nous avons fait remarquer que la formule anthronique est incompatible avec l'existence d’une base C*HAz‘0* et ne saurait, par conséquent, être prise en considération. Le parallélisme dans les modes de formalion est donc purement apparent et fortuit. Une seule explication reste possible : elle consiste à admettre la fixation d'une molécule de diméthyl- aniline sur le groupe CO de l’oxanthranol, en vertu d’un mécanisme analogue à celui qui donne nais- sance au violet cristallisé par fixation d'une molé- cule de diméthylaniline sur le groupe CO de la tétraméthyldiamidobenzophénone. Le vert phta- lique posséderait alors la formule de constitu- tion (1), et serait un dérivé hexaméthyltriamidé du dihydrure d’anthracène +-diphénylé y-dihydroxylé symétrique (Il), récemment obtenu par condensa- HO A \ \pya\e HO EN EX >Az(CH) AQU 4 C 7 UNRA C ss AR RAS JA7(CH5) NA 2 NA 32 AMEN À 10 Sd Az(CH) HO (1) (11) tion du bromure de phénylmagnésium avec l'an- (hraquinone #. Cette formule conduit bien à des sels en C*?’H°'Az° OR(R = Ci, Br, AzO*, elc.), à une base C*H*Az°0* et à une leucobase C*H"AZ0 ; elle explique l'exis- tence de produits de condensation avec la phé- nylhydrazine et l’hydroxylamine en C*H*Az' et C?H°'Az'O décrits dans notre dernier Mémoire, von Baeyer, Villiger et Mothwurf” ayant observé récemment la formalion de produils de condensa- tion analogues avec le triphénylcarbinol et ses homologues ; enfin, elle rend compte, mieux que toute autre, de la parenté évidente que nous avons reconnue entre le vert phtaliqueetle vert malachite, car notre colorant n'est autre qu'un vert malachile dont deux noyaux benzéniques sont réunis en ortho vis-à-vis du carbone central par le radical biva- lent : — / — OH Az (CH). On pourrait peut-être s'étonner de ne pas re- trouver dans le vert phlalique, en sa qualité de vert malachite doublement orthosubstitué, la soli- 1 Hazrer et Guvor : Bull. Soc. ch., t. XXXI, p. 795 (190%). 2 Von Baevyer, VizuiGer : Berichte, &. XXX VI, p. 3013 (1902), et Morawurr, B. {. XXXVII, p. 3150. dité aux alcalis des verts malachites monoortho- substitués; mais nous ferons remarquer qu'on n'est plus en droit d'appliquer ici des règles qui ont été établies uniquement pour des dérivés monoortho= substitués. Il semble, au contraire, d'après quelques exemples que nous possédons actuellement, que la double substitution en ortho vis-à-vis du carbone méthanique du vert malachite par un radical bivalent enlève au colorant résultant toute soli= dité aux alcalis. Tandis que le colorant (form. I) décrit dans le brevet allemand n° 38.863 est un bleu solide aux alcalis, son produit de condensation anthracénique (form. 11), le tétraméthyldiamido= phényloxanthranol, est un bleu d’une extrême sen- sibilité. F — Az(CH°} PR — CENT à ( Li — \ \ 7 NC Cl (ra dt | NC A \z (CH)? SAN Az (CH)? COOCHE N co / 7 (1) (II) Enfin, il importe de remarquer que la nouvelle formule est également d'accord avec la formule dissymétrique que nous avons assignée au tétra- chlorure de phtalyle, la difference de constitution des produits de condensation ultime de ce tétra- chlorure avec le benzène (diphénylanthrone) et la diméthylaniline (vert phtalique) trouvant son explication dans la différence d'allure des deux oxanthranols qui prennent naissance dans l’une des phases de cette condensation. Le tétrachlorure de phtalyle réagit sur le benzène et la diméthyla= niline d'une facon identique, du moins dans les premières phases de la condensation, et donne dans les deux cas les phényloxanthranols correspon= dants : HO CE HO CSHS — Az (CHS Ne CE : Sir 2 (CH) CH Du cu DC) co 4 Mais, tandis que l’oxanthranol, dépouillé de toub auxochrome, se condense avec les carbures benzé= niques conformément à l'équation : cons CI CSS NRA CH — \ cé cm Sen | Ce SC DEN ETAT IN RE co CU HO + H20% nous avons montré, dans un précédent travail que l'introduction de groupes diméthylamidés dans“ cette molécule en modifie à tel point les propriétés que l'oxanthranol résultant réagit dans un tout autre sens et donne, dans les mêmes conditions, des dérivés du dihydrure d’anthracène y-diphénylé y-dihydroxylé symétrique. Û “ nous avons rencontrée jusqu'alors - combinaison organomagnésienne de la p-bromo- A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE 899 HO, CH — Az(CH* ce e MES — Az (CH) VA + CSHS HO à CH — Az(CH°} — H°0+ CH SC | DCSH* — Az (CH). OH”. Ness Il nous restait à confirmer la constitution que nous venons d’assigner au colorant en le repro- duisant par les nouvelles synthèses qui découlent de cette manière de formuler. Une première synthèse, par condensalion du bromure de p-diméthylamidophénylmagnésium avec la 8-diméthylamidoanthraquinone : CO, ce NCSHS — Az (CH:)° + 2 (CHS)°AzC°H' — MeBr Co Mo--0 CSH' r s\2 0 CSH— Az(CH*)2 BrMo NT H'— Az (CHS) H ec H'— Az(CH = QTEK DCSHS—A7(CH:)?, DO Az\CH°}C —- BKÈT BrMg_0/ cp Az(CHS® H0/° NC Az (CH?) calquée sur celle qui conduit au dihydrure d’anthra- cène y-diphénylé y-dihydroxylé symétrique par condensation du bromure de phénylmagnésium avec l’anthraquinone, présentait un intérêt tout particulier, car elle établissait nettement la pré- sence d’un complexe anthracénique dans la molé- eule du vert phlalique; mais l'impossibilité que à obtenir la diméthylaniline, malgré les indications précises données récemment à ce sujet par MM. P. Ebrlich - et Sachs”, nous a obligé à renoncer à cette prépa- ration et à toutes celles qui meltent en œuvre le même dérivé bromé. Nous avons alors tenté une autre synthèse, réa- lisable sans l'intervention des combinaisons orga- nomagnésiennes. La considération du nouveau - schéma assigné au vert phtalique montre, en effet, - qu'on doit obtenir ce colorant non seulement, 4 1 Ç: i < comme nous venons de le voir, par condensation « du tétraméthyldiamidophényloxanthranol de cons- titution 1 avec la diméthylaniline, mais aussi par “condensation de la diméthylaniline avec l’oxan- thranol isomère de constitution II : no, % DAC) po € Daxcrey de 0 f 4 ; NA QI MA ace LA AY (I) (1) L'expérience a pleinement réussi, les rendements sont excellents dans les deux cas et la constitution du vert phtalique pourrait être considérée comme établie d’une facon définitive, si des expériences Enrzicu et Sacus : Bericate, t. XXXVI, p. 4296. récentes ne nous obligeaient à faire les plus grandes réserves sur la valeur de ces synthèses. Nous n'avons pu, en effet, dans une comparaison atten- tive, relever de différence appréciable entre les deux oxanthranols employés dans cette synthèse, et nous serions tentés de conclure à l'identité des oxanthranols, si cette identité n’était en contradic- lion avec leurs modes de formation et ne nous obligeait à admettre, lors de la préparation de l’un d'entre eux, une transposilion moléculaire pro- fonde et totalement inexpliquée. Le premier de ces oxanthranols, connu depuis longtemps déjà, se prépare par condensation de l'acide diméthylamidobenzoylbenzoïque avec la diméthylaniline, réduction de la diméthylaniline- phtaléine ainsi obtenue en acide tétraméthyldia- midotriphénylméthane-0-carbonique, condensation interne de cet acide en bitétraméthyldiamidophényl- anthranol par simple ébullition avec l'anhydride acélique, puis oxydalion de l'anthranol en oxan- thranol correspondant, au moyen du perchlorure de fer. /C'H*—Az (CH): ç —C'H4— A7 (CH) /C0 — GSH*— A7 (CH) con” — CH >0 NCOOH \ Co” /C°H'— Az(CH°)° > CH NCH'—Az(CHPE NcooH CH — Az(CHS)}° CH —A7 (CH) PAU EC < CH >CH#—Az(CH°) CH CSHS — Az (CH) C NG | H0/ SOI 0 H'— Az (CHS)2 HO 2 / I Az (CH + CH Nc A7(cH') NcoO Ces opérations successives se font avec d'excel- lents rendements, et, comme on a pu transformer l'un des produits intermédiaires, l’acide tétramé- thyldiamidotriphénylméthane-o-carbonique, en leucobase du vert malachite par distillation avec la chaux sodée, il en résulte que les deux groupes aminogènes de cet acide sont bien en para vis-à-vis du carbone méthanique et, par conséquent, aussi en para vis-à-vis de l'atome de carbone y (imprimé en caractère gras dans la formule ci-dessous) dans l’oxanthranol qui en dérive 7 HO _-_ DAz(CH* AV NES SPA Ce (CE Fe Le second oxanthranol a été obtenu récemment en partant du même acide diméthylamidobenzoyl- benzoïque par un cycle de réactions totalement 900 différent, non moins de rigueur. L'acide diméthylamido- benzoylbenzoïque, traité en milieu alcalin par la poudre de zinc, se transforme, comme nous l'avons montré autrefois, en acide diméthylamidobenzyl- benzoïque : 7 CH°— CH} — Az {CH°)° COOH C‘H° dont le chlorure, condensé avec la diméthylaniline en présence de chlorure d’aluminium, conduit à un dérivé du diphénylméthane o-substitné de cons- ütution : \H2 N 7 (CH3\2 NE << 0 D A7 (CH) NN NS AZ(CIB 2 CO—Q DAz(CH La constitution de ce composé n'est pas douteuse : elle ressort de son mode de formation, de l'étude de ses nombreux dérivés et de la nature de ses produits de dédoublement sous l'influence de la potasse en fusion, parmi lesquels on a caractérisé l'acide p-diméthylamidobenzoïque. Plusieurs voies, toutes à bons rendements, permettent de passer de ce composé aux dérivés anthracéniques corres- pondants. La pius simple consiste à chauffer quelques minutes une solution benzéno-alcoolique du produit avec la quantité théorique de chloranile. Nous espérions obtenir ainsi le tétraméthyldia- midodibenzoylbenzène ortho : (0) == NAT 3\2 46 SES 7 \0E | à Co A TT. vu nous avons obtenu son isomère, le deuxième tétra- méthyldiamidophényloxanthranol. La réaction s’est effectuée sans doute en plusieurs phases, et, bien que nous n’ayions pu saisir les termes de passage, il est Lrès probable que l’oxanthranol se forme par le processus suivant : CH Hate CHOI. Se 4 D —ACH} UN en ©—A2(cH°) FÉES = se NINMEEC Ÿd—AZ(CIFE N7ZA dd Az(CH3) to /\ / OA 71 ee’ 3e /. ANTES / \2 Aa A7 (CH* Le PQ Az(CHi) LAN NV S— Az CH) VINS NAN — Az(CH°)° || QU ES fi VIN co 7 */ VAN TAN Quelle que soit d’ailleurs l'interprétation admise, la préparation de cet oxanthranol par oxydation d'un dérivé ayant ses deux groupes amidés en para vis-à-vis de radicaux — CO — et CH? — implique et sa constitution semblait établie avec ! | nécessairement la présence de deux groupes ami- . ; L A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE nogènes en para vis-à-vis des deux atomes de car- bone 7 de l’oxanthranol résultant. L'oxanthranol de constitution suivante : os ER 4 Ne ÿ— Az(CH°)° } LE à 7N Az (CH:): { V/\co/ est le seul qui satisfasse à cette condition. VI. — LE CHROMOGÈNE DU VERT PHTALIQUE. Le vert phtalique est le premier représentant d'une classe nouvelle de colorants dont on a pré- « paré, depuis lors, un assez grand nombre de termes par condensation des tétraméthyldiamidophényl- oxanthranols précédents avec le benzène, le toluène, les xylènes, l’éthylbenzène, l’anisol, le phénétol, le pyrogallol, etc.”. Tous ces composés dérivent du dihydrure d’anthracène y-dihydroxylé +-diphénylé symétrique : HO C'HS cc ANA tel SAN HO ox comme les colorants du triphénylméthane dérivent du triphénylcarbinol. Il nous a semblé intéressant de préparer ce dioh et de le comparer au triphénylearbinol et au vert phtalique. Cette étude nous a révélé des propriétés fort curieuses. Le dihydrure d’anthracène y-dihy- droxylé y-diphénylé symétrique, que par abrévia- tion nous appellerons désormais diol, s'obtient facilement par condensation du bromure de phényl- magnésium avec l’anthraquinone ou le phényl- oxanthranol : PNVAUNAN | |+2cH—MeBr+2n0 N/Nco/ 7 C5 À ne Br + 2Mg€ °Nog (Etes HO \c'Hs HO L CSH5 NAT | + CH5 — MgBr + H°0 CN 4 HO CH D di _ A Mg Ex RUE 0 Tr 10/0 Nc 1 STAEULING : Thèse de doctorat à l'Université de Nancy, avril 1905. A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE 90 C'est, du reste, du phényloxanthranol qui se forme tout d’abord dans l’action ménagée du bro- mure de phénylmagnésium sur l’anthraquinone; et, lorsqu'on se place dans des conditions telles que l’anthraquinone soit toujours en large excès vis-à- vis de la combinaison organomagnésienne, on peut préparer commodément des quantilés considérables de ce quinol, sans avoir recours au procédé ancien, fort long et assez pénible, décrit par Baeyer. Il est facile de concevoir l'existence d'homologues » du précédent diol en remplaçant dans cette prépa- - ration l’anthraquinone et le bromure de phényl- magnésium par leurs homologues. On à ainsi oblenu des composés dont les propriétés générales sont entièrement comparables à celles du diol type. Tous ces composés se dissolvent dans l'acide sulfurique concentré avec une coloration bleu indigo ou vert malachite très intense et très carac- téristique, qu'il est inléressant de rapprocher de la coloration rouge fuchsine, également très caraclé- ristique, donnée dans les mêmes conditions par les phényloxanthranols. On sait que la faculté de donner des solutions sulfuriques fortement colo- rées est caractéristique des phénylcarbinols; cette + coloration est intimement liée à la formation d'un * sulfate coloré, que von Baeyer a pu isoler dans cer- à tains cas à l’état cristallisé, et l’on se rappelle les . conclusions toutes récentes que ce savant a tirées de l'existence de ces sulfates colorés, conclusions " qui l'ont amené à proposer une nouvelle formule : de constitution des colorants du triphénylméthane*. Comme le triphénylcarbinol également, les diols s'éthérifient avec la plus grande facilité, en pré- - sence d'un alcool et d'une trace d’un acide minéral, en donnant les éthers disubstitués correspondants: RO C°HS Sa de GIR2e * Ro Nc Il suffit de laisser tomber une goutte d'acide chlorhydrique dans une solution alcoolique du diol pour obtenir aussitôt une abondante cristal- lisation de l’éther correspondant. Quant aux éthers … mono-substitués : k HO CIE Ne A4 on les prépare facilement par condensation du 1 V. Baexer : Berichte, t. XXXVIII, p. 569 et 1156 (1905). bromure de phénylmagnésium avec les éthers du phényloxanthranol. Enfin, les diols rappellent également le triphé- nylcarbinol par l'aptitude qu’ils possèdent de se condenser avec la diméthylaniline et ses homolo- gues, par simple ébullition des composants en solu- lion acétique, pour donner desdérivésy-tri ety-tétra- substitués, sur lesquels nous reviendrons plus loin : Y 32 6 i GS (C 3,2 ‘6 ÿ 65 (CH3,°Az.C°H e 7e H (CH*)?Az.C‘H K GA I VNSAEN AÈ IN PRES N7S GAIN A NZ Nc > Ho N@H (cH}az.cH Non Mais la propriété la plus remarquable de ces diols, propriété tout à fait inattendue et sur laquelle nous désirons appeler l'attention, réside dans leur pouvoir fortement oxydant. Ces carbinols cèdent, en effet, avec la plus grande facilité, un atome d’oxy- gène aux molécules avec lesquelles ils se trouvent en présence, en se transformant en carbures anthra- céniques : CH HO po | SONGS ARS ] = 0 +0+ | | | | ) ca NAN GAX HO/ “Css 1e Ils oxydent les leucodérivés en colorants, mettent en liberté l’iode de l'iodure de potassium, ete., et leurs propriétés oxydantes sont telles qu'en leur présence l'acide chlorhydrique se comporte comme un agent de chloruration. Ainsi s'explique la for- mation, en apparence paradoxale, de diphénylan- thracène chloré dans l’action de HCI gazeux et sec sur une solution acétique et bouillante du diol. Le mécanisme de la réaction est facile à saisir: lorsqu'on répète, en effet, l'opéralion au-dessous de 100°, la liqueur se remplit de feuillets blancs nacrés de l’éther dichlorhydrique normal : ADR Cl Ne x 74 INA | Ne à . PANT/A / SAS / Or ce composé, chauffé au-dessus de 100° au sein d'un dissolvant neutre quelconque, perd aus- sitôt HCI et se transforme en diphénylanthracène chloré, conformément à l'équation : CSS CI C°H5 A DK : a CSIS DAH6 — ce 1.CSH® NCSHS. CH KAZÉE HCI + C H Gt cl Nos | CE 902 A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L'ANTHRACÈNE La position de l'atome de chlore dans cette mo- lécule reste hypothétique, toutes les tentatives faites pour transformer par oxydation le carbure chloré en anthraquinone ou chloranthraquinone avant échoué. Ce phénomène de chloruration sous l'influence de l'acide chlorhydrique, qui rappelle la transfor- malion dans les mêmes conditions de la benzoqui- none en hydroquinone chlorée et du flavanthrène en indanthrène chloré', met en évidence les pro- priétés fortement oxydantes de ces diols. On con- çoit donc qu'en raison de ces propriétés il ait été impossible de préparer avec ces diols des produits de condensation avec l'hydroxylamine et la phé- nylhydrazine, analogues à ceux que forment, dans les mêmes conditions, le vert phtalique et les tri- phénylcarbinols. Il est intéressant, toutefois, de faire observer que les propriétés si caractéristiques de ces diols, faculté d’oxydation et faculté de condensation, disparaissent dès qu'on opère en milieu neutre ou alcalin. Ainsi, contrairement à loute prévision, l’amal- game de sodium est sans action sur ces diols en milieu alcoolique, alors qu'une foule de composés organiques réduisent les diols en milieu acétique; on peut faire bouillir sans altération une solution de diol dans la diméthylaniline, alors qu'en présence d'acide acétique celte amine se condense rapide- ment, à la température du bain-marie, pour don- ner, comme nous le verrons plus loin, des dérivés y-tétrasubstitués du dihydrure d'anthracène. Baeyer, dans un récent Mémoire, a fait observer que l’ac- tivité de l'hydroxyle du triphénylcarbinol et de ses homologues nese manifeste également qu'en milieu acide; ces deux ordres de faits sont donc entière- ment comparables. Les carbures anthracéniques du lype : C‘u* ail EVANS 'e NGrs qui prennent naissance toutes les fois que les diols interviennent comme oxydants dans une réaction, sont des carbures colorés dont les solutions pos- sèdent une fluorescence violette de toute beauté. Ils régénèrent facilement les diols par oxydation. On peut encore les oblenir par une voie toute différente, qui présente un intérêt tout particulier en raison de sa commodité pour préparer des quan- tités considérables de carbure. Nous avons montré, dans un travail récent’, que le bromure de phé- nylmagnésium réagit sur la diphénylphtalide, l'éther phtalique ou l’éther o-benzoyl-benzoïque en donnant, dans les trois cas, comme produit de condensation ultime, le triphényl-0oxy-ux'-benzo= 88'-dihydro-u+'-furfurane (form. 1). Or, ce composé, réduit par l'amalgame de sodium, fixe deux atomes d'hydrogène avec rupture du noyau furfuranique et donne l’o-benzhydryltriphén ylcarbinol (form. Il), que l'acide sulfurique concentré transforme instan- tanément, à froid, en diphénylanthracène, par un mécanisme représenté par le schéma ci-dessous : DORE CONS /INVEZCH NC CH No | Non à 7 +6 (1 ADS NINeECR VNcHOR— CH: OH (1) (11) — —, PAU AN NS ANR c{ 4 3 | AN SGENT ES a deal | | | : Ve 7 PATES KO TS NN 7 NEA Traités par l’almalgame de sodium, ces carbures anthracéniques se transforment facilement en dihydrures incolores, non fluorescents et facilement oxydables. Le diphénylanthracène donne, dans ces conditions, un dihydrure fondant à 218°, dont la constitution n'est pas douteuse : CPR H. TE ANTENNES ISPÉSRAS | | | | ne | | 7 NZ / f RAC nue H/ Nc C'est done par erreur que Linebarger” a attribué autrefois une semblable formule de constitution à un produit fondant à 164°, obtenu à côté d’autres composés dans l’action assez complexe du chlorure de benzylidène sur le triphénylméthane, Telles sont, rapidement résumées, les propriétés des carbinols d'où dérivent le vert phtalique et ses homologues. On ne retrouve aucune de ces pro= priélés si caractéristiques dans les colorants ; ces corps ne jouissent d'aucune propriété oxydante; ils sont incapables de se condenser avec les amines aromatiques pour donner des dérivés du dihydrure d’anthracène +-tétraphénylé; leurs solu- tions dans l'acide sulfurique concentré sont d'un jaune pâle, alors que les carbinols dépouillés de SCHOLL et BERBLINGER. Bagyer : Berichte, &. XXXVII, p. 1160. 1 1 Guyor et CATEL: C. R., 1905. . * LiNEBARGER : Am. chem. Journal, t, XIII, p. 556. A. GUYOT — LES DÉRIVÉS y-ARYLÉS DE L’ANTHRACÈNE 903 tout auxochrome donnent, avec le même acide, des solulions bleu indigo ou vert malachite très intense; enfin, leurs leucodérivés renferment de l'oxygène et ne se rattachent done pas aux carbures que nous venons de décrire. Mais c'est un fait constant que l'introduction d’auxochromes dans la molécule d'un chromogène modifie à lel point les + propriétés du composé résultant qu'on n’y retrouve plus l'allure de la molécule primitive. Les propriétés si fortement oxydantes du chlorure de pyryle, sur lesquelles M. Fosse attirait l’altention dans un précédent article‘, ne se retrouvent pas dans ses dérivés amidés, les pyronines; l’aptitude que pos- sède le triphénylcarbinol de se condenser avec les phénols* et les amines aromatiques, par simple ébullition des composants en solution acétique, n'existe plus dans les amidotriphénylearbinols, et c'est en vain qu'on a tenté de préparer des dérivés du tétraphénylméthane par condensation du vert malachite ou du violet cristallisé avec une amine ou un phénol quelconques. Nous même avons attiré plus haut l'altention sur la différence d’allure très nette que présentent le phényloxanthranol et son dérivé tétraméthyldiamidé vis-à-vis du benzène, de ses homologues, des phénols et des amines. On saitaujourd'hui qu'il n’exisle aucune corréla- lation entre la couleur de la solution d'un colorant dans l'acide sulfurique et la couleur de la solution, + dans le même acide, du carbinol dépouillé de tout auxochrome. Le bleu Victoria, par exemple, se dissout dans l'acide sulfurique concentré en orangé, alors que son carbinol générateur, le diphényl- naphtylcarbinol, s'y dissout en vert intense. Enfin, c'est également à la présence des auxo- - chromes qu'il faut attribuer, chez le vert phtalique 4 et ses homologues, la propriété de donner des - leuco-dérivés de la forme : + Lo SR d NX 7 LL 1RS | /CSH#— Az (CH? /\ A Y TES Re NA Sc N7 HO \C‘H—Az(CHp, Az (CH°}° Y «— alurs que toutes les tentalives faites pour obtenir VIT. — LES DÉRIVÉS yÿ-TRI ET y-TÉTRA-ARYLÉS DU DIHYDRURE D'ANTHRACÈNE. Nous avons vu que les diols se condensent facilement avec la diméthylaniline et ses homo- logues, par simple ébullition des composants dans l'acide acélique, pour donner, selon les propor- tions des composants mis en œuvre, des dérivés du dihydrure d'anthracène +-tri et y-tétra-subs- titués : HO, C‘IE C5 /C'H*Az(CH°) De (6: A \ 6 *6F VGFIS (C | y” V6 ; ‘6 4 20 GHIQ ns CSHE + CSHSAZ(CIP) — CH C'H* + H°0 : C HO c‘ HO CHE HON CH CH /C‘H' Az (CH) } G: CE CUTE CH +2 C°HSAz (CH°)°— SH °cH‘+2H20 7 (ei Ce HO CSH5 CSH° CSH*Az (CH°}. Toutefois, cette méthode, qui conduit à d'excel- lents résultats pour la préparation des dérivés tétra- substitués, est d’une exécution délicate quand on se propose d'obtenir les dérivés trisubstitués. Mais on peut très aisément préparer ces dérivés trisubstitués, soil par condensation du bromure de phénylmagnésium et de ses homologues avec l’une des nombreuses diphénylanthrones actuellement connues : CH, CSI à * NE C N | | L CH Mg Br + H20 | NAN CON GHHERS QUE AAC 4 Bt = | | | + Me Le No NAN C Ne HO/ “CH soit par transposition moléculaire des télra- phényl-ux-benzo-88'-dihydro-ux'-furfuranes décrits CESR RSS LL un composé du mème type, mais sans auxochrome, dans l'un de nos derniers Mémoires : PL Li LJ] 14 . 2 ” . . 3 soit par réduction ménagée du diol, soit par oxyda- CE LC CH, con tion ménagée du carbure, ont loujours conduit au DES : 78 … diphénylanthracène par suite d’une déshydratation fé ÿ | \ | | - A ù 147 . interne : | ® GA CSS HS N AN EN : AE | DAUN CR AT TAN LONVAR RE NS C‘H° \CSHS C‘H® OH = (F1) + SZNTANPA IAE ANA cette transposition s’effectuant rapidement au con- HO/ Nc NcHs tact de l'acide sulfurique concentré, soil enfin par condensation anthracénique des composés du type : 1 Revue générale des Sciences du 30 sept. 1903. 2HALLER et Guxor : Bull. Soc. ch., t. XXXI, p. 979. D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 904 CSFIE COE CSHFÈ CHE à (EG / (BR FUN S ANOGNIN | . OH — ) DEA ONE C— CH < UN. Il CSH5 H CH résultant de l’action du bromure de phénylma- gnésium et de ses homologues sur les éthers des acidestriphénylméthane-0-carboniques.On obtient, dans ce dernier cas, un carbure d’où l'on passe faci- lement au carbinol par oxydalion. La coloration rouge orangé de ces carbinols dans l'acide sulfurique concentré, la grande facilité avec laquelle ils se réduisent, s'éthérifient ou se con- densent avec une molécule d'amine ou de phénol pour donner des dérivés du dihydrure d’anthracène y-létrasubstitués, rappellent de très près le triphé- nylcarbinol. lei encore, et conformément à l'obser- vation de von Baeyer, l’activité de l'hydroxyle car- binolique ne se manifeste qu'en milieu acide. Remarquons, en terminant, que la plupart des dérivés +-substitués du dihydrure d'anthracène peu- vent théoriquement exister sous les deux formes sté- réochimiques cis et trans. On n'obtient, en général, que l’un des deux composés; toutefois, dans la con- densation des diols avec la diméthylaniline et la diéthylaniline par ébullition des deux composants en solution acétique, on obtient des quantités égales et presque théoriques des isomères cis et et trans”. A. Guyot, Maître de Conférences à la Faculté des Sciences de Nancy REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE LL. — SYpiLis. Peu de faits ont eu celte année, dans le domaine médical, un aussi grand retentissement que la découverte du spirochète pâle : c'estle microbe pré- sumé de la syphilis. Jusqu'ici les expériences de contrôle qui sont faites de toules parts semblent confirmer la spécificité de cet agent. Depuis qu'on sait le rôle des microbes dans la production des maladies, on est convaincu que la Syphilis est d’origine microbienne. Sa contagiosité, sa transmission héréditaire, la netteté de ses symptômes caractéristiques, leur filiation, leur marche l'ont fait classer parmi les infections géné- rales le plus hautement spécifiques. Il semblait bien qu’un agent figuré pût seul reproduire cette maladie aux allures à la fois si fixes et si variées. Aussi, depuis vingt-cinq ans, on n’a cessé d'en chercher le microbe pathogène, et, maintes fois, on crut l'avoir trouvé. De nombreux parasites de tous ordres ont été donnés tour à tour comme les agents spécifiques de la vérole : loujours il fallut les rejeter après examen et remettre la ques- tion à l'étude. On se souvient de l'importance que prit jadis le bacille décrit par Lutzgarten; il ya quelques semaines à peine, Pommay décrivait encore un champignon à mycelium filamenteux dont la culture aisée sur les milieux usuels devait lui permettre d'obtenir un vaccin actif. Au début de l’année, un savant berlinois avanca que la syphilis était due à un protozoaire. Schau- dinn, à qui ses éludes {antérieures sur les Proto- zoaires, entre autres sur le spirille de la fièvre récur- rente, avaient donné une compétence spéciale, fut chargé par l'Office Sanitaire de Berlin de rechercher ce protozoaire. Il ne le trouva point; mais, grâce à RÉ à Ge Th D TES Rs. D « une technique particulière de coloration, il put voir dans trois cas de syphilis un microbe en spirale, un spirochète. Ce fut après cette constalalion qu'avec le concours d'un syphiligraphe, Hoffmann, il entre- prit des recherches sur des syphilitiques. Ils exa- minèrent des chancres, des papules, des bubons; ils trouvèrent, dans 26 cas, ce même spirochète. Avec une réserve prudente, tout à leur éloge, ils signalèrent le fait sans vouloir préjuger le rôle pathogénique du nouveau parasite. Celui-ci est un protozoaire spiralé, queses carac- tères morphologiques firent nommer Spirochæte pallida, à cause de son peu d'affinité pour les réactifs colorants. Le spirochète de Schaudinn a une longueur de 4 à 144 et une épaisseur de 0,5 w et moins. Il est très mobile. Ses spires bien régu- lières, serrées, sont au nombre de 6 à 14. On peut rappeler qu'antérieurement Bordet eb Gengou avaient trouvé, dans un chancre et des plaques muqueuses, un spirochète si difficilement colorable et si délicat que des recherches ulté- rieures, faites par divers microbiologistes et par LEMES RL LE ST D les auteurs eux-mêmes, ne le découvrirent plus. Était-ce celui de Schaudinn? C’est vraisemblable, car Metchnikoff et Roux, à qui Bordet a récem- ment envoyé une ancienne préparation, disent y avoir, « non sans peine, reconnu un spirille absolu- ment identique» au Spirochæte pallida Schaudinn: Hoffmann et Schaudinn demandèrent le contrôle de leurs recherches à l’Institut Pasteur, où Metch- ‘ Conférence faite au Laboratoire de M. Haller, à la Sor- bonne. Pire D° A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 905 … nikoff et Roux ont des séries de sujets en obser- vation pour leurs travaux sur la syphilis expé- rimentale. Au cours de leurs examens, tant sur des chimpanzés que sur des macaques syphilisés, Metchnikoff et Roux trouvèreut le Spirochæte pal- lida tantôt en grand nombre, tantôt très rare ; quelques fois la recherche fut vaine. Ces observa- “teurs insistent, d'ailleurs, sur la grande variabilité « du nombre de ces spirilles, sur leur répartition “inégale et capricieuse dans les produits syphiliti- ques. Lors de leur communication à l'Académie de Médecine, chez 4 singes syphilisés sur 6, ils « avaient trouvé des spirochètes. … Ayant obtenu ce résultat, ils cherchèrent le spi- - rochète dans le suc provenant du raclage de papu- “ les chez l'homme. Ils choisirent les papules les plus jeunes et dont le siège était le plus éloigné de - l'accident primitif. Dans ces conditions, le spi- rochète fut trouvé seul, sans les microbes étran- gers qui habitent si souvent les lésions syphili- tiques, qui peuvent en dénaturer l'aspect et en modifier l'évolution. Quatre fois sur six, ils le touvèrent. Il faut ajouter que des recherches faites sur des lésions cutanées d’une nature autre que la syphilis, tant à l’Institut Pasteur que dans d’autres élablissements, n'ont pas donné lieu à la constata- tion du même spirochète. En résumé, ce micro-organisme semble jusqu'ici n'exister que dans la syphilis ; et, dans celle-ci, il . n'est pas toujours décelable. Ce dernier fait est négligeable, parce qu'on sait que, dans certaines maladies infectieuses des mieux caractérisées au point de vue clinique et dont l'agent est aisément visible, dans la tuberculose par exemple, il est sou- - vent impossible de déceler le bacille pathogène. - Onn'apas encore réussi à obtenir des cultures “du Spirochæte pallida, pas plus que des autres spirilles, d’ailleurs, qui sont cependant reconnus “comme les agents de certaines septicémies, comme “lespirille d'Obermeier, cause de lafièvrerécurrente. De l’ensemble de ces recherches, Metchnikoff et r Roux admettent que la syphilis peut être une spi- “rillose chronique, produite par le spirochète de - Schaudinn. “— Dansune conférence récemment faite à la Société de l'Internat, Metchnikoff mit en parallèle la fièvre “récurrente et la syphilis. Il montra les deux -microbes spirillaires affectant également l'homme “et les singes; mais, indiquant la « différence entre allure aiguë de la fièvre récurrente et la chronicité de la syphilis », éminent bactériologiste ne fit pas allusion aux formes aiguës de la syphilis. Parmi les types fébriles que revêtent celles-ci, on distin- gue un type continu, qu'on a appelé la typhose Syphilitique, et un type intermittent, dit fièvre intermittente syphilitique, avec périodes alterna- tives de haute élévation de température et d'apy- rexie complète. Or, ce type thermique présente d'évidentes analogies avec la spirillose d'Obermeier, remar- quable par ses accès à rechute de pyrexie excessive, entrecoupés de périodes d'apyrexie complète. A la suite de ces observations, nombre d'auteurs ont poursuivi des études dans le même sens. Levaditi, voulant prouver le rôle pathogène spéci- fique du spirochète de Schaudinn, en rechercha la présence dans la syphilis congénitale, là où la syphilis vient de passer de la mère au fœtus. Or, dans le liquide prélevé sur un enfant de huit jours portant des bulles de pemphigus, Levaditi trouva le spirochète. Il existait également dans les organes. Cette même constatation a été faite aans le foie et la rate d'un nouveau-né syphilitique par Buschke et par Fischer. Dans un autre cas, Leva- diti trouva le spirochète dans des bulles de pem- phigus, mais ne put le déceler ni dans les viscères, ni dans la moelle. Plusieurs observateurs, tant à l'étranger (Wech- selmann, Frosch, Babes et Punca, etc.) qu’en France (Milian, Queyrat et Joltrain, etc.), ont, soit trouvé le Spirochæte pallida dans les lésions syphi- litiques,soit noté son absence dans des lésions qui ne sont évidemment pas de nature syphilitique. Bayet et Jacqué (de Bruxelles) ont publié une sla- tistique de leurs recherches. Ils ont vu le spirochète de Schaudinn : 9 fois dans le chancre primitif; 9 fois dans le sue obtenu par ponction des gan- glions satellites; 3 fois dans des papules secon- daires ulcérées ou non; 1 fois dans le foie ou la rate d’un nouveau-né hérédo-syphilitique. Une de leurs observations concerne un chancre du dos de la main et du ganglion épilrochléen correspondant. Si les constatations positives sont en majorilé quand il s'agit de lésions superficielles ou hérédi- taires, quelques auteurs ont signalé leur défaut dans les liquides organiques. C’est ainsi que Widal et Ravaut n’ont pu voir le spirochète dans le liquide cépbalo-rachidien, riche en lymphocytes, de 15 malades présentant, soit des éruptions secon- daires, soit des signes de syphilis cérébrale ou médullaire. A côté du Spirochæte pallida, Vaccompagnant même souveni, il existe un organisme voisin, qui, de prime abord, peut prêter à la confusion : c'est le Spirochæte refringens. Il a été signalé par Schaudinn lui-même et d’autres observateurs. Un savant autrichien, Kraus, qui trouva le spiro- chète de Schaudinn dans les lésions syphilitiques avérées, à insisté sur la présence fréquente du spirille réfringent, en dehors de la syphilis, dans le smegma, les secrétions vaginales, le pus des bala- 906 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE nites, les condylomes, etc. Bien que ses caractères morphologiques soient voisins du Spirochæte pal- lida, il ya cependant des moyens de les différencier. Kraus à proposé une différenciation par les réac- tions colorées, basée sur ce fait que les spirilles réfringents sont aisément colorables par les cou- leurs basiques d’aniline. En outre, leurs spires sont moins nombreuses et plus espacées. Signalons encore que, tout récemment, Hoffmann a retrouvé dans les cancers ulcérés des spirochètes analogues à celui de Schaudinn. Toutefois, ils sont plus épais, ont des spires plus accentuées et plus nombreuses, etprennentmieux la couleur. Hoffmann a vu dans ces spirochètes des éléments en forme de croissant ou spiralés se colorant en rouge par le procédé de Giemsa. Ces faits sont extrèmement importants; ils sont favorables à la spécificité, au rôle pathogénique du Spirochæte pallida; mais ils ne constituent pas encore une preuve certaine. Pour que le problème fût résolu, il faudrait prouver que le spirochète de Schaudinn, inoculé, seul, reproduit constamment la syphilis. Pour arriver à cette expérience décisive, l'oblention de cultures pures du spirochète, c'est- à-dire l'isolement parfait du parasite, est néces- saire. Ce résultat n’est pas encore atteint. Le moment n'est pas encore venu — malgré toute l'agitation qui s’est faite autour de cette question — de parler de sérum curatif. Il faut garder la réserve prudente dont les plus autorisés des auteurs, les inventeurs eux-mêmes, Schaudinn et Hoffmann, puis l’Institut Pasteur, ont donné l'exemple. II. — ATHÉROME EXPÉRIMENTAL. Les artères, quand l’homme arrive à l’âge mûr, subissent souvent une dégénérescence en certains points, réparlis très inégalement sur leur surface interne. Sur la membrane interne d’une artère, de l'aorte, par exemple, apparaissent de petites plaques grises, à peine visibles, gélatineuses au début, qui deviennent molles et jaunàtres, se rem- plissent de granulations graisseuses, puis d'un magma de cellules, de graisse et de cholestérine et de cristaux aciculaires d'acides gras, puis finissent, au bout d’un certain temps, par s’incruster de sels calcaires. Par leur développement, elles se réunis- sent, se confondent et transforment la surface lisse des vaisseaux en une vaste plaque inégale etanfrac- tueuse, le tissu doux, souple et élastique de l'artère en une croûte rugueuse, couverte d’aspérités aiguës, dure, cassante. C’est l’athérome artériel. La pustule athéromateuse est, de la sorte, remplie d’une sorte de boue, ce qu’exprime le mot athérome. ! C'est le procédé de coloration d'élection pour le spiro- chète de Schaudinn. Cette dégénérescence est considérée comme l'effet d'intoxications lentes plus ou moins nettement dé- terminées. On l’a attribuée à l’action de poisons fournis par l'organisme lui-même au cours d'éla- borations viciées, ou bien de poisons étrangers in- troduits dans l'économie, comme l'alcool, le plomb, oudetoxinesinfectieuses, comme le poison lyphique. Pour déterminer la part de chacun de ces agents, on à tenté à plusieurs reprises de produire artifi= ciellement l'athérome. Gilbert et Lion, Crocq, Boinet et Romary, en injeclant des toxines micro- biennes diverses aux animaux, ont pu provoquer, avec ou sans traumatisme préalable de la paroi artérielle, des lésions semblables à l’athérome, du moins à ses débuts. Mais c’est par les injections intra-veineuses ré- pétées de quelques gouttes d’une solution d’adré- naline au 1/1.000° (extrait de capsules surrénales) qu'on obtient l’athérome le plus caractérisé, à tous ses états, allant jusqu’à la transformalion calcaire de la pustule athéromateuse. Le mérite de cette découverte revient à Josué qui, le premier, signala le fait à la Société de Biologie en novembre 1903. Assez vite, ces injections provoquent des lésions M accusées, puisque les premières expériences de M Josué déterminèrent en cinq semaines, chez le lapin, la formation de plaques calcaires sur l'aorte thoracique et abdominale et, en même temps, une dilatation du cœur. En poursuivant l'expérience plus longtemps, au bout de trois mois, on trouve les mêmes lésions, mais plus nombreuses et beaucoup plus étendues. Josué a même pu observer la formation d'une poche anévrysmale (on sait que tout défaut de résistance sur un point d'une paroi artérielle peut être l’origine d'un anévrysme). Pour pro- duire cet athérome, il importe que l’adrénaline soit versée directement dans la circulation sanguine; les injections de cette substance pratiquées sous la peau n’y suffisent pas. Autrefois, on pensait que l'hypertension artérielle que présentent beaucoup d’athéromateux était la cause productrice de l'athérome. Comme l’adréna- line a pour effet d'élever considérablement la tension artérielle, on pouvait se demander si l’athérome expérimental n'était pas causé simplement par l'hypertension. Cette idée perd ses partisans. Nous. verrons plus loin qu'elle n’est pas corroborée par les faits d’expérimentation. Il est probable que l'athérome résulte d'une action plus directe de la substance toxique. L'action expérimentale de l’adrénaline étant acquise, il devenait nécessaire de chercher ces qu'étaient les capsules surrénales chez les sujetsm atteints d'athérome. Josué et Bernard virent, dans trois cas d’athérome spontané chez l'homme, des RAT nt gusper he it des D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE lésions notables des capsules surrénales. Ces orga- nes étaient plus volumineux et plus durs que nor- malement. Les cellules des diverses couches qui constituent le parenchyme étaient toutes modifiées : élat spongieux des cellules corticales, surcharge pigmentaire des cellules de la couche réticulée. Ces transformations accompagnent d'habitude la sur- activité fonctionnelle de la glande. Malheureuse- ment, il est impossible, dans les délais autorisés des autopsies, d'obtenir des capsules surrénales dont la substance médullaire, sans doute la plus importante, celle qui est le siège de la sécrétion de l’adrénaline, soit en état convenable de conserva- tion. Aussi ne peut-elle être l’objet d'une investiga- tion complète. Néanmoins, l'existence évidente des lésions surrénales coïncidait avec l'athérome. C'était un fait important à l'appui de la thèse de Josué. D'autres observateurs ont poursuivi l'étude de cetle question en divers sens. Pic et Bonnamour (de Lyon) ont confirmé les expériences de Josué. Injectant à des lapins quelques gouttes d’adréna- line, ils observèrent une fois sur trois la produc- tion d'un athérome aortique très accusé. L’aorte était devenue dure, rigide et couverte de plaques athéromateuses. Ils remarquèrent, en outre, que l'expérience était d'autant plus démonstrative que l'animal était plus âgé. Ils ont eu l’idée de poursuivre ces essais sur des lapins préalablement tuberculisés. Chez ceux-ci, quel que fût leur àge, l'athérome expérimental fut - réalisé, mais loujours avec une intensité propor- PR TP AT tionnelle à l’âge. Il résulte de ces faits que l’athé- rome semble être fonction de l’âge et qu'une infec- tion antérieure favorise sa production. Lortat-Jacob et Sabareanu, ayant vu que l’abla- tion thyroïdienne empêche la production de l’athé- rome expérimental, eurent l'idée de faire les mêmes essais sur d'autres glandes. Ils enlevèrent les testicules à des animaux et virent que celte castration favorise dans des proportions notables 907 l'adrénaline peut déterminer la lésion artérielle. On sait que l’artério-sclérose s'accompagne sou- vent d’élévation de la tension artérielle : ce fait servit de base à une théorie, soutenue par Huchard, qui altribuait à cette hypertension un rôle causal. Il semble, au contraire, que ce soit seulement l'effet du défaut d'élasticité des artères. Braun, expéri- mentalement, s'oppose à l'élévation de la pression artérielle que provoque généralement l’adrénaline par l'injection de nitrite d’amyle. Malgré cela, la lésion artérielle se produit. Ajoutons que Josué, de son côté, n'a pu déterminer l’athérome expéri- mental par l'injection de substances qui augmentent la tension artérielle. Il faut donc attribuer l'action de l’adrénaline plutôt à une toxicité spéciale de ce corps qu'à une hypertension vasculaire. Sturli eut l’idée d’expérimenter l’action de la méthylamine-acéto-benz-catéchine, dont la compo- sition chimique et l'action physiologique sont analogues à celles de l’adrénaline. Cette substance contracte les vaisseaux et, secondairement, amène une élévation de la pression artérielle. Les expé- riences de Sturli confirment les lésions ordinaire- ment constatées sous l'influence de ces actions, c'est-à-dire l'amincissement des parois et la dilata- lion secondaire du vaisseau. Il observa même la destruction du tissu élastique et la calcification. Aussi pense-t-il que la lésion provoquée par l’adré- naline est spéciale et qu’elle diffère de la sclérose aortique spontanée. Fischer, d'autre part, a observé une nécrose des éléments musculaires de la tunique moyenne, avec calcification et destruction des fibres élastiques. Elle affecte surtout la crosse de l'aorte et l'aorte thoracique. Il signale, en outre, des foyers de myo- cardite interstitielle et des hémorrhagies intra-fas- ciculaires dans les fibres mêmes du muscle car- diaque. Ces mêmes lésions sont produites par d’autres maladies : c’est plutôt une arlério-nécrose que de l’artério-sclérose. Kübbs a déterminé des lésions plus avancées en- … La formation de l'athérome surrénal. —._ Pearce et Stauton ont constaté, après des injec- À tions intraveineuses d’adrénaline fréquentes (5 à core que les observateurs précédents, puisqu'elles ont été jusqu'à déterminer des anévrysmes dissé- quanls. 6 fois 2 gouttes par jour), au bout de douze jours, des îlots de dégénérescence dans les luniques interne et moyenne de l'aorte, mais sans lésions macroscopiques. Puis la tunique élastique s’altère par allongement et rupture des fibres spiralées. - Plus tard, les artères deviennent extrêmement fria- bles et se revêtent de plaques calcaires. Josué, dans certaines de ses préparalions expérimentales, a signalé la dissociation et le dédoublement de la tunique élastique de l'artère ; ce fait s'observe éga- lement sur les artères athéromateuses de l'homme. L. Braun a recherché le processus par lequel Outre l'intérêt que présente l’athérome expéri- mental, l'ensemble de ces travaux semble juger un point de la Pathologie souvent discuté. Étant donnée l'opinion classique qui lie l’athérome à l'artério-sclérose, cette dernière n'étant, d'après les livres, que ie durcissement des parois des petites artères el principalement des fines ramifica- tions viscérales, on pouvait croire que ce qui pro- duisait l’'athérome produisait aussi l'artério-selé- rose. Or, les expériences de Josué sont contraires à cette idée, car l’adrénaline produit l’athérome, et non l’artério-sclérose. 908 D: A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE Elles ont donc montré qu'il fallait désormais différencier l'athérome de l’artério-selérose. Cette distinction, Brault l’a depuis longtemps établie sur des preuves anatomo-pathologiques. Repoussée jusqu'ici par la plupart des cliniciens, cette théorie de Brault sur la dualité des deux pro- cessus est expérimentalement justifiée. III. — Gourre. Les travaux relatifs à la goutte sont rares : les progrès faits dans la connaissance de cette maladie sont lents. Depuis un siècle, elle n’a fait que béné- ficier des acquisitions de la Chimie, qu'on a adap- tées du mieux possible à l'interprétation des phénomènes cliniques. L’acide urique a longtemps dominé la scène; on a approfondi l'étude des corps xantho-uriques; on a vu que le problème se compliquait en instituant le beau groupement des purines. Tout cela a fait mieux comprendre le mécanisme pathogénique peut-être; mais la cause réelle de la maladie s’est constamment dérobée. Il y à pourtant longtemps qu'on a pressenti que la Chimie seule ne donnerait pas la solution convoitée. En Allemagne, il ya trenteans,on commencaà parler de ferments. En France, Lecorché, que cette théorie avait séduit, avait pensé comparer le rôle des cel- Jules de l'organisme même à celui de cellules de ferments figurés; moi-même, exagérant peut-être une très vieille idée émise par Boerhaave, je défendis, il y a quelques années, la théorie parasi- taire en disant que « la goutte s'acquiert, elle se gagne ; et cela, indépendamment de notre constitu- lion même. Nos ascendants nous la transmettent, nous la passent, exactement comme ils nous passent un germe de maladie infectieuse’ ». J'avançais cette hypothèse d’après des considérations tirées de l’hérédité de la goutte, qui se transmet suivant le même mode que les maladies infectieuses les plus caractérisées, comme la tuberculose et la syphilis. Aujourd'hui, ces idées semblent de temps en temps trouver des arguments en leur faveur. Les agents infeclieux prennent une place dans la pathogénie de la goutte. E Signalons d'abord, au point de vue biologique, les nouvelles recherches de A. Labbé et Morchoisne sur l'élimination des composés xantho-uriques chez les sujets sains. Celle-ci est presque exclusi- vement proportionnelle à la qualité et à la quantité des aliments. Klemperer, qui poursuit ses beaux travaux de Chimie biologique, a démontré que l'acide urique est détruit par le sang, hors des vaisseaux, et qu'il en résulte une production d’acide oxalique. On sait Art. Goutte, Manuel de Thérapeutique de Debove et Achard, t. III. que ce corps est presque loujours en excès dans M l'urine des goutteux. Holger Trautne, prenant comme point de départ le fait bien établi que les goutteux ont très souvent des troubles digestifs, a vu que, pendant les périodes de conslipalion, le taux de l'acide urique augmente. Il attribue au Pacterium Coli la forma- tion et le passage dans le sang d’une substance qui se transforme en xanthine, puis en acide urique : d'où le rapport de la goutte avec les fermentations intestinales et les agents qui les provoquent, tels le P. Coli. Il réfute la théorie et le rôle des purines. D'après C. Watson, le régime carné intensif aurait une répercussion sur les glandes thyroïdes de certains animaux. Chez les poules, ces glandes subissent une hypertrophie notable avec distension des vésicules, surabondance de leur contenu col- loïde, prolifération et desquamation des cellules épithéliales et petites hémorragies intravésiculaires. Chez les rats, ces dernières lésions sont très accu- sées, mais la subslance colloïde se liquéfie et donne une liqueur mucoïde. Watson rapproche ces faits anatomiques de l'efficacité de la médication thyroïdienne dans certains cas de goutte. Mais il en conclut peut-être trop prématurément que la goutte serait due à des lésions thyroïdiennes cau- sées par une alimentation carnée excessive. En terminant, citons un médicament nouveau, l'acide anhydro-méthylène-citrique, ou plus sim- plement la citarine, proposé par les thérapeutes allemands. On en dit merveille : il aurait réussi là où les préparations salicylées, l’aspirine, la pipé- razine, la lithine, etc., ont échoué, — ce qui, soit dit en passant, est assez banal. Il serait diuré- tique el, en outre, solubiliserait les calculs uriques. Pour obtenir un résultat net, il faut prendre de 40 à 50 grammes de cilarine, soit 10 grammes par jour. Il est prudent de se méfier de ce médicament chez les goutteux dont les reins sont insuffisants. IV. — MALADIES DE L'ESTOMAC. La mise au point de cette partie de la Pathologie a été réalisée par l'apparition récente du livre de Soupault'. Ce livre a été fait dans un esprit évident de simplification et de clarté. Le distingué médecin est mort avant la publication de son ouvrage*. 1 Traité des Maladies de l'Estomac, par Maurice Soupault. Paris, J.-B. Baiïllière, 1905. * On me permettra de renouveler ici les regrets que celte disparition prématurée a laissés dans le corps médical, parmi ses collègues des hôpilaux, ses amis et ses élèves: Soupault était un médecin consciencieux, un observateur patient et perspicace, un homme sincère. Son livre à été publié par les soins de M. Hartmann, qui lui avait donné sa collaboration ainsi que des médecins d'une compétence notoire, tels que MM. Linossier, Cautru, Delherm, Gourin, G. Leven, Binet, Parizet et Salignat. D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 909 Chacun à pu remarquer que, plus la Médecine progresse, plus l'examen des malades tend à de- venir minutieux et compliqué. Enlre l'examen tel que le pratiquait le médecin de notre enfance et l'examen médical d'aujourd'hui, il y a des diffé- rences considérables. Autrefois, le diagnostic du praticien habile était une question de « flair »; on lui était reconnaissant de sa rapidité de com- préhension ; aujourd'hui, l'exactitude du diagnostic est une affaire de perspicacité et de patience, etil semble généralement qu'on sache peu de gré au médecin de sa lenteur et de sa minutie. Le malade, même dans la classe cultivée, a une fâcheuse ten- dance à croire que le médecin veut « essayer », alors qu'il cherche simplement à observer, à s'éclairer. Et l’un des plus grands obstacles au perfectionnement de la Médecine est certainement le mauvais gré que rencontrent ses investigalions. Avouons-le, elles sont souvent ennuyeuses à subir, mais elles ne sont jamais périlleuses, et le traitement utile en dépend. On exige encore du médecin trop de divi- nation, et pas assez de constalalions positives. Pourtant, tout le monde sait combien les choses se sont compliquées, et que, pour faire face aux exigences nouvelles, la division de la Médecine en spécialités, usant de moyens de recherche très dissemblables, s'est imposée. Le souci de l'invesli- galion minulieuse apparaît dès la première page daus le Traité des maladies de l'estomac de Sou- pault. Il insiste beaucoup sur l'importance des interrogaioires précis et détaillés, il donne la marche à suivre pour les bien conduire. Passant ensuite à l'examen objectif des organes, il s'étend sur les divers modes d'inspection de l'estomac. Entre autres procédés, l'examen à l’aide des rayons de Rœntgen donne des résultats intéressants et d'une certaine nelteté. Ils sont plus aisés à obtenir chez l'enfant que sur l'adulte; mais, ici, on peut tourner la difficullé créée par l'épaisseur destissus, en recourant à l'insufflalion gazeuse et à la dis- tension arlificielle par des liquides et surtout à l'administralion du sous-nitralte de bismuth, qui intercepte les rayons cathodiques comme le ferait un objet de métal ou de verre. Une pilule d’un gramme de sous-nitrale de bismuth fait une tache nette, noire, et comme, arrivée dans l'estomac, elle repose généralement sur le point le plus déclive, le sujet étant debout, on évalue facilement et l’on note le niveau correspondant sur la peau. En faisant varier l'attilude du sujet, on observe les déplace- ments de la pilule. En marquant au crayon der- mographique la succession des points de repère certains, on peut établir un diagramme des diverses posilions de la pilule et se faire une idée très exacte de l'étendue de l'estomac. C'est grâce à ces procédés qu'on a pu déterminer la position de REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. l'estomac dans des condilions variées el apprécier ses changements de forme pendant la digestion, ele. En dehors de cet examen, en clinique, la percus- sion el la palpation donnent des renseignements à peu près suffisants sur les dimensions du viscère. La pression est appliquée à la recherche des points douloureux; et, au moyen de l'esthésiomètre, on évalue le degré de la douleur. L'ausecullation, l'in- sufflation, la succussion donnent également des renseignements utiles. Une fois la délimitalion de l'organe obtenue, il importe de savoir quel est l'état des fonctions gas- triques. Cette exploration se fait au moyen de sondes appropriées, de pompes, poires, siphons et tubes divers. Soupault en décrit les particula- rités et l'emploi. Ces moyens fournissent à l'obser- vateur du suc gastrique aux moments les plus pro- pices et lui permetlent d'en étudier les variations, puisqu'on peut faire le fubage à jeun et plus ou moins longtemps après le repas d'épreuve. Le suc gastrique ainsi oblenu est soumis à l'analyse chi- mique. Cette analyse, non seulement donne les éléments comparatifs de la composition du suc gastrique, mais encore renseigne sur l'évolulion de la sécrétion gastrique. Elle indique si les maté- riaux nécessaires à la chymification normale sont sécrétés en Llemps convenable, en quantité voulue, s'ils ne sont pas mélangés d'acides de fermentation, comme les acides lactique, butyrique, acétique, etc. Il faut encore savoir la valeur de la salive, de la bile, du mucus, la nature des résidus alimentaires ou autres, les espèces microbiennes. Ces derniers points, qui demandent l'appui de la microscopie et de la bactériologie, sont un peu {rop écourlés au pont de vue technique. Soupault s’est atlaché à l’étude des grands sym- ptômes dyspeptiques, tels que les modifications de la faim, les douleurs, les vomissements de divers ordres, etc. Il étudie l’anorexie, c'est-à-dire la sup- pression de toute faim, au cours des maladies infeclieuses ou toxiques, des aflections locales de l'estomac ou de l'intestin, des étais nerveux. A elle seule, l'anorexie peut primer tous les autres phénomènes, constituer presque toute la maladie, du moins ce qu'on en voit et qui est justiciable d'un traitement particulier. La boulimie estle symptôme inverse. La sensation de faim s'accompagne sou- vent de polyphagie, c'est-à-dire excite les malades à manger en excès. Parfois, elle est seulement . impérieuse : une bouchée alimentaire la calme; ou bien des douleurs surviennent qui empêchent le malade de continuer à manger. La somme des ali- ments ingérés est alors insuffisante : on assiste à cet état paradoxal du malade qui à un appétit exa- géré et qui souffre d'inanilion. Les douleurs sont très fréquentes au cours des 20"** 910 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE affections de l'estomac. Elles sont extrèmement variées comme modalité et comme signification. L'atonie gastrique, la contracture musculaire, l'hyperesthésie des nerfs de l'estomac ou des nerîs voisins, les inflammations périgastriques, la com- pression des organes proches, l'excès de sécrétion du suc gastrique, diverses neuropathies avec ou sans lésion les provoquent. Il faut chercher leur forme, leur localisation, leurs irradialions, le moment exact où elles se produisent pour en faire état. La même analyse symptomatique doit être faite pour les vomissements. Soupault a étudié avec soin deux états curieux, le mérycisme ou rumina- tion et l’aérophagie. Certains sujets, souvent dès le plus jeune àge, présentent des phénomènes automatiques de rumi- nation. Au bout d'un temps variable, de quelques minutes à plusieurs heures après le repas, les ali- ments remontent par gorgées dans la bouche et sont remächés et redéglutis. Chez d'autres, névro- pathes pour la plupart, ces accidents n'arrivent qu'à la suite d’une émotion ou d'une habitude vicieuse, qu'ils se complaisent à entretenir. Cette forme de mérycisme n’a pas de gravité. Ailleurs, le mérycisme est véritablement un acte patholo- gique. Il est intermittent, coïncide avec des dou- leurs gastriques, apparaît par crises, s'accompagne de symptômes divers, malaises, vertiges, migraine, oppression, etc. ; ou bien le mérycisme est un symp- tôme nerveux pur, un spasme, un tic de l'estomac. L'aérophagie, que Mathieu a bien décrite, se dis- tingue des éructations banales ou causées par la flatulence, par la distension gazeuse du tube di- gestif, en ce sens que les gaz émis sont en majeure partie constitués par l'air atmosphérique. La rai- son en est simple : le malade avale de l'air et le rend. Ces mouvements sont spasmodiques et se produisent parfois sous formes de crises paroxys- tiques extrémement pénibles. Les troubles de la sécrétion gastrique sont ramenés par Soupault, dans un but de simplification, à deux types : l'hypochlorhydrie et l’hyperchlorhydrie. L'hypochlorhydrie, résultat de l'insuffisance de la secrétion gastrique, est soit d’origine congénitale (on sait qu'il existe une hérédité gastropathique), soit d'origine fonctionnelle, soit la suile d'une alté- ration de la muqueuse. Gette dernière catégorie correspond aux maladies organiques de l'estomac et comporte un pronostic plus grave que les pré- cédentes. L'hypochlorhydrie, outre l'influence fàächeuse qu'elle exerce sur la peptonisation des aliments, retentit, en outre, sur la sécrétion pancréatique, sur les fermentations gastro-intestinales et sur la motricité de l'intestin : d'où une mauvaise élabo- ration alimentaire, une mauvaise assimilation, une mauvaise évacuation des déchets. De là un reten- tissement sur l'état général el un état de souffrance de l'organe, qui finit par être le siège de lésions irréparables ou au moins très tenaces. L'hyperchlorhydrie, dans sa forme la plus accusée, se produit en dehors de toute digestion alimentaire. Dans l'estomac vide, à jeun, on trouve un liquide plus ou moins abondant, atteignant parfois un demi- litre. Ce liquide renferme très peu de produits ali- mentaires; souvent, il n'en contient pas. Cet état conslilue la gastrosuccorrhée. Il tient à une proli- fération des éléments sécréteurs du suc gastrique, liée le plus souvent à une lésion de l'estomac, uleère ou autre. Les fermentalions gastriques sont dues à des actions microbiennes, rendues possibles par une altération préalable des glandes de l'estomac. Les troubles de la motricité gastrique ont une grande importance dans l'étude des maladies de l'estomac parce que, la plupart du temps, ils sont l'effet d'une cause difficile à déterminer et qui reste dans maints cas toujours inconnue. Ils sont, d'ailleurs, plus à la portée de notre connaissance. Aussi il importe de les bien analyser, d'autant plus qu’on peut aujourd’hui les conjurer par les moyens chirurgicaux que nous retrouverons plus loin ex- posés par M. Hartmann. Ces troubles sont évalués par divers procédés cliniques, tels que la recherche du clapotage ou mieux de la succussion. Et, comme ces méthodes sont sujettes à l'erreur, il vaut mieux recourir au cathétérisme, qui donne les temps d'éva- cuation de l'estomac. Celle-ci peut être entravée par l'insuffisance motrice de l'organe ou par un obstacle sur le cours du chyme. La principale cause de ces troubles est le mauvais fonctionnement du pylore, entretenu par une lésion de cette région même ou d'une partie voisine. Dans des cas beaucoup plus rares, il y a incontinence pylorique. En dehors de toute lésion pylorique, on peut observer une atonie gastrique, telle que le viscère ne se débarrasse plus de son contenu. Les rétré- cissements, les sténoses pyloriques sont l'effet du cancer, de l’ulcère, de lésions cicatricielles, de compressions voisines (foie ou pancréas, ganglions, tumeurs quelquefois lointaines), de coudures ou de déformations. La sténose pylorique amène la dila- tation consécutive de l'estomac, des spasmes et, parlant, des douleurs, des vomissements, un reten- tissement plus ou moins profond sur l'état général, bref un ensemble de symptômes qui constitue le syndrome pylorique. Avant de s'occuper des maladies organiques de l'estomae, il importe de connaître l'estomac normal. Soupault à fait une bonne étude comparative de l'estomac à l'état normal et pathologique avec figures à l'appui. Il a, en outre, mis en relief les RO A RE GR Te TER SES AAAG ES LE mme Le 3 éremiuene TR PET CR 7 … s D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE 911 particularités analomiques telles que l'estomac biloculaire, l'estomac étranglé en sablier ou en bissac, malformation congénitale ou acquise, et la dislocation verticale de l'estomac, coïncidant tou- jours avec la ptose d’autres organes abdominaux. Les gastrites, leurs diverses formes aiguës et « chroniques, le polyadénome gastrique, l’atrophie : de la muqueuse, la linite plastique, l’ulcère chro- ! nique de l’estomac avec ses complications défor- - mantles, ses perforations, ses abcès consécutifs, « forment un ensemble important sur lequel on ne « peutici donner des indications, même sommaires, el à pour lesquelles il nous faut renvoyer au livre même. ) Il y a deux ans, dans cette même Æevue, nous “ avons exposé les nouvelles acquisitions sur les ; tumeurs et cancers de l'estomac et leur thérapeu- - tique, à propos des travaux de M. Hartmann. Nous en retrouvons une bonne étude dans l'ouvrage de Soupault. La question des dyspepsies a été traitée de concert avec G. Leven. On est convenu, en Méde- cine clinique, d'appeler dyspepsie tout trouble gastrique ne correspondant pas à une lésion orga- - nique grossière de l'estomac. Malgré les avantages que donnent les moyens actuels d'investigation clinique, il n’est pas possible de classer les dys- pepsies d’après le Lype du chimisme gastrique avec lequel elles coïncident, celui-ci étant très . variable. Soupault et Leven font, d’ailleurs, de la dyspepsie un tout : ils croient qu'il ne faut - pas chercher à la fragmenter en trop de subdivi- sions. Au fond, ils semblent la considérer comme un syndrome. C’est, en effet, voir prudemment, car un syndrome est un ensemble clinique qui peut - relever de causes parfois très variées. Or, la dys- } pepsie s'observe dans une foule d'états plus ou Se éloignés les uns des autres par leur nature. … Goutteux, cardiaques, tuberculeux, nerveux, ele., …— peuvent être dyspepliques. Les troubles dyspepti- LS s'enchevêtrent parfois dans des troubles fonc- “lionnels d’autres organes, si bien qu'on ne peut savoir lequel tient les autres sous sa dépendance. … Toutefois, un fait qui nest guère discutable chez “le dyspeplique, c'est qu'il a une hyperesthésie gas- rique. Sur cetle base, dont les auteurs font le sub- Stratum essentiel de leur théorie, ils s'appuient pour onner la prédominance au plexus solaire. —… Pour que l'estomac souffre, il faut, en effet, que le plexus solaire, clef de toutes les fonctions gas- triques, ait « quelque chose ». Nous ne savons pas “en quoi consiste celte irritation, ni comment elle estprovoquée, ni pourquoi elle persiste. Aussi, cette théorie ne délruit-elle pas l'idée très ancienne que la dyspepsie est d'origine gastrique pure, causée par tout agent d'irritation directe de la muqueuse de l'estomac, parce que, dans ces cas, le plexus l'aryés die solaire n’en subit pas moins les effets. Quoi qu’il en soit, l'examen des causes connues de la dyspepsie, de ses conséquences directes ou lointaines, de sa connexion avec les états organiques graves cons- lilue une bonne étude d'ensemble de ce syndrome si complexe. Le rôle prédominant du système ner- veux dans la dyspepsie a conduit les auteurs à classer près d'elle les crises gastriques du tabès. M. Hartmann, au début de la thérapeutique géné- rale des maladies de l'estomac, a traité les indica- tions de l'intervention chirurgicale dans les affec- tions dites « médicales » de l'estomac. On sait l’'appoint considérable que l'éminent chirurgien de Lariboisière a, depuis plusieurs années, fourni à cette partie de la Thérapeulique. Ses ouvrages sur la chirurgie de l'estomac, ses travaux de chirurgie anatomo-clinique, les études successives qu'il pour- suit sur les indications et les procédés opératoires dans les affections du tube digestif donnent à ces pages un intérêt considérable, puisqu'elles sont le résumé de ses opinions actuelles sur ces questions. Plus les opérations deviennent fréquentes, mieux elles sont réglées, plus tôt elles se font, et.plus les résultats directs et de survie prolongée sont nom- breux. M. Binet a exposé le régime alimentaire dans les maladies de l'estomac. On sait qu’il forme la base de la thérapeutique gastrique. C'en est l'élément capital et cela tombe sous le sens. De même qu'il faut un milieu propre à une plaie pour qu'elle puisse guérir, un air pur à un poumon malade, il faut un régime judicieusement choisi à un estomac souffrant. On à pu, ces dernières années, acquérir des notions assez exacles sur la valeur nutritive des substances employées à l'alimentation; mais ces notions ne peuvent être rigoureusement appli- quées. M. Binet montre qu'à côté de leur valeur alimentaire, il est de toute importance de consi- dérer la digestibilité des aliments. Or, non seule- ment celle-ci varie avec les diverses maladies, mais elle diffère selon des susceptibililés purement individuelles. M. Binet suit les préceptes formulés par M. Mathieu : ce sont les meilleurs principes à suivre dans le traitement des affections gastriques; les voici : 1° Donner une alimentation qui se rapproche autant que possible de la formule de la ration d’en- tretien, tout en tenant compte des indications four- nies par l’état des fonctions gasiriques; 2% Éviter la surcharge du tube digestif; 3° Éviter à la muqueuse gastro-intestinale des irritations inutiles; % Réduire au minimum d'origine gastro-intestinale. Cela posé, M. Binet étudie le régime de repos absolu de l'estomac et les divers régimes alimen- l'auto-intoxication 912 D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE taires, pour les détails desquels nous renvoyons à l'ouvrage même. M. Linossier s'est occupé du traitement des dys- peptiques par les eaux minérales. Le savant pro- fesseur agrégé de la Faculté de Lyon, par la direc- tion de ses travaux antérieurs, par sa pratique déjà longue des eaux de Vichy, a su donner à ce cha- pitre un altrait spécial. Il montre avec com- pétence les bienfaits généraux des eaux, quelle que soit leur composition, puis l’heureuse influence de la thermalité. Les eaux alcalines retiennent iei toute l'attention, puisqu'elles ont une action directe et im- médiate sur l'estomac. Le bicarbonate de soude est l'élément aclif des eaux bicarbonalées sodiques. Elles ont, par la présence de ce sel, une action chimique instantanée, Il se produil une saturation de l'acidité. Celte action est confirmée par l’expé- rience la plus banale. L'action physiologique est plus difficile à interpréter. M. Linossier pose la pro- posilion : « La sensibilité d'un estomac au bicarbo- pale de soude esten raison inverse de la richesse en acide chlorhydrique de sa sécrétion. » Gela explique, d'une part, l'excitation gastrique qu'obliennent les hypochlorhydriques avec une petite quantité d’eau alcaline; d'autre part, le défaut d’excitation gastri- que que peuvent présenter les hyperchlorhydri- ques à la suite de l'ingestion de doses élevées de la même eau. M. Linossier croit mal fondées et très exagérées les appréhensions qu'ont certains auteurs de la cure alcaline : il la croit incapable de provoquer la cachexie ou l’atrophie glandulaire, ce dont on l’a longtemps accusée. Dans l'effet des eaux, une différence très impor- tante doit être faite entre les affections gastriques mêmes et l’état des autres organes : foie, pancréas, intéslin, elec. A Vichy, où le traitement consiste essentielle- ment dans la prise de l'eau en boisson et où l’on emploie de préférence les sources chaudes, on cons- late, dès l'abord, que les hypochlorhydriques ont un réveil assuré de l'appétit et des digestions plus faciles. Souvent, au contraire, les hyperchlorhydri- ques ressentent quelques malaises au début de la cure. Linossier fait observer que ces phénomènes peuvent se rencontrer même sur des malades non gastropathes. En outre, une légère constipation est fréquente pendant le traitement. M. Linossier démontre que l'efficacité du traile- ment thermal dépend de son indication, dépend surtout de la nature des maladies concomitantes qui ont pu développer la dyspepsie et que celle-ci masque souvent. Il indique ainsi qu’une gastro- pathie peut s'améliorer sous l'influence des eaux, parce que la maladie quil’a provoquée (goutte, dia- bète, elc.)est elle-même améliorée. Une des formes communes de la dyspepsie est la forme nerveuse (dyspepsie nervo-motrice). Comme le trouble gas- trique est sous la dépendance d'une affection nerveuse non organique, la cure thermale agit ici avee succès, car elle réalise pour ces malades les meilleures condilions de changement de vie et de. régime. M. Linossier compare, au point de vue de la thermalilé, de la composition, des effets et des indicalions, les principales eaux minérales bicar- bonalées convenables au traitement des affections stomacales, lelles que Vals, Neuenabr, Bilin, Fachingen, Saint-Galmier, Evian, etc. Les eaux chlorurées sodiques sont égalementemployées dans le même but. Ces eaux sont surlout suivies en Allemagne. Ce pays est plus riche que la France en eaux chlorurées sodiques appropriées à ces traite- ments; les nôtres, trop concentrées pour l'usage: interne, sont surtout employées pour la balnéalion (Salies, Salies-de-Béarn, Biarritz). Les autres eaux sont passées en revue par M. Linossier; mais leurs indicalions sont moins précises et ne concernent que les dyspepsies secondaires, sauf les eaux comme celles de Royat, qui sont à la fois alcalines etchlorurées. Carlsbad a également une composi- lion mixle, mais ses eaux renferment, en outre, une notable proportion de sulfate de soude. Les eaux ferrugineuses, sulfureuses, arsenicales ou indifté- rentes n'ont ici qu'une importance relative. Dans le lraitement médical des affections gas- triques, le régime tient la place la plus importante. Le traitement médicamenteux, qu'il est prudent de n'employer qu'avec des intermittences el qui est soumis à des condilions assez précises d'oppor- tunité, n’est guère qu'un palliatif. M. Gourin a réuni, à la fin du livre de Soupault, un choix des médi- caments les plus utiles et les formules les meil- leures. D'autres procédés thérapeutiques viennent apporter leur concours efficace. C'est l'hydrothérapie, dont M. Parizet a développé l'action physiologique et M. Salignat la technique et les indicalions. C'est le massage abdominal, qu'a traité M. Caulru et qui, dans nombre de cas, est un des adjuvants les plus précieux, lant par son action générale que par ses effets locaux et directs. C'est encore l'électrothérapie, dont M. Delherm a donné avec clarté les indicalions et la technique. Ges diverses méthodes de traitement, loin de s’exclure” l’une l'autre, peuvent êlre combinées avec profit; et, hormis les cas de lésions organiques sur lesquel les elles ne peuvent agir (réserve faite pour les rayons de Rüntgen dont l'applicalion est en voie constante de perfectionnement), elles sont suscepti= bles d'apporter ici la guérison, là le soulagement Elles donnent, en outre, un réconfort moral qui esl indispensable pour sortir de l'état de maladie d'autant plus que, dans maints cas d'affections de É RS D' A. LÉTIENNE — REVUE ANNUELLE DE MÉDECINE l'estomac, c’est l'absence de ce « Lonus moral » qui conslitue toute la maladie. V. — EcuiINococcosE. Les lravaux de F. Dévé (de Rouen) sur le para- site des kystes hydatiques sont dignes de retenir l’altention. Je regrelte de ne pouvoir, dans cette revue déjà si longue, les analyser comme ils le mé- ritent. Je ne ferai qu'en signaler les résultats pra- tiques, tels qu'il les a consignés à la fin de son remarquable et récent ouvrage ‘. Les kystes hydatiques sont causés par un para- sile qui, chez certains animaux, Lels que le chien et - Je chat, vit à l’état de ver intestinal. C'est un ces- tode, le Tænia Echinococcus. Il émet des œufs qui, une fois ingérés, donnent naissance à des em- bryons ; ceux-ci quittent le {tube digestif et vivent à » l'état vésiculaire dans les organes les plus divers . de l’homme et des animaux, comme le bœuf, le mouton, le porc. C’est sous cette forme vésiculaire qu'il réalise le kyste hydatique. Cette affection, extrêmement fréquente dans cer- tains pays (Islande, Australie, République Argen- tine), augmente actuellement de fréquence non seulement dans nos pays coloniaux d'élevage du mouton (Algérie), mais encore en France même, probablement à cause de l'introduction abondante des moutons algériens. - Les animaux (moutons, pores, bœufs), s'ils sont atteints de kystes hydatiques, servent à propager la graine. Il suffit d'avoir vu les boucheries des vil- lages et même celles de certaines localités de la banlieue parisienne, où les bouchers tuent chez eux, pour s'assurer que tous les détritus, toutes les parlies des viscères mises au rebut (et parmi elles sont de véritables pièces anatomo-pathologiques) son! jelées aux ordures, souvent sur la voie publi- que même. Tous les chiens du village ont la licence de s’en repaitre. Ces faits extrêémementregreltables, qui se passent devant la porte des petites tueries locales, ne manquent pas dans les abattoirs des plus grandes villes. Dévé les signale à Rouen. « Aux abattoirs de Rouen (où l'on abat par se- maine environ 800 moutons, 200 bœufs et 250 porcs), les Echinocoques ne constituent pas un cas de saisie. Quand les kystes sont peu nombreux dans un viscère, on en pratique l' « épluchage » sur place, c'est-à-dire qu'on enlève les parties atteintes, “que l'on jelte au fumier dans la Cour de labattoir. Un organe conlient-il de nombreux échinocoques disséminés ? Ou bien, littéralement farci de kystes, il est, de l’aveu même du boucher, absolument inutilisable, et dans ce cas il est envoyé à l'équar- ! D'F, Dévé: Les Kvstes hydaliques du foie. Préface du Professeur Blanchard. Paris, de Rudeval, 1905. 913 rissage avec les viandes avariées saisies; ou bien, tout en restant impropre à la consommation hu- maine, il est moins complètement envahi, et alors le boucher est autorisé à emporter ce viscère con- laminé, qu'il vend à bas prix à sa clientèle comme « nourrilure pour chiens et pour chats (!) ». On voudrait favoriser la propagation de la mala- die, la disséminer dans les foyers, qu'on ne pourrait mieux faire ! Les règlements en France sont absolument insuf- fisants. Notre éducalion générale est encore assez primitive et assez barbare (bien qu'on nous res. sasse chaque jour que notre civilisation est la plus raffinée de la Terre) pour que le commercant n'hé- site pas à nuire grièvement à autrui de peur de sacrifier quelques centimes de son gain. Cela se voit constamment, surlout en matière de substances alimentaires. Dans les pays éprouvés par l'échinococcose, on a pris des mesures qui portent surlout sur la préser- vation et le traitement des chiens, puisqu'ils sont le principal objet d'une infestation qui, pour eux, n'a pas de gravité, sur la surveillance des abattoirs et sur la destruction des viandes malades à la cam- pagne par enfouissement profond avec de la chaux vive, et dans les abattoirs urbains par incinération. Dévé propose une série de mesures qu'il suffirait d'appliquer avec quelque attention pour rendre exceplionnelle une affection qui s'accroit progres- sivement depuis quelques années. Ces mesures sont très simples et peu coûteuses. Ce sont : 1° La saisie d'office dans les abattoirs et la des- truction effective de tout viscère envahi par les échinocoques ; 2 La réglementation stricte de l'entrée des chiens dans les abattoirs urbains ; 3° L'affichage, dans les abattoirs, d'une notice avertissant les bouchers, bouviers, bergers, ele., des caraclères de la maladie et des dangers que présentent les viscères contaminés pour l’homme et pour les animaux ; 4 Les inspections sanilaires, circulaires aux vétérinaires, elc. On pourrait y joindre des avis au public, qui comprendrait l'intérêt qu'il y a à mieux observer les viandes qui lui sont délivrées, tant pour l'usage de la famille que pour celui des animaux domes- tiques, à se priver de viande plulôt que d'en em- ployer de mauvaise qualité. On apprend bien aux enfants à distinguer une monnaie fausse d'une pièce de bon aloi, mais on n'apprend à per- sonne à faire une distinction, même grossière, entre les bonnes matières alimentaires et celles fermés, avec la confiance la plus naïve. D' A. Létie 914 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX BIBLIOGRAPHIE ANALYSES ET INDEX i° Sciences mathématiques Ces notions permettent de généraliser les premiers résultats, en complétant l'étude des ensembles linéaires Baire (René), Maitre de Conférences à la Faculté des Se entbe de Montpellier. — Leçons sur les Fonc- tions discontinues, professées au Collège de France — 1 vol. in-8°. (Prix : 3 fr. 50.) Gauthier-Villars, éditeur. Paris, 1905. Ce n’est pas seulement un intérêt purement spécu- latif qui conduit les mathématiciens à se débarrasser sraduellement des hypothèses restrictives introduites au début de la science pour préciser les êtres qu'ils étudient : l'application des Mathématiques aux phéno- mènes naturels y conduit naturellement, et, par exemple, les recherches de Physique mathématique ont amené à s'affranchir des restrictions ordinaires de continuité imposées aux fonctions, et à étudier avec soin les fonctions discontinues. Le livre de M. Baire est une contribution importante à ce genre d'études : le point de départ en est ce fait, observé depuis longtemps, de l'existence de fonctions discontinues représentables par des séries de fonctions continues; par exemple, la série de Fourier : sin 2x NT (jinti À 0e convergente quel que soit x, représente une fonction discontinue dont le graphique serait une suite de seg- ments rectilignes équipollents et équidistants, et de points isolés M. Baire se propose de rechercher toutes les fonc- tions discontinues qui sont représentables par des séries de fonctions continues. 11 observe, d’abord, que la recherche d’une telle fonction f(x) revient à celle d’une suite de fonctions continues f,, f,, .…, fn .…, dont f serait la imite, c'est-à-dire telle que l’on aurait, pour toute valeur de x : lim fn (x = f(x); no on va donc déterminer les fonctions discontinues qui sont /imiles de fonctions continues. En premier lieu, toute fonction discontinue qui à un nombre fini de discontinuités est limite de fonctions continues. Le cas d’une infinité de discontinuités est beaucoup plus complexe : il faut tout d’abord étudier avec soin la constitution de l’ensemble P de ces discontinuités ; aussi. l’auteur commence par reprendre les notions de point limite ei d'ensemble dérivé d'un ensemble donné. Si le dérivé de l'ensemble P a un nombre fini de points, la fontion /{x) ést limite de fonctions continues; ceci est vrai plus généralement si l'ensemble P a un dérivé d'ordre entier. formé d'un nombre fini de points, et l’on peut encore étendre la proposition en constituant autrement les dérivés de P. I] devient alors nécessaire d'introduire des considérations nouvelles concernant l'ordre relatif des éléments des ensembles; c’est l'objet d'un chapitre qui s'applique spécialement aux ensem- bles ordonnés, c'est-à-dire dans lesquels, de deux élé- ments -a ét b, lun à un rang inférieur à l'autre, et de telle sorte que, si le rang de a est inférieur à celui de b, et le rang de D inférieur à celui de €, il en résulte que le rang de a est inférieur à celui de ec; un ensemble ordonné est dit ren ordonné quand tout ensemble qui y est renfermé possède un élément initial, c'est-a-dire de rang inférieur à tous les autres. Pour fixer la notion du rang de chaque élément dans un ensemble bien ordonné, les nombres entiers ne suffisent pas : on a alors recours à de nouveaux signes, dits nombres transfinis (Cantor). par celle des ensembles parfaits; cette étude est indis- pensable pour reconnaître le rôle de la distribution des points de discontinuité dans les propriétés des fonc- tions, rôle que l’auteur étudie pour les fonctions d’une variable. Après avoir introduit des notions nouvelles relatives à la continuité et à la discontinuité (fonctions ponetuel- lement où lotalement discontinues), M. Baire est en mesure d'établir la condition nécessaire pour qu'une fonction discontinue soit limite de fonctions continues : il faut qu'elle soit ponctuellement discontinue ; le cha- pitre se termine par l'extension suivante : Si £ est Himite de fonctions continues, elle est ponctuellement discontinue sur tout ensemble parfait. Enfin, l’auteur étend ce qui précède au cas de plusieurs variables, ce qui lui permet de montrer que la condition nécessaire énoncée ci-dessus est aussi suffisante. Dans cet intéressant ouvrage, M. Baire a done con densé aussi clairement et aussi simplement que possible des sujets très délicats, encore peu connus, et qu'il à exposés ayec une véritable maitrise. M. LELIEUVRE, Professeur au Lycée et à l'Ecole des Scienees de Rouen, Stephan (P.). — Die technische Mechanik. Æle- mentares Lehrbhuch für mittlere maschinentechni= sche Fachschulen und Hilfsbuch für Studierende hôherer technischen Lehranstalten. Erster Teil: Die Mechanik starrer Kôrper. — 1 vol. cart in-8° de 3%4 pages. (Prix : 5 M.) B. G. Teubner, éditeur, Leipzig, 1905. Cet ouvrage de Mécanique est destiné à l'enseigne- ment des écoles techniques moyennes; mais, grâce à ses nombreux exercices empruntés à la Mécanique appliquée, il rendra aussi d'excellents services aux élèves des écoles techniques supérieures. Ce premier volume contient l’ensemble des notions fondamentales les plus essentielles de la mécanique des solides. L'auteur débute par l'étude de la Statique et examine successivement la Stalique du point maté- riel, des solides et des systèmes de corps solides. Puis, après un exposé très sommaire des principes de Giné- matique, il donne les notions usuelles de la Dynamique du point matériel et des solides invariables. Les considérations théoriques ont été limitées au strict nécessaire et n'exigent pas la connaissance de, l'Analyse infinitésimale. ‘Par contre, en raison même du but de l'ouvräge, l'auteur examine un grand nom- bre de problèmes pratiques d'une utilité immédiate pour les ingénieurs; ces problèmes sont accompagnés d'exercices nüinériques destinés à familiariser les élèves avec l'emploi des divers coefficients qui inter- viennent dans les applications. =. H.-Fenr, Professeur à l'Université de Genève: Mathot (R.-E.). — Manuel pratique des Moteurs à gaz et Gazogènes. — 1 vol. in-8° de 2x7 pages et 154 figures. (Prix : 42 fr. 50.) Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1905. À Ce livre se distingue des autres traités similaires par ses visées pratiques. L'auteur a surtout en vue de guider l'ingénieur pour le choix, l'installation, la conduite eb l'entretien des gazogènes et des moteurs à gaz, dont, l'ensemble constitue généralement encore pour lui une. nouveauté, Malgré le développement considérable pris, déjà par les installations motrices de ce genre el les: Î : C ; è : BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 915 simplificalions très notables apportées aux engins de la première heure, le groupe au gaz est loin d'offrir la même sécurité de fonctionnement et la même facilité de conduite que le groupe à la vapeur. Il faut, pour se tirer d'affaire, des connaissances pratiques spéciales, différentes de celles qu'exigent les chaudières et les machines qu'elles alimentent. Les organes des moteurs à explosion sont soumis à de fortes températures et à des écarts considérables de pression; de plus, la vitesse de rotation est {toujours très grande. Les questions de refroidissement du cylindre et de graissage des diffé- rentes articulations ont donc une importance capitale, sans compter celles de compression, d'allumage, d'étanchéité, ete., qui ont tant d'influence sur le ren- dement économique de l'ensemble. Le décrassage et l'entretien des gazogènes ont aussi leur importance : la conduite de ces générateurs de gaz, si simples qu'ils paraissent, demande des précautions, et de nombreux conseils pratiques à ce sujet ne peuvent être que bien accueillis par le personnel qui en est chargé. L'auteur fait précéder son manuel d'une comparaison, au point de vue des frais de premier établissement et d'exploitation, entre deux installations de force motrice : l’une par la vapeur, l'autre par le gaz. Il arrive aux con- clusions résumées dans le tableau suivant : HACIE FRAIS TOTAUX FRAIS JOURNALIERS ‘ PUISSANCE de {°r établissement d'exploitation Machine, à vapeur : . 15 à 20 chevaux. 12.030 fr. Air 21 50-chevaux . .’. 19.400 fr. DMÉTENTAl Moteur à gaz : 15 à 20 chevaux. . 4.425 fr. 13 172.31 50 chevaux . . . 16.460 fr. 16 fr, 60 L'avantage se maintient incontestablement en faveur des moteurs à gaz jusqu'à 500 chevaux : au delà, il est plus discuté, depuis l'application aux machines à vapeur de lacondensation et de la surchauffe et surtout depuis l'invention des turbines. M. Mathot semble avoir une prédilection pour le moteur à quatre temps; du moins, c’est le seul type dont il parle quand il s'agit de faire choix d’un moteur. H n’a pas en vue, il est vrai, de très gros moteurs, et les moteurs à deux temps, qui ont aussi leurs partisans, s'adaptent mieux aux grosses puissances. Toutes les parties du moteur sont disséquées avec soin, et décrites à fond : cylindre, soupapes, dispositifs d'allu- mage, piston, ‘bati, volants, arbre coudé, cames, cous- sinets, régulateurs, etc.; viennent ensuite les appa- reils de mise en marche, les conduites de gaz, compteurs, antifluctuateurs, régulateurs de pression, pots d'aspiration et d'échappement. On le voit, aucun détail n'est omis, avant de passer aux fondations, qui doivent être établies en vue d'éviter les trépidations, et aux solutions ayant pour but de pallier les vibrations et le bruit résultant de la marche accélérée du moteur. Enfin, la circulation d'eau et le graissage, en raison de leur importance, sont étudiés à part. La connaissance de tous ces éléments permet alors au lecteur de suivre utilement les recommanda- tions de M. Mathot concernant les conditions de bonne marche du moteur, les précautions à prendre pour sa mise en marche et les moyens de remédier aux per- turbations qui peuventse produire au cours de l'exploi- lation. La seconde partie de l'ouvrage est consacrée au gazogène, accessoire préliminaire et indispensable du moteur à gaz. C'est d'abord la description des princi- paux systèmes sous pression el par aspiration, mais parmi lesquels on regrette de ne pas voir figurer les gazogènes de gaz à l'eau dont on parle tant aujourd'hui. Puis vient celle des appareils secondaires connexes, tels que les scrubbers, refroidisseurs, épurateurs, régu- lateurs, etc. Ici encore, l’auteur fournit des indications . précieuses sur les conditions de bonne marche des gazogènes, leur montage, leur conduite et leur entre- tien. Un dernier chapitre sur la réception des installas tions et sur la facon de mener les essais {termine cet ouvrage, essentiellement pratique et recommandable, à ce titre, aux nombreux industriels quis'intéressent à la motion par le gaz. EmiLe DEMENGE Ingénieur civil. 2° Sciences physiques Jeans (J. H.),, 3. A., Fellow of Trinity College, Cambridge. — The dynamical Theory of Gases. — 4 vol. grand in-8° de 352 pages. At.the University Press, Cambridge, 1905. M. Jeans, qui s’est fait connaitre par plusieurs Mé- moires importants sur la théorie des gaz, vient de pu- blier, sur cette théorie, un traité d'ensemble où sont exposés, avec autant de rigueur que possible, les travaux classiques complétés par les recherches de l'auteur. « Dans une théorie aussi délicate, les hypothèses s'introduisent souvent d'une manière si subtile qu'il est presque impossible de savoir avec précision quelle hypothèse a été faite; d’où la nécessité d’une logique rigoureuse, « J'espère, dit Fauteur, qu'une partie du discrédit actuel de la théorie cinétique disparaitra, lorsqu'on se trouvera en présence de conclusions tirées rigoureu- sement des prémisses. » « Un désaccord entre la théorie et l'expérience — celui relatif au théorème de l’équipartition de l'énergie, et à l'évaluation du rapport des chaleurs spécifiques d'un gaz — est plus important que tous les autres. A cet égard, j'ai essayé de mettre eh évidence : « 40 Que le théorème de l’équipartition est basé sur une hypothèse déterminée, savoir l'absence d'action mutuelle de l’éther et de la matière: « 20 Que, de quelque côté qu'on regarde, l'illégitimité de cette hypothèse est évidente; « 3° Que, dès qu'on abandonne cette hypothèse, la théorie et l'expérience s'accordent aussi bien qu'on peut le désirer. » Telle est, en effet, la part vraiment personnelle de l'auteur; on la trouvera principalement aux cha- pitres VIII, IX, X, sous le titre général : « Theory of a non conservalive gas », Le premier de ces chapitres, « General dynamics of non conservative systems », conduit au résultat sui- vant: « Si l'on sait uniquement, au sujet d'un gaz, qu'il s'est refroidi spontanément à partir d’une tempé- rature élevée, et qu'il a actuellement atteint une tem- pérature à laquelle les changements ne sont plus très rapides — (par comparaison avec 10-19 secondes), — il est infiniment probable que ce. gaz & une spécification définie, qui dépend uniquement de son énergie pré- sente. Cette spécification est profondément différente de celle à laquelle conduit la conservation de l'énergie, laquelle conduit à l’équipartition. La température, unique dans le cas de la conservation de l'énergie, n'est plus qu'une température principale à laquelle il faut adjoindre une ou plusieurs températures subsi- diaires, nécessaires à la définition du gaz, d'autant plus nombreuses que la molécule est plus complexe. Pour aller plus loin, dans les chapitres suivants : « Echange et dissipation d'énergie », « Calorimétrie », il faut préciser les conditions dynamiques de ces échanges, ce qui restreint un peu la généralité des résultats. C'est au calcul des températures subsidiaires que s'attache l’auteur, et à leur influence sur le rap- port des chaleurs spécifiques. 1 Ces chapitres, pour intéressants qu'ils soient, ne dispenseront pas le lecteur de recourir aux Mémoires approfondis dont ils sont le résumé très succinct, et que j'ai analysés dans une des Notes à la traduction des Lecons de Boltzmann *. ARR RER = 4 ne SR 1 Lecons sur la Théorie des gaz, traduites par MM. Galotti et Bénard, avec des notes de M. Brillouin. Paris, Gauthier- Villars, 1905. 916 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX Il y a bien longtemps que j'appelle l'attention des élèves sur ce rôle de l'éther, et les restrictions qu'il apporte au théorème de l’équipartition de l'énergie ; ces restrictions, dont le caractère général apparaît sans calcul, j'ai été très heureux de leur voir donner de la précision par M. Jeans; mais je dois dire que le rôle des échanges entre matière et éther me semble plus étendu, plus complexe et sensiblement différent de celui que lui fait jouer M. Jeans. Sur d’autres points encore, je ne suis pas en complet accord avec lui; ce que j'ai dit dans une Note, au 1°" fascicule des Leçons de Boltzmann, au sujet de l'application des probabilités à la recherche de la répartition des vitesses entre les molécules, et de son extension à la recherche de la probabilité de distribu- tion des molécules elles-mêmes, précise l’objection fondamentale que J'ai à faire à la démonstration de la loi de Maxwell, proposée par M. Jeans [ch. HI}. La définition des probabilités égales, laissée dans l'ombre au début, précisée seulement au chapitre suivant IV, est trop évidemment liée au choix des coordonnées ; les rencontres ne jouent dans la démonstration qu'un rôle vraiment trop effacé et, pour ainsi dire, négatif. Les préoccupations de rigueur de M. Jeans l'ont conduit à s'occuper uniquement des gaz proprement dits et peu denses, à n’employer aucune des méthodes utilisées au voisinage du point critique; on n'y trou- vera ni viriel, ni équation de Van der Waals, ni étude des mélanges gazeux, ni dissociation. De cette limita- tion du sujet, de cette unité de méthodes, résulte une impression d'harmonieuse élégance dans la composi- tion de l'ouvrage. La rédaction en est sobre et précise; la lecture en est facile, autant que le permet la com- plexité même du sujet. Par la contribution personnelle de l’auteur au déve- loppement de la théorie, autant que par la composition, c'est un ouvrage digne de prendre place à la suite des beaux Mémoires de Maxwell sur la théorie dynamique des gaz. M. BriLLouix, Professeur au Collège de France Brearley (Harry) et Ibbotson (Fred.). — Analyses des Matériaux d’Aciéries. Traduit de l'anglais et augmenté par M. E. Bazw, avec une préface de M. G. ARTH. — 1 vol, gr. in-80. (Prix : 95 fr.) Ch. Béranger, éditeur. Paris, 1905. Sous cette dénomination d’« Analyses des Matériaux d’Aciéries », l'ouvrage comprend l'analyse des aciers, des fontes et de leurs alliages, l'analyse des minerais de fer, de manganèse, de tungstène et de chrôme, l'ana- lyse des matériaux réfractaires (briques, sables, etc.), l'analyse des laitiers et des scories, l'analyse des com- bustibles. Outre l'exposé des méthodes d'analyse chimique, l'ouvrage comprend un chapitre relatif à l'analyse micrographique et un chapitre relatif à la pyrométrie. Ces chapitres permettront d'étudier la structure pAy- sique intime du métal, ainsi que l'influence de la tem- pérature sur ses propriétés physiques. Les auteurs ont encore exposé — bien que sortant du cadre de leur livre — l'analyse des eaux des géné- rateurs, l'analyse des incrustations, l’analys des alliages métallurgiques (alliages de cuivre, d’étain, d’antimoine, de plomb, ete.). Enfin, le traducteur à ajouté un chapitre sur la calo- rimétrie. On voit que le titre est loin de donner une idée exacte de tout le contenu du livre, puisque celui-ci traite de questions qui n'ont guère de rapport avec l'Aciérie. Ce traité d'analyse a le grand mérite de nous faire connaître les procédés de recherche en usage aux Etats-Unis, c’est-à-dire dans le pays de la grande métallurgie. Bon nombre de méthodes et d'appareils — qui sont peu connus en Europe — nous ouvriront de nouvelles voies d'investigation, d'autant plus que ces méthodes ont été sinon créées, au moins vérifiées à la suite de nombreuses expériences des auteurs. Malheureusement, le traducteur a enlevé à ce livre une partie de son caractère et de son originalité en introduisant presque à toutes les pages des méthodes dont les auteurs n'avaient pas parlé. Un traité d'analyse chimique — pas plus qu'aucun ouvrage scientifique — ne doit être une encyclopédie où toutes les méthodes. connues sont publiées. MM. Brearley et Ibbotson ne donnent que les méthodes qu'ils ont vérifiées et expé- rimentées; c'est donc dénaturer l'esprit de leur livre que d'ajouter à leur travail d’autres méthodes, si bonnes soient-elles. Aussi bien les auteurs ont eu si peur de faire de leur traité une encyclopédie qu'ils ont relégué, à la fin du volume, dans un Appendice, un résumé des méthodes d'analyse publiées dans les grandes revues américaines et anglaises. Malgré les réserves que nous avons cru devoir faire à l'endroit de la traduction, il faut savoir gré à M. Bazin d'avoir mis cet ouvrage à la portée des industriels français. Il leur aura ainsi rendu un grand service. AUGUSTE HOLLARDO, Chef du Laboratoire central des Usines de la Cie française des métaux. 3° Sciences naturelles Codazzi (Ricardo Lleras), Chef de 1a Section minéra- logique et géologique de l'Office d'Histoire naturelle de la République de Colombie. — Mineralizadores y minerales metalicos de Colombia.— 1 asc. in-8° de 42 pages. Imprimerie Nationale, Bogota, 1905. 4 Dansla Revue du 15 mars dernier, nous avons signalé l'intéressante tentative, due à M. R. LI. Codazzi, d'établir une Minéralogie de la Colombie, dans le but de con- tribuer à la mise en valeur des richesses du sol de ce M pays, et nous avons analysé les quatre premiers fasci- cules de son étude. Le cinquième et dernier, qui vient de paraître, est certainement le plus important, puisqu'il se rapporte aux minéralisateurs et aux minerais métal- liques, qui fournissent à l'industrie une grande partie de ses matières premières. La Colombie renferme d'importants gisements de soufre, surtout au voisinage des régions volcaniques... On y trouve la plupart des minerais métalliques com- muns : cassitérite, galène, blende, oligiste, limonite, pyrite, pechblende, chalcopyrite, cuivre gris, puis des produits de plus grande valeur : cinabre, argent natif, argentite, or natif, platine, palladium et iridium, dont plusieurs sont l’objet d'une extraction importante. Enfin, parmi les produits d’origine organique, l'auteur signale la présence de guano, d’asphalte, de graphite, de houille et de lignite. Un complément utile de l'ouvrage de M. Codazzi serait une carte minéralogique de la Colombie, qu'il lui serait facile d'établir avec les matériaux qu'il a rassemblés. IE : } Gouin (Raoul), Zngénieur agronome. — Alimentation rationnelle des Animaux domestiques. — 1 ro/. in-18 de l'Encyclopédie agricole. (Prix : 5 fr.) Baïl- lière et Cie, éditeurs. Paris, 1905. ; Le livre de M. Gouin comprend plusieurs parties bien distinctes : Historique; Théorie de l'alimentation; Monographies sommaires des aliments du bétail; Ali- mentation spéciale des divers animaux de la ferme; Tables de composition moyenne des aliments. L'ouvrage débute par une revue historique et critique des travaux d'une douzaine de savants, depuis Lavoisier jusqu'à Julius Kühn. Cette méthode d'exposition rétros- pective, encore peu suivie en Agronomie, ne saurail trop être encouragée, nous l'avons déjà dit. La connaissance de la nutrition est loin d’être défi- nitive. Les travaux sur ce point se multiplient, et nous tenons à signaler ici la récente étude de M. Laulanié sur la Théorie générale dé l'alimentation !. M. Gouin ! Jievue générale de Médecine vétérinaire, 45 mars 1905. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX (Oh » Jonne, en une centaine de pages, un exposé méthodique et précis des principaux faits acquis à Ja science : nature et rôle des principes nutritifs; marche de la digestion ; absorption et nutrition; tissus animaux; digestibilité ; relation nutritive; mutations matérielles; mulations dynamiques ; rationnement et substitu- tions. Nos remarques sur cet exposé ne peuvent porter que sur des points particuliers. L'auteur choisit comme abréviations MA pour matières azotées, MNA pour matières non azotées. Il nous a semblé préférable d'adopter, ici même’, une abréviation plus complète, qui présente le grand avantage de faciliter le calcul. Il est vrai que l’auteur évite de donner des exemples de calcul de rations ou de substitutions alimentaires. Nous savons fort bien qu'en pareille matière le calcul est un - simple accessoire, un outil, mais un outil qui permet l'utilisation rapide, sûre et complète des résultats de l'expérience. En partant de données purement expéri- mentales, on obtient par le calcul des résultats ayant une valeur expérimentale. Nous savons aussi qu'il ne faut pas confondre les faits expérimentaux mêmes avec leur généralisation, avouée ou non; que les méthodes actuelles de ration- rement tiennent compte d'une ou de deux causes de rariation des rations, poids et surface, mais qu'elles laissent dans l'ombre une dizaine d'autres causes espèce, race, sexe, äge, appétit, élat d'engraisse- ment, etc. Aucune méthode ne permet donc de résoudre avec exactitude le problème du rationnement : la moins mauvaise est celle dont les résultats se rapprochent le plus de la réalité des faits. Le rationnement proportionnel au poids total des animaux à nourrir, adopté implicitement par l’auteur, n'est pas à l'abri de toute critique. Un boulonnais de 1.000 kiogs, deux percherons de 500 kilogs ou quatre poneys de 250 kilogs n'exigent pas la même ration {otale d'entretien. Quand on parle de l'élevage lucratif du lapin à un agriculteur, il n'est pas rare de le voir sourire, car il sait que dix lapins consomment autant qu'un mouton sans donner le même produit. Les normes d'alimentation de Wolff, reproduites dans l'ouvrage, renferment des résultals expérimentaux géséralisés par la méthode du rationnement propor- Honnel. Ces normes ont une grande valeur pratique. * Seulement, il est à regretter que les tables n'indiquent pas les résultats expérimentaux eux-mêmes : il serait lors possible de généraliser ces résultats par diverses “ méthodes en concordance avec la réalité. — L'auteur signale notre méthode de rationnement … progressif, dont nous résumerons en quelques mots “la portée : 4° Le rationnement Crevat et la formule t de Meeh ne sont que des cas particuliers du rationne- … ment progressif, comme il est facile de le montrer par “un calcul simple; 2° Le rationnement progressif tient compte de l'influence du poids individuel; il n’est pas figé dans une formule unique ; par sa souplesse, il per- … met de grouper des résullats sans lien apparent; enfin, il s'adapte aux faits au lieu de s'imposer à eux. Pour “ces raisons, le rationnement progressif nous semble “préférable au rationnement proportionnel, à la for- mule de Meeh et au rationnement Crevat. —…._ ]lserait facile de multiplier les observations sur ces —…_ questions neuves, mais nous ne pouvons transformer une analyse bibliographique en étude technique. — Les notices de M. Gouin sur les principaux aliments du bétail : fourrages, racines, graines, résidus indus- triels, aliments d'origine animale, renferment de très - nombreux renseignements pratiques. L'alimentation spéciale des animaux de la ferme est également l'objet d'études très soignées. Pour chaque espèce animale, l'auteur examine les cas qui se pré- sentent dans la pratique journalière de la ferme. 1 Revue gén. des Sciences, 29 février 1904. Exemple : alimentation du poulain, de la poulinière, de l’étalon, du cheval de travail. L'alimentation rationnelle est une science en forma- tion. M. Gouin nous en expose l’état actuel en ce qui concerne les animaux de la ferme. Son livre sera très utilement consulté par les agriculteurs et par les étudiants en agriculture. E. RaBaTÉ, Ingénieur-agronome, Professeur spécial d'Agriculture. 4 Sciences médicales Hartmann (Henri), Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. — Travaux de Chirurgieana- tomo-clinique. /euxième série. Voies urinaires. Testicule. — 1 vol. in-8° de 400 pages avec 105 figures. Georges Steinbeil, éditeur. Paris, 1905. A notre époque, la Chirurgie embrasse un si vaste domaine qu'il est impossible à l'esprit le plus actif et le plus complet d'écrire seul un traité de Chirurgie; pour un livre didactique, la collaboration de plusieurs est une absolue nécessité. Dans le nouveau livre que vient de publier M. Hartmann, on trouve la démonstra- tion de ce fait; ses Travaux de Chirurgie analomc-cl.- nique sont l'œuvre d'un groupe de travailleurs; chacun défriche un petit coin du domaine et peut ainsi faire un travail bien fouillé. Lecène étudie les tumeurs solides du rein; Lebrelon, l'anatomie des glandes bulbo-uréthrales; Esmonet, la tuberculose expérimentale du testicule et la technique des orchites expérimentales, etc.….; Lavenantnous donne des notes sur l'épithélioma primitif de l’urèthre ; Cuneo, sur l'histologie del'épididyme blennorragique.Certaines questions sont exposées en collaboration; c'est ainsi que Lecène et Prot décrivent un cas de tuberculose de l'urèthre simulant un néoplasme. Hartmann, seul ou en collaboration, écrit la plus grande partie de l'ouvrage : il nous expose les tumeurs de la capsule surrénale, les kystes du rein; il nous donne d'excellents conseils sur la conduite à tenir en présence d'une déchi- rure de la veine cave au cours de la néphrectomie, sur le meilleur moyen d'étudier la manière dont se fait l'évacuation du contenu des reins. Tout en tra- vaillant de son côté, ila su néanmoins surveiller le tra- vail de ses collaborateurs, leur donner des idées direc- trices. Les Travaux de Chirurgie anatomo-clinique ne sont pas une réunion d'articles disparates:; ils consti- tuent un livre qui continue dignement la série com- mencée l'an dernier. De P. Desrosses. Briançon (Dr), ex-interne des Hôpitaux de Sarnt- Etienne. — L'Ankylostomiase (Maladie du ver des mineurs). — 1 vo/. gr. in-8° de 350 pages. (Prix: 5 {r.) À. Maloine, éditeur. Paris, 1905. Chargé par la Commission d'études de l’ankylosto- miase de pratiquer, dans la région de Saint-Etienne, les recherches microscopiques nécessaires, M. Briançon en à profité pour faire une étude importante et précise de l’ankylostomiase, dans laquelle il passe en revue toutes les données relatives à cette maladie : l'histo- rique, les symptômes, la prophylaxie et le traitement de l'affection; le diagnostic, la biologie du parasite. 1] discute les rapports qui existent entre l'anémie des mineurs et l'ankylostomiase et établit, sur des preuves certaines, la nature parasitaire de l'anémie. La deuxième partie du volume est consacrée à l'étude de l’ankylostomiase dans le bassin houiller de Saint- Étienne, à la publication des recherches de laboratoire et des observations cliniques, à l'exposé de la conduite et des résultats de l'enquête scientitique. Cet ouvrage contient, à côté d'un exposé très complet de-la question, des documents personnels très inté- ressan{s. D' M. LABBé, Professeur agrégé à la Faculté de Médecine de Paris. 918 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 2 Octobre 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. —- M. R. Fuchs donne la forme d'une équation différentielle linéaire du second ordre telle que les points singuliers essentiels sont ), 1,4, © et que les coefficients des substitutions qu'un système fondamental d’intégrales y,, y, subit avec les circulations de la variable x sont arbitraires et indé- pendants de {. — M. S. Bernstein étudie les surfaces minima et démontre, en particulier, qu'une surface minima ne peut pas avoir de ligne singulière analy- tique. — M. P. Painlevé, pour suivant ses études sur les lois du frottement de glissement, montre de nou- veau qu'il y a contradiction logique, dans des condi- tions réalisables, entre les lois de Coulomb et la dyna- mique des solides rigides. Les conditions dans lesquelles cette contradiction se manifeste peuvent ètre réalisées pendant une durée aussi grande qu'on veut. — M. G. Bigourdan résume les observations de l’éclipse totale de Soleil du 30 août faites à Sfax (Tunisie). — M. Sté- phan communique les observations de la même éclipse faites à l'Observatoire de Marseille, Quelques secondes avant le premier contact, le bord du Soleil s'est coloré d'un mince liseré lé ‘gèrement orangé, qui s'est évanoui à l'instant enes > du contact. La température ne s’est abaissée que de 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. A. Guébhard à mis en évidence, par une exposition prolongée à la lumière solaire, le deuxième maximum de la courbe de la fonc- tion photographique etle minimum ultérieur. — M. B. Brunhes : Sur la direction de l’aimantation perma- nente dans une argile métamorphique de Pontfarein (Cantal) (voir p. 811). — MM. A. Bacovesco et A. Pictet, en chauffant la strychnine en tubes scellés avec de l’eau à 160°-180°, ont obtenu par refroidissement un corps C*H®#A7°0°-L3H20,F.2140,5, qui constitue un isomère de la strychnine, l’isostrychnine. Celui-ci, soumis à l’action de l’ éthylate de sodium, se transforme en acide isostrychnique de Tafel. 39 SCIENCES NATURELLES. — M. L. François montre que l’eau joue un rôle très favorable à la multiplication de certaines plantes aquatiques, soit en soutenant les stolons qui peuvent s’allonger davantage, soit surtout en les entraînant au loin quand ils sont brisés. M. R. Chudeau à retrouvé au sud de la Méditerranée, dans le Sahara, et avec une certaine symétrie, les principales zones de plissement de l'Europe, l'Atlas appartenant au système alpin. Séance du 9 Octobre 1905, M. le Président annonce le décès de M. de Rich- thofen, Correspondant pour la Section de Minéralogie. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. G. A. Miller démontre le théorème suivant : Un groupe abélien peut se définir comme étant un groupe dans lequel chaque opération peut se transformer dans son inverse par la mème opération. — M. J. Janssen résume les observations de l’éclipse totale de Soleil faites à Alco- sebre (Espagne). Il signale, d'autre part, la création d’une Association internationale pour les étude S So- laires, dont la première réunion s’est tenue à Oxford, du 27 au 29 septembre. — M. E. Stephan a observé l'éclipse solaire du 30 août à Guelma (Algérie). Il a constaté en particulier de très belles protubérances; l’abaissement de température a été de 6°. — M. M.Ste- fanik a fait des recherches spectroscopiques pendant l’éclipse du 30 août à Alcosebre. Il a observé la raie se de la couronne très brillante; mais aucune ligne a été vue dans la partie extrème rouge. — M. C. Mil- Ho ce a également étudié spectrosc opiquementl éclipse à Alcosebre. Les raies les plus intenses de la couche renversante ont été obtenues de G à K; la raie verte de la couronne à présenté une intensité remarquable. — M. J. J. Landerer a fait des observations sur la polari- sation de la lumière de la couronne solaire à Alcosebre. La proportion de lumière polarisée est comprise entre 0,50 et 0,60, valeur semblable à celle qui a été obtenue en 1900. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — MM. L. Rotch et L. Teisse- rence de Bort montrent que l'existence d’un contre- alizé, qui avait paru infirmée par les observations de M. Hergesell à bord de la Princesse-Alice, est nettement prouvée par les recherches récentes de MM. Clayton et Maurice, effectuées avec des ballons-sondes, entre les Acores et le Cap Vert. — MM. P. Freundler et E. Da- mond ont préparé le bromocyclohexane, C‘H!Br, Eb. 61°-62° sous 20 mm., et l’iodocyclohexane, C°H‘I, Eb. 840-86° sous 23-24 mm. Ces dérivés se prêtent assez mal aux condensations avec les dérivés sodés. — M. P. Carré a étudié la décomposition des alcools méta et para-nitrobenzyliques sous l'influence de la soude aqueuse et de la soude alcoolique; il y a oxydation et réduction des groupements nitrés et alcools avec for- mation d'azoxy ou d’azo-dérivés. — MM. A. Béhal et Tiffeneau ontétudié l'hydrogénation, l'oxydation et la fixation de OH sur quelques éthers s phé noliques à chaine pseudo-allylique ArC(CH*): CH. — MM. E. Bour- quelot et E. Danjou ont préparé à l’état pur la sambu- uigrine, le glucoside cyanhydrique nouveau retiré des feuilles de Sureau noir. Elle cristallise en aiguilles incolores; elle est lévogyre ; [a] —— 760,3; F: 1519-4520: Elle est hydrolysée par l’'émulsine en donnant du glu- cose, HCAZ et de l’aldéhyde benzoique; elle paraît être un isomère de l’amygdo-nitrile de Fischer C:*H{7Az05. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. P. Emile-Weil a cons- taté que l’anomalie de coagulation que présentent les hémophiles ne tient pas à la présence de substances anticoagulantes dans leur sang; elle est provoquée par l'absence ou l'altération de certaines substances nor- males, probablement du ferment coagulant, la throm- bose. — Mile Stefanowska a étudié, chez le lin et le pavot, l'évolution de la taille. Si l'on porte en abscisses la hauteur et en ordonnées le nombre des individus ayant atteint cette hauteur, on obtient des courbes qui présentent une grande analogie et se rapprochent des courbes binomiales. — M. A. Lacroix adresse quelques observations sur l’état actuel du Stromboli et le trem- blement de terre qu'on y a ressenti le 8 septembre. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 3 Octobre 1905, M. J. Bœckel signale un nouveau cas d’ablation de l'estomac pour cancer de la petite courbure occupant presque toute la cavité stomacale ; le malade guérit au bout de trois semaines et son état général est aujour- d'hui des plus satisfaisants. — M. V. Babès se demande si toute une série de maladies humaines, comme le paratyphus, la dysenterie, diverses entérites, seplicé- mies, infections hémorragiques, eétc., dans lesquelles il a trouvé des microbes qui, par leurs caractères mor- phologiques et de culture, se rapprochent du groupe de Gartner et des paratyphiques, n'accusent pas une origine animale. Il paraît y avoir un rapport de cause à effet entre certaines de ces maladies et l'alimentation 7e tunes matins PR ESS | É | ACADÉMIES ET SOCIÈTÉS SAVANTES 919 par certaines viandes. — M. Fernet communique deux … cas de pleurésie médiastine, interlobaire et diaphrag- —… matique, l'une purulente, l'autre gangreneuse, traités «et guéris par la thoracotomie, avec injections répétées de sérum de cheval chauffé dans le second cas. — M. E. Vidal montre qu'il y aurait un grand intérêt à pratiquer sur une vaste échelle la recherche méthodique - des tuberculeux pulmonaires au début de leur maladie et à les traiter avant qu'ils ne soient devenus dange- reux pour leurs voisins. — Le même auteur commu- nique les résultats favorables qu'il a obtenus dans le traitement du lupus et dans quelques autres manifes- tations tuberculeuses par l'héliothérapie. Séance du 10 Octobre 1905. M. A. Josias présente un Rapport sur le concours pour le Prix Vernois. — M. A. Laveran communique un Rapport sur un travail de MM. Soulié et Moreau intitulé : « Le paludisme en Algérie pendant l’année 4904 ». Les auteurs ont constaté une recrudescence formidable du paludisme en 190%, surtout dans le département d'Oran; ce fait s'explique par l’abon- dance des pluies. La Ligue algérienne contre le palu- disme s'efforce de vulgariser les notions Scientifiques nouvelles sur l'étiologie et la prophylaxie du paludisme. SOCIETE ROYALE DE LONDRES Séance du 8 Juin 1905 (suite). M. H. D. Dakin : Syuthèse d'une substance alliée à l'adrénaline. Ce Mémoire contient un compte rendu “(les essais de synthèse de l’adrénaline, le principe physiologiquement actif de la glande surrénale. L'adré- “ naline est communément considérée comme un alcool secondaire dont la formule est la suivante : C‘H#(OH}. H(OH).CH°AzHCH*. La cétone correspondante peut tre préparée en faisant réagir la méthylamine sur le “chloracétylcatéchol : c'est une substance cristalline, “formant des sels cristallins stables. La cétone peut “étre réduite électrolytiquement, et le produit doit avoir la composition assignée à l'adrénaline “naturelle. Quoique la base synthétique ait beaucoup de pro- riétés chimiques et physiologiques communes avec ‘adrénaline, ce n’est probablement pas la forme racé- nique de cette dernière substance. La base forme des sels extrêmement déliquescents, qui sont instables en Solution chaude; si l'on ajoute de l’ammoniaque aux solutions aqueuses des sels, la base libre se précipite sous forme d’un précipité amorphe gris-blanc qui est mextraordinairement instable à l'état sec. A cause de diflicultés expérimentales, on n'a pas encore pu obtenir des déterminations analytiques et de poids moléculaire satisfaisantes. Un rapport physiologique étroit entre s bases naturelle et synthétique est prouvé par le t que, chez le lapin, une injection intra-veineuse de “moins de 0,000.001 gramme est suivie par une élévation sensible de la pression du sang artériel. Une base qui st probablement identique à la substance décrite Gi-dessus a été obtenue en faisant réagir, sur le méthyl- aminoacétylcatéchol, l'aluminium et le sulfate mercu- ïique (D. R. P. 157.300), et l'on suppose que c’est un alcool secondaire. S'il en est ainsi, la formule de l’adréna- ine naturelle demandera une modification, mais il est nécessaire d'avoir de nouvelles preuves expérimentales ant que cette question soit élucidée. — M. H. D. akin : Sur l'activité physiologique de substances iées indirectement à l'adrénaline. L'auteur déduit ses expériences les conclusions provisoires sui- tes : 4° I] semble que le noyau du catéchol est ssentiel pour la production de substances physiolo- quement actives du type de l’adrénaline; 2° Il est portant de remarquer que les atomes d'hydrogène deux groupes hydroxyle dans le noyau du catéchol ne sont pas substitués ; 3° Un groupe alkyle d’un poids moléculaire faible (par exemple le méthyle, l’éthyle) attaché à l'azote tend à produire une substance beau- coup plus active que lorsqu'un groupe aromatique y est relié, tandis que les dérivés de la pipéridine, de lheptylamine et de la benzylamine occupent une posi- tion intermédiaire; 4° La réduction de bases céto- niques du type HO HO \ \ NG— CIER, | (e) dans lequel R est un simple groupe aliphatique, a pour résultat la production de bases avec une activité phy- siologique énormément accrue ; 5° Dans les substances examinées, il semble y avoir un rapport entre l'insta- bilité chimique et l’activité physiologique et vice versa. — M. R. Assheton : La morphologie du placenta des Ongulés, en particulier le développement de cet organe chez le mouton, et notes sur le placenta de l'Eléphant et de l'Hyrax. La formation du placenta des Ongulés vrais est fondée sur un système de replis de la mem- brane subzonale (ou du trophoblaste seulement), qui s'adaptent dans des rainures correspondantes des parois de l'utérus, sans épaississement de la couche trophoblastique du blastocyste et sans destruction de l'épithélium maternel ou d'un autre tissu (Sus). Cer- taines parties des crêtes sont produites par une ampli- fication locale en villosités véritables, dans lesquelles la splanchnopleure de l’allantoïde se répand postérieu- rement (Æquus, Bos, etc.\. Pour ce type de placen- tation, qui est produit principalement par le repli du trophoblaste, on emploie le terme de plié (placenta plicata), et l'on suppose que les Cétacés, les Siréniens et les Proboscidiens se rattachent à ce type de placen- tation, aussi bien que les Ongulés vrais et probablement les Edentés et les Prosimiens. Le terme de placenta cumulata est employé pour le type de placentation dans lequel le placenta est formé par l’'entassement ou l’épaississement de la couche trophoblastique, parmi les cellules accumulées de laquelle circule le sang maternel extravasé. La destruction de l’épithélium maternel se produit probablement toujours. A ce type se rattachent les Rodentiens, les Insectivores, les Hyra- coidés, les Primates et les Chéiroptères. Les Carni- vores sont peut-être intermédiaires; mais, d’après l'avis de Strahl, ils appartiendraient plutôt au type plicata, tandis que, d'après l'avis d’autres auteurs, ils sont voisins du type cumulata. La position morpholo- gique du placenta du mouton, dont le Mémoire ren- ferme une description détaillée, se trouve à la fin dela série des formes plicata, et se rapproche de très près du type cumulata. La placentation des Ongulés indique que cet ordre est relié plus étroitement aux Proboscidiens, aux Siréniens et aux Carnivores qu'aux autres groupes de Mammifères, tandis que la placentation des Hyracoïdés ne semble avoir aucun rapport avec ces groupes, mais est du type cumulata et ressemble davantage à la forme découverte chez certains Insectivores. Communications recues pendant les vacances. Lord Rayleigh : /ufluence des collisions et du mou- vement des molécules dans la ligne de visée sur la constitution d'une ligne spectrale. Si l'on excepte l’in- fluence des collisions et du mouvement des molécules et quelques autres causes de perturbation, une ligne spec- trale d’un gaz radiant devrait être infiniment étroite. Il y a vingt-cinq ans, en relation avec quelques détermi- nations d’Ebert, l’auteur a recherché l'élargissement d'une ligne résultant du mouvement des molécules dans la ligne visuelle, prenant comme base la loi bien connue de Maxwell régissant la distribution des vitesses parmi les molécules qui se choquent, et il a calculé le nombre de bandes d'interférence probables d’après une certaine hypothèse sur le degré de contraste entre les parties sombres et brillantes nécessaires pour la visibilité. Dans cette étude, il n'a tenu aucun compte des collisions, les vibrations provenant de chaque molé- 920 ‘ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES | cule étant supposées maintenues avec une régularité complète pour un temps indéfini. Quoique l'on ait peu de données sur la genèse de la radiation, on a long- temps pensé que les collisions agissent comme une autre cause de perturbation. On suppose que les vibra- lions d'une molécule ne sont pas dérangées lorsqu'elles décrivent une trajectoire libre, mais qu'elles sont sujettes à une altération de phase et d'amplitude, sou- daine et arbitraire, lorsqu'elles rencontrent une autre molécule. Une limitation du nombre des vibrations exécutées avec régularité implique nécessairement une certaine indétermination dans la fréquence, c’est-à- dire une dilatation de la ligne spectrale. Dans sa nature, cet effet est indépendant de l'effet de Doppler; par exemple, il diminue relativement à ce dernier si les molécules sont plus petites; mais le problème se pose naturellement de calculer l’action conjointe des deux causes sur la constitution d’une ligne spectrale. C’est la question étudiée par M. C. Godfrey dans un Mémoire récent'; le but principal de cette communication-ci est de commenter ce travail. Les formules qu'il obtient sont quelque peu compliquées et elles sont discutées seulement dans le cas où la densité du gaz est réduite sans limite. D’après l'hypothèse de l'auteur, cette réduc- tion ferait disparaître l'influence des collisions, de sorte que les résultats coincideraient avec ceux déjà rappelés, dans lesquels les collisions n'étaient pas prises en considération. Néanmoins, les résultats des deux calculs diffèrent de 10 °/,, ceux de M. Godfrey donnant une ligne spectrale plus étroite que l'autre. La diffé- rence de 10 0/, n’est pas de grande importance en elle- même, mais un écart de cette sorte crée un doute, qu'il est désirable, si possible, de dissiper. M. Godfrey lui-même caractérise la différence de paradoxale et émet quelques considérations afin de l’élucider. L’au- teur pense que la correction du 10 °/, est inadmissible, et qu'il n'y à ni ambiguité ni discontinuité en passant à la limite des trajectoires libres infiniment longues; il est enclin à croire que le calcul de M. Godfrey com- porte une erreur se rapportant au moyen par lequel on prend les moyennes des diverses trajectoires libres. — M. W. N. Hartley : Le spectre d'absorption et la fluorescence de la vapeur de mercure. L'auteur, ayant entrepris l’étude des spectres d'absorption des métaux à l’état de vapeur, a tout d'abord examiné le mercure. Ille volatilise dans un tube en verre de quartz d'Heraeus, avec un tube latéral du col duquel le métal peut être distillé et condensé. Il fait passer les rayons d'une étin- celle condensée à travers le flacon, puis sur une lentille de condensation cylindrique en quartz, qui les con- centre sur la fente d'un spectrographe de quartz. Spectre dabsorption. Tous les rayons sont transmis, depuis le rouge jusqu'à un point situé dans l'ultra- violet où se trouve une ligne de l'élain à À 2.571,67. De ce point à À 2.526,8, il y a une bande d'absorption très intense et bien définie, légèrement dégradée du côté tourné vers le rouge, après laquelle les rayons sont transmis avec une pleine intensité jusqu'à une lon- gueur d'onde d'environ 2.000. Fluorescence. Lorsque le mercure est en pleine ébullition, tout le côté du flacon le plus rapproché de l’étincelle s'illumine avec une fluorescence verte. Celle-ci pénètre d'environ 1/3 dans le flacon et illumine l’intérieur. Le verre de quartz lui-même n’est nullement fluorescent. Des solutions de chlorure de mercure ne présentent pas de bande d'absorption. La bande d'absorption dans la vapeur de mercure appartient à la vapeur, et est accompagnée par une forte fluorescence entre un certain maximum et un minimum de température situés très près du point d’ébullition. Il est une question eucore non élucidée, à savoir si les rayons absorbés par la vapeur de mercure, 1 Phil. Trans., À, t. CXCN, p. 329. jusqu'à disparaitre vers 280°; le reste de l'huile, distil= comme cela est prouvé lorsqu'on mesure la bande, réapparaissent avec une réfrangibilité plus faible comme lumière vert jaunâtre d’après la loi de Stokes. — M. J.M Larmor, à propos du récent Mémoire de M. A. J. Ewart, communique quelques réflexions sur /4 mécanique de l'ascension de la sève dans les arbres. Pour lui, il n'est pas nécessaire de supposer que lasève, dans la colonne de vaisseaux par laquelle elle monte, est soumise à la grande pression qu'indique cet auteur, et qui s'élève à plusieurs atmosphères pour les arbres les plus hauts. On peut imaginer, au contraire, une colonne verticale de vaisseaux disposés de telle facon que la sève passe lentement par transpiration de chaque vaisseau à celui qui lui est immédiatement supérieur, en traversant les parois poreuses qui les séparent; si la différence de densité est assez grande entre deux vaisseaux adjacents pour créer une tension osmotique supérieure à celle qui est nécessaire pour équilibrer la colonne de fluide, alors l’eau s'élèvera. Cette augmentation de la concen- tration à mesure que l’on s'élève n’est pas illogique; elle est, au contraire, le résultat naturel de l'évapora- tion. La succion capillaire exercée par la surface des feuilles peut également jouer un rôle. — M. le D' A. Theïiler communique ses recherches sur /a transmis- sion et l'inoculabilité du Spirillum Theileri Laveran. Le Spirillum Theïleri est naturellement transmis par les descendants des Æhipicephalus decoloratus qui se sont développés sur les bestiaux atteints ou guéris de l'infection spirillaire. Il est possible de rendre les bœufs et les moutons susceptibles à la spirillose par l'injection du sang d'animaux malades ou immunisés ; la preuve que le sang des moutons immunisés es infectieux manque encore. L'effet pathogénique dun Spirillum est une faible anémie accompagnée de fièvre ; dans aucun des cas de l'auteur il n'y à eu un résultat fatal. MAR à à MERS ie aline ec 1 SOCIETE ANGLAISE 3 DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE SYDNEY Séance du 10 Mai 1905. M. J. M. Petrie communique ses recherches sur l'huile minérale extraite de la torbanite de la Nouvelle Galles du Sud. La torbanite est un minéral bitumineux qu'on n’a trouvé qu’en trois contrées du globe : à Tor bane Hill (Ecosse), à Autun (France) et dans la Nouvelle Galles du Sud. Dans ce dernier pays, il est principa= lement soumis à la distillation pyrogénée pour en extraire l'huile qu'il contient. L'huile brute est unM mélange de paraflines et d’oléfines surtout. Les oléfines forment 70 °/, du distillat le plus léger, bouillant à 309; lorsque le point d’ébullition s'élève, elles diminuent lant entre 2802 et 400°, consiste entièrement en paraf= fines. On peut diviser les produits de la distillation en: trois parties : 1° les naphtes (9 0/4), distillant de 30° à 2009, D — 0,660 à 0,800, formés pour moitié des oléfines CH! à CH, et pour l’autre moitié des paraflines C‘H'# à C'H°; 2 l'huile solaire (54 °/4), distillant de 200 à 270°, D — 0,800 à 0,870, formée de 65 °/, de paral fines C!°H°° à C°H°, et pour le reste des oléfines C!°HÈ à C4%; 39 l'huile lourde (17 2/4), distillant au-dessu de 370°, D > 0,870, formée presque uniquement des paraffines CH à CH, À Ja fin de la distillation, i reste du chrysène. On à aussi constaté la présence de benzène, de phénols et d'une trace de thiophène. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MakETHEUX, imprimeur, 1, rue Casselte. 16° ANNÉE NORD 15 NOVEMBRE 1905 & de DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès Revue générale nu NCiences pures el appliquées sciences. Aûüresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Distinctions scientifiques Le Prix Bolyaïi. — Tous nos lecteurs ont certai- nement appris par la presse périodique le solennel hommage que vient de rendre à un savant français l'Université du Royaume de Hongrie. On sait qu'à la “demande de cette Université un Jury international avait été constitué pour décerner un prix de création nouvelle (le prix Bolyai) à l'auteur de la plus grande œuvre mathématique contemporaine. A l'unanimité, le Jury a salué en notre illustre collaborateur Henri Poin- caré, professeur à la Sorbonne, membre de l'Académie des Sciences et du Bureau des Longitudes, le plus grand “mathématicien de notre temps. : La Aevue s'abstient de commenter un tel événement. qui, ni en France, ni à l'Etranger, n'a surpris per- sonne, en consacrant, en quelque sorte, à nouveau l'une des gloires de notre pays et du monde, $ 2. — Nécrologie _ Le Commandant Massenet. — La Mission fran- gaise pour la mesure du degré dans la République de l'Equateur vient d'être cruellement frappée par la mort … de son chef intérimaire, le Commandant Massenet, « décédé le 1°* octobre à Cuenca, après avoir, pendant des années, dépensé sans compter ses forces et son “intelligence au service de la science géodésique. —. Sorti de l'Ecole Polytechnique en 1885, Louis Masse- «net entra, après un stage de dix ans dans l’Artillerie, au Service géographique de l'Armée, où sa brillante m intelligence, secondée par une rare énergie et une “crande élévation de caractère, lui valut d’être rapide- -ment distingué par ses chefs, et lui fit bientôt conlier d'importantes missions. Chargé d'opérations géodé- -siques étendues en France et en Algérie, il était entiè- —rement formé aux travaux sur le terrain lorsque le … Service géographique de l'Indo-Chine, récemment créé, demanda, pour la Section de Géodésie, un chef éner- sique et prêt à entreprendre les difficiles travaux en préparation dans la grande colonie d'Extrème-Orient. … Arrivé à Hanoï en 1901, le Capitaine Massenet‘jugea rapidement de la nature des déterminations à exécuter. La géodésie de lindo-Chine consistait surtout en REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. travaux séparés, exécutés au fur et à mesure des besoins, dans les pays les plus facilement accessibles. Les relier par un réseau continu de triangles, tel fut le plan que le jeune capitaine proposa à ses chefs, et que ceux ci-jugèrent d'abord irréalisable, en raison des dangers que présentait le séjour dans la montagne annamite, où aucun Européen n'avait encore pénétré. Mais le Capitaine Massenet mil une telle ténacité dans l'élaboration de son projet qu'il finit par obtenir l’auto- risation d'en entreprendre la réalisation, et passa deux années à déterminer les éléments d’un immense réseau de triangles, s'étendant sur plus de 2.000 kilomètres, le long de la chaîne dorsale qui court du Tonkin jusqu'à la Cochinchine en traversant l’Annam. Les sommets des triangles principaux sont au nombre de 110, et l'erreur moyenne de fermeture est de l'ordre de 5 se- condes centésimales seulement, ce qui est très peu, étant données les difficultés du travail. Le Capitaine Massenet, dont l'enthousiasme avait gagné ses dévoués collaborateurs, profita du séjour dans les pays traversés pour ébaucher la triangulation de second ordre en vue de la carte, et pour rattacher ses points géodésiques, d'une part avec ceux du Colonel Mac Carthy, à la frontière birmane, et, d'autre part, avec ceux que le Service hydrographique de la Marine avait déterminés en 1875 et 1887. L'accord de tous ces travaux s’est trouvé absolument remarquable. Rentré en France en 1904, le Capitaine Massenet venait de reprendre le commandement d'une batterie, et comptait sur quelque temps de repos bien gagné pour réparer ses forces, lorsque le Service géogra- phique de l'Armée vint de nouveau faire appel à son dévouement, pour remplacer, à la tête de la Mission de l'Equateur, son chef intérimaire, le Capitaine Maurain, dont la santé nécessitait le retour en Europe. Parti en décembre 1904, le Capitaine Massenet prit la charge des travaux dès le mois de janvier de cette année, et commença immédiatement la détermination de la différence de longitude entre les stations de la côte et celle de la Cordillière; l’on pouvait espérer qu'il avait échappé aux pires dangers du climat, puisque les opérations à la côte élaient à peu pres terminées, lorsqu'il fut atteint, en juillet, par la fièvre typhoïde, qui règne à l’état endémique dans les régions 21 Ve] 19 19 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE où il opérait. Sa robuste constitution eut encore raison du mal, et il venait d'entrer en convalescence <‘lors- qu'un abeès au foie se déclara, et l’enleva en quelques jours, peu après qu'il eut reçu sa nomination au grade de chef d’escadron. Le Commandant Massenet laisse des regrets unanimes et profonds, tant en raison de tout ce que son intelli- gence, unie à une volonté rare, permettait encore d'attendre de lui, que par l'élévation de son caractère, sa bonté unie à la fermeté, qui en faisaient un chef aimé de fous, et sachant communiquer à tous ses collaborateurs la foi dans le succès. $ 3. — Astronomie Lunette méridienne photographique. — Imaginons un collimateur orienté dans le plan du méridien et, devant lui, un miroir cylindrique dont les génératrices sont normales au plan du méridien. Au lieu d'un point lumineux, il sera préférable de mettre, au foyer du collimateur, une fente verticale fournissant plus de lumière; l'appareil étant réglé, les rayons réfléchis par le miroir vont constituer une nappe plane qui projette la fente sur la sphère céleste suivant un grand cercle lumineux qui servira de cercle de référence. Il suffit alors d'adjoindre, pour l’obser- vation, une lunelte visuelle ou photographique, dont l'objectif recoit la nappe plane formée des rayons ré- fléchis par le miroir et, en même temps, la lumière des étoiles : cet objectif est assez large pour n'être que peu masqué par le miroir cylindrique de petite di- mension. Les étoiles forment donc leurs images dans le plan focal; dans le même plan, les rayons de la nappe lumineuse produite par le miroir cylindrique forment une ligne fixe qui servira de référence, ligne qui n’est autre chose que l’image du grand cercle découpé dans la sphère céleste par le plan de référence. Tel est le principe du dispositif nouveau proposé récemment par M. Lippmann dans le Bulletin astrono- mique: l'Observatoire de Paris à fait construire un ap- pareil, sur les indications de l’auteur, pour déterminer ainsi les ascensions droites par la méthode photogra- phique, et l’organisation du Service correspondant a été confiée à deux habiles astronomes, MM. Jean Mas- cart et W. Ebert. Dans l'instrument dont il s'agit, par un dispositif plus pratique, la lunette réceptrice est constituée par un objectif renvoyant les rayons lumineux vers l’oculaire par l'intermédiaire d’un miroir à 45°; l'objectif à 16 centimètres de diamètre, permettant l'observation des étoiles de 11° grandeur; le champ est d'environ 20 1/2 carrés; la pose de 12 minutes peut, dans de bonnes conditions, photographier les étoiles de 9° gran- deur, la lunette étant montée équatorialement. L'étude des clichés avec la machine micrométrique permettra de conclure les différences d'ascensions droites avec une grande précision; l'image d’une fon- damentale donnera l’état de la pendule, le collimateur à fente étant muni d'un oblurateur instantané, réglé par la pendule elle-même, et qui donne sur le cliché des images équidistantes de la ligne de référence. Si, au contraire, on ne désire que la marche dela pendule, et non son état absolu, on la pourra déduire avec une grande précision de divers clichés du même groupe stellaire. Les documents réunis en un instant sont nombreux : suppression des erreurs personnelles. La méthode est directe, puisque les instruments dont il faut connaître les indications sont automatiquement réliés entre eux, et, comme dans les observations ordi- naires, on n'a pas à rapporter les objets faibles à des étoiles de repère, pour déterminer ultérieurement les coordonnées de celles-ci par rapport aux étoiles fon- damentales. MM. Jean Mascart et W. Ebert ont rencontré dans l'étude d’un tel instrument bien des difficultés : tels réglages et telles déterminalions, qui paraissaient très simples grâce à des dispositifs de laboratoire, se sont montrés beaucoup plus complexes dans la réalité. Mais: il fallaitavant tout étudier avec soin le nouveau dispositif, plutôt que de songer àle faire immédiatementservir à de déterminations définitives ; et, en effet, à l'heure actuelle; cet instrument ne peut être considéré que comme un modèle destiné à bien mettre en évidence les meilleures conditions qu'il faudra réaliser à l'avenir dans l'étude et la construction du système imaginé, à en faire sentir la portée, et à établir la technique désirable pour aboutir à des résultats d'une précision réelle. Sans entrer ici dans le détail des perfectionnements dont l'utilité à été mise en lumière, dès à présent, par les expériences de ces astronomes, et'grâce aux modi= fications proposées dont l'exécution est assez facile, om peut dire que de pareils instruments constitueront: un nouveau et précieux moyen de travail pour la mesure desascensions droites des astres et rendront de très grands services à l'Astronomie d'observation. C'est là, évidemment, une importante contribution à l'astronomie instrumentale de haute précision, eb nous n'aurions qu'à louer pleinement les auteurs de leur initiative et de leurs déterminations méthodiques;, siun petit point intéressant n'avait pas été laissé dans l'ombre : Commentse comporte le miroir cylindrique? et quelle confiance peut-on avoir dans la construction d’une telle surface? C'est là un point sur lequel il serait bon d’être renseigné, si l'on veut désormais s'écarter du plan et de la sphère comme surfaces optiques; d’ail= leurs, rien n'empêche de substituer au cylindre un miroir tournant, et l’on peut avoir beaucoup plus de confiance, à priori, dans la réalisation d’une petite surface plane. ; . Espérons que cette étude sera faite, et que la mo dification que nous proposons sera tentée, au besoin, dans la construction d'appareils de ce genre, mais plus puissants. $ 4. — Météorologie L’épaisseur des glaces en Sibérie. — D'après les observations de Middendorff, confirmées depuis par Maack, la nappe de glace sur les lacs ne dépas- serait pas 2,40 et, en règle générale, varierait entre 12,50 et 12,80. M. Vœikov a repris, avec sa haute com pétence, l’étude de cette question en ce qui concerne l'épaisseur de la couche de glace qui recouvre en hiver les eaux douces en Sibérie, et consigne ses obser- vations dansle eteorologische Zeitschrift ; l'épaisseur de glace des fleuves sibériens n'est pas très considé= rable : 0%,90 à 0,70 sur l'Iénissei par exemple. Cependant, à l'extrémité septentrionale de la Sibérie, dans la « toundra », cet épouvantable désert qui occupe tout le nord du pays, les nombres notés sont plus élevés : 2m,05 à 2m,15 à Boulonn, par 70%5! de latitude, 22,30 à 2,35 à Rourskoyé Oustié, par 710, Cette région est comprise entre les isothermes annuels — 16° et — 140 et, de décembre à mars, la température moyenne varie de — 340 à — 36°. À Verkhoyansk, sur la Yassa, sous 67°30/, 1m 80 seulement d'épaisseur de glace, ce qui est d'autant plus curieux que cette localité se trouve voisine du pôle de’froid de l'Ancien Monde la température moyenne des trois mois d'hiver est de — 349 à — 480, et l'on a observé jusqu'à — 67,8. Aux latitudes de Londres et de Hambourg, en Trans= baikalie, on trouve bien des singularités très curieuses sur lesquelles nous ne pouvons insister ici, et des épaisseurs très variables, de 1 mètre à 2,35 : d'une manière générale, il y a une croissance énorme de la glace dans le haut bassin de l'Amour lorsqu'il y a peu ou point de neige, et la dépendance est très nette entre l'épaisseur de la glace et la quantité de neige. : En raison de sa mauvaise conductibilité, la neige arrête la croissance de la glace. M. Vœikov raconte que, pour empêcher que les cours d’eau et les las peu profonds ne gèlent jusqu'au fond et que cette. congélation totale ne détruise les poissons, les Yakoutes recouvrent la glace de branches de pins; ces entasse= CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 993 ments de branchages déterminent la formation de “monceaux de neige et, par suile, arrètent l’accroisse- “ment de la glace, $ 5. — Génie civil _ Action du magnétisme sur les chrono- “mètres. -— L'aimantation des pièces en acier, cons- tatée depuis fort longtemps, n'avait pas d'inconvénients ant que, au point de vue de la chronométrie, la pré- ision du réglage n'avait pas l'importance actuelle ; ais le besoin que nous éprouvons d’avoir, sous un “volume restreint, un mécanisme qui nous indique ssez exactement /' heure à chaque instant de la journée, rend la tâche scientilique et pratique de l’'horloger de plus en plus difficile. Dans les pendules de précision, par exemple, le poids oteur est en général notablement supérieur au poids écessaire à l'entretien du mouvement du balancier; t si des causes retardatrices viennent à se produire, Ténergie du poids qui tombe lentement, dent par dent de l'échappement, est assez grande pour que le mou- ement à peu près régulier ne soit pas modifié d'une anière sensible, en supposant toutefois que la lon- sueur du pendule reste constante. Mais il en est autre- «ment dans un chronomètre de marine ou de poche : le cent est entretenu, non pas par la chute d'un po mais par la mise en jeu de forces élastiques, et es forces élastiques sont d'autant plus grandes que la “masse déformée est aussi plus grande. C’est un fait “d'expérience journalière, et d’une évidence telle qu'il serait inutile d'en parler si la Mécanique théorique et pratique ne tendait pas à la précision, et surtout à la meilleure utilisation possible des forces à notre dispo- sition. + Dans les chronomètres actuels, qui sont, relativement aux pendules, si petits et formés de si nombreux or- -£anes, l'énergie motrice emmagasinée dans un ressort “déformé, tendu, est quelque peu supérieure à celle que nécessite la mise en mouvement de ces organes. Mais, pour qu'un mécanisme fonctionne d'une façon régu- nlière, il faut surtout que l'énergie motrice reste sensi- “hlement constante ou, tout au moins, que les variations qu'elle subit n'atteignent pas une limite devant affecter Je mouvement dit régulier. Or, parmi les causes de “variations du mouvement de marche d'un chrono- “mètre, l'aimantation des pièces en acier donne préci- “sément naissance à des forces perturbatrices non D. | Les pièces qui peuvent devenir des aimants sont : les pivots, ressorts, ancre, spiral et balancier, et acces- 1 soires d'échappement. Les actions mutuelles de ces Maiitérents organes, envisagées seulement au point de | vue de l’aimantation, sont des actions à distance et de “deux sortes : les unes permanentes, qui tendent à Ë ugmenter le frottement des pivots sur les pierres; les “autres périodiques, tantôt accélératrices, tantôt retar- |atrices, tendant à altérer la période d’oscillation du Mbalancier et son amplitude, au point de provoquer arrêt d'un chronomètre. M. L. Guillin, chef des Travaux de Physique indus- ielle à l'Université de Besancon, s'est préoccupé Î d'étudier cette aimantation d'une facon purement Mexpérimentale, car il est clair que la complication de Mces organes rendrait illusoire l'étude mathématique du Mchamp magnétique et de ses variations. Pour cela, il suffit de revenir à l'expérience classique du spectre magnétique, qui permet de définir le champ, les lignes de force et les pôles; dans le cas de plusieurs aimants, spectre sera caractéristique des actions mutuelles des pôles et de la distribution des différents éléments. On peut espérer analyser de la sorte le magnétisme à chronométrie. Si l’on prend, par exemple, un ressort manté, confiné dans son barillet, on pourra étu- her son spectre et varier à l'infini les conditions de expérience : on a une figure très analogue à celle dun barreau aimanté, évidé en son milieu, avec deux : [E Ë ? : pôles bien distincts. Si le ressort se détend, on a, au contraire, une série de pôles distribués suivant les différentes spires, et ces spires subissent par consé- quent des actions mutuelles capables d'influer dans une certaine mesure sur la détente du ressort : actions accélératrices si, entre deux spires voisines, les lignes de force se repoussent, retardatrices dans le cas con- traire. Ainsi, deux spires voisines tendraient à rester adhérentes et, de toutes facons, la perturbation va créer des alternatives dans la détente. Le spiral peut être étudié de la même façon, et c'est sur lui que l’action perturbatrice de l’aimantation se fera le plus sentir, altérant l'amplitude de la période. Le cylindre aimanté mettra en évidence quatre centres magnétiques, avec une disposition de lignes de force qui ne pouvait être fixée que par l'expérience. Mêmes expériences pour les mouvements à ancre, munis de leurs pendants : on relève encore l'existence d'une série de pôles magnétiques qui font ressortir la pré- sence de forces parasites dues à l’aimantation, forces dont l'influence sur la régularisation du mouvement est loin d’être négligeable. Déjà M. Cornu s'était très habilement préoccupé de questions chronométriques de cette nature : il avait donné les observations faites sur une montre aimantée, relativement à la variation de marche, suivant l’orien- tation de cette montre dans le champ magnétique ter- restre, ce qui revenait à faire varier les forces dues à l’aimantfation; et, sur une montre quelconque, la pré- sence seule du champ terrestre occasionnera une cause perturbatrice. Nous ne reproduirons pas ici les conclusions de cet éminent physicien, conclusions que l'on peut trouver dans les Comptes ltendus, mais, dans le même ordre d'idées, il existe une autre cause, plus faible sans doute, de la variation de marche d'un chronomètre : pour cela, il faut remonter à l'expé- rience primitive de Gambey, en 1824, montrant qu'une aiguille aimantée qui oscille dans le champ magnétique terrestre revient plus facilement au repos à sa position d'équilibre lorsqu'elle est placée au dessus d’une masse métallique telle que du cuivre. Herschel et Babbage font l'expérience inverse, et, avec Arago et Faraday, nous savons aujourd'hui ce que sont l'induction et les freins électromagnétiques résultant des courants in- duits. ; Dans un chronomètre aimanté, le balancier et le spiral remplissent le rôle d'aiguille aimantée, et déter- minent dans la platine des courants induits faisant frein et tendant à diminuer l'amplitude des oscilla- tions : il doit s'ensuivre une varialion de marche, et l'on voit que cette aimantation des montres, et la variation de cette aimantation, apportent une difticulté de plus à celles du réglage mécanique. M. Guillin a-t-il choisi la bonne voie et un processus expérimental avantageux? Une fois les pièces connues, une à une, par cette méthode des spectres, pourra- t-on les combiner utilement? Nous ne le pensons pas, pour notre part; car, outre que le spectre n’est pas assez sensible, la complication et la multiplicité des pôles rendra bientôt le phénomène impossible à inter- préter. Néanmoins, les recherches sont intéressantes, et nous devons attendre les renseignements promis par l’auteur sur la facon dont une montre peut s'ai- manter,et les moyens employés pour faire cesser cette aimantation. $ 6. — Physique Une pile thermique à vide. — La vitesse de refroidissement d'un corps chauffé au-dessus de la tem- pérature ambiante et plongé au sein d'un gaz, en tant qu'elle est due à la conduction et à la convection de la chaleur, est réduite dans une grande mesure par une dilution considérable du gaz ambiant. Tel est le fait qui résulte des expériences de MM. Kundt et Warburg sur les thermomètres à mercure. Aussi, en renfermant les piles thermiques dans des vases vides d'air, l'on augmente évidemment leur sensibilité à un degré con- sidérable. Il en sera de même de tous autres dispositifs de mesure où l'effet thermique d’un courant électrique ou d'un rayonnement est utilisé pour des détermina- tions d'intensilé, que ce soit la variation de résistance d'un fil (comme dans les bolomètres) ou son allon- gement (comme c’est le cas de certains instruments de mesure techniques) qui servent de base aux mesures. Dans un Mé- moire publié dans la Physikalische Zeitschrift(n® 16), M. H. Brandes dé- id crit une pile ther- ù mique à vide du À type Klemencic, RER OPEN ES qu'il ditètre d'une Æ fabrication et d’u- ne manipulation très commodes. Däns une calotle de verre consli- tuant la partie su- périeure du vase de ia pile thermi- n que du dessin sans gè que, l’on dispose 1F pour ecrire ner l'opérateur quatre tubes de ne L'autre bout du FORTS AN MES CNSEN | NI N PSSSESESSESEE + bras de levier est tances de 1 à 1 1/2 altaché à linté centimètre, dont Fig. 1. — Poste iansmetteur du télaulographe. — t, crayon rieur de l'appareil les bouts renfer- ment des fils de platine de fort dia- mètre constituant une section carrée et où l’on scelle la pile thermique proprement dite consistant en fils de constantan et de fer. En faisant le vide dans cette pile, on en porte la sensibilité à des valeurs dix-huit fois plus grandes. Une pile thermique à vide, tout en étant d'une sen- sibilité analogue, est préférable aux bolomètres en ce qu'elle est plus compendieuse et qu'elle ne néces- sileaucune source de courant spé- ciale, ni aucune graduation préa- lable. Ses indica- tions gardent une proportionnalité jarfaile. NEC tricité industrielle La transmis- sion à distan- ce des éecritu- res et dessins. — L'idéal que les Fig. inventeurs de dis- positifs de trans- mission instantanée se sont proposé depuis long- temps, c'est de construire des appareils téléoptiques au moyen desquels les événements se passant en un lieu donné soient rendus visibles à des endroits éloignés, au moyen d'une transmission télégraphique. Bien qu'élant loin d’une solution véritable, ce problème a été résolu en partie par l'invention d'appareils per- mettant la transmission à distance des écritures et mème des photographies. Le Professeur Korn, à Munich, a été tout particuliè- rement heureux dans ses expériences de transmission des photographies, mais son appareil, en raison de son 1 FBogpemapls del CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Te Un crayon 4 à âme de graphite est articulé articulé sur bras de levier a; p, axe de rotation du levier a; r, résistance fixe; s, résistance mobile; b, archet collec- teur relié au fil d; e, barre collectrice reliée au fil e. 2, — Poste récepteur du télautographe, he coût élevé et de sa forte consommation d'énergie n'entrera pas, sans doute, de sitôt dans la pratique courante. On peut espérer, au contraire, un véritable succès pratique d'un autre appareil beaucoup moin coûteux et plus modeste, qui se borne à la transmission des écritures et des traits : nous entendons parler d télautoyraphe Grubhn, appareil qu'on peut facilement relier à toute ligne téléphonique existante. Présenté au public il y à déjà plusieurs années, cet instru ment vient de recevoir des perfectionnementss i considérables qui en augmentent l'utilité et qui l_ en favoriseront, sans doute, l'adoption plus gé nérale. Ï Les figures 1 et 2 représentent le mode de $ fonctionnement de l'appareil. sur un bras de le vier 4. Ce dernier qui est très mo bile.permeta crayon de se dé placer dans toute direction voulue à travers le plan à un axe de rota= tion y, susceptible de se déplacer sui vant la ligne AB: Le crayon peut, par conséquent, exécuter un mouve ment quelconque, et ses déplacements impriment un double mouvement oscillatoire et de va-et-vient au bras du levier. à : Dans la figure 1, r est une résistance fixe ets un@ résistance mobile qui est rigidement reliée au bras dè levier à par la tige qu'on remarque dans la figure; ces deux résistances sont en rapporb avec une batteri® de huit élément de pile sèche; estun petit arche collecteur monté sur le levier mo bile, dont il est isolé, et e est une barre collectrice fixe. Ces deux col lecteurs de cou rant sont reliés, aux fils de trans= mission det e. Or une partie du cou rant de la batterie 2 res Ligne de 1 ÉTANSMISS ON.) DD IN WMV MTIIÈE s'écoulant à tra Ion vers les collec teurs dans les fil de transmission oncomprendra ai sément que les courants traversant ces derniers, loin d’être constants sont modifiés par toute variation de position du crayon inscripteur. À tout point du plan du dessin correspom dent, par conséquent, deux intensités de courant diffé rentes, mais bien définies, de façon que les mouvement du crayon sont, pour ainsi dire, convertis en modikcäz tions de courant. Les lignes spiralées de la figure … représentent des cordons conducteurs flexibles. M Les courants transmis à la station réceptrice revien nent soit par la terre, soit à travers un troisième conducteur, A la station lointaine, les courants pénè trent dans un appareil de réception (fig. 2), où l'on CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 925 disposé une pelite lampe électrique projetant un mince inceau lumineux sur un miroir très petit. Après avoir été réfléchi par ce dernier, le pinceau lmineux va frapper un autre miroir, le réfléchissant à son tour sur du papier sensible à la lumière. Une lentille interposée sert à concentrer les rayons lumineux dans un foyer bien défini. Les deux petits miroirs ne sont point immobiles, mais se meuvent sous l'influence des cou- rants qui leur sont transmis, leurs axes de rotation por- tant des aiguilles magnétiques. Ces dernières recoivent “ un mouvement oscillatoire sous l’action des bobines -g et traversées par les courants qui arrivent. L'un des miroirs oscille de haut en bas et l’autre de droite à … gauche, conformément aux mouvements du crayon - inscripteur de l'appareil de transmission. Il s'ensuit que le rayon réfléchi exécute ces mêmes mouvements, qui se combinent en un mouve- ment résultant. On comprendra sans peine qu'on puisse diriger le rayon lumineux de tous côtés au moyen des deux miroirs avec Ja même facilité que le crayon inscrip- . teur de l'appareil de départ. Le mouvement de ce dernier a, en ef- jet, été décom- posé dans l'appa- reil de transmis- sion en deux mouvements,ver- tical et horizontal respectivement, qui se recombinent dans l'appareil de réception pour reconstituer le mou- -vement original. C’est dire que le rayon lumineux est devenu un crayon inscripteur se mouvant sur le papier photographique avec la même vitesse que la pointe de graphite et simultanément avec cette dernière, ce qui produit sur ce papier une inscription photogra- phique. : Le développement de ces impressions lumineuses est opéré automatiquement par l'appareil, un petit élec- tromoteur retirant la dépêche de la boite. Le procédé de développement ne demande que 10 secondes, c’est- à-dire que, 10 secondes après que l'opérateur a déposé son crayon, la dépêche autographiée est arrivée à - l'autre station. Les expériences faites par l'Administration des « Postes allemandes ont démontré la possibilité d'em- -ployer une même ligne téléphonique simultanément pour téléphoner et pour faire jouer le télautographe, sans donner lieu à la moindre perturbation. Mème à des distances considérables (par exemple entre Berlin et Dresde, soit sur 200 kilomètres), le télautographe a été essayé avec un succès complet. Cet appareil rendra des services surtout dans le cas «où le téléphone n'assurerait pas le secret de la missive mou qu'on désire en posséder une reproduction écrite. Les transactions de banque, par exemple, profiteront “du télautographe, qui leur permettra de transmettre “les signatures par télégraphe. Alfred Gradenwitz. / ras 4 $ 8. — Chimie industrielle . Les phénomènes qui accompagnent la réduction du fer. — Sous ce titre, MM. Schenck et W. Heller viennent de publier un intéressant Mémoire ‘ À 1 Ber. der, deutsch. chem. Gesellschaft, 1905, t. XXXVIIT, p. 2132-2139, 7 olvt vruiginal Handsihry. numgin 4 É / 4 Eure : Grjanna Dartitenbun 46 Fig. 3. — Exemple de message tel qu'il a été transmis (partie gauche) et reçu (partie droite) dans le télautographe. sur les réactions qui s'accomplissent dans le haul- fourneau. On sait que la réaction 2C0 27 G + CO? est équilibrée lorsque 1°co/pcos © (où € est la constante d'équilibre); on sait, d'autre part, que la réaction FeO Æ CO Z Fe —+- CO? est également équilibrée lorsque Pco/pcos = 1. Si les deux réactions ont lieu simultanément, quand il y à équilibre les deux équations doivent être vérifiées à la fois, et, si P est la pression totale des deux gaz, on a : Pco == C/n, et P—C(1I Ln)/n°. Comme € et n dépen- dent seulement de la température, il s'ensuit que la pression {otale, ainsi que la pression pañftielle de chaque gaz, ne dépendent aussi que de la température; par conséquent, en présence de carbone, l’oxyde fer- reux ne sera réduit par CO que si la pression totale de CO: et de CO pré- sents est infé- rieure à P,tandis que, si elle est Jar Peute-p ah (Gui lu) lrauiht ge Éhumtéate, Supérieure, le fer ; sera oxydé et le 7e) Han mat dem. Slip vi carbone mis en liberté. Pour vérilier ces déductions, 2 7 les auteurs ont Ün auf Qrrsse Gntyer - mesuré directe- Pre FES ment P à diffé- Nahares Clair. rentes tempéra- tures, partant à la fois d'un mé- lange de fer et de carbone en pré- sence de CO? et d'un mélange de carbone et d'oxy- de ferreux, en maintenant la température de leur ap- pareil constante jusqu'à ce que la pression ne variàt plus. Ils ont obtenu les résultats suivants : Ce do. TV : # imnma Y armure Se EN PARTANT DU F& MÉTALLIQUE ES — Tempér. endeg.C. Press.en mm. EN PARTANT DU FeO CR pr EE Temp.endeg.C. Press. en mm. 10,9 469 468 10,3 = — 540 30,0 600 65,0 — —= = — 620 81,5 = = 669 169,2 703 308,0 _ — 719 395,8 728 438,4 718 750.0 180 180.0 Les résultats des deux méthodes concordent parfai- tement. Il en résulte que, dans les conditions normales, c'est-à-dire sous la pression atmosphérique, il n'y à aucune réduction, si aucun gaz indifférent n'est pré- sent, au-dessous de 775° C. environ, car à cette tempé- rature seulement la pression d'équilibre P est égale à la pression totale des gaz réagissants; pour travailler à une température inférieure, il est nécessaire de réduire cette pression totale, soit en opérant dans un vide partiel, soit en diluant avec un gaz indiltérent. Dans le haut-fourneau, par exemple, quand l'air est employé à produire CO, la pression totale des oxydes du carbone ne peut pas excéder 250 millimètres et, dans ce cas, la réduction peut se produire à toutes les températures supérieures à 695° environ. Si, localement, la tempé- rature tombe au-dessous de ce point, les conditions existent pour la réoxydation du fer réduit et le dépôt de carbone. Le manganèse étant beaucoup plus oxydable que le fer, la valeur de €, pour le cas de ce métal, est plus élevée, et par conséquent la valeur de P est inférieure à ce qu'elle est dans le cas du fer. Les auteurs n’ont pu obtenir une valeur mesurable de P pour le manganèse CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE au-dessous de 1200° C. (10 millimètres). À 12299, elle est de 45 millim. 3; mais les expériences n’ont pu être continuées à cause de la détérioration des tubes de quartz à ces hautes températures. L'emploi du papier comme préservatif du fer et de l'acier contre la rouille, — À la der- nière réunion de la Société américaine pour l'Essai des matériaux, à Atlantic City, M. L. H. Barker a commu- niqué d'intéressants renseignements sur un nouveau procédé de préservation contre la rouille. On sait que la rouille ne se forme pas sans humidité et, comme tous les vernis sont plus ou moins per- mnéables à cette dernière, l’auteur à cherché à réaliser un isolement absolument impénétrable à l'eau; après de nombreux essais infructueux, il à fait choix d'une garniture en papier huilé qui s’est montrée très efli- cace. La garniture de papier à d'abord été utilisée comme préservatif contre l’action de la fumée sur des barreaux d'essais; après une durée de deux ans et trois mois, on a constaté que la couche de peinture extérieure, le papier et la première couche étaient restés intacts, tandis qu'aux endroits où l’on n'avait pas mis de papier la première couche n'était pas encore sèche, et la surface de l'acier montrait le même aspect que pour un acier recouvert de vernis seule- ment. Ces résultats encourageants conduisirent à faire des essais sur une plus grande échelle, Un grand nombre de fers en Æ, qui supportaient des fondements situés à quelques pieds seulement au-dessus d’une étendue d’eau salée, furent révêtus d’une enveloppe de papier ; ils étaient ainsi soumis à une humidité constante et à l'action des gaz de marais. Or, après plus d’une année, ils ne présentent pas la moindre trace de rouille. La garniture du fer avec le papier huilé se fait de la facon suivante : Après que toute la rouille antérieure a été soigneusement enlevée au moyen de brosses en fils métalliques raides, on donne une première couche de peinture, puis on pose le papier dessus, et l’on presse fortement ce dernier sur la surface peinte, de telle facon que les bords des bandes de papier séparées se recouvrent légèrement; enfin, on passe la deuxième couche. Ce procédé offre l'avantage que l’apposition des deux couches de peinture et celle du papier peuvent être faites à peu d'intervalle, ce qui diminue beaucoup les frais !. L’emploi de l'acide formique en distillerie. — M. H. Lange vient d'attirer l'attention sur les résul- tats extrèmement favorables qu'on obtient en distillerie par l'addition d'acide formique au milieu en fermenta- tion déjà acidifié par l'acide lactique®. L'acide formique à faible dose stimule l’activité fermentative de la levure, maintient la diastase à l’état actif pendant toute la durée de la fermentation et protège le liquide contre les bactéries acidifiantes, en donnant ainsi un rende- ment maximum en alcool. La fermentation des milieux contenant de l'acide formique commence plus tran- quillement que d'habitude ef se poursuit avec une intensité plus uniforme; un trait caractéristique de ces milieux, c'est l'exceptionnelle vigueur de la fermen- tation secondaire. Cette uniformité d'intensité fermen- tative permet de remplir les cuves plus haut que de coutume. Pour une cuve de fermentation de 3.000 litres de capacité, on emploie 50 à 60 centimètres cubes d'acide formique pur. En pratique, l'acide formique est dilué au 1/8. Le milieu à fermenter est préparé et aci- difié à la manière ordinaire; après qu'il a été refroidi à 370-380 C., on ajoute 100 centimètres cubes d'acide formique dilué pour chaque 100 litres de liquide et la levure est plongée à la température convenable. Après que la levure à agi pendant trois fermentations succes- sives, la dose d'acide formique est élevée à 200 centi- * D'après Stahl und Zisen, t. XXV, n° 49, p. 1159. > Zeitsch. f. Spiritusind., 1905, €. XXVIII, p. 341-432. mètres cubes par hectolitre, et maintenue ainsi pen- dant six autres fermentations; à partir de ce moment, on emploie constamment 300 centimètres cubes d'acide dilué pour 100 litres de liquide. Quand on emploie la plus forte proportion d'acide formique, il est bon d'élever de 4,5 à 2° la température à laquelle on ajoute la levure. $ 9, — Biologie Sur les prétendues dents aurifiées des moutons australiens. — 11 y a quelques mois, des journaux quotidiens de Londres et de Sidney annon- cèrent qu'on avait découvert des dents auriliées chez quelques moutons d'Australie. M. A. Liversidge vient de présenter, sur ce cas bizarre, un intéressant Mémoire à la Société Royale de la Nouvelle Galles du Sud. Ayant reçu la moitié inférieure de la mâchoire d'un mouton de Dubbo, il a observé que les dents de celle-ci étaient plus ou moins complètement incrustées d’une substance métallique, jaune, mais plus semblable à de la pyrite de fer (marcassite) ou à du laiton qu'à de l'or. Ce dépôt mesure moins d'un millimètre d'épaisseur. Sous l'objectif, on reconnait qu'il est formé de couches translucides minces, mais il n'y a aucune structure organique définissable. Le lustre métallique est dû à la facon dont la lumière est réfléchie par la surface des pellicules superposées. L'incrustalion se dissout en partie dans les acides dilués; le résidu consiste en matière organique pelliculeuse, possédant toujours l'éclat métallique, mais blanc et non plus jaune. L'examen chimique montre que cette incrustation sur les dents est un dépôt analogue au tartre dentaire et formé principalement de phosphate de chaux et de matière organique, L'acapnie évitée par la respiration d’un” mélange d'oxygène et d'acide carbonique. — On sait que, pour un aéronaute normalement entraîné, les malaises sérieux dus à la raréfaction de l'air com= mencent entre 7.000 et 8.000 mètres. C’est entre 8.000 et 9.000 que se sont produits les accidents graves, comme ceux dont la catastrophe du Zénith a laissé le souvenir. Mais, en appliquant la doctrine de Paul Bert, on a pu atteindre des altitudes plus élevées encore, en pratiquant des inhalations d'oxygène, comme l'ont fait MM. Berson et Süring, qui, cependant, étaient évanouis lorsque leur ballon atteignit sa plus grande altitude, qui fut de 40.600 mètres. D'après le Professeur Mosso, l'acide carbonique est un puissant adjuvant de l'oxygène pour combattre l’asphyxie due à la raréfaction, etles expériences entre prises depuis quelques années par léminent physio logiste ne laissent aucun doute à cet égard. | Les recherches récentes du Dr Agazzotti, élève du Professeur Mosso, sont plus concluantes encore. Les premiers essais, dont le sujet fut un orang-outang, furent si décisifs que le D' Agazzotti n'hésita pas à se soumettre à une atmosphère très raréfiée, créée dans une vaste cloche de fer appartenant à l'Institut physio® logique de Turin. Mais, si la totalité du gaz contenw dans la cloche eût participé à l'expérience, la difficulté de l'aérage aurait rendu impossible le dosage exact des gaz respirés, de telle sorte que l'expérience eût été peu concluante. En fait, la cloche servait seulement à fournir au sujet un milieu artiliciellement raréfié, am travers duquel circulait de l'air frais, entrant par um robinet peu ouvert, el aspiré par une pompe puissante qui entrainait mécaniquement les produits de la res piration. L'air inspiré, au contraire, était fourni pal un gazomètre, el arrivait sous un masque étroitement appliqué sur la figure de l'expérimentateur, qui rendait le gaz expiré par une soupape. La consommation dé gaz était de 500 litres par expérience. La composition de ce gaz élail, en moyenne, de 67 °/, d'oxygène et de 13 °/, d'acide carbonique, le reste étant de l'azote. Dans les premières phases de l'expérience, l’air dé la cloche était seul respiré, et ce n'est qu'après les CHRONIQUE ET CORRESPOND ANCE 921 “premiers malaises que commençait la respiration arti- … ficielle. …. Dans une des expériences que cite M. Agazzotti, la pression ayant été ahaissée en une demi-heure jusqu'à v À 410 millimètres de mercure, aucun malaise n'était encore perceptible; mais, dix minutes plus tard, les premiers symptômes d’asphyxie débutèrent, à une pression de 360 millimètres, par de la fatigue muscu- laire et cérébrale, avec un peu de céphalalgie. La fré- quence de l'inspiration était de 44 par minute, au lieu de 7 au début de l'expérience. Le gaz artificiel pro- duisit un soulagement immédiat et ramena l'observa- “ teur aux conditions du début de l'expérience. La raré- “ faction fut poussée encore plus loin, et la pression descendit graduellement jusqu'à 140 millimètres en une demi-heure environ. La fréquence de la respira- tion était alors de 23 1/2. La fin de l'expérience fut indiquée par l'épuisement prochain du gaz artificiel. Le retour à la pression normale s'effectua en vingt minutes, sans aucun inconvénient pour l'opérateur. Dans une deuxième expérience, la raréfaction fut pous- sée jusqu à 122 millimètres de mercure, pression sous laquelle M. Agazzoiti se trouvait parfaitement à son aise, puisqu'il caractérise dans les termes suivants son état : « J'aurais pu résister à une raréfaction plus forte, car je me trouvais encore parfaitement à mon aise, la mémoire lucide, la vue normale, les mouve- ments sûrs; je n'avais aucun tremblement des lèvres, comme dans l’autre expérience, jé ne ressentais aucune sensation de chaleur au visage ». Le dernier état de raréfaction auquel s'est soumis le Dr Agazzotti correspond à une altitude de 144 kilom. 1/2, dépas- sant ainsi de # kilomètres la plus grande hauteur atteinte par des hommes déjà évanouis. En plus de l'intérèt qu'elles présentent pour la Physiologie pure, ces expériences préparent douce d'excellente facon une exploration plus fructueuse de la haute atmosphère par ballons montés. k î à | $ 10. — Géographie et Colonisation Le Port de Paris'. — C'est un port singulier, en ce sens qu'il n’est pas centralisé en un point quelconque, mais qu'il comprend toute une série de quais ou de rives s'étendant le long de la Seine et des canaux. Et Ja Seine traverse l'enceinte parisienne sur 12 kilomètres de longueur. Dès l'époque romaine, Paris fut pour la batellerie un centre important, heureusement situé entre les con- fluents de la Marne et de l'Oise. Réorganisé sous le Consulat et l'Empire, il ne cesse de se développer jusqu'à la création des chemins de fer. Une crise survient de 1845 à 1855, suivie d'une période d'expansion qui n’est pas encore terminée. Son mouvement annuel est d'en- - viron 45.000 bateaux, transportant 9 millions de tonnes de marchandises. Ces nombres font de Paris le premier port de France, Marseille venant bien après avec 6 millions et demi de tonnes, cabotage compris. La comparaison avec le trafic par voie ferrée est inté- ressante : en 1901, sur 41.981.850 tonnes de produits déchargées dans la capitale, 43°/,, soit 5.197.800, étaient venues par eau, et, sur 4.538.376 tonnes envoyées hors Paris, 37 °/,, soit 1.704.500, l’étaient par bateau. Ces chiffres montrent que le port recoit plus qu'il » n’expédie, S'il en a toujours été ainsi, du moins le } caractère des arrivages s'est-il modifié : jusqu'à l’ap- -parition des voies ferrées, on venait s’approvisionner aux « coches d’eau »; seul, le marché aux fruits à PAG 4 F. Maury : Le Port de Paris, hier et demain, À vol. in-&°, pans, 1905. — D. Bezzer : L'Economiste français, 26 août 905. subsisté jusqu'à aujourd'hui. Actuellement, plus des deux tiers des entrées sont représentés par les maté- riaux de construction et la houille; les premiers ali- mentent en grande partie les chantiers parisiens, tandis qu'une bonne partie du charbon ne fait que transiter. Ce sont ensuite les bois, les céréales, les vins. Pour bien des raisons, les arrivages de bois diminuent constamment : l'amortissement du courant par les bar- rages, la difficulté de passage dans les écluses, l'appro- fondissement du fleuve sont autant d'obstacles au con: voyage des radeaux. D'un autre côté, la houille dans le chauffage et le fer dans la construction prennent de plus en plus la place du bois. Les matières premières destinées aux fabriques de produits chimiques et aux établissements métallurgiques, le sucre, le pétrole et le sel viennent après, par ordre d'importance. Ces marchandises arrivent d’abord par la Haute- Seine, la Loire et l'Allier, qui fournissent l'apport le plus volumineux : près de 2 millions et demi de tonnes, représentés, en bonne partie, par les matériaux de construction, les blés et les farines. La ligne de l'Oise etles-canaux du Nord apportent 1.800.000 tonnes, prin- cipalement en combustibles et sucres. La ligne de la Basse-Seine amène des produits très variés d'outre-mer : combustibles étrangers, céréales, laine, coton, lin, café, etc. L'Oureq, la Marne et l'Yonne ont une part plus faible. | Pour conserver au port de Paris l'importance de son trafic, bien desaméliorations ont été apportées, d'autres sont projetées. C’est ainsi que le canal de l'Ourcq a été approfondi à 2 mètres; on à réduit le nombre des écluses du canal Saint-Denis et commencé la transfor- mation des anciens quais à glacis en quais droits, le long desquels. les bateaux peuvent s'amarrer et débarquer ou embarquer directement les marchandises. Deux « gares d’eau » ontété installées : l'une à Javel, près du viaduc d'Auteuil, où les wagons de la Compagnie de l'Ouest viennent à quai-et permettent directement le chargement ou le déchargement; l'autre, à Ivry, outillée par la Chambre de Commerce de Paris, et rattachée à la gare du Chevaleret, sur le réseau d'Orléans. Une troisième est réclamée, qui raccorderait le port de lx Villette avec les lignes du Nord et de l'Est; par ailleurs, il serait souhaitable que le Midi et le Sud-Ouest de la France pussent communiquer avec Paris, que l'on doublät la voie du Nord qui est encombrée, qu'une direction unique fût chargée de l'exploitation com- merciale sous la seule responsabilité de la Ville. Bien que la navigation intérieure n'ait pas besoin, pour le chargement ou le déchargement, d'opérer aussi rapide= ment que la navigation maritime, pour laquelle chaque heure de stationnement représente une dépense con- sidérable, il faut constater quand même l'insuffisance actuelle du matériel de manutention et des hangars pour loger les marchandises, en reconnaissant toutefois la difficulté de répondre à tous les besoins, par suite de la dispersion des opérations commerciales tout le long du fleuve. Toutes ces amélioration faites ou à faire produiront- elles un accroissement du trafic du port, où mème suffiront-elles à le maintenir ? C'est toute la question de la navigation fluviale qui entre ici en jeu, et, sans croire que le commerce moderne finira par délaisser les transports par eau au profit de la voie ferrée, rajeunie dans son matériel de traction et dans son matériel roulant, nous pensons que le problème capital de la navigation intérieure devrait consister dans le perfectionnement de ses moyens de transport. P. Clerget, Professeur à l'Ecole supérieure de Commerce des Jeunes Filles à Fribourg (Suisse). 928 L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONES Depuis l'époque où la première cellule vivante est apparue à la surface de la Terre, la végétation n’a cessé d’être l'origine principale, on peut dire unique, des innombrables composés du carbone que nous connaissons. À part l'acide carbonique et certaines espèces de pétroles qui semblent déri- ver de carbures plutoniens, tous les corps orga- niques qui sortent de nos manufactures, pour être utilisés à tel usage que l’on voudra, sont en rap- port plus ou moins lointain avec la cellule végétale; il ne saurait, d’ailleurs, en être autrement, car l'énergie nécessaire à la synthèse d’un corps com- bustible quelconque ne peut provenir que du rayonnement solaire, et la végétation est seule capable d'emmagasiner économiquement celui-ci. La connaissance des réactions qui, dans les plantes à chlorophylle, amènent l'acide carbo- nique, l’eau et un petit nombre d'autres principes également incombuslibles à l'état de matière orga- nique est donc l'une des plus intéressantes que nous puissions demander à la Chimie végétale. Le problème, accessible seulement depuis que lon connaît les principaux modes de transformation chimique de la matière, est aujourd'hui résolu dans ses grandes lignes; nous allons en examiner l’état actuel en nous bornant aux plus simples des produits élaborés, aux hydrales de carbone et à leurs dérivés immédiats. Ï La synthèse végétale a pour point de départ la fonction chlorophyllienne, qui permet à la plante d'absorber la partie la plus efficace du rayonne- ment solaire (Timiriazeff) et d'en utiliser l'énergie à la décomposition de l'acide carbonique aérien. Nous ne discuterons pas ici la question de savoir s'il y a, dans cet acte fondamental, intervention d’une diastase parliculière, comme le veulent J. Friedel et Macchiati, ou s'il apparaît dans la plante, en même temps qu'un produit de réduction de l'acide carbonique, un autre corps plus oxygéné que celui ei, comme le pense Bach; les expériences sont, sur ces deux points, trop indécises pour êlre concluantes : nous admettrons seulement qu'il y à là en jeu quelque action catalytique, sans la pré- ciser. C'est, il est vrai, une lacune, mais le fait reste, indiscutable : le gaz carbonique est décom- posé par les feuilles avec dégagement d’un volume égal d'oxygène. C'est à Boussingault que revient l'honneur d'avoir, pour la première fois, donné une explica- tion ralionnelle du phénomène chlorophyllien. Remarquant que l'oxyde de carbone n'est pas décomposé par les feuilles, il suppose que l’anhy- dride carbonique s’y dédouble seulement, comme il le fait par dissociation, en un volume d'oxyde de carbone et un demi-volume d'oxygène; pour fournir le complément nécessaire de ce gaz, il ima- gine ensuite qu'une molécule d'eau se décompose, de la même manière, en oxygène qui se dégage et en hydrogènequi,s’unissantaurésidu qu'alaissél'acide carbonique, donne un hydrate de carbone. D'où le processus classique : CO? — CO + 0 H°0 —H° + 0 n (CO -+ H?) — Cn Ha On. En vérilé, ces lrois réactions sont possibles : Berthelot, Dehérain et Maquenne ont montré que l’'anhydride carbonique et la vapeur d’eau, sous pression réduite, se dissocient à froid dans un appareil à effluves, sous l'influence de l'énergie électrique qui, dans une certaine mesure, est com- parable à l'énergie lumineuse. D'un autre côté, Thénard a fait voir que, toujours sous l’action de l’effiuve, l’oxyde de carbone et l'hydrogène se con- densent en un corps solide combustible : on peut donc bien former de la matière organique en four- nissant de l'énergie à un mélange d'acide carbo- nique et d’eau. Cependant, on ne voit encore pas sortir de cette réaction un hydrate de carbone défini, comme le glucose ou ses isomères, et sur- tout il répugne à l'esprit de voir une substance aussi simple que le gaz carbonique se convertir d’emblée en un produit de poids moléculaire aussi fort que celui des hexoses. En général, les corps se compliquent d'une manière progressive, et l’on ne saurait admettre qu'à cet égard les méthodes de la Nature diffèrent de nos méthodes artificielles; il doit donc y avoir, entre l'acide carbonique et les sucres, un ou plu- sieurs intermédiaires : c'est Baeyer qui l'a fait con- naître le premier, en émetlant la célèbre hypo- thèse qui porte son nom. Baeyer admet que l'anhydride carbonique com- mence par se transformer dans la plante en acide, ce qui est infiniment probable, puisque les solu- tions de ce gaz influencent les réactifs colorés, puis que cet acide est réduit, avec dégagement d'oxygène, à l’état d’aldéhyde formique, suscep- tible de condensation. Les réaclions fondamen- tales de la fonction chlorophyllienne deviennent alors : CO3H2 — 02 + CH20 n(CH20) = CH 20n, L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS 929 En dehors de l'expérience de Bach, à laquelle 1 favorable à la végétation lorsqu'on l’emploie à dose mous avons fait précédemment allusion, et dans laquelle cel auteur croil voir se former de l'aldé- hyde formique quand on expose au soleil une solu- tion d'acide carbonique additionnée de sels d'urane, il n'esl guère possible de reproduire la premiére de ces deux réaclions; mais, en revanche, rien n'est plus facile, en s'aidant de l’électrolyse, que de transformer l'acide carbonique en acide formique, le plus proche parent de l'aldéhyde en question. Quant à la seconde, sa réalité expérimentale est surabondamment établie par les recherches bien connues de Lüw et de Fischer; mais, avant d'appli- quer les conclusions de ces auteurs à la Biologie végétale, il importe d'examiner d'abord quelques objections qui ont été faites par Les physiologistes à Fhypotlhèse de Baeyer. Ces objections peuvent se résumer en deux prin- cipales : 1° l’aldéhyde formique ne se rencontre pas dans les plantes vivantes; 2° elle ne saurait s'y produire parce qu'elle est un poison de la cel- lule. La première de ces objections à été levée par différents observateurs, entre autres Pollacei, qui ont oblenu, en distillant des feuilles fraichement insolées, un liquide réducteur. donnant avec la fuchsine sullfureuse la réaction de Schiff et avec le sulfate acide de codéiue une coloralion violelte, comme l'aldéhyde formique. Ce composé rédue- teur ne se renconlre pas dans les plantes qui ont séjourné longlemps à l'ob-curilé, non plus que chez les champignons : il résulle donc bien de l'ac- tivité chlorophyllienne. D'un autre côté, on trouve dans le règne végélal les produits immédiats de transformation de l'aldé- hyde formique : l'acide correspondant y est fort répandu et l'alcool méthylique s'y trouve fréquem- ment à dose considérable, pouvant atteindre jusqu'à 600 Tous les alcools de fruits, d'après Wolf, en renfer- ment; enfin, on trouve dans les plantes nombre de corps oxyméthylés qui n'ont pu se former qu'avec le concours direct du même alcool. Il est donc certain que les végélaux élaborent des composés mélhyliques; la présence dans leurs cellules d'une trace d'aldéh\de formique a aujour- d'hui d'autant moins lieu de surprendre qu'elle a été reconnue dans lous les produits de cowbustion incomplète et jusque dans l'air almosphérique. La secon le objection semblait plus grave, et elle ke serait, en effet, si l'aldéhyde formique devait exister dans les plantes en proportion notable; mais elle ne s'y trouve, ainsi que nous venons de le dire, qu'en très pelite quantité, et l'expérience a montré que, loin d'être nuisible, ce corps devient du poids de la matière organique élaborée. suffisamment faible. Bokorny el Lüw ont vu les algues former de l'amidon sous l'influence du méthylal ou du mé- thanolsulfile de sodium : ce résullat est particuliè- rement intéressant, parce qu'il nous montre l'aldé- hyde formique fonclionnant dans la cellule comme l'acide carbouique lui-même. Bouilhac à reconou que les plantes supérieures, la moutarde, par exemple, bénéficient manifestement de l'addition au liquide nutritif de quelques goulles de formol: Nous pouvons donc admeltre comme élablies la présence de l’aldéhyde formique dans les plantes et sa compatibilité avec la vie cellulaire: cherchons maintenant à définir les réactions qui vont trans- former ce principe primordial en hydrales de car- bone fermentescibles et actifs snr la lumière pola- risée. 11 Les premiers essais de polymérisation de l'al- déhyde formique remontent à Boullerow, qui, traitant ce composé par la chaux, obtint un corps dextriniforme, inactif et non fermentescible, qu'il appela méthylénitane. Würlz, en essayant plus lard d'appliquer à l'aldé- hyde formique la méthode qui lui avait servi à découvrir l'aldol, fut encore moins heureux que Boutlerow; c'est seulement Lüw qui, après bien des essais infructueux, finit par isoler, en attaquant l'alléhyde formique par la magnésie et le plomb, un sucre partiellement fermentescible et d'ailleurs très impur : c'était le mé/hose qui, entre les mains de Fischer, devint le point de départ de la synthèse arlificielle de tous les sucres végélaux. En s'aidant de la phénylhydrazine, Fischer com- mence par séparer de ce mélange un hexose C'H°0", puis il le prépare en plus grande quantité avec l’aldéhyde glycérique ou l'acroléine, ce qui le conduit à l'appeler acrose. L'acrose présente lous les caractères extérieurs du lévulose, mais il est inuclif et ne fermente qu'à moilié. Fischer, se rappelant que la synthèse ne fournit jamais que des racémiques, essaye alors de le dédoubler en appliquant les méthodes de Pasteur. Sous l'influence de la levure, l’acrose prend un pouvoir rotaloire dextrogyre : il renferme donc bien des corps aclifs, mais ce résidu infermentes- cible ne répond à aucun des sucres naturels; alors Fischer s'efforce d'isoler son isomère optique. Il réduit l'acrose, de imanière à le transformer en mannile inactive, oxyde celle-ci, ce qui lui donne successivement le mannose el l'acide mannonique racémiques, enfin dédouble ce dernier par cristalli- sation de son sel de strychnine : on se trouve; celte 930 fois, en possession de deux acides mannoniques actifs, en sensinverse, quil est facile, par un retour en arrière, de ramener aux états antérieurs de mannoses, mannites et acroses actifs. Or, le mannose dextrogyre qui se forme ainsi est identique au séminose de Reiss, c'est-à-dire au sucre de corrozo; la mannite correspondante est identique à celle que l'on retire de la manne; enfin, l'acrose lévogyre est identique au lévulose des fruits ou de l'inuline : l’acrose primitif était un véritable racémique, inactif par compensation. La synthèse lotale des principaux sucres végé- taux est ainsi réalisée au laboratoire; voyons ce que nous pouvons en tirer d'intéressant pour la Biochimie végétale. Dans l'application à la Physiologie des résultats précédents, une première difficulté se présente : les méthodes de Fischer, comme toutes les mé- thodes artificielles, conduisent à des sucres racé- miques, landis que celles de la Nature donnent exclusivement des sucres actifs qui, dans la classe des hexoses et des hexiles, appartiennent tous à la série droite. Faut-il admettre, avec Pasteur, que la cellule, en raison de sa dissymétrie, est capable d'engendrer immédiatement des corps actifs ou, au contraire, supposer qu'elle élabore des racémiques dont la moitié gauche estaussitôt détruite, en sorte qu'elle ne nous offre plus que leur moitié droite ? ITT Dans l’état actuel de la science, on ne saurait concevoir que la matière se transforme chez les êtres vivants suivant d'autres lois que celles qui président à ses transformations in vitro; la pre- mière hypothèse est donc inadmissible, d'où il résulte que les plantes doivent nécessairement produire des racémiques, les dédoubler, puis enfin employer leurs composants à des usages en rapport avec la série à laquelle ils appartiennent. C'est aujourd'hui un fait bien connu que la cellule vivante est capable de faire un choix entre les isomères stéréochimiques qu'on lui fournit et qu'elle doit cette propriété à des diastases. Pasteur à depuis longtemps fait voir que les organismes inférieurs dédoublent les racémiques ; on sait que la zymase des levures n'agit que sur les dextrohexoses et n'atlaque pas leurs isomères de la série gauche; Fischer a montré que la maltase hydrolyse certains glucosides (série «) qui résistent à l’action de l'émulsine, que celle-ci, inversement, en dédouble d’autres (série 8) sur lesquels la mal- tase n'a point d'effet. Il est donc logique d'admettre que les végétaux dédoublent les racémiques qui prennent naissance dans leurs cellules, mais on ne peut qu'être surpris de voir que le processus cons- L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS 3 tant est ici juste l'inverse de celui qui s'observe avec la zymase : les seuls éléments qui disparais- sent sont ceux de la série gauche, c'est-à-dire ceux- là seuls qui résistent à l’action de cet enzyme. Ce n'est donc point la zymase qui préside chez les plantes au dédoublement nécessaire du lévulose racémique élaboré, mais bien une autre diastase, de nature inconnue, qui agit en sens contraire, c'est-à-dire respecte les sucres de la série droite pour n’atlaquer que ceux de la série gauche. Ces derniers étant, d'après loutes Les probabi- lités, détruits et parliellement convertis en acide carbonique, on voit une fois de plus combien est invraisemblable l'intervention, admise par God- lewski et Mazé, de la zymase dans la respiration normale des plantes vertes. Si nous observons, enfin, que l’aldéhyde glycé- rique, qui donne par polymérisation les mêmes produits que l’aldéhyde formique, résulte très probablement, comme les hexoses, d'une conden- sation de cette dernière, nous sommes conduits à admettre le schéma suivant comme représentant mieux que tout autre le chimisme de la fonction chlorophyllienne : Ac. carbonique AIld. formique —+ Ald. glycérique — Glycérine SOU r. Lévulose. —+ d. Lévulose (assimilé) 1. Lévulose <— (transformé) Il ne nous reste plus qu'à rechercher le sort des deux lévuloses aclifs dans la cellule vivante; voyons d'abord comment le composé droit arrive à s’y transformer en glucose el en mannose, égale- ment répandus dans les sucs végétaux. Le phéno- mène est simple, et nous allons en avoir de suite une explication en nous reportant aux expériences de Fischer. JV Lorsqu'on réduit le lévulose ordinaire par l'hy- drogène naissant, on obtient, ainsi qu'il arrive avec toutes les acétones dissymétriques, un mé- lange de deux hexites stéréoisomères, la mannite et la sorbite droites : ces deux corps sont, d’ailleurs, identiques à la mannite de la manne el à la sor- bite des Rosacées. Si, maintenant, on oxyde ces pro- duits, on voit se former, d’une part du mannose, d'autre part du glucose, appartenant toujours à la série droite, el accompagnés, dans l'un el l’autre cas, de d-lévulose régénéré, Ces deux réaclions, qui se résument en une ré- duction et une oxydation, sont de l’ordre de celles qui se produisent le plus fréquemment chez les plantes ; il est donc permis de supposer que c'està elles qu'est due, au moins en partie, l’'isomérisation L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS a. 931 du d-lévulose. Il y a plus : Lobry de Bruyn a dé- montré que, sous certaines influences,-par exemple celle des alcalis étendus, les trois sucres en ques- tion, à savoir le lévulose, le mannose et le glucose, se convertissent mutuellement les uns en les autres, de manière à constiluer un mélange en équilibre. La facililé extrême avec laquelle s’effec- tuent ces transformations, dès la température ordi- naire, porle à croire qu'elles s'accomplissent aussi au cours de la végélalion, sans doute avec le con- cours de quelque diastase inconnue ; dès lors, l’iso- mérisation naturelle des hexoses droits pourra s'écrire de la manière suivante : d-Lévalose par | rédurt. par | diastase d-mannite d-sorbite d-mannose <— d-glucose par|oxyd. d-mannose par| oxyd, d-glucose Le phénomène de Lobry de Bruÿyn, que nous attribuons ici à une diastase, est d'autant plus intéressant qu'il explique sans peine le transport de l’un quelconque de ces trois sucres, à l’exelu- sion des deux autres, vers les points de la plante où il vient à changer de forme, par exemple à se condenser : l'équilibre étant alors rompu, ses deux isomères en reproduisent une quantité équivalente, qui s'isomérise à nouveau, el ainsi de suite jusqu'à épuisement complet de la réserve initiale. C'est ainsi certainement que s'accumulent le d-glucose, sous forme d’amidon, dans les pommes de terre ou les grains de céréales, le d-mannose, sous forme de mannanes, dans les graines de pal- miers, enfin le d-fructose, sous forme d'inuline, dans les tubercules de dahlia ou de topinambour. La transformation biochimique d'un sucre en un - autre, stéréoisomère du premier, ne se borne pas à celle dont nous venons de donner un exemple - frappant ; nous pouvons en citer un autre, fourni “par Bertrand, qui ne présente pas moins d'intérêt. —._ Lorsqu'on fait agir le Bacterium xylinum sur une solution de Wd-sorbite, celle-ci s'oxyde et se change en d-sorbose, lequel, réduit par l'hydro- “gène naissant, donne, comme le lévulose, un mé- _lange de deux hexites : l’une est identique à la d-sorbite primitive, l'autre à un produit antérieu- rement préparé par Fischer et désigné par lui sous | “le nom de d-1dite. Or, la d-idite accompagne la d-sorbite dans les baies de sorbier; elle n'a pu évidemment s’y former que par transformation de ‘Son isomère, suivant le mécanisme que nous ve- nons de décrire. Celui-ci, déjà reconnu à propos de 'isomérisation de la mannite, est donc d'ordre “général en Physiologie; la seule condition qu'exige Son fonctionnement est une disposition particulière des atomes dans la molécule, qu'il est d'ordinaire possible de connaître à l'avance et qui souvent empêche la réaction d'être réversible. Cette condition, qui résulte des travaux de Ber- trand, est la présence, sur les atomes de carbone 2 et 3, de deux oxhydryles alcooliques secondaires voisins, c'està-dire en position relalive çcis ou trans. Elle est remplie par la d-mannite : HO H OH OH cHeoH— CCC 0 cou ou OH k il et la d-sorbite : OH H OH OI Alle" CIFOH — C— C—C—C— CIHOH; AGE te H OH H°H elle ne l’est plus par la d-idite : ON H OH H PE Veil CH'0H— CCC C— CH'ON, | [PET A H OH H OH qui, en effet, reste inattaquée dans les bouillons de culture du Z. xylinum. Cherchons maintenant ce que deviennent, dans les plantes, les hexoses de la série gauche, que nous avons vus disparaitre aussitôt après leur forma- tion; sans doute, ils servent en partie à alimenter la fonction respiratoire, mais, avant d'atteindre la forme ullime de gaz carbonique et d’eau, ils se convertissent vraisemblablement en produits inter- médiaires, de moins en moins riches en carbone, dont on doit retrouver quelque lrace dans le suc cellulaire. Ces intermédiaires existent et les plantes en ren- ferment même des proportions considérables : ce sont les pentoses, qui tous, dans la Nature, appar- tiennent à la série gauche, alors qu'au contraire leurs homologues supérieurs appartiennent à la série droite. Cette opposition éminemment sug- gestive résulte du seul examen de leurs formules : OH H OH OI d-sorbile CHOH l L L — L CIEOH ï on 1 1 M OEEUH I-sorbite CHON — c — l — l — l — CHONH ot in oH OH OL He H Larabinose CHO — d — L _— ; — CH°OH [LAC A Aa H OH OH 932 HO 1-xylose CH?0OH — l — l — ! — CHO oh il on Alors qu'il est impossible d'établir aucun rappro- chement entre la formule de la d-sorbite et celles des pentoses, on voit immédiatement que la struc- ture géométrique de ceux-ci est identique à celle que présentent dans la /-sorbite les trois derniers ou les trois premiers atomes de carbone asymé- triques ; d’où cetle conclusion nécessaire que le l-arabinose dérive de la /sorbite (ou, ce qui revient au même, dans ce cas particulier, de la mannite, du mannose, du glucose ou du lévulose de la série gauche) par suppression de son premier groupe hydrocarboné, landis que le /-xylose en dérive par suppression du dernier. En d'autres termes, la /-sorbite se change en ara- binose ou en xylose suivant qu'elle commence à brûler par l'un ou l'autre bout de sa chaine ; les sucres droits servent à consliluer le squelelte cellu- losique et les réserves amylacées de la plante, les sucres gauches à fournir la substance mère des hémicelluloses el des gommes. C'est sans doute de la même manière, mais par une combustion plus avancée encore, que se forme l'érythrite inactive ; il est alors indifférent que l’on parte de la mannite gauche ou de son isomère droit. Ces conceptions répondent toutes à des réalités expérimentales : rien n'est, en effet, plus facile, par la méthode de Ruff, que de convertir le d-glucose en d-arabinose et le /-arabinose en i-érythrite. IL suffit de les oxyder à deux reprises différentes, d'abord par le brome et l’eau, puis par l’eau oxy- génée, en présence d'un sel de fer, ce qui n'est, en principe, qu'une imitation de ce qui se passe au cours de la respiration normale : CHHBOEEID ICHÈO! d-Glucose. Ac. d-gluconique. GSH07 + O0 = CO? + H°0 + CH!0° Ac. d-gluconique. d-Arabinose, Le /-glucose se comportant sans aucun doute comme son isomère droit, nous retrouvons ici, avec la plus grande netteté, le processus général de la respiralion aérobie: la matière neutre fixe l'oxygène pour donner un acide, lequel se décompose ulté- rieurement, avec mise en liberté d'anhydride car- bonique. Le problème de la synthèse naturelle des sucres simples, y compris la glycérine, se trouve ainsi complèlement résolu; nous allons voir mainte- nant comment il peut s’en produire de plus com- pliqués. L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS il Cherchons d'abord l'origine des sucres qui, comme la perséile ou la volémite, renferment plus de six atomes de carbone. Nous avons vu que les hexoses se forment direc- tement par aldolisalion de six molécuies d'aldéhyde formique ; le mode de liaison de ces groupes sem- blables étant le même pour lous, il y atout lieu de croire que, malgré la prédominance manifeste du groupement en C, la même réaclion peut s’accom- plir indéfiniment : il suffit alors d'imaginer qu'une, deux ou trois molécules d'aldéhyde formique viennent réagir sur les hexoses précé leminent formés pour concevoir la produclion possible d'heptoses, d'octoses ou de nonoses. En fait, il n'est pas possible d'unir directement les sucres réducteurs à l’aldéhyde formique, mais on arrive sans peine à les combiner avec l’acide cyanhydrique, qui est le nitrile correspondant. C'est alors la réaction de Kiliani, au moyen de laquelle Fischer a pu reproduire artificiellement la perséite ou sucre d'avocalier : C°H205 + CAZH — C'H#06C Az d-Maunose. Nitrile heplonique. CSH#O6CAz + 2H°0 = AzH* + C'H4OS Nitrile heptonique. Ac. heptonique, C'H4O8 + 4H — H?0 + C’HO* Ac. heptonique. Perséile. La synthèse de la volémite pourrait certainement s'effectuer par les mêmes moyens, mais l’expé- rience n’a pas élé faite et l'on ne sait pas encore à quel hexose ce sucre doit être rattaché. Quant à las production artificielle des hydrates de carbone en C* ou C*, elle n’a, jusqu'à présent, qu'un intérêt théorique, car on n'en connait dans la Nature aucun exemple bien défini: la prétendue octite des Hosacées, qui accompagne la sorbite dans le vin de sorbes, n’est autre chose, d’après Bertrand, que l'ancienne d-idite de Fischer, c'est-à-dire une hexite isomère de la mannite et de la sorbitle. La synthèse des glucosides découle nécessaire- ment de celle des monoses, mais on ignore sous quelle influence ceux-ci arrivent, dans la cellule végétale, à s'unir entre eux ou à d’autres composés, Il y a là sans doule en jeu des diastases déshydraz- tantes, et certains pensent, notamment dans le cas du maltose, que celles-ci sont identiques aux dias= Lases hydrolysantes déjà connues ; en fait, on na pu jusqu'ici reproduire par synthèse aucun des polyoses naturels, ni par voie chimique, ni pa l'emploi des enzymes végélaux. Certains glucosides complexes, la salicine par exemple, peuvent être préparés arlificiellement, e réunissant à nouveau les produits de leur hydrolyses L. MAQUENNE — LA SYNTHÈSE VÉGÉTALE DES CORPS HYDROCARBONÉS 933 mais alors une nouvelle question se pose : dans la plupart de ces corps on trouve, à côté des sucres véritables à chaîne longue, d’autres substances à structure cyclique, le plus souvent hexagonale comme celle des hydrocarbures du goudron; d'où viennent-ils el, s'ils ont encore la même origine que les sucres, comment dérivent-ils de ceux-ci? Pour répondre à cette question, il fautrechercher d'abord s’il existe dans la Nature des principes immédiats possédant à la fois les propriétés des sucres et la constitution des corps aromatiques, - puis essayer de les reproduire à leur tour. Or, on connait de semblables composés : ce sont la quercite et les inosites. Les inosiles, qui existent sous les quatre formes inactive, gauche, droile et racémique, répondent à la même formule CH®0° que les hexoses; d'autre part, elles présentent lousles caractères des hexites, sauf que, par réduction ou oxydation, elles fournis- sent des dérivés aromatiques tels que le phénol ordinaire, l’hexaphénol C'H'OS et la tétraoxyqui- none C’H'O°. Ce sont donc de véritables sucres à noyau hexagonal, intermédiaires, par conséquent, entre la série grasse et la série cyclique, dont il suffirait de connaître la genèse pour expliquer celle de tous les corps aromatiques végétaux. Malheureusement, on n’a pas encore pu préparer artificiellement l'inosite; l’aldolisation interne du glucose, qui devrait théoriquement la fournir, ne réussit pas, el l'on n'a pu déceler sa présence dans les produits de condensation de l’aldéhyde for- mique ou du glycérose. La seule indicalion que l’on possède à ce sujet résulte de la synthèse, effectuée par Baeyer, de glycols dérivés comme l’inosite du cyclohexane ; nous n’en indiquerons ici que le prin- cipe. L’acide succinique, qui est en rapport étroit avec l’acide tartrique, et par conséquent avec l’érythrile, se laisse facilement condenser en un dicéloacide hexagonal, l'acide succinylsuccinique, qui, dans certaines conditions, se change en quinile ou cy- clohexanediol ŒH°0*. Ce corps, qui existe sous deux formes isomériques, cis et cis-{rans, se rap- proche singulièrement de l'inosite; on peut dès lors supposer que cette dernière dérive de l'acide tartrique, de la même manière que la quinite dérive de l'acide succinique, c'est-à-dire par con- densation, hydrogénation et perte de deux carbo- nyles. L'expérience, non encore effectuée, montrera Si cette manière de voir est exacte. Une autre relation, fort curieuse et des plus inattendues, entre les sucres vrais et les composés eycliques, résulte de l’élude de la perséite ou man- noheptite C'H"O'. Lorsqu'on réduit à fond une hexite, en la faisant bouillir, par exemple, avec de l'acide iodhydrique, il se forme d'ordinaire un REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, hydrocarbure ou un iodure à chaine longue, de même structure que le sucre primitif; l'hydrocar- bure est identique à l’hexane des pétroles améri- cains. Avec la perséite, la réaction est tout autre : la chaîne se ferme et l’on obtient le même hydro- carbure C‘'H° qui se trouve dans les produits de la distillation sèche des résines, facile à transformer en cycloheptane CH", lequel enfin est identique à l'un des composants du pétrole russe, Celui-ci aurait-il donc une origine végétale ? Nous ne saurions l'affirmer, mais il faut recon- naître qu'une pareille transformation est de nature à intéresser autant la Géologie organique que la Physiologie. Quoi qu'il.en soit, l'hydrocarbure C'H° est analogue par toutes ses propriétés aux terpènes, el il est assez vraisemblable que ceux-ci prennent naissance dans les plantes par une réac- tion du même ordre, portant sur les homologues supérieurs, non encore isolés, de la perséite. L’ob- tention artificielle de ceux-ci est trop pénible pour que nous puissions vérifier une semblable hypo- thèse par de nouvelles expériences; celle que nous venons de décrire n’en donne pas moins la preuve que cerlains composés gras, et en particulier les sucres de haut poids moléculaire, sont capables, en dehors de tout effet de pyrogénation, de se convertir en corps cycliques dont un seul, faisant souche, peut engendrer tous les autres. VII Cela doit nous suffire pour le moment; l'état actuel de la Chimie biologique ne nous permet pas, en effet, d'aller plus loin dans cette voie. Nous aurions pu, sans doute, exposer en passant ce que l’on sait ou ce que l’on admet touchant la synthèse des acides végétaux, celle de leurs éthers naturels ou des corps à chaîne arborescente tels que l’alcool amylique ou l'acide citrique; nous ne l'avons pas fait parce que ces questions sont d'ordre secon- daire vis-à-vis de celles que nous avons traitées, un peu aussi dans la crainte de donner à cette étude une tournure trop exclusivement chimique. Il est indiscutable que la Chimie pure doit rester le guide constant du physiologiste, que celui-ci s'expose à de graves mécomptes s'il n’en observe pas constamment les préceptes avec la plus grande attention; mais il est aussi certain qu’elle seule ne saurait expliquer tous les phénomènes qui se passent à l'intérieur de la cellule vivante : celle-ci, les réactions les plus complexes s'accom- plissent avec une facilité qui étonne; tout nous y apparail en voie d'évolution, de transformation, comme si les aptitudes réactionnelles de la matière s'y trouvaient exaltées, étendues bien au delà des limites que la Chimie nous apprend à connaitre. 21* dans P. LETHEULE — LA LAMPE ET LA SOUPAPE A MERCURE DE COOPER HEWITT Nous savons aujourd'hui que cet élat particulier de la matière est dû, chez les êtres vivants, à son contact avec des diastases à fonctions multiples, qui remplissent dans la cellule le même rôle que nos réactifs dits prédisposants; c’est donc sur l'étude de ces corps singuliers, les plus caractéris- tiques peut-être de la vie, puisque nous les voyons se former sur place suivant les besoins du moment ou la composition du milieu, que doivent surtoul, à l'heure qu'il est, porter les efforts des cher- cheurs. Ici la Chimie pure ne peut nous offrir qu'un médiocre secours, car on ne sait pas encore sépa- rer les diastases, sans les détruire, des matières qui les accompagnent; mais l'énergie de leurs effets de catalyse tend à les faire considérer comme de puissants agents d'ionisation, et, à ce titre, leur examen préliminaire rentre dans le cadre des études de la Chimie physique. C'est par conséquent vers celle-ci qu'il faut dé- sormais nous tourner. Espérons que cet appel des chimistes et des physiologistes sera entendu; nous avons le ferme espoir que les recherches dirigées dans ce sens ne resteront pas infructueuses el qu'en nous faisant connaître la nature des actions diastasiques, elles nous dévoileront bientôt l’un des secrets les plus intimes de l'activité cellulaire *. L. Maquenne, Membre de l'Institut, Professeur au Muséum d'Histoire naturelle. LA LAMPE ET LA SOUPAPE À Depuis que des savants ellingénieurs américains, au premier rang desquels M. Cooper Hewitt, pour- suivent sans interruption leurs recherches sur les applications pratiques des tubes à vapeur de mer- cure, aucun exposé méthodique n’a été donné de leurs travaux et de leurs importantes découvertes, qui cependant ont conduit à la création d'intéres- sanls appareils d'éclairage, de redresseurs nou- veaux de courants alternatifs, ainsi qu'à des per- fectionnements dans le mode d'interruption de ces courants et dans leur utilisation pour la production réqulière et industrielle des courants à haute fre- quence. M. Maurice Leblanc vient de faire, devant la Société internationale des Electriciens, l'exposé ma- gistral des travaux et des résultats des recherches de M. Cooper Hewitt et de ses collaborateurs. Nous allons le résumer ci-après. I. — RECHERCHES SUR LES TUBES A GAZ RARÉFIÉ. Considérant d'abord les tubes à gaz raréfié de haute conduectibilité, M. Maurice Leblanc rappelle que, dans un tube à gaz raréfié, le gaz se comporte comme un diélectrique parfait, aussi longtemps que le champ électrique n'a pas atteint une valeur déterminée, dépendant de la nature et de la pression du gaz, et que, dès que cette valeur est atteinte, le gaz perd brusquement son pouvoir diélectrique el donne passage au courant comme un vérilable can- ducteur. Mais, contrairement à l'opinion reçue que la présence de gaz raréfié ne peut produire qu'un accroissement de résistance et qu'un haut degré de vide rend le passage du courant plus difficile, les MERCURE DE COOPER HEWITT expériences de M. Cooper Hewitt établissent qu'un vide élevé favorise le fonctionnement et que seul l'amorçage devient plus difficile. Aussi les tubes sur lesquels l'inventeur a poursuivi ses recherches en vue d'utilisation pratique sont-ils des tubes où le vide est poussé au plus haut degré. Un second fait mis en évidence par les expériences de M. Cooper Hewilt vise la résistance éprouvée par le courant à la cathode du tube : propriété que M. Cooper Hewitt a mise en évidence et désignée sous le nom de « répugnance de la cathode ». Heu- reusement, pour les applicalions pratiques des tubes à vide, il a découvert que l'action du courant a pour effet de désagréger la cathode, et qu'après un amorcçage préalable, celle-ci perd sa répugnance, au point de pouvoir donner passage au courant sous une tension de quelques volts seulement, soit 5 volts environ d'après les recherches du savant américain, Comme l'anode et la colonne gazeuse en absorbent à peine le double, la lampe peut fonc- tionner sous une tension de 14 volts, pourvu que les conditions générales de stabilité favorisent son fonctionnement continu, c'est-à-dire que les dimi- nutions de courant devront correspondre à un accroissement correctif dela tension, que la cathode devra se désagréger et se reconstituer d'une ma- nière continue, etc. $ Bien que les propriétés mentionnées soient géné- k rales, les recherches de M. Cooper Hewitt ont permis de déterminer rapidement les substances f qui remplissent le mieux les conditions voulues. Le graphite est poreux, d’une désagrégation facile @ ———————_——]_]—— ——, —_—— — —— ! Lecons professées au Muséum d'Histoire naturelle dun 16 mai au 6 juin 1905. { P. LETHEULE — LA LAMPE ET LA SOUPAPE A MERCURE DE COOPER HEWITT 935 mais il se transforme en poussière; le potassium et le sodium donnent des vapeurs d'une clarté satisfaisante, mais qui corrodent le verre. La plu- part des sels donnent des vapeurs acides, qui désa- “grègent l'anode du tube. Bref, le mercure a paru | étrele plus satisfaisant des éléments susceptibles de constituer la cathode, en raison de sa facile désa- grégation et des propriétés de sa vapeur. Quant à lanode, qui ne doit pas se désagréger, M. Cooper Hewitt la constitue d’une simple électrode de fer. Le mercure aurait pu être utilisé comme anode, mais l’échauffement de l’anode estsupérieur encore à celui de la cathode, e le mercure aurait distillé de l’une à l’autre électrode, ce qu'il était mieux d'éviter. Ce qui précède nous paraît résumer de-manière suffisante les recherches de M. Cooper Hewitt sur les tubes à vide, et particulièrement sur les tubes à mercure, dont on pourra dès lors comprendre “nement. II. — AMORÇAGE. Cette opération exige une décharge entre l'anode et la cathode, pour la désagrégation de celle-ci et des gaz à traverser. IL est évident qu'une tension élevée est nécessaire, mais qu'il suffit d'en dis- Mig: +. — Dispositif d’amorçage par l'emploi d'une self- Induction. — J, bobine de self-induction : U, interrupteur: R; R', résistances: f, condensateur: 4, anode:; A, tube. on l'emmagasine préalablement de manière conve- mable, dans une self-induction, par exemple : la Jigure 1 représente l'emploi d'une self-induction, | laquelle on donne passage au courant en Lo mieux le mode d'amorçage et le mode de fonction- | fermant d'abord l'interrupteur U pour permettre de charger la bobine de self-induclion J. L'ouverture de cet interrupteur donne ensuite lieu à une décharge de self, qui suffit pour effectuer l'amor- | | Fig. 2. — Autre disposilif d'amortage. — à, anode; ec, ca- thode; b, anode auxiliaire: f, condensateur; V, V’, inter- rupteurs; R, R', résistances: J, bobine de self. cage. Cependant, cette décharge est facilitée, dans la disposition de la figure 1, par l'emploi du con- densateur / (formé simplement d'une armature en papier d'étain) relié à l'anode a, et entourant l’autre armature constituée par la cathode elle- même, la surface intermédiaire du tube servant de diélectrique. Ce condensateur a encore pour fonc- tion d'utiliser mieux la décharge de la bobine de self, en l’empêchant de se faire par l'amorcage d'un arc aux bornes de l'interrupteur U, ce qui assure une rupture plus rapide par cet interrupteur et un survoltage plus élevé des électrodes à l’amor- çage. D'après M. Maurice Leblanc, l'expérience montre que la quantité d'énergie qu'il faut emmagasiner dans la bobine de self-induction J, pour déterminer l'amorcage, doit être environ cinq fois plus grande lorsque ce condensateur est supprimé que lorsqu'il est rétabli. Mais la disposition de la figure 2 exige encore uve tension moins élevée et facilile grandement l'amorcage, en affectant à celui-ci une anode auxi- liaire D très voisine de la cathode, de sorte que l'arc produit a seulement la longueur » € au lieu d’avoir la longueur a c. Les vapeurs déga- gées en ec par cet arc d'amorçage suffisent à rem- plir le tube et à le rendre conducteur. Les autres dispositions de la figure 2 sont, d'ailleurs, iden- 936 P. LETHEULE — LA LAMPE ET LA SOUPAPE A MERCURE DE COOPER HEWITT tiques à celles de la figure 1, à l'adjonction près d’un interrupteur U' deskiné à mettre hors circuit la cathode auxiliaire dès qu'elle devient inutile. L'un et l’autre modes d’amorçage sont entrés dans la pratique dans les cas où le mode d’emploi des tubes ne permet pas d’en effectuer le déplacement; mais un mode d’amorçage beaucoup plus simple a été adopté dans le cas où on peut le faire sans inconvénient : on effectue alors l'amorçage en inclinant simplement le tube de facon qu'un mince filet de mercure vienne joindre l'anode à la cathode et établisse un court circuit. Le courant passe : dès qu’on redresse le tube, le court circuit est inter- rompu, un arc jaillit à l’intérieur et détermine l'amorçage immédiat. Cette dernière méthode supprime tout appareil- lage de mise en marche, la résistance et la self- induction restant seules en série avec la lampe, dont elles sont destinées à assurer la stabilité de fonctionnement. LIT. — FONCTIONNEMENT. M. Maurice Leblanc expose les conditions de stabilité, et mentionne comme suit la difficulté qu'il fallait résoudre et qui nécessitait l'installation d’une self-induclion ou d'une résistance en série avec la lampe, toutes deux pratiquement utilisées par M. Cooper Hewitt. MM. Wiedeman, Ruhlmann et Cantor ont, en effet, montré qu'un courant traversant un gaz raréfié, lorsqu'il est fourni par une source à vol- tage constant, est toujours discontinu. Il était donc nécessaire de le forcer à demeurer continu en fai- sant croître automatiquement le voltage aux bornes du tube, lorsque l'intensité diminuait, et réciproquement. M. Cooper Hewitt y est arrivé en montant en série avec chacun de ses tubes une résistance ou une bobine de self-induction. Nous ne citerons que pour mémoire la partie de Ja conférence relative à l'étude spéciale de la con- ductibilité des tubes à vide et à cathode de mer- cure, et nous ne signalerons qu'en passant un phé- nomène découvert par M. Cooper Hewitt dans sa recherche de l'influence d'un champ magnétique sur ces tubes à vide. Ayant eu l’idée d'approcher un aimant d’une lampe en fonctionnement, il cons- tata qu'une flamme, dirigée suivant les lignes de force, émanait alors de la tache brillante consti- tuant la zone de désagrégation de la cathode, et venait s’écraser contre les parois du tube, en un point où se manifestait un vif dégagement de cha-. leur. î De plus, la colonne lumineuse subsistait entre l’anode et la cathode, mais elle contournait cette flamme et affectait la forme d'une hélice, IV. — APPLICATIONS. Plus importantes sont les applications pratiques qu'il a tirées de ces expériences, et que nous allons. successivement passer en revue dans l'ordre sui vant : 1° Éclairage par les lampes à vapeur de mer cure ; . 2° Redressement des courants par les soupapes électriques ; 3° Production industrielle des courants de haute fréquence par les exploseurs Cooper Hewitt; 4° Interruption des circuits à courants alternatifs | par interrupteurs à mercure. $ 1. — Lampe à vapeur de mercure. Les tubes Cooper Hewitt s’illuminent sous l'effet du passage du courant, et, si le vide n’y a pas étém poussé à un très haut degré, leur éclairage a les« couleurs du spectre des gaz résiduels; si le vide am élé poussé très loin, il cesse par suite de la vapori= sation du mercure‘, et la décharge illumine le tube d'une vapeur verte, caractéristique du spectre de ce métal. Cet éclairage dénature complètement less couleurs, donne un aspect cadavérique aux per sonnes, mais offre l'avantage de réaliser uné grande économie de courant et d'éliminer toule fatigue physiologique. * On a cherché à améliorer la couleur verte de I@x lumière en superposant au spectre du mercure celui d'un autre gaz coexistant dans le tube avecla vapeur de mercure; mais M. Cooper Hewitt am trouvé que l’une ou l’autre substance prend tous jours une prépondérance et qu'il est impossible de superposer les spectres, ce que M. Maurice Leblane exprime comme suit : « Il semble que le couranb demande dele transporter, suivant les cas, de prém férence aux ions de l’un ou l’autre des gaz vapeurs qui remplissent le tube, au lieu delle demander à plusieurs d’entre eux à la fois, » M. Maurice Leblanc signale une tentative substitution de l’amalgame de potassium au me cure lui-même, toujours dans le but de superposem le spectre rouge du potassium au spectre vert du mercure. Il en est résulté simplement une colorä tion rouge de la partie supérieure du tube sur faible longueur de 2 centimètres, le reste du Lubes demeurant vert, en raison de la prépondérances immédiatement prise par le mercure vaporisé. D'où la conclusion que M. Maurice Leblanc tire de expériences dans les termes suivants : « Comme ne saurait maintenir une lampe électrique dans la glace, si l'on veut employer ces tubes à ! À moins qu'on ne s'oppose à cette vaporisation en refroidissant le tube dans la glace. P. LETHEULE — LA LAMPE ET LA SOUPAPE A MERCURE DE COOPER HEWITT 937 raréfié et à cathode de mercure comme appareils d'éclairage, on doit accepter une lumière verte correspondant au spectre du mercure. » Signalons, en passant, les effets calmants des radiations émanant de ces lampes, et aussi l’abon- dance des rayons ultra-violets, qui trouveraient leur application en médecine si l’on prenait soin de substituer au verre, qui absorbe ces rayons, des substances telles que le quartz ou toute autre substance non absorbante pour ces rayons. D'après M. Maurice Leblanc, les lampes normales de M. Cooper Hewitt ne consomment que 0,45 watt par bougie, en tenant compte de la perte d'énergie dans les résistances inductives qui les accom- pagnent. Si l’on consent une perte de 25 °/, ‘dans la lumière produite, on peut la mélanger de rayons rouges, en enveloppant les lampes avec une étofte de soie imprégnée d’une substance ayant une vive fluorescence rouge, telle que la rhodamine. Dans ces conditions, les personnes recouvrent leur aspect naturel. La durée moyenne de ces lampes est de cinq mille heures. L'intensité pour laquelle elles sont construites est de 3,5 ampères. $ 2, — Soupapes électriques. M. Maurice Leblanc a défini soupape électrique «un circuit à travers lequel une force électromotrice alternative ne peut faire passer que des courants d'un sens déterminé ». Les tubes à cathode de mercure présentent cette propriété, mais le pas- sage au zéro des ondes de courant rétablirait la répugnance de la cathode si l'on ne prenait le soin de la maintenir en état de désagrégation par une source auxiliaire, ce qui nécessite pour le courant alternatif simple l'emploi d’une batterie à 14 volls branchée entre la cathode à désagréger et une ‘anode auxiliaire voisine D (fig. 3). Cette nécessité, due à l'annulalion du courant alternatif simple, n'existe plus avec les courants polyphasés, puisque Jes courants des différentes phases ne s’annulent “jamais simultanément. Celle propriété des courants polyphasés dispense d’une batterie d’accumulateurs “et d'une anode auxiliaire ; l'amorçage seul nécessite la présence d'une batterie appliquée aux deux “électrodes, et l'annulation des zéros de courant se fait par l'addition des ondes des différentes phases, et ne nécessite même pas l'emploi d'une selt- induction de réglage. Dans la transformation de courants triphasés par exemple, on constitue avec les enroulements un point neutre du système triphasé, les trois bornes du transformateur en étoile aboutissant à trois anodes, et le courant continu étant recueilli entre la cathode unique et le point neutre. Le redressement des courants polyphasés repré- sente aussi une meilleure utilisation de l’alterna- teur que le redressement du courant alternatif simple; qui n'utilise que les ondes d'un sens donné, à moins qu'on ne réalise avec les redres- seurs Cooper Hewitt un montage analogue à celui des soupapes de Graetz. D'après M. Maurice Leblanc, M. Cooper Hewitt a réussi à faire des redresseurs de ce système ca- pables de débiter un courant continu de 30 am- pères sous 500 volts et dont le rendement s'élève à 98 °/,. Tout fait espérer que ces résultats seront de beaucoup dépassés dans l'avenir, lorsqu'on aura définitivement réussi à remplacer les ampoules en verre par des ampoules métalliques. Les services que rendront ces appareils, lors- qu'ils seront devenus tout à fait industriels, seront immenses. Ils permettent, en effet, de redresser des cou- rants ayant la fréquence de ceux de Hertz, c'est-à- | Nes. RES ET) | NE —< / | | NE SA) | | Ge RAA HN OS sde d ï : “ nt D Fig. 3. — Soupape électrique Cooper-Hewitt. — a, anode; e, cathode; b, anode auxiliaire; f, condensateur; B, D, bat- teries; E, bobine de self. dire des courants capables de transmettre de l'énergie sans fil, au lieu de transmettre seulement des messages. En supposant que cela ne puisse se faire qu'à petite distance, il serait déjà fort intéressant de pouvoir transmettre de l'énergie à des voitures automobiles, au moyen d'une simpleligne parallèle à la route, par induction et sans contact direct, Ces appareils permettraient enfin de redresser des courants alternatifs, sans se servir de collec- teur, ce qui constituerait un grand progrès pour l'industrie électrique. $ 3. — Exploseurs. Nous reproduirons le résumé suivant du rôle des exploseurs et du rôle des interrupteurs pour cou- rants alternatifs : La production de courants de haute fréquence par la décharge des condensateurs rend désirable la restitution à ceux-ci, au bout de chaque demi- période de courant, de l'énergie qu'ils viennent de fournir. En opérant ainsi, d'après M. Maurice Le- blane, on peut obtenir des courants dont l'inten- 938 P. LETHEULE — LA LAMPE ET LA SOUPAPE A MERCURE DE COOPER HEWIITT sité efficace soit toujours constante, et dont les variations d'intensité, pendant la durée de chaque demi-période, suivent très sensiblement la loi sinusoïdale. Une ampoule comportant deux simples électrodes de mercure permet de réaliser cet appa- reil d’une manière salisfaisante en permettant : 1° Le commencement de la charge, par l’amor- cage d’un arc entre ses électrodes dans des condi- tions de tension toujours les mêmes; 2° Le passage du courant de charge sans chute de tension appréciable une fois l'amorçage établi; 3° La cessation de charge et le désamorcçage automatique lors du passage du courant par zéro. La tension nécessaire pour faire jaillir l'arc peut être, par exemple, de 10.000 à 20.000 volts, suivant le degré de vide, et cette limile peut être mainle- nue constante, si le tube est soumis à un refroidis- sement qui s'oppose à la vaporisation du mercure. La tension après l’amorcage peut ensuite être réduite à 14 volts environ, et le passage du courant par zéro rétablit la répugnance de la cathode. Des courants de 100.000 périodes par seconde ont pu être ainsi obtenus et leur régularité a été vérifiée par l'emploi d'un miroir tournant. M. Maurice Leblanc, loin de considérer cette fréquence comme une limite, émet les conclusions ci-dessous : « Cet appareil doit permettre de produire, indus- triellement et avec un très bon rendement, des courants alternatifs de haute fréquence, d'allure aussi régulière que ceux fournis par les alter- nateurs. La fréquence 10° est beaucoup trop faible pour qu'on puisse transmettre sans fil de l'énergie à grande distance; mais elle permet de la trans- meltre, par induction, à quelques mètres d'une ligne parcourue par un courant de cette fréquence. On a. reconnu expérimentalement la possibilité de transmettre un courant de haute fréquence à grande distance, le long d'une ligne électrique, sans déterminer de surlensions dangereuses. Il suffit, pour cela, de disposer, de distance en dis- tance, des bobines de self-induction montées en dérivation entre les conducteurs d'aller et de retour, en les dimensionnant convenablement. $S 4. S — Interrupteur pour courants alternatifs. Cette application est peut-être la plus immédiate et la plus modeste, celle aussi qui nécessite le moins de commentaires. Elle présente toutefois un caractère qu'il importe de faire ressortir : elle évite l'interruption brusque, qui peut offrir des désavantages dans de nombreux cas pratiques, eb elle permet encore, une fois amorcé l'arc de rup* ture, de n'effectuer la rupture définitive qu'au passage à zéro du courant; par suite, la cathodé recouvre immédiatement sa répugnance à ce mo ment même. V — ConcLusions. Nous ne pouvons donner de meilleure conclu sion à cette étude que d'emprunter à l’auteur lui même le résumé que nous reproduisons ci-des SOUS : - « Nous sommes heureux d'avoir pu appeler l'at tention sur les travaux de M. Cooper Hewitt. « Ila montré que, contrairement à une opinion répandue, un tube à vide conduit d'autant mieux le courant électrique que le vide y a été poussé plus loin, une fois ce tube amorcé. C'est seulement l'amorçage qui devient de plus en plus diffcile lorsqu'on veut le déterminer avec une simple difé rence de potentiel et que le vide devient très grand Mais on y arrive toujours avec la plus grande faci lité, en établissant un court circuit momentané dans le tube. L'arc qui jaillit dans le tube au moment de la rupture du court circuit en déterminem l’amorçage, quel que soit le degré de vide. « Enfin, M. Cooper Hewitt a découvert cette pros priété nouvelle des cathodes qu'il a appelée « ré pugnance » et a donné les moyens de la sur monter. « Les tubes à vide paraissent, dès mainlenanl, appelés à rendre les plus grands services indus triels. Non seulement, on peut faire avec eux des appareils d'éclairage intéressants, mais il est pro bable que, dans l'avenir, en suivant la voie ouvert® par M. Hewitt, on pourra les appliquer à la pro: duction et à l’utilisation industrielle des courants de haute fréquence, avec lesquels on pourra, nous l’espérons, résoudre des problèmes nouveaux rel& Lifs à la transmission de l'énergie, qui ne sauraiet l'être avec les moyens dont nous disposons aujo d'hui!. » P. Letheule. ‘ Les clichés des figures 1, 2 et 3 nous ont été obligeunl ment prôtés par la Société internationale des Électriciens et la Librairie Gauthier-Villars, auxquelles nous renouvelons ici tous nos remerciements. M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE 939 UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE PAR LE PLUS LOURD QUE L'AIR Bien avant la retentissante découverte des aéros- tats par les frères Montgolfier, les hommes eurent l'idée de s'élever en l’air par des moyens méca- niques; les premiers inventeurs s’inspirèrent de la Nature, et, copiant les oiseaux, s'adaptèrent des ailes artificielles; mais leurs essais furent infruc- tueux, et presque tous payèrent de leur vie leurs courageuses, mais imprudentes expériences. Il n'en restait pas moins évident que l'oiseau, pour voler, prend son point d'appui sur l'air : Léo- nard de Vinei fit à ce sujet d'intéressantes observa- tions et en arriva à l'idée d'une machine volante qui ne fut rien moins que le premier hélicoptère. Après lui, Paneton en 1768, Launoy et Bienvenue en 1784, reprirent les mêmes théories; ces deux derniers présentèrent à l'Académie des Sciences de Paris, et firent fonctionner devant elle, un modèle d'hélicoptère mû par un fort ressort. Si l'on ne prêta pas à leur ingénieuse invention tout l'intérêt qu'elle méritait, c'est que les frères Montgolfier vinrent révolutionner le monde du bruit de leur découverte. Les premières ascensions en ballons eurent un retentissement considérable; l’homme étant par- venu à s'élever dans les airs au moyen des aéros- lats, on abandonna les recherches sur les appareils plus lourds que l’air et l’on essaya de diriger les ballons. Mais, là encore, de sérieuses difficultés furent rencontrées; et, depuis presque un siècle qu on la cherche, malgré les progrès réalisés peu à peu, il faut reconnaître que la solution est loin d’être parfaite. Après les essais presque infructueux de Giffard, de Dupuy de Lôme, de Tissandier, les intelligents “travaux de Renard et Krebs donnèrent les premiers résullats décisifs; depuis, le comte Zeppelin, Santos-Dumont, dernièrement Lebaudy complé- tèrent l'effort et obtinrent de la direction des bal- lons les derniers progrès qu’il semble qu'on doive en espérer. En effet, comme l'a dit Nadar : « Ce qui tue la direction des ballons, ce sont les ballons. » Ses partisans : G. de la Landelle, Ponton d’Amé- court, Babinet, revinrent franchement à la con- quête de l'air par les appareils plus lourds que Vair, et, renonçant à diriger « la vessie flottante de Charles », préconisant « la sainte hélice », ils ! La Revue ne saurait s'associer à cette opinion : les récents travaux du regretté Colonel Renard établissent nette- nent la possibilité d'un progrès considérable dans la direc- tion des aérostats. (NOTE DE LA DIRECTION. virent le succès possible au moyen de machines volantes et abordèrent courageusement le grand problème de l'aviation. Avant Nadar, Cayley, reprenant l'idée de Lau- noy, construisit un hélicoptère, petit appareil mû seulement par des ailettes en forme d’hélice, qu'ac- tionnait un ressort. En 1842, Philipps construisit un appareil du même genre en métal, lequel s'éleva à une grande hauteur et pareourut une certaine distance avant de tomber. Enfin, en 1865, Nadar, d'après les mêmes principes, projeta l’exécution d'une machine volante destinée à enlever des voya- geurs; mais il se heurta à l'impossibilité de trouver alors un moteur suffisamment léger et ne put mettre son projet à exécution. Cette question du moteur léger, jointe à quelques expériences mal dirigées sur le fonctionnement des hélices, fut la pierre d’achoppement des héli- coptères. On essaya alors de construire des volateurs en étudiant la théorie du vol des oiseaux; de là, exé- cution d’une foule d'oiseaux artificiels, appareils à ailes battantes désignés sous le nom d'orthoptères. Le plus ingénieux fut celui de Pénaud (1871), élève de Marey, qui fit sur le rôle des ailes de fort inté- ressantes études. Mais ces sortes d'appareils ne donnèrent pas de bien brillants résultats, et, si habilement construits qu'ils aient été, ils ne furent jamais que des jouets d’enfants. Il restait aux aviateurs une troisième sorte de machine volante, à laquelle ils consacrèrent leurs efforts : les aéroplanes. Dans cette voie, de sérieuses études furent faites. Je veux citer tout d’abord les essais de vol plané de O. Lilienthal, qui fit de concluantes expériences, mais qu'une déplorable catastrophe empêcha de continuer son œuvre. Son aéroplane ne comportait pas de moteur. Les aéroplanes de Chanute' et ceux des frères Wright, également construits sans moteur, tout en permettant d'inléressantes expériences, ne don- nèrent pas encore de résultats suffisants. Tout autres furent les aéroplanes de Maxim, de Langley, de Tatin, d’Ader. Il m'est impossible de tenter, dans ce court exposé, une description de ces compliqués appa- reils. Leur exécution exigea une somme de travail 1 Voyez à ce sujet : Cnanute, dans la Revue du 30 no- vembre 1903. 910 considérable et fut fort onéreuse; quelques-uns fonclionnèrent, mais aucun n'offrit les conditions de sécurité, d'habitabilité et de durée suffisantes. C'est en étudiant les causes d'échec des diffé- rentes sortes de machines volantes imaginées jus- qu'à ce jour, et en me rendant compte des qualités et des défauts de chacune, que j'en suis arrivé à cette conclusion que l’aviateur pratique de l'avenir sera une combinaison du type hélicoptère et du type aéroplane, ces deux types s'assaciantet secom- plétant, pour ainsi dire, pour présenter les meil- leures conditions possibles de fonctionnement. Je vais essayer d'expliquer sur quelles données je me suis appuyé pour arriver à la conception d’un tel appareil, et, dans ce but, j'exposerai succincte- ment la théorie des hélicoptères et celle des aéro- planes. I. — HÉLICOPTÈRES. Les hélicoptères sont des appareils utilisant uniquement des hélices pour se maintenir en Pair et se diriger; ils ne comportent aucune surface planante. Différentes dispositions d'hélices peuvent être adoptées : celle qui consiste à avoir des hélices à axes verticaux pour la sustentation et d’autres à axes horizontaux pour les mouvements de transla- tion est mauvaise, car, presque toujours, toutes les hélices travaillent mal. {l est facile de s'en rendre compte : Si V est la vitesse tangentielle d’une hélice à axe vertical, v la vitesse de translation de l'appareil par rapport à l'air (fig. 1), les vitesses absolues des ailes de l'hélice se- V ront d'un côté V + y et de l’autre V — v;et,les efforts de sustentation n’é- tant plus les mêmes des deux côtés, l'hé- lice tendra à chavi- rer. En particulier, si on fait V— y, on voit ue les vitesses absolues des deux extrémités des ailes sont d’un côté O:et de l’autre 2V, D'un côté, on a tentation 0, et, de l'autre, on a quatre fois l'effort que l’on avait quand la vitesse était V, puisque ces efforts croissent comme le carré des vitesses. Il faut donc que ce soient les mêmes hélices qui Servent Fig. 4. commeeffortde sus- M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE à la fois à la propulsion et à la sustentation. Ceci ne peut s'obtenir qu’en rendant mobiles les axes des hélices de telle facon qu'ils soient verti=m caux pendant les mouvements de montée et de des- cente simples, et qu'ils soient obli- quesou horizontaux le reste du temps. Il està remarquer que, dans une telle disposition, les héli- ces travaillent dans d'excellentes condi- tions quand leur axe est oblique : Soit, en effet, AB l'axe d'une hélice réduite à un axe et deux pa lettes CD et EF vues en bout (fig. 2). Cette hélice, pour donner un effort oblique vers le haut, dans le sens BA, tourne dans le sens indiqué par la flèche : la palette CD est en avant du plan du tableau considéré comme contenant l'axe, et le point D se déplace dans la direction DG. Dans cette position, la palette CD pose à plat sur l'air et se déplace vers le bas : elle soutient l’appa- reil; tandis que la palette EF, verticale, se déplace vers l'arrière et pousse l'appareil en avant. On voit donc qu'à chaque tour, chaque aile d'hélice donne un coup d’aile vers le bas pour sou- tenir l'appareil et un autre vers l'arrière pour le pousser en avant, chacun de ces coups d'ailes. étant donné pendant que la palette est normale, « dans un cas à la verticale, dans l’autre à l'horizon- tale, c'est-à-dire dans de très bonnes conditions de rendement. Il va sans dire que l'exemple de la figure à été choisi de façon à être frappant; mais, en réalité, ce mécanisme de coups d'ailes commence à agir dès que l'axe des hélices est incliné vers l'avant. Il est à remarquer que, dans la disposition qui est indiquée plus bas, de deux hélices coaxiales tournant en sens inverse et prenant leurs réactions rotatives l’une sur l'autre, tous les efforts vers le: haut et vers l'avant, dont nous venons de parler, sont équilibrés deux à deux. Voyons maintenant quelle est la disposition la plus simple que puisse présenter un hélicoptère eb qui soit compatible avec une bonne marche de. l'appareil. Un hélicoptère étant soutenu par la seule action de ses hélices comporte forcément au moins une hélice à axe vertical (ou capable d'être placé verti- calement}; comme il faut résister à la réaction, rotative de cette hélice, pour que le corps de l'ap-. 1 M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE 941 pareil ne tourne pas en sens inverse de l'hélice, on doit disposer une autre partie tournante pour appuyer cette réaction. Pour économiser de la puissance et augmenter la force ascensionnelle de l'appareil, on est amené à faire cette autre partie tournante en forme d'hé- lice également, et l'on se trouve conduit à celte conclusion que l'hélicoptère le plus simple com- prend deux hélices à axes verticaux tournant en sens inverse et prenant leurs réactions rotatives l'une sur l'autre, les axes de ces hélices pouvant s'ineliner vers l'avant pour obtenir les mouvements horizontaux ou obliques. Dès lors, une disposition semble indiquée, parce qu'elle permet de condenser beaucoup l'appareil : donner aux deux hélices le même axe géométrique en les superposant; cette disposition offre, en outre, l'avantage de permettre un mode de transmission de mouvement el une disposition d’engrenages très avantageux en ce sens qu'il n'y intervient que des efforts de torsion, et que tous les efforts de poussée latérale sont équilibrés deux à deux. On pourrait croire que, dans cette disposition, les hélices vont se gêner l'une l'autre; il n’en est rien ; les efforts de poussée longitudinale s'ajoutent simplement : il est bien vrai que l’hélice du haut chasse l'air vers celle du bas et lui facilite ainsi sa rotation; mais celle du bas aspire l'air qui est au- dessus d'elle et aide à la rotation de la première. Les deux efforts ont la même valeur, et la preuve en est que, pour appuyer les réactions rotatives l’une sur l’autre, de telle sorte qu'elles s'équilibrent, on est amené à donner exactement le même pas aux deux hélices. Enfin, si, dans un hélicoptère ainsi disposé, on prend soin de placer la charnière du gouvernail obliquement ou de permettre la modification du pas de chacune des hélices, pendant la marche, l'appareil peut exécuter tous les mouvements sans aucune exception; monter ou descendre verticale- ment indépendamment de l'action du vent; se déplacer horizontalement ou obliquement dans toutes les directions; se tenir immobile en un point donné de l'espace, dans l'air calme ou malgré le vent; tourner à un moment quelconque aussi bien pendant la montée ou la descente que pendant la marche horizontale ou oblique. Tous les déplacements et mouvements peuvent être exécutés à la vitesse que l'on veut. En un mot, un tel appareil est l'appareil de manœuvre idéal. Étant ainsi établis les points principaux de la théorie des hélicoptères, il ne faut pas oublier qu'ils possèdent un rendement dynamique moins bon que les aéroplanes, c'est-à-dire qu’il faut, à égalité de poids, leur fournir plus de puissance, ! ou qu’à égalité de puissance, ils peuvent soulever un poids moins lourd. En outre, ils ne conviennent qu'imparfaitement aux grandes vitesses horizontales. Voyons maintenant les caractéristiques du se- cond genre d'appareils que nous avons à éludier, c'est-à-dire du type d’aviateur dit aéroplane. Il. — AÉROPLANES. On done le nom d’aéroplane à un appareil com- prenant une surface planante ou un ensemble de surfaces planantes trainées en biais dans l'air à grande vitesse, au moyen d’hélices à axes hori- zontaux. La réaction de l'air sous ces surfaces donne l'effort qui soutient l'appareil. C’est, en somme, un cerf-volant dans lequel la ficelle est remplacée par les hélices. Le principe du fonctionnement des aéroplanes est qu'ils doivent se déplacer horizontalement à grande vitesse pour pouvoir se soutenir en l'air et avoir un rendement dynamique avantageux. Les conséquences de ce fait sont les suivantes : à un aéroplane pur, sont interdites les manœuvres de montée ou de descentes simples, ainsi que les déplacements dans des direclions qui ne soient pas très voisines de l'horizontale; un tel appareil ne pourra quitter le sol qu'après avoir pris à la sur- face de celui-ci la vitesse qui est nécessaire à sa sustentation ; de même, il sera forcé, pour reprendre contact avec le sol, de l'aborder en vitesse, ces deux dernières conditions étant toujours vraies, sauf dans des cas exceptionnels de vitesse et de direction du vent; mais, en revanche, dans un tel appareil, la marche horizontale sera facile et avan- tageuse. Je ne parle pas ici de l'équilibre des aéroplanes; bien que d'intérêt primordial, cette question ne vient qu'en second lieu; elle sera résolue par la pratique dès qu'on aura pu naviguer dans l'air et y faire quelques expériences soigneusement établies et bien conduites. IIT. — Essar D'ASSOCIATION DE CES DEUX TYPES D'AVIATEURS. En résumé, voici les qualités et les défauts des deux types d'appareils que nous venons d’éludier: . Les hélicoptères sont des appareils parfaitement stables, d’une manœuvre simple et sûre et aux- quels tous les mouvements sont possibles dans toutes les directions; mais ces appareils auront des vitesses horizontales dépassant difficilement 80 à 100 kilomètres à l'heure. Les aéroplanes, au contraire, sont beaucoup plus 942 M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE difficilement maniables ; mais ils peuvent atteindre | perdre leur vitesse; ils se déplacent alors dans des des vitesses horizontales très grandes, en deman- | direclions assez voisines de la verticale : ils font de dant relativement peu de force. l'hélicoptère; puis, une fois en marche, ils peuvent L'association faire du vol logique de ces plané, ils vont deux appareils rapidement el découle très sans faligue : simplementde ils font de l’aé- cette compa- roplane. raison : dans un aviateur idéal, il faut IV.— Cons- TRUCTION D'UN adopter une ALPAREIL disposition BASË SUR CES permettant à l'appareil d’è- THÉORIES. lre successive- Si, mainte- ment hélicop- nant, nous lère et aéro- voulons arri- plane et de ver à la cons- truction d'un appareil vo- fonclionner à volonté de l’u- ne où l'autre lant d’après facon, afin de Fig. 3. — Vue de l'appareil d'essai au repos. ces théories, pouvoir ma- il nous faudra nœuvrer en hélicoptère et faire de la route en | d’abord commencer à construire un hélicoptère aéroplane. pur, certains que nous sommes de son bon fonc- Il faudra aussi, pour la sécurité du fonclionne- | tionnement, et le construire de Lelie sorte que l'on ment, que la puisse ulLé- transforma- rieurement le lion d'un {ype transformer à l'autre soit facilement en progressive el aéroplane puisse se faire sans moditi- à volonté len- cation impor- tement ou ra- tante ; puis, pidement, lorsque, avec lui, nous au- rons réussi à nous élever dans les airs età nous y di- riger, nous ajoulterons afin de’passer doucementde l'hélicoptère à l’'aéroplane et derevenirins- tantanément au type sûr et stable de l'hé- licoplère, en cas d'accident peu à peu à cet hélicop- tère des sur- ou de désé- faces planan- quilibrage de SL tes qui nous l'aéroplane. Fig. 4. — Vue de l'appareil d'essai en marche horizontale. permettront Pour voir de nous mou combien est logique cette association, on peut la | voir plus rapidement et d'atteindre les grandes comparer à la nature, l'éternel exemple : Examinons le vol des oiseaux : quand ils s’en- vitesses qu'il est permis d'espérer réaliser avec les | : , machines volantes; notre appareil se transformera lèvent ou se posent, ils battent violemment des | ainsi progressivement, grâce à des modifications ailes et font de grands efforls pour gagner ou | successives indiquées par la suite des expériences, M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE 943 en cet aviateur parfait, hélicoplère-aéroplane, au- quel nous voulons arriver. L'appareil que je construis d'après ces théories comprend un châssis, destiné à le soutenir quand il est à terre, et portant, à la partie haute, le groupe moteur et, par l'intermédiaire d’une articulation, les hélices. Celles-ci sont au nombre de deux; elles ont le même axe géométrique et tournent eu sens inverse. Enfin, à l'arrière, se trouve le gouvernail dont la charnière est inclinée à 45°. L’axe commun des hélices peut être incliné à volonté depuis la verticale jusqu'à l'horizontale et le pas des hélices est modifiable en cours de route. Celte description complète montre combien est simple cet appareil. Il est, d'ailleurs, impossible de faire un appareil plus simple, capable de tous les mouvements el donnant une sécurité égale. Si l’on considère que, grâce à l'inclinaison de l'axe des hélices jusqu'à l'horizontale, celles-ci d'élévatoires deviendront propulsives, on compren- | dra qu'avec l’adjonction de surfaces planantes l'ap- pareil deviendra un véritable aéroplane. De même, on peut se rendre compte que, si l’on dispose ces surfaces planantes de facon à pouvoir supprimer instantanément leur aclion, on reviendra, par le redressement partiel de l'arbre des hélices, à l'hé- licoptère simple. Ce sont bien là les conditions désirées. Voici maintenant le dispositif que j'ai adopté pour éviter la chute ou pour atténuer ses inconvé- nients, si occasionnellement elle devient inévitable. L'appareil comprend deux moteurs transmetltant leur mouvement aux hélices par des cliquets, de | telle sorte que l'arrêt accidentel de l’un des moteurs n'entraine pas l'arrêt de l’autre; de plus, l'appareil peut se tenir en l'air et se diriger avec un seul moteur. C'est donc déjà de nombreuses chances de chute évilées; mais il peut arriver que les deux moteurs s'arrêtent; il est bien évident qu'alors l'appareil tombe; les hélices tendent à tourner en sens inverse de celui dans lequel elles tournaient précédemment. Un frein, convenablement disposé, empêche alors leur rotation et les maintient dans les positions où chacune d'elles offre toute sa voi- lure au courant d'air ascendant, sans être gênée par l’autre. Il est facile alors de calculer la vitesse de chute de l'appareil, connaissant son poids et la surface de sa voilure. Cette vitesse sera environ 12 mètres par seconde, ce qui est loin d'être excessif : cela fait 43 kilo- mètres à l'heure environ. Cependant, le choc serait encore désastreux pour le voyageur et pour l’appa- reil; j'ai donc disposé un piston hydraulique amor- tüisseur du choc à l’arrivée sur le sol en cas de chute, La course de ce piston est de 2 mètres ; les sections de passage du liquide varient, bien entendu, sui- vant une loi parabolique, de façon à donner, pen- dant le fonclionnement du piston, un mouvement retardé à accélération négative constante et à poser l’appareil sur le sol sans vitesse. Dans ces conditions l’action du piston durera 1/4 de seconde et, pendant ce 1/4 de seconde, tout se passera à bord de l'appareil comme si la pesan- teur y était augmentée dans la proportion de 3, 6, ce qui est sans inconvénient pour le voyageur et pour l'appareil. En effet, un homme qui saute de 1 mètre seulement de hauteur et se recoit, après avoir fléchi les jambes, sur une très petite course, subit des accélérations négatives beaucoup plus grandes que 3, 6 X g, cela sans inconvénient résul- lant de ces accéléralions. Quant à l'appareil, ses différents organes ne travailleront pas, à ce moment, plus que pendant la marche. Le piston hydraulique est articulé à la partie supérieure, au moyen d'une double charnière, afin que, si l'appareil est entrainé par le vent pendant sa chute, on puisse cependant diriger l'extrémité de l'appareil de choc vers le point où doit se pro- duire la chute et éviter ainsi, pour le piston hydrau- lique, tout effort latéral qui lui serait funeste, Enfin, voici un dernier point important : lorsque l'on incline l’axe des hélices vers l'avant, l'ensemble Le = Es M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE de l'appareil prend une position telle que la ligne qui joint le centre de gravité et le centre de susten- tation soit verticale. Dans cette position, le châssis contenant le voyageur ne se trouve pas d’aplomb; il lève de l'avant; mais il est à remarquer que, dès que le déplacement horizontal commence, la pous- sée de ce courant d’air sur la partie basse de l’ap- pareil tend à le remettre d'aplomb. Cependant, cet effet ne serait pas suffisant, et, pour compléter l'action, j'ai disposé sur le gouvernail des surfaces planantes auxiliaires qui se déploient automatique- ment et qui maintiennent l'appareil parfaitement d'aluminium épanouis comme des œillets. Des tôles d'épaisseurs voulues, évidées aux endroits convenables, forment les âmes et sont reliées par des cornières aux tables qui constituent les sur- faces du dessus et du dessous des hélices. D'autres tôles, disposées perpendiculairement aux pre- mières, forment un cloisonnement transversal dans ces poutres etassurent une indéformabilité absolue. Ce mode de construction permet encore d'avoir de bonnes formes pour l'attaque de l’hélice dans l'air et pour sa sortie, ce que l’on ne peut pas obtenir avec des hélices en toile à armature en bois. Les Fig d'aplomb, quelle que soit l'inclinaison de l'axe des hélices. Ces surfaces planantes auxiliaires constituent, d'ailleurs, une sorte de gouvernail vertical qui n’est pas indispensable pour l'hélicoptère, mais le sera pour l’aéroplane. J'ai appliqué dans toute la construction de cet appareil les principes rationnels de résistance des matériaux en visant la légèrelé, Pour cela, j'ai augmenté la hauteur des poutres pour pouvoir, en conservant le même moment d'inertie, diminuer la quantité de métal employé, et j'ai contreventé con- venablement; j'ai oblenu ainsi une rigidité par- faite et une très grande légèreté. C'est ainsi que la voilure tout entière (hélices et gouvernail) est constituée exclusivement de tôles d'aluminium rivées au moyen de petits morceaux de tubes g. 6. — Vue de profil de l'appareil. axes des hélices, en acier, sont des tubes de très grand diamètre et très minces; dans l'appareil en réduction que j'ai fait, ils avaient l'un 17,5, l’autre 4"%,75 d’épaisseur. Ils m'ont donné de par- faits résultats, À cause de cette très faible épais- seur, ils constituent d'excellents ressorts au point de vue de la torsion, ce qui a le très grand avan- tage de permettre aux moteurs et aux hélices de tourner d’un mouvement parfaitement uniforme, même si les engrenages sont mal laillés. : Les montants du châssis et toutes les traverses sont en tubes d’acier. V. — ESSAI DE L'APPAREIL. Voici, pour terminer, les résultats des essais que j'ai faits, au Musée océanographique de Monaco, M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE 945 en présence de S. À. S, le Prince de Monaco, sur une réduction en demi-grandeur de l'appareil”. Les hélices mesuraient 6,25 de diamètre et 4,75 de largeur à la partie la plus large. Chacune d'elles, construite en tôles d'aluminium contre- ventées comme il a été expliqué plus haut, pesait 21 kilogs. L'appareil complet, comprenant les hélices et Le poids de cette transmission, porté par l'appa- reil, était 5 kilogs. L'appareil était, en plus, chargé de quatre poids en plomb de 5 kilogs chacun, accrochés à chacun des pieds du châssis. Le poids total à enlever était donc : PORTAIT EEE POI SAM ONE ele TR 25 — Fig, 7. — Vue de profil de l'appareil leurs axes, le train d’engrenages leur transmettant le mouvement, le moteur, le châssis, le gouvernail, en un mot, l'appareil complet, sauf le moteur, pesait 85 kilogs. Le mouvement, fourni par une dynamo, était communiqué à l'appareil au moyen d'un arbre de 1 mètre de longueur, terminé à chacune de ses extrémités par un joint à la cardan. Ces résultats ont fait l'objet de deux notes aux Comptes rendus de l'Académie des Sciences, présentées par le Prince, le 15 mai et le 5 juin 1905, | | | | I en marche horizontale, Ce poids fut entièrement soulagé, à chaque essai, par un courant de 40 ampères, sous 140 volts, mesurés aux bornes de la dynamo, soit 5.600 watts. La vitesse de rotation des hélices était de 40 tours à la minute. Le rendement de la dynamo (mesuré au frein de Prony, précisément pour cette intensité de 40 am- pères et 140 volts) étant de 80 °/,, la force utilisée a élé de 5.600 X 0,80 = 4.480 watts, 916 M. LÉGER — UN NOUVEL ESSAI DE NAVIGATION AÉRIENNE soit 6,1 chevaux de 75 kilogrammètres, ou 457 ki- logrammètres. + On peut admettre, pour le poids d’un moteur : 2 kilogrammes par cheval, y compris la provision d'essence pour une marche de une heure. Le poids mort de 25 kilogs soulevé peut alors se décom- poser ainsi : 1° 15 kilogs représentant 7,5 chevaux, force plus que suffisante pour enlever et conduire l'appareil: 2° 10 kilogs représentant le poids d’un homme de 80 kilogs en demi-grandeur. Dans ces calculs, il n'a pas été tenu compte du travail absorbé par la transmission à la cardan. Chaque unité de 75 kilogrammètres soulevant 110 ) — 18 kilogs, chaque nouvelle unité de 75 kilo- ) grammètres donnera une force ascensionnelle supplémentaire de : 18 — 2—16 kilogs. On pouvait donc conclure de ces expériences qu'avec un moteur de 10 chevaux, cel appareil pourrait soulever un homme, si la résistance de ses organes était suffisante pour soutenir cet effort. Les expériences d'enlèvement de l'appareil furent continuées en augmentant progressivement le poids mort soulevé et les puissances données par le moteur, afin d'éprouver la résistance méca- uique, de voir quelles parties céderaient les pre- mières et d'en déduire le coefficient de sécurité pour la marche normale. A cet effet, une seconde dynamo fut attelée à la première au moyen d'une courroie. Dans une première expérience, le poids mort fixé à l'appareil fut de 50 kilogs. Sous une force de 10 chevaux, l'enlèvement eut lieu tellement brus- quement que les huit cordes qui retenaient l’appa- reil au sol furent rompues d'un seul coup ; chacune de ces cordes était cependant capable de porter un homme sans se rompre; la rupture des huit cordes eut lieu par traction simple, mais il faut bien tenir compte de ce fait qu'elles étaient attelées en biais et qu'il y a eu choc, l'appareil élant violemment projeté en l'air lorsque les cordes se sont trouvées tendues. L'appareil, ayant brisé ses amarres, continua son bond et ne s'arrêta que lorsqu'il fut maintenu par l'arbre qui le reliait à la dynamo et qui fut tordu. Le courant avait été interrompu dès que la rup- ture des cordes s'était produite. L'appareil fut remis en expérience et fixé par des cordes plus fortes; les poids furent augmentés et l'on arriva ainsi jusqu'à enlever 100 kilogs de poids mort avec une force qu'il a été malheureusement impossible de mesurer exactement, mais qui fut certainement inférieure à 15 chevaux et évaluée à 12 chevaux. Ces 100 kilogs élaient ainsi constilués : le D' Ri- chard, directeur du Musée océanographique, avait pris place sur une planchette fixée à l'appareil au moyen de deux cordes. Le D' Richard pèse 74 kilogs ; il fut enlevé trois fois, la dernière avec 26 kilogs de poids en plomb, dont une partie élait attachée aux pieds de l’appa- reil et le reste placé dans les poches du D' Richard. Dès que les hélices se mirent à tourner, l'appa- reil fit un bond vertical, enlevant toute sa charge tellement brusquement que l'on craignit une nou- velle rupture des cordes le fixant au sol, et le cou- rant fut interrompu de suite. L'aisance avec laquelle s'est enlevé l'appareil prouve qu'il aurait pu soulever un poids plus grand encore avec la force qui lui a été fournie. La vitesse de rotation était de soixante lours par minule. À la suite de l'essai, j'ai constalé des défor- malions dans les arbres des hélices. Ces arbres sont constitués par des tubes d’acier mince de 5 et 6 centimètres de diamètre. Ces déformations ayant faussé le train d’engrenages, il a été impossible de continuer ces essais. On a noté que ces déformations proviennent d'efforts latéraux sur les engrenages et que, dans l'appareil définitif, ces eflorts latéraux s’équili- brant deux à deux, le même accident n'est pas à craindre. Les hélices n'ont subi aucune déformation et n’ont pas semblé souffrir de l'effort qu’elles ont supporté. On peut donc dire que cet appareil a soulevé un homme de 74 kilogs avec le poids représentalif du moteur nécessaire et la provision d'essence pour une marche de une heure. Au point de vue du coefficient de sécurité, on voil qu'il est franchement supérieur à 2, lorsque l'appareil fonctionne avec 6 chevaux et chargé de 25 kilogs de poids mort, ce qui correspond à la marche normale du grand appareil. Enfin, voici ce que donnent ces chiffres reportés au grand appareil : 100 kilogs de poids mort enlevés par le petit appareil correspondent à 800 kilogs pour le grand. Sur ces 800 kilogs, il faut prendre : Moteur de 100 chevaux, y compris la provision d'es- sence nécessaire à une marche de 4 heure. 200 kil. Voyageur . : TD Reste disponible. ToraL JAU — 800 kil. Ces 525 kilogs pourront servir à obtenir des vitesses horizontales plus grandes ou bien à em- porter d’autres voyageurs ou du combustible pour une marche de plus longue durée. in tout cas, ce chiffre est assez considérable pour montrer que le projet comporte une marge «De D' LEGENDRE — LE ‘* ROYAUME FLEURI ” OU PROVINCE DES QUATRE-FLEUVES 947 suffisante pour donner toutes les condilions de sécurilé et de bon fonctionnement désirables. Je commence dès maintenant la construction du véritable appareil qui doit m’enlever dans les airs. Cet appareil aura des hélices de 12",50 de diamètre; il sera actionné par un moteur de 100 chevaux; il pèsera environ 800 kilogs et sera capable d'enlever un homme et la provision d'es- sence nécessaire à une marche de cinq ou six heures. J'espère qu'il réunira les qualités de sécurité nécessaires pour entreprendre un voyage dans les airs et que, s'il n'est pas encore l’aviateur parfait de l'avenir, il n’en constiluera pas moins un réel progrès vers la solution idéale de la navi- gation aérienne. Ce progrès, c'est au Prince de Monaco que la science en sera redevable, car c'est avec son aide et son concours que j'ai pu commencer et que je continue mes expériences ; si ces expériences sont couronnées du succès que j'en altends, je veux lui en laisser tout l'honneur, puisque, sans sa gracieuse protection, je risquais fort de ne jamais pouvoir mettre mes idées à exécution. M. Léger. LE ‘ ROYAUME FLEURI ” OU PROVINCE DES QUATRE-FLEUVES (CHINE OCCIDENTALE) Si l’on songe un seul instant à l'importance des événements qui viennent de se passer en Extrème- Orient, on est obligé de constater que le centre de gravité mondiale se déplace désormais. La Chine, vraiment, devient le centre d'attraction de l'Univers organisé, le but fascinant vers lequel tous les grands peuples se hâlent fébrilement. Le moment est, en vérité, solennel : nous sommes bien à un tournant de l'histoire, et le « struggle for life » entre nations ne fut et ne sera jamais plus âpre qu'à celte phase de la vie des empires. La lutle est commencée, et si ardentes sont les compélitions pour la domina- tion de cet immense marché, le plus vaste et le plus riche du monde, qu'elle va se développer, formi- dable, sans trève ni recul. Et tant pis pour la nalion qui tout de suite ne prendra pas posilion dans cette grande bataille politique et économique : dans quelques années, il sera (rop tard. Il est donc intéressant, au dernier point, de rechercher quelle est la région de la Chine qui doit attirer plus particulièrement notre attention et assurer, dans les meilleures conditions, le déve- - loppement rapide et complet de notre colonie indo- chinoise. Cette région est, incontestablement, le Se-Tchouen, ou province des Quatre-Fleuves. I. — OROGRAPHIE. Le « Royaume fleuri » (dénomination poélique chinoise) est la province la plus riche, la plus féconde du Grand Empire : elle est située au nord du Yunnan, à l'extrème-ouest, et empiète sur les contreforts du grand plateau thibétain. Elle est d'une superficie un peu supérieure à celle de la Elle se divise en deux parties bien distinctes : la région montagneuse, ou Se-Tchouen occidental, représentant le quart de la superficie totale; et la région des terres rouges, des plateaux et des plaines, ou Se-Tchouen oriental. Le Se-Tchouen occidental est constilué par une série de grandes chaines loutes parallèles entre elles, à direction Nord-Sud, et perpendiculaires à deux énormes massifs auxquels elles s'ap- puient : le Kouen-Loun et l'Himalaya. Au fond de ces formidables plissements coulent le Yang-Tsé et ses affluents : le Ya-Long et le Ta-Tou-Hô!, puis le Mékong etle Salouen. Ges chaines sonttrès élevées : dans la région setchouennaise, elles ont de 4 à 5.000 mètres d'altitude, et, quand on se rapproche de la vallée du Min, vers l'Est, on rencontre des plateaux d'érosion séparant les cassures dont l’aititude est encore de 3.000 mètres. Les calcaires dominent dans toute la vallée du Ta-Tou-Hô que j'ai parcourue : ce sont eux qui constituent les flancs escarpés, les canons du fleuve et de ses affluents torrentueux. J'ai cotoyé de ces abimes Laillés à pie, séparant deux crêtes parallèles à peine distantes quelquefois de 20 à 25 mètres. Souvent ces masses calcaires reposent sur un lit d'argile : d’où glisse- ments, effondrements fréquents.Au fond de certains ravins, à 60 kilomètres de Foulin, et sur les bords de torrents à sec, j'ai reconnu des blocs de granit, des marbres el des porphyres d’une grande beauté, que n’exploite pas l'aborigène, ni même le Chinois. Dans la vallée de Foulin, on retrouve les grès rouges formant les collines encaissantes des ri- 1 Le Ta-Tou-Hô ne se jette pas directement dans le Yang- France, soit 600.000 kilomètres carrés, environ. | Tsé mais bien dans le Min, à Kia-ting. 948 D' LEGENDRE — LE ‘* ROYAUME FLEURI ” OU PROVINCE DES QUATRE-FLEUVES vières : les hautes montagnes de l'arrière-plan sont toujours calcaires. Dans notre marche vers l'Est de Foulin à Tchentou, par Ya-Tchéou, et après | avoir franchi le Ta-Siang-Ling, il ne fut plus ren- contré de calcaires, mais seulement de hautes col- lines de grès rouges fortement mélangés d'argile; leur élévation allait en diminuant à mesure qu’on se rapprochait de la vallée du Min. L'aspect pyrami- dal était plus rare que la forme de table affaissée d'un côté et représentant un plan incliné suivant la face de moindre résistance. En résumé, dans l'Ouest, entre la vallée du Ta-Tou-Hô et celle du Min, très hautes crêtes escarpées courant Nord-Sud et plateaux étroits atteignant jusqu'à 3.000 mètres d'élévation. Dans la vallée du Ya-Ho et vers l'Est, jusqu’à la plaine de Tchentou, collines de grès rouges argileuses, se développant en chaînes parallèles, constamment interrompues, pour former des groupes isolés de lables ou de pyramides. Je dirai maintenant un mot de la végétation des Alpes setchouennaises : j'ai parcouru les hauts plateaux de l'Ouest en février et en mars 1904; j'ai observé que, partout où la pente permettait de retenir un peu d'humus, apparaissent de belles cultures : blé, orge, maïs, sorgho, colza, pommes de terre. Sur le plateau même, partout où l’hu- midité est suffisante, {tous nos légumes, tous nos arbres fruiliers prospèrent à souhait, malgré l'altitude considérable, osci lant entre 2.000 et 3.000 mètres. Sur les sommets difficilement acces- sibles croissent encore de belles forêts, où domi- nent les essences de la zone tempérée ; mais, plus bas, tous les arbres ont disparu, systématiquement coupés par le Chinois envahisseur qui les détruit partout où il le peut, sous le mauvais prétexte que c'est de la terre arable récupérée. II a ainsi ruiné une grande partie des plateaux autrefois féconds du Se-Tchouen oriental. Dans toute cette région de l'Ouest où a pénétré le fils de Hän, il n'existe plus rien à exploiter comme produits du sol; mais le jour où le géologue et le minéralogiste parcour- ront ces vallées, ces cluses profondes, ils pourront déceler des richesses insoupconnées. Le long de tous les torrents, pendant le voyage, nous voyions de nombreux orpailleurs fouillant les sables, et plus au Nord, vers le Thibet, les bijoux d'or sont l’ornement habituel des femme aborigènes. Le Se-Tchouen oriental ou Bassin-Rouge, qui forme les trois quarts de la province, est la région fertile, féconde par excellence. Elle a dû constituer autrefois un vrai plateau, qui, érodé peu à peu, fissuré par les eaux lorrentueuses descendant des hautes montagnes de l'Ouest et du Nord, s'est découpé en damier, en tables séparées par des vallées, dont la direction générale est Nord-Sud, inclinant tantôt à l'Ouest, tantôt à l'Est. Les grès rouges et roches carbonifères qui forment ce terrain élèvent encore leurs arêtes jusqu'à 1.000 et 1.200 mètres d'altitude. Si l’on part du Sud, ces arêtes se profilent en éventail vers le Nord-Est, vers le Nord-Ouest, jusqu'aux grandes chaines de 2,500 à 3.000 mètres, qui séparent le bassin du Min et du Kialing-Kiang de celui du Hän. Dans la vallée du Yang-Tsé proprement dite, surtout en aval de Tchong-King, la formation n’est plus la même : les falaises qui bordent le fleuve et leurs prolongements transversaux, obliques ou per- pendiculaires au thalweg, sont composés de cal- caires gris, très escarpés, surtout dans les gorges de Kouei-Tchou. Comme dans la vallée du Ta-Tou- Hô, ces masses calcaires reposent fréquemment sur des lits schisteux qui subissent une double désagrégation par infiltration d’eau pluviale et de l'eau du fleuve, au moment des crues estivales qui M durent plusieurs mois. Beaucoup de seuils et de rapides dangereux doivent leur formation à ce ramollissement du substratum schisteux, qui à été M suivi de l’écroulement de la masse surplombante. On rencontre encore des grès, mais de couleur « grise, formant quelquefois, au milieu du fleuve, de belles tours composées d'assises qu'on dirait arti- ficielles, où allerne souvent le calcaire. II. — Cours D'EAU. J'ai suffisamment indiqué, par l'orientation des monts et coteaux, la direction générale des cours d'eau qui sillonnent la province et se jettent dans le Yang-Tsé. Le Min, le Lou-Hô et le Kialing-Kiang, avec leurs ramifications, arrosent toute la superficie du Bassin-Rouge. Le Kialing- Kiang, bien que séparé du Min par une grande distance, s'en rapproche considérablement par un des deux grands tributaires qu'il reçoit à Ho-tcheou, et ceux-ci, multipliés dans tous les sens par une foule de rivières étalées en plis d'éventail, couvrent tout l’espace intermédiaire à l'Est et à l'Ouest. Le Bassin-Rouge est donc arrosé à souhait et, comme la direction des grands plissements du relief est Nord-Sud, aucune chaîne n'arrête les courants chauds et humides qui viennent de l'Océan Indien et du Pacifique. La végétation est donc toute-puis= sante au Se-Tchouen, sur les plateaux et dans les vallées. Le climat, en raison de l'altitude, est tempéré; d'une grande régularité, il rappelle celui du Midi de la France, moins froid cependant. C'est cette remarquable égalité de température qui a permis au Se-Tchouen de donner une grande extension à la cullure du ver à soie et en a fait la plus vaste région séricicole du monde : la production est | | D' LEGENDRE — LE ‘* ROYAUME FLEURI ” OU PROVINCE DES QUATRE- FLEUVES 919 importante, mais bien au-dessous de ce qu'elle peut devenir le jour où le Chinois abandonnera ses méthodes surannées d'élevage du bombyx. Tout dans le Bassin-Rouge se trouve donc com- biné pour favoriser la culture intensive du sol: fécondité des terres, climat exceptionnel. Toutes nos céréales poussent admirablement, avec le riz en plus dans les vallées. À plus forte raison qu'au -Se-Tchouen occidental, tous nos légumes prospè- IT. — Sous-sor. Dans la vallée du Yang-Tsé, depuis I-Tchang jusqu'à Sui-Fou et au delà, presque chaque jour en remontant le fleuve sur la jonque, on aperçoit des exploitations de charbon et de minerai de fer. Le charbon forme, avec les calcaires des berges, des couches parallèles. Un peu en aval de Tchong-King existe une grande exploitation de houille et de EZe co pe M / 12 en CAPINEN ENS \qHan-Tehong gr S DT £ LIN) a } NE N 4 DO ) II ZE di) Va poser ; | 19) LUS à. D ) Si \N SL lets ii . ns So Lonà-Gan® SS 1: EN pr FUO Res re Mg {Grand centré, / commerncra Pr TS = Dessine par F Borremans 3. À Faatefeulle - Paris Fig. 1. — Le Royaume Fleuri ou Province des Quatre-Kleuves (Se-Tchouen). rent ici; nos fruits de même et aussi des variétés “des pays sub-tropicaux. Je n'ai jamais vu, sur “aucun sol, pareille abondance de produits de toutes sortes. Et il s'en faut de beaucoup que toute la Surface arable soit cultivée par l'habitant. Les méthodes du paysan chinois sont insuffisantes, défectucuses, et, si nos agronomes étaient appelés au Se-Tchouen, il leur serait facile de tripler le rendement actuel par une meilleure adaptation des cultures aux différents terrains et la fertilisation de vastes territoires incultes par les procédés de la chimie agricole moderne. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. carbonate de fer, disposés en couches allernantes : une grande partie de cette houille descend à I-Tchang et Hankeou, sur le bas Yang-Tsé, pour être vendue aux grands steamers qui le sillonnent. De même, en aval de Sui-Fou, le long des berges, existent des gisements de charbon, les meilleurs du Se-Tchouen : les canonnières anglaises et fran- caises l'utilisent à l'heure actuelle. En remontant le Min, jusqu à Kialing, on voit émerger, à l'entrée des vallées latérales, sous les grès rouges qui les bordent, des grès grisâtres renfermant d’excellent charbon. Près de Kien-Ouei, presque à mi-route DS 950 D' LEGENDRE — LE ‘ ROYAUME FLEURI ” OU PROVINCE DES QUATRE-FLEUVES >€ Où qu'au contraire > Sn—1, il trouve, pour la probabilité P, (ce; aa... a, 1) que le promeneur se trouve à une distance Sn - 1 << € après ses pérégrinations, l'expression : æ c f{ Autue)Juua) (ua) LL Tluas ide n Sans doute, ce résultat ne satisfera pas M. Pearson, l'intégrale à +414 fonctions oscillantes ne permettant pas même une approximation grossière; mais, au point de vue mathématique, il a quelque importance. Ainsi les considérations qu'en général la valeur de P, est positive et inférieure à l'unité, que cette valeur devient ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES égale à zéro ou l'unité si une des distances à surpasse € d'une quantité plus grande que la somme des autres à, - ou que la somme de toutes les à est inférieure à €, mènent à l'évaluation de quelques intégrales définies. Dans le cas de 2 très grand et de distances a très petites, le résultat s'accorde avec ce qu'on peut pré- dire : c'est que le vagabond terminera son chemin à proximité du point de départ. — M. W. Kapteyn : Dans le volume XVII du Journal de Crelle, E. Kummer a déterminé la valeur de l'intégrale : + dans l'hypothèse 2° positif et p non entier. [ci M. Kap- teyn s'occupe du cas p entier et positif; chemin faisant, il indique un lien simple entre l'intégrale de Kummer et l'intégrale = _b® xrdx, T —x e æ (2 où D est positif. — M. J. de Vries présente au nom de M. Z.-P. Bouman : Le complexe tétraëédral. L’équation Ap,p, + Bp.p, + Cp,Pe; où R=— = représente le rap- port anharmonique constant du complexe, dans la forme différentielle : A(xdy — ydx) dz + B(ydz— zdy)dx + C(zdx— xdz)dy =0. Les surfaces 2x PEN 2=EV Rx € du quatrième ordre dont les normales font partie du complexe, etc. — M. J. Cardinaal présente au nom de M. H. de Vries : La projection centrale dans l'espace de Lobatehelsky. Première communication. Dans l’espace hyperbolique, on se donne un plan.arbitraire + et, en un point quelconque 0, de +, la normale à +; de plus, on fixe sur cette normale un point quelconque 0. Cela posé, l'auteur se demande ce qu'il y a de remar- quable si l'on projette les figures de l’espace hyperbo- lique du point O comme centre sur le plan + comme tableau, et comment on peut déterminer inversement » les noue de cet espace à l’aide de ces projections. L'angle parallèle 74 de Lobatchefsky correspondant à la distance 00, — d, déterminé par la relation : Hiy2—_C,) 1—R L PEL ETC … le cône parallèle du point O, etc. — M. P.-H. Schoute : présente le tome second de son « Mehrdimensionale ; Geometrie (Géométrie polydimensionale), faisant partie … de la collection Schubert. 2° SCIENCES PHYSIQUES. — M. J.-D. van der Waals - présente trois communications en rapport intime l’une «avec l'autre : [. Propriétés de Ja ligne critique (ligne … des points de plissement) du côté des composantes. Dans les expériences de MM. Centnerszwer et Smits, ! une remarque de M. van’t Hoff et les calculs de M. van …Laar (fev. génér. des Sciences, t. XVI, p. 796), on trouve une discussion sur l'accroissement de la tem- pérature critique d’une substance à la suite de l'addi- tion d'une autre substance. Dans cette discussion, on ne tient pas compte de ce que M. van der Waals a ublié, il y a dix ans, sur les propriétés principales de la - ligne critique. Par la méthode thermodynamique, lauteur avait trouvé pour la quantité en question la relation : dx av® (a). = Sy 1 Æ ) 2x2v? MRT axov 963 | s'appliquant sans réserve aux substances normales. A l'aide de l'équation d'état, il en a déduit la formule : d'log T re DS b 9 bs DS 16 UX5 Ici, il publie une déduction nouvelle de ces équations et entre en quelques détails sur des questions qui s’y rattachent. — If. Les propriétés des sections de la surface de saturation d'un mélange binaire du côté des composantes. Etude de la surface (p, x, T) d'un mélange binaire, basée sur l'équation différentielle : 22) Le : (4 Wa Var dp— (Xe — x: (), 4 + TT at. Les propriétés de la direction initiale des sections per- pendiculaires à un quelconque des trois axes, etc. — III. Les valeurs numériques exactes pour les pro- priétés de la ligne des points de plissement du côté des composantes. Les deux communications précé- dentes démontrent de nouveau que l'étude thermody- namique des problèmes posés en fait trouver la solution générale complète et, de plus, que la déduction des valeurs numériques correspondant à des cas parti- culiers exige la connaissance de l'équation d'état. Quelquefois, il suffit de connaître une équation d'état approchée; mais, aussitôt que la condensation de la substance est tant soit peu considérable, par exemple dans l’état critique, les valeurs numériques obtenues à l'aide d’une équation d'état approchée peuvent différer beaucoup des valeurs effectives. Cela se présente surtout dans le cas d'une quantité se rapportant au volume. Ainsi, le volume critique d’une substance se rapproche de 2h, tandis que la valeur déduite de l'équation d'état où b est constant s'élève à 3b. Cette différence dis- paraît en tenant compte de la variabilité de D, qui décroit avec le volume. De plus, la quantité » d'un mélange dépend aussi de la composition. Cela entraine ne : (rime SES que l'expression DE d’un mélange est assez compliquée = - et diffère généralement de = . Si l'on connaissait IX }» la loi d'après laquelle b dépend de v et de x, le pro- blème ne présenterait d'autres difficultés que celles de calculs ennuyeux et compliqués. Mais on ne dispose pas encore d'une connaissance assez complète de cette loi, et on ignore toujours les valeurs numériques des constantes qui y entrent. Aussi l'auteur craignait d'abord qu'à cause de cette lacune il ne fût impossible de déduire théoriquement les propriétés des directions initiales des lignes de plissement avec une exactitude complète. Pourtant, il a trouvé — et c'est ce qu'il démontre ici — que, pour ce but, la connaissance de la loi suivant laquelle 2 varie avec v et x n'est pas indispensable, mais qu'il suffit de connaître deux quantités qui ont été déterminées expérimentalement pour l’état critique d’une substance simple. — M. H.-A. Lorentz : Sur la radiation de chaleur dans un système de corps ayant partout la même température. \. Si un certain nombre de corps d'un caractère quelconque, possédant tous la même température, se trouvent à l'intérieur d'une enveloppe parfaitement noire de même température ou parfaitement réfléchissante, il se forme quant à la radiation de la chaleur un état d'équilibre, caractérisé par le fait que tout corps absorbe autant de chaleur qu'il en émane et qu'à l'intérieur d’un corps transparent la densité de l'énergie de radiation possède, pour chaque longueur d'onde, une valeur déterminée dépendant de la température. L'auteur se propose d'étudier ces phénomènes plus en détail et de fixer le rôle joué par chaque élément de volume dans l’émanation et l'absorption. Ce but ne peut être atteint complètement qu'après s'être rendu compte du mécanisme entier de la radiation, ce qui 964 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES n’a été possible jusqu'à présent que dans un seul cas particulier. Pour diminuer les difficultés qui sont des conséquences immédiates de la défectuosité de nos idées sur la radiation, l’auteur se sert d’un artifice, en supposant que la radiation, due en effet à des mou- vements d'électrons, est causée par des forces électro- magnétiques d'action périodique quelconque siégeant dans les éléments de volume des corps. Alors on n'a plus besoin de s'occuper d'électrons; il sera même permis de considérer les corps comme des masses con- tinues. Ainsi, il devient possible de calculer, pour chaque corps, l'intensité des forces électromotrices en question, pourvu qu'on connaisse pour chaque longueur d'onde la relation entre les pouvoirs d'émission et d'absorption, égale pour tous les corps. Il est vrai qu'ainsi on n'aura pas trouvé le mécanisme véritable de la radiation, mais seulement un mécanisme fictif capable de causer le même effet. 1. Introduction. 2. Considération de corps anisotropes quelconques. Notations. Simplification du calcul, en substituant aux vraies valeurs des composantes des vecteurs les valeurs complexes ne contenant le temps qu'en des facteurs et. 3. Les vibrations dans un corps illimité homogène et isotrope, dues à des forces électromotrices et magnéto- motrices de fréquence n. 4. Déduction de l'équation de l'énergie. 5. Démonstration d'un théorème général. 6. Cas où disparait le premier membre de l’équation exprimant ce théorème. 7. Action d’une force dans un espace infiniment petit. 8. Les directions principales des axes. 9-13. Absorption d'un faisceau parallèle par une plaque très mince perpendiculaire au faisceau. Déduction de la quantité d'énergie émise par la plaque suivant la direction normale. Intensité des forces élec- tromotrices capables de causer cette émanation. Hypo- thèse sur les forces électromotrices siégeant dans les éléments de volume d'un corps. Ces forces satisfont, en effet, dans un système quelconque de corps, à la con- dition de l'équilibre de la radiation. — Ensuite M. Lo- rentz présente au nom de M. R. Sissingh : La (héorie de la réflexion de la lumière par des corps non complé- tement transparents. Les lois de la réflexion métallique ont été déduites, d'abord par Cauchy (1836-1848), ensuite par Ketteler (1877) et Voigt (1884), tandis que Lorentz (1875) les a empruntées à la théorie électro- magnétique de la lumière. Par des considérations dif- férentes, ces savants parviennent aux mêmes résultats. Le rapport mutuel des théories mécaniques a été indiqué par Drude (1892). Les lois de la réfraction de la lumière par des prismes métalliques, développées par Voigt (1885) et Drude (1891), ont été déduites d’un couple de théorèmes principaux simples par Lorentz (1892); il n'introduisait aucune hypothèse particulière sur les caractères des vibrations lumineuses. Ici M. Sissingh fait voir que l'étude de Lorentz mène aussi à un développement simple de la théorie de la réflexion métallique. — M. H. Haga présente au nom de M. C. Schoute : Determination de l'effet Thomson dans le mercure. Cette détermination fait suite à celle de M. Haga (voir Ann. de l'Ecole Pol. de Delft, t. I, p. 145, et t. IT, p. 43). Une description détaillée des expériences se trouve dans la thèse de l’auteur; une partie des résultats mentionnés à été obtenue plus tard. A l’aide d’une représentation graphique, l’auteur trouve que l'effet Thomson dans le mercure est sensi- blement proportionnel à la température absolue. — M. J. P. van der Stock : Les courbes de fréquence de quantités météorologiques. L'auteur se pose les trois questions suivantes : 1° Jusqu'à quel degré les moyennes mensuelles suivent-elles la loi ordinaire de probabilité ? 20 Quelle est la forme de la courbe de fréquence déduite des moyennes journalières ou des observations faites à des heures déterminées chaque jour, en tant qu'elles sont symétriques? 3° Quel est le degré d’asy- métrie de ces courbes? Ici il s'occupe exclusivement de la première question. Les données sur lesquelles il se base sont constituées par les positions du baromètre au Helder durant la période soixantenaire d'août 1843 à juillet 1902 (720 données), par les moyennes men= suelles du baromètre à Batavia de 1866 à 1902(444 don= nées) et des températures moyennes de toute la France de 1851 à 1900 (600 données). Le critère de l'accord avet la loi ordinaire est déduit de la relation 7 = = M=\/ ne Il trouve successivement pour les trois séries : 7—3,198, r— 3,235, x — 3,137, elc. — M. P. van Romburge : Sur la réaction de Pammoniaque et des amines avec les esters formiques des glycols et de la glycérine: Suite de la communication précédente (Æev. génér. des Se., t. XVI, p. 796). — Ensuite, M. van Romburgh présente au nom de M. L. van Itallie : « T'halictrum aquilegi= tolium », plante contenant HCAz. — M. S. Hoogewerff présente aux noms de MM. W.-A. van Dorp et G.-C.- A. van Dorp : Les chlorures des acides maléique etn fumarique et de leurs dérivés. — M. A.-P.-N. Franchi- mont présente au nom de M. D. Mol : Æecherches sur les esters anhydrides d'acides dibasiques. 3° SCIENCES NATURELLES. — Remise de la médaille Leeuwenhoek, accordée tous les cinq ans, décernée à M. M. W. Beyerinck pour ses recherches bactériolo- giques. — M. C. A. Pekelharing communique, aux noms de MM. C. J. C. van Hoogenhuyze et H. Verploegh : L'excrétion de la créatinine chez l'homme, travail fait dans le laboratoire de Physiologie de l'Université d'Utrecht. A l’aide de la méthode basée sur la réaction de Jaffé publiée récemment par M. Folin (Zeïitschritt {. Physiol. Chemie, {. XLI, p. 223), les auteurs ont déterminé journellement la quantité de créatinine qu'ils excrétaient eux-mêmes dans l'urine, pendant des périodes de deux à trois semaines. La nourriture, toujours la même, était d’une composition connue. Quelques jours seulement étaient consacrés à des tra= vaux musculaires forcés; pendant les autres jours, les exigences imposées au système musculaire étaient très restreintes. Ils trouvèrent que l’excrétion de créatinine ne subit pas d’accroissements de quelque importance sous l'influence du travail musculaire. Les valeurs trouvées les jours de travail ou immédiatement après ne sortent pas des limites des oscillations ordinaires. Dans l'abstinence complète de nourriture, au contraire, comme le prouve une série d'observations sur la « jeù= neuse professionnelle » Flora Tosca, le travail muscu= laire cause un accroissement bien manifeste de l’'ex= crétion de créatinine. Quand la nourriture ne contenait point de créatine ou de créatinine, la quantité des créatinine éliminée par les reins des auteurs était encore presque de 2 grammes par jour. L'addition de. protéides à la nourriture, sous forme d'œufs de poule; de caséine, de gélatine, etc., causait un accroissement très insignifiant. On peut donc déduire des observas tions que la formation de la créatine comme produi de désassimilation se fait dans les muscles et en d’autres organes sans être influencée directement par la contraction des muscles ou par la nourriture ré= sorbée, en parfait accord avec la théorie défendue récemment par M. Folin (Amer. Journ. of Physiol:, t. XIII), en rapport avec les échanges des matières nitrogénées. Probablement, une partie de la créatine formée dans les tissus est dédoublée dans l'organisme, en donnant des corps plus simples. Après l’ingestion de créatinine dans le canal alimentaire, les auteurs En retrouvaient la plus grande partie, mais non la quan- tité totale, dans l'urine. Dans les urines de nourrissons; nourris exclusivement avec du lait humain ou du lait des vaches, les auteurs ont démontré la présence de créali= nine; aussi, dans ces expériences, la réaction de Jaffé était préférable à celle de Weyl. P. H: SCHOUTE. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 16° ANNÉE N° 22 30 NOVEMBRE 1905 ? Revue générale Éd ind des Science pures el appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aüdresser tout ce qui concerne !a rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y Compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Détermination de la constante d’aberra- tion. — Une grande incertitude règne encore sur la valeur de la constante d’aberration : pour ne citer que des valeurs relativement récentes, Nyren a trouvé 20",481, nombre adopté par Oppolzer ; W. Struve donne 20",445, valeur employée par Le Verrier ; enfin, l'usage de la méthode de Talcott a fourni des résultats si dis- … cordants que les nombres obtenus varient entre 20",31 et 20,53. Jusqu'en 1900, la Connaissance des Temps a employé la valeur 20/,445 ; à partir de 1901, selon la convention adoptée par la Conférence internationale des étoiles fondamentales, c'est la valeur 20,47 dont on se sert pour les calculs de ce recueil. Une grave complication que l’on rencontre dans les “recherches de ce genre provient de ce que, dans “presque tous les procédés employés jusqu'ici, il était “nécessaire de faire intervenir la variation des latitudes. Or M. Lœwy a indiqué de nouvelles méthodes, d'un “caractère géométrique, d'apparence très simple, propres à la détermination de la latitude et à celle des coordonnées absolues des étoiles circompolaires ; si l'on choisit trois étoiles très voisines du pôle, que l’on puisse disposer d’une longue série d'observations très précises, il y a tout lieu de penser qu'il sera possible d'en déduire un procédé susceptible d'une très grande exactitude pour calculer la valeur de la constante d'aberration. 11 serait certainement précieux d'apporter ainsi une contribution sérieuse à l'étude d’une des questions les plus controversées de l'Astronomie, et l'importance du procédé correspondant serait définitivement consa- crée : car, dans cette méthode, chaque série d’obser- vations doit donner la position véritable du pôle au jour considéré, sans que l’on ait à tenir compte de cette variation de la latitude dont la recherche présente de si grandes difficultés. Sans entrer ici dans les détails du procédé, on doit en espérer des résultats d'une très haute précision si l'on accumule les obser- Nations à certaines époques de l'année, où les coeffi- cients dans les équations ont leurs valeurs les plus favorables. Deux astronomes, MM. H. Renan et W. Ebert, dont l'ha- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. bilité technique est reconnue, se sont donc efforcés une fois de plus d'appliquer ces nouvelles méthodes, tant à la détermination de la latitude qu'à celle de la constante de l'aberration : pour cette dernière quantité, ils ont trouvé la valeur 20,434 + 0,030. Quant à la latitude, toutes les tentatives restent discordantes et ne méritent pas la confiance qu'il était possible de leur attribuer a priori. Il faut remonter plus haut pour voir le vice fondamental de tous ces résultats : les méthodes elles- mêmes, d'apparence élégante, sont stériles malgré les efforts qu'elles suscitent depuis de très nombreuses années; elles sont trop simples, géométriquement, mais ne tiennent pas compte des possibilités pratiques, et c’est l'expérience même pour laquelle elles sont faites qui les condamne jusqu'à présent. Sont-elles susceptibles d’être modifiées d'une manière assez peu profonde pour conserver leur cachet, tout en se prétant à la pratique ? C’est peu probable et, en tout cas, elles n'ont jamais été assimilées par les astronomes étran- gers, à l'affût des perfectionnements dans l’Astronomie de précision, ou, du moins, on n'a rien publié à cet égard. Il semble bien, d’ailleurs, que le principe même soit défectueux, si l’on songe que quinze années d’obser- vations n’ont guère augmenté la précision dans la lati- tude, élément que la méthode était propre à fournir en vingt-quatre heures. L'orbite du premier satellite d’Uranus. — Dans ses recherches sur l'orbite d’Ariel, le premier satellite d'Uranus, M. Bergstrand a utilisé les obser- vations effectuées, de 1852 à 1901, par Lassell, Marth, Copeland, Newcomb, C. H. K. Peters, Holden, Hall, Burnham, Haigh, Henry, Perrotin, Barnard, Schaeberle, Hussey, Aitken et See. Les 300 observations qui ont été réunies ont donné, pour la durée de la révolution d’Ariel, 2 j., 520.380, ce qui correspond à un moyen mouvement de 208.682°,8176 en # années juliennes, ou 1.461 jours (en 1875, Newcomb avait trouvé pour valeur de cette quantité 208.682°,590); la longitude moyenne dans l'orbite pour l’époque 1871, Déc. 31,0 t. m. de Washington) est 22°,611; l'excentricité de l'orbite, 0,0081 ; la longitude du périuranium, comptée à partir du nœud, est représentée par : w — 20,4 + 160,03(€ — 1890,0); 19 LE 966 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE f enfin, le demi grand axe est de 13!',624, inférieur de 0,156 à celui qu'avait trouvé Newcomb. La discussion des observations n’a pas révélé l’exis- tence d'erreurs appréciables dans les valeurs de la lon- gitude du nœud et de l'inclinaison de l'orbite données par Newcomb; et les seules inégalités du périuranium doivent être attribuées au renflement équatorial de la planète, car les masses des autres satellites sont trop faibles pour exercer de l'influence. La masse d’Ariel obtenue par M. Bergstrand est de 332-000 de celle d'Uranus; quant à la masse d'Uranus, déduite du mouvement de son premier satellite, elle 1 £ ï - —, Celle du Soleil étant prise pour serait le —— RASE unité. $ 2. — Météorologie Exploration de l'atmosphère en Danemark. — Le choix des environs de Viborg (Danemark) pour explorer l'atmosphère, à l’aide de cerfs-volants et de ballons-sondes, est d'autant mieux indiqué qu'un grand nombre de dépressions se croisent sur le Jutland danois, ainsi que l'ont fort bien mis en évidence les cartes dressées à cet effet par l’Institut météorologique de Copenhague. Et M. L.Teisserenc de Bort, qui s’est si heureusement spécialisé dans l'étude de la Dynamique atmosphérique, était plus autorisé que quiconque pour faire une série importante de détermina- tions dans les environs de Viborg, à Hald : pour- suivies pendant près d’une année, les observations de ce savant ont été réunies en un volume sous le titre de Travaux de la Station franco-scandinave de sondages aériens et constituent une très importante contribution à l'étude des régions élevées de l’atmosphère. Un terrain fort bien situé avait été mis à la disposi- tion des expérimentateurs par M. Jagdemeister- Krabbe ; une cabane analogue à celle de Trappes, sus- ceptible d'être orientée dans toutes les directions, comporte un anémomètre enregistreur avec le treuil électrique des cerfs-volants; l'intensité de l’insolation est obtenue avec un pyrhéliomètre d'Angstrôm. La discussion des observations met déjà en lumière une conséquence importante, à savoir que les dépres- sions barométriques de faible rayon qui passent sur le Jutland s’annoncent ordinairement par un retour du vent inférieur au Sud, sans que les courants supérieurs en soient affectés : ainsi la rotation du vent commence par en bas pour se montrer ensuite dans la région des cumulus et des alto-cumulus. Certaines décroissances de température ont été remarquables, atteignant 0°,9 pour 100 mètres, de sorte qu'un ballon monté à 4.400 mètres eut à subir — 38° : le même jour, aux environs de Paris, un ballon indiquait — 17° seulement; deux jours avant, la température du sol était plus forte de 2°, tandis que dans la haute atmosphère elle était supérieure de 22°, ce qui est un exemple fort net de cette loi récente que la variabilité du climat est plus grande à une certaine hauteur que près du sol. Nous n'insisterons pas sur les vitesses du vent à diverses hauteurs, leurs brusques variations et les moyennes de croissance et de décroissance suivant les situations météorologiques, non plus que sur les modi- fications brusques qui correspondent aux changements de temps; mais nous sommes heureux d'enregistrer, à chaque nouvelle occasion, les progrès incessants que M. L. Teisserenc de Bort ne cesse d'apporter à la Mé- téorologie avec un zèle infatigable et une méthode vraiment scientilique. Une fois de plus, ici, conformé- ment aux travaux antérieurs de ce savant, on voit combien il seraitillusoire — suivant l'ancienne méthode — de raisonner sur les phénomènes de l'atmosphère comme s'ils étaient continus dans le temps et dans l’espace; les cas qui se rapprochent d'un régime per- manent sont, au contraire, des exceptions et restent limités à certains situations météorologiques. 22 $ 3. — Physique La température a-t-elle une action sur le poids des corps? — Le Professeur J.-H. Poynting, dont on connaît les beaux travaux sur la constante de la gravitation et sur l’action hypothétique de l'orienta- tion des cristaux par l'attraction newtonienne, vient dé soumettre à un examen expérimental minutieux Ja question d’une action possible de la température surle poids des corps. Les meilleures expériences ont été faites entre la température ordinaire et celle de Pai liquide, et ont conduit à la conclusion que, si un tel effet existe, 1l est, entre ces limites, inférieur à 2 mil® lièmes de milligramme pour la masse de 208$ grammes employée dans ces expériences, ou à 1 cent-millionième en valeur relative pour l'écart, de 200 degrés environ de la température des expériences. Ç Dans les limites de précision qu'il est actuellement possible d'atteindre, on peut donc dire que l’action cherchée n'existe pas. On sait, d'ailleurs, que les meilleures expériences faites jusqu'ici ont conduit à l@ même conclusion pour l'action de la pesanteur sur des corps pris isolément ou à l’état de combinaison. Un appareil pour mesurer l'équivalent mécanique de la chaleur. — Le Professeur H. L. Callendar vient de présenter à la Société de Phy-= OR Fig. 1. — Appareil pour la mesure de l'équivalent mécani que de la chaleur. sique de Londres et à l'Institution Royale un appareil T pour mesurer l'équivalent de la chaleur. Nous décri rons brièvement cet intéressant dispositif (fig. 4) : Un calorimètre cylindrique en laiton mince et à axe horizontal, renfermant une quantité d’eau donnée, est mis en rotation à une vitesse modérée, soit à la mains soit au moyen d'un moteur hydraulique ou électriques Les deux bouts d’un ruban en soie entourant Je cylindre et disposé de facon à faire un tour et demi autour de ce dernier, supportent des poids inégaux. Le stabilité de l'équilibre est assurée par une légère balance à ressort agissant à l'encontre du poids le plus long. Comme cette balance à ressort n'ajoute qu'une faible quantité à la différence de charge aux deux bouts de ruban, les petites erreurs de lecture ne sont que d’une importance relativement faible. Grâce à la sou plesse extraordinaire du ruban, la différence de charge aux deux bouts représente, avec une approximation très considérable, la mesure exacte du frottement. Les poids sont ajustés par tâtonnements, de façon à , CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 967 adapter à peu près au frottement du ruban ; l’ajuste- - ment définitif se fait automatiquement au moyen de la balance à ressort. Un compteur sert à enregistrer le nombre de tours exécutés par le calorimètre et l’ac- croissement de température est lu au moyen d'un ther- momètre recourbé à mercure ou à platine, qu'on intro- duit dans une ouverture médiane au trou intérieur du cylindre. Les pertes par radiation sont éliminées soit par la méthode de compensation de Rumford, soit en faisant deux expériences pour des charges différentes du ruban. Le mouvement de la surface du calorimètre - élimine l'effet des courants de convection, de facon que les pertes de chaleur sont plus régulières que dans . le cas d’une surface au repos. Voici les principaux avantages de cet appareil : Le frottement est indépendant de la vitesse avec une approximation très considérable; la balance à ressort est automatique; les variations de vitesse et de charge - ne s'accompagnent d'aucune modification de la capa- cité thermique du calorimètre. Il n'y a pas de frotte- ment de poulies ou de paliers susceptible d'introduire des erreurs; il ne se produit aucune vibration forcée et il n'y a pas besoin de vase amortisseur. Voici la méthode la plus simple pour faire une expé- prencess On introduit à peu près 350 grammes d’eau à 10° de la pipette dans le calorimètre à travers un tube de caoutchouc et une embouchure de laiton s'adaptant dans une ouverture à vis près du bord. Après avoir actionné le moteur à une vitesse convenable, on lit les températures de 100 en 100 tours. Ayant observé la température moyenne de l'air ambiant près du calo- rimètre pendant l'expérience, an choisit dans les observations un intervalle de 500 à 600 tours, pendant lequel la température moyenne du calorimètre est approximativement égale à celle de l'air. La correction due aux radiations extérieures sera alors sensiblement négligeable. La précision assurée par l'appareil est hautement remarquable ; un conférencier peut réaliser en environ dix minutes, devant son auditoire, une valeur exacte à B/20/0 près. …. Cet appareil breveté est construit par la Cambridge Scientific Instrument Company. Alfred Gradenwitz. Le mécanisme de la pulvérisation élec- trique. — Lorsqu'on fait passer à travers un fil mince interposé entre deux plaques de verre la décharge d'une batterie de bouteilles de Leyde, il se produit … une pulvérisation électrique. Dans certaines circons- tances, l'on observe une structure analogue à un « réseau sub-microscopique. Ce processus, comme le fait - remarquer M. F. Braun‘, se passe à peu près comme - suit : on fournit au métal, dans un intervalle de temps … très court (quelques cent-millièmes de seconde), une … quantité de chaleur assez grande pour le convertir à l'état - gazeux. La pression de vapeur élevée ainsi produite, en - soufflant sur le gaz métallique, l’écarte de tous côtés. — Le gaz, qui se refroidit en chemin, se condense en — petites particules, tout en laissant des intervalles libres … de métal; à proximité du fil métalliqne, les particules î se précipitent les unes à côté et au-dessus des autres — avec une densité assez grande pour former une couche “— se comportant comme cohérente par rapport à la lumière incidente. A une distance un peu plus grande, il se forme des fentes vides de métal entre les parti- . cules disposées suivant des lignes à peu près verticales au fil. - Or, l’origine de ces fentes n’est pas suffisamment élucidée; on pourrait croire que, ce sont des forces hydro-dynamiques qui y entrent en jeu. L'auteur incline cependant à penser que ce sont plutôt des par- ticules précipitées aux bords de la couche cohérente qui protégeraient les régions postérieures contre la ! Annalen der Physik, n° 7, 1905. vapeur métallique en train de se propager, ou qui détermineraient le chemin de la seconde demi-vibra- tion et qui, par là, donneraient naissance à une vapo- risation ultérieure. M. Braun est d'avis que les réseaux ainsi produits consistent en bandes métalliques relativement larges, séparées par d'étroites fentes d'air et qui se compor- teraient à l’égal d'un réseau de Hertz, constitué par des bandes de tôle. Ce qui est démontré, c'est que le métal passe à l'état gazeux. À part les preuves indirectes, cela résulte des vues photographiques prises dans une chambre obs- cure, les plaques de verre étant réunies en haut et en bas par une bande de papier gommé. On y remarque les nuages de vapeur lumineuse sortant de toutes parts. Lorsque les plaques de verre n'éclatent point, les pho- tographies donnent une image d'une exactitude surpre- nante de la pulvérisation métallique qui s'y produit. Afin de démontrer que ce ne sont point des particules solides ou fondues qui exercent l'effet photographique, l'auteur photographie le spectre de fils de zinc pulvé- risés de cette manière, spectre qu'il produit au moyen de prismes et de lentilles de quartz. Ce spectre, où l'on pouvait distinguer les lignes principales du zine, était discontinu. Les vapeurs montant d'un fil tendu à travers une plaque de verre horizontale et libre vers le haut éclairaient la fente. La longueur des lignes fait voir que les rayons moins réfrangibles (bleus) sont émis pendant un temps plus long que les rayons plus fortement réfrangibles (violets et ultra-violets). Des fils de charbon minces, pulvérisés de cette même manière, ont présenté un spectre continu. Comme le fait remarquer l'auteur, la question de savoir si le charbon peut être réduit à l’état gazeux pourrait peut-être être élucidée par des expériences analogues. M. Braun n'a pas eu de difficulté à reconnaître sous le microscope l'existence de globules de charbon fondu, d'un aspect identique à celui des globules métalliques fondus, formés dans des conditions analogues. Quant à savoir si les métaux pulvérisés ne con- tiennent point des additions d’oxydes, cette supposi- tion est confirmée par l'aspect d’un noir mat que présentent certains métaux à l’état pulvérisé, tandis que d’autres raisons viennent, au contraire, S'y opposer. Certaines observations ont amené l’auteur à penser qu'une séparation de métaux formant alliage serait possible par un procédé analogue. En faisant passer la décharge à travers un fil de laiton de 0%,006 d'épaisseur, il a en effet retrouvé le zinc presque entier entre les plaques de verre, tandis que le cuivre s’est précipité sur les plaques de garde verticales sous la forme de bandes verticales fines. Les alliages platine-argent se décomposent de la même manière. Voici l'explication avancée par l’auteur : Afin de réaliser la séparation, il convient de choisir une tem- pérature telle que le laiton soit bien fondu. C’est alors que le zinc, commencant à se vaporiser, projeltera des deux côtés les particules de laiton fondu. Ces dernières, dans leur trajectoire, émettront de nouvelles quantités de zinc qui distille, de facon que les particules extrêmes consistent essentiellement en cuivre pur. $ 4. — Électricité industrielle Le Potentiomètre Crompton. — L'emploi du potentiomètre comme instrument normal de mesure des sources de courant continu a été suggéré à l’ori- gine par le Professeur Fleming; mais c'est au lieute- nant-colonel Crompton, de Chelmsford, que l'on est redevable de son adoption dans la pratique. L'instrument consiste essentiellement en un long fil qui reçoit un courant électrique d’une batterie à cou- rant constant. Si le fil est homogène et de même gros- seur dans toute sa longueur, la différence de potentiel entre deux quelconques de ses points est proportion- nelle à la longueur du fil interceptée entre ces deux 968 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE points. Dans le potentiomètre Crompton, la chute de potentiel le long du fil de mesure s’ajuste de facon à répondre au cas que l’on étudie, au moyen de résis- tances placées dans son circuit, le maximum employé dans chaque cas étant de 2 volts, qu’on obtient avec un seul petit accumulateur. Les différences de potentiel sont mesurées en les comparant à la force électromo- trice d'une pile de Clark. Les courants sont mesurés en les faisant passer dans une bande de manganine à la- quelle sont fixées deux bornes, la différence de poten- tiel entre ces deux bornes, pour un courant de tension donnée, ayant été déterminée au préalable. Dans la pratique, le potentiomètre Crompton est construit comme suit (fig. 4). Le fil calibré, marqué AB, est enroulé sur quatorze bobines, appelées bobines du potentiomètre; une autre partie du fil, BC, en ligne droite, est appelée fil de l'échelle; les résistances des diverses bobines du fil droit sont égales. Un contact de glissement Q se meut le long des bornes des quatorze bobines, et un autre R le long du fil droit. Dans la position que montre la figure, la lecture de l'instrument donne 1,046. Les couples de points dont on veut comparer les différences de po- tentiel sont con- nectées aux blocs d'un commuta- teur bipolaire K, dont les manet- tes MN établissent lacommunication des points — une paire à la fois — avec les con- tacts de glissement Q, R, au tra- vers du galvanomètre. Le mani- pulateur H du galvanomètre est arrangé de façon à compléter le circuit au travers de deux ré- sistances qui, à tour de rôle, forment court-circuit quand le manipulateur est déplacé. Le courant nécessaire s'obtient au moyen d'une batterie secon- daire G. Une résistance ajusta- ble, consistant en une série de bobines DE et en un rhéostat continu F, est placée dans le circuit. En les ajustant, la résistance du cireuit et le courant qui y cireule et qui provient de la bat- terie d’accumulateurs peuvent être changés de facon continue et, par suite aussi, la chute de potentiel le long du fil de l'échelle. L'opérateur obtient alors l’équi- libre du galvanomètre avec la pile étalon quand Pindi- cation des contacts de glissement est égale à la force électromotrice de la pile à sa température actuelle. Si, par exemple, la température de la pile est de 159, sa force électromotrice étant de 1,434 volts, les contacts des glissements doivent être placés à ces chiffres, et le galvanomètre ramené à zéro en réglant la résistance DE et le rhéostat F. Quand ce résultat est obtenu, les indi- cations de l'échelle à tous les points représentent des lectures directes en volts. Emile Guarini. L4 l8 F2 M | A Q Comparaison des lampes au tantale et des lampes à filament de charbon. — D'après le Zeitschrift fur Elektrotechnik de Vienne, une intéres- sante comparaison a été faite entre les lampes à fila- ment de tantale et les lampes à filament de charbon au point de vue de leur sensibilité aux variations de tension du réseau. Les lampes en expérience étaient construites pour 410 volts et présentaient, sous celte tension, la même intensité lumineuse de 25 bougies. Elles étaient soumises à des tensions variables et croissant jusqu'à 200 volts, et pour certaines valeurs on 09 08 07 0:6 0:55 0# 0:3°0:2 O1 Fig. 1. — Potentiomètre Crompton. — ABC, fil calibré; Q, R, contacts de glissement; K, commutateur bipolaire à manettes M, N; H, manipulateur du galvanomètre DE; bobi- nes; F, rhéostat; G, batterie secondaire. photométrait les lampes au moyen du photomètre Lummer, tout en mesurant leur consommation à la manière ordinaire. A 75 volts, la lampe au carbone donnait 2,5 bougies et la lampe au tantale 6,4. À 110 volts, on vérifiait éga= lement les intensités lumineuses des deux classes de lampes : toutes deux étaient de 25 bougies. A 160 volts, la lampe au tantale donnait 93 bougies et la lampe au carbone 209. L'augmentation excessive d'intensité de la lampe au carbone demeurait sensible au delà de 160 volts, et à 200 la lampe était si vite brèlée qu'on n'avait pas le temps de la photométrer. Les lampes au tantale donnaient, sous 200 volts, 206 bougies. Quant aux consommations trouvées au cours des mêmes expériences, elles ont été excellentes pour la lampe au tantale, puisque, pour 410 volts, la consom= mation constatée a été de 1,06 watt par bougie. Il résulte donc de ces essais qu’au point de vue de la consommation et de la durée, les variations de tension d'un réseau affectent beaucoup moins les lampes au tantale que les lampes à filament de charbon. $ 5. — Chimie Pilesélectri- ques à l'oxyde de carbone et au carbone. — Les essais de com- G binaison du car- bone ou de l’oxyde de carbone à l’oxy- gène avec produc- tion d'énergie électrique sont restés jusqu'à au jourd’hui infructueux. On à sou vent construit des piles présen- tant le carbone ou l’oxyde de carbone au pôle négatif, et l'on a attribué l'énergie de ces élé- ments à l’activité électromotrice de C ou CO. Mais l'examen scien= tifique à bientôt montré que la force produite est due à d’autres modifications chimiques ou à des influences thermiques. MM. Ha- ber et Bruner ont montré que l'exemple le plus remarquable de ce genre, l'élément au carbone de Jacques, est en réalité une pile à gaz tonnant®. Or, MM. F. Haber et A. Moser viennent de trouver une solution du problème : ils ont réussi à constituer une pile dans laquelle les substances qui forment la source de la force électromotrice sont bien le carbone ou l’oxyde de carbone et l’oxygène*. Dans cette pile, le verre chauffé (à environ 500° C.} constitue l'électrolyte. On se sert d’un tube à essai en verre doux, dont les surfaces extérieure et intérieure sont platinées à l'extrémité fermée afin de servir d'électrodes. Le courant est amené à ces surfaces pla= tinées par un fil de platine fin. On entoure alors les surfaces intérieure et extérieure du tube d’une atmo sphère du mélange gazeux particulier à l'étude; c’est généralement de l'oxyde de carbone dilué avec des l'anhydride carbonique, d'une part, et de l’air d’autres part. 4 Des mesures précises ont montré que la force électro motrice développée aux points d'ébullition du soufre @ du pentasulfure de phosphore (1 volt environ) concorde très exactement avec celle qu'on calcule par la Then modynamique ; il en est demême pour l'effet du changes= ment de concentration de CO, CO? et O. Q Quand on emploie des mélanges de concentratio eg Re FU, ARR R EE PARA 1 Zeitschrift {ür Elektrochemie, 1904, t. X, p. 697. # Zeitschrift für Elcktrochemie, 1905, t. XI, p. 593-609. O 01 -02 -03-0#/05-06 :07 -08 -09 1 B R € CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 969 élevée en CO, il ya dépôt de carbone par dissociation du | duquel M. Pauly a démontré l'insuffisance de cette az, et la pile est transformée en élément dans lequel e carbone lui-même forme la substance active. La constitution de l’histidine. — On a insisté à plusieurs reprises dans cette Revue‘ sur le rôle impor- tant que jouent les trois bases hexoniques, l’arginine, la lysine et l’histidine, dans la constitution des prota- mines et des matières albuminoïdes, et l’on a montré que, dans l'enquête, si vaste par son ensemble et si minutieuse dans ses détails, ouverte depuis plus de cinquante ans sur la constitution des produits de la dislocation des protéiques, l'établissement d’une for- mule de structure pour ces trois bases représente un chapitre très important. Les deux premières, l'arginine et [a lysine, ont assez vite révélé leur secret. On sait que l’arginine est l'acide qguanidine-x-è-diamino-valerianique, etlalysine, l'acide a-<-diamino-caproique : AZH : C.AzH? CH°.AzH?2 Lu Le Que Te LT bre Vus UT Un . AzZH° loou doom Arginine. Lysine. Mais l’histidine CSH°Az'0® avait, jusqu’à ces derniers temps, résisté aux efforts des chercheurs. Voici que MM. Knoop et Windaus viennent d'établir d'une manière presque complète la constitution de cette base. M. S. Fraenkel® avait montré d'abord : 4° Que l’histidine contient un groupe carboxyle COOH. En effet, ce corps déplace l'acide carbonique du carbo- nate de cuivre pour former un sel de cuivre facilement soluble; porté à une température supérieure à son point de fusion, il perd CO*; enfin, et surtout, M. Pauly® réussit plus tard à préparer un éther méthylique dont le chlorhydrate est bien cristallisé ; 2° Que cette base contient un groupement d'amine primaire — AzH* et un seul. En effet, traitée par l'hypo- bromite de sodium, elle perd un atome d’azote qui se dégage et il se forme une oxydésaminobhistidine sur laquelle on reviendra plus loin; 3° Que l'histidine ne contient pas de méthyle com- biné à O ou à Az, détermination qui fut faite à l’aide de la méthode connue de MM. Zeisel et Herzig-Mayer. Cherchant ensuite à établir la nature des deux autres atomes d'azote, M. Pauly fit voir que l’un de ces atomes appartient à un groupement imide — AzH, car, en pré- sence du chlorure de l'acide B-naphtalène-sulfonique, lhistidine fixe deux restes naphtalène-sulfoniques. Comme l'un de ces deux restes est fixé par l'unique … groupe AzH* de la molécule, l’autre ne peut être retenu que par un groupe AzH. Le troisième atome d'azote de- vait donc appartenir à un groupement amine tertiaire. M. Pauly présente, en outre, une critique très serrée des “conclusions que M. Fraenkel avait tirées de son travail. En effet, comme l’histidine ne donne aucune des réac- tions indiquant l'existence d'un groupe guanidine ou d'un complexe pyrrolique, qu'elle présente par contre la réaction de Weidel, M. Fraenkel avait conclu à la pré- sence d'un noyau pyrimidique. Il serait trop long de reproduire ici le raisonnement très serré à l’aide a 1 Voyez la Revue du 15 février et du 30 mai 1899. ? S. FRAEXKEL : Monatsh. f. Chem. t. XXIV, p. 229. # H. Pauzx : Zeïtschr f. physiol. Chem., t. XLII, p. 508. hypothèse. D'ailleurs, MM. Knoop et Windaus ont montré que l’histidine n’est pas attaquée par le sodium et l'alcool, ce qui est tout à fait contraire à la conclu- sion de M. Fraenkel, puisque le noyau pyrimidique s'ouvre dans ces conditions et que la méthylpyrimi- dine, par exemple, est réduite à l’état de diamino- butane*. Cette résistance de l'histidine confirme, au contraire, l'hypothèse d'un noyau d'imidazol, proposée par Pauly, et qui ferait de l'histidine un acide «-amino-B-imidazol- propionique : NS | CH C 74 | CH: (l CH— AzH, | I >CH CH— AzH° CH— Az 7 | CooH Imidazol ou glyoxaline. Histidine. Cette formule rend compte, en outre, de l'existence de l’histidine biargentique, un atome d'argent se subs- tituant à l'hydrogène de COOH et l’autre à l'hydrogène du groupe imide AzH. De fait, l'imidazol donne un dérivé RAS par substitution du métal à l’hydro- gène imidé. MM. Knoop et Windaus viennent de confirmer cetw formule par voie synthétique. Si la formule (I) de M. Pauly est exacte, l’oxydésamino-histidine de M. Fraenkel, représentée alors par le schéma (IL), doit fournir par réduction le composé (III), soit donc l'acide $-1midazol-propionique. CH — AzH { — mn { = — ei dus (II) due (II) don de: doom doom Oxydésamino-histidine. Acide f-imidazopropionique. Or, cet acide, encore inconnu, a pu être obtenu syn- thétiquement par MM. Knoop et Windaus® en partant de l’acide glyoxylpropionique de M. L. Wolff*, que l’on condense avec de la formaldéhyde et de l’'ammoniaque d'après le schéma : A ne DT de — “Son » zH$ © C —— Az (ae => Que Que Que (oo Loox Les deux acides ainsi obtenus ont pu être identifiés d'une façon très précise, car l'acide imidazol-propio- nique cristallise bien, présente un point de fusion ou plutôt de décomposition très net, et donne une série de dérivés: nitrate, chlorure, iodure, chloroplatinate, etc., bien caractéristiques. La constitution de l’histidine se trouve donc déter- minée ; saufen ce qui concerne la position qu'occupe le groupe AzH* dans la chaîne propionique et que MM. Knoop et Windaus se proposent d'établir par un essai d’oxydation. Si AzH®? est bien en position «, on devra obtenir dans ces conditions l'acide imidazol-acétique, 1 Bvx : D. chem. G., t. XXXVI, p. 1924. ? Kwoop et Winpaus : Beitr. z. chem. Physiol.u. Pathol., t. VII, p. 144, 1905. 3 Wozrr : Ann. d. Chem., t. CCLX, p. 91. 970 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 6. — Sciences médicales Les bienfaits de la réforme temporaire dans larmée. M. le médecin-major Bonnette vient de publier ‘, sur ce sujet, une étude très docu- mentée qui semble prouver les heureux effets de la réforme temporaire dans l’armée. Parmi de nombreux exemples, celui-ci semble assez net : Pendant dix-huit ans, de 1880 à 1897, les deux bataillons du régiment d'infanterie de Bourg-en-Bresse (environ 1.200 hommes) ont fourni en moyenne trente-cinq réformes n° 2. Depuis l'adoption de la réforme temporaire, c’est-à- dire depuis six ans, le nombre des réformes n° 2 à diminué au moins du cinquième, grâce aux renvois temporaires dont le nombre a progressivement aug- menté (54 en moyenne). Ainsi, dans deux bataillons d'infanterie, le nombre des exclus définitivement a diminué el, en outre, ce qui n’est pas négligeable, une cinquantaine d'hommes, qui se trouvaient affaiblis, anémiés par le rhumatisme articulaire aigu, la grippe, des bronchopneumonies, des pleurésies ou des affec- tions suspectes, ont été provisoirement éliminés du rang et ont pu, loin de l'air empesté des chambrées et de la vie débilitante de la caserne, réparer leurs forces et fortifier leurs poumons en pleine campagne, en plein soleil : ce n'est point, à notre avis, un mince résultat. $ 7. — Géographie et Colonisation Les travaux de la Mission Maclaud pour la délimitation de la frontière entre la Guinée française, la Casamance et la Guinée portugaise. — La Mission chargée, sous la direction du Dr Maclaud, de la délimitation et de l’abornement, de concert avec une Mission portugaise, de la frontière entre la Guinée portugaise et nos territoires limitrophes de l'Afrique occidentale (Casamance et Guinée fran- çaise) a achevé, avec succès ses travaux, après trois campagnes très dures. Les pays à travers lesquels elle a opéré étant pour la plus grande part inexplorés ou mal connus, la Mission a rapporté des renseignements géographiques nouveaux, en même temps que de pré- cieuses indications au point de vue économique et des documents scientiliques très nombreux et de tout ordre. Nous avons déjà parlé de la première campagne, au cours de laquelle fut abornée, en 1902-1903, toute la frontière méridionale de la Guinée portugaise ?. En 4903-1904 fut achevée la détermination du parallèle 42040! Nord depuis 16° jusqu'à 17°30/ de longitude Ouest de Paris et entamée la délimitation de la fron- tière entre ce point et le cap Roxo. Au cours de la dernière campagne (1904-1905), le tracé a été mené jusqu'à l'Atlantique séparant les bassins des rivières Casamance et Cachéo. Relevons d'abord quelques-unes des notions données par la Mission sur les pays parcourus durant les deux dernières campagnes. Entre 16° et 17°30' de lon- gitude ouest, elle à traversé la riche et fertile province du Fouladou, dont elle a signalé les ressources abon- dantes. Le pays est uniformément plat et couvert d’épais fourrés de bambous. Les cours d’eau, larges et sinueux,ont des rives basses et imprécises, sur lesquelles les indigènes font d'excellentes récoltes de riz. A côté des Peulhs ou Foulbés, qui déplacent souvent leurs villages, résident les Mandingues, asservis par eux et plus sédentaires. Mandingues et Peulhs ne se mélan- gent pas, et presque tous les villages comptent deux groupes de cases : Foulacounda signifie endroit où habitent les Foulbés, et Moricounda endroit où résident les Mandingues. Le Fouladou pourrait nourrir une population dix fois plus nombreuse ; les champs de coton sont abondants et, autour de chaque village, 1 Bulletin médical, 1905, n° 53. ? Revue générale des Sciences, 1904, p. 222. paissent de magnifiques troupeaux de bœufs. Dans le Sankolla, on trouve beaucoup de lianes à caoutchoue à peine exploitées; des forêts de palmiers à huile bor- dent les rivières. A mesure qu'on s'approche de la Casamance, sur laquelle on trouve, à 2.300 mètres à l’ouest du méridien 17°30' Ouest de Paris, le village de Kolibantan, l'aspect du pays se modifie. A la flore guinéenne succèdent les essences sénégalaises ; on trouve de plus en plus fré- quentes les cultures d'arachides et de mil, les champs de calebasses et de coton; les villages sont moins clair- semés. Jusqu'au poste de Farim, sur le Cacheo, situé à peu près sur le même méridien dans la Guinée portugaise, on reste, au contraire, en plein pays guinéen. La laté- rite et les grès rouges affleurent dans le voisinage d'une ligne de faîte de faible élévation (35 mètres envi= ron) qui sépare le bassin de la Casamance de celui du Cachéo. La frontière, qui de 16° à 17930! de longitude était une ligne droite, se tient, à partir de ce dernier méri- dien, à égale distance du rio Cachéo et de la Casa- mance. La Mission se trouvait donc amenée à explorer ces deux bassins. \ Dans l’un et l’autre, des marigots profonds et salés pénètrent au loin dans l'intérieur des terres. Une dizaine de kilomètres seulement séparent le marigot de San Domingo, diverticule du Cachéo, du marigot de Guidel, tributaire de la Casamance. Lorsqu'on approche de la mer, on voit ces canaux s’aboucher les uns dans les autres et constituer un réseau compliqué de lagunes que traversent de violents courants marins. Ce dédale de canaux modifie profondément le régime des marées, qui se font encore sentir à 50 kilomètres en amont de Farim. La plupart navigables, ils peuvent rendre de grands services pour la mise en valeur du pays. Le Cachéo, qui est la grande artère de la Guinée por- tugaise, est une merveilleuse voie de pénétration, de mème que la Casamance du côté français. De Farim à Cachéo, le fleuve portugais se présente comme un large couloir sinueux, qu'on dirait taillé à l’'emporte- pièce dans la nappe verte des palétuviers. Son lit, large de 200 mètres à Karim, s'étale dans les alluvions voi- sines de la côte. Sa profondeur est partout considé- rable; à 200 kilomètres de l'embouchure, elle est encore de 7 mètres à mer basse et les grands navires peuvent remonter jusqu à Farim. Les poissons de toute sorte abondent dans le fleuve et dans ses affluents; la pèche et le séchage du poisson sont une des princi- pales industries du pays. Dans la région de marécages qui s’étend entre le Cachéo et la Casamance, les opéra: tions de la Mission devaient, on le comprend, présen- ter de grandes difficultés. La Mission à employé, pour obtenir les positions devant lui fournir des points de départ pour ses tra- vaux géodésiques, des procédés différents selon les facilités du terrain, Chaque fois qu'on put déterminer des positions par rapport à des points indiscutable= ment connus, on employa la méthode du transport de l'heure par chronomètre. Quand ce ne fut plus pos= sible, on eut recours à la méthode astronomique des occultations d'étoiles par la Lune. Les positions déter= minées par ces divers procédés servirent de bases pour le relevé complet de la frontière par la méthode du chainage, qui donne des résultats très précis, mais qui, dans la pratique, est d'un emploi long et souvent pé= nible, Il faut, en effet, passer par tous les obstacles, quels qu'ils soient, et ils ne manquèrent pas à la Mis= sion, qui rencontra,'outrel'inévitable brousse, des forêts impénétrables, puis les boues gluantes des marécages du Cachéo et tous les dangers d'une région malsaine, et enfin qui eut à compter avec l'hostilité des ha= bitants. Les observations astronomiques furent continuées pendant toute la route, autant qu'on le put, et toujours elles corroborèrent l'exactitude des opérations à lan chaine hectométrique. Les travaux géodésiques de la on 7 \ CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 971 Mission permirent de relever des erreurs considérables dans le tracé de la Casamance et dans la position de Sedhiou. Dans la partie de la frontière comprise entre l’inter- section du parallèle 42240! Nord avec le méridien 17930" * Ouest de Paris et le cap Roxo, sur l'Océan Atlantique, il fallut obtenir un tracé exact du cours du rio Cacheo et de la Casamance, puisque la frontière devait, en vertu du protocole du 12 mai 1886, se tenir à égale distance des deux rivières. Le moyen employé par la Mission, comme répondant le plus exactement à cette condition, consista à relier par une ligne brisée la borne 112, située à l'intersec- tion du parallèle 12°40'et du méridien 17930, aux angles saillants septentrionaux de la rivière de Cacheo et aux coudes méridionaux de la Casamance. La médiane du polygone ainsi formé détermina la frontière. Le bornage a été fait par la Mission avec un soin méticuleux et, si jamais un incident de frontière se produisait, il serait extrèmement facile de rétablir les droits de chacun. IL a été posé 184 piliers en pierre, et, là où la pierre manquait, entre la Casamance et le Cacheo, on les a construits en briques. Jamais ces piliers ne sont distants de plus de 6 kilomètres, sauf en un endroit où l'on a rencontré une mer de boue. Aucune des bornes n’est perdue dans la brousse ; elles sont toutes établies sur des accidents de terrain où elles sont faciles à retrou- ver. On en à placé à tous les sentiers et sur le bord de toutes les rivières qui coupent la frontière. D'une borne à l’autre, la frontière est marquée, soit par une ligne droite, soit par le thalweg d'un cours d’eau quand il s'en trouve. En supposant que les bornes soient envahies par la brousse ou détruites par toute autre cause, on retrouverait facilement leur emplacement soit par la carte, soit en se reportant aux procès-ver- baux qui sont réaigés de la façon la plus précise et la plus détaillée. Les résultats de la Mission, au point de vue de la frontière adoptée, sont des plus satisfaisants. Le prin- cipe qui a présidé aux revendications de la Mission française a été de sauvegarder les voies navigables. C'est ainsi qu'elle a pu conserver à la France, près de l'embouchure de la Casamance, tout le réseau navigable du rio de Cajinolle et du marigot de Soukoudiak. Tou- tefois, l'embouchure de cette dernière rivière reste portugaise, aux termes du traité de 1886. Outre le travail de délimitation, la Mission rapporte une carte dressée par l'administrateur Brocard et le levé de nombreux itinéraires de l'administrateur Leprince. Les minutes de la carte ont été faites au 10.000°. Un assemblage au 100.000! a été exécuté sur le terrain même; c'est cette carte qui constate les travaux faits en commun avec les Portugais et c’est d’après elle qu'ils ont été acceptés. On fait actuellement au Minis- tère des Colonies une carte au 250.000°, qui restera comme document au Ministère des Affaires étrangères. La Mission a rapporté, en outre, d'importantes col- lections d'Histoire naturelle qui ont été envoyées au Muséum et qui sont étudiées par des spécialistes. Les recherches ont particulièrement porté sur la faune et la pore économiques, sur les insectes nuisibles, sur les parasites, sur les plantes alimentaires et médicinales. Un grand nombre d'espèces sont nouvelles, notamment parmi les insectes: il en est de même de beaucoup de plantes, dans les familles les plus diverses, jusqu'aux mousses. Des documents entièrement nouveaux ont été rap- portés sur les grands Mammifères de la zone désertique de la haute Casamance : singes, antilopes, etc. Des renseignements inédits permettent de commencer l'histoire biologique de ces espèces. Les végétaux ont été étudiés tant au point de vue de la morphologie que de la science appliquée. D'une facon générale, les observations faites par le Dr Maclaud en Histoire naturelle ont été surtout dirigées dans le sens des études biologiques, en même temps qu'il a noté toutes les particularités pouvant offrir quelque intérêt au point de vue économique. Les échantillons de roches qui ont été réunis ont permis de commencer à dresser la carte géologique de la Casamance. Enfin, la Mission a été amenée à étudier très en détail les nombreuses races indigènes avec lesquelles elle à été en contact sur son parcours et elle a rapporté des documents ethnographiques considérables. Après les Nalous, les Yolas, les Tendas, les Bagas, les Landoumans, les Mékhiforés durant la première campagne, puis les Peulhs, les Mandingues durant la seconde, la Mission a rencontré les Balantes et les Bagnounks, entre la Casamance et le Cacheo. Les Balantes, qui viennent de la Guinée portugaise, ont le type nigritien très accentué. Ils vivent dans l'anarchie la plus complète; ils se font remarquer par leur penchant au vol et leur amour du pillage. L'insé- curité la plus complète règne aussi bien entre villages de même race que sur leurs frontières. Les Balantes se bornent à cultiver pour les besoins de la famille et n'ont que de maigres troupeaux *. Les Bagnounks sont aussi misérables que les Ba- lantes, mais beancoup plus lâches. La Mission recueillit aussi des données très com- plètes sur les Bayottes, qui habitent le pays au sud de Ziguinchor. Les Bayottes sont de race diola. Ils sont de taille moyenne, ont les traits du visage grossier, le regard fuyant et sournois; ils sont presque toujours nus. Comme toutes les autres peupiades de ces régions, ils vivent dans l'anarchie. Ils sont assez bons cultiva- teurs et pratiquent quelques industries, comme le tis- sage du coton ?. Plus à l’ouest, on se heurta aux Diolas Floups, et il fallut repousser les attaques de la tribu des Diamates. Toutes ces tribus, qui habitent la basse Casamance, ont entre elles de grandes affinités et elles paraissent se rapprocher aussi beaucoup des autres peuplades primitives de l'Afrique occidentale. On pourrait y voir comme des restes d'une grande race primitive, repous- sée et disloquée par des invasions successives et dont les débris épars se seraient trouvés arrêtés seulement par les obstacles naturels : la grande forêt ou la mer. Gustave Regelsperger. $ 8. — Congrès Congrès international d'Anthropologie et d'Archéologie préhistoriques.— La XII° session du Congrès international d’Anthropologie et d'Archéo- logie préhistoriques se tiendra à Monaco, sous le haut protectorat du Prince Albert L®, du 16 au 21 avril 1906. Les importantes découvertes faites dans la région, notamment celles dont la science est redevable à l'initiative du Prince de Monaco lui-même, donneront à cette session un intérêt tout particulier. En dehors des séances, où seront traitées à la fois des questions locales et générales, des excursions seront organisées, notamment aux célèbres grottes de Baoussé-Roussé et à quelques enceintes préhistoriques. Peuvent faire partie du Congrès et ont droit à toutes ses publications les personnes qui en font la demande et ont acquitté la cotisation de 15 francs. Pour tous renseignements, s'adresser à M. le D' Verneau, secré- taire général, 61, rue de Buffon, à Paris. 1 Juces Leprisce : Notes sur deux tribus de la basse Casamance (Revue coloniale, septembre 1905, p. 513). 2 Juces Lerrince : Les Bayottes (Le Tour du Monde, 1 et 14 octobre 1905. À travers le monde). 972 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES EN ASTRONOMIE DE POSITION 1. — CRITIQUE DES DÉTERMINATIONS ACTUELLES dien est aujourd'hui à peu près seul employé pour DES POSITIONS PRÉCISES. cette détermination; et c’est le même instrument, avec des dimensions réduites afin d'être plus aisé- $ 1. — Précision des déterminations actuelles. Les observations astronomiques effectuées dans les observatoires permanents ou temporaires, en vue de déterminer les coordonnées des astres ou simplement celles du zénith sur la sphère céleste à une heure donnée d'une pendule, sont loin de fournir des résultats aussi précis que sembleraient l'indiquer les valeurs des erreurs probables dont on les fait suivre ordinairement. S'il est de règle, dans les déterminations de cette espèce, de donner les latitudes et les déclinaisons au 1/10 de seconde d'arc, les ascensions droites et les heures au 1/100 de seconde de temps, il s’en faut que l’approxima- tion réellement obtenue soit de l’ordre de la der- nière décimale, et il arrive même souvent qu'on ne peut compter sur l'exactitude de l'avant-der- nière. Pour s’en convaincre en ce qui concerne les coordonnées comptées suivant le méridien, il suffit d'examiner les écarts des valeurs brutes de la lati- tude d’un même lieu obtenues par le même obser- vateur avec le même instrument et en employant la même méthode. Ces écarts augmentent, en gé- néral, lorsqu'il y a plusieurs observateurs, et ils prennent presque toujours une allure systématique lorsqu'on change de méthode ou d'instrument. C'est ainsi que les valeurs de la latitude obtenues avec un cercle méridien, d'une part, indépendam- ment des erreurs de positions d'étoiles, par l'obser- vation de circompolaires à leurs passages supérieur et inférieur, d'autre part, presque indépendam- ment de la réfraction, par l'observation de circom- zénithales, présentent des écarts moyens de même signe qui atteignent une seconde pour une année. Même différence entre les résultats fournis par les mêmes étoiles observées avec un cercle méridien et un cercle mural. Pour ce qui est de l'heure et des ascensions droites, on constate également des écarts dépassant parfois 0°,1 entre les ascensions droites conclues des mêmes étoiles prises le même jour par des observateurs différents. Afin de trouver l’explicalion de la faible préci- sion obtenue dans la détermination des positions du zénith et des astres, il convient d'examiner les méthodes et les instruments en usage actuelle- ment. Dans les observaloires modernes, le cercle méri- ment transportable, qui sert dans toutesles grandes opérations de géodésie et de géographie mathéma- tique pour obtenir l'heure et la latitude. Nous nous bornerons donc à étudier cet instrument et les méthodes d'observation méridienne. $ 2. — Observations méridiennes. Les observations avec un instrument méridien étant différentes suivant qu'il s'agit de la détermi- nation de la latitude et des déclinaisons, ou de l'heure et des ascensions droites, nous diviserons cette étude en deux parties : 1. Détermination de la latitude et des déclinai- sons. — Le problème consiste à mesurer des dis- tances zénithales méridiennes d'’astres. Si la décli- naison de l’astre est connue, la mesure donne une valeur de la latitude. Si, au contraire, on connaît la latitude, la mesure fournit la déclinaison. La série des opérations nécessaires pour obtenir une distance zénithale comprend le pointé de l'étoile, précédé et suivi d’un pointé du nadir dans la même position de l'observateur, et les lectures correspondant à ces trois poinlés. La distance zéni- thale se déduit de la différence entre la moyenne lecture du nadir et celle de l'étoile. Or, cette difré- rence est affectée des erreurs de pointé, de lecture et de division du limbe. En outre, on admet que la lecture du nadir qui correspond au pointé de l'étoile est la moyenne des lectures avant et après, ce qui n'est rien moins que démontré. En pratique, comme les pointés du nadir sont longs et pénibles, au lieu de les faire avant et après chaque étoile, ce qui serait logique, on in- tercale une série d’une dizaine d'étoiles entre deux pointés du nadir, et l'on fait encore correspondre au pointé de chaque étoile la moyenne des lectures du nadir obtenues dans la même position de l’ob- servateur, comme si le cercle porte-microscopes restait immobile durant la série. Pour constater l'immobilité de ce cercle, on n’a que le niveau qui lui est fixé, et l'on sait que ses indications sont rarement d'accord avec celles que donne le bain de mercure, De plus, le fil du réticule n’est jamais complètement horizontal, et, comme les pointés ne se font pas exactement au même point du fil, cette cause d'erreur, si petite qu’elle soit, vient encore | | | | | | A. CLAUDE £r L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 973 fausser les données de l'observation. Enfin, il reste les erreurs dues à la flexion de la lunette. Il est difficile, on le conçoit, de donner une idée même approximative de l'importance de ces di- verses erreurs. Celle de lecture, par exemple, qui paraît pouvoir être évaluée le plus aisément, dépend de la grandeur du cercle, de la perfection de sa division, de l'éciairage et du nombre des microscopes. Pour le grand modèle de cercle por- tatif à quatre microscopes, on peut affirmer cepen- dant qu'elle n’est pas inférieure à + 0”,5. Celle de la différence des lectures du uadir et de l'étoile est, par suite, au moins égale à H+0",5V 2——+0",7. En y ajoutant les erreurs de division, on voit que la différence des lectures est obtenue au plus à 1”. Avec les grands cercles fixes des observatoires, l'erreur de lecture doit être sensiblement plus faible, et comme, par l'étude du cercle, on connaît les erreurs de division, il semble qu'on doive arriver à une précision beaucoup plus grande. Il n’en est rien cependant : diverses causes encore mal connues font que la précision apparente des lectures est illusoire. En outre, les déformations irrégulières du cercle divisé sous l'iufluence de la pesanteur sont d'autant plus à craindre que le cercle est plus grand. Aux erreurs énumérées ci-dessus, et qui tiennent à l'instrument employé et à l'observateur, il faut ajouter une erreur physique redoutable, celle qui provient des anomalies de la réfraction. Dans les déterminations de latitude, on parvient à l’éliminer en partie en observant des étoiles culminant à une faible distance du zénith, en même nombre et à la même distance moyenne, vers le Nord et vers le Sud. Mais, pour les déterminations de déclinaisons, elle intervient en entier. 2. Détermination de l'heure et des ascensions droites. — La détermination de l'heure par des observations de passages à la lunelte méridienne donne lieu à une critique analogue à celle formulée plus haut au sujet des mesures de distances zéni- thales méridiennes. On s’évertue à obtenir l'instant du passage au fil moyen avec le plus d’exactitude possible en mettant un grand nombre de fils, et, au lieu de déterminer les corrections immédiate- ment avant et après chaque équatoriale, on en prend parfois une dizaine sans pointer la mire et Sans faire de nivellement pour ne pas perdre de temps. Or, si la collimation varie en général assez peu pour pouvoir être regardée comme constante pendant toute la durée d’une série el n'être, par suite, déterminée qu’une fois, il n'en est pas de même de l'inclinaison et de l’azimut, qui changent constamment et parfois très rapidement, surtout dans les instruments portatifs. Ces changements peuvent entrainer pour les corrections des varia- tions supérieures à la précision obtenue pour le passage au fil moyen. Il importe donc de n'inter- poler les valeurs de l’inclinaison et de l’azimut que dans le plus court espace de temps possible, et par conséquent de les déterminer avant et après chaque passage d'étoile. En’ opérant autrement, on aug- mente le nombre des résultats aux dépens de leur précision. Ce qui peuüt excuser jusqu’à un certain point l'usage si répandu de considérer les erreurs instru- mentales comme constantes pendant toute la durée d'une série, c’est la difficulté qu'on éprouve à les déterminer exactement. Laissons de côté la colli- mation, bien qu’on trouve généralement des diffé- rences très appréciables et inexplicables entre la collimation physique et la collimation polaire, et passons immédiatement à l’inclinaison. Y a-t-il un instrument plus capricieux que le niveau? Il indique souvent des variations d'inclinaison bien supé- rieures aux variations réelles alors que, d’autres fois, de petits changements d'inclinaison provo- qués artificiellement le laissent insensible. Nous ne sommes pas éloignés de partager l'opinion de cer- tains observateurs qui pensent qu’un nivellementne peut être réputé bon que s’il est la moyenne d'un grand nombre de mesures. Mais alors il faut suppo- ser l’inclinaison constante pendant toute la durée de ces mesures ou se résigner à n’obtenir qu'une incli- naison moyenne. Concluons en disant que le niveau est un instrument un peu grossier, qu'il faut bannir autant que possible des mesures de précision, et que son emploi dans la lunette méridienne, à défaut des pointés du nadir qui ne sont pas pratiques, est une cause d'infériorité pour cet instrument. On peut, sans doute, éliminer l'influence de l’erreur d'inclinaison en observant des étoiles qui culminent à une faible hauteur, mais cela n’est possible que dans les latitudes élevées et, d’ailleurs, on tombe dans un inconvénient encore plus grave, comme nous allons le voir. L'erreur d'azimut est la plus difficile à déter- miner. Elle s’obtient, en général, par l'observation d'une polaire et d'une équatoriale : c’est dire que l'opération demande un certain temps pendant lequel on suppose l'azimut invariable. On corrige les heures de passage rapportées au fil sans colli- mation des effets de l'inclinaison de l'axe; la faible précision avec laquelle celle-ci est mesurée se fait sentir sur la correction de la polaire dans les hautes et moyennes latitudes. De l'azimut calculé, on déduit l’azimut de la mire supposé invariable dans le cours d’une soirée. Les azimuts successifs de la lunette résultent alors des pointés sur la mire. On voit que cette détermination est basée sur quelques hypothèses plus ou moins vraisemblables 974 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 1 et qu'elle comporte un certain nombre d'opérations entrainant autant d'erreurs, et l’on comprend sans peine qu'on ne puisse jamais répondre d'un azi- mut à 0,1. Aussi a-t-on cherché dans ces derniers temps à se débarrasser de la correction d'azimut en n'observant que des éloiles culminant dans le voisinage du zénith; mais alors l'erreur d’incli- naisOn à son maximum d'influence ; de plus, la pré- cision des observations se trouve diminuée, sauf dans les basses latitudes. i Notons encore les erreurs dues aux flexions laté- rales et celle qui résulte de l'inégalité de diamètre des tourillons, dont la forme même n'a jamais été définie pour aucun instrument. On voit donc que, si l'heure du passage d’une étoile équatoriale au fil moyen peut être notée avec beaucoup d'exactitude, la réduction de ce passage au méridien n'est pas susceptible d’être déterminée avec la même précision : le nombre des inconnues est trop grand et il n'y a actuellement aucun pro- cédé qui permette d'obtenir les valeurs simultanées des erreurs instrumentales qui correspondent à l'heure même d’une observation, puisqu'il faudrait autant d'équations que d’inconnues etqu'on ignere jusqu'à la forme des équations pour certaines d'entre elles. II. — LE PROBLÈME DE L'ASTRONOMIE DE POSITION. LIEUX GÉOMÉTRIQUES. $ 1. — Véritable énoncé du problème. Ainsi, non seulement les instruments méridiens ne donnent pas et ne peuvent pas donner la pré- cision qu'on leur attribue souvent, mais encore il est impossible de se faire une idée nette de la pré- cision qu'ils permettent d'obtenir, tant pour la latitude et les déclinaisons que pour l'heure et les ascensions droites. Devant cette insuffisance de l'instrument uni- versel de l’Astronomie de position précise, on est amené à se demander si, au lieu de déterminer séparément les coordonnées des points, il n’y aurait pas avantage à généraliser le problème en consi- dérant les positions. En somme, le véritable énoncé du problème qu'il s'agit de résoudre est le suivant : On connait par leurs coordonnées : ascension droite et distance polaire, les positions d'un cer- lain nombre d'astres À, D, C,...; déterminer sur la sphère céleste un point X, position du zénith à un instant donné ou d'un autre astre, de manière que le rayon du cercle d'incertitude soit minimum. Sous cette forme, on voit qu'il faut chercher une série de lieux géométriques du point X qui le déter- minent le mieux possible dans toutes les directions. On sait combien l'introduction de cette notion de lieu géométrique en Navigation a transformé les anciennes méthodes et quelle clarté elle pro- . jette sur tous les problèmes d’Astronomie Dau- tique. En Géodésie, où elle a été apportée par M. Hatt', elle rend d'immenses services, non seu- lement en raison de la précision plus grande qu’elle donne dans les calculs de triangulation, mais aussi pour la facilité avec laquelle elle permet de résoudre les problèmes géodésiques et les simplifications qu'elle suggère dans les opérations sur le terrain; et nul doute qu’elle n'arrive peu à peu à remplacer celle du triangle. Seule, l’Astronomie de position précise est restée fidèle aux anciennes méthodes, et, sauf dans quelques Mémoires trop oubliés, il n’est jamais question de lieu géométrique : il sem= blerait, au soin avec lequel on évite le mot, lors même qu'on ne peut éviter la chose, que ce soit [à une conception grossière, bonne tout au plus pour les applications moins précises telles que la Navi gation. Et, pourtant, on ne saurait trop le répéter :\ une mesure astronomique quelconque donne un lieu géométrique et ne peut donner autre chose. Cest la notion fondamentale qui devrait servir de base à l'enseignement de l'Astronomie sphérique tant elle est simple, claire et précise. S 2. — Problème de la détermination d’un point sur le plan. Avant de chercher à résoudre le problème de l'Astronomie de position, nous allons prendre un cas plus simple, celui de la détermination d'un point sur un plan, afin de faire mieux saisir l'esprib de la méthode. Ce problème s’énonce ainsi : Plusieurs points À, B, C, … (fig. 1) étant donnés sur un plan par leurs coordonnées rectangulaires A y" ' 8, C ll Li À i x [l x he SR, Xo oi 0 Z Fig. 1. Li PAR VE déterminer la posilion du point inconnu X de ce plan de manière que le rayon du cercle d'incertitude soit minimum. | L'observateur a à sa disposition trois espèces de mesures : ! Harr : Des coordonnées rectangulaires et de leur emploi dans les calculs de triangulation. Service hydrographique de la Marine, AS93. | A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 975 1° Mesure des distances du point inconnu X aux divers points connus AÀ,B, CG, … Chaque distance mesurée, telle que AX, donne un lieu géométrique de X qui est le cercle décrit de À comme centre avec AX comme rayon; 2° Mesure en chacun des points connus À, B, C, de l'angle que fait la direction du point inconnu AX, BX, CX, … avec celle d'un point connu AB ou “AC, … BA ou BC, … CA ou CB … Chaque angle mesuré donne un lieu géométrique de X qui est le relèvement issu du point connu; 3° Mesure au point inconnu X des angles AXB, AXC, … que font les directions des points connus avec l'une d'entre elles choisie pour origine. Chacun de ces angles, tel que AXB. donne un lieu géométrique qui est le segment CHERE de l'angle AXB construit sur AB. Ces trois espèces de lieux géométriques peuvent être employées concurremment pour la détermi- nation de X.Connaissant une position approchée X, de X, posilion qu'il est toujours facile de se pro- curer, soit graphiquement, soit par le calcul, en prenant l'intersection de deux lieux se coupant sous un angle convenable par exemple, on calcule les coordonnées, par rapport à des axes X, x', X, y! parallèles aux premiers, de quelques points de chacun des lieux dans le voisinage de X,: deux suffisent si le lieu est une droite, trois si c'est un cercle ; et, si X, est suffisamment approché, on peut se contenter dans tous les cas de calculer un point et la direction du lieu en ce point. Sur une pro- jection à une échelle plus ou moins grande, suivant la précision que les mesures permettent d'espérer pour X, on porte tous ces éléments de lieux qui représentent la partie ulile de chacun d'eux et on a ainsi la traduction graphique des résultats de toutes les mesures. Siles mesures étaient exactes et s'il n'y avait pas d'erreurs sur les positions des points connus, “toutes ces droites concourraient en un même point qui serait le point X cherché. Mais il n'en est pas ainsi. Pour simplifier, supposons les points À, B, C, :.. connus exactement, en sorle que les lieux de X ne soient affectés que des erreurs de mesure. Pour choisir rationnellement le point à adopter, il est nécessaire de connailre la précision relative des “différents lieux, précision qui dépend pour chacun d'eux de celle de la mesure qui l'a fourni et de la Sienne propre. Ainsi l'erreur probable, dans le voi- sinage du point X, du relèvement AX par exemple, a pour expression : esind”X AX,, € étant l'erreur probable en secondes d'arc de la mesure de l'angle qui a fourni le relèvement, BAX par exemple. Il est clair, en effet, que l'erreur pro- bable du relèvement, c'est-à-dire son déplacement au point X pour l'erreur probable # sur l'angle, est proportionnelle à la distance AX, ou sensible- ment AX.. Sa précision peut être définie par l'expression inverse : ERABC ET ESA Se he et son poids représenté par le carré de celle-ci, soit par : D—= dan ie es En e AXE On trouverait de même les expressions des poids des lieux des deux autres espèces, connaissant les erreurs probables des mesures de l'unité de lon- gueur et des angles en X. La théorie des erreurs nous enseigne alors que le point le plus probable est celui pour lequel ÈP@ est minimum, d désignant sa plus courte distance au lieu de poids P et le signe È s'étendant à tous les lieux géométriques. La con- struction directe dece pointsurlaprojection devient très compliquée lorsque le nombre des lieux est un peu grand, et il est plus simple, dans ce cas, d’avoir recours au Calcul. Si les poids ne sont pas counus d'une façon assez précise, on peut se contenter de prendre le point au jugé en se guidant d’après le principe fourni par la théorie des erreurs. Il est évident que le point X est d'autant mieux déterminé que les lieux sont en plus grand nombre et qu'ils se coupent deux à deux sous des angles plus grands. D'autre part, il importe qu'il soit éga- lement bien déterminé dans tous les sens et, pour cela, que la somme des poids des lieux dont les direclions sont comprises dans un même angle azimutal suffisamment faible soit à peu près con- stante. On peut alors définir par une quantité unique l'erreur probable de position de X, ainsi qu'on va le voir un peu plus loin. L'expression : ARE + — Te nEP ? où n est le nombre total des lieux, peut être em- ployée pour obtenir cette erreur probable dans le cas où X est dé- terminé géométriquement. Si les points À, B, C, … étaient affectés d'erreurs probables «, 6, y, -.., il en résulterait pour les lieux géométriques des erreurs probables faciles à calculer, qui viendraient s'ajouter à celles provenant des erreurs d'observa- tion et qui influeraient tant sur le choix du point X que sur la valeur de son erreur probable. 976 A. CLAUDE er L. DRIENCOURT — [LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES Analytiquement, le problème est des plus simples. Les formules qui donnent en coordonnées rec- . A , : . A tangulaires la longueur D et l'orientation V par rapport à Oy (fig. 2) de la ligne XA qui joint les deux points X(x, y), A(x,, y,), sont: x, —x— D" sin V° D RE nn y, =} =D; cos V:. En les différenciant par rapport à DeN a E 7,, on obtient les expressions des varialions de D° et de V° en fonction de celles des coordonnées des deux points : Ne en dx cos NV? , dy sin V° aN° — (2) D° æ dD" = — dx sin V' — dy cos N° dx, cos V° dy, sin V° ANSE RETRO Re (3) D° D° dD'— dx, sin V' + dy, cos V”. Soit X, (x,, y,) une position approchée de X et posons : X— Xo | dx, Y = Yo + dy. Si l'on donne à dx et à dy cette signification dans les équations (2), dV et dD° seront les variations d'orientation et de longueur de la ligne XA quand on passe de X, à X, et en posant : (x — Dé sin VG À Ya—Ys = Di cos Vo on aura : Ve NEC D'—D$ FdD;. Cela posé, une mesure de la distance D' donne l'équation de condition : (4) dDG — — dx sin Vo — dy cos Vi. v 0 En second lieu, si l’on mesure au point A l'angle entre un autre point connu B (x,, y,) et le point inconnu X, il suffit d'ajouter cet angle à l'orien- tation calculée de AB ou de l'en retrancher pour obtenir une valeur de l'orientation 480° + V* de AX qui fournit l'équation de condition : (5) DéaVo sin {= — dx cos V, + dy sin Vo, AU Her : dV, étant exprimé en secondes d'arc. Enfin, si du point X on mesure l'angle entre les deux points connus À et B, on a une valeur de 7A B ; É à on 4 V —V qui donneune équation de condition d'une troisième sorte : (6) d(NS —Ni) sin 11— n (<°S VMC OS AV ne sin VS sinV — dx — dy Us pà D} Da Ts D” d(VS— VD) = V'— V'— (VS — Va) avec exprimé en secondes d'arc. Posons pour abréger : mu — °° MEN Ni Vo sin NA Dj Dy Dj Di +VMEN=R, cos 8— À, sin 5 = À: (6) devient : (6) Rd(V$ — Vÿ) sin 1° = — dx cos 0 + dy sin 8. Les équations de condition (4), (5) et (6') sont de forme linéaire, si l'on y regarde dx et dy comme des coordonnées courantes, et représentent les tangentes aux lieux géométriques ou mieux un élément de chacun de ces lieux dans le système d'axes parallèles aux premiers et passant par le point X,, à la condition que ce point soit suffisam- ment approché, ce qu'on peut toujours vérifier a posteriori. Les premiers membres sont les dis- tances à l'origine; ils représentent par conséquent les déplacements de chacun des lieux pour la variation correspondante de l'élément mesuré lorsqu'on passe de X, à X. Et l’on aura immédia- tement l'erreur probable du lieu géométrique en remplacant cette variation par l'erreur probable de la mesure. Si par exemple (e)' est l'erreur probable en secondes d'arc de l’angle BAX, l'erreur probable du relèvement représenté par (5) sera : (1) (e)!"Dj sin 1", ce qui est l'expression trouvée plus haut directe- ment. En divisant les deux membres de chacune des équations (4), (5) et (6') par un facteur propor- tionnel à son erreur probable, on les ramène au même degré de probabilité. Il n'y a plus alors qu'à les traiter par la méthode des moindres carrés pour en tirer les valeursles plus probables de dxetde dy. La méthode analytique est celle qu'il convient d'adopter pour la détermination rigoureuse du point le plus probable, lorsque le nombre des” équations de condition dépasse trois et que les erreurs probables des mesures sont connues avec assez d’exactitude. Elle permet, en outre, d'obtenir assez simplementles valeurs des erreurs probables èx, ày des coordonnées x et y. Si le point X était également bien déterminé. dans tous les sens, les quantités x et ôy seraient égales et indépendantes de l'orientation des axes : leur valeur commune représenterait ainsi l’erreurs probable de la position du point X dans tous les sens. Par analogie avec ce cas idéal, on peut, si l'on admet que le point est suffisamment bien déterminé dans tous les sens, prendre la quantité M VE (8) pour définir l'erreur probable de la position de X. | A. CLAUDE gr L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 977 Celte convention offre l'avantage que l'erreur est représentée par une quantité unique et qu'elle est indépendante de l'orientation des axes. Ce qui précède suppose que les points À, B, C, … sont exactement connus. Si leurs coordonnées étaient affectées d'erreurs probables DAOATES y, etc., les équations (3) permettraient de calcu- ler d'erreur probable de l'élément observé qui en résulte et, par suite, celle du lieu géométrique lui- même qui, combinée avec l'erreur probable prove- nant de la mesure, donnerait l'erreur probable totale. Prenons comme exemple le relèvement issu - de À. Son erreur probable d'orientation, résultant des erreurs èx,, y, supposées entièrement indé- pendantes, a pour expression en secondes : nn —) X— De sin 1 et l'erreur probable totale du relèvement ou de l'équation de condition (5) sera : (9) + sin 4" X VIe) "DA + (SVP. Le problème est donc complètement résolu. $ 3. — Détermination d’un point sur la sphère immobile. Le problème de la détermination d’un point sur la sphère supposée immobile n’est guère plus compliqué que sur le plan. La mesure des distances est remplacée par celle des angles au centre, la mesure des angles plans par celle des angles dièdres. La sphère dont il s’agit ici est la sphère céleste; les points A, B, C, …, X sont des astres ou le zénith, seul point observable en dehors des astres, et il n'y a à considérer que les angles au centre “comptés à partir du zénith, ou distances zénithales, et les angles dièdres ayant pour arête la verticale, ou différences d'azimuts. Celles-ci, suivant que le zénith Z est l'un des points connus A, B, CG, ..., ou le point inconnu X, fournissent un relèvement ou un segment capable sphérique : le premier lieu est un grand cercle passant par Z, le second une courbe qui diffère plus ou moins d’un cercle. Quant aux distances zénithales, elles donnent des petits cercles de la sphère, appelés cercles de hauteur, qui ont, comme dans le cas du plan, le point observé ou le zénith pour centre et la distance mesurée pour rayon. Le point inconnu X sera donc déter- miné par des lieux de deux espèces seulement : cercles de hauteur et segments capables sphé- riques si c’est le zénith, cercles de hauteur et relè- vements, si c'est un asire. On peut encore, pour obtenir la posilion de X, combiner les lieux des deux espèces et les tracer sur un plan. X, désignant comme précédemment une position approchée de X, on regarde la sphère comme plane aux environs de ce point, ce qui est permis dans des limites plus ou moins étroites sui- vant la précision qu’on cherche pour X, et l’on dé- termine à l’aide du calcul, par rapport à deux axes rectangulaires X,y, X,x représentant le méridien et la tangente au parallèle de X,, un élément de cha- cun des lieux dans le voisinage de X,, qu'on con- struit ensuite sur une projection à une échelle convenable. Il ne reste plus alors qu'à choisir le point. Il faut, pour cela, connaître les poids des différents lieux ou les inverses des carrés de leurs erreurs probables. Celles-ci s’obtiennent encore en multipliant l'erreur probable de la mesure expri- mée en secondes par le déplacement du lieu pour une variation de 1” de l’élément mesuré, déplace- ment dont il est facile de calculer l'expression géométriquement. Pour le reste, le problème est le même que celui du paragraphe précédent. Analytiquement, la méthode suivie pour le plan s'applique identiquement à la sphère; les formules sont seulement un peu plus compliquées. Au lieu des formules (1), on a les suivantes, qui donnent la distance zénithale et l'azimut d’un astre À : cos { — cos à cos À + sin à sin À cos 15(T — &) sin % cos Z — cos à sin } — sin à cos À cos 15(T — x) sin 15(T — &), (10) sin & sin Z — — sin ô en désignant par : €, la distance zénithale: 3 et, la distance polaire de A et la colatitude comptées de 0° à 180° à partir du pôle Nord; Z, l'azimut compté de 0° à 360° du Nord vers l'Est; « et T, l'ascension droite de A et celle du zénith (ou heure sidérale) comptées de 0 à 24 heures du méridien du point y vers l'Est. De ces trois formules, il n’y en a naturellement que deux qui sont indépendantes. Les formules (2) et (3) sont remplacées par celles qui donnent les variations de distance zénithale et d'azimut en fonction des variations des coordon- nées du zénith et de l’astre : 1 ( dé—= cos Zd\— 15 sin 1sin ZadT (1) À te t(dZ — 15 cos XdT)—= — sin Zdi —15 cos } cos ZdT cos Adô — 15 sin à sin Ada dy s (42) sin & dZ——sin Adô —15 sin à cos Ado, À désigne l'angle à l’astre compté, comme Z, de 0° à 360° du Nord vers l'Est. Les équations de condilion correspondant aux trois espèces de mesures se forment ensuite comme les équations (4), (5), {6'). Z, (,,45 T,) et ‘978 A. CLAUDE er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES F.| A, (3, 15 x,) étant des positions approchées de Z et de À, on pose : ( 2 = do + dho ( = Ô0 + do ( E—to + At Î T=T, + dT° { œ — à + day (2 —=7%0 + A Une mesure de €, par exemple, fournira l’équa- tion de condition : At = cos Z61) 5 — 15 sin }, Sin ZT, ou la suivante : At, = cos A,4dô, — 15 sin ô, sin Ada, suivant qu'il s’agit de déterminer le zénith ou l'astre A. Ces équations remplacent l'équation (4) du plan. L'erreur probable de leur premier membre est évidemment celle de la mesure elle-même de t ou à. Si l’on veut interpréter ces équations géométri- quement et les considérer comme celles de tan- gentes aux lieux géométriques, il suffit de poser : do 45 sin )6dT5 — dX = — dy ( dès = — dy À 15 sin ô,d59 = dx pour avoir les équations en coordonnées rectangu- laires rapportées à deux axes, méridien et tan- gente au parallèle, passant par Z, ou A, : ( A —— sin Z,dx + cos Z,dy y = — Sin A,dx + cos Açdy Ces équations sont identiques à l'équation (4). Les deux autres équations de condition se trai- teraient de la même manière. Le problème s'achève ensuite comme en plan. $ 4. — Détermination d’un point sur la sphère céleste. En traitant le problème qui précède, nous avons supposé le zénith immobile sur la sphère céleste ou, ce qui revient au même, toutes les observa- lions faites au même instant. En réalité, elles se font successivement pendant que le zénith décrit un petit cercle autour du pôle d'un mouvement uniforme. Il faut donc tenir compte du temps écoulé entre les observations, et c’est cette considé- ration du temps qui distingue le problème de l'As- tronomie de position du problème précédent. On l'y ramène en notant à un compteur de temps sidéral les heures {,, £,, ..…., {, des observations. L'astre À, par exemple, observé à l'heure #{,, du compteur, peut être considéré comme ayant été observé à l'heure f, arbitrairement choisie en appliquant à son ascension droite «, la correction t,—t{,, puisque cela revient à faire tourner l'en- semble de l’astre et du zénith aulour du pôle, en sens inverse du mouvement du zénith, du chemin parcouru par celui-ci durant le temps {, — {, pour le ramener à la position qu’il occupait à l'heure f,. i j Par rapport au zénith immobile, un astre a | ainsi une ascension droite variant comme le temps sidéral. Le même astre peut donc être observé plu= sieurs fois et fournir autant de lieux géométriques qu'on aura fait de mesures distinctes. En outre, sam distance zénithale et son azimut varient d'une façon continue entre certaines limites, ce qui per-" met de l'observer lorsque l'une de ces coordonnées atteint une valeur donnée d'avance comprise entre ces limites. Ce sont là de précieux avantages rela-« tivement au cas du zénith fixe par rapport aux astres. L'introduction du temps comme élément observé modifie toutefois considérablement le problème en altérant les poids des lieux géométriques. L'obser-« vation de l'heure comporte une erreur Af qui se reporte intégralement, mais en signe contraire, Sur l'ascension droite de l’'astre considéré comme observé à l'instant {. Cette erreur Ax— — At en engendre une à son tour sur l’autre élément observé, & ou Z, dont on obtient immédiatement les expressions AË ou AZ en faisant dans les équa- tions différentielles (41) et (12) : dé= At, dL—AZ, d=dè=0, d'——da«= At, ce qui donne : AË—— 15 sin } sin Z X At ORNE nee At]—— 15 cos cos Z X A4 : ( At=— + 15 sin ô sin À X At (ES) ( sin ?AZ = + 15 sin à cos À X Af A une erreur probable 3 correspond donc pour la distance zénithale une erreur probable (&)' qui a pour valeur : F (16) (ct)! — 15: sin À sin Z X ôt ou (ëêt)! — 15 sin à sin À X ôt suivant qu'il s'agit du zénith ou d’un astre. Les erreurs probables d’azimut correspondant à l'erreur probable de l'observation du temps s'écri raient de même en partant des secondes for mules (14) et (15). Ces erreurs probables se combis nent avec l'erreur proprement dite (X)' ou (àZ)! dem l’autre élément mesuré & ou Z pour donner l'erreur probable totale (à). Ainsi, pour une mesure de dis: tance zénithale, l'erreur probable lotale sera: (11) (8t) = + Ver) US sin} sin Zëtÿ ou (à) = + VTét)® (15 sinôsin Aët}, un observateur et un instrument déterminés. 11 n'en est pas de même de à/, qui varie ici avec la vitess zénithale de l’astre et qui serait fonction de sa vitesse azimutale s'il s'agissait d'observations d'azimu Par de nombreuses expériences, on a trouvé que l'erreur probable de l'observation de l'heure du ES 4 4 ès , A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 979 passage d'une étoile derrière un fil dans un instru- ment méridien a pour expression ! : sin à est la vitesse azimutale de l'astre vu à l'œil nu, celle d’un astre dans l'équateur étant prise pour unité; G est le grossissement de la lunette: Gsinèest donc la vitesse azimutale dans l'instru- ment. Si l’on admet, ce qui est très plausible, que l'expression précédente de l'erreur probable d'une - observation de temps s'applique aussi bien aux - observations zénithales qu'aux observations azi- - mutales, il suffira d'y remplacer sin à par la vitesse zénithale sin À sin Z ou sin à sin A dans le premier cas et dans le second par la vitesse azimutale sin à cos A. L'erreur probable (17) du lieu géométrique fourni par l'observation d'une distance zénithale deviendra ainsi: 19) Gr——+\/ (87) +45: [(o,07 sin} sin Z7+ ( ’ ) | G OÙ 0 ——+ Ve + 15° [0,07 sin à sin A+ () |: x Connaissant les erreurs probables des lieux géo- métriques, on achèvera de résoudre le problème comme en plan. $ 5. — Observations astronomiques simplifiées. Une observation astronomique comprend done, en général, outre le pointé, une lecture de cercle gradué et une estimation d'heure *. Chacune de ces opéralions comporte une erreur; mais celle sur le pointé, qui n'est qu'un intermédiaire, peut être considérée comme se reportant tout entière sur l'une des deux autres, et c’est de la correspondance … plus ou moins exacte entre la lecture et l'heure que - dépend l'exactitude de l'observation. Il y à naturellement avantage à observer dans - des conditions telles que l'une des opérations, lecture ou estimation de l'heure, soit inutile puis- qu'on supprime l'erreur afférente à celte opération et que, de plus, l'observation se trouve simplifiée. « À priori, il est évident que les observations dans — lesquelles on n’a pas besoin de noter l'heure ne … peuvent fournir que des lieux géométriques indé- pendants du temps, petit cercle de colatitude pour le zénith et de distance polaire pour un astre. On - le vérifie, du reste, aisément au moyen des équations ifférentielles (11) et (12) et des équations (14) et L A Faye : Cours de l'Ecole Polytechnique, t. 1, p. 150. . ? Nous ne considérons ici que l'observation astronomique de précision; nous négligeons, par conséquent, les observa- tions à double pointé simultané qui ne comportent pas une grande exactitude. Li (15): les coefficients de At, dT et — dx sont respec- tivement les mêmes et ils s’annulent: 1° dans les ( 0° l480° pour des observations de distances zénithales méridiennes; 2% dans les équations en dZ ou AZ, 90° ; pour À is -n, autrement dit pour des observa- [ 1270 Û équations en AË ou d£, pour Z— » c'est-à-dire tions d’azimuts d'astres à leurs digressions. Les lieux correspondants sont normaux au méridien du zénith ou de l’astre. En dehors de ces deux cas particuliers, où l'élé- ment observé, € ou Z, passe par un maximum ou un minimum, il faut nécessairement noter l'heure du pointé et l’on ne peut supprimer une erreur qu’en supprimant la lecture. Considérons d’abord les observations azimu- tales. Si la lunette de l'instrument est susceptible de prendre deux mouvements, l’un autour d'un axe verlical, l’autre autour d’un axe horizontal, on la calera en azimut pour ne lui laisser que le mou- vement en hauteur et l’on observera les passages au fil vertical. Dans ces conditions, il ne pourrait y avoir à faire qu'une seule lecture azimutale; mais elle est évidemment inutile, car une seule lecture ne donne pas un azimut. Il faut donc déterminer l'orientation du plan par les observations elles- mêmes en les choisissant convenablement. S'il n'y avait pas d'erreurs d'observation, l'orientation du vertical s'obtiendrait de la manière la plus exacte en prenant deux astres à 90° l’un de l'autre. En tenant compte des erreurs sur les passages, on est amené à modifier plus ou moins cet écart théorique des deux astres pour diminuer leur influence et obtenir la meilleure détermination de l’orientation. On observe, en somme, par cette méthode des dif- férences d’azimut nulles. Les lieux géométriques du zénith, segments capables sphériques de l'angle 0° ou 1809, auront tous même direction, celle du plan azimutal d'observation. Ceux d’un astre pourront avoir deux directions si l'astre est observable deux fois, le méridien de l'astre étant coupé sous des angles symétriques par le vertical aux deux passages. Les observations de passages au méridien et au premier vertical sont deux cas particuliers de cette méthode. Dans le premier, la combinaison d'étoiles qui donne la meilleure orientation est celle d'une circompolaire et d’une équatoriale, car la distance des deux observations est de 90° et l'influence des erreurs sur les passages est minimum. Un défaut très grave commun à toutes les méthodes qui viennent d'être énumérées, défaut que nous croyons avoir suffisamment mis en lumière au chapitre I,$ 2, en ce qui concerne les observations méridiennes, est le suivant : 980 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES Une observation isolée ne constitue pas ‘une mesure, elle fournit seulement l’un de ses termes; l’autre, généralement assez difficile à obtenir (c’est la lecture du nadir pour les observations de distances zénithales méridiennes, le passage d’une circompolaire dans le cas des observations de passages méridiens), n’est, pour cette raison, déter- miné qu'une fois ou deux par série d'observations, ce qui fait que chaque mesure résulte de la combi- uaison de deux observations non simultanées. Elles sont séparées par un intervalle de temps assez long en moyenne, durant lequel on suppose l'instrument immobile. En outre, elles ne sont jamais faites dans les mêmes positions de la lunette, en sorte que la pesanteur n'a pas la même action sur ses différentes parties dans les deux cas. $6. — Méthode des hauteurs égales. Tout autre est la méthode des hauteurs égales, fondée sur le procédé d'observation simplifiée qu'il nous reste à examiner. 1 Au lieu de caler la lunette en azimut comme dans les observations azimulales, calons-la en hau- teur en laissant libre le mouvement azimutal, et admettons que l’axe vertical autour duquel s'effectue ce mouvement reste rigoureusement verticaldurant la série d'observations (ou, ce qui revient au même, que nous ayons un moyen de connaître exactement son inclinaison sur la verticale à chaque pointé). Dans cette hypothèse, la lunette, occupant Ja même position par rapport à la direction de la pesanteur, peut être considérée comme restant identique à elle-même, durant toute la série, et faisant un angle invariable avec la verticale. Chaque observation constitue alors une véritable mesure, dont le rapport à la circonférence de grand cercle est inconnu, il est vrai, mais peut être déter- miné par l’ensemble des observations, comme la position du zénith elle-même, et non par une obser- valion particulière, comme le second terme de la mesure dans les méthodes précédentes. Soit, en effet, à déterminer d’abord la position du zénith. Les heures notées des passages au petit cercle de distance zénithale inconnue permettent, comme on l’a vu, de ramener les ascensions droites des étoiles observées à ce qu'elles auraient dû être pour que ces éloiles effectuent leur passage au même instant {, du compteur de temps sidéral. Dès lors, tous ces astres fictifs peuvent être considérés comme situés, aux erreurs d'observation près, sur un même petit cercle dont il s’agit de trouver le centre. C'est le même problème qu'au $ 4, avec cette différence qu'ici le rayon est inconnu; mais la solution est presque identique. Au lieu du rayon vrai € qui servait dans l’autre cas pour tracer par le calcul un élément du cercle de hauteur, ou, | lui pour lequel on a comme on l'appelle en Navigation, la droite de L hauteur, par rapport à deux axes rectangulaires représentant le méridien et la tangente au parallèle du centre ‘approché Z,(X,, 15 T,), on emploie un rayon approché &,. Les lieux qu'on obtient ainsi sont des lieux approchés par défaut de d&,—t—Kù,. S'il n'y avait pas d'erreurs d'observation, ils se- raient tous tangents, chacun du même côté par rapport à l’astre qui l'a fourni, à un même cercle ayant pour centre le point K de la projection qui représente le point Z de la sphère et pour rayon la correction dé, de &, (fig. 3). Le cercle le plus pro-* bable est encore ce- ZPd* minimum, d dé- signant ici, non plus la distance de la droite de poids P au point choisi, mais sa plus courte distance au cercle. On voitque toutes les droites in- terviennent avec leur poids pour son tracé, par conséquent pour la détermination de & aussi bien que pour celle du point Z. " Les erreurs proba- bles des droites approchées sont évidemment les mêmes que celles des droites réelles, lesquelles ont pour expression, (&)' étant nul dans (19) : 2 3 3,2\2 (20) Ô— +1 Vo sinxsinzÿ + (Te) . Analytiquement, le problème ne diffère de celui traité au S 3 que par l'introduction d’une (roi= sième inconnue €. L'équation de condition, mise sous la forme (13), devient : (21) Aÿ, = — sin Zodx -— COS Zody — dz, en appelant dz = dE, la correction de 6, et Aë, repré sentant toujours la différence entre la distance» zénithale &, et celle qui correspond au point appro= ché ZA, 13 T,). Les équations de condition (21), traitées par la” méthode des moindres carrés, donneront les valeurs les plus probables des corrections des valeurs approchées À,, T, et£,. On aura ensuite leurs erreurs probables par les formules ordinaires. Passons maintenant à la seconde partie du pros blème de l’Astronomie de position, celle qui a pour objet la détermination de la position d'un astre inconnu X. L'observation du passage de l'astre X au cercle de distance zénithale vraie & est englobée dans une A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES 981 série d'observations d’astres connus qui fournit la position de Z à l'heure /, du compteur de temps » sidéral et la valeur de £ : on a ainsi un lieu géo- métrique de X qui est le petit cercle décrit de Z comme centre avec & pour rayon. C'est donc tou- jours le € déduit de l’ensemble des observations des astres connus qui sert et non un & résultant d'une observation particulière. Chaque série ne donne qu'un lieu de X, à moins - que les deux passages ne soient assez rapprochés pour être observés dans la même série, auquel cas on obtient deux lieux symétriques par rapport au méridien de l’astre. Et, comme chacun d'eux coupe ce méridien sous l'angle 90° H À, leur angle est égal à 2A. En observant les jours suivants, on pourra avoir d’autres lieux et atténuer ainsi l’in- fluence des erreurs d'observation; mais les lieux auront toujours les deux mêmes directions. Si l’on veut que celles-ci varient, il faut nécessairement, lorsqu'on reste sur le même parallèle, faire varier la distance zénithale d'observation: et, si l’instru- ment dont on dispose ne permet pas de le faire, il ne reste qu un moyen, c'est de se déplacer en lati- tude. Ce déplacement est pour ainsi dire nécessaire pour obtenir des lieux géométriques dans toutes les directions, car on ne saurait dépasser une cer- taine valeur pour la distance zénithale sans avoir à craindre les anomalies de la réfraction qui font qu'elle n’a plus la même valeur dans tous les azimuts. Ainsi, tandis que, pour le zénith, la méthode des hauteurs égales fournit le moyen de déterminer sa position par des lieux géométriques orientés dans tous les sens, ce résultat ne peut être atteint pour un astre que par une série de déplacements entre les colatitudes 3 — © et EX si l'on ne dispose que d'une distance zénithale invariable. L'erreur probable de chacun des lieux dépend -non seulement de son erreur probable propre, donnée par la deuxième formule (19) dans laquelle (&)' —0, mais aussi de celle de la distance zéni- thale, que nous désignerons par & pour la distin- “guer, et de celle du zénith dans la direction de .l'astre qui a pour expression : Æ VE cos Z 15° sin z (6 T) sin° Z. On a donc pour l'erreur probable totale : L. an Connaissant les poids de tousles lieux, on pourra les combiner entre eux pour obtenir la position la plus probable et l'erreur probable de la position adoptée. Il importe de remarquer que la distance zénithale (82)? cos? Z + 15* sin?} (21) sin? Z +- (dt)? Je +15? [t0.07 sin à sin A} + eo IL REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, obtenue par chaque série d'observations est une distance zénithale vraie. La valeur absolue de la réfraction n'entre pas en jeu et la dissymétrie, par rapport à la verticale, de la réfraction à la distance zénithale € peut seule affecter les résultats‘. Cette cause d'erreur devrait être prise en considération si l’on observait à une faible hauteur ; mais si £ne dépasse pas 30° par exemple, on peut admettre qu'elle est tout à fait négligeable. En tous cas, l'erreur est certainement inférieure à celle qui affecte la moyenne d'une série de distances zéni- thales méridiennes prises au Nord et au Sud et corrigées de la réfraction, car, dans ce cas, la symé- trie par rapport au zénith n'est jamais aussi com- plète ; et elle est incomparablement plus faible que celle de la correction de réfraction qu’on applique à la distance zénithale méridienne &’une étoile dont on veut avoir la distance polaire. $ T. — Précision des droites de hauteur. Pour terminer ce rapide exposé de la méthode des hauteurs égales, il nous reste à voir comment varie la précision de la droite de hauteur lant du zénith que d'un astre inconnu, afin de nous rendre compte de celle dont les résultats sont susceptibles et des conditions dans lesquelles elle peut être atteinte. Prenons d'abord la droite de hauteur du zénith. Son erreur probable est donnée par la formule (20) : elle est fonction de trois quantités : À, Z et G. Le premier terme sous le radical contient sin À sin Z en facteur; il est, par conséquent, d'autant plus faible que l'observateur est plus près du pôle et que l’astre est plus près du méridien. Il est nul pour un astre observé dans le méridien et (20) se réduit alors à : (23) èd L'erreur probable varie en raison inverse du grossissement. Pour avoir une idée de sa grandeur, donnons à G la valeur particulière 130 — c'est celle qui correspond à un instrument dont nous aurons à nous occuper plus tard. — Nous obtenons ainsi dt— + 0/37. Pour un lieu et une distance zénithale donnés, il n'y a généralement pas une étoile observable exactement dans le méridien. Du reste, la formule (20) n'est plus vraie dans le méridien même puis- ! Pour simplifier, nous avons supposé implicitement, dans ce qui précède, la réfraction constante pendant toute la durée d’une série d'observations. Mais rien n'est plus facile que de tenir compte de ses variations en les faisant porter sur la valeur de la distance zénithale approchée &. On emploie alors un & différent soit pour chaque étoile, soit pour chaque groupe d'étoiles de la série. co 982 A. CLAUDE er L. DRIENCOURT — LA MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES qu'alors à — à —0. Mais, dans le voisinage du méridien où elle est applicable, sin Z est très petit, et par conséquent aussi le premier terme sous le radical, en sorte que la formule (23) est très appro- chée. On peut donc dire que l'erreur probable de la droite de hauteur fournie par une circomméri- dienne est inversement proportionnelle au grossis- sement de la lunette. Si l'on remarque que l'y du centre Z du petit cercle enveloppe des droites de hauteur sur la projection, c’est-à-dire la lati- tude, dépend presque exclusivement de droites de cette espèce, et qu'on peut appeler pour cette raison droites de latitude, on arrive à cette conclu- sion que, abstraction faite des erreurs de position des étoiles, les déterminations de lalitude par la méthode des hauteurs égales sont susceptibles d'une précision illimitée, à la condition que l'on trouve le moyen d'augmenter le grossissement sans diminuer, dans la même proportion, la préci- sion du pointé. En se plaçant à ce point de vue, on peut dire que, dans les limites de temps entre lesquelles les effets de ses variations de marche sont négligeables, le compteur de temps, qui, par ailleurs, offre une facilité et une rapidité de lec- ture incomparables, est de beaucoup Le plus précis de tous les cercles divisés lorsqu'il est allié à un instrument de hauteurs égales, pourvu d'une lunette d’un grossissement suffisant. Avec la va- leur de G égale à 130, qui donne X—2#0",37, la précision des meilleurs cercles divisés est déjà surpassée. Il est aisé de se rendre compte géométriquement de l'influence du grossissement sur la précision des droites de latitude. Une circomméridienne donne (fig. 4) un cercle de hauteur ZZ' qui coupe le parallèle Zz du zénith Z sous un angle égal à z Cércle de hauteur Z” | 15 El, > > 4e Le lies | ë car: GC JE RES Fig. 4 l'azimut de l'astre, par conséquent voisin de 0° ou de 180°. Les deux lignes se couperaient en Z s'il n'y avait pas d'erreur d'observation; à cause de l'erreur Af, leur intersection est en z, Zz étant l'arc de parallèle décrit par le zénith durant le temps Af, c'est-à-dire en secondes d'arc 15 sin À A‘. Le déplacement Af du lieu est représenté par la longueur zZ' de la perpendiculaire abaissée de z sur ZZ'. Ce côté de l'angle droit, opposé dans le triangle rectangle ZZ'z au petit angle Z, est une petile fraction de l'hypoténuse Z7. Ainsi, à la latitude de Paris, pour Z—5° et A/—1* de temps, A£—0",86. Or, A est d'autant plus faible que la vitesse zénithale est plus grande ou que le grossissement est plus fort, et il en est de même de AC. Le premier terme sous le radical dans (20) est maximum pour une latitude donnée lorsque 90° T= tue c’est-à-dire lorsque l'astre observé est dans le premier vertical, et ce maximum atteint sa plus grande valeur pour À— 90° ou à l'équateur. Avec le grossissement G— 130 déjà considéré, on. a alors : EEE AM soit le triple de l'erreur probable d’une droite de latitude. Les droites horaires — c'est le nom qu'on donne aux droites de hauteur qui provien- nent d'astres observés dans le voisinage du pre- mier verlical — sont donc beaucoup moins précises G devient rapidement négligeable vis-à-vis de (0,07 sin À sin Z) lorsque G croît, leur précision ne peut pas dépasser une certaine limite. Ainsi, dans 90,2 : 9700? si l’on fait 9\ 2 que celles de latitude. Et, comme le terme Fe) l'exemple précédent : À — 90°, Z = N G—, on à : X—+1",05, chiffre à peine plus faible que celui qui correspond à G— 130. Il n'y a donc pas intérêt, pour la détermination de l'heure seule, à employer des grossissements trop forts, et c'est par le nombre des observations qu'il faut chercher à augmenter la précision des résultals. Cette conclusion, du reste, n’est pas spéciale à la méthode des hauteurs égales : elle résulte de la précision avec laquelle les heures de passage sont notées el s'applique, par conséquent, à toutes les autres méthodes qui ont pour objet de déterminer l'heure. Nous nous permettrons d'’insister sur cette ques- tion de variation de la précision de la droite de hauteur en fonction de l'azimut, car elle est fon- damentale pour le traitement rationnel du pro- blème des hauteurs égales et, bien qu'elle soit très. simpie, elle paraît avoir été méconnue jusqu'ici de tous ceux qui se sont occupés des droites de hau- teur. , On peut contester l'exactitude de la formule em- pirique (18) qui nous a conduits aux conclusions précédentes. On ne saurait en faire autant pour le principe suivant, qui exprime la même chose sous une forme moins précise, mais plus générale : L'exactitude avec laquelle on apprécie l'instant d'un phénomène visuel croît en même temps que là rapidité avec laquelle on voit passer le phénomène mais elle ne lui est pas proportionnelle. La raison en est qu'il y à une limite à la préci= sion de cette appréciation : elle n’est guère infé- P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS 983 rieure à 0°,1 pour les meilleurs observateurs. Dès “que le grossissement de la lunette est suffisant pour permettre d'atteindre cette limite, on ne “gagne pour ainsi dire plus en l’augmentant. Ainsi, à léquateur, un simple sextant, par exemple, si l'on fait abstraction des erreurs instrumentales et de “celles qui proviennent de la difficulté d'observer “avec un instrument tenu à la main, donne, à “nombre égal d'observations, sensiblement la même précision pour l'heure qu'un instrument de pas- sage grossissant soixante fois, bien que sa lunette ne grossisse que huit fois, ce qui équivaut à seize avec l'horizon artificiel. Au contraire, lant que la rapidité du phénomène n'est pas assez grande pour qu'on puisse noter l'heure avec la précision limite, plus le grossisse- ment est fort et plus la précision est grande. Ce qui vient d’être dit pour la droite de hauteur du zénith s'applique identiquement à celle d’un astre inconnu en tant qu'il s'agit de sa précision propre; il suffit de remplacer partout € et Z par ë et A. Mais l'expression complète (22) de X con- tient les termes où figurent les erreurs probables ‘de la position du zénith et de la distance zénithale au point où la droite de hauteur de l’astre inconnu “a été obtenue; elle ne se prête donc pas à la dis- … cussion. 4 III. — ConczusIow. LC En résumé, la méthode des hauteurs égales est la seule qui permette de résoudre, d'une façon satisfaisante, le problème de l’Astronomie de posi- tion pris dans toute sa généralité. Elle fournit des positions et non des coordonnées. Elle utilise des observations qui constituent par elles-mêmes des mesures et non l’un des termes d’une mesure. La quantité observée, au lieu d'être tantôt une lecture de cercle divisé, tantôt le temps, est toujours et uniquement cette dernière, ce qui rend les obser vations absolument comparables et permet d'assi- gner à chacune d'elles sa véritable erreur probable. L'influence de la réfraction est du second ordre et peut être négligée. En sorte que la méthode est à la fois celle qui fournit les positions les plus précises et la seule qui permette d’obtenir rigou- reusement leur degré de précision. Enfin, au point de vue pratique, en remplaçant les lectures de cercles divisés par celles du temps, elle rend les observations beaucoup plus rapides et plus faciles. Tant d'avantages qui la mettent incontestable- ment au premier rang des méthodes d'Astronomie de position n'ont pas empêché qu'elle ne fül presque entièrement délaissée pour la détermi- nation de la position du zénith, au point que cer- tains Traités d'Astronomie récents n’en font pas mention. Pour la détermination des positions des astres, son emploi n’a même jamais été envisagé. Dans un prochain article, nous donnerons les raisons de cet abandon et de ce mépris, nous mon- trerons que ces raisons ont cessé d'exister depuis la création de l’As{rolabe à prisme, et que la méthode doit reprendre aujourd'hui la place que lui assi- gnent ses mérites théoriques. A. Claude, Attaché à l'Observatoire du Bureau des Longitudes. L. Driencourt, Ingénieur-hydrographe en Chef de la Marine. CRISTAUX LIQUIDES ET L'existence d'une nouvelle propriété de la ma- ière, ne rentrant pas dans le cadre d’une théorie en apparence bien établie, est souvent contestée. i le phénomène nouveau n'est pas tout simple- ent nié, ilest attribué à des causes secondaires et, ar conséquent,ne mérite pas d'attirer l'attention. Les intéressantes observations de M. O. Lehmann entrent dans cette catégorie. Ce savant a montré ue certains liquides agissent sur la lumière pola- isée, à la manière d’un cristal. Depuis la publica- ion, faite en 1889, de ses premières recherches, il LE | La Revue se fait un devoir et un plaisir de remercier M. le Professeur Lehmann et son éditeur, M. Engelmann, e Leipzig, pour le prêt des figures qui accompagnent cet “article: ces figures sont tirées du grand Ouvrage de M.Leh- _ Mann cité ci-après. % à b L* LIQUIDES CRISTALLINS' a continué patiemment ses observations et il vient de réunir ‘ les connaissances que nous possédons sur ce sujet, et dont la plus grande partie lui est due, dans un grand Ouvrage, accompagné de nom- breuses photographies, donnant une idée des phé- nomènes présentés par les liquides biréfringents. Mais, tandis que M. Lehmann s’est surtout borné à l'étude des propriétés optiques, d’autres expéri- mentateurs, en particulier M. Schenck*, ont exa- miné les autres propriétés physiques. Le fait qu'un liquide, aussi mobile que l'eau, 4 O. LenMmanx : F'lüssige Kristalle. 1 volume in-4° avec 483 figures et 39 planches en héliogravure. W. Engelmann, éditeur. Leipzig, 1904. 2 R. Scuenc : Xristallinische Flussigkeiten uud flüssiye Kristalle, W. Engelmanp, éditeur. Leipzig, 1905. 984 P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS polarise la lumière est évidemment en contradic- tion avec l’idée qu’on a de la structure des milieux anisotropes. L'état solide élait considéré comme nécessaire pour qu'une substance possédàt la structure des cristaux, dans lesquels la valeur de certaines propriétés physiques change avec la direction; or, cela paraît tout à fait incompatible avec l’état liquide. On avait bien observé que des corps gélatineux deviennent biréfringents sous l'influence d’une légère compression, ou même par le seul fait de leur écoulement; mais, en somme, c'élait toujours une action mécanique extérieure qui produisait l’anisotropie. La théorie de M. Lehmann, attribuant la double réfraction des liquides qu'il a étudiés à la consti- tution et à l'orientation de leurs molécules, a été contestée par G. Quincke, Tammann, Rotarski, etc., qui croient que ces liquides ne sont pas homo- gènes, et, par conséquent, que la double réfraction est un phénomène secondaire. Après avoir énuméré sommairement les prin- cipales substances donnant des liquides biréfrin- gents, nous nous proposons de passer successi- vement en revue les propriétés optiques et les expériences faites dans le but de combattre ou d'appuyer l'hypothèse de M. Lehmann. I. — SUBSTANCES DONNANT PAR FUSION DES LIQUIDES BIRÉFRINGENTS. En 1888, Reinitzer remarqua que le benzoate de cholestéryle entre en fusion à 145°%5, en donnant un liquide trouble, restant tel jusqu'à 178°5, tem- pérature à laquelle il devient clair. Cette substance a donc, pour ainsi dire, deux points de fusion. Reinitzer, pensant qu'il s'agissait d’un changement isomérique, en confia l'étude microscopique à O. Lehmann, qui constata un fait absolument inat- tendu : le liquide trouble est biréfringent et la double réfraction disparaît au moment où la clari- fication se produit. L'attention des chimistes ayant été ainsi altirée par cette observation, l'existence d’autres sub- stances organiques donnant par fusion un liquide trouble, se clarifiant ensuite à une température plus élevée, a élé conslatée d’abord par Gatter- mann, qui à découvert des corps encore plus curieux que le benzoate de cholestéryle. Les liquides troubles qu'ils fournissent sont, en effet, beaucoup plus fluides que ce dernier et surtout beaucoup plus biréfringents ; alors que la substance de Reinitzer donne, entre les nicols croisés, les teintes grises, avec la même épaisseur, celles de Gattermann pro- duisent les blancs d'ordre supérieur, et leur biré- fringence serait même, d'après Lehmann, qua- rante fois plus grande que celle du gypse. Ce substances sont : Le p-az0xvanisol : CH*0.CSH. Az — Az.C‘H*.CH°0, Ù fondant à 116° et devenant clair à 134°; Le p-azoxyphénétol : C?H°O.CSH*.Az — Az.CSH*.C°H°O, 8 0 fondant à 13795 et se clarifiant à 168°; Le p-azox yanisolphénétol : CHSO.CSH".Az — Az.CSH!',C2H°0 Ne N É fondant à 93°%5 et se clarifiant à 149°6. Il existe encore d'autres corps de ce genre, parmi lesquels je signalerai l’anisaldazine, Vacide p-mé-M thoxycinnamique, le p-diacétox ystilbène chloré et le p-azoxyhenzoate d'éthyle. Ë Les propionate, acélate, oléate de cholestéryle M jouissent des mêmes propriétés que le benzoate. | Lehmann y rattache les oléates de potasse, de soude, d'ammoniaque, et même l’iodure d'argent, î cubique entre 146° et 450°. | La viscosité est très variable d’une substance à l'autre ; alors que celle du p-azoxyphénétol est plus faible que celle de l’eau, que l'acide p-méthoxycin- namique est fluide comme cette dernière, le ben- zoate de cholestéryle possède la viscosité de l'huile, et l'oléate d'ammoniaque, à ce point de vue, peut être comparé à la vaseline. 4 Ca II. — ÉTUDE OPTIQUE. Un microscope polarisant ordinaire est suffisant pour observer la double réfraction des liquides, six l'on fond, au préalable, le corps à examiner surune lame de verre; mais le phénomène est de courtes durée, par suite du refroidissement rapide de la préparation !. Pour une étude suivie, l'emploi d’un microscope de O. Lehmann, construit pour less observalions à haute température, est nécessaire: Cependant, en disposant, sur la platine d’un micro= scope ordinaire de Nachet, une plaque de cuivre de. 95 centimètres de longueur sur 4 à à de largeur, percée au milieu d'un orifice pour laisser passer les rayons lumineux, on peut obtenir une température convenable, en chauffant, avec un bec Bunsen, ‘ Les corps donnant par fusion des liquides biréfringents sont préparés par E. Merck, fabricant de produits Chi= miques à Darmstadt. E. Zeiss, d'Iéna, construit les appareils pour l'observation et la photographie des cristaux liquides Le microscope de O. Lehmann, permettant de faire ICS observations à des températures élevées, se trouve chez Voigt et Hochgesang, à Gôttingen. Ù P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS cette plaque à l’une et même aux deux extrémités. Naturellement, la platine doit être protégée par plu- sieurs couches de carton d'amiante, et les observa- tions ne doivent être faites qu'avec des corps dont les points de fusion ne sont pas trop élevés (ben- zoate de cholestéryle, p-azoxyphénétol, etc.). Avec un grossissement de 40 diamètres, le phénomène peut être suffisamment observé dans la plupart des cas; mais, pour l'étude de la structure intime des gouttes anisotropes, des grossissements de 300 à 100 diamètres sont nécessaires. Alors, le liquide doit être recouvert d’une lamelle de verre. O. Leh- mann recommande l'emploi, comme couvre-objet, d'un verre de montre très plat, dont la partie convexe est en contact avec [ce porte-objet. Les liquides d'une grande fluidité donnent, sur la lame de verre, dans cerlaines conditions, des gouttelettes biréfringentes dont le contour est ri- goureusement sphérique. Leur forme est due seu- lement à la tension superficielle. O. Lehmann les a désignées sous le nom de « {üssige Kristalle », ou cristaux liquides. Les liquides ayant une certaine viscosité montrent des cristaux allongés dont les extrémités sont arrondies. Leur forme est la résul- tante de la tension superficielle et des forces attrac- tives agissant entre les molécules. Ils se déforment, comme on le verra plus loin, sous la moindre Big. 1. — Préparalion de p-azoxyphénétol examinée avec un Seul nicol et montrant le polychroïsme des gouttes aniso- tropes. — a, goutte dans la première position principale ; b, dans la seconde. (D'après une phototypie de Leh- mann, cliché de l'ouvrage de Schenck.) aclion et coulent comme un liquide ; aussi Leh- mann les désigne-t-il sous le nom de « fiessende Kristalle » ou cristaux qui coulent; je les appel- lerai, pour ne pas employer un terme nouveau, 985 cristaux plastiques où cristaux mous. Il existe entre ces derniers et les cristaux proprement dits tous les intermédiaires. $ 1. — Cristaux liquides. Le p-azoxyphénétlol convient {rès bien pour les observations microscopiques. Quelques cristaux Fig. 2. — Préparation mince de p-azoxyphénétol observée avec les nicols croisés. (D'après une phototypie de Lehmann, cliché de l'ouvrage de Schenck.) de cette substance sont fondus sur une lame de verre. Pendant tout le temps que le liquide est trouble, il agit sur la lumière polarisée d'une facon énergique ; mais il vaut mieux chauffer jusqu'à ce que la clarificalion se produise et laisser refroidir le liquide clair, isotrope; ilse produit alors un grand nombre de goultes biréfringentes, ayant un mou- vement de rotation autour de l'axe vertical (fig. 1 et 2). Comme ces gouttes sont en très grande quan- tité, qu'elles se fusionnent lrès rapidement, il est avantageux de couvrir le porte-objet d'une petite quantité de matière étrangère, miscible ou non avec le p-azoxyphénélol: la colophane, le thymol conviennent parfaitement pour obtenir des gouttes isolées. Un excès de subslance étrangère empêche la production des cristaux liquides biréfringents et, par refroidissement, les cristaux solides prennent seuls naissance. Il me parait préférable, pour cer- taines observations, d'employer la glycérine, non miscible avec le p-azoxyphénétol liquide et aniso- trope. Ce dernier corps, étant le plus léger des deux et non miscible avec elle, forme comme une espèce de couronne autour d'une goutte de glycérine. Par suite de l'élévation de la température, des couches de liquide biréfringent recouvrent la goutte. Elles sont minces au point de ne présenter, entre les nicols croisés, que le gris du 1‘ ordre. En outre, ces couches, par suite de la tension superficielle, augmentent ou diminuent continuellement d’épais- seur, de telle façon que, par places, elles montrent la gamme des couleurs d’un quartz taillé en biseau. La biréfringence parait donc êlre en relation avec 986 P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS à l'épaisseur de la couche, et une émulsion ne pour- rait produire un tel phénomène. La glycérine dissout un peu de p-azoxyphénétol liquide et isotrope; aussi, par refroidissement, il se sépare des gouttes en plus ou moins grand nombre de liquide anisotrope insoluble ; celles-ci sont remarquables par les belles teintes de polari- sation qu'elles présentent et, comme leur biréfrin- gence est très élevée, elles sont très minces. Les teintes s'élèvent de la périphérie au centre comme si la goutte était formée par une substance solide lenticulaire anatrope. C'est à ces gouttes, produites d'une facon quelconque, que Lehmann a donné le nom de cristal liquide; le liquide cristallin est formé par un agrégat de cristaux liquides, au même titre que le marbre calcaire est composé d'un agrégat de cristaux de calcite. Cependant, les e d Fig. 3. — Gouttes anisotropes observées en lumière natu- relle. — a, première position principale; b, deuxième position principale; e et d, intermédiaires entre les deux positions principales : ec, vue en lumière naturelle et d entre les nicols croisés. (D'après O. Lehmann.) gouttes n'existent pas dans le liquide avec la forme régulière lenticulaire qui vient d’être décrite. Les gouttes ou cristaux liquides se présentent, d'après O. Lehmann, dans deux positions dites principales. Examinées en lumière naturelle, les unes ont le centre obscur entouré d'une zone claire (première position principale) (fig. 3 a); les autres sont claires au centre et montrent deux bandes obscures diamétralement symétriques, de telle sorte qu'elles présentent l'aspect d'une sphère obscure contenant dans son intérieur une lentille claire (seconde position principale) (fig. 3 b). Entre ces deux formes régulières, il existe tous les pas- sages intermédiaires (fig. 3, c et d). Les cristaux orientés dans la première position principale sont les plus commodes à étudier. Ils se produisent, de préférence, dans les préparations épaisses et, presque toujours, en opérant avec de la glycérine, comme cela a été indiqué plus haut. Observées avec un seul nicol, ces gouttes montrent deux secteurs clairs et deux secteurs colorés en jaune (fig. 4 à); elles sont, par conséquent, poly- chroïques comme les cristaux solides; mais, ce qui est tout à fait remarquable et particulier au gouttes épaisses, c’est que les secteurs n’ont pas las Fig. 4. — a, goutte dans la première position principale examince avec un seul nicol; b et ce, schémas montrant l'orientation des molécules. (D'après O. Lehmann.) même posilion, suivant que le nicol, tout en con= servant son orientation, est disposé au-dessus où au-dessous de la préparation. Dans le cas où le nicol, placé au-dessous, a sa courle diagonale de façon que les vibrations des rayons se fas sent de droite à gauche, les secteurs colorés er jaune sont respectivement, en haut, à droite, et em bas, à gauche (fig. 4 a). Pour retrouver cette image il faut tourner le nicol de 90° par rapport à sa position primitive si on le met au-dessus de la préparation Il y a, par conséquent, rotalion du plan de polari sation de la lumière. Entre les nicols croisés, les gouttes placées dans la première position prinei pale montrent encore le polychroïsme et une croix noire (fig. 5) dont les branches coïncident avec les sections des nicols. Les bras de cette croix sont noirs dans les préparations minces, et colorés en rouge ou ‘en vert avec les gouttes épaisses ; parfois même, ils sont rouges au centre et verts à l’autre extrémité ou inversement.Ce fait prouve encore quii y à rotalion du plan de polarisation. Les cristau liquides ne correspondent donc pas à un crista Fig. 5. — Gouttes dans la première position principale wuë avec les nicols croisés. (D'après O. Lehmann.) solide, mais à un sphérolite, constitué par un grant nombre de cristaux ou plutôt de molécules biré fringentes disposées autour d'un centre (fig: h et c). Dans ces gouttes, les molécules cristalli de la partie supérieure ne coïncident pas exa ment avec celles qui sont placées au-dessous. peut comparer l'enroulement qui paraît exister celui des lames de mica, disposées autour di P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS 987 l'expérience de Reusch. Naturellement, dans les cristaux liquides, ce sont les molécules elles-mêmes qui agissent comme un cristal solide. Les cristaux placés dans la seconde position principale (fig. 1, b; 3, b; 10, B) ont, d’après O. Lehmann, leur axe de symétrie disposé hori- zontalement, tandis qu'il est vertical dans la pre- mière position. Les parties claires et obscures que présentent les globules cristallins, et qu'on ne voit pas dans les gouttes isotropes, sont précisément dues à des réflexions intérieures, produites par cette structure particulière, qui vient d’être indiquée. Quand un liquide se solidifie, il se produit, sui- vant la vitesse de refroidissement, un nombre plus ou moins grand de cristaux, et parfois aussi, lors- que la substance fondue est limitée par deux lames de verre, des sphérolites auxquels les sphéro- cristaux liquides peuvent être comparés. Ce der- nier cas est offert par le soufre orthorhombique peu biréfringent, par la cholestérine et par beau- coup d’autres corps. Généralement, les gouttes liquides, passant à l’état solide, donnent un agrégat de cristaux groupés autour d’un point, placé au centre ou sur les bords de la goutte primitive. Mais il arrive aussi, parfois, qu’il se forme un cristal unique (acide picrique) ayant une forme lenticulaire et dont le contour est rigoureusement circulaire. Les gouttes de p-azoxyphénétol, produites sur la glycérine, présentent des phénomènes remarqua- bles. Au moment où elles vont se solidifier, par suite probablement de la variation de la tension superficielle entre elles et la glycérine, leur dia- mètre horizontal augmente et diminue alternati- vement, et, naturellement, ces mouvements ne peuvent se produire qu'avec des changements correspondants de l'épaisseur, entrainant des variations des teintes de polarisation. La goulte, en se solidifiant, perd sa forme et donne plusieurs cristaux solides, n'ayant aucune orientation cris- tallographique l’un par rapport à l’autre. La biréfringence des cristaux liquides de p- azoxyphénétol est considérable, et ce fait, joint à celui que les teintes de polarisation montent avec l’épaisseur et qu’il y a extinction comme dans un cristal, est suffisant pour faire rejeter l'hypothèse d’une émulsion. M. O. Lehmann a déterminé approximativement la valeur de cette biréfringence dans le p-azoxyphénétol solide, par comparaison ” avec les indices de réfraction du soufre fondu et de la naphtaline bromée. D'après lui, n,—1,9 et 2, = 1,5 environ. La biréfringence est donc de 0,4, Supérieure, par conséquent, à celle de la calcite, de la cassitérite et même du soufre (0,3). 0. Lehmann croit lirer de ses observations que celle du z-azoxyphénétol liquide esl aussi élevée que celle des cristaux solides. J'ai cependant re- marqué que, dans le cas où une goutle montre au centre le bleu de premier ordre, la teinte passe, après la solidification, au rouge de second ordre: Fig. 6. — Cristaux liquides examinés entre les nicols croi- ses, et montrant la déformation de la croix par suite de leur rotation (première .position principale). (Cliché de l'ouvrage de Schenck, fait d'après! une héliogravure de O. Lehmann.) ; sa biréfringence est donc plus faible que celle du corps solide, mais elle est au moins trente fois égale à celle du quartz. La rotation des globules cristallins est tout à fait remarquable et se fait en sens inverse des aiguilles d'une montre; toutefois, dans le sucre fondu, a rolation se fait dans le sens de ces dernières. Cetle Fig. 1. — Gouttes liquides soumises à un mouvement de r'otalion et examinées avec les nicols croisés. — a, pre- mière position principale: b, €, d, e, deuxième position principale. (D’après O. Lehmann. rotation, qui se produit quand la plaque est chauffée ou refroidie, est plus rapide dans les gouttes occu- pant la deuxième position principale que dans celles qui se trouvent dans la première. Sous l'influence de cette rotalion, les molécules 988 P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS se déplacent par rapport au centre, et d’autant plus qu’elles sont plus rapprochées de la péri- phérie. Les branches de la croix noire, produite entre les nicols croisés, prennent la forme d’une spirale (fig. 6 et 7). Les gouttes placées dans la seconde position prin- cipale sont aussi plus ou moins déformées (fig. 7). M. O. Lehmann a étudié l'influence du magné- tisme sur les cristaux liquides de p-azoxyphénétol. Ceux-ci, placés dans un champ magnétique hori- zontal, prennent la seconde position principale; si les lignes de force sont perpendiculaires au porte- objet, les goultes montrent les caractères de la première position principale. L'influence magnétique a une action remarquable sur les molécules dans le cas où le cristal liquide est fixe. Elles s’orientent parallèlement aux lignes de force, comme le montrent les propriétés opti- ques de la goutte soumise à l'expérience (fig. 8). La position des molécules dépend des forces Fig, 8. — Délormation des gouttes dans un champ magné- tique. (D'après O. Lehmann.) magnétiques directrices et des forces existant dans le liquide et leur donnant l'orientation première. Le système cristallin des molécules constituant la goutte liquide ne peut pas être établi, puisque la détermination de la vraie symétrie pseudo- cubique ou pseudo-hexagonale ne peut déjà pas se faire très exactement. Cependant, O. Lehmann est porté à croire que les molécules du p-azoxy- phénétol sont monocliniques et hémimorphes, d'après le raisonnement suivant : Les cristaux liquides ne montrant jamais de plage toujours obscure, quand on tourne la préparation sous le microscope, les molécules ne sont pas uniaxes et, par conséquent, ni quadratiques, ni hexagonales; elles ne sont pas non plus rhombiques, puisque l'extinction se fait obliquement dans les molécules les plus inférieures et les plus supérieures de la goutte. Les branches de la croix étant, dans beau- coup de cas, en coïncidence avec la section prin- eipale des nicols, les molécules appartiennent au système monoclinique plutôt qu'au système tricli- nique, et, si l’on considère le mouvement de rotation des gouttes, elles sont hémimorphes. O0. Lehmann admet encore que l’axe est incliné de 60° et que l'angle d'extinction est de 45°. Les substances pouvant absorber, pendant la formation du cristal solide, une matière colorante sont très rares. Naturellement, il ne s’agit pas de M coloration produite par des inclusions grossières, 4 solides ou liquides, mais de la syncristallisation « de la malière colorante avec la substance; en outre, les zéoliles peuvent admettre dans leur réseau les molécules les plus diverses (G. Friedel)- Il était intéressant de voir ce qui se produit avec les cristaux liquides, à ce point de vue. M. O. Lehmann a montré que l'acide p-méthoxy- cinnamique se colore par la safranine, et qu'il devient alors polychroïque. J'ai moi-même observé que les cristaux liquides du p-azoxyphénétol se colorent par le vert malachite. Le polychroïsme est g Fig. 9. — Gouttes résultant de la fusion de plusieurs autres: gouttes. — a, e sont sur le point de prendre les carac= tères d’un cristal liquide dans la première position prin= cipale, mais elles montrent encore les noyaux des gouttes primitives. (D'après O. Lehmann.) intense, bien que la quantité de matière colorante absorbée soit très faible. Alors que le liquide clair et isotrope se mélange, presque en toutes propor= tions, avec beaucoup de substances fondues, en particulier avec celles qui dérivent de l'aniline, le liquide biréfringent ne tolère qu'une faible quan= lité de matière étrangère el souvent même aucune trace. Ce fait est facile à mettre en évidence par l'emploi de matières colorantes. Ainsi la fuchsine colore fortement en rouge le liquide isotrope, mais les gouttes cristallines produites par refroidisse= ment du liquide coloré ne contiennent pas du tou de matière colorante. 4 Je ferai remarquer que, si le liquide trouble était hétérogène, si c'était une émulsion, les composants se coloreraient inégalement dans le cas où ilya r I | absorption de matière colorante. 4 | P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS 989 O. Lehmann a étudié l'orientation des molécules cristallines liquides par rapport à celles du cristal solide. Il a remarqué qu’une plage très mince de p-azoxyphénétol solide, en devenant liquide, con- serve le même polychroïsme et les mêmes directions d'extinction. Les liquides anisotropes, dont les propriétés \ B Fig. 10. — Gouttes anisotropes se divisant en deux sous l’in- fluence d'un corps étranger. — À, cristal liquide dans la première position principale; B, dans la seconde position principale; les nicols sont croisés. (D'après O. Lehmann.) viennent d’être passées en revue, ont la faculté de produire des gouttes identiques à celles d’un liquide ordinaire : elles peuvent se diviser sous l'influence d'un corps étranger ou se réunir ; elles montrent alors des phénomènes assez curieux. Deux gouttes qui viennent de se fusionner conservent pendant quelque temps les caractères particuliers de chacune d'elles (fig. 9), mais finalement la goutte totale a la constilution des gouttes étudiées plus haut. Si elle est dans la première po- sition principale, elle a un noyau foncé, enve- loppé d’une zone claire. “ Les gouttes, en se réu- nissant, montrent par- fois des images curieu- ses, plus ou moins com- pliquées. Les cristaux liquides provenant de la division d’une goutte présentent finalement les caractères de la goutte primitive (fig. 10). On a voulu, tout à fait à tort, établir des compa- raisons entre les cris- taux et les êtres vivants; avec plus de raison, on -a vu des relations entre les gouttes liquides biré- fringentes et les cellules. Sur une lame de verre, le liquide recouvert d'un couvre-objet et examiné entre les nicols croisés montre un grand nombre de croix noires, plus ou moins déformées, représentant chacune un ou plu- sieurs cristaux liquides (fig. 2). Fig. 11. — Cristaux de ben- …— zoate de cholestéryle. — Deux cristaux, a et b, se fusionnent pour former un cristal unique. (D'après O, Lehmann.) $ 2. — Cristaux plastiques. Les cristaux de beaucoup de substances sont plus ou moins plastiques, surtout ceux des métaux (expériences anciennes de Tresca). O. Lehmann à montré que la masse päleuse, obtenue en fon- dant l’iodure d'argent hexagonal, est composée d’un agrégat de cristaux oclaédriques entrant en fusion à 450°. L'oléate d'ammoniaque, dont la C Fig. 12, — Cristaux d'oléate d'ammoniaque formés dans l'al- cool. — Deux cristaux se fusionnent pour produire un cristal unique (a et b) ou donnent naissance à une macle (c). (D'après O. Lehmann.) consistance est celle de la vaseline, est cependant constitué par un agrégat de cristaux qui se défor- ment par la plus faible pression. Le benzoate de cholestéryle, dont la fluidité est celle de l'huile, , A B Fig. 143. — A, Cristal de p-azoxybenzoate d'éthyle se défor- mant progressivement au contact d'une bulle d'air. — B, plusieurs cristaux donnant finalement naissance à un sphérolite. (D'après O. Lehmann.) présente, comme le p-azoxyphénétol, une phase liquide trouble, qui permet d'observer un passage entre les cristaux d'oléate d'ammoniaque et les cristaux liquides proprement dits. Dans ces derniers, la forme de la goutte biré- 990 P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS fringente est due seulement à la tension super- ficielle: celle des cristaux plastiques est influencée à Ja fois par celle-ci et par la structure cristalline ; aussi les cristaux allongés sont arrondis à leurs deux extrémités. Ces cristaux plastiques montrent quelques propriétés intéressantes, jetant un jour tout à fait nouveau sur les forces moléculaires, et il y aurait des comparaisons inléressantes à faire avec d’autres phénomènes observés dans les cris- taux, si cela ne nous éloignait pas trop du sujet. Les cris- taux de ben- zoate de cho- lestérylesont allongés, peu biréfringents et tout à fait plastiques.Si deux cris- taux, par sui- te des mou- vements du liquide, arri- vent à se ren- contrer, SOUS l’influence des actions capillaires, l'un d’eux tourne de fa- con à se mel- tre dans la même direc- tion que celle de l’autre, et les deux se fusionnent en un seul, $ 3. — Mélanges de liquides cristallins. La distinction entre les cristaux liquides et quelques-uns des cristaux plastiques ou mous qui viennent d’être considérés est artificielle; aussi, on peut s'atlendre à trouver des mélanges entre ces liquides. Le benzoate de cholestéryle se mélange en toutes proportions avec le p-azoxyphénétol, et le liquide biréfringent qui en résulte présente, à l'œil nu, des colorations encore plus belles que celles qui sont caract ® risliques de quelquessels de cholesté- ryle. La biré- fringence du liquide obte- nu est inter- médiaire en- tre celle des deux compo- sants. Les gouttes ain- si produites. présentent en généralde nombreuses hachures liquide çon tient une grande quan= tité de ben= zoate de cho lestéryle, le gouttes sonb ovoïdeset,e comme l'in- semettanten dique la fi- Fig. 14. — Préparation mince d'un mélange de liquides biréfringents, observée en contact les lumière naturelle. — Les gouttes montrent de nombreuses bandes. (D'après une | gure 11. phototypie de ©. Lehmann, cliché de l'ouvrage de Schenck.) unes avec le L'oléate autres, pro= d'ammoniaque, cristallisant dans l'alcool, montre un phénomène semblable; en outre, les cristaux, en venant au contact dans certaines positions, forment des macles (fig. 12). Les cristaux de p-azoxybenzoate d'éthyle présen- tent un exemple frappant de l'influence de la ten- sion superficielle sur la forme de ces substances plastiques. Au contact d'une bulle d'air, ils se déforment progressivement, se raccourcissent, et viennent l'entourer partiellement (fig. 13). S'il y a plusieurs cristaux, la bulle peut être complètement envelop- pée et, si elle vient à disparaitre, il se produit un Sphéro-cristal. duisent des macles de deux à cinq individus (fig. 15). Celles de 4 cristaux sont intéressantes, (fig. 16); les hachures se croisant au centre, il s@ Fig. 15. — Gouttes données par un mélange de p-azoxÿs phénétol et de benzoate de cholestéryle. — Macles ‘de. trois individus. (D'après O0. Lehmann.) produit le phénomène des réseaux et, par suite, les & belles couleurs signalées plus haut. La partie cens, P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS 991 L trale de la macle forme une étoile bleue à quatre branches, avec une bordure rouge devenant exlé- rieurement jaune et finalement blanche. Le mélange d’anisaldazine et d'acide p-méthoxy- cinnamique, fondu avec un peu de colophane, donne des résultats curieux !. La biréfringence des globules anisotropes est diminuée de telle sorte qu'au lieu de donner les blancs d'ordre supérieur, ils présentent de belles couleurs et, en outre, la ro- tation du plan de polarisation fait complètement dé- faut. Mais ces globules ne conservent pas longlemps les mêmes propriélés : leur biréfringence augmente brusquement, comme s'il s'agissait d'un change- ment polymorphe, la fluidité ne changeant pas, et leur mobilité diminue. Cette modification est ensuite suivie d’une autre : les gouttes deviennent isotropes; mais, en faisant glisser la lame couvre- objet, on peut constater que la biréfringence n'a 1. Fig. 16. — Macles de quatre individus produites par le mélange de benzoate de cholestéryle et de p-azoxy- phénétol. (D'après O. Lehmann.) pas changé et que l’isotropie est due à ce que les molécules se sont orientées de facon qu'un axe optique soit perpendiculaire à la préparation. Une orientation semblable a aussi été constatée dans l’oléate d'ammoniaque. Il ne s’agit probable- ment d'aucun changement polymorphe; les varia- tions de la biréfringence sont dues à ce que l’ani- saldazine et l'acide p-méthoxycinnamique ne sont pas miscibles en toutes proportions, et, par suite de l'abaissement de température, les deux liquides se séparent partiellement dans la goutte. III. — PROPRIÉTÉS PHYSICO-CHIMIQUES. L'étude des propriétés optiques a montré que les liquides anisotropes doivent leur biréfringence à leur structure moléculaire; mais tous, sans excep- tion, sont troubles, et la première idée qui vient à l'esprit est qu'ils ne sont pas homogènes. O. Leh- mann explique ce trouble en admettant qu'il est ! Ann. d. Physik, 4° série, vol. XVI, p. 160, 1905. produit par des réfractions et des réflexions dans les divers cristaux liquides, dont l'orientation varie avec chaque individu ; un liquide dont les molécules auraient la symétrie cubique serait transparent. Je ferai remarquer que, les gouttes se réunissant, dès qu'elles sont en contact, pour former finalement un seul cristal liquide, les molécules d’un liquide ani- sotrope contenu dans un vase devraient avoir une orientation régulière dans toute l'étendue du liquide, à l'exception de celles qui sont en contact avec les parois ; par conséquent, il doit en résulter un cristal parfait, transparent et sans aucun trouble. Pour que cela se réalise, il faudrait que le liquide fût au repos absolu et, par conséquent, que sa tempé- rature fût rigoureusement la même en lous ses points, conditions impossibles à maintenir pendant un temps assez long, tant qu'on n'aura pas décou- vert des liquides biréfringents à la température ordinaire, laquelle peut seule être réglée avec une grande précision. Ce trouble des liquides biréfringents n'est pas, au premier abord, en faveur de la conception de O. Lehmann, et d’autres hypothèses ont été émises. G. Quincke a pensé qu'en admettant l'existence de corpuscules solides anisotropes en suspension dans un liquide en contact avec un autre liquide, non miscible avec lui et l’enveloppant comme le ferait une membrane, le phénomène serait expliqué; il serait même intéressant de réaliser l'expérience. Tammann croit qu'il s'agit d'une émulsion. Le liquide biréfringent de p-azoxyphénétol serait formé par un produit brun se produisant en grande quantité dans les substances du p-nitrophénol et par une solulion dans celui-là du corps solide non décomposé. Pour savoir si les liquides biréfringents sont homogènes ou hétérogènes, de nombreuses recher- ches sur diverses propriétés physiques ont été faites, surtout par R. Schenck et par plusieurs élèves de l'Université de Marbourg; trois thèses sur ce sujet ont déjà été soutenues. $ 1. — Propriétés montrant que les liquides biré- fringents sont purs. Si les liquides troubles sont des émulsions, une machine centrifuge doit permettre de séparer les liquides constituants. Schenck a expérimenté sur le p-azoxyanisolphénétol, très trouble entre 93°5 et 1496. La machine centrifuge de 0",60 de dia- mètre a fonctionné pendant dix minutes à 1.500 tours à la minute. Aucune séparation n'a été obtenue. Cœhn, qui s'est servi, dans ses expé- riences, du p-azoxyanisol, a utilisé une machine donnant 1.000 tours à la minule. Au bout de deux heures, le liquide était encore trouble comme au début de l'opération. Avec un temps beaucoup 992 P. GAUBERT — CRISTAUX LIQUIDES ET LIQUIDES CRISTALLINS moindre, les éléments figurés du sang se séparent ! du sérum. La cataphorèse électrique permet aussi de recon- naître les émulsions. La méthode est basée sur le fait que, s'il existe une différence de potentiel entre les gouttelettes en suspension et le liquide, les premières se dirigent vers une des deux élec- trodes, dans le cas où une chute de potentiel est produite dans le liquide. Bredig et von Schu- kowski ont expérimenté avecl'anisaldazine, le pro- pionate de cholestéryle et deux autres substances, et Cœhn avec le p-azoxyanisol. Les conditions de température, de pression, etc., ont élé variées et aucune séparation n’a été obtenue. De Koch a montré que les émulsions, contenant des particules d’une autre nature en suspension, donnent les anneaux de Newton, et, des dimensions de ces anneaux, il est même possible de calculer celles des particules en suspension. Le p-azoxya- nisol et l'acide p-méthoxycinnamique ne lui ont fourni aucun résultat. De Koch a aussi observé que le spectre d’absorp- tion des liquides clairs et des liquides cristallins est le même. Le changement de la viscosilé, produit au mo- ment où le liquide trouble devient monoréfringent, est un fait absolument inattendu. Des mesures pré- cises faites par Schenck, il résulte que la plupart des liquides anatropes, en devenant clairs, perdent beaucoup de leur fluidité. Une émulsion ne donne rien de semblable. Par conséquent, tous les faits observés qui pré- cèdent montrent que les liquides biréfringents ne sont pas des émulsions. L'expérience de Abbegg et Leitz contredit l'hypo- thèse de G. Quincke. Ces auteurs ont mesuré la constante diélectrique du liquide cristallin et du liquide isotrope, el aucune différence n'a été con- statée, alors que, d’après les observations de Drude, s’il y avait eu des particules solides en suspension dans le liquide trouble, on aurait observé une di- minulion de la constante diélectrique, au moment de la clarification. En outre, G. Tammann a filtré trois fois, avec un filtre à bactéries, un liquide biréfringent et n'est pas arrivé à obtenir la moindre séparation. $2. — Comparaison des propriétés physiques des deux liquides anisotrope et isotrope. En général, il y a une diminution brusque de la densité, au moment où le liquide trouble devient clair. Le changement est assez faible dans le benzoate de cholestéryle et presque nul dans le p-diacétylstilbène chloré; mais, dans ce dernier cas, il se forme des produits de décomposition, qui faussent les observations. Les points de fusion et de clarification sont mo- difiés par la pression. Huletl a montré que ces deux points s'élèvent régulièrement avec la pression et que les lignes les représentant en fonction de la température sont deux droites presque parallèles dans le p-azoxyanisol et le p-azoxyphénétol. Le point de congélation d’un liquide est abaiïssé par la présence d’une substance étrangère en disso- lution dans ce dernier, et la grandeur de cet abais- sement dépend de la concentration moléculaire de cette dissolution. Si le point de clarification est analogue au point de solidification, ur phénomène semblable doit être observé. Schenck a fait, dans ce but, des expériences qui ont confirmé celte ana- logie. Le passage de l'état solide à l’état de liquide ani- sotrope se fait avec absorption de chaleur, ce qui est tout naturel; mais il était intéressant de savoir si la transformation du liquide cristallin en liquide isotrope nécessite une cerlaine quantité de cha- leur. Les nombreuses mesures failes ont montré que l’analogie entre les points de clarification et de fusion est complète. Dernièrement, Rotarski et Zemèuyj ont fait des recherches au moyen du pyromètre enregistreur de Kurnakow pour voir si la fusion et la clarifica= tion se font à une température déterminée. Des courbes de refroidissement obtenues, ils concluent que le liquide trouble se comporte comme une émulsion; leurs résultats ont été contestés par Schenck. Les chaleurs spécifiques diffèrent peu dans les liquides anisotrope et isotrope. Elles sont, en effet, pour les deux corps suivants : ÉTAT LIQUIDE LIQUIDE solide trouble clair p-azoxyanisol . . . - 0,282 0,529 0,531 p-azoxyphénétol . . . 0,335 0,526 0,529 La tension superficielle ne varie pas beaucoup d'un liquide à l’autre; elle est par centimètre carré (deux expériences) : anisotrope . . 38,62 dynes. (I) MU cu \ — re STONE EN) p-azoxyanisol. . ue 304 LS OUT - 1e LS: 000e SANT anisotrope. . 30,11 — (I) So Den et \ — 0.198 40) PRPOTS PER EN ESS trope 0e C0 28 00) l = . te 027 DEAR) Les molécules cristallines et amorphes ont done presque le même volume, et il serait très intéres= sant de savoir si les deux sortes de molécules ont la même facilité de passer dans le réseau des cris- taux de heulandite ; malheureusement, l'expérience ne sera réalisable que le jour où nous connaïitrons, un liquide biréfringent à la température ordinaire. HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 993 IV. — Coxczusroxs. L'étude rapide des diverses propriétés desliquides cristallins a montré que lear biréfringence est réelle- ment due à leur structure moléculaire et non à une émulsion (hypothèse de Tammann). En outre, il - existe tous les passages entre les cristaux liquides et les cristaux solides. L'hypothèse de O. Lehmann donne donc une interprétation satisfaisante des | phénomènes observés. 1l est probable que, dans les cristaux solides, la double réfraction dépend aussi, comme dans les cristaux liquides, de la molécule elle-même, fait déjà admis par plusieurs cristallo- graphes. Cependant, l’idée qu'un liquide puisse être biré- fringent choque tellement les idées en cours qu'elle est loin d'être généralement admise. Sur la proposition de Van 'Hoff, une Commission, dont fait partie le principal adversaire des théories de M. Lehmann, M. Tammann, a été nommée par la Société Bunsen, société dont le but est de faire pro- gresser la Chimie physique, pour étudier la nature desliquides troubles. L'attention étantainsi appelée, d'une façon particulière, sur cette question, il est probable que, dans peu de temps, on aura encore à enregistrer des faits nouveaux relatifs à la Phy- sique moléculaire. P. Gaubert, Assistant de Minéralogie au Muséum d'Histoire naturelle. REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE ÏJ. — ANESTHÉSIE. A diverses reprises, dans ces revues annuelles de Chirurgie, nous avons eu l'occasion d'aborder la question de l’anesthésie. Une série de travaux, publiés cette année, nous engage à revenir sur ce point. $ 1. — Anesthésie locale. Depuis que la cocaine est entrée dans la pratique, il y a une vingtaine d'années, on a tour à tour prôné la tropacocaïne, l’eucaïne a, l'eucaïne b, J'anesthésine, le gaïacol, puis toujours on est revenu à la cocaïne. Actuellement, il semble qu'on soit en possession d’un nouvel anesthésique local pouvant supporter la comparaison avec elle. La stovaine, découverte par un chimiste français, -M. Fourneau, rentre, nous dit M. Pouchet, dans le groupe des anesthétiques locaux et possède, en “outre, à faible dose, des propriétés antithermiques manifestes. Son action est analogue à celle de la cocaïne, elle abolit les propriétés vitales des cel- lules avec lesquelles elle vient en contact et agit comme poison du système nerveux central. Elle a une action tonique sur le cœur, des propriétés antiseptiques; sa toxicité est beaucoup plus faible que celle de la cocaïne. . MM. Chaput et Reclus, qui l'ont expérimentée Sur l'homme, s'en déclarent très satisfaits. L'action de la stovaïne serait peut-être, au dire de Reclus, moins durable que celle de la cocaïne; mais c'est là une différence infinitésimale, et la vérité est que la stovaïne vaut la cocaïne. Elle est moins toxique. Reclus emploie couramment 14, 16, 18 et même 20 centigrammes de stovaine; les petits troubles physiologiques parfois notés, une légère päleur de la face, un peu d’anxiété précordiale, sont plus exceptionnels encore qu'avec la cocaïne. Aussi comprend-on que les partisans de la rachicocaïnisation, Chaput, Tuffier, aient, dans ces derniers temps, substitué à la cocaïne la stovaïne pour les injections anesthésiantes intra-rachidien- nes. L’anesthésie semble avoir été bien obtenue; mais, comme après l'emploi de la cocaïne lombaire, on a observé une céphalalgie pénible, de la rachi- algie et des vomissements. Bien que celte rachi- stovaïnisation n'ait encore été employée que sur un nombre relativement limité de malades, on a déjà publié deux cas d'intoxication manifeste, dont un suivi de mort. Aussi comprend-on que M. Reclus, tout en acceptant ce qui a trait aux injections loca- lisées de stovaïne, ait fait des réserves théoriques sur l'emploi de la stovaïne rachidienne. $ 2. —_ Anesthésie générale. Au cours de la dernière année écoulée, un mou- vement s’est dessiné à Paris en faveur de l'emploi des appareils au lieu de la simple compresse pour l’'administralion du chloroforme. MM. Kirmisson, Delbet, Quénu, etc., ont préconisé l'emploi d'un appareil venu d'Allemagne, celui de Roth-Dräger. La méthode de Roth s'inspire d'un double principe : 1° Le principe des mélanges titrés de chloro- forme, établi expérimentalement par Paul Bert, et appliqué par lui avec succès, dès 1884, dans le service de Péan; 9 Le principe de l'association de l'oxygène au chloroforme, principe excellent, les récentes expé- riences de Gwathmey, à New-York, ayant montré 994 HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE que le chloroforme mélangé à l'oxygène est déux fois moins toxique que lechloroforme mélangé d’air. Dans l'appareil de Roth, l’arrivée de l'oxygène, contenu sous pression dans un obus, est réglée par une vis faisant mouvoir une aiguille sur un cadran gradué, permettant de faire passer à vo- lonté 1, 2, 3,4 ou5litres d'oxygène par minute et de savoir toujours la quantité qui passe en un temps donné. L'écoulement du chloroforme, contenu dans un petit récipient en verre, peut de même être accéléré ou retardé, suivant la position qu'on donne à une aiguille se déplaçant sur un second cadran analogue au premier. On peut ainsi faire -respirer par minute 50 centigrammes, 1 gramme, À gr. 50 ou 2 grammes de chloroforme. Théoriquement, cette méthode semble bonne; pratiquement, elle a tout au moins l'inconvénient de nécessiter l'emploi d’un appareil volumineux, lourd, peu portatifet coûteux. Aussi comprend-on que son emploi n'ait séduit qu'un pelit nombre de chirur- giens et que l’on ait cherché des appareils plus simples. À cet égard, nous devons mentionner celui de Vernon-Harcourt, couramment employé à Londres, que MM. Monprofit et Témoin ont intro- duit en France, et les appareils plus récents de Ricard et de Reynier. L'appareil de Ricard est le plus employé à Paris. Cet appareil se compose essentiellement d'un masque, pourvu à sa partie supérieure d'une sou- pape d'expiration et relié, par un tube garni d’une soupape d'inspiration, à un appareil mélangeur de chloroforme et d’air. Cet appareil est constitué par un cylindre de verre dans lequel se trouve le chloroforme et dont le couvercle est percé de cinq trous, dont quatre peuvent être fermés successivement, ce qui permet de diminuer à volonté la quantité d'air pénétrant dans l'appareil et, par conséquent, d'augmenter la proportion de vapeurs chloroformiques. Une tige filetée creuse passe par l'orifice central du couvercle et supporte un disque intérieur mobile, percé d'un orifice central. Ce disque peut descendre jusqu'au contact du chloroforme; remonté au maximum, il vient bulter contre la base d’un cylindre métallique appendu au couvercle et ménage ainsi, au-dessus de lui, une chambre dans laquelle aboutissent le tube d'inspiration relié au masque et les quatre orifices situés sur le couvercle; le malade ne respire alors que de l’air pur. Malgré ce qu'ils ont de séduisant, ces divers appareils n'ont pas été adoptés par tous les chi- rurgiens. M. Berger craint que l'emploi des appa- reils ne détourne l'attention du chloroformisateur de l'observation des phénomènes physiologiques présentés par le malade, en la portant sur le jeu de l'appareil, en remplaçant la surveillance du malade par la surveillance des robinets, des curseurs, des obluraleurs, des soupapes. Aussi préfère-tsl donner le chloroforme sur une simple compresse, ce qui, incontestablement, est le procédé le plus simple d'anesthésie. Avec la compresse et un peu d'’atten- tion, on peut, du reste, régler l'administration du chloroforme comme on le fait avec les appareils mélangeurs. Le point important, quel que soit le mode d’anes- thésie employé, c’est de donner au début le chlo- roforme doucement pour éviter les défenses du début, l'excitation violente et les troubles respira- toires qui en sont la conséquence. Il est important que l'anesthésie soit bien commencée, sans quoi elle reste souvent jusqu’au bout troublée; puis qu'elle soit très régulièrement continuée, de ma- nière à éviter ces demi-réveils qui précèdent sou- vent les accidents. Qu'on emploie un quelconque des appareils ou la compresse, il y aura toujours des anesthésies régulières et de mauvaises anes- thésies, et cela dépendra beaucoup de celui qui donne le chloroforme. À cet égard, l'institution d'anesthésistes professionnels semble une bonne pratique, qu'il y aurait lieu de chercher à vulga- riser en France. $ 3. — La scopolamine. Un nouvel anesthésique général nous à été apporté, par M. Desjardins, d'Allemagne, où il est employé depuis quelques années par un certain nombre de chirurgiens. La scopolamine s'emploie en injections sous-cutanées associée à la morphine (L milligramme de bromhydrate de scopolamine, 4 centigramme de chlorhydrate de morphine, 1 centimètre cube d’eau). Avec trois injections de 4 centimètre cube, faites successivement quatre heures, deux heures et une heure avant l'opération, on arrive, dans 26 °/, des cas environ, à avoir une anesthésie suffisante pour pouvoir opérer. Les malades dorment en général de ments, sans nausées, ne se plaignent pas de leur plaie et restent plus ou moins anesthésiés pen- dant une période de vingt-quatre heures environ: La scopolamine a été particulièrement employée en France par Terrier et Desjardins, puis par Walther et Defontaine. $ Elle a l'inconvénient d’être très inégale dans sons action, si bien que, chez un grand nombre de malades, il faut donner une certaine quantité de chloroforme ; elle provoque une vaso-dilatation qui gêne parfois l'opérateur; enfin, elle s'accompagne d'une contracture de la paroi abdominale ne cessant même pas à la suite de la chloroformisation et contre-indiquant la scopolamine pour la chirur-" gie abdominale. + quatre à cinq heures et se réveillent sans = LI tt À Ps HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 995 …. [1 semble que, pour de petites interventions, la “scopolamine-morphine soit suffisante; pour des opérations plus sérieuses, elle pourrait être utile- ment combinée à l’action du chloroforme. Il suffi- rait de faire, une à deux heures avant l'opération, “une injection de la solution habituelle, puis de donner le chloroforme pendant que le malade est sous l’action du médicament; il passerait alors insensiblement au sommeil le plus profond, sans appréhension, sans agitation, après avoir inhalé une quantité de chloroforme extrêmement minime. M. Terrier, qui, au début, avait conseillé de chercher à obtenir l'anesthésie avec les injections de scopolamine-morphine seule, constatant que dans 76 °/, des cas il fallait donner du chioroforme et sans qu'aucun indice pût faire prévoir cette nécessité, a fini par conclure qu'il élait préférable d'en donner de parti pris dans tous les cas. Avec l'unique injection de scopolamine, qui suffit alors, on na pas les inconvénients que nous avions signalés à la suile de la triple injection : la contrac- “ture de la paroi et la vaso-dilatation superficielle … deviennent inappréciables. II. — TRAITEMENT DU CANCER. La question du cancer, de sa nature et surtout de son traitement, continue à être une de celles qui préoccupent le plus le monde médical ; nous “ajouterions même le monde extra-scientifique, si LE en jugeait par les nombreux articles que la presse politique a consacrés depuis dix-huit mois à a sérothérapie du cancer. PORTER $ 1. — Sérothérapie. Dans une série de publications retentissantes, M. Doyen a cherché à établir : a) Que le cancer élait dû à l’action d'un microbe “inconnu jusqu à ses travaux et qu’il décrit sous le run grand nombre de cancers par l'injection d'un Sérum spécial. Les travaux de contrôle, faits à la suite de ces communications, semblent bien établir l'existence “du nouveau microbe décrit par Doyen sous le nom | de Micrococcus neoformans. Dans un grand nombre de tumeurs, M. Metchnikoff a, sur ce point, con- firmé les assertions de Doyen; mais il ne s'ensuit pas nécessairement que ce microbe soit l'agent spécifique du cancer. M. Doyen le croit pour deux raisons : … 1°Il a pu, avec des cultures de son microbe, pro- Yoquer le développement de tumeurs ; 2° Les culiures de son microbe ont été agglu- tinées par le sérum de plusieurs cancéreux. Malheureusement, les examens faits par les membres de la Société anatomique, Cornil, Brault, Letulle, Weinberg, etc., des tumeurs obtenues par M. Doyen à la suite de l’inoculation de son microbe, ont montré que cet expérimentateur s'était mépris sur la nature des productions constatées. Jamais il n'a obtenu une néoformation répondant à la marche el à la gravité clinique du cancer vrai. Les lésions qu'il a produites dans ses expériences ne sont que des lésions d’inflammation subaiguë ou chronique ; elles ne répondent en rien aux types microscopiques de l’épithéliome ou du sarcome; elles sont identiques à celles qui succèdent à une infection par d’autres micro-organismes, le bacille tuberculeux par exemple, ou même à l'introduc- tion de corpuscules étrangers, stérilisés, comme la poudre de lycopode. Quant au fait que, dans quelques cas, les cultures du Micrococcus neoformans ont été agglutinées par le sérum de cancéreux, il n'a pas l'importance que lui attribue M. Doyen au point de vue du diagnostic du cancer et, par conséquent, au point de vue de la spécificilé du microbe comme agent pathogène des néoplasmes. M. R. Marie, expérimentant avec le sérum de tuberculeux, de syphilitiques, d’hémiplé- giques, de malades atteints d'affections médullaires et même d'individus sains, a pu constater que le sérum humain, quelle que fût sa provenance, et quelle que fût la maladie du sujet qui l'avait fourni, possède la propriété d’agglutiner le mi- crobe de Doyen tout comme le sérum des cancé- reux. La conclusion à tirer de tous ces travaux de con- trôle, c’est qu’il existe dans un certain nombre de néoplasmes un microbe répondant aux caractères décrits par Doyen, mais que rien ne démontre, ni les recherches expérimentales, ni le séro-diagnos- tic, qu'il s'agisse là d'un microbe spécilique, de l'agent pathogène du cancer. Sur la demande de l'Association francaise de Chirurgie qui, lors du Congrès de 1904, avait manifesté le désir d'être scientifiquement rensei- gnée sur la valeur du traitement sérothérapique de Doyen, et qui avait exprimé le vœu que la Société de Chirurgie nommäât une Commission pour en étudier les effets, la Société de chirurgie, dans sa séance du 14 décembre 1904, procéda à l'élection d'une Commission composée de MM. Berger, Kir- misson, Monod, Nélaton et Delbet. Vingt-six malades ont été suivis dans la clinique de M. Doyen, où ils étaient traités par M. Doyen lui- même; sept mois plus tard, dans la séance du 12 juillet dernier, la Commission apportait le résul- tat de ses constatations : « Trois observations sont inutilisables, les mala- des n'ayant pu être suivis ; 996 HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE « Un cas est sans récidive après quatre ans et demi {(lymphosarcome du testicule) ; « Deux cas sont stationnaires; « Vingt-neuf sont incontestablement aggravés et, chez quelques-uns, l’aggravation semble même avoir été très rapide. « M. Doyen objecte que quelques-uns deces ma- lades ont été insuffisamment traités; il n’en reste pas moins, comme le fait observer Pierre Delbet, au nom de la Commission dont il était le rappor- teur, « que, pendant les cinq mois où nous avons examiné tous les malades que M. Doyen à voulu nous montrer, nous n'avons pas vu une seule amé- lioration. Aussi nous semble-t-il que M. Doyen a été victime des illusions qui entraînent si facile- ment les inventeurs à confondre leurs espérances avec la réalité, et nous concluons à l'unanimité : « Rien de ce que votre Commission a observé ne permet de penser que le traitement de M. Doyen ait une action favorable sur le cancer. » En présence de ces constatations précises, nous devons donc encore une fois abandonner les espé- rances qu'avait fait naître cette nouvelle médica- tion sérothérapique et revenir aux traitements locaux qui, seuls jusqu'ici, ont donné des succès. $ 2. — Rayons X. ù Parmi les nouveaux traitements locaux du can- cer, ilen est un sur lequel nous devons nousarrêter quelque peu : c’est le traitement par les rayons X. Il semble aujourd'hui bien établi que la radio- thérapie, appliquée au trailement des cancroïdes de la peau, en particulier des petits épithéliomas de la face, est efficace; elle provoque, comme le dit Tuffier, la disparition du tissu néoplasique et de ce tissu seul, si bien que la cicatrice consécutive est remarquable par sa souplesse et son unifor- mité. Pour les cancers plus profonds, ayant secon- dairement envahi la peau ou nou encore ulcérés, les résultats ne semblent pas aussi brillants. L'application des rayons demande, du reste, à être faite alors avec certaines précautions. Béclère, qui, dans ces dernières années, s’est spécialement attaché à l’étude de ces questions, pose les règles suivantes : 4° Faire absorber à chaque séance la quantité de rayons maxima compatible avec l'intégrité du tégument; 2% Mettre entre les diverses séances l'intervalle de temps minimum compatible avec l'intégrité du tégument. Conformément à ces règles, il est difficile de dépasser par séance la dose de 4 H (unités Holz- knecht) et de mettre entre deux séances consécu- tives moins d'une semaine d'intervalle. En se conformant à ces règles, on arrive à obtenir la cicatrisation d'un certain nombre d'ulcérations;, cicatrisation qui s'accompagne d'une notable amé-« lioration de l’état général, comme si le traitement en faisant disparaitre les lésions locales, tarissait une source de poisons. Il ne semble malheureuse | ment pas que l’on ait obtenu jusqu'ici de guérisons réelles ; les malades localement améliorés, quelque- fois même guéris en apparence, succombent au bout d’un temps plus ou moins court à des dégéné= rescences ganglionnaires ou viscérales secondaires Bien plus, la cicatrisation d'une ulcération ne semble être quelquefois que le résultat d’une pseudo-guérison, comme le montrent des examens de Borrel, qui a trouvé, au microscope, du cancer dans la partie profonde de noyaux cicatrisés. Le traitement opératoire, abstraction faite des petits cancroïdes de la face dont l'évolution lente est, du reste, toute spéciale, reste le seul que nous ayons pour combattre le cancer. Peut-être y aurait il quelque utilité à faire des applications de rayons X sur les cicatrices après les extirpations de cancer, l’action élective de ces rayons sur les tissus" néoplasiques et leur respect des éléments normaux nous autorisant à le faire. Rien n'est toutefois encore établi sur ce point. $ 3. — Opérations. Pour que le traitement opératoire donne des résultats durables, il faut que le chirurgien enlève la totalité des tissus envahis. Il faut, de plus, qu'il les enlève en bloc, comme s'il s'agissait d'une poche septique, évitant la dissémination dans lan plaie de cellules cancéreuses qui pourraient y pul= luler et être le centre de noyaux de récidive à évo- lution quelquefois plus rapide que la tumeur ini- tiale. Le manuel opératoire est aujourd'hui réglé pou une série de cancers. 4 Pour le cancer du sein, il faut enlever en bloc le sein, la peau, le muscle pectoral sous-jacent et la masse remplissant le creux axillaire, mettant en pratique le procédé d'Halsted (de Baltimore) plus ou moins modifié. Pour le cancer de l'utérus, ily a lieu d'enlever par l'abdomen les ligaments larges; l'utérus et la partie supérieure du vagin suivant les indications de Wertheim (de Vienne). Pour le cancer du pylore, nous conseillons d’extirper en masse le pylore, les glandes sous-jacentes, et toute la petite courbure de l'estomac avec la chaine de ganglions jusqu'au cardia. Pour le cancer du recz tum, nous avons posé comme règle qu'il faut enlever tout le rectum avec les ganglions de son méso, en bloc, ce qui est facile en rasant la CONCA= vité sacrée, etc. 4 Pour tous ces cancers, la question opératoire | nous semble actuellement tranchée. Il n’en est pas À D 0 7 Spas C HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE 997 de mème du cancer de la langue, qui a fait, dans ces dernières années, l'objet de nombreuses discus- sions et qui passe pour un des plus rebelles à nos moyens chirurgicaux. Poirier à Paris, Butlin à Londres se sont attachés à montrer qu'on pouvail, par des exérèses élen- dues, arriver à obtenir de véritables guérisons. Tous deux conseillent, toules les fois que le plancher buccal n'est pas pris, de faire l'opération en deux temps : exécutant, dans le premier une opération exclusivement buccale, dans le deuxième une opé- ration exclusivement cervicale, conservant entre les deux foyers opératoires une cloison constituée surtout par le mylo-hyoïdien et la base hyoïdienne des muscles de la langue. En évitant la communi- _calion des plaies opératoires, buccale et cervicale, on évile l'infection des espaces celluleux du cou par le contenu buccal; les dangers de l'opération sont diminués et la durée de la guérison opératoire réduite. Le premier lemps opératoire est relativement simple. La bouche étant maintenue largement ouverte, on tire fortement la langue au dehors et l'on coupe les piliers antérieurs devenus facilement accessibles. Relevant la pointe de la langue, on seclionne avec des ciseaux le frein et les génio- glosses, près de leur insertion maxillaire. Il est alors facile de libérer le ou les flancs de l'organe, suivant l'étendue du mal, coupant après la mu- queuse l'hypoglosse sous lequel on trouve l'artère linguale qu'on lie. On termine l'opération en cir- conscrivant la tumeur à grands coups de ciseaux donnés à distance dans les parties saines. Seul le rejet des liquides intra-buccaux (sang et salive), à chaque expiration et pendant les quintes de toux que détermine l'écoulement de sang dans le conduit pharyngo-laryngé, gène l'opérateur. Pour l’éviter, on peut pratiquer, au début de l'in- lervention, une laryngotomie inlercrico-thyroï- dienne. Celle-ci est très simplement exécutée, après section de la peau, par ponction de la mem- brane intercrico-thyroïdienne avec une canule pourvue d'un mandrin ovoïde aiguisé en trocart. L'opération terminée, on relire la canuleel l’opéré respire par la bouche. Neuf jours après ce premier temps, lorsque le malade commence à avaler sans grandes diffi- cultés, Butlin pralique le deuxième temps, l'exérèse des ganglions cervicaux. Ceux-ci peuvent, au point de vue chirurgical, être classés en quatre groupes différents : un groupe sous-men{al, un sous-maxillaire se confon- dant plus ou moins avec la glande, un carotidien inférieur, dont une glande est particulièrement importante au niveau de la bifurcation de l'artère, un parotidien ou carotidien supérieur qui se trouve REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. situé profondément, plulôt en arrière des vaisseaux qu'en avant, entre ceux-ci et la parotide. Pour enlever toute celte chaine ganglionnaire, il faut faire une longue incision sur le bord antérieur du sterno-mastoïdien, depuis l’apophyse mastoïde jusqu’à l'articulation sterno-claviculaire, et bran- cher perpendiculairement sur celle-ci une autre incision qui va du bord supérieur du cartilage thyroïde à la symphyse. En relevant les deux lam- beaux cutanés ainsi taillés, on enlève complète- ment les groupes ganglionnaires, disséquant de très près le paquet vasculaire du cou, enlevant la glande sous-maxillaire, excisantmême une portion de la parotide et disséquant avec soin tous les muscles de la région. Nous avons cru utile de rappeler ici ces larges opérations faites par Butlin, parce que cette manière de procéder n'est guère entrée dans la pratique jusqu'ici et qu'elle semble avoir donné à son auteur des résultats meilleurs que ceux que nous sommes habilués à observer. Sur vingt-huit malades ayant subi, de janvier 1896 à décembre 1901, ce large évidement du triangle cervical antérieur, Bullin en à vu quatre succomber à une tumeur ganglionnaire sans réci- dive locale sur la langue ; il a pu en suivre dix en parfait état pendant un laps de temps dépassant trois ans. Poirier va plus loin encore que Bullin; se rap- pelant que les lymphatiques d’un côté de la langue s’anastomosentlargement avec ceux du côté opposé, il conseille de pratiquer systémaliquement un évi- dement bilatéral des ganglions du cou, pratique que n'ont pas adoptée les autres chirurgiens et que rejette en particulier J.-L. Faure, qui se demande si les avantages théoriques de l’ablation bilaté- rale ne sont pas largement compensés par les inconvénients qu'il y à à pratiquer une opéra- tion aussi étendue, d'autant plus que, si les gan- glions du côté opposé sont pris, les chances qu'il pourra y avoir de les enlever en totalité sont bien minimes. II. — OTo-RHINOLOGIE. $ 1. — Traitement des otites moyennes aiguës. Le traitement des otites moyennes aiguës, mis à l'ordre du jour de la dernière réunion de la Société française d'Olologie, de Laryngologie et de Rhino- logie, y a fait l’objet d’un intéressant Rapport de Lermoyez, Lubet-Barbon et Moure. Au début, on peut quelquefois obtenir la sédation des symptômes par un {railement purement médical. Lorsque les douleurs ne sont pas continues, que l'audition n'est pas notablement abaissée, que la fièvre est légère, on peut se borner à remplir 99** 998 HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE plusieurs fois par jour le conduit auditif avec de la glycérine phéniquée chaude à 5 °/,. Ces applica- tions calment la douleur et désinfectent l'oreille externe en vue d'une intervention opératoire secon- daire éventuelle. Les applicalions de laudanum, de baume tranquille, qui infectent le conduit, les douches d’air dans le nez, qui agitent la caisse et ses articulations endolories, qui risquent d'envoyer en masse les germes du nasopharynx, sont aujour- d'hui abandonnées. Si la douleur est continue et croissante, si la surdité est récente et très accusée, si, en l'absence de toute lésion en un autre point du corps, la fièvre est vive, il faut faire la paracentèse du tympan, que, pratiquement, on incise là où il bombe. Quand une ou deux larges paracentèses n’ont pas suffi à faire disparaître les symptômes inquiétants de l’otite, s’il persiste des douleurs fixes et spon- tanées dans la région mastoïdienne, s’il y a des douleurs à la pression de l’apophyse, il faut ouvrir largement l'antre mastoïdien. En traitant ainsi rationnellement les otites moyennes aiguës, on évitera les méningites, les abcès du cerveau, les abcès du cou, la surdité définitive, complicalions si fréquentes, autrefois, quand cette affection élait mal traitée. $ 2. — Traitement de la méningite d'origine auriculaire. Jusqu'à ces derniers temps, la Chirurgie se croyait impuissante en présence d'une méningite suppurée. Deux observations récemment publiées par Ler- moyez montrent ce que l’on peut espérer d’une intervention opératoire judicieuse. Dans un premier temps, Lermoyez évide large- ment le rocher, et, par le toit de l’antre, découvre la dure-mère sans la franchir. Si les accidents continuent, au bout de quelques jours il incise la dure-mère crucialement et même pratique des ponctions exploratrices du lobe tem- poral, de manière à vider le ventricule latéral s’il est le siège d’une hydropisie enkystée ou à ouvrir quelquefois un abcès temporal latent. En même temps, on fait et, au besoin, on répète des ponctions lombaires, de manière à évacuer avec le liquide une certaine dose de microbes et de toxines, en même Lemps qu'on provoque la sécré- lion d'une nouvelle quantité de liquide céphalo- rachidien qui posséderait peut-être un pouvoir bactéricide actif. $ 3. — Traitement des sinusites frontales. Si les sinusites frontales aiguës ou subaiguës évoluent naturellement vers la guérison, les sécré- lions s'écoulant facilement et sous la simple action de la pesanteur dans les fosses nasales à lravers le canal infundibulaire, il n’en est pas de même des sinusites frontales chroniques, qui s'accompagnent de modificalions profondes de la muqueuse, hyper- plasiée, bourgeonnante et couverte de fongosités. Depuis que la spécialité olo-rhino-laryngologique a pris le développement que l’on sait, de nombreux procédés ont été préconisés pour la cure de cette affection. Les uns méritent en quelque sorte le nom de procédés simples : ce sont de simples trépanations fronto-sinusoïdales. Dans le procédé d'Ogston-Lue, par une incision courbe, longeant la moitié ou le tiers interne du sourcil, on trépane parcimonieuse- ment la paroi antérieure du sinus, curettant celui-ci et drainant par le canal fronto-nasal. Dans celui de Kunht, on résèque toute la paroi antérieure du sinus frontal, y compris l'arcade orbitaire, on nettoie les parties et l'on applique directement la peau sur l’excavation ainsi créée, ce qui entraine une difformilé considérable. Dans celui de Tilley, on combine les deux opérations précédentes; on supprime la cavité sinusale en enlevant toute sa partie anlérieure, puis on draine par effraction à travers les cellules ethmoïdales antérieures et l'in- fundibulum. Les procédés mirxles s'atlaquent, en même temps qu'aux sinus frontaux, au labyrinthe ethmoïdal. Tel le procédés de Taplas, qui, après avoir réséqué la paroi du sinus jusqu'à son pied, prolonge la brèche jusque dans la cavité nasale par résection de l’apophyse montante du maxillaire supérieur et détruit, au fond de la tranchée ainsi créée, les cellules ethmoïdales. Jacques résèque de même les cellules ethmoïdales, mais y arrive par une baie de la branche montante du maxillaire et de l’apophyse nasale du frontal, après avoir curetté le sinus par un effondrement de sa paroi orbitaire. Killian, pour curelter le sinus, crée deux brèches, l’une aux dépens de sa paroi antérieure, l'autre aux dépens de sa paroi inférieure, toutes deux séparées par l’arcade orbilaire supérieure conservée, ce qui évile la défiguration; puis il trépane l’apophyse montante du maxillaire, ce qui lui permet de curetter et d'ouvrir largement les cellules ethmoï- dales antérieures. Tous ces procédés semblent à Sébileau un peu théoriques. Il n'y a pas de raisons pour trépaner systématiquement d'une manière parcimonieuse ou large. Les sinus frontaux sont très différents suivant les individus : quelquefois si réduits qu'ils logeraient à peine un gros pois, ils sont d'autres fois énormes, atteignent ou même dépassent les bosses frontales, vont jusqu’à l'apophyse orbitaire externe, dédoublent la paroi supérieure de l'orbite, ont une cavité hérissée de cloisons et creusée de logeltes. à . 5 là HENRI HARTMANN — REVU Il faut se conformer à cette règle de chirurgie | générale qui commande de suivre les lésions jusqu'à ce qu'on en ait atteint les limites. Il faut détruire toutes les fongosités. Une simple trépa- nation frontale, d'étendue plus ou moins grande suivant les dimensions du sinus, suffit pour cela; pour assurer un libre écoulement vers la narine, on élargit ensuite avec la curette gynécologique le canal fronto-nasal et l'on détruit les cellules qui l'entourent. Dans ce dernier temps, il faut faire attention de maintenir la curette en bonne direc- tion, car on a une tendance naturelle, sur le malade couché, à la diriger en arrière, ce qui expose à pénétrer dans la partie supérieure et postérieure du labyrinthe et à léser la lame criblée. IV. — TUBE DIGESTIF. $ 1. — Corps étrangers de l’æœsophage. Le diagnostic des corps étrangers de Tœsophage a largement bénéficié de la découverte des nouveaux moyens d'investigalion que nous possédons aujour- d'hui : l'emploi des rayons X et l'æœsophagoscopie. Le passage des olives œsophagiennes ne permet pas toujours de reconnaître l'existence du corps étranger; von Hacker, puis tout récemment Ro- senbaum, ont bien mis en relief le peu de certitude de ce mode d'examen; la sonde glisse quelquefois à côlé du corps étranger sans en déceler l’existence. Au contraire, pour les objets osseux ou mélal- liques, et ce sont les corps étrangers le plus fré- quemment observés, la radioscopie permet le plus souvent un diagnostic exact du siège et des dimen- | sions du corps étranger. Il n'y a qu'une précaution à prendre: ne pas laisser un intervalle lrop long entre l'examen aux rayons X et l'extraction, faute de quoi il peut arriver au chirurgien de chercher, comme Sébileau, par l'œsophagotomie, un sou qui déjà circule dans l'abdomen. L'œæsophagoscopie est d'un emploi assez courant en Allemagne et en Suisse. L'appareil spécial qu'elle nécessite et aussi, disons-le, les manœuvres un peu pénibles auxquelles il faut soumettre les malades font qu’en France ce mode d'exploration ne s’est pas encore vulgarisé, bien qu'il soit cependant sûr et rapide. Le diagnostic élant posé, quel est le meilleur traitement? | Pour les corps étrangers plats et sans aspérités, les sous en parliculier, que les enfants avalent assez fréquemment, le panier de de Graefe était, Jusqu'à ces derniers Lemps, l'instrument auquel on avait généralement recours. Quelques accidents observés à la suite de son emploi, en particulier un cas de déchirure de l'œsophage communiqué à la Société de Chirurgie par Sébileau, un autre d’ar- E ANNUELLE DE CHIRURGIE 99ç rachement du hile du poumon publié par Walther, d’autres accidents relalés par Garel,etc., ont un peu jeté le trouble dans les esprits. Aussi, se fondant sur ce fait que les corps étran- gers s'arrêtent presque toujours au niveau des pre- mières verlèbres dorsales, quelquefois au niveau du chaton du cricoïde, tout à fait exceptionnelle- ment dans l'æsophage thoracique, Bérard et Leriche conseillent l'œsophagotomie externe, qu'ils consi- dèrent comme la méthode la plus sûre et la moins dangereuse pour les cas habituels. Cette opinion est peut-être un peu exagérée et l'extraction par les voies naturelles rejetée d'une manière trop absolue. Broca et Jalaguier, qui ont une grande expé- rience en matière de Chirurgie infantile, continuent à se servir du panier de de Graefe. Pour eux, les accidents qu'on lui impute sont dus à ce qu'on l'a employé dans des cas où il n'était pas indiqué ou à ce que l’on n'a pas su s’en servir. Dès qu'il y a une pointe, une aspérité, c'est un instrument dangereux qu'il faut absolument laisser de côté. Quant aux accidents résultant du passage du panier, ils sont faciles à éviter. Pour ne pas faire de déchirures à l'aller, il faut faire, sur la tige de baleine, poulie de renvoi avec l'index contre la paroi du pharynx, ce qui permet de pousser bien verlicalement. Pour éviter d’accrocher au retour le cricoïde, il suffit de le refouler un peu en avant, soil en portant doucement à la rencontre du panier chargé une éponge montée sur tige de baleine, comme Félizet, soit en portant l'index gauche à la rencontre du sou dont le bord vient se loger entre la pulpe et l’'ongle, comme Broca. On peut encore, à l'exemple de Jalaguier, si l’on accroche, faire décrire un quart de tour au panier de de Graefe et au sou au moment où l'on arrive derrière le cricoïde; on le dégage ainsi facilement. On possède, du reste, actuellement, pour extraire les pièces de monnaie de l'œsophage, un instru- ment bien moins volumineux que le panier de de Graefe, le crochet de Kirmisson, qui ne mesure que cinq millimètres dans le sens antéro-postérieur, qui est facile à introduire, même dans l'œsophage d'enfants de deux à trois ans, et dont la pratique a montré la valeur dans ces dernières années. En Allemagne, où, comme nous l'avons dit à pro- pos du diagnostie, la pratique de l'æœsophagoscopie s'est généralisée, l'extraction a lieu généralement sous le contrôle direct de la vue. Avec l'æœsophago- scope, on saisil, en le voyant, le corps étranger sans risque de pincer ni de déchirer la muqueuse, élant fixé sur la siluation exacle du corps étranger, sur son orientation, ainsi que sur les altéralions de la muqueuse avoisinante. Il suffit, en introduisant le tube œsophagoscopique, de s'arrêter à la première 1000 résistance rencontrée; puis, une fois le corps étran- ger encadré dans l’extrémité du tube, de le saisir avec une pince appropriée et de l’extraire, soit à travers le tube, soit en même temps que le tube, si la lumière de celui-ci ne permet pas le passage du corps élranger. Aussi comprend-on les résultats brillants que cette méthode a donnés à divers chi- rurgiens, en particulier à von Hacker. Actuellement, il semble que, pour les corps élran- gers irréguliers, on se rallie en général à l'œsopha- gotomie externe, que, pour les corps de forme ar- rondie, on cherche à obtenir l'extraction par les voies naturelles, soit avec le panier de de Graefe, soit avec le crochet de Kirmisson, étant bien en- tendu qu'on n'agira ainsi que dans des cas d’acci- dent récent et que toujours on procédera avec douceur. & 2 $ 2. — Tumeurs du gros intestin. Plusieurs communications failes par nous ou par nos élèves à la Société de Chirurgieont appelé l’at- teution sur le traitement des tumeurs du gros intes- tin, un peu trop délaissé dans notre pays. Il reste établi que, dans les cas accompagnés d'occlusion, où l’état précaire des malades s'oppose à une intervention plus importante, l'anus artili- ciel Simple, fait au besoin avec la seule anesthésie locale, reste la seule opération indiquée. Il pare au plus pressé, fait cesser les accidents d'occlusion et permet quelquefois de pratiquer secondairement une opération plus complète. Quelques chirurgiens le regardent encore comme indiqué, en dehors de l'occlusion aiguë, dans les cancers inextirpables par infiltration à distance: nous lui préférons alors l'entéro-anastomose. Les cas les plus intéressants sont ceux où la résection immédiate de la tumeur semble possible. On admet généralement, à Paris, que la résection doit être suivie d’une restauralion immédiate du canal intestinal. Cette manière de faire, bonne pour les tumeurs de l'intestin grêle, ne nous semble pas devoir être toujours adoptée en pré- sence des tumeurs du gros intestin. Pour celles-ci, la ligne de conduite à suivre varie suivant le siège el suivant la nature des accidents présentés par le malade. Lorsqu'il n'y à pas d'accidents d’ocelusion et que la tumeur siège au niveau des fosses iliaques, dans une région où le foyer opératoire est facile à limiter et à drainer, nous pensons qu'on peutopérer eu un temps, enlevant la tumeur, fermant les deux bouts de l'intestin et établissant entre ces deux bouts une anastomose latérale. Lorsque la tumeur siège dans un autre point des colons ou lorsque, siégeant dans une fosse iliaque, «l'e s'accompagne de phénomènes de demi-occlu- HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE sion, nous croyons plus sage de suivre l’exemple- donné par Mikulicz et Hochenegg, et d'opérer en. deux temps : La tumeur étant libérée de ses con- nexions, on l’amène au dehors du ventre, on ferme la plaie par une couronne de sutures fixant aux. lèvres de celle-ci les deux bouts de l'intestin, puis. on résèque la tumeur une fois le ventre fermé, liant le bout supérieur sur une canule destinée à amener au dehors du pansement le contenu intestinal. Dans un deuxième temps, nous excisons l'anus. artiliciel, fermons les deux bouts de l'intestin et établissons entre eux une anastomose latérale. Les. résultats opératoires sont très supérieurs à ceux que donnait, en pareils cas, l'opération en un. temps. $ 3. — Appendicite. 1. Pseudo-appendicites. — La crainte, très jus-- tifiée, que médecins et malades ont actuellement de l’appendicite a amené, dans un certain nombre de cas, une véritable appendicophobie. Nous en trouvons un exemple typique dans le récit fait récemment par Picqué d’une véritable épidémie de pseudo-appendicites survenues dans une petite: garnison. Deux officiers avaient été successivement alteints d'appendicite, et l’un était mort de périto-. nite généralisée, opérée tardivement. Très émus. par ces deux cas, 9 officiers sur 25 vinrent, dans la semaine qui suivit, consulter confidentielle- ment le médecin-major du régiment; tous éprou- vaient des douleurs spontanées dans la fosse iliaque droite; 7 n'avaient aucune douleur à la pression et furent rassurés immédiatement; 1 déclarait souffrir à la pression et fut quelques jours à se laisser tranquilliser; quant au chef de bataillon, il resta cinq jours au lit, et fut guéri instantané: ment par une applicalion de pointes de feu. Il est certain que des chirurgiens ont enlevé, en: particulier chez des névropathes, des appendices. sains. Il y a des femmes qui, toute leur vie, souf- frent du ventre. Jadis, on leur enlevait les ovaires. et on leur faisait parfois subir, sans succès du reste, toutes les opérations de la gynécologie. Aujourd'hui, on enlève leur appendice et elles ne: vont pas mieux. D'autres fois, il s'agit d'erreurs de diagnostie; des malades ont un rein mobile, de la lithiase rénale, une ptose abdominale; ils se plaignent de douleurs dans la fosse iliaque droite, et croient à de l'appendicite. On enlève leur appendice, et ils- continuent à souffrir. La cause de la douleur était ailleurs. C’est ce que montre un récent travail de: Frederick Treves, qui, étudiant les résultats éloi- gnés d'opérations d’appendicile, dit avoir observé quarante-cinq cas de douleurs persistantes après. des opérations d'appendicite à froid. Neuf fois il s'agissait de douleurs ovariennes, huit fois d'en-- RE *, 2 "nn — Po. SES AR TEA É HENRI HARTMANN — REVUE ANNUELLE DE CHIRURGIE térocolile, cinq fois d'hypocondrie, trois fois de caleuls biliaires, deux fois de rein mobile, une ‘fois de calcul rénal, ele. Il est donc nécessaire, en présence de signes d’'appendicite sans crise nette, -de soumettre le malade à un examen approfondi, sous peine de pratiquer une intervention inutile et d’aggraver même son état. 2. Appendicites larvées. — Il est, d'autre part, -actuellement établi qu'en dehors des appendicites avec crises, il existe un assez grand nombre de cas d'appendicites chroniques larvées, qu'on mécon- naissait autrefois et sur lesquelles, à la suite d'une intéressante communication de M. A. Guinard, une longue discussion s’est engagée à la Société de Chirurgie. Presque en même temps, la question était abordée à la Société médicale des Hôpitaux. Des nombreuses communications faites, nous pou- ‘vons tirer un certain nombre de conclusions : 1° Il ya des femmes qui, après une opéralion -sur l'ovaire ou sur l'utérus, continuent à souffrir et qui ne guérissent qu'après une deuxième inter- vention, consistant dans l’ablation d'un appendice enflammé. Il faut donc, en pratique, dans toute Jlaparotomie, aller à la recherche de l’appendice, et, pour peu qu'il soit suspect, l'enlever; 2° Un certain nombre de cas d'appendicites, sur- ‘tout lorsque l’appendice plonge dans l’excavation pelvienne, sont pris pour des salpingo-ovarites, des tumeurs annexielles à pédicule tordu, etc.; 3° Certains accidents dysménorrhéiques, des douleurs attribuées à une rétrodéviation mobile cessent à la suite de l’ablation d’un appendice malade, comme Lejars en a publié des exemples; %° Il existe une forme d’appendicite chronique encore mal connue de beaucoup de médecins, qui s'établit insidieusement, sans éclat, sans poussées aiguës, el qui est d'ordinaire, comme l’a montré Brun, la phase de début, de durée variable, de l’ap- pendicite aiguë. Walther, récemment, en a bien -éludié les symptômes. Cette appendicite chronique est caractérisée par > CH C.OH CO+2H° HO.CH0 CO + H20 H0.C00H CO® + H°0 L > En contact avec une surface catalysante chaude, l'acétylène s'unit avec la vapeur d’eau pour former de l’acétaldéhyde, qui peut ultérieurement se décomposer en méthane et C0. — Mie I. Smedley a reconnu que le pouvoir du groupe carbonyle d'agir comme chromo- phore dans les dérivés du fluorène est détruit lors- qu'on remplace l'oxygène par deux atomes de Cl. Le chlorure de fluorénone, F. 1030, est incolore. — MM. D. R. Boyd et J. E. Pitman ont constaté que l’éther tri- méthylique du pyrogallol est facilement décomposé par HT aqueux; le trichloranisol et le tribromanisol ne sont presque pas affectés par cet agent dans les condi- lions ordinaires; mais, en présence d'acide acétique, glacial, on obtient la quantité théorique d'iodure de méthyle. — MM. J. B. Cohen et D. Mc Candlisch ont étudié le mécanisme de la réduction des dérivés nitrés par l'hydrogène sulfuré. Le degré de réduction est augmenté par la présence de groupes acidiques (AzO®,CO®CH®,CI) et diminué par celle de groupes basiques (CH3,AzIP); il est aussi influencé par les em- péchements stériques. Il se forme, en général, un composé hydroxylamique intermédiaire. — M. G. TM Morgan etM!!e F.M. G. Micklethwait ont préparé une BE. 2 se 4 Mona 3 ox tit nas RL 2 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES série d'arylsulfonyl-p-diazoimides, en particulier la toluène-p-sulfonyl-p-phénylènediazoimide. Ces diazoi- mides donnent des dérivés azoïques par condensation, dans un solvant inerte, avec les phénols et les amines aromatiques. — M. $S. E. Sheppard à montré expéri- mentalement que le développement photographique est une réation chimique réversible; il a déterminé les facteurs d'équilibre pour l’oxalate ferreux. — MM. J. B. Cohen et P. Hartley poursuivent leurs recherches sur la chloruration progressive du benzène en présence du couple aluminium-mereure. Le 3° substituant (atome de CI ou groupe nitré) entrant dans les dichloro- ou chlo- ronitrobenzènes ou dans les monochlorotoluènes occupe la position non symétrique, formantun composé 1 :2:4; le 4° substituant (CI ou Az0?) occupe la position 5. Dans tous les dérivés 1 : 2 : 3 chlorés ou chloro-nitrés du benzène et du toluène, le 4e substituant (CI ou Az?) est adjacent aux trois autres. — MM. F. L. Usher et M. W. Travers ont trouvé qu'en l'absence d'HCI ou en présence de faibles quantités de cet agent As°0* est rapidement réduit par H?S avec formation de trisul- fure. Si la concentration de l'acide augmente jusqu'à 25 0/5, le produit de la réaction est le pentasulfure. Enfin, en présence d'HCI concentré, il se forme de nouveau du trisulfure., — M. Al. Mc Kenzie à constaté que l'acide lactique de fermentation du commerce est tantôt dextrogyre, tantôt lévogyre. Il est probable que l'action bactérienne fournit un mélange de quantités inégales des deux acides. L'auteur a réalisé la Synthèse asymétrique de l'acide /-lactique par réduction du pyru- vate de /Zmenthyle avec l'amalgame d'Al, qui donne un mélange de d- et de /-lactate de /-menthyle, le dernier en excès. Par hydrolyse avec KOH alcoolique, et enlèvement du Zmenthol, on obtient un mélange de d- et /-lactate de K, qu'on acidifie et d’où l’on retire l'acide /-lactique qui est en excès. — MM.S. Ruhemann et R. W. Merriman, par l'action du chlorure de phényl- propiolyle sur l'acétylacétone monosodée, ont obtenu l'acétylbenzylidè ne-méthylcétodihydrofurfurane, F.4520 1539; il se dissout en bleu dans la pipéridine, d'où HCI précipite son isomère, le 2-acétyl-5-hydroxy-4-phényl- 3-méthyl-1-cétocye lope ntadiène, F. 14709. On observe des réactions analogues avec le chlorure de phénylpro- piolyle et l’acétoacétate d'éthyle monosodé. — M. A. J. Brown : Sur les influences qui règlent la reproduc- tion du Saccharomyces cerevisiae. — Mie J. F. Hom- fray a observé que les mélanges d'acétaldéhyde et d'eau donnent des valeurs de la réfraction spécifique moindres que celles qu'on calcule d'après les consti- tuants; il s'ensuit qu'il existe dans le liquide une cer- taine quantité d’aldéhydrol CH*CH(OH}Ÿ. L'acétone et Veau ont une faible tendance à donner le composé CIFC(OH CH". L'alcool éthylique et le cyanure d'éthyle ne donnent pas de composé, contrairement aux indi- cations de Gautier. ACADÉMIE DES SCIENCES DE VIENNE Séance du 13 Juillet 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. Ph. Broch a déter- miné les radiants et la hauteur des étoiles filantes observées du 19 au 24 avril He à Vienne, Pola, Krems- munster, Brunn et O'Gyalla. Les hauteurs d'apparition et de disparition ont été, en moyenne, de 477 et 119 ki- lomètres, la trajectoire de 92 kilomètres. Trois radiants semblent montrer que la trajectoire des météores avait une grande analogie avec celle des comètes 186% III, 1849 III et 1844 IL. 2 SCIENCES PHYSIQUES. — M. V. F. Hess étudie le pouvoir de réfraction des mélanges de deux liquides en tenant compte de la variation de volume pendant le mélange et montre expérimentalement que la loi des mélanges Fee Biot-Arago, modiliée par la formule de Pulfrich, donne des résultats absolument conformes à l'expérience. — M. R. von Hasslinger cherche à montrer que les conductibilités électrolytique et REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 1013 métallique ne sont pas très différentes dans leur essence et qu'il est possible de trouver chez un mème corps les deux espèces de conductibilité avec des formes de passage. Chez le soufre, conducteur élémentaire, on observe, au voisinage du point d'ébullition, une conduc- tibilité qui augmente avec la température, et le cou- rant produit dans le soufre, par polarisation, des forces contre-électromotrices appréciables. Les oxydes de fer Fe°0* et Fe*O®, qui conduisent métalliquement à basse température, conduisent électrolytiquement à haute température. — M. J. H. Süss a déduit de mesures de conductibilité la constante d'affinité d'un grand nombre d'acides. Voici quelques résultats : ac. as-résor- cylique0,0496 ; ac. nitroopianique0,000.291 ; ac. nitrohé- mipinique 2,1; ac. HN RON Rte 0,0265: ac. homophtalique 0,0190. — M. R. Wegscheider indique un mode de calcul qui permet de déterminer par la même observation les constantes du premier et du second stade de dissociation des acides bibasiques à dissociation par étapes, en connaissant des valeurs approchées des deux constantes. — Le même auteur montre, par des mesures de conductibilité, que les acides 0-aldéhydiques en solution aqueuse sont presque tous transformés en majeure parlie en oxylactones tautomères. — Enfin, M. R. Wegscheider montre que, si la loi de dilution d'Ostwald s'applique à un groupe d'acides aminés, on peut en conclure avec vraisem- blance que, dans ce groupe, la formation interne de sels et l'hydratation sont peu importantes : c'est le cas des acides acétaminés aromatiques et des «-anilidoa- cides gras. — MM. J. Herzig et F. Wenzel, par l’action de KOH et CHI sur l’aldéhyde diméthylphloroglucique, ont obtenu l’aldéhyde tétraméthylphloroglucique et un produit de condensation de deux molécules de celui-ci Lee élimination d'acide formique; ce composé se dédouble quantitativement en aldéhyde tétraméthyl- phloroglucique et tétraméthylphloroglucine. — M. Gold- schmiedt a préparé les dérivés méthylés de l'acide ellagique ; il est parvenu jusqu'à l'acide tétraméthyl- ellagique. — M. H. Meyer, en faisant réagir le diazo- méthane sur les acides-aldéhydes, à obtenu une seule sorte d’éther, l’'éther normal. Celui de léther bromo- opianique fond à 105°-106°. — Le même auteur a étudié l'influence réciproque des groupes AzH? et OH et de l'Az pyridique dans les « et y-amino ou oxy-pyridines. — Enfin, M. H. Meyer a fait réagir le diazométhane sur les pyridones etles acides oxypyridinecarboniques ; la formation d’éthers à l'oxygène ou à l'azote dépend de la présence des substituants du noyau pyridique. — MM. Zd. H. Skraup, E. Geisperger, E. von Knaffi- Lehnsdorff, F. Menster et H. Sirk, par l’action ménagée de l'anhydride acétique saturé d'HCI gazeux sur l'amidon, le glycogène et la cellulose, ont obtenu des combinaisons acétylchlorées qui paraissent dériver sans dédoublement de la substance originale. De leurs poids moléculaires, on déduit pour poids moléculaire minimum de l’amidon soluble 7.440 ou (C°H‘?0°)* et de la cellulose 5.508 ou (C‘H'°05)%#. Il se forme aussi des produits de dédoublement des polysaccharoses l'amidon donne le dérivé acétylthloré d’une érythro- dextrine (C‘H#205}, puis de l'acétylehloromaltose et de l'acétylchloroglycose. Le glycogène fournit un dérivé acétylchloré qui, d’après sa teneur en chlore, a un poids moléculaire de 23.630. — M. F. Ratz est parvenu à préparer de la nicotine chimiquement pure par transformation en chlorozincate, cristallisation frac- tionnée et extraction de la nicotine du sel pur par KOH sans solvants. Son pouvoir rotatoire spécifique à 20° est de 169°,54, sa densité 1,00925 et son point d'ébul- lition 246°, 2 sous 720 millimètres. — Le même auteur a constaté que, dans l’alkylation du nitroacétamide par réaction de son sel d’Ag avec les iodures d’alkyles, il se forme l'éther isonitré, qui, par oxydation intramolé- culaire du groupe alkyle, donne les deux oximes encore inconnues de l'acétamide. — M. Zd. H. Skraup à reconnu que les diverses pré parations de caséine sem- blent donner, par hydrolyse, les unes surtout du glyco- 99 *+* 1014 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES colle, les autres surtout de l’alanine. — MM. Zd. H. Skraup et F. Heckel montrentque, même quand lhy- drolyse de la gélatine est conduite comme celle de la caséine, il ne se produit ni acide caséinique, ni acide caséanique. — MM. A. Adensamer et Ph. Hôrnes ont hydrolysé l’albumine d'œuf d'après le procédé de Skraup pour la caséine. Des phosphotungstates, on a isolé la d-alanine, mais on n'a pas trouvé le glycocolle. On à isolé, d'autre part, la leucine, l'iso- leucine et l'acide aminovalérique. — MM. Zd. H. Skraup et R. Zwerger, par l'hydrolyse partielle de la caséine avec HCI à haute température, ont obtenu le phosphotungstate bien cristallisé d’un produit où le rapport Az :G—1:2,6, et offre, par conséquent, une grande analogie avec celui de la caséinokyrine 1 : 2,55. Par dédoublement plus profond, on obtient de la lysine, de l’arginine et de l'hystidine. 3° SciENCES NATURELLES. — M. C. Toldt : L'ossicula mentalia et son importance pour la formation du menton chez l'Homme.—M. $S. von Schumacher : Les nerfs de la queue des Mammifères et de l'Homme, et leurs rapports avec la corde sympathique terminale. — M. R. Popper déduit d'expériences faites sur des chiens et des cobayes que l’abaissement de pression sanguine produit par l'extrait thymique provient de la propriété de ce dernier de coaguler le sang dans les vaisseaux et de produire des troubles mécaniques de la circulation. — M. O. Reiser a étudié les collections ornithologiques rapportées par l'Expédition envoyée au Brésil par l'Académie. Il a caractérisé un certain nombre de nouvelles espèces : Rhamphastus theresae, Megaxenops parnaquae, Synallaxis griseiventris, Bubo magellanicus deserti, Rhynchotus rufescens catingae. — M. R. Hoernes communique ses observations géo- logiques sur les Baléares, considérées comme un frag- ment de la Cordillère bétique. Séance da 12 Octobre 1905. 40 SciENCES PHYSIQUES. — M. V. Rothmund montre par trois voies (alcalimétrique, cryoscopique et élec- trique) l'existence d'une combinaison de l’acétone avec l'acide sulfureux ou avec le sulfite neutre ou acide. L’acide acétone-sulfureux est plus fort que l'acide sul- fureux. — M. F. Wertheimer: La constitution des a et $-benzopinacolines. 20 SCIENCES NAIURELLES. — M. F. Dimmer décrit un appareil qui permet d'obtenir des photographies ins- tantanées du fond de l'œil vivant. La source lumineuse est une lampe à arc électrique de 30 ampères dont la lumière est adoucie par un verre grisàtre. L'image est obtenue au moyen de deux objectifs. Les photogrammes ont 37 millimètres de diamètre. — M. C. Diener signale des phénomènes de convergence chez des Ammonites triasiques de l'Himalaya. L'étude des nombreuses Cératites du Muschelkalk lui a montré, d'autre part, que le genre Ceratites doit ètre considéré comme un genre polyphylétique. — M. R. Hoernes poursuit ses recherches géologiques sur le tertiaire du sud de l’Es- pagne. — M. G. Geyer communique ses observations géologiques faites au tunnel de Bosruck. Séance du 19 Octobre 1905. 4° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. H. Benndorf étudie le mode de propagation des ondes sismiques à lPinté- rieur de la Terre. Il montre que le temps T, (en mi- nutes) qu'un choc de la première secousse emploie pour parvenir du centre de l’ébranlement au point d'observation, est donné en fonction de la distance épi- centrique À (en mégamètres) par l'équation T, = 0,4 + 1,7 A + 0,042 A. De la même facon, le temps T, de la seconde secousse est donné par l'équation T, —1,3 + 3,0 À — 0,075 4°. Enfin, le temps T du maximum des secousses est donné par l'équation T —4,4A. L'auteur conclut que la première règle de Laska (la longueur de la première secousse en minutes, diminuée d'une minute, est égale à la distance de l'épicentre en méga- mètres) se vérilie assez bien jusqu'à 10.000 kilomètres ; au delà, on observe des écarts systématiques crois- sants. La seconde règle de Laska (la longueur des deux premières secousses en minutes est égale à trois fois la distance en mégamètres) est encore plus exacte ; mais elle offre aussi des écarts systématiques pour les grandes distances. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. F. M. Exner essaie d'appliquer les formules de la théorie cinétique des gaz à la détermination de la pression et de la température d’un gaz idéal se dirigeant contre une paroi solide, puis d’un courant d'air rencontrant la paroi d'une montagne. Les observations concordent assez bien avec les résultats théoriques. — M. A. Brezina étudie Île mode de formation des mélanges eutropiques, c’est-à- dire de ceux qui sont constitués par la resolidification de masses amollies, mais solides ; la plessite du fer météorique est un mélange eutropique de kamazite et de taenite. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. E. Suess : La vallée de l’Inn à Nauders. L'auteur distingue entre le Rhin et l’Inn trois recouvrements: suisse, lépontin et alpin oriental. L'auteur considère avec Lugeon le massif de la Selvretta comme un morceau de la calotte alpine orientale reposant sur le recouvrement lépontin, et le bord de l’Inn sur lequel les sédiments lépontins sont visibles comme une fenêtre ouverte par l'érosion dans le recouvrement oriental alpin. Les pierres vertes de Nauders sont un reste de la vieille calotte primitive. ACADÉMIE ROYALE DES LINCEI Séances d'Août, Septembre et Octobre. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. V. Volterra, après avir étudié, dans une Note précédente, les déforma- tions qui se manifestent dans un cylindre creux dont on enlève une tranche radiale, s'occupe, dans une nou- velle communication, des déformations dues à l’enlè- vement d'une tranche uniforme, déformations encore plus sensibles et singulières, qui rendent le corps asy- métrique après la distorsion. Ces déformations ont été reproduites par M. Volterra à l’aide de modèles en caoutchouc.— M. L. Bianchi: Sur la déformation‘des paraboloïdes. — M. S. Pincherle: Sur les équations fonctionnelles linéaires. — M. A. Venturi donne les procédés et les résultats des déterminations de gra- vité relative, exécutées dans sept stations de la Sicile, en 1904. — M. E. Levi s'occupe des groupes transitifs de l’espace à » dimensions, et démontre un théorème général relatif à la forme des opérations de l'ordre maximum (> 4). — M. G. Fubini: Sur les couples de variétés géodésiquement applicables. —M. A. Ferrari: Sur la brisure des lignes parallèles aux courbes planes algébriques. — M. C. A. Dell’Agnola étudie quelques propriétés des fonctions entières transcendantes, comme limites de propriétés connues des polynomes. — M. A. Del Re : Les focales de Minding et leurs po- sitions d'équilibre. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. À. Righi décrit ses re- cherches sur la diminution de résistance dans les so- lides et liquides mauvais conducteurs de l'électricité (sulfure de carbone, benzène, etc.) par l'effet des rayons du radium; cette augmentation de conductibilité est marquée dans les liquides, mais très petite dans les solides. — M. A. Pochettino informe l’Académie de ses nouvelles recherches sur la luminescence émise, sous l'action des rayons cathodiques, par quelques cristaux ; cette luminescence se trouve polarisée en partie dans une direction qui est en relation avec les axes de symétrie du cristal. M. Pochettino étudie la valeur de cette polarisation pour la schéelite, la phosgé- nite, le zircon, Papatite, le béryl, l'anatase, le diop- side, la cérusite, la baryte, le crysobéryl. — M. U: Grassi apporte une contribution aux recherches de Rubens et Kohlrausch, par l'étude, à l’aide d’une dis= position particulière, de l'augmentation de condueti= bilité de l'eau sous l'action des émanations du radium. ve sur ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1015 — M. G. A. Blanc, étudiant et analysant les sub- stances qui forment les sédiments des eaux thermales d'Echaillon et Salins-Moutiers, est arrivé à des conclu- sions analogues à celles de Elster et Geitel, et de Hahn : c'est-à-dire que les phénomènes radioactifs du tho- - rium sont dus à la présence de traces d'un élément très actif, que l'or n'a pu encore séparer du thorium à cause de l’analogie des caractères chimiques qu'il a avec ce dernier corps. — MM. G. Ciamician el P. Sil- ber ont fait d'autres recherches sur les actions chimi- ques de la lumière, observant l'action des alcools de la série grasse sur le nitrobenzène et la facon dont se comporte le nitrobenzène avec les aldhéydes aromati- ques. — MM. J. Bellucci et E. Clavari, au cours de leurs expériences, ont reconnu qu'on ne peut attribuer au nickel que deux types d'oxydes seulement: Ni O et Ni 0°. — M. V. Castellana à obtenu la transformation des pyrrols en dérivés du pyrazol; et, avec la collabo- ration de M. D'Angeli, a étudié quelques diazoindols pour en déterminer la formule de structure. — M. L: Mascarelli s'occupe de quelques sels doubles formés par les dérivés iodiques avec les chlorures et bromures de mercure. — MM. A. Angeliet G. Maragliano, dans une note sur la nitration des amines, démontrent que la formation de l'acide nitrohydroxylaminique a lieu par nitration normale. — MM. E. Mameli el E. Alagna: Action du iodure de magnésiopropyle sur le pipéronal. — M. F. Angelico: Sur les amino el diazopyrrols. — M. C. Palazzo décrit l’action de l’hydroxylamine sur l’éther diméthylpyronedicarbonique; avec la col- laboration de M. M. Salvo, il s'occupe de l’action de lhydroxylamine sur l’éther acétyl-malonique; avec M. Carapelle, il étudie la même action sur l’éther diacé- tylmalonique. — MM. C. Palazzo et A. Caldarella : Sur quelques dérivés azotés de l’acétyl-carbinol. — M. E. Azzarello: Action de l’hydroxylamine et de l'«-benzylhydroxylamine sur l’éther triméthyloxyco- ménique ; sur quelques cétones pyrazyoliniques ; action du diazométhane sur l’éthylène et sur le diallyle. 39° SCIENCES NATURELLES. — M. O. Mattirolo transmet le résumé d’une étude qu’il vient de terminer sur les champignons souterrains du Portugal. — MM.G.Tizzoni et A. Bongiovanni informent l’Académie de la conti- nuation de leurs recherches sur l’action, découverte par eux, des radiations du radium sur le virus rabique. Les radiations se montrent capables de transformer le virus en un vaccin efficace; en les dirigeant sur l'œil d'un lapin auquel on a inoculé le virus rabique, elles empêchent la manifestation de la rage, convenablement appliquées, mème trois jours après l'infection. Cette propriété antirabique du radium serait due principale- ment aux rayons £. Pour les expériences sur les lapins, on faisait usage d’un échantillon de radium de 100.000 radio-unités. — M. A. Ferro a fait desrecherches pour déterminer la quantité d'eau qui se trouve dans l'heu- landite de Montecchio Maggiore, et pour séparer l’eau d'imbibition de celle que l’on doit considérer comme eau de cristallisation ou de combinaison. — M. A. Agazzotti donne la description des expériences qu'il a exécutées sur un orang-outang renfermé sous une cloche où l’on raréfiait l'air en y faisant arriver de l'oxygène et de l'anhydride carbonique. Les nombreuses observations faites par l’auteur sur le singe, et répétées sur l'homme, démontrent que la respiration d'une suf- fisante quantité d'oxygène et d'anhydride carbonique mélangée à l'air fait disparaître les symptômes de malaise causés par la dépression, et en empêche la réapparition lorsque la dépression augmente. La pré- sence de l’anhydride est nécessaire, et le conseil de M. Mosso aux aéronautes d'y recourir est entièrement justifié. Il suflit d’une quantité de 13 °/, de CO* avec 67 °/, de O* pour que l’homme puisse parvenir, sans souffrir, jusqu’à une hauteur de 14.500 mètres. — MM. L. Tenchini et P. Cavatorti, se basant sur le peu de connaissances que nous possédons sur Panatomie normale de la glande thyroïdienne, ont fait une enquête qui- montre que les variations morphologiques de la thyroïde ont probablement une valeur qui dépend de la prédominance du goitre dans certaines régions; le développement de la thyroïde avec l'âge suit la marche d'une parabole, constante pour la forme dans les diffé- rents pays. L'ensemble de ces observations fait songer à une fonction plus ou moins énergique de la thyroïde dans les régions où le goitre est plus ou moins déve- loppé. —M. C. Gorini donne des détails sur l'existence et sur la distribution des espèces de microorganismes dans le lait, caillé ou non, qui sert à la fabrication des fromages. — M. B. Gosio confirme, par de nouvelles expériences, les résultats obtenus en recourant aux tellurites et aux sélénites alcalins, pour reconnaitre, par une réduction colorée de ces substances, si les microorganismes contenus dans un liquide sont encore vivants. La réaction la plus marquée est donnée par le tellurite potassique. Ce réactif peut recevoir de nom- breuses et utiles applications, pour dévoiler la possi- bilité d'une contamination (par les germes de l'air, par exemple) et pour constater la stérilité des liquides que l'on emploie dans les injections hypodermiques. La petite quantité de tellurite qui suffit comme réactif en rend l'usage sans danger. — M. L. Panichi apporte une contribution expérimentale à la connaissance de l'hérédité dans l'infection pneumonique larvée: il a reconnu, sur les lapins, que le père peut transmettre au fils, soit le germe de la maladie, soit un certain degré de résistance, et que le sang du fils ne possède pas le pouvoir d’agglutination. M. Panichi ajoute quelques notes sur la biologie du germe repris dans le sang du fils, et sur la virulence qu'il peut acquérir. Dans les dernières élections, l'Académie des Lincei a nommé Associés étrangers MM. Marcel Bertrand et Ph. Van Tieghem, membres de l'Institut de France, Ernesto Manon. ACADÉMIE DES SCIENCES D’AMSTERDAM Séance da 30 Septembre 1905 (suite). SCIENCES NATURELLES. — M. W. Beyerinck présente, au nom de M. N. L. Sohngen : Le mélhane comme uutrilion carbonee (dépense de construction) et souree d'énergie (dépense d'entretien) pour les bactéries. Communication provisoire sur une série d'expériences faites au Laboratoire microbiologique de Delft. Le mé- thane, produit sans cesse en grandes quantités par les microbes, a dû être engendré en volume incalculable dès que la vie des plantes est devenue possible sur notre planète; cependant, on ne le retrouve dans l'atmosphère qu'en traces à peine indicables. Ce gaz est si résistant aux influences chimiques qu'une disparition due à cette cause est très improbable. Comme, par l'oxydation du méthane en acide carbo- nique et en eau, une quantité importante d'énergie se dégage, on peut se demander s'il y a des organismes qui se sont adaptés à cette source d'énergie. D'abord, l'auteur a essayé de faire absorber ce gaz par des plantes aquatiques; il a obtenu une absorption importante par : Callitriche stagnalis, Potamogeton, Elodea cana- densis, Batrachium, Holtonia palustris, Spirogyra. Une des expériences avec l'Hottonia palustris a donné, par exemple, une absorption de 500 c. c. de méthane en quinze jours. Le laps de temps s'écoulant avant que l'absorption devint visible était très différent, mème en diverses expériences avec la même espèce; mais l'absorption, une fois commencée, continue avec une grande rapidité. Par l'observation des deux phéno- mènes suivants : 1° par suite de minutieux lavages de la plante, le début de l'absorption se ralentissait au lieu de s'accélérer; 2° quelquefois, le liquide se cou- vrait d'une membrane muqueuse, — l’auteur fut porté à croire que l'oxydation n'était pas provoquée par les plantes elles-mêmes, mais par des microbes introduits avec elles. Pour étudier ce procédé de plus près, il fit construire un appareil de verre, permettant de pour- suivre labsorption quantitativement aussi bien que 1016 qualitativement. Cet appareil se compose de deux vases réunis par un tube (fig. 1). Pour régler la pression dans le vase de culture A, ce tube porte dans sa partie horizon- tale un robinet B; l’autre vase contient de l'eau. Par le bouchon du vase À passe un petit tube à robinet C, contenant à son extrémité supérieure un tampon d'ouate. On remplit le vase A tout entier avec la solu- tion suivante : Eau distillée 400, K°HPO* 0,05, AzH'Cl 0,1, MgAzH#PO*0,05, CaSO* 0,01; on y ajoute une petite quantité d'humus infecté par quelques gouttes d’ichor ou d’eau de canal; ensuite, on introduit le méthane et l’oxy- gène par le petit tube C jusqu'à ce qu'il ne reste qu'un centimètre de liquide au fond du vase A, et on cultive à une température de 30 à 37° C. Après deux ou quatre jours, on apercoit sur le liquide une membrane, qui s'épaissit rapidement. Le liquide, clair au début, com- mence à se troubler à cause des microbes, se nourris- sant des corps morts de la membrane. De plus, un grand nombre d’infusoires, d’amides et de monades se montrent dans le liquide et dans la membrane. Si, après une semaine, on analyse le mélange des gaz, on trouve que le méthane a disparu tout à fait ou en partie, et qu'une quantité considérable d'acide carbo- nique s’est formée. La susdite membrane se compose Fig. 1. — Appareil pour l'étude de l'absorption du méthane par les bactéries. — À, vase de culture; B, C, robinets. principalement d'une seule espèce de microbes; dans toutes les expériences de l’auteur, la disparition du méthane lui est due. Ce microbe a la forme d’un petit bâton, court et gros, longueur #4 à 5 p, diamètre 2 à 3u, qui se meut exclusivement dans les cultures nouvelles et ne porte qu'un cil unique. L'auteur le désigne par le nom de Bacillus methanicus; il se pro- pose d'examiner de plus près si peut-être il y a plu- sieurs espèces de microbes ayant la faculté d’absorber le méthane, ce qui est bien probable, car des expé- riences provisoires ont déjà montré qu'on trouve dans l'eau de mer un microbe de propriétés tout à fait ana- ogues. On isole le Bacillus methanicus de la manière la plus efficace en faisant des cultures sur gélose ne contenant que les sels inorganiques nécessaires, à une température de 30° C., dans une atmosphère composée d'un tiers de méthane et de deux tiers d'air. Une grande quantité du méthane introduit est consommée pour constituer les corps des microbes; une autre partie est oxydée en acide carbonique, ce qu'on peut constater par l'expérience suivante, L'analyse des gaz obtenus après quinze jours, 225 c. c. de CH*et 320,7 c. c. de O0? ayant été introduits dans le vase A, donnait res- pectivement 78 et 172 ec. c. de CO? et O?, et le CH avait disparu entièrement. Pour démontrer que le liquide contenait une grande quantité de matière organique, l'auteur l’a oxydé avec du permanganate et de l'acide sulfurique; 100 €. c. du liquide en demandaient 48,3 de KMnO“. L'auteur espère décrire bientôt des expé- riences plus approfondies. — M. C. Winckler présente, au nom de M. D. J. Hulshof Pol : Les centres de Bolk dans le cervelet des Mammifères. D'après M. L. Bolk, il se trouve dans le Jobulus simplex du cervelet ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES un centre coordinateur des mouvements du cou. Pour vérilier cette hypothèse, M. G. van Rynberk a extirpé, au Laboratoire du Professeur Lucciani, à Rome, chez un chien, la partie du cervelet qu'il soupconna être le lobulus simplex. Tout le temps que l'animal a vécu après l'opération, il secouait la tête comme pour dire « non »,. L'autopsie faite, le cervelet à été envoyé à M. Winkler, d'Amsterdam, qui l’a fait examiner, dans son laboratoire, par M. Hulshoff Pol. L'examen exact du spécimen a appris : 1° que le Zobulus simplex est intact à la surface du cervelet; 2 que, dans la partie médiane droite, la lamelle postérieure du lobe anté- rieur à disparu à peu près totalement, tandis que du lobulus simplex, intact à sa surface, le rayon médul- laire à été séparé du nucleus medullaris du cervelet; 3° que, dans la partie latérale droite, la lamelle posté- rieure du lobe antérieur et le lobulus simplex ont été détruits par l'opération. Ainsi, M. van Rynberk avait extirpé non seulement le Jobulus simplex droit du cervelet, mais aussi la lamelle postérieure (le sub- lobule n° 4 de Bolk) du lobule antérieur du cervelet, — Ensuite M. Winkler présente, au nom de M. G. van Rynberk : Les dessins sur la peau des Vertébrés en rapport avec la métamérie cutanée. Dans les dernières années, plusieurs tentatives ont été faites afin de A trouver la connexion entre la distribution des seg- ments dans la peau et l'innervation segmentale du cutis. Ainsi les raies noires et blanches du zèbre, la | Ÿ ligne noire en croix du dos et des épaules de âne, les taches blanches de la peau des lapins noirs, etc., ont été étudiées en rapport avec l'innervation de la peau. L'auteur, en se basant sur les recherches détaillées sur la métamérie cutanée des chiens, exécutées ensemble : avec M. Winkler (Revue gén. des Se., t. XII, p. 4192, t. XIV, p.172, 403, t. XV, p. 51, 164), reprend l'étude de la pigmentation, déjà commencée chez les requins (Sey1- lium Catulus et Seyllium Canicula, voir le journal Pe- trus Camper, t. I, p. 137-173). Ici il ajoute — et voilàäun point de vue nouveau et original — une nouvelle dis- tinction à la distinction ordinaire entre « couleur fon- damentale » et «dessin », en distinguant entre contraste par excès et contraste par défaut. Ainsi, il trouve que l'excès de pigmentation correspond aux maxima d'in- nervation, tels que Winkler et van Rynberk les ont démontrés dans les métamères cutanés. Dans le cas du zèbre, par exemple, les raies noires sont formées par contraste par excès, le maximum de pigment s'agglomérant dans les zones de sommation de l'inner- vation. Le contraste par défaut coïncide quelquefois avec les minima d'innervation. Parfois, il arrive qu'entre les segments pigmentés se trouvent quelques segments sans pigment (omission segmentaire); alors apparaissent les triangles blancs sur la peau à couleur fondamentale noire. Si le point de vue fondamental de l'auteur est correct, les types d'Eimer exigent une revision et une amplification. M. van Rynberk a déjà commencé ce nouveau travail. — M. Weber présente. au nom de M. Sydney J. Hickson : On a new species of Corallium from Timor (Une nouvelle espèce de corail de l'île Timor). La nouvelle espèce a été nommée Corallium reginæ en honneur de la reine des Pays-. Bas. — M. K. Martin présente, au nom de M. Eug. Dubois : La signilication géographique et géologique du Hondsrug et l'examen des pierres erratiques de notre diluvium boréal. Réfutation de quelques opi- nions de MM. FE. J. P. van Calkar et H. G. Jonker. — Ensuite, M. Martin présente un mémoire de M. H: G. Jonker : Contributions à la connaissance des pièces erratiques sédimentaires du Hondsrug. 1. Le Hondsrug de la province de Groningue; 2. Pierres erratiques du Silurien supérieur ; 3. Pierres erratiques de l’âge de la zone ballique orientale. Sont nommés rapporteurs : MM. Martin et J. M. van Bemmelen. P. H. Scuoure. Le Directeur-Gérant : Louis OLIVIER. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. fu4 4 Ve v % # £ LA, 16° ANNÉE N°23 15 DÉCEMBRE 1905 Revue générale | Jess. Sciences pures el appliquées DirECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Adresser tout ce qui concerne !a rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et la Hollande. CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $ 1. — Astronomie Distances moyennes dans le système so- laire. — Nous avons eu — à différentes reprises — l’occasion de critiquer les moyennes en Météorologie, ou du moins leur emploi exclusif, car, trop souvent, - ces nombres n'ont aucune signification physique et les - véritables précautions ne sont pas prises pour définir nettementles nombres moyens. Imaginons, parexemple, qu'il s'agisse de déterminer la température moyenne d'une journée : il serait absolument illogique de la définir comme la moyenne arithmétique entre le maximum et le minimum de température de la journée — ce qui se fait encore. Le maximum a pu ne durer que quelques instants et le minimum sévir plusieurs heures : aussi les observateurs météorologiques qui ne disposent pas d'appareils enregistreurs leur permet- tant d'effectuer le calcul de la température moyenne d'une façon rigoureuse, mais qui n'ont pour ressources que les indications des thermomètres à maxima et minima, prennent comme température moyenne celle qui divise l'intervalle des températures extrêmes dans un certain rapport constant, qui diffère généralement de l’unité (coefficient de Kempe). Cela n’est encore qu’une approximation assez gros- sière, tandis que l'analyse définit avec précision ce qu'il faut entendre par valeur moyenne d'une fonction entre deux valeurs données de la variable, — valeur moyenne qui est fournie par une intégrale définie. Or, en Astronomie, on emploie couramment l’expres- sion de distance moyenne d'une planète au Soleil, et cette expression est généralement synonyme du demi grand axe : c'est la moyenne arithmétique entre la plus rande distance de la planète au Soleil a(1+e), ou istance aphélie, et la plus petite a(1—e), ou distance érihélie, a étant le demi grand axe et e l’excentricité e l'orbite. Un astronome amateur, M. H. Chrétien, souvent mentionné pour ses intéressantes recherches, j a voulu combattre l’abus de cette dénomination et, à cet effet, il établit ce qu'il faut entendre par distance moyenne d'une planète au Soleil : il suffit, pour cela, de définir la variable par rapport à laquelle on entend calculer l'intégrale en question. Les trois variables adoptées par H. Chrétien sont l'arc REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. | | d'orbite, l'anomalie vraie, et le temps : il en résulte trois valeurs différentes comme distance moyenne, à savoir a, a V 1 — € (ou le petit axe b)et a( 1 +5). Ces observations méritaient d'ètre mentionnées, car elles précisent et les expressions et les valeurs numériques propres aux différents emplois et aux applications : les nombres les plus utiles, pour le système solaire, sont les suivants : PLANÈTES a aV1—e Mercure 0,387099 0,318828 0,395280 Vénus 0,723330 0,723313 0,723347 La Terre . 1,000000 0,999861 1,000141 Mars . 1,523618 1,51703$ 1,530305 Jupiter . 5,196496 5,208615 Saturne. 9,539720 9,569766 Uranus . 19,197180 19,23845% Neptune . . 30,107155 30,109941 Détermination spectrographique de la pa- rallaxe solaire. — Au moment où l'on termine les calculs relatifs à la parallaxe solaire à l’aide de la pla- nète Eros, il ne sera pas sans intérêt de dire un mot d'une méthode employée par M. F. Küstner pour arriver à la même détermination. M. F. Küstner a mesuré 16 raies sur chacun des 18 spectrogrammes d’Arcturus, obtenus pendant la période qui s'étend du 24 juin 1904 au 15 janvier 1905, à l’aide du spectrographe de Bonn. Ces mesures lui ont permis de déduire la vitesse radiale de l'étoile par rapport au Soleil, soit : 4,83 + 0,27 kilomètres pour l'époque 1904, 8, ainsi que la vitesse movenne de la Terre : 29,617 + 0,057 kilomètres, en adoptant la valeur de 299.865 + 26 kilomètres par seconde pour la vitesse de la lumière dans le vide. On sait, d'autre part, que, dans le calcul de la dis- tance du Soleil à la Terre au moyen de la constante de l’aberration d’après la formule : tang « — y 2repré- sentant la constante, U la vitesse de la Terre sur son orbite, et V la vitesse de la lunuère, la valeur de U admise actuellement est, jusqu'à un certain point, assez hypothétique. On admet généralement qu'elle est égale 23 1018 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE à 29,765 kilomètres par seconde, la parallaxe étant de 8,80. Mais ces deux nombres variant proportionnellement, il s'ensuit qu'une valeur plus approchée de la quantité U doit changer le résultat final. Cette détermination faite soigneusement, M. Küstner arrive à la quantité 8/,844 +0/,017 pour la valeur de la parallaxe solaire au moyen de cette méthode nouvelle, ce qui ramènerait le Soleil à 148.700.000 kilomètres environ. Mais, remarquons-le, la valeur de la méthode de M. Küstner repose alors entièrement sur la mesure des raies spectrographiques, et toute la question revient à savoir si cette mesure est susceptible d’une aussi grande exactitude. Les premiers résultats obtenus à l’aide de la paral- laxe d'Eros sembleraient faire croire que la détermi- nation spectrographique est encore loin de donner avec précision la deuxième décimale du nombre qui indique la parallaxe du Soleil. La tentative n’en était cependant pas moins intéressante à signaler. Les Bandes d’ombre pendant les éeclipses totales. — Partout où l’éclipse totale a été observée avec succès, on a pu constater le phénomène connu sous le nom de bandes d'ombre et qui se présente habituellement un peu avant et un peu après la totalité sous forme de sinusoïdes sombres séparées par des intervalles clairs. M. Zona, directeur de l'Observatoire de Palerme, dont la Mission était fixée à Sfax (Tunisie), vient de donner une explication assez plausible du phéno- mène. Pour cet astronome, les bandes en question auraient une origine purement atmosphérique. Il a, en effet, plusieurs fois observé que les rayons lumineux projetés par une lumière très intense sur une muraille située à plusieurs kilomètres montrent exactement les mêmes bandes lumineuses et sombres qu'il a vues lui-même à Sfax le 30 août dernier. La lumière de Vénus, projetée à travers une petite fenêtre sur la paroi opposée d’une chambre où il était assis, a reproduit le même aspect. M. Zona pense donc que ces phénomènes tien- nent à une même cause. Pendant l'éclipse, les vibra- tions atmosphériques qui expliquent l'agitation vue sur le limbe du Soleil lorsqu'on l’observe directement seraient la cause des bandes oscillantes qu’on remarque avant et après la totalité, alors que la Terre reste seu- lement éclairée par un mince croissant. $ 2. — Mécanique Recherches nouvelles sur Paviation. — Les expériences de Langley, en Amérique, et de Marey, en France, ont démontré qu'un grand oiseau, volant contre le vent, les ailes tendues, immobiles, parallèles à l’ho- rizon, peut soutenir dans l'air, pour une surface donnée d'ailes, un poids de beaucoup supérieur à celui que sou- tient un aéroplane avec ailes de même superficie. Elles ont montré aussi que l'oiseau, sans effort apparent, sans altérer le parallélisme de ses ailes avec l'horizon, sans plonger, vaine la force du vent, alors qu'un aéroplane ne peut fournir le même résultat que s'il est pourvu d’un moteur mécanique relativement très puissant. Ces faits paraissaient en contradiction avec les données de la Physique; il n’en est rien, cependant, comme vient de le démontrer récemment M. A. Bertelli, de Brescia, par des expériences des plus intéressantes. Il a no- tamment constaté des réactions tout à fait paradoxales produites par les courants d'air sur les surfaces con- cavo-convexes et paraboliques que constituent les ailes des oiseaux. Les expériences et les appareils dont M. Bertelli s’est servi sont si simples que chacun peut les répéter. L'appareil consiste en une feuille légère de bristol de 10X8 centimètres, courbée, et tournant par une de ses extrémités droites, librement, autour d’une aiguille à tricoter. La surface du bristol est plan-convexe ou parabolique comme l’aile de l'oiseau. On place l'appareil ainsi constitué sur une table, qu'il touche par ses bords droits. En soufflant tangentielle- ment, au moyen d'un petit tube, sur la face convexe, on constate un phénomène étonnant : le bristol est at- üré vers l’orifice du tube (fig. 1). Il se produit un véritable Fig. 1. effet d'aspiration. L'effet est plus sensible si l’on dispose l'appareil en banderole, c'est-à-dire si l'on fixe l’aiguille verticalement de facon qu’elle constitue la hampe et le bristol la banderole. On peut alors souffler sans tube. La facon dont le courant d'air se dirige dans cette expérience peut être mise en lumière au moyen d’une bougie (fig. 2). En soufflant comme il vient d'être dit, 22 M. Bertelli a constaté qu'au milieu de l'aile, la flamme de la bougie est attirée vers le bristol, tandis qu'à l'extrémité opposée à celle où l’on souffle, elle tend à s'éloigner. Au milieu, il y à donc un courant d'air qui se dirige vers l'aile, tandis qu'à l'extrémité il y en à un qui s’en éloigne. Mais, au lieu de souffler tangentiellement à la partie convexe, on peut souffler sur la courbure voisine du point d'attache de l'aile. Dans ce cas, des courants d'air se produisent sous l'aile et, nouveau fait paradoxal, se dirigent vers le point d’où l’on souffle, tendant, par Se conséquent, à soutenir l'aile et, par suite, l'oiseau (fig. 3). Telles sont les expériences et les appareils dans leur forme la plus simple, la plus grossière. Elles ne pour- raient entraîner l'évidence complète si elles n'avaient été confirmées pleinement dans leurs résultats par des expériences faites avec précision, au moyen d'appareils ne laissant aucune place à l'erreur. Par ces expériences, M. Bertelli croit pouvoir expli- quer la facon dont se comporte l'aile de l'oiseau, puisque l'oiseau a une double surface de soutien, une au-dessous de l'aile, l'autre au-dessus. Ainsi s'expli- CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE querait aussi la facilité que possède l'oiseau de vaincre la résistance du vent, et la résistance moindre que présentent aux courants d'air les corps à tète sphéroï- dale et à queue conique comparativement aux corps à tête conique. $ 3. — Physique Dilatation et température de fusion des métaux. — Une Note publiée récemment dans les Annalen der Physik, par M. de Panayef, appelle l'at- tention sur une curieuse relation, enseignée par la statistique, entre les températures de fusion des métaux et leur coefficient de dilatation. Les métaux purs peuvent, en effet, être rangés sur une courbe dont les abscisses sont les températures de fusion, les ordonnées les dilatations, et dont l'aspect est très analogue à celui d’une hyperbole équilatère. L'auteur se borne à cette constatation. Mais, en y regardant de près, on peut pousser un peu plus loin les conclusions. Si, au lieu de considérer les températures de fusion dans le système centigrade ordinaire, on les compte à partir du zéro absolu, on peut établir que le produit de la tempé- rature de fusion par le coefficient de dilatation est une constante, approximativement égale à 0,02; en d’autres termes, les métaux entrent en fusion lorsque, à partir du zéro absolu, la distance moyenne de leurs molécules à éprouvé une augmentation de 2 °/.. Cette loi, qui semble être suivie au moinsaussi bien que celle de Dulong et Petit, est intéressante, mais elle n’est pasnouvelle, Lorsque, en1885, je commençaià m'occuper de mesures de dilatation, elle m'avait frappé, également C'est ce que l'expérience vérifie avec une approximation suffisante. 2° Action des produits de la réaction sur la vi- tesse de saponilication. — Toutes choses égales d'ailleurs, la glycérine et les acides gras exercent une action retardatrice. 3° Influence de la quantité de cyloplasma sur la vitesse de saponification. — Pour de petites quan- tites de cytoplasma agissant en un temps très court, la quantité d'huile saponifiée en un temps donné est proportionnelle à la quantité de cytoplasma. 4 Loi exprimant la vitesse de saponilication. — D'après Victor Henri, si à représente la quantité de substance à transformer au début del’expérience, x la quantité transformée au temps 4, m et n deux constantes caractéristiques de la substance diasta- sique, la valeur de la constante de vitesse K est donnée par l'équation : + a x K—-|{(m—n)-+nL | lat a—X ta —x dans le cas où m—n, on a : el, toutes conditions expérimentales restant les mêmes : 1 K,=- log Mt Ge a D' MAURICE NICLOUX — LA SAPONIFICATION DES CORPS GRAS formule qui correspond, comme on le sait, à l'action hydrolysante des acides, à condition de laisser constantes, au cours d'une expérience, les propor- tions relatives d'huile et d’eau. Voici les résultats d'une expérience, faite à la température de 18° : PROPORTION VALEUR d'huile saponifiée (x) de DURÉE pour 100 (a) K, X10? SUMMDINUIES 00. 23,6 0,388 45 — 33,1 0,387 60 D Re 40,4% 0,375 90 —_ 54,8 0,382 127 Et RES 67,0 0,392 150 UT RACINE 13,2 0,381 210 de it ee 85,5 0,399 450 EE MOTTE 94,4 0,218 La valeur de K, est donc remarquablement cons- tante dans le cas d'une saponification rapide attei- gnant 95 °/, environ en 7 h. 30. Pour des saponifications durant 24 heures, la valeur de K, baisse sensiblement en fonction du temps. $ 3. — Conclusions. Ainsi donc, l’action de la température, la cons- tance d'action du cytoplasma, l’action des produits de la réaction, la proportionnalité entre la quantité de cytoplasma et la quantité d'huile saponifiée, la loi qui exprime la vitesse de saponification, montrent qu'il y a parallélisme complet entre le cytoplasma et les diastases (invertine, émulsine, amylase, trypsine, maltase) *. Nous allons montrer qu'une propriété inat- tendue (action de l’eau) distingue le cytoplasma de toutes les diastases connues. IV. — LA PROPRIÉTÉ LIPOLYTIQUE DU CYTOPLASMA N’EST PAS DUE À UN FERMENT SOLUBLE. Connaissant le mode de préparation générale des diastases et ayant à ma disposition le cytoplasma de la graine, seule partie active et, par conséquent, douée d’un pouvoir saponifiant considérable, j'ai essayé de tenter la préparation du ferment soluble dont il pouvait, par exemple, être en quelque sorte le support. A cet effet, le cytoplasma, amené à l'état sec”, est traité simplement par l’eau. On reconnait alors 1 On pourrait ajouter à ces cinq caractères, déjà si nets, un sixième, à savoir : le chloroforme, l’arsénite de soude sont sans action ou à peu près sur le pouvoir saponifiant du cytoplasma. ? On trouvera la bibliographie dans les C. R. de la Soc. de Biol., t. LVI, mai 1904. 3 On se débarrasse, à cet effet, de l'huile qui tient en suspension le cytoplasma par un dissolvant approprié, de préférence la benzine ou l'éther de pétrole. On évitera avec soin la présence de l'humidité; à cet effet, avant toute opé- ration, on maintiendra à l’étuve à 100°, pendant plusieurs heures, le mélange de cytoplasma + huile. 1035 immédiatement : 4° que le filtrat est inactif; 2° que le résidu sur filtre encore humide est également inactif. Dès lors, toute propriété lipolytique ayant disparu, il est inutile de pousser plus loin les opé- rations. L'eau très légèrement acide (acide acétique à 6°/,.) donne le même résultat ; il en est de même pour la glycérine pure, l'alcool absolu ou étendu, les solutions de NaCl comprises entre 7 et 20°/, les solutions de saccharose à 5 et 50 °/.. Cette action particulière de l'eau ou de l’eau très légèrement acidifiée peut être mise en évidence par les deux expériences suivantes, très faciles à réaliser : On pèse des quantités absolument égales de cyto- plasma, d'huile, d'acide acétique étendu (N/10), et l'on fait, dans deux petits mortiers, les mélanges dans les deux ordres suivants : a. Cytoplasma + huile + eau acidifiée. b. Cytoplasma + eau acidifiée + huile. On constate alors que le mélange a est le siège d'une saponification régulière ; le second mélange b ne présente pas la moindre trace de saponification . Cette expérience comparative absolument nette montre que l'action de l’eau enlève à l'agent lipoly- tique, et cela instantanément, son pouvoir hydro- lysant dès qu’il n’est plus protégé par l'huile *. Comment alors la saponification, qui correspond à une fixation d'eau et qui exige la présence de l’eau, peut-elle avoir lieu? On pourrait penser que cette action de l’eau pure ou légèrement acidifiée sur le cytoplasma est trop artificielle, trop brutale, et l'on peut faire l'hypothèse que c’est au cours de la saponitication, par le fait de la présence de l’huile, que le ferment soluble, s’il existe, serait mis en liberté par le cytoplasma en activité. Pour s’en rendre compte, on fait l'expérience suivante : On met en train une saponification d'huile de coton et, lorsque 35 °/, environ de l'huile est dédoublée, on centrifuge la masse dans deux tubes à une tempéra- ture voisine de 30°-35°; on obtient trois couches : 1° Une couche inférieure d'eau glycérineuse acide, claire; 2 [ne couche intermédiaire, formée par une émulsion semi-solide plus riche en acides gras que la couche supérieure; { Ilen est de même si, dans la formule b, avant d'ajouter l'huile, on dessèche le mélange cytoplasma et eau dans le vide sur l'acide sulfurique à la température ordinaire; le cytoplasma prend alors une forme cornée et il est impos- sible de le remettre en suspension dans l'huile. 2 MM. Victor Henri et André Mayer ont montré (Soc. de Biol., 28 mai 1904) que, dans un très grand nombre de cas, un colloïde stable peut préserver un autre colloïde ou une émulsion contre l'action de précipitation d'une solution quelconque, à condition que ce colloïde stable soit ajouté avant la solution précipitante; si, au contraire, on J'ajoute après, la préservation n'a plus lieu. Il est intéres- sant de rapprocher ces faits de l’action de l’eau sur le cyto- plasma protégé ou non par l'huile. 1036 3° Une couche supérieure d'huile et d’acides gras clairs. Si l’on mélange intimement de nouveau les trois couches de l’un des tubes, la saponification reprend; donc, la substance active n’est pas détruite. Dès lors, on doit retrouver celle-ci dans l’une des trois couches de l’autre tube. A la première couche (glycérine + eau + acide), on ajoute de l'huile; il n’y a pas saponification; à la troisième (acide gras et e,° sont des constantes. Donc il distingue trois vibrations principales : une vibration lente, une yibra- tion moyenne et une vibration rapide. Dans le dia- gramme ci-joint (fig. 2), les distances de O corres- pondent aux valeurs de 7, /, L, et aux longueurs de pendule des vibrations lente, moyenne et rapide (v.1., v. m., v.r.). Le premier trait représente le cas général : les traits A, B, C correspondent aux trois cas : A : 1, —], considérable, e, et e, petits; B : /, —1, petit, e, et c, considérables: C : 1, — 1, petit, cinet Ga DELILS: De ces trois cas, le troisième est celui observé par Huygens. 20 SœuENcEs PHYsiQuEs. — M. H. A. Lorentz : Sur la radiation de chaleur dans un système de corps ayant partout la méme température. Suite (Voir Rev. génér. des Sciences, t. XVI, p. 963). 16. Etat de radiation dans un système quelconque. 17. L'espace rempli d’un corps isotrope, homogène et parfaitement transparent, où tous les corps sont tenus à la même température. 18. L'amplitude du courent électrique correspondant. 19. Remarque finale. — M. H. W. Bakhuis Rooze- boom :Les dillérentes branches de la ligne des trois phases pour solide, liquide et vapeur en des systèmes binaires, où se présente une combinaison. Pour ne pas ètre obligé de considérer une combinaison chimique formée de deux composantes comme une troisième composante, il faut que cette combinaison soit tant soit peu dissociée dans la transition à l’état fluide ou gazeux. Alors, au lieu du point triple unique, il se forme un lieu de points triples : la ligne des trois phases, fai- sant connaître les valeurs correspondantes de la tem- pérature et la pression où la combinaison se maintient à côté des quantités de fluide et de vapeur de composi- tion variable. Cela a été démontré par van der Waals en 1885. Ici, M. Roozeboom s'occupe des transforma- tions que subit la ligne des trois phases sous l'influence des variations de température et de pression, ce qui mène enfin à la disparition d'une des trois phases. A cette fin, il se sert de la représentation nouvelle (p, x) de sa figure de l’espace déduite par M. Smits (Aew: génér. des Sciences, t. XVI, p. 196). — Ensuite, M. Roo= zeboom présente au nom de M. F. M. Jaeger : La di= phénylhydrazine, l'hydrobenzène et la benzène-aniline,. et la miscibilité des dernières substances avec lazo= benzène, le stiblène et le dibenzène dans l'état solide: (A suivre.) P.-H. Scnoute. Le Directeur-Gérant : Louis OLivier. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette, 16° ANNÉE 30 DÉCEMBRE 1903 Revue générale des Sciences pures ei appliquées DIRECTEUR : LOUIS OLIVIER, Docteur ès sciences. Aûäresser tout ce qui concerne la rédaction à M. L. OLIVIER, 22, rue du Général-Foy, Paris. — La reproduction et la traduction des œuvres et des travaux publiés dans la Revue sont complètement interdites en France et dans tous les pays étrangers, y compris la Suède, la Norvège et ia Hollande, CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE $S 1. — Astronomie Les solutions périodiques dans le problème des trois corps. — Les solutions périodiques et asymptoliques sont, an le sait, les seuls cas où il soit possible de calculer, pour un temps illimité, avec une précision illimitée, les mouvements des corps célestes. Bien que ces cas ne se présentent jamais dans la Nature, ils peuvent cependant rendre d'importants services à l’Astronomie : par exemple, on peut avoir avantage à prendre comme point de départ pour l'étude approximative d'une certaine orbite une solution périodique qui, pendant longtemps, se rapproche de la première. Mais la plus grande importance de ces orbites exactes pourrait bien venir, comme le dé- clare M. H. Poincaré, de ce qu'elles peuvent être em- ployées comme base sûre de nouvelles recherches théo- riques, de ce « qu'elles sont, pour ainsi dire, la seule brèche par où nous puissions essayer de pénétrer dans une place jusqu'ici réputée inabordable ». Etant donnée leur grande importance à ce point de . vue, les solutions périodiques ont, en ces dernierstemps, - été l'objet de nombreuses recherches; c'est ainsi que, dès 1877, G. W. Hill, dans un Mémoire très commu, utilisait une solution périodique comme point de départ d'une étude de l'orbite de la Lune. Mais c'est surtout depuis le travail, qui fait époque, de M.,H. Poincaré sur les orbites périodiques que les astronomes leur ont consacré une grande attention : Hill et lisserand les ont prises comme point de départ du calcul des mou- vements d'Hypérion ; Simonin, Hill et Schwarzschild ont montré qu'elles sont particulièrement utiles pour cal- culer les perturbations des petites planètes dont la durée de révolution est en rapport presque rationnel avec celle de Jupiter; enfin Hill, Darwin, Burrau, Per- chot et J. Mascart, Charlier, etc. ont numériquement et analytiquement étudié les orbites périodiques souvent curieuses dans lesquelles une masse infiniment petite peut se mouvoir, si elle est attirée par deux masses finies gravitant autour de leur centre de gravité commun. Dans tous ces travaux, sauf un, on a admis que les trois corps restent toujours dans un même plan; par conséquent, on n'a étudié ou employé, dans ces recher- bic a que des solutions périodiques de la première et ne tm te moisi) RÉ de la seconde sorte, REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Par contre, les solutions de la troisième et de la qua- trième sorte ont peu ou point attiré l'attention : elles sont l’une et l’autre caractérisées par des inclinaisons entre les orbites, les premières ayant, en outre, de petites excentricités, les deuxièmes de grandes excen- iricités. Ces solutions n'ont été traitées que dans le travail bien connu de M. Poincaré, et il est clair qu'il peut exister de telles orbites, puisque cet auteur donne précisément un exemple de solutions périodiques de la troisième sorte, à faible inclinaison. Tandis que les solutions périodiques de la quatrième sorte doivent être très difficiles à étudier, par suite de la grandeur même des excentricités, la théorie des solutions de la troisième sorte est, au contraire, natu- rellement très élémentaire, puisque les excentricités des orbites sont petites : la discussion peut alors être basée sur les premiers termes simples du dévelop- pement de la fonction perturbatrice suivant les puis- sances des excentricités. Cependant, ces solutions pé- riodiques de la troisième sorte méritent encore quelque intérêt, en vertu du grand nombre de types très dif- férents qu'elles peuvent présenter; en outre, une discussion des conditions de stabilité de ces orbites, quand l'inclinaison cesse d’être petite, pourrait utile- ment contribuer à jeter quelque lumière sur la question de la constitution du système planétaire. Il était donc fort désirable que les solutious périodiques de la troi- sième sorte fissent l'objet d'une étude approfondie : 1° Pour réaliser une classification des types très dif- férents de ces orbites; : 20 Pour discuter les conditions de stabilité des divers types, en se basant, par exemple, sur la recherche des exposants caractéristiques des orbites. M. H. de Zeipel, déjà connu par d'intéressantes recher- ches sur les perturbations planétaires, s’est attaché à cette importante question et il obtient de précieux ré- sultats. Nous ne pouvons insister, ici, sur les détails des divers cas particuliers; mais il est curieux, cependant, d'établir un rapprochement avec les travaux de A. Fé- raud que nous avons eu l’occasion d'analyser déjà; car certaines solutions périodiques seront possibles si la ligne des apsides coïncide avec la ligne des nœuds ou lui est perpendiculaire, les conjonctions et oppositions symétriques se produisant à une demi-période, soit sur la ligne des nœuds elle-mème, soit à 90° de cette ligne, 24 1066 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE En outre, l'étude est faite des solutions réelles et imaginaires; mais la difficulté ne peut être levée, dans sa généralité, de savoir, parmi les différentes solutions, celles que l’on peut considérer comme stables d’une manière absolue. En résumé, les recherches de M. H. de Zeipel offrent un caractère original et entièrement nouveau; les résultats sont très instructifs, et les con- clusions touchent aux points les plus obscurs des stabilités et instabilités pour les cas de fortes excen- tricités ou de grandes inclinaisons, — points sur les- quels devront de plus en plus se localiser les efforts des astronomes modernes. Le dixième satellite de Saturne. — Le Pro- fesseur Pickering vient de donner, dans le numéro 9 du volume LIT des Annales de l'Observatoire d'Harvard College, les principaux éléments de Thémis, le dixième satellite de Saturne, qui est situé entre Titan et Hypé- rion. La grandeur du satellite n’a pas varié depuis les pre- mières observations et s’est maintenue vers 17,5. Ce nombre indique malheureusement que Thémis est hors de la portée visuelle de tous les instruments existants et que toutes les recherches sont actuelle- ment limitées aux moyens photographiques. L'examen des plaques montre que l’inclinaison de l'orbite du nouveau satellite par rapport à lécliptique est de 399,1. Son excentricité est assez forte et voisine de 0,23. A sa plus grande élongation, le dixième satellite se trouve à 154.500 kilomètres de la planète, si bien qu'il croise les orbites de Titan et d'Hypérion et doit subir, de ce fait, d'importantes perturbations, dont les résultats sont discutés dans la Note de M. Pickering. Le diamètre probable de Thémis serait de 61 kilo- mètres et sa période de révolution de 20,85 jours. Tousles chiffres précédents ne sont évidemment qu'ap- proximatifs, puisqu'ils ont été déduits de documents photographiques encore peu nombreux. Ajoutons que, de tous les satellites de Saturne découverts jusqu'à ce jour, Phœæbé, le plus extérieur, est le seul qui soit animé d'un mouvement rétrograde. $ 2. — Physique Le magnétisme des alliages du manga- nèse. — Dans le court article consacré, l'an der- nier‘, à l'ébauche d'une théorie possible des alliages magnétiques que forme le manganèse avec l'aluminium ou l’étain, j'étais parti de l’idée d’un simple relèvement de la température de transformation du manganèse, et j'avais pensé pouvoir la fonder sur le fait que l'alumi- nium forme au moins deux alliages dont la température de fusion est supérieure à celle des composants. J'ajoutais : « Peut-être trouvera-t-on pour l’étain des effets analogues sur les températures de fusion des alliages qu'il forme. » Ce phénomène, dont j'indiquais alors la possibilité, et qui serait venu donner un ferme appui à la théorie que j'avais essayé de formuler, vient d'être établi expérimentalement par la découverte d'un relè- vement considérable des températures de fusion dans la série des alliages étain-sodium. Dans un travail très bien conduit, exécuté au labo- ratoire de M. Tammann, à Gôttingue, M. T.H.Mathewson a montré que l'étain et le sodium peuvent former les cinq combinaisons Na'Sn, NaSn, Na‘Sn°, NasSn et NaSn?. Toutes ont des points de fusion plus élevés que ceux des composants; la principale, NaSn, entre en fusion à 5769, alors que les températures de fusion du sodium et de l’étain sont situées respectivement à 970,5 el 2320, L'écart par rapport à la moyenne est donc de 411 degrés, quantité qui atteint presque le relève- ment constaté dans les alliages de l'aluminium avec l'antimoine. [ 1 Revue du 30 octobre 190%. D'autres recherches, poursuivies au laboratoire de M. Tammaan, ont aussi confirmé le fait que la tem- pérature de transformation des métaux magnétiques peut n'être pas abaissée par l'addition de métaux non magnétiques, mais que, dans certains cas particuliers, il se produit seulement une sorte de dilution des pro- priétés magnétiques. Tel est le cas, par exemple, des alliages du nickel avec l'or, pour lesquels la tempéra- ture de transformation a été trouvée à peu près la même depuis le nickel pur jusqu'à son alliage conte- nant 40 °/, de nickel seulement. La perméabilité était faible, mais ne disparaissait qu'au delà de 3209. Tout ces faits viennent à l'appui de la théorie dont J'ai donné l'esquisse. Ch.-Ed. Guillaume, Directeur-adjoint du Bureau international des Poids et Mesures. $ 3. — Électricité industrielle Recherches sur linfluence de la Terre dans la télégraphie sans fil. — Le fait que l'énergie électromagnétique est transmise plus facile- ment sur l'eau que sur terre, après avoir frappé les expérimentateurs aux débuts mêmes de la télégraphie sans fil, a été confirmé ultérieurement à plusieurs reprises. C'est ainsi que la Terre s’est trouvée exercer une certaine influence sur le champ électromagnétique des ondes hertziennes, influence dont la nature n'avait toutefois pas été élucidée. Une intéressante série d'expériences vient d'être entreprise par M. G.S. Sachs (voir Annalen der Physik, n° 12). Dans ces expériences, l’auteur se sert de trans- metteurs et de récepteurs du système Braun à couplage électromagnétique, installés à des hauteurs différentes au-dessus du sol. Au lieu d’un cohéreur, il emploie une pile thermique dans le circuit récepteur; aussi les deux dispositifs sont-ils susceptibles d’une construction parfaitement symétrique. La bobine, placée à proxi- mité du transmetteur, était alimentée par la batterie d'accumulateurs de l'Institut de Physique, à l’aide d'une ligne de 25 ou de 5Q mètres de longueur; dans certains cas, on se servait d'une batterie installée au voisinage immédiat. La pile thermique était reliée au galvanomètre par une ligne de 48 à 75 mètres de lon- gueur. Le transmetteur était pourvu d'une bobine sans résonance avec le premier, et qui était destinée à mesurer l'énergie qu'il émettait. Cette bobine se trou- vait également reliée à un galvanomètre. Voici les résultats qu'ont donné ces intéressantes expériences : La surface de la Terre, dans le cas des ondes de 31 mètres de longueur, se comporte à l'égal d’un milieu fortement absorbant et peu réflecteur. En remplaçant la capacité par une prise de terre, on affaiblit la trans- mission à un degré considérable, tandis qu'en isolant l'appareil de la Terre, on rend la transmission plus efficace. On voit que, au moins pour les ondes de courte lon gueur, l'appareil radiotélégraphique doit ètre bien isolé de la Terre, et placé aussi haut que possible au-dessus de cette dernière, sans toutefois être relié au sol. Les arbres couverts de feuilles absorbent et réflé- chissent les ondes électriques. Placés entre les deux appareils, ils affaiblissent la transmission de l'énergie électrique, tandis qu'ils la rendent plus eflicace, en, raison des ondes stationnaires qui se forment, lors= qu'ils se trouvent derrière les appareils. Le bobinage du système accouplé doit se trouve dans un plan perpendiculaire à l'antenne. La puissance de radiation d'un système ayant deux antennes à chaque station est de cinq à six fois plus grande que celle d’un système ne comprenant qu'une antenne et une capacité. Les fils tendus à angle droit par rapport à l'antenne et à la ligne reliant le transmetteur et le récepteun n'exercent aucune influence sur la transmission. Si, au contraire, les fils sont tendus suivant la ligne reliant ni dérs -méniés dite. sé CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1067 les deux appareils, ils renforcent quelque peu la trans- mission. Un fil courant parallèlement à l'antenne exerce un effet d'écran d'autant plus fort que la prise de terre est plus parfaite; les fils parallèles sans relation avec le sol n’ont que des effets lentement affaiblissants. De ces résultats, l'auteur tire la conclusion que, toutes les fois que l'appareil de télégraphie sans fil doit être installé au voisinage de mâts élevés, etc., il doit être isolé de la Terre, toute résonance entre le fil et les ondes étant évitée dans la mesure du possible. L'effet intégral de la transmission décroit propor- tionnellement au carré de la distance dans le cas des ondes de 30 mètres de longueur. La méthode proposée par le Professeur Drude permet de calculer rapidement et sûrement la construction de transmetteurs et de récepteurs accordés à couplage magnétique. Lampe de sûreté système Tommasi. — On sait les services rendus par l'électricité dans les mines, et les progrès qu’elle a permis de réaliser sur la lampe Davy au point de vue de la sécurité. Cependant, il peut arriver que l’ampoule d'une lampe électrique se brise, et que le filament de charbon dégage des parti- cules incandescentes, susceptibles de provoquer l’in- flammation du grisou, ou même les poussières peuvent s'enflammer au contact des filaments des lampes à incandescence en cas de rupture de l’ampoule. M. Berthelot vient de présenter à l’Académie des Sciences une lampe étudiée par M. D. Tommasi pour rendre ce danger impossible. Le principe en est simple : il consiste à monter l’'ampoule de la lampe dans un tube en verre, fermé d’un côté par le socle de l'appareil, et de l’autre par un couvercle muni d'un robinet. Un petit soufilet, placé à l’intérieur, permet d'établir ou d'interrompre le courant, suivant qu'il est: vide ou gonflé. Pour allumer la lampe, il suffit d’'insuf- fler un peu d'air dans le petit soufflet interrupteur. On peut l'éteindre en ouvrant le robinet pour permettre l’'échappement de l'air et dégonfler le soufflet. Il est évident que la rupture de lampoule produirait le même effet que l'ouverture du robinet, sans toute- fois ouvrir l'ampoule directement à l'atmosphère : L'am- poule se brise à l’intérieur du cylindre de verre, dont le volume se dilate de la quantité représentée par le volume de l’ampoule, dilatation qui suffit pour contrac- ter le soufflet et le faire fonctionner : la lampe est ainsi éteinte et tout danger d'explosion coniuré. Des études minutieuses auraient permis, paraît-il, de véri- fier le fonctionnement de sécurité de cette lampe. 4. — Chimie PA Les colorations iridescentes sur le verre. — L'iridescence qu'on observe sur certains verres est généralement considérée comme produite par la réflexion de la lumière sur les surfaces inférieure et supérieure d’une couche transparente très mince d'épaisseur variable. M. H. E. Ashley vient de se livrer, à ce sujet, à une série d’intéressantes recherches, dont il tire les conclusions suivantes" : La production des effets iridescents nécessite deux processus : d’abord la coloration du verre par l'intro- duction d’un métal dans une atmosphère oxydante, puis la coloration subséquente du métal dans une atmosphère réductrice; dans celle-ci, à une fempéra- ture suffisamment élevée, un grand nombre de subs- tances chimiques agissent sur le verre coloré en trans- formant la couleur réfléchie en une des couleurs - prismatiques. Toutes les expériences ont été faites sur du cristal dur d'Autriche, qui fut d'abord coloré avec de l'argent, puis soumis au deuxième traitement. Avec la plupart des substances employées, le radical acide paraît exercer la plus grande influence sur la colora- tion, exceplé pour le métal cuivre. 1 Trans. of the American Ceram. Soc., t. VII, p. 159-184. Par exemple, de bons résultats ont été obtenus avec des poudres de sulfure d'argent (ou de cuivre), d’ocre et de noir de fumée dansla proportion 1 : 27 : 2 ou 1:97 :2,. On arrive à une belle couleur bronzée avec l’acétate de cuivre, le thiosulfate de sodium et l’ocre dans la pro- portion de 3 : 1 : 396. La formation d'oxydes d'étain adhérents empêche l'emploi de chlorure stanneux, mais le chlorure d'aluminium donne des effets colorés analogues. $ 5. — Zootechnie L'alimentation rationnelle de la vache lai- tière et le contrôle de son rendement. — M. J. Alquier, attaché au Laboratoire de recherches de la Compagnie générale des Voitures, à Paris, a fait, sur cette question, au 2° Congrès international de Laiterie qui vient de se tenir à Paris, une très importante communication, dont nous extrayons les passages qui suivent : De tous les animaux de la ferme, la vache est cer- tainement celui dont le rationnement doit être établi le plus rigoureusement. La nourriture est-elle surabon- dante? La vache engraisse. Or, l'embonpoint nuit à la lactation, et ne constitue pas une qualité pour les femelles destinées à la reproduction. Il les prédispose aux accidents lors du part. Si la ration est, par contre, insuffisante, principalement en matières albuminoïdes et minérales, exportées si abondamment par le lait, mème lorsque l'animal semble, en apparence, suffisam- ment nourri, la période de lactation active et régulière diminue considérablement de durée. Et encore le mau- vais rendement n’est-t-il qu'un inconvénient minime à côté des conséquences de l’état d'épuisement auquel en arrive tout organisme dont la production n'est pas proportionnée à la recette alimentaire. On réaliserait certainement un progrès considérable dans la prophy- laxie de la tuberculose si l’on songeait à prévenir le mal en enseignant, avec un peu plus d'insislance, que la vache ne peut se contenter des fourrages et résidus industriels les plus grossiers et les moins nutritits, qu'il est cependant de règle, dans la plupart des campagnes, de lui donner, à l’exclusion de tous autres. La vache laitière rationnellement nourrie recevra donc tout d'abord exactement ce dont elle a besoin pour s’entretenir et satisfaire à la production maxima possible au moment considéré. À cette première règle générale, il est logique d'ajouter les suivantes, encore plus méconnues : 1° Le ralionnement de la vache lai- tière doit être individuel; 2° La valeur nutritive de la ration individuelle doit varieravec le rendement, chaque période de lactation exigeant, pour une vache donnée, un apport alimentaire différent. Ne pas tenir compte, ainsi que cela est encore de règle, de ces deux derniers principes, revient à nier l'importance, pourtant indiscutable, des aptitudes indi- viduelles de la race, ainsi que des variations normales de la sécrétion, qui constituent les principaux facteurs de la production du lait. On ne saurait, par consé- quent, trop critiquer le système, si souvent appliqué comme une méthode de progrès, de la ration moyenne, scientifiquement calculée pour un rendement moyen et distribuée, par exemple, à toutes les laitières d'une même exploitation. On arrive fatalement de la sorte aux rationnements insuflisants ou surabondants, pré- cédemment critiqués. La vache qui produit beaucoup, ou qui vient de vêler, doit, à poids vif égal, ingé- rer davantage que la mauvaise laitière ou la bête tarie. Il faut également tenir compte de ce que toutes les laitières ne transforment pas de même les four- rages. Les quantités d'aliments ingérés par deux vaches, fussent-elles du même poids, sont, en effet, très rare- ment entre elles dans le même rapport que les volumes de lait ou les poids de beurre produits par ces deux vaches. Généralement, l'une d'elles utilise les aliments mieux que l’autre, et, à ce propos, il est facile de dé- montrer que l'utilisation de la ration est d'autant plus élevée que la vache est meilleure laitière, c’est-à-dire, 1058 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE en d'autres termes, rendue plus apte à la production maxima par sa race, son individualité et l’activité de sa mamelle au moment considéré. Dans ces conditions, la tactique du producteur de lait doit se borner exclusivement au choix judicieux de son bétail et à l'élimination des animaux à faible rendement, que l’on peut qualifier de parasites, puisque leur exploitation n’est pas rémunératrice. Or, il existe un système permettant de déceler avec certitude les bonnes laitières ou beurrières : c’est celui qui consiste à contrôler la production du lait comme on doit suivre toute entreprise industrielle, c'est-à-dire en enregis- trant la qualité, la quantité, la valeur économique, d’une part, des matières premières à transformer et, d'autre part, des produits résultant de cette transfor- mation. D'après cela, le contrôle rationnel laitier por- tera sur les aliments ingérés par les vaches, puis, sinrultanément, sur le rendement en lait de ces der- nières, avec examen de la qualité de la production. Est-il besoin d'ajouter qu'étant donnée l'influence indé- niable de l'individualité et des variations de la lacta- tion, le contrôle du rendement de la vache n'aura une signification pratique que s'il est individuel et continu ? Bien que relativement très simple en principe, cette méthode n'est cependant pas à la portée de toutes les bonnes volontés, car elle présente de sérieuses dif- ficultés d'exécution : pesage des aliments, échantillon nage des traites, détermination de la qualité de lait, qui réclament le secours sinon d'un spécialiste, du moins de quelqu'un qui soit bien au courant des opérations du contrôle. Ceci reconnu, si l’on considère combien est grande la dissémination des vaches laitières et combien est relativement restreint le nombre des exploitations à gros capitaux, possédant un nombreux bétail et un nombreux personnel, on comprend tout de suite que la plupart des propriétaires d’étables, livrés à leurs propres ressources, ne peuvent, pour des raisons 6co- nomiques, tirer partie de cette idée, à moins qu'ils n'entrent dans la voie si féconde de l'association coo- pérative. En effet, le système du contrôle du rendement laitier a déjà fait brillamment ses preuves dans tous les pays où les agriculteurs ont compris l'utilité de s'associer pour suivre la production individuelle de leurs vaches. En Danemark, par exemple, la première Société de contrôle date à peine de dix ans. Actuellement, il existe dans le pays 340 associations, contrôlant plus de 100.000 vaches. La méthode se serait-elle répandue aussi rapi- dement si elle avait été reconnue sans valeur par les propriétaires d'élables? M. Alquier ne le pense pas. Il croit, au contraire, que, si l'agriculteur s'engageait aujourd'hui résolument dans cette voie, le contrôle méthodique, individuel et continu, du rendement de la vache le conduirait graduellement, mais sûrement : 1° à la constitution d'étables uniquement composées de laitières ou de beurrières à grands rendements, c'est-à-dire d'animaux d'un rapport maximum; 2° à l'amélioration de la race par sélection des reproduc- leurs. L'importance de ces conclusions mérite l’atten- lion de tous les agriculteurs. $ 6. — Physiologie Diabète et ilots de Langerhans. — Les ex- périences des physiologistes ont établi que l’ablation de la plus grande partie du pancréas, pratiquée chez le chien et chez quelques autres animaux, détermine chez eux l'apparition d’un diabète intense persistant jusqu'à la mort. Les cliniciens et anatomo-patholo- uistes ont, de leur côté, montré que, chez un cerlain nombre de diabétiques, mais non pourtant chez tous, le pancréas présente des allérations plus ou moins profondes. ; Or, le pancréas est un organe histologiquement double : il est formé d'acini sécréteurs produisant le suc pancréalique, qu'ils déversent dans le duodénum par l'intermédiaire des canaux pancréatiques, sur les terminaisons desquels ils sont disposés, et d’amas cellu- aires spéciaux, dits îlots de Langerhans, sans rapport avec le système des canaux pancréatiques. Les deux fonctions du pancréas, la fonction sécré- trice externe (production du suc pancréatique) et la fonction sécrétrice interne (intervention dans la régu- lation glycémique de l'organisme), appartiennent-elles aux mêmes éléments, ou doivent-elles être respective- ment rapportées à l'un et à l'autre système de cellules pancréatiques, les îlots de Langerhans présidant à la sécrétion interne de l'organe et à la régulation glycé- mique de l'organisme ? Les recherches anatomo-pathologiques de Dieckoff, de Kasahara, de Szoboleff et d'Opie conduisent à attri- buer un rôle considérable à la dégénérescence des ilots de Langerhans dans la pathogénie du diabète, ces auteurs ayant noté, dans des cas de diabète typique, la seule lésion des îlots de Langerhans. A cette conclusion, MM. P. Carnot et P. Amet, qui viennentdereprendre systématiquement l'étude de cette question, opposent deux ordres d'arguments : 1° Beau- coup de diabétiques n'ont présenté à l’autopsie aucune lésion langerhansienne; 2 On a souvent noté des lésions considérables des îlots de Langerhans, associées ou non à des lésions des acini, sans que ces lésions aient donné lieu pendant la vie aux symptômes du diabète. Depuis quelques années, de nombreux médecins se sont attachés à rechercher systématiquement Îles lésions pancréatiques dans les autopsies des diabé- tiques ; or, dans la moitié au moins des cas, les pan: créas, acini et îlots, étaient intacts; et, dans les cas où les pancréas étaient anormaux, les altérations langer- hansiennes étaient rarement électives et coexistaient avec d'autres altérations pancréatiques. Pour n'en citer qu'un exemple, sur 23 diabéliques examinés, Schmidt trouve 8 pancréas intacts, T pancréas altérés avec ilots sains, 8 pancréas scléreux avec lésions insu- laires. Sans doute, on ne peut conclure de ces faits que la fonction glycorégulatrice de l'organisme, mise en défaut dans le diabète, n’a pas pour organe les ilots de Lan- gerhans, parce que ces ilots peuvent présenter des lésions histologiques encore inappréciables par nos procédés d'investigation, et aussi parce que ces ilots peuvent présenter une inhibition fonctionnelle sans altération histologique. Pourtant, ces faits doivent nous conseiller la prudence dans nos conclusions. MM. P. Carnot et P. Amet se sont attachés récem- ment à étudier les lésions que peuvent présenter les îlots de Langerhans dans un grand nombre d’affections essentiellement distinctes du diabète, et ils ont pu constater, en un court espace de temps, 8 cas dans les- quels ces ilots étaient grandement altérés en dehors de toute glycosurie (il s'agissait de malades ayant suc= combé à la tuberculose chronique, à la granulie, à l& cirrhose alcoolique, à la rupture péritonéale d'un kyste hydatique, à un cancer d'estomac, sans avoin jamais eu de glycosurie). Ces mêmes auteurs ont not une dégénérescence graisseuse considérable des ilot de Langerhans sur des pièces expérimentales, obtenue en soumettant des animaux de laboratoire aux intoxis cations arsenicale, phosphorée, morphinique, diphté rilique. Or, pas plus que les malades, ces animaux n'avaient présenté de glycosurie. Sans doute, comme le fait très justement remarque . Laguesse, l'étude des altérations des îlots de Lam cerhans sur les pièces d'autopsie est fort difficile, et souvent les prétendues lésions décrites par les auteurs ne sont que de simples stades de l'évolution normale des ilots ; — sans doute aussi, il est possible que toutes les lésions des ilots, notamment leur infiltration craisseuse, ne produisent pas la glycosurie. Il n'en esl pas moins certain que ces observations anatomo pathologiques doivent nous inviter à la prudence dans nos conclusions sur le rôle physiologique des îlots di Langerhans. M CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE 1069 La question des îlots de Langerhans et de leurs | fonctions est manifestement à l’ordre du jour et l'on peut espérer que les observations, qui se multi- plient, ne tarderont pas à permettre de tirer des conclusions définitives. Dès maintenant, toutefois, on peut affirmer que les îlots de Langerhans représen- tent une véritable glande vasculaire sanguine, dissi- mulée dans l'épaisseur du pancréas digestif; nous n'en voulons pour preuve que les faits suivants relatés par M. Laguesse. Le canal pancréatique d’un lapin avait été réséqué entre deux ligatures sur 4 centimètre de lon- gueur, au voisinage de son embouchure dans le duodé- num ; le lapin, complètement remis quinze jours après l'opération, se développa normalement et ne manifesta aucun phénomène morbide pendant deux ans. Il fut sacrifié vingt-cinq mois après avoir été opéré. À l'œil nu, le pancréas paraissait complètement absent; il était remplacé par une masse adipeuse, qui en avait conservé à peu près la forme; cette masse était formée unique- ment et exclusivement par les îlots de Langerhans conservés intacts, groupés autour de cordons fibreux qui représentaient les anciens canaux pancréatiques obturés et transformés. Le lapin'n'avait présenté aucun symptôme de diabète; on avait toutefois négligé de faire l'épreuve de la gly- cosurie. Ceci démontre bien que les ilots représentent un organe distinct du pancréas sécréteur, autonome, mais ne démontre pas qu'ils sont les organes de la fonction glycorégulatrice de l'organisme, car nous ne croyons pas qu'on ait réalisé chez le lapin la synthèse du diabète par l’ablation du pancréas. 11 était intéressant de signaler ou de rappeler cet ensemble de faits à un moment où les recherches expé- rimentales et anatomo-pathologiques sur les îlots de Langerhans vont se multiplier. $ 7. — Psychologie Un Laboratoire de Pédagogie normale. — Nous assistons en ce moment, en France et à l'Etranger, à un mouvement général qui porte tous ceux qui s'oc- cupent de Psychologie, de Médecine, d'éducation, vers les solutions pratiques. En France, nous voyons la Lique des Médecins et des Pères de famille s’efforcer d'introduire dans les collèges et lycées la fiche sani- taire individuelle, qui permettra de suivre, de mesurer le développement physique et intellectuel de chaque enfant, de déceler ses diathèses, et de le soigner quand il est encore temps. Au Congrès international d'Edu- cation et de Protection de l'Enfarce, qui s'est tenu à Liège en septembre 1905, les congressistes ont voté à l'unanimité la création d'un Comité international de Pédagogie, qui essayera de faire pénétrer dans l'Ecole les résultats les plus utiles et les mieux démontrés de la recherche scientifique. Il est incontestable, en effet, que nous possédons actuellement bien des connais- sances de psychologie sur l'enfant, qui pourraient rece- voir une application dans l’enseignement. La Société libre d'études psychologiques de l'enfant, fondée il y à cinqans par M. Buisson, et qui compte aujourd’hui plus de 600 adhérents, a beaucoup travaillé; par ses enquêtes, ses questionnaires, ses études d'après nature, elle a élucidé bien des points importants: et il serait dom- mage que tous ces travaux restassent lettre morte et ne servissent à rien. Que faudrait-il donc pour que ces idées de réforme, ces aspirations prissent enfin un corps? Il faudrait que quelqu'un payät de sa personne et fit un essai. Mais où? Comment?Dans quelles conditions? À mon avis, on devrait choisir une petite école primaire, qui aurait un directeur intelligent, un personnel zélé, des inspecteurs amis du progrès.Il faudrait aller trouver toutes ces per- sonnes, leur dire : « Je vous apporte de belles idées, qui seront très uliles sans doute aux enfants. Voulez-vous en faire l’essai loyal ? 11 s’agit d'opérer des examensetdes mensurations périodiques, il s'agit de débrouiller des types d'intelligence, de constater des aptitudes, de mieux adapter l'éducation à la personnalité de chacun. Le travail sera long et méticuleux, et, pour le moment, il ne sera nullement rémunérateur dans le sens ma- tériel du mot. Vous n'en serez récompensé que par la satisfaction d'avoir accompli, vous les premiers, un grand devoir social ». Ce n’est pas tout. Il faudrait encore l'appui de l'Admi- nistration. Il faudrait aller voir ceux qui nous gouver- nent, les intéresser à notre cause, leur montrer que nous sommes des gens de bonne volonté, que nous mettons beaucoup du nôtre, que nous-méritons d'être soutenus, encouragés. Voilà ce qu'il faudrait dire et faire comprendre, en mettant dans nos demandes cette éloquence qui vient du cœur. Serions-nous compris? Plus d’un, parmi ceux qui lisent ces lignes, va répondre sceptiquement : tout est possible! Eh bien, on aurait tort d'être sceptique. Nous arrivons toujours au but, à la condition d'y mettre de la volonté, à la condition surtout de ne pas oublier de faire dans chaque entreprise la part de l'initiative privée. Ce laboratoire de pédagogie normale, il existe; il existe depuis quinze jours. J'ai demandé à l'Administration l'autorisation de lecréer moi-même dans une Ecole de la Ville de Paris. Les instruments sont en place. Les pro- fesseurs de l'Ecole s’exercent à les manier. Le Directeur de l'Ecole veille avec un soin jaloux à la mise en marche. On trouve là la toise, le dynamomètre, le spiromètre, le compas d'épa ur, les appareils enre- gistreurs de la méthode graphique, les méthodes qui permettent de relever les signes d'une mentalité quel- conque, enfin tout ce qui nous sert à connaitre le corps et l'âme de nos enfants. On trouve là aussi, dès à présent, des gens qui sont décidés à travailler beaucoup, avec ardeur et désintéressement. Nos res- sources sont petites, mais notre courage est grand. Dans notre gratitude, nous rendons hommage à la bienveil- lance de M. Bédorez, à l'appui constant et chaleureux de M. l'inspecteur Belot, au zèle infatigable de M. le directeur Vaney, à la collaboration précieuse du D' Si- mon, et aux encouragements d'un comité de patronage dans lequel ont bien voulu entrer MM. Léon Bourgeois, Bédorez, Buisson, Baguer, Baudrillart, Boitel, Charlot, Devinat, Lacabe, Langlois, Le Chatelier, Legendre, Mala- pert, L. Olivier, Thamin, et M! Billotey. Que tous les instituteurs désirant s'initier aux méthodes nouvelles, qui permettent de mieux connaitre les enfants, que tous ceux qui croient que notre œuvre est utile et féconde viennent frapper à la porte de notre labora- toire (36, rue Grange-aux-Belles) : ils y recevront le meilleur accueil. Alfred Binet, Directeur du Laboratoire de Psychologie physiologique de la Sorbonne. $ 8. — Géographie et Colonisation L'Industrie française de la Soie devant la concurrence internationale. — Les récentes discussions parlementaires sur le relèvement des droits frappant les tissus étrangers de soie pure ont paru faire croire, si ce n’est à une crise, et le mot est bien fort, — du moins à des difficultés que traverserait l'industrie francaise de la soie. Aussi bien, à cette occasion, nous semble-t-il intéressant d'étudier, en nous aidant d'un récent travail de M. R. Gonnard ?, l'état actuel de cette branche de notre production. La répartition géographique de la production de la soie s'étend sur deux vastes régions : une partie du bassin méditerranéen (Europe et Asie antérieure) et l'Extrème-Orient (Inde, Indo-Chine, Chine et Japon). Comme le montre le tableau suivant, les quantités affirment la prépondérance énorme et croissante de l'Extrême-Orient devant l'infériorité et le stationne- ment de la sériciculture européenne, et aussi la grande ——————————————— 1 Hovue économique internationale, 15-20 août 1905. 1070 CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE supériorité de la production italienne sur celle des autres pays méditerranéens : Soies mises à la disposition de l'industrie occidentale, en 1902. France. . . 570.000 kgs Italie .», Ps #.417.000 Espagne eut 18.000 Autriche-[Hongrie 304.000 SUISSE re 4 ee No Re 50.000 Russie et/Caucase.. . - 465.000 Etats des Balkans . . . . 110.000 Turquie d'Europe 170.000 Grèce et Crête. 55.000 Turquie d'Asie. NS CAEN Perse et Turkestan (exp.). 545.000 Chine, Schang-Haï (exp.). 3.550.000 — Canton (exp.). 3.220.000 Japon (exp.). ce UU0 000 Indes anglaises . . . . . . 295.000 Toute cette soie, mise à la disposition des fabricants occidentaux, est conditionnée et vendue dans un cer- tain nombre de villes, qui sont ordinairement des centres industriels en même temps que des marchés. Les plus importantes sont Milan (9.849.000 kilogrammes en 1902) et Lyon (7.165.000 kilogrammes). Puis vien- nent Turin en Italie, Saint-Etienne en France, Zurich et Bâle, en Suisse, Crefeld et Elberfeld en Allemagne, Vienne en Autriche. La consommation industrielle comparée de la soie se répartit de la manière suivante : 1900 1902 HranCE ER NE 3. 4.109.000 kgs Etats-Unis . 3. 6.000.000 Allemagne . 2. 2.983.000 SUISSES 115 1.665.000 EME 1.000.000 Russie . 1. 1.514.000 Angleterre 761.000 Autriche - 750.000 Ainsi, l’industrie de la soie se développe, des con- currences nouvelles apparaissent. Quelles sont les rai- sons de ce changement ? Vis-à-vis de la consommation, c'est d'abord que le luxe a évolué, il s'est égalisé : la qualité du tissu est moins recherchée que l'agrément de la confection, les lainages font concurrence aux soieries, et, parmi ces dernières étoffes, les damas et les brocarts précieux, qui furent la gloire de Lyon, ont fait place aux tissus légers et peu coûteux, capables d’être fabriqués partout et plus sujets aux oscillations de la mode; de là, pour Lyon, une concurrence qui ne cesse de grandir, et des probabilités de crises fréquentes pour tous les centres de production. En ce qui concerne la production, les causes de crise résident dans l'élévation du prix de la matière pre- mière, très recherchée et peu susceptible d'être multi- pliée rapidement, malgré les essais que l’on tente aujourd'hui dans différents pays. C'est ainsi qu'au cours de 1902 et 1903, la hausse a été de 20 °/,. Si l'extension de l’industrie de la soie agit dans ce sens sur la matière première, son influence s'exerce en sens contraire sur la vente des tissus, el les deux mouve- ments s'unissent pour diminuer les bénéfices. D'autre part, les conditions du travail se sont modifiées : l'in- dustriel, quise contentait de transmettresescommandes au « canut », sans avoir à engager aucun capital, a dù construire des usines, acquérir un matériel coûteux, nécessitant un travail continu, qui pousse à la surpro- duction, si Fécoulement n’est pas continu à son tour. De plus, avec les progrès constants du machinisme, ce sont les pays les plus récemment outillés qui ont le plus de chances de victoire. L'examen des différentes causes que nous venons d'analyser montre assez que le malaise doit être plus ou moins général. Et tel est bien le cas, mème aux Etats-Unis, dont les industriels ne cessent pas de se plaindre, en réclamant des droits d'entrée toujours plus élevés. Devant cette évolution de l'industrie soyeuse, la fabrique lyonnaise n’est pas restée inactive : tandis que les métiers à bras se raréfiaient, les métiers mécaniques se multipliaient, en se concentrant dans des usines, souvent établies à la campagne. Enfin, s'adaptant aux nouveaux désirs de la consommation, la fabrique lyonnaise a réduit sa production de riches tissus, livrant aujourd’hui des étoftes dont le prix du mètre oscille entre 500 francs et 0 fr. 50. Ces transfor- mations ont permis un accroissement de la production, qui s'est élevée de 379 millions de francs, en 1893, à 444 millions, en 1902, et les exportations ont suivi le même mouvement. En aucune facon, la situation de notre industrie soyeuse n’est pire que celle de nos rivaux étrangers. P. Clerget. $ 9. — Enseignement Le nombre des étudiants en Allemagne. — L'encombrement des carrières libérales se fait sentir d'une facon intense dans tous les pays. Voici quelques chiffres qui montrent qu'en Allemagne le nombre des étudiants s'accroît dans des proportions inquiétantes : Pendant le semestre d'été 1905, on comptait dans l'Empire allemand 41.948 étudiants, dont 3.198 étran- gers (soit 7 °/.). Ce chiffre dépasse de 13.000 celui d'il ya vingtans. On constate, cependant, une légère diminution dans les Facultés de Médecine et de Théologie protes- tante, mais l'augmentation est saisissante en ce qui concerne les étudiants en Philosophie ef Histoire, au nombre de 8.893, en 1905, au lieu de 3.399, en 1885. Pour les Mathématiques et les Sciences naturelles, le nombre passe dans le même temps de 2.583 à 5.299; pour la Pharmacie, de 814 à 1.547; pour le Droit, de 4.682 à 11.678. Or, les chiffres de 1885 représentaient déjà un excé- dent par rapport aux places disponibles et à l’accrois- sement de la population. L'Ecole de Marine de Paris. — On sait qu'il à été fondé, lors de la rentrée d'octobre, à l'Ecole supé- rieure de Commerce de Paris, une section de Naviga- tion. Voici la liste des matières enseignées et des pro- fesseurs chargés de cet enseignement ; Calculs nautiques, Cosmographie, M. Guilhaumon ; Physique : M. Tombeck, docteur ès sciences; Météorologie, Théorie du navire, Constructions na- vales : M. Roullin, capitaine de frégate; Machines à vapeur : M. Petithomme, ingénieur prin- cipal de la Marine; He Règlements maritimes, Police de la navigation : M. Réty, chef de bureau à la Navigation commerciale ; Histoire du commerce : M. Milhaud, professeur au Lycée Montaigne; Géographie du littoral l'Ecole navale ; Commerce et Comptabilité : table à la Cour d'appel; ; Législation industrielle et ouvrière, Economie poli- tique : M. Renault, docteur en droit; Législation commerciale et maritime : M. Fromageot, docteur en droit; Etude des transports : à la Compagnie de l'Est; ve Législation sanitaire et Hygiène maritime Dr Barthélémy, médecin principal de la Marine; Lanque anglaise : M. Baijet, agrégé de l’Université. La durée des cours sera de deux ans. A la fin de la première année, les élèves, sous la conduite de leurs, professeurs, visiteront les ports de l'Angleterre, et, à la fin de la seconde année, les grands ports du Nord et les établissements de la Marine : chantiers de construc- tions navales, forges, entrepôts, etc. Astronomie . : M. Métin, examinateur à M. Leix, expert comp- M. Hubout, ingénieur en chef : M. le A. CLAUDE er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME 1074 L'INSTRUMENT DES HAUTEURS ÉGALES EN ASTRONOMIE DE POSITION OÙ ASTROLABE A PRISME Dans un des derniers numéros de la Æevue’, nous avons montré la supériorité, au point de vue théorique comme au point de vue pratique, de la méthode des hauteurs égales sur loutes les autres méthodes d'observation pour la détermination pré- cise de la position, sur la sphère céleste, du zénith à une heure donnée d'un compteur de temps ou d'un astre. Et, pourtant, elle est à peu près universelle- ment abandonnée, non seulement dans les obser- vatoires et en Géodésie, mais même en Astronomie de voyage, c'est à dire là où ses avantages prati- ques, tout au moins, auraient dû la mettre au premier rang. Quelles sont donc les raisons qui peuvent expliquer un pareil abandon? C'est ce qu il importe tout d'abord d'examiner. 1l nous faut, pour cela, remonter aux origines de la méthode. JL — MÉTHODE DE GAUSS ET MÉTHODE DES HAUTEURS ÉGALES GÉNÉRALISÉES. EMPLOI DU SEXTANT. La méthode des hauteurs égales pour la déter- mination simultanée de la latitude et de l'heure a élé imaginée par Gauss en vue d'éliminer, dans l'emploi du sextant et de l'horizon artificiel pour l'observation des hauteurs d'astres, l'influence des erreurs instrumentales (excentricité de l’alidade, obliquité des miroirs par rapport au limbe, pris- matisme des miroirs et des glaces du bain, etc.) et celle des erreurs de lecture et de collimation. Elle consiste à caler l’alidade sur le limbe dans une position arbitrairement choisie, qui n'a pas besoin d'être connue, et à noter au chronomètre les heures auxquelles trois astres quelconques, dont on peut avoir les positions exactes par les éphémérides ou les catalogues, atteignent la hauteur apparente qui correspond à ce calage. Comme, pendant la durée des observations, on n'a à toucher à aucun organe de l'instrument, on peut admettre qu’à chacune d'elles, occupant la mème position par rapport à /a verticale, il se retrouve identique à lui-même, ou, en d'autres termes, que les hauteurs apparentes observées sont rigoureusement égales. On est donc bien dans les conditions d'application de la méthode. Avec trois astres seulement, le problème est évidemment déterminé. Gauss en a donné le pre- ? A. CLaune et L. Drrexcourr : La méthode des hauteurs égales en Astronomie de position, dans la Revue du 30 no- vembre 1905. mier une solution directe. Cagnoli en a fourni une autre un peu plus élégante. Elles permettent d'ob- tenir les trois inconnues sans l'intermédiaire de leurs valeurs approchées. C’est l'avantage qu’elles présentent sur la solution indirecte des équations de condition ou des droites de hauteur, avantage un peu théorique du reste, puisque, dans la pra- üique, on est toujours obligé de préparer les obser- vations et, par conséquent, d'avoir des valeurs plus ou moins approchées des inconnues. Il est largement compensé par une plus grande compli- cation de calculs et surtout par une moindre faci- lité de discussion. Cherchons les directions azimulales que doivent avoir les trois astres observés pour que les résul- tats aient le maximum de précision. La formule qui donne l'erreur probable d’une observalion au sexlant est: 3,2N2 (1) —+ 15 / (007 sin } sin Z)? +(5) (2G est mis ici au lieu de G,car la vitesse relative des images est double lorsqu'on observe à l'horizon artificiel). En fixant dans celte formule G=8, ce qui est le grossissement ordinaire des lunettes astronomiques de sextants, on trouve : = +3,00 pour un astre observé dans le méridien; ot ——+3/,18 pour À — 900 l et pour un astre observé ot ——+3/,04 pour ? — 300 dans le {er vertical. On voit que, avec ce grossissement, l'erreur pro- bable d’une droite de hauteur est sensiblement constante dans tous les azimuts et à toutes les latitudes‘. Les trois droites de hauteur dans la mé- thode de Gauss ayant ainsi même poids, il est clair que le cercle qui leur est tangent intérieurement ou extérieurement sera d'autant mieux déterminé que le triangle se rapprochera davantage de la forme équilatérale, ce qui conduit à prendre trois étoiles à 120° les unes des autres. Pratiquement, il suffit que leurs directions azimutales fassent entre elles des angles convenables. C’est la conclusion à laquelle Gauss était parvenu en caleulant l'influence d’une erreur d'observation sur les résullats. En observant les trois mêmes étoiles à trois re- 1 C'est cette constance qui explique qu'aucun observateur jusqu'ici n'ait signalé la variation de la précision de la droite de hauteur avec l'azimut, variation très perceptible avec les grossissements élevés. 1072 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME prises différentes, Gauss à obtenu pour lechiffre des secondes de la latitude de Gültingen : La {re soirée . 567,7 DRE UE 3e — IS NUS CRD AUNE MOYEN EE RE SES , SE Le chiffre exact est de 55”,6. Les écarts sont de l'ordre de grandeur indiqué par la formule (1). D'autres observateurs,opérant en divers points, ont trouvé de pareilles concordances, et leurs moyennes s'écartent aussi peu des latiludes exactes délermi- nées ultérieurement. Pour les Leures, on constate des accords du même ordre entre celles qu’on obtient par ce procédé et celles que fournit un instrument méridien. On ne saurait donc douter de l'excellence d'une méthode qui permet d’alteindre une pareille exactitude avec un simple sextant et par trois observations seulement. Malgré tout, elle a loujours été considérée plutôt comme une solution intéressante d'un problème trigonométrique que comme une véritable méthode d'observation. Anger et Knorr ont essayé de com- battre celte fausse conception en montrant que le principe des hauteurs égales s'applique à un nom- bre quelconque d'étoiles elque le problème serésout très aisément par la méthode générale des équa- tions de condilion. Après eux, le Commandant Perrin, dans le très beau Mémoire qu'il a publié sur l'emploi de la méthode des hauteurs égales avec le sextant”, à été encore plus loin dans cette ‘ voie : c'est à lui que revient l'honneur d’avoir sim- plifié le problème par l'application des lieux géo- métriques. En dépit de son origine illustre et des efforts tentés par ceux qui ont pu en apprécier la valeur, la méthode de Gauss a toujours été d'un usage peu répandu. Parmi les raisons qui expliquent cet abandon, il faut sans doute placer en première ligne les diffi- cultés que présentent, au début, les observations d'étoiles au sextant et à l'horizon artificiel. Ce n’est que par un entrainement progressif, en commen- çant par les étoiles les plus brillantes, qu'on arrive à mettre aisément les deux images d'une même étoile dans le champ, à les y maintenir et à les faire passer assez près l’une de l’autre pour bien appré- cier le moment où elles sont à la même hauteur. On a inventé des dispositifs particuliers pour faci- liter ces opéralions : un pelil niveau qui se fixe sur l’alidade et un pied articulé porté par trois vis calantes, ou, à défaut, un sabot de bois portant des entailles à différentes hauteurs. Mais ces acces- soires ne sont pas d'un usage courantet il faut une très grande habitude ou un talent d’observateur ! Voir Annales du Bureau des Longitudes, t. IV. C'est à ce Mémoire que sont empruntés les chiffres cités plus haut. peu ordinaire pour espérer obtenir, mème avec un instrument qui en est muni, des résultats d'une précision comparable à celle indiquée plus haut. C'est qu'en effet le sextant se prête mal aux observations qui réclament une grande précision. Le grossissement dans un intrument à réflexion destiné à être tenu à la main est nécessairement très limité; on est obligé de laisser un certain champ à la lunette sous peine d’augmenter outre mesure les difficultés de recherche de l'étoile et d'observation. Même en employant dans la lunette astronomique du sextant un oculaire négatif, qui donne, comme on sait, le plus fort grossissement pour une même valeur du champ, on ne dépasse guère huit fois. Or, on a vu qu'avec cette valeur de G, l'erreur probable d'une droite de hauteur n’est M pas inférieure à 3". Lorsque l'instrument doit étre placé sur un support, on peut substituer à l'ocu- laire ordinaire un oculaire grossissant un peu plus et aller jusqu'à douze et treize fois; c'est à peu près la limite. Dans ces conditions, on ne saurait obtenir une bien grande précision pour les droites de latitude. A défaut d'observalions très précises, peut-on du moins les mulliplier assez dans une même soirée pour réduire d’une manière notable l'influence des erreurs et profiter ainsi de la généralisation dont la méthode a été l’objet depuis Gauss? L'expé- rience est là pour démontrer que les plus habiles observateurs ne peuvent guère prendre plus de cinq à six étoiles dans une soirée. Et cela se con- coit : les étoiles, de grandeur trois au plus, doivent \ être réparties autant que possible également dans les diverses régions azimutales, et, d'autre part, il faut à chaque observation un certain lemps pour se préparer. Or, si ce nombre d'observalions suffit pour garantir contre loute erreur grossière résultant de méprises possibles sur l'identité des étoiles, il ne permet pas d'espérer une atténuation sensible de l'influence des erreurs. Pour compenser l'insuffisance du nombre des éloiles observables, on à imaginé de faire plusieurs observations de chaque étoile, en se basant sur la perfeelion relative de la gradualion dans les ins- truments actuels. Au lieu de laisser l’alidade fixée sur lé même point du limbe pendant toute la durée des observations, on lui donne une série de dépla- cements successifs de part et d’autre de ce point, et l'on note les heures auxquelles une même étoil alteint les hauteurs correspondant à ces différents calages qui sont lus sur le limbe. On obtient ainsi, pour chaque étoile, une série d'heures à la moyenne desquelles on applique une petite correction pour la faire correspondre à la moyenne des lectures. Celle-ci ne doit pas nécessairement avoir la même valeur pour toutes les étoiles; il suffit que les dif % 4 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME férences soient petites, la méthode des équations de condition permettant, dans ce cas, d'en tenir compte aisément dans les calculs. Nous ne saurions, pour notre part, admeltre une manière d'opérer qui porle une aussi grave atteinte au principe des hauteurs égales. Pour qu’elle fût légitime, il faudrait que les différences des hau- teurs moyennes fussent connues avec une entière exactitude, ce qui n’est pas, puisqu'elles sont affec- tées des erreurs de lecture et d’excentricité. S'il est permis, en effet, de négliger les petites diffé- rences des erreurs qui résultent, pour des hauteurs très voisines, de la partie constante de l’excentri- cité, il n'en est pas de même de celles qui provien- nent de la partie /uctuante, due au jeu nécessaire de l'axe de rotation de l'alidade dans sa douille, à l’usure, et qui change lorsqu'on déplace celte ali- dade. Rien n'autorise à penser que, dans chaque série de hauteurs, il se produit une compensation sufäsante de ces erreurs essentiellement variables et qui peuvent atteindre une valeur notable. En procédant par séries de hauteurs, on fait donc béné- volement réapparailre les deux plus redoutables erreurs du sextan!, que la méthode de Gauss a pré- cisément pour but d'éliminer. Le bénéfice est plus que problématique et, en saine doctrine, cette ma- nière d'opérer doit être cendamnée. Ainsi, depuis Gauss, la méthode des hauteurs égales n'avait fait aucun progrès sensible en dehors de la généralisalion dont elle avait été l'objet, — généralisation demeurée, on l’a vu, presque exclu- sivement théorique du reste : les difficullés d’ob- servation, si rebutantes pour les commençants, n'étaient guère aplanies; on n'avait rien fait pour diminuer les erreurs d'observation, et le petit nombre d'étoiles observables dans le court inter- valle pendant lequel on peut négliger les variations de marche du compteur de temps interdisait tout espoir de réduire notablement leur influence sur les résultats. Et il n’en pouvait être autrement tant que l'instrument de la méthode continuait à être le sextant, qui, de par sa nature même et l'usage auquel il est destiné, ne peut s’accommoder des forts grossissements. Elle restait donc ce qu'elle était primilivement : un merveilleux procédé pour tirer du sexlant le meilleur parti possible, mais d'un emploi difficile, exigeant un assez long appren- tissage el, par suite, d'un usage peu répandu. II. — EMPLOI DU THÉODOLITE. Le principal obstacle au développement de la méthode des hauteurs égales fut l'élat de dépen- dance où, depuis Gauss, elle élait maintenue vis-à- vis du sextant : l'imperfectibilité de l'instrument avait fini par jeter un certain discrédit sur la mé- 1073 thode elle-même. Sans doute, le sextant — et c'est pour cela que Gauss l'avait choisi — était le seul instrument réalisant la condilion essentielle pour l’applicalion rigoureuse de la méthode, à savoir la constance de la hauteur apparente mesurée. Mais si, au lieu de se borner à cette unique considéra- lion pour juger si un instrument convient ou non à la méthode, on avait envisagé l’ensemble des conditions à remplir, on aurait reconnu que le théodolite y salisfail en moyenne à peine moins bien que le sextant, et, comme avec lui les obser- valions sont incomparablement plus faciles qu'avec ce dernier instrument, il aurait vraisemblablement permis à la méthode de se propager." Quoi qu'il en soit, pour déterminer simultané- ment la latitude et l'heure par des observations de hauteurs égales avec le théodolite, l'instrument étant en station, on cale la lunette en hauteur et on note les heures auxquelles un certain nombre d’as- tres connus passent sous le fil horizontal du réli- cule de la lunette. Immédiatement après chaque observation, on détermine l'inelinaison de l'axe parallèlement au plan vertical passant par l'axe optique. Une observation complète ne demande pas plus de trois à quatre minutes. Avec une table de calages à intervalles suffisamment étroits, on peut arriver à prendre huit à dix éloiles en une heure. ï, désignant l'inclinaison de l'axe vertical cor- respondant à une étoile À, et? la distance zénithale instrumentale, la distance zénilhale apparente observée de l'étoile est{+ 7,. Son erreur probable n'est plus nulle, comme danse cas du sextant, mais égale à 31,, c'est-à-dire à l'erreur probable d'une mesure d’inelinaison, laquelle dépend de la valeur des divisions du niveau principalement. La formule (1), qui donne l'erreur probable d'une droite de hauteur, n'est plus applicable. Mais, tant que le grossissement de la lunette ne dépasse pas 20, on peut admettre que l'erreur probable est in- dépendante de l'azimut. On la détermine alors a posteriori par les observations. Les nombreuses séries qui ont été faites dans ces dernières années à l'Observatoire du Bureau des Longitudes ont montré que les résultals obtenus en opérant ainsi, avec un instrument donné, sont beau- coup plus précis que ceux fournis par toutes les autres méthodes. On s'en rendra compte aisément si l'on veut bien se rappeler ce que nous avons dit au sujet du niveau dans le précédent article : chaque nivellement peut être affecté d'une erreur assez forterelativement à la précision des lectures; mais, de même qu'un nivellement peut être considéré comme bon s’il est la moyenne d'un grand nombre, de même ici les erreurs des lieux géométriques dues aux nivellements particuliers se compensent 107% A. CLAUDE xt L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME en grande partie si leur nombre est assez élevé. Voici quelques chiffres résultant d'observations faites avec un théodolite à deux verniers donnant les 10" et muni d’une lunette grossissant {trente fois : La méthode des circomméridiennes ne permet d'obtenir la latitude qu'à 10" près avec une seule éloile. Le grand nombre d'observations pourrait faire croire à une meilleure approximation. La méthode de Gauss donne la latitude à moins de 7", même sans circomméridienne. En employant la méthode des hauteurs égales avec douze étoiles, on obtient la latitude à 3” ou 4" près, alors que l'écart le plus fort des lectures du niveau atleint quelquefois 30". Ainsi, pour le théodolite comme pour le sextant, la méthode des hauteurs égales est celle qui permet de tirer de l'instrument le meilleur parti possible pour la détermination de la latitude et celle de l’heure. Si l’on ajoute à cela qu’elle dispense des lectures du limbe, toujours si ennuyeuses la nuit, surtout en plein air, qu'elle n'exige qu'une bonne lunette et un bon niveau, les cercles pouvant être quelconques, on comprendra que, malgré le travail que nécessite la préparation de la table des calages et des heures des passages, elle emporte les préfé- rences des observateurs qui ont eu l'occasion de l'essayer. Par rapport au sextant, le théodolite est inférieur en ce que les différences de hauteur apparente, étant mesurées avec le niveau, ne sont pas susceptibles d'une grande exaclitude; mais il rachète en partie celte infériorité par la rapidité desobservalions, qui permet d'en augmenter sensiblement le nombre; en outre, les observations sont beaucoup plus faciles et n'exigent aucun apprentissage spécial. III. — ASTROLABE A PRISME. $ 1. — Nécessité de la création d’un instrument de hauteurs égales. Les résultats obtenus par la méthode des hau- teurs égales avec les deux instruments qui viennent d'être examinés, s'ils étaient remarquables comme précision relalive, étaient loin toutefois d'avoir la précision absolue de ceux que fournissent les instruments méridiens. On pourrait en dire autant des déterminations de latitudes effectuées au moyen du zénith-télescope des Américains ou de la lunette méridienne avec micromètre tourné à 90° par le procédé Talcott, qui n’est qu’un cas particulier de la méthode des hauteurs égales, celui de deux étoiles observables dans le méridien. La variation d'inclinaison de. l’axe réel ou fictif autour duquel tourne la lunette quand on passe de la première à la seconde observalion est mesurée à l’aide du niveau comme dans les observations au théodolite ; de plus, on emploie le micromèlre pour mesurer la différence des distances zénithales instrumen- tales des deux étoiles. Aussi, quoique le grossisse- ment de la lunette soit beaucoup plus fort, les résullats ne sont guère plus précis que ceux que donne le sextant par la méthode de Gauss. On s'explique maintenant pourquoi la méthode des hauteurs égales élait si délaissée. Faute d'ins- trument spécialement approprié à la mesure des hauteurs égales et pourvu d’une lunette de gros- sissement comparable à ceux des lunettes des cercles méridiens, elle ne pouvait entrer en con- currence avec les méthodes d'observalion méri- dienne pour les déterminations de latitude et d'heure dans les grandes opérations de Géodésie,, et a fortiori pour la détermination des positions des astres. Dans le domaine de l’exploration, où elle aurait pu rendre de grands services, le sextant, pour lequel elle avait été imaginée, présentait des. difficultés d'observation qui avaient suffi à la dis- créditer au point qu'on ne songeail que rarement à l'appliquer avec le théodolite. Il y avait là une lacune qu'il fallait combler si l’on voulait faire pro- duire à la méthode des résultats en rapport avec: ses mérites théoriques. Ce but a été alteint par la créalion de l’astrolabe à prisme. $ 2. — Considérations ayant servi de base à la construction de l'instrument. Avant de donner la description des différents. modèles de l'astrolabe à prisme, il convient d’ex- poser les idées directrices qui ont conduit à sa construction. IL était naturel de chercher à réunir dans un. même instrument les avantages que présentent, au point de vue de l’emploi de la méthode, tous ceux dont il a été parlé plus haut, en évitant leurs défauts. Tout d'abord, le mode d'observation au sextant et à l'horizon artificiel à mercure s'imposait comme, étant le seul capable de fournir des hau- teurs apparentes rigoureusement égales. Il offre, en outre, deux avantages très précieux qui sont les suivants : 1° La lunette n'a pas besoin de réticule; il suffit d'amener les images à coïncider à peu près au centre du champ lorsque l'instrument est réglé; 2 L’angle observé est le double de la hauteur; la vitesse zénithale relative des images est double de celle d'une image simple : la précision obtenue pour la hauteur simple est la même que celle que donnerait son observation avec une lunelle à réli- cule de grossissement double. La longueur de la lunette se trouvait déjà réduite de près de moitié pour la même précision d'obser- valion, ou inversement, avec la même lunette, on 4 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE À PRISME 1075- aurait une précision double pour les étoiles à vitesse zénithale suffisamment lente, c'est-à-dire pour les circomméridiennes. Mais l'absence de réticule permettait d'aller plus loin encore dans cette voie. Dans les lunettes à réticule, le grossisse- ment de l’oculaire est très limité : on ne peut l’aug- menter sans augmenter en même temps le diamètre apparent des fils et sans diminuer dans le même rapport la précision des pointés. On est donc obligé, pour augmenter le grossissement. de la lunette, d'employer des objectifs à foyers de plus en plus longs. C'est ainsi qu'on est conduit à mettre dans les instruments ces longues lunettes qui, entre aulres défauts, ont celui d’être très encombrantes et peu transportables. Il n'en est pas tout à fait de même pour les lunettes sans réticule. Quel que soit le type d'ocu- laire employé, son grossissement n’a alors d'autre limite que celle à partir de laquelle les images cessent de paraitre fines. Or, le diamètre apparent sous lequei on voit l'image d'une étoile à travers l’oculaire dépend du diamètre de l’image réelle fournie par l'objectif et du grossissement propre de l'oculaire. On sait que le passage des rayons lumineux dans l’objectif donne naissance à des phé- nomènes de diffraction en vertu desquels l'image d'une étoile, au lieu de se réduire à un point, est une tache brillante estompée sur les bords et entourée d'anneaux concentriques alternativement clairs et obseurs; l'éclat des anneaux lumineux est sensiblement plus faible que celui de la tache centrale et va en diminuant progressivement. Pour une distance focale principale donnée, l'éclat de la tache centrale est inversement proportionnel à la surface libre de l'objectif; son diamètre est d'au- tant plus étroit et les anneaux plus resserrés que l'ouverture efficace de l'objectif est plus grande. On peut donc, en augmentant dans une certaine mesure le rapport de l'ouverture de l'objectif à sa distance focale, accroitre la finesse des images réelles. D'autre part, comme il n’y a pas de réticule à rendre visible, on observe dans un champ sombre, ce qui permet d’apercevoir des étoiles d'éclat beau- coup plus faible que si le champ était éclairé. Avec les lunettes à réticule, il n’y a pas intérêt à obser- ver des étoiles au delà d'une certaine grandeur, car elles disparaissent sous les fils et leur pointé est moins précis. Au contraire, lorsque le champ est sombre, on recherche de préférence les étoiles de faible éclat, qui donnent des images fines, plus favorables à la précision de l'observation que les images trop éclatantes. Or, celte finesse vient de ce que seule la partie la plus brillante de la tache centrale est visible : ce noyau ayant un diamètre très faible, on peut le regarder avec un oculaire - d'un grossissement notablement plus fort que celui des lunettes à réticule sans que, pour cela, il cesse de paraître fin; et son éclat n’est guère diminué, car le léger agrandissement produit par l’'augmen- tation de grossissement est compensé en parlie par l'extinction plus complète des bords estompés et des cercles de diffraction. Ainsi, en adoplant le mode d'observation au sextant et à l'horizon artificiel, on avait la possi- bilité d'employer des luneltes d’un grossissement équivalent à ceux des lunettes de pelils cercles méridiens et même d'instruments d'observatoires, tout en restant très portalives. Avec d'aussi forts grossissements, on ne pouvait songer à conserver le syslème des miroirs du sex- tant comme appareil de mesure. Leur monture est très défectueuse; lorsqu'ils sont en place, ils sont toujours plus ou moins déformés, assez même quelquefois pour donner des images troubles ou allongées. Mais ce qu'on peut reprocher surtout à l'appareil de mesure du sextant, c’est de ne pas présenter des garanties suffisantes d'invariabilité quand l’alidade est fixée sur un point du limbe. On peut bien admettre, comme nous l'avons fait plus. haut, que, au degré de précision que comporte le grossissement de la lunette, l'angle des miroirs reste constant tant que le sextant est tenu verlica- lement dans la même position. Avec des grossis- sements dix et vingt fois plus forts, les mouve- ments relatifs des miroirs, presque inévitables avec une liaison aussi précaire, ne devaient plus être considérés comme négligeables. Il était donc indis- pensable de remplacer les miroirs par un système de faces réfléchissantes absolument solidaires, par- faitement planes et le restant suffisamment, une fois l'appareil placé dans sa monture, pour sup- porter de forts grossissements. Le prisme équiangle se présentait naturellement. On connaît la propriété suivante qui fait de ce: prisme un instrument de mesure : Deux rayons lumineux LI, L'{', qui pénètrent dans le prisme normalement aux arétes par deux faces différentes AB, AC, et sortent parallèlement par la 3° face BC après s'être réfléchis chacun sur la face d'entrée de l'autre, font entre eux un angle LVL' égal à 120°. La figure 1 ci-après suppose qu'il s'agit de rayons monochromatiques. Mais la propriété subsiste évi- demment avec la lumière blanche, chacune des radiations émergentes étant symétrique comme direction de celle du rayon incident par rapport à la normale à la face réfléchissante, puisque les angles À, B, G sont égaux; seulement, si le rayon incident n'est pas normal à la face de pénétration, les diverses radialions sont séparées à la sortie. Cela n'a aucun iuconvénient dans le cas qui nous occupe : les faisceaux émergents, élant reçus dans 1076 A. CLAUDE £r L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME une lunette astronomique, forment quand même au foyer de l'objectif des images incolores. L'angle LVL' = 2h étant constant quelle que soit lincidence i des rayons LI, L'[", le prisme équi- angle constitue une instrument de mesure de l’angle de 120° entre deux faisceaux de rayons lumineux parallèles normaux à ses arêtes. Pour cet angle unique de 120°, il peut donc remplacer le système des deux miroirs du sextant. L'inconvénient de ne mesurer qu'un angle est largement compensé par son invariabilité. Et le prisme offre, en outre, cet avantage que, chacune de ses faces réfléchissantes se laissant traverser par les rayons de l'autre fais- ceau incident, on n’est pas obligé de viser directe- ment l’image de l'étoile dans le bain de mercure Fig. 1. comme avec le sextant : à leur sortie du prisme, les rayons directset les rayons réfléchis sur le bain de mercure issus d'un même astre suivent la même direction LS lorsque leur angle est égal à 120°, et cette direction commune d'émergence est horizon- tale si la face BG est verticale. La lunette peut donc être placée horizontalement, ce qui facilite grande- ment l'observation. Une difficulté se présentait cependant pour l'adoption d’un semblable dispositif. Le prisme équiangle que nous venons de considérer est un prisme parfait, donc irréalisable. À défaut de prismes parfaits, seuls susceptibles de supporter un grossissement illimité, pourrait-on du moins en trouver d'assez peu défectueux pour admettre un grossissement de lunette comparable à celui des lunettes d'instruments méridiens portatifs, qui, d’après la formule (1), correspond déjà à une haute précision? Les progrès accomplis depuis quelques années dans la fabrication et le travail du verre permettaient de l’espérer. On parvient actuellement à fabriquer des verres d’une très grande homogé- néilé. D'autre part, l'art de tailler des faces planes est arrivé à une extrême perfeclion : quandil s’agit de faces de quelques centimètres de côté seule- ment, on obtient leur planéilé sans peine à moins d'une frange. L'égalité des angles et le parallélisme des arêtes peuvent être réalisés à 1° près assez facilement. Cela suffit pour avoir des images nettes avec des lunettes ne grossissant pas plus de 60 à 70 fois. Il est aisé de voir, en effet, que, dans ces limites, les dispersions résultant de ces deux der- nières erreurs du prisme sont négligeables. Quant à l'angle 2) mesuré par un prisme dont les faces réfléchissantes ne font pas exactement un angle de 60°, il est un peu différent de 120° et, de plus, il varie avec les angles d'incidence; mais, si l'erreur de l'angle À ne dépasse pas 1', l'angle 22 peut encore être considéré comme constant, pourvu que les angles d'incidence ne dépassent pas 2°. On pouvait donc, avec des lunettes d'un grossissement au moins égal à celui des luneltes méridiennes portalives, se servir de prismes pour mesurer un angle constant d'environ 120° entre les rayons directs et les rayons réfléchis sur le bain de mer- cure, issus d’une même étoile, à la condition de placer la face d’émergence BC à peu près verticale, ce qui, on l'a vu plus haut, est la position préférable pour la commodité de l'observation. Dès lors, il suffisait de monter un prisme de ce genre devant l'objectif d’une lunette, de telle sorte qu'un rayon lumineux, partant d'un point de l'arête À normalement à cette arêle et contenu dans le plan bisecteur de l'angle dièdre A,, vienne passer à peu près par le centre du diaphragme situé dans le plan focal principal de l'objectif, pour constituer l'appareil de mesure. En effet, en plaçant cet appa- reil de manière que l’arêle À soit normale aux rayons incidents directs et réfléchis sur le bain de mercure issus d'une même étoile, et que le plan bissecteur de l'angle À soit horizontal, les deux images viennent coïncider dans le voisinage du dents est égal à 2h; réciproquement, si les images directe et réfléchie d’une même étoile coïncident à peu près au centre du champ, c'est que les rayons sur AC et AB sont parallèles entre eux, très sensi- blement normaux à l’arêle À et parallèles au plan bissecteur de l'angle À, par conséquent que l'inci- dence des rayons tels que LI, L'[' est à peu près normale, qu'ils sont assez exactement perpendicu- laires à l'arête À et que leur angle est égal à 2. Pour permettre de diriger facilement l'appareil de mesure dans un azimut quelconque, il n'y avait | qu’à le fixer, comme la partie supérieure d’un théodolite, sur une fourrure mobile autour d'un centre du champ lorsque l'angle des rayons inci- tels que LI, l'L' réfléchis à l'intérieur du prisme PP | | | A. CLAUDE er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE À PRISME 1077 axe verlical porté par trois vis calantes et muni d'un cercle azimulal. Le réglage de la position de la lunette par rapport à l’axe vertical, étant effectué dans un certain azimut, se maintient lorsqu'on fait pivoter l'appareil, si l'axe est nivelé. Mais cela ue suffisait pas pour arriver à observer aussi rapidement avec cet instrument qu'avec le théodolite. De même que, dans ce dernier, le niveau qui sert à repérer la projection du zénith instru- mental sur le plan de visée par rapport à la ver- ticale tourne avec la lunette, il fallait, dans le nouvel instrument, entrainer le bain de mercure avec surface parfaitement horizontale et un amortisse- ment suffisant pour qu’on puisse placer cet horizon à mercure sur un support mobile. L'instrument ainsi concu répondait à toutes les condilions exigées pour devenir un instrument de hauteurs égales parfait : 1° La constance r igoureuse de la hauteur appa- rente observée élait assurée par l'emploi du bain de mercure et d'un appareil de mesure invariable ; 2° La haute précision des observations était cer- taine, puisque l'appareil admettait un grossisse- et que ce ment de lunette d'environ 65 chiffre RE — UT UN HULL Te = a SE: 1 1 È \ 4 Boop HE UT Fig. 2. — Astrolabe à prisme Claude et Driencourt pour la mesure des latitudes et la détermination de l'heure Ci I : à par la méthode des hauteurs égales. l'appareil de mesure, de façon à n'avoir pas, à chaque observation, à le déplacer, à-régler sa posi- tion et à le niveler. On ne pouvait songer, dans ces conditions, à faire usage du bain de mercure ordi- naire, dont les oscillations sont beaucoup (rop pro- longées; il était nécessaire d’avoir recours au bain de mercure amalgamé. Dans celui-ci, le mercure, en s'amalgamant avec le cuivre rouge qui forme le fond de la cuvette, le mouille et devient en même temps légèrement päteux. Les mouvements que causent les oscillations entrainent des frottements internes et sur le fond, qui ont pour effet d’éteindre très rapidement les oscillations. L'amortissement est d'autant plus énergique que l'épaisseur de la couche de mercure est plus faible; mais, si on la diminue trop, on a une surface qui n’est plus hori- zontale. Par tâälonnements, on détermine aisément l'épaisseur qui convient pour obtenir à la fois une se trouvait doublé par suile du mode d’obser- valion ; 3° Enfin, la rapidité des observations, jointe à possibililé de à la prendre des étoiles d'éclat assez de du champ et de la commodité d’obser- vation, devait permettre d'obtenir un grand nombre d'observations dans un temps très court. faible en raison du grossissement de la lunette, l'obscurité S 3. — Description de l'instrument. C'est à M. Vion que revient l'honneur d’avoir exécuté les premiers instruments d’après les plans et les indications qui lui ont été fournis. Le mo- dèle qu'il construit se compose de trois parties : l'astrolabe à prisme proprement dit, le support et le bain de mercure. a) L'astrolabe à prisme proprement dit com- prend la lunette avec son prisme, un axe verlical 1078 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME porté par trois vis calantes sur lequel elle est mon- tée perpendiculairement, un cercle azimulai avec un index, une boussole et un niveau. Le prisme à 55 millimètres de côté de section. Il est fixé sur une monture qui emboîte comme un manchon le bout du tube de ïa lunette. Une gou- pille, sur laquelle vient buter une vis réglable portée par le manchon lorsqu'on fait tourner celui-ci autour de l'axe de la lunette, indique la position pour laquelle l'arête du prisme est perpendiculaire à l'axe vertical. En outre, trois couples de vis, for- més chacun d’une vis de serrage et d'une vis de butée, sont disposés dans la monture pour per- meltre de donner au prisme de petits mouvements de rotation autour d'une normale au plan bissec- teur de l'angle dièdre antérieur et d'une parallèle aux arêtes. La lunette à un objectif de 42 millimètres d'ou- verture libre et d'environ 40 centimètres de dis- tance focale. Elle n’a pas de réticule; son axe op- tique est défini avec une précision suffisante par le centre du diaphragme placé dans le plan focal principal et le centre optique de l’objectif. L'ocu- laire employé donne un grossissement de 65 et le champ est de 28". Pour le transport, cette lunette se décompose en deux parties, qui rentrent l'une dans l’autre. La moitié côté objectif est fixée dans une gouttière portée par la douille qui emboîte l'axe vertical : un système de réglage permet de faire varier légèrement l’inclinaison de la goultière sur la douille, afin de parfaire la perpendicularité de l'axe optique et de l'axe vertical. Un cercle azimu- tal, centré sur cetaxe, autour duquel il peut tourner à frotlement dur, porte une division en degrés sur laquelle vient affleurer le trait (index) de l'alidade. Ce cercle, qui servait primitivement de cercle de calage, n'est plus utilisé dans l'instrument complet que pour obtenir le petit angle dont on est souvent obligé, au moment d'une observation, de faire tourner la lunetle par rapport à sa position nor- male pour amener les images à coïncider au centre du champ; il pourrait donc être remplacé par un secteur de quelques degrés. Une boussole, avec cercle divisé en degrés pour l'orientation approximative de la lunette au début des observations, est fixée sur le tube même dela lunette, ainsi que le niveau sphérique destiné au nivellement de l'axe vertical. D) Cet appareil est placé, avec le bain de mercure, sur un plateau horizontal mobile autour d'un axe vertical porté par trois vis calantes qui constitue le support. Les vis calantes de l'astrolabe sont placées de manière que deux d’entre elles se trouvent à gauche sur une ligne parallèle à la lunette conve- nablement orientée par rapport au bain de mer- cure, de manière qu'on puisse, en agissant sur ces vis en sens contraire, rectifier au besoin l’horizon- talité de l’axe optique, et, en manœuvrant la troi- sième seule au moment d’une observation, amener les deux images à passer l’une sur l'autre. Un dis- positif assez simple maintient les vis en place sur le plateau, tout en les laissant libres de tourner, et empêche que l’astrolabe ne puisse êlre renversé. Un grand cercle azimutal, centré sur l'axe verlical du support et mobile à frottement doux autour de lui, porte une division en degrés sur laquelle vient affleurer l'index de l’alidade qu’entraine le plateau. Une pince permet d’immobiliser le cercle lorsqu'il est orienté. Un niveau sphérique est fixé sur le plateau pour le nivellement de l'axe. c) Le bain de mercure, de forme circulaire, est creusé dans une épaisse plaque de cuivre rouge. Le fond est une calotte sphérique dont la flèche ne dépasse guère un millimètre au centre. Les bords sont parfaitement dressés; ils forment une arèle vive bien plane, à l'extérieur de laquelle se trouve une rigole destinée à recevoir le mercure en excès. Le bain repose sur le plateau du support par trois vis réglées de telle sorte que le plan des bords soit horizontal lorsque l'axe est vertical. Un abri ävec chicanes intérieures et percé de deux ouverturés pour laisser passer les rayons, se fixe sgalement sur le plateau; il protège assez bien du vent pour qu'on n'ait pas besoin de fermer les ouvertures avec des glaces comme dans l'horizon artificiel ordinaire. : Outre ces trois parties, l'instrument comprend un pied à trois branches, en tout semblable aux pieds des théodolites ordinaires, qui est destiné à recevoir le support. Leur liaison est assurée par une tige filetée à ressort qui se visse dans la masse centrale des trois bras du support. L'instrument lout entier, dans la construction duquelil entre beaucoup d'aluminium, est renfermé dans trois boîles : son poids ne dépasse guère celui d’un théodolité de moyenne dimension. d) Le réglage des différentes parties n'offre au- cune difficullé pour un constructeur. La seule opé- ralion qui demande à être faite avec un peu de précision est celle qui consiste à rendre l’arête an- térieure du prisme normale à l’axe oplique, ou plus exactement l'axe optique parallèle au plan des rayons émergents provenant des rayons incidents normaux à l’arête. On y parvient très simplement en opérant par autocollimation sur les faces réflé- chissantes du prisme, comme on le fait avec la lunetle méridienne sur le bain de mercure pour le pointé nadiral”. On emploie pour cela un oculaire de Gauss d’un grossissement beaucoup plus faible que celui de l’oculaire d'observation, afin de rendre ! Cette idée ingénieuse nous a été suggérée par M. Favé. PRE PP A. CLAUDE cer L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME l'éclairage du champ plus facile. Comme l'angle que mesure le prisme, lorsqu'on le fait pivoter devant la lunette autour d'un axe perpendiculaire au plan bissecteur de l'angle A, passe par un maximum lorsque l'arête est normale à l'axe optique, ce réglage n'exige pas une grande préci- sion. Néanmoins, on l’effectue aussi exactement que possible : on a alors une bande de 2',5, de part et d'autre de la verticale du centre du champ, dans laquelle on peut amener les images à coïncider Sans avoir à craindre d'erreur appréciable. $S 4. — Mise en station de l'instrument. Procédé d'observation. L'instrument peut servir à déterminer la lati- tude et l'heure en Lous les points où une station au théodolite est possible ; il ne réclame même pas un sol aussi stable. Sa mise en station est Lout à fait analogue, sauf qu'il y a deux nivellements à faire au lieu d’un. La préparation du bain de mer- cure demande un peu de soin. Il est particulière- ment avantageux, pour obtenir un amortissement énergique, d'avoir un meénisque concave; il faut pour cela que la cuvette soil bien amalgamée et que la surface du bain reste un peu au-dessous des bords de la cuvette. Lorsque la surface est conve- nablement nettoyée, on met l'abri en place. On oriente la lunette par rapport au bain de manière que le prisme, vu par réflexion dans le bain, occupe le milieu de l'ouverture : c’est sa position normale. On la repère sur le cercle azimutal de l’astrolabe qu'on met à zéro. Il ne reste alors, pour achever la mise en station, qu'à orienter le cercle azimutal du support ou cercle de calage. Cette orientation s'ob- tient d'abord approximativement à l'aide de la boussole; on la parfait en observant une éloile brillante dont on connaît l’azimut au moment de son passage au cercle de hauteur. Toutes ces opérations sont très rapides et ne demandent que quelques minutes. Pour observer une étoile dont on a calculé d'avance l'azimut de passage Z, on fait tourner le plateau du support jusqu'à ce que son index marque la division Z sur le cercle de calage. L’ins- trument est ainsi orienté, c'est-à-dire que les deux images doivent se présenter dans le champ avant l'instant de leur conjonction si l'azimut est exact. L'observalion consisle, comme avec le sextant et l'horizon artificiel, à amener les images direcle et réfléchie à passer, dans la partie centrale du champ, non pas précisément l'une sur l’autre, mais l’une à côté de l’autre, juste assez près pour que les images restent distinctes, et à noter l'instant où elles se trouvent à la même hauteur. On se sert pour cela de la vis calante de l’astrolabe à prisme située à droite de l'observateur. Gràce à l'indépendance des 1079 deux axes du support et de l’astrolabe à prisme, cette manœuvre ne provoque aucune oscillation à la surface du bain; elle peut donc être faite jusqu'au moment de l'observation sans qu'on ait à craindre de troubler l’image réfléchie. C'est là un grand avantage, car de la distance à laquelle on fait passer les deux images l'une de l'autre dépend en grande partie la précision de l'observation. La lunette restant horizontale, l'observateur peut s'asseoir et suivre ainsi commodément la marche des images en hauteur, ce qui contribue à augmenter encore cette précision. L'opération de calage et l'observation d’une étoile à marche rapide (étoile horaire) ne demandent pas plus d'une minute. Avec une liste de calages assez complète, on peut, en une heure, par temps clair, observer trente à quarante étoiles convenablement réparties dans les différentes directions azimutales. La vitesse d'observation est ainsi quadruple de celle qu’on peut atteindre avec le théodolite. $ 5. — Catalogues d'étoiles. Préparation des observations. Lorsque le ciel est clair, l'instrument décrit ci-dessus permet d'observer facilement les étoiles de septième grandeur. Le nombre des éloiles fournies par les catalogues en deçà de celte limite entre des parallèles distants de 60°, nombre qui représente celui des étoiles observables en un point du parallèle moyen, est considérable lorsque ce point est voisin de l'équaleur; il diminue au fur et à mesure qu'on s'en écarle, mais resle encore très grand lorsque la latitude du lieu d'observation est inférieure à 60°; au delà seulement, il commence à diminuer rapidement jusquà devenir nul aux pôles. Il suffit, même dans les régions polaires, pour faire le point sur la sphère céleste dans le temps durant lequel les variations de marche d'un bon compteur de temps peuvent être considérées comme négligeables. Toutefois, si l’on prenait &u hasard dans les étoiles observables, on s'exposerait à de longues, pénibles et souvent infructueuses recherches dans les catalogues pour trouver les positions exactes. D'autre part, si l’on ne dispose pas d'autre cata- logue que celui des éloiles fondamentales de Newcomb, on peut se trouver gêné, à de certaines heures, par la pénurie d’éloiles, dans l'hémisphère sud principalement. Il était donc: indispensable, pour rendre l'usage de l'instrument pratique à toutes les latitudes, d’avoir un catalogue réunissant toutes les étoiles jusqu'à la septième grandeur inclusivement, dont les mouvements propres paraissent déterminés avec assez d'exactitude. Pour l'obtenir, nous nous sommes adressés à un astro- nome de l'Observatoire de Paris, M. J. Bossert, 1080 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE À PRISME dont la grande compétence en ces matières est bien connue. M. Bossert, à qui nous sommes heureux de témoigner ici notre reconnaissance, n’a pas hésité à entreprendre cet énorme travail. Dans son Cataloque d'étoiles brillantes qui est sur le point de paraître !, il a pu réunir 3.800 étoiles réparties le mieux possible dons les différentes zones. Les étoiles y sont rangées par zones de 1° de distance polaire et, dans chaque zone, par ordre d’ascension droite, en vue de faciliter la préparation des observalions à l'astrolabe à prisme. Avec ce recueil, on sera désormais assuré de trouver assez d'étoiles pour faire son point très convenablement en quelque lieu de la Terre que l’on se trouve et l'on ne sera plus exposé à prendre des étoiles dont les positions sont mal déterminées. Pour achever de rendre l'usage de l'instrument tout à fait pratique, il fallait, en outre, simplifier la préparation des observations : car le caleul des azimuts de calage et des heures de passage demande beaucoup de temps si le nombre des étoiles est un peu grand. L'emploi d'un abaque pouvait seul per- mettre de réduire au minimum le temps de prépa- ration. Le très bel Abaque du point à la mer de MM. Favé el Rollet de l’isle, qui représente 1/8 de la sphère dans le système de projection dit de la carte plate, élait celui qui résolvait le mieux la question. Mais ses dimensions, nécessaires pour l'usage auquel il est destiné, et sa division en plusieurs feuilles rendaient son emploi peu com- mode. Sur notre proposition, le Service hydrogra- phique de la Marine, qui avait été l'un des premiers à adopter l'astrolabe à prisme, fit graver une réduction, à une échelle et sous une forme appro- priées, de la partie de cet abaque qui représente la partie de la sphère comprise entre les cercles paral- lèles au méridien distants de celui-ci de 30°. La courbe transformée du petit cercle de 30° de dis- tance zénithale est tracée à part sur un transparent avec les divisions azimutales de degré en degré. En l’appliquant sur l’abaque de manière que les deux méridiens coïncident et que le centre se trouve sur le point qui correspond à la latitude approchée du lieu, on lit instantanément l'azimut et l'angle horaire de l’astre en fonction de sa distance polaire, au moment où sa hauleur atteint 60° soit à l’est, soit à l’ouest du méridien. Cet abaque réduit permet également d'identifier une étoile inconnue observée. Dans le voisinage du méridien, la courbe du transparent coupe mal les cercles de distance polaire, en sorte que, avec cel abaque seul, on était encore obligé de calculer lazimut de calage des étoiles observables à moins de 20° du méridien. ! Librairie Gauthier-Villars, 55, quai des Grands-Augus- tins, Paris. M. le lieutenant de vaisseau Perret, professeur à l'Ecole navale, vient de combler cette lacune au moyen de deux nomograinmes à points alignés, le premier pour les lalitudes inférieures à 60°, le. second pour les latitudes plus élevées, qui donnent l’azimut avec loule la précision nécessaire jusqu'à 4° du méridien lorsqu'on connait la latitude avec assez d’'exactitude. Ces deux nomogrammes sont actuel- lement en publication au Service hydrographique‘. Connaissant les angles horaires des passages d'une étoile au petit cercle de 30° de distance zéni- thale et son ascension droite, on en déduit les heures sidérales des passages. On n'a plus alors qu'à dresser une liste des calages et heures sidé- rales correspondantes rangées par ordre. Si ces heures étaient suffisamment espacées, on n'aurait qu'à observer toutes les étoiles dans l’ordre de la liste. Mais, en général, on est obligé de faire un choix, surtout si l’on s'est servi d’un catalogue assez complet. On à vu, dans la première partie”, l'imporlance que présente, pour la détermination rationnelle du point à adopter, la connaissance des poids des droites de hauteur. Cette connaissance n'est pas moins utile pour la préparation des obser- vations, lorsqu'on à des éloiles en nombre sura- bondant, pour réparlir convenablement celles à observer dans les différentes régions azimutales : de la mauière dont cette réparlition a été faite dépend, en effet, la plus ou moins bonne détermi- nation du cercle tangent aux droites de hauteur approchées. En principe, ce cercle doit être égale- ment bien déterminé dans toutes les directions. Il faut, pour cela, que la densité des étoiles à observer dans une région azimutale donnée soit inversement proportionnelle au poids moyen des droites de hauteur fournies par les étoiles de cette région. Il n'est pas toujours possible de suivre cette règle, qui conduit, dans le voisinage de l’équaleur et pour G— 65 (ch. II, $ 7, 1"° partie), à prendre neuf fois plus d'étoiles horaires que de circomméridiennes; car il faut toujours avoir des circomméridiennes au Nord et au Sud et l’on ne peut pas toujours inter- caler assez d'horaires, dans le temps relativement court durant lequel les varialions de marche d’un chronomètre sont négligeables, pour satisfaire à la condition énoncée. Mais ce qu'il importe surtout d'avoir en vue dans la préparation, c’est la bonne détermination du cercle tangent aux droites de hauteur approchées. On peut être tenté, lorsqu'on ne cherche que la latitude par exemple, d'exagérer le nombre des 1 L'abaque général de préparation avec le transparent est mis en vente au Service hydrographique sous le n° S.I. 27. Les deux nomogrammes de M. Perret y seront joints dès que la gravure en sera terminée. ? Revue du 30 novembre 1905. A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME 1081 circomméridiennes aux dépens de celui des étoiles des autres régions et de celui des horaires en par- ticulier. Ce serait une erreur, car si l’x du centre n'est pas déterminé exactement, l'y sera faussé en général par cela même, le cercle devant être tangent aux deux droites de latitude synthétisant celles au NordetauSud,etcesdeux droiles n'étant pas généra- lement parallèles à l'axe des x. Inversement, si, con- naissant très exactement la latitude, on se propose de déterminer l'heure, il faut se garder de sup- primer les circomméridiennes, qui donneront le rayon d &, du cercle tangent à peu près indépen- damment des variations de marche du compteur de temps dans le cours des observations, ce qui permettra de vérifier jusqu'à un certain point si la marche a été régulière et égale à celle adoptée pour le calcul. Il nous parait inutile d'insister plus longuement sur cette question : une simple dis- cussion sur un exemple concret pour le tracé gra- phique du cercle tangent le plus probable suffit pour se rendre compte de la nécessilé d'avoir _ recours à la méthode des hauteurs égales dans tous les cas où l’on veut obtenir le maximum de précision soit pour l'heure, soit pour la latitude, et par conséquent de faire un choix raisonné des étoiles à observer. $ 6. — Précision des observations et des résultats. L'expression de l'erreur probable d'une droite de hauteur, déduile de la formule empirique (18) du premier article, est encore, comme pour le sextant : (0,07 sin} sin Z}? + Es) É Nous avons donné (1® partie, ch. IT, $ 7) les valeurs + 0",37 : + 1",11 de celte expression à l'équateur pour 2G — 130, qui correspondent à des étoiles observées de du méridien et du premier vertical. L'expérience montre que la précision des observations à l’astrolabe à prisme est à peu près celle qu'indique la formule. On en à la preuve très simplement en ce qui concerne les circomméri- diennes en observant une de ces étoiles à ses deux passages : la différence des distances des deux droites de hauteur au point adopté, différence qui - est à peu près indépendante de l'erreur de position de l'éloile, est toujours de l'ordre de d£y2 lorsque les deux observations sont marquées bonnes. Pour les horaires, la vérification est moins facile à faire, car, pour avoir un résultat indépendant de | l'erreur de position, il faudrait encore observer les ù + deux passages d'une même étoile ; mais leur inter- - valle est toujours supérieur à la durée d’une série. Jusqu'ici les déterminations avec l’astrolabe à prisme n'ont guère porté que sur la position du énith à une heure donnée d'un chronomètre; non Re rer REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. que ce modèle ne puisse déjà servir à rectifier des positions d'étoiles, — nous avons eu maintes fois l’occasion de constater des écarts anormaux, d’allure systématique, en observant une même étoile à ses deux passages ou au même passage à des jours différents, écarts qui ne peuvent être attribués qu'à des erreurs sur les posilions des étoiles, — mais parce que nous avions en vue un instrument de plus grand modèle avec un grossissement beaucoup plus fort, dont il sera question un peu plus loin. Les observalions que nous avons faites en 1901- 1902 à l'Observatoire du Bureau des Longitudes au Parc de Montsouris, en nous plaçant dans les con- dilions mêmes où l'on se trouve en cours de cam- pagne, c’est-à-dire avec l'astrolabe placé sur son trépied, en employant un compteur comparé avant et après à une pendule pour avoir sa marche moyenne, et en opérant par vents lrès variables et même par forte brise de N.-E., nous ont toujours donné pour la latitude des chiffres qui ne diffèrent pas de plus de 0",3, et dont la moyenne s'écarte de 0",2 seulement de celle qu'on obtient avec un cerele méridien portatif de Brunner à 4 microscopes par un grand nombre de soirées. Pour l'heure, il n’a pas été fait de comparaison directe avec la lunette méridienne. Cette comparaison était, du reste, superflue : l'inspection des graphiques suffit à prouver que les points adoptés ne sont guère moins bien déterminés dans le sens E.-0. que dans le sens N.-S., c’est-à-dire que l'heure est obtenue à moins de 0,05”. L'expérience ayant montré qu'on ne pouvait guère compter sur la marche régulière du compieur pendant plus d'une heure dans les conditions où nous opérions, nos séries ne dé- passent généralement pas celte durée; elles com- prennent en moyenne une trentaine d'étoiles. Dans la campagne hydrographique qu'ils ont faite en 1903-04 sur les côtes de Madagascar et à la Réunion, MM. Driencourt et Cot ont obtenu, toujours par des séries d’une heure, des résultats d'une précision tout à fait comparable, quoique, en raison de la pénurie d'étoiles bien déterminées, ils n'aient pu observer que vingt éloiles en moyenne par série * D'autres observateurs, opérant dans différents pays, sont arrivés à la même précision. On peut donc affirmer, sans crainte d'exagération, qu'un bon observaleur, en une heure, par nuit claire, 1 Nous pourrions donner ici les erreurs probables des résultats tant pour la latitude que pour les heures: mais, à la méthode des moindres carrés, nous avons toujours pré- féré la construction graphique à grande échelle (2 ou 3 mil- limètres pour 1"), qui est beaucoup plus rapide et toujours suffisante, et, aux erreurs probables, nous substituons des chiffres “e ‘forts qui représentent le maximum d'indéci- sion sur la position du centre du cercle. 2 Voir les C. R. Ac. Sc., séance du 30 janvier 1905. 24* 1082 A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME avec un choix convenable d'étoiles, détermine au moyen de l’astrolabe à prisme la latitude à moins es ; - 0°,05 de 0”,5, et l'heure à moins de —— + sin À $ 7. — Détermination de l'heure seule. Astrolabe petit modèle. Lorsqu'on à besoin de déterminer l'heure fré- quemment au mème point etqu'on ne recherche pas une extrême précision, — c'est le cas des obser- valoires chronométriques par exemple, l'astro- labe à prisme est encore l'instrument qui donne le maximum d’exactitude dans le minimum de temps. On dresse une table des angles horaires, des azimuts et de leurs dérivées, pour les distances polaires de 40’ en 10° de À — 28° à À + 28° par exemple, correspondant à la colatitude du point et à la distance zénilthale vraie que mesure le prisme dans les conditions de réfraction moyenne. Une interpolation donne l'angle horaire de la table pour la distance polaire d'une étoile. On en déduit pres- que immédiatement l’abscisse du point d'inter- section de la droite de hauteur avec l'axe des x et son azimut : il ne faut pas plus de deux minutes pour calculer une étoile et tracer sa droile de hau- teur. Trois ou quatre étoiles à l'Est et autant à l'Ouest suffisent pour déterminer le cercle dont le centre est sur 0x, et obtenir la correction de l'état approché du compteur de temps à moins de 0°,1. On peut même, si l’on a soin de choisir des éloiles assez près du premier vertical, se dispenser de construire les droites de hauteur et prendre tout simplement la moyenne des étals fournis par les étoiles à l'Est, puis la moyenne de ceux que don- nent les étoiles à l'Ouest, et enfin la moyenne de ces deux moyennes. Nous avons montré, dans la première partie, qu'il est inutile, pour cetle détermination seule, d’avoir un fort grossissement. On peut faire usage, dans ce cas, d'un astrolabe petit modèle, qui est une réduction du modèle décrit plus haut. La lunette a un grossissement de 20. L'erreur pro- bable d’une droile de hauteur fournie par une observation faite avec cet instrument à l'équateur, dans le premier vertical, est seulement de +1",6; il est donc très suffisant pour obtenir l'heure. Dans le voisinage du méridien, l'erreur probable d'une observation est relativement plus forte ; elle est de —+1",92. On voit néanmoins que ce très petit ins- trument, qui tient tout entier dans une seule boîte, permet encore d'obtenir les latitudes à 1", $ 8 — Instruments de M. Jobin. Depuis quelques mois, M. Jobin à entrepris à son tour la construction de l’astrolabe à prisme. Nous n'avons pas à faire ici l'éloge de l’éminent prisme par rapport à la lunette est simple pour les constructeur : tous les physiciens et les astronomes connaissent les merveilles d'optique qui sont sor- ües de ses ateliers. Personne, parmi eux, ne sera surpris d'apprendre que le modèle géodésique qu'il a créé réalise de nombreux perfectionnements, dont quelques-uns tout à fait essenti-ls. Nous ne pou- vons indiquer ici que les principaux. Occupons nous d’abord de l'instrument de me- sure, du prisme. On a vu plus haut que, pour le grossissement de 65, on peut se contenter de prismes assez imparfaits. M. Jobin construit des prismes qu'il appelle « exacts », et qui le sont en ce sens que l’homogénéité du verre n’est pas assez. parfaite pour qu'on puisse aller plus loin. Les faces sont planes à moins d’un quart de frange; quant aux angles et au parallélisme des arêtes, ils sont exacts à moins de 2”; et ces qualités se main- tiennent sur le prisme mis en place, grâce au soin avec lequel il est monté. N'étaient leurs dimen- sions, qui obligent à limiter l'ouverture de l'objectif et, par suite, le grossissement de la lunette, de tels prismes pourraient supporter un grossissement de beaucoup supérieur à celui qu'on emploie, et qui est d'environ 75. Mais, déjà avec ce grossisse- ment, les images gagnent en nettelé d'une façon très appréciable. En second lieu, l'observation dans un champ sombre à un inconvénient lorsqu'on doit observer dans une région déterminée du champ, comme c'est le cas ici. Les bords se distinguent très diffi- cilement lorsque la nuit est noire, et l'on apprécie mal le milieu du champ, ce qui peut entrainer des erreurs sur la hauleur mesurée. Pour y remédier, M. Jobin place un réticule formé, comme celui du sextant, de quatre fils en croix qui limitent la région du champ dans laquelle on doit amener les. images à coïncider, et il éclaire ce réticule latéra- lement par une ouverture pratiquée dans la lunette, en sorte qu'il apparaît brillant sur fond noir. Cet. éclairage peut être réglé à volonté. Ce perfection- nement esttrès important; il évitera bien des petites erreurs aux personnes qui n’ont pas l'habitude d'ob- server dans un champ sombre. Un perfectionnement non moins imporlant esb celui qui a été apporté dans la monture du prisme el dans le dispositif pour l’autocollimation. Avec le: modèle ordinaire, si le réglage de la position du constructeur, il ne l’est pas pour l'observateur. Celui-ci peut bien constater avec l'oculaire de Gauss que le prisme est déréglé; il arrive difficile ment à le remettre exactement d’aplomb. En outre, coume la lunette n’a pas de réticule, il faut admettre que le reglage effectué avec l’oculaire de Gauss subsiste avec l'oculaire d'observation, autrement» dit que les deux oculaires sont exactement centrés. A. CLAUDE Er L. DRIENCOURT — L'ASTROLABE A PRISME 1083 Dans le modèle de M. Jobin, le montage adopté est stable : le prisme, enlevé complètementetremis dans son logement, relombe à la même place. L'autocollimalion se fait avec un viseur spécial en éclairant les fils du réticule de la lunette, ce qui offre toutes garanties. Le réglage s'obtient à l'aide de trois vis calantes avec ressorts placées dans la monture et peut êlre effectué par un observateur quelconque; on bloque ensuite le tout avec les trois vis antagonistes. De plus, le prisme et sa monture, au lieu d’être reliés à la lunette par un simple manchon emboitant le bout du tube, sont portés par un long lube qui chausse dans toute sa longueur le tube de la lunelte et assure une liaison et un cen- trage parfaits. Il convient de signaler encore la substilution à l'oculaire positif très grossissant, dont la faible ouverture est fort incommode avec un champ sombre, d'un microscope avec un jeu d'oculaires de grossissements différents. Outre ce modèle géodésique, M. Jobin a établi les plans d'un petit modèle plus réduit encore que le pelit modèle ordinaire et dont la lunette aura un grossissement variant de 20 à 30. Enfin, il vient d'exécuter un prisme de 65 milli- mètres de côté de section, qui supporte un grossis- sement de 130 et même de 150, c'est-à-dire qui permet d'avoir une vitesse relative des images égale à 260 ou 300 fois celle d’une image simple. L'erreur probable d'une observation de circomméridienne très proche du méridien descend avec ces chiffres à + 0"18et+0",16. Un instrument de grand modèle, avec ces données comme caractéristiques, est ac- tuellement en construction; il sera encore facile- ment transportable etse placera sur un pied comme le modèle décrit ci-dessus. Il pourra être employé comme instrument d'observatoire fixe outemporaire pour la détermination des positions des astres et pour certaines autres déterminations. IV. — CoxcLusions. En résumé, on peut dire aujourd’hui qu'il existe un instrumentdehauteurs égales, qui est l’astrolabe à prisme avec son support et son bain de mercure. Les résultats obtenus jusqu'ici prouvent à la fois l'excellence de la méthode et l’exacte adaptation de son instrument. Avec lui, le problème de l’Astro- nomie de position comporte le minimum d'in- connues à déterminer, et, jusqu'à ce que l'on ait trouvé, pour remplacer le verre du prisme, une substance pouvant être considérée comme tout à fait invariable,aueun instrument ne peut permettre de résoudre le problème d'une facon plus simple. Avec le modèle géodésique courant, la précision des déterminations est déjà supérieure à celle de tous les instruments méridiens. Mais, alors que ceux-ci sont lourds et encombrants, qu'ils exigent toute une installation de piliers et de cabanes, qu'ils nécessitent plusieurs soirées complètes pour la détermination d'une latitude et une au moins pour l'heure, l’autre ne pèse pas plus qu'un théo- dolite ordinaire, il s'installe comme lui sur un pied à Lrois branches n'importe où en quelques minutes, el, en une heure d'observations, avec beaucoup moins de fatigue puisque l'observateur est assis et n'a qu'à lire son compteur de temps, il permet d'obtenir à la fois l'heure et la latilude, ainsi qu'un lieu géométrique de chacune des étoiles inconnues observées. L'astrolabe à prisme s'impose donc désormais comme l'instrument indispensable pour la déter- mination des positions des étoiles, aussi bien que pour la détermination de la latitude et de l'heure, dans toutes les grandes opérations de géodésie et de géographie mathématique; son transport facile, son installation simple et rapide permettront de l’'employer en beaucoup de points où l'on serait obligé de renoncer au cercle méridien faute de place, de temps ou d’argent.Ces mêmes qualités le recommandent aux explorateurs, qui ne pourront plus désormais invoquer la nécessité d'opérer vite et de réduire au minimum le poids et le volume de l'instrument comme excuse de l'insuffisance et du peu de précision de leurs observations, ainsi qu'il est arrivé trop souvent’. A. Claude, Attaché à l'Observatoire du Bureau des Longitudes. L. Driencourt, Ingénieur bhydrographe en chef de la Marine. 1 Un ouvrage intitulé : Deseription et usage de l’astrolabe à prisme est en ce moment en publication à la librairie Gauthier-Villars, 55, quai des Grands-Augustins. Pour mémoire, signalons à la même librairie : le Catalogue par zones des Etoiles brillantes, de M. J. Bossert, et au Ser- vice hydrographique, 13, rue de l'Université, l’'abaque général et les nomogrammes de préparation des observa- tions à l'astrolabe à prisme. Nous rappellerons, en outre, aux officiers et aux voya- geurs, qu'il existe au Pare de Montsouris un observatoire astronomique, celui du Bureau des Longitudes, où ils peuvent venir s'exercer aux observations astronomiques avec les divers instruments, notamment avec l'astrolabe à prisme. 108: D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL LES CONQUÊTES RÉCENTES DE LA BIOLOGIE DANS LE DOMAINE DU CHIMISME INTESTINAL L'étude du chimisme intestinal a fait, dans ces dix dernières années, des progrès si importants qu'ils semblent reléguer dans un lointain très reculé des notions qui, il y a dix ans à peine, constituaient le fond de nos connaissances sur cet important sujet. Nulle part ne se montre mieux la fécondité des résultats qu’on peut attendre de deux sciences très voisines, et, à vrai dire, confondues : la Physiologie et la Chimie biologique, lorsque leur évolution parallèle permet d'aborder avec le concours de l’une et de l'autre des problèmes que leur effort isolé n’eût pas résolu. Grâce aux travaux de Pawlow et de ses colla- borateurs, grâce aussi aux efforts de Starling et Bayliss en Angleterre, Délezenne, Gley, Camus en France, la Physiologie expérimentale a mis en œuvre des procédés nouveaux, et ces procédés ont permis de recueillir des données d'une précision inconnue jusqu'alors, en même temps qu'ils met- taient en évidence, d'une part, la collaboration des diverses sécrétions intestinales dans les phé- nomènes de la digestion et, d'autre part, la dé- pendance de l'activité de l'intestin par rapport aux actes psychiques. Par ailleurs, nos connaissances sur un des ali- ments fondamentaux, l’albumine, s'élargissaient singulièrement sous l'impulsion de Kossel, de Kuts- cher, de Fischer, d'Abderhalden * et de leurs élèves; 1 Conférence faite à l'Ecole du Service de Santé militaire de Lyon, le 28 juin 1905. M. le médecin-inspecteur Varzrarn, de l'Académie de Médecine, directeur de l'Ecole, a organisé un système de conférences qui, à côté ou en dehors du programme officiel de l'enseignement médical, ont pour but d'initier les élèves de l'Ecole à d'importantes questions d'actualité scientifique. C'est ainsi que, grâce à celte heureuse initiative, les sujets suivants ont été traités par divers professeurs de l'Univer- sité de Lyon pendant le cours de l'année scolaire 1904-1905, indépendamment de la leçon que nous reproduisons. Professeur Dérérgr, doyen de la Faculté des Sciences : « Les rapports de la nature géologiqu: du sol avec les sources et les nappes aquifères ». M. Rav, maître de conférences à la Faculté des Sciences : « La cellule végétale, sa biologie; les indications qu'elle peut fournir à la biologie animale ». Professeur Gouy, de la Faculté des Sciences : « 10 [Les Rayons cathodiques; 2° les Rayons Rœntgen; 3° le Radium et la radioactivité », 3 conférences. M. Vaxnev, maitre de conférences à la Faculté des Scien- ces : « Evolution de quelques Protozoaires parasites de l'homme. » Professeur Cuancéry, de la Faculté des Lettres : « 19 Le péril jaune; 2° Le peuple américain », 2 conférences. : Nous citerons ici une fois pour toutes le beau livre de PawLow, aujourd'hui classique : Le Travail des glandes digestives, traduction Pachon et Sabrazès, Paris, Masson. 3 Tous ces travaux sont répartis dans divers Mémoires elles devenaient susceptibles d'éclairer le chimisme des voies digestives. Par une heureuse fortune, de ces deux ordres de recherches, poursuivis séparé- ment, résulle un ensemble de faits qui se coordon- nent et que je me propose d'exposer ici. La génération médicale qui a précédé de quelques années celle qui est encore sur les bancs aurait pu résumer comme suit le gros œuvre de ses connais- sances sur le chimisme de l'intestin : 1° Les substances amylacées, partiellement trans- formées en maltose par le ferment salivaire, sont saccharifiées surtout par l'amylopsine du suc pan- créatique. Le maltose est ultérieurement scindé dans l'intestin en deux molécules de glucose im- médialement absorbables ; 29 L'influence simultanée, mais assez obscure, du suc pancréatique et de la bile émulsionne et sapo- nifie les corps gras, et assure leur passage à travers l'intestin, soit à l’état de savons alcalins, soit à l'état de fines gouttelettes de graisses; 3° Quant aux albumines, altaquées successive- ment par la pepsine chlorhydrique du suc gas- trique et la trypsine du suc pancréatique, elles sont transformées en un mélange de substances protéiques assez mal déterminées, qu'on confondait sous le nom d’albumoses, de peptones, ete.; 4 Le rôle de la bile n’était pas encore différencié avec une nelteté suffisante, et, d’ailleurs, tout n'a pas été dit sur le pouvoir digestif de cette sécrétion. A ces idées, justes dans leur ensemble, entachées cependant de quelques erreurs et d’imprécisions assez nombreuses, se ratlachaient le grand nom de Claude Bernard et le souvenir si honorable de Blondlot, de Schiff et d'auires classiques. Il était réservé à l'École physiologique de Péters- bourg, représentée par Pawlow et ses élèves : Lintwarew, Serdjukoff, Chigin, SchepowalnikofF, de découvrir de nouveaux procédés opératoires permeltant de suivre de plus près et d'étudier avec une précision plus pénétrante la digestion sur l'animal vivant. A l’ancienne fistule gastrique, qui fournissait à Blondlot, à Cl. Bernard et, à leur suite, à tant d’autres expérimentaleurs un suc impur mêlé de publiés au cours de ces dernières années dans la Zeitschrift für physiol. Chemie. D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL 1085 salive, de mucus œsophagien et de produits ali- mentaires plus ou moins digérés, Pawlow substitue la fistule avec œsophagolomie. L'œsophage vient s'ouvrir sur la face latérale du cou; l'estomac, pourvu d’une fistule et séparé par une ligature des voies digestives supérieures, donne, quand l'animal mange et rejelte les aliments par l'orifice cervical de l’æsophage, un suc gastrique très pur, dont la sécrétion a été provoquée par la vue ou la saveur des aliments (repas fictif). Pawlow a encore enrichi la technique d'un autre procédé : il taille aux dépens de l'estomac un lambeau dont il fait une sorte de cul-de-sac s'ou- vrant sur la paroi abdominale. Ce cul-de-sac est ménagé de telle facon qu'il ne communique pas avec la cavité gasitrique proprement dite, tout en conservant ses connexions vasculo-nerveuses. On a ainsi un pelit estomae, sorte de miroir du grand, puisqu'il fonctionne comme ce dernier, mais dont l'étude est extrèmement aisée, le petit estomac s'ouvrant à l’air libre. La Physiologie expérimentale doit au savant russe des perfectionnements tout aussi remar- quables touchant l'étude du suc pancréalique. On sail que l’ancien procédé de récolte de ce suc con- sistait à introduire, dans le canal de Wirsung mis à nu, une canule qui livrait rarement une quantité suffisance de suc. Autour de l’ampoule de Vater, Pawlow découpe un lambeau d’intestin : ce lam- beau, auquel est fixé le pancréas, est greffé sur la paroi abdominale de telle sorte que le canal de Wirsung vient s'ouvrir au dehors, la glande restée intacte ayant conservé l'intégrité de son fonction- nement physiologique. À la condition de prendre certaines précautions, le pancréas fournit en assez grande abondance un suc actif. Il ne faut pas croire, cependant, que ces brillants résullats aient été réalisés du premier coup. La lecture du livre de Pawiow donne la mesure des efforts d'ingéniosilé patiente qu'il a fallu développer pour atteindre le but. Le succès a tenu plus d’une fois à un accident fortuit dont le physiologiste russe a su tirer parti avec une incomparable maitrise. Il serait injuste, dans cet exposé, de passer sous silence les beaux lravaux de Délezenne ! sur l’ac- tion synergique des divers liquides ou produits organiques dans le mécanisme des réactions bio- chimiques. Ces recherches, qui sont des modèles de précision, ont conduit l’auteur à l'élaboration d'une méthode féconde dont les résultats sont pré- sents à l'esprit de tous. C'est gräce à sa technique que Délezenne à pu montrer la nécessité de l'in- terventlion du suc intestinal dans certains phéno- 1 Les travaux de Délezenne, cités plus loin avec quelques . détails, ont été publiés, pour La plupart, au C. R. de la Soc. de Bioi., en 1901 et 1902. mènes de la digestion pancréatique. Nous y revien- drons plus loin. Tandis que la Physiologie expérimentale ajoutait ainsi, aux ressources de sa technique, les acquisi- lions dont nous venons de parler, la Chimie biolo- gique abordait à son tour, à l’aide de nouveaux procédés, l'étude méthodique de la constitulion des albumines. Grâce à l'acide phospho-tungstique, qui sépare à l'état de précipités crislallins les acides diaminés de la masse plus considérable des corps monoaminés qui prennent naissance dans l'hydrolyse des matières albuminoïdes par les acides dilués et bouillants, grâce aux procédés imaginés par Fischer, Kossel et leurs élèves pour isoler les uns des autres les acides monoaminés, on a pu dédoubler la molécule protéique en dérivés plus simples, dont la plupart sont actuellement bien connus : ce sont l’arginine, guanidine de l'acide 4-è-diamino-valérique, l’histidine ou acide a-ami- no-B-imidazol-propionique, la lysine ou acide «-e-diamino-caproïque, la tyrosire, la leucine, l'acide amino-valérique, l’alanine, la phénylala- nine, le glycocolle, la proline ou acide pyrrolidine- carbonique, des acides bibasiques, tels que les acides aspartique et glutamique, etc. Enfin, l'emploi méthodique de certains sels, uti- lisés autrefois comme précipitants dans des con- ditions moins rigoureusement définies (sulfates d'’ammoniaque et de zinc), a permis à certains biochimistes de jeter quelque jour dans le groupe un peu confus des produits de la régression diges- tive des albumines (albumoses, peptones). Zunz et Proskauer ont fait, dans celte voie, quelques ten- tatives intéressantes. Ces préliminaires étaient indispensables pour comprendre quels avantages a recueillis des der- nières recherches la physiologie de la digestion, et par quelles voies se sont réalisés les progrès les plus récents. IT On sait depuis longtemps que la vue, le simple désir d’un aliment provoquent un afflux de salive et, nous pouvons ajouter aujourd'hui, de suc gas- trique. C’est ainsi que le chien œsophagotomisé, bien qu'il rejette par le cou tous les aliments ingurgilés par lui, sécrète, au cours de ce repas fielif, une assez grande quantité de suc gastrique. Par contre, la sécrétion ne se produira pas si, à l'insu de l'animal et en détournant son attention, on introduit par la fistule, dans son estomac, des morceaux de viande. L'estomac, non averti, ne réagit pas. La sécrétion gastrique obéit à des exci- talions de divers ordres : appétit, vue d’un aliment désiré, saveur, odeur, etc., el aussi, lorsque l'animal mange, contact des aliments avec la muqueuse de 1086 D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL l'estomac; certains produits (eau, extrait de viande) ont une action plus particulièrement favorable; c'est l'inverse pour d'autres, la graisse par exemple. Tant que l'estomac ne se vide pas dans le duo- dénum, ni la bile, ni le suc pancréatique ne s'écoulent dans l'intestin; mais, le pylore vient-il à livrer passage au contenu stomacal, la bile et le suc pancréatique apparaissent aussitôt. C'est l’aci- dité du chyme qui provoque l’activité sécréloire du pancréas, par un mécanisme que les travaux de Starling et Bayliss nous ont fait connaitre, et sur lequel nous reviendrons. A leur tour, les divers segments de l'intestin entrent en action quand le bol alimentaire imprégné de suc pancréatique ar- rive à leur contact : la muqueuse s'injecte, le suc intestinal s'écoule. Ce rôle d’excitant qui appar- tient au suc pancréatique a été bien mis en évi- dence par Pawlow. Un segment de l'intestin isolé par une fistule de Thiry ne fournit que peu de suc intestinal, inactif ou peu s’en faut. Si l’on introduit du suc pancréalique dans le segment ainsi isolé, le suc intestinal s'écoule. Seul, le suc pancréatique est capable, semble-t-il, de faire sécréter un suc intestinal doué de pouvoir digestif !. Les diverses portions de l’inteslin entrent donc en aclion les unes après les autres et les unes par les autres, le travail de l’une ayant pour consé- quence d’exciter l’activité de celle qui la suit. Dans son ensemble, l'appareil digestif est done compa- rable à une machine dont la mise en mouvement se propage de haut en bas comme par une série d'engrenages successifs, le (travail d’un segment de l'intestin étant conditionné par le travail du seg- ment qui le précède. Cette corrélation dans le travail des glandes di- gestives se complète d’une remarquable adaptation, à la fois qualitative et quantitative, des sécrétions de l'intestin et des glandes annexes à la nature et à la masse des matériaux qu'elles ont à digérer. Ainsi, comme l’ont montré Pawlow et ses élèves, pour une même variété d'aliments, et toutes choses égales d’ailleurs, la quantité de suc gastrique est proportionnelle au poids de l'aliment. A 100 gr. de viande correspondront, par exemple, 25 centi- mètres cubes de suc gastrique; à 200 grammes, 46 centimètres cubes; 106 centimètres cubes pour 400 grammes, etc. Si, à la viande, on substilue un autre aliment, le volume du suc sécrété aussi bien que la composition chimique subiront de notables variations. C’est ainsi qu'avec la viande Ja quantité de suc est maxima; il en est de même de la chlor- hydrie. Le pain provoque une sécrétion moins abondante et moins acide, mais plus riche en pep- 1 SawrrsGn : Secrétion du suc intestinal. Rousski Wratch, {. I, p. 200, 1902 (référé in Journ. de Physiol., &. AN. p. 751). sine. Avec le lait, tous ces éléments diminuent à la fois : volume, acidité, pouvoir digestif. Du reste, au cours de la digestion d'un même aliment, des varia- tions se produisent qui n'ont ni le même sens, ni la même intensité avec les divers matériaux ali- mentaires : le pouvoir digestif diminue rapidement avec la viande, plus lentement avec le pain; il augmente, au contraire, s'il s'agit du lait. Les courbes ne se superposent pas et, dans une cer- laine mesure, elles sont caractéristiques. Le suc pancréatique présente une souplesse d'adaptalion au moins égale à celle du suc gas- trique : c’est ainsi que le régime carné y fait pré- dominer la trypsine;: avec les hydrocarbonés, l'amylopsine abonde; au régime lacté correspond une production intense de stéapsine et, à la suite d'une ingestion prolongée de lactose, Weinland ‘ a même vu apparaitre la lactase, qui, normalement, n'existe pas dans le suc pancréatique. III La digestion de l'albumine commence dans l'estomac; mais le chimisme gastrique n’est pas, à beaucoup près, aussi connu qu'il le parait tout d’abord. Jusqu'à ces dernières années, on ne con- naissait guère de la pepsine que son pouvoir diges- if; on l'idenlifiait vaguement avec une matière protéique et l'on ne croyait pas que son activité chimique aliât plus loin que la formation des albu- moses et des peptones. On n’en est plus là aujour- d’hui. Pekelharing et M"° Schoumow-Simanowski, melltant en œuvre des sucs purs obtenus par la méthode de Pawlow, ont pu extraire, par refroidis- sement vers zéro, ou par simple dilution jusqu'à une teneur en HCI de 0,2 °/,,, une matière grisätre qui, recueillie par centrifugation, apparait formée de granulations amorphes, peu solubles dans l’eau pure, solubles dans l'eau salée ou acidulée. Cette matière a un pouvoir digestif très énergique et l'on est tenté de la considérer comme de la pepsine à peu près pure, bien qu'on ne soit pas en élat de le démontrer rigoureusement. La pepsine de Pekel- haring et de M"° Schoumow-Simanowski a la com- position d'une albumine sulfurée (1,16 °/, de soufre); elle contient aussi de peliles quantités de chlore, de fer et de phosphore. La présence, dans ses produits de dédoublement, de la xanthine et d'un pentose ne laisse guère de doute sur sa nature c'est très probablement un nucléo- protéide, comme beaucoup d'autres diastases, La pepsine agit dans un milieu où l'acide chlorhy= drique est primitivement libre à la façon de l'acide: 1 WeEINLanD : Zeits. f. Biol., t. XXXNIII, p. 16 et 60%; 1899, et t. XL, p. 386, 1900. D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL 1087 en solution aqueuse, ainsi que Frouin l'a établi avec le suc pur obtenu par la méthode de Pawlow. Mais, pendant la digeslion, l'acide se combine, au moins en partie, avec les matières alimentaires et les produits digérés : le rôle de l'acide dans ces combinaisons incomplètes, et peut-être tempo- raires, nous échappe à peu près complètement. Des notions exactes sur ce sujet éclaireraient sans aucun doule le mécanisme de la digestion gas- trique; elles seraient d’un grand secours dans l'interprétalion des données analytiques fournies par l'examen chimique du contenu stomacal; elles serviraient de guide à l’éliologie, encore si confuse, des troubles fonctionnels de l'estomac. Quel que soit le mécanisme du procès digestif, il reste à étudier la digestion elle-même, c’est-à- dire la nature des produits digérés. On croyait autrefois que l'estomac transformait les matières albuminoïdes en acide-albumines d’abord, puis en albumoses, enfin en peptones, considérées par la plupart des auteurs comme le terme ullime de la digestion gastrique. Cette manière de voir com- portail, sous sa rigueur apparente, un certain nombre d'idées erronées. En réalité, les mots d’acide-albumine,albumose, peptone, désignent des stades différents de la dissection moléculaire des albumines sous l'influence de la digestion, sans doute aussi des espèces chimiques; mais ces espèces, nous ne les avons pas isolées; elles ne sont déterminées que par des caractères arbitraires, et c'est bien à tort qu'on les rangerait parmi les substances définies. Quand on soumet, in vitro, à une digestion pep- sique du blanc d'œuf coagulé, on voit l’albumine se dissoudre lentement dans la liqueur acide: la solution perd peu à peu quelques-unes des réac- tions de précipitation les plus nettes qni servent à caractériser les albumines : c'est d'abord la chaleur et l'acide azotique, puis le ferrocyanure acétique, enfin le sulfate d’ammoniaque à saluralion, qui cessent de produire un trouble dans le liquide. L’albumine primitive s’est transformée en peptone, terme ultime de la digestion pepsique, aux yeux de la plupart des biochimistes, il y a quinze ou vingt ans. En soumettant cette théorie à une vérification expérimentale un peu serrée, on a été conduit à en modifier plusieurs données fondamentales. Quand on prolonge pendant quelques semaines, à l'abri de la putréfaclion, une digestion artificielle, on voit diminuer la proportion des albumoses et des peptones, c'est-à-dire des corps protéiques donnant encore la coloration violet-rouge par le sulfate de cuivre et la potasse (réaction du biuret). A leur place apparaissent des composés crislalli- sables ne donnant plus la réaction du biuret (corps abiurétiques); ce sont des acides aminés : ieucine, Lyrosine, alanine, arginine, ete. La molécule al- buminoïde s'est résolue en ses principes consti- tutifs. La production de ces acides aminés ne résulle pas seulement d'une digestion artificielle prolongée bien au delà des limites d'une digeslion normale : dans l'estomac physiologique, on trouve aussi, après deux ou trois heures de digestion, des corps abiurétiques en petites quantilés. Il ne faudrait pas croire que les divers stades de régression des albumines se succèdent régulière- rement et qu'on trouve d’abord des acide-albumi- nes, puis des albumoses et des peptones, enfin des acides aminés. Dans un estomac en digestion, comme l'ont montré Zunz, Pfaundler, Malfatti, on trouve simultanément tous les termes de la régres- sion digestive des aliments quäternaires, formés, semble-t-il, parallèlement et non par une évolution graduelle. Ce sont les matières protéiques non coa- gulables par la chaleur ou l'acide azotique, non précipitables par le ferrocyanure acétique (albu- moses), qui prédominent dans le mélange (68 à 90 °/, d'après Zunz); puis viennent l’albumine inaltérée, l’acide-albumine, divers acides aminés et de faibles proportions de peptones vraies. Ces dernières n’ont pas le rôle capital qu'on s'était plu à leur assigner; elles font défaut, dans un grand nombre de cas. Du reste, l'analyse ne reflète peut- être pas très exactement la marche du phénomène: l'absorption modifie incessamment la composition de la masse en s'exerçant inégalement sur les divers produits ; il est possible que les acides aminés pénètrent dans la muqueuse plus rapide- ment que les albumoses, par exemple. La prédo- minance de ces dernières proviendrait alors de leur moindre assimilabilité; mais on pourrait aussi l'expliquer en invoquant la théorie de Kühne, récemment confirmée par Siegfried. On sait que, suivant cette théorie, les albumoses, sous l'influence de la digestion, se scindent en deux complexes moléculaires : les Aémipeptones, transformables en corps abiurétiques par une digestion prolongée, el les antipeptones, qui résistent au suc gastrique, deviennent un peu plus dialysables, mais ne don- nent pas d'acides aminés. Bien que la digestion pepsique nous apparaisse aujourd’hui comme une transformation moléculaire plus profonde qu'on ne le pensait, elle n'en est pas moins un travail préliminaire que le pancréas doit compléter. Dès que le pylore livre passage aux aliments imprégnés d'acide chlorhydrique, le pancréas entre en activité. Pawlow, qui a étudié de près le phéno- mène, l'attribuait à un acte réflexe provoqué par le contact de l'acide sur la muqueuse duodénale. Peu 41088 après, Starling et Bayliss' découvraient le véritable mécanisme en montrant que, si l'on fait macérer la muqueuse du duodénum préalablement broyée dans de l'acide chlorhydrique à 4 °/, ou dans un autre acide convenablement dilué, on obtientune liqueur qui, injectée dans les veines d’un chien, provoque la sécrélion du pancréas. Le suc obtenu est peu énergique ou absolument inactif si l'intestin est vide; pour que la sécrétion possède son aclivité normale, il faut que le pancréas soit sollicité en même temps par la présence de matériaux alimen- taires dans l'intestin. Starling et Bayliss ont donné le nom de sécrétine à l'agent excitateur du pan- créas; ils supposent qu'il préexiste dans la mu- queuse à l'état de proferment, transformé en ferment aclif par la solution acide. On peut préparer de la sécrétine avec le duodénum, le jéjunum et les pre- mières portions de l'iléon:; vers la barrière de Bauhin, la muqueuse n'en fournit plus. Une des particularités les plus inattendues dans l'histoire de la sécrétine, c'est que cet agent ne semble pas être de nature diastasique; il résiste, en effet, à l’ébullilion, comme l'ont montré Starling et Bayliss?, Camus et Gley', Herzen et Radzikowski *. Au cours de ces dernières années, on n'a pas été peu surpris d'apprendre que le suc pancréatique pur, obtenu par la méthode de Pawlow-Schepowal- nikoff, est, d'ordinaire, dépourvu de toute action sur les substances albuminoïdes. En présence d’une petite quantité de suc intestinal, le suc pancréatique manifeste un pouvoir digestif des plus énergiques. Pawlow a expliqué ce singulier résultaten montrant que le suc pancréatique pur ne renferme pas de trypsine, mais seulement un proferment, le trypsi- nogène. lequel ne devient actif qu’en présence d’un nouvel agent diastasique, l'entérokinase ou ferment des ferments. Ces faits, établis par Pawlow et ses élèves Sche- powalnikoff®, Walther°”, Lintwarew, ‘ Sawitsch”, Popielski”, confirmés et précisés en France par ? STARLING et BAYLISS : Journ. of Physiol., L. Physiol., EX, «t. 682. ? STARLING et BAYLISS : % Camus 513 et 898. Caucs et GLEx : C. R. de la Soc. de Biol., 4902, t. LIN, r. 241, 434, 648, 895. * Herzen et Ranzixkowski1: C. Z?. de la Soc. de Biol., 1902, t DIV, p: 507: - * SCHKPOWALNIKOFF : Maly's Tabresb., t. XXIV, 1899, p. 378. ° Wazrtuer: Ve congrès internat. de physiol. Turin, 1901. ? Linrwarew : Ueber die Einfl. versch. Beding. auf den Zustand und die Quantität der Ferment in Pankreassaft. Dissertation, Petersburg, 1901, et Piochem. Centralbl., H. 3, n° 201. * Savirscu : Rousski Wratch, t. Pliysiol., 1902, t. IV, p. 121. ® PorreLskt : Rousski Wratch, t. 1, 672; 1902, et Journ. de Physiol., t. IV, p. 750. The mecanism of pancreat. secret. XXVIII, 1902, et. Centralblatt für 106. /c16. : G:R. de la Soc. de Biol., 1902, t. LV, p.44, 1, p. 200, et Journ. de D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL Délezenne”, Camus et Gley*, sont aujourd'hui elas- siques; cependant, quelques particularités impor- tantes de la question n'ont pas encore été élucidées. Ainsi, le suc pancréatique du chien nourri avec du pain, du lait, du beurre ou des pommes de terre ne contient pas de trypsine, mais seulement du trypsinogène ; il ne devient actif qu'au contact de l’entérokinase. Si, au contraire, on ajoute de la viande à l'alimentation, le pancréas sécrète de la trypsine ; avec le régime carné absolu, la sécrétion tarit presque complètement, mais la petite quan- tité de suc qui s'écoule ne contient que de la tryp- sine, sans proferment. Délezenne pense cependant, et peut-être avec raison, que le suc pancréatique absolument pur est toujours dépourvu d'activité digestive sur les albumines; les observations qui lendent à prouver le contraire proviendraient des erreurs faciles à commettre dans ces expériences délicates. En voici un bel exemple : à l'abri de toute trace de suc intestinal, le suc pancréatique pur digère la fibrine; mais cette exception appa- rente s'explique par ce fait que la fibrine retient toujours des globules blancs, lesquels renferment de l’entérokinase (Délezenne). Des observations de cet ordre confirment la loi, au lieu de l'infirmer, et peut-être en serait-il de même dans beaucoup d'autres cas si l’on en connaissait exactement le déterminisme. L'entérokinase est une diastase qui se détruit à la température de + 67° et que les acides précipi- tent des exlraits aqueux de la muqueuse duodénale. Comme la pepsine, c'est probablement une nucléo- albumine (Stassano et Billon)‘; elle n'estpas spéciale à la muqueuse du duodénum; Délezenne* a dé- montré sa présence dans les leucocytes, dans les ganglions lymphaliques et, en particulier, dans les plaques de Peyer; certaines bactéries, le venin des serpents en renferment également. Il n'a été question jusqu’à présent que d'une seule des actions digestives du pancréas, celle qui s'exerce sur les aliments quaternaires. Comment sontinfluencées par l'entérokinase l’'amylopsine et la stéapsine pancréaliques ? Pour Pawlow, Hamburger et Hekma”, l'entérokinase n'aurait pas d'action . constante sur les diastases pancréatiques de l'ami- 1 DÉLEZENNE : et 1164, et t. LIV, "41902; 893, etc. 2 Caxus et GLey : C. R. de la Soc. Biol., t. LIV, 1902ÿ p. 241, 434, 648, 895. 3 Srassano et Bizcox: C. R. de la Soc. Biol., {. LIV, 1902, C. R. de la Soc. Biol., t. LIL, 1901, p. M6 p. 281, 283, 592, 691, 693, 890, p. 623. 4 DÉLEZENNE : C. R. de la Soc: Biol., t: LIN, 1902, “p.284 283, 890, 893, 896, et C. R. Acad. Sc., t. CXXXV, "4902 p. 328. 4 S JlameurGer et Hekma : Journ. de Plysiol., t. IV, 1902; p. 805, et Xün. Akad. van Wettenschappen te Amsterdam, 1902, p. 133. D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL 1089 don et de la graisse. Pour Pozerski', au contraire, l'entérokinase acliverait la saccharification des amylacés. Cette question appelle de nouvelles recherches. Sous l'influence de la trypsine aidée de l’entéro- kinase, la digestion pancréatique des alburmines évolue, mais avec unc énergie plus grande, dans le même sens que la digestion pepsique, c’est-à-dire vers la décomposition des matières protéiques et, par l'intermédiaire des albumoses, jusqu'aux corps abiurétiques. À ce stade de son évolution, la diges- lion intestinale fait intervenir une nouvelle dias- lase, découverte par O. Cohnheim, l'érepsine. Cette diastase fait subir aux albuminoïdes, trans- formés en albumoses par les enzymes de l'estomac, du pancréas et de l'intestin, une transformation nouvelle qui les fait descendre d'un degré dans la voie des simplificalions régressives. On savait, par les observations déjà anciennes de Hofmeister”, Shore*, Neumeister', Salvioli, que les albumoses el peptones, maintenues au contact de l’inteslin, ne tardent pas à disparaitre, et l'on interprélait ce fait en admettant qu'à travers la paroi intestinale les albumoses reconstiluaient des albumines; mais, d'une part, Embden el Knoop” n'avaient pas pu saisir cette transformation en relour des peplones en albumines et, d'autre part, il résulterait de cette synthèse, si elle élait réalisée effectivement, que le tube digestif ne peptonise les aliments quaternaires que pour les faire repasser à l'état d’albumine, sans qu'on apercoive le béné- fice de ces deux réactions successives et de sens opposé. Cette manière de voir ne cadre guère avec ce que nous savons de la machine d’assez haut rendement qu'est l'organisme animal. Otto Cohnheimf a cherché dans une autre voie. En 1901, cet auteur publiait dans la Zeitschrift für physiologische Chemie un important travail dont voici l'expérience fondamentale : On sacrifie un animal jeune (chien ou chat) en pleine digestion et, après avoir divisé l'intestin en menus fragments, on l’agite avec du sang ou une solution salée physio- logique dans laquelle on a introduit de la peptone commerciale. En même temps, on fait passer un courant très lent d'oxygène dans le mélange placé à l'étuve à 37°. Au bout de trois à quatre heures, on constate que la réaction du biuret a disparu; le liquide fournit avec l'acide phospho-tungstique un 4 Pozersxi : C. R. de Ja Soc. Biol., t LIV, 1902, p. 96. ? Horweisrer : Zeils. f. physiol. Chemie, 1881,t. VI, p.51 et 69, et Schmiedeberg's Archiv, t. XIX, 1885, p. 1 ; t. XX, 1586, p. 291 ; t. XXII, 1887, p. 306. 3 Saone : Jour. of Phystol., t. XI, 1890, p. 528. 4 NEUMEISTER : Zeitsch. f. Biol., t. XXVII, 1890, p. 309. % Eugoex et Kxoop : Beitrage Z. physiol. u. pathol. Chemie, {. 111, 1902, p. 120. » 5 Connnelm : Zeïts. Î. physiol. Chemie, t. XXXIT, 1901, p451;t. XXXV, 1902, p. 139 et 396 ; t. XXXVI, 1902, p. 43. précipité cristallin d'où l'on peut extraire des acides diaminés; on décèle également la présence de la tyrosine. En d’autres termes, la peptone s’est transformée en corps abiuréliques, en acides aminés. Kutscher et Seemann‘, Lüwi” ont confirmé ces faits. L'agent de cette (ransformalion en composés abiuréliques des albumoses de la digestion est une diastase nouvelle, de propriétés énergiques et très différenciées, l'érepsine. Pour la préparer, on sacrifie un jeune chien en pleine digestion, on enlève l'intestin, dont on racle la muqueuse à l’aide d'un morceau de verre. Les lambeaux de muqueuse, ainsi détachés, sont broyés avec du sable fin et épuisés en présence du chloroforme ou du toluène avec un sérum artificiel, de préférence celui de Ringer (8 °/ de NaCl, avec de petites quantités de KCI, CaCE, CO‘NaH). On passe à travers un linge, exprime et filtre. Le liquide obtenu est saturé avec du sulfate d'ammoniaque ; le précipité qui se forme est recueilli, mis en suspension dans l’eau et sou- mis à la dialyse. Il reste sur le septum du dialyseur un produit qui dédouble les albumoses et les peptones comme le ferait l'acide sulfurique bouil- lant, c'est-à-dire en donnant des composés cristal- lisables : ammoniaque, arginine, lysine, leucine, tyrosine et autres acides aminés. L'érepsine est dé- truite à 59° (Hamburger et Hekma) . Une des particularités les plus curieuses de cette diastase, c’est que son activité est limitée aux albumoses et aux peptones; elle n'agit pas sur les albumines véritables. Cette spécificité est telle qu'on a ulilisé l’érepsine comme réaclif pour distinguer les albumines des -albumoses. C'est ainsi que Magnus Lévy s'en est servi pour déterminer la nature de la substance protéique urinaire connue sous la désignation erronée d’a/bumose de Bence- Jones. Cette matière n’est pas attaquée par l’érep- sine, et ce caractère a suffi pour la faire ranger parmi les albumines proprement dites. Il y a cependant deux exceptions à la règle ci-dessus : elles concernent les protamines du sperme et la caséine du lait, attaquées l'une et l'autre par l'érepsine. Il en résulte que, tandis que les aliments protéiques ordinaires sont peplonisés seulement par la pepsine et la trypsine, l'organisme dispose, dans l'intestin, d'une troisième diastase pour digérer la caséine. Ce résultat contribue à expliquer la digestibilité facile du lait. Au point où nous l'avons conduite, la digeslion des matières albuminoïdes est déjà fort avancée, 1 Kurscuer et Seemanx : Zeits. f. physiol. Chemie, t. XXXVI, 1902, p. 13. 2 Lowi: Centralbl. f. Physiol., t. XV, 1902, p. 590, et Archiv. für experiment. Pathol. und Pharmak., t. XLVIW, 1902, p. 303. 1090 D' L. HUGOUNENQ — LA BIOLOGIE ET LE CHIMISME INTESTINAL puisque, grâce aux divers ferments, et surtout à l'érepsine, les albumoses et peptones sont trans- formées en corps abiurétiques; le rôle de l'intestin n'est pourtant pas lerminé. Parmi les produits de dédoublement des maté- riaux albuminoïdes, soit par les acides dilués in vitro, soit par l’action des sucs digestifs, il en est un remarquablement constant, puisqu'il se forme par l’hydrolyse de tous les corps protéiques exa- minés jusqu'à présent: c’est l’arginine, ou guani- dine de l’acide &«-è-diamino-valérique : ACC res AzH.CH°.CH°.CH°.CH(AZH°).COH. Or, en présence de fragments d'intestin finement broyés, ce corps se dédouble par fixation d’eau en urée et acide diamino-valérique (Kossel et Dakin) : 7 AzH° A7H—C: CH®.A7H° “AZH | | CH? CH? | | AP CH? CH® + H°0 — CO£ + | | NAZIP CH? CH? | dr AzRe CH.AzH° | CO?H CON L'agent de cette réaction, auquel Kossel et Dakin -ont donné le nom d’arginase, esl une diastase qui peut être extraite par l’eau de la muqueuse intes- tinale hachée. On obtient une solution aqueuse, d'où le sulfate d’ammoniaque à saturalion précipite l'enzyme. On purifie par dialyse, précipitation par l'alcool, bref par les procédés habituellement usités en pareil cas. L'arginase se rencontre dans le foie, où elle para- chève sans doute la transformation en acide dia- mino-valérique et en urée de l’arginine formée dans l'intestin par l’action de l'érepsine sur les albu- moses et peptones. La découverte de l’arginase témoigne des trans- formations profondes éprouvées par les aliments quaternaires dans le tube digestif. Loin de s'arrêter aux peptones, comme on l’enseignait autrefois, le dédoublement va jusqu'à la destruction complète de la molécule albuminoïde, jusqu'à la mise en liberté des acides aminés : encore, parmi ces derniers, en est-il, comme l’arginine, que l'intestin soumet à un dédoublement plus avancé pour faire apparaître deux corps plus simples, dont l'un, l’urée, est le dernier terme du métabolisme des substances azotées dans l’économie, dont l’autre contribuera, lui aussi, par voie indirecte, à la production de l’urée. Mais, sans insister sur ce dernier point, il convient de faire remarquer que, déjà pendant l'absorption intestinale, une fraction de l'azote des aliments quaternaires s'est transformée en urée. IV Cette désintégration moléculaire opérée par l'in- testin ne s'exerce pas seulement sur les composés quaternaires : elle s'applique à toutes les classes d'aliments organiques. Ainsi, les amylacés (C5H"0"}, transformés en maltose C*H*0" par la salive et le suc pancréalique, donnent finalement du glucose C'H°0", corps beaucoup plus simple que l’amidon, formé, comme on sait, par la condensation de nom- breuses molécules de glucose avee élimination d'eau. Même constatation pour les graisses. L’absorplion des graisses a été l’objet de longues discussions entre Pflüger! et son École d'une part, et, de l'autre, Munk*, Hofbauer*, Exner*, Henriques et Hansen”, Lüwi. Pfüger à fait triompher sa théorie de la saponification complète des graisses avant leur passage à travers l'intestin. D'après Pflüger, l’in- teslin n'absorberait pas de corps gras, mais seule- ment leurs produits de décomposition, glycérine et acides, provenant de la saponification réalisée par le suc pancréatique aclivé par la bile. Les acides gras, mis en liberté, pénètrent dans la muqueuse soit à l’élat de savons solubles, soit à l’état libre, mais, dans ce dernier cas, dissous à la faveur de la bile, dont Pflüger a montré le pouvoir dissolvant intense sur les acides gras. Ce pouvoir dissolvant de la bile serait tel qu'il ne serait jamais en défaut, même quand le régime est très riche en graisse. L'absorption des graisses nese ferait donc pas à l’état de gouttelettes finement émulsionnées; tout est sa- ponifié : il ne passe pas de corps gras inlacts, mais seulement de la glycérine et des acides gras, libres ou salifiés, mais toujours dissous. La désintégralion moléculaire des aliments est done un fait d'ordre général : amylacés (ransformés en glucose, graisses saponifiées en glycérine et acines gras, matières albuminoïdes désagrégées en leurs principaux éléments constitutifs, les acides aminés. En raison même de leur grande complexité de structure, du poids élevé de leur molécule, les aliments quaternaires illustrent bien cette démon- stration. Si, par exemple, on considère le poids mo- léculaire des albumines, lequel n'est pas inférieur à 1 Prcôcer: Pflüger's Archiv, t. LXXX, 1900, p. 11; t. LXXXI, 1900, p. 375; t. LXXXII, 1900, p. 303 et 351 ; t. LXXXV, 1901 pu tuULXXX VII 1902, "p-299Met4518; t. LXXXIX, 1902, 2111 XC; 1902; "p°14. Centralblat für Physiol., {. 2 Monk : XEV, 1900, p. 424, 153, et:409: 3 Horgauer : Pfluger's Archiv., t. LXXXI, 1900, p. 263, et t. LXXXIV, 1901, p. 649. 4 Exner : Pflüger's Archiv, Lt. LXXXIV, 1901, p. 628. # Henriques et Hansen : Centralbl. {ür Physiol., L&. XIV, 1900, p. 313. S Lowr: Marburg. Gessels. z. Beford. der Naturwis- sensch., 1904. J. RÉV!IL — LA RÉUNION DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE À TURIN 1091 4.000 et dépasse peut-être ce chiffre de beaucoup, on mesure l'énergie de ce procès de désintégration qu'est la digestion intestinale quand on compare ces albumines à leurs produits de digestion, les acides aminés, dont la molécule pèse trente ou quarante fois moins. Graissesethydrocarbonés subissent des sim- plifications de mêmeordre,et, comme leurs transfor- malions nous sont beaucoup mieux connues, nous pourrions même, en ce qui les concerne, mesurer exactement en calories, par exemple, le travail que leur régression impose aux glandes digestives. L’'intestin est un broyeur moléculaire : il ne livre à l'économie que des débris avec lesquels nos cel- lules reconstituent de nouveaux édifices, adaptés à leurs besoins. Enfin, il est une autre question que nous vou- drions examiner en terminant. À la lumière des faits récents, il apparaît qu'une importante fraction de l’azote alimentaire pénètre dans l'économie non pas à l’élat de peptone, c'est-à-dire de corps pro- téique, mais à l’état de composés cristallisables, connus et classés. Nous mangeons des albumines; mais nous absorbons des acides aminés (glycocolle, leucine, arginine, lysine, tyrosine, etc.). Quelle est, normalement, la part de l'azote utilisé à l’état d'albumose ou de peptone; quelle fraction tra- verse l'intestin à l'état d'amines plus ou moins complexes? Il est difficile de répondre à celte question. Mais, si l’on venait à démontrer que lout l'azote de l’albumine pénètre dans l'organisme à l’état de composés cristallisables, on pourrait presque se demander si l’albumine est, comme on le croit encore, un aliment indispensable. Dans des expériences difficiles à réaliser et surtout à pour- suivre un certain temps, on a essayé de substituer, à l’albumine d’une ration alimentaire, une quan- tité équivalente d'azote sous forme de corps aminés, en appliquant la loi de l’isodynamie. Jusqu'à pré- sent, ces tenlalives n'ont pas abouti, et peut-être ne parviendra-t-on jamais à établir l'équipollence de l'azote albumineux et de l'azote abiurétique. Dans ce cas, l’albumine resterait ce que nous croyons qu'elle est : un aliment que rien ne remplace et dont l'absence ou la diminution au-dessous d’un certain minimum entraîne à bref délai la déchéance et la mort. C'est là une donnée classique et que jusqu'à pré- sent rien n’a pu ébranler. D' L. Hugounenq, Protesseur de Chimie médicale à la Faculté de Médecine de Lyon, Correspondant de l'Académie de Médecine. LA RÉUNION EXTRAORDINAIRE DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE À TURIN (SEPTEMBRE 1905) Siluée dans la plaine du Pô, que limitent au nord les Alpes et au sud les Apennins, la ville de Turin est un centre tout désigné d’excursions géologiques. Aussi le Conseil de la Société géologique de France eul-il une heureuse inspiration en acceptant d'y tenir sa réunion extraordinaire de 1905, sur l'invi- talion de M. le Professeur Frédéric Sacco. Celui-ci, — qui devait être nommé président de la réunion, — nous conviait à l'étude des terrains terliaires du Piémont et de la Ligurie, ainsi qu'à celle des for- malions quaternaires et de la zone des «Pierres vertes‘ » de la lisière des Alpes. Huit jours devaient être consacrés à parcourir les environs de Turin, d’Asti, de Serravalles et de Gênes. 11 nous à paru intéressant d’en exposer les principaux résullats en suivant l’ordre de l’âge des assises dont l'étude fut successivement abordée et qui fut à peu près celui des localités visitées. Nous nous occuperons donc successivement des formalions éogènes (Eocène et ! Ce terme, créé par Gastaldi, sert à désigner la formation appelée en France Schistes lustrés etcomprenant une série de dépôts appartenant au Trias supérieur et au Jurassique. Oligocène) et néogènes (Miocène et Pliocène), pour terminer par le Quaternaire. Quant à la zone des « Pierres vertes », par suite du peu de temps dont nous pûmes disposer, nos observalions furent trop incomplètes pour que nous jugions utile de les présenter ici. Rappelons, en débutant, que la région que nous devions parcourir a fait l'objet de nombreux tra- aux dont les plus importants sont dus à Brocchi, Brongniart, Provena de Collegno, Pareto, de Mor- tillet, Gastaldi, Sismonda, Baretti, Mayer-Eymar, Parona, Porlis, Issel, Rovereto, Virgilio, Sacco', etc. Ce dernier savant — qui a publié plusieurs cartes relatives à notre champ d'études — fut pour nous un guide sûr et dévoué, que nous ne saurions trop remercier. Ajoutons encore que de belles séries de fossiles tertiaires, réunies par Baretti au Musée du palais Carignan, purent être consultées par les membres de la réunion, ce qui leur permit d’éta- 1 Voir la bibliographie géologique du Piémont de MM. Pa- rona, Sacco et Virgilio, Rome, 1894. 1092 J. RÉVIL — LA RÉUNION DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE A TURIN blir, avec les bassins tertiaires d'autres régions, des comparaisons intéressantes. Les formations tertiaires de la Haute-Italie ocei- dentale peuvent être groupées en deux zones : une zone méridionale, s'étendant le Jong du pied sep- tenlrional des Alpes maritimes et de l’Apennin sep- tentrional, et une zone septentrionale, faisant face aux Alpes centrales. La première comprend les col- lines de Mondovi,les Langhe, le haut Montferrat et une partie des collines plus septentrionales de Tor- tone. Quant à la seconde, elle est constituée par les collines Turin-Valence, qui ne seraient autre chose, d’après M. Sacco, que le prolongement de la partie nord de l’Apennin septentrional”. Dans le voisinage de Turin, les collines forment un petit massif au milieu de la plaine piémontaise, massif dans lequel les formations miocéniques se montrentrelevées sur les deux flancs d’un anticlinal, dirigé de l'Est à l'Ouest. En divers points de ce massif, la voûte est largement ouverte, laissant affleurer le substratum, caractérisé par de l’Oli- gocène et de l'Eocène. Ce sont ces deux formations que les membres de la Société géologique éludièrent, le 6 septembre 1905, en visilant les environs de Lavriano et de Gassino. À la base des collines de la première de ces localités, ils observèrent des marno-calcaires, avec intercalation de bancs gréseux, disposés en couches verticales et même légèrement renversées. D'après les fossiles recueillis (Nummulites, Orbi- toides, Lithothamnium), ces assisesappartiendraient au Bartonien. Elles seraient contemporaines, d'après M. II. Douvillé, des marnes bleues de la côte des Basques, à Biarritz. Aux marno-calcaires bartoniens succèdent — mais sans qu'il soit possible ici d'établir nettement leurs relations réciproques — des argiles bleuâtres schisteuses, parfois bariolées, délilées parles agents atmosphériques et profondément ravinées. Elles constituent la formation bien connue des Argiles écailleuses (Argille scagliose), qui présentent un remarquable développement dans l'Apennin sep- tentrional, où elles donnent à la région un cachet spécial et où elles renferment des roches variées, particulièrement magnésiennes et verdätres. M. Sacco désigne ces assises sous le nom d'Argi- loschistes ophitifères et les considère comme cré- tacées. Il a développé sa manière de voir à la fin de son bel ouvrage sur le « Bacino terziario del Pie- monte » (1889-1890), et annoncé, dans une Note récente, que «ses éludes l’ont amené à placer dans F, Sacco : La Géo-tectonique de la Haute-ltalie occiden- tale (Bull. Soc. Belge de Géologie, t. IV, 1890). Loc. cit., pp. 13 et 18. | le Crétacé presque toutes les serpentines dites éocéniques »'. Il s'est appuyé sur d'intéressantes données paléontologiques qui mettent en évidence cetâge crétacé du « Flysch ophitifère » de l'Apennin italien. En effet, il cite des débris de Lamelli- branches (/noceramus Cripsii, 1. Brongmarti, I. problematicus, etc.), des Céphalopodes (Scapdites, Toxoceras, Ancyloceras, Baculites, Turrilites, Des- moceras, Acanthoceras, etc.), de nombreux restes de poissons d'espèces crétacées, allant du Céno- manien au Danien, mais plus spécialement séno- niennes. Revenons aux collines de Lavriano. La partie centrale en est constituée par ces Argiles écail- leuses, sur lesquelles s'appuient les Calcaires à fucoïdes (Calcare alberese), qui appartiendraient à l’Eocène inférieur et moyen. Il convient de faire observer que cette manière de voir n'est pas universellement adoptée; pour de nombreux géologues, les Calcaires à fucoïdes sont interstratifiés avec les Argiles écailleuses, et tout ce complexe appartient à l'Éocène. Ne serait-il pas plus rationnel d'admettre que les Argiles ne sont pas partout du même àge, et que, dans certaines régions, elles ont pu débuter dans le Crétacé, pour se continuer pendant les premiers temps lertiaires ? L'étude de la localilé de Lavriano ne permet pas d'arriver à des conclusions précises. En effet, si l'on voit les Argiles écailleuses surmontées en cer- tains points par les Calcaires à fucoïdes, il en est d’autres, par contre, où l’on apercoit d'énormes blocs de Calcaires englobés dans les Argiles. Ces blocs, qui sont actuellement exploités pour les fours à chaux de la maison Delmastro, sont consi- dérés, par M. Sacco, comme tombés au milieu des Argiles et non interstratifiés. Cette difficulté d'interprétation se complique encore par la présence, à Lavriano, d'un curieux dépôt formé de masses anguleuses d’un Calcaire rosé à Crinoïdes et à fossiles du Lias, dépôt super- posé à un conglomérat à éléments cristallins. Les fossiles recueillis ont été étudiés par M. Parona*?; il y a cité de nombreuses espèces (A vicula, Pecten, Terebratula, Waldheimia, Rhynehonella, Spirife- rina) appartenant au Lias moyen. Les conditions de gisement de cette masse détri- tique sont difficiles à interpréter, et une explica- tion salisfaisante ne nous en a pas été fournie. La considérer comme provenant de quelque terre ou écueil baigné par la mer éocénique, — écueil qui 1 EF, Sacco : Les formations ophitifères du Crétacé (Bull. Soc. belge Géologie, t. XIX, 1905). 3 F, ParoNa : Fossili nel Lias medio nel conglomerato di Lavriano (Colli torinesi). Afti. R. Ace. d. Sc. di Torino, t. XXVI, 1890-1891. J. RÉVIL — LA RÉUNION DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE À TURIN 1093 aurait été situé au lieu même où se trouve aujour- d’hui la colline de Turin, — est une hypothèse diffi- cilement acceptable. Ne serait-il pas plus simple d'en attribuer la provenance à des mouvements orogé- niques, et d'y voir un lambeau de recouvrement analogue à ceux du versant nord des Alpes? Ce problème, que nous n'avons pas la prétention de résoudre, demande donc de nouvelles recherches pour trouver les racines (?) de celte masse en situation anormale, comme aussi pour s'assurer si des gisements analogues ne s’observeraient pas en d’autres points du revers septentrional de l'Apennin. Une autre localité intéressante, — à laquelle fut consacrée l'après-midi de la même journée, — est celle de Bussolino, près de Gassino. L'on voit suc- céder à des Marnes argileuses bleuâtres des Marno- Calcaires à Nummulites complanatus LmK. qui, d'après M. H. Douvillé, seraient du Lutétien supé- rieur. Viennent ensuite d’autres couches à pelites Nummulites, Orbitoïdes et Lithothamnium sembla- bles à celles de Lavriano, puis des sables à Tere- bratules età Nummulites problemaricus (= N. ga- sinensis Prever). Ces deux derniers niveaux sont bartoniens, et c'est directement au-dessus que se rencontrent des conglomérats rapportés à l’Oligo- cène par M. Sacco. Ces diverses assises passent les unes aux autres par transilion graduelle. Des dépôts de mer pro- fonde sont ainsi peu à peu remplacés par d’aulres de caractère saumätre ou de faible profondeur. II Bien connue des touristes, la colline sur la- quelle est édifiée la basilique de Superga est cé- lèbre, parmi les géologues, par les nombreux et beaux fossiles miocènes y ayant été recueillis, ainsi que par des bancs de conglomérats d’une épaisseur insolite, sur le mode de formation desquels on a beaucoup discuté. Une journée spéciale consacrée à sa visite s'imposait; elle nous permit d'observer des formations succédant comme âge à celles qui avaient été observées la veille. En effet, le versant regardant le Pô est essentiel- lement formé par les divers élages du Miocène, tandis que le revers opposé montre des formations appartenant à l’Aquitanien, au Miocène et au Plio- cène. C'est l'Aquitanien qui forme, en ce point, l'axe de la voûte, et, d'après M. Sacco, c'est sur des conglomérats appartenant à ce niveau, mais qui pourraient être en partie burdigaliens, d’après M. Depéret', que se trouvent la basilique ainsi ‘ Le jour de l'excursion, notre confrère y a trouvé un Pecten, du groupe du Beudanti; l'exemplaire n'a malheu- reusement pas été recueilli en place. que les premiers lacets de la roule de Baldissero. Ces conglomérats — dans lesquels on voit des blocs non roulés très volumineux — consistent en une alternance de sables grossiers ferrugineux, avec des lits de gros galets en grande partie ser- penlineux. Ils auraient constitué un immense cône de déjections de torrents descendus des Alpes ; quant aux masses non roulées, elles seraient le résidu de bancs conglomératiques détruits par l'érosion, masses qui, tombées des falaises, au- raient été entrainées dans la mer, englobées dans des alluvions argileuses et sableuses ‘. Aux conglomérals succèdent des assises à élé- ments de plus en plus marneux, et qui passent en- suite à d'épaisses couches de marnes fissiles, à surface couverte de P{éropodes et contenant, en outre, des F'oraminifères et des Mollusques. Elles sont le représentant typique du facies langhien, rappelant un peu le Schlier d'Autriche. Au-dessus des marnes viennent des bancs sablo- gréseux alternant d'abord avec quelques minces lits de marnes. Cet ensemble appartient à l'Helvé- tien et est très fossilifère à Baldissero. Ce gisement, connu sous le nom de gisement de Superga, ou de Turin, est d’une grande richesse (Ancilla, Car- dita, Pleurotoma, Ranella, Nassa, Natica, Cassis, Conus, etc.). Cette faune, dite « de Turin », doit être classée, d'après M. Depéret *, à la base du deuxième étage méditerranéen d'Autriche, c'est-à- dire au niveau de l'horizon de Grund et de Saint- Gall. Aux assises fossilifères succèdent, d'après le même savant, des marnes et grès à Penfacrines, el des couches à Lucines; puis viennent d’autres assises de marnes peu fossilifères, où M. Sacco voit les représentants du Tortonien et du Messinien. Pour étudier fructueusement ces deux dernières formations, nous dûmes nous rendre deux jours plus tard dans la vallée de la Scrivia, où s’obser- vent de bonnes coupes, rendues intéressantes par des gisements du Miocène supérieur, également d'une richesse exceptionnelle. Le lit de la Scrivia est creusé à Serravalle dans des bancs compacles appartenant à l'Helvétien et inclinant vers le Nord. A leur partie supérieure, ces grès passent insensiblement à des marnes bleues très développées près de Stazzano, dans les ravins de « Bocca d'Assino », et plus à l'Est à « Vergo, S. Agata », etc. Elles renferment la faune clas- sique qui à servi de type à l'élage tortonien. Cette faune, bien étudiée se fait remarquer, par sa richesse en Nassa, Pleurotoma, Murex, Conus, etc. 1 Cette interprétation a élé empruntée à M. Virgilio, qui a examiné toutes les hypothèses précédemment émises (F. VirGiLio : La colline di Torino, Torino 1895. ® C. Depérer : Classification et parallélisme du système miocène { Bull. Soc. géol. de France, 3e s., t. XXI, 1893). 109% J. RÉVIL — LA RÉUNION DE LA SOCIÉTÉ GÉOLOGIQUE DE FRANCE A TURIN Ces marnes sont ensuite surmontées par des couches rapportées au Messinien (— Pontien), et consistant, à Monterosso, en un poudingue épais formé d'éléments provenant des Alpes Liguriennes occidentales et orientales. À ce niveau se ren- contrent parfois des bancs gypseux. Signalons dans la même vallée, et en amont de Serravalle, des bancs puissants de conglomérats oligocènes, qui sont en discordance très nelte sur les couches plus anciennes des calcaires et des schistes à fucoïdes. Ces assises, que nous pûmes observer près de Ronco et de Gênes, nous ont rappelé les formations du même àge des Basses- Alpes, également riches en empreintes de Æelmin- thoïdea et de Chondrites. j'est dans les environs de la ville d'Asti que nous devions aborder l'étude du Pliocène; c’est là que ses dépôts y sont le mieux représentés. L'élage inférieur (Plaisancien) consiste en marnes bleues, que nous observämes à un demi-kilomètre de Reviniano. Elles deviennent légèrement sableuses à leur partie supérieure, pour passer ensuite à des sables jaunes (Astien). Ces derniers sont très fossi- lifères à Val Andona, — localité bien connue des collecteurs de fossiles, — où chacun de nous put faire d’abondantes récoltes d'espèces admirable- ment conservées (Pectonculus, Panopæa, Murex, Conus, Turbo, Cassis, Ostrea, ele.). III À la sortie des vallées alpines et à leur débouché dans les plaines, les formations quaternaires pré- sentent leur plus remarquable développement et les grandes moraines sont généralement bien caractérisées. La vallée de Suze, au point où elle vient aboutir dans la plaine du Pô, ne manque pas à la règle, et les preuves de la station prolongée d'un immense glacier descendu des Alpes y sont d'une netteté absolue. Les moraines frontales y forment plusieurs ares concentriques (au moins cinq), sensiblement paral- lèles les uns aux autres, et constituent ce qu'on a appelé « l’amphithéâtre morainique de Rivoli ». Deux de ces ares s’y distinguent par leur étendue et leur hauteur. Le premier est celui sur lequel est assis le bourg de Pianezza, où l'on peut voir, sur la rive gauche dela Doire Ripaire, d'épais dépôts de transport à structure chaotique (Glaciaire) passer dans le bas à la structure stratifiée (fluvio-gla- ciaire). Ces derniers forment le sous-sol de la plaine située à l’aval, et, désignés par M. Sacco sous le nom de « Diluvium », seraient, pour lui, d'âge antéglaciaire (?). Une seconde moraine, séparée de la première par une dépression très accusée (cuvette terminale), est celle d’Alpignano, limitée elle-même par une nouvelle cuvelte et, plus à l'Est, par les formations erratiques de Casaletto. D’énormes blocs, venant des crêtes du Musiné, sont parsemés sur les divers mamelons, et deux d’entre eux, situés l’un à Pia- nezza (bloc d'euphotide dédié à Gastaldi) et l’autre à Casaletto (bloc de prazinite que nous nous propo- sämes de dédier à M. Sacco), ont des dimensions véritablement extraordinaires. Les autres cercles morainiques se dessinent mieux vers le Sud et s’apercoivent neltement du petit monlicule qui supporte les ruines du vieux château d’Avigliana. Ce monticule à surface mou- tonnée et striée forme comme un massif isolé au milieu de la plaine, dominant une région de lacs et de tourbières développés au Midi et présentant l'aspect particulier des paysages glaciaires. Ce système de moraines, marquant les phases de retrait d'un glacier provenant des hauteurs du Thabor, du Mont-Cenis et du Mont-Genèvre, appar- tient-il à une seule glaciation où à plusieurs? C’est un problème dont M. Sacco n’a pas cherché la solu- tion, mais qui a élé abordé récemment par M. Guiseppe Capeder !. Get auteur, à la suite d'inté- ressantes découvertes de formations interglaciaires (alluvions inter-morainiques, couche de læss, et dépôts d’altérations connus sous le nom de /erreto), croit pouvoir établir, pour l'appareil glaciaire de Rivoli, trois phases d'extension séparées par deux périodes inlerglaciaires. La seconde période aurait été caractérisée par un climat sec, et la première par les conditions favorisant la ferralisation, c'est- à-dire la rubéfaction des terrains argileux. IV Avec l'étude des formations quaternaires des environs de Rivoli, qui fut effectuée le 11 sep- tembre 1905, se terminèrent nos courses en Italie. La séance de clôture eut lieu le même jour et permit à M. Sacco de résumer les faits observés. D'intéressantes discussions, auxquelles prirent part MM. Peron, Haug, Dolfus, Kilian, P.Lory, David-Mar- tin, Robert Douvillé, Préver, etc., appelèrent l’atten- tion sur les problèmes non complètement résolus. Ne serait-il pas utile — ainsi que nous en expri- mions le vœu dans cette même séance — que les géologues des deux versants des Alpes puissent se rencontrer plus fréquemment sur le terrain ? Ces recherches collectives et ce groupement d'efforts seraient d’un profit certain pour le développement d'une science que cullivent aujourd'hui avec lant d'ardeur de très nombreux adeptes. J. Révil, Président de la Sociélé d'Histoire naturelle à de Savoie. 1 G. Carever : Sulla struttura dell’ anfiteatre morenico di Rivoli, in Rapporto alle diverse fasi glaciali, Romo, 1904. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1095. REVUE ANNUELLE D’ANATOMIE I. — LE PREMIER CONGRÈS INTERNATIONAL DES ANATOMISTES. L'année 1905 restera pour tous les Anatomistes une heureuse date : celle de leur union définitive. Le plus modeste d'entre eux sera certain désormais de pouvoir se faire entendre de lous, de pouvoir montrer à tous ses préparations, ses dessins, en un mot, les résultats variés de ses recherches. Suc- cessivement s'élaient fondées des sociétés pure- ment nationales (anglaise, américaine), ou inter- nalionales, mais à noyau allemand ou francais dominant (l’Anatomische Gesellschaft, 1886; l'As- socialion des Anatomistes, 1899). Mais, malgré la présence de membres communs, il manquait un lien officiel entre ces groupements. Il était bon que chacun d’entre eux conservàät son individualité, afin d’avoir des réunions assez fréquentes {an- nuelles), ne nécessitant pas de trop grands dépla- cements, faciles à suivre vu l'emploi à peu près exclusif d'une seule langue, et d’un caractère plus familial. Il était bon aussi qu'une « entente cor- diale » s'établit entre tous ces groupements (et d'autres s’il s'en fonde), que, de temps à autre, sans rien abdiquer de leur indépendance, ils pussent, traitant d'égal à égal, tenir des assises communes où seraient en outre invités, à titre d'hôtes, les anatomistes encore isolés. Comme solution, le lien fédératif était tout indiqué. Il a suffi que, sur l’ini- tiative du Professeur Nicolas (de Nancy), secrélaire de l'Association française, toutes les sociétés (aux- quelles s’est jointe l'Unione zoologica italiana, en grande partie composée d’analomistes) s'enten- dissent pour réunir leur assemblée annuelle dans la même ville, et tenir en commun leurs séances scientifiques, sous la présidence successive de cha- eun de leurs présidents élus : ainsi est né le Pre- mier Congrès 1édératif international des Anato- mistes. Ce ne sera pas le dernier, car les sociétés présentes se sont constituées en une fédération permanente, el ont nommé chacune un délégué pour les représenter dans un Comité, qui a pour mission de provoquer, tous les cinq ans environ, la réunion d’un nouveau Congrès ‘. Pour faire réussir une entreprise de ce genre, il fallait encore trouver une Université d'accès facile et agréable pour tous, qui voulût bien nous héber- ger, un homme qui assumäât la tâche souvent in- 1 L'Associalion des Anatomistes, reprenant sa liberté pour l'an prochain, tiendra son assemblée à Bordeaux, du S au A1 avril 4906, sous la présidence du Professeur Viault ; vice- présidents : les Professeurs Jolyet, Kunstler, De Nabias. grate de l’organisation locale. La ville de Genève, située en terrain neutre, et si accueillante aux étrangers de toute nationalité, élait particulière- ment indiquée pour nos débuts; elle l'était d'autant plus que nous y rencontrions, en la personne du Professeur Éternod, l'homme actif et dévoué qui voulut bien se charger de constituer et de présider un Comité d'organisation locale, travaillant d'ac- cord avec les bureaux des diverses sociélés. Grâce à toutes ces circonstances favorables, le Congrès a parfaitement réussi, et 290 membres de toutes nationalités s'étaient fait inscrire, dont le plus grand nombre ont pu venir prendre part aux travaux de l'assemblée. Les Professeurs Symington (de l’Anatomical Society of Great Britain and lre- land), Waldever (de l’Analomische Gesellschaft), Renaut (de l’Associalion des Anatomistes), rem- plaçant M. Sabatier retenu par la maladie, Romiti (de l'Unione zoologica italiana), ont successivement présidé les séances, dont la première fut ouverte par un excellent discours du Professeur Éternod, président du Comité local d'organisation. (Les Américains avaient malheureusement été retenus au dernier moment.) 73 communications étaient annoncées, et c'est seulement grâce à un certain nombre d'absences que le programme a pu être épuisé dans les quatre journées mises à la disposi- tion des congressistes (6 au 10 août). Suivant une tradition déjà suivie dans plusieurs des Sociétés, les après-midi ont été réservées pour les démons- tralions de préparations microscopiques et macro- scopiques, plus nombreuses même que les commu- nications. Ce sont, à notre avis, ces leçons de choses et les discussions sur pièces qui font le grand in- térêt de pareilles réunions *. Ces congrès permettront encore la discussion d’un certain nombre de questions d'intérêt général ; dès le premier, deux ont été posées sous forme de vœux présentés, l’un par le Professeur Prenant (de Naney), l’autre par le D' Chaine (de Bordeaux). Le premier regrette de voir la bibliographie deve- nir chaque jour plus difficile à faire, s'encombrer de non-valeurs, de répétitions; il voudrait voir les périodiques se spécialiser au lieu d'accueillir cha- cun des travaux intéressant toutes les branches de l'Anatomie, un classement succéder à la confasion actuelle, ete. Le second demande, comme l'avait ‘ Une exposition d'instruments, faite par les principaux constructeurs de microscopes, microtomes, étuves et autres instruments de laboratoire, complétait heureusement les démonstralions, malgré l'absence regrettable de plusieurs fabricants. 73 1096 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE: D} ANAT OMIE déjà fait le Professeur Lesbre à l'Association des Anatomistes (Lyon, 1901), l'unification de lanomen- clature anatomique, et particulièrement de la no- menclature musculaire dans la série des Vertébrés. Ce sont là des questions qu'il fallait assurément poser, mais auxquelles une réponse n'est pas facile, et ne peut se donner d'emblée. Le Congrès, ou les Sociétés constituantes dans leurs réunions d’af- faires, n'ont guère pu que nommer des Commis- sions pour les étudier. L'Universilé de Genève avait, en outre, profité de la circonstance pour inaugurer solennellement le buste de l'un des siens, si malheureusement dis- paru en mer au cours d'une expédition scientitique, en pleine maturité de son talent, le regretté Her- mann Fol. D’excellenis discours ont été prononcés à ce sujet, notamment par les Professeurs Êternod (de Genève), Waldeyer (de Berlin), Henneguy (de Paris). Tout en rappelant les travaux du grand bio- logiste qui fit faire un pas si important à la ques- tion de la fécondation, les orateurs n'ont pas man- qué de nous montrer que la Suisse, l'Allemagne, la France pouvaient chacune s'honcrer d’avoir contribué à sa formation scientifique, et qu'il avait conservé l'amour de ces trois pays. C'était certes une heureuse idée que d’avoir associé à cet hom- mage posthume le premier Congrès international des Anatomistes, en le plaçant en quelque sorte sous le patronage d'un homme aussi capable de comprendre et d'estimer des collègues venus de tous les points de l'Europe. Nous ne terminerons pas sans dire quel accueil merveilleux les Anatomistes ont recu à Genève. Leurs collègues, l'Université, les Pouvoirs publics se sont disputé le plaisir de leur offrir une hospi- talité aussi cordiale que somplueuse. Un soir, c'était Mr° Hermann Fol qui les recevait à Chou- gny, dans sa magnifique propriété; un autre soir, c'était le Professeur Éternod qui louait, pour faire le tour du pelit lac, un des grands bateaux à va- peur de la Compagnie, sur lequel le Professeur Bugnion (de Lausanne) leur faisait servir une col- lation ; un autre soir, c'était un grand diner offert par l'État et la Ville de Genève, etc. Pour les deux premières fètes, qui se passaient en plein air, le soleil s'était mis de la partie, et la sereine splendeur du décor semblait ajouter encore à la cordialité des hommes pour prècher aux Anatomistes une affec- tueuse estime et une union durable dans leur com- mun labeur. Comme le faisait remarquer l'un d'eux, les réunions de ce genre ont non seulement l'avantage d'éviter souvent, par l’examen des pré- parations originales, des polémiques longues et oiseuses, mais elles ont déjà enlevé bien de l'ai- greur à d’autres polémiques fatales, en cimentant des amitiés, en émoussant des inimiliés naissantes, se qui tombent à la vue d'une figure sympathique et d'une main loyalement tendue. Il nous est impossible d'entrer dans le détail des communications, dont aucune ne manqua d'intérêt, mais qui embrassent des sujets trop divers et qui d'ailleurs, ne sont pas encore publiées. Nous en retrouverons un certain nombre cette année et la suivante dans les différents chapitres de notre revue. Nous voudrions seulement ici citer au pas- sage quelques-unes des démonstrations qui ont parliculièrement attiré notre attention. Le Professeur Corning (de Bâle) présente de magnifiques coupes macroscopiques el topogra- phiques de différents organes chez des sujets adultes ou jeunes : articulalion du coude (coupe longitudinale), main (coupe transversale totale), doigt (coupe longitudinale), mamelle, etc... Ces coupes, faites à la celloïdine, colorées électivement, montées au baume du Canada entre deux lames de verre, sont bien supérieures aux coupes ordinaires d'organes congelés, peuvent être facilement proje- tées, et même, gràce à leur minceur relative (un à deux dixièmes de millimètre), être examinées au microscope. Ce sont de très précieux matériaux de travail. — Le Professeur Kohn (de Prague) montre des préparations macroscopiques de la chaine de ses «paranglions » ou «organes chromaffines » chez l'enfant. Ces organes, grâce à leur affinité pour les sels de chrome, ressortent seuls colorés en brun sur les tissus clairs et transparents. — Le D' von Korf (de Kiel) présente une série de coupes qui montrent bien le mécanisme de la formation de l’ivoire. Entre les odontoblastes, on trouve, venant de la pulpe, des fibres collagènes ascendantes assez grosses. Au-dessus de la couche des odontoblastes, elles s'épanouissent en pinceaux de fines fibrilles serrées, d'abord divergentes, puis sensiblement parallèles et formant bientôt une couche continue : ce sont les fibrilles de la substance fondamentale de l’ivoire. C'est plus haut seulement qu'on les perd de vue dans une masse uniformément colorée, là ou cette substance se calcifie. — Les D Berry et Lack ont réuni une intéressante série de prépara- tions montrant toute l'évolution de l’appendice cæcal. Chez le fœtus, la muqueuse est peu épaisse, déjà un peu infiltrée de leucocytes, mais sans follicules clos. Ceux-ci apparaissent chez l'enfant avant la sixième semaine, dans la région profonde de la muqueuse, encore mal limitée de la sous- muqueuse. C'est entre eux et le fond des glandes de Lieberkühn qu'apparaît ensuite la muscularis mucosæ : elle les rejette dans la sous-muqueuse (dixième semaine). Ils augmentent considérable- ment pendant la période de croissance, et leur grand développement suffit à caractériser l’appen- dice. Au delà de la vinglième année, ils ont ten- LE | 4 L > E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1097 dance à s’aplatir ; ils vont alors peu à peu en dimi- nuant, bientôt presque jusqu'à disparaître, en même temps que la muqueuse subit une transfor- mation plus ou moins atrophique. — Le Professeur Prenant (de Nancy) montre, dans les cellules muqueuses de l'estomac du Triton, un curieux mode de formation du mucus, par différenciation d'une sorte de série de plateaux muqueux super- posés. — Le Professeur Éternod (de Genève) expose des préparations d’un très jeune œuf humain, où il a vu, comme dans l'œuf de Peters, le tropho- derme, organe de nutrition épithélial, très nette- ment envahi par le sang maternel, mais sur toute sa surface, et non pas seulement à l'extrémité des villosités ; le travail qui se fait à l'extrémité des villosités n’est qu'un vestige du processus primitif. Le sac vilellin contenait un véritable vitellus, liquide il est vrai, couleur saumon, qu'il a vu changer de couleur et se troubler peu à peu. C'est cette liquéfaction du vitellus qui a modifié les condi- tions de la gastrulation. — Le Professeur Cristiani (de Genève) et M°®° Cristiani, sa collaboratrice, font voir les résultats de leurs greffes thyroïdiennes sur le rat blanc. Ces greffes sont placées dans le pavil- lon de l'oreille, afin qu'on puisse constater leur croissance à l'œil nu par transparence ; cetle crois- sance est d'autant plus rapide qu'on a réséqué au sujet un plus gros fragment de sa propre thyroïde. Si celle-ci est laissée intacte, le fragment s’atro- phie; sinon, il conserve sa structure pendant des mois el des années. Le rôle vicariant est manifeste. Une série de coupes à différents stades permet de suivre l'évolution du tissu thyroïdien. Tout le monde connait déjà l'importance des résullats obtenus par ces auteurs. — Le D° Hill (de Sydney, Australie) montre de très belles microphotographies des premiers stades de la segmentation chez le Dasyurus viverrinus, et des modèles de divers stades de développement de l'Ornythorhynque. — Le Professeur H. Hoyer (de Cracovie) a suivi le développement du système lymphatique chez le têtard de grenouille. Le processus est assez analogue à celui qui a été décrit par F. Sabin chez le porc. La formalion des sacs lymphatiques sous-cutanés est particulièrement intéressante. Dans la têle, par. exemple, à la face ventrale, on voit arriver de chaque côlé un vaisseau latéral bifurqué en Y, et terminé par deux culs-de-sac. Ce sont ces vais- seaux qui, en se dilatant simplement, de façon à venir bientôt se toucher et s’étaler sur presque toute la surface inférieure de la tête, y constituent les deux sacs lymphatiques sous-cutanés. Si la confluence peut jouer un rôle dans la formation des sacs, c'est la dilatation qui est le principal facteur. — Le Professeur Renaut montre ses cellules rhagiocrines du tissu conjonclif, c'est-à- REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 19 50. dire ces éléments qui, à une période de leur exis- tence tout au moins, élaborent de vérilables « grains de ségrégation », colorables à l’état vivant par le rouge neutre. — Le Professeur Van der Stricht expose une série très complète des stades de la différencialion du vitellus, dans l'ovule des chauves-souris, aux dépens des formations mito- chondriales. Mais nous ne pouvons tout citer. Rappelons seulement encore la présentation de modèles du développement de l'oreille moyenne, par le Profes- seur Hammar (d'Upsala); de modèles de l’urètre et des glandes de Cowper, par le D' Lichtenberger (de Heidelberg) ; de modèles d'éembryon de Prosi- miens, par le Professeur Keibel (de-Fribourg); — les démonstrations du Professeur Fusari (de Turin), sur les villosités intestinales; du D' Benda (de Berlin), sur la spermatogénèse: du Professeur Marceau (de Besançon), sur la fibre cardiaque; du Professeur Bryce (de Glascow), sur le développe- ment du Lepidosiren ; des D'° Bonnamour (de Lyon), et Mulon (de Paris), sur les variations de structure des surrénales, elc. Nous laissons de côté, provisoirement, celles de MM. Meves, Re- gaud, etc., dont nous aurons à parler dans les chapitres suivants. Nous ne pouvons pourlant passer sous silence une question à l'ordre du jour. C'est celle des neu- rofibrilles. Le Professeur Ramon y Cajal (de Ma- drid) en montra de fort belles par ses méthodes. D'autre part, le D' Donaggio (de Naples) croit pou- voir, par une méthode personnelle toute différente (thionine-pyridine), mettre en évidence un réti- culum fibrillaire beaucoup plus fin encore et dans toute l'étendue des cellules de la moelle épinière (chien), où beaucoup d'auteurs l'avaient nié. Ses préparations sont fort belles, mais n'exeluent pas absolument l’idée d’un artefact, d'un réticulum de coagulation. Une vive controverse s’est élevée à ce sujet entre les deux chercheurs, et la question demande à être reprise. Ce que nous appelions, l'an dernier, la bataille du neurone a donc continué, non seulement sur ce point de structure, mais sur la question de l'in- dividualité même du neurone, sans que la position des adversaires parût changer bien sensiblement. Contre le neurone, il y avait une communication du Professeur O. Schulze (de Wurzbourg), qui n’a pu être faite, une du Professeur Kohn (de Prague), sur le système nerveux périphérique, une du Pro- fesseur Barfurth (de Rostock), sur la régénération périphérique des nerfs. Les faits et arguments à l’appui sont du même ordre que ceux dont nous avons parlé, l'an dernier, à cette place. Pour les deux auteurs, la fibre nerveuse est formée par une chaine de cellules de Schwann, d'origine ectoder- 24** 1098 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE mique. Mais les partisans du neurone, Lenhossek en tête, proposent des interprétations différentes, et la question est loin d’être vidée. Une autre discussion assez vive s'est engagée entre les Professeurs Bardeleben et Gaupp sur la conslilution du maxillaire inférieur, l'un tenant pour l'homologie, l’autre pour la non-homologie de cette pièce squelettique dans toute la série des Vertébrés. II. — UN NOUVEAU PÉRIODIQUE ANATOMIQUE. Un nouveau périodique anatomique vient de s'ajouter au nombre loujours croissant des Revues, des Archives et des Journaux. Mais celui-ci a un but spécial, et, loin de compliquer le travail biblio- graphique, il est destiné à l'aider. C’est la Revue générale d'Histologie, publiée à Lyon (Storck, édi- teur), sous la direction des Professeurs J. Renaut et CI. Regaud. Comme le disent ceux-ci dans leur Préface, le nombre des (ravaux publiés est devenu si consi- dérable, leurs résultats sont parfois si contradic- toires « que même un histologiste de profes- sion, sous peine de se borner à n'être plus qu'un simple érudit de sa science, doit se résigner à restreindre sa documentalion parfaite à l’objet particulier de ses propres études ». El toute docu- mentation qui n’est pas parfaite et sévèrement cri- tique expose à de graves erreurs. À plus forte raison pourra-t-elle entrainer dans une fausse voie le physiologiste, l'anatomo-pathologiste, le mé- decin qui cherchent à en tirer des applications. Les Traités d'Hislologie, sans cesse remaniés, jamais au courant, sauf au moment de leur appari- tion, ne peuvent plus être suffisamment documen- taires sans atleindre des dimensions colossales. Ce qu'il faut aux chercheurs, aux professeurs chargés d’un enseignement, c'est une succession de revues générales, failes par des spécialistes, sur chacune des questions en voie de transforma- tion qui ont atteint un certain degré de maturité, c'est une collection de monographies, sans cesse remises au point, et dont l’ensemble formera une sorte de vaste Traité, indéfiniment remanié par de nouveaux apports, indéfiniment extensible, comme le domaine de la science dont il s'occupera. C’est à ces besoins qu'essaie de répondre le nouveau pé- riodique dès ses premiers fascicules, et, si les Directeurs peuvent continuer à lui assurer des collaborateurs consciencieux et compétents, il est permis d'espérer quil rendra de grands ser- vices !, ! Nous aurons à reparler plus loin des premiers fas- cicules. IT. — CeLzLure Er Tissus. LES GLOBULES ROUGES DU SANG : LEUR FORME ET LEUR STRUCTURE. 1. Forme. — D'après tous les classiques, les globules rouges [ou hématies, érythrocytes) du sang de l'homme et de la plupart des Mammifères sont considérés comme des disques assez minces, légèrement excavés sur leurs deux faces, et à bords arrondis, tendant à s’empiler à la facon de pièces de monnaie. Voici pourtant que cette description quasi sécu- laire est vivement attaquée de différents côtés. C'est d’abord Triollo', qui trouve les hématies pour la plupart sphériques, roulant dans la prépa- ration comme des ballons de caoutchouc; les autres sont en grains de café accolés deux à deux, ou encore polyédriques par pression réciproque à la façon des cellules hépatiques, jamais disposées en piles de monnaie. Et pourtant, l’auteur s'entoure de précautions. Pour éviter l’action de l'air et sur- tout de la vapeur d'eau, que l’on sait être nuisible aux hématies, il pique le doigt à travers une goutte de vaseline, préalablement déposée sur la peau. N'est-ce pas cet excès de précautions qui lui a été nuisible? Quoi qu'il en soit, Jolly ?, dont les tra- vaux sur le sang sont déjà bien connus, est venu répondre à l’auteur italien qu'il avait refait ses expériences sans arriver aux mêmes résultats. On trouve, il est vrai, des globules sphériques, mais manifestement en voie d'’altération; la plupart restent discoïdes et susceptibles de s'empiler. Les changements de forme sont faciles, fréquents : le retour au disque est la règle. D'ailleurs, dans le sang circulant, comme la grande majorité des au- teurs, il retrouve la forme classique typique. Mais voici qu'un autre chercheur, Weidenreich ?, s'inscrit aussi contre les données admises : pour lui, les hématies des Mammifères sont excavées en forme en cloche. Leeuwenhæck, dès 1719, a donné une description un peu analogue, et Weidenreich a pris lui-même comme point de départ une pre- mière observation de son maitre, le Professeur Schwalbe, sur le hérisson. Un auteur américain, F.J. Lewis ‘, est en outre venu depuis confirmer sa description; mais, jusqu'à présent, elle a été accueillie avec un certain scepticisme. Dans ses ‘ Triozro : Nouvelles recherches expérimentales sur la morphologie des éléments figurés du sang. C. R. Soc. de Biologie, 22 et 29 octobre 190%. . ? Jouy : C. R. de la Soc. de Biologie, 5 novembre 1904. % WEIDENXEICH : Studien über das Blut... 1. Form und Bau der roten Blutkôrperchen. Archiv für mik. Anat., t. LXI, 1902. — Die roten Blutkôrperchen. Zrgebnisse der Anato- mie, L. XIIT, 1903.—Ueber die Form der Säugererythrocyten.… Folia hœmatologica, t. 1, 1905. *K. J. Lewis : The shape of mammalian red blood cor- puscles. Journal of Medical Research., vol. X, 1904. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1099 travaux récents, Albrecht ‘ croit qu'il s'agit d’une déformation causée par la chaleur; M. Heidenhain ? ne l'admet pas. Pourtant, Weidenreich s'occupe du sang depuis plusieurs années déjà, et a fait de nombreuses expériences avec une bonne technique. Sa descrip- tion mérite donc d’arrèier l'attention. Tantôt il recueille le sang directement et rapidement (par piqûre du doigt), pour l'examiner sans addition dans la chambre humide, sur une platine chauf- fante; tantôt il le dilue dans le sérum du même animal, obtenu par défibrination et centrifugation. Dans ce dernier milieu, la forme se maintient pen- dant dus heures si la préparation est soigneuse- ment lutée, et quelles que soient les variations de température; les formes biconcaves n'y apparai- traient que tardivement et secondairement. Enfin, fait plus important encore, il retrouve le même aspect dans le sang circulant sur le vivant (capil- laires du mésentère du lapin ou de l'aile de la chauve-souris en état d'hibernation), et Lewis fait, de son côté, la même observation sur le cobaye. Weidenreich se heurte pourtant à une difficulté. Dans la solution de sel marin à 0,85 °/,, que l’on considère comme isotonique au sérum sanguin, les hématies prennent la forme discoïde: il faut une solution à 0,6 °/; pour trouver les cloches. L'auteur allemand en avait d'abord conelu que c’est cette seconde solution qui est isotonique, mais les résultats de la cryoscopie sont trop nettement en faveur de la solution à 0,85 pour qu'il ait pu con- server cetle opinion. Se basant sur certaines obser- vations de M. Heidenhain sur les phénomènes de tension superficielle, il a été amené à penser que la différence d'activité entre le sérum sanguin et la véritable solution salée isotonique tenait à la richesse en colloïdes du milieu; et, de fait, en ajoutant un peu de gélatine à obtenu les mêmes résultats que dans le sérum, c'est-à-dire « la persistance de la forme en cloche ». La forme des globules dépendrait donc, d’après lui, non seulement de la pression osmotique, mais aussi de la force moléculaire du milieu, c’est-à-dire de sa teneur en substances colloïdes. Enfin, lélas- ticité et la plasticité de la membrane des hématies entreraient également en jeu, cette membrane résis- tant davantage à l'extension dans le sel que dans le sérum, probablement parce qu'elle y perd de son élasticité par gonflement. Ces observations sont intéressantes, et, en somme, ne nous écartent pas énormément de la théorie classique. Ce qui leur a nui, c'est cette expression de forme en cloche qui fait image, mais à cette solution, il a | qui est évidemment exagérée. Si l’on suit de près la description de l’auteur, avec ses figures sous les yeux, on voit que, dans le sérum, et dans le sang examiné sans liquide additionnel, ce ne sont pas à proprement parler des cloches profondément exca- vées qu'il aurait eu le plus souvent sous les yeux, mais des disques un peu déformés, à centre légè- rement refoulé, de facon à être concavo-convexes et non symétriquement biconvexes comme on les a figurés jusqu'ici. Il y aura donc lieu de multiplier les observations sur le vivant, pour vérifier si cet aspect, qu'on décrivait jusqu'ici comme une défor- mation, représente la forme d'équilibre physiolo- gique. L'observation de l'aile des chauves-souris nous paraît pour cela un objet de choix, à condition qu'on fasse varier les conditions de l'expérience, parce que c'est là qu’on risque le moins de se placer dans des conditions anormales; or, on sait quelle est l'extrême plasticité des hématies, et combien les plus légères variations physiques ou chimiques suffisent à les modifier et à les déformer. 2. Structure. — La structure des hémalies est également l’objet de discussions; mais, sur ce point, on n’a jamais bien été d'accord. La plupart des histologistes, pourtant, admettent l'existence d'un « stroma » protoplasmique, plus ou moins spongieux, imprégné d’hémoglobine, et entouré d'une couche enveloppante plus dense. Or, Schäfer!, Weidenreich décrivent le globule comme une vési- cule formée d’une mince membrane avec contenu liquide. Déjà Cuénot (1889), Bergonzini (1890), Ma- callum (1892), Griessbach (1892), niaient toute structure dans le corps de l’hématie vivante, et considéraient comme produit par les réaclifs fixateurs le réticulum qu'on y observe dans cer- taines conditions. Bloch (1901) se joignait à eux dans une cerlaine mesure, mais en admettant que, malgré l'aspect homogène, il pouvait exister une différenciation qui nous échappe. Jamais on n'avait été aussi loin que Weidenreich (1903-1904, oc. cit.), lorsqu'il dit que l’hématie est une vésicule constituée d’une « membrane protoplasmique, d'aspect homogène, incolore », renfermant « un contenu liquide et sans structure, l’'endosome, qui représente essentiellement une solution d'hémo- globine ». Pourtant Hamburger” déduit de consi- dérations physico-chimiques l'existence d'un réticu- lum ; Negri”, Ruzicka* voient, chez les Amphibiens, f 1 Scnærer : On the structure of the Erythrocyte. Analo- mischer Anzeiger, {. XXVI. L'auteur y rappelle des vues qu'il a déjà émises dès 1892-1593. ? Après KoLLMANN (1873), Fücns (1877), PrrrzxER (1883), ete. HaweurGer : Osmotischer Drück und Ionenlehr | baden. 1902. SGTEA/ ‘ AzsrEcuT : Sitzungsber. Ges. Morph. Phys. München, 3 Necri : Memorie del R. Istituto Lombard Qu HPEHo ei St [e] t. XIX, 1903. t.XIX, 1902. LE (€ ? MarTIN HEINENHAIN : Folia hœmatologica, 1904. 4 RuzickA : Anat. Anzeig., t. XXIIT, 1903. Q dr à € mi LIBRARY ;- Z æ à 2 Z) à \ LA ;] Le Or 1100 une structure réticulée apparaître au moyen de.la coloration vitale par le rouge neutre ou le bleu de méthylène. Meves” croit que, même dans ces cas, c'est un produit artificiel; chez la Grenouille, pourtant, il croit trouver un véritable réseau, mais, chez la Salamandre, il n'existe qu'un certain nombre de filaments périnucléaires, contournés, épais, qu'il croit formés de mitochondries, c'est-à-dire de ces petits grains décrits par Benda dans le proto- plasme de nombreux éléments. Il y trouve, en outre une sorte de corpuscule paranucléaire. Cet auteur attire surtout l'attention sur la pré- sence d’une différenciation structurale toute parti- culière, qu'on ne retrouve pas chez les Mammifères, mais qui a été déjà signalée par Nicolas (1896, Bibl. anat.) chez les Amphibiens, et Dehler chez l'embryon de poulet. C'est un anneau périphérique, qui semble essentiellement destiné à maintenir la forme discoïde de l’hématie. Meves montre que cet anneau (/andreifen) est essentiellement constitué par une ou, plus généralement, par plusieurs fibrilles parallèles situées dans le bord même du corpus- cule. I] disparaît pendant la division caryocinétique, probablement employé à la constitution de la figure achromatique. Par certains réactifs, on y voit appa- raître des membranes et des lignes de granulations transversales de place en place. Dans le sang aban- donné à lui-même sur la lame, et soumis ainsi à une lente concentration, l'anneau marginal subit une sorte de contraction et ses deux moiliés longi- tudinales tendent à s’enrouler en spirale l’une autour de l’autre. Tous ces phénomènes sont surtout marqués chez la Salamandre terrestre. Weidenreich conteste ces données; pour lui, l'anneau n'est pas une formalion filamenteuse, mais simplement l'expression d'un pli de la mem- brane. Divers réactifs le fixent et maintiennent ainsi la forme; dans les réactifs non fixants (solu- lion salée), rien n'empêche le déplissement et, par suite, le gonflement de l'hématie, qui tend à devenir Sphérique. Mais, tout récemment, Bryce”, chez le Lepidosiren, montre de nouveau la réalité de cet anneau, qu'il voit apparaître au cours du dévelop- pement, lorsque le globule, de sphérique qu'il était, tend à s’aplatir, et qui, dans les vues de profil, sur les larges hématies de cet animal, se montre en coupe optique comme une série de points (dans un champ clair), correspondant à la section des fibrilles décrites par Meves. * Meves : Zur Struktur der roten Blutkôrperchen bei Am- phibien und Säugethieren. Mitt. des Vereins Schleswiq- Holsteinischer Aerzte, 1903. — Et Anatomischer Anzeïger, plusieurs articles en 1904, 1905; démonstration au Congrès de Genève, etc. = Tu. H. Bavyce : The histology of the blood of the larva of Lepidosiren paradoxa. Transaction of the Royal Society of Edinburgh, t. XLI, part. IT, 1904. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE Chez le même animal, Bryce voit un réticulum qu'il croit être le reste d’une structure alvéolaire primilive. De toutes ces descriptions, il résulte donc que l'hématie n’est pas absolument dépourvue de struc- ture ; la différenciation de ces fibrilles périphériques, les filaments isolés décrits dans le corps par Meves suffiraient à le prouver. Pourtant, presque tous les auteurs font, comme Meves lui-même, des réserves sur l'existence d'un réticulum. Ces réserves sont hautement justifiées, mais il y à loin de là à la présence, dans une vésicule, « d'une simple solu- tion d’hémoglobine ». Ne s’agirait-il pas simplement d'un protoplasme homogène, plus fluide que dans la plupart des cellules, et dans lequel peuvent s'élaborer des différenciations filamenteuses secon- daires? En ce qui concerne la membrane, Bryce en décrit une, Meves n'en trouve point. Mais il fait observer à Weidenreich qu'il n’est aucunement besoin, pour expliquer les phénomènes osmotiques, d'admettre l'existence d’une véritable membrane, au sens histologique du mot. Il suffit d'une crusfa, d'une couche limitante densifiée du protoplasme, dont personne ne songe à nier l'existence dans les hématies, où elle est particulièrement bien marquée, et où elle a toujours été décrite. Schäfer, Albrecht croient pourtant lrouver quelques particularités importantes dans cette membrane (ou couche limi- tante). Pour Schäfer, elle est constituée par une substance très molle et très élastique, contenantune grande quantité de lécithine et de cholestérine. La présence de ces corps, dont les propriétés physiques sont les mêmes que celles de la graisse, se laisserait démontrer par l’action de la chaleur, qui ramollit et peut fondre cette sorte de « myéline », par la coloration laquée que prennent les hématies après l’action des dissolvants de la graisse, par la couleur foncée que prend la membrane par l'acide osmique. Cette membrane serait donc constituée de nucléo- proléides, mais avec une couche superticielle for- tement imprégnée de ces substances grasses, peul- ètre même exclusivement formée de lécithine et de cholestérine. Albrecht retrouve la même couche superficielle « de nature graisseuse », fluide à chaud, formant enveloppe non miscible au plasma, mais permettant l'osmose. Il explique par là les changements de forme, l'agglutination, ete., et ce fait que des fragments d’hématies peuvent encore en remplir les fonclions. Au cours des recherches dont nous venons de parler, Meves, Weidenreich, Bryce donnent encore un grand nombre d'observations intéressantes. Bryce, par exemple, suit les phénomènes de la caryocinèse dans les hématies du Lepidosiren. I ne voit pas de centrosome au repos; mais, dès la E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 4 1101 prophase, il s'en forme deux très nets, ou un seul qui se divise ensuite. L'auteur suit également l'histogénèse, et voit à partir d'une certaine époque la plupart des globules rouges se former dans la rate. Il admet la descendance décrite par Pou- chet : une forme cellulaire initiale unique, d'où peuvent dériver aussi bien des hématies que des leucocytes. Ce Lravail est accompagné de très belles planches. JV. — SQUELETTE. — L'ORIGINE DE LA PARTIE OCCIPITALE DU CRANE. Nous avons analysé ici même, en 1901, des tra- vaux de Furbringer et de Gaupp, où ces auteurs admettaient le déplacement de la frontière cran o- vertébrale au cours du développement phylogéné- tique. Il y aurait eu un recul de cette frontière, et les crànes d'Amniotes contiendraient trois protover- tèbres de plus que les crânes de Sélaciens. Froriep! vient aujourd'hui combattre cette hypothèse; pour lui, il ya homologie de la frontière cranio-verté- brale chez tous les Vertébrés. Chez les Sélaciens, on trouve le nombre des somites occipitaux bien plus grand (13 chez les Torpedo) que chez les Rep- tiles (5) et chez les Mammifères (3). Mais, peu à peu, au cours de l’ontogénèse, les premières protover- tèbres s’atrophient, et les trois dernières seules persistent, comme chez les Mammifères, pour « entrer dans cette phase de développement spécial qu'on pourrait appeler occipitalisation »; c'est- à-dire que le mésenchyme qui en dérive se fusionne en une seule masse, et s’accroit subitement et con- sidérablement pour donner les masses latérales de l'occipital. Il est donc infiniment probable, d'après cet auteur, que les trois vertèbres (ou occipito- blastes) persistantes sont les mêmes partout, et qu'elles se sont maintenues précisément à cause du fait qu'elles on! toujours été indispensables à l'occi- pilalisation du cräne. V. — APPAREILS DIGESTIF ET RESPIRATOIRE. $ 1. — Appareil lymphoïde de l'intestin et production de l’entérokinase. Dans une thèse récente, Simon”, élève de Roger «et de Dominici, met en évidence un fait nouveau qu'il serait très intéressant de vérifier. Dans le derme de la muqueuse intestinale (mais en dehors des follicules), il trouve de nombreux leucocytes 1 Frorier : Die occipitalen Urwirbel der Amnioten im Vergleich mit denen der Selachier. Ze° Congrès interna- tional des Anatomistes, Genève, 1905. ? Simox : Contribution à l'étude de l'appareil lymphoïde de l'intestin. Thèse, Paris, 1904. éosinophiles de la variété polynucléaire (par oppo- sition aux myélocytes éosinophiles). Ces cellules feraient défaut dans les autres muqueuses, seraient bien plus rares dans la rate et les ganglions. C'est donc qu'elles auraient un rôle important dans l'in- lestin. Quel peut être ce rôle? Suivant ces éosino- philes chez le chien, l’auteur les voitsouvent engagés entre les cellules de l’épithélium intestinal, mais seulement dans les glandes de Lieberkühn. Ils tra- verseraient manifestement cet épithélium, et arri- veraient dans la cavité glandulaire, où ils se détrui- raient, mettant en liberté leurs granulations, et donnant ainsi l'un des éléments du suc entérique. Chez l'animal à jeun depuis deux ou trois jours, le nombre des éosinophiles est peu abondant dans le derme, et assez rarement on en aperçoit en train de träverser l’épithélium. L'injection dans le duo- dénum de grandes quantités de suc pancréatique, ou d'eau salée à la dose physiologique, déter- mine, au contraire, en un quart d'heure environ, une infiltration massive du derme par un nombre considérable d’éosinophiles, en une demi-heure à une heure une abondante diapédèse de ces cellules à travers l’épithélium. La richesse-de la muqueuse en kinase augmente parallèlement. L'auteur en conclut que les éosinophiles prennent une part importante à la formation de l’entérokinase, tout en pensant qu'ils ne sont pas seuls à la sécréter, qu'ils peuvent, d'autre part, participer à la forma- tion d’autres ferments. Dans le mème travail, Simon étudie dans son ensemble l'appareil Iymphoïde de l'intestin. Il y voit l’'analogue d'un vaste ganglion lymphatique étalé, dont les follicules corticaux seraient repré- sentés par les follicules clos isolés ou agminés (plaques de Peyer), et la substance médullaire par le derme même de la muqueuse, infiltré de mono- nucléaires, de macrophages, et surtout de nom- breux polynucléaires neutrophiles et éosinophiles. Tandis que, dans la substance médullaire du gan- glion, les éléments dégénérés sont détruits sur place, ici ils s’élimineraient de préférence dans la cavité intestinale en traversant l’épithélium. Au cours des infections expérimentales qu'il a provoquées, il a vu l'appareil lymphoïde intestinal réagir comme le reste du système hématopoïétique, mais à un degré moindre, la production de leucocyles et la diapé- dèse à travers l’épithélium augmenter dans des proportions considérables pour aider au rejet des produits toxiques. Dans un cas, chez le lapin, Simon a même pu constater la transformation myéloïde partielle des follicules, c'est-à-dire l'élaboration à leur intérieur d'hématies nucléées typiques. C'est une observation importante en faveur de l'unité du système hématopoïétique, que tant d'auteurs se | refusent à admettre. 1102 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE $ 2. — Dérivés branchiaux : le thymus. Le thymus a été récemment l'objet d’un assez grand nombre de travaux, dont quelques-uns sont particulièrement importants par leur riche docu- mentation. Tout le monde est d'accord depuis long- temps pour faire dériver cet organe du feuillet interne, d’ébauches épithéliales paires émanées d'une ou de plusieurs fentes branchiales, suivant les espèces. Mais on sait, d'autre part, combien le thymus est encore peu connu dans son évolution, dans sa structure, et combien varient les inter- prétations à propos des différents éléments de cetie structure. Deux principales théories sont depuis longtemps en présence. Les uns sont partisans d'une pseudomorphose (His, Stieda, 1880, 1881, etc.), c'est-à-dire qu'ils admettent que le tissu d’aspect lymphoïde (lymphocytes dans les mailles d'un réticulum cellulaire), qui constitue essentiellement l'organe adulte, se forme grâce à une invasion d'éléments mésodermiques dans l'ébauche épithé- liale primitive. De cette ébauche ne persisteraient que des vestiges : les groupes de grosses cellules arrondies au centre, aplaties en écailles à la péri- phérie, qu'on appelle corpuscules de Hassall. Les autres, au contraire, admettent une {ransformation directe de l’épithélium en tissu lymphoïde. C'est en ce sens que s'était prononcé, dès 1879,Kælliker ; c’est cette théorie qu'ont particulièrement développée Tourneux et Hermann (1887), Prenant (1893-1894). Quelques-uns, comme Schaffer (1893), von Ebner (1899), font provenir la partie centrale ou médul- laire de l’épithélium surtout, tandis que la corticale serait principalement d'origine conjonctive. Si nous arrivons aux travaux récents, nous trou- vons les opinions suivanles : Oscar Schullze (1897), Ver Eecke‘, Nusbaum et Prymak (chez la truite)‘, Maurer° (chez les Am- phibiens principalement), voient encore, dans le réticulum, du tisssu conjonctif de remplacement qui a pénétré l’ébauche épithéliale. Mais Beard‘, Hammar”, Stæhr° font dériver ce réticulum de ! Ver Eecxe : Structure et modifications fonctionnelles du thymus de la grenouille. Bull. de l'Acad. R. de Méd. de Bel- gique, 1899, et Ann. Soc, Méd. Gand, 1899. © Nuseaum et Prymak : Zur Entw. der lymph. Elementen der Thymus bei den Knochenfischen. Anatomischer Anzei- ger, L. XIX, 1901. # Maurer : Schilddrüse und Thymus, etc. Morpholog. Jahrbuch, & XXVII, 1899, — et Hertwigs Handbuch. d. vergl. u. exp. Entwickl., 1902. * Bearp : The source of leucocyles. Anatom. Anzeig., &. XVIII, 1900 ; et The origin and histogenesis of thymus. Zoolog. Jahrb., t. XVII, 1902. ® Iamwar : Zur Histogenese und Involution der Thymus- drüse, Anatom. Anzeiger, {. XXVII, 1905. — Et Congrès des Anat., Genève, 1905. ® Sroesr : UÜeber die Thymus. Sitzungsberichte der phys. medicin. Gesellschaft zu Würzburg, 8 juin 1905.—Et Lehr- buch der Histologie, 1905. l'épithélium primitif. Hammar et Stæhr vont plus loin. Pour eux, ce n’est point du tissu conjonctif; c'est encore du tissu épithélial qui a pris la dispo- silion réticulée, comme cela arrive en d’autres points déjà bien connus : dans la partie centrale de l'organe de l'émail (bourgeons des dents), dans le follicule de De Graaf de plusieurs espèces animales (Hammar). Quant aux éléments contenus dans les mailles du réseau, et très généralement considérés jusqu'ici comme des /ymphocytes, Stœhr en fait également « des cellules épithéliales, demeurées à un stade jeune longtemps persistant ». Pour lui, on peut trouver aussi des leucocytes, mais guère plus qu'en tout autre organe. Les autres auteurs les consi- dèrent comme des lymphocytes, mais ne sont pas d'accord sur leur origine. Hammar, Bryce ‘réservent leur opinion. Ver Eecke, Goodall?, Lewis* (chez les Oiseaux) y voient des éléments immigrés de l’exté- rieur ; tandis que O. Schultze, Maurer, Beard, Nus- baum et Prymak, Ghika*, tout en élant d'accord avec les précédents sur leur nature lymphocytaire, les font dériver de l’ébauche épithéliale primitive. Beard (chez les Sélaciens) va même beaucoup plus loin. Pour lui, c'est cette ébauche qui représente l'origine première des leucocytes dans l'ensemble de l'organisme, et Prymak” se range à son avis chez les Téléostéens. Quant aux corpuscules de Hassall, Nusbaum et Prymak les considèrent encore comme des restes épithéliaux non transformés en leucocytes; Scham- bacher®, même, comme les derniers vestiges d'un canal excréteur ramifié; Goodall, Lewis soutiennent des opinions analogues. Au contraire, à la façon d'Amman, de Watney (1882), de Prenant (1893), Wallisch *, Magni*, Maurer, Hammar, Stæbr les voient se former secondairement aux dépens da réseau et augmenter de nombre avec l’âge. Reprenons quelques-uns de ces points en sui- vant particulièrement le travail et les figures de Hammar (d'Upsala), qui a étudié simultanément l’évolution complète du thymus chez l’homme, le 1 Tu. H. Bryce : The histology of Blood. Lepidosiren. Transact. of the R. Society of Edinburgh, t. XLI, 1905 — Et Development of the Thymus gland in Lepidosiren. 1 Con- grès internat. des Anat., Genève, 1905. ? GoopaL: The postnatal changes in the Thymus of Guinea- pigs. Journal of Physiolog., t. XXXI, 1905. ; # Lewis : The Avian Thymus. Journal of Physiol., t. XXXII, 1905. * Gui : Etude sur le Thymus. Thèse, Paris, 1901. 5 Prymar : Fein. Bau und Involution der Thymusdr. bei den Teleostiern. Anatom. Anzeig., t. XXI,1902. 8 ScaamBaceR : Ueber die Persistenz von Drüsenkanälen. Diss. medic., Strassburge, 1903. — Et Virchow's Archiv, t. CLXXIT. 7 Wazuscn : Zur Bedeutung der Hassalschen Kôrperchen. Archiv für mik. Anat., t. LXIIL, 4903. # Macnr : Ueber einige histol. Untersuch. Arch. f. Kin- derheïlk., t. XXX VIII, 4903. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D ANATOMIE 1103 chien, le chat, le lapin, le rat, le bœuf, chez plu- sieurs espèces d'Oiseaux et d'Amphibiens. Autant l'origine des lymphocytes reste incer- taine, dit Hammar, autant celle du réseau est évidente ; et il s'attache surtout à cette partie de l'histogénèse. Les vaisseaux sanguins commencent à pénétrer dès le stade où l'organe est représenté par une simple masse épithéliale. Pour former réseau, les cellules de cette masse, d'abord ser- rées, s'écarlent, se munissent de petits prolonge- ments qui vont s’allongeant graduellement, sont de plus en plus lächement unies. Ainsi naît le réticulum sur les fœtus humains de 21 à 31 millimètres de longueur. Sur le pre- mier, on lrouve toutes les transitions : certaines plages restent encore purement épithéliales, tan- dis que d'autres sont nettement réticulées. Les mailles du réseau sont d’abord vides, mais, vers la fin du deuxième, le commencement du troi- sième mois, on voit se produire deux changements. Les cellules des parties centrales grossissent, et par conséquent se rapprochent, d'où un aspect plus compact: le réticulum périphérique reste, au contraire, grêle et peu serré; dans ses mailles apparaissent des lymphocytes de plus en plus nombreux, siège bientôt d'abondantes caryo- cinèses. Ainsi se différencient l’une de l’autre, dans chaque lobule, une substance corticale et une substance médullaire. Par places et pendant long- temps, chez le chien surtout, l’assise de cellules la plus périphérique peut garder la disposition épi- théliale avec des transitions insensibles au réli- culum; celte disposition (sur laquelle Prenant, Chiari, ont déjà attiré l'attention) peut reparaitre également au cours de l'involution ; l’auteur y voit la preuve manifeste de la nature épithéliale persis- tante de toute charpente réticulée. Une autre preuve, et qui sépare complètement le thymus des vrais organes lymphoïdes, c'est que, dans ces der- niers, les cellules de charpente forment généra- lement des fibres de réticuline, et même un nombre plus ou moins grand de fibres collagènes fines. Or, ici, les colorations spécifiques (méthodes de Hansen, de Mallory, etc.), les digestions arti- ficielles par la trypsine, ont montré à l’auteur suédois que la transformation n’aboutit jamais à la formation de fibres conjonctives vraies ou fausses, et que le réseau reste purement cellulaire. Chez les Amphibiens, du reste, il est compact et serré, d'aspect plus épithélioïde. Dans la substance médullaire, Hammar voit de très bonne heure se présenter des diflérenciations particulières. Elles sont loutes caractérisées par l'Aypertrophie de certaines cellules du réticulum, isolées ou par groupes. Assez rarement, ces éléments restent de simples cellules géantes, à un ou plu- sieurs noyaux, arrondies ou reliées au réseau. Le plus souvent, la différenciation est poussée plus loin et aboutit, chez les Oiseaux et les Amphibiens, à la formation de ce que Hammar appelle les ce/- lules myoides, chez les Mammifères à la consti- tution des corpuscules de Hassall, qui sont par conséquent des formations analogues. Les cellules myoïides ont été vues aussi par Pensa ‘, qui les considère comme de véritables éléments musculaires à développement retardé, nés de l’épithélium du cœælome de la troisième fente branchiale, et inclus dans le thymus. Situées de préférence dans la substance médullaire, elles ont un corps réfringent, en majeure partie formé de fibrilles souvent lisses et concentriques, plus ou moins groupées en faisceaux de directions variées, mais parfois aussi délicatement striées, et pouvant offrir tous les détails de structure de la fibrille musculaire striée ordinaire. Chez les Amphibiens, ces cellules restent le plus souvent arrondies; mais, chez les Oiseaux, elles s’allongent plus volon- tiers pour former de véritables fibres, qui restent généralement en continuité avec le réseau. À ces éléments singuliers (trouvés également par Pensa chez les Reptiles), Hammar n'a pu voir jusqu'ici aucun lien avec le système nerveux par la méthode de Golgi; l'excitation directe du thymus ne luia pas montré de contractions. Il hésite donc à les considérer comme de véritables éléments muscu- laires au point de vue fonctionnel. Leur présence ici montre que des fibres striées peuvent provenir de l'entoderme, et par conséquent des trois feuillets blastodermiques. Chez les Mammifères (veau, par exemple), on rencontre simplement un certain nombre de gros éléments arrondis, réfringents, à fibrillation plus ou moins concentrique. Mais, chez les Mammifères, les cellules hyper- trophiques du réticulum se comportent générale- ment d'autre façon. Une d’entre elles, de place en place, s’arrondit en grossissant, refoule les voi- sines qui s’hypertrophient aussi, les aplatit et s'en coiffe pour s’en former une coque écailleuse ; l’en- semble forme un corpuseule de Hassall. Les cellules centrales subissent souvent alors la dégénérescence chromatique, hyaline, ou graisseuse. Il peut s'y former des cavilés avec débris cellulaires. Il peut exister aussi des corpuscules composés, par sou- dure de plusieurs voisins, ou bien des amas, des trainées irrégulières de cellules hypertrophiques, toujours unies au réseau par leurs prolongements extérieurs, et montrant souvent des transitions à ce réseau. Il peut enfin s'y former de véritables petits kystes, tapissés en partie ou en totalité de cellules ne —— 1 Pgxsa : Bollettino della Soc. med. chir. de Pavia, 1902 et 1904. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE épithéliales ciliées, ou à cuticules, à bordure en brosse, el même, chez les Amphibiens, de cellules muqueuses. Toutes ces particularités sont en faveur de la conception épithéliale du réticulum. Les cor- puscules de Hassall n'existent pas dans le réseau thymique dès son origine ; les premiers et les plus simples se forment chez le fœtus humain de 65 à 70 mm.,etilne cesse de s’en constituer, jusque dans la première partie de la période d'involution. Wal- lisch a montré, dès 1903, que leur volume tolal augmente avec l’âge, et que, chez un enfant de six mois, il représente plus de 180 fois le volume d'un thymus entier d’un fœtus du troisième mois. Ce ne sont donc pas des vestiges plus ou moins atrophiés de l'épithélium primitif ou d’un canal excréteur. Sur l'origine des lymphocytes contenus dans les mailles, Hammar est beaucoup plus réservé. Tout en penchant, semble-t-il, pour la théorie de l'im- migration, il reconnait qu'il n’y a pas jusqu'ici d'argument bien probant en sa faveur, et que cer- tains lymphocytes sont munis de prolongements qui semblent unis au réseau. Ce sont ceux que l'on a considérés comme des formes de transition. Mais, dès leur apparition, les lymphocytes montrent de nombreuses caryocinèses, assez faciles à distinguer de celles du réseau, et subissent une prolifération abondante. Le thymus devient alors une source de leucocytes. Ce n'est point, comme nous l'avons vu, l'opinion de Stæhr, qui ne voit dans les « prétendus lympho- cytes » que des cellules épithéliales particulières. « Le thymus, dit-il, est un organe épithélial du commencement jusqu'à la fin », et dans toutes ses parties. Si l'on accepte cet exposé, ajoute-t-il, toutes les obscurités disparaissent; tous les efforts pour faire dériver les leucocytes de l’entoderme ont échoué ici comme ailleurs. En face des réserves de Hammar et de Bryce, il est difficile, à l'heure actuelle, de suivre Stæhr jus- que-là, vu l'absence d'arguments absolument pro- bants; mais il semble bien définitivement acquis aujourd'hui, grâce à Hammar particulièrement, qu'il ne doit plus rester de doules en ce qui con- cerne le réseau : il est franchement épithélial; or, c'est la partie essentielle, la première formée, la dernière dégénérée: les lymphocytes sont des éléments beaucoup plus labiles, tard apparus, tôt disparus à l'état normal, diminuant et disparais- sant facilement quand la nutrition générale est en souffrance. : Hammar a également suivi l’involution de l'or- gane. Il distingue une involution accidentelle, qui se produit lorsqu'il existe une diminution ou des troubles de la nutrilion (inanition, maladie), et une involution normale, due aux progrès de l’âge (Altersinvolution). Dans les deux, les lymphocytes disparaissent d'abord, le réticulum se dégage, les processus de dégénérescence s'accentuent dans les corpuscules de Hassal et dans tout le tissu. Dans l'involulion normale, les lobules diminuent pro- gressivement de volume, tandis que le tissu adi- peux se forme et augmente entre eux, mais le tissu lymphoïde se maintient longtemps. Les lympho- cytes disparus, la structure épithéliale réapparait dans la couche périphérique. Il est impossible d'assigner une date aux différents stades de l'invo- lution, les différents lobules de la même glande se comportant différemment, quelques-uns résistant très longtemps. Chez l'homme, d'ailleurs, le thymus persiste plus longtemps qu'on ne pense. Sur qua- rante sujets sains, Hammar à trouvé que le poids augmente jusqu'à la puberté. C’est seulement à trente-cinq ans qu'il commence à diminuer. Chez un suicidé de cinquante-trois ans, il existait encore de la substance médullaire, entourée par places d'une substance corticale bien définie. Ajoutons encore qu'Hammar et Bryce s’'inscri- vent tous deux contre la généralisation à tous les Vertébrés des données de Beard, qu'ils n'ont pu pourtant contrôler chez les Sélaciens. Chez le Lepidosiren (Bryce), les leucocytes abondent dans l'organisme alors que le thymus n’est encore qu'un amas épithélial ; ils préexistent même à son appari- tion. Chez l’homme (Hammar), on en trouve égale- ment en abondance au deuxième mois (embryon de 17 et 21 millimètres), alors qu'ils n’apparaissent dans le thymus qu'au troisième mois. Des rapports analogues existent chez le chien, chez le poulet. Le thymus n’est donc point la source première des leucocytes dans l'organisme. VI. — APPAREIL CIRCULATOIRE. $ 1. — Les-artères de la base du cerveau. Nous avons analysé précédemment (1903) un tra- vail de M! Bertha De Vriese sur le développement ontogénétique et phylogénétique des artères des membres. Le même auteur aborde aujourd'hui !, dans les mêmes conditions, l'étude des artères de la base du cerveau. D'après ses recherches, le domaine cérébral irrigué par la carotide interne s'étend d’abord bien plus loin en arrière chez le fœtus que chez l’homme adulte. C'est secondaire- ment que la vertébrale finit par prédominer dans celte partie postérieure. La cérébrale postérieure du fœtus provient aussi souvent de la première que de la seconde. Il résulterait de ces changements une atrophie graduelle et secondaire de la partie de la cérébrale postérieure primitive née de la, 1 B. De Vruse : Sur les artères de la base du cerveau Verhandl, der Anatom. Gesellsch., Jena, 190%, E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1105 carotide, partie qui forme la communicante postérieure de l'adulle. Souvent, en outre, chez le nouveau-né, nait de la communicante antérieure une grosse artère médiane du corps calleux, qui peut persister chez l'adulte. L'existence de cette artère impaire paraît à l'auteur une disposition primi- tive; elle nailrait de la fusion des deux extrémités terminales des carotides. $2. — Le myocarde; ses vaisseaux lymphatiques. Nous avons rendu compte ici, il y a déjà trois ans, des travaux qui ont modifié les conceptions anciennes sur la fibre musculaire du cœur (Hoyer, Marceau, M. Heidenhain, Hoche, Godlewsky, etc.), et qui ont notamment montré que le segment de Weissmann n'est pas une cellule. Nous n'avons _ donc pas à revenir en détail sur cette question. Mais nous devons signaler la revue générale que Renaut et Mollard ‘ viennent d'y consacrer, et qui est une mise au point très complète. Les auteurs n'admetlent pas l'existence d'un véritable sarco- lemme dans la fibre cardiaque ; ils pensent que sa irès mince enveloppe est ici une sorte de « sarco- lemme resté embryonnaire », ou plutôt une forma- tion exoplastique du sarcoplasme marginal: ils proposent de l'appeler exosarcoplasme pour le distinguer du vrai sarcolemme des fibres striées ordinaires. Dans leur revue, Renaut et Mollard ne s’occu- pent pas seulement de la fibre contractile: ils trai- tent du myocarde en général; et nous nous arrête- rons un instant sur la question du tissu conjonctif et des vaisseaux lymphatiques du cœur, qui, elle aussi, a subi d'assez grandes modifications. La ques- tion des fentes de Henle est définitivement tranchée: il n'y a point d'endothélium lymphatique à leur sur- face; ce ne sont point des cavités lymphatiques. Le myocarde est divisé en gros faisceaux, entourés chacun d'une gaine ayant les caractères, non d'une aponévrose, mais d'une simple enveloppe fibreuse, à faisceaux divergents et lächement entre-croisés (feuillets fenêtrés et formation fasciculante de Durand, 1879), réunis pourtant entre eux en une membrane continue par la substance conjonctive amorphe. Les écarts existants entre ces gaines fibreuses sont les fentes de Henle : celles-ci sont comblées, remplies par un {issu conjonctif läche, continuation du tissu sous-péricardique, et d’au- tant plus abondant (les fentes étant plus larges) qu'on se rapproche davantage de l'épicarde. Ce tissu lâche porte par places des trainées de vési- cules adipeuses, partant des vaisseaux sanguins, parfois, mais assez rarement, d'un capillaire lym- ! Rexaur et Mozcaro : Le Myocarde. Revue générale d'His- tologie, t. I, Paris et Lyon, Storck, 1905. phatique, hientôt « terminé en ampouie close ou en pointe effilée », prolongement d'un des lympha- tiques sous-péricardiques. Enfin, il existe, à l'inté- rieur des faisceaux musculaires principaux, une troisième formation conjonctive : c'est la formation conjonclive intrafasciculaire, formant des cloisons de plus en plus minces (à mesure qu'elles circons- crivent des faisceaux plus petits) du périmysium interne. En dernière analyse, on retrouve encore autour de chaque fibre « un manchon constitué par une pellicule connective d’une minceur extrême ». Ces « manchons connectifs pellucides » sont formés de substance amorphe contenant quelques fibres tramulaires, et se continuant avec la membrane propre des capillaires sanguins. Il ne faut pas les confondre avec le mince exosarcoplasme resté adhérent à la fibre, généralement rétractée à leur intérieur. C'est là encore, jusque dans ses plus fins détails, une variété du tissu conjonctif modelé, offrant une voie facile à la sclérose. On comprend que, d’après cette description, le myocarde n'est plus « une éponge lymphatique », comme le disait Ranvier. Chez les Mammifères, les seuls véritables et abondantis vaisseaux lympha- tiques du myocarde sont silués à sa surface, sous le péricarde viscéral : ce sont les larges capillaires lvmphatiques sous-péricardiques. De là, partent des branches qui s'engagent, sur un court trajet seulement, dans les fentes de Henle et s'y termi- nent en culs-de-sac. L'existence de lymphatiques sous l’endocarde reste douteuse. C’est seulement par remplissage forcé, puis rupture des vaisseaux méritant véritablement ce nom, qu'on développe dans les fentes de Henle, avec les injections colo- rées, des « espaces pseudo-lymphatiques » arlifi- ciels, privés de la paroi endothéliale caractéris- tique. C'est par ce procédé faulif qu'Albrecht* encore, en 1903, arrivait à celte conclusion, con- forme à celle de Ranvier, à savoir que l’origine des voies lymphatiques se trouve partout dans le myo- carde. Des recherches plus récentes de Bock? viennent confirmer en majeure partie la description de Renaut et Mollard, bien que l’auteur se soit servi de masses à injection colorées (bleu de Prusse). Il ne voit point de fentes lymphatiques entre les fibres ni entre les faisceaux, mais seulement un système de capillaires lymphatiques relativement étroits anastomosés en réseau, avec, de place en place, des rameaux terminaux en cæcum. Bock ne diffère des auteurs français que sur un point : ce réseau lym- phatique lui apparait très riche. Il est développé 1 Arerecar : Der Herzmuskel und seine Bedeutung. Ber- lin, 1905. ? Bock : Die Lymphgefässe des Herzens. Anatomischer | Auzeiger, t. XXVII, juin 1905. 1106 E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE parallèlement au réseau sanguin et à ses côlés, mais ! seur du follicule épithélial; la torsion de celui-ci moins régulier el un peu plus serré, de telle facon que chaque fibre musculaire peut être considérée comme accompagnée d'un capillaire sanguin et d'un capillaire lymphatique (ou de deux), souvent côle à côte, suivant en tous cas la même direction, parallèles à la fibre, avec des anastomoses trans- versales ou obliques. Le vaisseau lymphatique est généralement un peu plus large que le vaisseau sanguin, et laisse souvent apercevoir les noyaux de son endothélium. De belles figures en couleur, très démonstratives (coupes en long et en travers), accompagnent ce lravail. Les unes proviennent du chevreuil; les autres ont été fournies par un cœur humain injecté dans d'excellentes conditions (sup- plicié,-une heure après la mort). VII. — TÉGUMENT EXTERNE. — LE MÉCANISME IHISTOLOGIQUE DE LA FRISURE DU POIL. On à altribué la frisure des productions pileuses à des causes diverses. Pour les uns, elle réside dans une conformation particulière du poil lui-même, qui serait l'absence de moelle (mais Nathusius a rectifié cette erreur), la finesse du poil, sa section elliptique (Browne, 1853, Weber, Henle, Kælliker, Pruner-Bey). Pour les autres, elle est due à la con- figuration du pore, à la forme spiroïde ou incurvée du follicule (Nathusius, 1866, Gætte, 1867, Unna, 1896, Duclert, 1888, etc.). Vigier et Bloch‘ ont étudié récemment le cuir chevelu de deux nègres du Congo, morts à Paris, et la peau du mouton mérinos. Contrairement aux auteurs précédents, ils ne voient dans l’enroulement plus ou moins spiroïde du folli- cule qu'un phénomène secondaire. La cause pre- mière est dans la présence d'une créle semi-cir- culaire oblique, existant dans la concavité d'un coude très marqué, que forme le bulbe immédia- tement au-dessus de la papille. Cette crête n’est qu'un fort épaississement de la paroi fibreuse du follicule, épaississement essen- tiellement formé de fibres transversales ou plutôt obliques. Elle s'enfonce dans la gaine épithéliale externe, épaisse au-dessus d’elle, très réduite, au contraire, au-dessous. « La présence unilatérale de cette crête au niveau de la partie supérieure du bulbe et son orientation légèrement oblique doivent déterminer une compression et un dépla- cement des éléments encore jeunes et plastiques du poil, d’où résulte l’enroulement en spire de celui-ci. » La compression agit sur toule l’épais- 1 Vicien : Mécanisme histol. de la frisure. C. R. de l'Assoc. des Anatomistes, Toulouse, 1904. — BLoca et Vicrer: Recher- ches histol, sur le foll. pileux. Bull, de la Soc. d'Anthropo- logie, 190%. est, par conséquent, déjà un phénomène secondaire. C'est au contact seulement de la crête que le poil commence à décrire une spire dans le derme, et aussi à pivoter sur son axe. Contrairement à ce que pensent Fritsch et Unna, la configuration de la papille n'a pas grande influence sur la forme du poil. Les cheveux du nègre, nés d’une papille arrondie, sont générale- ment de section elliptique; les brins de laine du mouton mérinos, nés d’une papille aplatie, lingui- forme, sont parfaitement cylindriques. VIII. — ORGANES GÉNITO-URINAIRES. $ 1. — Les anomalies congénitales du rein. Chaque jour sont signalées des anomalies de ce genre; mais ces observations restent isolées, et il est assez rare qu'un anatomiste s'impose la besogne un peu ingrate de les réunir, de les critiquer, de les classer, et d'essayer d'en tirer des déductions utiles. C'est ce travail que vient de faire Gérard, après l'avoir préparé dans la thèse de son élève Cadoré*. « Les anomalies des reins, dit-il, qu'on peut presque toujours expliquer par des arrêts de développement, sont en général compatibles avec la vie; c'est ce qui fait leur grand intérêt : car, si un rein anormal peut passer inaperçu, n'attirer l'attention par aucun signe spécial, et, ordinaire- ment, n'être découvert qu'après la mort, il peut, par contre, être accidentellement touché par les divers processus pathologiques; il importe donc de bien connaître les anomalies, et de préciser les caractères anatomiques capables de les faire décou- vrir chez le vivant. Nous verrons, en effet, qu'il est souvent possible de soupçconner un rein unique, et de dépister un rein en ectopie congénitale. » Gérard réunit 527 cas d'anomalies, dont un certain nombre d'observations personnelles de rein en fer à cheval et de rein fortement atrophié; il en donne de bonnes figures. Sur ces cas, il y en a 218 d'absence congénitale d'un rein (Ballowitz, 1895, Arch. f. pathol. Analt., dans sa monographie, n'en avait réuni que 213), 17 d'atrophie absolue d'un rein, 15 d'’augnentalion du nombre, d’ailleurs dis- cutables (3 reins), 90 de reins en fer à cheval, 22 de reins concrescents, etc. Gérard arrive à établir la classification suivante, qui se rapproche de celle, antérieure, de Lance- reaux (1875, Dict. Dechambre), et moins de celle de Jacquemet et Musy (1894) : 1 Gérann : Les anomalies congénitales du rein chez l'homme. Journal de l'Anatomie et de la Physiol., juin 1905. 3 Canoré : Thèse, Lille, 1903. E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1107 ANOMALIES CONGÉNITALES DES REINS. 1. Anomalies par défaut. ( complète du système urinaire. { congénitale absolue d'un des deux reins. { relative d'un des deux reins. Atrophie ? cs é { { absolue d'un des deux reins. Absence IL. Anomalies par excès. Augmentation du nombre des reins. III. Anomalies de forme des reins. IV. Anomalies par fusion. Symphyses rénales. Rein en fer à che- ( à concavité supérieure. LINE à concavilé inférieure. transversal au-devant de la colonne \ vertébrale. longitudinal sur un des côtés de la Rein concrescent | colonne vertébraie. V. Anomalies de situation. Ectopie intra-pelvienne du rein. Dans ses conclusions, l’auteur insiste sur la fré- quence relative de l'absence congénitale totale de l'un des reins (plus fréquente à gauche et dans le sexe masculin). « Dans les cas de rein unique, dit-il, avec absence congénitale complète du rein du côté opposé, les anomalies concordantes des organes génitaux internes du même côté sont la règle, leur état normal l'exception. » Donc une malformation unilatérale de l'ovaire, des trompes, une anomalie de l'utérus ou du vagin devra faire penser à l'absence possible d'un rein, « du côté opposé aux anomalies ». Au contraire, « dans le cas de rein unique formé par la coalesence de deux organes congénitalement accolés (reins en fer à che- val, reins concrescents, etc...), l’anomalie concomi- lante des organes génitaux internes est absolument exceptionnelle ». Le rein unique, dans ce cas, pré- sente toujours de l'hypertrophie fonctionnelle; la possibilité de sa présence ne doit jamais quitter l'esprit du chirurgien. Pas plus que ses devanciers, Gérard n'a pu établir dans quelles proportions on rencontre les malformations du système rénal. Elles sont relalivement rares jusqu'ici, mais plus on les cherche avec soin et plus on en trouve. $ 2. — La capsule fibreuse du rein. Le rein est entouré, comme l’on sait, d'une atmo- sphère adipeuse, et, plus en dehors, d'une assez forte capsule fibreuse. Le développement seul pouvait donner la signification de ces envelop- pes accessoires. Fredet' l'a suivi sur des fœtus humains de 6 à 14 centimètres. Sur les premiers, le rein repose en arrière sur un fascia développé au- devant des muscles de la paroi abdominale posté- rieure, que l’auteur appelle fascia prépariétal. En avant, il est recouvert par le fascia péritonéal. Or, dès cette époque, il existe une capsule fibreuse autonome enveloppant le rein, capsule qui se 4 Freper : Note sur la formation des capsules du rein chez l'homme. Journal de J'Analomie, nov. 1904. fusionne en arrière, près de la ligne médiane, avec le fascia prépariétal, en avant avec le fascia péri- tonéal. Fermée en bas et libre, fermée en haut el adhérente à la gaine de la capsule surrénale, l'en- veloppe fibreuse ne s'ouvre qu'en dedans pour recevoir les vaisseaux. Les capsules des deux reins sont indépendantes. Au cours du développement, cet état se modifie peu à peu par l'apparition, entre la capsule périrénale et l'enveloppe propre du rein, de tissu cellulaire läche qui se charge de graisse pour former l'enveloppe adipeuse. Plus tard, le feuillet antérieur de la capsule s'épaissit en se fusionnant en une seule lame avec le fascia péri- tonéal et la lame fibreuse mésentérique. $ 3. — Les vaisseaux sanguins des organes génito-urinaires. Sous ce litre, Farabeuf' vient de publier et de présenter à l’Académie de Médecine une descrip- tion très complète et très précise de la vasculari- sation des organes génitaux et du bassin, qu'il est impossible de résumer ici, mais que tous les ana- tomistes devront consulter. Il insiste partliculière- ment sur quelques faits. C’est d’abord que, malgré leurs anastomoses fréquentes, les vaisseaux du pé- rinée et ceux du bassin sont nettement distincts. : — Les branches descendantes de l'artère utérine se groupent de telle facon, en arrière et en avant, sur Je col, que la dilatation et même la déchirure de ce col sont possibles sans rupture artérielle. — Les veinules qui accompagnent l'artère ombilicale oblitérée vont se jeter dans les vésicales inférieures, et, par conséquent, ne suivent pas le même trajet que leur arlère, etc... L'ouvrage est illustré de nombreuses figures. $ 4. — Constitution de la membrane pellucide de l’ovule. On considérait jusqu'ici la membrane pellucide de l'ovule des Mammifères comme une couche homogène percée de canalicules radiés. Par ces canalicules, on admettait (avec Retzius et plusieurs autres auteurs) que les cellules folliculeuses envi- ronnantles envoient des prolongements protoplas- miques qui viennent s'anastomoser avec le cyto- plasme ovulaire et concourent directement à sa nutrition. Il n'en est pas ainsi, d’après Regaud et Dubreuil*. Sur le follicule mür, ces auteurs mettent bien en évidence les prolongements radiés, mais ces prolongements se colorent par le picro- { Farageur : Les vaisseaux sanguins des organes génito- urinaires, du périnée et du pelvis. Paris, Masson, 1905. — Amplification de la Thèse de son élève le D: Cerr et Acad. de Méd., avril 1905. 2 RecauD et DuereuiL : Sur la structure de l'ovaire des Mammifères. Ier Congrès international des Anatomistes, Genève, 1905. 1108 E. LAGUESSE —- REVU E ANNUELLE D'ANATOMIE bleu dans la double coloration safranine picro-bleu, et sont en continuité non avec le protoplasme des cellules folhiculeuses, mais avec une sorte de sub- slance intercellulaire formée par le fusionnement de leurs exoplasmes. Regaud et Dubreuil voient, au cours du développement, la pellucide se constituer par l'accumulation de filaments exoplasmiques de ce genre, les uns radiés, les autres circulaires très serrés. En dehors de la pellucide proprement dite persiste une zone feulrée finement granuleuse, où les filaments sont moins serrés. En dedans d'elle, contre l'œuf, on trouve, au contraire, dans le follicule mûr, une fine membrane d'aspect anhyste, colorable en masse par le picro-bleu. IX. — SYSTÈME NERVEUX. — TERMINAISONS NERVEUSES SENSITIVES DANS LES MUSCLES. — FIBRILLES ULTRA- TERMINALES. Il y a longtemps déjà (Kælliker, 1850, 1862) que l'on connait l'existence des Lerminaisons nerveuses sensitives dans les muscles, mais l'étude des appa- reils terminaux spéciaux et la délermination de leur fonction est beaucoup plus récente; les tra- vaux qui s'y rapportent sont fragmentaires et épars. Aussi n'était-il pas superflu d'essayer une élude -d’ensemble de ces appareils. C’est ce qu'ont fait Regaud et Favre’ dans une revue générale qui s'appuie sur un certain nombre d'observations personnelles, sur les travaux récents de Crevatin”, Huber, Dogiel, Ramon y Cajal.…, et surtout sur ceux de toute une série d'auteursitaliens : Ruffini*, «Giacomini ‘, Cipollone *, Perroncito ‘, ete. Laissant provisoirement de côté les organes musculo-tendineux de Golgi, qui appartiennent plutôt aux tendons, Regaud et Favre essaient d'abord de classer les « dispositifs sensitifs termi- naux des muscles ». Is les divisent en deux groupes principaux : les dispositifs sensitifs épimysiaux, caractérisés par le contact direct des terminaisons nerveuses avec les fibres musculaires, et les dis- positifs terminaux interstitiels, c'est-à-dire sié- geant dans le tissu conjonctif périmysial, entre les fibres musculaires. Parmi les premiers sont les terminaisons simples (d'Odenius,| 1872, Arndt, 1 CL. Recaup et Favre : Les terminaisons nerveuses et les organes nerveux sensitifs de l'appareil locomoteur, 1re par- tie. Revue générale d'histologie, t. 1, fase. 1, 190. ? Crevanx : Ueber Muskelspindeln. Anat. Anzeïg., {. XIX, 1901. 3 Ruoreini : Sulla fina analomia dei fusi. Siena, 1898. — Et Journal of Physiology, t. XXII, 189$. — Analom. Anzeig., t. XVI, 1899. — Accademia di Siena, t. XI, S. 4, 1904. # Gracouini : Atti Accad, Fisiocr., Siena, {. IX, S. 4, 1898. 5 CrroLcoxe : Nuove ricerche... tic. nel Lab. di anat. Roma, &. VI, 1898. 5 Perroncrro : Sulla terminazione.. C. R. Assoc. Anatom. Lyon, 1901, et Archiv. ilal. de Biologie, t. XXXVI, 1901; t. XXXVIII, 1902. — Gazz. med, ital.,t. LIV, 1903. Sachs, Rouget); les {erminaisons en grappe ‘de Tschiriew, 1879); les {erminaisons en paniers à l'extrémité des fibres (de Retzius, 1892, Giaco- mini, 1898); les {erminasons spéciales aux muscles de l'œil (Retzius, 1892, Huber, 1899); enfin, les laseaux neuro-musculaires. Le second groupe comprend : les terminaisons libres de Kælliker (1862); les terminaisons en plaques interstilielles ou en buissons sigualées par Kerschner (1888); enfin, les terminaisons encapsulées dans des cor- puscules paciniformes. Ces dispositifs sont de valeur très inégale. Les premiers paraissent aux auleurs francais avoir une valeur spéciale, et, parmi eux, les fuseaux neuro-musculaires méritent une « place absolument prépondérante ». Ce sont ceux-ci surtout, en effet, qui concourent, avec les terminaisons des tendons et des articulations, à nous donner des sensations inconscientes et sub- conscientes, « qui n'ont rien de commun avec les sensations tactiles » et qui méritent un nom spé- cial: celui de sensations cinesthésiques ». On devra appeler ainsi les sensations qui nous donnent la conscience de nos atlituues et de nos mouvements, celles qui nous permeltent d'approprier ces mou- vements au but que nous voulons atteindre. Dans leur revue générale, Regaud et Favre con- sacrent donc la plupart des chapitres à une étude complète des fuseaux neuro-musculaires chez tous les Vertébrés. Pour eux, le fuseau schématique est essentiellement constitué : 1° par une ou plusieurs fibres musculaires striées, généralement plus fines que les voisines, perdant assez souvent leur stria- lion au niveau de la terminaison, insérées à leurs deux extrémités sur des fibres tendineuses; 2° par une ou plusieurs lerminaisons motrices; 3° par un ou plusieurs dispositifs sensilifs terminaux épimy- siaux fournis par une ou plusieurs fibres nerveuses enveloppées par une gaine de Henle; 4° par une capsule formée d’une ou plusieurs lamelles de sub- slance conjonctive, et laissant entre elle et la fibre un espace clos fusiforme rempli de liquide incom- pressible, qui doit jouer un rôle important dans le mécanisme de transmission. Après avoir étudié les fuseaux relativement simples des Reptiles, puis des Amphibiens, les auteurs insistent sur les fuseaux plus complexes des Mammifères, s’en rapportant surtout à l'excellente description donnée par Ruf- fini chez le Chat. Cet auteur a montré que les fu- seaux les plus complets recoivent trois sortes de terminaisons : 1° une ou plusieurs {erminaisons primaires où annulo-spirales; 2° une ou plusieurs terminaisons secondaires ou en forme de fleur; 3° des terminaisons en forme de plaques. Les pre" mières sont les plus importantes, et constituées chacune par une grosse fibre, qui perd sa myéline, s’aplatit en ruban, et s'enroule (souvent après bi-, E. LAGUESSE — REVUE ANNUELLE D'ANATOMIE 1109 furcation en une branche ascendante et une des- cendante) en une spirale serrée plus ou moins régulière, autour de la fibre musculaire, ou bien y reste parallèle en envoyant de place en place une série d’anneaux qui l'entourent ‘. Les termi- minaisons en fleurons, que Regaud et Favre pré- fèrent appeler ramiliées polymorples, manquent souvent; elles proviennent de fibres myéliniques spéciales plus petites, et sont reléguées vers les extrémités du fuseau. Enfin, les {erminaisons en plaques nous retien- dront un peu plus, parce que leur signification n’a été élucidée que tout récemment. Elles ressemblent plus ou moins fidèlement à des plaques motrices ordinaires, mais sont souvent plus petiles, et peu- vent encore en différer par l'agencement de leurs ramuscules terminaux. Elles sont extra-capsulaires, et se trouvent au delà (par rapport au tendon) et souvent, en outre, en decà de la partie renflée cap- sulaire du fuseau. Elles reçoivent des fibres à myé- line spéciales, fines, souvent séparées des pre- mières. Ruffini, Giacomini, Crevatin, en raison des différences qui existent entre elles et les plaques motrices ordinaires (Ruffini), de leur inconstance (Giacomini, niée par Ruffini), tendaient encore ré- cemment à les considérer comme sensitives. Mais Kerschner, qui les a découvertes (1888), les tenait déjà pour motrices, et la plupart des recherches récentes sont venues à nouveau plaider en faveur de ce rôle. Cipollone (1898) apporte ce premier fait décisif : souvent une fibre nerveuse à myéline se bifurque, et fournit par une de ses branches une plaque motrice indiscutable à une fibre musculaire ordinaire, et par l’autre une terminaison en plaque à une fibre musculaire fusale (Lézard). Mais la dé- monstration peut être encore plus éclatante. Ruffini montra, en 1900 et 1901, que, chez l'homme même, certaines fines fibres sans myéline peuvent se dé- tacher des véritables plaques motrices, et se ter- miner plus loin dans le musele d’une facon encore inconnue. On appela ces fines fibres les fbrilles ultra-terminales de Ruffini. Or, Fusari* (1901), dans les muscles de l’'Ammocète, dit que les fibrilles ultra-terminales sont des collatérales motrices. Et Perroncito (1901 à 1903) démontra que les fines fibres aboutissant aux plaques terminales des fu- seaux, chez les Lacertiens, sont ordinairement aussi des rameaux collatéraux des fibres motrices ordi- uaires, se détachant soit d'un étranglement annu- aire voisin de la plaque, soit des rameaux mêmes 4 La plupart des auteurs, contrairement à Ruffini, consi- dèrent ces « anneaux de Ruffini » comme n'étant pas de véritables anneaux, mais simplement l'expression optique de tours de spire très rapprochés. 2 Fusart : Présentation de préparation. C. R. de l'Assoc. des Anat., Lyon, 1901. d’une plaque motrice; elles constiluent en ce cas des fibrilles ultra-terminales de Ruffini. Enfin, Cipollone à encore prouvé expérimentalement la nature de ces plaques. Par la compression tempo- raire de l'aorte abdominale (chez le Lapin), qui détermine la nécrose de la substance grise de la moelle lombaire en laissant les ganglions rachi- diens intacts, il a vu les terminaisons en plaques des fuseaux et leurs fibres afférentes dégénérer comme les plaques motrices communes (cinquième au dixième jour), tandis que les autres fibres du fuseau (dispositif nerveux sensilif) restaient in- tactes. Les premières représentent donc bien les terminaisons motrices; il serait, d’ailleurs, singulier que seules les fibres fusales en fussent dépourvues. Les fibres ultra-terminales peuvent probablement jouer encore d’autres rôles. C’est ainsi que Cecche- relli', dans les muscles de la langue, vient de dé- crire, en connexion avec elles, un réseau très délicat de fibres sans myéline, entre les éléments musculaires. Notons, pour finir, le travail de Gregor*?, qui élu- die la répartition des fuseaux neuro-museulaires chez le fœtus humain. C’est seulement dans le digastrique et les pelits muscles du larynx qu’il n’a pu en trouver. Dans tous les autres muscles qu'il a examinés, les fuseaux étaient nombreux, mais plus ou moins abondants, pourtant, selon les régions. Mentionnons, par exemple, les chiffres de 362 pour le biceps brachial (long chef), 660 pour le triceps. On sait, d’après Christamanos et Strüss- ner (1891), que le nombre absolu des fuseaux dans un musele parait rester invariable depuis le milieu de la vie intra-utérine. S'ils apparaissent plus tard moins abondants dans un champ donné, cela est dû à ’'augmentation au nombre et surtout du dia- mètre des fibres musculaires interposées. Les chif- fres de Gregor semblent donc être valables pour l'adulte, si toutefois on lient compte de l'existence avérée de varialions individuelles. Kühne (1863) avait estimé le nombre des fuseaux à 1 °/, de fibres musculaires (Souris); mais Félix (1887) n'en avait compté que 69 dans le biceps brachial d'un fœtus humain. Huber° (1902) en a trouvé de 60 à 100 dans chacun des six premiers espaces inlercostaux du Chat (muscles intercostaux externe et interne). E. Laguesse, Professeur d'Histologie à la Faculté de Médecine de Lille. 1 CEeccHERELLI : Sulle piastre motrici e sulle fibrille ultra- terminali. Archivio ital. di Anat., L. L, 1903. ? A. GreGor : Ueber die Verteilung der Muskelspindeln. Archiy fur Anat., und Phys., An. Abth., 1904. 3 Huger : Neuromuscular Spindles. Proceed, Assoc. ame- rican Anat. Americ. Journal Anat., {. 1, 1902, BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 1° Sciences mathématiques Vallier (E.), Correspondant de l'Institut. — Note sur la Dynamique de l’Aéroplane.— 1 vo/.1in-4 avec figures. (Prix : 3 fr. 50.) Ve Ch. Dunod, éditeur. Paris, 1905. La question de l'aviation par des appareils plus lourds que l'air semble sortir peu à peu du domaine de l'utopie, à mesure que les moteurs se perfectionnent et deviennent plus légers; mais, si déjà quelques per- sonnes ont amorcé, pour ainsi dire, l'étude expéri- mentale de ce difficile problème, par des recherches limitées d’ailleurs à l’aéroplane simple, il faut recon- naître que, jusqu'à présent, le côté théorique a été complètement négligé. A ne considérer que la constitution d’un appareil de planement et l'agencement de ses organes, c'est là, sans doute, une partie qui ne peut être traitée que par les praticiens; mais ceux-ci seraient exposés à de fâcheux tâtonnements; ils courraient le risque de s'engager dans des voies sans issue, si, d'autre part, n'étaient pas élucidées, dès le principe, les questions relatives aux liaisons qui doivent assurer la stabilité de l’ensemble, à la résistance que l'appareil peut opposer aux coups de vent sans dimensions trop grandes et sans poids exagérés, et surtout à l'évalua- tion des puissances que nécessite la marche du navire aérien. Ce sont là précisément des questions qui ressortissent à la Mécanique appliquée. Elles ont été rarement et insuffisamment traitées jusqu'ici, — dans leur ensemble tout au moins, — et l’on saura gré à M. Vallier d'en avoir abordé l'examen avec beaucoup de sagacité et sa science coutumière, Les ingénieurs trouveront dans son travail une base solide pour leurs études futures. Après avoir exposé les lois physiques qui dominent la discussion, l’auteur envisage le cas d'un aéronat à plateau moteur agissant verticalement, sans examiner la manière dont l'énergie ainsi produite serait trans- mise au système. Il tire de ce cas théorique, et avec le minimum de calculs algébriques, car toute la discussion a reposé sur l'étude d’une équation du troisième degré, des formules qui ont été appliquées, par la suite, à tous les problèmes qui se présentent successivement, à l'aide de changements très simples dans les ariables et les paramètres considérés. Il résulte de cette étude que la multiplication des plateaux, figurant ici les appareils de sustentation, ne semble devoir être qu'une source de déperditions et de complications, à laquelle il ne faudrait recourir que dans des cas exceptionnels. Des formules ainsi établies, M. Vallier déduit la théorie de l'hélicoptère, où la nacelle Does est sou- tenue par un jeu d'hélices à axe vertical. L'application aux résultats connus de lhélice du Wéditerranéen à conduit à déterminer les constantes qui permettront d'aborder les applications ultérieures. La deuxième partie de l'ouvrage contient l'examen de l’aéroplane, uniquement soutenu par l'action des mo- teurs transportés à son bord. On y trouvera élucidées les questions re :latives à la marche, à l'énergie propul- sive nécessaire, au rapport qui doit exister entre les organes de l'aéroplane proprement dit (ailes sustenta- trices) et ceux de l'hélice propulsive. L'auteur met en garde contre l'erreur souvent commise lorsqu'on oublie de tenir compte de la vitesse d'entrainement de l’ap- pareil dans l'appréciation de la vitesse effective de l'hélice propulsive. et il arrive à cette conclusion assez ANAI.YSES BIBLIOGRAPHIE ET INDEX neuve que les grandes vitesses de translation, qui sem- bleraient devoir aisément résoudre le problème, sont, au contraire, à redouter comme exigeant des énergies exagérées. Les équations définitives du régime de l'appareil permettent de constater que, dans l’état actuel de l’industrie, un tel aéronat ne saurait être réalisé prati- quement. Il semble, au contraire, que la solution doit ètre cherchée dans un aéroplane mixte, dérivé du dirigeable actuel, dont il ne différera que par la substitution d'un dispositif d'hélicoptère au ballon sustentateur. Enfin, ce ne sera peut-être là qu'un acheminement vers l’ appareil à hélice inclinée, remplaçant le double jeu d'hélices horizontales et verticales, spécialisées dans leur rôle de sustentation et de propulsion, ce dernier type n'étant considéré que comme un modèle de tran- sition; mais la réalisation de l'appareil à hélice in- clinée nécessitera sans doute de longues recherches avant qu'on ait résolu toutes les questions d'assem- blages qu'elle soulève. Quelle que soit, d’ailleurs, la solution de l'avenir, l'ouvrage de M. Vallier a le mérite de poser nettement le problème qui s'y trouve traité avec une rare élé- gance dans les procédés d'analyse mathématique. Il fournit, dès à présent, aux chercheurs les bases ration- nelles d’études nouvelles et des formules permettant de classer les résultats obtenus grâce aux perfection- nements qui seront successivement apportés aux divers organes. À ce titre, il sera utilement consulté par les expérimentateurs pour l'interprétation de leurs essais, par les constructeurs pour l'établissement de leurs projets. Il a surtout le grand mérite d'être la première tentative d'ensemble traitant méthodiquement ce pro- blème diflicile. Lt-C! G. EsPitALLIER. 2° Sciences physiques de Watteville (Charles). — Spectres de Flamme : Variations spectrales d'ordre thermique. | l'hèse pour le Doctorat de la Faculté des Sciences de Paris.) — 1 vol. in-8°. Imprimerie Charles Hérissey, Évreux, 1905 *. On sait qu'on trouve dans la flamme du gaz deux régions principales : le cône intérieur, ou noyau, et la flamme proprement dite qui l'enveloppe. Dans l'étude des spectres de flamme, on s'était borné jusqu'ici à introduire la substance à étudier dans la flamme déjà formée. M. de Watteville a réussi, par d'ingénieux procé- dés, à photographier jusque dans l'ultra-violet extrème les spectres qui correspondent aux différentes régions de la flamme, dont les divisions au point de vue spec= tral sont nettement tranchées. Uülisant et perfection- nant un dispositif dont la première idée est due à M. Gouy ?, il pulvérisait, dans les flammes d’une rampe à gaz de trente petits becs, les solutions salines à étudier, entrainées par un courant d'air compri- mé. Les intensités des petites flammes élémentaires s'ajoutent, grâce à la transparence qu’elles ont les unes pour les autres, et l'observation a lieu dans le sens de la longueur du brûleur. Les spectres étu- diés ont été ceux de Li, Na, K, Cu, Ag, Mg, Ca, Sr, Ba, Zn, Cd, Hg, Sn, Pb, Bi, Cr, Fe. Les temps de pose ont été de huit heures en employant un réseau concave, de trois à quatre heures avec le prisme de verre, et de six ! Ce travail a paru en grande partie dans les Phïiloso phical Transactions of the Royal Society. London, 190%. ? Ann. de Chim. et de Phys., 5e série, & XVHI. BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 1111 heures avec celui de quartz. M. de Watteville a obtenu ainsi des spectres d'une extrème finesse, dont trois photographies, en épreuves directes, accompagnent sa thèse. Ses résultats, fort importants et tout à fait nou- veaux, peuvent ètre résumés ainsi : Les spectres de flamme sont considérablement plus riches en raies qu'on ne l'avait observé jusqu'ici, et ils s'étendent fort loin dans l'ultra-violet, où la raie À 2.199 de l'étain est encore visible. Les divisions de la flamme en régions montrent des séries spectrales de raies différentes; si, par exemple, on projette au moyen d'une lentille une nage de la flamme dont la hauteur totale soit infé- rieure à la fente du spectroscope, on observe que les spectres des métaux alcalins sont divisés longitudinale- ment en trois bandes parallèles différenciées au point de vue de leur teneur en raies de séries. Pour le potas- sium, la région, inférieure correspondant au cône bleu donnera toutes les raies du métal; la bande moyenne limitera par sa partie supérieure les lignes des deux séries secondaires, qui ne seront plus visibles dans la troisième région, formée par les parties les plus hautes de la flamme, où n'apparaïîtront que les fortes raies de la série principale. L'auteur a comparé les spectres de flamme à ceux de l'arc et de l’étincelle, et a remarqué que ce sont les raies les plus fortes dans l'arc qui se trouvent dans la flamme. On est, en outre, conduit à rapprocher le spectre de celle-ci du spectre de l'étin- celle oscillante sous l’action d'une self-induction. Pour Fe, Ni, Co, les mèmes raies sont communes aux deux spectres, et les raies produites dans la flamme parais- sent le prolongement de celles de l’étincelle oscillante photographiées sur la même plaque. De l’ensemble des faits observés, dont je n'ai cité que les plus saillants, M. de Watteville conclut que l'intervention de simples variations thermiques lui semble suffisante pour pro- duire les différences spectrales constatées par lui. Il corrobore ainsi les hypothèses astronomiques de Kir Norman Lockyer, attribuant à une origine thermique les différents spectres des étoiles, qui renferment cependant les mêmes lignes que ceux de nos sources électriques, arc et étincelle. Ce travail a été accompli en majeure partie au laboratoire de M. A. Schuster, à Manchester, et terminé à celui des recherches phy- siques de M. Lippmann, à la Sorbonne. Il honore aussi bien son auteur que les maitres éminents qui l'ont encouragé. A. DE GRAMONT, Docteur ès sciences. Kling (André). — Contribution à l'étude des Alcools cétoniques. (Thèse présentée à la Faculté des Seiences de Paris.) — 1 vol in-8° de 90 pages. Gau- thier- Villars, éditeur. Paris, 1905. L'acétol (acétylcarbinol) CHS.CO.CH?OH, premier terme de la série des alcools cétoniques, est un de ces corps particulièrement dignes d'intérèt sur lesquels nous pouvons étudier l'influence mutuelle de deux fonctions différentes. Son étude constitue la partie la plus importante de cette thèse. M. Kling a préparé l’acétol par l’action du formiate de potassium sur l'acé- tone monochlorée et le traitement du formiate d'acétol obtenu par l'alcool éthylique. Cette méthode diffère de celle de Henry, qui a obtenu l’acétol pour la première fois, en 1872, par l'emploi de l'alcool éthylique au lieu de l'alcool méthylique qui rend beaucoup plus difficile Ja purilication du produit. L'auteur a découvert, en outre, un autre procédé de formation, très intéressant au point de vue biochi- mique et fondé sur l'oxydation du propylglycol par la bactérie du sorbose ou le Mycoderma acetr. Des deux fonctions de l’acétol, la fonction alcool est celle qui paraît la plus diminuée par la présence de la fonction acétonique ; la vitesse initiale d’éthérification de cet alcool est, en effet, de l’ordre de celle d’un alcool tertiaire; la fonction cétonique, au contraire, garde toute sa netteté et donne les réactions caractéristiques ordinaires. L'emploi des méthodes physico-chimiques (conducti- bilité, viscosité) montre qu'en solution aqueuse l’acétol doit exister à l’état d'hydrate, sans doute combiné à une molécule d’eau, et que, sous cette forme, il se conduit comme un pseudo-acide. Les réactions chimiques, en particulier la réduction, qui donne à la fois de l'acétone (ou de l'alcool isopropylique) et du propylglycol, amènent à la même conclusion. Cette fonction acide se manifeste, en outre, par l'exis- tence de quelques dérivés métalliques (acétolates de Ca, Ba) et surtout des acétolates alcooliques, dont l’un, celui de méthyle, présente la propriété remarquable de n'exister que sous la forme d'un dimère (C'H*O*®, corps solide, bien cristallisé, fondant à 130° et dans lequel la fonction cétonique est masquée. Les autres alcools cétoniques préparés par l’auteur, propionylcarbinol C*H°.CO.CHOH, méthylacétylcarbinol ou méthylacétol CH*.CO.CH(OH)CH* et benzylearbinol C°H5.CO0.CH?0H, présentent aussi en solution une forme aci et se conduisent comme des pseudo-acides. L'ensemble deces faits montre l'intérêt du sujet traité ; l'emploi simultané des méthodes chimiques et physico- chimiques donnera certainement des résultats intéres- sants dans les études ultérieures que M. Kling se réserve de poursuivre dans cette direction. C. MARIE, Docteur ès sciences. 3° Sciences naturelles Demangeon (A. — La Picardie et les régions voisines : Artois, Cambrésis, Beauvaisis. — { ro/. in-8 de 1v-496 pages avec 42 fiqures, cartes et schémas, 17 planches photographiques, 3 planches- cartes. (Prix : 12 fr.) Librairie Armand Colin. Paris, 1905. Il est impossible de résumer en quelques lignes le travail que M. A. Demangeon à présenté comme thèse de doctorat à la Faculté des Lettres de l’Université de Paris. Ce travail constitue, en effet, une étude géogra- phique extrêmement complète et la plus approfondie qui aitété écrite sur la plaine picarde, c'est-à-dire sur la région crayeuse et limoneuse qui s'étend entre la Manche et l'Oise d'une part, le Pays de Bray et la Flandre de l’autre. Si, au premier abord, cette région « ouverte à tout venant » apparaît comme le type de la région mono- tone, en lisant cet intéressant ouvrage, l’on s'apercoit bien vite qu'elle constitue une personnalité géogra- phique, fondée sur l'unité de sa nature physique (craie et limon), et que l'œuvre de ses habitants n'a fait qu'accentuer et consolider. Sur toute cette région, que l’auteur limite tout d'abord en montrant les transitions et les différences qu'elle présente avec les régions voisines : Pays de Bray, Bassin de Paris, Thiérache, pays minier, c'est la craie qui constitue, qu'elle soit Turonienne ou Séno- nienne, l'élément fondamental de la géographie phy- sique. Un chapitre est consacré à l'histoire géologique de la région, à la formation de la Manche, aux plisse- ments de la craie, au rôle de ces plissements et des diaclases de la craie sur le réseau hydrographique, et montre que, dans les plaines comme dans les mon- tagnes, l'aspect de la surface est un écho des phéno- mènes de profondeur. Dans l'étude des matériaux du sol— c'est-à-dire de la craie, avec son uniformité minéralogique, des formes de relief auxquelles elle donne naissance, en particu- lier de ces curieux « rideaux », ressauts brusques cou- pant les pentes régulières des versants, et dont l’origine, très discutée, serait due à des glissements le long de diaclases et à la culture, ce qui nous paraît très vraisemblable, des matériaux utiles qu'elle fournit pierres de construction, pierres à chaux, amende- ments, phosphates dont l'exploitation a laissé appau- vris et dépeuplés les cantons qu’elle a momentanément enrichis), dans celle de l'argile à silex, des dépôts ter- tiaires, et enfin deslimons, — M. Demangeon a su éviter 4142 BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX — avec raison, à notre avis — les détails par trop géologiques et les difficultés que suggère encore l'étude approfondie de la plupart de ces formations, pour insister, au contraire, sur les caractères géogra- phiques et économiques, comme les paysages de craie, d'argile à silex, l'intérêt anthropographique des lam- beaux tertiaires, la valeur agricole du limon (limon supérieur de M. Ladrière, c’est-à-dire terre à brique et ergeron). Sur le climat, l’auteur, en étudiant toute la région comprise entre le littoral à l'Ouest, Paris et le pied de l’Ardenne d'autre part, montre que, si le climat est plus doux sur la côte en hiver, le printemps et l'été sont beaucoup plus chauds à l'intérieur du pays, dont la moyenne annuelle est supérieure à celle de la côte. Les cartes de la répartition des pluies montrent, outre l'influence du relief, un changement curieux du maximum des pluies : octobre pour la côte, juillet pour les confins de l’Ardenne. L'hydrographie était particulièrement intéressante à étudier dans cette région, et l’auteur s'y est appliqué dans deux chapitres. Nous aurions aimé voir, en particulier, beaucoup plus complète, et poursuivie jus- qu'à la Manche, l'étude de la vallée de la Somme, si suggestive au point de vue du mode de formation des vallées d'érosion. L'hydrologie de la craie est traitée en détail, à la fois au point de vue de la perméabilité de la craie fissurée, des variations des nappes aquifères qui alimentent les puits des plateaux crayeux indis- pensables pour l'homme et ses animaux, des sources, du débit des rivières. À côté des variations saisonnières et probablement climatologiques de la nappe aquifère, les sources tendent à émigrer vers l'aval; les vallées sèches, dont les plus anciennes seraient dues, d’après l’auteur, à un mouvement d'exhaussement du sol, s'accroissent au détriment des vallées humides : la nappe aquifère tend, en effet, à s’enfoncer, par suite même de la circu- lation de l’eau à l'intérieur des diaclases de la craie, du déboisement, de la suppression des jachères et aussi de la culture intensive à laquelle est soumise toute la région. Les rapports de l'hydrographie et du milieu humain ont été et restent toujours de la plus haute importance : sur les plateaux, le besoin d’eau explique les mares, les citernes, les forages profonds de 80 mètres et plus; ces derniers, fort coûteux, nécessitent des groupements collectifs ou des besoins industriels. Dans les vallées se trouvent les tourbières, les hortillonnages, les biens communaux, les moulins et les usines attirés par les avantages d’une force hydrau- lique, toujours insuffisante pour les grands établisse- ments, mais facile à régler, toujours disponible et sen- siblement constante. Un chapitre spécial est consacré à l'étude de la côte des Bas-Champs, des estuaires de la Somme, de la Canche et de PAuthie et aux modifications qu'a subies, depuis les époques historiques les plus reculées, le littoral de la Manche de cette région avec son ancienne falaise, ses cordons littoraux, ses dunes et ses polders. L'homme a réussi à lutter contre les invasions de la mer et des sables, mais à été moins heureux dans la conservation des débouchés maritimes que représen- taient, il n'y à pas encore très longtemps, ces baies aujourd'hui ensablées. La seconde partie de l'ouvrage est entièrement consa- crée à la géographie économique et humaine. L'homme a profondément modifié, sinon transformé, la plaine picarde, faisant disparaître pour ainsi dire, avec les bois etles jachères, toute plante sauvage, créant ou, au contraire, asséchant des marais, changeant même, avec la culture, depuis l'époque gauloise, le sol lui même. Il n'en résulte pas moins, jusque dans la marche actuelle des faits économiques (agriculture, industrie, commerce), la persistance des conditions primitives du sol qui ont fait jouer, dès l’origine, à la plaine picarde «le rôle d'une région nourricière ». Le blé d'abord, puis les cultures industrielles intensives, aujourd'hui localisées dans les régions à couverture de | limon, plus récemment l'élevage, de plus en plus développé dans les régions bieffeuses de l'Ouest et vers la bordure de la plaine picarde, ont, de tout temps, été les caractéristiques de la Picardie et de son sol. Les industries textiles (laine, lin) ont aussi été fondées sur les produits locaux, mais n'ont pas cessé de se modifier sous l'influence des conditions extérieures changeantes et de la présence, au Sud et au Nord, de puissants centres commerciaux et industriels. Les industries campagnardes n'ont pas encore com= plètement disparu dans le Vimeu, le Santerre et le Cam- brésis. Elles occupent les habitants l'hiver, tandis que, pendant la belle saison, quelques-uns, surtout dans le Cambrésis, émigrent temporairement pour se livrer w aux travaux des champs, parfois jusqu'aux environs de Paris. La décroissance de ces industries explique cependant l'exode du paysan, privé de leurs ressources, vers la mine ou vers les grands centres industriels. Ce sont les jeunes qui s’en vont vers la ville; et les villages, où la population et le nombre des naissances dimi- nuent forcément, ne sont plus habités que par des vieillards. Le développement, surtout depuis le xvur siècle, de la propriété paysanne; le morcellement du sol; les éta- blissements humains, depuis la ferme picarde d'un cachet si spécial et beaucoup de hameaux où la popu- lation, groupée autour des points d’eau ou attirée par la présence de la bonne terre à blé, se dédouble fré- quemment ou s'allonge le long des routes ou près des chemins de fer; enfin la position des villes, qui ont dù soit sur les hauteurs, soit au milieu des vallées marécageuses, être longtemps des villes-forteresses; la répartition de la population, sont présentés et accompagnés de cartes et d'illustrations qui peignent la contrée sous quelques-uns de ses aspects les plus caractéristiques. Elles permettent au lecteur de se convaincre de plus en plus de la coopération intime et | profonde de l'élément naturel et de l'élément humain. Dans un dernier chapitre, M. Demangeon traite des divisions territoriales : les premiers groupements hu- mains (gaulois et gallo-romains) étaient limités par des forêts, dont quelques noms de lieux ont conservé le souvenir ; les divisions du moyen âge, du xvint siècle, ne correspondent en réalité à rien de naturel, sauf le Santerre, le Vimeu et le Boulonnais. L'auteur ne s’est pas contenté de consulter une foule de documents : la bibliographie n'indique pas moins de 592 références; il a parcouru tous les pays dont il nous donne des descriptions vivantes et vécues, por- tant toutes leur cachet bien personnel. Peut-être reprochera-t-on parfois à M. Demangeon d’avoir voulu donner trop de détails et trop de preuves de la thèse qu'il défend ; il n’en reste pas moins, de la lecture de ce travail, malgré la diversité des sujets traités, l’im- | pression d’une méthode sûre et précise et d’un édifice solidement établi. 11 est à souhaiter que la méthode de M. Demangeon soit adoptée pour l'étude des autres contrées de la France. H. Douxanr, $ Maître de Conférences de Géologie à l'Université de Lille. | Beauverie (J.), Chargé d'un cours de Botanique appliquée à la Faculté des Sciences de Lyon. — Le | Bois (avec une préface de M. DauBrée, Directeur | général des Eaux et Forêts au Ministère de Pl Aqgri- culture) — 2 vol. grand in-8° de 1400 pages, avec 485 figures, dont 46 planches dans le texte. (Prix : 20 fr.) Gauthier- Villars, éditeur. Paris, 1905. Si le fer et l'acier paraissent avoir détrôné le bois. dans un grand nombre d'applications, il ne faut pas perdre de vue que de nouveaux débouchés, d'une incon- testable importance, s'ouvrent petit à petit devant | l'industrie forestière et lui assurent une longue ère de vitalité. Pour justifier la publication de son ouvrage, M. Beauverie n'aurait eu qu'à faire de son dernier cha- pitre, en guise de préface, un résumé magistral et suggestif. Cr BIBLIOGRAPHIE — ANALYSES ET INDEX 1143 L'extension de jour en jour plus grande des chemins de fer et des lignes télégraphiques et téléphoniques nécessite l'emploi d’un nombre incalculable de tra- verses et de poteaux dont la durée est limitée et qu'il faut remplacer périodiquement. Le pavage en bois se substitue peu à peu, dans la plupart de nos grandes villes, au pavage en pierre. Dans les mines, des galeries interminables sont soutenues par des étais en bois. L'industrie de l'ameublement, si prospère et actuelle- ment si artistique, demande des bois variés. Enfin, c’est encore le. bois de nos forêts qui fournit la matière pre- mière de ces papiers de médiocre qualité, mais de si bas prix, qui ont permis à la presse quotidienne de prendre un essor exceptionnel. En somme, le bois n’est détrôné qu'en apparence; dans la réalité, il n’en faut pas moins qu'autrefois; mais les applications ne sont plus les mêmes. Empressons-nous d'ajouter que l'étude des bois prend chez nous une importance exceptionnelle par un double fait : d'abord, notre pays porte de magnifiques forêts et tout le monde sait que la sylviculture à toujours été en honneur chez nous; mais, en outre, la France possède d'immenses colonies dont les richesses forestières sont bien loin d'être entièrement connues et sont dans tous les cas incontestables. A ces divers titres, un ouvrage général sur les bois ne peut être que d’une très grande utilité en France et dans les colonies. Il convient donc de louer M. Beau- verie d’avoir entrepris un travail de cette importance et de l’avoir traité sans empiéter par trop sur les ques- tions diverses qui s’y rattachent. L'ouvrage comprend deux volumes, qui forment deux parties assez nettement distinctes. Les trois premiers chapitres du premier volume sont consacrés à l'étude anatomique des bois et ensuite à leurs caractères phy- siques et chimiques. Les trois chapitres suivants traitent de l'aménagement des forèts, de l’abatage, du débit et du commerce des bois. Dans les chapitres sui- vants, l’auteur étudie les altérations des bois sur pied et des bois abattus par des causes diverses, mais surtout par les cryptogames et les insectes. Il est ainsi amené tout naturellement à passer en revue les divers procédés préconisés pour empêcher ou retarder l’altération des bois et assurer leur conservation. Le deuxième volume est consacré à l'étude spéciale des bois indigènes ou exotiques utilisés par l'industrie. L'auteur, adoptant une classification assez artificielle, les passe en revue successivement en indiquant leurs caractères essentiels ; il examine ensuite leur produc- tion dans les divers pays et surtout dans les colonies françaises, puis il donne une idée du commerce qu'ils alimentent. Le volume se termine, comme nous l'avons déjà dit, par un chapitre assez étendu sur les usages divers des bois. L'auteur a malheureusement accordé, selon nous, une trop faible importance à l'étude micrographique des bois. Il existe déjà, en ce moment, un certain nombre de travaux qui pourraient être mis à contribution, à défaut de recherches personnelles. En outre, les notices écrites pour les expositions universelles ou autres ne sont peut-être pas toujours des sources d'informations suffisamment autorisées et, pour la Nouvelle-Calédonie par exemple, l'ouvrage si documenté du général Sébert pouvait être consulté avec plus de fruit que la Notice écrite en 1900 par l'Union agricole calédonienne. Ces quelques réserves formulées, nous nous plaisons à reconnaitre que M. Beauverie s’est elforcé de faire œuvre utile et que les lecteurs, commercants, industriels et coloniaux, trouveront dans son travail une ample moisson de renseignements intéressants. ] HENRI LECOMTE, Professeur au Lycée Saint-Louis, Belzung (Er.), Docteur ès sciences, Professeur au Lycée Charlemagne. — Leçons de Zoologie (pour la classe de 3° B). — 4 vol. in-12 de 380 pages, avec 332 fig. (Prix : 2 fr.50). F. Alcan, éditeur.Paris, 1906. REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. 4 Sciences médicales Mignot (D' F.)..— Le Péril vénérien et la Prophy- laxie des Maladies vénériennes. — 4 ro/. 1u-8° de 232 pages. (Prix : 3 fr. 50.) O. Doin. Paris, 1905. Comme pour la tuberculose, on a cru bien faire en initiant franchement le public aux dangers du péril vénérien, aux conséquences proches et lointaines de la contamination blennorragique, chancreuse et syphi- litique. On l’a fait et on continue de le faire dans l'idée d'arrêter de cette façon les ravages de l'avarie et d’in- suffler un peu de «vertu » à ceux qui en manquent. La crainte de la maladie n'est-elle pas le commence- ment de la sagesse? Le livre de M. Mignot est écrit dans ce but. Comme il ne s'adresse pas aux médecins, la partie médicale proprement dite, les méfaits cliniques et anatomiques du gonocoque et du spirille de Schaudinn, de la blen- norragie et de la syphilis, y tiennent une place modeste. En revanche, l'auteur s'étend beaucoup sur la prostitu- tion et les prostituées dans le passé et le présent, tant en France qu’à l'Etranger. M. Malherbe, qui a écrit une préface au livre de M. Mi- gnot, est convaincu que ce livre instruira le père de famille soucieux de protéger ses enfants contre le dan- ger vénérien, l’'éducateur de la jeunesse désirant ne pas lancer dans le monde le jeune sujet sans défense « contre les terribles embüches que le jeu d'amour lui tend », l’homme, enfin, qui compromet sa santé parce qu'il méconnaît l'étendue du péril qui le menace. Seulement est-il permis d'espérer que la connaissance du péril suffit pour assagir l'individu et lui faire fuir le danger? M. Mignot en doute — en quoi il a parfai- tement raison — et cite à l'appui le cas des étudiants en médecine qui, parfaitement au courant du péril vénérien, n'en sont pas moins fortement éprouvés. C’est pourquoi M. Mignot estime que le péril vénérien doit être combattu par l'instruction répandue à pro- fusion, par les notions d'hygiène et de morale mises à la portée de tous, par le mariage précoce, par la réforme complète de l'éducation apprenant aux jeunes gens et jeunes filles à se respecter mutuellement, etc. I] pense qu'il faudrait encore lutter contre la prostitution en poursuivant la prophylaxie, en multipliant les œuvres d'aide et de secours matériel et moral, etc. Et encore, comme le dit M. Mignot, tout cela pourrait bien venir se briser contre un mobile aveugle et impérieux l'instinct sexuel. Dr R. Rome, Préparateur à la Faculté de Médecine. Yvert (D' A.), Médecin principal de l'armée en re- traite. — Les Applications médico-chirurgicales de l'Adrénaline. — 1 vol. in-8° de 328 pages. (Prix : 3 fr.) Félix Alcan, éditeur. Paris, 1905. L'auteur à collationné, analysé, groupé la plupart des documents expérimentaux et cliniques publiés sur l'adrénaline depuis le jour où, en 1901, Takamine parvint à extraire des capsules surrénales ce produit éminemment actif; il a constitué ainsi un dossier médico-chirurgical qu'il soumet au public scientifique. De sa lecture ressort l'impression bien nette : 1° Que l’adrénaline est vraiment le vaso-constricteur le plus puissant connu jusqu'à ce jour et mérite le nom imagé d'alcaloïde de la bande d'Esmarch, dont l'avait baptisé Lermoyez; 2° Que les applications externes, locales, tant en chi- rurgie générale qu'en rhinologie et en ophtalmologie, sont dès maintenant parfaitement réglées ; 39 Qu'en revanche, l'administration interne en méde- cine générale, dans le traitement des hémorragies en particulier, demeure imprécise, mal réglée, aléatoire, en dépit de succès partiels, mais inconstants. A signaler l'étude des inconvénients, dangers et contre-indications de la dite substance, des hémorragies secondaires et des accidents bulbo-protubérantiels en particulier. D° ALFRED MARTINET. Dress 111% ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER ACADÉMIE DES SCIENCES DE PARIS Séance du 27 Novembre 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. M. Fréchet pré- sente ses recherches sur les ensembles de courbes continues. — M, H. Lebesgue montre qu'il peut exister des fonctions continues dont les séries de Fourier con- vergent partout sans être pour cela uniformément convergentes partout, — M. E. Taffoureau calcule le coefficient d'utilisation des hélicoptères, c'est-à-dire le rapport entre le poids utile et la poussée. — M. Ch. André a observé l’éclipse totale de Soleil du 30 août à Tortosa. Il montre que l'étude d’une éclipse par une série de mesures micrométriques peut être considérée comme au moins équivalente, même au seul point de vue de la détermination des contacts extrêmes, à l’ob- servation directe de ces contacts. — M. Ch. Fabry à étudié l'intensité lumineuse de la couronne solaire pendant l’éclipse totale du 30 août. L'intensité totale a été trouvée égale à 0,13 lux ou, à très peu près, les trois quarts de celle de la pleine Lune. La lumière de la couronne était d'une teinte identique à celle de la lumière solaire. 20 SCIENCES PHYSIQUES. — M. G. Le Cadet a mesuré l'intensité du champ électrique terrestre et de l’ionisa- tion de l'atmosphère pendant léclipse totale de Soleil du 30 août à Tortosa. Le champ s’est rapidement affaibli après le troisième contact, et le minimum absolu s'est produit douze minutes après la totalité. L'ionisation totale parait s'être affaiblie depuis le com- mencement jusqu'à une demi-heure environ après la totalité. — M. L. Malassez montre la nécessité de définir plus exactement la notion de pouvoir grossis- sant des objectifs microscopiques. — M. M. Chanoz décrit une méthode qui permet, par l'emploi des chaines liquides symétriques présentant une surface fraiche de contact, de déceler les impuretés des électrolytes ou l'existence d’une dissociation hydrolytique. — M.Jean Malassez établit que les corpuscules cathodiques sont bien émis sous la différence de potentiel existant réelle- ment entre la cathode et l’anode, et que c’est à partir de la surface même de la cathode qu'ils recoivent du champ intense l'énergie cinétique correspondante. — M. M. Delépine a constaté que le platine provoque la destruction du sulfate d'ammonium par l'acide sulfu- rique bouillant; il ne doit, pour cette raison, jamais ètre utilisé dans la méthode de Kjeldahl. — M. H. Mois- san à constaté que le cuivre peut être distillé avec facilité au four électrique ; lorsque la vapeur est con- densée sur un corps froid, on peut obtenir un feutrage de cuivre liliforme présentant toutes les propriétés du cuivre ordinaire. À sa température d'ébullition, le cuivre dissout le graphite et l’abandonne plus ou moins cristallisé par refroidissement. — M. P. Lebeau à reconnu que la limite de combinaison du cuivre et du silicium, même en présence d'un excès considérable de ce dernier, n’atteint pas SiCu?, mais est voisine de SiCu' et correspond à environ 10 °/, de Si combiné. — M. G. Baudran signale un certain nombre de corps qui réagissent sur le gaïacol à la façon d'oxydases, mais en présence d’eau oxygénée : ce sont les chlo- rates, bromates, iodates, hypochlorites, hypobromites, hypoiodites. — M. Ch. Moureu à déterminé la réfrac- tion et la dispersion moléculaires d'un grand nombre de composés à fonction acétylénique. L'exaltation de la réfraction moléculaire croît très notablement à mesure que les radicaux entrant dans les molécules sont plus électronégatifs. La contiguité immédiate des groupements négatifs à la liaison acétylénique paraît être la condition de leur influence. — MM. A. Haller et Padova, par condensation des aldéhydes benzoïque, anisique et -nitrobenzoïque avec l’anthrone par lin- termédiaire de la pipéridine au sein de la pyridine comme solvant, ont obtenu les benzylidène-, anisyli= dène- et m-nitrobenzylidène-anthrones, F. 126°-127, 41400,5-1410,5 et 1650,5-166°,5. Ils en concluent que le corps C'0H#0 est un tautomère, se comportant tantôt comme anthrone, tantôt comme anthranol. — MM. A. Muntz el E. Lainé montrent qu'en partant du sulfate d’ammoniaque il est possible d'établir des nitrières à action beaucoup plus rapide et à production beaucoup plus intensive que les nitrières en usage autrefois. Un terreau bien consommé, additionné de 1 °/, de sulfate d'ammoniaque, à produit par kilog et par vingt-quatre heures 0 gr. 63 de salpêtre, soit 1.250.000 kilogs pour une année sur un hectare avec une couche de 50 cen- timètres d'épaisseur. — M. G. Malfitano montre que les sels intimement liés aux albuminoïdes et aux matières diastasiques ont une influence favorisante sur la protéolyse. — M. C. Delezenne à constaté que l’acti- vation du suc pancréatique par les sels de calcium est tout à fait spécifique. Elle ne s’observe pas avec les sels de Sr et Ba. — M. F. Battelli et Me L. Stern ont trouvé que le sulfate ferreux se comporte vis-à-vis de la catalase d’une manière tout à fait analogue à l’anti- catalase ; celle-ci jouerait donc le rèle d'une peroxydase. 3° SCIENCES NATURELLES. — M. G. Loisel : Toxicité du liquide séminal et considérations générales sur la toxicité des produits génitaux (voir p. 1.059). — M. A. Pizon, ayant repris les expériences de Piéri sur l'ovulase du sperme d'Oursin, conclut à l'absence bien nette d'un ferment soluble d'origine spermatique qui provoquerait la segmentation de l'œufet auquel avaient pu faire croire des expériences conduites avec une rigueur insuffisante. — MM. J. Kunstler et Ch. Gineste ont étudié les sphérules trophoplasmiques des Infu- soires ciliés; chez l'Opaline dimidiate, elles ont un diamètre moyen de 4 4 6. — M. Ch. Gravier a retrouvé dans le golfe de Tadjourah un Annélide polychète, décrit autrefois par M. Vaillant comme Syllidien et comme se reproduisant par bourgeonnement; c’est un type nouveau, que l’auteur nomme Anisocirrus deci- piens, et les bourgeons ne sont autre chose que les tentacules. — M. N. de Zograf a étudié la calotte cer- vicale chez les Nauplius de l'Artemia salina; elle pré- sente des anneaux de grandes cellules à réaction nerveuse, — Mlle M. Stefanowska el M. H. Chrétien ont fait des recherches statistiques sur l’évolution de la taille du lin. — M. I. Gallaud a étudié des caféiers de la Nouvelle-Calédonie, atteints d'une maladie, le koleroga où candellilo, causée par un champignon, le Pellicularia koleroga Cooke. Ce parasite est unique- ment superticiel, ce qui permet d'espérer qu'on pourra trouver un traitement eflicace sans grand danger pour l'hôte. — M. Th. Solacolu à reconnu que les réserves accumulées à la base de la fleur ou dans les parties voisines, pour servir au développement normal du pistil après la fécondation, sont utilisées dans certaines espèces, même lorsque la fécondation n'a pas lieu, à la production du fruit parthénocarpique.— M. A. Michel- Lévy a constaté qu'il existe, à l’île Pitcairn et à l’île Mangareva, deux séries de roches basaltiques : une plus acide, formée de basaltes andésitiques, passant à des andésites à olivine et à des tachylites; une autre plus basique, composée de basaltes labradoriques. — M. Ph. Négris estime que l'émersion crétacée en Grèce est subordonnée à un plissement N. E. dont les ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1145 plis se seraient moulés sur les plis hercyniens décou- verts par M. Deprat en Eubée, Avec les plis crétacés ont interféré, plus tard, les plis pyrénéens, puis les plis pindiques ou alpins, qui ont compliqué énormé- ment la tectonique de la région. — M. P. Termier à reconnu que toute la province de Santander (Espagne) est un pays de nappes, dont la formation est posté- rieure au Nummulitique. — M. Deprat déduit, de l'étude des dépôts carbonifères et permiens de la feuille de Vico (Corse), que, pendant le Carboniférien, ont eu lieu en Corse de puissantes éruptions donnant nais- sance à d'importantes coulées trachytiques (ortho- phyres), alternant avec des couches tufacées (tufs ortho- phyriques). Puis, pendant le Permien, eurent lieu de formidables éruptions donnant naissance à des coulées de rhyolites. — M. de Mecquenem a exploré le gise- ment de Vertébrés fossiles de Maragha (Perse), dont les espèces sont voisines de celles de Pikermi. Toutefois, l'ÜUrmiatherium Polaki et le Rhinoceros Morgani sont spéciaux à cette faune. Séance du 4 Décembre 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES. — M. C. Guichard pré- sente ses recherches sur la déformation des qua- driques. — M. E. Belot a appliqué la loi de Bode à la détermination des inclinaisons des équateurs plané- taires sur l’écliptique. — M. Ch. Fabry à mesuré l'éclat intrinsèque de la couronne solaire pendant l'éclipse du 30 août avec un photomètre Mascart modifié. Il était de 720 bougies par mètre carré à 5! du bord du Soleil dans la direction de l'équateur, soit 0,28 de l'éclat intrinsèque moyen de la surface lunaire. — M. M. Brillouin montre qu'un électron de forme quelconque, non sphérique, possède cinq coefficients d'inertie distincts, définis très simplement- au moyen du potentiel électrocinétique de l’électron. 29 SCIENCES PHYSIQUES. — M. Ch. Nordmann à mesuré l'ionisation positive de l'atmosphère en Algérie au moment de l’éclipse totale du 30 août. La courbe régulièrement ascendante de l'ionographe a commencé à indiquer une dépression progressive 45 minutes après le premier contact, avec un minimum 40 minutes après la totalité, suivi d’un relèvement à la normale 20 minutes après le dernier contact. — M. Houllier montre que les pluies estivales, sans effet apparent sur le débit des sources de plaine, jouent pourtant un rôle indirect : en fournissant aux plantes l'humidité néces- saire, elles empêchent ladessiccation du soletpermettent aux pluies de la saison froide, dont une partie impor- tante n’est plus employée à restituer à la terre son degré normal de saturation, de concourir entièrement à l'alimentation des sources. — MM. Gaetano et Gio- vanni Platania ont eu l'occasion d'étudier l'état magnétique de blocs de lave formant le mur d'une maison avant et après un coup de foudre. La chute de la foudre a causé une très forte augmentation de l'aimantation, qui était presque nulle à l'origine. — M. G. Charpy a étudié le refroidissement des alliages fer-carbone. La solidification du mélange eutectique cémentite-cristaux mixtes se produit vers 1.450° et non vers 1.050°; la solidification du mélange eutectique graphite-cristaux mixtes se produit à une température légèrement supérieure. Suivant les conditions de refroidissement, on obtient la solidification de l’un ou l’autre de ces mélanges, mais non des deux successi- vement, — M. Em. Vigouroux a constaté que Si et Al, incapables de se combiner à l’état pur pour former des siliciures d'aluminium, s'unissent souvent, à la faveur d'impuretés apportant un troisième métal, pour donner naissance à des siliciures d'Al et du métal, c'est-à-dire à des silicoaluminures, corps définis el cristallisés. — M. G. Urbain montre que le spectre de phospho- rescence ultra-violet observé par Sir W. Crookes en 1899 ne caractérise aucun élément nouveau et que la substance qu'il a appelée victorium est un complexe renfermant du gadolinium. — M. H. Leroux, en appliquant la méthode de Sabatier et Senderens au naphtol &, a obtenu le décahydro-e-naphtol, F. 629, donnant par déshydratation l’octohydrure de naph- talène À, Eb. 190-1910. — M. H. Hérissey a extrait des feuilles du Laurier-cerise un glucoside cyanhydrique cristallisé, la prulaurasine, C'*H{Az0', K. 120°-122, (al ——52°,7. Elle est hydrolysée par l’émulsine en HCAz, d-glucose et aldéhyde benzoïque. Elle est isomère de l'amygdonitrile-glucoside et de la sambuni- grine. : 30 SciENCES NATUELLES. — M. A. Laveran signale un grand nombre de localités de l'Ouest africain et de l'Etat indépendant du Congo où ont été capturées des tsétsés ou autres mouches piquantes. L'’abondance de ces insectes est bien en relation avec la fréquence des trypanosomiases. — M. G. Bohn poursuit l'étude du phototropisme chez les larves de Homard: il provoque, suivant les circonstances, des mouvements divers de répulsion, attraction, roulement et autres rotations, qui ont le caractère de mouvements irrésistibles. — M. P. Marais de Beauchamp décrit l'organe rétro- cérébral de certains Rotifères Ploïimides. Il l'a observé dans 5 familles : Euchlaninés, Rattulinés, Colurinés, Gastropodinés et Notommatinés. Il est fondamentale- ment glandulaire et élabore une sécrétion colorable vitalement par le neutralroth. — M. J. Maheu à observé, chez la majorité des espèces connues de T'ino- miseium, des laticifères inarticulés dans les paren- chymes, qui s’anastomosent par disparition des mem- branestransversales venues en contactetquicontiennent une forte proportion de caoutchouc. — M. P. Termier montre que toute lasérie sédimentaire du pays basque, depuis le Cristallin du Labourd jusqu'au Crétacé inclu- sivement, est une nappe venue d’ailleurs et ployée en carapace. — M. E. Noel a constaté que les galets allongés d'un conglomérat ont en un point une direc- tion dominante, normale à la trajectoire des filets liquides en ce point au moment précis de leur arrêt. On peut déduire de ce principe une méthode pour préjuger de la direction du courant qui a amené les galets d’un conglomérat. — M. E. Haug a étudié les fossiles dévoniens de l’Ahenet occidental recueillis par M. N. Villatte. Ils permettent d'affirmer la présence des trois subdivisions principales du système dévonien dans cette région. ACADÉMIE DE MÉDECINE Séance du 28 Novembre 1905. M. Gilbert est élu membre titulaire dans la Section de Thérapeutique et Histoire naturelle médicale. M. Netter présente un Rapport sur la proposition de M. Fernet relative à la mention de l'alcoolisme, de la tubereulose et de la syphilis sur les feuilles de décès. Il recommande l'adoption de cette proposition et l'appro- bation des modifications déjà effectuées par M. Bertillon dans les feuilles de décès soumises au corps médical hospitalier de Paris. — M. François-Frank présente un Rapport sur un Mémoire de M. Rousseau Saint- Philippe relatif à l'emploi de l'iodure d’arsenic contre la scrofule et la scrofulo-tubereulose de l'enfant. L'au- teur a obtenu, dans plus de 200 cas, de bons effets par l'administration de 10 à 40 gouttes matin et soir d’iodure d'arsenic pur en solution à 1 °/.. Séance du 5 Décembre 1905. M. Doléris est élu membre titulaire dans la Section d'Accouchements. M. Chauvel présente un Rapport sur un Mémoire de M. de Font-Réaulx concernant les résultats de l’abla- lion du cristallin transparent dans la myopie forte. Le bénéfice immédiat de l'opération consiste en une dimi- nution de la réfraction oculaire, un allongement de la vue et un accroissement de l'acuité de vision; par contre, le bénéfice réel pour la vision rapprochée parait être nul. Quant aux résultats éloignés, il ne paraît pas que la marche progressive de la myopie soit enrayée; tout au plus est-elle ralentie. L'opération est donc A116 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES sérieuse, grave même, et ne devra pas être appliquée indistinctement à toutes les myopies. — M. N. Gréhant à poursuivi ses recherches sur l'air confiné. Chez le chien, il a obtenu l'arrêt de la respiration et de la cir- culation dans un air qui ne renfermait plus que 3,3 °/, d'oxygène, mais qui contenait, en outre, 12 °/, de CO*. — Après discussion, l'Académie adopte la proposition de M. Fernet relative à la mention de diverses maladies sur les feuilles de décès. SOCIÉTÉ DE BIOLOGIE Séance du 2 Décembre 1905. M. G. Linossier signale des phénomènes d’intoxica- tion chez l’homme, non seulement à la suite de l'in- gestion d'œufs plus ou moins altérés, auquel cas l’in- toxication est attribuable aux ptomaïnes de la putré- faction, mais à la suite de la simple ingestion d'œufs de poule parfaitement frais, ce qui confirme l'existence d'une ovotoxine dans l'œuf. — MM. G. Leven et G. Barret montrent, par la radioscopie, que, dans le pansement au bismuth de l’ulcère gastrique, l'impré- gnation totale, même légère, de la muqueuse gastrique n'est pas réalisée. Il y a donc lieu de renoncer à l’em- ploi des doses massives. — M. P. Harang à extrait de l’'Aspergillus niger une tréhalase qui permet de re- chercher et de doser le tréhalose dans les Champi- gnons, en mesurant le pouvoir rotatoire du glucose formé par dédoublement. — MM. A. Rodet et Gala- vielle ont constaté que le bacille de la phléole (Timo- thée-bacille), introduit dans l'organisme du lapin, du cobaye, des Bovidés ou de la chèvre, à l'état de culture pure, est susceptible de déterminer des lésions viscé- rales qui présentent des analogies manifestes avec les lésions tuberculeuses. — MM. A. Rodet et Lagriffoul ont observé que, pour l’exaltation du bacille d'Eberth par la méthode des passages, les « passages directs », utilisant comme matière infectante les exsudats péri- tonéaux eux-mêmes, constituent la méthode de choix. - M. A. J. Carlson a reconnu que le courant moteur passe huit à dix fois plus lentement à travers les plexus nerveux du cœur qu'à travers les nerfs des muscles périphériques. — M. J. Laurent essaie de concilier les résultats des expériences de Klebs et de Blaringhem relativement à l'influence des traumatismes sur certaines plantes en montrant que, dans les expé- riences de ces deux auteurs, le milieu intérieur de la plante varie dans le même sens. — M. Ch. Féré à étudié l'influence de l'orientation sur l'activité : vers le sud, le travail est plus faible, vers le nord plus grand, et encore plus intense vers l’est et surtout vers l'ouest. — M. G. Bohn a reconnu que très fréquem: ment les Arthropodes s'orientent par rapport à la dis- tribution topographique des taches d'ombre et de lumière à la surface de leurs yeux ; plus la surface de l'œil est étendue et immobile, plus les rotations s'ac- complissent avec rapidité et sûreté. — M. A. Policard a constaté que la striation basale des cellules du cana- licule contôurné du rein des Mammifères est due à l'existence de filaments basophiles, individualisés dans le cytoplasma et tous parallèles entre eux. — M. G. Marcano considère les lésions des polypes muqueux des fosses nasales comme déterminées par un processus unique d'ædème inflammatoire, quelquefois accom- pagné d'hyperplasie glandulaire et se terminant par une sclérose interstitielle éléphantiasique, rarement par une formalion myxomateuse., — M. J. Darier conclut des recherches précédentes que l'existence du myxome vrai est très discutable à la peau, et que les tumeurs molles et gélatineuses qu'on y rencontre sont d'ordinaire des éléphantiasis partiels. — M. L. Jouhaud montre que l’action des solutions aqueuses de sublimé sur le sang porte non sur l’hémoglobine, mais sur le stroma globulaire, qui emprisonne l'hémoglobine dans ses mailles. — M. H. Hérissey : Sur la prulaurasine (voir p. 1115). — M. P. Wintrebert a éludié l’ordre d'apparition des orteils et le premier développement des membres chez les Anoures; aux deux extrémités, la prévalence, dans l’ontogénèse comme pendant la vie, appartient à la quatrième digitation. — Le même auteur à observé qu'après ablation des centres médul- laires chez les larves de Rana viridis, la régression de la queue se produit néanmoins; mais les membres postérieurs sont gravement atteints. — M. F. Battelli et Me L. Stern ont constaté que l'anticatalase agil comme une peroxydase : elle active le peroxyde d’hy= drogène au même titre que l'hémoglobine. SOCIETE FRANÇAISE DE PHYSIQUE Séance du 1% Décembre 1905. M. Pierre Weiss adresse une Note sur les propriétés des contacts imparfaits, à propos des travaux de MM. Fisch, Schneider et Blanc. — M. Maurice Leblanc présente une nouvelle machine frigorifique. Cette ma= chine est destinée à refroidir un courant d’eau natu- relle ou salée. Le froid y est produit par l’évaporation partielle dans le vide de l'eau à refroidir, comme dans la machine Carré. Mais alors que, dans cette dernière, la vapeur d’eau produite par l’évaporation est absorbée par de l'acide sulfurique concentré, l’auteur s’est pro- posé d'extraire la vapeur, au fur et à mesure de sa pro- duction, par des moyens purement physiques. L'énor- mité des volumes à extraire, due à l'extrême faiblesse de la densité de la vapeur d’eau aux températures infé- rieures à 0°, prohibait l'emploi de pompes, qui auraient dû avoir un volume démesuré, par rapport à leur puis- sance, et un rendement illusoire. Il s'est servi d'éjec- teurs à vapeur où la vitesse du fluide entrainé atteint environ 1.000 mètres par seconde, ce qui leur permet d'en extraire de très grands volumes sans que leurs dimensions soient exagérées. Les calories prises au courant d’eau sont transportées sur un corps à tempé- ralure aussi basse que possible. Ce corps est, comme dans toutes les machines du même genre, un conden- seur refroidi par un autre courant d’eau. La nouvelle machine se compose, en définitive, d’une chambre her- métiquement close, dans laquelle le vide est entretenu par un éjecteur à vapeur qui aspire dans cette chambre et refoule dans un condenseur. L'eau à refroidir est introduite à la partie supérieure de cette chambre, où elle pénètre naturellement, sous l'influence du vide. Elle s'y évapore partiellement. La partie non évaporée, mais refroidie, est reprise à la partie inférieure par une pompe qui la renvoie dans l'atmosphère. L'étude de cette machine a conduit l’auteur à faire une théorie du fonctionnement des éjecteurs à vapeur. La princi= pale cause de mauvais rendement de ces appareils est due à la perte de force vive occasionnée par la ren- contre des veines fluides entrainante et entraînée, qui ont des vitesses très différentes. Dans le cas actuel, le poids du fluide entrainé étant toujours plus petit que celui du fluide entrainant, le rendement de l’éjecteur est comparable à celui du système constitué par une machine à vapeur et par un compresseur à piston, tant que la compression peut s'y opérer dans de bonnes conditions. Pour cela, il faut qu'elle soit effectuée le long d’un diffuseur divergent, toutes les fois que la pression initiale est au moins égale à 58 /, de la pres- sion finale. Lorsque la pression initiale est plus petite,» il faut que le diffuseur soit d’abord convergent, puis divergent. Jusqu'à présent, on n'avait pu se servir de diffuseur convergent-divergent, la compression pro: duite dans la partie convergente étant détrüite par une détente consécutive dans la partie divergente. L'auteur n’est parvenu que tout récemment à empêcher la pro- duction de ce phénomène et à rendre possible l’utili= sation de ces diffuseurs. En se servant de diffuseurs divergents, il à pu obtenir, dans des conditions de ren=" dement très supérieures à celles des machines à ammo=, niaque, des différences de température de 10°, et, dans des conditions de rendement comparables, des difté= rences de température de 20°, ce qui a permis de fabri- quer de la glacé. Il s'occupe de la production de diffé= ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES 1117 rences .de températures supérieures, à l'aide de ses nouveaux diffuseurs, et est parvenu, dès à présent, à obtenir de l'eau salée à — 14°, le “condenseur étant à la température de 4230. — M. Le Bel expose la suite de ses expériences destinées à démontrer qu'il peut exister une inégalité entre le pouvorr émissif d'un corps et son pouvoir absorbant relativement au rayonnement émis par une enceinte de nature différente. Un couple thermo-électrique différentiel a été formé par un fil de platine iridié en forme de U soudé à deux fils de pla- tine protégés par un crayon en terre réfractaire. Sur l'une des pointes de la fourche ainsi constituée, on place un chapeau formé par un petit tube de platine très mince sur lequel on a enroulé du fil de platine de Om%,03, le tout pesant jusqu'à 0 gr. 02. L'enceinte est constituée par un tube fermé en platine fondu de 10 millimètres de diamètre et 140 millimètres de lon- gueur, placé dans un tube de cuivre rouge, lequel est chauffé, soit au moyen d’un bain de plomb, soit par le courant électrique. En déplaçant le chapeau d'un point à l’autre, on observe avec l’un et l’autre appareil une déviation du galvanomètre qui commence vers 50°, pour atteindre, entre 3509 et 400°, un maximum de 7 milli- .mètres à 10 millimètres suivant le chapeau employé, ce qui’ correspond à 0°,10 ou 0°,13. Le phénomène diminue ensuite de 1/3 environ jusqu'à 500°, mais tend vers une constante; on n'a atteint 800° qu'au bain de plomb. 11 diminue encore quand on calcine le chapeau, mais on peut alors chauffer pendant trente-six heures à 600 sans qu'il faiblisse. Les observations faites avec une enceinte plus grande, de 40 millimètres de dia- mètre (mais avec une gaine de cuivre trop courte), ont confirmé ces résultats; on a pu introduire dans cet appareil un chapeau de 4 gramme et constater que la différence observée est plus forte. On corrigeait l'iné- galité de température en retournant le crayon de 180”, et, si l'équilibre est bien réglé, on observe la mème différence moyenne, que la fourche soit verticale ou horizontale. Le phénomène diminue quand on prend pour enceinte un tube en argent et quand on fait le chapeau en fil d’or ou en fil d'argent; il se maintient avec du fil de palladium. Si, au contraire, on met une lame de mica à l'intérieur ou à l'extérieur du chapeau, on n'observe plus rien; on n'a pas non plus réussi à observer une différence lorsque te tube formant en- ceinte était en platine aggloméré, c'est-à-dire pareil au fil mince du chapeau. Du reste, le platine fondu diffère aussi du platine aggloméré par sa dureté et sa malléabilité moindre; il est probablement moins pur que le métal fourni directement par la calcination du chloroplatinate ammonique. L'auteur a aussi constaté que le bloc de granit entouré d'asbeste continue depuis un an et quart à manifester un excédent de 09,03 à 0,04 sur la température de la cave à 20 mètres de pro- fondeur où il se trouve, et ces deux sortes d’observa- tions tendent à confirmer son hypothèse initiale. On peut, sans doute, admettre que le granit participe des propriétés du radium; mais la singulière facilité qu'on éprouve à supprimer le phénomène observé avee le fil de platine mince, soit en modifiant l'enceinte, soit en couvrant le chapeau de mica, ainsi que la faiblesse du phénomène à la température habituelle et son maxi- mum vers 4009, ne paraissent pas établir d'analogie avec les effets de radio-activilé qui sont invariables et indé- pendants des actions extérieures. SOCIETE CHIMIQUE DE PARIS Séance du 24 Novembre 1905. MM. A. Trillat et Sauton communiquent les résultats qu'ils ont obtenus dans l'étude du dosage de la matière albuminoïde du lait. Le procédé consiste à utiliser les ropriétés que possède l’aldéhyde formique d’'insolubi- iser les matières albuminoïdes du lait dars des condi- tions particulièrement favorables pour leur isolement. Les auteurs exposent les essais de contrôle auxquels ils se sont livrés pour faire la vérification de leur mé- thode. Cette étude fournit l’occasion à M. Trillat de parler des propriétés si remarquables de la caséine insolubilisée par l'aldéhyde formique et des applica- tions industrielles auxquelles elle à donné lieu. — MM.P. Freundler et Damond décrivent le procédé qui leur à permis de transformer la méthyléthyleétone en alcool! amylique racémique (C*4°)(CHS) CH.CH°OH, avec un rendement de plus de 60 °/, de la théorie. Cette méthode consiste à réduire la méthyléthylcétone en alcool butylique secondaire par la méthode de M. Sabatier. L'alcool butylique secondaire, traité par le tribromure de phosphore, fournit du bromure de butyle secondaire. Enfin, ce dernier est transformé en organo- magnésien et condensé avec le trioxyméthylène sec : CA C2HP, SCHMgBr + CH20 = > CH — CH20MgBr. CH” É ca” On obtient en même temps un peu du formal corres- pondant, CH? \|OC‘H‘}. La dernière réaction ne donne de bons rendements que si l’on modère la formation de l’organo-magnésien par addition d’une trace de sul- fure de carbone. Si l’éther employé est parfaitement pur, il se forme beaucoup plus de butylène et de butane. — M. G. Urbain expose ses dernières recher- ches sur les terres yttriques. Les terres comprises entre le terbium et l’yttrium appartiennent au groupe hol- mique. Ces terres, séparées du terbium et de l’yttrium par le fractionnement des éthylsulfates, ne renferment pas trace d’erbium, Le fractionnement des nitrates simples dans l'acide nitrique a permis de séparer ces nitrates en deux groupes. Le premier groupe, nitrates les moins solubles, donne des sels verts, le second groupe donne des sels orangés. A l'étincelle, les terres à sels verts donnent un spectre ultraviolet riche en raies brillantes, parmi lesquelles on peut observer celle de l'élément À prévu par Demarcçay, ainsi qu'un grand nombre des raies de l'élément X prévu par Exner. Le spectre visible donne, avec le mode d’excitation de l'étincelle préconisé par M. Lecoq de Boisbaudran, les raies qui ceractérisent un élément inconnu qu'il a dé- signé par Zy. A l'absorption, elles donnent les bandes visibles À= 753, 474, 451, 428, qui caractérisent, d'après M. Lecoq de Boisbaudran, un élément auquel il a donné le nom de dysprosium. Le spectre de fluores- cence des solutions présente uniquement les bandes qui, d’après le même auteur, caractérisent un élément Lz. Enfin, le spectre de phosphorescence oblenu en introduisant environ 1°/, de cette terre dans la chaux pure donne, comme bande principale, la bande connue sous le nom de bande citron, que M. Crookes attribue à l’yttrium et M. Lecoq de Boishbaudran à sa terre Ze. Or, la terre de l’auteur, dont le poids atomique est 162, ne renferme pas traces d’yttrium. Son oxyde est sensi- blement blanc. 1% fractions consécutives, obtenues après trois ans de fractionnements journaliers, donnent le même spectre d’étincelle, le même spectre d'’ab- sorplion, les mêmes spectres de phosphorescence, le même poids atomique. Il est probable que cette substance est un élément unique; il est cependant possible qu’elle soit un groupe d'éléments fort voisins. Dans le cas où cette substance serait homogène, il parait légitime de lui conserver le nom de dyspro- sium que M. Lecoq de Boisbaudran a donné à la terre encore inconnue qui donne le spectre d'absorp- tion visible. Le spectre ultraviolet d'absorption est fort intense. On y observe les bandes suivantes : 400 à 394, faible; de 392 à 384,5, très forte; de 381 377, moyenne; de 368,5 à 361,5, forte ; de 355,5 à 34 extrèmement forte ; de 340 à 336, assez forte ; de 329 à 316, extrêmement forte. Quelques bandes de ce spectre empiètent plus ou moins complètement sur les bandes du terbium ; l’une d’entre elles, la bande 350, parait coïncider presque exactement avec la bande corres- pondante attribuée par M. Urbain au terbium. Cepen- dant, lorsque l’on observe des solutions de terbium et de terres à dysprosium à des concentrations telles que 1118 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES ces deux bandes aient la mème intensité, la bande 368,5-361,5, forte dans les terres à dysprosium, fait complètement défaut dans la terbine. En admettant que la bande 350 dans la terbine est la même que la bande correspondante dans les terres holmiques, il faudrait admettre que cette bande caractérise un élé- ment encore inconnu envahissant toutes les terres comprises entre le gadolinium et l'yttrium. Cette hypothèse est assurément admissible, mais se concilie mal avec la plupart des autres observations faites sur les terres de ce groupe. La bande visible 451, que M. Le- coq de Boisbaudran attribue au dysprosium et appelle x, présente dans les terres à sels orangés ou holmium une anomalie semblable : elle se renforce dans ces dernières. Plusieurs observations donnent à penser qu'il ne faut voir là qu'une coïncidence, qui est d’ail- leurs fréquente dans la spectroscopie des terres rares. M. Urbain expose ensuite ses recherches sur la phos- phorescence des terres rares. Il a commencé l'étude de la phosphorescence ultraviolette que donnent les terres gadolinifères. On sait que cette phosphorescence a été attribuée par Sir W, Crookes à un élément qu'il a appelé victorium. En diluant une terre gadolinifère dans environ 100 fois son poids de chaux, la phospho- rescence ultraviolette révèle au spectrographe le spec- tre suivant: 3153,5, moyenne ; 3152,3, faible ; 3150,5 et 3149,3, moyennes; 3147,3, très forte ; 3146,0, faible; 3144,2, faible; 3140,0 moyenne. Si une trace d’impu- reté (victorium) donnait un spectre analogue, mais déjà faible, dans le gadolinium pur, après une pareille dilu- tion dans une terre inerte comme la chaux, la phos- phorescence devrait disparaître tout à fait. L'auteur conclut de cette expérience que la phosphorescence décrite appartient en propre au gadolinium. SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES Communications reçues pendant les vacances. Sir A. Noble, poursuivant ses recherches sur les explosifs, a recalculé les températures atteintes avec différentes densités de charge, en se basant sur les valeurs des chaleurs spécifiques des gaz à haute tem- pérature données récemment par MM. Holborn et Austin. Il arrive à des résultats presque identiques à ceux qu'il avait déjà trouvés, pour la cordite, pour les fortes densités de charge (0,35 à 0,50); mais, pour les densités décroissantes, les températures déduites sont bien inférieures aux valeurs déjà trouvées. Des sub- stances diverses, comme le carbone, Pt, Ta, Os et Ti métalliques, placées dans la charge, ont toutes été plus ou moins fondues ou volatilisées pendant la minime fraction de seconde où elles ont été exposées à la chaleur maximum. — M. Th. F. Claxton présente les résultats préliminaires d'un relevé de la déclinaison maqnétique aux environs du Royal Alfred Observatory, à l'ile Maurice. Des observations, il résulte que la déclinaison normale à l'Observatoire est d'environ 9°45!, soit 30! de plus que la valeur obtenue précédem- ment et employée comme base pour les valeurs publiées depuis 1875. Tout autour, il y a une assez grande varia- tion, les deux valeurs extrèmes observées étant de 41029! et 7°30/ en deux points distants seulement de 180 mètres. — M. F. H. A. Marshall : Sur la fertilité des moutons écossais. L'auteur a constaté qu'une alimentation artificielle appropriée exerce une influence stimulante sur l’activité sécrétoire des ovaires, en causant une maturation plus rapide des follicules de Graaf, qui se déchargent en plus grand nombre dans les premières périodes d'ovulation de la saison sexuelle. — Me J. E. Lane-Claypon a étudié l’origine et l'évo- lution des cellules interstitielles de l'ovaire du lapin. Un grand nombre de cellules germinales sont incluses dans le mésoblaste sous-jacent; le plus grand nombre subissent des transformations jusqu'à un certain stade. Ce stade atteint, elles peuvent passer par les processus nécessaires d'ovogenèse, ou elles peuvent être modifiées pour former soit les cellules folliculaires, soit les cel- lules interstitielles, ce dernier processus étant le sort principal des cellules situées près de la périphérie, tandis que l’ovogenèse est celui des cellules les plus centrales. Les cellules interstitielles sont donc des œufs potentiels, capables de devenir des œufs si le stimulus approprié est donné. Cestimulus est donné par la gros- sesse, période durant laquelle elles subissent un accrois- sement de dimensions, excédant celui d'un œuf primor- dial. Vers le vingt-troisième jour environ, quelques- unes des cellules interstitielles sont enlevées près de la périphérie, et elles passent par les transformations nucléaires de l'ovogenèse en devenant de vrais œufs. — MM. F. Keeble et F. W. Gamble : Sur l'isolement de l'organisme infectieux (Zoochlorella) du Convoluta ros- coffensis. Les auteurs ont obtenu la preuve expérimen- tale que les cellules vertes (Zoochlorella) qui appa- raissent dans les tissus superticiels de la Convoluta roscolfensis (turbellariée) existent dans le corps comme résultat d'une infection. Comme ceux des savants anté- rieurs (Haberlandt),les essais des auteurs pour cultiver les cellules vertes isolées de l'animal ont échoué. En somme, l'observation amène à la conclusion que les cellules vertes, une fois qu'elles ont pénétré dans le corps de l'animal, perdent tout pouvoir d'une existence: séparée. Par conséquent, afin de résoudre le problème de la nature des cellules vertes, les auteurs ont été obligés de l’attaquer par l’autre bout, c'est-à-dire en essayant de découvrir l'organisme avant son entrée dans le corps. D'après leurs observations sur le cours normal de l'apparition des cellules vertes dans les corps des Convoluta qui viennent d'éclore, les auteurs furent amenés à penser que l'on découvrirait les précurseurs des cellules vertes sur ou dans les capsules dans les- quelles sont placés les œufs des Convoluta. C'est, en effet, le cas. Par l'isolement de ces capsules, on a obtenu des colonies vertes d’un organisme mobile et l’on à prouvé que l’organisme a le pouvoir d’infecter de jeunes Convolulta incolores, éclos dans des conditions stériles, et de donner naissance, chez ces animaux, aux cellules vertes identiques à celles quise produisent chez l'adulte normal. L'organisme infectieux est, dans son état actif, une algue unicellulaire à quatre cils. Il à un unique chloroplaste en forme de bassin, occupant la plus grande partie de la cellule, une tache en forme d'œil, placée excentriquement, et une grande pyrénoïde octo- gonale à l'extrémité postérieure du corps. Les cellules mobiles se reposent fréquemment et s’entourent elles- mêmes d'une paroi épaisse striée. Elles peuvent aussi, dans cet état de repos, subir une division végétative, donnant lieu à une condition palmellée. Ces carac- tères indiquent la relation de l'organisme infectieux avec les Chlamydomonadinées. SOCIÉTÉ DE PHYSIQUE DE LONDRES Séance du 24 Novembre 1905. M. A. Russell présente ses recherches sur la résis- tance diélectrique de Pair. Celle-ci, à une pression barométrique donnée, est généralement déduite des, résultats des expériences faites sur les voltages disrup= tüifs entre des électrodes métalliques égales placées à une distance donnée. On suppose alors que le champ électrique entourant les deux électrodes juste avant le passage de la décharge disruptive est semblable à celui qui entoure les électrodes aux faibles voltages. Schuster a montré que cette hypothèse n’est pas soutenable: L'auteur trouve que, dans certains cas, le diélectrique cède avant que la décharge finale n'ait lieu. Donc les limites des tubes de Faraday ne sont plus les surfaces des électrodes métalliques, mais la limite de cette partie du diélectrique entourant les deux électrodes qui a cessé d'isoler en devenant conductrice. On sait que, pour divers gaz, il ya certaines différences de potentiel minima entre les électrodes pour la production d’une élincelle ; les équations électrostatiques ne rendent pas compte de ce fait. L'auteur suppose que, pour des dis= lances plus fortes qu'un millimètre, quand le voltage ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES disruptif est V kilovolts, la différence de potentiel efficace entre les extrémités du tube de Faraday qui est soumis à la tension maximum est Ve, « étant le voltage minimum pour la production d'étincelle. Appli- quant ces données aux essais de Heydweiller, Stein- metz, etc., l'auteur trouve pour la résistance diélec- trique de l’air 38 kilovolts par centimètre carré environ. Cette valeur permettra de calculer la pression critique pour les transmissions électriques aériennes à haute tension. -- MM.H.-A. Wilson etE. Gold ont déterminé la conductibilité électrique d'une flamme de Bunsen contenant des vapeurs de sels alcalins pour des cou- rants alternatifs d'une fréquence de 7 X 10* à 11 X 10° par seconde. Pour les courants alternatifs rapides, une flamme contenant les vapeurs d'un sel alcalin se com- porte comme un milieu isolant de haute capacité induc- tive spécifique. La conductibilité des vapeurs des divers sels alcalins dans une flamme pour des courants alternatifs rapides, telle qu'elle est mesurée par la capacité apparente d'électrodes de platine immergées dans la flamme, varie comme la racine carrée de la conductibilité des mêmes vapeurs salines pour des courants continus. On en conclut que les ions négatifs de tous les sels ont la même vitesse. La capacité appa- rente varie presque inversement à la racine carrée de la différence de potentiel maximum appliquée. La capa- cité apparente est presque indépendante du nombre de vibrations par seconde et de la distance des élec- trodes. La capacité apparente par centimètre carré de surface des électrodes est égale à Vne/8xV,, où n est le nombre d'ions positifs par centimètre cube, e la charge d’un ion et V, la différence de potentiel maximum appliquée. — M. J. Morrow communique ses recherches sur les vibrations latérales des barreaux chargés et non chargés. Au moyen d'une méthode d'approxima- tion continue, il a pu déterminer les courbes de dépla- cement élastique et la fréquence des vibrations laté- rales des barreaux. Les équations générales du problème sont difficiles à manier ; mais, pour une position donnée de la charge du barreau concentrée en un point et pour un rapport donné dela masse de la charge à celle du barreau, les expressions qui donnent la fréquence deviennent simples. L'auteur en a calculé les cons- tantes pour un certain nombre de cas particuliers. SOCIÉTÉ DE CHIMIE DE LONDRES Seance du 2 Novembre 1905. M. Ph. Blackman montre que la conductivité mo- léculaïre de l’eau peut être représentée par K et cal- culée par l'équation : Brnx € Bouion — Bryix = K; OÙ Uri rom et Pnx représentent respectivement les conductivités moléculaires, mesurées à la même température et à la même concentration moléculaire v, de l'acide HX, de la base M'OH et du sel M!'X. — M. H. O. Jones montre que les deux iodures d'a et £-phénylbenzylméthylallylammonium isomères de We- dekind ne sont pas des isomères, mais des composés différents, la substance $ étant en réalité un iodure de benzylphényldiméthylammonium. L'activité optique est la seule manifestation possible de l'existence de composés stéréoisomères de l’Az pentavalent du type AzabcedX, et, comme on n'a jamais pu la déceler, il s'en- suit qu'il ne se forme pas d'isomères par l'union des amines tertiaires et des iodures d’alkyles. — M. E.B.R. Prideaux à préparé, par l’action du fluor sur le sélé- nium et le tellure, des fluorures gazeux SeFf et TeF°; ils sont condensables par le froid en formant des corps blancs de neige. — M. J. F. Thorpe a préparé, par des méthodes qui ne laissent aucun doute sur leur constitu- tion, les acides 4$-et &y-diméthylglutaconiques; or, ils ne sont pas isomères, mais identiques; de même, les acides a-méthyl-B-éthylglutaconique et B-méthyl-7-éthylgluta- 1119 conique sont identiques. Il en résulte que l'acide glu- taconique possède une structure symétrique. — MM. H. Rogerson et J. F. Thorpe, en faisant réagir le cyano- acétate sur l’acétoacétate d’éthyle, ont obtenu, par hydrolyse, soit des dérivés de l'acide glutaconique, soit des dérivés de la 2:6-dioxypyridine. — MM. F. V. Darbishire et J. F. Thorpe, par élimination de HBr de l’x-bromo-6-méthylglutarate d’éthyle, ont obtenu un mélange d'acide 6-méthylglutaconique avec son éther éthylique lactonique. Avec l’«-bromo-af-dimé- thylglutarate, on obtient également, et avec un meil- leur rendement, l'acide «f5-diméthylglutaconique. — M. J. Wade a constaté que l’acétate d'éthyle forme des mélanges binaires et ternaires à point d'ébullition minimum avec l'alcool éthylique et l’eau. Le mélange ternaire, qui contient 9 °/, d'alcool et 8 °/, d’eau, bout à 700,3, et les mélanges binaires, qui renferment res- pectivement 8,6 °/, d’eau et 30,6 °/, d'alcool, bouillent à 70°,5 et 74,8. En préparant les éthers par la méthode de Markownikoff, par distillation continue des acides et alcools en présence d'acide sulfurique, on obtient généralement de ces mélanges ternaires. — M.E. B.R. Prideaux, en faisant passer le fluor sur le brome, a obtenu un liquide jaune pâle qui se congèle en un solide blanc fondant à — 2°. Il répond à la formule BrF® et paraît être le seul fluorure de brome défini. — MM. E. Linder et H. Picton ont poursuivi leurs re- cherches sur les solutions et pseudo-solutions. Ils con- sidèrent les précipités qui se forment quand le sulfure d'arsenic est coagulé par les sels métalliques comme des dérivés métalliques d’un sulfhydrate complexe xAS?S5.HPS + BaCI° — xAs?$S*.BasS EL 2HCL II doit se pro- duire des phénomènes analogues dans la coagulation de l'hydrate de fer colloïdal. La coloration substantive du sulfure d’arsenic et de l'hydrate de fer colloïdaux par le violet de méthyle et le bleu d’aniline présente des phénomènes analogues à ceux de la coagulation de ces colloïdes par les sels métalliques. — M. J. E. Purvis a étudié l'influence de champs électro-magné- tiques puissants sur le spectre d'étincelles du ruthé- nium, du rhodium et du palladium. La plupart des lignes sont divisées en triplets, quelques-unes en dou- blets ou quadruplets; très peu ne sont pas affectées. La ligne intérieure du triplet est généralement la plus forte. — M. Ph. W. Robertson a observé que les alca- loïdes du cinchona forment avec le thiocyanate de Zn et d'Am des composés insolubles caractéristiques. Leur formule est très compliquée : celle du thiocya- nate de cinchonine, d'ammonium et de zinc est 4CH2#0A7°. 3Zn (CAzS)?.2AzH*CA7S.4#HGAZS. Malgré la complexité de ces sels doubles, la détermination de la quantité de thiocyanate enlevée de la solution par les alcaloïdes constitue une méthode volumétrique exacte et rapide pour les doser, en particulier la quinine. — M. P. S. Barlow a cherché à déterminer la pression osmotique de solutions de sucre dans les mélanges d'alcool et d’eau. Pour les membranes perméables à l'eau seulement, la valeur de Van’t Hoff pour la pression osmotique est fortement diminuée par la présence d'alcool; au-dessous d'une certaine-concentration de la solution sucrée, il n’y a plus de manifestation di- recte de la pression osmotique, l'alcool présent mas- quant l'effet du sucre. Pour une membrane perméable à l’alcool seulement, la pression est beaucoup moindre que dans le cas précédent, et elle se manifeste très lentement. SOCIÉTÉ ANGLAISE DES INDUSTRIES CHIMIQUES SECTION DE NOTTINGHAM Séance du 20 Octobre 1905. MM. S. R. Trotman et J. E. Hackford ont obtenu, en ajoutant de la strychnine ou un de ses sels à une so- lution contenant de l'acide tannique, un précipité blanc floculent ; son insolubilité est telle qu'on peut déceler 1120 ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES facilement une partie d'acide tannique dans 10.000. Ce composé répond à la formule C*H**A7*0°, CHO? ; il a une composition constante, même en présence d'un excès de base. Les auteurs basent sur cette réac- tion un procédé de dosage des diverses matières lan- nantes. Ils obtiennent des résultats inférieurs à ceux de la méthode par la poudre de peau, mais il est bien connu que cette substance absorbe des corps autres que l'acide tannique. SECTION DE NEW-YORK Séance du 6 Octobre 1905. M. H. S. Duckworth propose l'emploi du chlore électrolytique, sous forme d'hypochlorite de soude, au blanchiment des fibres textiles, au moyen d’un appa- reil qu'il décrit, Les avantages de ce procédé sur la méthode habituelle à l’hypochlorite de chaux sont les suivants : 4 pouvoir effectif intense de la liqueur à l'état naissant et grand degré de permanence des blancs obtenus ; 2 plus grande résistance et meilleure appa- rence des tissus blanchis; 3° faible quantité de sels restants dans la fibre. SECTION DE LONDRES Séance du 6 Novembre 1905. M. J. Lewkowitsch présente un exposé général de la question de l'évaporation dans le vide des solutions contenant des solides. ACADÉMIE DES SCIENCES D'AMSTERDAM Séance du 28 Octobre 1905 (suite), 20 ScreNces PHYSIQUES. — M. A. P. N. Franchimont présente, aussi au nom de M. H. Friedmann : Les amides des acides à et $-aminopropioniques. En 1873, M. Baumstark a extrait de quelques urines une sub- stance composée de prismes blancs de quelques milli- mètres de longueur, ressemblant à l'acide hippurique. Elle est facilement soluble dans l’eau bouillante, diffi- cilement dans l'eau froide, insoluble dans lalcool absolu et l’éther ; à 250°, elle ne subit pas de chan- gement. L'analyse menait à la formule C*H*OAz*. Baumstark l’appelait la diamide de l'acide lactique. M. Beilstein la considère comme l'amide de l'acide a-aminopropionique, en y ajoutant un point d'interro- gation. Pour lever cette incertitude, M. Franchimont a chargé M. Friedmann de la préparation des deux -ainides d'après une méthode capable de mener à des produits purs. Le résultat de M. Friedmann, c’est qu'aucun des deux amides en question n'est identique à la substance extraite de l'urine par Baumstark. — M. C. H. Wind présente : « Publications de circon- stance, n° 24-26, publiées par le Conseil permanent international pour l'exploration de la mer, contenant : A. M. van Rosendaal et C. H. Wind; Prüfung von Strommessern und Strommessungsversuche in der Nordsee (Examen d'instruments pour mesurer la vitesse des courants de la mer et détermination expérimentale de cette vitesse dans la mer du Nord). 30 SCIENCES NATURELLES. — M. H. Zwaardemaker : Sur la faculté de perception pour les intensités de sons, d'après les expériences de M. À. Deenik. Com- municalion de recherches concernant le minimum perceptible des sons provenant du diapason et du tuyau d'orgue. Pour donner à l'appréciation person- nelle des expériences une valeur réelle, il était néces- saire d'éloigner de l'observateur tout ce qui pouyait détourner son attention. Il s'asseyait donc dans le cabinet spécial du Laboratoire de Physiologie, construit de manière à ne permettre à aucun son étranger d'y pénétrer. Dans la pièce voisine, un électro-aimant imprimait un mouvement d’une certaine amplitude mesurable à un diapason. Deux tubes suffisamment protégés, traversant le mur entre les deux pièces et s'appliquant par les deux bouts aux méats auditifs de l'observateur, peuvent être placés à différents niveaux par rapport au plan des vibrations du diapason, au moyen d'un dispositif spécial, par un aide, opérant indépendamment. L'auteur conclut de ces expériences que la loi de Weber est valable en général, mais non pas exactement, pour les intensités de son moyennes et faibles qui font l'objet des recherches. Ensuite, un tuyau d'orgue, bien accordé, remplacçait le diapason. Comme dans les expériences précédentes, l’observa- teur, se trouvant dans le cabinet isolé, écoute, à travers un tube en caoutchouc, les vibrations continues, sus- citées dans le tuyau par un courant d'air sec, prove- nant d'une pompe foulante hydraulique. Une partie du conduit qui amène l'air traverse le cabinet isolé et porte à cet endroit des diaphragmes, ajustables à cer- tains diamètres, permettant à l'observateur de régler la quantité d'air, tandis qu'il peut évaluer par des ins- truments de mesure, placés en aval dans le cabinet même, la pression et la quantité de l'air qui passe par le tuyau d'orgue. Il résulte de ces expériences que le minimum perceplible le plus favorable se trouve à dof et que la distinction des sons, à partir de ce point-là, va en décroissant assez régulièrement dans les deux sens. — M. H. J. Hamburger: Une méthode d'évalua- tion de la pression osmotique de quantités minimales de fluides. Quelquefois, on est dans la nécessité de déterminer la pression osmotique de quelques fluides normaux ou pathologiques du corps, en ne disposant que de 1/2 ou 1/4 de centimètre cube. C'est ce qui arrive, par exemple, quand on cherche les concentra- tions favorables des fluides employés dans le trai- tement clinique de l'œil. Il faut alors se servir de con- centrations offrant la même pression osmotique que le milieu naturel de la cornée et de la conjonctive, l'humeur lacrymale. Mais, dans ce cas, la difficulté d'obtenir une quantité un peu considérable de la sub- stance à examiner exclut l'emploi des méthodes ordi- naires. M. Hamburger communique ici une méthode nouvelle, exempte de cet inconvénient. Elle s'appuie sur le principe connu, que le volume des corpuscules du sang dépend surtout de la pression osmotique de la solution qui les porte; l'application se fait comme suit: On prend un certain nombre d'éprouvettes en forme d’entonnoir, dont le col cylindrique est formé d'un tube capillaire calibré, fermé en bas. Dans une de ces éprouvettes, on met 1/2 c. c. du liquide à examiner et dans les autres 1/2 ce. c. de solution de NaCl de diverses concentrations (0,8 °/0,0,9 2/5, 1 2/5, ete., jusqu’à 1,6 0/5). Ensuite, à chacune de ces quantités de liquide, on ajoute 1/50 c. c. de sang. Après un délai d’une demi- heure, les éprouvettes sont placées dans la machine centrifuge, et l'on continue la centrifugation jusqu'à ce que les sédiments ne varient plus de volume. Alors la pression osmotique cherchée équivaut à celle de la solution de NaCI dont le sédiment de corpuscules du sang égale celui du liquide examiné. Pour l'humeur lacrymale, c'était la solution de NaCl de la concentra- tion 1,40/,. Malheureusement, la méthode nouvelle n'est pas si générale que celle de l’abaissement du point de congélation; elle laisse dans l'embarras dans les [cas de la bile et de l'urine. Elle rend de bons ser- vices dans les cas du sérum du sang, de la lymphe, de l'humeur cérébro-spinale, de humeur lacrymale. D'un autre côté, elle est mdépendante de la coloration, parce qu'elle ne se base que sur le volume du sédiment des corpuscules du sang. — M. A. A. W. Hubrecht présente au nom de M. E. Fischer (Freiburg im Breisgau): Das Primordialcranium von Tarsius spectrum (Le crâne primordial de T'arsius Spectrum). Communication pro- visoire. — Rapport de MM. K. Martin et J. J. van Bem- melen sur le mémoire de H. G. Jonker intitulé: Con- tributions à la connaissance des pierres erratiques sédimentaires du Hondsrug » (Rev. gén. des Se., t. XVI, p. 1018). Le travail paraîtra dans les Mémoires de l'Académie. P.-H. Scnoute. Le Directeur-Gérant : Louis OLiviER. Paris. — 1. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XVI DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES (DU 15 JANVIER AU 30 DÉCEMBRE 1905) I. — CHRONIQUE ET CORRESPONDANCE Astronomie et Géodésie. Poux (Justin). — La prochaine éclipse totale de SEE RE Een TT Des canauxde Mars. 220.900. 0 UC un 4} La situation de la Terre dans l'espace. . . . . . . . La quadrature mécanique des taches solaires . . . . La nouvelle comète à courte période « 1904 e ». Le neuvième satellite de Saturne He’sixieme)satellitée de Jupiter, 2: 1:14... . . : La polarisation de la couronne solaire. . . . . . . . Lunette méridienne photographique. . . . . . . . . Détermination de la constante d'aberration L'orbite du premier satellite d'Uranus. . . . . . . . Distances moyennes dans le système solaire. . . . . nain spectrographique de la parallaxe so- aire Les bandes d'ombre pendant les éclipses totales. Les solutions périodiques dans le problème des trois PTS 8 AE SSSR ONRER SR CE AE Le dixième satellite de Saturne. . . . . . . . . . . Botanique et Agronomie. CLerGEt (P.). — Le problème viticole francais . . Goparp (F.). — La production cotonnière mondiale. SonextensIoOnOuvelle LE NE AU MAQuenneE (L.). — L'œuvre agricole de M. P.-P. Dehé- RE EN D AS EN MERS Cu LR Ro) CORNE EE L'Institut international agricole. . . . . . . . . . . Chimie. Manie (Cu.). — L'Electrochimie et les composés oxy- génés et hydrogénés de l'azote La décomposition des ciments par l’eau de mer : Les déviations pathologiques de la désintégration des albumines : la cystinurie La récupération électrolytique de l’étain des vieux fers blancs La constitution des combinaisons bleues Origine du fibrinogène Détermination de la masse atomique de l'azote . . . MEMEMENSANS CREME EN EE. 1. Nrmals du papier comme préservatif du fer et de BaGencontres li TOUiLIE "MERE VE, 20 L'emploi de l'acide formique en distillerie. . . . . . Piles électriques à l'oxyde de carbone et au car- HOT 5 0e és CÉSAR Re La constitution de l'histidine . . . . . . . . . . . . Le chromogène scatolique de l'urine et le pigment HELENE OR RE e Les colorations iridescentes sur le verre. . . . . . . REVIE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905, Distinctions et solennités scientifiques. Ocivier (Louis). — Election à l'Académie des Sciences de Paris Les prix Nobel . Le prix Bolyai . : . . Electricité industrielle. GRAneNwirZz (A.). — La transmission à distance des ÉCRITHDESS ETES TES ET EE Guarmi (Emile). — Le potentiomètre Cromptou. Nouvel appareil enregistreur pour la télégraphie SOUS MARINE FERME CNRS RES Nouvelle lampe à vapeur de mercure à l'Exposi- HONTE SAN EMONSE PE PRN ENS CORRE La nouvelle lampe à incandescence électrique au OUEN OMENE ROME RE RE EE ER ne unitéléphone DyCémIquer ES EEE EN ENEE: L'éclairage par les lampes Cooper Hewitt . . . . . . Le régime futur de l'électricité à Paris. . . . . . . . MESSeOTan ts NQOPIRIAITES DEEP Nr Les arbres comme antennes de sep sans fil . Un nouveau fype de dynamoh.!. "0: 2. Un projet de plateforme roulante à : New-York. . . Service radiotélégraphique entre l'Océan Pacifique CHAN EIQUE EM EC ET ET : Détermination des qualités magnétiques du fer . L'utilisation locale des chutes du Niagara . . . . . Comparaison des lampes au tantale et des lampes à à Hamientide; Charbon PORN RE NU L'emploi des ondes hertziennes pour le réglage des harldees étalons PER ERerE IT Les régulateurs électriques à faible inertie et à vi- DraHon fe eu au LE NORRIS 2: à. Recherches sur l'influence de la terre dans la télé- praphesans (ANRT EE DE Lampe de sûreté système Tommasi . . . . . . .. Enseignement, Universités et Sociétés. CcerGer (P.). — L'Institut géographique de Bruxelles. HapamarD (Jacques). — A propos d'enseignement. . . PRExANT (A). — Création à la Faculté de Médecine de Lyon d'un enseigaement spécial pour les candi- dats à l'Ecole de santé militaire. . . . . . : Les progrès de l'enseignement agricole en Belgique > Prix proposés par l' Académie des Sciences de Lisbonne. Au Muséum d'Histoire naturelle . . 300, #49, Societé de Géographie de Paris. . . 300; Institut de France. Les subventions du legs Debrousse. Société de Géographie commerciale de Paris . . . . Personnel universitaire. ‘2. : 0e . - 450, Ecole pratique des Hautes-Etudes. . RE Ecole nationale supérieure des Mines . Statistique des étudiants. ; Une Ecole navale de Commerce en Espagne Académie royale des Sciences de Lisbonne. . . , . . Conseil de l’Université de Paris LE 924 967 41 100 143 190 24% 354 407 447 « 49% 590 114 839 878 968 1020 1020 1066 1067 1192 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Ecole de Physique et de Chimie de la Ville de Paris . Société des Amis de l'Université de Paris. : Le Congrès de l'Enseignement commercial. . Ls monument Dehérain- Sanson-Mussat à l'Ecole de Grignon : Premier Congrès fédératif international d' Anatomie : Congrès géologique international . . Les ‘docteurs en médecine candidats au ‘doctorat i ès- sciences . RP eh Me ob Bourses de voy age autour du monde É Ecole Polytechnique Les candidats aux Ecoles ‘militaires. L'organisation des études médicales . L'éducation en Chine . . $ Congrès international d’ Anthropologie et d’ Archéologie préhistoriques : Le Laboratoire colonial du Muséum ‘d'Histoire natu- relle de Paris. . LM Se Le nombre des étudiants en ‘Allemagne . L'Ecole de Marine de Paris . . . eee Génie Civil et Mécanique. CLerGer (P.). — Houille blanche, déboisement et droit JeIPROPRIE ER NT EN EN DEMENGE (Emile). — L'attache des rails aux traverses de chemins de fer. . . s GRaDexwirz (A). — Les furbines à ‘gaz. : MiLHAUD G) — Matière et mouvement. Bases d'une Mécanique DRISEUNE opposée à la Mécanique clas- sique A M eee de Me de D LI he OLIVIER (Louis). — Les nouvelles machines frigori- fiques à affinité. . . WEyxEr (C.-L.). — Une question ‘relative au méca- nisme des fluides. . . Les derniers BEABNÉE des locomotives à vapeur et élec- triques. . : 5 Nouvelles machines frigorifiques à affinité. Un appareil pour diminuer le roulis d'un vaisseau. La transformation des wagons à marchandises . Pendule en acier-nickel entretenu électriquement . Les signaux de chemins de fer et le Block-system au- tomatique Un appareil pour enregistrer les vibrations des stea- IMeTS EE L'emploi des chaudières à tubes d' eau sur les locomo- tives . Les explosions de chaudières et le remplacement des moteurs à vapeur par les moteurs à combustion interne. Les wagons de marchandises de grandes dimensions. L'exploitation des mines aux grandes pAoRAeUEe L'extraction et l’utilisation de la tourbe. . . Les progrès de la surchaulfe dans les macbines à va peur . RL SEINE RETIENS Les locomotives à gazoline . LOS Action du magnétisme sur les chronomètres Recherches nouvelles sur l'aviation . . . Géographie et Colonisation. CLERGET (| tique. . — Les chemins de fer transpyrénéens . - — La pénérration économique du Sahara. — La valeur éconvmique du Soudan central . — La Loire navigable et le projet du « Grand cen- tral francais » . — Le rôle économique du chemin de fer transandin. — La situation économique de Madagascar. . . . . — L'Indo-Chine francaise et ses chemins de fer. . . — Le port de Paris . — L'Industrie francaise de la soie devant la concur- rence internationale . P.. — Les grands ports français de l’Atlan- REGELSPERGER (G.). — Les travaux ‘scientifiques de la Mission Je délimitation du Niger au Tchad (Mis- sion Moll) — Les travaux de la Mission Maclaud pour la délimi- tation de la frontière entre la Guinée francaise, la Casamance et la Guinée portugaise . . . : Le caoutchouc dans l'Afrique occidentale franc aise. : L'ivoire au Congo francais . . SATPE La culture du coton dans la vallée du Niger. L'Association caoutchoutière coloniale. La cullure du coton en Afrique . La question de l'eau eu Australie . 493 589 630 713 797 83 923 1018 Géologie et Paléontologie. La séolomiedu Maroc RE RER Mathématiques. RicHarp (J.). — Les principes des DR Ro et le problème des ensembles . : La somme des angles du triangle et les hy perespaces. La théorie des ensembles . . . . Météorologie et Physique du Globe. Le sondage de l'atmosphère par cerfs-volants . Théorie nouvelle des Séismes. . . 16 Concours international de prévision ‘au temps. ts Les ballons-sondes en haute mer . . . . . . . . . Intéressante installation météorologique. . . Le concours international de prévision du temps. gl La conférence des Directeurs de services météorolo- giques à Innsbruck. . . : . . . . . . . L'épaisseur des glaces en Sibérie . : Exploration de l'atmosphère en Danemark 4 « : : « Nécrologie. PanUTANNE VC ECC SCC CE NRC LEE Détente PENSE RS Henri Parinaud. . ER RE AE A A à Emest-Adolphe Bichat. . : . . TARAThalEn EEE RE MEL nid Le Commandant Massenet . SES 200 SENTE Physique. GraDenwirz (A). — Un instrument DL l'observation de la vie des insectes … . . — Un appareil pour mesurer n équiv alent mécanique de la chaleur. . . GuizLauxe (Ch. Ed.). — Dilatation et température ‘de fusion des métaux . . SES — Le magnétisme des alliages du manganèse. She La projection en couleurs naturelles . . Photographie en couleurs par la méthode Lippmann. Sur les phénomènes présentés au sein des chamos magnétiques par les solutions de malières colo- rantes La transmission au loin des indications de la boussole. Recherches sur la loi de Draper. Le spectroscope à vision directe de ‘Blakesley à uve seule espèce de verre . . die La phosphorescence des sulfures alcalino- terreux. Fe Les rayons magnéto-cathodiques L'acoustique des salles de réunion . . . . Le sélénium et les courants électriques . . . . . . Le télégraphone perfectionné . La cause de l'effet de Volta . Effets de radiation sur les plaques au gélatino- “bro= mure d'argent. . OL Détermination de la masse atomique de l'azote. "Le Le corps humain comme source d'électricité. : Spectres des métaux alcalins; centres d'émission des différentes sénes . CS CÉORONC Stéréoscope dièdre à grand ‘champ, à miroir bissec- * teur . Une méthode pour rendre visibles les vibrations élec- triques stationnaires . . . . . . .« « . + . + + . « La photographie animale . . L'aceumulation de la chaleur solaire dans les’ liquides. L'orthodiagraphe . Nouveau procédé pour amorcer les forces au ‘moyen des sons . . Uu nouveau corps radio-ac ur, Je radio-thorium : : : Nouvel essai infructueux de liquéfaction de l'hélium. L'influence de l'ionisalion sur la codes des cohéreurs. . . D VEN cote NARCTTORES Une pile thermique à vide. La te DRÉrSUREe a-t-elle une action sur le poids des Corps : ET, Le mécanisme de la pulvérisation électrique . : Conductivité électrique et PORTO de réllexion du carbone. s 152 o41 141 . 24 190 966. 101% 1066 4 100 143 24% 298 298 394 405 A0T 446: 446. 49% 543 543 631 666 71% 114 To 198 198 838 840 878 S18 923. 966. 967 1020 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Sciences médicales. CcerGEr (P.). — La production du bétail francais et la consommation de la viande. . . Weiscenger (F.). — La Croix-Rouge japonaise. 632 | GraDENwITZ (A.). — Un dispositif pour la à production ZauLunowski. — Le surmenage des musiciens , 41 de l'anesthésie électrique . . . . . . . . . . . . Les corpuscules de Negri et la LEE NS EREE 5 | Weiscerger (F.). — Le coolie japonais. ; Nouveau traitement du tétanos . . 6 | Création d'une station biologique aux Iles Bermudes. Transmissibilité de Ja dysenterie amibienne en France. 49 | Sur la sécrétion du suc gastrique chez l'homme . . . Le syndrome de Ganser. 102 1PSunile Sucipylorique et EN La fièvre lilieuse hé moglobinurique dans le bassin Valeur de l'homochromie comme moyen de ‘défense. du Congo. CL EC SRE Po CE ente 102 | Les fonctions du bulbe . . . . . . . . . - Le « déjà vu » . 434 | La mort d'une grenouille Cale bre ee CI NT Migraine ophtalmique. 14% | Insuffisance parathyroïdienne chez la chèvre. . . La transmission du parasite de la malaria à travers le Rôle des muscles spinaux dans la marche chez placenta . . . Pen D'UN CNE 145 LOMME Re TEEN: L'autonomasie . . 245 | Un nouveau procédé ROUE produire l'anesthésie du Les hémiædèmes chez les hémiplégiques = 245 COLDS QUM AIDE EEE Ecoulement du liquide céphalo-rachidien Le le nez. 215 | L'œuf des Ascidies est une mosaïque de substances Type infantile du gigantisme . . AE 299 déterminantes d'organes . . - MPRAUÉENISERE 2. . Se SYNC OU 356 | Expériences sur la croissance des huilres : : . La neurasthénie biliaire. . . . . . 109 | Les fonctions du ccum et de l’appendice. Pseudo-tuberculose due à des lombrics . : : | 409 | La vie dans la nature à l'abri des microbes . . Syphilis et paralysie générale . . . . . . . . . . _. 449 | Le meilleur procédé d'anastomose intestinale pour les Le système séparatif dans l'assainissement urbain. 497 expériences physiologiques . . . .!. . . . à. . Le casier sanitaire des maisons de Paris. . . . . . . 545 | Les pêcheries du banc d'Arguin . . . . , . . ReE” La théorie parasitaire du cancer. . . . . 592 | A propos des expériences de M. Burke. : :..... L'assistance médicale indigène en Afrique occidentale Les problèmes de la Biologie . . . . . . . . . . . . INARCRIS EN Len bare Part rt te de eV ec 663 | La question des localisations cérébrales. : : . . . : La protection de 1 enfance en Indo- Chine; : ! : 668 | Sur les prétendues dents aurifiées des moutons aus- Neurasthénie de l'ouvrier et du pauvre. 669 traliens. RC EN NO Génio-spasmes et génio-tics. . . . . . . 669 L'acapnie évitée par la respiration d'un ‘mélange LE ON SE A ES T5 d'oxygène et d'acide carbonique. Les aphasies musicales où amusies . : . 715 | Relation entre les chromosomes du noy au et la déter- Eatuberculose au Tonkin. . - 2... . : … . T5 mination du sexe chez les Insectes. . . . . . . . Tremblement congénital chez des faisans . . 754 Modifications de la coagulabilité du sang consécutives Crise de faux accouchement chez une tabétique. 154 à la destruction expérimentale door te Le Congrès international de la Tuberculose . . . . 800 | L'alimentation rationnelle de la vache laitière et le Alimentation des campagnes en eau potable. . . . . 800 contrôle de son rendement . . . . . . . . . . . La prophylaxie de la tuberculose à bord des navires Diabète et îlots de Langerhans. . . . . . . . . . . . COMTE PM EU ec ASE de 840 L'action bactéricide des peintures MUrAIES 2-00 840 : : Mal perforant buccal dans le tabes. . . . . 840 Sciences diverses. La tuberculose et l'habitation urbaine. s81 Dysostose cléido-cranienne héréditaire. A 8S1 | Biner (A.). — Un Laboratoire de Pédagogie normale. Les bienfaits de la réferme temporaire dans l'armée. 910 | Czener (P.). — La question du sucre et la Convention AERBENXENES SE PL RR ERE » . 4 L — La dépréciation du métal argent. ere Zoologie, Anatomie et Physiologie. MEYER QU — À propos de la représentation propor- THOnnele es NE RER ET: . A50 ALLORGE (Maurice). — Le nouveau Parc md a de Rouyer (L.). — Sur la représentation proportionnelle NENEVORREERE RTL CRIER ARE REND 54% — À propos de la représentation proportionnelle. II. — ARTICLES ORIGINAUX Astronomie, Météorologie. , Boissouny (Jean de). — Les gaz mono-atomiques, le mercure, le thallium, le plomb, l'or dans la clas- CLAUDE (A.). — La méthode des hauteurs égales en | SH EE Astronomie de position. . . . . . . 973 | Bouveaurr (L.). — Modes de formation et de ‘prépara- — L'Instrument des hauteurs égales en Astronomie tion des aldéhydes saturées de la série grasse . de position ou astrolabe à prisme. . . . . . . . 1071 | Guyor (A.). — Les dérivés y-arylés de l'anthracène et Dnrexcourt (L.). — La méthode des-hauteurs égales en ES ON RRNATUr EE LE Astronomie de position . 973 | Henrt (Victor). — Le rôle des colloïdes en Biologie. — L'Instrument des hauteurs égales en Astronomie | Découverte de kinases artificielles. . . . . . . . de position ou astrolabe à prisme 1071 | GUYE (Ph.-A.). — Nouvelles recherches sur le poids Norouanx (Charles). — La structure de la couronne atomique de l'azote. . . SORT PONT NUL, Ti fai Que 103 | HuGounexo (L.). — Les conquêtes récentes de la Bio- logie dans le domaine du Chimisme intestinal. , LaAmsLinG (E.). — Revue annuelle de Chimie physiolo- Botanique et Agronomie. gique. 1re partie : Constituants. de l'organisme. Aliments -diastases 6e nn cu : Baiccaun (Emile). — Le problème de l'exploitation | — 2° partie : Digestion, sang, urine . . agricole en Guinée francaise. …. 493 | MAILnE (A.). — Revue annuelle de Chimie minérale. MAQUENNE (L.). — La respiration des plantes vertes. 594 MAQuENNE (L.). — La synthèse végétale des corps hy- MAzé (P.). — L'humus et l'alimentation carhonée de | drocarbonésn l'AS ne la cellule végétale. {re partie : La théorie de | MAzé (P.). — L'humus et Talimentation carbonée ‘de MARIE RENE ON UE RER Al DCR 452 | le cellule végétale. 1r° partie : La théorie de Liebig. — 2e SE L'assimilation des substances ternaires. 205 — 2e partie: L' ‘assimilation des substances ternaires. Zeuurer (R.). — Une nouvelle classe de ra Er Marre R (P. Th.) — Les pseudo-acides, Les Ptéridospermées ARE VCPE ELE r . 718 | Niccoux (Maurice). — La saponification des corps gras. Roueu (Albert R — L'industrie des abrasifs et le eu COTTON PES re MELUN IT SIRET Chimie. SABATIER (Paul). — La catalyse par les métaux com- | UD S: : HN A TENTE JON PTE ERE Berrraxp (G.). — Le domaine actuel de la Chimie bio- WauL (A.). — Les idées actuelles sur la conslilution logique . SISEE TE Te APE MEAUNE "EE EST AN LEE 7 #51 des matières colorantes du triphénylméthane. 1123 593 1124 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Chirurgie, Médecine, Hygiène, Microbie médicale. BLumwsTein (F.). — Les résultats acquis de la sérothé- TAPIE. a AN NOR PT EU TP SE M D NN Desrosses (P.). — Radiothérapie et cancer. . . . . . Harruann (Henri). — Revue annuelle de Chirurgie. . JEANSELME (E.). — Hygiène et vie matérielle en Chine. LÉTIENNE (A.). — Revue annuelle de Médecine. . . . Martinet (A.). — Pharmacologie de l'acide phospho- rique : Are partie. Action digestive. . . : . — 2e parlie : Action nerveuse et humorale. . . . . Meurice (J.). — L'Adrénaline. Son action physiolo- gique et ses applications thérapeutiques. . . . . Rome (R.). — L'exode rural et la tuberculose à la GAMPETNE Re IC ee RE Ci Trousseau (A. — La fondation ophtalmologique Aïdolphetde Re SCIE RER EE : Enseignement. CcerGer (P.). — L'esprit scientifique dans l'enseigne- ment 'CDTIMErCIAl Re ME TRS SITE DaLeuowr (J.) — L'Enseignement des Sciences appli- quées à l'Institut de Physique de l'Université de BRLDOUERS NS ME SR MN TE nd Hapamarp (Jacques). — Réflexions sur la méthode ReHTISDTQUER EM PRE A CO IT Kowazskr (J. de). — L'enseignement des Sciences appliquées à l'Institut de Physique de l'Université GÉNVTULE SNl E MNe rotor Le Danrec (Félix). — L'enseignement des Sciences naturelles comme instrument d'éducation philo- SOPRQUE RE EE CRC ER ER CU MicueL-Lévy (A.). — La chaire d'Histoire naturelle des corps inorganiques au Collège de France . SwyxGebAuW (R.). — L'enseignement technique dans les Universités. L'Institut électrotechnique de HONTE HENIUIIE EME EEE CT Géographie et Colonisation. Barzcaud (Emile). — Le problème de l'exploitation apricole en GIDÉeMTANCAISE RE EN RC CavaiLLës (H.). — L'économie pastorale dans les Pyré- M'ÉCSE ER Ne ne ie NN Ur e JEANSELME (E.). — Hygiène et vie matérielle en Chine. LeGENvREe (D'). — Le « Royaume fleuri » ou Province des Quatre-Fleuves (Chine occidentale). . . . . . WEIsGERBER (F.). — La ville de Fez. . . . . . . . . . —HHUINJOURS ANTENNES Géologie, Minéralogie et Paléontologie. Lacrorx (A.). — Le mode de formation d'un dôme vol- canique et la cristallisation des roches éruptives quartzifères, d'après les observations faites au cours de l’éruption de la Montagne Pelée . . . . Lauxay (L. de). — Application de la méthode tecto- pique à la métallogénie de la région italienne . . Mrcnez-Lévy (A.). — La chaire d'Histoire naturelle des corps iuorganiques au Collège de France . . . . Réviz (J.). — La formation des vallées des Alpes de Savoie La Réunion extraordinaire de la Société géologique de France à Turin (Septembre 1905). : à... …. Roweu (Albert de). — L'industrie des abrasifs et le corindon Zeirer (R.). — Une nouvelle classe de Gymnosper- mes Les\Pféridospermées:, "MM NN Histoire des sciences et Nécrologie. Hecurozrz (H. von). M. Hertz. (Mémoire posthume et inédit de M. von HELROLA) ER CNE ER RE OCR Pépin (V.-E.). — Auguste Comte et l'Histoire scienti- fique. Remarques sur l’article posthume de Paul DNS A MAN INOTR 108 Dh CROP EE 0: EE ROM 0 Taxnery (Paul). — Auguste Comte et l'Histoire des SCIE SIT AG el NT DT EN EE Vierze (Paul). — La vie et l'œuvre de Sarrau. . . . . — La vie et les travaux de. ‘423 171 195 947 634 1038 Mathématiques. MEYER (A.). — La théorie des élections et la représen- tation proportionnelle. 1" partie : Système majo- ritaire et systèmes de répartition proportionnelle. — 2e parlie : Examen critique des théories sur les- quelles s'appuie le système d'Hondt. . . . . . . Mécanique et Génie civil. CarrauD (G.). — Les enseignements scientifiques du polissage MER NT EN EEE EspirALLiEer (Lt colonel G.). — Le matériel aérostatique et la construction des ballons sphériques - . . . Lecornu (L.). — Revue annuelle de Mécanique appli- QUÉ: 12 pre one M ES NES ENT EE Lécer (M.). — Un nouvel essai de navigation aérienne panlemplus 1ourd'que lan CARE RTE Osmoxn (F.). — Les enseignements scientifiques du POTISSAS ON PER CE NN ER EC EEE SuLZER-ZIEGLER (Ed.). — Le percement du tunnel du SUDPIONE SONT EN CON RTC RE Voxer (J.). — Les voyages au long cours en ballon. . — Les applications militaires de la photographie en ballon Physiologie. ErenEricQ Léon). — Revue annuelle de Physiologie . LamBLinG (E.). — Revue annuelle de Chimie physiolo- gique. 1e partie : Constituants de l'organisme. Aliments -Diastases WMC ME ICR ARRIERNERe — 2e partie : Digestion, sang, urine . . . . . : . . Loisez (G.). — Evolution des idées générales sur la sexualité. {re partie : Des Anciens à la fin du XVNIE MSIE Cle M TE PR AT CE — 9e partie : Dix-neuvième et vingtième siècles MEURICE (J.). — L'Adrénaline. Son action physiologique et ses applications thérapeutiques. . . . . . . . Physique. BLoxoLot (R.). — L'inscription photographique de l'ac- tion-des rayons NME CREER NRURE Brunues (Beroard). — Les travaux récents de magné- tisme terrestre dans la France centrale. . . . . . Dune (P.). — Le principe de Pascal. Essai historique. Gausert (P.). — Cristaux liquides et liquides cristal- DS alerte lee Re OU EN OCT EE Guincaanr (J.). — Les phénomènes de luminescence CPleUrS CAUSES ER CN CEE JANET (Paul). — Les tendances et les recherches ac- tuelles de l’Electrotechnique. . . . . . . : . . : KouLer (A. — La microphotographie en lumière ultra-violette VMC RCE NEERERE LANGEvIN (P.). — La physique des électrons . . . . . LETREULE (P.). — La lampe et la soupape à mercure de CO0perAHE MED EM RE PRET PR 0 Rausay (William). — Le radium peut-il donuer la vie? SWYNGEDAUW (R.). — L'enseignement technique dans les Universités. L'institut électrotechnique de l'Umiversitétde Lille CREER Voxer (J.). — Les applications militaires de la photo- LLaPhIE EN ball ON EN TEEN ENTER EE Zoologie et Anatomie. CauzLerY (Maurice). — Les yeux et l'adaptation au milieu chez les animaux abyssaux. . . . . . . . Hexrt (Victor). — Le rôle des colloïdes en Biologie. Découverte de kinases artificielles. . . . . . . . Hucouxexo (L.). — Les conquêtes récentes de la Bio- logie dans le domaine du chimisme inteslinal . . LoïseL (G.). — Revue annuelle d'Embryologie . . . . LaGuesse (E.). — Revue annuelle d'Anatomie . . . . Ramsay (William). — Le radium peut-il donner la vie? Recnauzr (Félix). — La morphogénie osseuse expli- quée par l'anatomie pathologique . . . . . . . . Ricuert (Charles). — Le problème ou le préjugé des TALES DS re eee De LE PNR LS EN ER END TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Revues annuelles. Revue annuelle de Physio- — Revue annuelle de Chirurgie. . FrReveriCQ (Léon). logie . . Hartuanx (Henri. 577 993 | Lérienne (A.). | Constituants de l'organisme, albments; dima laser ar eu LaMBLinG (E.). — 2° partie : Digestion, sang, urine. . Leconxu (L.). — Revue annuelle de Mécanique appli- QUÉBEL a UE iian ee telle ol ar AU e TRE — Revue annuelle de Médecine . . . . gique. dre partie : LAGuEssE (E.). — Revue annuelle d'Anatomie . . . . 1095 | Loisez (G.). — Revue annuelle d'Embryologie . . . . LauBLiG (E.). — Revue annuelle de Chimie physiolo- ! Maive (A.). — Revue annuelle de Chimie minérale . DE 5 Coxt(dohn) = MechanICS ec ee UE 1° SCIENCES MATHEMATIQUES FRANcuE (Georges). — Le graissage industriel TC Garoux ( (Adrien). — Les moRoennes MONET UE LE ; : Hasers (Alfred). — Cours d'Exploitation des Mines . . DE RUE HouLzLeviGue (L). — Du Laboratoire Rte RIT À _ set Larosrocer (N.). — Traité général de l'emploi de no pnene): — Leçons sur les TOnRONS disconti 914 l'électricité dans l'Industrie DIET Oe-Ne- Borez (Emile). — Lecons sur les fonctions de variables Le et (H-). — Essais des matériaux hydrau- ele et les I OT RNENE eu) séries de QE 633 LecouTe-DEenIS (Maurice). — Utilisation pratique et Buuxs (H.). — Grundlinien des wissenschaftlichen compet A AL pour tous les services Alto à lo CNRC ANRr 128 | y EME st "Essai d'ff SA ME Césaro (E.). — Elementares Lehrbuch der algebrais- NE ape PRES SENS CHAT ANNEES OULerTAUNE chen Analysis und der Infinitesimalrechnung . 701 S CCE ADD RER RE ORAN OS EE CourTÉ INTERNATIONAL DES Pons Er MESURES. — Procès- Mas FOR de RS ORSERT la Navigation aérienne. . JÉtRaredes SEANCES Ses à 658 Massarr (G je Bale Ste l'emploi de l'air comprimé Czuser (E.). — Wabrscheinlichkeitsrechnung ‘und ihre TE Ê dé co a LE 2 nn P “a Anwendung auf Fehlerausgleichung, Statistik : lee oi TRE PEACE ER OT ENMERS und Lebensversicherung . . . . . . . . . «+ . . 184 VERS RCE \ e DURE ellorito eds notera Fovër (Ed.-A.). — Jecons élémentaires sur la théorie PE E PAR ENTER EEE EURO CEE ACER des fonctions analytiques. . . . . . . . . . . LES MD Srre SAS Fe en pente etats names Fe Gueixer. — Einleitung in die Functionentheorie. . . 480 | ” SET : LCR: ESRRERECURENEER Grassmanx (Hermann). — Gesammelte Werke. 1. Die RE e A . AUS SALUE Gr te Abhandlungen zur Geometrie und Analysis. 701 Pér re \ 2 fe Re S RE ER KrAzer (Ad.). — Lehrbuch der Thetafunktionen . 831 a er de LS M Ie ee re LiNpELOr (Ernst). — Le calcul des résidus et ses appli- Fra (P ; D } Hé rue s machi : je A ELSR ES cations à la théorie des fonctions . . . . . . . SMAUDENN ÈS de a Et que l a Loi de lai gene Monressus DE BALLORE (R.). — Sur les fractions conti- Rural «)- Es DÉEAS US Sem or d a PRES nues algébriques . : . . . « . « . « « . + « - : ON RER SR RS OcaGnE (Maurice d'}. — Leçons sur la Topométrie et = ARE SE RS NN ED EE EE EEE LE CAE Dre de rs 60 | Somalie mn à © an, TS Ten LA es RACEUES EE CRIARES 599 | Vazur (E.). — Note sur la dynamique de l’aéroplane. PApELIER (G.). — Précis d'Algèbre et de Trigono- IS lee dE ge TOP EE ET EE 228 Pocssix (René). — Sur l'application des procédés gra- 2° SCIENCES PHYSIQUES phiques aux calculs d’Assurances . . . . .. . . 393 STOLZ. — Me in die Funclionentheorie. 480 Taxvery (Jules). — Introduction à la théorie des fonc- i dons 'dnneivariahle M Pr RC. Te ANT IES HETSAME TeixEIRA (F. Gomes). — Obras sobre Mathematica . . 393 : Te + ZeuTHEN (H.-G.). — Geschichte der Mathematik im Agrauam (Henri. — Recueil d'expériences élémen- XVI und XVII Jahrhundert . . . . . . . . . . . 284 taires de Physique . . ... - . . . . . - . . . . Arxozp (E.). — La machine dynamo à courant con- TM EE CNE OS TE D OO SAC Astronomie et Météorologie. BareizutoN (L.). — Manipulations et études électrotech- (L.) P DIQUES Te a nie ea le ec eee ALGUÉ (José). — The cyclones of the Far East . . 871 | Barxerr(S.J.). — Elements of Electromagnetic Theory. BerGet (A.). — Physique du Globe et Météorologie. 738 | Bercer (A.). — Physique du Globe et Météorologie. Coxsrax (P.). — Cours élémentaire d'Astronomie et de BoERxSTEIN (R.). — Landolt-Bærnstein physikalisch- D TOR ER IC Cm NS et) UNE 128 chemische Tabellen. . . . . . . : . . - . . . . LARMINAT (E. de). — Topographie pratique de recon- Crauve (Georges). — L'Electricité à la portée de tout naissance et d'exploration. . . . . . . . . . Se 32 lesmondé. PA TES CN RE 0: Lesoœur. — Observatoire national de Besancon. . 8£ | Czupxocuowskr (Walther Biegon von). — Das elek- Lego (Ernest). — Extrait du plan d'une ‘bibliogra- trische Bogenlicht, seine “Entwicklung und seine phie analytique des écrits contemporains sur physikalischen Grundlagen. . . . . . . . . .. lhistoire de L'AstronGmie eu... ue 517 | Foveau DE COURMELLES. — L” Année électrique. O8Brecat (A.). — Anuario del Observatorio astrono- Frick (J.). — Physikalische Technik. . . . . . . . . corde santieso de Cle... - ce 100% | Gazine (L.). — Éclairage (huiles, alcool, gaz, électri- cité, photométrie). . . . ARR EDR : ; 5 DRE Ch.-E — Les hypothèses modernes sur la Thermodynamique, Mécanique générale Ent électrique ïe la matières 2.2 et Mécanique appliquée. Hionxs (A.-H.). pe SATA RTS Jeans (J.-H.). — The dynamical Theory of gases . . . Baupry DE SAUNIER (L.). — Les motocyclettes. . . . . 701 Kavser (H.). — Handbuch der Spectroscopie. . . . . BAUMGARTNER (F.). — Mauuel du constructeur de mou- LEHMANN ( 0.). — Cristaux HAUTES EEE CEE DS EN MeUNIELE re Ale Ts ES 956 | Mauouir (A.). — Electrotechnique appliquée . . . . . BERNARD (F.). — Aménagement des eaux à Java. Irri- Meveruoreer (W.).— Landolt-Bærnstein physikalisch- HOMO IZICTES ICE Elie = "Me 0341 chemische-Tabelleng ls 4." 240. : 2 ANS BouLvix (L.). — Cours de Mécanique appliquée aux Muczer (P.-Th.). — Lois fondamentales de l'Electro- Machines. Théorie des machines thermiques. . . 1052 AOC LOENS ol ME Morte 19 75 821 904 376 172 1126 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Pozzi-Escor (M.). Chimie. . RINNE (E.). — Le microscope polarisant. . . . . . . Samnr-PauL (B.). — Eclairage (huiles, alcool, gaz, élec- tricité, photométrie) OR ON OMR DeBE @ 2 Tammanx (Gustave). — Cristallisation et fusion. Travers (Morris M.). — Experimentelle Untersuchung VON GaASEn EE CR CRE Warrs (W. Marshall). — An introduction to the study of spectrumNanalysis EN Weiss (G.). — Précis de Physique biologique YouxG (Sydney). — Traité élémentaire de Physico- — Fractionnal Distillation . . . . . Chimie. Amapuzzr (Lavoro). — Il Selenio. . . . . . . - . . . BarraL (E.). — Précis d'Analyse chimique qualitative. Benenicks (Carl). — Recherches physiques et physico- chimiques sur l'acier au carbone . . . . . . . . BerrHeLor (M.). — Traité élémentaire de Chimie orga- BorrxsTEIN (R.). — Landolt-Bærnstein physikalisch- chemische Tabpellens 4 ee ET RENE BaearLeY (Hiarry). — Analyses des matériaux d’acié- HCÉRPUN PONDNM EUR ON AN ES RE NS at BroquIx (L.). — Guide pratique pour l'essai des médi- Duczoux (E. Herrero). — Tratado elemental de Qui- mica. Tome Ier. Quimica inorganica. Tome Il. QUITCAIOTE ANT CA NS PEN NE Gowriz (P.). — Guide pratique pour l'essai des médi- CAMERIS CHIMIQUES 2 CCE CR ET IE lsBotsox (Fred.). — Analyses des matériaux d'acié- RES M2 DES Dee Mono me nie ee Ce JunerLeisca (L.) — ÉTAPE NOT loi io eme ce pie Jüprxer (von baron). — Eléments de Sidérologie. Cous- titution des alliages de fer et des scories. Le VerRIER (U.). — Procédés métallurgiques et étude LES MERE LAURE EN EN RE Ce Lézé (R.). — Préparation et maturation des caillés de POMADETIE EU ARENA AR) ce Lee EconD y GamBo4a. — Détermination quantitative du UOTE EEITENDOITS MEN CR EC LUMIÈRE ET SES riLs. — Agenda Lumière 1905 . . Lurz (Louis). — Les Micro-organismes fixateurs GÉANTS LL SPORE Maxéa (André). — Sur les acides gallotannique et SES Gene 0 SAGEM Meveruorrer (W.). — Landolt-Bæœrnstein physikalisch- chenusche abelNen RER EEE Moissan (H.). — Traité de Chimie minérale. Métal- Does EME lAUR EE PC Muzcer (P.-Th.). — Lois fondamentales de l’Electro- CHLMIE Se M CE ER NC Re Osrwazn (D.-W.). — Eléments de Chimie inorganique. A0 /MEtAlOIdes COMENT Pacorrer(P:). — Vinification (vin, éau-de-vie, vinaigre) Pozzi-Escor (M.). — Traité élémentaire de Physico- CHIMIE MR Re er EE TE CEE RanpaAu (Paul). — La fabrication des émaux et l'émail- ETES et A RS PT Mn ne où 0 Razoue!( (P.). — Les déchets industriels. Récupération, USER EE CCE SABATIER (Paul). — Nouvelles méthodes générales d’hy- drogénation et de dédoublement moléculaire ba- sées sur l'emploi des métaux divisés. . . . . . SENDERENS (J.-B.). — Nouvelles méthodes générales d'hydrogénation et de dédoublement moléculaire basées sur l'emploi des métaux divisés. . . . . . SÉMICHON (Lucien). — Traité des maladies des vins . . TorreLzLt (M.). — Analisi chimica qualitativa. . . . . VaLEur (Armand). — Chimie et toxicologie de l’arse- nic et de ses composés 3° SCIENCES NATURELLES Géographie, Géologie, Paléontologie. AzanrA (Félix de), — Geografia fisica y esferica de las provincias del Paraguay, y misiones Guaranies. . Copazzi (Ricardo Lleras). — Introduccion al estudio de los Minerales de Colombia. Classificacion de los Minerales de Colombia. Minerales alçalinos y 1006 terrosos de Colombia. Gemas y minerales litoides de 1C0LOMPI SR RENTRER RENNES Copazzr (Ricardo Lleras). — Mineralizadores y mine- rales metalicos de Colombia DEMANGEON (A.). — La Picardie et les régions voisines : Artois, Cambresis, Beauvaisis. . . . . . . . . . Forez (F, A }. — Le Léman. cu 40 de MNT GaLLoIS (E.). — Au Japon (Impressions de voyage). GERVAIS-COURTELLEMONT. — Voyage au Yunnan. Gornox (Ogilvie). — The geological structure of Mon- zoni and Fassa GRANDERYE (L.-M.) DÉTALES; Vans eee 2 de oate le RP GRENARD (F. 1e — Le Tibet. Le pays et les habitants. Prosr (Eug... — La Belgique agricole, industrielle et commerciale. Etude ÉCONOMIQUE PTE Réviz (J.). — Notions de Géologie appliquées au dé- partementide laSavoie RER RINNE (F.). — Etude pratique des roches, à l'usage des ingénieurs el des étudiants ès sciences naturelles. SARGENTON-(GALICHON (Mme A.).— Sinai-Ma'ân-Pétra (Sur les traces d'Israël et chez les Nabatéens). . . . . TuouLer (J.), — L'Océan, ses lois et ses problèmes. WEISGERBER (F.). — Trois mois de campagne au Maroc. Botanique et Agronomie. BeAUvVERIE ((J:)-1—"Le bois... LV EN CHEVALIER ane — Les végétaux utiles de l'Afrique ITOPiCAlE NP ANCEISE APR OC NE Cozsox (Léon). — Culture et industrie de la canne à sucre aux Îles Hawaï et à la Réunion. . . . . . DEPARTMENT OF AGRICULTURE Or NEW ZEALAND. — Ele- venth annual Report. Twelfth annual Report. . . GuéGuEN (F.). Les champignons parasites de l'homme et des duimaux se, PEL EN NE CRE GuyËrIN (Paul). — Les connaissances actuelles sur la fécondation chez les Phanérogames . . . . : . . GuiLLon (J.-M.). — Etude générale de la Vigne . . . Larar (Franz) — Handbuch der technischen Myko- NS OR MO RU ro Et ou à à LAURENT (J ). — Recherches sur la nutrilion carbonée des plantes vertes à l’aide de matières organiques. Lecowre | Henri). — Le coton en Egypte. Culture, pré- paration, EXPONtAtIONS. SNS CR Lézé (R.). — Préparation et maturation des caillés de FTOMIS TETE 2 EE MON TRUE Lurz Louis). — Les micro-organismes fisateurs d'AZOLE Lea Are ie aie Pt tete ee TC EE MarriGxat (M.). — Le liège, ses produits et ses sous- PrOAUIES SARL Te Ce RC PCT CIRE PAcorret(Paul}—=WViticulure MR Prosr (Eug.). — La Belgique agricole, industrielle et commerciale. Etude économique. . . . Zoologie, Anatomie et Physiologie de l’homme et des animaux. ANGLAS (J.). — Les animaux de Laboratoire : l'Ecre- visse (Anatomie et dissection) …. - : . . . . BELZUNG (Er. ). — Lecons de Zoologie. : : : Biner (A.). — L' étude expérimentale de l'intelligence. Boun (P.).— Traité d' Histologie. Cytolugie générale et spéciale TE OR LAS ER IC Bournon (B.). — ÉEA perceplion visuelle de. l'espace. : BRaNcA (A.). — L'œuf humain et les prewiers stades de son développement. Eléments d'Embryogénie . Curor (Edmond). — Le sucre dans l'alimentation des ANLMAUTEE RE CU ATEN IPS IT TEE Cxox (Elie de). — Les nerfs du cœur (Anatomie et PYaiolen e) AR PRE A En Re IDe 0 € Deueny (G.). — Mécanisme et éducation des mouve- MENÉS :: 4-70 10 nat se eee le CR OCR Doyox (Maurice). — Traité de Physiologie. 4° Fonc- tions d'innervation. 2° Fonctions élémentaires . FËré (Ch.). — Travail et Plaisir. Nouvelles études expérimentales de Psycho-mécanique . . . . . . Francois-Franck (Ch.-A.). — Cours du Collège de France. de 1880 à 1904 et travaux du Laboratoire de AS HAM UE ETES MENU RE RER TE Frger (P.-C.). — Report of the superintendant of the Government Laboratories in the Philippine ls- lands for the year ended September 4 th. 1903 . Gouin (Raoul). — Alimentation rationuelle des ani- maux domestiques . . . 919 1113 3% 86 958 397 230 103 431 619 287 481 343 916 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1127 Levaniri (C.). — La nutrition dans ses rapports avec RDIDUUTLÉE DE TE Te che Dette le ie Lors (Jacques). — Studies in general Physiology. . . Maizcaro (L.). — Traité d'Histologie. Cytologie géné- rale et spéciale Mosso (A..— Les exercices physiques et le dévelap- pement intellectuel PARKER NE J.). — Lecons de Biologie élémentaire . . PERRIER ( Edmond). — Traité de Zoologie. Poissons. Porockt (J.). — L'œuf humain et les Premiers stades de son développement. Eléments d'Embryogénie. Travaux de la Station de recherches relatives à la pêche maritime à Ostende. . . . . . VaricnY (Henry de). — La Nature et la vie. . . . . . 4° SCIENCES MÉDICALES Chirurgie, Gynécologie, Ophtalmologie. Bawzer (S.). — Chirurgie orthopédique. . . . . . . . BerGer (Paul). — Chirurgie orthopédique Broca (A.). — Lecons cliniques de Chirurgie infantile. Harrtuanx (Henri). — Travaux de Chirurgie anatomo- clinique. Voies urinaires Marron (Georges). — Chirurgie du Système nerveux (Cräne et Encéphale, Rachis et moelle, Nerfs) . . YverT (A.). — Les applications médico- chirurgicales de l’'Adrénaline 35 186 86 181 531 231 397 833 1054 Médecine, Hygiène, Microbiologie médicale. Becort (J.). — Traité de Radiothérapie... . . . . BLaxcuarD (R.). — Les Moustiques: histoire naturelle EMROER EE, nn Le en ee à Borxer (E.). — Les Doctrines médicales. Leur évolu- tion BrerTow (M.) 1 ’Ankylostomiase, maladie sociale (Ané- mie des mineurs). Biologie, clinique, traitement, prophylaxie. PER Abe > Me Brraxcox. — L'Ankylostomiase (Maladie du ver des mineurs) CALMETTE (A.). — Ne maladie sociale (Anémie des mineurs). Biologie: clinique, traite- NÉE Me DIR LE ICE SR PER ES CE DARENBERG (G.). — Les différentes formes cliniques et . sociales de la tuberculose pulmonaire Dueois. — Les Psychonévroses et leur traitement END 8 ALES M TEL EE GaurTierR (Armand). — L'alimentation et les régimes chez l'homme sain et chez les malades Guirauo. — Manuel pratique d'Hygiène à l'usage des mMÉELIRS ee ÉOIANIS EE ED ET LP 0. Hazzunx (Maurice d')}. — Résurrection du cœur. La-vie du QRUE isolé. Le massage du cœur Héricourt (J.). — Les frontières de la maladie. Hocne (L.). — Les lésions du rein et des capsules surrénales Laesé (H.). — Analyse chimique du sang LÉTIENNE Auguste). — Précis d'Urologie “clinique. MAssELIN (Jules). — Précis d’ Urologie clinique. . . . Maruieu (F.). — Traité de l'Alcuolisme. . . . . . . Micwor F. . — Le péril vénérien et la prophylaxie des maladies vénériennes. . . . . . . . . . . . Micxor (R.). — Traité de l'Alcoolisme PacÈs (C.). - — L'Hygiène pour tous. NI Poucuer (G.). — Lecons de Pharmaco-dynamie et de Matière médicale. Antithermiques, ‘analgésiques. Modificateurs du système nerveux périphérique et DÉNTO-HUSCUAITE ENS EE. CR: RoruscuiLn (H. de). — Traité d'hygiène et de ‘patho- logie du nourrisson et des ‘enfauts da premier ÉTAPE OMS ER Ar EE En 431, Roussez (Albéric). — La Franklivisation réhabilitée . Simpsox (W.J.). — A treatise on Plague. . . . . . . TrisouLer (H.). — Traité de l'Alcoolisme. . . . . . . TripiEr (R.). — Traité d'Anatomie pathologique géné- RER ee en CU ER tee SE AE YVERT (A.). — Causeries sanitaires. 11. Désinfection. . 5° SCIENCES DIVERSES Bérarp (Victor). — L'Empire russe et le Tsarisme , . BLANCARNOUX (Paul). — Du choix d'une carrière indus- (ESC CARRE PRES RE RE DE BLonpEL (Georges). — La politique protectlionniste en Angleterre. Un nouveau danger pour la France . HuE (Louis). — La falsification des boissons. . . . . LéG . Louis). — Moscou (Les villes d'Art célèbres) . tr (Paul). — Ports francs d'autrefois et d’aujour- ARE raie a Se ee Ne NO PU M OR Te Paucuax (Fr.). — Les mensonges du caractère . Risr (A.). — ‘La Philosophie naturelle intégrale et les rudiments des Sciences exactes. SIEGFRIED (André). — La démocratie en Nouvelle- ZE- Jane PARENTS UNION COLONIALE FRANCAISE. — Préparation aux car- MÉRESICOIONtEH EME Een te ele Monet ee eee , 181 1008 131 1054 579 131 704 Thèses pour le Doctorat présentées aux Univer- sités françaises (1904-1905), ef analysées dans la Revue en 1905. 1° SCIENCES MATHÉMATIQUES MoxtEssus DE BALLORE (R.). nues algébriques . — Sur les fractions conti- 2° SCIENCES PHYSIQUES Physique et Chimie. Bezcoc. — Thermo-électricité du fer et des aciers . . KuixG André). — Contribution à l'étude des alcools cétoniques . . Scauer (J.). Recherches sur la vitesse de dissolu- tion des sels dans leurs solutions aqueuses . . . WaTTE vice (Charles de). — Spectres de flamme ; varia- tions spectrales d'ordre thermique. . . . . . . . 3° SCIENCES NATURELLES Bonpace (Edm.). — Recherches anatomiques et bio- logiques sur l’autotomie et la régénération chez divers Arthropodes pes (L.). — Contribution à la connaissance de l'appareil digestif des Annélides Polychètes. L'épi- thélium intestinal de la Pectinaire. . . . . . .. — ACADÉMIES ET SOCIÉTÉS SAVANTES DE LA FRANCE ET DE L'ÉTRANGER Académie des Sciences de Paris. Séances des 49: décembre: 1904-2007 0 QU — 26 — ME M re A LE _ 2 Janvier 01905 51.100 9 — Eee rer e trile — 16 — mn PRO EE, EE 23 — ÉCRIT E Séances des 30 janvier AMD ESC ee — 6 CA A LC RL NE AT E— 13 — — = 20 — ARS VOUS CPU, 2e 97 —— NULL POUR LR == 6 mars RS AT re 2 13 — A ae OS To Æ 20 _ nr ot MUR — 27 — ES MIO LS 869 1010 1128 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Séances des 3 AT O OS ERP EE SOS Sean cestdes M OM CTEMENN RS EU — 10 — AR METNT 438 — 14 — MONA ENS € — 17 — OR A DO TC 439 — 21 — RS EU RTE . — 25 — TC HOME JO: 48% — 28 — NON EEE Mo o D — Aer mai TE CAR ET APE 484 — 4 février LR PE Et 5 0 — 8 — = NC A TAN 48% — Al — Ne TS TU RU — 15 — DAS ST nee 10e 533 — 18 — NE TE 05 dt — 22 — reve NN ee 53% — 25 — EE MCE MATE MED 0 — 29 — CU MU NA ECDE, 580 — 4 mars ete LPS NES — 5 juin ONE NR En US 580 — A1 — ES MERE = 13 — RD RS RL CR AE 621 ee 18 — ETES ND — 19 — TD CN PUR ELE 621 — 25 — = the Le MOULE MELUN — 26 — on ON FO AT ANE ar ie 657 _— 4e avril = ss EUR EE — 3 JU ER EE 657 — 8 — OM LR di oc à — 10 — SN RP PE ER 705 — A5 — EE Et 0 0 — 17 — RE lee 705 — 6 mai = Vide LS RON — 24 — ER Re UE 742 — 13 — Sr NN UTC UNSS — 31 — A es tee NOTES 142 — 20 — ER RCA AU 5 — 7 août NL OR Et 789 — 21 — TE ML OA © — 14 — ER TENUE 789 — 3 juin UN RENE — 21 — DAS 189 — 10 ET loto 0 — 28 — EN NS AA Se 835 — 17 — A UE A — HESPDIEMDIC ER PT CE 839 — 24 — EE hoc ee al — AR PATES AU 814 _ juillet NE ME PNNRUNRES — 18 — MD CRE CT GS S74 — 8 — EN PRE — 25 = EE PC Lie EURE 874 — 22 — = be MARNE — DARÉOCTDETE ME RME ENS 918 — 29 — RARE ES: Du à — 9 — PR re EE 918 — 14%/0ct0Dre M = NME RE — 16 — En OM CAROTLERE ES 960 — 21 — EE PO QTE D — 23 — RE ENT ES Ut 960 — 28 — PE AE OO © _ 30 — PE RUN CE TER 1009 — £'énoyembre — "FU UCRE — GRENOVEMPIE MEET 1009 —_ 11 — en RER do o — 13 — D A OL 1057 — 18 — RE 6 to — 20 — en NOTÉE 1057 — 25 — RE OC UL O -> — 27 — MR on Te 1114 — 2HLdécembre =. NE — R'AAÉCEMETE MINOR NE 11145 RÉUNION BIOLOGIQUE DE BORDEAUX Académie de Médecine. Séances des 6Mdécembre MODE NN — NOR EEE © cu à Séances des 20N décembre MDP 38 Œ TE VEIOr QE ASE NEENTREREEE F2 97 Es LT Er PT ENT 38 — 14 mars El LS = SN janvien MOI ER 90 = A TA GUN EL 0: = 10 = EE RPM TT ER 90 T 24 MAL Qi SAR æ 17 PER UN Pre Ets 133 ci PL MR Lu Ne ER ES L 24 = RS NES 133 Eu 2) AUNELN EN PTE RERE Æ 31 5 SET La AL 184 — APMOYEMDrE EN NECC- EE — nl février ER Pin 18% À 12 14 = Re N URES 1 934 RÉUNION BIOLOGIQUE DE MARSEILLE = Re A DNA SENS 4 | Séances des 20 décembre 1904... ..... ea a e QU TER CS Ë — 11S janvier 1008 EE CRE = 1 mars y PS LA E E S 289 a D février 2 2: 14 = APR RL 346 2 mn TE — 21 = CC Ce 346 Er al avril NM dre _ 28 Sn Pied A à cotctee de 399 - 1650 Host NE DNS — 4 avril APPARUE 399 Œ 20 tee 18 4: I EE = nl NP ER A SAN 399 Le RE DE CE 7 à) — 18 — SE OR 0 4394 EU PS CUT 4 2 MR MT SRE SRE — 25 — + to NO ue . 440 nee = 2 __ CE MONET TER 285 RÉUNION BIOLOGIQUE DE NANCY = 9 = Rs Vo Oo be c 485 | Séances des 13) décembre 4904... — 16 en SR 534 — 9MMjanvier 1005 0 -P NNE — 23 = NS EME ER 534 — 14.9 février 0 = NM EMA NENER —= 30 = UE LION Pie 581 — 13. mars PA le — 6 juin NS gocntols à re 582 — 11 avril =, AO CREUERE — 13 = = olee a ee 622 — 16 mai = ji VIS CON — 20 — EE Re 622 — 20 juin ER Fe IV LES d'a — 27 — A NA ER 658 _— 44 -juillet RU NLEICITIEST — 4 Je ere rare 658 — 43 "nOvembre = CEE — 11 — RL: CE DUT. 706 — 18 — ER ME MERE SR OIL E 706 — 95 — RC lee 143 Société française de Physique. — Sn DCÉODIE Re ee JLS _- 10 —_ TR ET Lo 919 | Séances des 16 décembre 1904... — 17 = EE RAS TR OT 960 _ CAMES ET On à — 24 — IT STD ET 961 — 20 — NA ie Leo = 31 — — M ON SET 1010 = 3 ENTIER EE — TMOVEMPIEN—- M Pa EN 1010 — 17 — EE D rs — 14 — Ne ONE MERE 1058 — 3 mars TN, se — 21 — + More RER 1058 45] — NO ENS LR SLT o — 28 — pese Ne I RAS 4115 —_ 3 avril NT R e — SdéCeMmbreR— HE Le NICE A5 —_ 5 mai is CR LE ENS — 19 — LP AUEEARENRE ee, È . — 2 juin RO MO ICS 0 Société de Biologie. Æ 16 = (ER PORN — HOMRJUUlE NN ER Séances des AnWdscembre MIE ER ENTREE 38 = ATiunovembre — 1. — 24 — ROME OR RE 90 — Aer décembre — TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES 1199 Séances des Séances des Société chimique de Paris. Dedécembra 19082. 700: 7. 40 23 _— ESS Lo ea UT 92 RUN ET METIER EURE 136 27 — et ele 187 10 février M Enr Pa 236 24 — M Vis: 0e 292 10 mars Rite der moe 348 24 — CT et 401 1% avril ECO) OR 487 12 mai Nr EE ne en S 537 26 — en OT A lc 623 9 juin AS ET A DOUTE TUS 23 — TR NES EST ete 709 10 novembre — ..... 1061 24 — = Vénn e E eve 1117 SECTION DE NANCY Aer iGvriar 22008) A5 re sa | 231 17 mai SPAS RES AE 537 20 juillet Re NES 1 Dj 744 Société Royale de Londres. Communications recues pendant les vacances. Séances des Séances des Séances des 40, 876, 919, 961, 10 11, 1061. 1118 17 novembre .190% . . . . . . 40, 93 24 Æ —= 41, 93, 136 AerSrdécemhre 27-0200 NO!” 8 —_ En MR eee 136, 238 15 — IS MEME 137, 238 ASS VENDS EEE 293 26 _ a NE 294, 349 9 l'février. — 349, 401, 488 9 = M TRES 442, 488 16 — ER Re te a tn 489 23 — NES DE 490, 539 2 mars nl fe CT 584 9 — NP MEN DES CRELE 585 16 — NOT Cu AMOR: A 585 2. — — 5 586 30 — AN CARO CMP 624 6 avril RC fr - 625, 661 13 — 561, 790, 835, 874 il mai — ... 1661, 190 "835 18 — 710, 191, 836 25 — ile 100 Et dues Dene 746 8 juin — 146, 391, 836, 874, 919 Société de Physique de Londres. Pa ONE Ets EEE 187 24 FÉVR EAST 294 10 mars RE on Pen tre 349 24 — = A CRT 402 14 avril A CIM 2 490 412 mai PRES eue rs; © 586 16 juin Eh lee re le 710 30 — = 08e STAR CNE 191 DR OCLODTE ENT, LS RU 1012 10Pmoyembre "2% : 1. 25 1062 24 — PRES A RUE 1118 Société de Chimie de Londres. 1% décembre 1904 . . . . . . 94 Te anvienen ls. SE 137 25 — AE PR NE 188 DT ENTIET Re us: vs 0 D 188 15 — RER A 294 2 mars PNR CT OMS 350 45 — RER PT DC 402 29 — NT ARE LE. 443 6 avril NF .1:2.:1 400 490 19 — EN: Cie ER. 539 4 mai A er Sec Tee 587 17 — SES PES he 626 ET rt 14 — OT EE 192 Communications recues pendant les vacances 1119 Société anglaise des Industries chimiques. Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des Séances des SECTION CANADIENNE 26 VTIE ee MAINS TER ENS 295 SECTION D'ÉCOSSE 25BAOCTO BTE AIDE EE EC 95 Grdécembre tv" Cr 95 SAAIAUVICEr LOUE 295 7 mars RO eo à 491 SECTION DE LIVERPOOL 30 novembre 190€..." 138 14 décembre — :.... 01. ASS BL. MévVTIeR MAIDEN 403 8 mars ES ee CIE PEN EN 491 12 avril — Ve 8 Le EU 491 SECTION DE LONDRES Dudécempre A0 EN Eee 137 OA ANVIERMAIISE NEE 188 6 février — PR UD ETS 6 mars = Ù Hour ere a le 491 4er mai AA TN EURE 627 5 juin ES Se 141, 192 EAMOVEMPTE EEE 1120 SECTION DE MANCHESTER 2Ndécembre AIUE EC MEN 188 A3 2#janvienn 19050, CM 295 3 mars A ©. D 491 7 avril M y RER Pre 587 5 mai OT RE 627, 662 SECTION DE NEWCASTLE 20 octobre 41904 . . . . . F5 5 0042 ÂTénovembhre MMM 42 15% décembre. =". 17 LL 0 188 AGAMÉIÉTTI ET MID EN ER 00 SECTION DE NEW-YORK DANOGCIODrE MAUR 94 25 novembre — NC 138, 295 16 décembre — ...... 188, 350 20 janvier 1905 29%, 403, 491 24 février + Shan PANNE LAURE 491 24 mars EL OR PEL 491, 627 19 avril TR RE 587 19 mai AS ACER TÉTÉATEE) GES OCIORTOME RENTE ENS RRE 1120 SECTION DE NOTTINGHAM 26 OCIODrE AO UE 23 NOV M - e dE AN déCeMbre EE 137 251 janvier A AIN HE NE 295 25% SÉVTIED TE CT 403 22 mars 491 24 mai de re et MARS 193 20 NOCLODTE M EAN 2 UNE 1119 SECTION DE SYDNEY 12 avril 19097 627 10 mai A ERP RS 920 SECTION DU YORKSHIRE LAN MIN TO UT ER EE . 403 20 AÉTERs — E r re le 403 20 mars =: 492, 588 17 avril RTE LE 588 Académie des Sciences de Berlin. Se décembre MID St Eee 238 5 — MISES OR 238 22 — te sr a 239 A2 janvier 4 AIS RSC 350 1130 TABLE ANALYTIQUE DES MATIÈRES Séances des HAN | 12 12 Led QE 19 19 GR 21 © © © 19 © NN © 19 + 19 N9 a © janvier 1905 février — ET D Vo octobre (AR ET TE Société allemande de Physique. Séances des HAT IAE 11 novembre 1904 . . . 9 décembre — 30 20 janvier février mars UNS PONS ES SES juin Académie des Sciences de Vienne. Séances des RS TO 1er décembre 1904 Janvier MMIDI PEN ES SéVLIER ER NC mars SR Tee Séances des | CS AIR ET 9 mars 16 — 30 — 6 avril al mai 18 — 25 — 8 juin 23 — 6 juillet 43 — 12 octobre 49 — 26 — CNRS SAT UE Académie des Sciences d'Amsterdam. Séances des Séances de RP RRRREl 26 novembre 24 décembre 28 janvier 25 février 25 mars 22 avril 21 mai 2% juin 30 septembre 28 voctobre Académie Royale novembre décembre janvier février mars avril mai juin juillet août septembre octobre 1004: METTRE EAN LES 96, 19084 TENUE 4 INA ST TPE SERIES VOTES 1064, des Lincei. 190% TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS LE TOME XYI DE LA REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES PURES ET APPLIQUÉES" A ApERRATION. — Détermination dela constante d'aber- ration. 1. Hu meR HUIT SLT MS ete à 965 Agrasirs. — L'industrie des abrasifs et le corindon. 504 Agsonprion. — Note sur la fluorescence et l'absorp- DOMINANT NNIGOU TS ES el Ce RON RC 624 ACADÉMIE. — Prix proposés par l'Académie des Sciences de Lisbonne. RER PRE Re Ve dass 246 — Académie royale des Sciences de Lisbonne. . 498 — Election à l'Académie des Sciences de Paris. 629 AcapxtEe. — L'acapnie évitée par la respiration d'un mélange d'oxygène et-d'acide carbonique. . . . 926 AccipENTS. — Accidents du travail. . ... . . . . . 1002 Accoucuement. — Crise de faux accouchement chez une tabétique ele Re N DETE se = 754 Acines. — Les pseudo-acides : . . . . . . . . . . . 44% — Pharmacologie de l'acide phosphorique.1re partie : AIBÉE NII ESELVER ES ME Le ee PEUT 568 — 2e partie: Action nerveuse et humorale. . , . 611 — Sur les acides gallotannique et digallique . . . . 702 — Sur quelques substances dérivées de l’acide phényl- CEMDOTIQUE ar ee ee nu er mens ruse ne 28e Ne 196 — Recherches sur les indices de réfraction de l'acide sulfurique. à différentes concentrations. . … . . . 874 — Emploi de l'acide formique en distillerie. . . 926 — Les amides des acides &« et £-aminopropio- AO Berne cn ere pe et a ser nur erhet euelllella te à 1120 Acrer. — Recherches physiques et physico-chimiques sur l'acier au carbone..;.".-.-..-2..".0,.0. 33 — Propriétés. élastiques de l'acier à haute tempé- PATTERN ER EU lie net le: pe. shot te ST5 AciÉRIES. — Analyse des matériaux d'aciéries . . . 916 AcousrTiQuE. — L'acoustique des salles de réunion. . 407 ADAPTATION. — Les yeuxet l'adaptation au milieu chez leSaniMaUx ADySSAULS EN, 2e) 2. US MEN ee 5, 324 ADRÉNALINE. — Synthèse d'une substance alliée à MHATER DRE REC LOUE, COURS CE ere ) — Sur. l'activité physiologique de substances reliées indirectement à l'adrénaline. . . . . . . . . .. 9419 — L'adrénaline, son action physiologique et ses applications thérapeutiques. . . .. . . . . . . 104% AËROPLANE. — Notes sur la ‘ypamique de l’aéroplane. #10 AFFECTIONS XALIGNES.. — Recherches sur l'absence ou la diminution marquée de l'acide chlorhydrique libre du contenu gastrique dans les. affections malignes d'organes autres que l'estomac, . . . . 585 Arnique. — Le caoutchouc dans l'Afrique occidentale TRUE EE EE NNERPrE SN ESEST re tu 3D6 — La culture du £oton en Afrique, . . . . . . . . 592 — L'assistance médicale indigène en Afrique occi- HentRIPAUTANCAISE ARR EU. LPC OR 668 — Les végétaux uliles de l'Afrique tropicale fran- GRISES 2 ver nn door pie RAC PO CN 5.20 105% AGENDA. — Agenda Lumière 1905. . . . . . . . . . 654 Am — Etude sur l'emploi de l'air comprimé à haute tension comme moyen de transport mécanique SOUÉBTERIN T-n ac er ae e ROe 228 — Détermination des quantités de néon et d'hélium dans lar atmpephérique A EE CRUE 585 ALBUMINES. — Les déviations pathologiques de la dé- sintégralion des albumines : la cystinurie. . . . 191 1 Les chiffres gras reportent aux articles originaux. 1 Azcooc. — Contribution à l'étude des alcools céto- TUE Te Ar NA RUE UE ele Aer aiit ALcoouIsuEe. — Traité de l'Alcoolisme . . . . . . . . 519 Aznéuypes. — Modes de formation et de préparation des aldéhydes saturées ile la série grasse . . . . 330 ALGÈBRE. — Précis d'Algèbre et de Trigonométrie. . 228 ALIMENTATION. — L'alimentation et les régimes chez l'homme sain et chez les malades. . . . . . . . 87 — L'Humus et l'alimentation carbonée de la cellule végétale. 4'e partie : La théorie de Liebig. . . 1352 — 2e partie : L'assimilation des substances ter- MALTE RU eu ae re e lle dote e be ee EN ee 205 — Le sucre dans l'alimentation des animaux. . . . 230 — Alimentationrationnelle des animaux domestiques 916 — L'alimentation de la vache laitière et les condi- tions de son rendement . - . . . . . - . . . . 1067 Aves. — Laformation des vallées des Alpes de Savoie. 462 Aumonrac. — La synthèse directe de l'ammoniac. . . 625 ANALYSE: CHIMIQUE: — Précis d'Analyse chimique qua- RHAVE SOON EE NME SUR. NÉE AE ENTRER 394 — Analisi chimica qualitativa. . . . . . . . RRQ 5 ANALYSE. MATHÉMATIQUE . — Gesammelte Werke. Die Abhandlungen-zur Geometrie und Analysis. . . . 701 — Elementares Lehrbuch der algebraischen Analysis uod der Infinitesimalrechnung . . . . . . . . . 701 — Avalyses des matériaux d’aciéries. . . . . - . . 916 Axasromose. — Le meilleur procédé d'anastomose in- testinale pour les expériences physiologiques. . 545 Anaromre. — Traité d'Anatomie pathologique. . 35, 131 — La morphogénie osseuse expliquée par l'Anatomie RHHOÏOSITUE RCE ENS EN EneNe CRCRR 21% — Premier Congrès fédératif international d'Ana- ÉOOTOE NNN R RER CE E + (NN — Revue annuelle d'Anatomie. : : : : + «+ + . . . 1093 ANESTHÉSIE. — Ua nouveau procédé pour produire l’'anesthésie du corps humain. . . : + - - . . . 356 — Un dispositif pour la production de l'anesthésie élecinique ile Mrane-e Verre de CE Nr 591 ——rANeSIé Sie tes creer ol CNE 993 Aximaux. — Les yeux et l'adaptation au milieu chez les animaux abyssaux. . . . . .- à . . . - . . 324 AxkyLosromrAse. — L'Ankylostomiase; maladie so- ciale (Anémie des mineurs). Biologie, clinique, traitement, prophylaxie . . . . . . . . . . . . 141 — L'Ankylostomiase (Maladie du ver des mineurs). 917 Axxfrines. — Contribution à la connaissance de l'ap- pareil digestif des Annélides Polychètes. L'épithé- lium intestinal de la Pectinaire. . . . . . . . . 286 AxTENses. — Les arbres comme antennes de télégra- PRES ans ARE EAN EE CCE 447 ANTHRACÈNE. — Les dérivés y-arylés de l'anthracène et der son dihyArure EN NON Ne s92 AnraropocoGre. — Congrès international d’Anthropo- logie et d'Archéologie préhistoriques. . . . . . 971 Apuasies. — Les aphasies musicales où amusies. . . 7 APPAREIL miGestir. — Contribution à la connaissance de l'appareil digestif des Annélides Polychètes. L'épithélium intestinal de la Peclinaire. . - . . 286 Aprexnice. — Les fonctions du cæcum et de l'appen- DCS EST RE Et Ce ne RAT APPENDICITE. — Appendicite. . . . . . . . . . . . . 1000 Argres. — Surla mécanique del'ascension de la sève dans les bre EE ETS ETS 920 Arc. — Sur le spectre d'émission de l'arc électrique à! haute Pension NEC CC ET 342 ArGEnr. — La dépréciation du métal argent. . . . . 194 41132 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ARGENT. — La nature de laréaction de l'argent dans les BLé. — Relations entre les pluies d'automne et les tissus animaux et VÉGÉTAUX... 625 rendements en blé de l'année suivante. : 488: ARGuIN. — Les pêcheries du banc d' Arguin. 591 | BLrocs. — Contributions à l'étude des blocs erratiques ARSENIC. — Chimie et toxicologie de l'arsenic et de sédimentaires dans les Pays-Bas. . . . . NE ED A) ses composés. 129" |" Bois. — Le bois... 1112 Anrurovones. — Recherches : anatomiques ‘et biologi- Borssons. — La falsification des boissons. 834 ques sur l’autotomie etla régénération chez divers Borates. — Quelques caractères physiques des borates Arthropodes . . 1007 de soude, avec une méthode nouvelle et rapide Ascres. — L'œuf des Ascidies est une mosaïque ‘de pour la détermination des points de fusion, . . 93 substances déterminantes d'organes. . . 408 | Bourses. — Bourses de voyage autour du monde. . . 754 ASSAINISSEMENT. — Le système separatif dans l'assai- BoussoLe. — La transmission au loin des indications nissement urbain. . . 497 de la boussole . . 244 AssimILATIoN. — Recherches expérimentales sur l'assi- Bnuzeons. — Nouveaux brûleurs de laboratoire appli- milation etla respiration végétales. Etude quan- cables au chauffage à température élevée. 92 titative sur l'assimilation de l'acide carbonique Buz8e. — Les fonctions du bulbe. . . . . . . 101 et la température de la feuille en illumination NOLMALE RENTE NE ET 0) ASSISTANCE. — L'assistance médicale indigène en C Afrique occidentale française. . . oMe 668 Assocrarios. — L'Association caoutchoutière colo- CagLes. — Mesure de la capacité des longs câbles sous- MON RMS EME NOÉ RO DORA ÈTER où De Que Le 545 marins . . 292 ASSURANCES. — Sur l'application des procédés ÉARDE Cæcuw. — Les fonctions du cæcum et de l'appen- ques aux calculs d'assurances. . . . . . . . 393 ICE ARR Ne TE UE ME ASTROLARE. — L'instrument des hauteurs égales en Carés. — Les cafés sans caféine. . . 667 Astronomie de position ou astrolabe à prisme. .10%4 | Carrés. — Préparation et maturation des caillés de ASrRonomIE. — Cours élémentaire d'Astroncmie et ÎroMasenI EE M MAS 180 deINAVIEADON EE NE RTE ER EN 128 | Carcur. — Grundlinien des wissenschaftlichen Rech- — Extrait du plan d'une bibliographie ‘analytique DEN S MN ee Leo le NO ICE 128 des écrits contemporains sur l'histoire de l’Astro- — Le calcul simplifié par les procédés mécaniques. 529 DOINIE EE NER eE e 511 | CALCUL DES PROBABILITÉS. — A ee — La méthode des hauteurs égales en Astronomie de nungund ibre Anwendung auf Fehlerausglei- DOSUTON EN NT EU NE 922 chung, Statistik und Lebensversicherung PEN — L'instrument des hauteurs égales en Astronomie CaLorImèTRe. — Un calorimètre de Bunsen. : . . . 91 de position ou astrolabe à prisme. . . . . . . . 1071 — Expériences avec des calorimètres à hydrogène et ATHÉROME. — Athérome expérimental. . . . . . 906 AIT IIQUITES EF eNeL ee MEN RENE TEUE 836 ATMOSPHÈRE. — Le sondage de l'atmosphère Pere cerfs- Canaux. — Les canaux de Mars. ... . . . . . 15-831 VON LE À 0 à oc6 ie et eue. QD à 45 I CARAUX Si Ue : 869 — Sur lesions de l'atmosphère SARA EAN EEE 536 | Cancer. — Radiothérapie et cancer. . . . . . . . . 123 — Exploration de l'atmosphère en Danemark . 966 — La théorie parasitaire du cancer . . 592 ATLANTIQUE. — Les grands Ports francais de l’ Atlan- =iTrallemeutidu Cancer ET EE TN CCE 995 LiTUEN RENE PANNES M AN RER Re 6 | Canne À sucre. — Culture et industrie de la canne à AUSTRALIE. — La question de l'eau en Australie. 1023 sucre aux iles Hawaï et à la Réunion. . . . . . 397 AUTOMOBILES. — Les DErIeCHGBnERRRts automobiles Caourcnouc. — Le caoutchouc dans l'Afrique occiden- COMMODE RE BEC PE ONE VC 956 Tale MITEN CASE EN PR PNR CRE 356 AUTONOMASIE. — L’autonomasie . . : : : - . : : . - 245 | Capacrré. — Mesure de la capacité des longs câbles AuTOTOMIE. — Recherches anatomiques et biologiques SOUS=IMATIDS re AC NN Dce e -D N 292 sur l’autotomie et la FSEÉNÉFQNAR chez divers Ar- CarsuLes. — Les lésions du rein et des capsules sur- LULOPOUES PR RTS EC INR CRE. . 41007 rénales Er del Nr Ie ON ENT RO EE 397 Aviartox, — Recherches nouvelles sur l'aviation. : : 1018 CaracrÈre. — Les mensonges du caractère. . 873 AVORTEMENT-—/AVOr(EMENL ue ce 4002 | Carnoxe. — Piles électriques à l'oxyde de carbone et AZOTE. — Détermination de la densité de l’oxyde au" CACbOHE. D SES NT LR GR PR 968 CITZOI EEE EE : er ete 40 — Conductivité électrique et pouvoir de réflexion du — Les micro- organismes fixateurs d'azote. ! | ..…. 343 Cal DORE AE CR NS RER NE EE 1020 — Détermination de la masse atomique de l'azote . 543 | CarBuRATEURS. — Les carburateurs . : : . . : . . 393 — L’Electrochimie et les composés oxygénés de Carrière. — Du choix d'une carrière industrielle. . 131 RAZOTER RER RE EE 590 — Préparation aux carrières coloniales. . . . . . . 232 — Houreles recherches sur le poids atomique de Caster, — Le casier sanitaire des maisons de Paris. 545 azote ETES ND 255 | Carazyse. — Le rôle de la diffusion pendant la cata- lyse par les métaux colloïdaux et les substances STONE SR CR RTE 136 B — Le rôle de la difusion dans la catalyse du pero- xyde d'hydrogène par le platine colloïdal. . ... 625 BACtTÉRIES. — Le méthane comme nutrition carbonée — La catalyse par les métaux communs . . . . . . LE 22 (dépense de construction) et source d'énergie (dé- Ceczuce. — L'Humus et l'alimentation carbonée de la pense d'entretien) pour les bactéries. . . . . . . 1015 cellule végétale. 1r° partie. La théorie de Liebig. 452 Bazisrique. — Recherches de Balistique extérieure . 294 — 2e partie : L'assimilation des substances ter- BaLLons. — Le matériel aérostatique et la construc- NAÏLESL De ME lee I IP ENCRES . 205 tibnfdestballons#sphériques PRE ENT 620 | Cernaconiscus. — Une nouvelle espèce ‘de Ces — Les voyages au long cours en ballon. . . . . . 734 AISCUS LEE CAEN NCIS 876 — Les applications militaires de la photographie en Cunrs-voLanrs. — Le sondage de l'atmosphère par ballon EME SR RE ES . 850 cerfSvolan ISERE EE 45 BALLONS-SONDEs. — Les ballons- sondes en haute mer . 589 CerveLer. — Les centres de Bolk dans le cervelet des BARREAUX. — Vibrations latérales des barreaux char- Mammileres MES ER COIN CEE 1016 DÉS CRMONILNETRÉS PRE CR . A119 | Cuame. — La chaire d'Histoire naturelle des corps BeLGiQuE. — Les progrès de l'enseignement agricole inorganiques au Collège dé France. . . . . . . . 359 EN BElPLUU CREME SET CN 102 | Cnacrur. — Détermination de la chaleur spécifique de — La Belgique agricole, industrielle et commerciale. la vapeur surchauffée. | 624 Ftudeéconomime re MM EN EN RE 232 — L'accumulation de la chaleur solaire dans les Bernupes. — Création d'une Station biologique aux liquides. SÉPARER 195 iles Bermudes . ù — Un appareil pour mesurer l° équivalent mécanique É BÉTAIL. — La production ‘du bétail français et la con- denta/chaleur RE OC ROC 966 sommation de la viande. . . . . . . . . 819 | Cuamrroxons. — Les champignons parasites de pete — Da pharmacologie de l'indaconitine l'homme et des animaux . . . . . . . . 873 t de la bikhaconitine . PAS TEM re LEE Ur SET CHAMPS MAGNÉTIQUES. — Sur les phénomènes présentés ne 1E. — Lecons de Biologie élémentaire. : . : 531 au sein des champs magnétiques par les solu- — Les problèmes de la Biologie. . . . . . . . . . 668 tions de matières colorantes . 143 BIRÉFRINGENCE. — La biréfringence Magnetaus de Cnaunières. — L'emploi des chaudières à tubes d'eau certains liquides. RC CR TE pe NL) sur 1es TOCOMONIVES CSST RCE Aer dE 445 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1133 Cnaunières. — Les explosions de chaudières et le rem- placemeut des moteurs à vapeur par les moteurs à combustion interne. . .: . . . . . CnemiNs DE FER. — Les signaux de chemins de fer et le Block système automatique. . . . . ; : — Les chemins de fer transpyrénéens . — : ‘attache des rails aux iraverses de chemin de err-s — Le rôle économique du chemin de fer {ransandin. Cnèvre. — Insuffisance parathyroïdienne chez la COMTE PE EN re AR I Re Se ee Cane. — Revue annuelle de Chimie ‘physiologique, 1re partie : Constituants de l'organisme, aliments, ASTAS ES EN ar Re MEET 2 — 2e partie: Digestion, sang, urine. — Revue annuelle de Chimie minérale . . Traité de Chimie minérale. Métalloïdes et Mé- taux Tratado elemental de Quimica. 1° Quimica inor- ganica. 2° Quimica organica . Eu Le domaine actuel de la Chimie biologique . 5 Éléments de Chimie inorganique. 1° Métalloïdes, 20! MÉTRO NO Ne Na Re ALU) - — Trailé élémenfaire de Chimie organique. ; Cuixe. — Hygiène et vie matérielle en Chine. . . AÉDUCAUONENCNNER TRS TN INR EN — Le « Royaume fleuri » ou Province des Quatre- fleuves (Chine occidentale). . . . . . . er CammurGre. — Chirurgie orthopédique . . . . — Leçons cliniques “de Chirurgie infantile. . . — Chirurgie du système nerveux (crâne et encéphale, rachis et moelle, nerfs) — Travaux de Chirurgie anatomo- clinique. Voies HOTTES ATEN TIQUE EME Am — Revue annuelle de Chirurgie . . . . . . . . . . Cuzore. — Note sur la cause de la période d'induc- tion chimique dans l'union de l'hydrogène et du GONE NO A EL M On SRE AE — Le poids atomique du chlore: essai pour déter- miner l'équivalent du chlore par combustion divectelaveciEnyAra nee NME MAT AUEN NES Caroue. — La solubilité des chlorures de chrome ISO ETES ER ES ee dard ie lee 2e CHROMOGÈNE. — Le chromogène scatolique de l'urine et le pigment qui en ÉTERNEL CurowosomEs. — Relation entre les chromosomes du noyau et la détermination du sexe chez les APR OEM anee ei La 2: etes De le ele % CHRONOMÈTRES. — Action du magnétisme sur les chro- DOTE LES AE le SLA LE SON Caure D'EAU. — Utilisation pratique et complète d'une chute d’eau pour tous les services d'une exploita- ON NET IS EN EME ER EC ARS Civexr. — La décomposition des ciments par l'eau de NE Se RE EE OR ES ne Cuimar. — Oscillations de l'activité solaire et du climat. — Périodicité de l’activité solaire et du climat . Cour. — Les nerfs du cœur (Anatomie et Dre HO NME RENE TE Re EE DOTE — Résurrection du cœur, La vie du cœur isolé. massage du cœur. Conéreur. — L'influence de l'ionisation sur la con- duetiviténdesicohérenrs. 2 1 M CAN CU TUUE Cozrèce. — La chaire d'Histoire naturelle des corps inorganiques du Collège de France . . . . . . — Cours du Collège de France de 1880 à 1904 et Tra- vaux du Laboratoire de 1871 à 1904 . . . . . .. CozLoïnes. — Le rôle des colloïdes en Biologie. Décou- verte de kinases artificielles . . CoLomBiE. — Introduccion al estudio de os Minerales de Colombia. Clasificacion de los Minerales de Colombia. Minerales alcalinos y terrosos de DR Gemas y Minerales litoides de Colom- ia COLORATION. — Un nouvel appareil pour la mesure delafcoloration: #14 0## 0026 Cocormmérrie. — La colorimétrie et la méihode colo- rimétrique pour déterminer la constante de dis- sociationtdess acides me 0 rm ie CouÈre. — La nouvelle comète à courte période « 4904 e ». COMPLEXE. — Sur un complexe tétraédral particulier. — Sur un groupe de Apr à cônes de com- DIEXESETGHOnnelSe Le EE es MO — Un groupe de complexes des rayons REV à — Le complexe tétraédral. . . Comeressieiciré. — Sur la compressibilité des gaz entre une SPAOrDRre et une demi-atmosphère de pression . . Concours. — Le concours international de prévision QUES RARE CONDUCTIBILITÉ. — La conductibilité éle etrique d'une flamme de Bunsen . . . Coxoucrivirés. — Effet de la tempé rature sur les con- ductivités thermiques de quelques isolateurs élec- triques. . — Sur une méthode pour trouver la conductivité calorifique . . — Conductivité électrique et ‘pouvoir de réflexion du carbone . . CONFÉRENCE. — Conférence des Directeurs de Services météorologiques à Innsbrück. : Pc Cox6o. — L'ivoire au Congo francais. . . CoxGrës. — Le congrès de” l'Enseignement commer- Cal — Premier Congrès fédératif international d'Anato- DOME NT ee - AP ENT — Congrès géologique international —- Congrès international d'Anthropologie et d'Ar- chéologie préhistoriques . . Coxvorura. — Sur l'isolement de l'organisme infec- tieux (Zoochlorella) du Convoluta roscoffensis. CoouE. — Le coolie japonais . . : Coripon. — l'industrie des abrasifs et le corindon. Cores. — Le corps humain comme source d'électricité. — La PHENRT EL a-t-elle une action sur le poids des corps ?2. — Les solutions périodiques dans le problème des trois corps . . CorruscuLes. — Les ‘eorpuseules de Negri et la rage. Coton. — La culture du coton dans la vallée du NO de PO CT DA Done I OOINE — Le coton en Egypte; culture, préparation, “expor- LL fo) ee JAMES le D MONT RMEr O l = — La culture du coton en Afrique. 27 — La production cotonnière mondiale. Son exten- sion nouvelle. . . . . . Courawrs. — Les « courants d'éclat » ‘(réponse élec- trique à la stimulation) de la vésicule biliaire de la Grenouille. . . RE ee A der à — Les courants « opiniâtres : » — Le sélénium et les courants électriques . ER Courees. — Sur des systèmes linéaires de courbes planestalsébDriIqMes Et EEE. Couronne. — La structure de la couronne solaire. — La polarisation de la couronne solaire . . CréaTININE. — L'excrétion de la créatinine chez LTD EN M ME LOMME ENT RE : CRISTALLISATION. — Kry stallisieren und Schmelzen. Crisraux. — Cristaux liquides. . . . . . . . . 1.3 — Cristaux liquides et liquides cristallins . Crorx-Rouce — La Croix-Rouge japonaise . Crues.— Relations entre les variations de la pression atmosphérique dans le nord-est de l'Afrique et les crues du Nil CRUSTACÉS. — Recherches sur la physiologie de la coloralion des Crustacés supérieurs. Cuparure. — Lecons sur la topomélrie et la ‘eubature des Éerrasses Ne Cie CycLoxes. — The cyclones of the Far East. . : . . . Cysrnurte. — Les déviations pathologiques de la désintégration des albumines : la cystinurie. . Cvrococre. — Traité d'Histologie. 1° Cytologie géné- rale et spéciale. Ent CCR OUOM MEME d'a D Danemark. — Exploration de l'atmosphère en Dane- EN DID TELE Co CO CR ELA UD Où COCA L DépoisemenT. — Houille blanche, déboisement et droit de ProPrÉtÉ ER ee le- LE DÉCHARGE DISRUPTIVE. — La déchar ge disruptive. . Décuers. — Les déchets industriels. Récupération, USER MENT NC CCE IE RER NE Déxocrarie. — La démocratie en Nouvelle- Zélande. Dexsiré. — Déterminations de la densité de N'a d'azote ru: Denrs. — Sur les prétendues dents aurifiées des mou- tons australiens. . . . . . . * DésinrecrioN. — Causeries sanitaires. Désinfection. Dessins. — Les dessins sur la peau des Vertébrés en rapport avec la métamérie cutanée . . Car Le Dragère. — Diabète et ilots de Langerhans . 1134 Dramanr. — Une nouvelle formation du diamant. . . Drasrases. — Lois d'action des diastases. . . ae Dierustox. — Le rôle de la diffusion pendant la cata- lyse par les métaux colloïdaux et les substances SIMNAÏTES: à 2 PR I EEE Dinararron. — Dilatation et température de fusion des métaux. . 3 Dissocrariox. — La colorimétrie et la méthode colori- métrique pour déterminer la constante de disso- ciation des acides. Dissozurion. — Recherches sur la vitesse de dissolu- tion des sels dans leurs solutions aqueuses . . . DisTILLATION. — Fractionnal distillation . à DisriLerie, — L’ < ÉRPISR de l'acide formique en distil- lerie.. : DocrEurs. — Les es docteurs en médecine candidats ‘au doctorat ès sciences. : Docrrixes. — Les doctrines médicales. Leur évolu- tion. È ë Dynawo. — La machine dynamo à courant continu. — Un nouveau type de dynamo. DysexreriEe. — Transmissibilité de la dysenterie ‘ami bienne en Frauce . Dysosrose. — Dysostose cléido-cranienne héréditaire, E Eu oxYGÉNÉE. — Réactions obtenues avec l'eau oxy- génée. . Eaux. — Aménagement des eaux à Java. Irrigation des rizières. : — Alimentation des campagnes en eau potable. — Etude d'un procédé de nitrification en rapport avec la purification des eaux d'égout. . . . . . . — La question de l’eau en Australie . : Ecuixococcose. — Echinococcose . . . . . . . EcraIRAGE. — L'éclairage par les lampes Cooper HeWIE See Cou ie VS Mere ai eue — Eclairage (huiles, alcool, gaz, électricité, photo- métrie). : ns Ecurse. — La prochaine éclipse totale de Soleil : — Les bandes d'ombre pendant les éclipses totales. Ecorres. — Ecole pratique des Hautes-Eludes. . . . . — Ecole nationale supérieure des Mines . . , . . . — Une Ecole navale de Commerce en Espagne . . — Ecole de Physique et de Chimie de la Ville de Paris. — Ecole Polytechnique. c DT RO ENS 2e — Les candidats aux Ecoles militaires NN EE Ne —. Ecole de Marine de Paris + 24 : 1 2% 2 04 Economie. — L'économie pastorale dans les Pyrénées. Ecrevisse. — Les animaux de laboratoire; l'écrevisse (Anatomie et dissection). . .. . . . . . Ecrrrures. — La transmission à distance des ‘écritures eNdessins rie SRE END Evucarion. — L'éducation en Chine . : : . Errer. — La cause de l'effet de Volta. É — Détermination de l'effet Thomson dans le mercure. Esecreurs. — Théorie du fonctionnement des éjec- teurs à vapeur . Ececrrons. — La théorie des élections et la représen- tation proportionvelle. 1'e partie : Système majo- ritaire et systèmes de répartition proportionvelle. — 2e partie : Examen critique des théories sur les- quelles s'appuie le système d'Hondt. . . . . . . . Ececrriciré. — L'électricité à la House de tout le HONTE EN TE Dtev.a CRAN — L'année élec trique c — Le régime futur de l'éle ctricité à Paris. ! | — L'électricité atmosphérique sous les hautes lati- tudes. . — Traité général de l'emploi ‘de l'électricité dans l’ industrie minière — Le corps humain comme source d'électricité. Ececrrocuimie. — Lois fondamentales de l'Electro- CRIME 2 RAP NL RARE re — L'Electrochimie et les composés oxygénés ‘et hydrogénés de l'azote. . ELecrroLvTEs. — Théorie des électrolytes amphotères — Rapports des dimensions des ions avec la conduc- tibilité des électrolytes . . ELecrron. — Déduction simplifiée du champ et des forces agissant sur un électron en mouvement. — Le mouvement des électrons dans les métaux. 139, — La physique des électrons. — Le mouvement des électrons dans les métaux. ELecrnorecuniQque, — Electrotechnique appliquée. 961 135 341 800 835 1025 913 24% 530 665 1018 450 498 498 546 800 800 1070 riciri 519 924 882 494 96% 1116 444 458 129 129 354 284 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ELEcTROTECUNIQUE. — Les tendances et les recherches actuelles de l'Etectrotechnique. . . ELéuevrs. — Les indices de réfraction des éléments. Emanarion. — Lois de la disparition de la radioacli- vité iuduite par l'émanation du radium . . . Euaux. — La fabrication des émaux et l'émaillage . ; EuerYoGËNE. — L'œuf humain et les premiers Stades de son développement. Eléments d'Embryogénie. EuerYoLoGiE. — Revue annuelle d'Embryologie ER EMULSINE. — Sur l'existence probable de l'émulsine dans la levure. : ENraNcE. — La protection de l'enfance en Indo-Chine. ENFANTS. — Traité d'hygiène et de pathologie du nourrisson et des enfants du premier äge. . 431, ENSEIGNEMEXT. — Les RrQgTÉS de l'enseignement agri- cole en Belgique . . — Création à la Faculté de Médecine de Lvon d’un enseignement spécial pour les candidats à l'Ecole de santé militaire. ae — À propos d'enseignement. — L'enseignement des Sciences naturelles comme instrument d'éducation philosophique . — L'enseignement technique dans les Universités. A électrotechnique de l'Université de DE Se — Le Congrès de l'Enseignement commercial. — L’ esprit scientifique dans l enseignement commer- cia — L'enseignement des Sciences appliquées à l'Ins- titut de Physique de l'Université de Fribourg ENSEMBLES. — La théorie des ensembles . . — Les principes des Mathématiques et le nor deslensembles"#"1"1 Enzvwes. — Action des acides et celle des enzymes. Equuiere. — L'équilibre thermique . . — Sur les équilibres occultes dans les sections (p, x) d'un système binaire en rapport avec la présence de matières solides . EQUIVALENT. — Un appareil pour mesurer l'équivalent mécanique de la chaleur ErYsiPue GRAMINIS. — Sur une adaptation endophy- tique présentée par l'Erysiphe Graminis D. C. dans certaines condilions de culture. Espaces. — L'équation qui détermine les angles entre deux espaces polydimensionaux. . . . . . . . . — La perception visuelle de l'espace . — La projection centrale dans l'espace ‘de Lobat- chefsky. Estomac. — Maladies de l'estomac. Etain. — La récupération électroly nqpe de l'étain des vieux fers-blancs. Eroires. — Nouvelles recherches sur la “classification thermique des étoiles. SHRRT RES CC — Observations d'étoiles faites dans quelques cercles de pierres anglais. . . — Evolution du spectre d’une étoile pendant sa croissance d'une nébuleuse . . . . . . . . . : Eruves. — L'organisation des études médicales. . . . ETUDIANTS. — Statistique des étudiants. Dos € — Le nombre des étudiants en Allemagne . . . . . Euroriuu, — Sur l’europium etson spectre ultra- -violet. — Le spectre de phosphorescence de l'europium pur. Exercices. — Les exercices pby siques et le développe- mentintellectne ete Exrérrences. — Recueil d' expériences élémentaires de PRYSIQUE ARTS EN NN RER Ce — A propos des expériences de M. Burke. ExPLorrarion. — Le problème de l'exploitation agri- cole en Guinée francaise "NN NN SES Exerosirs. —Surilestexplosuts. RSS ExrLosions. — Les explosions de chaudières et le remplacement des moteurs à vapeur par qu moteurs à combustion interne. . . . . . . . - F Faisans. — Tremblement congénital chez des fai- Sans . : SCT FALSIFICATION. — ‘Falsification des boissons. Féconparion. — Recherches nouvelles sur la féconda- Toner CCM SES ÉRTE — Les connaissances actuelles sur ‘la fécondation chez les Phanérogames.. . = . : 1. 4." Fer. — Elfet de la température de l'air liquide sur les propriétés mécaniques et autres du fer et de ses alliages. RÉ ERSRTSEEMERRE: Ce e — Thermo-électricité du fer et des aciers. . . . . . TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 135- Ken. —Eléments de Sidérologie. 1re partie : Constitution GéoLocre. — La Réunion extraordinaire de la Société des alliages de fer et HÉSCOrIES 0 à lat 2 à 481 géologique de France à Turin (septembre 1905). .4094 — La préparation du fer colloïdal RE ce Ne S00 | Géomërair. — Gesammelte Werke. Die BbERLGHA gen — Détermination des qualités magnétiques du fer. 839 zur Geometrie und Analysis. . . . . . . . . 701 — Les phénomènes qui RÉORÉRERENt la réduction GiGanrisue. — Type infantile du gigantisme. . . . . 299 CROIS SU à 0 oo PONTS PCM 925 | Grace. — Le dégel de la glace flottante . . . . . . . 140 FERMENTATION. — Le mécanisme de la fermentation GOUTTE. — Goutte Me Vos SEE 308 PRÉ TOLS 'e CES NO TO cn 11 | GhaissaGe. — Le graissage industriel. : 738 FEuRO-CYANIQUES. — La constitution des combinaisons GRAISSES. — La saponification des corps gras x 1029 ferro-cyaniques bleues. "M. 1%, . 1. . + - : 298 | Gravirarton. — Recherches sur la gravitation. 1061 FeuiLLes. — Les REDÉRESUS ghysialogiques des feuilles GRENOUILLE. — La mort d'une £ renouille célèbre. 144 AO Et à at OCR EN IENEERE 586 — Les « courants d'éclat » réponse électrique à la —_ Sur l'émissivité ther ruique d' une feuille verte stimulation) de la vesicule biliaire de la gre- dans l'air tranquille et en mouvement. . . . . . 586 ON SEE 0 RE 402 Rezlammlielde Fez. LM MS © . 634 | Guinée. — Le problème de l'exploitation agricole en Fes. — La structure et la fonction des fibres ner- Guinée Ranense PA eee 423 EU SES CU ele denhee ER -- 746 — Les travaux de la Mission Maclaud pour la déli- FIiBRINOGÈNE. — Origine du fibrinogène . . . . . . 355 mitation de la frontière eutre la Guinée francaise, Fièvre. — La fièvre bilieuse hémoglobinurique dans la Casamance et la Guinée portugaise. 970 Je"bassin du (COn50, 2-2 IN 402 | Gyuxospenues. — Une nouvelle classe de Gymmospér - — Propagation de la fièvre méditerranéenne par les mes, les Ptéridospermées. . . , . . . . . . . . 718 UPEVIES SR S - aae ea n Tate de 8176 FILS MÉTALLIQUES. — Procédé de fabrication électroly- tique de fils métalliques très fins. ; 584 H FLuines. — Une question relative au mécanisme des TARN TMS ONCE FR A ESS 46 | Haurrariox. — La tuberculose et l'habitation urbaine. 881 FLuor. — Détermination quantitative du fluor par HacoGènes. — Les hydrures d'halogènes comme sol- EHERTEIDOTIS SE NE NUE 618 vants conducteurs. III. Les nombres de transport. 238 — Indice de réfraction du fluor gazeux. . . . . . 815 | Haureurs. — La méthode des hauteurs égales en As- FLuorescexce. — Note sur la fluorescence et l'absorp- tronomie de position. . . . . 972 HN ee ET ela er RUE RONDES CO e 624 — L'instrument des hauteurs égales en Astronomie — Le spectre d ‘absorption et la fluorescence de la de position ou astrolabe à prisme. . . . . . .. 1071 VAPEUR IeRMENCUTE ER CE UE 920 | Hériuw. — Détermination des quantités de néon et Fox. — Modifications de la coagulabilité du saug d'hélium dans l'air atmosphérique. . . . . . . . 585 consécutives à la destruction expérimentale du foie 1022 — Nouvel essai infructueux de liquéfaction de l'hé- Foxerioxs. — Einleitung in die Functionentheorie. 480 NE Ro Un ac D AVC MT ROMANE 878 — Jatroduction à la théorie des fonctions d'une va- Héwrornèmes. — Les hémiædèmes chez les hémiplégi- riable, tome I. Nombres irrationnels, ensembles, CRÉES CNE RSRNRRILE" CENT ENCRES EEE 245 limites, séries, produits inlinis, fonctions élémen- HÉMIPLÉGIQUES. = Les hémiœdèmes chez les hémiplé- taires, dérivées. 576 DIQUES ET -U C Re el ane 245 — Lecons sur les fonctions de variables réelles et Histinine. — La constitution de l'histidine. . . . . » 969: les développements en séries de polynomes . . . 653 | Histoire. — Auguste Comte et l'histoire des Sciences. 410 — Lehrbuch der Thetafuoklionen . . . . . . . . . 831 — Auguste Comte et l'mstoire scientifique. Remar- — Leçons sur les fonctions discontinues . . . . . 91% ques sur l'article posthume de Paul Tannery. 694 Foxpariox. — La fondation ophtalmologique Adolphe HisrocoGie. — ‘Traité d'Histologie. 1° Cytologie géné- dERRONRSCDUE EE E MLONR C. S57 Te ESDECIRlE EE Re s6 Forces. — Nouveau procédé pour amorcer les forces HomocuromtE. — Valeur de l'homochromie comme FUTURE CO RS RE PE RE 838 moyen de défense "6... 100 Focr. — Sur un nouveau type de tour électrique avec Horroces. — L'emploi des ondes hertziennes pour Je une nouvelle détermination du point de fusion réglage des horloges-étalons . . . . . . . . . . 1020 POP ER TR Ne coute enis à 661 — Sur les horloges sympathiques de Huygens et les Fracrrons. — Sur les fractions continues algébriques. 869 phénomèues analogues, en rapport avec les vibra- ÉRANKLINISATION. — La Franklinisation réhabilitée . . 131 tions principales et composées d'un mécanisme à FRex. — Dispositif de frein synchronisant électro- un seul degré de liberté portant deux pendules. 1064 MOT DE Eee de lee ie 186 | Hourice. — Houille blanche, déboisement et droit de FricontriQues. — Nouvelles machines frigorifiques à à PDNEE LEA 2e po à MR . 665 ENT SAS RE METEO LU NE O0 MAUMRES Expériences sur la croissance des huitres. 441 — Uue nouvelle machine frigorifique DAC te LIEN 4146 | Huuus. — L'humus et l'alimentation carbonée de la FROMAGERIE. — Préparation et maturation des caillés cellule végétale. 1re partie : La théorie de Liebig. 153 CÉRTOIUE PELLE NE ONU ee EC 180 — 2c partie : © L'assimilation des substances ternaires. 205 FUSION. — Krystallisieren und Schmelzen Se SEE e 433 | Hypraurioue. — L'hydraulique agricole . . . . . . . 495 — Dilatation et température de fusion des métaux. 1019 — Essai d'hydraulique souterraine et Muviale. : | 1004 Hyprocargonés. — La synthèse végétale des corps RYATOCATDONÉS EE NS Ce 928 G Hyprocénariox — Nouvelles méthodes générales d'hydrogénation et de dédoublement moléculaire Ganoziiuu. — Le spectre ultra-violet du gadolinium. 238 basées sur l'emploi des Métaux divisés. . . . . . 1006 GALVANOMÈTRE. — Analyse des courbes obtenues à l'aide Hyorocène. — Note sur la cause de la période d'in- du galvanomètre à corde. Masse et tension du fil duction chimique dans l'union de l'hydrogène et de quartz et résistance du mouvement du fil. 712 LUNCAION ER LE Re 349 GASTRULA. — Théories sur l'évolution de la sas IlvGxèxe. — Hygiène et vie maté ‘rielle en ‘Chine. 4195 A J'EN OT ENEENENEE . . . 3889 — Traité d’' Hygiène et de Pathologie du nourrisson GASTRULATION, — La gastrulation des Vertébrés. . . . 382 et des enfants du PreMIien ape 3 Cle 437 GAZ NESUT DIRES A PAZ EE AN LE. he ns 353 — L'Hygiène pour tous. 873 — Les gaz monoatomiques, le mercure, le aies — Manuel pratique d' Hygiène a l'usage ‘des méde- le plomb, l'or dans la classification . . . . . . 7? cins et des étudiants . . . . 959 — The dynamical theory of gases. . . . . . . . . 915 | HyperespACEs. — La somme des angles du ‘triangle et — Experimentelle Untersuchung von Gasen . . . . 1005 les Hyper ESPACES ES LR CCE 141 GazoGENEs. — Manuel pratique des moleurs à gaz et HYSTÉRECTOMIE. — Hystérectomie vi aginale ou abdo- FRSDBBTES EE SN ee SC elles cie 91% MInAlE A TA LRRNtS courte ee tete CRU RUN 601 Gazoune. — Les locomotives à gazoline. à S3T GÉNID-SPASMES. — (énio-spasmes el génio-tics . . 669 Géocrapnie. — Société de Géographie de Paris. 30€ Î — Geografa fisica y esférica de las BrQPApnE à del Paraguay, y misiones Guaranies. . . . . .. 1006 Iumuxrré. — La nutrition dans ses rapports avec GÉOLOGIE. — La Géologie du Maroc . . 152 l'immunité, + - … =. 35 — Notions de Géologie appliquées au département ISDACONITINE. — La pharmacologie de l'indaconiline et ITR OC SRE RU TA CENEREE EN E 872 de la bikhaconitine . ÉTEND LES 15 1136 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Ixvo-Cnixe. — La protection de l'enfance en Indo- LiQuérAGTION. — Nouvel essai iufructueux de liqué- Chine. . 668 faction de lMhé UNE ER E 818 — L'Indo-Chine française et ses Chemius de fer. 881 | Liquine. — Ecoulement du liquide céphalo- -rachidien Inscriprion. — Note sur uu HE pour inscription par le nez PU REC 245 graphique. . . 707 — L'accumulation de la chaleur ‘solaite dans les INSECTES. — Un instrument pour l'observation de la liquides. 798 vie des insectes. . . . .. 490 | Locazreartox. — Nouvelles éludes histologiques sur la Ixsrirur. — L'Institut géographique ‘de Bruxelles ; 357 localisation de la fonction cérébrale. Les cerveaux — Institut de France. Les subventions du legs De- de felis, Canis et Sus comparés avec celui de brousse . CRAN crie Lo Lo Me IT: l'Homme . DAS 0 293 — L'Institut international agricole ; 631 — La question des localisations cérébrales . ! : 880 INSUFFISANCE. — Insuffisance paratby roïdienne chez la Locoorives. — Les derniers press des locomotives chèvre . 245 à vapeur et électriques . . À INTELLIGENCE. — L'étude expérimentale del'Intelligence. 35 — L'emploi des chaudières à ‘tubes d'eau sur les INTESTIN. — Tumeurs du gros intestin. .1000 JOCOMOHVES ANR ENT DAC in — Les conquêtes récentes de la Biologie dans le do- — Les locomotives à gazoline . rs 831 maine du chimisme intestinal. . . -AOS4 | Lor. — Recherches sur la loi de Draper 13 298 INTUMESCENGES. — Nouvelles expériences ‘et recherches Loire. — La Loire navigable et le projet du « Grand histologiques sur les intumescences, avec quel- CENTTA ID ALANC ASP EN TENTE 448 ques observations sur la division nucléaire dans Louerics. — Pseudo-tuberculose due à des lombrics. 409 les tissus pathologiques. 626 | Lumière. — Une théorie mathématique de la réflexion IxvERSION. — Sur la fonction photographique ‘dans de la lumière près de l'angle de polarisation. 488 ses rapports avec les phénomènes d'inversion. 38 — Das elektrische Bogenlicht, seine Entwicklung lox. — Sur les ions de l'atmosphère. 536 und seine physikalischen Grundlagen . 832 — Rapports des dimensions des ions avec la conduc- — La théorie de la réflexion de la lumière par des tibilité des électrolytes . . . 589 corps non complètement transparents . 96% lonISATION. — Enregistrement continu de l'ionisation LUMINESCENCE. — Les phénomènes de luminescence et atmosphérique . . 290 leurs causes . . .. . 683 — L'influence de l'onisation sur la conductivité des Luxerre. — Lunette méridienne photographique : 922 cohéreurs. . . 818 ÉRRIGATION. — Aménagement des eaux à Java. Ir riga - tion des rizières. 341 M IsoLareurs. — Effet de la température sur les conduc- tivités thermiques de quelques isolateurs élec- Macuines. — La pratique des machines à bois . 32 triques . . 137 — Manuel de la machine à vapeur. . . 529 ITALIE. — Application ‘de la méthode tectonique à la — Les progrès de la surchaufle dans les machines à métallogénie de la région italienne . MITRES LE VAPEUT ET NE PNA ON ES PRE 719 Ivorre. — L'ivoire au Congo francaise 498 — Cours de Mécanique appliquée aux machines. Théorie des machines thermiques . 1052 MapaGascar. — La situation économique de Mada- J BASCET fre 2e EME TELL AUTO RC ENORME 841 : Macwérisme. — Les travaux récents de magnétisme Jarox. — Au Japon. Impressions de ayeee : 33 terrestre dans la France centrale. Le présent et le — La Croix-Rouge japonaise . 632 passé magnétiques des volcans d'Auvergne . S94 Juerrer. — La sixième satellite de Jupiter. 282 | __ Action du magnétisme eur les chronomètres. 923 — Le magnétisme des alliages du manganèse. . . 1066 K Marantes. — Manuel pour l'étude des maladies du système nerveux . . DONNER ou) Kinases. — Le rôle des colloïdes en Biologie. Décou- — Les frontières de la maladie. . : : . : . 281 verte de kinases artificielles. . ER 640 | Mazarra. — La transmission du parasite de la malaria drAVerS leMDIATen EEE RCE CEE 145 MaNGaANÈsE. — Le maguélisme des alliages du man- L BANÉSE Are E Matt ne 1066 MANIPULATIONS. — Manipulations et études électro- LaporAToIRE. — Les animaux de ÉRoAees l’écre- techniques . Me eat 39% visse (Anatomie et dissection). UN EN OS T9 0 MMAMONETRE UN manomètre ‘absolu se de . EM — Du laboratoire à l'usine. . . . . . . . 1052 | MaArcne. — Rôle des muscles spinaux dans la marche Lawpe. — Lampe à lumière oxy- acétylénique de la chez Aihomme EEE DR ee. EE) Compagnie francaise de l'Acétylène dissous . . . 91 | Maroc. — Trois mois de campagne & au Maroc . . . : 518 — Nouvelle lampe à vapeur de mercure à l° peser — La géologie du Maroc . S : ER 152 de Saint-LOUIS + MRC RUN CEE 100 Mars. — Les canaux de Mars . . . ANRT — La nouvelle lampe à incandescence électrique ‘au Masse. — Résultats de la nouvelle détermination ‘de tantale . ES la masse du décimètre cube d'eau pure . . . 487 — L'éclairage par les lampes” Cooper Hewitt | 2%% | Marérraux. — Essais des matériaux hydrauliques 8% — La lampe et la soupape à mercure de Cooper MATHÉMATIQUES. — Geschichte der Mathematik im XVIen HELD ARE TE EE AC NEED 934 uud XVII Jahrhundert. RP TETE Le 28% — Comparaison des lampes au tantale et des Shore — Obras sobre Matematica. . . . . . . . . 393 à filament de charbon. : 968 — Les principes des Mathématiques et le problème — Lampe de sûreté système Tommasi . . 1067 desvensembles IE PRE 541 Lapin. —-Recherches sur l'ovulation et la dégénéres- Marière. — Les hypothèses modernes Sur la constitu- cenceldesiœusiChezMeMapIN ENTER 661 tion électiqueldelamalier ed CR ER 654 LÉMAN AL DÉMaENMEN Me ne UN IE PNR 395 — Matière et mouvement. Bases d'une Mécanique LEvVURE. — Sur l'existence PHOBRUIE de l'émulsine dans objective opposée à la Mécanique classique. . . 791 la levure :0 1011 | Mariënes coLoraANrEs. — Les idées actuelles sur la LièGe. — Le liège, ses produits et ses sous- produits . 1007 constitution des matières colorantes du triphényl- Liëe. — Sur la ligne stellaire située près de } 4.686. 442 IMÉTRAN EST EN RC EE 558 — lufluence des collisions et du mouvement des mo- MATIÈRE MÉDICALE. — ‘ Lecons de Pharmacodynamie et lécules dans la ligne de visée sur la constitution de Matière médicale. 4° série : Antithermiques, d'une ligne spectrale MR LEE 919 analgésiques. 5e série : Modificateurs du système — Proprié tés de la ligne critique (ligne des points de nerveux périphérique et névro-musculaire . 181 plissement) du côlé des composantes . . . . 963 | Mécanique. — Mechanics . . . . . 119 — Les valeurs numériques exactes pour les pro- — Matière et mouvement. Bases d'une ‘Mécanique priétés de la ligne des points de plissement du objective opposée à la Mécanique classique . . . 797 côté des composantes. F6 FD PRE 963 — Revue annuelle de Mécanique appliquée . . . . . S24 — Les différentes branches de la ligne des trois — Die technische Mechanik. Die Mechanik starrer phases pour solide, liquide el vapeur en des sys- Kérper MONA ENEUUR 1% tèmes binaires, où se présente une combinaison. 1064 — Cours de Mécanique appliquée aux machines. | Larase. — Recherches sur la lipase du ricin . . . . . 1011 Théorie des machines thermiques . . : . . . OL IEP TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES Mépecine. — Revue annuelle de Médecine Méoicauents. — Guide pratique pour l'essai des médi- caments chimiques . Méxinerre. — Traitement de la méningite ‘d’origine auriculaire . . MewsonGes. — Les mensonges du caractère MERCURE. — Les gaz nonoatomiques, le mercure, le thallium, le plomb, l'or dans la classification — Le spectre d'absorption et la fluorescence de la vapeur de mercure MÉTALLOGÉNIE. — Application de la méthode tectonique à la métallogénie de la région italienne . . MÉTALLOGRAPHIE. — Métallographie. . . . . . . Mérauuoives. — Traité de Chimie minérale. Métalloïdes et Métaux. Méraménie. — Les dessins sur la peau des Vertébrés en rapport avec la mélamérie cutanée . SE Méraux. — Métaux divisés . . — Traité de Chimie minérale. taux . La résistance au contact de deux métaux . . Les ellets des tensions momentanées dans les MÉlAUx es : Nouvelle méthode pour éludier la micro-structure des métaux. ë Le mouvement des électrons dans les métaux : Spectres des métaux alcalins; centres d'émission ‘es différentes séries . . . À FEV + Le La catalyse par les métaux communs . Procédés métallurgiques et étude des métaux . . Influence des chaugements de phase sur la téna- cité des métaux ductiles à la tem pérature ordinaire et au point d'ébullition de l'air liquide. . . MéréoRoLoGIE. — Intéressante installalion météorolo- PIQUE UN. Re — Physique du globe et Météorologie — La Conférence des directeurs de services météoro- logiques à Innsbrück. — Les courbes de fréquence de quantités météorolo- giques . Mérane. — Le méthane comme nutrition carbonée (dépense de construction) et source d'énergie (dépense d'entretien) pour les bactéries . . Méruone. — Réflexions sur la méthode heuristique. MEunIER. — Manuel du constructeur de moulins et du meunier Mrcroges. — La vie dans la nature à l'abri des mi- robes * - Fi © Métalloïdes et Mé- MICROMÈTRE. — Le wicromèire électrique DUR Micro-0RGANISMES. — Les micro-organismes fixateurs d'aznte 1. MicropnoTocRarmE. — La microphotographie | en lu- mière ultra-violette . . . Microscope. — Le microscope polarisant. Guide pra- tique pour les études élémentaires de cristallo- graphie et d'optique 1 MiGRaINe. — Migraine ophtalmique AVE Mixéraux. — Introduccion al estudio de los Minerales de Colombia. Clasification de los Minerales de Colombia. Minerales alcalinos y terrosos de Co- lombia. Gemas y minerales litoides de Colombia. — Mineralizadores y minerales metalicos de Co- lombia . . . MAT LTÉE — Déterminalion des espèces minérales : : . .. 1 Mixes. — Utilisation pratique et complète d'une chute d'eau pour tous les services d’une cxpetanss NO CASSER DOC A — Cours d’° exploitation des mines . — Traité général de PR de l'électricité ‘dans l'industrie minière Re ne. LA A0 Misci8iliTÉ. — Sur quelques phénomènes remarquables qui se présentent en cas de miscibilié restreinte de deux liquides dont l'un est anomal, comme eau Missiox. — Les travaux scientifiques de la Mission de délimitation du Niger au Tchad (Mission Moll). — Les travaux de la Mission Maclaud pour la déli- mitation de la frontière entre la Guinée francaise, la Casaman:e et la Guinée portugaise . . . Moxumenr. — Le monument Dehérain-Sanson-Mussat à l'Ecole de Grignon. . . . . Moxzonr. — The geological Structure of Monzoni and DD CRE ER MonPHOGÉNE. — La morphogénie osseuse expliquée par l'anatomie pathologique. : : Moscou. — Moscou (Les villes d' art célèbres) ES LES REVUE GÉNÉRALE DES SCIENCES, 1905. Moteurs. — Les explosions de chaudières et le rem- placement des moteurs à NAESHE par les moteurs à combustion interne . CRE EN. 5 re — Manuel pratique des moteurs à gaz et gazogènes. MorocycLertEs. — Les motocyclettes “MAS T Mouuixs. — Manuel du constructeur de moulins et du meunier DST Sy ST So EN NC EE Mousriques. — Les moustiques ; “histoire naturelle et médicale . . RES RE EU eo Mouroxs. — Sur les prétendues dents aurifiées des moutons australiens Mouvements. — Mécanisme et éducation des mouve_ ments Re re De RU EE TT CRE — Matière et mouvement. Bases d’une Mécanique objective opposée à la Mécanique classique Mvuseces. — Rôle des muscles spinaux dans la marche chez l'homme. Muséuy. — Au Muséum d'Histoire naturelle. "300, 449, — Lelaboratoire colonial du Muséum d'Histoire natu- relle de Paris. ANA Musicrexs. — Le surmenage des musiciens > MycoLocre. — Manuel de Mycologie technique . NATURE. — La nalure et la vie. Navicariox. — Cours élémentaire d'Astronomie et de Navigation. Gp, À — Lecons sur la navigation aérienne. — Un nouvel essai de navigation aérienne ‘par le plus lourd que l'air. Navires. — La prophylaxie de la tuberculose à bord des navires de commerce . . . . NécroLocie. — La vie et l'œuvre de Sarrau. — Paul Tannery. ARRET J. E. Dutton . Le docteur Henri Parinaud . Ernest-Adolphe Bichat. . . L'œuvre agricole de M. P.-P. Dehérain. E. R. Thalen . à Eh US Le Commandant Massenet . ele. CRÈTE La vie et les travaux de Hertz. Mémoire thume et inédit de H. von Helmholtz . . . . . . Néon. — Détermination des quantités de néon et d'hélium dans l'air atmosphérique. . . Nerrs. — Les nerfs du cœur (Anatomie et physiologie). NEURASTHÈNIE. — La neurasthénie biliaire. . . . . . . — Neurasthénie de l'ouvrier et du pauvre . NiaGara. — L'utilisation locale des chutes du Niagara. NiGer. — La culture du coton daus la vallée du Niger. — Les travaux scientifiques de la Mission de délimi- tation du Niger au Tchad (Mission Moll) . NiTRIFICATION. — Etude d'un procédé de nitrification en rapport avec la purification des eaux d’égout. Nourrissox. — Traité d'hygiène et de pathologie du nourrisson et des enfants du premier âge. . 437, Nouvezcr-ZéLanoe.—La démocratie en Nouvelle-Zélande Nurririox. — Recherches sur la nutrilion carbonée des plantes vertes à l’aide de matières organiques. — La nutrition dans ses rapports avec l'immunité. pos- [0] Omsecrirs. — La théorie des objectifs optiques symé- triques . — Méthodes employées au Laboratoire d'essais du Conservatoire National des Arts et Métiers pour l'étude des objectifs photographiques. . . ; OBsERvATOIRE. — Observatoire national de Be »sancon.. — Anuario del Observalorio astronomico de Santiago de Chile. ‘ Océax. — L'Océan, ses lois et ses $ problè mes. OE-0rPHA6E. — Corps étrangers de l'æsophage . Oeur. — L'œuf humain et les premiers stades de son développement. Eléments d'Embryogénie . . — L'œuf des Ascidies est une mosaique de subs- tauces déterminantes d'organes . . Oxpes. — L'emploi des ondes hertziennes | pour le réglage des horloges étalons. : OPRTALNOLOGIE. La fondation ophtalmologique Adolphe de Rothschild. : Or. — Les gaz monoatomiques, le mercure, le thal- lium, le plomb, l'or dans la classification . Onreire. — Formules exactes d'approximation pour le rapport des triangles dans la détermination d’une orbite elliptique par trois observations 1138 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES ORerrE. — L'orbite du premier satellite d'Uranus. . . 965 PuoroGraPniEes. — Photographies en couleurs obtenues OreiLce. — La sensibilité de l'oreille humaine pour par la méthode De pe sans miroir de des sons de différentes hauteurs produits par des MErCUTE NRC ER 39 tuyaux (d'orgue se NC 240 — Photographie en couleur par la méthode Lipp- ORTHODIAGRAPHE. — L' Orthodiagraphe A TON D 798 mann . . 100 OSciLLATION. — La conversiou des oscillations élec- — Recherches “expérimentales pour la représentation triques en courants continus au moyen d'une de la fonction photographique. . . . . . . . 186 soupape à vide. . . . . : 488 — La théorie des processus photographiques. . 401, 625 Osuose. — Sur quelques particularités de l'osmose — Photographies en couleurs du LRPÈQRE négatives des solutions aqueuses . . sn I par transmission . . DOM ir oo c 660 Orrres. — Traitement des otites moyennes aiguës. 997 — La photographie animales. SHARE 751 Ovarre. — L'origine et l'évolution des cellules in- — Les applications militaires de la photographie en terstitielles de l'ovaire du lapin . . 1118 Ballon EEE RE 850 OvuLartion. — Recherches sur Dove on et la dégé- Paysico-cumie, — Traité élémentaire de Physico_ nérescence des œufs chez le lapin . 661 Chimie . Rio on HU OXYDE DE CARBONE. — Appareil automatique averlis- — Landolt-Boernstein ‘physikalisch-chemische Ta- seur d'oxyde de carbone. . . De un Helen ee M RSR ER ETES 833 Ozone. — L'ozone et ses applications industrielles : : 654 | PnystoLocir. — Revue annuelle de Physiologie ... 517 — Traité de Physiologie. 1° Fonctions d’innervation. 2eNhonchonshelémentaires tt e CRe 619 P — Studies in general Physiology. . : . «UM 186 Paysique. — Recueil d'expériences élémentaires de Parter. — L'emploi du papier comme RES Nenr du PRYSIQUE NEA ER RE TIRE 530 fer et de l'acier contre la rouille. 926 — Physique du globe et Météorologie del lotc,s « 738 PARAGUAY. — Geografña fisica y esférica de las” pro- — Précis de Physique biologique. . : . 1053 vlncias del Paraguay, y misiones Guaranies . . . 1006 Picarpie. — La Picardie et les régions voisines : Artois, PARALLAXE. — Détermination SPESROEREUe de la Cambrésis, Beauvaisis. ut parallaxessolaire VER a NRC .... 1017 | Pixxs. — Communication préliminaire sur les piles PARALYSIE. — Syphilis et paralysie générale : ON LA NN) galvaniques produites par l'action de la lumière. 136 Parc. — Le nouveau parc zoologique de New-York. : 544 — dre pile thermique à vide. . . . . . . . . + . | 923 Paris. — Le Port de Paris. 927 | — Piles électriques à l'oxyde de carbone et au car- PARTHÉNOGENÈSE. — Parthénogénèse naturelle et arti- DOTE PR EN NE ERA TON 968 HOT ILES ENT AR NP NE ee 226 | Pcacewra. — La transmission du parasite de la ma- PEAU. — Présence d'une ty rosinase daus la peau de laria travers lehplacenta "2. "0 145 GORLADS AV ERLÉDIES EE ER EE D 42 — La morphologie du placenta des Ongulés, en par- Pêcne. — Travaux de la:Slation de recherches rela- ticulier le développement de cet organe chez le tives à la pêche maritime à Ostende. . . . . .. 833 mouton, et notes sur le placenta de | Eléphant et Pêcaeries. — Les pêcheries du banc d'Arguin. 591 de l'Hyrax RE TT M Re - à 919 PépaGocte. — Un Laboratoire de Pédagogie nor-- PLaisir. — Travail et ‘plaisir. Nouvelles études expé- CR ONE GS ROME IE NE ER TE à DS 1069 rimentales de Psycho-mécanique. . . : . . . CAEN Penrures. — L'action bactéricide des peintures rnu- PLanrss. — La respiration des plantes vertes . . . . 594 Tales 840 PLare-roRme. — Un projet de plate-forme roulante à PENDULE. — Pendule en acier. nickel entretenu électri- N'EMENOL EN PRO RE EC CCE 590 quement. - 141 PLATINE. — Sur un nouveau type de four électrique — Sur les observations faites avec un pendule horizon- avec une nouvelle détermination du point de tal dans les régions antarctiques au cours de enr te) EEM EMEA A0 à 5 0kU 0 à 6 0 66L l'expédition de Ta RADISCOVELYAD SE PRIE EN 836 Pr. — La transformation d'un pli latéral en un pli PERCEPTION. — La perception visuelle de l'espace c 958 principal et réciproquement . . . 663 PÉRIL VÉNÉRIEN. — Le péril vénérien et la prophylaxie PLous. — Les gaz monatomiques, le mercure, le thal- desPmaladiesivénériennes MR EN 1113 lium, le plomb, l'or daus la classification 2 LR OTERS PERSONNEL. — Personnel universitaire. . . . 250, 754 PLures. — Relation entre les pluies d'automne et les P£esanTEUR. — Intensité et direction de la force de la rendements en blé de l’année suivante. . . . . . 488 pesanteur aux Indes. SRE DEN ON TRE 661 Porns. — Comité international des Poids et Mesures. 653 PESTE. — A treatise on Plague. ÿ 1054 — Nouvelles recherches sur le poids atomique de Paacocyrose. — Recherches expérimentales sur Ja l'azotes AA RE SRE UE NE PER 455 nature de la substance du sérum qui influence la Porvrs omermicaux. — Les points ombilicaux double phagocytose. . . 5 962 et multiple comme singularités du premier ordre — La phagocytose des cellules rouges du sang. : : 4061 d'exception de surfaces générales en coordonnées PHANÉROGAMES. — Les connaissances actuelles sur la ponctuelles M 43 fécondation chez les Phanérogames . 436 Porssoxs. — Traité de Zoologie. Fascicule Vi. Poissons. 231 PHARMACOLOGIE. — Pharmacologie | de l'acide phospho- POLARISATION. — La polarisation de la couronne rique. le partie : Action digestive. MB ER à 568 solaire AMEL Meet ee le A CRE 1749 — 2° partie. Action nerveuse et humorale. . . . . . G14 PorissAGe. — Les enseignements scientifiques du polis- PHARMACODYNAMIE, — Lecons de Pharmacodynamie. SAGE PEN IRN A MOSS ER Re RD One ml 4e série : Antithermiques, Analgésiques. 5e série : POLYEMBRYONIE. — La polyembryonie spécifique ou Modificateurs du système nerveux périphérique LeLMINOPONIE Ne PER NE REP 390 CLAMÉVTO MUSCUTTILE MERE PA NE ERRRE 182 Ports. — Les grands ports francais de l Atlantique. 6 Puases. — La forme des sections du plan de satura- — Ports francs d'autrefois et d'aujourd' Due 741 tion perpendiculaires à l'axe des X, dans le cas de — Le port de Paris MMM NTRN NS Mr De pression à trois phases entre deux lempératures. 795 Porexriouèrre. — Le potentiomètre Crompton. 967 — Les équilibres (T, x) de phases solides et fluides PRESSION. — Les relations entre les variations de la pour des valeurs variables de la pression. 196 presnpe atmosphérique dans le Nord-Est de — Contribution à la connaissance des courbes (p, x) l'Afrique et les crues du Nil. . . . - . . . . 488 et (p, t) pour le cas où deux substances entrent — La détermination de la pression de vapeur par en composition use en phèses fluide et barbotase d'air CRE EE = 002 BAZEUSEE NE RE Ce 196 PRESSION osmoriQue. — Sur la pression osmotique PnASE S-MÈTRES. — Théorie des phases-mètres. . . . . 1012 dans le sang et l’ urine des poissons . . . . . . . 44 PHILIPPINES. Sa of the nent of the Go- — Une formule pour la pression osmotique dans vernement Laboratories in the Faiippine Islands les solutions concentrées dont la vapeur suit les for the year ended September 4 th 1903. . . . . 343 lois desfraz PET INC RCE METRE SERRE 712 Puicosopuie. — La Philosophie naturelle intégrale et — Déductions cinétiques de la loi de Van't Holf par les rudiments des Sciences exactes . . 232 rapport à la pression osmotique d'une solution PnospuonesceNce. — La phosphorescence des sulfures diluée, 21 MEN EN AN NP RENE 712 81CA NO ELITE EN ES 354 — Une méthode d'évaluation de la pression 0smo- — Phosphorescence causée par les rayons y el [ ‘du tique de quantités minimales de fluides . . . 1120 DRAIUIN +». ENS NPA Ru 488 | Prévisrox. — Le Concours international de prévision PRO RAPHIE. Sur la fonction photographique dans dupe F'iestenee ele RU ses rapports avec les phénomènes d'inversion. . 38 | Principe. — Le principe de Pascal. . . . . . . . . . 599 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 1159 Bars Les px NODE IE ECC CU RÉGIMES. — L'alimentation et les régimes chez l'homme — Le prix Bolyai . . . . 921 sain et chez les malades . 57 PROBABILITÉ. — Un problème ‘de probabilité géomé- RéGuLateurs. — Les régulateurs électriques à faible trique-... 962 inertie et à vibrations . 1020 Procénés. — Sur l' application des procédés graphiques Rex. — Les lésions du rein et des c: apsules surrénales. 397 aux calculs d'assurances . . 393 "RE? TATION. — La théorie des élections et la re- PROJECTION. — La projection en couleurs naturelles. : 4 présentation proportionnelle. ire partie : Système ProLapsus. — Traitement des prolapsus génitaux. . .1002 iwajoritaire et systèmes de répartition proportion- ProtÉGrIoNNiSTE. — La politique protectionniste en nelle . too ren tr le See 411 Angleterre. Un nouveau danger pour la France. 36 — 2e partie : Examen critique des théories sur les- PsxcRoNévROsES. — Les Psychonévroses et leur trai- quelles s’appuie le système d'Hondt . 1488 tement moral. . . SON N CL — Sur la représentation proportionnelle . . + 635 Prérinospenmées. — Une nouvelle classe de Gymno- — A propos de la représentation proportionnelle - spermes : les Ptéridospermées. . . . . . . . . . 18 150, 593, 669 PuERILISME. — Le puérilisme. . . 396 | RerPronucron. — La physiologie de la reproduction Pucvérisarion. — Le mécanisme de la pulvérisation chez les Mammifères . 191 électrique. . . 14 000 20e 0 0. 967 | Résinus: — Le calcul des résidus et ses applications Purpur4a. — Le Purpura. a 0 Lo à la théorie des fonctions. É 100% PyréNéEs. — L'économie pastorale dans les Pyrénées . 22% | Résisrance. — La résistance au contact de deux mé- LaUxes RM nee et — Résistance diélectrique de l'air : : . . - us Q RESPIRATION. — La respiration des plantes vertes - 594 — Recherches expérimentales sur l'assimilation et la ‘QuavrIQuES. — Sur le lieu géométrique des axes prin- respiration végétales. Etude quantitative sur l'as- cipaux d'un faisceau de quadriques . . . .. . . 44% similation de l'acide c arbonique et la température — Les équations qui déterminent le lieu géomé- de la feuille en illumination normale. 190 trique des axes principaux d'un faisceau de qua- — L'acapnie évitée par la respiration d'un mélange driques 0239 d'oxygène et d'acide carbonique. . . 926 Quartz. — Sur le module de rigidité torsionnelle des REvuE. — Revue annuelle de Chimie physiologique. fibres de quartz et son coefficient de température. 29% 19 Constituants de l'organisme, aliments, diastases. 49 — 2e partie. Digestion, sang, urine. . . . . . . . . #3 — Revue annuelle de Chimie minérale. 4172 R — Revue annuelle d'Embryologie . 326 ; — Revue annuelle de Physiologie . 51% Races. — Le problème ou le préjugé des races . ss3 — Revue annuelle de Mécanique appliquée S?21 Races. — Effet de l'anhydride carbonique sur l'in- — Revue annuelle de Médecine . + € 904 curvation APS) des racines de Pisum sa- — Revue annuelle de Chirurgie . 93 tivum. . . : SO le — Revue annuelle d'Auatomie , . .. . 1095 &anraTiON. — La radiation Rôntgen polarisée . . . . 489 | Ruaupospnère. — Sur une nouvelle rhabdosphère ; D39 — Effets de radiation sur les “plaques au gélatino- Ricin. — Recherches sur la lipase du ricin. . . 1011 bromure d'argent. . . 543 | Ricinité. — Sur le module de rigidité torsionnelle des — Méthode simple Fous détermiver la ‘constante de fibres de quartz et son coefficient de température. 294 radiation . . . +... + « + - «+ «+ 586 | Rocnes. — Le mode de formation d'un dôme volca- — Mesure absolue de la radiation | LT DBD nique et la cristallisation des roches éruptives — La radiation lumineuse spontanée du radium : : 961 quarizifères. . . . DA En ER ES Me AL — La radiation de chaleur dans un système de SGERE — Etude pratique des roches, à l'usage des ingé- ayant partout la même température. . . . 963 nieurs et des étudiants ès sciences naturelles . . 833 — Appareil pour la mesure de la radiation de la RouiLce. — L'emploi du papier comme préservatif du couronne solaire pendant une éclipse . . . . 1012 fer et de l'acier contre la rouille. 926 — Sur la radiation de chaleur dans un système ‘de Rouuis. — Un appareil poux diminuer le roulis d'un corps ayant partout la même température . . . . 106% vaisseau . . . 46 Rapro-acrivité. — Lois de la disparition de la radio-ac- Royaume FLEUR. — Le « Royaume ‘Fleuri » ou ‘pro- tivité induite par l'émanation du radium . . . . 291 vince des Quatre-fleuves (Chine occidentale). 94% — Sur les minéraux radio-actifs. . . . 584 | Russie. — L'empire russe et le tsarisme. . . . . . . 1055 — Un nouvel élément radio-aclif qui ‘dégage ‘de l'émavation du thorium . . . 585 RADIOTÉLÉGRAPHIQUE. — Service radiotélégraphique S entre l'océan Pacifique et l'Atlantique. . . . . . 714 RADIOTHÉRAPIE. — Radiothérapie et cancer. . . . . . 423 | Sanara. — La pénétration économique du Sahara. . 245 — Traité de Radiothérapie. 437 | Sanc. — Analyse chimique du sang. . . 656 Rapio-rHorIüM. — Un nouveau corps radio- actif, le — Modifications de la coagulabilité du sang ‘consé- radio-thorium. . . A . 840 cutives à la destruction “expérimentale du foie. 1022 RaDrum. — Phosphorescence causée. par les rayons Y — La phagocytose des cellules rouges du sang. 1061 et 8 du radium . . 0. 488 | MSAPONIFICATION. — Jia saponification des corps gras. 102 — Le radium peut- “il donner la vie? : : ! : ! : : : 804 | Sancine. — Une sarcine de fermentalion anaérobie — La radiation lumineuse spontanée du radium : : 961 obligatoire . . 302 Race. — Les corpuscules de Negri et la rage . . . . 5 | Sarezurre. — Le neuviéme satellite de Saturne . 242 Ras. — L'attache des rails aux traverses de chemin — Le sixième satellite de Jupiter. . . . . . . . 242 ADS 8 9 5 Fo 297 — Le dixième satellite de Saturne. . . 5 1066 Ravoxs. — Enroulement des rayons ‘cathodiques dans Sarurxe. — Le neuvième satellite de Saturne . :. 1242 un champ magnétique . . . + s + + + + + 236 | Savore. — La formation des vallées des Alpes de — Les rayons magnéto- cathodiques MR bare + Savoie . 4162 — L'inscription photographique de l'action des — Rose de ‘Géologie appliquées au départe ment MATIN OR 2 ee Cr2r de la Savoie 872 Réacriox. — La réaction de Friedel et Crafts : : : 140 | Scaxniuu. — Le spectre d'are du scandium et ses re ap- RÉFLEXION. — Une théorie mathématique de la réflexion ports avec les spectres célestes 142 de la lumière près de l'angle de polarisation. . . 488 | Scwxces. — Auguste Comte et l'histoire des Sciences. 10 Rérorue. — Les bienfaits de la réforme temporaire Sécrérion. — Sur la sécrétion du suc gastrique chez dans l'armée . . . . . Es EN l'homme 5 Réeracriox. — Indices de réfraction des éléments. : 41 — Sur le mécanisme chimique de la sécrétion gas- — La réfraction double dans un champ magnétique Quane Re AE Mo Mirti vec à proximité de raies d’ absorption ER D LME $ — Théorie. nouvelle des sé isme: Si 141 décomposées . . . . : : 440 — Le sélénium et les courants électriques. 446 — Indices de réfraction de l'acide sulfurique à difré — 11 Selenio- : 139 rentes concentrations. . . . . . . . 874 | Secs. — Recherches sur la vitesse de dissolution des RÉGÉNÉRATION. — Recherches anatomiques et biolo- sels dans leurs solutions aqueuses. S5 giques sur l'autotomie et la régénération chez SéRornéraPiE. — Les résultats acquis de la sérothé- divers Arfhropodes. . . . . « «, +. « « + + + + 1007 TADIO ANS tar etoile enr a ee UE 1140 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES SéRuM. — La combinaison chimique et l'action foxiaue SrecrRes. — Evolution du spectre d'une étoile pendant dans le sérum hémolytique . - . . . : . 9% sa croissauce d'une nébuleuse . . . . . . . . : — La nature de l'action opsonique du sérum ‘san- — Spectre de phosphorescence de l'europium pur . POTTER tn RS oi re 293 — Le spectre d'absorption et la fluorescence de la — Recherche expérimentale Sur la nature de la subs- vapeur de mercure. . . : tance du sérum qui influence la phagocytose . . 962 — An introduction to the study of spectrum analysis. SÈvE. — Sur la mécanique de l'ascension de la sève — Spectres de flamme. Variations spectrales d'ordre dans Ales ATOS EEE 920 (RETMIQUE MEN NAN NN SN Sexe. — Relation entre les chromosomes du noyau SPECTROSCOPE. — Le spectroscope à vision directe de et la détermination du sexe chez les Insectes. 1022 Blakesley à une seule espèce de verre . . Se SEXTANTS. — Appareil à vérifier les sextants. 441 | Srecrroscopie. — Handbuch der Spectroscopie. . : SEXUALITÉ. — Evolution des idées générales sur la SPHÈRES. — Les systèmes non linéaires de sphères en sexualité. 4re past : Des Anciens à la fin du CUS AS ME on 0 ate nlé ke à XVITIS STE Cle. > : 40 | Semicun Tuerzenr. — La transmission etl'inoculabilité — 2e partie : Dix- neuvième et vingtième ‘siècles . 65 du Spirillum Theileri Laveran. . . . . . . . SIBÉRE. — L'épaisseur des glaces en Sibérie . . . . 922 | Srarron. — Création d'une Station piolosiques aux iles SIDÉROLOGIE. — Eléments de Sidérologie. 1e partie : BERMUTES ER CE CEE Re CRE Constitution des alliages de fer et des scories. 481 STATIQUE. — Technische Statik . . . . : . . : SIGNAUX. — Les signaux de chemins de fer et le Block STEAMERS. — Un appareil pour enregistrer les vibra- system automatique. Mn tions /desssleamers PC EEE SiLrcIUM. — Recherche sur le spectre du silicium . 584 STÉRÉOSCOPE. — Stéréoscope dièdre à grand champ, SLVPLON. — Le percement du tunnel du Simplon. . LE A AMILOITADISSEC EUR PE EN CRETCRE Sinaï. — Sinaï-Ma än-Pétra (Sur les traces d'Israël et Suc. — Sur la sécrétion du suc gastrique chez l'homme. cheztlesANabatéens) REP RE EE 656 | Suc PyLokiQue. — Sur le suc pylorique. . . . . . Sixusires. — Traitement des sinusites frontales : : : 998 | Sucur. — La question du sucre et la Convention de SOCIÉTÉ. — Société de Géographie de Paris. 300, 449 Bruxelles. . . ste — Société de Géographie commerciale de Paris. . . 450 | — Le sucre dans l'alimentation des animaux. : — Société des Amis de l'Université de Paris . . . . 546 | Surrures. — La phosphorescence des sulfures alcalino- — La réunion extraordinaire de la Suciété géologique LJVRQLES à Eheig olive ‘de France à Turin (Septembre 1905). 92 | Suronaurre. — Les progrès de la surchauffe dans les Soie. — L'industrie francaise de la soie devant Ja con- machines à vapeur . . conrencenntennatonnle te IN TE 1069 | SurrAcEs. — Sur des faisceaux de surfaces algébriques. Souez. — Oscillation de l'activité solaire et du climat. 4% — Sur le rang de la courbe d'intersection de deux — La structure de la couronne solaire. . . |. 4103 surfaces algébriques à — La prochaine éclipse totale de Soleil . 665 — Les propriétés des sections de la surface de satu- — Périodicité de l'activité solaire et du climat. 195 ration d'un mélange binaire du côté des com- — Distances moyennes dans le système solaire . . 1017 DOSARIes PUR EE PLLON 2 9 gelée en Un | È — Détermination spectrographique de la parallaxe SURMENAGE. — Le surmenage des musiciens. solaire. . . 1017 | SynprowE. — Le syndrome de Ganser. : SORDRSe — La Physique des solides d' après les idées SyNruèse. — La syuthèse végétale des corps hydro- . Tammann . 135 carbonés . . : . SoL D — Sur les phénomènes présentés au sein SYPHILIS. — Syohilis et paralysie générale. des champs maguétiques par les solutions de — Syphilis ë matières colorantes. 143 | Svsrèue nerveux. — Manuel pour Î l'étude des maladies — Sur quelques particularités de l'osmose des solu- du système nerveux . : GS LINEAR tions aqueuses . 661 — Une formule pour la pression ‘osmotique dans les solutions concentrées dont la vapeur suit les lois T desgaz 112 — Déductions cinétiques de la loi de Van’t Ho par Tags. — Mal perforant buccal daws le tabes. rapport à la pression osmotique d'une solution Tagérique. — Crise de faux accouchement chez une diluée T2 LaDÉIQUEREMER RENE CEE — Sur les verres, les pellicules et les solutions mé- Tâsies. — Landolt-Boernstein physikalisch- “chuinische LALLIQUES PE MMENT RE PRE EL SL PARENT CRE 875 Tabellen eue Sozvanrs. — Les “hydrures ‘4 ‘halogènes comme soL TACHES SOLAIRES. — La quadrature mécanique des vants conducteurs. IIL. Les nombres de transport. 238 tachesiS0laMes ER ERNEEEEE Sons. — La sensibilité de l'oreille humaine pour des TanraLe. — La nouvelle lampe à incandescence élec- sons de différentes hauteurs produits par des trique au lantale . é tuyaux d'orgue. . . . 240 | Tcnan. — Les travaux scientifiques de la Mission de — Sur la pression du son dans l'organe de Corti. 748 délimitation du Niger au Tchad (Mission Moll) . — Amplitude du son impulsif minimum Pere pnble TecuniQue. — Physikalische Technik. . . . . BALOrC ILE SR EN ER 835 | TéLécrarnie. — Les arbres comme antennes de télé- — Nouveau procédé pour amorcer les forces au graphie !sans fl PEN RO CC ENT moyen de sons. 838 — Recherches sur l'influence de laterre dans la télé- — Sur la faculté de per ception pour les intensités de graphie sans fil. RS RENONCE, Ge : sons . 1120 TÉLÉGRAPHIE SOUS-MARINE. — Nouvel appareil enre- Soupax. — La valeur économique ‘du Soudan central. 409 gistreur pour la télégraphie sous-marine . du = SOUDE. — Sur la conductivité électrique et diverses TÉLÉGRAPHONE, — Le télégraphone perfectionné. propriétés de l'hydrate de soude en solution TÉLÉPHONE. — Un téléphone RYPIÉNIQUEN EEE aqueuse DÉMNDNECE d 41 | Température. — L'élévation moléculaire de la tempé- SOUPAPE. — Soupape à mercure pour trompes à eau. 292 rature critique la plus basse d'un mélange binaire — La conversion des oscillations électriques en cou- à composantes normales . . . . . : rants continus au moyen d'une soupape à vide.. 488 — La température a-t-elle une action sur le poids des — La lampe el la soupape à mercure de Cooper COTPS ANA TN Hewitt. 934 | Temps. — Concours international de prévision ‘du SrecrRe, — Etude détaillée des lignes ‘élargies du ti- LOTS EN NOR REIN NC CRE 13, tane, du fer et du chrome en rapport avec les TénaciTé. — Influence des changements de phase sur lignes du spectre de Fraunhofer . À ë A la ténacité des métaux ductiles à la température TE spectre ultra-violet du gadolinium. f 238 ordinaire et au point d'ébullition de l'air liquide. — Sur le spectre d'émission de l'arc électrique à à Ténéniere. — Huit jours à Ténérifle . . . . . à Reüteitens on ASP RNA NEEErS LORD Texsions. — Les effets des tensions momentanées — Note sur le spectre de y Centaure. $ 442 dans les métaux . . — Le spectre d'arc du scandium et ses rapports avec Tenne, — La siluation de la Terre dans l'espace . les spectres célestes . . . . 442 | Téranos. — Nouveau traitement du tétanos . . .: . . — Sur l'europium et son spectre ‘ultra-violet. 443 | Taacuruw. — Les gaz monoatomiques, le mercure, le — Recherches sur le spectre du silicium . . 584 thallium, le plomb, l'or dans la classification. — Spectres des métaux alcalins: centres d'émission Tuéonèues. — Les théorèmes de Guldin dans l'espace (ES 'UUTÉTEN TER ÉTIENNE ES 666 polydimensional , CRC CON 1066 41 446 190 796. 966 838 961 1038 TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES 141 Tnéorie. — Elements of Electromagnetic theory. . . 85 | Uxiversrrés. — Conseil de l'Université de Paris . 546 — La théorie des ensembles . 241 — L'enseignement des sciences appliquées à l Institut — Lecons élémentaires sur la thévrie € des fonctions de Physique de l'Université de Fribourg . É rire] BTALVÉQNER EE MR EM. © suite 138 | Uranus. — L'orbite du premier satellite d’° Uranus 965 — The dynamical theory of gases 915 | Urixe. — Le chromogène scatolique de l'urine et le — Le calcul des résidus et ses applications à à la théorie pigment qui en dérive : ACT. 1021 des TONCHONS --e- -e 100% | UroLoGiE. — Précis d Urologie clinique 88 Taermo-ÉLecrriciTé. — Thermo-électricité du fer et des ACIETS EE Me ee hÉNATORRAMAO ur AN TaoriAniTE. — La thorianite. . . . . . . . . . 191 V Tiser. — Le Tibet. Le pays et les habitants : . . 86 Tissus. — La nature de Ja réaction de l'argent dans les Vacne. — L'alimentation de la vache laitière et les tissus animaux et végétaux . . . . . . . . . . . 625 conditions de son rendement . 1067 ToxkiN. — La tuberculose AUMLONKIN CO Ac 115 Vazuées. — La formation des Alle es des Alpes Me Torocrapnie. — Topographie pratique de Reconnais- SAP OT PRE TT EN LUE 462 sance et d'Exploration . . . . . . . . . . . . . . 32 VAPEUR. — Détermination de la chaleur r spécifique de Toromérrie. — Lecons sur la topométrie et la cuba- la vapeur surchauffée . L ARS , 624 ture des terrasses. . . 453 — Les turbines à vapeur. . 831 Tonsamre. — L'huile minérale extraite de la torbanite Vécéraux. — Les végétaux iles de Ar ique ‘tropicale de la Nouvelle-Galles du Sud . . . . . . . . . . 920 francaise 1054 Tours. — Extraction et utilisation de la tourbe . 43 | Ven. — Influence du venin du cobra sur le métabo- Toxiwe. — Sur la chimie physique de la réaction toxine- lisme des protéides . . 626 antitoxine. . . . . . . . -. . +. : 625 | Verre. — Ebet des radiations solaires et d'autres radia- TRANSMISSION. — La transmission à distance des écri- tiona sir latcouleur duverrets 0 2700 349 tures et des dessins. . . . . . . . . - - . + . : 924 — Sur les verres, les pellicules et les solutions métal- Traxsrorr. — Etude sur l'emploi de l'air comprimé à liques LLPLE RS AC D AR PET QE DE | 875 haute tension comme moyen de transport méca- _ — Les colorations iridescentes sur le verre . . - 1067 nique souterrain . . . . . - + - 28 | Vraxoe. — La production du bétail francais et la con- Travair. — Travail et plaisir. Nouvelles ‘études expé- roma ton dela ane 819 rimentales de Psycho-mécanique. . . . . . - . 287 | Yiprarions. — Un appareil pour enregistrer les vibra- TREMBLEMENT DE TERRE. — Vitesse de propagation du oncles teams 213 tremblementdeterre du Guatémaladu19avril 1902. 585 — Une méthode pour ere DIE SUIES) bralione TRIANGLE. — La somme des angles du triangle et les électriques stationnaires DRE Te 714 hyperespaces . . : . .. . . : + + . + . - : LL | Vie. — Le radium pent-il donner la vie? s01 TRIBROMOXYLENE. — Sur les six ‘tribromoxylènes iso- nn ane le Dar ee du 1034 MOQUE RS Ne er loue à see 196 | Viçxe. — Etude générale de Ta Ce US EE TRIPRÉNYLMÉTIANE. _— Les idées actuelles sur la conslitu- VINIFICATION. — Vinification (Vin, seu de vie VI tion des matières colorantes du Triphénylméthane. 558 naigre) ù 531 Trompes. — Modifications aux trompes à mercure . . nee na led tentte tin à AS 786 — Soupape à wercure pour les trompes à eau. . . . 2%2 | Vision. — Deux cas de vision trichromique . . . 490 Trypaxosoma Bazsrantr. — Historique de la vie du Try- ro De srolorEeta ec line (umiere es panosoma Balbianii. . . . . . . . . . . . 816 RH ve NE 190 Tryraxosomes. — Les effets comparatifs des Try pano- ete Le problème cale francais . : 115 somes de la fièvre de Gambie el de la maladie du Vanne Venu 187 sommeil EU Jets LR ele gel e de 293 Vozcaxs. — Le mode de formation d' un ‘dôme yolca- Tsarisue. — L'empire russe et letsarisme. . . - . - 1055 nique et la cristallisation des roches éruptives TusercuLose. —Pseudo-tuberculose due à des lombrics. 409 quartzifères. é 301 — L'exode rural et la tuberculose à la campagne. . 436 — Les travaux récents de magnétisme ‘terrestre — La tuberculose au Tonkin. . . - - - - : ne 145 dans la France centrale. Le présent et le De — Le Congrès international de la Tuberculose. 800 magnétiques des volcans d'Auvergne. s01 — La prophylavie de la tuberculose à bord des de de CE 0 ne j 144 navireside commerce 204.0 -0."-0e 1: % EN BAD J ° a: ; — La tuberculose et l'habitation urbaine. . . . . . 881 — Les différentes formes cliniques et sociales de la wW # RBSrenIose PRQTAR A IN OS DER ee 959 u8es. — L'écoulement de l'eau à travers les tubes. 93 : 24 Tumeurs. — Sur les ressemblances qui existent entre W ee — La transformation des wagons de marchan- 100 les corps de Plimmer des tumeurs malignes et Pr ce EE SANT PART certains coostituants normaux des cellules Re RE ÉSSNEURE marchandises de gran es dimen- 389 ductrices des animauxs. ee 7190 sions. + . . +... - - - de Tunxez. — Le percement du tunnel du FAnpiee A Ir Turgines. — Les turbines à gaz. : . … 353 — Les turbines à vapeur. . . . . . . . . . 831 Y Tuvau. — La distribution de la vitesse sur la section d’un tuyau parcouru par un fluide visqueux . . 624 | Yeux. — Les yeux et l'adaptation au milieu chez les 4 TYROSINASE. — Présence d'une tyrosinase dans la peau animaux abyssaux . . . . . . DE - 324 detcertaimsiVertébrés 4. MU. Le. . 82 | Yuxxax. — Voyage au Yunnan. 139 U Z Universités. — L'enseignement technique dans les Uni- Zooco&iEe. — Traité de sosie Fascicule VI: Pois- versités. L'Institut électrotechnique de l'Université loss Duo OS NA ON EEE A SR EE RE .. 316 — Lecons de Zoologie . 1113 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS‘ A Abderhalden (A.), 540. Abelous (J.-E.), 235, 397, 400, 1059. Abney (Sir W. de W.), 836. Abraham (H.), 135, 184, 186, 348, 580, 584. Abraham (M.), 296. Abric (P.), 290, 582, 106, 143. Achard (Ch.), 35, 234, 486, 535, 961. Adami (J.-G.), 661. Adamovic (L.), 106%. Adensamer (A.), 1014. Adie (J.-R.), 746. Agazzotti (A.), 194, Agerer (F.), 628. Alagna (E .), 4015. Albanese (N.). 96. Albarède, 90. Albert-Lévy, 90. Alcock (A.), 746. Alexander (W.), 585. Alezais, 660. Algué (Rev. José), 871. Alix (J.), 184. Allemandet, 238. Allonnes (Ce =R. d'), 290. Allorge (Maurice) a 54. Alvarez (E.-P.), 484, 485, 533, 581. Amaduzzi (Lavoro), 139. Amagat (E.-H.), 135, 739. Amaun (M.), 183. Ambard (L.), 290, 659. Amet (P.), 486, 659, 660, 1010. Ammann (L.), 658. Ancel .P.), de 401, 744 Anderlini (T.), 795. Anderson (W.-C.), 137. Andouard (P.), 440, 535, 707. Andoyer GE ), 874. Andrè (Gh.), 290, 705. André (G.), 592 657, 1114. Andreasch (R.), 794. Andrew (G.-W.), 1012. 230, 1015. Andrews (A.-E.), 1063. Angeli (d’), 1015. Angeli (A) 193 1015. Angelico (F.), 193, 1045. re Le .):2239- Aoglas (J :h 579. Anthony (R +), à 399. Antipa (G.), : 339. Antoniou (A.), 744. Appleyard (R. }: 710. Archibald (E.-R 1.), 238. Ardern (Ed.), 581. Argand (E.) 534, 580. Arloing (F.), 235. Armagnat, 584. Armes (H.-P. ), 1012: Armstrong (E.-F.), 1011. Armstrong (H.-E.). 491, Arnaud (F.), 401. Arno (A.), 193 Arno (R.), 44%. Arnold (E. 662, 1011. 1 Les noms imprimés en caractères gras sont ceux des auteurs des articles originaux. Les chiffres gras reporlent à ces ar- ticles. Arsandaux (I.), 233. Arsonval (A. d'), 91, 236. Arth (G.), 654, 1006. Arthaud-Berthet (J.), 580. Artmann (P.), 741. Artom, 296. Aschkinass (E Assheton (R.), Astruc (A.), 3 Aten (A.-H.-W.), Atkin (E. ah Fri Atwater (C.-G.), 627. Aubertin (Ch.), 134, 184, 185. Auché (B.), 135, 1011. Auger (V.), 399. Aul4 (S.-J.-M.), 1011. Auric, 189, 874, 960. Austen (P.-C.), 1062. Austin {L.), 351. Autonne (L.), 393, 480. Azambuja, 399. Azara Res de), 1006. Azzarello (E.), 1015. 2) 2ÉÈE 919 ee Babes (A.), 132. Babès (V.), 918. Babinski (J.), 961. Bachelier, 960. Backmann (E.-L.), 623. Bacovesco (A.), 918. Bagard (P.), 745. Baillaud (Emile), 423 à 432. Baire (René), 914. Baldit (A.), 1009. Ball GES), 188. Ball (W.-C.), 539. Baly (E.-C.-C.). 402, 792. Balzer, 1010. Bamberger (M.), 194. Bancel, 623. Banzet (S.), 231. Bar, 7017. Bar (P.), 290. Barbieri (G.), 296, 444. Barbieri (N.- ne 581. Barbillion (L. Bardin, 742. Barger (G.), 192. Barkla (Ch. -G.), 489. Barlow (P—S.), 1119. Barnes (E.-W h aile Barnes (H.-T.), 9 Barnett (S.-J.), 85. Barral (E.). 394. Barratt (J.-O. W.), Barret (G.), 1416. Barrier, 961. Barriol, 393, 529. Barthe (L.), 134, 488. Basset (H. jun.), 398, 537. Bassot, 398. Bastian (H.-C.), 586. Bateson (W.), 1011. Battelli (A.), 193. Battelli (F.). 90, 91, 134, 185, 346, 484, 286. 533, 105, 961, 1059, 1114, 1416. Baty (E.-J.), 403. Bauby, 400. Baud (E.), 651. 1061. Baudouio (M.), 183. Baudran (G.), 143, 1114. Baudran (J.), 398. Baudry de Saunier (L.), 101. Baumgartner (F.), 956. Baxandall (F.-E.), 40, 442. Bay (J.), 184, 346. Bayeux (R.), 705. Baylac, 90. Bazin (Alb. ), 439: Beaufils, 235. Beaujard (E. je 184, 185, 707. Beaulard , } 960 Beauverie (J.), 1442: Becke (F.), Da 628. Becquerel (H.), 105, 874. Becquerel Ph ne 439, 622. Beddle (CL), 7 Béhal (A.), En a. Bebhn (U.), 351. Beilby (G.-T.), 488, 961. Beilby (H.-N.), 961. Beille (L.), 707. Bell (G.-A.), 187. Bellars (A.-E.), 350. Bellenoux (E.-S.), 484. Bellet (F.), 134, 185, 290, 346. Bellet (H.), 581. Bellieni, 236. Belloc, 285, 485. Bellot, 38, 135. Bellucci (J.), 138, 296, 44%, 1015. Belot (E.), 1115. Belot (J.), 437. Belzecki, 438. Belzer (A.-H.-J.), 140. Belzung, 1113. Bemmelen LE -M. van), 140, 796. Bendersky, Benedicks {Cail), 33. Benjamin (H.), 622, 960. Benndorf (H.), 1014. Bennett (H.-G.), 350. Benoist (L.), 439, 660. Bérard (Victor), 1055. Berger (Paul), 231, 398, 622. Bergeron (J.), 235. Berget (A.), 89, 106, 738. Bergonié (J.), 38, 135, 235, 398, 431, 441" 581, 623. Bergt (W.), 588 Berlemont (G.), Bernard (ee 1h De Bernard (K.), 341. Bernard (L} 38, 134, 1059. Bernard (N.), 485. Bernstein (S.), 12 580, 918. Berthelot (M.), 133, 116,345, 3987 399, 484. 533, En Bertin (E.), 183, 439 Bertin-Sans (H.), 184, 235. Bertrand (G.), 92, 136,,451 à 461, 106, 743, 1061. Bertrand (Léon), 234. Bertrand (Marcel), 1015. Berwerth (F.), 239, 664, 795. Bes (K.), 712. Besson (L.), 399. Bettencourt, 961. , Betti (M), 138. Beyerinck (M.-W.), 352, 964. Bianchi (L.), 393, 1014. 618, 835. 1038. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1143 Bichat (E.), 742. Bouman (K.-H.), 664. Bureau (Ed.), 874, 1058. Bidet (F. Ye 142. Bouman (Z.-P.), 963. Burford (S.-F.), 491. Bierry (H.). 439, 440, 536, 582, 705, 190. Bounhiol (J.-P.), 89. Burgess (C.-H.), 93, 349. Bigart, 1059. Bourdon (B.), 958. Burke (J.-B.), 624. Bigot (A.), 1009. Bourgeois (R.), 32, 433. Burnet (Et.), 1859. Bigourdan (G.), 132, 234, 399, 918. Bourget, 960. Burrard (S.-G.), 661. Billard (A.), 659. Bourguignon (Mlle). 235. Burrows (H.), 403. Billard (G ), 134, 185, 235, 290, 346, 486, Bourguigoon (Mme,, 744. Busquet (H.), 659. 623, 707, 790, 961, 1010. Bourquelot (E.), 398, 400, 658, 659, 918, | Butte (L.), 185. Billet (A.), 134, 290, 346, 441, 485, 583, 961. 1059. Bousfield (W.-R.), 41, 585. Billet (J.), 535. Boussac (1J.), 1009. C Billy, 399. Boussinesq (J.), 89, 233, 289, 398, 657, | Cadiot, 346. Binet (A.), 34, 1069. 105, 742. Cain (J. -C.). 94. Binet (M.), 706. Boutan (L.), 622. Caldarella (A), 1015. Binet du Jassonneix, 371, 706. Boutroux (P.), 742, 1009. Callendar (H.-L.), 188, 586, 1012. Bisanti (Ch.), 134. Bisselick (J.-W. van), 712. Blackman (Ph), 1062, 1419. Blackmann (K. E.), 790. Blaise (E.-E.), 31, 132, 184, 237, 289, 346, 538, 539, 6: 8, 109,744, 745, 746, 1009. Blake (GES): 791. Blakesiey (T.-H.), 1062. Blakey (W.), 492. Blanc (G.), 37, 90, 1015, 1061. Blancarnoux (Paul), 131. Blanchard (R.), 532. Blanksma (J.-J.), 140, 748, 796. Blarez (Ch.), 235, 707. Blaringhem (L.), 38, 184, 582, 1058. Blasdale, 540. Blau (Edm.), 628. Bloch (A.-M.), 235, 582, 961. Bloch (Eug.), 533, 583. Blok (S.), 96. Blondel (A.), 657, Fe Blondel (Georges), Blondlot (R.) es à 728. Blumstein (F.), G12 à 648. Bocher (M.), 399. Bock (F.), 295. Bodroux (F.), 439, 621, 706. Bæckel (J.), 918. Bærnstein (R.), 833. Boëseken (J.), 4140. Boggio (T.). 138. Bohn (ess 440, 531, 1059, 1115, 1116. Boinet (E.), 234, 583, 660, 834. Boissoudy (Jean de), 328 à 234. Boistel (A.), 657. Belk (L.), 664, 748, 796. Bollemont (voir Grégoire de Bollemont). Boltzmann (A.), 96, 139. Bondi (E.), 794. Bondouy (Th.), 582. Bone (W.-A.), 626, 661, 1012. Bongiovanui (A.), 1015. Bonjean (Ed.), $9. Bonnamour (S.), 185. 744. Bonnier (G.), 439. Bonnier (P.), 290. Borcea (J.), 289. Bordage (Edm.), Bordas (F.), 439. Bordas (L.), 91, 1009. Borde (P.). 398, 621. Borel (Emile), 183. 653. Borel (K.), 184, 234, 960. Borrel (A.), 90, 91, 290, 486. Borrelly, S9. Bosc (Ed.), 235. Bosc (F.-J.\, 90, 233, 400, Bottasso (M), 621. Bottomley (J. 2T.), 1062. Bouchet (P.), 485. Bouchonnet (A.), 90, 621. Boudouard (O.), 89, 623, 742. ‘Bougault (J.), 40, 488. Bouin (P.), 86, 91, 401,589, 744. Boulanger (A.), 869. Boule (M.), 234, 622, 657. Boullanger (E.), 289. Bouiouch (R.), 742. Boulud, 43S, 660, 706, Boulvin (J.), 1052. 186, 702, 1007. 535, 189. 143, 835. 706, 1009, 135, 288, 290, 401, 583, Bouty (E.), 657, 742. Bouveault (L.), 90, 136, 187, 233, 349, 320 à 326, 621, 657, 105, 710. Bouvier (E.-L.), 234, 289, 439, 960, 1008, 4057, 1058. Boyd (D.-R.), 1012. Boyé, 38. Boyer (Jacques), 285. Boy-Teissier, 583, 660. Braillon (L.), 1011. Brame (J.-S.-S.), 491. Branca (A.), 397. Brandeis (R.), 135. Brankow, 711. Branly (Ed.), 345, 657. Brasil (L.\, 286, 288, 345. Brau, 789. Brauns (R.), 711. Brearley (Harry), 916. Bréhon, 133. Breteau (P.), 399. Breton (M.), 346, 141, 743. Breuer {J.), 404. Breuil (P.), 288, 484, 657. Breydel (A.), 345. Brezina (A.), 96, 1014. Briançon, 917. Bridre (J.), 707. Brillouin (M.), 288, 657, 916, 1115. Brindeau (A.), 134, 1058. Briot (A.), 91, 231, 290, 583, 660, 834. Brissemoret, 1058, 1059. Brives (A.), 184. Brizi (U.), 194. Broca (A.), 345, 483, 485, 536, 620, 657, 959. Broch (Ph.), 1013. Brochet (André), 40, 233, 289, 292. Brock (A.-J.-P. van den), 796. Broquin (L.), 1053. Brouardel (P.), 90. Brown (A.-J.), 1013. Brown (J.-C.), 350, 792. Brown (H.-T.), 443, 586. Browning (H.), 94. Bruch (E.), 90. Bruchat (J.;, 234. Bruckuer (C.), 588. Brübl (J.-W.), 626. Brumpt (E.), 623, 660, 961. Brunel (L.), 93, 133, 346. Brunelli (G.), 794. Brunet (Louis), 230, 286, 344, 404, 588, 628, 664, 795, 871, 872, 916. 1064. Brunhes Bernard), SO4 à 814,918, 1009 Brunhes (Jean), 342. Bruni (G.), 1382 296. Brunon (R.). 439. Bruns (H.), 128. * Brunswick Le Bihan, 582. Bruntz (L.), 744. Bruyant (Ch.), 235. 346, 701. Bruyn (H.-E. de), 748. Buchanan (J.-Y.), 491. Büchner (E.-H.), 240, 796. Buhl (A.), 132, 742. Buisson (H.), 487. Bukowski (G. von), 352. Bulloch (W.), 293. Burch (G.-J.), 790. Burdett (T.), 626. Calmette (A.) 346, 141, 143. Calzolari (F.) 444 Cameron (A). 71 Ca nescasse (J.) NES: Camichel (C.), 132, 1 Campana (D. del), 139. Campana (Ml: R.), 1011. Campbell (A-W.) 293, 349 Campbell (J.-E.), 661. Camus (J.), 1009, 1010, 1059. Camus (L.), 346, 657. Candlot (E.), 85. Cane (J.-C.), 792. Cantacuzène (J.), 961, 1010. Cantin (G.), 31. Capelli (A.), 444, 793. Capitan, 132, 657, 106, 744 Carapelle, 1015. Cardinaal (J.), 44, 239. Carey (E.), 138, 491. Carles (J.), 235. Carlson (A.-J.), 1011, 1116. Carnot (P.), 134, 184, 185, 400, 440,£486, 659, 660, 707, 961, 1010. Carpenter (R.-F.), 188. Carpini (C.), 138. Carré (H.), 31, 289, 580, 789. Carré (P.), 289, 918, 1057, 1061. Carrel (AL.), 1011, 1059. Carrière (G.), 390. Carrus (G.), 288. Carrus (S.), 132. Carson (Ch.- -M.), 587. Cartaud G.), SA à 65, 105. Carulla (F.-J.-R.), 295. Case (W.-L.), 627. Cash (J.-Th.), 875. Caspari (C.-Ed.), 84, 129. Castel (R. du), 658. Castellana (V.), 444, 793, 1015. Castelnuovo (G.). 132, 793. Castex, 90, 184, 707. Catel (..\, 133, 237, Cathelin (F.), 440. Catouillard (G.), 134, 185. Caullery (M.), 290, 324 à 340, 346, 400, 440, 580, 582, 190, 1011, 1057. Cautru, 743. Cavaillès (H.), 377 à 783. Cavalié (M.), 135, 235, 347, 486. Cavalier, 623. Cavallier (C.), 398. Cavaroz, 535. Cavatorti (P.), 1015. Caven (B.-M.), 710. Cayeux (L.), 89, 485, 657, Cazalbou, 400. Cernovodeanu (Mlle P.), 534, 535. Cesaro (E.), 701. Chablay (E.), 485, 533, 534. Chabrié (C.), 90. Chaïne (J.), 38, 288, 347, 486, 534. Challamel (A.), 233, 288, 345. Chalimers (S.-D.), 294, Chamberland, 38. Chanoz (M.), 89, 345,438, 706, 742, 1057, 1114. Chantemesse (A.), 184, Chapman (L.), 349, 626. Chappellier (A.), 346. Charabot (Eugène), 130, 233, 289, 1057, 033, 531, 530, 14% 106, 874. 185, 346, 347, 234, 658, 960. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEU RS 4144 Charles-Roux (J-.), 90. Charpentier ( P.-G.), 189, 835. Charpy (G.), 742, 1145. Charrin (A 134, 183, 234, 438, 439, 580, 658, 705, 707, 189. Chassevant (A.), 184, 400, 440, 623, 659, 707. Chattaway (F.-D.), 137, 294, 662. Chauffard, 706. Chautard (J.), 345. Chauveau (A.), 346, 438. Chauvel, 90, 133, 184, 399, 582, 622, 1115. Chavanne, 132, 233, 348, 438. Chella (S.), 193. Chevalier (Aug.), 234, 395, 580, 1009, 1054. Chevalier ; 290. Chevrel (F.), 1059. Cher oUbE (J.), 290, 400, 705. Chick (Mie H.), 835. Chifflot {J.), 535. Chikashigé (M.), 627. Chistoni (C.), 296, 444, 793. Chofardet (P.), 132, AA u 743. Chree (C.), 188, 238. 349. Chrétion (H. V 1322 1114. Chrétien (P.), 658. Christens (S. \, 236. Chuard (E.), 533. Chudeau (R.), 918. Ciamician (G.), 444, 1015. Cipolla (Mile J.), 296. Claffin (A.-A.), 491. Clarke (R.), 10 qe Claude (A.), 932 à 983, 1071 à 1083. Claude (Georges), 129, 1057. Claude (H.), 1010. Clavari (E.), 1015. Claverie Que Claxton Clayton Clément (E. Clerc (A.), 6 Clerget (P.), 6, 36, 50, 145, 194, 232, 246, 357, 409, 4 19, 633, 649 à 65®, 666, 715, 141, 841, 880, 882, 927, 1070. Clerici (E), 139, 296, 194. Cligny (A.), 234, 713. Clinton (W.-C.), 402. Cluzet, 439. Coates (J.-E.), 626. Cobb (J.-W.), 588. Codazzi (R.-Lleras), 230, 916. Cohen (E.), 140. Cohen (J.-B.), 350, 792, 1012, Cohn (Emile), 239. Coker (E.-G.), 93. Colani (A.), 658. Colardeau (E.), 530. Coleman (W.-H.), 587. Colin (Le P.), 485, 581. Collie (J. N.), 192. Collin (R.), 135, 236, 744, 1059. Collot (L.), 1058. Colombino (S.), 622. Colombo, 133. Colson (A.), 40, 89, 184, 398, 580, 743. Colson (Léon), 397. Comas Sola (J.), 960. Combes (R.), 1058, 1059. Comte (C.), 235, 486, 659, 744. Conduché (A. ) 253, 293. Conrad (V.\, Considère, 133, 83. Constan (P. ), 128: Contremoulins (G.), 658. Cooper (W.-R.), 188. Copaux (H.), 289. Corbino (0.-M.), 444. Cordier (M.), 659. Cornil (V.), 346, 789. Corton (F.-R.), Cosserat (Eug.), 3 Cosserat (l°r ss 2 1013. 105, Coste (M.), 1009. Cot (Ch.), 134. Cotton (A.), 347, 661, 743, Cotton (Em.), 233, 705. Coudray (P.), 346, 789. Courcoux, 90. Couréménos (Ac), 580. 389, 1000. Courtade , 90. Courltet (E ); 221183. Courtot (A.), 184, 237, 539, 658, 145, 1009. Couteaud, 485, 706. Coutière (H.), 289, 345, 439, 706, 142 Couturier (F.), 345, 657. Couvreur (E.), 134, 290, 400, Coux (A. de la), 654. Cox (John), 179. Coyne, 235, 347, 623. Craw (J.-A.), 625. Crémieul(W-),M89;,"91; 1UGL. Cristiani (Mme H.), 400. Cristiani (H.), 134, 185, 290, 400, 440, 486. Crocco (G.-A.), 37, 138. Crookes (Sir William), 238, 349, 443, 875, 961. Crosland (P.-F.), 7 Crossley (A.-W.), re ; 192: Cruchet (R.), 38, 235. Caboni (G..), 194. Cuénot (L.), 134, 579, 582, 7817, 1054. Cunningham (E.), 238. Curie (P.), 291, 657. Curot (Edmond), 230. Curtin (F.), 582. Curtis (E.), 621, 622, 659. Cuthbertson (Clive), 41, 875. Cyon (Elie de), 703. Czapski (S.), 443. Czuber (E.), 784. Czudnochowski (B. von), 193, 832. 658, 705, 438, 960, 1009, Dakin (H.-D.), 587, 919. Dale (Mie E.), 626. Dalemont (J.), 233 à 926. Dalhuizen (Mille A. A.), 712. Damond (E.), 918, 1058, 1117. Damour (E.), 581. Daniel (L.), 706. Daujou (Eum.), 658, 659, 918. 961. Danne (J.), 133. Darbishire (F.-V.), 1119. Darboux (G.), 132, 288, 345, 835, 874 Daremberg (G.), 959. Darier, 38, 90, 133, 1010, 4116. Darré, 623. Darwin (G. H.), 836. Darzens (G.), 37, 92, 132, 487, 1057. Dassonville (Ch.), 1010. Dassonville (G.), 1010. Dastre (A.), 485. Daublebsky von Sterneck, 588. Daunay, 290, 707. Dauphin (J.), 874. Davies (J. H.), 625 Davies (L. J ), Davies (Th. H. | Davila (Ch.), Davis (B.), 403. Dawson (H. M. Pl Dean (George), Debeyre (A.), nn Debierne (A.), 789. Deenik (A.), 1120. Defant (A.), 404. Dehon, 535, 582. Dejust (H.), 485. Dekhuysen (M. C.), 44, 796. Delacroix (G.), 289, 533. Delage (A.), 37, 581. Delage (Y.), 534. Delamarre (G.), 535. Delépine (M.), 1114. Delezenne (C.), 1057, 1059. Delion, 961. Dell'Agnola (GC. A.), 1014. Delore (X.), 743. Del-Re (A.), 1014. Demangeon (A.), 1111. Demenge (Emile), 298, 1052. Demeny (G.), 431. Demolis (Ed.), 701. Lemoulin (Alph.), 484, 581, 142, 835, 480, 618, 915, 814. Denier, 789. Denigès (G.), 235, 486. Denning (A.-D }, 586. Denso (P.), 234. Depéret (Ch.), 581, 1009. Deprat (J.), 132, 580, 705, 4115. Derrien (E.), 345, 484, 581. Desch (G. I1.), 402. Desfontaines (M.), 485. Desfosses (P.), 123 à 42%, 232, 437, 483, 917,1008. Desgrez (A.), 136, 398, 400, E80, 582. Deslandres (H.), 371, 399, 438, 789, 835, S14. Desplantes (G.), 398. Devaux-Charbonuel, 292, 621. Dévé (F.), 134, 235, 659, 707, 961. Deventer (Ch. M. van), 140. Dewar (sir J.), 238, 836. Deyrolle, 290. Dhéré (Ch.), 1009. Diener {C.), 628. 1014. Dienert (F.), 133, 1005. Dienes (P.), 233. Diesen (G. van), 140. Dieulafé, 134, 400. Dilthey, 239, 588. Dimmer (F.), 1014. Diues (W. H.), 661. Dinesmann (A.), 706. Dinkhauser (J.), 628. Ditte (A.), 484. | Divers (E.), 137. Divine (R. E.), 138. Dixon (A. E.), 491. Dixon (H. B.), 443, 710. Dobbhie (J. J.), 350. Doelter (C.), 139, 194 Doléris, 1115. Donau (J ), 295. Done (E.), 539. DORE 90. Dop (P de Die Dopter (Ch.), 235, 290, 346, 347, 660. Dor (L.), SET Doran (R. E.), 3 Dorello ( (P.), 794 Dorléans (ü.), 661. Dorp (A. van), 964. Dourlen (J.), 580. Doulté (Edmond), 578. Douvillé (H.), 399. Douvillé (R.), 658. Douxami (H.), 1112. Dover (Mile M. V.), 1063. Downing (W.), 746. Doyon (M.), 91, 134, A 346, 347, 400, 440, 485, 535, 619, 744 | Drabble (E.) ji Dreaper W. P.), 350. Driencourt AL .), 183, 288,932 à 983, 1071à 10 Drouin de Bouville (de), 582., Drysdale (C. V.), es Drzewina Me A.), 9 Duane qe ), 288, Lr Dubard (M.), 1087. Duboin (A.), 742, 159. Dubois (de Berne), 344. Dubois (Ch.), 1010. Dubois (Eug.), 1016. Dubois (H.), 234 Dubois (R.), 38. Duboseq (0.), 835. Dubreuil (G.), Dubuisson, lot, Sos, 1059. TABLE ALPHABÉTIQUE Duché, 622. Duchemin (R.), 580. Duckworth (H. S.), 1120. Duclaux (J.), 237, 580, 581. Ducloux (E.), 1058. Ducloux (E. Herrero), 285, 1010. Ducrot (R.), 135, 235. Duddell (W.), 39. Dufet (H.), 135, 486. Dufour (A.), 583. Duhem (P.). 834, 1057. Dumont (J.), 433, 439, 1009. Dunn (J. T.), 42, 188. Dunstan (A. E.), 94. Dunstan (W. R.), 443, 791, Duparce (L.), 153, 621. Duvond (R.), 582. Durante, 485, 622. Duregger (W. ), 588. Darham (Mie FI. M.), 42. Duval (H.), 706. Dyk (G. van), 664. Dyke (G. B.), 402. 875, E Easton (G:), 44, 795. Ebert (W.), 533, 657, Edgar (E. EC 710. Edéins (J.-S.), Edridge-Green (Fe -W.), 490. Edwards (C.-"7.), 403. Effront (J.), 708, 960. Eginitis (D.), 874. Egoroll :N.), 438. Ebrenfreund (B.), 741. Ebrenhaft (F.), 664. Ebrlich, 534. Ehrmann, 706. Einthoven (W.), 44, 512. Elder (H.-M.), 188. Elot (A.), 707. Emich (E.), 295, 7#1. Emrys-Roberts (E.), 586. Enriques (F.), 132, 288. Eredia (F.), 138. Esclangon (E.), 485, 621, 789. Escombe (F.), 586. per Cr G.), 670 à 6S3,1110 Etard (A.), 621. Etienne 1Ge ), 660. Ewart (A. J.), 42. Ewbank (E. ). 192. Exner (F.), 664, 1014. Exner (S.), 795. Eydman (F.-H.), 796 Eynon (L.), 94 1063. Fabre (Dr), 582. Fabre (L.-A.\, 874. Fabre (P.), 584. Fabry (Ch.), 288, 398, 484, 1114, 1115. Fabry (Eug.), 438. Fage (L.\, 103, 1058. ire (L.), us. antappie (L.), 296. Farahent. NT Farmer (J.-B.), 790. Farr (C.-C.), 584. Fatou (P.), 183, 288. Fauré-Frémiet (E.) 38, 582, 1011. Faurot (L.), 1057. Fauvel (P.), 534. Fawsitt (Ch.-Ed.), 490. Fayet (G.), 37, 89, 133, 183 Fehr (H.), 128, 617, 701, Feliciani (C.), 444. Fenton (H.-J.-H.), 626. Féré (Ch.), 134, 185, 287, 290, 400, 456, 535, 622, 659) 789, ue 1116. Ferguson (W .-C.), 7 Fernbach (A.), 37, 90, “ins, 534, 581. 483, 534, 599 à 640, 1063. 185, 3417, 400, 138, 831, 914. Fernet (Ch.), FE ne Ferrari (A.), Ferrié (G Ferro (A), : Féry (Ch.), 89, 133, 184. Ficheur (E.), 705. Ficker (H. von), 239, 404. Field (A.-M.), 488, 661. Fierz (H.-E.), 587, 662. Fierz (H.-T.), 188, 662. Findlay (Al.). 491, 626. Finger (E.), 664. Fiozi (F.), 138, 628. Fischer (Em.), 238, 540. Fischer (E.), de Kribourg-en-Brisgau, 1120. Flamand (G.-B.-M.), 399. Flaschner (0.), 794. Eleig (C.), 235, 534, 535. Fleming (J.-A.), 188, 402, 488, 710, Fleurent (E.), 90. Fleury (Maurice de), 231, 706. Fliche (P.), 484. Floquet (G.), 228. Foa (C.), 535, 623, 659, 707. Foà (Miie A.), 139. Fontan, 289. Font-Réaulx (de), 1058, 1115. Fonvielle (W. de), 398, 621. Forbes (G.), 294. Forcrand (R. de), 345, 438. Forel (K.-A.), 289, 395, Forrest (C. =N)) ), 491. Forster (M.-0.), 188, 443,490, 587, 661.662. Fortin (Ch.), 288. Fortineau (L.), 134. Fosse (R.), 534, 581, 900. Fouché (M.), 133, 233. Fouët (Ed.-A.), 738. Foureau (F.), 89, 484. Fourneau, 621, 624. Fournier (E.), 89,234, 289, 345, 960. Fourtau (R.), 132. Foveau de Courmelles, 129, 288. Fowler (G.-J.), 587. Fox (F.), 349. Fox (J.-J.\, 1012. Franca (C.), 290. 440, 961. Franche (G.), 738. Franchimont (A.-P.-N.), 1120. Francois, 743. Francois (L.), 918. Francois (M.), 398, 657. Francois-Frank, 183, 481, Frankland (P.-F.), 539, 710. Fras (S.), 1059. Frasch (H.-A.), 138. Frass (E.), 711. Fraysse (A.), 133, 183. Frébault (A.), 438. Fréchet (M.), 789, 288, 345, 1057, 1114. Frederieq (Léon), 517 à 528. Freer (P.-C.), 343. Frémont (Ch.), 658, 742, 189. Freundler (P.), 346, 67, 109, 918, 1058. Frick (J.), 571. Frielberg (S. von), 444. Friedel (G.), 345, 398. Friedel (Jean), 132. Friedmann (H.), 1120. Friend (J.-A.-N.), 539. Frigoff (Mlie S.), 440. Frobenius, 588. Froin (G.), 660, 1011. Fron (G.), 484. Frouin (A.), 400, 439, 440, 486, 582. 623, 1 716. 1115. Fubini (G.), 138, 44%, 793, 1014. Fuchs (C.), 538, 622 Fuchs (R.), 918. G Gagnière (J.), 184, 235. Gaillard (G.), 289. Gaillard (L.), 486, 961. Gain (Edmond), 578. DES AUTEURS . Geest (J.), 1145 Galavielle, 1116. Galine (L.), 530. Galippe (V.), 658. 706. Gallaud (LL), 1114. Gallo (G.), 296. Gallois (Eugène), 33. Gamba (P.), 138. Gamble (F.-W.), Gardiner (J. A.), Gardner (W.-M.), Garnett (J. C. M.) Garnier (L.), 401. Garnier (M.), 535, 1010. Garrelon (L.), 707, 743. Garrigou- Lagrange (P.), 742. Garrigue (L.), 658, 659, 961, Gatin Mue C.-L h 535. Gatin (C.-L.), Gatin- ARE (Mme J.), 290. Gatin-Gruzewska (Mme Z,. }, 582, 701. Gatoux (Adrien), 701. Gaubert |P.), 33,833, 983 à 993,1054 Gaudechon, 345. Gaudry (A), : Gault (H.), 441, 538, 7 Camion L.), 743. Gauthier (C.), 660. Gautier (Armand). 87, 136, Gautier (CI.), 134, 401, 535. Gautier (L.), 534. Gautier (R.), 398. Gautrelet (J.), 38, 90, 135,235, 623, 707, 1011. Gaver (F. van), 660. Gay (Alfred), 13:,394. Gebhard {L.), 710. Gebhardt (A.). 140. Gebrcke (E.), 95, 404, 193 Geisperger (E.), 1013. Gellé (E.), 134, 235, 582, 622. Gelmo (P.), 628. Gemelli(F. A.), 961. Gendre (E.), 38,/441. Gentès, 38, 135. Gentil (L.), 89, 484, 622, 651. Georgiades (M.), 132. Gérard (Er.), 299. Gérard (T. A.), 492. Géraudel (E.), 2485! 346, 535. Gerber (C.), %01, 439, 451, 484. Gernez (D.), 484, -483, 593, 651. Gervais- tiellemont. 139. Geyer ((G.), 1014. Giacobini, 37, 399. Giard (A.), 38. Giesbrecht (W.), 346. Gilardoni {H.), 484. Gilbert (A.), 90, 91, 134, 235, 400, 582, 622, 623, 659, 707, 743, 1115. Gilles, 151. Gineste (Ch.), 1114. Giolitti (F ) 396. Giran (H.) 657. 539, 1118. 1062. 492. , 875. 1061. 662. 440, Girard (A. Gb, 345. Girard (J.), Girard | 235, 440. (P°),-438- P.), 184. , 657, 1010. : 480. Godard {F.), 668. Godchot (M.), 133, 187, 234, Godefroy (L.), 288. Gæbel (Q.), 290. Gold (E.), 1119. Goldberger (F.), 747. Goldschmidt, 485. Goldschmiedt, 1013. Goldziher (Ch.), 1009. Gompel (M.), 346, 400. Goodrich (E. S.), 661. Goodwin { W. L.}, 710. Gordon (Maria M. Ogilvie), Gorescu (C.), 1010. Gorini {C.), 1015. Gorter (A.), 664. Gosio (B.),1015. Gouin (A.), 440, 535, 707 245, 705. 130. Gouin (Raoul), 916. Gouldeu (J.), 1059. Goulding (E.). 1063. Goupil (P.), 189, 1053. Gourdon, 961. Gouré de Villemontée (P.), 706. Gradenwitz (A.), 190, 354, 540, 592, 663, 111, 925, 967, 1063. Graetz (L.), 443. Grate (V.), 404, 492. Gramont (A. de), 8172, 1053, 4111. Granderye (L.-M.), 1053. Grand-Eury,399, 439, 1058. Granger (A.), 399,581, 710, 786. Grassberger (R.), 795. Grassi (B.), 149, 794. Grassi (U.), 1014. Grassmann | Herbert Gravier (Ch.), 398, 581, 1114. Gray (A. W ), 712 Gray (R. W.), 587. Gray (Th.), 95. Graziadei (H.), 628. Greftulhe, 290, 535. Grégoire de Bollement, 708. Gregory (R.-P.), 1014. Gréhant (N.), 90, 399, 581,706, 744, 1116. Grenard (K.), 86. Griffin (M. L.), 295. Griffon (Ed.), 484. Grignard (V.), 658. Grimbert (L.), 4010. Gros (H.), 707. Gross (Fr.), 134. Grérsnien (J.), 184, 491, 662. Guarini (Emile), 968. Guarrigue (L.), 623. Guébhard (A.), 38, 39, 186, 345, 533, 580, 835, 918. Guédras (M.), 31, 438. Guéguen (F.), 185, 813, 1011, 1058. Guégen | (BAS 234. Guende (Mie B.), 398, 400, 580, 582. Guéniot, 38. Guerbet (M.), 235, 1010, 1058. Guérin (Paul), 436. Guglielmivuetti, 399. Guglielmo (G.), 138, 296. Guiart (J.), 532. Guichard (C. ), 105, 1145. Guichard (Marcel), 394. Guiche (duc de), 484. Guignard (L.), 658, 742. 855, 960. Guiilain (G.), 13%. Guillaume (:h.-Ed.), 187, 291, 85, 135, 1179, 487, 108, 871, 1005, 1020, 1066. Guillaume (J.), 13. Guillemard (H.), 485, 582, 41058. Guilleminot (H.), 318, 706, 742. Guillet (L.),183, 185,319,657, 658,1705,835. Guilliermond (A.), 235, 835. Guillon (J. M.), 703. Guilloz (Th.), 91,1 Guinchant (J.), 693. Guiraud, 959. Guitez, 90. Guntz (A.), 229, 398, 537, Guslavson (G.), 399. Guthrie (C. C.), 1041, 1059. Guttmann (L.-F.), 592. Gutton (C.), 288, 708. Guye (Ch. Eug.), 184,229, 233, 533, 654. Guye (H.), 533. Guye (Ph.-A.), 485, 534, 658, 255 à 232,833, 1057. Guyénot (E.), 535. Guyot (A.), 133, 183,184, 237, 533, 537, 538, 580, 144, S92 à VOA. Guyou (E.), 580. Gwyer (A. G. C:), 294. 35, 236, 441, 1039. 398, 439, 484, 6S3 à 709, 744 H Haaland, 91, 235, 341. Habets (Alfred), 480. Hachet-Souplet (P.), 707. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Hackford (J.-E.), 94, 1119. Hackspill (L.), 705. Hadamard (Jacques), 194, 233, 499 à 504, 1785, 789, 1009. Hadfield (R.-A.), 238, 746. Haentzschel (E.), 403. Haerdtl (H.), 664. Hahn (0.), 585. Hall (A.-D.), 661. Haller (A.), 31, 132, 183, 184, 234, 289, 348, 485, 543, 580, 622, 658, 1009, 1061, 1114. Hallez (P.\, 233, 1009, 1058. Hallion, 288, 483. Hallopean, 1010. Halluin (Maurice d’), 188, 1010. Halphen (G.), 401, 534. Hamburger (H.-J.), 1120. Hamonet (J.), 136. Hann (J.), 239, 628. Hansky (A.), 184, 233, 34 Hanson (H.-N.), 403. Harang (P.), 1116. Harden (A.), 711. Hart (G.), 831. Hartley (P.), 1013. Hartley (W.-N.), 626, 920. Hartmann (Henri), 540, 10053. Hartog (M.), 293. Harvey (A.-W.), 1062. Harvey (T.-F.), 193. Haschek (E), 7194. HAS RnB (R. von), 139, 1013. Haudié (E. ), 285, 832. Haug (Emile), 131, 399, 789, 1115. Hauger, 439. Haushalter (P.), 135, 236, 744 Hautefeuille, 1011. Hawthorne (J.), 491. Hayat, 790. Hayek (A. von), 139, Haynes (D.), Fe .Heape (W.), 661. Hébert (Al.), 132, 136, 233, 1857. Heckel (F.), i014. Hédon (E.), 235. Heïnricher (E.), 239. Heitz (J.), 90, 707. Helbronrer (P.), 1057. Hellebrand (E.), 794. Helmann (G.), 239. Helmert, 711. Helmholtz (H. von), 1024 a 4029, 1063. Hemmelmayr (F. von), 96, 588. Hemsalech (G.-A.), 439, 533. 583. Henning (F.), 540. Henri (V.), 90, 91, 133, 185, 292, 346, 341, 400, 534, 535, 640 à 642. Henry (A.), 400, 440. Henry (Ch.), 346. Henry (Louis), 533. Henry (Th.-A.), 1011, 1063. Herbette (J.), 621. Hergesell (H.), 183, 581, 1057. Héricourt (J.), 287. Hérissey (H.), 398, Hérisson, 183. Herlitzka “a .), 138. Hermana (K.), 711. Hermann F .), 141. Herscher (M), 235, 582, 107, 143. Hertwig (0.), 588. Hertzka (R.), 139. Hervieux (Ed.), 399 Herzig (J:), 1013. Hess (V.-F.), 1013. Hesse (Ed.), 38, 91, 134. Hewitt (J.-T.), 294, 1012. Hicks (W.-L.), 1012. Hickson (Sydney J.), 1016. Hills (J.-S.), 350. Hiorichs (G.-D.), 234, Hiorns ° A.-H.), 342: 5, 438. 917, 993 à 200, 1115, 1116. 288, 621. Hoche (L.), 397, es ue Rs (R. : 239, 1014. Hoitsema (C.), 748, 8e, Holborn (L.), 351, 540. Hollard (Auguste), 518, 872, 916. Holt (A.), 93. Holt (A. jun), 626. Homfray (Mlie J.-K.), 1013, 1062. Honigschmid (0.), 295. Hoogenhuyze (C.-J.-C. van), 964. Hopfgartner (K.), 351. Hopfner (F.), 664. Hopkins (F.-G.), 661. Hopkinson (B.), 489, 815. Hôürnes (Ph.), 1014. Horrocks (W.-H.), 816. Horton (Frank), 294. Houard (C.), 89. Houdas (J.), 742. Houillon (L.), 746. Houllevigne (L.), 233, 439, 658, 1052. Houllier, 184, 1115. Howard D. ), 443. Huchard (H.), 346, 622, 706. Hue (Louis), 834. Huggins (Sir William), 961. Huggins (Lady), 961. Hugounenq (L.), 132, 234, 398, 438, 1058, 1084 à 1091. Huiskamp (W. } Li Hulshoff Pol (D.-J.), Humbert, 1040. Hunter (A.-E.), 491. Husson (Ed.), Tu5, 10517: Hutton (R.-S.), 627. 1016. Ibbotson (Fred.), 916. Ignatowsky (A.), 91, 134. Imbert (A.), 441, 1053. Ingle (H.), 95. Irimescu (S.), 1010. Irvine (J.-C.), 711, 1012, 1062. Iscovesco (H.), 659, 744, 190. Itallie (L. van), 964, J Jackson (F.-H.), 238, 490. Jaeger (F.-M.), 664, 196, 1064. Jatié (A.), 588. Jager (G.), 139. Jalaguier, 1010. James (Th.-H.), 402. Jammes (L.), 133, 707. Janet (Paul), 547 à 557. Janssen (J.), a 918. Januschke (H.). 795. Japp (F.-R.), 587. Jeneros VAS)525: Jardim (C.), 290. Jardin, 183. Jaubert Gus S74. Jeandelize (P.), 401, 441, 660. Jeans (J.-H.), JèIs JE Jeanselme (D: Jecker (L.), 53 Jehl (Dom F.), 960. Joannis (A.), 485. Joffroy (A.), 289, 1010. John (C. vou), es Johnson (F.-M.-G.), Ne Johnston qe 587, 7 Jolly (J.), 400, “4 744, Jour (W. ve 701. Jolyet, 259. Jomier (J.), 90, 91, Jones (D.-T.), 1012. Jones (H.-0.), 137, 1119. Jonker (IH.-G.), 240, 712, 796, 1120. Jonnesco (Th.). 184 Josias (A.) 90, 234, Jossifov, 185. Josué (0. ), 961 Jouguet (E.), 345, 189. Jouhaud (L.), 1058, 1059, Jousset (A.), 659. 961, 1010. 134, 659, 707. 1016 399,919: 1116. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1147 Joye (P.), 439. Lafforgue, 347, 622, 107, 744. Lecarme (J.), 143. Joyeux, 660. Lafite-Dupont, 441. Le Chatelier (H.), 84. Jowett (H.-A.-D.), 490, 627, 662, 192, | Lagatu (Il.), 37, 289, 533, 581, 189. Lecher (E.), 194. 1063. Lagrange (KF.), 399, 658. Leclere du Sablon, 183, 581, 621. Juch (V.), 628. Lagriffoul, 790, 1116. Lecomte (Henri), 518, 1007, 11135. Judd (M!'e H.-M.), 490. Laguesse (E.), 347, 400, 743, 1010, | Lecomte-Denis (Maurice), 285. Julius (W.-4.), 664, 795. 1093 à 1109. Lecornu (L.), 288, 395, S24 à S30. Jumelle (H.), 132, 233, 439, 1054. Jung (H.), 238, 621. Jungfleisch (E.), 233, 234, Jungfleisch (L.), 618. Jupiner (Hans baron von), 481. 345, 705. K Kalischer (0.), 628. Kapteyn (W.), 44, 96, 963. Kareft (N.), 290, 346, 341, Katzer \e } 741. 440, 535 Key (R. Ed Fe HU Kermorgant, 90, 184, 346, 534. Khouri (J.), 961. Kidston (R.), 876. Kipping (F-S.), 294, 491. Klein, 351. Kleint (K.), 492. Klimont (I.), 404. Kling (André), 183, 237, 580, 623, 1111. Klobb (T.), 657, 144. Klug (L.), 239 Kluger (A.), 664. Kluyver (J.-C.), 962. Knafl-Lehnsdortf (E. von), 1013. Knoll (F.), 404. Knox (J.), 587. Kæœhler (A.), 14% à 151. Kæœnigsberger, 1063. Koha (M.), 741. Kohn-Abrest, 743. Kobhnstamm (Ph.), 712. Künigsberger, 238, 351. Konschegg (A.), ie Korschun Ft )F Korte (R.-F.) Korteweg (D.-J. Kostersitz (K.), 7 Kowalski (J. 726. Kraskovits (G.), 628. Krassilstschik (J.), 440, 485. Kraus (R.), 195. Krause (M.), 580. Krazer (Ad.), 831. Krebs (A.), 1057. Kreïdl (A.), 295. Kremann (R.), 96, 139. Kreusler (H.), 403. Krigar-Menzel (0.), 95. Krohn (A.), 38. Kronecker (H.) ; 234. Kubart (B.), Kuckuck (M.), ‘390. Kunckel d'Hesculaïs (J.), 38. 400. Kunstler (J.), 4114. Kunz (J.), 706. Kurrein (H.). 239 Kuss (G.), 742. 438, 485, 533, 288. L Laar QE J. van), 240, 663, 664, 148, 196. Labbé (D.), 1010. Labbé ( FH ), 185, 656. Labbé (Marcel)! BE 917. Lache (J.-G.), 623, 707 Lacombe (H.). 187. Lacroix (A.), 89, 439, 553, 918. Ladenburg (E.), 540. Lafar (Dr Franz), 180. 88, 535, 741, 873 , , 4010. 233, SOA à 315, Laignel-Lavastine, 440. Lainé (E.), 1114. Lake (Me H.), 876 Laloue (G.), 289. Lamb (M.-C.), 295. Lambert (M.), 1058. Lambert (P.), 789. Lambling (E.), 49 à 31, 35 à 83, 656. Lamothe (de), 38, 621. Lamotte (Marcel), 436, 571, Lamplugh (G.-W.), 661. Lamy (H.), 235, 289, 44 Lancereaux, 184, 743. Lanchester (F.), Landerer (J.-J.), Landolt, 38, 13 710. 918. 3. Landouzy, 1010. 398, 534, 189. Landrieu (Ph. b Landsiedl (A. Landsteiner . 194: ), 664, Lane (J.-H.), 188. Lane (N.-J.), 491, 741. 958. 0, 144 Lane-Claypon (Mile J.-E.), 1118. Lang (H.), 741. Lang (W.-R.), »8T. Lange (D. de), 43. Lange (F.), 486, 535. Lange (S.-J. de), 654 Laugeron (M.), 4 Langevin (P. 236, 25% à Langlet (E.), 707. Laugmuir (A.-C.), 158. Langstein (L.), Lankester (E.-Ray), 876. Lannelongue, 234. Lapicque (L.), SEE E ), 37, 89, 133, 135, 183, 226, 484, 536, 583. Langlois (J.-P.), 235, 107, 143, 188, 959. 552. 234, 235, 346, 341, 438, 240, 581, 382, 622, 623, 660, 705, 107. 660. ere (Mue L.), 346, 347, 440, Lapie (Paul), 35, 182. Lapostolet (N. js Lapparent (A. de), 3 617. 7, 184, 1058. Larguier des Bancels, 621, 623, 705, 107. Larminat (E. d Larmor (J.), 92 e), 32. 0. La Rosa (M. 193. Lattès (8. 89. Lauby, 135. Laudet ((G.), 74 Laufer, 622. 3. Laulanié, 38, 134. Lauvay (F.), 62 Launay (L. de) 1 1057. Launoy (L.), 13%, 535. Laur (F.), 1433, 398, 581. nb JE 185, 1116. Lauricella (G.), 296, 793. Laussedat (A ÿ ne Lavallée (A.). 790. Even (L.), Lavaux (J.), 89. Laveran (A.), 90, 91, 183, 235, 398, 439, 440, 485, 384, 622, 705, 919, 961, 1009 Lavergne (Gérard), 138, 831, 870, Law (H.-D.) 235. 106, 789. ), 1010, 1115. 229, 956. A9: Leach (F.-P.), 4 90. Lebailly (C.), 961. Lebeau (P.), 438, 485, 537, 580, 621, 1061, 4114. Le Bel, 487, 11 Lebesgue (H.), Leblanc (M.), 1 Lebeuf, 84. 17. 534, 1144. 116. Lebon (E.), 511. Le Cadet (G Lécaillon (A.), ), 41114. 38, 639, 107, 288, 399, SA2 285, 394, à 821, 400, 743, 190, 102, 710, 1058. Le Dantec (A.), 38, 135. Le Dantec (F.), 276 à 283. Le Dentu, 399. Ledoux (P.), 142 Ledru, 346. Leduc (A.), 289, 345, 399, 438 Leduc (St.), 484, 742. Leenhardt (Ch.), 706. Lees (Charles-I1.), 137, Lees (F.-H.), 402. Lefèvre (J.), 91, 706, 960, 1058. Legendre (A.-F.), 94% à 955. Legendre (R.), 347, 535. Léger (E.), 580, 581. Léger (L.), 90, 134, 234, 337, 834, 835. Léger (M.), 939 à 94%. Le Goff (J.), 346. Lehmann (0.), 95 Leithaüser (G: -E. Lelieuvre | Lemoine ((. ce) Lemoine (J.), 583. Lemoine (P.), 184, 289. Le Monnier (G.), 400. Lemoult (P.), 133, 581, 621. Lenoble (E.), 535. Lépire (R.), 438, 660, 706, 743. Le Play, 134, 183, 234, 580, 658, 705. Lerch (F. von), 404, 492. Lereboullet (P.), 400, 440, 659. Leredde, 440. Leriche (R.), 582. Le Roux (F.-P.), 89. Leroux (H.), 288, 658, 1115. Lesage (A.), 31. Lesage (L.), 534, 960. 582, 622, 623, Lesch (K.), 295. Lesne (P.), 623. l Lespieau (R.), 233, 345, 398, 401, 438, 658. Lester (J.-H.), 295. Letheule | L.), 934 à 938. Létienne (Auguste), S8, %7, 834, 904 à 9153. Letulle (M.), 400. Levaditi (C.), 35, 400, 440, 535, 623, 960, 961, 1010, 1058, 1059. Leven (G.), 1116. Le Verrier (U.), 812. Levi (E.), 1014. Levi (M.-G.), 793. Lévi (Léopold) , 440, Levi-Civita (T.), 296. Lévy (Albert), ne Lewkowit+ch (EL), 1120. Lezé (R.), 180. Libert | L.) , 874. Lichtenstern (B.) Lieber (H.), 350. Lindelof (Ernst). Linder (E.), 1119. Linder (S.-E.), 188. Lindet (L. 5 ve 136, 481, Linossier (G.), 235, 440, Linsbauer (L.), 351. Liouville (R.), 345, 439. Lippmann (G.), 40, 89, 581, Lipschitz | (A.), 139. Lisle (J. de), 1010. Lister (J. ie 586. Livon (Ch.), 553. Livon (Je ), 135. Llord y Gamboa (Dr Ramon), 618. Lloyd (L.-L.), 492. Lobo (N.), 290. Lockyer (J. Norman), 40, 44 Locquin (R.), 621, 6517, 105, Lodge (O.-J.), 238. Lodin (A.), 143. Loeb (Jacques), 660. 100%. 658, 956. 1116. 660. 584, 624. 10. 2 1 186. (M.), 623, 654. Loeper 705, 142; 835. Loewy, 133, 285, Loir (A.), 704. Loisel (G.), 10 345, 346, 326 à 392, 1009, 101 1114. Lombroso (U.), 90. Longden (A.-H.), 295. Lorentz (H.-A.), 139, Lorié (J.), 140. Lortat-Jacob (L.) Louise (E.), 65 Lovibond (J.- Lowe (W.-F.), 188. Lowenthal. 10: Fe Lowry (T.-M.), 41, 662. Lubimenko (W. \ 874. Lucas-Champiënnière, Lucet (A.), 1009. Lugeon (M.), 534, 580. Lugol (P.), 135. Lullin (Th.), 438. Lumière, 654, 705. Lumsden (J.-S.), 137. Lunt (J.), 584. Lutringer (A.), 132, 346. Lutz (L.), 34, 184, 289, 343. Lyons (I1.-G.), 488. 210, 663, Macallum (A.-B.), 625. Mac Arthur (J.-S.), 491. Macbride (E.-W.), 661. Me Candlisch (D.), 1012. Macdonald (J.-S.), 146. Macé (E.), 705. Machat (J.), 86, 740, 1056. Mache (H.), 40%, 443. Mac Intosh (R.), 238. Mac Intosh (D.), 294, 491. Mackensie (Al.), 662, 1013. Maclaurin (R. C.), 488. Me Leod (C.), 873. Mac-Mahon (P.-A.), 238. Maguery, 481. Maheu (J.), 1115. Maignon (F.), 438, 439, 484, 485. à 49, 65 à 75 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS , 290, 1,1059, 963, 1064. 184, 1058. Mailhe (A.), 132 à 4 184, 598, 657, 658, 10%, 708, 742, 74: Maillard (L.), 86, 1009. Maillet (Ed.), 183, 345, 481, 621, 835, 1004. Maire (Dr), 234. Maire (M.), 539, 744. Maire (René), 399, 441. Malaquin (A.), 550. Malassez (Jean), 1114. Malassez (L.), 1114. Malfitano (G.), 37, 485, 707, 744, 874, 960, 1009, 1114. Malherbe, 289. Mallet, 790. Malloizel, 440. Maltet, 346. Mameli (E.), 1015. Mancini (pEREA 206, 444, 794, 1015. Mandoul (H.), 38, 90, 133, 134, 707. Manéa (André), Fe Mangin (L.), 380. Manley (J.-J.). 874. Manouélian (Y.,, 400, 1059. Manouvrier, 38. Manouvriez (A.), 581. Manschot (G.-W.), 240 Mansuy ( H. ), 289. Manueli (E), 138. Maquenne (L.), 237, 401, 533, 594 à 598, 624, 154, 928 à 934, Marage, 90, 288, 1009, 1057. Maragliano (G.), 1015. 960. Marais de Beauchamp (P.), 1115. Marcano, 1010, 4116. Marceau (F.), 742 March (F.), 231, 289, 348. Marchand (L.), 486. | Maubant ( Marchis (L.), 870. Marchoux (E.), 290, 790. Marckwald, 711. Mardick (J.-R.), 94. Marie (A.), 400. Marie (C.), 485, 53%, 591, Marié (G.), 288, 485, 580. Marinesco (G.\, 400. Marino (K.), 185. Marion (Georges), 620. 1010, 1111. Marquis (L.), 136. Marquis (R.) got Marsais | (P): Marsh (4. -E.), "205, Marshall (F.-H.-A.), 791, 1118. Martel (E.-A.), 288, 622, 707. Martignat (M.), 1007. Martin (K.), 240. Martin (L.), 440. Martine (C. je 132, 533. Martinelli (G.), 135. Martinet | A ), 182, 568 à 575, 611 à 616, 10: 13, 44119: Martinsen, 581: Mas (F.-B. de), 869. Mascarelli (L.), 1015. Mascart (E.), 37, 48%, 835. Mascart (J.), 533. Mason (M.), 439. Massart (G.), 228. Masselin (Jules), 88. Massol (L.), 289. Masson EAU 141. Massoulier (P.), 133, Mathews (J.-M.), Mathias (E.), 129, 484. Mathieu (F.), 579. Mathot (R.-E.), 914. Matignon (C.), 132, 224, 3 8, 621, 658, 706. Maätruchot, 1010. Matthaci (Mi'e G.-L.-C.), Matthies (W.), 663. Mattirolo \o. RUE 1891899; 229, 484, 553, 190. Maupetit, 441. Maurant (E.), 3 Maurel (E.), ne ‘91, 13%, 185, 486, 535, 582, 623, 659, 745. Maurel ({ j 707. Mayer (André), 235, 289, 290, 144. Mayet, 580. Mazé (P.), 452 343, 621. Mazelle (Ed.), 352. Mazzucchelli (A.), 793. Mebus (A.), 443. 7 Mecquenem (de), 1115. Meerten (H. van), 748. Meerum Terwogt (P.-C.-E.), 140, Mees (Ch.-E.-K.), 137, 401, 625. Mehmke {R.), 663. Meige (Heu) 131 231. Meingast NE 96. Meker (G.), 92. Meldola (R. ), 94, 188, 443, 1012. Melikoff (P.), 234. Mendelssohn (M.), 233. Menster (F.\, 1013. Mercier (L.), 91, 582. Mercier (P.-Ad.), 180. Merriman (R.-W.), 1013. Mertens (F.), 351. Meslin (G.), 133, 234, 345, 533, 6317, a E. Mauduit (A.), E. 290, 400, 706. 340, à 1457, 205 à 24%, 105, Mesnil (F.), 398, 400, 440, 580, 1057. Metchnikoff (El.), 534. Metzner (R.), 739. Meunier (L.), 345, 623. Meurice (J.), 1045 à 14051. Meyer (A.), 444 à 123,158 à 174, 404, 450, 669. Meyer (E.), 43, 96. Meyer (H.), 295, 1013. Meyer (S.), 96, 404, 443, 794. 382, 10141, Meyerhoffer ( W.), 239, 833. Michel (A }, 235, 295. Michelis (G. de), 290. Michel-Lévy (A.), 359 à 369, 1009, 1114. Michel-Lévy (I), 37, 89. Micklethwait (Mie F.-M.), 137, 1012. Mignot (F.), 1143. Mignot (R. }, cu Milhaud (G.), 798. Miller (G. + h S9, 918. Miller (N.-H.-J.), 661. Milliau (E.). 657. Millochau (C.), 183, 918, Millosevich (E.), 138, 296. Milne (J.). 836. Minchin (E.-A.}, 1011. Mingazzini (P.), 194. Minguin (3:),-133,%231,.399; Mioni (G.), 38, 185, 347. Mioni (J.), 134. Mirovitch, 440, 622. Mitchell (H.-V.), 294, 1012. Môbius, 351. Moissan (H.), 90, 132, 133, 183, 229, 233, 485, 581, 621, 1114. Mol (D.), 964. Molisch (H.), 295. Moll (J.-W.), 796. Molle, 706. Molliard (M Monaco (prince de), MORGOUEe 341, 486. Monod (Ch.), 1010. Monpillard (F.), 658. Montangerand, 960. Montel (R. ), 623. Montelli (J.), 623. Montessus de Ballore (R. de), 580, 869. Montoya y Flores, 1010. Moodie (Mile A.-E.), 1062. Moog (R.), 1058. Moore (B.), 585. Moore (J.-E. -S.), 790. Moore (R.-W.), 587. Morat (J.-P.), ho. Morchoisne (E.), 185. Moreau, 919. Morel (Alb.), 132, 134, 234, 290, 346, 347, 393, 400, ne 440, 535, 744, 1058. Moreux (lh.), 234, 289. Morgan (G. in ), 137, 662, 741. Mornac (Ge): LS 1072. Morrell (R.-S ), 350. Morrow (à, 350, 624, 1119. Mortimer-Mégret (Comte), 956. Mosny, 440. Mosso (A.), 139, 181, 44#. Motet, 38, 1010. Motion (J.), 295. Moty, 440. Mouilpied (A.-Th. de), 2 Moulin (H.), 1060. Moulin (M.), 183. Moureaux (Th.), Moureu (Ch.), 136, 621, 109, 742, 743, 14. G.), 134, 234, 1057. .), 454, 189. 533, 534, 814. 89, 438, 835, 874, 1057. 622, 658, 10, Moussu ( 235, 439, 1014, 1058. Moutier (A.), 233, 288, 345, 743. Moutier (F.), 657. Mouton (H.), 743, 189, 1060. Moynier Je Villepoix, 659. Muir (Robert), 94. Muller-Breslau, 540. Muiler (E.), 43. Muller (P.-Th.), 37, S6, 238, 352, 417 à 423, 538, 511, 7622, 628, 702, 1063. Mulon (P.\, 37, 1010. Munaron (L.), 139, 194. Mundici (C.-M.), 138. Munk (J.), 492, 1063. Muntz (A.), 184, 1114. Muratet (EE " 1011. ATBOUEIR EE LES, 143, 835. Murray (G ie Muspratt (] Na a TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS 1149 N Pantanelli (E.). 794. Pinoy, 486, 623. Papelier (G.), 228. Pintza (Al.), 638. Naagen (L.), cs Papillault, 706, 144. Piroutet (M.), 132. Nabias (B. de), 7 Papinian (J.), 290. Pitman (J.-E.), 1012. Nagel (0.), 627. Paraskevopoulos (P.), 659. Pittard (E.), 960. Nageotte (J. ), 535, 961. Parhon (R.), 290. Pizon (A.), 111%. Nalepa (A (2 Ni 404, 794. Pariset, 234, 235. Pizzetti (P.), 444. Nance (J.- -L), 491: Parker (T.-J.), 531. Place (T.), 196 Nasini (R.), 444, 393. Parona (C.-F.), 296. Plane pes G.), 138, 296, 793. Nattan-Larrier (L.), 134, 440, 1058. Parravano (N.), 444. Plauck (M.), 588. Neesen, 443. Pascal (E.), 138, 444. Plangger (A.), 588. Nègre, 622. Passa (H.), 658. | Platania (Gaetano), 1115. Négris (Ph.), 1114. Pastureau, 621. Platania (Gio:anni), 1115. Neil (J.-M.), 295. Patein {G.), 90. Plaut (H.). 535. Netter (A.), 1010, 1011, 1058, 1059, 1115. | Patterson (Th.-S.), 94, 137, 350. Plimmer (H.-G.), 293. Neumann (J.), 96 Pattinson (H.-S.), 188, 350. Pocheltino (A.), 793, 1014. Neveu-Lemaire, 659. Pattinson (J.), 188. Poincaré (H.), 37, 132, 438, 581, 960. Newton (J.-A.), 710. Paulesco (N.-C.), 1058. Puirier, 133, 1038. Nicklès (R.), 183, 498, 658. Paulhan (Fr.), 873. Polack:(A.), 37,581. Nicloux (Maurice), 38, 1029 à 403%. Peake (A. H.), 624. Policar: i (A.). 1010. 11416. Nicolardot (P.), 92, 153, 236, 398, 109. : Pearce (F.), 183, 621. i Poucet (A.), 582, 743. Nicolas (E.), 400, 439, 440, 555. ! Pécheux (H.), 37, 581. Pousot (A.), 484, 485, 621. Nicolas (J.), 134, 623, 744. Péchoutre (F.), 436. | Popper (R.), 12 Nicolle (C.), 134, 485,:234, 235, 486, 659, | Peck (J.), 187. Porcher (Ch.). 440, 485, 534, 535, 658, 144, 790. Pécoul (A.), 90, 186. 835. Niederschülte (9), 492. Peglion (V.), 194. Porchet(F.), 533. Nierenstein (M.), 710. Peglioni (V.), 296. Portier (P.), 400. Niessl (G. von), 404. Péju (G.), 440. Posternak (S.), 2. 183, 235. Nimführ (R.), 404, 628. Pekelharing (C.-A.), 140. Posthumus Meyes(R.), 96. Nitlis (J. de), 706. Pélabon (H. ), 534. Potier (A.), 533. Niveu (C.), 294. Péletier (Mie M.), 535. Potocki (J.), 397. Nobécourt, 623, 707. Pellat (H.), 133, ES Prain (D.), 661. Noble (Sir Andrew), 191, 1118. Pennock (J.-D.), 627. Precht (J.), 492. Noel (E.), 1115. Pépin (V.-E.), 694 à 700. Prenant (A.), 86, 131, 146,236, 287, 397, Nordmann (Ch.), S9, 403 à 414, | Perdrix (L.), 401. 144. 233, 290, 1145. Pérez (Ch.), 38, 135, 235, 441, 623. Prévost (J.-L.), 134, 185. Norman (G.-M.), 192 North (B.), 492. Northall-Laurie (D.), 490. Nouri (0.), 582, 623, 961. [0] Obrecht (A.), 1004. Ocagne (Maurice d'), 433, Occhialini (A.), 793. Oceanu (P.), 132. Oddo [(B.), 296, 441, Odier (R.), 543. Ofner (R se 741. Oldham (R.-D.) Olie Jr. (J. ), a. Oliver (P.-W.), 529. 660. 661. Olivier (Louis), 100, 629, 654, G56, Olmer (D.), 133. Olsuki (C.), 492. Onves (H. Kamerlingh), Orlando (L.), 138, 296. Ortal (134). Orton (K.-J.-P.), 137, 403, 626. ” Osmond (EF. 105, 189. Ostenfeld (A.), 617. Ostwald (W.), 351, 618. Otsuki (C.), 627. Ott (H.), 96. Oudemans (J.-A.-C.), 148, 796. 96, 663. Ouvrard (L.). 189. Owen (D.), 791. P Pacaut (M.), 289, 659. (P.), 531, 781. Padé (H.), 742, 1009, 1057. Padoa (M.), 793. Padova, 1114. Pagès (ü. ), 873. Pagaiez | Ph.), 1009, 1010. Painlevé | (P.), 37, 345, 918. Paisseau (G:) , 486, 707. Palazzo (C. }, 1015. Panichi (L.), 1015. Panisset (L.), 91, 134. Pannekock (A.), 96. Paasiot (A.), 789. Pacottet 33, 54 à 65, 90, 669. 481, lP'ergola (D. Di), 444. Périssé (L.). 393. Perkin (A.-G.), 402, Perkin (F.-M.), 792. Perkin (W.-H.), 188. Perkin (W.-H. jun.) 710. Perman (E.-P.), 188, 625. Pernter (J--M.), 533, 628, Pérot (A.), 37. 4M, 1061. Perotti (R.), 296. Perrier (A.), 438. Perrier (Edmond), 23 Perrier (G.), 132, 189. Perrier (R.), 439. Perrigot (M.), 89. Perrin (Jean), 134, 185, 618. Perrin (M.), 660. Perrin (W. ca .), 876. Perrot - LL) 5810 Peruzzi (L:). 194. Pescheux, 439. Peter (Carl), 1063. Petit (Joseph), 40, 136, 233, Petit (P.), 106. Petiljean, 290. Petot (A.), 233. Petri (L.), 139, 444, 194. Petrie (de M), Lo Peitit (A), 38. 87, 90, 235. Peyrony, 657. Philip (J.-Ch.), 792. Philipps (P.), 187, 961. Philoche (Mlie Ch.), Phisalix (C.), 288, Pic (A.), 185. Picard (Em.), 132, 399, 657. Picciati (G.) Piccinini ( Pickles (S.-S Pictet (A.), 918, Picton (H.), 1119. Pidoux | (Justin), 665. Piery, 38, 90,13 Piettre, Pigeaud, 345, 439. Pigeon (L. JE GAS, 619, Pignet (P. , 538 Piltschikoff, Pinard (A.). Piacherle (S.), pre 1014. 66 587, 710, 192. 350, 402, 403, 4. 236, 290, 289; 292: 382, 190. 290, 637, 639. 189. 539, 486, 184,89, nt 438, 533, 657, 1009. Prey (A.), 664. Price (W.-IL.), 5817. Prideaux (E.-B.-R.), Priestman (H.), 403. Pring(J.-N.), 1062. Probst (M:), 404. Proca (G.), 659. Proctor (Ch.), 294. Prost (E.), 132, 232. Prud'homme (M.), 581 Przibram (K.), 96. Pscheidl (W.), 351 Puccianti (L.), 58. Puglisi (M.), ATA Puiseux, 815, 1119. 296. 133, 288. Purdie (Th.), 1012. Purvis (J.-E.), 1119. Puschl (P.-K.), 79%. Q Quennessen (L.), 40%; Quillard (Ch.), 231 Quintaret (G.), BA Rabaté (E.). 703, 188, 917. Radakovic (M.), 664. Radakovits (J.), 628. Raffy (L.), 657. Raïlliet (A.)., 400, 410. Raken (H. W. R.), 140. Rambaud, 37, 89, 132, 438. Ramfaldi (F.), 793. Ramon y Cajal (S.), 346, Ramond(F.), 189, 1010. Ramond (L.), 535, 1011. Ramsay (Sir W..), 443, 585, SOA à s03. Randau {Paul), 785. Ratz (F.), 1013. Ravaz (L.), 658, 789. Raveau (C.), 189. Ravenna (C.), 138, Ray (P.-C. ACTA Rayet (G.), 789, 133, 621, 874 Rayleigh Lord ,; 40, 349, 919. Raymond, 289. Razous (P.), 1006. 534, 1011. 193. 1150 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Récamier (D.), 235, 623. Recoura (A.), 621, 657, 705. Redpath (G.-C.), 350. Regelsperger (Gustave), 717, 971. Regen (J.), 295. Regener (E.), 793. Regnault (D' Félix), Rehns (J.), 347, 400, 657. Reid (W. F.), 188. Reiger (R.), 443. Reinganum (M), 40%, 712. Reiser (0.), 1014. Remlinger (P.), 623, 659, 660, 744. Remoundos (G. ), 132, 48#, 960. Reoan (H.), GET, Renard, 486. Renaut (J.), 185, 290, 744. Rengade (E.), 133, 484, 581, 106. Rénon (L.), 1011. Renouf (N. l, 7192. Répin (Ch.), 485, 742. Repossi (E. À de Retterer (Ed.), 434, 485, 235, 346, 400, 485, 659, 144. 790, 1010. Révil (J.), 462 à 476, 872, 1094 à 1094. Rey (J.), 1057. Reynier (P.), 132, Rhéti (L.), 1063. Rene Dumas (L.), 1011, 1059. Richard (G.), 32, Richard (J.), Ai Richards (F. Us T4. Richardson | re) que Richardson | ÿ). 403, 588. Riche (A.), He Richelot (L.-G.) hs ve Richet (Ch.),1 62 Richon (L.), Lot, nt Richthofen (de). 918. Riesz (F.), 132, 960. Rieux, 1059. Righi (A.), 793, 1014. Rimatori (C.), 79%. Rimini (E.), 44%. Ringelmann (M.), 960, 1009. Rinne (E-),°33: Rinne (F.), 833. 247 à 227. 38, 91, à 535, 582, 184, 582, 706. 90, 707, 1010, e Rist ie h 332. Rist (E.), 707. Roaf | nt ’E.), 585. Roberts (D. J.), 402. Robertson (Ph. W.), 1003, 1119. Robertson (W.), 662. Robin !{A.), 706, 961. S 622. Rocques (X.), 180, 234, 436, 531, 186, 834. Rodano (C. A.) Rodet (A.), 2 82, 190, 1116. Rodriguez (L.), 660. Rœderer (G.). 485, 537, 744. Roger (H. 961, 1010, 1011. Roger (d.) 35, 1010. Rogers (É) 119% ÉtmaGn ni \, 1149 Rogovsky (E. he 288, 184, 960, Romburgh (P. van), 796, 964. Romen “Albert de), 504 à ts Romme (R.), 4796 à 479, 959, 1113. Roos (L.), 789. Roozeboom (H. W. Bakhuis), 240, 748, 7196, 1064. Rosendaal (A. M. van), Rosenhain (W.), 489. Rosenheim (O.), 587, 816. Rosenstiehl, 581. Rosenthal (G.), 400, Rossard (F.), 439, Rossi (G.), 139. Rostaine, 235, 290. Rotch (L.), 918. Rothé, 39. Rothmund (V.), 1014. © Rothschild (NH. de), 437, 1008. Rouget (J.), 622. 1120. Roullet (Lucien), 232. Rouslacroix, 441. Rousseau (E.), 345. Rousseau Saint-Philippe, 1115. Roussel (Albéric), 131. Routier, 658. Roux (E.), 233, 293, 624, 1058. Roux (J.-Ch.), 707. Rouyer (L.), 358. Rozet (CL.), 483. Rowland (J. S.), Rubens (H.), 95, Rudolph (K.), 40 Ruhemann (S.), Russ (F.), 404. Russell (A.), 1118. Russell (W.), 37. Rymberk (G. Van), 4% 399, 485, 533,534, 131. 540. 4. 94, 491, 1013. 4, LOG, S Sabareanu (G.), 4 Sabat (B.), 289. DRE) (RS 42, 742 9; Der Sn (J. )E Sachau, 540. Sacquépée, 1059. Saiut-Martin (L.-G.), 134. Saint-Paul (B.), 530. Saint-Philippe (H.), 961. Sakorraphos, 535. Salet, 288, 874. Salmon (E.-S.), 626. Salmon {P.), 235, 400, 582, 657, 658. Salomon (M.), 38, 134. Saloo (M.), 1015. Samec (M.), 239. Sand (Henry J.-S.), 136. Sandberg (C.-G.-S.), 439. Sande Bakhuyzen (H.-G. Van), 239, 796. Sani (G.), 138. Sargenton-Galichon (Mme A.), 656. Sauton, 485, 535, 537, 1117. Sauvage (Edouard), 529, 1010. Savorin, 132. Savoroin (J.), 705, 1037. Schattenfroh (A.), 1795. Scheuer (0.), 534. Schidlof (A.), 184. Schidrowitz (Ph.), 295, 627. Schinz (H.-H.), 352. ,, 234, 398, 658, 708, 850, 1006. 441, 1011. Schlæsing (Th. fils), 4057, Schmitt CEE 534, 658. Schofield ( 2 Schoute (&) : Schoute (P.-H.), 44, 96, 140, 240, 352, 664, 719, 748, 196, 963, 964, 1016, 1064, 1420. Schræder (H.), 626. Schulten (A. de), 183. Schultz (Oscar), 1063. Schulze (F.-F.), 238. Schumacher (S. von), 1014. Schur (Issai), 588. Schurr (J.), 85, 351. Schweidler (E. von), 96, Schwitter (M.), 141. Scott (Al.), 443 404, 794. Scott (D.-H.), 5. Scott Ge, ), 626. Searle (G.-F. € ), 661. Seguy (G.) , 89. Serd] (K.), 239. Seillière (Es ), 290, 582: Sell (W:-J.), 626. Selleger (E.-L.), 140. Semichon (L.), 657, 1786. Sencert (L.), 134, 236, 660. Senderens (J.-B.), 234. Senier (A.), 1062. Senter (George), 625. Sérégé (H.), 38, 346, 341. Sergent (Edm.), 134, 440, 190, 1059. Sergent (Et.), 134, 440, 790, 1059. Sérieux (Paul), 344, 579. Seurat (G), 289. Severi (F.), 483, 399: Sevestre, 934, 582, 658, Sevin, 440, 707. Seyewetz (A.), 142. Shaw (P.-E.), 835. Shaw (W. =N.), 488. Sheppard (S.- E.) AT: un Sberrington (C. j. 626, 7 Short (EF. -C.), 626. Sicard RIRE) 235. Sidgwick (N.-V.), 491. Siebenrock (K.), 628. Siegfried (André), 182. Siden (Per), 32. Silber (P.), 444, 1045. Simon (de Nancy), 91, 236. Simon (L.), 293. Simon DE Es =ix 345, 348. Simon (M.), 7 Simon ME un, 660, 74%, 1059. Simond (P.-L.), 190. Simone |A.) ) 346, 438. Simpson (G.-C.), 584. Simpson (W.-J.), 1054. Simonsen (J.-L.), 710. Sindall (R.-W.), 792. Sirk (H.), 1013. Sissingh (R.), 964. Skraup (Zd.-H.), 96, 588, 1013, 1014. Slatineano (A.), 707, 1010. Slator (A.), 491. Sluyter (Ch.), 712. Smedley (Me J.), 1012. Smiles (S.), 403. Smith (Mlle A.-E.), 403. Smith (H.-L.), 6 6. Smithells (A.), 4 Suits (A.), 796. Sodeau (W.-H.), 42 Sohier (A.), 228. Sohngen (N.-L.\, 1015. Solacolu (Th.), 1114. Solvay (E.), 533, 651. Sommerfeld (A.), 44 Soulé (Ed.), HUE Soulié (A.), 235, 400, 919, 1059. Soulié (E.), 341. Sowter (R.-J.), 294, 490. Sparre (de), 89, 183, 142. Spielmann (P.-E.), 147 Spiess (C.), 400, 743, 874, 1041. Spillmann (L.), 91, 401, 660, 744. Stanford (N.-V.), 710. Stauoïévitch (G.-M.), 960. Stassano (H.), 582. Steel (T.), 627. Steele (B.-D.), 238. Stefani (C. de), 139, 794. Stefanik (M.), 918. Stefanowska (Mile M.), 89, 918, 1114. Stelzuer (H.), 492. Stéphan (E.), 918. Stephan (P.), 135, 914. Stephanos (C.), 533, Stephens (F.-G.-C.), 1012. Stern (Mie L.), 90, 91,185, 484, 486, 533, 105, 1059, 1063, 1114, 1116, Stevens (H.-P.), 793. Stewart (A.-W.), 137, 350, 402. Stini (J.), 535, 144. Stock (J.-P. Van der), 964. Stodel (G.), 440. Stok (J.-P. Van der), 352. Stokes (J.-A.), 662. Stolz, 480. | Strada (K.), 707, 744. Streintz (F.), Ses Strohschneider (0.), 492. Struthers (R. de J.-F. ju Strutt (R.-J.), 58%, 661, Stücker (N.), 492. Stuchetz (J.), 795. Stumpf, 351. y Stuyvaert, 1057. À Suarez de Mendoza, 440, 534. | \ 1058. , 625, 1013. 2 43. 398, 742, E Sudburough (J.-J.), 402. TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS A5 Suess (E.), UE Sugg (Es) Suida (W r\ “go, 628. Sulzer-Ziegler (Ed.), Sumpner (W.-E.), 1012. Suner (A.-P.), 190. Süss (| UE, 1013. Suyver (J.-F.), 140. Swinburne (J.), 188, 1062. Swyngedauvw (R.), 316 à 325. Sy, 31, 89, 132, 438. 24% à 256. T Taboury, 709. Tacconi (E.), 194. Taffoureau (E.), 1114. Tagliaferri (E.), 195. Take (E.), 492. Tammann (Gustave), 433. Tandler (R.), 141. Tanvery (Paul), 410 à 44%. Tannery (Jules), 576. Tanon, 622. Tanret (G.), 40, 106, 742. Tassilly, 93. Tatlock (R. R.), 295. Tattersall (Gh 403. Taylor (F.), 94, rs Tedone (0. ), 296, Teglio (E.), 296. Teisserenc de Bort (L.), 233, 703, 918. Teissier (B.), 400, 582. Teixeira (F. Gomes), 393. Tenchini (J.), 1015. Teodoresco (E.-C.), 2 Termier (P.), 1115. Terrien (Eug.), 1011. Terroine (T.-K.), 536, 705, 790. Tètedoux (Paul), 18. Thaon (P.;, 134. Theiler (A, 920. Thiele (F.-H.), 746. Thiroux, 90, 582, 707. Thomas (A.), 90! Thomas (W.), 402. Thompson (G.-W.), 587. Thompson (H.-B.), 662. Thompson (S.-P.), 188. Thomson (R.-T.), 295. Thooris, 341. Thorpe (3. -F.), 4419. Thorpe (Th.-Ed.), 294. Thoulet (EF), 396. Thoulet Ge 655, 656, 960. Thovert (J.), 1009. Tisehent (Ph. Van), 1045. Tiffeneau, 580, 621, 62%, 918, 960. Tilden (W.-A.), 203, 662. Tinkler (Ch.-K.), 350. Tison, 535. Tissot (J.), 183, 184, 233, 289, 346, 1059. Titherley (A.-W.), 1012. Tixier (L.), 7107, 1011. Tizzoni ((G.), 1015. Toch (M.), 587. Toldt (C.), 101#. Toldt (K.), 443. Tornani (E.), 296. Tornier (G:), 1063. Torres (L.), 438. Tortelli (M.), 436. Touchet (Em.), 438. Toujan (G.), 235, 400, 1059. Touplain, 439. Traina (E.), 296. Trannoy (R.), 132, 706. Traube (E.), 42. Traube (J.), 663. Travers (M. -W.), 294, MCE 1013. Traynard (E.), 132, 399. Trépieu (Ch), 814, Tribondeau 1e }, Fi 135, 235, 441, 623. Tribot (J.), . 92, 581. Triboulet La ). Trillat (A. mu 235,292, 346, 347, 485, 535, ST, 206, 1117. Tripier (R.), 35, 36, 131. Trotman (S.-R.), 94, 403, 1119. Frousseau (A), 857 à 568. Tschermak (G.), 194. Tumlirz (0.), 351. Turchet, 184, 5 Turchini (S.), 28 536. Turnau (R.), 404. Turner (W.-E.-S.), 491. Turpain (A.), 835. Tutin (F.), 350. Tutton (A.-E.-H.\, 662, Tymstra Bz. (S.). 140. Tzitzéica (G.), 132, 233. 1012. U Uhlig (V.), 795. Ullmaun (G.), 874. Ulpiaui (C.), 296. Ultée (A.-J.), 796. Umetaro-Suziki, 238. Urbain (G.), 187, 288, 401, 485, 623, 874, 1115, 1117. Uriarte (L.), 134. Usher (F. L.), 1013. V Vaillant (L.), 657. Vaillant (P.), 621, 960. Vaillard, 582. Valeur (Armand), 709, 742, 743. Vallée (E.), 621. Vallée (H. h 37, 400, 581, 189. Vallier (E.), 1110. Vallois (L.), 534. Vamossy (de), 1061. Vaney (C.), 48 Te Van t'Hoft (J.-H.), 239, 398, 540. Vaquez (H.), QE Varenne (E) ), 288. Varet (R.), 622. Varigny (Henry de), 105%. Varin (abbé), 292. Variot, 90, 254, 743. Vasileseu (V.), 659. Vassal (J.-J.), 289, 623. Vaulx (H. de la,, 874. Vautier (Th.), 533. Veley (V.-H. Venditori (D. ), 296. Venturi (A.), 1014. Vermeulen (H.), 352. Verneuil (A.), 136, 581. Véronèse (G.), 444. Verploegh (H.), 964. Verschaffelt (J.-E.), 140, 66%. Versluys (W.-A.), 748, 795, Vessiot (E.), 534 Viala (P.), 580. Vidal (E.), 705, 919. Vieille ‘Paul), 3 à 40. Vigier (P.), 37. Vignon (G.), 657. Vignon (L.), 90, 346, 438, 580. Vigouroux (E.), 1009, 1057, 11145. Viguier (C.), 705. Vila (A.), 184, 289, 1009. Villar (F.), 622. Villard (P.), 37, 39, 187, 236, 345. Villaret (M.), 707. Ville (J.), 345, 484, 581. Vincent (C.), 1059. Vincent (H.), 38, 347, 486, 535, 582, 1055. Violle (J.), 184, 533 Visser (A.-W.), 712. Vitali (G.), PT Vles (Fr.), 31. Vœrman, 549. Vogel, 540. Voinov (D.), 290, 440. 01, 438, 533, 657, 199, 621, 1622; 658, Volterra (V.), 296, 44%, 193, 1014. Vosméær (G.-C.-J.), 712. Voyer (J.), 234 4 337, 850 à 856. MARNE (P.), 485, 582. Vries (E. de), 712. Vries (J. de) 352, 663, Vries (H. de), 9 Vuillemin (P. ), TA, 747. 3. 89, 181, 581, 873. W Waals (J.-D. van der), 663, 195, 196, 963. Wade (J.), 1119. Wadmore (J.-M.), 587. Waele (H. de), 90. Wælsch (E.), 741. Wagner (A. |. 664, 794. Wahl (A.) 102 233,558 à 568. Wahl (M.), 187. Walker (A.=P.), 792. Walker (C.-E.), 790. Walker (G.-W.), 349, 585. Walker (James), 93, 792. Walker (J.-W.), 1063. Waller (Mme A. "M.), 402, Wallerant (K.), 133, 233, 438, 485, 1009, 1057. Walter (H.), 492 Warburg (E.), 627,.1711. Warcollier (G.), 6517, 789. Ward (G.-J h 295. Wassmuth (A.), ae Watson (I. Ce Watson (W. ), sé ou, Watteville (C0 de). 582, 1110. Watts : W. Marshall), 1052. Webb RE 93. Weber (A.), , 660, 74 Webster (C.- St.), on Weeder (J.), re 195. Wegsscheider (R.), 492, 79%, 1013. Weil (P. Emile), 622, 659, 106, 707, 960. Weinberg (B.), 188. Weinek (L.), 492. Weisgerber (K.), 497, 578, 632, 634 à 639,1038 à 1045. Weisl (S.), 628. Weiss (G.), 38, 181, 287, 437, 1053. Weiss (Pierre), 533, 581, 621, 106, 742 1116. Welsbach (K. Auer von), 492. Went (k.-C.-N.), 748. Weuzel (F.), Werner (F.), 139, 295. Wertheimer (E.), 582, 620. Wertheimer (F.), 1014. Wesson (D.), 741. Weyher (C.-L.); 41. White (J.), 491. Whittaker (E.- DAC Widal, 235, 290. Wiechowski (S.), 588. Wielowieczki (H. von), 139. Wiesner (J.), 404, 195. Wildeman (E. de), 23%. Wilderman, 136. Wilkens (Al.), 628. Wilkie (J.-M.), 193. William (W.-S.), 793. Willows (R.-S.), 187. Wilson (H.-A.), 710, 1119. Wilson (W.-E.), 586, 875, Wind (C.-N. Winkler (C.) Wintrebert 28 Wintrebert (P.), 90, 62: , 660, 743, 1011, 1116. Wittmann (J.), 239. Witz (A.), 530, 1052. Wolff (1.), 31, Wood (J.), 587. Wood (R.-W.), 192. Worden (E.-C.), 295. Worley (F.-P.), 792. Wurtz (R.), 660. Wyk (H.-J. Van), 664. Wynne (W.-P.), 350, 443. 90, 438, 534, 581. 1152 TABLE ALPHABÉTIQUE DES AUTEURS Wyrouboff (G.), 1061. Zeïller (R.), 398, 658, 248 à 72%. Wysman (H.-P.), 712. Z Zellner (J.), 443 Zemplen (G.), 1009. Zaalberg (A.-L.), 712. Zervos (P.), 438, 874. Y Zabludowski, 49. Zeuthen (H.-G.). 281. Yersin, 582. Zabradnik (L.), 492. Zimmermann (S.), 741. Young (G.), 539. Zalackas (C.), 345. Zipser (A.), 794. Young (Sydney), 342. Zambonini, 138. Zograf (N. de), 1114. Young (W.-J.), 711. Zammit (T.), 876. Zôlss (B.), 239. Yourewitch, 341. Zangger (H. }» 00. Zoretti, 1057. Yung (E.), 398. Zeeman P 140, 748. Zwaardemaker (H.), 240, 748, 1120. Yvert (A.), 304, 1113. Zehnder (L 4 43. Zwerger (R.), 1014. PARIS. — L. MARETHEUX, IMPRIMEUR, 4}; RUE CASSETTE j” x | | . “M ne: : We #4 = ne ne TS Lens Nr RS SR ï